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VETE

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants

Fascicule 3 - Témoignages du 13 février 2008


OTTAWA, le mercredi 13 février 2008

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 12 h 7, pour étudier les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada.

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : La séance est ouverte. Bienvenue au Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Aujourd'hui, nous accueillerons des représentants de la Légion royale canadienne qui, comme vous le savez, est une organisation fraternelle à but non lucratif soutenue par les cotisations de ses membres, qui appartiennent à environ 1 600 filiales au Canada, aux États-Unis, en Allemagne et aux Pays-Bas. Depuis sa fondation, en 1926, la Légion a concentré ses efforts sur l'obtention de pensions adéquates et autres bénéfices bien mérités par les anciens combattants et les personnes à leur charge.

La Légion royale canadienne a comparu pour la dernière fois devant notre comité le 6 juin 2006. Depuis, le gouvernement a établi le poste d'ombudsman des anciens combattants et publié la Déclaration des droits des anciens combattants. Nous sommes ici pour bien comprendre les points de vue de la Légion sur la mise en œuvre de la nouvelle Charte des anciens combattants.

J'aimerais maintenant vous présenter Jack Frost, président national de la Légion, ainsi que le colonel à la retraite Pierre Allard, directeur du Bureau d'entraide, qui l'accompagne.

Je voudrais vous exprimer mes regrets quant au fait que nous avons dû annuler votre dernière comparution en raison des intempéries, et en particulier à vous, M. Frost, qui avez dû prendre le volant pendant deux heures pour être avec nous. D'après ce que j'ai compris, vous avez des remarques à faire, après quoi, j'espère que vous accepterez de répondre aux questions du sous-comité.

Jack Frost, président national, Légion royale canadienne : Cet exposé comportera deux volets : M. Allard en présentera une partie, et je me chargerai de l'autre.

C'est un plaisir de comparaître de nouveau devant votre sous-comité pour vous fournir une mise à jour au sujet de la nouvelle Charte des anciens combattants, ou NCAC, du point de vue de la Légion.

Certains de nos commentaires porteront sur des programmes et des politiques pertinents à la NCAC et à la Loi sur les pensions. Nous commencerons par traiter de ces questions, puis nous terminerons avec nos recommandations concernant les améliorations à apporter à la nouvelle Charte des anciens combattants.

Tout d'abord, nous aimerions réitérer notre appui à la NCAC, qui a été adoptée à un moment très opportun. Nous attribuons cela au fait que tous les partis politiques se sont unis de façon non partisane pour donner leur appui aux anciens combattants, ce qui a également donné lieu à l'introduction d'une Déclaration des droit des anciens combattants et à la nomination du premier ombudsman des anciens combattants, le colonel à la retraite Patrick Stogran.

Bien que nous aurions préféré que l'ombudsman soit chargé d'un mandat inscrit dans la loi qui lui garantisse des pouvoirs d'enquête étendus, nous sommes conscients que cet objectif pourrait être réalisé plus tard par le regroupement des ombudsmans fédéraux sous un même toit. Cela permettrait de mettre en œuvre une législation qui conférerait davantage de pouvoirs d'enquête et ferait en sorte que le bureau centralisé des ombudsmans rende des comptes directement au Parlement. On pourrait ainsi réaliser des économies, puisque les frais généraux seraient réduits. Ce modèle est en vigueur en Australie.

Pierre Allard, directeur du Bureau d'entraide, Légion royale canadienne : D'autres initiatives ont été mises en œuvre par Anciens Combattants Canada, ou ACC, lesquelles amélioreront certainement les prestations disponibles pour les anciens combattants. Par exemple, ACC a instauré une nouvelle politique en matière de perte auditive qui reconnaît le droit partiel à des indemnités pour une invalidité liée à une perte auditive lorsque l'audiogramme d'un ancien combattant, à sa libération du service militaire, indiquait une perte d'ouïe sans toutefois établir une perte auditive menant à une invalidité. Auparavant, les anciens combattants devaient avoir une perte auditive invalidante à leur libération pour avoir droit à des prestations.

Un requérant peut maintenant être pleinement admissible s'il a établi une perte auditive menant à une invalidité équivalant à un total de perte de 100 décibels ou plus à des fréquences de 500, 1 000, 2 000 et 3 000 hertz dans l'une ou l'autre oreille, ou de 50 décibels ou plus dans les deux oreilles à 4 000 hertz sur son audiogramme de libération, et s'il n'a pas cet audiogramme, lors du premier audiogramme après sa libération. L'ancien combattant peut également associer cette perte auditive invalidante au bruit et au service militaire.

Anciens Combattants Canada et le Tribunal des anciens combattants — révision et appel peuvent maintenant reconnaître le droit partiel à des indemnités d'invalidité, chose que nous réclamons depuis 1995. Avant cela, seul le plein droit était reconnu. Aujourd'hui, on peut aussi accorder un droit partiel en vertu de la Loi sur les pensions et de la nouvelle Charte des anciens combattants si l'audiogramme de libération d'un requérant indique une perte plus élevée que 25 décibels dans l'une ou l'autre oreille dans l'intervalle de variation de 500 à 8 000 hertz; ou si le requérant a un audiogramme actuel qui répond à la présente norme de perte auditive menant à une invalidité, c'est-à-dire un total de 100 décibels de perte auditive ou plus aux fréquences de 500, 1 000, 2 000 et 3 000 hertz dans l'une ou l'autre oreille ou supérieure à la fréquence de 4 000 hertz dans les deux oreilles.

La perte de décibels dont fait état l'audiogramme actuel à la même fréquence doit être confirmée comme pareille ou plus importante à celle indiquée sur l'audiogramme de libération. La perte auditive invalidante doit être associée au bruit et au service militaire.

Nous tenions à lire ici ces définitions techniques relatives au droit partiel à des indemnités d'invalidité pour nous assurer de faire connaître ces nouveaux critères. Il s'agit d'une tribune idéale.

La précédente explication simplifie un processus complexe, tandis que les cas et circonstances peuvent varier. Nous invitons donc les requérants à communiquer avec un agent d'entraide de la Légion afin d'obtenir de l'aide en ce qui a trait à une réclamation auprès d'ACC ou à un appel au Tribunal des anciens combattants — révision et appel.

Comme vous le savez, la Légion maintient un réseau d'agents d'entraide formés partout au pays, qui fournissent des services de représentation gratuits à tous les niveaux d'arbitrage et d'appel. Nous avons une ligne nationale sans frais : 1-877-534-4666.

En tenant compte des améliorations qui seraient bénéfiques pour tous les anciens combattants, nous sommes préoccupés de voir que les choses avancent lentement en ce qui concerne l'examen des soins de santé offerts aux anciens combattants. Tandis que nous avons des anciens combattants traditionnels de santé fragile et leurs conjoints qui ne peuvent être admissibles au Programme pour l'autonomie des anciens combattants, ou PAAC, qui leur permet de rester chez eux — ce qui constituerait une mesure économique pour Anciens Combattants Canada — nous avons également des anciens combattants modernes qui glissent entre les mailles du filet, et qui ne sont peut-être pas admissibles à des soins à long terme ou à des indemnités bonifiées d'aide aux funérailles et à l'inhumation semblables à celles fournies aux membres des forces armées.

Nous avons également des anciens combattants sans-abri. ACC a besoin d'un programme pour leur venir en aide. La Légion est prête à examiner avec eux des moyens de mettre en œuvre un tel programme par l'entremise de son Centre d'excellence de logement.

Dans le contexte particulier des programmes de la NCAC, nous vous avons fourni, telles qu'elles nous ont été transmises par Anciens Combattants Canada, des statistiques sur les programmes d'activités. Vous les trouverez dans votre document.

Au-delà de ces statistiques, nous aimerions formuler des remarques sur des programmes particuliers. Nous avons également inclus dans votre documentation un tableau qui semble complexe. Néanmoins, il s'agit là du meilleur pictogramme que j'aie vu; il recense, en une page, tous les nouveaux programmes de la NCAC, en plus de décrire les relations entre eux.

En termes simples, mis à part les indemnités d'invalidité, qui compensent pour la douleur, le point d'entrée pour tous les programmes de la NCAC est véritablement le programme de réadaptation, qui comporte un certain nombre d'éléments.

Malheureusement, il existe un autre programme de réadaptation parrainé par l'entremise du Régime d'assurance-revenu militaire, ou RARM. Le RARM sert à des fins professionnelles. Autrement dit, il sert à aider les gens à se trouver un nouvel emploi. Le programme de réadaptation offert par Anciens Combattants Canada, lui, a une portée plus globale. Nous aimerions qu'il y ait une simplification des programmes de réadaptation pour qu'ils soient regroupés en une seule entité.

Les membres des Forces armées canadiennes sont libérés sur une base volontaire ou pour des raisons médicales. Les deux processus peuvent mener à des prestations du RARM ou d'ACC. Sur ce tableau, les différents fournisseurs de prestations sont indiqués par une couleur différente. Le bleu foncé correspond aux Forces armées canadiennes; le gris, aux Anciens combattants; et le violet, au RARM. Ce tableau a en fait a été dessiné et préparé par l'agent de liaison des Forces armées canadiennes de Charlottetown, qui a tâché de simplifier la représentation de ce qu'impliquent réellement les programmes, et de préciser leur interrelation. Croyez-le ou non, cela simplifie le processus en ce qui a trait à un fournisseur de services.

Ces avantages sont souvent interreliés. Il va sans dire que lorsqu'il s'agit des programmes de la NCAC, nous parlons en réalité d'environ cinq programmes : la réadaptation, les avantages de santé, le placement, les indemnités d'invalidité et les avantages financiers. Ceux-ci comportent quatre éléments : l'allocation pour perte de revenus, le programme de soutien du revenu, les prestations de retraite supplémentaires et l'allocation pour déficience permanente.

M. Frost : Il y a un point à l'accès primaire à la plupart des programmes de la NCAC, soit le programme de réadaptation. Pour simplifier le plan assez complexe ci-joint, je précise que plus souvent qu'autrement, le point d'accès de la réadaptation mène aux avantages financiers. Malheureusement, le RARM des FC et Anciens Combattants Canada sont tous les deux responsables de la prestation des services de réadaptation, ce qui crée des difficultés de coordination pour les deux fournisseurs de services. Ainsi, la première amélioration consisterait à éliminer le programme de réadaptation pour invalidité prolongée du RARM pour l'intégrer à un seul programme relevant d'ACC ou de la NCAC.

À propos du RARM, nous sommes également très préoccupés par le fait que les prestations d'invalidité d'ACC continuent d'être réduites par ce qu'on appelle la « disposition de recouvrement du RARM », à hauteur du montant versé par l'assurance-invalidité prolongée, ou AIP, du RARM. Cela a été corrigé pour les bénéficiaires visés par la nouvelle Charte des anciens combattants, mais les bénéficiaires de prestations d'invalidité continuent d'être traités injustement. Comme vous pouvez le voir sur le plan, les anciens combattants qui ont des besoins de réadaptation liés aux services peuvent être jugés admissibles à un programme de réadaptation à n'importe quel moment suivant leur libération.

Alors qu'il suivrait un programme de réadaptation, un ancien combattant serait également admissible à une allocation pour perte de revenus lui assurant 75 p. 100 du salaire brut qu'il gagnait avant sa libération. Cependant, ce salaire brut reçu avant libération, selon le moment de celle-ci, pourrait être insuffisant pour combler les besoins financiers actuels de l'ancien combattant. Une simple solution serait d'adapter l'allocation pour perte de revenus de façon à tenir compte des ajustements de salaire ainsi que de l'avancement qui devraient normalement s'accumuler au cours de la carrière de quelqu'un, en fonction des prévisions actuarielles. Il s'agit là de la méthodologie commune utilisée dans les tribunaux civils. Nous croyons également que, pour établir le rang de base aux fins de l'allocation pour perte de revenus, le rang de soldat devrait être élevé à celui de caporal.

Un autre problème est lié aux indemnités d'invalidité, ou II. Il est clair que celles-ci visent à dédommager les anciens combattants de la douleur et de la souffrance. Les taux des II sont modifiés chaque année pour correspondre à l'indice des prix à la consommation, ou IPC, entre autres ajustements. Quoi qu'il en soit, un ancien combattant qui reçoit une indemnité d'invalidité n'obtient aucun autre ajustement. Les anciens combattants devraient avoir droit à cette augmentation annuelle, car la douleur et la souffrance ne disparaissent pas.

Par exemple, un ancien combattant qui aurait reçu en 2006 une indemnité d'invalidité de 100 p. 100 d'un montant de 250 000 $ aurait été admissible à un supplément de 5 729,25 $ en 2007, et de 5 105,59 $ en 2008. Les prestations de retraite supplémentaires, ou PRS, qui sont versées sous forme de montants forfaitaires à l'âge de 65 ans en fonction de 2 p. 100 de toutes les allocations potentielles pour perte de revenus qui pourraient revenir à un requérant, vise à compenser pour l'occasion perdue de cotiser à un régime de retraite.

Toutefois, ces PRS sont versées en tant que montant forfaitaire imposable. Nous préconisons une méthode qui transformerait ce montant forfaitaire en revenu de pension. Nous sommes également inquiets du fait qu'on ne transmet pas suffisamment d'information aux anciens combattants pour les aviser que, s'ils ont un emploi et ne sont pas admissibles à des allocations de perte de revenus, ils devraient quand même présenter une demande afin d'obtenir le plus de prestations possible en vertu des PRS.

Finalement, même si les familles, les conjoints et les enfants peuvent être admissibles à des services de soutien en matière de santé mentale, l'un des points d'accès pour ces services tient pour acquis que l'ancien combattant a demandé des soins en santé mentale de son propre gré. Comme ce n'est pas toujours le cas, la seule possibilité qui s'offre à ces conjoints et enfants est le service d'aide téléphonique d'ACC, qui peut donner accès à certains services, quoique de façon assez limitée.

Nous croyons également qu'on pourrait, et devrait, faire plus pour intégrer pleinement les cliniques pour traumatismes liés au stress opérationnel d'ACC et les centres de soins pour trauma et stress opérationnels des FC. Par exemple, les deux cliniques n'utilisent même pas un outil standard d'évaluation initiale.

Abstraction faite des commentaires précédents, qui se veulent constructifs, nous estimons que la nouvelle Charte des anciens combattants offre un bon mélange de programmes qui tentent de répondre aux besoins des anciens combattants. Nos recommandations d'améliorations visent à rehausser la qualité de ces programmes. Nous sommes également conscients que d'autres programmes sont disponibles pour des membres des FC qui, s'ils s'y inscrivent, peuvent grandement changer les choses pour les personnes à charge qui leur survivent — comme le régime d'assurance-vie temporaire du RARM, qui constitue des prestations facultatives.

Nous sommes également conscients que bien souvent, les membres des FC en service ne prêtent pas suffisamment attention à la désignation de leurs premiers bénéficiaires ou survivants, ce qui cause souvent des problèmes pour ce qui est d'attribuer des prestations aux intéressés. Au bout du compte, on devrait adopter une approche plus proactive afin de s'assurer que tous les membres des FC et les anciens combattants soient pleinement informés des prestations et des programmes qui peuvent améliorer leur qualité de vie, ou celle des gens qui leur survivent.

Voilà qui met fin à notre exposé. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci. J'ai omis de vous présenter les sénateurs qui sont ici aujourd'hui. Je vais le faire maintenant, et les sénateurs pourront profiter de cette occasion pour signaler à la greffière s'ils souhaitent poser des questions.

Permettez-moi de commencer par le vice-président du comité, le sénateur Day, qui vient du Nouveau-Brunswick, où il a eu une carrière très fructueuse d'avocat en pratique privée. Il est en poste au Sénat du Canada depuis octobre 2001, et assume actuellement la présidence du Comité sénatorial permanent des finances nationales, en plus d'être vice-président du présent comité, comme je l'ai précisé.

Le sénateur Banks a été nommé au Sénat en avril 2000. Bien des Canadiens le connaissent en tant qu'artiste et musicien polyvalent et accompli. Le sénateur Banks est également président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, en plus d'être membre de notre sous-comité.

Le sénateur Downe vient de Charlottetown. Il a été nommé au Sénat en juin 2003. Bien qu'il ne soit pas, de façon générale, un membre officiel de notre comité, sa présence est la bienvenue, car il porte un grand intérêt à nos travaux. Aujourd'hui, il siège en tant que remplaçant officiel du sénateur Kenny. Il est membre du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, du comité de la régie interne et enfin, du comité exécutif de l'Association parlementaire Canada-OTAN.

[Français]

Le lieutenant-général et sénateur Roméo Dallaire a connu une carrière distinguée dans les Forces armées canadiennes. Le sénateur Dallaire vient du Québec et a été nommé au Sénat en 2005.

Il est membre du Comité sénatorial permanent des droits de la personne et du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.

[Traduction]

Voilà la liste des sénateurs présents aujourd'hui; le premier intervenant sera le sénateur Downe.

Le sénateur Downe : Je profite de mon nouveau statut de membre du comité pour me lancer le premier. Pendant votre exposé, il y a eu deux changements importants par rapport au texte préparé, que nous avons devant nous. J'aimerais déterminer s'ils étaient voulus ou non.

Vers la fin de la page 3 du document que nous avons en main, on dit qu'Anciens Combattants Canada et le Tribunal des anciens combattants — révision et appel « reconnaissent » maintenant le droit partiel. Or, dans votre allocution, vous avez dit « peuvent reconnaître. »

Ma seconde question porte sur le dernier paragraphe de votre exposé, à la page 11 du document. On peut y lire ceci : « Nous sommes d'avis que la nouvelle Charte des anciens combattants offre un bon mélange de programmes qui répondent aux besoins des anciens combattants. » Or, lors de votre exposé, vous avez dit : « tentent de répondre. » Si c'est cette dernière affirmation qui est juste, quels sont les besoins, à votre avis, qui ne sont pas comblés en ce moment?

M. Allard : Je vais répondre à la première question. À la page 3, c'est probablement une question de sémantique, car nous tentions de décrire les critères assez techniques pour satisfaire aux nouvelles lignes directrices relatives au droit partiel, qui ont été établies par Anciens Combattants Canada. J'ai tenté d'obtenir la confirmation d'ACC pour ce que j'appellerais mon synopsis de la nouvelle politique, ce qui a pris un certain temps. Quand nous l'avons finalement obtenue, il s'est avéré qu'on favorisait l'aspect circonstanciel de cette politique, ce qui est correct. C'est pourquoi j'ai utilisé le terme « peuvent. »

Le sénateur Downe : La différence entre les expressions « reconnaissent » et « peuvent reconnaître », c'est qu'avec la première, le ministère est tenu d'agir, alors qu'avec la deuxième, il a davantage de marge de manœuvre.

M. Allard : En disant « reconnaissent », j'entends que toutes les conditions précédentes ont été respectées. Cette idée de condition a bien été rendue par l'expression « peuvent reconnaître. » On peut utiliser la formulation qu'on veut, de façon interchangeable. J'adopte le point de vue d'un fournisseur de services qui représente un client. Si j'ai écrit « reconnaissent », c'est que je veux bien tenir pour acquis qu'on le fera, si ces critères sont respectés.

M. Frost : Et pour finir, en ce qui a trait à la seconde partie de votre question, j'ai dit intentionnellement « tentent de. » À titre d'exemple, la Loi sur les pensions est entrée en vigueur en 1933, mais nous l'avons améliorée au fil des ans pour en faire ce qu'elle est aujourd'hui. La même chose vaut pour la nouvelle Charte des anciens combattants. Même si elle répond aux besoins de base, il y a encore beaucoup à faire pour l'améliorer afin d'augmenter encore plus les avantages pour les membres des forces armées en service aujourd'hui.

Le sénateur Downe : J'aimerais en savoir plus sur les avantages et l'aide que vous fournissez aux anciens combattants. Ces services sont-ils offerts aux réservistes?

M. Frost : Oui; il est question d'une représentation dans le cadre de demandes de pension.

M. Allard : Pour les réservistes, la GRC et les personnes à charge.

Le sénateur Downe : Un certain nombre d'anciens combattants ont communiqué avec moi à propos du programme d'indemnisation partielle des victimes de l'agent Orange. La Légion a-t-elle pris position en ce qui concerne ce programme d'indemnisation offert par le gouvernement?

M. Frost : Cette indemnité est fondée sur des indemnités similaires, sur des paiements forfaitaires qui ont été versés dans le passé, comme l'indemnisation des anciens combattants de Hong Kong qui appartenaient à la marine et à la marine marchande. Il serait difficile d'accorder, pour l'agent Orange, une indemnité plus élevée que ce qui a été accordé par le passé.

Le sénateur Downe : Une préoccupation, dont vous n'entendez peut-être pas parler directement, m'est exprimée par d'anciens combattants qui ont été amenés à croire que le programme d'indemnisation couvrirait une période prolongée pour les gens qui étaient à la base des forces canadiennes de Gagetown. Au bout du compte, le gouvernement a restreint cette période à deux ans et a payé un montant forfaitaire de 20 000 $ à des gens qui habitaient aux alentours de la base, de même qu'à ceux qui ont pu être touchés sur la base même.

Les plaintes me viennent d'anciens combattants qui affirment que leurs problèmes de santé actuels sont dus au fait qu'ils se trouvaient à la base lorsque les produits chimiques ont été vaporisés, mais qui tombent en dehors de ces deux années. Ils veulent que l'indemnisation soit incluse dans l'ensemble des avantages. De toute évidence, vous n'avez pas encore étudié cela en détail.

M. Frost : Nous avons des résolutions en ce sens.

M. Allard : La réponse comporte probablement deux volets. J'approuve certainement le fait que le règlement financier corresponde au montant qui a été remis à d'autres groupes. Cela dit, l'une des choses qui nous préoccupent, c'est qu'abstraction faite de l'admissibilité d'une personne à un règlement financier parce qu'elle a été sur les lieux pendant cette période, il y a également des prestations d'invalidité d'Anciens Combattants Canada à l'intention de ces gens pouvant être atteints d'une invalidité à long terme.

Ce qui nous préoccupe encore davantage, c'est que dans un contexte de règlement financier, tout ce qu'on a à prouver, c'est qu'on a été là. Mais pour des prestations d'invalidité, le critère est plus strict. On doit être en mesure de prouver qu'on a été directement exposé, qu'on a manipulé ces produits chimiques ou été en contact avec eux, et alors, le ministère évaluera si l'on est admissible à des prestations d'invalidité.

Nous estimons que le même critère que celui établi pour les indemnisations financières devrait être invoqué dans le cas des prestations d'invalidité. Nous entendons des plaintes à ce sujet.

Le sénateur Downe : Merci.

Le sénateur Banks : Je vous suis reconnaissant de nous avoir remis un tableau simplifié. J'ai trois brèves questions, et une plus longue. À la page 12 de votre mémoire, on traite du régime d'assurance-vie temporaire du RARM, qui est une prestation facultative. Sa disponibilité est-elle garantie pour les anciens combattants, indépendamment de leur situation et de leur état de santé? Un ancien combattant peut-il obtenir cette assurance-vie temporaire en tant que droit?

M. Frost : Un membre des Forces armées canadiennes a la possibilité de souscrire au RARM n'importe quand. Ce n'est pas automatique.

Le sénateur Banks : On y souscrit avant d'être réformé, bien sûr.

M, Allard : On doit y adhérer pendant son service. Si un souscripteur a un accident qui est lié à son service militaire, il obtiendra ces prestations. On fournit beaucoup d'information aux membres des FC à propos de la souscription au régime d'assurance-vie temporaire du RARM. On peut obtenir jusqu'à 400 000 $, sans exclusion relative au service militaire, et avec les prestations associées. Néanmoins, les membres doivent souscrire au régime.

Le président : Avez-vous bien dit que cela ne devait pas nécessairement être lié au service militaire? Si je traverse la rue, à la base, et qu'une voiture me passe sur le corps, par exemple, je serai couvert.

M. Allard : Il s'agit d'une assurance temporaire. De même, si vous êtes sur votre toit, à réparer l'antenne, et que vous tombez et perdez vos deux jambes des suites de vos blessures, cela ne sera pas lié au service militaire. Au lieu de cela, il y a un programme d'indemnisation pour mutilation associé à l'assurance temporaire, qui n'a rien à voir avec le service militaire. Il y a des avantages supplémentaires à la souscription.

Le sénateur Banks : C'est plutôt normal, étant donné qu'il n'y a pas d'exclusions.

M. Allard : Il n'y a pas d'exclusions, mais bien des jeunes membres des forces canadiennes peuvent penser qu'ils n'ont pas besoin de souscrire.

Le sénateur Banks : Quand nous sommes jeunes, nous nous croyons tous indestructibles.

La page huit traite d'une réduction du règlement auquel les anciens combattants pourraient avoir droit. Pourquoi le montant est-il réduit? Vous l'avez peut-être expliqué, mais cela m'a échappé. On dit : « ...aurait été admissible à un supplément de 5 729,25 $ en 2007, et de 5 105,59 $ en 2008. »

M. Frost : Ces chiffres sont basés sur l'indice des prix à la consommation.

Le sénateur Day : Pour ce qui est de l'inflation, c'est autre chose.

Le sénateur Banks : Cela va dans le sens inverse.

M. Allard : Oui et non. Nous utilisons l'indemnité d'invalidité maximale, qui est de 250 000 $. Je dirais que cette indemnité n'est pas la norme, car il est plus probable que des montants moins élevés soient versés. Vous obtiendriez cette indemnisation en 2006, peu importe pour quel motif; mais si vous présentiez votre demande en 2007, l'indemnisation serait supérieure de 5 700 $ à celle que vous auriez reçue en 2006. Nous disons que le supplément calculé sur une base annuelle devrait être accordé aux requérants qui ont été admissibles année après année. Cela ne disparaît pas.

Le sénateur Banks : Merci de nous l'avoir expliqué. À la page cinq de votre exposé, on parle des anciens combattants modernes qui passent à travers les mailles du filet et qui peuvent ne pas être admissibles à des soins de longue durée. Quelle en est la raison?

M. Allard : Actuellement, les anciens combattants des forces armées modernes n'ont pas droit à des soins de longue durée, sauf dans des circonstances uniques liées à une invalidité. Cela diffère de toutes les autres catégories d'anciens combattants canadiens. Par exemple, les anciens combattants traditionnels de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée peuvent obtenir des soins de longue durée à titre de droit, mais les anciens combattants modernes ne disposent pas d'un tel droit.

Ils pourraient obtenir ce droit grâce à l'actuel examen des soins de santé offerts aux anciens combattants, qui vise à abolir tous les critères d'admissibilité complexes en vigueur et à les simplifier, de telle façon que les anciens combattants appartenant à n'importe quelle catégorie qui ont besoin de soins de longue durée et ont servi leur pays reçoivent ces soins. Nous espérons que cela ressortira de l'examen des soins de santé offerts aux anciens combattants, mais celui-ci semble traîner en longueur et ne pas avancer aussi vite que nous le souhaiterions.

Le sénateur Banks : Quand cela a-t-il changé?

M. Allard : Cela n'a pas encore changé.

Le sénateur Banks : Vous avez dit que les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée avaient le droit de recevoir des soins de longue durée. Mais ce n'est plus le cas. Quand cela a-t-il changé?

M. Allard : Malheureusement, n'importe lequel de ces avantages était disponible grâce à la loi actuelle et à l'évolution de la législation, des règlements et des politiques relevant des Anciens Combattants. Comme ACC traitait avec ces différentes catégories d'anciens combattants, il a modifié ses politiques et règlements. Mais il n'a pas fait de même pour les anciens combattants modernes.

Le sénateur Dallaire : En vertu de la nouvelle Charte des anciens combattants.

Le sénateur Banks : La plupart des Canadiens seraient déçus de l'apprendre.

M. Allard : Oui.

Le sénateur Banks : Je croyais le contraire. Nous nous occupons d'affaires concernant des anciens combattants des forces aériennes qui, après la Seconde Guerre mondiale, ont été détachés de l'ARC, l'Aviation royale du Canada, pour être envoyés dans des écoles privées en tant qu'instructeurs de pilotes et navigateurs dans le cadre du Plan d'entraînement aérien du Commonwealth britannique. À la fin de ce programme, ils ont rejoint l'ARC et ont été réformés, mais ils n'ont pas accumulé de temps de service durant leur détachement, et ont donc été déclarés inadmissibles à des prestations. Je suis certain que vous connaissez bien ce genre d'histoires. Beaucoup de ces gens prennent de l'âge, et pour certains d'entre eux, il manquait tout simplement quelques jours à la période de service requise pour être admissible.

La légion a-t-elle pris position et intercédé auprès du MDN, le ministère de la Défense nationale, en vue de changer la définition de « service » pour que ces quelques personnes qui restent puissent avoir droit à des prestations?

M. Allard : Cette responsabilité revient au MDN et à ACC.

Le sénateur Banks : Les représentants d'Anciens Combattants Canada nous ont dit qu'ils étaient obligés de traiter avec les anciens combattants tels que définis par le MDN.

M. Allard : On en revient à ces catégories d'anciens combattants. Par exemple, nous avons les anciens combattants qui ont servi au Canada seulement, et qui devaient compter 365 jours de service. Je crois que vous faites allusion aux personnes à qui il manquait peut-être 10 jours pour satisfaire à cette exigence.

Le sénateur Banks : C'est exact.

M. Allard : Les anciens combattants ayant servi au Canada n'ont pas, eux non plus, accès à des soins de longue durée en vertu du critère actuellement en vigueur. La solution serait qu'ACC aille de l'avant rapidement avec son examen des soins de santé offerts aux anciens combattants, et demande les réformes nécessaires pour que l'accès repose sur les besoins, et pas sur des critères artificiels.

Nous sommes fortement en faveur d'une modification des critères afin qu'ils soient fondés sur les besoins. Quoi qu'il en soit, nous sommes inquiets de voir qu'Anciens Combattants Canada n'agit pas assez rapidement.

Le sénateur Banks : Êtes-vous d'avis qu'ACC peut régler le problème?

M. Allard : Oui. S'il passe à un programme fondé sur les besoins, il pourra résoudre le problème des anciens combattants modernes des forces canadiennes en leur accordant un accès à des soins de longue durée selon leurs besoins.

Le président : L'examen des soins de santé offerts aux anciens combattants est un examen ministériel interne.

M. Allard : C'est juste.

Le président : Quand l'a-t-on entrepris? A-t-on déjà précisé quand on prévoyait le terminer?

M. Allard : Cet examen a commencé en 2004, je crois, d'après les rapports que nous a transmis le ministère. En 2006, le Conseil consultatif de gérontologie, parrainé par le ministère, a publié un document de travail intitulé Parole d'honneur. Dans ce document, on disait que nous devions changer ce système reposant sur des critères complexes, qui n'ont aucun sens et qui sont indéfendables, et nous tourner vers une approche fondée sur les besoins. Il y a un outil dont on faisait la promotion dans Parole d'honneur, et qui vient du Québec. Il est déjà en place dans cette province, et on l'appelle « mesure d'autonomie fonctionnelle. » Il s'agit d'une mesure d'autonomie fonctionnelle qui peut être appliquée aux individus pour déterminer leurs besoins et ensuite les diriger vers les divers avantages. Parole d'honneur a eu droit à une certaine visibilité en novembre 2006, et nous attendons une action de la part du ministère pour mettre cela en en place.

Ce mécanisme répond non seulement aux besoins des anciens combattants modernes, mais aussi à ceux des anciens combattants traditionnels. Par exemple, il y a encore certains cas où un ancien combattant de santé fragile âgé de 85 ans peut bénéficier d'un accès au Programme pour l'autonomie des anciens combattants de manière à pouvoir rester chez lui. En vertu du critère d'admissibilité actuel, il doit être atteint d'une invalidité. Il doit aller au ministère pour prouver qu'il a une déficience, et ensuite, il pourrait bénéficier du PAAC. Cela semble être une simple mesure d'économie que de déclarer : « Accordez-lui le PAAC et laissez-le rester à la maison. Peut-être n'aura-t-il pas besoin des indemnités d'invalidité ou d'une pension, selon ses critères. » La même chose vaut pour les conjoints d'avant 1981. On leur a fait la promesse qu'ils auraient accès aux avantages du PAAC. Voilà une mesure qui leur accorderait ces avantages, grâce à cet examen des soins de santé offerts aux anciens combattants et à un nouveau système qui serait mis en place en fonction des besoins. Nous l'appuyons.

Le président : Nous accueillerons le ministre le 27 février. Peut-être les membres du sous-comité pourraient-ils lui poser quelques questions.

Le sénateur Dallaire : J'ai quelques questions à vous poser au sujet de la Légion et de certains détails concernant vos clients.

Dans les années 1990, la Légion accompagnait environ 15 p. 100 des demandes de pension d'invalidité pour leur faire franchir les étapes du processus à Anciens Combattants. Êtes-vous encore à ce niveau? Aujourd'hui, en faites-vous plus ou moins qu'à l'époque?

M. Allard : Nous nous situons probablement à 10 p. 100 au maximum. Nous demeurons dans ces eaux-là.

Le sénateur Dallaire : En 1993, on m'a dit que le taux était de 15 p. 100. Il y en aurait encore environ 10 p. 100 qui sont traitées par votre entremise?

M. Allard : Oui, entre 8 p. 100 et 10 p. 100.

Le sénateur Dallaire : C'est ce que j'ai fait lorsque mon tour est venu.

Faites-vous partie du nouveau conseil consultatif sur les anciens combattants?

M. Allard : Oui.

Le sénateur Dallaire : Est-ce que des réunions ont eu lieu jusqu'à maintenant?

M. Frost : Oui.

M. Allard : Nous nous sommes réunis en deux occasions.

Le sénateur Dallaire : Est-ce que ce conseil consultatif relève du sous-ministre ou du sous-ministre adjoint?

M. Frost : Il relève du sous-ministre.

Le sénateur Dallaire : S'est-il donné comme mandat d'examiner la mise en place des modalités et des règles d'application de la nouvelle Charte des anciens combattants et d'évaluer la satisfaction de la clientèle à cet égard? Êtes-vous allés jusque-là?

M. Allard : Je ne crois pas que nous soyons allés jusqu'à nous intéresser aux questions touchant la satisfaction. Je peux vous dire que nous nous sommes réunis pour discuter de différents dossiers problématiques. Certains des enjeux dont nous avons fait état dans notre exposé sont largement assimilables aux questions examinées par votre comité. Nous n'avons pas encore discuté des aspects concernant les familles. Si vous vous souvenez bien de l'élaboration et de la mise en œuvre de la nouvelle charte, elle comportait certaines dispositions visant à garantir des avantages sociaux aux familles.

Le sénateur Dallaire : C'était effectivement prévu.

M. Allard : Oui, mais je ne sais pas vraiment si ces dispositions ont été mises en œuvre. Nous pouvons constater, comme je l'ai déjà mentionné ici, que des améliorations s'imposent à certains égards. Le conseil consultatif s'intéresse à ces aspects particuliers.

Le sénateur Dallaire : Permettez-moi une remarque à l'intention de notre président. Au moment opportun, il serait bon de convoquer ici la présidente de ce comité consultatif pour qu'elle nous donne un aperçu du point de vue de ses membres à ce sujet.

C'est le groupe consultatif dirigé par le Dr Peter Neary, qui a enclenché une grande partie des réformes réalisées au départ. Il serait intéressant de voir où se situe ce nouveau comité.

Qui en assure la présidence?

M. Frost : Je ne souviens plus de son nom.

M. Allard : Elle se prénomme Muriel.

Le sénateur Dallaire : J'aimerais parler de la nouvelle génération d'anciens combattants et des sections de la Légion dans les différentes régions du pays. Nous nous préoccupons grandement de la situation des secteurs urbains et des réservistes qui sont éloignés des bases et des services. Comme les activités de mess ont diminué considérablement même dans les manèges de tout le pays, sans parler des bases militaires, quelles mesures ciblées avez-vous prises pour attirer ces anciens combattants de nouvelle génération dans le giron de la Légion où ils pourront trouver la camaraderie et le soutien sur lesquels leurs prédécesseurs comptaient tellement?

M. Frost : Vous mettez le doigt sur une question qui nous préoccupe grandement, à savoir le recrutement de nouveaux membres. Nous aimerions bien voir les anciens militaires venir grossir les rangs de nos différentes sections. L'évolution des styles de vie fait en sorte que les militaires actifs d'aujourd'hui, qu'ils soient dans la force régulière ou dans la réserve, ne se bousculent pas à notre porte pour se joindre à la Légion. Leurs priorités sont différentes de celles des militaires des années 1950 et 1960. La vie familiale est plus accaparante. Il faut maintenant composer avec des familles dont les deux membres occupent un emploi rémunéré. C'est un peu la course folle de 8 heures du matin jusqu'à 20 heures le soir. On réussit à peine à prendre une pause de temps à autre pour passer du temps avec son conjoint. C'est un problème pour nous.

Nous nous rendons effectivement dans les bases et les manèges militaires pour expliquer qui nous sommes et ce que nous pouvons faire. Nous invitons les militaires à venir nous visiter, mais on ne pourrait pas dire que nos démarches produisent des résultats époustouflants.

M. Allard : Parmi les éléments que nous devons faire mieux connaître, il y a le travail de défense des droits que nous accomplissons au nom des membres des Forces armées canadiennes. Il se peut fort bien que les militaires ignorent que nous intervenons à ce niveau. Par exemple, nous revendiquons le partage du revenu de pension pour les aînés. Un grand nombre de conjoints et de conjointes de militaires ne travaillent pas nécessairement et peuvent être dans l'impossibilité de trouver un emploi en raison de la carrière militaire de leur conjoint. Je peux vous assurer que, pour les couples ne comptant qu'un seul salarié, le partage du revenu de pension des aînés est extrêmement avantageux du point de vue fiscal.

Le sénateur Dallaire : Tout à fait.

M. Allard : Nous faisons partie du conseil préconisant un tel partage du revenu. Nous revendiquons aussi une bonification des prestations de retraite pour conjoint. À l'heure actuelle, si votre conjoint est membre des Forces armées canadiennes, votre pension de retraite correspondra à 50 p. 100 de son salaire. Nous ne croyons pas que cela soit suffisant. La norme dans l'industrie est sans doute de 70 p. 100; nous demandons 66 p. 100. Nous intervenons pour faire valoir que les anciens combattants méritent une aide financière adéquate.

Nous avons également approché les Forces armées canadiennes en prévision d'un envoi postal accompagnant la documentation relative aux pensions. Nous pourrions offrir une adhésion d'une année aux membres des Forces canadiennes lorsqu'ils prennent leur retraite. Nous multiplions les efforts pour faire mieux connaître notre organisation. Nous ne voulons pas aller trop loin en ce sens, mais nous ne lésinons pas sur les moyens.

Le sénateur Dallaire : Permettez-moi de vous donner un exemple. La présence de bureaux d'Anciens Combattants Canada sur les bases militaires s'inscrit dans une réforme majeure. Dans certains cas, des bureaux ont même été établis dans les quartiers généraux eux-mêmes.

On peut aussi penser à l'exemple des funérailles. La famille peut alors compter sur le représentant local de la Légion qui a un excellent système en place à cette fin. Nous avons des anciens combattants de nouvelle génération qui reviennent d'outre-mer. Dix-huit membres de mon régiment sont revenus pour intégrer la marine. Les Forces armées canadiennes ont décidé de conserver ces soldats à leur service pendant une période de trois ans lorsqu'ils sont blessés. Pour autant qu'ils soient en mesure d'occuper un emploi utile, ils demeurent au sein de l'effectif pendant trois ans, si cela n'est pas dommageable pour leur santé.

Nous avons constaté que les anciens combattants qui se rendent à l'hôpital pour obtenir des soins sont souvent traités sur le même pied que n'importe quel autre citoyen. Ils doivent attendre comme tous les autres patients, même s'ils ont été blessés en Afghanistan. Nous nous sommes récemment rendu compte que nous les abandonnions à leur sort au milieu de la masse des citoyens. Il y aurait beaucoup à dire sur le rôle des sections locales de la Légion qui, lorsqu'un soldat blessé revient dans le secteur, transmettent l'information aux hôpitaux, comme le régiment devrait le faire, pour que l'on sache que cette personne n'a pas simplement été victime d'un accident de motocyclette, mais qu'elle a combattu en Afghanistan. Il devrait y avoir davantage d'interventions proactives directes auprès des blessés et des régiments sur les théâtres d'opération quant aux mesures à prendre pour le retour des soldats et aux interactions avec leurs familles. Il s'agit là d'un lien extrêmement important à établir. Cela concerne l'interprétation de la Charte. Vous offrez également un lieu de contact pour les familles. Les différentes sections de la Légion organisent toutes sortes d'activités familiales. Il suffit de penser aux équipes de légionnaires et à toutes les activités sportives.

Comme les anciens combattants plus âgés ne sont plus nécessairement présents, de nombreux civils et associés ont joint les rangs de la Légion et ont ainsi obtenu, selon moi, des pouvoirs trop grands. Le moment serait peut-être venu d'intégrer un nouveau groupe. Je me demande si, au niveau national, vous songez à créer une toute nouvelle façon de faire les choses relativement au retour des troupes. Il ne suffit plus de leur offrir des beignets à leur arrivée au port avec l'aide de Sally Ann. C'est beaucoup plus complexe. Des anciens combattants se suicident parce qu'ils se retrouvent isolés de leur régiment et personne ne semble saisir le message. En regardant autour de vous, vous vous rendez compte qu'il y a encore une section de la Légion ou un bureau de poste.

Vous vous devez d'agir de façon proactive en déployant des moyens novateurs pour recruter ces soldats, plutôt que d'attendre en vain qu'ils se joignent à vous ou de penser que le MDN va faire la promotion de vos services. Plus vous aiderez à prendre en charge les soldats blessés et leurs familles et à briser leur isolement par rapport à leur régiment militaire, plus vous tendrez vers cet objectif. Ils ont besoin de vous. Ils ont besoin de la camaraderie que l'on pouvait trouver autrefois à la Légion.

C'est un commentaire que je me suis permis de formuler. Vous pourriez combler un vide énorme et transmettre beaucoup d'information pouvant être utile à la fois à Anciens Combattants Canada et au MDN.

M. Allard : Vous avez soulevé tout à l'heure un point intéressant en demandant dans quelle mesure nous agissions encore comme représentants, et je vous ai dit que cela se situait entre 8 p. 100 et 10 p. 100. Si vous examinez le tableau que j'ai ici, vous constaterez que les Forces canadiennes et Anciens Combattants Canada sont représentés dans le processus, mais pas la Légion. Ce sont des employés des Forces canadiennes et d'ACC qui travaillent dans les bureaux de transition mis en place. Certains protocoles en vigueur en cas de blessures prévoient la transmission d'information aux Forces canadiennes et à Anciens Combattants Canada, mais pas à l'agent des services de la Légion. Un programme est offert pour les traumatismes liés au stress opérationnel. Il existe ainsi une multitude de programmes et de fournisseurs, mais on a établi des processus administratifs qui auront pour résultat, si nous ne sommes pas assez vigilants, de nous exclure d'activités comprises dans notre mandat prescrit par la loi. Il est prévu dans la Loi sur les pensions et dans la nouvelle Charte des anciens combattants que nous pouvons offrir des services de représentation, mais je ne crois pas qu'Anciens Combattants Canada respecte l'esprit de la loi en nous excluant via ces processus administratifs. Nous sommes conscients de la situation et nous allons faire les démarches nécessaires.

Vos propos sont tout à fait pertinents, car nous nous rendons effectivement dans les établissements de soins de longue durée. Nous y faisons des visites à caractère social. Nous nous assurons que l'on s'occupe bien des anciens combattants et qu'ils reçoivent des soins de qualité. Nous devons nous rendre ainsi dans les hôpitaux. Comment pouvons-nous savoir que des anciens combattants sont hospitalisés? Il nous faut peut-être parler aux Forces canadiennes. Nous devons entrer en contact avec Anciens Combattants Canada et nous tailler une place dans le processus malgré les protocoles en vigueur en cas de blessures, des protocoles d'entente qui nous excluent actuellement.

[Français]

Le sénateur Dallaire : Vous représentez l'instrument idéal sur le plan rural, où il y a énormément de blessés. Vous êtes sur le terrain et il s'agit d'amener une nouvelle philosophie, une nouvelle façon de voir ces nouveaux vétérans parce qu'il y a tout de même un élément fondamental : tous ces hommes et femmes se sentent quand même isolés.

Vous pouvez empêcher ce sentiment d'isolement, vous pouvez éduquer les unités de milice à mieux faire leur travail. Il me ferait plaisir de parler à la Légion royale canadienne pour que vous ayez ce mandat.

Le sénateur Day : La Légion royale canadienne a besoin de fonds pour renouveler son mandat. Je crois que ce sont les membres qui paient pour cela et non le gouvernement. Vous voulez un nouveau mandat, mais qui va payer pour cela?

[Traduction]

Le sénateur Dallaire : Quant à la façon dont on procédera, il s'agit de réorienter l'aspect administratif en fonction des exigences de l'époque avec la nouvelle génération d'anciens combattants et les possibilités qui s'offrent. Cela fait partie des mesures qu'ils estiment devoir prendre. Si vous n'intervenez pas auprès de la nouvelle génération d'anciens combattants, surtout s'ils sont blessés, vivent en milieu rural ou sont membres de la milice, ils vont aussi échapper à l'attention des Forces canadiennes en raison de toutes ces procédures à suivre et nous allons tout simplement les perdre.

Je pourrais vous parler de plusieurs suicides de membres de la milice survenus au Québec dans la foulée de ce sentiment d'abandon. Il y a pourtant des sections locales de la Légion. Nous nous occupons de leurs funérailles, mais nous ne sommes pas là pour eux lorsqu'ils sont vivants. L'intervention dans ce processus est un enjeu qui en vaut la peine. Confiez le mandat à un comité. Les ressources financières sont là, si la volonté existe.

[Français]

Les profits sont encore là.

[Traduction]

Pour ce qui est du paiement forfaitaire de 250 000 dollars, lorsque nous avons contesté la Charte, nous avons demandé qu'il soit non imposable, comme la pension d'invalidité actuelle. Nous n'avons pas eu gain de cause. Si vous accordez 200 000 dollars à un ancien combattant, plus le salaire qu'il touchait et l'allocation pour service à l'étranger qui s'y ajoutait en raison de sa présence sur un théâtre d'opérations, la ponction fiscale fait en sorte qu'il ne lui reste plus grand-chose. À mon avis, il doit bien y avoir un moyen de régler ce problème avec le paiement forfaitaire.

M. Allard : Le paiement n'est pas imposable.

Le sénateur Dallaire : Ce n'est pas ce que vous avez dit précédemment.

M. Allard : Non, l'indemnité pour invalidité n'est pas imposable.

Le sénateur Dallaire : Le paiement forfaitaire n'est donc pas imposable.

M. Frost : Non.

M. Allard : Les prestations supplémentaires de retraite payées à l'âge de 65 ans sont en partie imposables, mais pas l'indemnité pour invalidité.

Le sénateur Dallaire : Je ne veux pas m'aventurer sur ce terrain.

Le sénateur Downe : Pour ce qui est du paiement forfaitaire, j'ai fait valoir publiquement dès le départ que je craignais que le ministère et le gouvernement aient donné leur accord à ce sujet uniquement parce que cette mesure se traduirait par des économies à long terme. Vous indiquez à la page 8 le montant reçu aurait été plus élevé, compte tenu de la hausse du coût de la vie, si le paiement avait été effectué un an plus tard. L'envers de la médaille, c'est bien sûr que le gouvernement aurait dû débourser de plus fortes sommes. C'est une situation que nous devrons surveiller de près à l'avenir.

Il y a un autre élément qui me préoccupe. Au Canada, nous avons échappé en grande partie au phénomène des anciens combattants se retrouvant à mendier dans la rue parce qu'ils touchent seulement un paiement annuel. Je me demande si, dans certains cas, un paiement forfaitaire ne risque pas d'être flambé pour différentes raisons, ce qui laisserait le bénéficiaire sans autres ressources. Voilà donc un autre facteur dont il faudra surveiller l'évolution.

Le ministère n'est pas là pour réaliser des économies; son rôle est de fournir des services aux anciens combattants et d'aider la Légion et les autres intervenants à s'assurer que l'on fait le nécessaire.

M. Allard : C'est pourquoi nous préconisons le versement d'un supplément annuel pour l'indexation du paiement pour invalidité. Nous estimons également que l'indemnité pour perte de rémunération est une mesure compensatoire au même titre que la pension d'invalidité et qu'elle peut être versée jusqu'à l'âge de 65 ans. Cependant, nous faisons également valoir qu'il convient de modifier la formule utilisée pour calculer la garantie de 75 p. 100 des revenus perdus.

Le sénateur Dallaire : Vous ne pouvez pas considérer ces mesures isolément du fait que le nouveau processus vise à faire des anciens combattants des citoyens à part entière. Cet objectif se traduit par des activités de recherche d'emploi et de recyclage. Si cela ne fonctionne pas pour l'un des conjoints, c'est l'autre qui peut se recycler et c'est bon pour la vie. De telles mesures n'ont jamais existé auparavant. Il y a un prix à payer.

M. Allard : Nous avons accepté ce prix à payer en sachant que la charte n'était pas fixée à demeure et que nous pouvions y apporter des améliorations; nous en proposons d'ailleurs quelques-unes.

En toute équité, il faut dire que nous recevons des commentaires plutôt favorables au sujet de l'indemnité pour invalidité et des mesures de réadaptation — lesquelles peuvent être transférées au conjoint et incluent notamment des prestations pour perte de revenu. Il y a bien certains mécontents, mais la majorité des gens sont satisfaits.

Le sénateur Downe : Je suis d'accord, mais le programme n'en est qu'à ses débuts. Je me demande si tout ira aussi bien dans 10 ans.

M. Allard : Nous l'améliorons sans cesse.

Le sénateur Dallaire : Si vous vous souvenez de ce qui a été dit la semaine dernière, la charte a justement été conçue de manière à offrir cette marge de manœuvre au ministre, pour autant que le ministère n'établisse pas de règles qui lui feront obstacle.

M. Frost : Vous savez probablement que l'administration centrale de la Légion royale canadienne a dépensé quelque 100 000 $ l'an dernier en soutien direct aux militaires sur le terrain, surtout en Afghanistan. Je ne dirais donc pas que nous avons les bras croisés. Nous sommes présents à 100 p. 100 pour offrir notre soutien. Il y a peut-être certains secteurs où nous pourrions en faire davantage en intervenant directement pour guider les militaires actifs ou les membres de la milice, mais nous sommes tout de même bel et bien présents.

Le sénateur Dallaire : J'espère n'avoir rien dit de péjoratif en indiquant que vous n'étiez pas là. Je crois simplement que vous êtes confrontés à une toute nouvelle génération d'anciens combattants dont les exigences sont totalement différentes. Il existe au chapitre des communications un vide énorme que la Légion peut contribuer à combler, ce qu'elle réussissait auparavant. Ce faisant, vous pourriez sauver des vies et aider des familles en assurant l'accès aux programmes que vous offrez déjà à vos membres.

Nous avons perdu près de 15 années d'apprentissage dans nos efforts pour comprendre la façon de soigner les blessures psychologiques, qui sont beaucoup plus fréquentes que les blessures physiques. Plus qu'un simple centre d'excellence aux dires des quelques spécialistes qui y travaillent, l'Hôpital Sainte-Anne est en voie de devenir un véritable lieu de recherche et développement, d'enseignement, de formation et de services offerts en permanence à un niveau raisonnable, 15 ou 20 lits, comme établissement spécialisé digne de ce nom dans le traitement du syndrome de stress post-traumatique. Avez-vous pris position à ce sujet?

M. Frost : Monsieur Allard, vous faites partie du conseil consultatif de cet établissement. En fait, vous vous rendez souvent à Sainte-Anne-de-Bellevue.

M. Allard : J'y vais régulièrement. Permettez-moi un bref retour en arrière pour illustrer ce que nous faisons pour les membres des Forces canadiennes.

J'ai participé au deuxième Colloque national sur les traumatismes liés au stress opérationnel qui s'est tenu à Montréal. Je crois que vous y étiez également, sénateur.

Le sénateur Dallaire : J'ai pris la parole à cette occasion.

M. Allard : Vous avez prononcé une allocution lors du banquet. Je me suis assuré de bien faire savoir à tous les représentants d'Anciens Combattants Canada que ce n'était pas vraiment le deuxième colloque sur les traumatismes liés au stress opérationnel, mais bien le troisième. Le premier colloque a été organisé par la Légion à Charlottetown en 1996. Nous y avons demandé instamment que le traumatisme lié au stress opérationnel soit éventuellement reconnu comme étant une maladie invalidante. C'est un exemple de ce que nous pouvons faire au bénéfice des membres des Forces canadiennes et des anciens combattants.

Pour nous, il ne fait aucun doute que l'hôpital de Sainte-Anne-de-Bellevue doit devenir un centre d'excellence en matière de stress opérationnel. Pour ce qui est des installations de soins de longue durée et des établissements de moins en moins nombreux offrant l'accès à des soins de première ligne, dont certains comportent des secteurs spécialisés en santé mentale, nous préconisons le maintien de cette vocation et l'amélioration des installations de telle sorte que les sommes qui y ont été investies ne soient pas perdues.

Le sénateur Dallaire : La plus grande partie des réformes effectuées à Anciens Combattants Canada dans les années 1990 ont été attribuables à la présence de notre ancien juge-avocat général, le brigadier général Pierre Boutet, à titre d'officier général du ministère.

Croyez-vous que la présence d'un officier général à Anciens Combattants Canada insufflerait une vigueur renouvelée aux efforts déployés pour réaliser une réforme, procéder à des changements, prendre en compte les différents points sensibles et entretenir des relations avec des organismes externes comme la Légion?

Le sénateur Day : Il pourrait aussi s'agir d'un adjudant-chef.

Le sénateur Dallaire : Je n'ai rien contre les colonels, mais l'intégration d'un officier général change radicalement la donne.

M. Frost : Peu importe qui vous placez en poste, la donne sera changée. La situation va nécessairement évoluer, pour le meilleur ou pour le pire.

Supposons par exemple que deux juges entendent votre cause. Il est bien connu que vous vous en tirerez mieux avec un juge n'ayant pas d'antécédents militaires parce que ceux-ci rendent généralement, et cela est établi statistiquement, des décisions plus favorables. Alors j'hésiterais à dire si cela serait avantageux ou non.

Le sénateur Dallaire : Je parle d'un détachement à titre de directeur général. Il n'est pas question d'une nomination.

M. Allard : Il faut bien dire qu'à l'époque où le général représentait le ministère à Charlottetown, il n'existait pas de tribunes semblables à celles actuellement en place qui permettent au sous-ministre adjoint des services aux anciens combattants et au chef du personnel militaire de discuter régulièrement en comité. Ces discussions ont lieu tous les trois mois, si ce n'est plus fréquemment encore. Anciens Combattants Canada et les Forces canadiennes ont fait le nécessaire pour intégrer leurs approches de prestation des services.

Le sénateur Downe : J'aimerais dire quelques mots à ce sujet. Je ne voudrais aucunement dénigrer le travail du général, dont mon collègue vient de nous parler, mais je crois que le ministère tenait à l'époque de vastes consultations auprès d'un large éventail d'associations, y compris la Légion, et a pu connaître ainsi le point de vue de nombreux anciens combattants. Bon nombre des résolutions adoptées ont été le fruit de ces consultations, plutôt que du travail d'un seul individu.

D'après ce que j'ai pu entendre au sein du ministère des Anciens Combattants, il y avait une distinction très nette. Les individus qui se présentaient devant le Tribunal d'appel des anciens combattants se demandaient si certains civils au sein du ministère n'étaient pas davantage favorables à la cause des simples soldats et des caporals, notamment, que les militaires de haut rang. C'est ce qui expliquait en partie la scission. Nous devons nous montrer prudents.

À mon avis, le Tribunal d'appel des anciens combattants est davantage assimilable à un jury composé de membres du grand public. Si vous êtes accusé d'un crime, vous comparaissez devant 12 citoyens sélectionnés aléatoirement. Les anciens combattants devraient profiter de la même possibilité, plutôt que d'avoir à composer avec des militaires de différents niveaux. Comme je vous vois acquiescer d'un signe de tête, je suppose que vous êtes d'accord avec moi.

Le sénateur Dallaire : J'aurais une dernière question concernant le 100e anniversaire de la bataille de Vimy qui coïncidera avec le 150e anniversaire du Canada en 2017. Avez-vous un plan à long terme pour commémorer Vimy en 2017? Si vous n'en avez pas, je me ferai un plaisir de vous communiquer le mien.

M. Frost : Pour l'instant, nous n'avons pas de plan à long terme.

Le sénateur Dallaire : Il faudrait être mieux préparés que nous l'avons été pour les célébrations des projets du millénaire et de la tombe du Soldat inconnu. Je sais que vous étiez en train d'y travailler. L'initiative a été abandonnée, et nous l'avons relancée. Nous pourrions peut-être discuter de la façon dont nous voulons souligner le 100e anniversaire de la bataille de la crête de Vimy au Canada, et pas seulement là-bas.

Le président : Il n'est jamais trop tôt pour en parler. Avant de nous pencher là-dessus, nous allons permettre au sénateur Day de poser des questions.

Le sénateur Day : Nous tenons à féliciter la Légion royale canadienne pour le travail qu'elle effectue. Vous savez que vous pouvez compter sur mon soutien.

Je tiens d'abord à vous remercier pour ces renseignements. Comme l'a indiqué le sénateur Banks, si c'est aussi simple que vous le laissez entendre, alors il y a quelque chose qui ne va pas. Vous dénoncez le fait que les services de réadaptation sont offerts dans le cadre de deux programmes distincts. Il faut corriger la situation. C'est ce qui arrive quand nous mettons sur pied un nouveau programme et que nous négligeons d'en supprimer d'autres. Nous devons continuer de chercher un moyen d'intégrer tous ces programmes.

Vous avez parlé de l'examen des besoins en soins de santé des anciens combattants. J'ai l'impression qu'il s'agit d'une initiative interne d'Anciens Combattants Canada. Ils consultent peut-être des gens de l'extérieur, mais vous ne participez pas à l'étude en tant que membre du comité d'examen.

M. Frost : Nous le faisons. Nous faisons partie du conseil de gérontologie.

M. Allard : Nous faisons partie du Conseil consultatif de gérontologie. Nous avons participé à la préparation du rapport intitulé Parole d'honneur, qui a été rendu public en décembre 2006.

Le sénateur Day : Est-ce que l'examen des besoins en soins de santé des anciens combattants est une initiative distincte?

M. Allard : L'examen découle du rapport Parole d'honneur. Le processus a commencé en 2004.

Le sénateur Day : Croyez-vous être en mesure, malgré les problèmes de dédoublements qui existent, de porter cette situation à l'attention des décideurs et de les amener à agir?

M. Frost : Concernant l'examen des besoins en soins de santé, le comité de gérontologie a formulé des recommandations et déposé un rapport. Le ministère des Anciens Combattants a préparé un plan d'action, que nous avons commenté. Nous avons vu les recommandations, et nous les appuyons.

Nous espérons qu'il n'y aura pas de retard, que d'ici quelques semaines, une fois le budget adopté, des fonds seront octroyés pour appuyer les conclusions de l'étude. Toutefois, on ne sait jamais.

Pour ce qui est des vétérans contemporains, les soins offerts doivent être fonction des besoins, non pas du moment de survenue de la blessure ou de la nature de celle-ci. Il s'agit là d'une façon plus humaine d'aborder tout le processus de réadaptation.

Le sénateur Day : Cela comprend la réadaptation pour faciliter la transition entre la vie militaire et la vie civile. Si vous n'êtes pas en mesure d'occuper un poste qui vous donne droit à un salaire similaire, avez-vous accès dans ces cas-là à un supplément de revenu?

M. Allard : L'examen des besoins en soins de santé des anciens combattants vise trois programmes qui n'ont rien à voir avec la nouvelle Charte des anciens combattants : les traitements, les soins de longue durée et le Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Le vétéran contemporain n'a pas accès aux soins de longue durée sauf s'il répond à certains critères bien précis. Nous estimons que les anciens combattants des Forces canadiennes devraient, le moment venu, bénéficier de soins de longue durée.

Le Programme pour l'autonomie des anciens combattants est également assorti de critères. Les anciens combattants, au fur et à mesure qu'ils avancent en âge, veulent rester chez eux et non pas se retrouver dans un centre de soins longue durée. Ils devraient eux aussi faire l'objet d'une évaluation en fonction de leurs besoins, et non pas en fonction de critères relatifs au service.

Le sénateur Day : Parlons justement du Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Il y a tellement de programmes qui me trottent dans la tête qu'il doit y avoir un moyen de simplifier tout cela. Toutefois, nous ne le ferons pas aujourd'hui.

Concernant le PAAC, nous recevons, en tant que sénateurs et membres du comité, beaucoup d'appels, y compris de la part de conjoints, au sujet de ce programme et de la promesse qui a été faite. Nous ne cessons de rappeler aux gens la promesse que nous avons faite avant les dernières élections. Nous espérons qu'elle finira par être honorée.

Je crois comprendre que pour avoir accès au PAAC, un ancien combattant doit toucher une pension d'invalidité. La règle est toujours la même, n'est-ce pas?

M. Allard : Il peut recevoir l'allocation d'ancien combattant, qui est essentiellement une aide financière qu'on lui accorde parce que son revenu est trop faible. Cela peut lui donner accès au PAAC. Le problème, c'est qu'il y a plusieurs portes d'accès. Je ne peux pas toutes les décrire, mais il y en a plusieurs.

Le sénateur Day : Vous avez parlé de la perte auditive. Je trouve cela intéressant. J'entends souvent dire, au Nouveau-Brunswick, qu'au Canada, les anciens combattants qui ne reçoivent aucune pension d'invalidité présentent une demande de prestation d'invalidité en vue d'avoir accès au PAAC. Le ministère des Anciens Combattants essaie de leur accorder une pension en fonction de la nouvelle invalidité qu'ils viennent de découvrir, ce qui leur donne droit, ensuite, aux soins offerts dans le cadre du PAAC. C'est quoi, cette tactique? Est-il vrai que les choses se passent de cette façon?

M. Frost : Oui.

M. Allard : Oui.

Le sénateur Day : J'entends parler de choses pareilles et j'ai du mal à y croire.

M. Frost : Le personnel s'efforce parfois de trouver, avec l'ancien combattant, une invalidité quelconque qui peut être liée à son service.

Cela dit, je suis certain que ce ne sont pas tous les anciens combattants qui s'adonnent à cette pratique, mais ils sont bien épaulés.

Le président : Vous l'avez dit plus tôt : le vieillissement n'est pas une invalidité.

M. Allard : La fragilité non plus. Nous aimerions qu'elle fasse partie des critères qui permettent d'avoir accès au PAAC.

Le président : Cela permettrait peut-être de garder les anciens combattants à la maison, et non pas dans des centres où les soins de longue durée coûtent très cher. Ils seraient plus heureux et le contribuable économiserait de l'argent.

M. Allard : Il y a beaucoup d'anciens combattants âgés de plus de 85 ans qui ont accès au PAAC parce qu'ils ont présenté une demande de prestations d'invalidité.

Le sénateur Day : Il faut également tenir compte du conjoint survivant d'un ancien combattant qui n'avait pas accès au PAAC. Ensemble, ils ont été en mesure de faire toutes choses, mais lorsque la conjointe de l'ancien combattant se retrouve tout à coup toute seule, elle n'a droit à aucune aide.

M. Frost : Vous avez sans doute parlé aux représentants du ministère des Anciens Combattants. Cette injustice, espérons-le, sera corrigée d'ici deux mois.

Le sénateur Day : Je l'espère. Nous en parlons déjà depuis un bon moment.

M. Allard : L'ancien combattant des Forces canadiennes aura aussi accès à une plus grande gamme de services, comme les soins de longue durée, par exemple.

Le sénateur Day : J'aimerais en savoir plus sur le Régime d'assurance-revenu militaire, le RARM. Est-ce que le régime est financé par le gouvernement ou par les membres?

M. Allard : Il s'agit essentiellement d'un régime d'assurance. Je ne peux pas entrer dans les détails.

Le sénateur Day : Est-ce qu'il s'agit d'un régime d'assurance mutuelle, ou est-ce que le gouvernement y participe financièrement?

Le sénateur Dallaire : C'est la Great-West Life qui s'en occupe.

M. Allard : Cela dépend du programme auquel vous faites allusion. S'il s'agit du régime d'AIP du RARM, soit l'assurance invalidité prolongée, le gouvernement paie 85 p. 100 des primes, et le membre, 15 p. 100. Dans le cas de l'assurance temporaire du RARM, c'est le membre qui paie la prime.

Le sénateur Day : Certains anciens combattants nous ont dit qu'on les encourageait à souscrire à des régimes de leur propre initiative.

M. Allard : L'adhésion au régime d'AIP du RARM est presqu'obligatoire.

Le sénateur Day : Est-ce que les membres doivent payer les primes à même leur salaire?

M. Allard : Cela n'a aucun sens, car les services de réadaptation sont couverts par le RARM. Il y a un programme de réadaptation, prévu par la loi, qui est offert par Anciens Combattants Canada. Alors pourquoi continuer d'adhérer au régime d'AIP du RARM pendant deux ans, si ACC offre une protection complémentaire de trois ans qui est plus complète que le régime d'AIP, qui ne couvre que les services de réadaptation professionnels? Cela n'a aucun sens. L'assurance temporaire offerte dans le cadre du RARM constitue une solution plus raisonnable en raison des nombreux avantages qu'elle présente.

Le sénateur Day : J'ai trois autres questions à poser, mais on me dit que le temps presse.

D'abord, j'aimerais savoir ce que vous pensez des hôpitaux canadiens pour anciens combattants. Nous avons entendu dire, il y a six mois, que les hôpitaux pour anciens combattants aux États-Unis étaient plutôt rares et ne répondaient pas aux mêmes normes que les hôpitaux pour civils.

Ensuite, j'aimerais savoir quels liens vous entretenez avec le nouvel ombudsman des anciens combattants. Êtes-vous en concurrence avec lui, ou pouvez-vous trouver un moyen de collaborer ensemble? Vous avez dit qu'il devrait posséder des pouvoirs d'enquête plus vastes. Je vous demanderais de préciser votre pensée.

Enfin, pour ce qui est des services que vous fournissez, le sénateur Dallaire a parlé du rôle que vous pourriez jouer notamment auprès des réservistes qui reviennent d'une mission. Je suis tout à fait d'accord avec lui. Toutefois, je sais que dans les régions peu peuplées, dans certaines localités, il n'y a qu'un bureau de la Légion et un bureau de poste. Je sais qu'il est difficile pour ces filiales d'assurer l'entretien de l'immeuble, de financer les activités qui sont organisées. Est-ce que la Légion royale canadienne reçoit des anciens combattants ou du gouvernement une aide pour fournir des services qu'elle offre à l'heure actuelle?

M. Allard : Non.

Le sénateur Day : Donc, vos activités sont financées grâce aux fonds que vous arrivez à recueillir via vos membres?

M. Allard : C'est exact.

Le sénateur Day : Vous êtes de plus en plus sollicités, et vous pourriez faire encore plus.

M. Frost : C'est vrai. Vous soulevez un point fort intéressant, parce que le visage de la Légion a changé. La base est toujours la même. Nous comptons aujourd'hui 1 520 filiales. D'ici 15 ans, à moins d'un changement radical, au rythme où nous allons, les filiales seront beaucoup moins nombreuses. À Toronto, par exemple, on en compte 36. Il y en aura deux fois moins d'ici 15 ans. Certaines vont fusionner, vendre leurs immeubles. Il y aura toujours une Légion, mais il n'y aura plus autant de filiales à l'échelle nationale.

J'aimerais pouvoir vous dire que le nombre de membres va augmenter, mais quand j'ai jeté un coup d'oeil aux statistiques, il y a deux jours, j'ai vu qu'il était à la baisse. Nous comptons maintenant moins de 400 000 membres, soit environ 388 000. Nous aimerions que le chiffre se stabilise autour de 350 000. C'est l'objectif que nous visons. Nous avons nous aussi beaucoup de problèmes.

Le sénateur Day : J'en suis conscient. Il est important qu'on le sache.

J'aimerais bien pouvoir explorer plus à fond certains des autres points, mais il ne reste plus de temps. Le président me fait signe d'arrêter. J'espère que nous aurons l'occasion de nous rencontrer de nouveau, que je pourrai visiter vos nouveaux bureaux et quartiers généraux.

M. Frost : M. Allard a pris les questions en note. Je suis certain que nous pourrons vous répondre par courriel. Les questions sont assez simples.

Le sénateur Day : Merci.

Le président : Ces renseignements nous seraient très utiles. Merci, sénateur Day, de votre compréhension. Nous allons avoir des problèmes si nous siégeons au-delà de 13 h 30.

Je vous encourage à rester en contact avec le sous-comité. Comme vous le savez, votre travail nous intéresse beaucoup. Nous nous ferons un plaisir de vous prêter main-forte, au besoin, dans certains dossiers, que ce soit ceux que nous avons abordés aujourd'hui, qui sont complexes et importants, ou ceux entourant les activités commémoratives, le Fonds du Souvenir, l'aide fournie en matière d'enterrement, question qui n'a pas encore été réglée. N'hésitez pas à nous communiquer tout dossier qui vous pose problème, si vous jugez que nous pouvons vous aider. Nous avons accès à certains ressources, soit des professionnels et des gens qui ont servi dans les Forces canadiennes, comme notre distingué collègue, le sénateur Dallaire. Nous accepterons volontiers de vous fournir son aide. Le sénateur Dallaire sait ce qu'est le bénévolat forcé.

Le sénateur Dallaire : Merci beaucoup.

Le président : Avant de m'attirer encore plus d'ennuis, je vais mettre fin à la réunion.

La séance est levée.


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