Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 3 - Témoignages du 25 octobre 2011
OTTAWA, le mardi 25 octobre 2011
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 17 h 5, afin d'examiner, pour en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujet : l'innovation dans le secteur agricole et agroalimentaire du point de vue des producteurs).
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Mesdames, messieurs, la séance est ouverte.
[Français]
Je vous souhaite, honorables sénateurs et les invités, la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.
[Traduction]
Messieurs Bacon et Phillips, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à comparaître pour nous faire part de vos opinions, de votre vision et de vos connaissances sur l'industrie. Nous vous en sommes reconnaissants.
En guise d'introduction, je suis Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick, et je préside le comité. Je demanderais à chaque sénateur de se présenter aux témoins et aux téléspectateurs.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Fairbairn : Joyce Fairbairn, de Lethbridge, en Alberta.
Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.
Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.
Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
Le sénateur Rivard : Michel Rivard, des Laurentides, Québec.
[Traduction]
Le président : Nous poursuivons aujourd'hui notre examen de la recherche et de l'innovation dans le secteur agricole en vue de développer de nouveaux marchés au pays et à l'étranger, de renforcer la viabilité de l'agriculture et d'améliorer la diversité et la sécurité alimentaires. Nous nous concentrerons aujourd'hui sur la compréhension de l'innovation dans le secteur agricole et agroalimentaire du point de vue des producteurs.
Nous accueillons M. Gordon Bacon, président-directeur général de Pulse Canada, un regroupement de producteurs de légumineuses qui comprennent les pois, les fèves, les lentilles, les pois chiches et les féveroles. Nous entendrons aussi le témoignage de M. Richard Phillips, directeur exécutif de Les Producteurs de grains du Canada.
Monsieur Bacon, je vous invite à faire votre exposé.
Gordon Baker, président-directeur général, Pulse Canada : Je vous remercie d'avoir présenté les légumineuses. Peu de gens savent que le Canada est le plus grand producteur et exportateur au monde de pois et de lentilles et qu'il se classe parmi les cinq premiers producteurs de pois et de fèves. Nous avons entre 35 et 40 p. 100 du marché mondial. Pulse Canada représente les associations de producteurs de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba et deux associations de l'Ontario ainsi que les transformateurs et les exportateurs de légumineuses au Canada.
En un mot, notre rôle, en tant qu'association, consiste à améliorer la profitabilité de l'industrie. Pour être profitables, nous devons augmenter la demande de légumineuses; pour augmenter la demande, nous devons offrir de la valeur; pour offrir de la valeur, nous devons limiter les coûts. Je me réjouis de la chance qui m'est offerte de transmettre quelques-unes de nos idées concernant l'innovation. Permettez-moi de décrire d'abord l'approche que nous adoptons à l'égard de l'innovation pour offrir de la valeur dans l'industrie de l'alimentation.
Qu'est-ce que les consommateurs valorisent dans leur alimentation? Les réponses constituent les assises sur lesquelles les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire ont été bâtis. Si nous répondons à la question : quelle valeur l'agriculture et l'agroalimentaire au Canada offrent-ils aux consommateurs pour se démarquer de la concurrence, nous définissons les assises sur lesquelles le secteur agricole et agroalimentaire du Canada appuiera son développement.
Revenons à la question et examinons comment les consommateurs déterminent la valeur de leurs aliments. Les aliments doivent être abordables, sûrs, nutritifs et goûteux. Les aliments doivent être facilement et systématiquement disponibles. L'agriculture canadienne excelle sur ces plans. S'il s'agit de valeurs simples que les consommateurs tiennent pour acquises, mais il y a un vaste écheveau de réglementations au niveau gouvernemental et une chaîne d'approvisionnement complexe dans le secteur de l'alimentation qui permettent aux Canadiens de supposer, avec raison, qu'ils peuvent compter sur ces valeurs.
Nul n'a plus à cœur de veiller à ce que les objectifs de la salubrité, de la fiabilité et de la sécurité alimentaires soient réalisés que les producteurs et les transformateurs d'aliments au Canada. L'industrie consacre beaucoup de temps et de ressources à essayer de prévoir d'où des difficultés pourraient surgir et où nous pouvons consacrer du temps et des ressources afin d'analyser nos produits pour que nous puissions dire avec confiance que nous remplissons et dépassons les attentes des consommateurs par rapport à la valeur des aliments.
Il est important d'être conscients qu'il faut des investissements permanents pour livrer aux consommateurs les valeurs alimentaires qu'ils attendent. À une époque où les gouvernements dans le monde entier cherchent à réduire leurs dépenses, nous devons comprendre que les investissements publics dans le système alimentaire ne bénéficient pas exclusivement aux Canadiens, ils bénéficient aussi à la population de presque tous les pays du monde. À lui seul, le secteur des légumineuses exporte vers plus de 150 pays. Les investissements dans la recherche agricole au Canada aident à assurer la sécurité alimentaire dans un monde qui dépend des échanges commerciaux, et ces investissements profitent aussi aux Canadiens. Les investissements publics dans notre chaîne alimentaire servent autant l'intérêt public que les intérêts humanitaires. Continuons donc à reconnaître que les secteurs publics et privés doivent continuer à investir pour satisfaire à ce besoin fondamental, l'alimentation.
J'aimerais maintenant m'attarder à l'innovation qui change la donne et aux façons novatrices de voir l'alimentation qui peuvent régler une partie des problèmes émergents à l'échelle mondiale. Parlons du rôle essentiel que le gouvernement peut jouer, de pair avec l'industrie, pour créer les conditions qui permettront au secteur agricole et agroalimentaire canadien de se bâtir un avenir solide.
Permettez-moi de commencer d'abord par un point qui, je l'espère, n'est pas qu'une question rhétorique pour vous. Combien de sénateurs, ou combien de députés, réfléchissent aux défis et aux coûts des soins de santé puis orientent leur réflexion sur le rôle que l'agriculture et l'alimentation devraient jouer pour garder les gens en bonne santé? Si votre réponse silencieuse n'était pas : « C'est ce que je fais », j'espère que vous pourrez bientôt répondre : « C'est ce que je ferai ».
Nous savons que l'alimentation et le mode de vie sont les principaux leviers du destin médical. Pourtant, je me demande si nous investissons beaucoup trop peu de temps et de ressources dans des moyens de garder les gens en bonne santé. Les Nations Unies ont désigné les maladies cardiovasculaires et le diabète comme deux des quatre priorités en matière de maladies non transmissibles. Il faut braquer les projecteurs sur les aliments que nous consommons, une façon de mettre une main sur le levier de l'alimentation, à l'avant-plan de la lutte pour améliorer la santé et réduire les coûts des soins de santé. Il est beaucoup plus rentable de garder les gens en bonne santé que de traiter ceux qui sont déjà malades.
L'alimentation pour améliorer la santé peut être une affaire simple. Permettez-moi de vous donner quelques idées qui, à notre avis, pourraient avoir une grande incidence pour nous aider à relever les défis sanitaires liés à l'embonpoint de plus en plus répandu dans la population.
Soyons motivés par l'idée que quelque chose que nous faisons doit changer. Nous ne pouvons pas continuer à grossir, tant par rapport à notre poids que par rapport aux coûts liés à la prestation des soins de santé publics. S'il est difficile de changer ce que les gens mangent, nous pouvons changer ce que contiennent les aliments qu'ils mangent déjà. Examinons l'effet que peut avoir la modification de la composition des aliments.
Dans le document d'information que je vous ai remis, j'ai souligné un simple changement de formulation d'un aliment que tous les Canadiens connaissent bien — les pâtes alimentaires. Les pâtes sont un bon aliment. Si nous prenons les pâtes faites de semoule de blé dur canadien à 100 p. 100 et que nous y substituons 25 p. 100 de farine de lentille, nous passons d'un bon aliment à un aliment fantastique. Cette reformulation simple fait grimper la teneur en fibres de 100 p. 100 et augmente la teneur en protéines de 25 p. 100. Ces deux changements sont la clé. Il devient évident, selon les études médicales, que les protéines jouent un rôle important dans la gestion du poids. Les régimes à haute teneur en fibres sont aussi importants dans la gestion du poids. Le bénéfice, c'est que les gens qui ont une alimentation à la fois riche en fibres et riche en protéines sont moins susceptibles de grignoter. Par conséquent, ils consomment moins de calories au bout du compte. Vu les liens établis entre le contrôle du poids, la maladie cardiovasculaire et l'amélioration du contrôle du taux de sucre dans le sang, le contrôle du poids est un élément essentiel à la santé des Canadiens.
Sans passer en revue les faits médicaux qui figurent dans le dossier que je vous ai remis, je veux simplement insister sur le fait que nous avons la possibilité d'améliorer comment les Canadiens s'alimentent en améliorant ce qu'ils mangent. Pensez à ce que vous avez consommé depuis 24 heures puis imaginez à quel point votre alimentation aurait été plus saine si elle avait été reformulée de manière à incorporer 25 p. 100 de farines de légumineuses.
L'exemple du passage de « bon » à « fantastique » de ce plat de pâte introduit une autre valeur alimentaire que je veux mentionner. Combien de gens à Ottawa, ou dans n'importe quelle ville canadienne, pensent à l'impact de leurs choix alimentaires sur l'environnement? Le fait est que la maison que vous choisissez d'habiter, la voiture que vous choisissez de conduire et les aliments que vous choisissez de consommer sont les choix environnementaux les plus importants que vous pouvez faire au cours de votre vie. Vous faites des choix alimentaires trois fois ou plus par jour tandis que vous pouvez choisir une voiture une ou deux fois par décennie, et une maison une ou deux fois dans votre vie. Vos choix alimentaires importent pour l'environnement. La bonne nouvelle, une fois encore, c'est que l'agriculture peut vous aider à faire des choix positifs pour l'environnement.
Comme agronome et comme agriculteur, il peut m'arriver de vraiment m'emballer en expliquant aux gens comment les légumineuses à grains réduisent l'empreinte environnementale de la production végétale annuelle. Les légumineuses prennent l'azote de l'air et utilisent l'énergie solaire pour le transformer en élément nutritif pour la plante. La magie dans ce processus, c'est que l'énergie solaire remplace le gaz naturel comme source d'énergie qui alimente la conversion de l'azote atmosphérique en des formes que la plante peut utiliser. Parce que l'azote est essentiel à la croissance de tous les végétaux, nous devons utiliser l'azote pour nourrir les végétaux qui nourrissent le monde. Il n'est que logique de maximiser l'utilisation de la production d'engrais à l'énergie solaire. Une fois encore, le document d'information vous expliquera comment les légumineuses et les régimes culturaux annuels peuvent contribuer à un environnement plus sain.
Pouvons-nous tous formuler un plan d'action gouvernemental clair quant au rôle que l'agriculture peut jouer pour assurer la santé de la population et de la planète? Le gouvernement a-t-il créé les conditions propices pour permettre aux entreprises et aux particuliers d'examiner les aliments afin de proposer plus de solutions? Les prochaines étapes devraient inclure une description claire de l'allure que le succès pourrait avoir, pour nous permettre de garantir que nos investissements sont ciblés et que les résultats escomptés sont clairs. Comme je l'ai dit récemment, si nous nous entendons sur la destination, l'élaboration d'une stratégie n'en est que plus claire.
Les investissements des secteurs public et privé en innovation détermineront le succès futur de l'agriculture. Comme les ressources sont limitées, le défi auquel nous sommes tous confrontés est de convaincre les gens qu'il pourrait être préférable d'investir une partie des ressources disponibles dans une nouvelle voie. Nous avons peut-être davantage besoin d'innovation que de stabilisation. La question que nous devons nous poser est la suivante : où essayons-nous de trouver de la stabilité? Je vous encouragerais à réfléchir un peu à notre dépendance passée vis-à-vis de marchés comme la Russie, qui est aujourd'hui l'un de nos compétiteurs dans l'industrie du blé, ou au rôle changeant de la Chine qui avait exprimé l'intention, il n'y a pas si longtemps, de devenir autosuffisante en matière de production de grains et qui représente aujourd'hui 60 p. 100 du commerce annuel mondial du soja importé au Canada. Le fait est que les marchés évoluent dans le monde entier et que c'est l'innovation qui nous permettra d'aller là où nous trouverons ces nouveaux débouchés.
Pour conclure, je veux passer brièvement au sujet de l'innovation. Il est important d'ajouter de la valeur à l'innovation pour améliorer l'efficacité. Comme je l'ai mentionné au début, les agriculteurs doivent limiter leurs coûts s'ils veulent être compétitifs. Peu importe que nous affrontions la concurrence sur le marché des produits de base ou sur le marché des ingrédients alimentaires, nous devons offrir des produits à des prix compétitifs par rapport à ceux de nos compétiteurs dans le monde entier. L'amélioration continuelle en vue d'obtenir des gains d'efficacité est la réalité dans tout secteur d'activité. Nous devons livrer plus à moindre coût.
Je veux mentionner brièvement quelques postes clés des coûts que les agriculteurs doivent supporter. Le transport est le premier poste. Pulse Canada a recommandé vivement au gouvernement de donner suite aux engagements qu'il a pris en vue de régler les problèmes de transport. Nous croyons que la stratégie est bonne et que le moment est venu de la mettre en œuvre.
Le deuxième poste concerne l'harmonisation des approches mondiales visant à protéger la santé humaine et l'environnement par la réglementation des pesticides. Nous croyons que le Canada est bien placé pour exercer un leadership à l'échelon mondial afin de s'attaquer à quelques-uns des problèmes qui augmentent vraiment l'insécurité alimentaire et les préoccupations au sujet de la volatilité des prix. Une fois encore, cela nécessitera un investissement dans des agences clés comme l'ARLA, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire.
Pour conclure, j'aimerais dire que nous devons changer notre façon de voir les aliments. Les aliments peuvent être au cœur de notre stratégie en matière de soins de santé et un élément majeur de notre stratégie environnementale. Les investissements dans l'innovation agricole, c'est-à-dire les investissements dans la recherche et dans les mesures visant à harmoniser la politique alimentaire, seront essentiels au succès futur de l'agriculture canadienne et à l'approche du Canada à l'égard des soins de santé, de même qu'à la contribution que les Canadiens peuvent apporter à la protection de l'environnement. Planifions notre destination. Une fois que nous nous serons entendus sur une destination, les cibles que nous nous donnerons en matière d'innovation deviendront claires.
Dans le document que je vous ai remis, nous présentons un vaste éventail de renseignements. Je serai heureux de répondre, aujourd'hui ou plus tard, aux questions que les sénateurs peuvent avoir.
Richard Phillips, directeur exécutif, Les Producteurs de grains du Canada : Je veux tout d'abord remercier le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts d'avoir eu la prévoyance et la sagesse d'examiner la recherche et l'innovation en agriculture au Canada. Les Producteurs de grains du Canada ont recommandé d'en faire une priorité depuis de nombreuses années. Je vois au moins un sénateur hocher de la tête. J'ai rencontré quelques-uns d'entre vous à ce sujet.
Je travaille à l'association Les Producteurs de grains du Canada depuis cinq ans. Nous défendons les intérêts de dizaines de milliers de producteurs prospères de blé, d'orge, d'avoine, de canola, de maïs, de légumineuses, de seigle et de triticale.
J'ai une ferme à Tisdale, en Saskatchewan, et j'ai grandi en regardant la télévision en blanc et noir et M. Mahovlich jouer au hockey sur la chaîne CBC les samedis soirs il y a bien longtemps. Ma mère est aussi une grande partisane.
J'aimerais soulever aujourd'hui trois points importants pour la recherche et l'innovation en agriculture au Canada, et un point au sujet des marchés internationaux.
Premièrement, il faut augmenter le financement de la recherche dans son ensemble. L'augmentation du financement destiné à la recherche en agriculture est une orientation qui fait consensus parmi les agriculteurs de toutes les régions de notre pays. Je crois que ceux qui siègent à ce comité depuis un certain temps savent que les agriculteurs sont divisés sur de nombreux enjeux, mais c'est celui qui nous unit tous.
Nous sommes effectivement reconnaissants que le gouvernement du Canada a commencé à investir davantage en recherche depuis quelques années et nous sommes aussi conscients qu'il y a eu un effort par l'intermédiaire des grappes scientifiques et de l'Initiative de développement des produits agricoles innovateurs, le programme DPAI, pour faire en sorte que les associations de producteurs elles-mêmes exercent une plus grande influence sur leurs priorités de recherche.
Le secteur privé est aussi un énorme investisseur dans la recherche et l'innovation au Canada, mais ce, essentiellement dans trois domaines seulement, soit le maïs, le soja et le canola. Le secteur public travaille souvent sur des aspects agronomiques fondamentaux et des maladies qui n'offrent peut-être pas un rendement commercial, et sans ce rendement, le secteur privé a peu d'intérêt à investir. Ce sont là tous les morceaux du casse-tête, le public et le privé, mais nous avons vraiment besoin d'une vision canadienne de la recherche en agriculture, une vision qui porte plus loin que la prochaine récolte. Les enjeux récents comme les prix et la salubrité des aliments, les biocarburants et la viabilité ont mis en lumière ce besoin.
Les agriculteurs canadiens produisent aujourd'hui davantage d'aliments avec moins de ressources que jamais auparavant. Cette performance a été rendue possible par les découvertes et les nouvelles technologies issues de la recherche, mais le Canada ne peut risquer de perdre cet atout compétitif en agriculture.
Selon le Forum des Nations Unies sur l'alimentation, les agriculteurs devront produire autant d'aliments au cours des 50 prochaines années que la Terre en a produit au cours des 10 000 dernières années. La population mondiale devrait croître de 6,8 à 9,1 milliards d'habitants et pourtant, le financement qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada accorde à la recherche fondamentale est beaucoup moins important qu'il ne l'était en 1994. En tenant compte de l'inflation, il faudrait majorer l'investissement de 26 millions de dollars par an pendant 10 ans — c'est-à-dire qu'il faudrait ajouter 26 millions de dollars année après année — pour nous ramener au niveau de la recherche publique de 1994 à Agriculture Canada.
Un environnement qui favorise la recherche et l'innovation et qui assure un accès équitable au marché pour nos exportations procure un avantage compétitif aux agriculteurs canadiens, mais nous sommes aussi conscients de la difficulté bien réelle d'essayer d'équilibrer le budget dans cette période agitée. Les Producteurs de grains du Canada ont une nouvelle proposition : modifier la structure comptable d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Modifier la comptabilité de l'affectation des redevances à AAC. Actuellement, le revenu tiré d'innovations fructueuses qui revient à AAC est incorporé au budget du ministère et remplace les crédits budgétaires réguliers.
Je vais m'écarter de mon texte pendant un instant. Si un chercheur d'Agriculture Canada met au point une nouvelle variété de blé ou quelque chose dans les légumineuses pour les transformateurs d'aliments et que la découverte est privatisée, les redevances reviennent à Agriculture Canada. Actuellement, ces sommes sont incorporées dans le budget du ministère et elles sont soustraites des affectations qui proviennent des plans fédéraux. Nous disons que cela doit changer. C'est la suggestion que nous vous faisons.
Faute de contributions fédérales directes accrues, nous suggérons qu'au minimum, le gouvernement du Canada devrait fixer le budget de recherche d'AAC à son niveau d'aujourd'hui puis le lier à l'inflation.
Ensuite, le gouvernement devrait permettre l'ajout de toutes les redevances engendrées par les découvertes d'AAC pour compléter le budget de recherche du ministère. C'est un moyen sans incidence financière de majorer le budget de recherche d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Ce sont les redevances payées par quiconque veut exploiter les découvertes qui feront augmenter le budget.
L'autre effet important de cette mesure, c'est l'envoi d'un message clair aux chercheurs d'AAC : si vous découvrez une valeur, vous récupérerez cette valeur. Plus vous travaillez sur des projets qui correspondent à ce dont les agriculteurs, les transformateurs d'aliments ou les consommateurs ont besoin, plus vous verrez un retour de fonds dans votre programme. Tout le monde y gagne.
Je veux que ce soit clair pour tous. Disons que le budget actuel est de 250 millions de dollars. Nous disons de le fixer en permanence à 250 millions de dollars, de le majorer seulement en fonction de l'inflation, mais ensuite, pour toutes les découvertes qu'Agriculture Canada fait et privatise, que ce soit auprès des producteurs de grains ou d'oléagineux ou des transformateurs d'aliments, toutes ces redevances provenant de découvertes utiles reviendraient et augmenteraient le budget, au lieu que ce soit le gouvernement qui doivent fournir tout l'argent lui-même pour augmenter le budget. C'est ce que nous vous suggérons.
D'une façon ou d'une autre, nous aimerions revenir aux niveaux du financement de la recherche de 1994.
Je veux vous donner un exemple de recherche publique dans le domaine de la nanotechnologie des engrais. Les chercheurs s'emploient à créer des engrais « intelligents » qui se scellent eux-mêmes lorsqu'il y a trop d'eau, pour empêcher ainsi le lessivage dans les bassins hydrographiques, voire réduire la quantité de produits qu'il faut répandre dans les champs. Ils prennent un engrais granulaire et le recouvrent de la nanotechnologie. Dès qu'elle sentirait qu'il y a trop de précipitations, et dans le sud du Manitoba, vous savez de quoi je parle, elle se scellerait et l'engrais ne serait pas lessivé dans le sol, il resterait dans les granules. Actuellement, l'engrais est lessivé et vous voyez les problèmes que cela cause au lac Winnipeg et Sauvons le lac Winnipeg et il y a davantage de purin de porc parce qu'il y a trop de nitrates et trop de phosphates dans le lac. Cela nous permettrait, de fait, d'appliquer moins d'engrais qui serait disponible lorsque les plantes en ont besoin.
L'autre élément de cette nanotechnologie, et les chercheurs travaillent là-dessus à l'université ici à Ottawa, ils peuvent faire en sorte que lorsque l'extrémité de la racine touche elle-même l'engrais granulaire, c'est alors que la granule s'ouvre et laisse sortir l'engrais. Elle ne libère l'engrais que lorsque l'extrémité de la racine lui touche. Une fois encore, cette solution empêche le lessivage. Quand je vois que la viabilité est l'un de vos objectifs, je pense que c'est le genre de recherche qui pourrait nous aider, comme agriculteurs canadiens, à être beaucoup plus écologiques. Cela se vend bien aussi au grand public.
Il y a d'autres options, si je reviens à la question du financement de la recherche. Comme producteurs, nous n'attendons pas du gouvernement qu'il se charge de tout pour nous. Y a-t-il d'autres modèles qui permettent d'investir plus d'argent dans la recherche et d'attirer aussi des fonds privés? Il y a l'option d'un crédit d'impôt pour les semences certifiées, pour favoriser l'utilisation accrue des nouvelles semences et l'augmentation des redevances par volume produit. Le projet de loi qui a été récemment présenté au Parlement renforcera la capacité des groupes agricoles d'obtenir des prélèvements de contributions. La Western Grains Research Foundation et l'Institut international du Canada pour le grain sont deux organes importants qui ont bénéficié d'un prélèvement, mais compte tenu des changements imminents de la mise en marché des grains dans l'Ouest canadien, nous devons adopter une nouvelle loi pour couvrir cet aspect. De fait, nous espérons l'élargir. Actuellement, beaucoup de lacunes permettent à de nombreux agriculteurs de ne pas contribuer à la recherche et nous aimerions élargir l'application parce que tous y gagnent.
Nous croyons aussi que le gouvernement du Canada a un rôle à jouer pour trouver des moyens de favoriser des partenariats publics et privés. Cela semble bien fonctionner pour le canola, le maïs et le soja, mais nous ne voyons pas beaucoup de partenariats publics-privés dans les secteurs des légumineuses ou des céréales.
Enfin, en ce qui concerne les marchés internationaux, nous étions très heureux de l'engagement que l'actuel ministre de l'Agriculture a pris d'ouvrir les marchés au moyen d'ententes commerciales et, ce qui est tout aussi important, en assurant l'accès aux marchés. Le Secrétariat à l'accès au marché est un bon exemple de l'aide que le gouvernement nous offre pour maintenir les échanges commerciaux. Un rapport vient d'être déposé hier sur les travaux accomplis et la greffière pourrait peut-être en obtenir des exemplaires. Je peux évidemment vous en laisser un. Il faudrait de fait le distribuer pour que tous puissent prendre connaissance du travail accompli, non seulement pour ouvrir de nouveaux marchés mais pour maintenir nos marchés actuels de façon que les échanges puissent se poursuivre.
Aux Producteurs de grains du Canada, nous croyons qu'il n'appartient pas au gouvernement du Canada de garantir un revenu aux agriculteurs, mais il lui appartient de créer un environnement stratégique qui nous permet de gagner notre vie. Investissez avec nous dans la recherche pour que nous restions compétitifs et investissez dans l'ouverture et le maintien de marchés. Avec votre aide et les bons outils, l'avenir de l'agriculture n'a jamais été aussi prometteur.
Le président : Je vous remercie. Nous passerons maintenant aux questions des honorables sénateurs.
[Français]
Le sénateur Robichaud : J'aimerais tout d'abord remercier M. Phillips, parce que lorsqu'il était venu me rencontrer au bureau, je lui avais demandé de nous soumettre des suggestions pour les travaux futurs de notre comité. La liste de suggestions qu'il m'a fait parvenir nous a aidés à définir les termes de notre étude. Je vous remercie et j'espère que vous serez satisfait de l'impact que le comité aura sur la recherche et l'innovation.
[Traduction]
Si les redevances devaient être incorporées dans le budget d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, combien d'argent cela représenterait-il? Je croyais que les chercheurs obtenaient un brevet sur leurs travaux et que la plus grande partie de l'argent allait à des institutions privées et non à Agriculture et Agroalimentaire Canada.
M. Phillips : C'est une bonne question. Actuellement, le budget du ministère de l'Agriculture augmenterait de 5 à 6 millions de dollars par an. C'est le niveau du poste actuel des redevances d'Agriculture et Agroalimentaire Canada qui remplace les crédits. Si cette mesure était instaurée, nous pensons qu'en 10 ans, ce montant pourrait doubler ou tripler. Les chercheurs aiment être publiés et reconnus pour leur travail. S'ils voient un moyen d'augmenter le budget destiné à leur programme de recherche grâce à une mesure du genre, vous verrez une motivation beaucoup plus grande dans la fonction publique à faire du bon travail.
Les redevances sont négociées. Si une université ou Agriculture et Agroalimentaire Canada fait une découverte, on s'adresse à une société privée et on négocie un partage des profits ou des redevances. Une partie revient à l'inventeur initial, en l'occurrence l'université ou Agriculture et Agroalimentaire Canada, et la société privée en garde une partie lorsqu'elle vend la semence ou transforme l'aliment. Actuellement, 5 à 6 millions de dollars reviendraient à Agriculture Canada. Nous croyons que ce montant augmenterait assez rapidement.
Le sénateur Robichaud : Cela s'accumulerait au cours de l'année. Vous dites qu'il pourrait y en avoir beaucoup plus.
M. Phillips : C'est exact.
Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé d'engrais intelligents. Est-ce disponible sur le marché et sinon, combien de travail nous reste-t-il à faire?
M. Phillips : Je vais m'avancer en disant que nous sommes à environ cinq ans de l'arrivée sur le marché si nous maintenant l'intensité des travaux en cours. De fait, je vous encouragerais à communiquer avec le chercheur, Dr Carlos Monreal, à l'Université Carleton, pour obtenir sa version officielle. Nous le rencontrons aux deux mois. Je vous encouragerais à l'inviter pour vous expliquer la recherche. La chimie n'a jamais été mon fort à l'université. La technologie des engrais intelligents est à notre portée.
Le sénateur Plett : De quelle façon votre association, Les Producteurs de grains du Canada, est-elle financée? D'où provient votre financement?
M. Phillips : La plus grande partie de notre financement provient directement des organisations agricoles membres, des cotisations qu'elles versent à l'association. Nous sommes composés de producteurs de blé, de producteurs d'orge, de l'Alberta Barley Commission, de tous les producteurs de canola du Canada, de l'Alberta Oat, Rye and Triticale Association, de la Prairie Oat Growers Association, de la Manitoba Corn Growers Association et de l'Atlantic Grains Council. En outre, lorsque nous organisons un congrès, je peux faire un peu d'argent avec des commandites.
Le sénateur Plett : Combien d'argent consacrez-vous à la recherche et au développement? Vous avez parlé d'investissements de l'État dans la recherche et le développement.
M. Phillips : Mon budget brut est d'environ 200 000 $, qui paie mon salaire, celui de mon adjointe et le loyer du bureau. Je suppose que je pourrais amputer mon salaire et investir dans la recherche, notre association ne le fait pas, mais nos membres investissent beaucoup dans la recherche. Par exemple l'Alberta Pulse Growers Association finance directement la recherche par une contribution des producteurs. Les producteurs de canola de la Saskatchewan, du Manitoba, de l'Alberta et de l'Ontario financent directement la recherche par leurs contributions. L'Alberta Barley Commission finance beaucoup de recherches par ses contributions. Dans certains groupes agricoles, les affiliations sont volontaires et ils ne financent pas beaucoup de recherches. Les producteurs investissent des dizaines de millions de dollars.
Le sénateur Robichaud : Quand vous dites « des dizaines de millions », voulez-vous dire 20, ou 30, ou 40 millions de dollars? Avez-vous un chiffre?
M. Bacon : Je peux dire qu'à lui seul, grâce aux contributions des agriculteurs, le secteur des légumineuses dépense plus de 10 millions de dollars par an pour la recherche. En Saskatchewan, il y a un prélèvement obligatoire non remboursable de 1 p. 100; il est de 0,5 p. 100 au Manitoba et de 1 p. 100 en Alberta, mais dans ce dernier cas, il est remboursable. Les règles varient d'une province à une autre mais les agriculteurs paient actuellement un prélèvement sur les ventes de blé et d'orge qui est investi dans la recherche. Il s'agit d'investissements considérables. Je n'ai pas le chiffre si nous additionnons le canola, le blé, l'orge et les légumineuses.
M. Phillips : Le chiffre pour le canola serait plus élevé que pour les légumineuses.
Le sénateur Plett : Pour clarifier, vous dites que le taux est fixé par la province et pourtant, vous êtes une organisation canadienne. Pourquoi n'établiriez-vous pas la même norme pour toutes les provinces?
M. Bacon : Pulse Canada reçoit son financement des groupes provinciaux. Ces contributions sont établies dans la législation provinciale. Essentiellement, nous n'investissons pas, mais quelle somme Pulse Canada investit-elle dans la recherche? La réponse est zéro, parce que tous ces investissements sont faits directement par les producteurs de légumineuses du Manitoba ou de la Saskatchewan. Vous pouvez voir dans notre rapport annuel les contributions selon la province et qu'une part importante de notre financement provient du gouvernement du Canada. Une partie des travaux innovateurs que nous avons menés sur la santé humaine et la viabilité environnementale est financée sous l'égide de Cultivons l'avenir, le cadre de la politique agricole qui est une responsabilité fédérale-provinciale-territoriale.
Le sénateur Plett : Ma prochaine question concerne les grains génétiquement modifiés. En 1997, 0,01 p. 100 de la récolte totale de soja était génétiquement modifiée. En 2007, cette proportion était passée à 62,5 p. 100 au Canada. Comment expliquer cette augmentation? Vers quoi nous dirigeons-nous? Quels autres grains sont génétiquement modifiés au Canada?
M. Phillips : La proportion a augmenté pour le soja tout comme pour le canola. Les chiffres seraient probablement similaires pour le canola. Comme producteur, l'une des principales raisons, c'est que nous pouvons désormais nous débarrasser des mauvaises herbes. Dans le passé, nous devions appliquer du Treflan, un produit chimique pour lutter contre les mauvaises herbes dans les champs de canola. Il fallait le faire pénétrer à angle droit dans le sol à quatre ou cinq pouces de profondeur et à 48 heures d'intervalle. J'ai grandi entouré de nuages de poussière qui s'élevaient en tourbillon dans le champ autour de mon tracteur tandis que j'essayais de l'appliquer. Le produit asséchait le sol et l'érosion du sol et l'érosion par le vent engendraient des pertes incroyables. Avec la semence génétiquement modifiée qui est résistante à la pulvérisation, nous pouvons ensemencer le champ et pulvériser par la suite pour contrôler toutes les mauvaises herbes ce qui augmente grandement le rendement et nous a permis d'étendre la culture du canola à des endroits où nous n'aurions jamais pu le faire auparavant parce que les herbicides à base de terre ne pouvaient contrôler qu'un nombre très limité de mauvaises herbes. La superficie ensemencée a donc beaucoup augmenté.
On cultive encore aussi une quantité considérable de soja non génétiquement modifié au Canada. Certains marchés paieront un supplément pour se le procurer. Par exemple les Japonais ou les Européens paieront un supplément aux agriculteurs, peut-être jusqu'à un dollar de plus du boisseau, pour cultiver ces fèves sans OGM et les expédier vers ces marchés où ils y sont sensibles. La plus grande partie du soja est destinée au marché des aliments du bétail où ils ne se préoccupent pas de savoir s'il y a des OGM ou non.
Le sénateur Plett : Le fait que nous utilisions des grains génétiquement modifiés ne nous permet-il pas d'éviter de laisser des champs en jachère, de ne pas ensemencer pendant un an pour laisser le sol se régénérer?
M. Phillips : Oui, c'est vrai. Sur notre ferme dans notre enfance, si nous voulions cultiver du canola, nous laissions souvent le champ en jachère l'année précédente pour essayer de tuer le plus possible les mauvaises herbes parce que les produits chimiques à l'époque n'en tuaient qu'un nombre limité. Il fallait essayer de nettoyer nos champs. Par conséquent, nous laissions davantage de champs en jachère et cela étant, l'érosion par l'eau et le vent était plus prononcée.
M. Bacon : Je veux mettre en lumière le rôle que le développement d'une industrie viable des légumineuses dans l'Ouest canadien a joué pour y réduire la superficie en jachère. Différentes cultures utilisent l'eau de façon différente. Les cultures de légumineuses ont tendance à utiliser l'eau de la couche supérieure du sol. De nombreux facteurs, que ce soit les cultures génétiquement modifiées comme le canola, les modifications de la machinerie pour le travail du sol, la transition du travail réduit du sol à la culture sans labour, le semis direct, ou tous les produits chimiques agricoles auxquels les Canadiens ont désormais accès, ont aidé les agriculteurs à rendre leurs exploitations agricoles beaucoup plus respectueuses de l'environnement. C'est une combinaison de nombreux facteurs, dont le développement d'outils comme les cultures génétiquement modifiées.
Le sénateur Plett : Vous parliez du transport comme d'un domaine clé et vous avez dit que Pulse Canada recommande vivement au gouvernement de donner suite aux engagements pris le 18 mars. Pouvez-vous nous dire en quoi consistaient ces engagements?
M. Bacon : Bien sûr. Le premier engagement, et le plus important, c'était que les expéditeurs auraient droit à une entente sur le niveau de service. Un projet de loi serait rédigé pour leur donner ce droit et le droit à un mécanisme de règlement des différends, si les expéditeurs et les transporteurs ne réussissaient pas à s'entendre. Il avait été question de renforcer la déclaration au secteur public de quelques-unes des mesures essentielles de l'efficacité des transports. Il avait été question de désigner un modérateur pour participer à la discussion sur les accords relatifs au niveau de service et pour accorder aussi une attention particulière à ce que nous pouvons faire pour améliorer la chaîne d'approvisionnement du transport dans son ensemble.
Lors d'un récent congrès du secteur du transport à Winnipeg, il a été mentionné que les frais de surestaries étaient trois fois plus élevés que l'année précédente et cinq fois plus élevés que la moyenne. Le problème ici, c'est que ce sont les agriculteurs qui supportent ces coûts d'inefficacité. En tant que communauté d'expéditeurs, non seulement dans le domaine agricole mais aussi de concert avec une vaste coalition d'expéditeurs par rail, nous avons souscrit à l'intervention du gouvernement pour changer la situation, pour que nous puissions adopter une approche systématique à la recherche de moyens qui nous permettraient de tirer d'autres gains d'efficacité du système de transport. La communauté des expéditeurs a très bien accueilli l'annonce du 18 mars et nous encourageons le gouvernement à donner suite à l'engagement d'agir qu'il avait pris à l'époque.
Le sénateur Mercer : Je veux simplement revenir sur notre observation au sujet du transport des légumineuses. Je siège aussi au Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Nous avions examiné la conteneurisation il y a quelques années. Quand nous avions rencontré des représentants de l'industrie des légumineuses à l'époque, le plus grand problème était la disponibilité de voitures vides et propres au bon endroit et au bon moment. Une autre préoccupation concernait leur remplissage, en particulier au port de Vancouver. Depuis, chaque fois que je rencontre un représentant du secteur des légumineuses, je pose toujours la même question : « La situation s'est-elle améliorée? » Comme vous le savez, le problème tenait au fait que lorsque les produits restent sur le quai à Vancouver, leur qualité se détériore heure après heure, jour après jour. Si nous attendons trop longtemps, lorsqu'ils arrivent en Chine ou en Inde, ce ne sont rien de plus que des aliments du bétail coûteux.
M. Bacon : L'industrie a continué d'évoluer depuis que nous avons comparu devant le Comité sénatorial des transports. Un aspect pour lequel nous avons vu une croissance remarquable, c'est que les légumineuses sont désormais expédiées en vrac aux installations portuaires. Elles sont ensuite transférées dans les conteneurs maritimes aux installations portuaires parce que le plus grand défi consistait à amener suffisamment d'équipement dans les Prairies pour les remplir.
Je veux simplement mentionner pourquoi l'industrie des légumineuses tient autant à modifier les transports. Les navires porte-conteneurs qui quittent les ports canadiens font régulièrement des surréservations de l'ordre de 40 p. 100 pour garantir qu'ils peuvent partir avec une pleine cargaison. Étant donné le manque de fiabilité de la chaîne d'approvisionnement dans son ensemble, ils surréservent de 40 p. 100. Cela signifie qu'on dit souvent aux entreprises qui essaient d'embarquer leurs produits sur des navires que le navire est plein. Notre objectif est d'améliorer l'efficacité du système dans son ensemble. Pouvez-vous vous imaginer si nous avions le même genre de rapport statistique avec les transporteurs aériens? Le manque de prévisibilité, la variabilité des délais de transport et la façon dont ces deux choses se manifestent dans le mauvais rendement du système sont vraiment essentiels pour comprendre ce que nous voulons dire. Je vais vous relater rapidement un cas vécu. J'ai eu la chance d'être invité à assister à une partie des négociations relatives à l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie, au sujet de la notification de la date effective. Il était intéressant d'entendre l'un des importateurs colombiens dire : « L'avantage tarifaire de 15 p. 100 dont vous jouissez par rapport aux États-Unis doit être mis dans la balance avec votre manque de fiabilité comme fournisseur. Même si vous jouissez d'un avantage tarifaire, cela ne signifie pas que vous êtes un fournisseur privilégié parce que vous n'avez pas la réputation d'être fiable comme fournisseur de produits. » C'est un message que nous avons reçu partout dans le monde. C'est pourquoi la communauté des expéditeurs s'unit pour dire que nous pouvons faire mieux. Nous avons un système sophistiqué mais sous-performant.
Le sénateur Mercer : Monsieur Phillips, je veux revenir un peu sur votre idée concernant les redevances. Je pense que c'est fascinant. Je ne suis pas sûr que je veuille voir toutes les redevances aller dans les recettes générales d'Agriculture Canada. Ce serait peut-être plus intéressant de penser à un système dans lequel nous en verserions une partie dans un fonds de dotation pour l'avenir. Je rappelle à tous qu'en 1930, trois médecins de Toronto ont inventé le pablum à l'Hôpital pour enfants malades. Cette invention a financé la recherche pédiatrique pendant 25 ans. Les redevances de cette invention ont aidé à mettre sur pied l'une des fondations médicales les plus prospères du pays, la Fondation de l'Hôpital pour enfants malades.
Croyez-vous que nous pourrions générer suffisamment de revenus au moyen des redevances si la moitié était versée dans le budget général d'Agriculture Canada et l'autre moitié dans un fonds de dotation? Nous pourrions fixer une cible que nous voudrions atteindre, que ce soit 500 millions ou 100 millions de dollars. Le fonds de dotation serait utile quand nous arriverions dans ces années creuses où les brevets expireraient et nous n'aurions pas de rentrées d'argent pendant un certain temps, afin que nous ne perdions pas la capacité de recherche parce que nous aurions dépensé tous les fonds au fur et à mesure.
M. Phillips : Je crois que nous sommes probablement ouverts aux suggestions. Dans ma discussion avec Agriculture et Agroalimentaire Canada, ils ont dit qu'une partie de ces fonds devront même être affectés aux frais généraux et à l'administration. Les fonds n'iront pas seulement aux chercheurs parce que quelqu'un doit préparer la paie pour le programme de recherche et il y a d'autres frais généraux. Ils ont dit qu'ils ne verraient probablement pas la totalité de ces fonds de toute façon. Nous serions ouverts aux suggestions à ce sujet. Je ne sais pas en quoi consiste le modèle, mais je crois que si nous étions assis à la même table avec Agriculture Canada et les groupes agricoles, nous pourrions trouver une solution. J'aime l'idée d'en mettre une partie de côté pour les années maigres. C'est le principe de Joseph, en fait.
[Français]
Le sénateur Rivard : Dans votre présentation, monsieur Phillips, vous souhaitez que le gouvernement fédéral revienne faire des subventions en recherche et développement au niveau de 1994 et rajuster ensuite selon l'augmentation du coût de la vie. Pourriez-vous me donner une idée approximative, lorsque par exemple vous dépensez un dollar en innovation, quel pourcentage représente le fédéral comparativement à votre industrie? Est-ce que des gouvernements provinciaux ont des programmes de recherche et développement également?
[Traduction]
M. Phillips : Cela dépend de la province, mais la Saskatchewan, l'Alberta et le Manitoba font des essais de variétés. Ils prennent les différentes variétés de blé et les cultivent dans différentes régions de la province puis les agriculteurs vont dans les champs ou examinent les registres pour déterminer quelles variétés donnent un meilleur rendement dans quelles régions de la province. Les provinces investissent de l'argent. Les agriculteurs investissent beaucoup d'argent. Les triturateurs d'oléagineux eux-mêmes investissent beaucoup d'argent dans la recherche également.
Le gouvernement du Canada investit de l'argent. La partie du gouvernement va dans la recherche publique. Au total, les chiffres sont considérables, mais cet investissement n'est pas destiné qu'aux producteurs de grains. Agriculture Canada fait beaucoup de recherche sur les secteurs soumis à la gestion de l'offre. Ils font de la recherche sur le poulet et la dinde, la production laitière et les rations du bétail. Ils ont un vaste éventail d'activités. Ça ne se limite pas à nous. Je n'ai pas toutefois en tête le chiffre exact quant au pourcentage du budget global qui est réservé aux grains.
[Français]
Le sénateur Rivard : Peut-on penser, par exemple, que 75 p. 100 de ce que vous investissez en recherche et développement viennent du fédéral? Est-ce exagéré de penser que les trois quarts sont fournis par le fédéral?
[Traduction]
M. Phillips : Je vais devoir simplement prendre l'engagement de vous revenir là-dessus pour vous fournir cette information. Je n'ai pas le chiffre en tête. Il faudrait que je détermine quelle part du budget est réservée aux grains, puis que j'additionne le montant que les gens du secteur du canola investissent, puis des légumineuses, du lin, de l'orge et de l'avoine. Nous avons beaucoup de contributions et il faudrait que je les additionne toutes. Je prends l'engagement de vous revenir là-dessus. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous répondre ce soir.
[Français]
Le sénateur Rivard : Plus tôt, vous avez mentionné, entre autres, la Colombie. Est-ce que votre plus gros client serait par exemple l'Asie, l'Amérique du Sud ou les États-Unis, ou exportez-vous presque partout dans le monde?
[Traduction]
M. Bacon : Je peux répondre pour le secteur des légumineuses. Notre plus grand client est l'Inde. La Chine a émergé comme notre deuxième plus grand client. Un petit nombre de pays représentent la grande majorité des ventes. Environ 75 p. 100 de cinq pays représenteraient 75 p. 100 des exportations totales, mais la liste totale compte 150 pays. Cela varie aussi selon la culture. Le plus grand marché pour les fèves est les États-Unis, suivi du Royaume-Uni. Pour le pois, c'est l'Inde. Si vous les additionnez tous ensemble, l'Inde est notre plus grand client.
M. Phillips : Pour plusieurs des autres cultures, les États-Unis demeurent encore l'un de nos plus gros et de nos plus importants clients.
Le sénateur Mahovlich : Vous avez mentionné que la population mondiale atteindra 9,1 milliards d'habitants dans 50 ans et qu'elle se situe actuellement à 6,8 milliards.
M. Phillips : Elle atteindra 9,1 milliards en 2050.
Le sénateur Mahovlich : La population de l'Inde semble croître, il y aura donc une demande plus importante pour les produits que nous fournissons à l'Inde. Le gouvernement en est-il conscient? Il me semble que nous sommes sur une lancée. Nous avons un grand potentiel ici, et nous devrions aller de l'avant et investir dans l'avenir, à mon avis. Vous avez un fichu de bon argument.
M. Bacon : Tout à fait. La population mondiale augmente et, d'un point de vue environnemental, nous n'avons pas besoin de déboiser davantage ni de convertir plus de prairies à la culture pour la nourrir. À mon avis, ce que nous devons faire, c'est intensifier la production agricole, ce qui signifie que nous devons utiliser tous les outils disponibles. Nous devons satisfaire aux besoins des Nord-Américains et du monde riche, mais nous devons aussi jouer un grand rôle en matière d'assurance de la sécurité alimentaire pour le monde en développement. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous devons obtenir un rendement de nos investissements d'un point de vue humanitaire et satisfaire aux besoins du monde développé.
M. Phillips : Il faut aussi utiliser les ressources avec beaucoup de prudence. Nous ne pouvons continuer à surfertiliser ni à gaspiller des denrées. Cette époque sera bientôt révolue. Le coût des intrants continue d'augmenter. Il faut aussi utiliser l'eau sagement. Au Canada, nous jouissons de précipitations relativement abondantes. Nous sommes bien placés, en ce sens que nous n'avons pas à nous battre pour avoir de l'eau ici, contrairement à d'autres pays.
Le sénateur Mahovlich : Quel pays est notre plus grand compétiteur? S'agirait-il du Brésil?
M. Bacon : Cela dépend de quelle culture vous parlez.
Le sénateur Mahovlich : Je parle des exportations totales.
M. Bacon : Les États-Unis sont l'un de nos plus grands compétiteurs à cause de la production de maïs et de soja. Par rapport aux exportations agricoles, le titre revient probablement aux États-Unis. Le Brésil sera un grand compétiteur sur les marchés internationaux du soja.
Le sénateur Mahovlich : Nous avons effectivement beaucoup de terrain à couvrir ici. Nous avons beaucoup de potentiel ici, n'est-ce pas, étant donné la taille de notre pays?
M. Phillips : Je pense que toutes les bonnes terres sont actuellement en production. Au Brésil, ils ouvrent encore des dizaines de milliers d'acres.
Le sénateur Mahovlich : Ils déboisent des forêts.
M. Phillips : Ils ont aussi des prairies qu'ils convertissent à la culture. Cela ne se résume pas à l'Amazonie. Ils ont de grandes, d'énormes superficies de prairies qui ont été laissées dans le passé en pâturage et qu'ils convertissent également à la culture. Il n'y a pas que des forêts. Ils ont beaucoup d'autres terres arables. Au Canada, les terres arables sont toutes en exploitation. Pouvons-nous produire davantage avec ce que nous avons? C'est l'investissement dans la recherche et l'innovation qui nous permettra de le faire. Nous ne pouvons pas cultiver simplement davantage d'acres pour produire davantage d'aliments comme ils peuvent le faire au Brésil.
Le sénateur Mahovlich : C'est comme le marais Holland, en Ontario. Nous sommes limités au marais Holland. Nous ne pouvons pas agrandir, et cette section est développée.
M. Bacon : À mon avis, il est intéressant d'observer que la Chine fait des investissements massifs dans l'infrastructure en Afrique, et il y a des travaux dans notre secteur en vue de produire des pois jaunes en Afrique. De grandes pressions s'exercent pour augmenter la production de légumineuses en Europe de l'Est, parce qu'une grande partie de ces grandes prairies de la steppe a été sous-utilisée depuis les 25 dernières années. Il y a des régions où il est aussi possible d'augmenter la production. Par rapport à l'agriculture canadienne, nous pouvons réfléchir à ce qui nous permettra de rester compétitifs. Nous ne sommes pas les producteurs aux coûts les plus faibles au monde. À mon avis, ce n'est pas l'objectif que nous devrions viser. C'est pourquoi, dans mon exposé, j'ai voulu parler des priorités futures et de la façon dont nous pouvons nous distinguer de la compétition à faible coût. Les agriculteurs ne feront pas de profit si nous devons être le fournisseur d'aliments à faible coût sur les marchés mondiaux. Nous devrons toujours être compétitifs sur les marchés des produits de base, mais nous devons réfléchir à la perspective particulière que nous adopterons pour nous tailler un créneau dans l'industrie alimentaire.
Le sénateur Eaton : Je suis désolée d'être en retard. J'étais à une réunion consultative du caucus des transports, ce qui est très à propos, vu ce dont vous parlez.
J'aimerais que vous nous citiez quelques bons exemples de ce que nous avons trouvé ou de ce que la recherche canadienne a produit au cours des 10 dernières années en fait de nouveaux produits.
M. Phillips : Évidemment, il y a eu un nombre assez important de variétés de blé. Nous cultivons beaucoup de blé dans l'Ouest canadien et un bon nombre de ces variétés de blé proviennent des laboratoires d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. De fait, si vous remontez un peu plus loin, presque toute la génétique du canola original venait effectivement d'Agriculture et Agroalimentaire Canada aussi. Ils ont fait une grande partie de cette recherche fondamentale, puis ils ont accordé des licences et il peut arriver qu'une entreprise du secteur privé la prenne et continue de la développer. C'est ce que les agriculteurs achètent au bout du compte. Dans certains cas, par rapport aux grains céréaliers, tout vient d'Agriculture Canada. Toutes les variétés d'avoine, presque toutes les variétés d'orge et beaucoup de variétés de blé viennent toutes d'Agriculture Canada.
Le sénateur Eaton : Collaborez-vous avec des universités?
M. Phillips : Oui, et les universités travaillent ensemble. À l'Université de la Saskatchewan, l'université et Agriculture et Agroalimentaire Canada sont si proches qu'on pourrait presque dire qu'ils ne font qu'un.
M. Bacon : J'aimerais m'étendre sur quelques-uns de nos grains, dans le domaine du savoir en fait de consommation de produits alimentaires et des effets positifs qu'ils ont eus sur la santé humaine. Dans le dossier d'information que la greffière a reçu, nous avons décrit quelques-uns des rôles que la consommation accrue de légumineuses peut avoir par rapport à la gestion du poids, les maladies cardiovasculaires et le diabète. À mon avis, si les agriculteurs étaient très heureux d'entendre parler des cas où la recherche leur a été bénéfique, je crois que les Canadiens en général seront peut- être plus intéressés de parler de certaines possibilités d'étudier comment les produits agricoles canadiens peuvent améliorer la santé et l'environnement.
Le sénateur Eaton : Est-ce que cela signifie que vous modifierez — et je ne suis pas une scientifique — la structure moléculaire de certaines légumineuses ou de certains grains pour réduire leur teneur en amidon ou augmenter leur teneur en vitamine D? Autrement dit, voyez ce qu'ils ont fait avec le lait. Est-ce que ce sont là les directions dans lesquelles vous orientez la recherche?
M. Bacon : Pour le moment, la recherche se limite aux produits que nous avons. J'ai parlé dans mon exposé de la reformulation de produits alimentaires que les Canadiens consomment déjà, des reformulations simples en vue d'augmenter la teneur en protéines et en fibres. Nous travaillons à partir de la compréhension de la nutrition humaine que nous avons maintenant. Il faudra beaucoup de recherche parce qu'il faudra que ce soit très clair que si vous augmentez un certain élément, vous n'allez pas entraîner des effets secondaires indésirables.
La bonne nouvelle, c'est que nous pouvons faire une différence simplement avec les produits que nous avons. Toutefois, comme vous le soulignez, il y a de nombreux exemples dans l'industrie de l'alimentation où nous avons augmenté certains éléments liés à des effets positifs sur la santé.
M. Phillips : Par rapport à votre question, une grande partie des travaux sur le blé, l'orge, les légumineuses et l'avoine n'a rien à voir avec le génie moléculaire, mais bien avec la bonne vieille sélection végétale. Ils sélectionnent pratiquement à la main les plants qui présentent les traits souhaités.
Le sénateur Eaton : Vous avez entendu le premier ministre et le ministre Ritz parler du libre-échange. Ils tiennent à conclure des accords de libre-échange avec la Chine et l'Inde et des négociations avec l'UE sont en cours. Avons-nous des choses qui créeront des obstacles au commerce et qui compliqueront les négociations par rapport à la façon dont nous cultivons les légumineuses ou les grains?
M. Bacon : Vous posez des questions très importantes pour notre industrie. Nous sommes des défenseurs et des partisans de longue date des accords commerciaux bilatéraux pour garantir que le Canada jouit du même accès que les autres nations exportatrices. Par exemple, le premier ministre était au Maroc en janvier dernier pour lancer des négociations sur le libre-échange. À compter du 1er janvier 2012, les pois canadiens seront désavantagés par un tarif de 30 p. 100 et les lentilles canadiennes, par un tarif de 2,8 p. 100.
Le sénateur Eaton : Désavantagés par rapport à qui?
M. Bacon : Par rapport aux Américains qui ont négocié un accord de libre-échange avec le Maroc. C'est pourquoi nous devons uniformiser les règles du jeu. Les obstacles commerciaux non tarifaires nous occasionnent le plus d'ennuis au quotidien, par exemple les différences en matière de politique alimentaire mondiale. Les niveaux maximums de résidus de produits phytosanitaires autorisés, par exemple les pesticides, représentent un énorme défi. C'est pourquoi je crois que des agences comme l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, sous l'égide de Santé Canada, doivent recevoir des fonds additionnels parce qu'elles peuvent jouer un rôle de leadership sur la scène internationale en vue de soumettre les nouvelles homologations à des examens communs mondiaux et faire en sorte que le monde entier travaille de concert pour éliminer une partie de ces obstacles commerciaux non tarifaires.
Le sénateur Eaton : S'agit-il d'une forme de certification?
M. Bacon : Oui. La Commission du Codex Alimentarius est l'organe international chargé d'établir les normes internationales de qualité des végétaux. Malheureusement, le Codex a beaucoup d'années de retard. Treize des 17 produits que nous utilisons dans la culture des lentilles n'ont pas de norme dans le Codex ce qui crée une grande incertitude dans un contexte commercial. Pour vous donner un exemple concret, si nous exportons des lentilles vers l'Inde, notre plus grand client, et que nous découvrons des résidus d'un produit couramment utilisé, quel cadre juridique permet de déterminer si le produit est conforme? L'Inde se réfère à une norme du Codex et le Codex n'en a pas.
Notre crainte, c'est que tout cela ajoute un risque dans les échanges commerciaux —le commerce exige des primes de risque —, ce qui signifie que les agriculteurs au Canada sont touchés et que les consommateurs en Inde sont aussi touchés. Nous essayons de recenser tous ces obstacles au commerce non tarifaire et d'établir une stratégie pour les contrer.
Le sénateur Eaton : Où le Codex est-il situé?
M. Bacon : La Commission du Codex Alimentarius Commission est un organisme mixte de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, et de l'Organisation mondiale de la santé. Elle a son siège social à Rome. Elle a été créée dans les années 1960. Des mesures simples permettraient de mettre le Codex aux normes et, ainsi, de jouer un rôle beaucoup plus décisif et dynamique sur la scène internationale. C'est un enjeu pour l'industrie des végétaux et l'industrie de la viande.
Le sénateur Eaton : Pourriez-vous faire parvenir au comité une liste de recommandations sur la façon dont nous pourrions mettre à jour le Codex ou exercer des pressions à cette fin?
M. Bacon : Absolument. Nous pourrions inclure le rôle que des organismes canadiens peuvent jouer et les domaines dans lesquels notre investissement visant à éliminer ces coûts du système pourrait être utile. Nous serions heureux de le faire.
Le sénateur Mercer : Si ma mémoire ne me fait pas défaut, le Canada a joué un rôle de premier plan dans la création de cet organisme dans les années 1960, n'est-ce pas?
M. Bacon : Je n'en suis pas sûr.
Le sénateur Mercer : Il me semble qu'Agriculture Canada et Santé Canada avaient joué un rôle de premier plan dans la mise sur pied de cet organisme.
Le président : Messieurs les témoins, lorsque vous voulez fournir des documents pour répondre aux questions, veuillez le faire par l'entremise de la greffière du comité.
Le sénateur Fairbairn : Comme vous le savez probablement, monsieur Phillips, je viens du Sud de l'Alberta dans les contreforts des Rocheuses, une région entourée par tout le reste. Quand vous avez parlé au début, vous donniez l'impression que toutes les portes s'ouvraient sur le terrain pour essayer de faire avancer les choses, probablement avec votre aide et celle de ceux qui veulent vous appuyer. Avez-vous beaucoup d'activités de ce genre sur le terrain, peut-être avec des universités? Une région comme Lethbridge meurt d'envie de s'engager dans ce genre d'initiative. Les genres de choses qui arrivent sont un peu différentes chaque année, en particulier quand il y a des montagnes, des rivières et des vallées. Est-ce que cela ressort régulièrement avec les gens qui peuvent comprendre qu'ils pourraient aider et participer à ce que vous essayez de faire? Est-ce que cela fonctionne bien dans cette région du Canada?
M. Phillips : Lethbridge a effectivement un grand centre de recherche d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Pour vérifier mes chiffres, j'ai téléphoné à un responsable de cette station de recherche pour ce que j'avançais au sujet des cinq à six millions de dollars de redevances. Au sein de notre organisation, nous avons les producteurs de blé d'hiver de l'Alberta et Lethbridge est un centre de recherche important sur cette culture. Nous avons les Alberta Pulse Growers, l'Alberta Barley Commission, l'Alberta Oat, Rye and Triticale Association et les Alberta Canola Growers. En Alberta, c'est intéressant parce que même si les gens cultivent du canola, du maïs et toutes les autres cultures dans le secteur privé, les agriculteurs aiment aller à Lethbridge. Quand ils entendent parler un chercheur d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, ils ont l'impression d'entendre une voix objective qui fait autorité. Tous mes groupes membres travaillent fort pour entretenir de bonnes relations avec l'université et avec le centre d'Agriculture et Agroalimentaire Canada à Lethbridge. Nous travaillons dur sur cela.
Le sénateur Fairbairn : Je vous remercie, et continuez. Je suis sûre qu'ils feront de même.
Le sénateur Duffy : C'est un sujet fascinant. La sécurité alimentaire est l'un des enjeux dont nous devons nous occuper. Je vous ai entendus parler des améliorations qui ont été apportées en matière de productivité et des différentes percées de la recherche qui ont permis à notre agriculture d'être si productive et de créer une industrie dont nous sommes si fiers.
Dans le passé, il a été question des modifications génétiques. Certains des éléments les plus extrêmes de notre société ont qualifié les produits génétiquement modifiés d'aliments Frankenstein. Que pensez-vous des campagnes de cet ordre contre les aliments génétiquement modifiés? Quelle est la situation aujourd'hui? Avez-vous réussi à rassurer ceux qui avaient été effrayés par ce genre de tactiques en leur montrant que, de fait, la modification génétique est positive pour notre secteur agricole?
M. Phillips : Il est difficile de convaincre tout le monde. Même pour moi, l'expression « génétiquement modifié » ne sonne pas bien. C'est un problème. Avons-nous convaincu les opposants farouches? Non. Allons-nous réussir à le faire? Probablement pas. Nous analysons ce que les consommateurs font. Oui, il y a une certaine croissance des marchés de producteurs. C'est ce que certains consommateurs veulent et certains consommateurs achètent biologique. Quand vous allez à un marché de producteurs, vous voyez des gens repartir avec quelques sacs de carottes. Quand vous allez à l'une ou l'autre des grosses épiceries, vous voyez les gens sortir avec des paniers d'épicerie remplis. Si on leur pose la question, les consommateurs disent qu'ils ne veulent pas d'aliments génétiquement modifiés lorsqu'ils font des achats pour leur famille, mais le prix et la qualité sont des facteurs. Que cela vienne d'un produit génétiquement modifié ou non est assez loin dans la liste des priorités de la plupart des consommateurs. À cet égard, nous avons fait d'assez bons progrès.
M. Bacon : Les cultures de légumineuses ne sont pas génétiquement modifiées où que ce soit dans le monde, donc je ne représente pas ici une industrie de produits génétiquement modifiés. Les Canadiens et les gens dans le monde entier peuvent avoir une grande confiance dans la science qui sous-tend l'évaluation qui se fait avant que la mise en marché de ces produits soit autorisée. Franchement, ils sont évalués et testés de façon beaucoup plus approfondie que certaines des méthodes de sélection végétale traditionnelles, ce qui comprend la mutagénèse, qui comporte l'emploi de radiations et de produits chimiques pour modifier les structures génétiques. Nous avons un ensemble de normes bizarres, en ce sens que la sélection végétale traditionnelle englobe des choses comme la mutagénèse, qui n'est pas testée avec autant de soin que la modification génétique intentionnelle.
J'aime bien encadrer la discussion sur ce point dans le contexte de la responsabilité sociale de nourrir sept milliards d'habitants aujourd'hui, en allant vers neuf milliards à l'avenir. Quand nous avons déjà un milliard d'habitants qui souffrent de malnutrition chronique et une planète aux ressources limitées, je suis personnellement d'avis que nous devons utiliser tous les outils à notre disposition pour nourrir une population mondiale croissante d'une façon durable. Pour ce faire, nous devrons utiliser la modification génétique et tous les autres outils disponibles. Nous devons avoir des systèmes scientifiques solides, et nous en avons. Nous devons sans cesse nous employer à garantir que nos aliments sont sûrs.
Je suis d'accord avec M. Phillips. Il est difficile de changer ce que les gens pensent sur ces points, tout comme il est difficile de les convaincre que des aliments qui ont reçu des pesticides au cours de leur production sont sûrs. Pourtant, il y a une très grande somme de preuves qui dit que nous avons un très bon régime réglementaire dans ce domaine également. Si vous faites confiance aux régimes réglementaires globaux, vous devez alors examiner le risque en sachant que des recherches sont menées dans le monde entier afin de garantir que le produit et la production sont sûrs.
Le sénateur Duffy : Cela m'intrigue de vous entendre parler de la façon dont les nouvelles pratiques ont réduit l'érosion. L'érosion par le vent et l'eau est une préoccupation majeure, non seulement dans l'Ouest mais également dans l'Est. Selon ce que vous me dites, la situation s'est radicalement améliorée sur ce point également.
M. Bacon : Nous avons mené quelques projets pilotes. Nous participons à des initiatives mondiales sur le développement durable. Il y a un projet clé aux États-Unis qui examine cinq grands indicateurs de la viabilité et les évaluations d'où nous en étions il y a 15 ans et d'où nous en sommes actuellement par rapport à la qualité de l'eau, l'érosion, les matières organiques dans le sol, et cetera. Nous constatons des améliorations dans tous ces domaines. C'est grâce à l'équipement que nous utilisons, à la technologie à laquelle nous avons accès et à la diversification de notre système cultural. Nous avons une très bonne histoire environnementale à raconter concernant la production d'aliments au Canada. Je crois que nous pouvons même faire mieux sur le plan du respect de l'environnement en changeant ce que les gens consomment. Plus nous consommerons de légumineuses, mieux l'environnement s'en portera.
M. Phillips : Les gens du secteur du blé pourraient ne pas être d'accord avec vous.
Grâce aux nouvelles technologies et à notre façon actuelle de cultiver avec un travail minimal du sol, nous sommes loin de consommer les carburants fossiles que nous consommions auparavant. Dans le passé, nous devions parcourir les champs trois ou quatre fois avec nos tracteurs pour préparer le sol à l'ensemencement. Aujourd'hui, nous ne le faisons qu'une fois. Nos factures de carburant ne représentent qu'une fraction de ce qu'elles étaient il y a 10 ans.
M. Bacon : La culture des légumineuses utilise la moitié de l'énergie non renouvelable comparativement aux autres cultures annuelles. J'en reviens à mon observation sur l'utilisation de l'énergie solaire pour produire les engrais azotés. C'est un fait. Si nous voulons parler de l'amélioration du dossier environnemental du canola, la culture du canola en alternance avec des légumineuses, voilà la façon de faire des gains. Il ne s'agit pas entièrement d'un commercial pro-légumineuses. S'il est vrai qu'on nous juge en fonction de nos fréquentations, les cultures qu'on fait pousser en parallèle de légumineuses ont un meilleur bilan environnemental. C'est un atout pour la commercialisation du blé canadien en Europe, où McDonald's fixe certaines normes. Nous menons des projets pilotes avec Unilever, Sustainable Food Lab et d'autres parce qu'un nombre grandissant de compagnies du secteur de l'alimentation dans le monde entier ont dit vouloir réduire leur empreinte environnementale de 50 p. 100 au pour des cinq prochaines années. D'ici 2025, tous leurs ingrédients de base proviendront de sources respectueuses de l'environnement. Nous essayons de créer pour l'agriculture canadienne les conditions qui lui permettront d'en tirer parti et de saisir parfaitement la contribution que ces systèmes culturaux diversifiés peuvent apporter afin de garantir que les systèmes de mesure sont en place. Je crois que l'agriculture canadienne doit tirer parti de l'importance accordée au respect de l'environnement, parce que nous aurons ainsi dans le monde entier le statut de fournisseur privilégié.
M. Phillips : Je veux revenir sur ce que dit M. Bacon. Cela ne s'applique pas qu'à la culture du canola en alternance, cela s'applique aussi au blé et à l'orge. Ce que M. Bacon veut dire lorsqu'il parle d'azote alimenté à l'énergie solaire, c'est que si vous cultivez des légumineuses, vous créez en fait de l'azote qui reste dans le sol. Cela signifie que je peux réduire la quantité d'engrais que, comme agriculteur, je dois appliquer l'année suivante. Ainsi, les mesures montrent une agriculture plus durable. C'est pourquoi nous en tirons des dividendes à l'heure de la mise en marché.
Le sénateur Robichaud : Dois-je comprendre qu'il y a moins de résistance aux OGM dans certaines parties du monde, comme l'Europe?
M. Phillips : Il y a encore passablement de résistance en Europe. Vous pouvez expédier du blé par bateau rempli à ras bord, mais il pourrait y avoir un peu de poussière de blé ou des semences de canola génétiquement modifié ou quelque chose comme ça, en particulier s'il s'agit de grains de provende. De fait, l'Europe vient de prendre des mesures en vue de créer une politique sur la présence de traces qui autorisera de petites quantités d'OGM dans l'industrie des aliments du bétail. Nous exerçons des pressions pour que cette politique s'applique aussi aux aliments destinés à la consommation humaine parce que zéro est un petit chiffre quand vous travaillez dans un élévateur à grains. Il y a toujours quelques grains qui s'échappent ou qui sont poussés par le vent ou sur votre ferme. C'est une partie du travail que nous faisons pour maintenir les échanges commerciaux, pour essayer de négocier une politique sur la présence de traces. Quand nous nous sommes plaints des politiques de l'Europe, ils nous ont demandé ce que nous avons comme politique. Nous n'avions pas de politique non plus.
Au Canada, nous en sommes aux dernières étapes, après avoir tenu des assemblées publiques à la grandeur du pays, pour mettre en place notre propre politique sur la présence de traces afin de déterminer ce qui est acceptable si l'on trouve quelque chose qui n'a pas encore été approuvé. Je ne sais pas si je réponds à votre question.
Le sénateur Robichaud : Je vois.
M. Phillips : Si vous voulez savoir dans quelles régions l'acceptation est la plus grande, c'est au Canada, aux États- Unis et une grande partie d'Amérique latine. En Asie du Sud-Est, les gens mangent du canola, du maïs et toutes sortes de grains. Le principal foyer de résistance, selon moi, est en Europe et dans les groupes de revenus les plus élevés en Amérique du Nord qui peuvent se permettre de payer un supplément pour obtenir ce qu'ils veulent.
Le sénateur Robichaud : La plus grande partie des terres sont actuellement exploitées. L'utilisation intensive des terres représente-t-elle un danger? Nous entendons parfois dire que si l'on fait trop de choses au même endroit, on épuisera tout ce qu'il y a dans la terre. Avons-nous maîtrisé cet aspect?
M. Bacon : Je pense qu'il y a des recherches très intéressantes à ce sujet. Je citerai quelques études menées dans l'Ouest canadien qui montrent que grâce à la culture intensive en alternance, la culture continue, la production d'oléagineux et le travail réduit du sol, nous augmentons les taux de matières organiques dans le sol. Grâce au travail réduit du sol et à ce système cultural diversifié, nous rétablissons le contenu organique du sol, ce qui offre deux avantages majeurs : cela permet de réduire la quantité d'engrais nécessaire parce qu'une partie des besoins sont comblés par la matière organique qui se décompose et, par ailleurs, la matière organique est très importante pour conserver l'humidité du sol. La recherche que nous citons dans une partie de nos travaux sur la viabilité environnementale se penche sur ce point.
Il s'agit d'utiliser la bonne technologie de manière à éviter la surfertilisation. Nous utilisons des produits de protection phytosanitaires de plus en plus sûrs. À mon avis, nous devrions nous soucier davantage d'une partie du monde en développement où l'on n'utilise pas le même niveau de technologie. Honnêtement, si nous examinons où l'on trouve les taux les plus élevés d'érosion, nous constatons que c'est dans le monde en développement. On peut soutenir que nous devons utiliser davantage de technologie pour améliorer la viabilité des systèmes culturaux. La preuve que j'invoquerais consisterait à comparer quelques indicateurs de la viabilité du Canada à ceux des systèmes culturaux employés dans une partie du monde en développement où nous voyons des taux élevés d'érosion. Quand le sol a disparu, vous n'avez pas de système productif pendant 10 000 ans.
M. Phillips : Trois hivers passés, j'ai fait du bénévolat au Nicaragua. Nous travaillions sur des pentes escarpées dans les montagnes et les gens faisaient brûler la paille chaque année, ce qui est la pire chose à faire. C'est une croyance ancestrale, une sorte de vieille légende tribale, que si vous brûlez la paille chaque année, vous aurez une bonne récolte. Cela signifie que rien ne retient le sol lorsque les pluies arrivent. Ils appauvrissaient donc les sols, mais les gens ne possédaient pas cette connaissance agronomique. Dans des pays comme ceux-là, il faut revenir à la base absolue. Il faut bâtir de petits barrages pour étager et ralentir le flot de l'eau. Il faut ramasser des roches et les entasser pour la retenir. Vous travaillez vraiment un champ à la fois, un village à la fois.
Quand j'ai travaillé en Éthiopie, c'était la même chose. En Éthiopie, il y a des pluies pendant de longues périodes et pendant de courtes périodes, mais ils ont tellement dénudé la terre pour ramasser du bois à brûler ou pour construire leurs maisons ou peu importe que lorsqu'arrive la pluie, l'eau disparaît et on se retrouve avec d'énormes tranchées creusées par l'érosion et le sol qui est lessivé. Le monde en développement a besoin de beaucoup d'améliorations en matière de pratiques agricoles.
Le sénateur Eaton : Pour revenir aux semences génétiquement modifiées et au rejet qu'elles ont suscité, le rejet a aussi énormément touché l'Afrique. Avez-vous une quelconque forme de programme d'éducation ou de lobbying pour essayer de renverser ces préjugés? Les répercussions sont terribles en Afrique. D'après ce que je comprends, l'Inde a commencé à produire sa propre variété de sélection optimale issue du génie génétique et elle a augmenté énormément ses rendements, mais l'Afrique ne l'a pas fait. C'est toujours, comme vous le dites, l'érosion et pas de culture génétiquement modifiée autorisée.
M. Phillips : Dans les pays africains, où ils essaient de vendre leurs produits sur le marché européen, c'est-à-dire là où ils y sont très sensibles, parce que les Européens leur ont dit qu'ils ont un niveau de tolérance zéro et que si quelque chose devait être mêlé au maïs qui vient de là, ils vont cesser de l'acheter d'eux. C'est ce qui explique cette tendance en Afrique, plutôt qu'une préoccupation pour la santé sur le terrain en Afrique.
Le sénateur Eaton : Essayons-nous de renverser les préjugés européens? Est-ce simplement qu'ils veulent vendre leurs propres produits? Ils n'aiment pas la concurrence qui vient de l'Amérique du Nord, alors ils soulèvent ce mythe au sujet des semences génétiquement modifiées, ou invoquent-ils une véritable raison scientifique pour expliquer leur rejet?
M. Phillips : Il n'y aurait pratiquement pas d'études soumises à un examen par des pairs dans le monde entier qui prouveraient l'existence d'un risque. C'est en partie une question de philosophie. Les Européens ont une philosophie différente à l'égard des aliments en premier lieu. Je ne sais pas si l'intention est de nous empêcher d'entrer sur leurs marchés ou si c'est simplement ce que leurs consommateurs demandent. Nous faisons de notre mieux. Nous n'avons pas d'orge, ni de blé, ni d'avoine génétiquement modifiés. Nous vendons beaucoup de récoltes canadiennes en Europe, mais pas de canola, ni de maïs ou de soja sauf si des mesures ont été prises pour les isoler.
M. Bacon : L'Europe n'est pas exempte d'aliments génétiquement modifiés. Ils consomment des aliments génétiquement modifiés. Ils sont sélectifs et ils prennent leur temps pour approuver des caractères. Les exemples sont nombreux. Il n'y a nulle part dans le monde où les aliments génétiquement modifiés sont totalement absents.
Je crois que vous avez raison, en ce sens qu'il y a un élément de maintien d'une certaine politique protectionniste quant à la rapidité avec laquelle des caractères sont approuvés, mais il ne fait aucun doute qu'il reste un groupe solide et véhément qu'on ne réussira jamais à convaincre qu'ils veulent consommer des aliments génétiquement modifiés, tout comme des gens préfèrent manger des aliments biologiques plutôt que des aliments cultivés à l'aide de produits phytosanitaires, même si, une fois encore, aucune étude scientifique soumise à un examen par des pairs ne révèle des facteurs de risque connus. L'époque où il y avait des facteurs de risque connus par rapport aux pesticides est révolue depuis 40 ou 50 ans, mais il est impossible de changer l'attitude des consommateurs.
Notre meilleur espoir, c'est de faire en sorte d'avoir des systèmes qui reconnaissent l'impossibilité d'avoir zéro de quoi que ce soit. La seule façon d'obtenir un niveau zéro est de ne pas avoir d'échanges commerciaux. Si nous pouvons avoir des seuils acceptables, une politique sur la présence de traces, cela nous permettra d'offrir au consommateur ce qu'il veut. S'il veut un produit non génétiquement modifié, en tant que nation exportatrice, c'est ce que nous devons lui offrir.
M. Phillips : S'il est prêt à payer pour l'obtenir.
M. Bacon : D'un point de vue global, ce sera l'importance accordée à l'environnement qui aidera à focaliser l'attention sur l'utilisation de tous les outils disponibles. Nous ne pouvons simplement pas nourrir, et nous ne nourrissons pas la population aujourd'hui. La question revient donc à la population : comment faire en sorte de bien nourrir sept milliards, puis neuf milliards d'habitants sans décimer la planète pour le faire? Je crois que la réponse doit être que vous devez utiliser tous les outils disponibles.
Le sénateur Mahovlich : Parlant de respect de l'environnement, quand je sors de la ville de Toronto, là où il y a des fermes, je vois partout des développements immobiliers. Devrions-nous être inquiets, ou faut-il laisser simplement le développement continuer?
M. Phillips : Je ne viens pas de l'Ontario, mais j'ai emprunté assez souvent l'autoroute. Tout ce qui peut être fait pour augmenter la densité du noyau urbain au lieu de continuer à agrandir sans cesse les banlieues serait une bonne chose. Beaucoup de villes ont été construites à l'origine sur des terres agricoles fertiles, et c'est simplement ainsi que la civilisation s'est développée. Plus les villes s'étendent, plus les meilleures terres arables disparaissent. Je frissonne toutes les fois que je vois un article dans le journal d'Ottawa disant que quelqu'un veut développer encore davantage la ceinture verte. N'allez pas dans cette voie-là.
Le sénateur Mahovlich : Nous devrions être inquiets.
M. Phillips : Bâtissez en hauteur, pas en largeur.
Le sénateur Plett : Monsieur Phillips, vous avez effleuré un point que j'allais soulever quand vous avez parlé du bénévolat que vous avez fait et des gens qui brûlaient la paille. J'ai une ou deux questions à ce sujet. Premièrement, dans ma province, et je ne sais pas si c'est le cas dans la vôtre, des gens brûlent encore la paille. Avons-nous quelque chose à apprendre ici? Est-ce que cela nuit vraiment à la terre lorsque nous brûlons la paille? Il y a des brûlis tout autour de l'endroit où je vis.
M. Phillips : La vallée de la rivière Rouge est un microcosme d'un endroit exceptionnel où le sol est si riche et la croissance est si forte qu'il est difficile de tout réintégrer dans le sol. Quand ils brûlent du lin, il est exceptionnellement difficile de réincorporer le lin dans le sol de toute façon. Les préoccupations concernant l'érosion ne sont pas les mêmes que si vous êtes dans une pente et que vous brûlez la paille. C'est assez différent. Vous n'avez pas de pénurie de matières organiques dans ce microcosme. Je n'approuverais pas cette pratique, mais je ne critiquerai pas non plus les agriculteurs.
Le sénateur Plett : Ça nous agace parfois lorsque la fumée envahit nos villages.
Nous sommes évidemment tous en faveur de l'innovation et des gros équipements qu'on achète et utilise et ainsi de suite. Vous avez mentionné plus tôt dans votre exposé le projet en cours au Manitoba pour sauver le lac Winnipeg. Nous avons entendu à maintes reprises l'inquiétude des gens au sujet des engrais qui sont lessivés dans les cours d'eau. Je ne crois pas beaucoup le fait que si vous incorporez quelque chose dans le sol, que cela se fraiera un chemin jusqu'au cours d'eau. Je ne le crois pas. Toutefois, nous avons beaucoup d'éleveurs de bétail qui fertilisent le sol. Beaucoup de propriétaires sont devenus extrêmement efficaces avec leurs systèmes de drainage parce qu'ils veulent ensemencer tôt au printemps et qu'ils veulent se débarrasser de l'eau. Sans vouloir critiquer les agriculteurs — je sais que vous ne seriez pas de ceux-là —mais pour beaucoup d'agriculteurs, leur seul problème par rapport à l'eau consiste à l'évacuer de leur terre. S'ils peuvent le faire, tout va bien. Quelle est l'ampleur du problème que nous avons à cet égard?
C'est là où je pense que nous avons un problème avec les engrais. Les gars épandent du fumier en surface, et le drainage est tellement efficace. Bien sûr, les pluies arrivent et il est impossible d'aller dans les champs pour l'incorporer dans le sol et nous avons ce lessivage dans les fossés et cela se rend dans les cours d'eau. S'agit-il d'un problème important?
M. Phillips : Je dirais que cela revient à ce microcosme dans cette région au sud de Winnipeg. Je n'entends pas la même chose en Saskatchewan. Nous n'avons simplement pas la même concentration de porcheries ou de fermes laitières que dans le Sud du Manitoba, dans le même bassin hydrographique. Je ne sais pas quelle serait la solution dans cette région, mis à part qu'ils doivent injecter ces matières à l'automne. Il existe des systèmes d'injection. Je ne sais pas pourquoi les producteurs de cette région n'ont pas investi dans ces systèmes. C'est peut-être plus coûteux ou cela prend peut-être plus de temps pour faire le travail.
Quand je parle d'utiliser mieux les engrais, je parle des engrais granulaires incorporés dans le sol, et pas uniquement des engrais intelligents. Je suis sûr que vous êtes au courant, mais il y a un système de géopositionnement global dans la cabine du tracteur. Bien des gros tracteurs sont maintenant équipés d'un pilote automatique. Lorsque l'agriculteur revient de l'extrémité de son champ, il peut lâcher le volant et le tracteur reviendra en ligne droite.
Étiez-vous un agriculteur dans votre jeunesse?
Le sénateur Plett : Non, mais j'ai travaillé sur des fermes.
M. Phillips : Dans les nuages de poussière qui m'entouraient lorsque je conduisais un tracteur il y a 30 ans, on ne savait même pas où on se trouvait, au point où on faisait chevaucher l'épandage d'engrais d'un côté, sans en appliquer ailleurs. Quand la poussière se dissipait et que vous regardiez en arrière, vous auriez pu penser que je m'étais couché trop tard la veille. C'était parfois le cas. Chaque fois que j'avais le vent dans le dos, on aurait dit que j'avais veillé tard.
Comme agriculteurs, nous pouvons le faire. Nous avons les outils et la technologie pour éviter le plus possible ce genre de choses. Au Manitoba, je sais que c'est une question difficile. Je ne connais pas les solutions pour composer avec tout ce lisier de porc. Je ne connais pas la réponse à cet égard.
Le sénateur Plett : J'espère ne pas avoir mis les producteurs de porc dans l'embarras parce que j'appuie effectivement l'industrie du porc et je veux les aider aussi. Je vous remercie de votre réponse.
[Français]
Le sénateur Rivard : Nous avons entendu, la semaine dernière, les producteurs laitiers. Tout le monde sait que l'industrie laitière a des surplus et que, chaque année, ils perdent des produits. Peut-on dire que votre production, vous l'écoulez, vous rencontrez la demande ou si vous avez des surplus? Par exemple, on sait que le Canada est en train de conclure un accord de libre-échange avec l'Union européenne. Bien que les Européens soient frileux par rapport aux OGM, croyez-vous que, via un accord de libre-échange avec l'Union européenne, vous pourriez vendre peut-être 10, 15 p. 100 de ce que vous produisez présentement?
[Traduction]
M. Bacon : Je crois que la différence entre l'industrie des légumineuses et l'industrie des grains tient au fait que le produit peut être entreposé pendant de longues périodes. Il est entreposé à sec ce qui offre un choix aux agriculteurs : s'ils n'aiment pas les prix sur le marché aujourd'hui, ils peuvent attendre la semaine prochaine ou le mois prochain. Les agriculteurs entreposent parfois leurs grains pendant plus d'un an en attendant un prix qu'ils trouvent plus attrayant. Évidemment, avec un produit périssable comme les produits laitiers, cette option est moins présente, ou il vous faut construire des entrepôts réfrigérés. Je ne suis pas un expert de l'industrie laitière.
Quant à l'accord de libre-échange avec l'Europe, je ne crois pas qu'il aura un quelconque effet sur l'attitude des consommateurs. Au bout du compte, quand il est question de savoir si le consommateur européen est prêt à acheter quelque chose, nous essayons de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'obstacles gouvernementaux, mais je ne sais pas si nous verrons de sitôt des changements d'attitude chez le consommateur européen à l'égard des modifications génétiques, tout comme je crois qu'il y aura toujours des consommateurs qui opteront pour des produits biologiques.
Pour revenir à une question antérieure du sénateur Eaton, nous devons, comme industrie, mieux communiquer les bases scientifiques solides sur lesquelles nos systèmes de sécurité alimentaire sont fondés pour éviter que les gens s'inquiètent sans raison.
[Français]
Le sénateur Rivard : Les témoins nous ont laissé un feuillet de recettes très appétissantes de 32 pages et je les en félicite. C'est très bien. Je me rends compte que Agriculture et Agroalimentaire Canada y a probablement contribué largement. Est-ce possible de penser que cette brochure est disponible en français également?
[Traduction]
M. Bacon : Oui, elle est disponible. Je n'en ai pas apporté d'exemplaire, mais à mon retour au bureau, je veillerai à vous faire parvenir cette information.
[Français]
Le sénateur Rivard : Je suis très heureux d'entendre cela parce que c'est une clientèle importante. Je peux vous dire que c'est très bien fait et que c'est très appétissant. Je vais l'apporter à la maison pour ma conjointe.
[Traduction]
M. Bacon : Sénateur, la brochure était en français mais le contenu était entièrement en anglais.
M. Phillips : Nous nous engagerons aussi à distribuer aussi le livre de recettes du canola.
Le sénateur Robichaud : Combien de recherche fait-on sur les engrais et les pesticides? Vous avez mentionné les engrais granulaires intelligents, mais par rapport à ce que vous produisez, y a-t-il beaucoup de place à l'amélioration? Je sais qu'en production laitière, on fait beaucoup de travail sur l'utilisation des engrais, mais dans la production de grains et de lentilles, reste-t-il encore beaucoup à faire?
M. Phillips : Une partie du travail qui reste à faire concerne le placement de l'engrais et la distance de la semence et de savoir si la machinerie est assez proche. Si vous appliquez trop d'engrais à la semence, vous pouvez essentiellement brûler les racines. Il y a plus de travail à faire sur ce point.
La prochaine percée vraiment importante, après les engrais intelligents, serait probablement s'ils pouvaient mettre au point une variété de blé ou d'orge qui pourrait effectivement fixer l'azote dans le sol, comme les légumineuses le font. Ce serait probablement la prochaine percée vraiment importante. Nous sommes peut-être à 20 ans d'y arriver. On y travaille actuellement.
Par rapport aux pesticides, ce sont plutôt les grosses compagnies qui font la recherche sur les pesticides. Il y a Bayer, Syngenta, Monsanto, BASF. Ce sont les grosses compagnies qui investissent des centaines de millions de dollars. Ils analysent des milliers de produits pour tuer les mauvaises herbes et ils ramènent la liste à trois ou quatre, ou à un seulement, au bout du compte. Ce sont les compagnies qui ont les poches assez profondes pour le faire.
Pour notre part, la recherche publique ici, par rapport aux cultures, concerne les variétés. Il y a beaucoup de travail sur les variétés et sur les grains céréaliers pour améliorer les rendements ou la résistance à la maladie. Ce sont les genres de choses qui vous permettent d'utiliser moins de pesticides, si vous réussissez à les mettre au point. M. Bacon pourrait peut-être parler de l'aspect de la santé humaine, par exemple du centre St. Vital où ils font des essais cliniques sur l'alimentation.
M. Bacon : Pour répondre à la question du sénateur, également pour reprendre ce que M. Phillips disait, je crois que l'un des domaines d'investissement majeur serait de trouver des variétés végétales qui utilisent plus efficacement l'engrais disponible. C'est évidemment un point que l'industrie du canola étudie et comme M. Phillips l'a mentionné, les végétaux qui sont capables d'extraire plus efficacement les engrais du sol et d'avoir une meilleure croissance pour la même quantité d'engrais, ainsi que dans le domaine des micronutriments et le rôle que certains de ces éléments mineurs jouent pour bien nourrir les végétaux. Les végétaux ressemblent aux humains. Ils ont besoin du bon apport nutritif au bon moment. Un quelconque déficit limitera la croissance de la plante d'une quelconque façon. Nous essayons ici encore d'extirper les derniers gains d'efficacité possibles en matière de production végétale, et l'utilisation efficace de l'eau y est évidemment liée.
Le sénateur Plett : M. Phillips vient de faire allusion au centre St. Vital. Est-il situé à Winnipeg?
M. Phillips : Oui, à Saint-Boniface.
Le sénateur Plett : Ils sont côte à côte.
M. Bacon : Le gouvernement du Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada a un centre de recherche en agriculture et il est lié à la médecine. C'est là où une partie du travail sur le lin a eu lieu, par rapport aux bienfaits du lin pour la santé, et c'est là aussi qu'une partie du travail sur les bienfaits des légumineuses pour la santé a eu lieu. Nous sommes aux tous débuts de l'établissement d'un lien solide entre l'agriculture et les résultats pour la santé. Une grande partie de notre travail, y compris notre partenariat avec Agriculture et Agroalimentaire Canada, consiste à travailler en étroite collaboration avec les grandes compagnies du secteur de l'alimentation et à les encourager, à leur fournir des réponses aux questions qu'ils ont sur la reformulation des produits alimentaires.
Nous devons effectivement élargir la somme des connaissances médicales pour établir un lien entre la consommation de certains produits alimentaires et de meilleurs résultats pour la santé, que ce soit par rapport aux maladies cardiovasculaires ou au contrôle du taux de sucre dans le sang pour le diabète et nous pouvons parcourir la liste. C'est un domaine d'innovation très important. Nous travaillons avec des compagnies pour reformuler le pain de façon à inclure davantage de farine de légumineuses et ainsi améliorer la réponse glycémique, une fois encore pour contrôler le taux de sucre dans le sang. Nous essayons de recenser les principales maladies qui touchent les Canadiens et les solutions alimentaires que nous pouvons proposer pour compléter l'approche pharmacologique en matière de soins médicaux.
Le sénateur Duffy : Pour revenir à ce que M. Phillips disait au sujet des GPS et de la conduite des tracteurs, un problème que nous avons à l'Île-du-Prince-Édouard et qui semble persister — il est un peu moins présent mais il demeure préoccupant — le lessivage de pesticides dans les cours d'eau. Il y a eu trop de mortalité de poissons au cours des dernières années. J'espérerais que vous tous, les acteurs de l'industrie, poursuiviez vos travaux pour faire en sorte que les bandes protectrices soient suffisantes et qu'en employant ces méthodes plus scientifiques de pulvérisation et d'ensemencement, les agriculteurs ne menacent pas nos cours d'eau. C'est un problème réel, en particulier dans les endroits où les cours d'eau sont proches, comme à l'Île-du-Prince-Édouard.
M. Phillips : Si on voulait vraiment jouer à Big Brother et imposer l'installation de GPS dans tous les tracteurs, le gouvernement pourrait, en théorie, saisir cette information et savoir si quelqu'un a effectivement enfreint la loi. Je lis les journaux de l'Atlantic Grains Counsel et je vois qu'on y mentionne que si des gens appliquent quoi que ce soit à moins de 30 pieds d'un cours d'eau, ils enfreignent la loi et pourtant, des gens enfreignent quand même cette loi, parfois par accident, sur des terres à bail.
Le sénateur Robichaud : Trente pieds ou trente mètres?
M. Phillips : C'est peut-être à 30 mètres des cours d'eau. J'ai lu à propos de ces infractions à l'Île-du-Prince- Édouard. En théorie, si vous avez une carte assez précise du champ, vous pouvez régler les alarmes sur votre GPS. Il vous avertira si vous êtes trop près et vous n'aurez alors aucune excuse, à moins d'être vraiment endormi. Vous ne devriez pas dormir au volant, de toute façon.
Je voulais prendre un autre engagement concernant l'information que je pourrais vous fournir par rapport à CropLife et toutes les grandes compagnies qui ont fait beaucoup de travaux sur les cultures génétiquement modifiées et sur les questions relatives à l'innocuité et le matériel de sensibilisation publique. Je leur demanderai si elles veulent bien distribuer aussi une partie de leur documentation. Le sénateur Eaton demandait si c'était possible.
Le président : Avant de lever la séance, j'aimerais dire quelques mots aux témoins. Premièrement, je vous remercie d'être venus. J'aimerais faire quelques observations et commentaires au sujet de vos témoignages. J'ai quelques questions, mais je demanderai à la greffière de vous les faire parvenir par lettre pour que vous puissiez y répondre.
J'apprécierais aussi que vous nous fassiez part de vos commentaires sur ce qui suit : quand nous avons parlé de production alimentaire en agriculture, vous n'avez pas parlé de la compaction du sol. Vous avez mentionné l'érosion, et nous aimerions avoir votre avis professionnel sur le sujet.
Deuxièmement, pour citer un exemple de ce qui s'est produit dans l'Est du Canada — et nous l'avons vu aussi dans l'Ouest canadien, quand ils se sont mis à cultiver la pomme de terre — il y a des années, nous avions des ramasseurs de roches pour ramasser les roches dans nos champs. Au fil du temps, les spécialistes de la recherche et du développement nous ont dit que nous devions laisser les roches dans notre sol pour garder l'humidité, et ainsi obtenir une récolte de meilleure qualité. Le Comité aimerait savoir ce que vous en pensez.
[Français]
Vous avez parlé de terres arables. Lorsqu'il en fut question, le sénateur Mahovlich a fait allusion au fait que, dans certaines régions du globe, comme le Brésil, on coupait à blanc pour transformer les forêts en terres arables.
Est-ce qu'au Canada, ou dans certaines régions du Canada, on pourrait augmenter les terres arables afin d'avoir une plus grande production? Dans l'affirmative, dans quel secteur pourrait-on le faire? S'agirait-il du côté forestier, des terres humides ou de nouvelles terres arables?
[Traduction]
L'autre domaine au sujet duquel nous aimerions recevoir vos commentaires, c'est de savoir si les producteurs de grains, à titre individuel, font partie du réseau de l'innovation en pratiques agricoles. Comment le gouvernement du Canada peut-il favoriser la capacité créative des agriculteurs canadiens?
La dernière question sur laquelle nous aimerions profiter de votre expérience professionnelle, de vos commentaires et de vos connaissances est la suivante : à votre avis, le programme de la grappe de recherche d'AAC est-il utile pour définir les priorités de recherche dans l'ensemble de l'industrie?
Nous vous ferons parvenir ces questions pour que vous puissiez nous donner vos réponses. Nous l'apprécierions beaucoup, Messieurs Phillips et Bacon.
Le sénateur Robichaud : Vous avez des imprimés sur les légumineuses et la maladie cardiovasculaire, sur les légumineuses et le contrôle du diabète et sur le contrôle du poids. Quel rôle Santé Canada joue-t-il pour en faire la promotion?
M. Bacon : Je peux dire avec grand plaisir que nous avons une très bonne relation de travail avec Santé Canada, et Agriculture Canada et Santé Canada collaborent en vue d'élargir ce rôle. Ils ont été très utiles pour définir les méthodologies de recherche de façon à ce que les résultats remplissent les critères de Santé Canada. Nous avons fait des progrès concrets au cours des quatre ou cinq dernières années pour établir une très bonne relation avec Santé Canada, et Santé Canada manifeste un intérêt bien concret à modifier le système pour contribuer à faire en sorte que les aliments jouent un plus grand rôle.
Le président : Messieurs Bacon et Phillips, j'écoutais un groupe d'économistes parler de la production mondiale. Ils disaient que le pays qui serait doté des quatre F aurait certainement une longueur d'avance en matière d'activité économique et de production alimentaire. Les quatre F sont, en anglais : food, fuel, fertilizer et forestry, c'est-à-dire les aliments, le carburant, les engrais et les forêts.
Nous vous remercions beaucoup d'avoir partagé vos connaissances avec nous. Il se pourrait que nous vous demandions de revenir.
Sur ce, mesdames et messieurs les sénateurs, la séance est levée.
(La séance est levée.)