Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 8 - Témoignages du 21 octobre 2009


OTTAWA, le mercredi 21 octobre 2009

Le Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie s'est réuni aujourd'hui à 16 h 9 pour examiner le projet de loi qui lui a été renvoyé, c'est-à-dire le projet de loi C-6, Loi concernant la sécurité des produits de consommation.

Le sénateur Art Eggleton (le président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'aimerais entamer les travaux avant qu'une alarme nous force de nouveau à quitter les lieux. Je ne sais pas si cela arrivera, mais tenons-nous prêts.

Aujourd'hui, nous entamons l'examen du projet de loi C-6, la Loi concernant la sécurité des produits de consommation. Je prévois qu'il y aura en tout quatre réunions sur le sujet, mais le calendrier n'est pas encore fixé. Les nombreuses personnes qui veulent comparaître devant nous ont diverses opinions à nous communiquer au sujet du projet de loi C-6, soit pour l'appuyer soit pour s'y opposer, ou encore pour y faire apporter des changements ou des amendements. Nous entendrons ces personnes au cours des prochaines réunions.

Aujourd'hui, nous allons entendre le point de vue des représentants de Santé Canada. Vous vous rappellerez peut-être que la dernière fois que nous avons examiné un projet de loi, c'est-à-dire le projet de loi C-32, la personne qui a comparu devant nous au nom de Santé Canada était Paul Glover, sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs. Il est de retour parmi nous aujourd'hui. Je lui laisse le soin de présenter les fonctionnaires qui l'accompagnent ainsi que leur domaine de spécialité qui nous concerne.

Paul Glover, sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, Santé Canada : Je suis heureux de me présenter devant vous aujourd'hui pour discuter du projet de loi C-6, soit la Loi concernant la sécurité des produits de consommation proposée.

[Français]

Je suis le sous-ministre adjoint chargé de la Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs. Je suis accompagné aujourd'hui par Charles Ethier, directeur général pour la Direction de la sécurité des produits de consommation, Robert Ianiro, directeur, du bureau de la Sécurité des produits de consommation et Diane Labelle, avocate générale, chargée de l'Unité des services juridiques.

[Traduction]

Le projet de loi C-6 est une mesure législative importante ayant pour objet de protéger la population en prévoyant et en prévenant les risques pour la santé ou la sécurité humaines que posent les produits de consommation. Le projet de loi C-6, qui fait partie du Plan d'action détaillé pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation du gouvernement, portera sur trois secteurs à améliorer. Le projet de loi C-6, qui fait donc partie d'un plan global visant la sécurité des aliments et des produits de consommation, traite, comme son titre l'indique, exclusivement des produits de consommation. Il y aura, dans l'avenir, d'autres initiatives portant sur les aliments et les autres points.

Le Plan d'action pour la sécurité des produits alimentaires et de consommation portera donc sur trois secteurs : la prévention active afin de prévenir les problèmes avant qu'ils surviennent, la surveillance ciblée pour veiller à ce que le système de réglementation fonctionne, et l'intervention rapide, soit la capacité d'intervenir avec célérité quand il le faut. Le projet de loi C-6 se fonde sur le principe de la responsabilité partagée selon lequel l'industrie a la responsabilité première de la sécurité de tout produit qu'elle fabrique, importe ou distribue à l'intention de la population canadienne. Cette dernière a un rôle à remplir dans la prise de décisions éclairées sur les produits de consommation qu'elle utilise. Enfin, le gouvernement a la responsabilité de surveiller et de promouvoir la conformité et de mettre en application la législation qu'il administre.

Le projet de loi C-6 remplacerait la partie I de la Loi sur les produits dangereux, le principal texte fédéral régissant les produits de consommation peu sûrs ou dangereux depuis maintenant 40 ans. Bien que ce régime axé sur la sécurité des produits nous ait bien servi, il est périmé et doit être modernisé. Le marché d'aujourd'hui est beaucoup plus complexe que celui qui existait en 1969, année d'entrée en vigueur de la Loi sur les produits dangereux. La mondialisation signifie que les produits vendus au Canada proviennent maintenant du monde entier.

[Français]

Les technologies en évolution ont introduit sur les marchés de nouveaux matériaux et des substances beaucoup plus rapides et les consommateurs canadiens ont maintenant accès à un nombre de produits beaucoup plus grand qu'avant. Nos principaux partenaires commerciaux, comme les États-Unis et l'Union européenne, ont déjà harmonisé leur régime sur la sécurité des produits afin de prendre en compte les nouvelles réalités du marché. Sans le projet de loi C-6, nous prendrons du retard.

[Traduction]

Je crois vous avoir distribué un document comparant la situation des États-Unis et de l'Union européenne à celle du Canada, telle qu'elle est sous le régime de la Loi sur les produits dangereux et telle qu'elle le sera lorsque le projet de loi C-6 sera adopté. Ce document illustre en quoi le changement nous placerait sur un pied d'égalité avec nos principaux partenaires commerciaux.

En vertu de la Loi sur les produits dangereux, la capacité du gouvernement du Canada de s'attaquer au problème de la sécurité des produits de consommation en temps utile se résumait à demander à l'industrie de rappeler volontairement des produits. Bien que l'idée de travailler en partenariat avec l'industrie soit importante, le gouvernement doit disposer du pouvoir nécessaire pour régler les cas où une approche volontaire ne produit pas les résultats nécessaires. Sans les dispositions contenues dans le projet de loi C-6, Santé Canada n'a pas le pouvoir d'ordonner le rappel d'un produit de consommation dangereux, d'arrêter la vente d'un produit ou de retirer un produit des rayons des établissements commerciaux si l'industrie refuse de collaborer.

Je veux prendre quelques minutes pour aborder certaines des principales dispositions de la loi proposée. Le projet de loi C-6 comprendrait une interdiction générale qui ferait une infraction de la fabrication, de l'importation et de la publicité ou de la vente par un fournisseur d'un produit qui pose un risque déraisonnable pour la santé et la sécurité de la population. L'interdiction générale permettrait de prendre immédiatement des mesures en l'absence d'un règlement visant le danger que pose un produit en particulier. Cela comprendrait l'arrêt de la vente, de la fabrication ou de l'importation du produit et son retrait des rayons des établissements commerciaux. Cela va totalement à l'encontre de la démarche au cas par cas que prévoit la Loi sur les produits dangereux, qui n'autorise pas de prendre des mesures concernant un produit avant qu'un règlement soit adopté. Essentiellement, le gouvernement devait consacrer beaucoup de temps et d'énergie à la constitution de la preuve et à l'établissement d'un calendrier de réglementation, ce qui entraînait souvent des retards. C'est pourquoi nous sommes passés à la collaboration volontaire avec l'industrie.

Le projet de loi C-6 comprendrait également le signalement obligatoire, en vertu duquel les fabricants, les importateurs et les autres intervenants dans la chaîne d'approvisionnement seraient légalement tenus de signaler, dans les délais impartis, tout incident grave lié à un produit ou tout défaut d'un produit dangereux mettant en cause la santé ou la sécurité. Le signalement obligatoire renforcerait la capacité de Santé Canada de repérer rapidement les problèmes liés à la sécurité des produits de consommation et d'intervenir en conséquence en prenant les mesures correctives appropriées. Ce qui importe plus encore, c'est que cela nous permettrait de diffuser l'information sur la sécurité des produits auprès des Canadiens.

Le ministre serait habilité à ordonner aux fournisseurs de mettre à l'essai les produits, de réunir des renseignements et de produire les résultats des essais ou des études permettant, le cas échéant, de vérifier la conformité ou de prévenir une violation des dispositions de la loi. Ces exigences, comme d'autres dispositions du projet de loi, n'introduiraient pas d'obligations uniques particulièrement contraignantes pour l'industrie. Elles correspondent plutôt à l'adoption de bonnes pratiques commerciales lors de l'exercice normal de la diligence raisonnable. Elles correspondent aussi à celles qu'on trouve dans des mesures législatives semblables aux États-Unis et dans l'Union européenne.

Le projet de loi C-6 — et, nous savons que vous en avez beaucoup entendu parler — renforcerait également les pouvoirs des inspecteurs. Il importe aussi de signaler que ces pouvoirs découlent de précédents établis dans d'autres mesures fédérales sur la santé et la sécurité, comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, la Loi sur les produits antiparasitaires, le Code canadien du travail, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et la Loi sur la santé des animaux. En bref, nous examinons les pratiques découlant d'autres textes de loi visant à protéger les animaux, et nous essayons de les utiliser pour protéger la santé des Canadiens.

Les inspecteurs auraient le pouvoir d'ordonner aux fournisseurs de procéder à des rappels et à d'autres mesures correctives lorsqu'ils y seraient tenus. Le projet de loi C-6 permettrait également aux inspecteurs d'intervenir afin de faire un suivi relatif aux dispositions des mesures correctives lorsque le fournisseur ne le fait pas. Ce sont des pouvoirs que les États-Unis et l'Union européenne ont déjà.

Il importe d'aborder ici pendant quelques instants certaines déclarations publiques faites au sujet de pouvoirs que le projet de loi C-6 accorderait aux inspecteurs de Santé Canada. On a affirmé que les pouvoirs prévus dans le projet de loi C-6 sont sans précédents — qu'ils ne respectent pas la Charte canadienne des droits et libertés, que le projet de loi C- 6 ferait disparaître le droit des atteintes directes et s'écarterait de la règle du droit. Nous affirmons officiellement que ce n'est tout simplement pas le cas.

On a affirmé que le projet de loi C-6 accorderait aux inspecteurs de Santé Canada le pouvoir d'entrer chez les Canadiens sans mandat. C'est faux. Pour s'acquitter de leurs fonctions reliées à la loi proposée, les inspecteurs de Santé Canada pourraient entrer chez quelqu'un seulement avec le consentement du propriétaire ou après avoir obtenu un mandat d'un tribunal, qui nous le fournirait uniquement si nous pouvions en justifier la nécessité.

On a affirmé que la loi proposée permettrait aux inspecteurs de Santé Canada de contrôler et de fermer des entreprises. C'est faux. Santé Canada aurait le pouvoir d'ordonner à une entreprise ou à une personne de cesser de fabriquer, de vendre ou d'annoncer un produit qui représente un danger pour les Canadiens. Si une entreprise se conforme à la Loi, les inspecteurs de Santé Canada n'auront aucun effet sur ses activités. Lorsqu'une entreprise pense que les ordonnances des inspecteurs sont injustes, elle peut demander à un agent d'examen désigné de les revoir. Les ordonnances des inspecteurs sont aussi assujetties à la surveillance de la Cour fédérale du Canada.

On a rédigé le projet de loi C-6 avec minutie en pensant aux droits des Canadiens et à l'importance de disposer de moyens appropriés de s'attaquer aux cas des produits de consommation dangereux. Les experts du droit constitutionnel du ministère de la Justice ont étudié les dispositions du projet de loi C-6 tout au long de sa rédaction pour s'assurer qu'elles sont conformes aux protections fondamentales auxquelles s'attendent les Canadiens, et qu'ils méritent.

Les sénateurs sauront que le ministre de la Justice doit attester que toutes les dispositions de tous les projets de loi émanant du gouvernement déposés au Parlement sont, notamment, conformes à la Charte.

Le projet de loi C-6 comprend de nouvelles exigences visant la conservation des documents qui obligent les fournisseurs à conserver l'information sur la source et la distribution de leurs produits. Dans le cas d'un incident concernant la santé et la sécurité, cela faciliterait de meilleures collectes et un plus grand partage de l'information. Ces dispositions aideraient le gouvernement à intervenir rapidement et efficacement dans l'application de mesures correctives là où cela aurait été le plus propice dans la chaîne d'approvisionnement.

Le projet de loi C-6 porterait les amendes et les sanctions à des niveaux conformes à ceux d'autres lois fédérales modernes et de nos partenaires commerciaux.

En outre, le projet de loi C-6 prévoit l'introduction d'un régime de sanctions administratives pécuniaires comme solution plus souple et mieux adaptée que les poursuites au criminel. On a recours de plus en plus au régime des sanctions administratives pécuniaires dans les régimes canadiens de règlementation sur la protection de l'environnement et des consommateurs afin d'obtenir conformité et collaboration et d'encourager la correction rapide des problèmes réglementaires. La Loi sur les produits antiparasitaires, la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et la Loi sur la santé des animaux sont des exemples d'autres mesures fédérales qui comportent de telles dispositions.

Il importe de signaler que le régime de sanctions administratives pécuniaires prévoit des recours. Le ministre peut en effet les revoir, et une personne peut demander à la cour de revoir la décision du ministre.

J'espère que ce survol des principales dispositions de la loi proposée vous a permis de saisir l'essentiel de ses objectifs. Le projet de loi C-6 préviendra les problèmes avant qu'ils surviennent, permettra d'effectuer la surveillance voulue pour veiller à ce que le système de réglementation fonctionne et nous permettra d'intervenir rapidement quand il le faut.

J'espère aussi avoir pu faire la lumière sur les fausses affirmations qui circulent concernant la portée des pouvoirs que le projet de loi C-6 accorderait à Santé Canada.

En conclusion, permettez-moi de réitérer que le projet de loi C-6 modernisera les outils qui nous permettent de protéger les Canadiens contre les produits de consommation dangereux.

Il nous fera plaisir, à mes collègues et à moi-même, de répondre à toutes vos questions.

Le président : Je voudrais souligner que deux personnes qui ne sont pas des membres du comité se sont jointes à nous aujourd'hui. D'habitude, je les présente en premier, mais aujourd'hui, je vais le faire maintenant. Le sénateur Day du Nouveau-Brunswick est le porte-parole officiel pour le projet de loi C-6. Il se joint donc à nous, tout comme le sénateur Mercer de la Nouvelle-Écosse.

(La séance est suspendue.)

—————

(La séance reprend.)

Le président : J'ai reçu aujourd'hui une lettre de Bibles for Missions. Je ne comprenais pas en quoi cette question concernait cet organisme. En lisant la lettre, je me suis aperçu que cette association compte 35 magasins d'aubaines partout au pays. Je me suis aussi rappelé qu'il y en a d'autres, comme Goodwill et l'Armée du Salut. Bien sûr, ils ont des boîtes dans lesquelles les gens peuvent déposer leurs dons de vêtements, et cetera. Je crois que l'article 13 les préoccupe, car il prescrit que les marchands doivent recueillir les renseignements sur l'origine des produits, et les consigner. En quoi la loi proposée touchera-t-elle les magasins d'aubaines?

M. Glover : Merci, monsieur le président, de cette question. C'est un point dont nous sommes conscients. D'ailleurs, il en a été discuté pendant les consultations concernant le projet de loi. Nous travaillons depuis le mois d'août avec plusieurs œuvres de charité, notamment l'Armée du Salut et le Conseil canadien des œuvres de charité chrétiennes, afin de veiller à pouvoir les exempter, par règlement, de l'exigence de consignation pour les raisons que vous venez de nommer.

La consignation ne vise pas les dons occasionnels anonymes. Elle vise plutôt les entreprises qui font fabriquer en série des produits en Chine et qui prétendent ne pas savoir ce qui se passe à l'usine chinoise. Nous voulons qu'ils connaissent les ingrédients qui entrent dans la fabrication d'un produit afin que nous puissions les retracer en cas de problème. Les situations occasionnelles ne sont donc pas visées. Il y aura un règlement d'exemption dans ces cas.

Cela dit, ce ne sera pas, à notre avis, une exemption complète. En effet, ça ne pourra pas toujours s'appliquer. Prenons l'exemple d'une entreprise qui décide de faire un don à une œuvre de charité. Selon nous, de tels dons devraient faire l'objet d'une consignation. Nous pourrons ainsi nous assurer que si un donateur décide de donner un grand nombre, disons, de matelas, de berceaux, de stylos et qu'il y avait ensuite un problème, ces produits ne pourraient pas tout simplement pénétrer le marché sans qu'on le sache. Ça n'arrive pas très souvent. Les œuvres de charité le comprennent et estiment qu'il est raisonnable dans une telle situation de consigner des renseignements. Parallèlement, ça les protégerait des entreprises qui essayent, intentionnellement ou non, de se débarrasser de produits qui ne sont plus appropriés ou qui sont dangereux afin d'éviter de payer des frais tels des frais d'élimination. La consignation des renseignements est donc un moyen de protéger les œuvres de charité. Ce ne sont que les dons importants provenant des entreprises qui sont visés. Nous avons travaillé de concert avec les œuvres de charité.

Le président : Elles seront donc exemptées par règlement. Comme il sera présenté aux deux Chambres du Parlement, nous finirons bien par le voir. Le règlement sera en vigueur avant que ces dispositions ne soient appliquées, n'est-ce pas?

M. Glover : Notre intention est de coordonner le tout. Je ne peux pas m'engager au sujet des échéances. Ces décisions dépendent du Sénat.

Le président : Vous ne voulez pas laisser ces personnes dans l'expectative.

M. Glover : Ce n'est pas notre intention. Nous voulons la coordination. Je ne peux pas m'engager à donner une réponse définitive au sujet d'une question sur laquelle je n'ai aucun contrôle et qui relève en fait du Parlement.

Le président : Permettez-moi de revenir sur ce que vous avez dit à propos des mandats. Si quelqu'un veut pénétrer dans une résidence privée, cette personne devra obtenir un mandat, mais elle n'en aura pas besoin si elle veut entrer ailleurs. Ce projet de loi confère d'importants pouvoirs de perquisition et de saisie pour lesquels aucun mandat n'est requis. Il s'agit ici d'inspecteurs dont la formation nous est inconnue. Leur rôle ressemble à celui d'un policier, avec des pouvoirs similaires. Sauf que nous ne savons pas qui ils sont et quelle formation ils ont reçue. Dans le processus d'appel, il semble que ce soit une personne distincte qui entendrait les appels, mais la question de savoir si elle indépendante de l'organisation de laquelle relève l'inspecteur n'est pas claire. Après tout, c'est peut-être simplement le patron de l'inspecteur. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?

Pourquoi un mandat n'est-il pas exigé pour les propriétés commerciales ou les autres propriétés concernées qui ne sont pas des résidences privées? Quelle est la formation des inspecteurs? Quant au processus d'appel, est-il indépendant?

M. Glover : Je vous remercie, monsieur le président, de ces questions. Pour commencer, je voudrais situer le projet de loi dans le temps et m'assurer que tout le monde comprend. Il se situe à l'étape de la post-commercialisation et non pas à celle de la pré-commercialisation. Il y a littéralement des dizaines de milliers de produits de consommation qui entrent au pays; c'est pourquoi nous visons, par cette loi, la prévention active au moyen de normes et d'une surveillance ciblée. Nous ne pouvons pas être partout à la fois, je veux dire compte tenu du nombre de produits de consommation, d'installations, d'importateurs et d'exportateurs. Nous voulons cibler nos efforts.

Les inspections existent pour veiller à l'application de la loi. Nous pourrions donc pénétrer dans les locaux des entreprises, tout comme c'est le cas pour d'autres industries faisant l'objet d'une réglementation et pour lesquelles aucun mandat n'est exigé, afin de nous assurer qu'elles sont au courant de leurs obligations et qu'elles se conforment à la loi. C'est le fondement des inspections. Elles sont le moyen d'assurer la conformité. Nous devons demander aux tribunaux de nous donner un mandat à cette fin; or c'est une fonction de l'inspection. Je ne suis pas tout à fait sûr de la réaction des tribunaux.

Le président : Vous le faites pour les résidences privées.

M. Glover : J'aimerais également clarifier ce point, parce que nous en avons beaucoup entendu parler. Nous sommes intéressés aux lieux de travail; nous ne nous rendrons donc pas dans les résidences privées à moins que la personne intéressée travaille de chez elle, ou que nous croyions qu'elle y entrepose un certain produit. Nous ne pénétrons pas dans les foyers, nous nous rendons sur les lieux de travail. Advenant que ce lieu se trouve dans une résidence privée, nous demanderons à la personne visée de nous permettre de mener une inspection. Si elle y consent, c'est parfait; sinon nous devrons nous adresser aux tribunaux et les convaincre que nous avons un bon motif.

Diane Labelle, avocate générale, Unité des services juridiques, Santé Canada : Pour revenir aux propos de M. Glover sur les tribunaux, le projet de loi C-6 énonce clairement que pour procéder à la visite d'un lieu en toute légalité, l'inspecteur doit d'abord avoir des motifs raisonnables de croire qu'il s'y passe quelque chose. Un simple soupçon ne suffit pas : il doit s'agir d'un motif raisonnable fondé. Le tribunal doit ensuite être en mesure de l'évaluer de façon objective.

Nous tenons également compte du fait que l'article 8 de la Charte prescrit que chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives. Il n'offre pas de protection contre l'ingérence indue du gouvernement dans la vie privée, au respect de laquelle toute personne peut raisonnablement s'attendre.

La Cour suprême du Canada a jugé dans plusieurs affaires importantes que lorsqu'il s'agit d'entreprises, de lieux de travail et d'activités commerciales, les attentes relatives à la protection de la vie privée sont moindres. Tel est le cas parce que l'objectif de la réglementation est la protection de la population ou de couches importantes de la population contre les effets potentiellement nuisibles d'une conduite préjudiciable. Lorsque les inspecteurs se rendent sur les lieux de travail pour veiller à la conformité, aucune accusation n'est portée contre le propriétaire ou la personne concernée. Il ne s'agit pas d'une procédure criminelle; c'est simplement une procédure administrative visant à assurer la conformité. Si jamais on constatait une activité d'une certaine gravité, voire une activité criminelle, l'inspecteur serait dans l'obligation d'obtenir un mandat pour poursuivre la perquisition.

Robert Ianiro, directeur, Sécurité des produits de consommation, Santé Canada : Pour répondre à votre question sur le type de formation des inspecteurs désignés et leur identité, je commencerai par souligner que l'article 18 confère au ministre le pouvoir de désigner des inspecteurs sans préciser explicitement leurs qualifications, pratique qui est assez courante. En effet, on la retrouve dans plusieurs lois fédérales. Permettez-moi d'en nommer quelques-unes : la Loi sur les pêches, la Loi sur les ressources en eau du Canada, la Loi sur le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, la Loi sur les aliments et drogues ou la Loi sur l'inspection des viandes. C'est donc un phénomène très courant.

Je peux cependant affirmer que tous les inspecteurs de Santé Canada sont titulaires d'un diplôme universitaire en sciences ou en ingénierie. C'est une exigence, compte tenu du groupe et du niveau ainsi que de la classification des personnes et des postes au sein du ministère.

Les inspecteurs désignés sous le régime de la Loi sur les produits dangereux ou du projet de loi proposé sur les produits de consommation au Canada suivent une formation rigoureuse. Cette formation comprend, et ce n'est qu'un survol, la connaissance et la compréhension de la loi et des pouvoirs qu'elle confère, ainsi que de ses règlements d'application. De plus, nous avons élaboré un éventail de politiques, de documents d'orientation et de procédures opérationnelles normalisées qui expliquent en détail le processus et les étapes à suivre dans l'exercice de nos pouvoirs. Enfin, la Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, tout comme de nombreuses directions générales au ministère, a rendu publique une politique sur la conformité et l'exécution, dans laquelle sont expliqués la portée des pouvoirs et les principes qui régissent leur utilisation.

En ce qui concerne votre question sur le processus d'appel, je tiens pour acquis que vous parlez des ordonnances de l'inspecteur qui peuvent être émises dans des cas de non-conformité ou lorsqu'il existe des préoccupations concernant la santé et la sécurité des consommateurs.

Ces ordonnances d'exécution tenant lieu de mesures correctives peuvent être examinées par un responsable nommé par le ministre. Ces responsables ne doivent pas faire partie de la voie hiérarchique. Ils peuvent être liés de près ou de loin au processus qui mène à l'émission de l'ordonnance d'exécution. Nous nous attendons à ce que la personne en question possède des connaissances dans les domaines des sciences, de l'ingénierie ou de l'administration des règlements et des lois et, idéalement, à ce que cette personne ait aussi des connaissances dans le domaine du droit, si possible.

Le président : Si la personne ne fait pas partie de la voie hiérarchique, il s'agit vraiment d'une opération indépendante, n'est-ce pas?

M. Ianiro : Exactement.

Le président : Il y a beaucoup de monde ici aujourd'hui parce que nous avons des invités. Le sénateur Banks de l'Alberta s'est également joint à nous. Toutes les autres personnes sont membres du comité, à l'exception des sénateurs que j'ai présentés plus tôt.

Le sénateur Keon : Nous avons eu un nombre très élevé de demandes de renseignements liées à cette peur — presque une paranoïa — relative à une fouille non appropriée réalisée dans des résidences et des lieux d'affaires.

Vous avez répondu en énumérant des précédents se rapportant à la Loi sur les pêches, et vous avez déclaré qu'on n'avait pas besoin de preuve que des actes criminels ont été commis pour faire des enquêtes à cet égard. Si une personne a des doutes raisonnables ou une preuve raisonnable, elle peut obtenir un mandat et effectuer une enquête sur place.

Pourquoi cette peur est-elle apparue? Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire, en tant que comité, pour réduire une partie de cette peur?

M. Glover : Parmi les documents que j'ai présentés, vous trouverez un certain nombre de questions qu'on nous a posées régulièrement, ainsi que les réponses que le ministère juge appropriées. Nous vous les avons fournies, au cas où elles vous aideraient à répondre aux intervenants.

Je peux également déclarer qu'à la suite des importantes consultations que nous avons eues auprès de l'industrie, de groupes de représentants de l'industrie, de groupes de consommateurs et d'autres groupes, je peux affirmer que la sécurité et la protection de la santé des Canadiens ont également une grande importance pour eux. Un nombre élevé de représentants de l'industrie sont d'accord avec ces initiatives. Ils pensent que ces initiatives sont importantes. Les industries qui se préoccupent de la santé et de la sécurité des consommateurs, qui fabriquent des produits sûrs qu'elles distribuent dans les marchés et qui ont effectué des tests avec une diligence raisonnable, aimeraient qu'on leur confirme que les autres joueurs sont soumis aux mêmes coûts, et que ces derniers conservent les dossiers nécessaires pour s'assurer qu'ils fabriquent eux aussi des produits sûrs pour les Canadiens. Il existe un grand nombre d'industries qui soutiennent assez fortement la loi proposée.

Nous sommes aussi au courant du grand nombre de préoccupations soulevées de façon forte par le groupe des fabricants de produits de santé naturels. Le ministre a déclaré qu'une modification à la loi indique de façon explicite que cette dernière ne s'applique pas aux produits de santé naturels et qu'elle ne s'appliquera pas à ces produits dans l'avenir. Pour ce faire, nous aurions besoin d'une modification à la loi. Nous croyons que si ce groupe soulève des préoccupations, ces préoccupations ne seront pas liées à la loi.

Le sénateur Keon : Je crois que c'est très sage. Je ne veux pas vous retenir trop longtemps, car il y a beaucoup de gens à la table. Nous devrons aborder ce sujet un autre jour, lorsque nous travaillerons sur une autre loi, j'en suis persuadé. Cela viendra.

J'accepte votre réponse, mais je ne sais pas pourquoi cette peur est persistante en ce qui concerne les inspecteurs musclés qui envahissent la vie privée des gens, les lieux d'affaires, et cetera.

M. Glover : Pour poursuivre sur la question posée par le sénateur, il s'agit d'une seule loi. Telle que proposée, et si on la lit de façon isolée, je peux comprendre ces préoccupations. Cependant, la loi fait partie d'un cadre plus vaste regroupant d'autres lois qui continuent de s'appliquer.

Si nous utilisons une force excessive, nous aurons des comptes à rendre, et cetera. Nous ne pouvons pas et ne devons pas lire cette loi en faisant abstraction de toutes les lois qui existent pour protéger les Canadiens. Je me tourne maintenant vers mon collègue de la Justice.

Mme Labelle : J'aimerais souligner le fait qu'aucune disposition sur l'immunité n'a été prévue dans le projet de loi. Autrement dit, un inspecteur qui agit de façon négligente pourrait être jugé responsable de ses actes. C'est un aspect du projet de loi.

Il existe un autre aspect, à savoir que les inspecteurs ne sont pas autorisés à utiliser la force. Ils doivent obtenir un mandat et être accompagnés d'un agent de la paix. Je crains que, si on en vient à ce point, ce sera vraiment parce que les inspecteurs pensent que la personne visée pourrait avoir un comportement extrême, et pas simplement être responsable d'un cas de non-conformité.

En outre, conformément aux principes fondamentaux de la loi, un inspecteur est tenu d'agir de façon raisonnable en tout temps, et ses actes peuvent être examinés par la Cour fédérale du Canada.

M. Glover : Des gens ont l'impression que nous disposons de véritables armées d'inspecteurs qui attendent de défoncer les portes des gens. Nous gérons cette loi dans un contexte ultérieur à la mise en marché. Les entreprises ne viennent pas nous voir pour nous demander d'emblée : « Pouvons-nous vendre nos produits? » Cela contribuerait à obstruer les marchés avec, littéralement, des dizaines et des centaines de milliers de produits et d'innovation. Nous travaillons dans un contexte ultérieur à la mise en marché. Nous ne sommes pas intéressés par une ou deux transactions réalisées dans la résidence d'une personne. Ce qui nous intéresse, c'est la protection de la santé et de la sécurité des Canadiens.

Cela signifie que nos inspections seront ciblées et qu'elles auront lieu là où les besoins sont les plus évidents, à savoir les gens qui importent, vendent et fabriquent un grand nombre de produits. Nous voulons nous assurer que ces joueurs se conforment à la loi et connaissent leurs responsabilités, afin que nous et les Canadiens puissions avoir confiance dans les produits que nous achetons.

Nous interviendrons seulement si nous recevons des plaintes de la population en ce qui concerne un produit en particulier, et nous agirons là où les gens ont acheté le produit qui représente des risques pour la santé ou la sécurité. Cela nous amènera à nous rendre dans certaines petites entreprises, peu importe où elles se trouvent, afin de répondre aux préoccupations qui ont été soulevées. Toutefois, dans les cas où des incidents nous ont été rapportés, nous devrons assurer un suivi et faire enquête. Il existe un nombre tellement élevé de produits que nous orienterons nos ressources en fonction des endroits où il y a un risque.

Le président : Avant de permettre au prochain membre du comité d'intervenir, j'aimerais souhaiter la bienvenue au sénateur McCoy de l'Alberta. Il est évident qu'il s'agit là d'une question importante.

Le sénateur Eaton : Merci monsieur le président, et merci à vous tous, messieurs. Une des choses que je trouve intéressante dans le projet de loi, et c'est également quelque chose que vous avez indiqué dans votre exposé, c'est que l'industrie a une responsabilité cruciale en ce qui concerne la sécurité de tout produit qu'elle fabrique, importe ou distribue.

Par contre, j'ai entendu des critiques de la part de grands détaillants en ce qui concerne la soi-disant « responsabilité », si on définit « responsabilité » en tant qu'» exigences en matière de reddition de comptes ». Pouvez-vous me répéter ce que vous leur avez dit, s'il y a lieu? De quelle façon croyez-vous que vous allez aborder cette situation? Je remarque que c'est assez flou dans le projet de loi.

M. Glover : Merci beaucoup pour votre question. Nous reconnaissons que cet aspect est flou dans la loi, et je dois admettre devant les membres du comité que ce flou est volontaire. C'est une situation qui évoluera avec le temps, et nous l'aborderons au moyen d'orientations en matière de politiques, de conseils, d'orientations destinées à l'industrie et, au besoin, d'un règlement que nous pouvons modifier en nous fondant sur ce qui fonctionne le mieux.

Actuellement, l'industrie n'est pas tenue de faire rapport sur les incidents. Il n'y a aucune reddition de comptes obligatoire concernant tout incident. Il arrive souvent que ce sont d'autres autorités législatives qui nous informent de problèmes auxquels ils ont dû faire face sans avoir pu les régler à l'échelle locale.

Le projet de loi changera cette situation. Si des problèmes surviennent en ce qui concerne des jouets pour enfants ou des berceaux, les autorités compétentes devront nous en informer afin que nous puissions faire enquête, prendre des mesures correctives, etc.

Nous avons collaboré avec l'industrie afin de déterminer ce qu'est un « incident » et à qui incombe la responsabilité en matière de rapport. Compte tenu du nombre élevé de produits à la consommation, ce n'est pas notre intérêt d'être inondés de plaintes ou de demandes concernant des produits nuisibles. Nous collaborons avec l'industrie pour déterminer ce qui serait un incident qui vaudrait la peine de nous être rapporté.

Ce qu'il nous importe de savoir, c'est si le produit a un défaut de conception ou de fabrication. S'il y a eu un certain nombre d'incidents, le produit peut constituer un risque. Par exemple, si les gens ont des problèmes avec un produit, c'est peut-être parce qu'il a été mal assemblé. Cela peut représenter un risque. Des incidents peuvent également être causés par un défaut du produit ou par l'utilisation qui en est faite. Nous sommes donc en train de voir avec l'industrie ce que nous pouvons faire pour que ce système de signalement obligatoire soit plus clair.

Encore une fois, l'objectif pour nous est de recueillir les renseignements nécessaires pour décider si nous devons intervenir ou établir une norme.

Le sénateur Eaton : Cela me rassure, car il ne faudrait pas qu'il y ait une avalanche de signalements. Une fois que le projet de loi sera adopté, allez-vous vous mettre à rédiger toute une série de règlements?

M. Glover : Pour l'instant, nous sommes en train de définir des orientations générales avec l'industrie, et nous allons continuer de le faire pendant la première année, afin d'être sûrs que nous sommes sur la même longueur d'ondes. Nous avons déjà eu beaucoup de consultations sur le sujet, et nous savons aussi que les grandes entreprises le font déjà, pour la plupart.

Le sénateur Eaton : Cela ne va-t-il pas leur imposer de nouvelles formalités bureaucratiques considérables?

M. Glover : Non, je ne pense pas, mais je reconnais que certaines petites et moyennes entreprises n'ont pas l'habitude de le faire. Nous essayons donc de les contacter pour leur expliquer en quoi consistent les nouvelles formalités administratives que nous allons leur imposer et pour nous assurer qu'il n'y en aura pas trop. En effet, nous n'avons pas besoin de renseignements inutiles qui ne serviraient qu'à congestionner nos systèmes. Nous essayons donc de tenir compte de la taille de chacune de ces entreprises et des systèmes qu'elles utilisent.

M. Ianiro : Nous avons entrepris de vastes consultations auprès de l'industrie. Les PME tout comme les grandes entreprises nous ont dit et répété qu'elles préféraient que nous établissions des orientations générales dès le début, plutôt que de passer directement à la mise en œuvre de règlements. Il faut compter 12 à 18 mois pour faire adopter des règlements et les publier dans la Gazette du Canada, et comme entre-temps nous aurions appris beaucoup de choses, nous nous serions retrouvés à la case départ.

Nous avons donc préféré travailler avec l'industrie pour définir des orientations générales. C'est un processus qui va se poursuivre, et c'est seulement si nous constatons que cela ne fonctionne pas ou que des gens ne font pas les signalements exigés que nous envisagerons de prendre des règlements. Tout le monde reconnaît que c'est la meilleure façon de procéder.

Le sénateur Segal : Ma première question porte sur ce qu'on a qualifié d' « enjeux constitutionnels » et que d'aucuns associent à ce projet de loi. Le pouvoir de perquisitionner une propriété privée suscite de grandes inquiétudes, et vous avez abordé la question. On a aussi parlé de la saisie de biens privés sans mandat du tribunal, de la destruction de biens privés sans surveillance du tribunal, de la prise de contrôle d'entreprises sans la surveillance du tribunal, de la non- restitution de biens saisis sans mandat du tribunal, et de l'imposition d'amendes sans mandat du tribunal.

Je vous remercie de nous avoir indiqué que vous avez l'intention de prendre des règlements afin de protéger les magasins d'articles d'occasion et les bazars caritatifs, entre autres, du Canada. Mais pensez-vous être aussi capables, par voie de règlement, de trouver une solution aux problèmes que je viens d'énumérer, car cela contribuerait à accroître la confiance et à dissiper les inquiétudes?

Ma deuxième question porte sur le commerce. Beaucoup de témoins nous ont dit, lorsque nous discutions des produits du tabac, que les mesures proposées dans un projet de loi fort semblable à celui-ci de par sa structure ne posaient pas de problème sur le plan commercial.

Or, nous avons constaté que des membres du Congrès et du Sénat américains achetaient des pages entières dans les journaux pour dénoncer les pratiques commerciales déloyales du Canada. D'aucuns craignent qu'en imposant de nouvelles normes sur la teneur en plomb, le Canada ne mette en place des limites plus sévères que celles qui sont en vigueur dans d'autres pays, alors que ces pays se préoccupent tout autant que le Canada de la sécurité des enfants, et qu'il ne soit finalement accusé d'enfreindre les traités commerciaux en restreignant, par une réglementation excessive, l'importation de produits en provenance d'autres pays.

Les fonctionnaires se sont efforcés de faire un choix judicieux des instruments à utiliser. Au niveau fédéral, on ne peut pas choisir n'importe quel instrument. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas une excuse pour créer un problème si on peut l'éviter.

D'ailleurs, si vous avez des suggestions à nous faire, n'hésitez pas.

M. Glover : Je vais vous donner une première réponse avant de demander à ma collègue du ministère de la Justice et à M. Ianiro de la compléter. Je laisserai le soin à ma collègue du ministère de la Justice de vous parler des aspects juridiques de la question.

Nous comprenons bien qu'il soit nécessaire d'avoir un système harmonisé, afin qu'il n'y ait pas de normes différentes pour le Canada, les États-Unis et l'Union européenne, ce qui serait insensé. Toutefois, nous voulons éviter d'en être réduits au plus bas dénominateur commun. Notre mission est de protéger la santé et la sécurité des Canadiens, et il peut arriver que nous estimions avoir les preuves scientifiques nécessaires pour décider de passer à un niveau différent de celui de nos collègues de l'Union européenne ou des États-Unis. Dans ces cas-là, nous sommes prêts à le faire.

Par ailleurs, nous sommes prêts à collaborer afin de nous assurer que nous ne créons pas des obstacles inappropriés et inutiles aux échanges commerciaux en cherchant à harmoniser et à normaliser les exigences relatives aux essais. Cela facilitera la simplification des critères relatifs aux signalements et aux essais. Par contre, lorsqu'il s'agit de la santé et de la sécurité des Canadiens, nous sommes prêts à assumer notre différence, le cas échéant. Autrement dit, nous estimons que cette différence peut être justifiée. Comme nous l'avons déjà constaté à plusieurs occasions, c'est un droit que se réserve chaque juridiction.

Pour ce qui est de la saisie ou de la confiscation de produits et de la prise de contrôle d'une entreprise, je peux vous dire que nous n'avons pas le pouvoir de prendre le contrôle d'une entreprise. Par contre, nous pouvons l'obliger à prendre des mesures correctrices. Si nous constatons qu'un produit n'est pas étiqueté de façon appropriée, par exemple que l'étiquette est rédigée en français ou en anglais seulement, nous pouvons signaler à l'entreprise qu'elle doit remédier à la situation en changeant l'étiquette. Dans le cas d'un lit d'enfant jugé dangereux, plutôt que d'obliger l'entreprise à procéder à un rappel du produit, nous pouvons lui suggérer des mesures correctrices.

C'est seulement dans le cas où l'entreprise ne tient pas compte de nos mesures correctrices que nous lui imposons une sanction administrative pécuniaire. Si nous estimons qu'elle n'est pas capable de corriger le problème ou qu'elle ne réussit pas à le faire, nous lui demandons de cesser de vendre le produit. Si elle n'obtempère pas, nous procédons alors à la saisie.

Ce n'est donc qu'à partir du moment où elle ne respecte pas les instructions que nous lui avons données que nous saisissons le produit. Si elle refuse de nous fournir les résultats d'essais ou d'autres renseignements qui nous permettent de déterminer si un produit est conforme, nous en prélevons un échantillon afin de l'analyser nous-mêmes. En revanche, nous sommes tenus de restituer l'échantillon prélevé dès que sa conformité est établie, sauf, et c'est la seule exception, lorsque le produit a fait l'objet d'une confiscation ou d'un ordre de destruction.

Nous ne sommes nullement intéressés à prendre le contrôle d'une entreprise ou à saisir de grandes quantités de produits. Nous ne le ferons que dans les cas extrêmes, lorsque nos instructions n'auront pas été suivies.

Le président : Dans votre recherche de l'harmonisation, allez-vous vous montrer passifs ou proactifs?

M. Glover : Nous allons être proactifs, voire combatifs.

Mme Labelle : Permettez-moi de revenir sur le concept de la saisie d'un produit et de sa non-restitution.

Les inspecteurs de Santé Canada ne peuvent pas conserver des produits indéfiniment, sauf si le propriétaire les a abandonnés, y a renoncé volontairement ou encore s'il est introuvable. C'est uniquement dans ces circonstances très précises qu'un produit est conservé indéfiniment. L'article 24 du projet de loi dispose que l'inspecteur doit donner mainlevée de la saisie après avoir constaté que les dispositions de la loi et des règlements applicables ont été respectées.

Le produit peut aussi avoir été confisqué après une condamnation ou au moment où l'on constate une infraction. Dans ce cas très précis, le produit peut être conservé indéfiniment.

Si la saisie se produit au cours d'une enquête pénale, elle doit se faire dans le cadre d'un mandat délivré en vertu du Code criminel. Dans ce cas, la chose saisie doit être restituée, à moins qu'elle ne soit nécessaire à l'enquête ou aux procédures qui en découlent. Si la chose n'est pas restituée, l'inspecteur doit en informer le tribunal ou demander à ce dernier de prendre une décision à cet égard. Dans certains cas, le propriétaire peut également demander au tribunal que la chose lui soit restituée.

Le produit peut-il être détruit sans qu'il n'y ait eu de révision? Un produit ne peut être détruit que s'il a été confisqué de la façon dont je l'ai expliqué. Il n'y a confiscation que lorsqu'une personne est reconnue coupable d'une infraction à la loi ou au Code criminel. Elle ne peut pas réclamer la restitution de son bien ou consentir à sa confiscation lors d'une révision effectuée par le ministre, lorsqu'il s'agit d'une infraction à la loi, ou par le tribunal, lorsqu'il s'agit d'une infraction au Code criminel. Même si le ministre procède à une révision, la Cour fédérale a le pouvoir de faire une autre révision. Autrement dit, les conditions dans lesquelles se font la saisie, la conservation et la destruction d'un bien sont soumises à des contrôles précis.

Le président : Avez-vous quelque chose à ajouter au sujet des répercussions commerciales?

Mme Labelle : Le ministère de la Justice s'assure que chaque texte législatif est conforme aux obligations commerciales contractées par le Canada.

Pour ce qui est des nouvelles normes, le ministère de la Justice examine de près chacun des textes législatifs, règlements ou nouvelles normes qui sont proposés. Cela se fait au cas par cas, au fur et à mesure qu'ils sont préparés par le ministère de la Santé.

Le sénateur Cordy : Notre souci principal, à nous tous qui sommes ici autour de cette table, est de veiller à ce que les produits vendus au Canada ne posent aucun danger. C'est bien évident. Je suis sûre que nous appuyons tous cet objectif du projet de loi, qui est la sécurité des produits. Je dois dire toutefois que j'ai reçu à ce sujet plus de courrier qu'au sujet de n'importe quel autre projet de loi, même celui qui concernait le mariage civil, ce qui n'est pas peu dire. Nous devons donc assumer nos responsabilités et nous assurer que ce projet de loi n'aura pas d'incidence négative sur les Canadiens.

L'une des choses qui me préoccupent est la communication de renseignements par le ministre. Les articles 15 et 16 permettent au ministre de communiquer des renseignements commerciaux confidentiels à une personne ou à une administration. Or, la définition d'» administration » inclut les États étrangers et les organisations internationales d'États. Cela me rend un peu frileuse. Et je lis un peu plus loin que cela peut se faire sans le consentement de la personne, et même sans l'aviser.

J'ai reçu beaucoup de réactions à ce sujet, et cela se comprend, surtout de la part d'entrepreneurs qui craignent que le ministre ne transmette des secrets commerciaux à des administrations étrangères ou même à l'intérieur du Canada, mais surtout à des administrations étrangères.

On avait eu le même genre de chose avec le projet de loi C-11, qui portait sur les anthropopathogènes. À l'époque, cela ne me plaisait pas trop, mais comme il s'agissait d'agents pathogènes humains, je m'étais dit qu'il fallait l'accepter. Aujourd'hui, il est question de la sécurité des produits de consommation, et nous devons certes nous assurer que les produits vendus ou donnés aux Canadiens ne présentent aucun danger. Mais j'aimerais savoir si la commissaire à la protection de la vie privée a donné son feu vert à ces dispositions? Pourquoi est-il nécessaire de communiquer ce genre de renseignements à des administrations étrangères ou à des organisations d'États étrangers?

M. Glover : Soyez assurés que nous n'aurons recours à ces articles de la loi que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, dans le but de protéger la santé et la sécurité des Canadiens. Autrement dit, nous ne les invoquerons que si nous sommes convaincus qu'en ne le faisant pas, nous ferions courir un risque indu et inapproprié à la santé et à la sécurité des Canadiens. C'est donc un pouvoir qui ne sera exercé que dans des circonstances extrêmement rares.

Étant donné la dimension internationale des entreprises dont il est question et le nombre de pays impliqués dans les circuits d'approvisionnement, il arrivera inévitablement que nous ayons affaire à des gouvernements étrangers et à des institutions qui n'ont pas leur siège au Canada. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu ce genre de dispositions.

Nous avons également consulté la commissaire à la protection de la vie privée.

M. Ianiro : Nous estimons que les articles 16 et 17, qui portent sur les renseignements commerciaux confidentiels, permettent de concilier l'intérêt public, la protection de la santé et de la sécurité humaines ainsi que la protection des renseignements que l'industrie nous aura communiqués.

Les renseignements commerciaux confidentiels dont il est question ici sont essentiellement des renseignements sur des comptes, des listes des points de vente des produits, les noms des fournisseurs et des distributeurs des produits, etc. Ce n'est pas le genre de renseignements que nous aurions besoin de communiquer aux institutions que vous avez citées, qu'il s'agisse d'administrations étrangères ou d'organisations internationales. Les informations que nous pourrions leur communiquer viseraient plutôt à obtenir leur collaboration pour vérifier d'autres détails que nous n'aurions pas en notre possession mais dont nous aurions besoin pour assurer la protection de la santé et de la sécurité des Canadiens.

Par exemple, supposons qu'un incident se produise avec un lit d'enfant. Si nous savons que le lit est également vendu aux États-Unis, nous communiquerons avec notre homologue dans ce pays, la United States Consumer Product Safety Commission, pour lui demander si des incidents lui ont été signalés au sujet du même produit, quand ils se sont produits et quelle était leur nature. C'est ce que nous faisons déjà dans le cadre de la Loi sur les produits dangereux. La United States Consumer Product Safety Commission et Santé Canada émettent des rappels conjoints. C'est grâce à la communication de ce genre de renseignements que nous pouvons le faire.

Les médias nous ont reproché de ne pas réagir assez vite, tout au moins pas aussi vite que d'autres pays comme les États-Unis. Or, s'ils peuvent réagir rapidement, c'est en partie dû au fait que leur loi prévoit le signalement obligatoire des incidents, ce qui n'est pas le cas chez nous, tant que le projet de loi C-6 n'est pas adopté. Il faut aussi avoir des dispositions qui autorisent la communication de renseignements, et c'est ce que prévoit le projet de loi.

Il convient de souligner qu'en vertu de l'article 17, en cas de danger grave ou imminent — entendez danger de mort —, le ministre peut communiquer ces renseignements sans entente de confidentialité préalable. Par contre, à l'article 16, une entente de confidentialité doit avoir été signée avant que nous puissions communiquer les renseignements. Si ces renseignements sont communiqués de façon inappropriée, la jurisprudence ou d'autres lois peuvent être invoquées.

Nous avons jugé bon d'inclure ici les organisations internationales et les provinces parce qu'un grand nombre de produits sont réglementés au niveau provincial. C'est le cas notamment de la majorité des articles électriques qui, en Ontario, par exemple, sont réglementés par l'Electrical Safety Authority. Le fait d'avoir le pouvoir de communiquer ces renseignements nous permet de collaborer avec les provinces dans le but d'avoir une approche cohérente et uniforme dans tout le Canada.

Quant aux organisations internationales, il s'agit d'agences de normalisation qui ne sont pas nécessairement liées à des organisations gouvernementales et qui s'occupent d'homologation et de certification des produits. Il se peut que nous ayons besoin de communiquer avec ces agences pour savoir si tel ou tel produit a vraiment fait l'objet d'un processus de certification ou d'homologation.

Ce genre de dispositions existe. En fait, nous avons déjà des ententes de confidentialité et sommes en mesure de collaborer avec les États-Unis, surtout, et, dans une certaine mesure, avec l'Union européenne.

Le sénateur Cordy : Vous avez dit que vous aviez consulté la commissaire à la protection de la vie privée. Qu'a-t-elle dit?

M. Glover : Son bureau nous a fait parvenir un certain nombre de questions sur différents aspects du projet de loi, et nous sommes en train d'y répondre. Je ne suis donc pas en mesure de vous dire exactement ce qu'elle a dit. Nous ferons parvenir cette information à la greffière.

Le sénateur Cordy : Merci.

Le sénateur Callbeck : Je vous remercie de votre déclaration. À l'article 12, vous faites peser le fardeau des essais et des études sur les fabricants et les importateurs, plutôt que sur les agences gouvernementales comme l'Agence d'inspection des aliments. Pourquoi ce revirement?

Deuxièmement, comment le gouvernement fédéral pourra-t-il s'assurer que ces essais et ces études ont été faits correctement? Les fabricants et les importateurs devront-ils les réaliser dans un certain délai? Et les coûts? Cela risque de coûter très cher. Ce ne sera peut-être pas un problème pour les grandes et moyennes entreprises, mais je pense plus particulièrement aux petites entreprises. Ces dernières ont-elles soulevé ce problème? Avez-vous eu des consultations à ce sujet?

M. Glover : Il y a eu beaucoup de consultations. Au moins une cinquantaine d'organisations nous ont fait parvenir des observations, et nous continuons d'avoir des consultations avec l'industrie et la société civile.

Vous me demandez pourquoi il y a eu un revirement, et je vous dirai, au risque de me répéter que c'est à cause du grand nombre de produits de consommation offerts sur le marché. Nous demandons donc à ceux qui les conçoivent et qui les fabriquent de les tester afin de s'assurer qu'ils ne présentent pas de danger. Ces gens-là doivent démontrer qu'ils ont réellement procédé à ces essais. Ils ne peuvent plus s'en laver les mains et dire : « nous ne savons pas exactement ce que fait l'usine en Chine ou ce que contient telle ou telle peinture ». Ils devront être en mesure d'indiquer quels ingrédients entrent dans la composition de la peinture et dans le produit fini qui est vendu au Canada. Autrement dit, ils devront garantir que le produit ne pose aucun danger.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, notre objectif est de prévenir les problèmes. Nous sommes prêts à travailler avec les agences de normalisation dans le but d'établir des normes appropriées pour une vaste gamme de produits de consommation. Il faudra que les industriels soient pleinement informés de ces normes afin qu'ils puissent fabriquer des produits qui y sont conformes. Ils devront tester leurs produits, pas seulement parce que nous l'exigeons, mais aussi pour pouvoir fournir la preuve aux agences de normalisation qu'ils respectent les normes établies. Cela nous donnera une plus grande marge de manœuvre pour déployer nos ressources en fonction des problèmes qui se présentent. Il incombe aux entreprises de s'assurer que les produits qu'elles offrent aux Canadiens ne posent aucun danger; ce n'est pas au gouvernement de faire l'assurance de la qualité de leurs produits.

M. Ianiro : Au sujet du revirement dont vous parlez, il s'agit d'un autre pouvoir que le ministre pourra invoquer pour demander que lui soient communiqués les résultats des essais. Il se peut que les essais aient déjà été effectués et que les fabricants et les importateurs aient les résultats en leur possession. Cela ne signifie pas pour autant, et cela mérite d'être précisé, que Santé Canada ne continuera pas de tester des produits dans ses laboratoires.

Nous avons actuellement plus de 30 règlements en vigueur, en vertu de la Loi sur les produits dangereux. Ces règlements continueront d'être appliqués en vertu de la Loi sur la sécurité des produits de consommation. Sur un cycle de six ou sept ans, nous comptons examiner tous les aspects de ces règlements et procéder à des essais ciblés dans notre laboratoire homologué, à Ottawa. Cela ne va pas changer. L'article 7 nous permet de demander aux fabricants et aux importateurs de nous fournir les résultats des essais. Dans la plupart des cas, ils les ont déjà en leur possession. Nous procéderons alors à des vérifications et à des essais ponctuels pour valider l'exactitude de ces résultats.

Pour ce qui est de la validité des essais, et votre question portait là-dessus, le laboratoire a établi des normes qu'elle met à la disposition de l'industrie, à savoir la méthodologie, les appareils et les équipements que nous utilisons pour vérifier la conformité.

Vous avez demandé si un délai avait été prévu. Dans la plupart des cas, les essais ont déjà été faits. C'est le seul moyen, bien souvent, de savoir si le produit est conforme aux exigences canadiennes. En ce qui concerne les coûts, la majorité des entreprises font déjà ces essais. Il convient de souligner ici que ces pouvoirs ne s'appliquent qu'aux fabricants et aux importateurs, pas aux détaillants ou aux publicistes. Si vous n'êtes pas un importateur direct, nous ne pouvons pas vous demander de fournir les résultats des essais. Nous n'avons pas non plus l'intention d'imposer à de petits détaillants des essais potentiellement coûteux. Mais encore une fois, quand on est en affaires, il faut assumer ses responsabilités. Dans certains cas, le seul moyen pour un importateur d'être sûr que les produits qu'il importe répondent à nos critères est d'effectuer lui-même des essais.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que ces essais et ces études seront normalisés, mais comment le gouvernement fédéral va-t-il s'assurer qu'ils sont effectués correctement?

M. Glover : Notre objectif ici est de nous assurer que les entreprises sont informées de ces normes. Comme l'a indiqué mon collègue, nous allons faire des essais ponctuels afin de vérifier que l'industrie assume ses responsabilités et que tout le système marche bien. C'est là l'objectif des essais auxquels nous allons procéder dans nos laboratoires.

Le président : Nous allons maintenant laisser la parole au sénateur Martin, qui vient de la Colombie-Britannique. C'est la marraine officielle du projet de loi C-6 au Sénat.

Le sénateur Martin : Je vous remercie de comparaître devant le comité. J'ai deux questions à vous poser. La première concerne la Charte et certains problèmes constitutionnels. Le ministre de la Justice a-t-il eu l'occasion d'examiner attentivement ce projet de loi? Estime-t-il qu'on a pris en compte les problèmes constitutionnels que certains ont évoqués?

Mme Labelle : Je peux vous confirmer que le ministère de la Justice, au nom du ministre de la Justice, a vérifié que le projet de loi était bien conforme à la Charte. Il a notamment examiné de près la conformité des pouvoirs d'inspection avec l'article 8 de la Charte. Nous sommes d'avis que les dispositions en question satisfont aux critères établis par les tribunaux en la matière.

Le sénateur Martin : Ma deuxième question porte sur les autres juridictions et sur l'interconnexion des économies du monde entier. Vous avez dit que d'autres pays comme les États-Unis et l'Union européenne avaient déjà modernisé leurs systèmes. Dans quelle mesure sommes-nous en retard? Le projet de loi va-t-il nous aider à rattraper notre retard? Vous avez donné un exemple avec le système de signalement obligatoire qui fait désormais partie du projet de loi. Pourriez-vous nous donner des précisions sur les autres lacunes que nous avons en ce moment au Canada?

M. Glover : J'ai déposé un document d'une page qui décrit justement ces lacunes, et je vais le passer rapidement en revue.

Premièrement, l'exigence générale en matière de sécurité, qui fait peser la responsabilité sur l'industrie, n'existe pas dans l'actuelle Loi sur les produits dangereux, mais elle fait partie du nouveau projet de loi C-6. Les États-Unis n'ont pas cette exigence, mais ils ont la capacité de faire appliquer des normes non réglementées. L'Union européenne a adopté le principe de l'exigence générale en matière de sécurité. L'adoption du projet de loi nous permettra donc de rattraper notre retard dans ce domaine.

Le signalement obligatoire des incidents n'est pas prévu dans l'actuelle Loi sur les produits dangereux, mais il est proposé par le projet de loi C-6. Les États-Unis et l'Union européenne ont déjà ce mécanisme. Il en va de même pour la traçabilité. Nous n'avons pas d'exigence en matière de traçabilité, alors que les États-Unis et l'Union européenne en ont, sous la forme d'un mécanisme de rétention des documents. Pour ce qui est maintenant des mesures correctrices obligatoires, y compris le rappel des produits, nous n'avons pas de mécanisme en place, alors que nos principaux partenaires commerciaux en ont. Quant aux amendes et aux sanctions, nous pouvons actuellement en imposer, mais seulement s'il s'agit d'un produit réglementé, ce qui signifie qu'il faut passer par les parties 1 et 2 de la Gazette du Canada. Pour le moment, nous nous contentons de mesures volontaires, ce qui n'est pas suffisant pour protéger la santé des Canadiens. Nous n'imposons pas d'amendes parce que cela ne sert à rien, vu la lenteur de tout le processus. Bref, à l'heure actuelle, nous sommes à la traîne de nos principaux partenaires commerciaux.

En réponse à votre dernière question, j'aimerais dire qu'il existe une procédure d'homologation et de vérification par une tierce partie. Ce mécanisme, qui existe dans d'autres juridictions, permet à des tierces parties indépendantes de tester et d'homologuer des produits pour le compte des entreprises. Le gouvernement accepte cela.

Le sénateur Dyck : Le projet de loi ressemble beaucoup à un autre texte que nous avons examiné récemment, le projet de loi C-11, sur les agents pathogènes humains et les toxines. En effet, il y avait les mêmes problèmes au sujet des pouvoirs des inspecteurs, de la protection de la vie privée, etc.

Toutefois, ce qui les distingue, c'est notamment le niveau de risque. Avec le projet de loi C-11, nous avions manifestement affaire à des agents infectieux et extrêmement toxiques, et il nous a donc été plus facile d'accepter que les inspecteurs se voient confier les pouvoirs nécessaires pour protéger la santé des Canadiens.

Si l'on en juge par l'Annexe 2 du projet de loi C-6, qui donne une liste des produits interdits, le niveau de risque n'est pas tout à fait le même. Par conséquent, comment un inspecteur va-t-il pouvoir décider, en vertu de l'article 30, qu'il a des motifs raisonnables de croire qu'un produit est dangereux et qu'il doit en ordonner le rappel? Qu'est-ce qui constitue des motifs raisonnables?

M. Glover : Permettez-moi de vous dire qu'il serait imprudent de croire qu'il s'agit là de risques bénins. Nous constatons malheureusement chaque jour que des Canadiens sont victimes des effets nocifs de produits de consommation dangereux. Certains en meurent, d'autres subissent des blessures ou sont victimes d'accidents.

D'après le classement effectué par l'OCDE, nous ne performons pas aussi bien dans ce domaine que certains de nos principaux partenaires commerciaux. Des hospitalisations sont souvent causées par des accidents et des blessures liés à des produits de consommation inappropriés et dangereux, sans parler des modes d'emploi imprécis qui sèment la confusion chez les consommateurs. Ce ne sont donc pas des risques bénins.

Charles Ethier, directeur général, Direction de la sécurité des produits de consommation, Santé Canada : C'est une erreur de penser que les produits de consommation présentent moins de risques que d'autres produits. Comme l'a dit M. Glover, il arrive malheureusement que des produits de consommation provoquent la mort.

La loi en vigueur contient des lacunes par rapport au dispositif législatif de nos principaux partenaires commerciaux. Le projet de loi C-6 vise à y remédier en nous permettant d'intervenir de façon plus rapide et plus efficace lorsqu'un jouet, par exemple, met la vie des enfants en danger.

Nous avons eu des cas de ce genre, souvenez-vous des balles de type yo-yo. Elles ont fait l'objet d'un rappel au Canada, car les enfants qui les utilisaient risquaient sérieusement de s'étrangler avec. Il y a eu d'autres cas de ce genre, qui ont causé des morts.

Il y a eu aussi des incidents, l'année dernière je crois, avec du matériel artistique destiné aux enfants, car certaines substances contenaient la fameuse drogue du viol. Ces cas sont rares, heureusement, mais les risques sont parfois très réels.

Nous ne pouvons pas prétendre non plus, vu la nature et le nombre des produits de consommation qui arrivent sur le marché chaque année — surtout les nouveaux produits de consommation — que nous pouvons anticiper tous les risques qui y sont associés. Ce projet de loi est nécessaire car il nous permettra de prendre les mesures nécessaires pour appréhender ces risques. Nous sommes convaincus que ce texte est l'instrument dont nous avons besoin.

M. Glover : Vous vouliez savoir comment nous mesurons le risque? Je vous dirai que lorsque les inspecteurs constatent qu'il y a un problème au niveau de l'étiquetage, ils ne vont pas ordonner pour autant un rappel du produit. Les mesures à prendre pour corriger le problème sont relativement simples, et il suffit souvent d'ajouter une étiquette au produit.

Nous avons des méthodes sophistiquées qui nous permettent de catégoriser et de mesurer les risques. Si le problème concerne le mode d'emploi, il est facile d'y remédier. Si une pièce est défectueuse, il n'est pas nécessaire de rappeler le produit; il suffit de fabriquer une nouvelle pièce qui remplacera la pièce défectueuse.

Beaucoup de problèmes peuvent se régler grâce à la formation, à l'expérience, aux protocoles et à la capacité de l'industrie de réagir rapidement. Bien sûr, notre plus gros souci concerne les jeunes enfants qui, eux, sont extrêmement vulnérables face à des produits dangereux. Certains ont perdu un membre ou un doigt parce qu'ils avaient mal utilisé un produit. Nous déterminons les interventions appropriées en fonction du niveau de risque d'un produit.

J'attire votre attention sur le fait que, sans le projet de loi C-6, nous n'aurons pas le pouvoir de rappeler un produit. À l'heure actuelle, le rappel d'un produit doit être négocié avec l'entreprise, sur une base volontaire, et cela peut prendre du temps. On nous reproche souvent de tarder à intervenir lorsqu'il s'agit de protéger la santé des Canadiens. C'est donc un élément important lorsque nous faisons face à des risques particulièrement élevés.

Le sénateur Munson : Je vous remercie de nous faire part de votre expertise, mais pendant que nous vous écoutons, la plupart d'entre nous recevons des messages sur notre Blackberry. Personnellement, depuis le début de la séance, j'en ai reçu une demi-douzaine au sujet des aspects constitutionnels du projet de loi C-6.

Les gens estiment — et je pense qu'il va falloir trouver une réponse à ces questions aujourd'hui — que le projet de loi C-6 prévoit une application non régulière de la loi, et que cela est anticonstitutionnel.

Permettez-moi de lire l'un des courriels que j'ai reçus :

Sénateur,

L'application non régulière de la loi qui est prévue dans le projet de loi C-6 est anticonstitutionnelle. Selon le livre de procédure pénale, la Charte des droits et libertés et la Loi constitutionnelle sont les lois suprêmes du pays, et toute loi qui enfreint nos droits est « inopérante ». Le gouvernement essaie de faire adopter une loi anticonstitutionnelle, et pendant qu'il y est, pourquoi n'utilise-t-il pas la voie accélérée? Comment pouvons-nous croire que ce projet de loi sert les intérêts de la nation et de ses citoyens si on recourt à ce genre de manœuvres pour le faire adopter? Ce projet de loi ne doit pas être adopté. Il est anticonstitutionnel et illégal et constitue un acte de trahison. Votre rôle, sénateurs, est de nous protéger, pas de bafouer nos droits.

Je ne partage pas nécessairement cette opinion, mais voilà le genre de commentaires qu'on reçoit. C'est l'une des raisons, en plus de la protection de la vie privée, pour lesquelles nous sommes réunis ici.

Vous avez dit que le ministre était confiant de sortir gagnant d'une contestation du projet de loi en vertu de la Charte. Que nous conseillez-vous de répondre à ces milliers de gens qui nous envoient ce genre de courriels?

M. Glover : Je ne peux pas résister à la tentation de vous demander si l'un d'entre vous a reçu un courriel sur ma superbe performance aujourd'hui? Personne, sans doute.

Loin de moi l'idée de prendre les choses à la légère. Nous savons qu'un lobby très actif s'oppose à certaines dispositions du projet de loi et qu'il est bien organisé. Dans notre société d'aujourd'hui, avec tous les outils qui existent — que ce soient des lettres types ou autres —, il est possible de bien s'organiser pour faire connaître ses préoccupations.

Quant aux réponses qu'il faut leur donner, je vous conseille de leur communiquer les informations que je vous ai données. Je pense que ce sont des réponses appropriées à leurs questions.

En fait, la réponse est simple : les entreprises qui fabriquent des produits sûrs appuient ce projet de loi; il ne les préoccupe pas. Elles savent qu'elles opèrent dans un secteur réglementé, et que le gouvernement doit exercer une surveillance — pas intervenir, mais surveiller — pour s'assurer que les systèmes fonctionnent afin qu'elles soient assurées que les produits qu'elles vendent aux Canadiens ou qu'elles exportent à l'étranger sont sûrs, pas seulement pour les Canadiens mais aussi pour les consommateurs des autres pays vers lesquels elles exportent. Les dispositifs que nous mettons en place, comme l'exigence générale en matière de sécurité et les inspections que nous faisons pour nous assurer que le système fonctionne, sont tout à fait légaux et appropriés.

J'ai du mal à comprendre pourquoi les gens sont si inquiets. S'ils fabriquent des produits sûrs et qu'ils peuvent démontrer qu'ils le sont, nous n'aurons aucun problème avec eux. Notre objectif n'est pas de forcer des portes pour saisir des produits au hasard. Nous cherchons au contraire, en collaboration avec l'industrie, à garantir aux consommateurs que les produits qu'ils achètent sont sans danger.

Le président : Nous essayons simplement de nous assurer que le libellé de la loi reflète bien vos intentions.

M. Glover : Au risque de me répéter, je dirai que oui. Nous avons des pouvoirs que nous pouvons invoquer pour protéger les animaux; nous estimons que les êtres humains devraient bénéficier du même niveau de protection.

Le président : J'aimerais savoir ce qu'en pense l'avocate ici présente.

Mme Labelle : Pour ce qui est de la constitutionnalité du projet de loi, je me dois de préciser d'emblée que la question comporte deux aspects. D'un côté, il y a le recours à des sanctions pénales.

Lorsqu'on parle d'inspecteurs, cela signifie qu'on a mis en place un processus administratif pour vérifier la conformité. La liberté individuelle n'est jamais en jeu. Jamais un individu ne fera de la prison pour non-conformité, sauf si cette non-conformité devient pénale.

Les normes relatives à l'application régulière de la loi dans le contexte d'une intervention administrative visant à vérifier la conformité sont différentes des normes qu'on utilise dans une procédure pénale. Dans les deux cas, il y a application régulière de la loi. Dans le cas d'une intervention administrative visant à vérifier la conformité, le comportement de l'inspecteur peut être porté à l'attention de la Cour fédérale du Canada. C'est l'application régulière de la loi. Si ledit comportement dépasse une certaine limite et devient une activité pénale, cela ressort du Code criminel et des tribunaux. Il y a donc toujours application régulière de la loi.

Le président : Tout à l'heure, vous avez parlé de la conformité avec la Charte. Pouvez-vous communiquer au Comité un avis écrit attestant que le projet de loi C-6 est constitutionnel et conforme à la Charte?

Mme Labelle : Je m'en occuperai avec mes collègues.

Le président : Cela nous aidera à répondre aux gens.

Le sénateur McCoy : Je suis sûre que vous êtes sincères et que vous n'avez pas l'intention de commettre des actes illégaux, et qu'en fait, vous êtes animés des meilleures intentions. Permettez-moi quand même de vous poser la question suivante : pourquoi devrions-nous confier des pouvoirs aussi extraordinaires à Santé Canada étant donné le nombre incalculable de fois où ce ministère a failli à ses devoirs au cours des 10 dernières années? Comment pouvez-vous nous convaincre que vous saurez exercer d'une façon raisonnable les pouvoirs qui vous sont confiés alors que nous avons eu maintes preuves du contraire au cours des 10 dernières années?

M. Glover : Je remercie le sénateur de cette question très directe. Très franchement, ma réponse est simple : réinvitez- nous et faites-nous confiance. Voyez ce que nous avons fait et comment nous avons exercé les pouvoirs qui nous ont été confiés. Nous savons qu'avec la mondialisation et le rythme des innovations, ce sont là des pouvoirs que d'autres juridictions ont jugé important d'avoir pour protéger leurs propres citoyens. Nous estimons que les Canadiens devraient avoir le même niveau de protection.

Nous opérons dans un marché mondial, et avec des instruments comme le signalement obligatoire, nous serons en mesure de savoir où il y a des problèmes et de cibler nos interventions en conséquence. Je serais ravi de vous faire un rapport sur la façon dont nous avons exercé ces pouvoirs. Nos interventions seront ciblées et délibérées. Elles seront déclenchées par des preuves que nous aurons recueillies au sujet de la non-conformité d'un produit ou par des plaintes des consommateurs, l'objectif étant toujours de protéger la santé et la sécurité des Canadiens.

J'aimerais ajouter qu'on nous a fortement reproché de réagir trop lentement. Les consommateurs veulent être mieux protégés. Les premières questions auxquelles mes collègues doivent souvent répondre sont : que saviez-vous? quand l'avez-vous appris? pourquoi avez-vous tant tardé à intervenir? Les Canadiens veulent que leur gouvernement intervienne davantage lorsqu'il y a un problème. Par contre, ils ne veulent pas nous voir quand il n'y a pas de problème. Avec le système de signalement obligatoire, nous serons en mesure de cibler nos interventions.

Le sénateur Day : J'ai beaucoup de problèmes avec ce projet de loi. J'ai déjà posé beaucoup de questions pour lesquelles j'ai obtenu certains éclaircissements, ce dont je vous remercie.

Il y a pas mal de documents que je n'ai pas eu le temps de lire, car étant donné le peu de temps dont nous disposons, nous ne pouvons pas examiner à fond toutes les dispositions du projet de loi. De façon générale, j'estime que ce projet de loi va beaucoup plus loin que cela n'est nécessaire. Vous l'avez reconnu en annonçant que des règlements exempteraient certains organismes caritatifs de l'application de ce projet de loi.

À mon avis, vous ratissez beaucoup trop large. Tout le monde ici appuie l'objectif général du projet de loi, qui est d'actualiser la législation sur les produits de consommation et la Loi sur les produits dangereux, laquelle est en vigueur depuis déjà pas mal de temps.

Le processus administratif qui est proposé, avec le recours aux inspecteurs, me préoccupe beaucoup. Vous avez dit que ces gens-là inspecteraient principalement des entreprises, mais il y aura certainement beaucoup de cas où il ne s'agira pas d'entreprises. Supposons qu'une personne en frappe une autre avec une poêle à frire. Selon les dispositions actuelles, celui qui a acheté la poêle à frire pourrait fort bien devoir soumettre un rapport d'incident. Le libellé est tellement vague qu'il n'exclut pas ce genre de situation. Dans votre esprit, ces situations sont exclues, et vous nous demandez tout simplement de vous faire confiance, que vous n'irez pas poursuivre ces gens-là. Mais cela nous préoccupe beaucoup. Vous nous avez proposé de vous réinviter devant notre comité, et c'est sans doute ce que nous devrions faire afin que nous puissions examiner ensemble certaines dispositions précises de ce projet de loi.

Le président : Tout à fait d'accord.

J'aimerais poser deux petites questions. À l'article 23, on emploie le mot « chose ». Quelle est la définition de « chose »? Je ne la vois pas dans le projet de loi. L'article 37 fait référence à la Loi sur les textes réglementaires. J'essaie de comprendre pourquoi une partie de ce projet de loi ne tombe pas sous le coup de la Loi sur les textes réglementaires. Cela me préoccupe.

Le sénateur Day : Monsieur le président, pour gagner du temps, je vais vous donner la définition du mot « chose ». Je suis un peu pressé car je dois aller présider un autre comité.

Le président : Si vous répondez rapidement à mes deux questions, nous pourrons être sortis d'ici dans cinq minutes.

M. Glover : Malgré les affirmations qu'a faites le sénateur, je peux vous confirmer que ces dispositions s'appliquent aux activités commerciales. Permettez-moi de vous donner un exemple. Un couteau, c'est tranchant. Ça sert à couper des choses. Mais nous n'allons pas déclarer pour autant qu'un couteau contrevient à l'exigence générale en matière de sécurité. Les tribunaux sont en mesure d'interpréter ces concepts, qui sont compris et qui font l'objet d'une interprétation. Ces dispositions s'appliquent donc aux activités commerciales, c'est-à-dire à la fabrication, à l'importation et à la vente d'un produit.

Le sénateur Day : Dans ce cas, donnez-nous la définition de « vendre ». Quand vous parlez de la vente d'un produit, il faut savoir ce que vous entendez par « vendre ». Si vous vous contentez de parler de la vente commerciale d'un produit, vous ne faites que survoler la question. La définition de « vendre » est tellement vague dans le projet de loi qu'elle n'exige même pas une fin commerciale. Autrement dit, il pourrait s'agir d'une vente de garage ou d'un bazar caritatif.

M. Glover : Permettez-moi de vous dire que ces activités-là sont couvertes. Chaque année, nous avertissons les gens de ne pas vendre des marchettes pour bébés, car elles sont interdites. Et malgré cela, les gens essayent de vendre des produits réglementés ou interdits dans les marchés aux puces ou les ventes de garage. Il y a transaction lorsqu'il y a vente d'un produit, ce qui est une activité commerciale. Nous voulons tout simplement empêcher que des produits dangereux continuent de se vendre.

Si quelqu'un est en possession d'un lit d'enfant qui a fait l'objet d'un rappel parce qu'il est dangereux, allez-vous l'encourager à le vendre pour cinq dollars à sa prochaine vente de garage? Non.

Le sénateur Day : Non, en effet, mais je ne suis pas plus d'accord pour que vous vous immisciez dans ma vie quotidienne.

Le président : Nous essayons de trouver la définition du mot « chose ». Est-ce la même chose que « article »?

Le sénateur Day : Ça n'est pas défini.

Mme Labelle : C'est une convention d'écriture. Nous avons employé le mot « chose » pour englober le mot « article », qui est défini, et le mot « moyen de transport ».

Le président : Et la Loi sur les textes réglementaires?

Mme Labelle : La Loi sur les textes réglementaires s'applique aux arrêtés d'urgence et aux règlements d'application de la loi. Elle ne s'applique pas à l'ordre donné par un inspecteur, lequel ordre est une chose spécifique et non une règle d'application générale.

Les arrêtés d'urgence et les règlements d'application des arrêtés d'urgence sont exemptés de l'article 3, qui porte sur l'enregistrement des règlements, et de l'article 9, qui porte sur l'entrée en vigueur des règlements, et ce, pour des raisons d'ordre pratique. En effet, cela permet au gouvernement, dans certaines circonstances, d'intervenir le plus rapidement possible. Par contre, une fois confirmés par le GEC, les arrêtés et les règlements sont renvoyés au Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation, qui vérifie qu'ils satisfont aux exigences de publication.

S'il s'agit de règlements qui ont déjà été déposés devant la Chambre, il y a un contrôle parlementaire avant et après.

Le sénateur Banks : À la page 22, le paragraphe 37(3) dispose que :

L'arrêté est soustrait à l'application des articles 3 et 9 de la Loi sur les textes réglementaires.

C'est bien ce que dit le projet de loi, n'est-ce pas?

Mme Labelle : Oui, et j'ai bien dit qu'ils étaient exemptés des articles 3 et 9; toutefois, ils ne sont pas exemptés de toute la Loi sur les textes réglementaires. L'exemption s'applique à ces deux articles précis.

Le sénateur Day : La définition de « vendre » comprend « [...] fournir à une ou plusieurs personnes, pour une contrepartie ou non [...] ». Quand vous entendez le mot « vendre », il faut penser à la définition qu'en donne ce projet de loi et pas au sens normal que vous lui donneriez.

M. Glover : Croyez-moi, je n'essaie pas d'entamer un débat, mais nous avons tous en tête des exemples où l'industrie distribue des produits gratuitement. Par conséquent, nous ne voulons pas que des produits dangereux soient exemptés de ce projet de loi simplement parce qu'ils ont été distribués gratuitement. Si un produit n'est pas bon pour la vente, l'entreprise doit prendre des mesures, mais elle ne doit pas le distribuer gratuitement.

Le président : Sur cette note, je vous propose de conclure notre réunion d'aujourd'hui, mais nous allons vous réinviter car nous avons d'autres questions à vous poser.

Le sénateur Pépin : Quand allons-nous parler de la traduction?

Le président : Quand vous voulez, sénateur Pépin. J'avais déjà votre nom sur ma liste pour cette question, mais nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque ces témoins comparaîtront à nouveau.

(La séance est levée.)


Haut de page