Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 6 - Témoignages du 30 septembre 2009


OTTAWA, le mercredi 30 septembre 2009

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 16 h 5, pour étudier le projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac, qui lui a été renvoyé.

Le sénateur Art Eggleton (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Soyez les bienvenus à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Il s'agit de la deuxième séance que nous consacrons à l'étude du projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac.

J'aimerais souhaiter la bienvenue à deux sénateurs. Le sénateur Kelvin Ogilvie siège à notre comité pour la première fois aujourd'hui. Il remplace le sénateur Martin, mais nous espérons le revoir parmi nous. Le sénateur Ogilvie est originaire de la Nouvelle-Écosse et a été nommé récemment au Sénat.

Le sénateur Rivard, du Québec, remplace madame le sénateur Champagne. Bienvenue à vous deux et merci d'être des nôtres aujourd'hui.

Nous entendrons deux groupes de témoins aujourd'hui. Le premier se compose de personnes qui ont exprimé des réserves relativement au projet de loi C-32. Les témoins du deuxième groupe sont très favorables à ce projet de loi.

Après avoir entendu les témoins, je voudrais discuter avec les membres du comité des options qui s'offrent à nous. Je les décrirai aux sénateurs à ce moment-là pour que nous puissions décider de la marche à suivre.

Nous nous sommes efforcés d'inviter le plus grand nombre possible de personnes parmi celles qui avaient demandé d'être entendues par notre comité. Nous n'avons pas pu les inviter toutes, mais nous avons tâché de choisir des témoins représentatifs des différents points de vue et j'espère que nous avons réussi. Cependant, si les membres du comité souhaitent entendre d'autres témoins après la séance d'aujourd'hui ou réentendre les fonctionnaires, cela demeure possible. Nous en discuterons également à la fin de la réunion.

Parmi les témoins du premier groupe figurent les représentants de Casa Cubana, un importateur montréalais de cigares de qualité, et de Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International, fabricant et distributeur de produits du tabac. Nous entendrons également un responsable de l'Association canadienne des dépanneurs en alimentation, qui parlera au nom des détaillants du Canada, et un représentant de Distribution G. V. A. Inc, une société canadienne d'importation et de distribution des produits du tabac. Enfin, un représentant de BCTGM, le syndicat qui représente les travailleurs de Rothmans, Bensons & Hedges Inc., prendra la parole.

Chaque témoin dispose de cinq minutes, pour que nous puissions entendre toutes les questions des membres du comité.

Madame Debra Steger, voulez-vous commencer? Nous avons également reçu votre mémoire. Vous avez la parole.

Debra Steger, experte en droit commercial international, Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International : Merci de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui sur la cohérence du projet de loi C-32 avec les obligations du Canada en matière de commerce international.

Je suis professeure à la faculté de droit de l'Université d'Ottawa, où j'enseigne le droit du commerce international et le droit en matière de placements. Je compte 30 années d'expérience en droit du commerce international. J'ai récemment présidé un comité de règlement d'un différend de l'Organisation mondiale du commerce; j'ai agi également en qualité de conseillère juridique pour les gouvernements du Canada et du Mexique dans le règlement de différends auprès de l'OMC et de différends relatifs à l'ALENA, l'Accord de libre-échange d'Amérique du Nord. J'ai été la première directrice et la première conseillère juridique en chef de l'organe d'appel de l'OMC, où j'ai eu l'occasion d'entendre les 60 premières instances de l'OMC, y compris des affaires liées à l'Accord sur les obstacles techniques au commerce, l'accord OTC, et l'accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires, l'accord SPS. Auparavant, j'ai participé en qualité de négociatrice principale à l'élaboration de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce et à titre de conseillère juridique principale du gouvernement du Canada pour l'ensemble des accords conclus avec l'OMC. J'occupais le poste d'avocate générale du Tribunal canadien du commerce extérieur lors de la mise en œuvre de l'ALENA, l'Accord de libre-échange nord-américain, et de l'accord instituant l'OMC. J'occupais ces fonctions lorsque les premières affaires ont été entendues. Vous trouverez une notice biographique plus complète à l'annexe 1 de mon mémoire.

Les responsables de Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International m'ont demandé d'évaluer la légalité du projet de loi C-32, à titre d'experte du droit commercial international. Dans mon témoignage d'aujourd'hui, je ne représente pas l'Université d'Ottawa.

PMI et RBH appuient sans réserve l'objectif louable du projet de loi C-32, qui consiste à interdire certains produits du tabac exhibant des arômes de fruit ou de bonbon considérés comme particulièrement susceptibles de plaire aux jeunes. Mais dans sa forme actuelle, ce projet de loi a une trop grande portée et, à mon avis, il est incompatible avec les obligations qui incombent au Canada en vertu de l'ALENA et les règles de l'OMC. Cette lacune aurait très bien pu être évitée si le gouvernement avait consulté les intéressés avant de le présenter devant le Parlement. Le gouvernement pourrait corriger le problème facilement en suivant l'exemple de trois pays qui ont déjà adopté une législation poursuivant exactement le même objectif : l'Australie, les États-Unis et la France. Ces pays ont une législation interdisant les produits du tabac exhibant des arômes qui plaisent aux jeunes. J'ai joint à mon mémoire, à l'annexe 2, une modification simple inspirée de la même approche. Cette modification a l'appui de l'Association frontière hors taxes, de l'Association canadienne des dépanneurs en alimentation, de l'Association des gens d'affaires coréens en Ontario et du Syndicat international des travailleurs et travailleuses de la boulangerie, confiserie, tabac et meunerie, que vous entendrez aussi aujourd'hui.

Le projet de loi C-32 interdirait la fabrication et la vente de cigarettes contenant l'un de quelque 5 000 additifs, peu importe leur quantité ou leur effet sur l'arôme du produit fini. Or, certains de ces additifs sont des composantes essentielles de cigarettes de tabac mélangé produites par Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International. Si le projet de loi est adopté, ces cigarettes ne pourront plus être fabriquées et vendues au Canada ni exportées vers d'autres pays. Toutefois, le projet de loi n'interdit pas les cigarettes confectionnées de tabac séché à l'air, qui ne contiennent pas d'additifs, mais qui, tout comme les cigarettes de tabac mélangé, goûtent le tabac. Dans leur témoignage devant vous, les fonctionnaires de Santé Canada ont déclaré que les cigarettes mélangées n'ont pas d'arôme de bonbon ou de fruit, mais ils n'ont pas montré non plus que l'interdiction de ces cigarettes permettrait au gouvernement d'atteindre son objectif déclaré d'interdire les produits du tabac qui présentent des arômes qui plaisent aux jeunes. Bien au contraire, le professeur Casey Mulligan, de l'Université de Chicago, a fait parvenir à votre comité un rapport indiquant que les données recueillies jusqu'à présent ne permettent pas de conclure que les cigarettes mélangées conventionnelles sont plus susceptibles d'amener les jeunes à fumer que les cigarettes faites de tabac séché à l'air.

Passons maintenant à l'analyse juridique. En vertu de l'Accord de l'OMC sur les obstacles techniques au commerce, les règlements de nature technique ne doivent pas entraver plus que nécessaire le commerce pour atteindre un objectif légitime, notamment la protection de la santé publique. Au moment d'adopter de tels règlements, les membres de l'OMC doivent tenir compte des risques pertinents, et également des « données scientifiques et techniques disponibles ».

Le projet de loi C-32 entrave le commerce plus que nécessaire pour atteindre l'objectif légitime du Canada. Le gouvernement du Canada n'a pas tenu compte du fait que les cigarettes mélangées n'ont pas d'arôme de bonbon ou de fruit, arômes qui plaisent particulièrement aux jeunes. En fait, Santé Canada reconnaît que les cigarettes mélangées conventionnelles ne présentent pas de tels arômes. À cet égard, elles ne se distinguent pas des cigarettes faites de tabac séché à l'air, lesquelles ne sont pas interdites par le projet de loi C-32. En un mot, le gouvernement n'a pas établi que l'interdiction des cigarettes mélangées soit nécessaire pour atteindre l'objectif légitime du Canada. Qui plus est, il y aurait des moyens d'atteindre cet objectif qui auraient des effets moins restrictifs sur le commerce.

La modification proposée dans mon mémoire et les approches privilégiées par l'Australie, les États-Unis et la France permettent d'atteindre exactement le même objectif sans restreindre indûment les échanges commerciaux.

Le président : Cinq minutes sont écoulées. Je vous prierais de conclure.

Mme Steger : Je vous invite à prendre connaissance de mon mémoire, qui détaille davantage les arguments relatifs à l'Accord sur les obstacles techniques au commerce, l'Accord de l'OMC et aussi le chapitre 9 et le chapitre 11 de l'ALENA. Essentiellement, je suis d'avis que le projet de loi C-32 est incompatible avec les obligations commerciales du Canada et je demande respectueusement au comité d'étudier et d'adopter la modification que j'ai proposée et à laquelle souscrivent les détaillants et les syndiqués. Merci de votre attention.

Luc Martial, Affaires gouvernementales, Casa Cubana : J'ai apporté des copies de mon témoignage. J'ai également plusieurs documents pertinents avec moi.

J'aimerais d'abord remercier le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie de nous donner l'opportunité de présenter preuves et témoignages à l'appui de notre assertion voulant que le projet de loi C-32 est au mieux une fraude publique et au pire, une violation du mandat de Santé Canada dans le domaine du contrôle du tabac.

Afin d'ajouter de la crédibilité à notre témoignage, permettez-moi de me présenter et de présenter la compagnie. Casa Cubana est un importateur de produits de cigares de qualité basé à Montréal et un meneur dans la distribution de petits cigares aromatisés au pays. Établie en 1998, la compagnie s'étend à la grandeur du Canada, avec un service des ventes touchant plus de 10 000 comptes directs — incluant les chaînes au détail, les détaillants indépendants, les stations d'essence, les épiceries, les boutiques hors taxes, et cetera.

En ce qui me concerne, je suis un professionnel du contrôle du tabac depuis 18 ans. J'ai travaillé comme analyste des politiques pour l'Association pour le droit des non-fumeurs du Canada; comme spécialiste des données et coordonnateur des affaires publiques pour le Conseil canadien sur le tabac et la santé; comme directeur du Centre national de la documentation sur le tabac et de la santé; comme directeur du Conseil canadien du contrôle du tabac et comme évaluateur et analyste des politiques pour le Programme de lutte au tabagisme à Santé Canada.

En quoi consiste le projet de loi C-32? Nous sommes ici aujourd'hui en raison d'une campagne de choc orchestrée, une campagne de peur et de haine, menée pendant deux ans par des groupes antitabac extrémistes, des politiciens malhonnêtes ainsi que des agences de santé et des groupes de jeunes bien intentionnés mais manipulés. La raison pour laquelle ils ont eu besoin de créer cette fausse indignation pour pousser les gouvernements à agir est qu'en utilisant les faits purs et simples, le projet de loi C-32 n'a nulle raison d'exister.

Le projet de loi C-32 est présenté sous le seul principe voulant que l'intérêt et la priorité du gouvernement sont d'interdire les produits du tabac attirant les jeunes. Dans ce cas, nous disons donc que les saveurs attirent les jeunes. En ne pouvant pas compter sur la moindre recherche ou preuve démontrant un lien entre l'utilisation de saveurs dans les produits du tabac et la décision des enfants de commencer ou de continuer à consommer du tabac, le gouvernement a justifié son projet de loi sur le fait que les jeunes parviennent à avoir accès à ces produits. Si tel est le critère déterminant pour la validité du projet de loi C-32, alors ce dernier est carrément indéfendable.

Si le fait que 6 p. 100 des mineurs ont accès à des petits cigares suffit pour établir que ces produits sont « attirants » pour les jeunes et pour justifier leur interdiction, alors le gouvernement devrait nécessairement concéder que les cigarettes traditionnelles non aromatisées sont « vraiment attirantes » pour les jeunes, puisque 10 p. 100 des mineurs ont accès à ces produits et s'y intéressent. Dans ce contexte, le projet de loi C-32 vise à interdire le seul produit issu du tabac que les jeunes consomment le moins.

Le projet de loi C-32 n'a pas comme intérêt la protection des jeunes contre le tabac. Il vise plutôt à permettre à Santé Canada de dépasser largement son mandat pour imposer un mode de vie aux Canadiens d'âge légal.

Le projet de loi C-32 vise à prohiber un produit servant un marché indéniablement légitime et légal et, par le même processus, il mettra des centaines sinon des milliers de personnes au chômage, détruira des centaines de commerces canadiens légitimes, éliminera des centaines de millions de dollars en revenus gouvernementaux légitimes, stimulera le marché noir des produits du tabac et permettra aux jeunes d'avoir accès à des produits issus du tabac aromatisés beaucoup moins chers et nullement contrôlés.

Le projet de loi C-32 n'est pas une loi sur la santé. Je répète que c'est une loi sur la haine. Le Sénat doit maintenant décider à quel point la haine de certains envers cette industrie, ces produits et les Canadiens d'âge légal choisissant de les consommer devrait pouvoir saper l'honnêteté, l'intégrité et la responsabilité de notre gouvernement.

La vérité au sujet de ces produits est fort simple : le marché des produits de tabac aromatisé représente moins de 0,5 p. 100 du marché total de tous les produits issus du tabac consommés chaque année au Canada. Comme l'a appris Santé Canada dans la recherche effectuée, la vaste majorité des Canadiens consommant ces produits ont l'âge légal pour le faire — un âge légal prévu dans la loi par tous les gouvernements du Canada. Aujourd'hui, 92 p. 100 des Canadiens qui choisissent de consommer ces produits ont l'âge légal pour le faire.

Bien que certains aient accès illégalement à ces produits aromatisés, la recherche effectuée par le gouvernement montre clairement que les jeunes ont un accès beaucoup plus grand aux produits du tabac non aromatisés, aux produits alcoolisés approuvés par le gouvernement et aux produits de loterie.

Les arômes retrouvés dans ces produits, qui semblent au centre du désaccord, sont exactement les mêmes que ceux que l'on retrouve dans une quantité beaucoup plus grande et une variété beaucoup plus vaste de produits alcoolisés vendus tous les jours au pays par tous les gouvernements en place au Canada.

Il n'existe aucune recherche appuyant une obligation d'emballage minimale pour ces produits ou l'interdiction d'un arôme en particulier, encore moins de tous ces arômes. Santé Canada le sait. À ce niveau, il est fort intéressant de remarquer que l'expert même du gouvernement fédéral en matière de contrôle du tabac, le Dr Murray Kaiserman, est complètement absent du dossier. Comment se fait-il que Santé Canada ait témoigné devant le Comité permanent de la santé et devant le comité sénatorial il y a deux semaines sans la présence de l'expert en poste depuis 25 ans?

Autre fait intéressant à noter, Santé Canada et les groupes antitabac ont concédé depuis longtemps qu'interdire les produits du tabac n'a aucun impact sur l'adoption ou la consommation de ces produits. Pourtant, les voilà maintenant en train d'essayer de vous convaincre de l'inverse.

Étant donné l'absence d'une recherche solide et d'une justification politique pour tous les aspects de ce projet de loi, l'absence de la moindre consultation significative des milliers de commerçants légitimes du secteur privé dont la vie et le gagne-pain seront directement frappés par ce projet de loi, l'absence du moindre engagement à l'égard du moindre objectif spécifique de santé de la part du gouvernement, étant donné l'absence de ces principes fondamentaux essentiels à la bonne gouvernance dans notre pays, nous vous demandons de voter contre le projet de loi C-32.

Le président : Vous en avez dit beaucoup en cinq minutes. Je suis désolé que nous ayons si peu de temps. Je sais que vous aimeriez parler davantage. Cependant, nous avons reçu beaucoup de documents sur le sujet, de chacune de vos organisations, notamment. Nous avons encore d'autres documents à lire et à assimiler. Nous avons beaucoup de documents à l'appui de tous les arguments que vous avez présentés, même si vous avez l'impression de ne pas les avoir suffisamment étayés.

J'aimerais signaler aux membres du comité, comme je l'ai fait la fois précédente, que nous avons deux nouvelles pétitions. L'une nous vient de Mike Gobin, en Alberta, et compte 2 300 signatures contre le projet de loi C-32. L'autre nous a été envoyée par Jenny Togias. Elle comprend 1 200 signatures et fait part de certaines préoccupations, surtout au sujet des petits commerces et des dépanneurs.

Notre troisième témoin s'appelle Michel Gadbois, il est vice-président principal de l'Association canadienne des dépanneurs en alimentation.

Michel Gadbois, vice-président principal, Association canadienne des dépanneurs en alimentation : Vous avez les documents sous les yeux. Tous les renvois aux chiffres et aux pourcentages figurent dans cette trousse.

Je peux répondre aux questions en français et en anglais, mais je préfère prononcer mon allocution en français.

[Français]

Au nom de l'Association canadienne des dépanneurs en alimentation, je vous remercie d'entendre la voix des dépanneurs dans le dossier du projet de loi C-32.

D'abord, un mot pour nous présenter. L'ACDA est composée de 25 000 propriétaires et gérants de dépanneurs à travers le Canada, et ce, par le biais d'organisations régionales bien implantées dans les provinces atlantiques, le Québec, l'Ontario et l'Ouest canadien. Nous représentons autant les détaillants indépendants que les bannières de petite, moyenne et grande taille.

L'impact économique des dépanneurs au Canada est considérable à tous points de vue. Directement, c'est 165 000 employés, c'est deux milliards de dollars en salaires annuels et 11,3 milliards de dollars en taxes perçues pour le gouvernement, c'est-à-dire que l'on remet au gouvernement six fois les salaires que l'on paie.

Les dépanneurs sont parmi les rares entreprises encore gérées de façon familiale. Pour nous, c'est très important qu'il y ait encore de la place pour ce type d'entreprise qui souvent, est seule à offrir des services de base dans les nombreux villages isolés.

Les dépanneurs du Canada appuient à 100 p. 100 la lutte au tabagisme chez les jeunes. Dans la documentation, vous trouverez assez d'information sur les programmes offerts dans nos magasins, justement pour former les jeunes qui travaillent dans nos magasins à ne pas vendre aux jeunes consommateurs. C'est difficile, mais on a des programmes pour les former. Les résultats des enquêtes de Santé Canada démontrent le taux de succès avec lequel nous contrôlons la vente aux mineurs.

Étant donné le sérieux de notre action pour prévenir le tabagisme chez les jeunes, vous comprendrez pourquoi nous souscrivons à l'interdiction de la vente des cigarillos aromatisés. Un tel bannissement va dans le sens de nos efforts tout comme ceux du gouvernement.

Ceci étant dit, nous n'avons pas encore entendu ni ne pouvons concevoir aucun argument logique ou basé sur des faits pouvant supporter l'interdiction des cigarettes à tabac de mélange, un article en annexe au projet de loi C-32 auquel nous nous opposons.

Avec tout le respect que je dois aux membres du comité, l'expérience de nos 25 000 dépanneurs d'un océan à l'autre nous indique que les cigarettes de tabac à mélange comme les Gauloises ou les Rooftop ne sont pas en grande demande par les personnes susceptibles de se faire carter par nos détaillants. Les cigarettes de tabac à mélange n'ont rien à voir avec les cigarillos à saveur de fruit. Leur interdiction ne va en rien contribuer à la lutte au tabagisme chez les jeunes; par contre, bannir ces produits va toutefois asséner un énorme coup de poing supplémentaire à l'industrie de détail qui souffre de la contrebande de tabac qui dévaste le Canada présentement.

Si vous bannissez les cigarettes de tabac à mélange, vous éliminez une catégorie entière de produits pour nos membres; du même coup, vous offrez sur un plateau d'argent aux criminels une nouvelle gamme de produits à vendre en exclusivité pour grossir leurs profits et faire croître le réseau. Si nous ne pouvons plus les vendre, fiez-vous sur le crime organisé pour le faire à notre place et ajouter cette catégorie à leur gamme de produits qui comprend aussi le trafic de la drogue et des armes.

La vaste majorité des Canadiens est bien au fait de la croissance fulgurante de la contrebande de tabac. Dans un de nos rapports, l'an dernier, nous avons estimé au Canada en entier à 30 p. 100 la vente de produit de tabac illégal à travers le Canada et c'est maintenant rendu au-dessus de 40 p. 100 au Québec et 50 p. 100 en Ontario.

De mon côté, je continue à faire des tournées, entre autres sur des sondages qu'on a faits, on a recueilli des mégots de cigarettes autour des cours d'école, vous en avez peut-être entendu parler, qui démontre que jamais, depuis les dix dernières années, la croissance de la consommation des cigarettes illégales n'a été aussi élevée chez les jeunes, justement à cause de l'accessibilité de ce produit.

Au début de ma présentation, je vous ai rappelé que nous représentons 25 000 détaillants à travers le pays. Ce que j'ai omis de vous dire c'est qu'en moyenne, chacun emploie quatre à dix personnes. La plupart du temps ces quatre à dix personnes sont des membres de la famille élargie.

J'essaie de vous dire que la contrebande de tabac n'est pas une crise anonyme, mais plutôt une crise qui a fait disparaître un dépanneur par jour au Canada depuis trois ans — un par jour! Ce sont des gens qui paient leurs taxes, qui ne demandent rien au gouvernement et suite à des décisions de hausses excessives de prix, ont transféré tout le marché ou la moitié du marché auprès des criminels.

En conclusion, nous vous offrons notre appui pour tous les aspects du projet de loi qui nous apparaissent efficaces pour lutter contre le tabagisme chez les jeunes. La prévention du tabagisme chez les jeunes est une cause que nous appuyons depuis des années et pour laquelle Santé Canada reconnaît notre contribution.

C'est forts de cette crédibilité que nous vous enjoignons de ne pas bannir les cigarettes de tabac à mélange, car cela va trop loin. Nous demandons aux membres du Sénat de favoriser un amendement au projet de loi afin que les cigarettes de tabac à mélange ne soient pas bannies au Canada.

[Traduction]

Le président : À présent, nous accueillons Luc Dumulong, vice-président, Distribution G.V.A. Inc. Vous avez également un mémoire écrit.

Luc Dumulong, vice-président, Distribution G.V.A. Inc. : Contrairement à mon collègue, j'ai fait un effort supplémentaire et je ferai mon exposé en anglais bien que ma langue maternelle soit le français.

Le président : Vous avez le choix de la langue.

M. Dumulong : Je sais, mais je suis maintenant prêt à le faire en anglais.

G.V.A. est une petite entreprise familiale créée en 1997 qui emploie environ 80 Canadiens. Nous sommes un important importateur et distributeur pour les dépanneurs, les tabagies et les boutiques hors taxe. Nous distribuons environ 1 000 types de cigares au pays. Nous versons au gouvernement plus de 20 millions de dollars de taxes annuellement.

Ce sont des adultes qui consomment nos produits. Nous nous opposons à ce que des mineurs puissent les obtenir. La ministre de la Santé a annoncé que le gouvernement prévoie interdire tous les produits de tabac aromatisé au moyen du projet de loi C-32. Si le projet de loi est adopté dans sa version actuelle, il y aura de nombreuses conséquences négatives pour l'économie canadienne, comme des mises à pied, une réduction des recettes fiscales et des conséquences contreproductives pour la politique et la santé publiques.

Distribution G.V.A. déplore le manque évident de consultations sur le projet de loi C-32. Je peux vous donner de nombreux exemples. Nous avons eu un préavis de deux jours avant de présenter notre exposé au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes et nous avons été informés de la tenue d'une conférence téléphonique avec le Comité permanent de la santé seulement deux heures à l'avance. Il y a eu peu de temps pour les consultations.

En 2008, le gouvernement du Québec s'est occupé également des cigarillos aromatisés vendus à l'unité. Les autorités ont consulté largement toutes les parties intéressées lors de la rédaction de la loi 112. En décidant d'un prix minimum pour la vente des cigares à l'unité, les ventes à l'unité au Québec ont presque disparu. Les produits aromatisés vendus présentement sont surtout vendus en paquet de deux qui sont de 2 à 3 $ plus chers qu'un paquet de 20 cigarettes.

La portée du projet de loi C-32 est beaucoup trop large. Il en est ainsi parce que Santé Canada n'a pas procédé aux consultations nécessaires auprès des parties intéressées et qu'on ne connaît donc pas véritablement la situation concernant les cigares et l'industrie canadienne du cigare en général.

Dans sa version actuelle, le projet de loi C-32 interdira des produits qui sont sur le marché depuis des décennies, des petits produits comme celui-ci, qui n'attirent pas du tout les jeunes fumeurs. Ces produits seront interdits inutilement. Dans notre mémoire, nous en présentons des preuves en annexe.

Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement et Santé Canada ne mènent pas les recherches nécessaires pour savoir s'il y a un problème réel concernant cette question. En fait, le gouvernement ne sait pas du tout s'il y a un problème. Le gouvernement dit que c'est une question urgente et il veut accélérer l'étude du projet de loi pour bannir une catégorie qui représente, comme mon collègue l'a dit, moins de la moitié de 1 p. 100 du marché canadien total du tabac, tout en offrant une exemption pour les cigarettes au menthol, qui, pour citer le ministre, sont « marginales » à 2 p. 100.

D'après l'Enquête de surveillance de l'usage du tabac au Canada la plus récente, celle de 2008, la vaste majorité de ces produits sont consommés par des adultes, comme cela a été mentionné précédemment, et leur utilisation par des jeunes diminue. Selon Santé Canada, la contrebande de cigarettes est beaucoup plus importante que celle des cigarillos aromatisés. L'enquête de Statistique Canada montre que la catégorie des produits aromatisés n'amène pas plus de gens à fumer, mais certains consommateurs passent des cigarettes aux cigarillos aromatisés. Une interdiction totale des cigarillos aromatisés mènera à une augmentation de la contrebande du tabac et à un accès plus facile à ces produits pour les mineurs.

La contrebande illégale de tabac présentement offre des sacs ziplock de 200 unités vendus à 20 $. C'est un prix abordable. Si le projet de loi est adopté et qu'il y a une interdiction totale des cigarillos aromatisés, nous en retrouverons dans les cours d'école partout au Canada. De plus, il y a maintenant des tableaux d'affichage géants dans les réserves autochtones qui font la publicité de ces produits, exemptés de taxe, soit dit en passant.

Nous craignons également que le projet de loi C-32 donne beaucoup de pouvoir au gouverneur en conseil. Les Canadiens doivent se demander pourquoi on veut donner aux fonctionnaires et aux bureaucrates la capacité de changer la loi comme ils le veulent, sans devoir présenter leur intention aux membres dûment élus du Parlement.

En ce qui concerne nos recommandations, nous proposons que la définition de « cigarillos » soit réexaminée afin de permettre la vente des petits cigarillos classiques aux consommateurs canadiens adultes.

Nous recommandons également que le gouvernement fixe un prix de transaction minimum, comme le gouvernement du Québec l'a fait avec succès pour mettre fin à la vente à l'unité de ces produits. À cause du prix de vente plus élevé de ces produits, nous recommandons un amendement au projet de loi qui permettrait la vente des produits aromatisés en paquet de dix ou vingt unités afin que les consommateurs adultes canadiens puissent obtenir le produit qu'ils veulent légalement.

Nous recommandons une interdiction de possession de tabac pour les mineurs. Nous recommandons également que le projet de loi C-32 ne soit pas adopté dans sa version actuelle jusqu'à ce que le comité sénatorial entende la GRC et l'Agence du revenu du Canada, qui ne se sont pas encore exprimées sur le sujet. Les membres de ces organisations sont des experts pour les enjeux beaucoup plus larges dont nous avons discuté, comme la contrebande.

En conclusion, pour les raisons importantes exposées cet après-midi, nous faisons appel à la rigueur intellectuelle des sénateurs, et demandons avec respect que le comité ne recommande pas l'adoption de cette version du projet de loi C- 32.

Richard Brousseau, président, Syndicat international des travailleurs et travailleuses de la boulangerie, confiserie, tabac et meunerie : J'aimerais faire mon exposé en français.

[Français]

Permettez-moi d'abord de remercier le comité de nous accueillir et de nous permettre de venir exprimer nos inquiétudes au sujet du projet de loi C-32 tel qu'actuellement rédigé. Je m'appelle Richard Brousseau, et je suis président du Syndicat international des travailleuses et travailleurs de la boulangerie, confiserie, tabac et meunerie, section locale 261-T.

Je représente les 300 employés de l'usine Rothmans, Bensons & Hedges de Québec. RBH fabrique des produits du tabac à Québec depuis plus de 100 ans, alors que le plus important fabricant de produits du tabac au Canada a transféré toute sa production au Mexique. Pendant sept ans, RBH continue de fabriquer la totalité de ses produits au Canada. Il emploie 750 personnes en tout au Canada, dont 300 dans notre usine de Québec.

Je souhaite mentionner que le syndicat des employés de RBH soutient le projet de loi qui est de réglementer les cigarillos. Ces cigarillos qui sont vendus souvent 1 $. Contrairement aux cigarettes, il n'est pas obligatoire qu'ils soient vendus en paquet de 30 minimum, il n'y a pas de message graphique sur le devant et au dos du paquet pour la mise en garde sur la santé, et la liste des ingrédients utilisés n'est pas publiée.

Je vais prendre une minute pour parler de ce qu'est le tabac de mélange. Vous avez ici des sortes fabriquées au Canada. Ce tabac est une composante de trois tabacs qu'on appelle du Burley oriental et du tabac de Virginie. Il contient des ingrédients qui contrôlent le goût et l'humidité. Ces ingrédients font en sorte que le produit final sente le tabac et non les fruits ou les bonbons. Si jamais vous voulez les sentir, vous êtes libres de le faire.

On a quand même de la production. Vous allez me dire que vous avez entendu que la production de ces produits au Canada est minime. Comme vous le savez sans doute, notre entreprise a été achetée par Philip Morris International l'an dernier pour deux milliards de dollars. Mais il est certain que ce qu'ils voulaient, c'est exporter et développer le marché ici au Canada. Si on ne peut plus faire cela, on ne pourra pas entrer en compétition avec les gens en Amérique latine qui ont des salaires plus bas et beaucoup moins d'avantages que nous.

Parlons de l'achat de Philip Morris. Dans le cadre du processus d'acquisition, Philip Morris a fourni certains engagements d'affaires à Investissement Canada, notamment pour effectuer d'autres investissements de capitaux dans les usines de RBH en vue de fabriquer des cigarettes au Canada et les vendre dans d'autres pays, ainsi que pour introduire au Canada les marques internationales de Philip Morris. Sur la foi de ces engagements, les emplois resteraient à Québec et Investissement Canada a approuvé cette acquisition.

Cette acquisition a été une bonne nouvelle pour les employés de RBH et leur famille. Ces investissements ont déjà commencé pour utiliser la capacité de production excédentaire qu'on pouvait avoir à l'usine de Québec. On a présentement des variantes de Rooftop, de Gauloises, de Gitanes et Carreras. Le tabac que nous utilisons dans les différentes cigarettes de mélange provient de pays comme : les États-Unis, le Brésil, l'Argentine, le Malawi, le Mozambique, la Macédoine, la Grèce et la Turquie. Nous savons que des législateurs de ces pays ont écrit au gouvernement du Canada pour leur faire part de leur grande inquiétude à l'égard du projet de loi, le considérant comme un projet de loi protectionniste.

Nous sommes ici pour vous parler des emplois. Les marques de Philip Morris contiennent des ingrédients que le projet de loi interdit. Par conséquent, cette interdiction sape le plan d'affaires de l'usine de Québec et met en péril plus de 300 emplois.

Nous croyons que la solution est d'interdire les produits du tabac qui produisent une fumée de tabac dégageant principalement un arôme de fruit ou de confiserie. Il s'agit d'une approche mesurée et bien pensée, et nous demandons respectueusement au comité d'envisager cette possibilité. Cette solution a déjà été adoptée aux États-Unis, en Australie et en France. Elle permet d'atteindre l'objectif établi par le gouvernement. Une simple modification réglementaire ou une garantie du gouvernement de ne pas appliquer certaines dispositions de la loi nous semble complètement inacceptable.

Les ministres, les gouvernements et les règlements passent, mais les lois demeurent. Un amendement s'impose. Notre usine et nos emplois en dépendent. À vous de décider si vous voulez jeter 300 familles à la rue ou adopter un amendement qui respecterait la vente légale d'un produit légal dans le respect de nos ententes internationales.

[Traduction]

Le président : Merci d'avoir généralement respecté les limites de temps de parole.

Je vais maintenant donner la parole aux membres du comité. Je vais leur demander de ne poser qu'une ou deux questions et de n'avoir qu'un préambule très court parce qu'il ne reste que 20 minutes avant le prochain groupe de témoins.

Je vais débuter avec une question pour la professeure Steger au sujet de l'OMC et de l'ALENA, son domaine d'expertise. Ma question concerne les cigarettes de mélange américain et leur production par Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International.

La Loi sur le tabac, que le projet de loi C-32 modifierait, parle de production aux fins de vente au Canada. Si on continue la production aux fins d'exportation aux États-Unis, est-ce que cela serait une solution? La Loi sur le tabac permet-elle cette possibilité?

Y aura-t-il une autre approche possible au moyen de l'article 9 du projet de loi C-32, qui propose qu'à l'article 7.1(1) « le gouverneur en conseil peut, par décret, modifier l'annexe par adjonction, modification ou suppression », et cetera?

Le gouverneur en conseil — le ministre et le cabinet — pourrait apporter des changements afin que Rothmans, Benson & Hedges puisse continuer à fabriquer le produit seulement à des fins d'exportation. Pouvez-vous donner votre point de vue sur cette approche? Une exemption serait-elle conforme aux règlements de l'OMC et de l'ALENA?

Mme Steger : En un mot, non. Une exemption pour les produits d'exportation ne respecterait pas les règles de l'OMC. L'Accord sur les obstacles techniques au commerce prévoit que quels que soient les objectifs légitimes d'un gouvernement, les mesures et les règlements qu'il prend ne doivent pas restreindre le commerce plus que nécessaire pour atteindre cet objectif.

Une autre disposition de cet accord prévoit que les règlements techniques doivent être fondés sur des caractéristiques de performance — le goût — plutôt que sur des caractéristiques de conception — les additifs.

Le problème, c'est que la portée de ce projet de loi est beaucoup trop vaste. Le projet de loi contient une liste de plus de 5 000 additifs qui sont des arômes typiques utilisés de façon sûre dans les aliments. L'approche d'autres pays a été de réglementer la saveur de la cigarette. Cette approche respecte les exigences de l'OMC. Ces exigences ne visent pas les répercussions commerciales en tant que telles, donc vous n'avez pas à calculer ces répercussions, mais elles visent les répercussions potentielles. C'est un problème fondamental du projet de loi, mais il est simple à résoudre.

Le président : Il n'y a pas d'aspect discriminatoire concernant le fait que ce soit une entreprise américaine plutôt que canadienne. Les restrictions s'appliquent dans les deux cas, n'est-ce pas?

Mme Steger : C'est exact.

Le président : Est-ce une défense en droit commercial?

Mme Steger : Cela serait une défense si nous parlions de l'article III de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, c'est-à-dire la disposition de non-discrimination. Cependant, dans le cas présent, nous parlons de l'Accord sur les obstacles techniques au commerce, qui s'applique à toutes les normes sur les produits et n'exige pas de discrimination. Les responsables de Rothmans, Benson & Hedges Inc. et Philip Morris International disent que leur entreprise appuie totalement l'objectif légitime mais que la réglementation doit s'ajuster à l'objectif et ne pas trop restreindre le commerce. D'après moi, même une exemption pour exportation violerait l'Accord sur les OTC.

Le sénateur Keon : Ma question s'adresse à Mme Steger et à M. Brousseau. Il y a beaucoup d'inquiétude concernant la fermeture potentielle de l'usine à Québec. Une autre rumeur veut que l'usine à Québec ferme même si le projet de loi n'est pas adopté. Qu'en pensez-vous?

[Français]

M. Brousseau : Non, il n'y a pas de rumeur concernant la fermeture de l'usine. L'usine va bien. On a tout de même un bon volume de production. Évidemment, un tel projet de loi vient mettre en péril les projets de Philip Morris. Cette entreprise était propriétaire de notre compagnie à 40 p. 100. L'an dernier, ils sont devenus propriétaires à 100 p. 100. Cette entreprise détient 58 usines à travers le monde.

Philip Morris voulait utiliser notre usine pour lancer des produits sur le marché en Amérique latine et développer le marché canadien avec les produits existants, fabriqués à l'usine de Québec depuis quatre ou cinq ans. Si ce projet tombe à l'eau, le marché continuera d'exister, mais il deviendra la cible de la contrebande, qui attire les jeunes étant donné que ceux-ci se tournent déjà vers la contrebande pour acheter des produits bon marché.

Philip Morris n'a pas l'intention de fermer l'usine de Québec. Ils n'ont pas payé 2,5 milliards de dollars pour la fermer. Toutefois, s'ils ne peuvent pas réaliser les projets prévus pour l'usine de Québec, qui sait ce qui se passera. L'usine détient présentement deux contrats : un qui doit commencer d'ici deux semaines et un autre destiné à l'Argentine et au Mexique.

Depuis quelque temps, on parlait d'embauches. Si Philip Morris ne peut plus mener ce type d'activité à terme, soit d'exporter et de développer des produits, qui sait ce qui arrivera. Notre usine coûtera plus cher qu'une usine en Amérique latine ou qu'une des 58 autres usines que détient Philip Morris à travers le monde.

[Traduction]

Mme Steger : Je ne suis pas au courant de telles rumeurs. En 2008, lorsque Philip Morris Inernational a acquis Rothmans, l'investissement a été examiné par Industrie Canada en vertu de la Loi sur Investissement Canada. Philip Morris s'est engagé à maintenir les emplois, à élargir ses activités et à amener de nouveaux produits mélangés au Canada. Philip Morris International et Rothmans doivent respecter ces engagements pris en vertu de la Loi sur Investissement Canada.

Ce projet de loi minera ce plan d'affaire et l'accord du gouvernement pour cet investissement donné l'année dernière. Le projet de loi rendra la situation difficile pour Rothmans, et l'entreprise ne pourra pas respecter son engagement pris en 2008, qui a été approuvé par le ministre de l'Industrie.

Le sénateur Segal : J'ai une question pour Mme Steger et une question pour M. Martial. Madame Steger, d'après la vaste expérience que vous avez de ces questions, quels recours utiliseront d'après vous les Américains et les autres qui se sentent brimés par ce projet de loi? Quelles options sont disponibles pour eux? Si vous deviez conseiller le ministre du Commerce international sur les mesures auxquelles on peut s'attendre, que lui diriez-vous?

Mme Steger : Il est difficile de prévoir ce que feront les autres gouvernements. Si un autre gouvernement voulait monter un dossier contre le Canada, il pourrait le faire à l'OMC. Comme vous le savez, un certain nombre de membres du Congrès américain s'opposent à ce projet de loi, le gouvernement grec s'y oppose et d'autres gouvernements le feront peut-être également. Je ne veux pas avancer d'hypothèses sur ce qui pourrait se produire, mais un autre gouvernement pourrait avoir une bonne cause à l'OMC, étant donné le libellé de ce projet de loi.

Le sénateur Segal : Monsieur Martial, quelle que soit notre opinion de l'instrument choisi par les fonctionnaires dans ce projet de loi, et que nous pensions qu'il est adéquat, inadéquat, pertinent ou excessif, j'ai senti dans votre exposé une opinion sur leur motivation.

Voulez-vous nous en dire plus à ce sujet? Suggérez-vous qu'il y ait autre chose que le travail de fonctionnaires qui font de leur mieux pour protéger la population contre les ravages du cancer? Si c'est le cas, pourriez-vous nous en parler pour que nous puissions tous en profiter?

M. Martial : Absolument; je crois que c'est pertinent. J'ai participé à une rencontre en mai avec l'expert de Santé Canada sur le contrôle du tabac, qui prendra sa retraite bientôt, le Dr Murray Kaiserman. Je lui ai dit que j'avais examiné la recherche. J'ai travaillé sous ses ordres à Santé Canada. D'après tout ce que j'ai vu, cette situation ne pose pas problème, surtout chez les jeunes. Il a admis que ce n'est pas parce que des enfants fument ce produit. C'est parce que ce produit paraît bien. Voilà notre problème. C'est une question de style de vie.

J'ai demandé s'il avait des résultats de recherche ou s'il avait entrepris une recherche. Depuis un an maintenant, je demande au gouvernement, surtout à Santé Canada, de faire une recherche sur ce produit. Qui le consomme? En quoi les arômes peuvent-ils influer sur la décision de commencer ou de continuer à fumer? Où peut-on acheter ce produit? Allez savoir, vous allez interdire un produit que les jeunes achètent déjà sur le marché noir. Ni vous ni Santé Canada ne le savez.

M. Kaiserman m'a dit qu'ils n'ont pas fait de recherche et qu'ils n'allaient pas en faire pour deux raisons. Premièrement, le marché est tellement petit que les données ne seraient pas fiables. Deuxièmement, s'ils ne font pas de recherche, ils ne sont pas obligés de divulguer les résultats. À mon sens, cela veut dire que Santé Canada ne veut pas faire de recherche qui prouverait que ce produit n'est pas vraiment un problème.

En tant que sénateur, je pense que je serais insulté que Santé Canada me présente un projet de loi après avoir délibérément évité de consulter les intéressés. Ils ont délibérément évité de faire de la recherche.

Oui, il ne s'agit pas simplement de protéger les enfants. Il ne s'agit pas de protéger les enfants. Ce produit est l'un des produits du tabac les moins consommés par des enfants. C'est ça que vous voulez interdire. Ça n'a aucun sens. Je répète que c'est une loi fondée sur la haine. Vous détestez ces produits parce qu'ils sont aromatisés. Comment osons- nous faire cela?

Pour illustrer mon propos, prenons l'exemple de l'alcool. On retrouve exactement les mêmes arômes dans l'alcool. Cependant, personne ne prétend que le gouvernement conspire avec l'industrie de l'alcool pour cibler les enfants ni que l'industrie de l'alcool utilise ces arômes pour inciter les jeunes à commencer à boire, et cetera.

Le sénateur Ogilvie : J'aimerais obtenir deux éclaircissements. Le premier concerne un chiffre cité par M. Martial et qui par la suite a été confirmé par son collègue. Si j'ai bien compris, ces produits aromatisés représentent la moitié de un pour cent du marché du tabac.

M. Martial : Encore moins.

Le sénateur Ogilvie : Ma deuxième question porte sur les commentaires de Mme Steger. Je veux être sûr que je l'ai bien entendu. Elle a dit que le projet de loi est essentiellement une liste de 5 000 composés qui servent pour la plupart à aromatiser le tabac. Ensuite, elle a dit que si ce projet de loi concernait les arômes, il serait acceptable. Est-ce exact?

Mme Steger : C'est tout à fait cela. Le problème, c'est l'approche adoptée dans ce projet de loi, pas l'objectif. C'est le moyen d'atteindre cet objectif, choisi par Santé Canada, qui est le problème. Le projet de loi interdit les cigarettes contenant l'un des 5 000 additifs et plus qui ont déjà été visés par l'Organisation mondiale de la santé et d'autres. Il s'agit de chocolat, de réglisse et d'un certain nombre d'autres additifs. Certains servent à fabriquer les cigarettes de tabac mélangé, mais ces cigarettes ne goûtent pas la fraise ou le chocolat. Les cigarettes de tabac mélangé n'ont pas un goût aromatisé.

Des lois d'autres pays visent le goût final du produit plutôt que les additifs qu'il contient. Par exemple, la loi française vise le goût du produit. La loi française traite également de la quantité des ingrédients ajoutés. Le problème c'est l'approche, pas ce que le gouvernement essaie de faire.

Le sénateur Ogilvie : Pour bien comprendre, si je regarde la liste des composés qui ont été recensés et que vous avez mentionnés, je m'attendrais à ce que bon nombre d'entre eux donnent leur goût au tabac auquel ils sont ajoutés. Vous parlez en fait des produits qui ne contiennent pas les ingrédients de cette liste. Est-ce exact?

Mme Steger : Le problème, c'est que les cigarettes de tabac mélangé sont du type américain et vendues partout ailleurs dans le monde sauf au Canada et dans les pays du Commonwealth. Elles sont faites à partir de trois sortes de tabac, comme l'a expliqué M. Brousseau. On ajoute des additifs pour obtenir le goût qui les caractérise.

Toutefois, au bout du compte, elles ne goûtent pas le chocolat, les fraises ni d'autres produits que M. Brousseau vous a montrés.

[Français]

Le sénateur Rivard : J'ai un commentaire pour Mme Steger avant de poser une question à M. Brousseau.

Naturellement, la prétention de votre client est qu'on enfreint des règles de l'OMC, du GATT, de libre-échange et tout. Selon nos informations, le ministère de la Santé, entre autres, nous assurait le contraire. C'est donc comme dans la vie de tous les jours, lorsqu'il n'y a pas d'entente on se ramasse devant les tribunaux qui pourront dire qui a tort ou raison.

La question pour M. Brousseau maintenant. Quand j'ai eu le plaisir de rencontrer le président de Rothmans à Québec pendant l'été, je pense que vous étiez présent. La demande visait à ce que le gouvernement apporte un amendement pour permettre l'importation du tabac de type Burley à Québec et qu'on fabrique des cigarettes en vue de les exporter. Est-ce que votre position aujourd'hui va au-delà de cela? Vous voulez également que ces produits soient vendus au Canada ou si vous maintenez la demande de cet été d'importer du tabac Burley, fabriquer des cigarettes et les exporter, que ce soit en Europe ou que ce soit n'importe où, sauf au Canada?

M. Brousseau : On s'est peut-être mal exprimé dans nos demandes.

Il est clair que l'on veut importer et exporter le tabac de type américain, mais on a quand même une petite production à l'usine de Québec. Ce n'est pas beaucoup pour l'instant, mais Philip Morris a l'intention de développer des produits aussi. Parce que les produits qu'on exporte à travers le monde sont faits avec du tabac américain et non pas du tabac de Virginie comme les cigarettes ordinaires que vous voyez ici.

Si la production de ces cigarettes n'est plus permise ici, c'est là notre peur. Nous savons qu'il y a une clientèle, qu'avant elles étaient fabriquées en Europe et maintenant ici chez RBH; mais si elles ne sont plus faites ici, comme il y a une clientèle pour ces produits, on sait que cela se retrouvera sur le marché de la contrebande. Le gouvernement ne percevra alors plus de taxes et on ne connaîtra pas la composition des cigarettes, et cetera. Et si elles sont moins chères, cela peut également encourager les gens à les consommer.

M. Dumulong nous a montré des choses que les gens fument ici parce que le prix n'est pas élevé. Nous pensons que c'est important de garder cette production afin de conserver nos emplois chez nous à l'usine de Québec.

Le sénateur Rivard : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Callbeck : Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Je crois que vous avez dit tous les deux que vous n'avez pas été consultés avant que le gouvernement ne présente ce projet de loi. Parmi les autres témoins, y en a-t- il qui ont été consultés?

Le président : Ils répondent tous non.

Le sénateur Callbeck : Monsieur Brousseau, vous avez parlé d'un contrat du Mexique. Pourquoi ces cigarettes ne sont-elles pas fabriquées au Mexique? La main-d'œuvre est bien meilleur marché.

[Français]

M. Brousseau : C'est une bonne question, à savoir pourquoi ces cigarettes ne sont pas faites au Mexique. Là-bas et partout à travers le monde, les cigarettes sont manufacturées avec ce qu'on appelle ici des « couverts basculants ». Il y en a au Québec, mais vous voyez beaucoup des formats qui sont ce qu'on appelle « à étui tiroir ». Nous avons donc un produit qui n'existe pas au Mexique, en Argentine ou au Honduras, et qu'ils veulent exporter dans ces mêmes pays. Nous avons ici la capacité de le faire, nous avons déjà fait des projets pour eux. Nous avons la technologie pour le faire. En plus, au niveau du seuil de rentabilité, il est plus facile de démarrer quelque chose ici que là-bas. Si cela ne fonctionne pas là-bas, l'investissement dans de nouveaux équipements est plus compliqué pour ces gens.

Nous avons commencé et nous amorcerons un projet en octobre et un autre en janvier. Il y a d'autres contrats qui risquent de suivre dans la prochaine année pour plusieurs usines. Ce ne seront peut-être pas des contrats, on va peut- être les commencer, mais quand même, cela amènera de l'eau au moulin. On parlait d'embauche, alors il faut se préparer parce qu'on a une surcapacité. Il y a des machines qui ne roulent pas à 100 p. 100.

[Traduction]

Le sénateur Callbeck : Ce contrat avec le Mexique est-il nouveau, ou avez-vous déjà conclu de tels contrats auparavant?

M. Brousseau : Non, nous n'avons pas eu de tels contrats auparavant.

[Français]

Nous ne l'avons jamais fait. C'est la première fois. On a déjà mis sur pied un projet pour une autre usine, projet sur lequel nous travaillons encore. C'est un projet qui n'a pas un gros volume, mais présentement, on a 30 ou 40 millions de cigarettes à fabriquer au mois d'octobre. On a un nouveau contrat en 2010 justement pour cela. Il y a une délégation de spécialistes du marketing de toutes ces usines qui sont venus voir ce qu'ils pourraient essayer de faire avec les différents types de machine et le format qu'on peut avoir.

Le sénateur Pépin : On a parlé de la loi australienne qui vise le tabac aromatisé et non pas les cigarettes conventionnelles. Je pense que la loi australienne a été acceptée par les États-Unis et la France. Quelle est la différence entre la loi australienne et le projet de loi C-32?

[Traduction]

Mme Steger : C'est une bonne question. J'ai joint à mon mémoire des copies de la loi australienne et de la loi américaine, laquelle est entrée en vigueur la semaine dernière, de même qu'une copie de la loi française. La loi australienne est en vigueur depuis 2006. Les États de la Nouvelle-Galles du Sud et de Tasmanie ont adopté des lois semblables en Australie.

La grande différence entre ces approches et celles du projet de loi C-32, c'est qu'elles ciblent la saveur du produit. Les produits du tabac, y compris les cigarettes, qui ont des caractéristiques fruitées, sucrées ou qui rappellent les friandises sont interdits. Il s'agit de la description donnée dans la loi australienne. Au bout du compte, le goût de ces produits est fruité, sucré, ou rappelle les friandises. Comme je l'ai dit, à mon avis, une telle description dans le projet de loi est entièrement conforme aux attentes de l'OMC et à l'ALENA. Toutefois, le Canada a décidé d'ajouter en annexe au projet de loi C-32 une liste de plus de 5 000 additifs provenant de l'Organisation mondiale de la santé. Les cigarettes qui contiennent l'un ou l'autre de ces additifs sont interdites.

Cette question a été abordée par un comité de la Chambre des communes. Le projet de loi a été rédigé tellement rapidement que lorsqu'il a été présenté à la Chambre des communes, les députés ont tout de suite compris que le projet de loi interdisait également les cigarettes faites de tabac jaune, c'est-à-dire les cigarettes régulières qui représentent 98 p. 100 du marché canadien. Cette interdiction est associée au fait que les cigarettes faites de tabac jaune contiennent également des additifs. Cette question a été soulevée par un comité de la Chambre des communes. Le projet de loi aurait interdit toutes les cigarettes. Je ne crois pas que l'intention au début était d'interdire les cigarettes de tabac mélangé, parce que ces cigarettes et les cigarettes fabriquées de tabac jaune goûtent le tabac, et non pas les friandises ou un fruit. Le gouvernement n'a pas fait ses devoirs, n'a présenté aucune étude et n'a pas consulté les intervenants avant de présenter le projet de loi. Il a par conséquent commis une erreur. L'erreur est facile à corriger, en adoptant l'approche prise par l'Australie, la France, les États-Unis et les autres États australiens : cibler la saveur au lieu de dresser la liste de tous les additifs qui sont contenus dans les cigarettes et le papier.

Le président : C'est tout le temps que nous avions pour notre premier groupe de témoins. Je vous remercie de vos exposés et des réponses à nos questions.

Nous allons maintenant entendre le deuxième groupe de témoins. Je cède la parole à François Damphousse; allez-y.

[Français]

François Damphousse, directeur, bureau du Québec, l'Association pour les droits des non-fumeurs : Monsieur le président, nous sommes heureux de cette occasion de faire entendre notre point de vue sur le projet de loi. Nous appuyons le projet de loi sans aucun amendement.

Tout d'abord, j'aimerais corriger la perception de plusieurs sur le projet de loi et surtout son objectif. Le projet de loi ne vise pas uniquement à interdire les saveurs, par exemple, de fruits ou de bonbons dans les cigarettes. Son objectif est beaucoup plus large. Le projet de loi restreint la commercialisation du tabac afin de mieux protéger les jeunes.

Deuxièmement, à notre avis, il est inévitable que Rothmans, Bensons & Hedges fermera ses portes. Que le projet de loi soit adopté ou non, il est clair que cette fermeture aura lieu.

Depuis 1993, je travaille dans la lutte au tabagisme. On a eu à débattre la Loi sur le tabac du gouvernement du Québec en 1998 devant la Commission des affaires sociales. Impérial Tobacco avait témoigné et menacé le gouvernement de fermer ses usines si on ne retirait pas le pouvoir du gouvernement de réglementer le produit et les emballages.

Le Dr Jean Rochon, à l'époque, a acquiescé et a éliminé ces deux mesures dans le projet de loi. Quelques années plus tard, en 2003, Imperial Tobacco a fermé son usine de Saint-Henri, à Montréal, et deux autres usines en Ontario. L'entreprise a déménagé sa production au Mexique.

Vous trouverez un document en annexe à mon rapport à l'effet que des experts en économie avaient prédis, depuis 1993, la fermeture de ces usines.

La seule raison pour laquelle ces entreprises sont encore ici, c'est pour exercer du chantage dans le but d'affaiblir des mesures efficaces de contrôle du tabac. Je vous demande, s'il vous plaît, de ne pas tomber dans ce piège.

Les amendements proposés nous préoccupent. On parle surtout d'odeur caractéristique de saveurs de tabac. Cette proposition est, à notre avis, inacceptable. On peut voir les effets d'une loi ou d'un amendement similaire en Australie et aux États-Unis. Tout d'abord, j'aimerais savoir quelle méthodologie vous comptez utiliser pour déterminer ce qui est une odeur caractéristique du tabac. Il n'existe aucun moyen de faire une telle détermination. Il sera très facile pour l'industrie du tabac de contester devant les tribunaux le seuil de perception des odeurs de produits du tabac comportant des additifs.

Il faut absolument que l'on puisse contrôler et interdire l'usage des additifs dont il est question dans le projet de loi C-32. Cette question est pour nous assez importante.

On oublie souvent un autre point. Les additifs et les saveurs ne sont pas uniquement destinés à aromatiser le tabac. Depuis des années, nous avons accès aux documents internes de l'industrie du tabac, surtout compte tenu des poursuites intentées aux États-Unis. Ces documents ont révélé très clairement que, pour l'industrie du tabac, les additifs sont également utilisés pour réduire l'effet de nausées lorsqu'on commence à fumer. Cet aspect est très important quand on cherche à attirer de nouveaux fumeurs. Les additifs sont également utiles pour renforcer l'effet de dépendance causé par la nicotine. D'ailleurs, plusieurs recherches viennent appuyer ce point.

Il ne faut pas donner à l'industrie la possibilité de trouver d'autres façons d'utiliser les additifs mentionnés au projet de loi C-32 pour continuer à garder une mainmise sur la population et surtout sur les jeunes. Un des arguments avancés souvent par l'industrie est le fait qu'elle veut offrir aux consommateurs adultes des produits sur le marché.

La Cour suprême du Canada a statué en 2007, car l'industrie du tabac contestait la loi fédérale qui restreint la publicité liée aux produits de tabac. L'industrie faisait valoir l'argument que son marketing ciblait les adultes dans le but de leur faire changer de marque. Cet argument a été rejeté par la Cour suprême du Canada.

L'industrie du tabac cherche à rassurer les fumeurs actuels pour éviter que ceux-ci quittent le marché. On vise les jeunes âgés de moins de 18 ans. D'ailleurs, 80 p. 100 des usagers commencent à fumer avant l'âge de 18 ans.

De penser que seule la publicité est utilisée comme stratégie pour recruter les jeunes fumeurs est une perception bien limitée de la situation. Bien d'autres moyens sont utilisés par l'industrie du tabac pour s'assurer qu'il soit facile pour les gens de commencer à fumer et faire en sorte qu'on développe une dépendance le plus rapidement possible.

[Traduction]

Le président : Nous allons maintenant passer à Mme Doucas, de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac.

[Français]

Flory Doucas, codirectrice, Coalition québécoise pour le contrôle du tabac : La coalition a été mise sur pied suite à la décision gouvernementale d'abaisser les taxes sur le tabac pour faire face à la crise de la contrebande dans les années 90. Nous savons aujourd'hui que cette contrebande a été orchestrée de toutes pièces par les fabricants de cigarettes, dont Rothmans.

Suite à cette défaite importante pour la santé publique, les groupes de santé et la société civile du Québec se sont ralliés à la coalition en se promettant de ne plus jamais laisser l'industrie et ses partenaires proposer des solutions aux problèmes liés au tabac.

La mise en marché des cigarillos aromatisés a été désastreuse pour le Québec. Un produit ressemblant aux cigarettes a réussi, en l'espace de quelques années, à renverser la tendance à la baisse, au cours des dix dernières années, de l'usage du tabagisme chez les jeunes. Philip Morris, la même entité qui vous a offert le témoignage de Mme Steger un peu plus tôt, a, par le passé, aussi menacé d'entamer des poursuites en vertu de l'ALENA lorsque les parlementaires canadiens songeaient à uniformiser l'apparence des paquets de cigarettes, et ce, en dépit des avis légaux lui indiquant qu'il n'y avait pas matière à une telle dispute. Ces documents ont tous été rendus publics.

Philip Morris tire avantage de la complexité et de la méconnaissance des ententes du GATT et de l'ALENA pour faire des menaces sans fond. Les produits du tabac qui sont populaires auprès des jeunes et qui contiennent des additifs sont différents des produits du tabac qui ne contiennent pas d'additifs. Les produits avec des additifs aromatisants sont beaucoup plus susceptibles de plaire aux fumeurs débutants et donc de promouvoir l'initiation au tabagisme que des produits sans additifs. Les gouvernements n'ont pas à accorder un traitement similaire à des produits qui ne le sont pas.

L'aromatisation joue aussi sur les perceptions lorsqu'un produit est consommé. Pendant longtemps, les additifs n'avaient pas pour effet de donner une saveur de fruits ou de friandises. Les fabricants s'employaient simplement à ajouter des ingrédients au tabac pour lui donner un goût ou une odeur agréable, comme on le fait pour le vin. Un vin qui a de légères notes d'abricot ou de mures n'est pas nécessairement un vin à l'abricot ou aux mures. Ces notes sont là pour plaire, pour encourager la vente du produit.

Une interdiction des saveurs au Canada serait très dangereuse pour la multinationale RBH, puisque cela créerait un précédent mondial et que Philip Morris utilise plus d'une centaine de substances aromatisantes dans ses produits. Les produits destinés à d'autres marchés ou aux boutiques hors taxes ne devraient pas faire l'objet de traitement spécial. Dans la mesure où le Canada juge essentiel d'interdire les produits du tabac aromatisés et qu'il contribue à l'initiation du tabagisme aux jeunes, il serait tout à fait amoral de permettre aux compagnies canadiennes d'exporter ces mêmes produits vers d'autres pays où ils serviront tout aussi efficacement à attirer des jeunes vers une dépendance mortelle.

Le Canada, comme 160 pays, a ratifié le traité de l'Organisation mondiale de la santé pour lutter contre le tabagisme. Le traité implore ses signataires d'aller au-delà des obligations, de réagir rapidement et efficacement aux pratiques de l'industrie et d'être solidaires aux efforts des autres nations.

Par ailleurs, la convention-cadre implore les pays plus nantis de financer et d'appuyer les démarches antitabac des pays émergents, soit les pays du Sud. Il est donc extrêmement déplorable d'apprendre, et nous citons un article publié hier, que Philip Morris a acheté Rothmans en raison de la capacité de l'usine à produire des produits pour l'Amérique du Sud.

Les représentants des boutiques hors taxes et de l'industrie du détail font valoir l'argument que les cigarettes à mélange américain ne visent pas les jeunes, que les cigarillos aux fraises et les additifs sucrés de certaines marques américaines ou européennes sont difficilement comparables. « Apples and oranges », disait la porte-parole du Frontier Duty Free Association. Or, les recherches indépendantes révisées par des paires, publiées dans les revues scientifiques abondent d'exemples prouvant le contraire. Entre autres, deux chercheurs analysant les changements apportés aux cigarettes Camel aux États-Unis entre 1983 et 1993 concluent en disant ce qui suit.

[Traduction]

Les changements aux produits qui rendent les cigarettes plus agréables au goût, plus faciles à fumer ou qui créent une plus grande dépendance sont susceptibles d'encourager davantage de gens à commencer à fumer.

Le président : Pouvez-vous terminer, s'il vous plaît? Les cinq minutes sont écoulées.

[Français]

Mme Doucas : Selon le témoignage des représentants des boutiques hors taxe, les ventes représentent 1,4 p. 100; c'est similaire pour les aéroports. Tout comme c'est le cas pour le virus de la grippe H1N1, les intérêts de santé au niveau de la lutte au tabagisme doivent avoir le pas sur ceux du tourisme.

Au niveau des dépanneurs, quoi dire? Ces gens n'ont eu aucune hésitation à vendre ces cigarillos et ces mélanges aromatisés à la fraise et au chocolat. Même si on les retire aujourd'hui du marché, ces jeunes et ces adultes restent dépendants aux produits et auront à retourner au dépanneur s'acheter des cigarettes. Rappelons que, sur 10 produits consommés ou dix cigarettes consommées, sept proviennent des manufacturiers légaux.

Le président : Merci beaucoup.

[Traduction]

Cynthia Callard, directrice exécutive, Médecins pour un Canada sans fumée : Si on se fie à ce qu'ont dit les témoins plus tôt, on aurait l'impression que personne n'est favorable à ce projet de loi. Toutefois, j'ai rarement vu un projet de loi obtenir autant de soutien que le projet de loi C-32. Le premier ministre et la ministre de la Santé lui ont réservé un traitement prioritaire après les dernières élections. Deux provinces ont adopté des projets de loi semblables. Le NPD, les Libéraux et les Conservateurs ont présenté des projets de loi d'initiative parlementaire. Ce projet de loi constitue une mesure populaire partout au Canada, et avec raison.

Je ne sais pas d'où viennent les chiffres que vous avez fournis plus tôt aujourd'hui. Vous pouvez obtenir la bande de données de l'Enquête de surveillance de l'usage du tabac au Canada et faire votre propre analyse. C'est ce que nous avons fait et nous avons découvert des chiffres alarmants. Il n'est pas vrai que 6 p. 100 des enfants utilisent ces produits. Santé Canada vous a dit que 25 p. 100 des jeunes de 15 à 17 ans les utilisent. Le nombre est plus élevé chez les 17 à 19 ans, soit les jeunes du secondaire. Parmi eux, 31 p. 100, soit presque un sur trois, ont utilisé ces produits. De ces 680 000 jeunes, 200 000 n'ont jamais essayé la cigarette.

Il est faux que les gens passent de la cigarette au cigarillo. Nous devons accepter que les cigarillos constituent une drogue d'introduction. Les produits de tabac aromatisés sont en fait une drogue d'introduction à l'usage régulier du tabac, et c'est pourquoi nous sommes préoccupés.

Compte tenu du nombre important de personnes qui utilisent ces produits, ceux-ci devraient être interdits. Le Canada n'est pas le seul pays à s'occuper de ces problèmes; d'autres se penchent également sur la question. Comme le Canada, l'Australie est un État fédéral et, comme le Canada, l'Australie partage la compétence sur le tabac avec les États. L'Australie va de l'avant. Trois États ont adopté des lois. Le projet de loi du prochain État qui compte adopter une loi comporte des mesures beaucoup plus vastes que celles comprises dans le projet de loi C-32. Le projet de loi resserre la définition de saveurs, mais propose l'interdiction de tous les produits dont l'emballage pourrait encourager les jeunes à fumer ou qui font l'objet d'une publicité qui incite les jeunes à fumer. Leur projet de loi utilise une approche réglementaire différente, qui prévoit des pouvoirs considérables qui ne seraient pas facilement acceptés par notre Parlement.

Pour la première fois, les États-Unis ont adopté une nouvelle mesure législative concernant la Loi sur les aliments et drogues. Mercredi dernier, le New York Times a publié un éditorial sur le projet de loi. À la une, on disait qu'il s'agissait d'une interdiction de la cigarette avec une échappatoire, en faisant référence aux saveurs. Deux semaines avant cela, le Wall Street Journal disait que la nouvelle loi était pleine d'échappatoires et de faveurs spéciales. Philip Morris a été largement consulté, et aurait influencé les rédacteurs de la loi de la FDA. On n'a donc pas à se demander pourquoi il propose cette approche comme option.

Je ne suis pas médecin, ni avocat spécialisé en droit commercial. Toutefois, en travaillant dans le domaine, j'ai beaucoup appris en matière de droit commercial, parce que le commerce est toujours utilisé comme objection. Ceux qui ont des objections ne veulent pas parler de santé, mais plutôt d'ententes commerciales et d'emplois. Le débat finit toujours par être orienté sur les emplois.

En écoutant les gens parler ici aujourd'hui, on aurait l'impression que ce projet de loi interdisait les cigarettes américaines. Ce projet de loi n'interdit pas les cigarettes mélangées américaines. Comme Santé Canada a tenté de l'expliquer la semaine dernière, les cigarettes mélangées américaines sont déjà sur le marché et ne contiennent pas de ces additifs.

J'ai inclus dans la trousse que nous vous avons envoyée des articles de presse parus en 1989. En 1989, Santé Canada avait dit aux compagnies de tabac qu'elles devaient lui indiquer ce qui était contenu dans leurs cigarettes. Les Américains ont dit, oh mon Dieu, si on vous le dit, vous allez transmettre l'information à tout le monde et nos secrets seront connus.

Les deux compagnies américaines qui étaient en affaire à l'époque, R.J. Reynolds et Philip Morris, avaient des approches différentes. R.J. Reynolds a décidé de retirer les additifs de ses cigarettes mélangées américaines vendues au Canada, et Philip Morris a décidé de retirer ses cigarettes du marché. J'ai ajouté à la trousse des coupures de presse à ce sujet.

R.J. Reynolds, qui est maintenant Japan Tobacco International, ou JTI, simplement pour compliquer davantage le récit, a dit aux journalistes à l'époque qu'il s'agissait d'une recette complètement différente, que le goût était légèrement différent, mais que selon leur recherche, les consommateurs n'avaient pas vu la différence.

Les compagnies ont déjà démontré qu'en réaction à des lois, elles peuvent reformuler leurs cigarettes. Le projet de loi n'est pas une interdiction de facto. L'entente sur les obstacles techniques au commerce n'entre pas en jeu. En fait, je dirais que si vous exemptez les cigarettes mélangées américaines pour un motif invoqué dans la loi mais pas pour les autres, vous créeriez de la discrimination commerciale, parce que ces cigarettes sont des produits semblables. Cela reviendrait à dire qu'une bière lager doit afficher un avertissement de santé, mais pas les bières ale, ou que les automobiles de l'Inde n'ont pas besoin d'avoir des sacs gonflants parce qu'elles sont vendues sans coussin gonflable en Inde, et cette restriction serait discriminatoire. Nous adoptons des lois en matière de santé et de sécurité qui doivent s'appliquer à tous les produits.

Ce serait ironique si nous adoptions ce projet de loi pour mettre fin à des échappatoires et que nous aboutissions avec des produits comme ceux-ci sur le marché. Ce serait ironique et absurde d'inclure des échappatoires qui seront exploitées.

Mon collègue dit qu'il y a toujours un bouclier humain. Les entreprises de tabac ne sont pas directement représentées aujourd'hui. Nous n'avons personne ici de la gestion de Philip Morris, de Rothmans ou de Benson & Hedges. Ils ne sont pas placés dans une position où ils doivent répondre directement à vos questions sur leurs plans d'affaires. Il y a un bouclier humain de travailleurs à qui on a dit que soudainement leurs emplois étaient menacés.

Je crois que les emplois dans le domaine du tabac constituent une menace. Ces emplois n'auraient d'ailleurs jamais dû exister. Nous avons besoin d'une stratégie, mais je sais que l'intention du Parlement n'est pas d'encourager les gens à continuer de fumer afin de garder des emplois.

[Français]

Rob Cunningham, analyste principal des politiques, Société canadienne du cancer : Monsieur le président, au nom de la Société canadienne du cancer, je vous remercie de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.

[Traduction]

Vous avez reçu notre mémoire et je vais y faire référence dans mon exposé. Nous recommandons respectueusement au comité d'adopter le projet de loi sans amendement. Le projet de loi contient une disposition importante qui interdit la publicité du tabac dans les journaux et les revues. Nous avons présenté à la greffière des documents que vous pourrez examiner et qui appuient cette partie du projet de loi. Ce projet de loi rapprochera le Canada de la norme internationale en ce qui a trait à la publicité du tabac, et nous appuyons ardemment cette approche.

Pour ce qui est des saveurs, nous sommes d'accord avec Santé Canada, qui dans son témoignage à votre dernière séance a dit que l'amendement proposé par le sénateur Rivard créerait une échappatoire. J'ai étudié la loi australienne et la loi américaine, et nous pouvons en tirer des leçons parce qu'au bout du compte, elles étaient inadéquates.

À l'onglet 17 du cahier fourni, j'ai inclus un reportage de l'Australie publié au cours du mois, et dans lequel le chercheur Bill King indique que les cigarettes en Australie contiennent du sucre, du cacao et de la réglisse. Nous n'en voulons pas. Nous ne voulons pas une combinaison de saveurs pour améliorer le goût des cigarettes et les rendre plus faciles à fumer, même si les cigarettes n'ont pas comme goût prépondérant celui du chocolat. Nous ne voulons pas créer d'échappatoire que les compagnies de tabac pourront exploiter, parce que nous savons qu'elles ont l'habitude d'exploiter les échappatoires. Leurs avocats feront valoir de façon déterminée que même si la saveur n'est pas forte, il ne s'agit pas d'une saveur qui caractérise le produit, et qu'ainsi elles ont le droit de l'ajouter.

Certaines des lois des États australiens permettent même l'ajout d'alcool comme le rhum, d'épices comme la cannelle ou d'herbes comme la menthe. L'industrie du tabac pourrait avoir une autre idée, et nous ne voudrions pas qu'il y ait une échappatoire pour leur permettre de s'en servir.

À votre dernière séance, on vous a parlé des cigarettes Winston et Camel comme exemple de cigarettes mélangées américaines. Aux onglets 6 et 7 de notre cahier, figurent des rapports sur les ingrédients ajoutés dans les cigarettes Winston et Camel soumis au ministère des services de santé de la Colombie-Britannique. Ces cigarettes sont des cigarettes mélangées américaines sans aucune des saveurs qui ne seraient pas interdites dans ce projet de loi. Ces rapports démontrent comment ces cigarettes mélangées américaines peuvent être vendues et sont vendues au Canada sans saveur. Le mélange peut être reformulé pour le marché canadien un peu comme les compagnies étrangères ont des emballages avec des avertissements de santé bilingues, photos à l'appui, juste pour les Canadiens.

On a parlé des magasins hors taxe et du fait que 2 millions de dollars sur 139 millions représentaient 1,4 p. 100. Ce montant est-il important dans le secteur du hors taxe dans l'ensemble, surtout lorsqu'une proportion de ces cigarettes peuvent être reformulées, qu'elles ont peut-être déjà été formulées sans aucune des saveurs interdites dans ce projet de loi?

Il est intéressant de constater que Statistique Canada et les données commerciales américaines pour 2007-2008 rapportent que peu, voire aucun tabac Burley n'ait été exporté des États-Unis vers le Canada. Dans la mesure où le tabac Burley utilisé au Canada vient surtout d'autres pays.

D'où vient cet intérêt commercial pour la ceinture de tabac américaine? Je propose respectueusement que le tout a été fabriqué par Phillip Morris à titre d'effort politique pour s'opposer à ce projet de loi, et les données figurent aux onglets 8 et 9 de notre cahier.

Pour ce qui est de la question du commerce international, je remarque que le ministère de la Justice a témoigné relativement à ce projet de loi et que selon le ministère, le projet de loi est conforme aux ententes commerciales. Nous avons des normes pour toutes sortes de produits — réfrigérateurs, jouets pour enfant, lait et automobiles. D'autres pays et leurs entreprises peuvent exporter au Canada; ils n'ont qu'à respecter les normes canadiennes. Ce projet de loi tel que rédigé est nécessaire. Il ne va pas plus loin qu'il ne le faut. Nous pouvons tirer des leçons de l'expérience des autres pays. Il n'existe aucun traité ou droit légal quant à l'ajout de saveurs à un produit poison qui crée une dépendance pour améliorer son goût. Les recommandations du ministre de la Santé au Parlement nous plaisent.

Phil Jansson, animateur, Coalition jeunesse de l'Est de l'Ontario : Aujourd'hui je représente les jeunes de tout l'Est ontarien qui, depuis un an, font campagne pour sensibiliser nos pairs et les législateurs de notre nation aux dangers du tabac aromatisé et ses répercussions sur le taux de fumeurs chez les jeunes au Canada. Les jeunes se prononcent contre l'industrie du tabac pour mettre fin à ce marketing trompeur, et c'est ce que nous faisons depuis des années.

Au cours des derniers mois comme l'a dit le sénateur Keon à la séance précédente, nous avons recueilli plus de 10 000 cartes postales signées à l'appui de l'interdiction des additifs de saveur au tabac, dont 7 000 ont déjà été présentés au gouvernement fédéral. Je vais maintenant vous montrer le reste des cartes postales signées, et la greffière a deux autres paquets de cette taille à l'appui de ce projet de loi. De voir ce projet de loi sur le point d'être concrétisé est phénoménal, et en dit long sur le pouvoir et la détermination des jeunes partout au Canada.

Au nom des jeunes Canadiens, je félicite notre gouvernement actuel et la ministre Aglukkaq d'avoir proposé ce projet de loi en Chambre en juin dernier. Je crois que le projet de loi C-32, sous sa forme actuelle, réduira de façon considérable le nombre de jeunes pris dans l'accoutumance mortelle du tabac. Ce projet de loi empêchera l'industrie du tabac de commercialiser ses produits au groupe le plus vulnérable de la société, soit les jeunes.

Certains ne s'en rendent peut-être pas compte, mais le tabac est l'un des seuls produits qui tue lorsqu'utilisé comme il faut. La moitié des consommateurs de tabac en mourront un jour ou l'autre. Le recours aux saveurs sous toutes ses formes est une façon facile pour les grandes compagnies de tabac d'accoutumer de nouvelles victimes, jeunes et moins jeunes. Comme vous le savez peut-être, dans de trop nombreux cas, les jeunes commencent en consommant du tabac aromatisé sous forme de cigarillos et autres lors de fêtes et de diverses activités sociales. Le tabac aromatisé, selon mon expérience, est l'un des produits du tabac les plus populaires lors de fêtes. Il est très facile de commencer en prenant une Prime Time ou un Colt d'un ami. Leur caractère attrayant et leur saveur donnent l'impression qu'il ne s'agit pas du tout de tabac. Le tabac aromatisé, malgré son attrait tropical et fruité n'est pas meilleur pour la santé ni moins accoutumant que toute autre forme de tabac. Le tabac aromatisé est une drogue d'introduction à toute une vie d'accoutumance.

En 2003, dans le cadre d'une étude menée dans 50 écoles secondaires d'Ottawa, on a demandé aux jeunes qui se considéraient comme fumeurs pourquoi ils fumaient. L'une des deux raisons les plus populaires était les activités sociales et les fêtes. En 2008, l'Enquête de surveillance de l'usage du tabac au Canada signalait que les cigarillos étaient utilisés par une proportion alarmante de jeunes. Parmi ceux âgés de 15 à 19 ans, 9 p. 100 fumaient le cigarillo, et 31 p. 100 l'avaient essayé. Les taux chez les jeunes de 20-24 ans étaient pires, avec 12 p. 100 de fumeurs et 48 p. 100 qui l'avaient essayé. De plus, les personnes âgées de 20 à 24 ans sont encore considérées comme des jeunes.

D'autres études ont prouvé qu'une seule cigarette peut commencer une accoutumance mortelle, et que 80 à 90 p. 100 des fumeurs commencent à fumer avant l'âge de 18 ans, et c'est un point important.

Nous devons mettre fin aux agissements des grandes compagnies de tabac avant qu'elles n'attirent davantage de consommateurs à perpétuité, et nous pouvons y arriver avec ce projet de loi. Le projet de loi C-32 constitue une étape importante dans la prévention de la consommation du tabac.

En 1989, il a été demandé aux compagnies de tabac de fournir une liste des additifs dans les cigarettes. En 1993, l'âge légal pour acheter des cigarettes est passé de 16 ans à 19 ans. En 2000, Santé Canada a été le premier à présenter des avertissements de santé graphique sur les emballages de cigarettes. En 2001, le ministre de la Santé à l'époque, Allan Rock, a proposé une loi pour empêcher les cigarettes d'être commercialisées sous le nom « légères » ou « douces ». Il a noté que les compagnies de tabac trompaient le public depuis que ces termes avaient été introduits à la fin des années 70. Actuellement, des interdictions d'étalages sont adoptées dans plusieurs provinces, ce qui garde les produits du tabac et leur publicité mielleuse hors de vue.

Le projet de loi dont vous êtes saisis aujourd'hui constitue la prochaine étape importante dans la prévention de la consommation du tabac et la protection des jeunes contre cette industrie mortelle.

Dans sa version actuelle, le projet de loi C-32 est essentiel pour que les jeunes échappent à cette toxicomanie mortelle. Je vous exhorte à donner votre appui à ce projet de loi sans le modifier et à exclure le tabac américain. Tout amendement à ce projet de loi nuira à son objet initial. Comme l'a récemment annoncé la ministre fédérale de la santé, Leona Aglukkaq, ce genre de tabac ne représente qu'une part infime du volume vendu au Canada, soit 0,5 p. 100. Si l'on peut interdire le tabac américain mélangé et aromatisé, c'est un produit de moins sur le marché pour faire d'un jeune un accro, ou pour maintenir dans sa dépendance un fumeur, et un produit de moins qui pourrait faire mourir la mère, l'oncle ou le grand-père de quelqu'un. Et au bout du compte, pour les compagnies de tabac, c'est une possibilité de moins dont elles peuvent user et abuser. Les tactiques de commercialisation trompeuses de l'industrie du tabac doivent être stoppées aujourd'hui et vous, honorables sénateurs, avez le pouvoir de le faire.

Je suis convaincu que nous tous, autour de cette table, tenons à la santé et au bien-être des Canadiens de tous âges. Je vous exhorte, vous qui êtes législateurs, à appuyer ce projet de loi pour protéger l'avenir du Canada, mes pairs et notre jeunesse. Votre décision aura un effet sur la santé et le bien-être des Canadiens pendant de nombreuses années.

Le président : Merci beaucoup.

Je vais poser d'abord quelques questions. La première s'adresse au dernier intervenant, M. Jansson. Beaucoup de témoins nous ont parlé de la contrebande. Ce projet de loi ne porte pas sur ce problème. Dites-nous ce que vous avez constaté au sujet de la contrebande chez les jeunes et l'effet que pourrait avoir sur ce problème le projet de loi C-32. Est-ce que davantage de cigarillos colorés et aromatisés se retrouveront sur le marché noir? Qu'en pensez-vous?

M. Jansson : Je reconnais que la contrebande est un problème au Canada. Je sais que c'est un problème à l'école secondaire. Mais ce ne sont pas les jeunes qui lancent les activités de contrebande. Le tabac aromatisé est un problème. Je ne pense pas que les jeunes passeront au tabac de contrebande. Pour commencer, il faut vendre des produits plus faciles à fumer, soit ceux qu'on trouve sur le marché actuellement.

Le président : Je vais poser une question aux autres témoins, qui tous peuvent répondre, puis je reviendrai à ce qui justifie le traitement distinct du tabac mélangé américain, par rapport aux cigarettes canadiennes. Nous nous entendons tous, les deux sont mauvais pour la santé, mais qu'est-ce qui justifie un traitement distinct pour l'un et pour l'autre?

Monsieur Brousseau, le représentant du syndicat, a dit que l'odeur est la même, c'est une odeur de tabac. Le produit contient ces additifs, mais ce n'est qu'une partie infime du produit. Le produit reste le même. Pourtant, l'industrie prétend que ces additifs sont nécessaires en raison de l'amertume du tabac mélangé américain.

On pourrait leur demander de changer la recette. Je pense que c'est ce que disait Mme Callard et en fait, l'une des entreprises a apporté ce changement. Mais puisque le tabac mélangé américain n'occupe que 1 p. 100 du marché, ce n'est pas le genre de changement qui serait fait pour le marché canadien.

On en revient à ce qui se passe à cette usine québécoise, à ces 300 emplois et à la valeur d'exportation du produit. L'usine importe du tabac Burley, le conditionne puis l'exporte aux États-Unis ou ailleurs.

En quoi serait-il juste d'interdire ces cigarettes de tabac mélangé américain, préparées avec ce procédé particulier, comme vous le demandez?

Mme Callard : Peut-être n'avons-nous pas été clairs : nous voulons que toutes les cigarettes soient traitées de la même façon, et nous pensons que ce traitement uniforme est conforme à ce qu'on fait habituellement dans la réglementation sur la santé et en droit commercial. Il est vrai qu'il faudra reformuler davantage de cigarettes au tabac mélangé américain que de cigarettes au tabac de Virginie.

Nous ne voulons pas d'une loi qui crée des règles pour des cigarettes au tabac mélangé américain et d'autres règles pour les cigarettes au tabac de Virginie. Si vous créez une loi pour les cigarettes au tabac mélangé américaines, des compagnies européennes de tabac mélangé ou quelqu'un d'autre estimeront alors qu'il y a discrimination et invoqueront la possibilité de pouvoir se servir aussi de cacao, ces produits étant semblables. Il y aura ensuite une procédure d'arbitrage, on revendiquera l'exception accordée aux cigarettes américaines de toutes sortes, si cette exemption est accordée.

M. Damphousse : J'ai aussi mentionné plus tôt l'argument selon lequel les compagnies de tabac se démènent pour pouvoir garder ces additifs dans leurs produits. Ces additifs ne servent pas qu'à aromatiser la fumée du tabac. Si on regarde le document interne du secteur du tabac, on comprend que ces entreprises ont une vaste connaissance de tout ce qu'elles peuvent faire avec leurs cigarettes. Si vous leur ouvrez grande la porte en leur laissant faire des recherches sur tous ces additifs, elles en profiteront. Si un additif permet de réduire les nausées qu'on ressent quand on commence à fumer, ce sera bon pour encourager les enfants à devenir fumeurs. Je ne sais pas si certains d'entre vous ont commencé à fumer quand vous étiez enfants. Au début, la cigarette donne la nausée. Les fabricants de cigarettes veulent réduire cet effet pour mieux vous accrocher.

Ainsi, le sucre peut sembler inoffensif. Quand on le mange, il l'est, mais quand on le brûle, c'est une tout autre chose. La combustion d'une matière organique comme le sucre libère d'autres composées dont l'acétaldéhyde. Combiné à la nicotine, l'acétaldéhyde en augmente l'absorption. Il est inacceptable de laisser l'industrie du tabac trouver moyen d'augmenter l'absorption de nicotine, surtout quand elle cherche à inciter les enfants à fumer. C'est intolérable il ne faut pas laisser à l'industrie la possibilité de le faire, pour quelque type de tabac que ce soit.

M. Cunningham : Ce n'est peut-être qu'un pour cent maintenant, mais nous ne voulons pas que ce nombre augmente. Il est troublant d'entendre les syndiqués de Philip Morris annoncer que l'entreprise veut augmenter les produits aromatisés au Canada. Nous ne voulons pas. Il y a 10 ans, les cigarillos aromatisés étaient un problème dont on ne parlait pas au Canada. Mais voyez comme ce marché a grossi. Les compagnies de tabac savent comment exploiter la situation. Nous pensons qu'il ne faut pas leur en laisser la possibilité.

Le sénateur Keon : L'Association médicale canadienne n'a pu venir aujourd'hui et m'a demandé de présenter une demande au comité, pour que nous appuyions ce projet de loi sans amendement. Je voudrais que ce renseignement soit intégré au compte rendu.

Mes questions s'adressent à M. Damphousse et à Mme Callard. Ce qu'on entend principalement, au sujet de ce projet de loi, ce sont ses effets économiques. Des gens perdront leur emploi, une usine québécoise risque de fermer, ainsi de suite.

La Colombie-Britannique a décidé de poursuivre les sociétés de tabac pour recouvrer les coûts en soins de santé associés au tabagisme. L'Ontario a fait de même hier. Il semble y avoir un consensus et on peut s'attendre à ce que les autres provinces suivent le pas. Quand cela sera terminé, on peut prévoir de nombreux recours collectifs au nom de patients qui sont morts de maladies associées au tabagisme. Le Canada ne sera plus un milieu accueillant pour les producteurs de cigarettes.

L'argument économique est-il crédible, actuellement?

M. Damphousse : Dans mon mémoire, je présente les idées d'experts en économie. D'après eux, le secteur du tabac pour l'ensemble du Canada n'est pas une puissance économique importante.

Le rôle du gouvernement, c'est de réduire le tabagisme. Il y a deux semaines, Santé Canada a déclaré que vous ne pouvez pas à la fois protéger le secteur du tabac et réduire le tabagisme. Il faut faire un choix. À vous de choisir qui vous protégerez.

Qu'arrivera-t-il si le tabagisme baisse? Les gens auront de l'argent à dépenser sur d'autres choses, ce qui stimulera d'autres secteurs économiques du pays. Au bout du compte, ce sera avantageux pour le Canada.

Au sujet des emplois, beaucoup ont déjà été perdus au fil du temps, à cause de la modernisation des usines de tabac. Les gens qui sont licenciés prennent leur retraite et on ne les remplace pas.

N'oublions pas ce qui est arrivé chez Imperial Tobacco. Imperial Tobacco a fermé trois de ses usines au Canada, même si elle était le plus grand employeur. La société a déménagé ces emplois au Mexique. Pourquoi? Parce que c'est la seule façon d'augmenter les profits, en réduisant les coûts. Les coûts de main-d'œuvre au Canada sont élevés pour le secteur du tabac. On verra la même chose chez Rothmans et Benson & Hedges. Philip Morris a fait une annonce menaçante — c'est du chantage. En effet, cela se fera, quoique vous décidiez.

Mme Callard : Dans le débat sur le projet de loi C-32, ils ont eu du succès, au moyen de la même stratégie qu'ils emploient depuis 40 ans. On devrait pourtant savoir mieux réagir.

Ces entreprises veulent parler d'économie plutôt que des questions soulevées par M. Damphousse sur la façon dont ces additifs accroissent l'effet de la nicotine, la quantité de nicotine absorbée, le temps que met la nicotine à atteindre le cerveau et l'absorption de la nicotine plus loin dans les poumons, pour qu'elle entre plus rapidement dans le sang, grâce à un changement du pH des cigarettes. Au lieu de parler de ces questions, on vous fait songer aux détaillants, aux boutiques hors taxes, aux travailleurs et aux agriculteurs.

L'industrie a écarté du débat les arguments relatifs à la santé, pour en faire une discussion économique. C'est ce qu'elles font toujours. Elles en font une question de commercialisation, il s'agit de savoir si la publicité de style de vie qui encourage les gens à fumer est une bonne chose, de savoir si les commandites seront supprimées ruinant notre été. C'est une réaction typique de la part de ce secteur.

C'est la raison pour laquelle des tonnes d'études ont été faites sur l'effet négatif du tabagisme pour l'économie, pour les recettes gouvernementales et pour la société. Ces études ne tiennent pas compte des particuliers qui viennent vous dire que l'adoption de ce projet de loi lui fera perdre son emploi. Ce sont des boucliers humains, employés par l'industrie avec beaucoup d'efficacité. Je ne serais pas étonnée qu'on en voie encore. Il faut s'en souvenir, mais dans le contexte global de ce problème.

[Français]

Le sénateur Pépin : Le projet de loi C-32 exempte le menthol comme aromatisant du tabac. Santé Canada nous a dit que les produits mentholés étaient plutôt en déclin. Pourtant, l'ajout du menthol à la cigarette semble lui donner un meilleur goût. J'aimerais avoir votre opinion sur l'exemption du menthol dans le projet de loi C-32. À votre connaissance, quel a été l'effet de l'aromatisation du menthol sur le taux de tabagisme? Avec l'interdiction des cigarettes aux arômes de fruits et de confiserie, est-ce qu'il n'y a pas un risque que les cigarettes au menthol deviennent une solution de rechange pour les jeunes?

M. Damphousse : Cela a fait l'objet d'un gros débat au sein de la communauté de la santé quand le projet de loi est sorti et qu'on a vu qu'il y avait une exemption pour le menthol. On était préoccupé à savoir si on demandait un amendement ou pas. C'est une question stratégique. Finalement, on n'a pas jugé nécessaire de le faire compte tenu du faible pourcentage que cela peut avoir. Cependant, c'est une préoccupation parce que le menthol n'est pas seulement une saveur. C'est un analgésique topique très doux et cela peut inciter les gens à fumer la cigarette. C'est quand même une préoccupation.

Le sénateur Pépin : Plus que les fruits?

M. Damphousse : C'est une préoccupation et on n'est pas nécessairement d'accord à ce que ce soit exempté. L'amendement couvre juste les fruits et les bonbons. M. Cunningham l'a mentionné, ils peuvent utiliser beaucoup d'autres saveurs comme les épices et la cannelle. JTI-Macdonald a mis en marché une cigarette More au whisky. C'est une autre saveur qui peut être utilisée si on accorde un amendement de cette nature-là. Évidemment, on essaie d'avoir l'amendement le plus large possible. Cependant, il y a des décisions qui sont prises au sein de notre communauté à savoir si on propose d'autres amendements ou non.

Mme Doucas : J'irais peut-être un peu plus loin. En fait, ce n'est pas un projet de loi qui est parfait. Vous parlez de l'exemption pour le menthol. Il y a aussi une exemption pour les produits sans fumée, comme le tabac à chiquer ou à priser. Il y a un mécanisme au sein du projet de loi qui fait qu'on peut ajouter des produits. C'est en voyant cela qu'on s'est dit que si on ne l'avait pas cette fois-ci, on allait continuer nos plaidoyers.

Malheureusement, il semblerait que ça va prendre plus de gens accrocs à ces produits avant que Santé Canada n'intervienne. Mais c'est déjà mieux que ce qu'on a maintenant alors qu'aucune réglementation n'existe. Comme on le soulignait, on voyait déjà les effets de ces produits auprès des jeunes; cela a donc renversé la tendance au déclin.

Le sénateur Pépin : Je vais demander à M. Jansson ce qu'il en pense. Est-ce que vous croyez que les cigarettes au menthol vont attirer davantage si les autres sont interdites?

[Traduction]

M. Jansson : D'après mon expérience, il y a peu de jeunes qui fument des cigarettes mentholées. Malheureusement, ce n'est pas prévu dans le projet de loi. Cette omission est peut-être une échappatoire pour les producteurs qui ciblent la jeunesse, comme par le passé.

[Français]

Le sénateur Segal : Madame Doucas, vous avez dit que votre organisation a été fondée au moment de la réduction des taxes pour la lutte de la contrebande. Ces réductions ont provoqué une augmentation de l'usage chez les jeunes filles et d'autres qui ont commencé à fumer.

Ce problème de contrebande demeure. Lorsqu'on a posé des questions à ce sujet aux fonctionnaires de Santé Canada, ils ont répondu que la contrebande ne relevait pas de leur ministère.

Je pose la question suivante : doit-on créer une solution qui pourrait générer un nouveau problème? À votre avis, sommes-nous en train de résoudre un problème concernant les différents goûts en donnant aux fonctionnaires le pouvoir incroyable d'ajouter ce qu'ils veulent sans aucune référence au Parlement ni aux élus?

Et si on fait cela et que cette loi a du succès, cela va-t-il créer un marché incroyable pour la contrebande qui ne regarde pas les travaux de ce comité-ci? Est-ce que votre problème peut demeurer aussi difficile qu'il l'est maintenant puisqu'on remplacerait les choses maintenant légales avec un produit à 100 p. 100 illégal et distribué par ceux qui ne paient aucune taxe et qui ne créent aucun emploi local?

Nous voulons agir aussi vite que possible pour protéger le public. Mais si on agit très vite et sans aucun amendement comme vous suggérez et que cela ne diminue pas le problème; que le problème soit pire, où en serons-nous? Quel serait votre conseil à des législateurs qui essaient de trouver la façon la plus efficace de procéder?

Mme Doucas : Je suis encouragée par le fait que vous êtes préoccupé par les questions de contrebande. Un n'empêche pas l'autre. On travaille tous ici sur la contrebande et nous sommes préoccupés par la question, mais nous sommes également préoccupés par les produits aromatisés. Sachez que cela se vend à l'unité, en paquet de cinq, en paquet de trois et en paquet de dix.

Lorsque je vais dans les dépanneurs et que je me présente, je veux savoir quelles sont les nouvelles saveurs. C'est comme cela qu'on apprend, on le demande. Un paquet de cigarillos est beaucoup plus cher qu'un paquet de cigarettes. Nous savons que les jeunes privilégient ces produits. Ils sont plus faciles à consommer. Ils ont l'air inoffensifs et anodins. On a éduqué les jeunes par rapport à la cigarette, et malgré le taux de contrebande actuel on voit encore des déclins chez les jeunes. Les leçons apprises, les programmes de lutte antitabac et les mesures en place fonctionnent. Il faut aller dans le même sens et continuer à réglementer. Et là, on est rendu à réglementer le produit. Il faut aller de l'avant. On ne peut que constater les succès.

Quant à la contrebande, nous sommes les premiers à demander une série de mesures pour la contrer. Et je vous dirais que la Loi sur le tabac n'est pas l'instrument approprié pour le faire tel qu'elle est écrite en ce moment. Il faut révoquer des permis et sensibiliser les autorités américaines pour qu'ils interviennent de leur côté. Très souvent, les usines sont du côté américain des réserves.

Sans aller dans tout le débat de la contrebande, non je ne pense pas qu'on est en train de transférer le problème ailleurs. Le problème de la contrebande reste. Pour l'instant, il y a peu ou pas de produit de cigarillos sur le marché de contrebande, malgré le fait qu'il est certain qu'il y aurait un profit à y faire.

Je vous dirais que le signe qu'on a est que les jeunes continuent d'acheter des produits du tabac dans de beaux paquets qui coutent cher. L'industrie mise beaucoup sur les nouveaux emballages de cigarettes. Cela ressemble à des iPod, cela ne ressemble en rien aux gros paquets de nos grands-parents. Les jeunes sont donc encore attirés par ce qui est beau; le gros sac de Ziploc, ce n'est pas pratique pour un jeune.

[Traduction]

Le président : Nous avons une salle comble ce soir, quasiment sur le point de déborder. Il est presque 18 heures, soit l'heure normale pour lever la séance, mais, avec votre consentement, je suis prêt à continuer. On ne prévoit pas une autre réunion du comité dans cette même salle ce soir, mais certains sénateurs ont des obligations et doivent se rendre à d'autres salles de comités.

M. Damphousse : Je suis heureux que vous ayez soulevé la question de la contrebande, qui est une source de préoccupation majeure pour la communauté sanitaire, car nous savons que les taxes sont une des mesures les plus efficaces pour réduire la consommation de tabac. Nous nous employons sans relâche depuis 2002 à renseigner les fonctionnaires et les politiciens sur cette question. En effet, nous avons rencontré des gens et accordé des interviews aux médias, de même que nous avons été consultés par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale. De plus, nous avons consulté la GRC sur la stratégie nationale pour lutter contre la contrebande. S'agissant de ces stratégies, vous trouverez les noms de nos organisations, la Société canadienne du cancer, Physicians for a Smoke-Free Canada et l'Association pour les droits des non-fumeurs. Je vous remettrai notre dépliant qui contient des recommandations précises pour lutter contre ce problème. Le gouvernement conservateur a proposé des mesures dans le budget pour s'attaquer à ce problème, mais s'agit-il toujours d'un problème? Oui, c'est toujours un problème. Nous continuerons donc de nous battre et de revendiquer des mesures plus vigoureuses pour lutter contre ce phénomène.

Une autre question soulevée pas seulement aujourd'hui mais aussi à la dernière réunion est le fait que nous donnons un pouvoir considérable à Santé Canada au moyen de ce projet de loi, auquel l'on pourrait ajouter d'autres substances plus tard. Vous devez comprendre à qui vous avez affaire. L'industrie du tabac est efficace quant à sa recherche et à sa façon de trouver des moyens de découvrir de nouveaux produits chimiques pour accroître les propriétés efficaces de ses produits. À mon avis, Santé Canada devrait avoir le pouvoir d'agir avec autant de célérité que possible pour empêcher les fabricants de tabac de développer de nouvelles solutions. Plutôt que de miser sur la filière législative en déposant un nouveau projet de loi pour protéger la population, nous devons nous doter de ce pouvoir, comme nous le faisons dans le cas d'autres produits de consommation qui tombent sous le coup de la Loi sur les produits dangereux ou de la Loi sur les aliments et drogues.

Le sénateur Ogilvie : Il y a une question importante que je n'ai pas vue dans les documents que j'ai passés en revue ni entendue lors des témoignages, mais qui a néanmoins été abordée dans les réponses de deux ou trois témoins aux questions. Cela dit, avant de poser ma question, je veux parler de l'effet de la chaleur, y compris des flammes, sur les produits chimiques. Nous n'avons qu'à penser aux mises en garde concernant les steaks gras grillés sur le barbecue et à ce qui arrive à la graisse quand elle coule sur le brûleur. Celle-ci se transforme en composés carcinogènes qui peuvent être absorbés par la viande ou relâchés dans l'atmosphère.

Je trouve particulièrement intéressantes les études détaillées qui portent sur la transformation de composés d'ordinaire anodins, notamment le sucre et les acides, une fois ceux-ci brûlés au bout d'une cigarette. À tout le moins, nous savons qu'ils deviennent volatiles et qu'ils sont ainsi absorbés par le corps. Selon toute probabilité, sous l'effet de la chaleur et de l'oxygène, ils sont convertis en produits chimiques dérivés entraînant un vaste éventail de conséquences. Connaissez-vous des études détaillées sur la conversion chimique des additifs qu'on utilise actuellement ou que l'on pourrait éventuellement utiliser?

M. Damphousse : Je vous fais parvenir des recherches fondées sur des examens de documents produits par l'industrie du tabac, et qui abordent la question de l'utilisation des additifs et de ce qui arrive à ceux-ci une fois brûlés. Cet argument est très fort. Certains de nos détracteurs vous diront que certains de ces additifs sont utilisés dans des aliments et qu'ils ne présentent aucun risque. Toutefois, consommer un aliment contenant des produits chimiques censés se dissoudre dans le corps et en profiter est une chose, mais brûler ces mêmes produits chimiques et les inhaler, c'est une autre paire de manches. Nos poumons ne sont pas censés inhaler de la fumée de tabac ou tout autre composé organique brûlé. Cela peut paraître anodin au début, mais une fois brûlées, ces substances deviennent carcinogènes. Cette situation devrait vous inquiéter. La comparaison proposée par nos détracteurs offre un mauvais exemple.

[Français]

Le sénateur Rivard : J'ai deux préoccupations : une morale; nous devons nous occuper de la santé des Canadiens, qu'il y ait de moins en moins de fumeurs et la solution idéale est qu'il n'y en ait plus du tout —tous les pays du monde font le même vœu — et une économique; si le projet de loi est adopté, c'est la fin à court ou à moyen terme d'une usine à Québec et c'est 330 emplois de moins, donc 330 familles au chômage.

La solution serait que le projet de loi soit adopté et que les produits qui ne rencontrent pas la nouvelle norme du projet de loi C-32 ne servent que pour l'exportation et ne soient pas vendu au Canada. Qu'en pensez-vous?

M. Damphousse : Je ne partage pas votre avis sur la perte d'emploi. Je vous ai expliqué dans mon mémoire que ces emplois seront perdus de toute façon. C'est inévitable avec la baisse de la consommation. Ce ne sera pas tout de suite à moins que Philip Morris International décide de réduire ses coûts de production en déménageant sa manufacture ailleurs. Mais la plus grande production de cigarettes de la manufacture de Rothmans, Benson & Hedges Inc. à Québec est faite avec du tabac de Virginie. Donc, pas touchée du tout par le projet de loi. Comme ma collègue l'a mentionné, ils peuvent aussi bien fabriquer des cigarettes avec du tabac américain et que ce soit vendu au Canada sans problème.

En ce qui concerne l'exportation, vous avez une obligation morale de veiller à la protection de la santé publique non seulement ici, mais aussi au niveau international. Vous faites maintenant partie de la convention-cadre pour la lutte antitabac qui est un traité international. Vous l'avez ratifié et il y a des dispositions très sévères dans le traité qui font en sorte qu'il faut faire très attention à l'influence de l'industrie du tabac pour les activités au Canada et aussi à l'extérieur du pays.

Éventuellement, les emplois perdus — à cause de la réduction graduelle du tabac — le seront par attrition et les gens dépenseront leur argent dans d'autres biens de consommation qui stimuleront d'autres secteurs d'économie canadienne.

[Traduction]

M. Cunningham : Plus tôt aujourd'hui, le président a fait allusion à l'article 9 du projet de loi en ce qui a trait au Gouverneur en conseil et s'est demandé si ce mécanisme permettait les exportations. Évidemment, nous recommandons que l'exportation de cigarettes aromatisées ne soit pas permise.

[Français]

Vous vous demandiez si l'usine allait fermer. En ce moment, 1 p. 100 de la fabrication est la cigarette contenant un mélange américain avec des saveurs. Est-il vraiment réaliste de penser qu'une usine va fermer pour 1 p. 100 de sa fabrication alors, qu'année après année, la réduction des ventes du tabac est beaucoup plus élevée que ce 1 p. 100? On a vu des déclarations semblables en 2000, alors que le Parlement avait considéré un règlement pour les mises en garde avec photos. Rothmans disait que les imprimeurs allaient perdre des emplois, qu'il était impossible d'imprimer des photos en couleurs sur les paquets de cigarettes au Canada, que les emplois iraient aux États-Unis. Une fois le règlement finalisé, les emplois n'ont pas été perdus. Il était possible d'imprimer les emballages au Canada. Donc, l'histoire se répète sans cesse.

[Traduction]

Le président : Je remercie les témoins d'avoir comparu devant le comité.

Je vais expliquer aux sénateurs les options possibles au regard de ce projet de loi, puis nous commencerons la discussion.

Premièrement, d'autres témoins ont demandé à comparaître devant le comité. Avec l'aide du personnel, j'ai tenté de trier les listes pour parvenir à une représentation croisée des témoins ayant des perspectives différentes de sorte que nous puissions entendre tous les points de vue. Il est évident que d'autres témoins souhaitent comparaître. Nous pouvons toujours tenir une réunion supplémentaire et inviter les témoins ayant fait une demande et ainsi entendre plus de témoins. Je ne pense pas que nous puissions les entendre tous, à moins que vous ne le souhaitiez. Quelqu'un a même suggéré de convoquer la GRC ou d'autres autorités policières pour nous parler des ramifications de ce projet de loi en ce qui a trait à la contrebande.

Deuxièmement, il y a également les fonctionnaires de Santé Canada. Nous pouvons les inviter de nouveau, mais je vois que Paul Glover est déjà ici. Si nous souhaitons interroger davantage ces fonctionnaires, nous pourrons alors le faire à une réunion future. Nous n'avons pas le temps de le faire aujourd'hui. Il y a toujours la possibilité de tenir une autre réunion.

Troisièmement, si les membres du comité veulent entamer l'étude article par article aujourd'hui, trois possibilités s'offrent à nous à cet égard. D'abord, c'est une étude article par article sans amendement. Nous pouvons probablement terminer une telle étude aujourd'hui dans le temps qu'il nous reste, car le projet de loi n'est pas volumineux. Ensuite, il y a la possibilité de débattre les amendements si l'un d'entre vous souhaite en proposer. Enfin, dans le cadre de l'étude article par article, nous pouvons préparer un rapport d'observations pouvant comporter des demandes ou des suggestions relatives au recours au Gouverneur en conseil pour proposer des règlements ou des exemptions comme le prévoit l'article 9 du projet de loi.

Si nous voulons proposer des amendements ou rédiger un rapport d'observations, à mon avis, il nous faudra une autre réunion. Ces questions sont controversées.

La seule chose que nous puissions faire aujourd'hui est une étude article par article du projet de loi sans amendement. Cela étant, je m'en remets à vous. J'ai besoin de savoir ce que vous en pensez.

[Français]

Le sénateur Rivard : Je propose que l'on fasse l'étude article par article et que l'on dispose le projet de loi ce soir.

Le sénateur Pépin : Je veux bien, mais j'aimerais autant qu'on le fasse entre nous plutôt que devant la télévision. Est- ce que nous allons faire cela devant la télévision?

[Traduction]

Le président : Nous sommes tenus d'examiner le projet de loi en séance publique. Nous n'avons pas besoin des caméras de télévision, mais les gens dans l'auditoire peuvent rester ici. Nous sommes tenus, que je sache, d'étudier ce projet de loi en public. C'est un projet de loi.

Le sénateur Stratton : Tout à fait.

Le président : Il ne s'agit pas d'un rapport.

Le sénateur Stratton : Non.

Le président : Je m'incline devant le sénateur Stratton sur cette question.

Le sénateur Stratton : Il s'agit d'une audience publique.

Le sénateur Pépin : Cette réunion est une audience publique.

Le sénateur Stratton : Oui, cette réunion continuera d'être une audience publique. Nous n'allons pas subitement changer notre façon de faire.

Le président : Je pensais que la réunion à huis clos était une exigence. Notre comité étudie de nombreux rapports. Et ces rapports sont préparés à huis clos.

Le sénateur Stratton : C'est une autre paire de manches.

Le président : Peut-être y a-t-il confusion entre projet de loi et rapport. Nous sommes saisis d'un projet de loi, et nous devons donc l'étudier en public.

Le sénateur Stratton : Absolument.

Le sénateur Ogilvie : Je ne suis pas sûr de comprendre le Règlement à cet égard. Toutefois, en me fondant sur mon expérience dans d'autres domaines, et pour faire progresser la discussion, je propose que nous étudiions le projet de loi article par article sans amendement.

Le président : On peut proposer des amendements. Nous ne pouvons pas dire à l'avance si des amendements seront proposés mais, si nous avons à le faire, alors nous devrions envisager sérieusement de poursuivre au-delà de la présente réunion.

Le sénateur Ogilvie : D'après ce que j'ai compris, vous nous avez soumis trois choix. J'allais proposer le premier.

Le président : D'accord; Sénateur Segal, souhaitez-vous intervenir concernant la procédure?

Le sénateur Segal : Ma loyauté envers mon gouvernement m'empêche de le faire. Je n'interviendrai pas.

Le président : D'accord.

Le sénateur Cook : Savons-nous si des amendements sont prévus?

Le président : Je ne le saurai pas avant que nous entreprenions l'étude article par article. Si des amendements sont proposés, nous pourrons alors décider d'en reporter l'examen à une autre réunion ou de voter immédiatement.

Le sénateur Cook : Je propose que nous allions de l'avant.

Le président : Est-ce que quelqu'un souhaite intervenir concernant la procédure avant que nous passions à l'étude article par article?

Le sénateur Eaton : Je pense que nous devrions tout simplement aller de l'avant.

Le président : D'accord.

Le sénateur Segal : J'invoque le Règlement, monsieur le président. Les membres du comité sont-ils autorisés à s'abstenir concernant tel ou tel article dont traite le comité?

Le président : Oui, je le pense. C'est ce qui se fait au Sénat. Je pense que cela s'applique ici également.

Le sénateur Segal : Merci.

Le président : À moins qu'on me demande qu'un vote soit inscrit, je n'identifierai pas chaque intervenant : il suffira d'un oui, d'un non ou d'une abstention.

La greffière m'informe du fait que les membres du comité peuvent exprimer leur volonté de s'abstenir.

[Français]

Le sénateur Rivard : Monsieur le président, j'aimerais savoir, si nous procédons à l'étude article par article, si nous pourrions avoir à la table des gens de Santé Canada au cas où nous aurions un point à clarifier. Nous pourrions poser la question aux gens qui ont rédigé le projet de loi pour nous assurer que nous comprenons bien. Sinon, est-ce que nous devons l'approuver sans question?

[Traduction]

Le président : Cela s'écarte de la procédure normale. Cependant, si les membres du comité souhaitent que des fonctionnaires de Santé Canada comparaissent, la chose est possible. Puis-je savoir ce qu'en pensent d'autres membres du comité?

Je constate que certains ne sont pas d'accord. Cependant, les fonctionnaires sont ici.

Je connais vos avis. Les membres du comité conviennent-ils de passer à l'étude article par article du projet de loi C- 32, Loi modifiant la Loi sur le tabac?

Des sénateurs : D'accord.

Le président : Adopté.

Le président : L'étude du titre est-elle reportée?

Des voix : D'accord.

Le président : L'étude de l'article 1, qui propose un autre titre, est-elle reportée?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 3 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Segal : Je tiens à signaler mon abstention pour cet article. Il accorde au Gouverneur en conseil à tout moment tout pouvoir qu'il pourrait souhaiter.

Le président : D'accord.

Adopté avec cette abstention.

L'article 4 est-il adopté?

[Français]

Le sénateur Rivard : Monsieur le président, j'aurais une question de clarification à poser aux représentants du ministère de la Santé.

[Traduction]

Le président : Les membres du comité acceptent-ils que le sénateur Rivard pose une question aux représentants de Santé Canada concernant l'article 4?

Des voix : D'accord.

Le président : Monsieur Glover, veuillez prendre place au bout de la table avec vos fonctionnaires.

[Français]

Le sénateur Rivard : J'ai écrit ma question pour être sûr que ce soit très clair : est-ce que le projet de loi C-32 vise à cibler les additifs interdits qui sont utilisés dans la fabrication des produits uniquement pour le marché canadien? Est- ce que cette clause s'applique aux produits d'exportation?

[Traduction]

Paul Glover, sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, Santé Canada : Le projet de loi C-32 vise à résoudre des problèmes de santé publique au Canada. Il vise à interdire l'utilisation de certains additifs comme les saveurs dans les petits cigares, les cigarettes et les feuilles d'enveloppe, puisqu'ils incitent les jeunes canadiens à fumer.

L'article 4 du projet de loi C-32 vise à cibler les additifs interdits pouvant entrer dans la fabrication des produits destinés au marché canadien seulement. Cela est conforme à la Loi sur le tabac de 1997, qui autorise le gouvernement à établir des normes qui s'appliquent aux produits fabriqués pour le marché canadien. Il revient aux autres pays de déterminer si l'interdiction des saveurs ou des additifs des produits du tabac correspond à leurs objectifs en matière de santé publique. D'autres pays se penchent déjà sur cette question. Selon la politique du gouvernement du Canada, les produits du tabac fabriqués au Canada et destinés exclusivement au marché de l'exportation seront autorisés.

Le président : Ils seront autorisés. Merci beaucoup.

Je vais passer à la question suivante.

L'article 4 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 6 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 7 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 8 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Segal : Je vais m'abstenir.

Le président : Le sénateur Segal s'abstient de voter sur l'article 8.

Est-il convenu d'adopter l'article 8?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 9 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 10 est-il adopté?

Le sénateur Segal : Je suis désolé, je n'ai pas lu suffisamment rapidement. Je vais également m'abstenir pour ce qui est de l'article 9.

Le président : Très bien. Ah oui, il s'agit du célèbre article 9.

Le sénateur Pépin : Je m'abstiens également de voter sur cet article.

Le président : Le sénateur Pépin s'abstient de voter sur l'article 9 également.

Le sénateur Fairbairn : Je m'abstiens.

Le président : Quelqu'un d'autre?

En dépit de ces abstentions l'article 9 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Adopté.

L'article 11 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 12 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 13 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 14 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 15 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 16 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 17 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 18 est-il adopté?

Le sénateur Segal : Étant donné qu'on a entendu beaucoup de témoignages sur les pratiques de recours aux experts- conseils, qui sont insuffisantes et injustes, je vais m'abstenir de voter sur l'article 18.

Le président : L'article 18 est la disposition d'entrée en vigueur.

Avec l'abstention du sénateur Segal, l'article est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : L'annexe est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Segal : Je vais également m'abstenir sur ce vote.

Le président : Quelqu'un d'autre veut-il s'abstenir?

Le projet de loi est adopté.

Le comité souhaite-t-il procéder à huis clos pour discuter d'observations à joindre en annexe au rapport sans modification?

Personne ne souhaite procéder ainsi.

Est-il convenu que je transmette le projet de loi au Sénat sans amendement et sans observations?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Segal : Je m'abstiens.

Le président : Voilà qui met un terme à nos délibérations. Le projet de loi est adopté sans amendement et il sera transmis au Sénat.

(La séance est levée.)


Haut de page