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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 3 - Témoignages du 27 octobre 2011


OTTAWA, le jeudi 27 octobre 2011

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 4, afin d'examiner pour en faire rapport les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujet : L'innovation dans le système agricole et agroalimentaire de la perspective des producteurs agricoles).

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour. La séance est ouverte.

[Français]

Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

[Traduction]

Je m'appelle Percy Mockler. Je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je préside le comité. J'invite maintenant tous les autres sénateurs de se présenter. Commençons à ma gauche.

Le sénateur Mercer : Sénateur Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Joyce Fairbairn, de Lethbridge, en Alberta.

Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.

Le sénateur Plett : Don Plett, de Landmark, au Manitoba.

Le sénateur Eaton : Nicole Eaton, de Toronto, en Ontario.

[Français]

Le sénateur Rivard : Michel Rivard, des Laurentides, Québec.

[Traduction]

Le président : Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation à nous faire profiter, nous et tous les Canadiens, de leurs connaissances et de leurs points de vue sur les milieux agricoles qu'ils représentent. Ils ont sûrement tenu compte de l'ordre de renvoi du comité. Un rapport sur le développement de nouveaux marchés domestiques et internationaux, le renforcement du développement durable de l'agriculture et l'amélioration de la diversité et de la sécurité alimentaires sera présenté au Sénat.

[Français]

Le but de la réunion aujourd'hui est de comprendre l'innovation dans le système agricole et agroalimentaire tout en considérant les perspectives venant des producteurs agricoles eux-mêmes.

[Traduction]

Nous accueillons, de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, Ron Lemaire, président, et Jane Proctor, vice-présidente à la Gestion des politiques et des enjeux.

[Français]

Nous avons également la directrice du Conseil canadien de l'horticulture, Mme Anne Fowlie, qui est vice-présidente exécutive.

[Traduction]

Le greffier me dit que le premier témoin qui fera son exposé sera M. Lemaire. Il sera suivi de Mme Fowlie. Après les exposés, les sénateurs poseront des questions. Monsieur Lemaire, je vous en prie.

Ron Lemaire, président, Association canadienne de la distribution de fruits et légumes : Honorables membres du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, au nom de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, je vous remercie de nous donner l'occasion de nous exprimer devant vous aujourd'hui.

Le marché canadien des fruits et légumes contribue à hauteur d'environ 5 milliards de dollars à l'activité économique mesurable au Canada, et fournit directement de l'emploi à plus de 90 000 Canadiens dans tout le pays. L'ACDFL est une association sans but lucratif qui représente les intérêts du secteur des fruits et légumes frais au Canada depuis 87 ans. À l'appui d'une chaîne d'approvisionnement à intégration verticale, nous représentons plus de 770 entreprises membres, de la production jusqu'à la distribution, autrement dit, des producteurs-expéditeurs jusqu'aux détaillants en produits alimentaires, en passant par les services alimentaires, et presque tous ceux qui se trouvent entre les deux. À titre d'exemple, nous comptons parmi nos membres : la PEI Potato Board, BC Tree Fruits, Loblaws, Metro, Sysco et Gordon Food Service. Avec ses membres, l'ACDFL représente les intérêts de 456 sociétés canadiennes, dont plus de 150 producteurs-expéditeurs-conditionneurs. La diversité de son effectif donne à l'ACDFL une perspective unique sur les enjeux et les difficultés que doit affronter l'agriculture canadienne, tant au niveau de la production primaire, que de la commercialisation.

Certes, il n'existe pas de solution miracle pour résoudre les difficultés qu'éprouve depuis longtemps le marché des fruits et légumes, mais nous nous devons d'envisager de nouveaux modèles économiques et de nouvelles politiques appelés à soutenir les entreprises canadiennes afin d'améliorer leur compétitivité à l'échelle nationale et internationale. À ce sujet, j'aimerais insister brièvement sur quelques occasions favorables dans le contexte des trois domaines d'intérêt mentionnés dans l'ordre de renvoi.

Pour ce qui est de développer de nouveaux marchés, tant au Canada qu'à l'étranger, l'absence de renseignements solides sur les marchés dans le secteur des fruits et légumes constitue actuellement un obstacle et présente pour le gouvernement une belle occasion de soutenir la planification des activités, les négociations commerciales et la viabilité du secteur des fruits et légumes frais canadiens sur le marché international.

Je dois signaler que l'actuel système d'information sur le secteur horticole manque de fonds et de ressources. Aussi, l'industrie et le gouvernement se démènent actuellement dans le noir et ils sont donc désavantagés face à la concurrence lorsqu'il s'agit d'obtenir des renseignements sur les marchés nationaux. Il est essentiel de posséder des renseignements exacts sur les marchés si nous voulons répondre à nos besoins en matière d'analyses économiques et de marché afin de créer de nouveaux créneaux commerciaux et de production.

En outre, il faut faire preuve d'innovation sur le marché canadien afin de répondre aux besoins de plus en plus diversifiés de la mosaïque canadienne. L'immigration, le vieillissement de la population et la mondialisation figurent au nombre des facteurs influant sur les habitudes alimentaires, les tendances et les dépenses pour l'alimentation au Canada. Le lancement de nouveaux produits au Canada, les aliments tels que les nutraceutiques et d'autres innovations qui vont de l'emballage aux technologies de production seront le gage à long terme de la durabilité et de la viabilité de l'agriculture canadienne, dans la mesure où cette dernière bénéficiera du soutien nécessaire pour suivre la cadence, et ce soutien est fondamental.

Au crédit du secteur des fruits et légumes frais, on peut porter la tendance croissante des Canadiens à rechercher des aliments non transformés afin de prendre soin de leur santé et de leur bien-être. La question à se poser est la suivante : en tant que décideurs et producteurs canadiens, faisons-nous ce qu'il faut pour soutenir cette tendance en adoptant les politiques appropriées et en créant un contexte favorable afin de permettre aux innovations canadiennes de prospérer et de prendre la tête du marché, tant au pays qu'à l'étranger?

L'accès aux nouvelles technologies de production, comme les produits de protection des cultures, est essentiel si on veut que les producteurs conservent leur compétitivité. Le gouvernement du Canada doit se montrer agile et proactif afin de s'adapter au rythme rapide du changement avec lequel l'industrie des fruits et légumes frais doit composer chaque jour. C'est pourquoi nous encourageons la collaboration constante entre l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et ses pendants à l'étranger, afin de veiller à ce que l'industrie canadienne ait accès aux produits et technologies qui garantissent la compétitivité ainsi que la salubrité de l'approvisionnement alimentaire des Canadiens. De plus, le gouvernement doit travailler en étroite collaboration avec l'industrie dans d'autres secteurs, comme la modernisation du programme des fruits et légumes frais, notamment la salubrité alimentaire, la qualité et la normalisation ainsi que la traçabilité.

Par ailleurs, pour qu'une industrie soit concurrentielle, il faut mettre à sa disposition des outils d'atténuation des risques financiers. En effet, l'atténuation des risques financiers constitue un problème depuis la fin des années 1980. En 2005, cette question a pris encore plus d'importance, car on a signalé que le secteur des fruits et légumes affichait le taux le plus élevé de faillites, qui est de 2,3 sociétés par milliard de dollars. Ce chiffre ne comprenait pas les entreprises du secteur ayant volontairement décidé de cesser leurs activités, soit pour éviter d'avoir à payer leurs fournisseurs, soit pour se retirer de façon légitime, notamment pour insolvabilité. L'incidence, pour les entreprises canadiennes, et plus particulièrement pour les producteurs primaires, sur le marché des fruits et légumes frais a été et est toujours importante.

De plus, le rapport Hedley, que l'industrie a présenté au gouvernement du Canada en 2005, mettait au jour des méthodes contraires à l'éthique et illégales, notamment le non-règlement des paiements, le ralentissement des paiements et l'insolvabilité. Ce rapport faisait ressortir la nécessité de mettre au point un mécanisme destiné à offrir un programme de protection financière, semblable à celui offert par la fiducie créée aux termes du Perishable Agricultural Commodities Act, le PACA, aux États-Unis. Pourquoi avons-nous besoin d'un tel programme? Les avantages sont clairs. Il s'agit de veiller à ce que les gens soient payés équitablement et dans des délais raisonnables, puisque ces facteurs influent directement sur le prix exigé du consommateur, sur la salubrité alimentaire, et sur les revenus des producteurs.

La solution n'est pas simple, mais elle est essentielle : il faut améliorer la réglementation actuelle de la commercialisation. Le rapport Hedley décrivait la portée des changements. Par exemple, cela pourrait consister à apporter des modifications à la PAC et à améliorer l'information sur les marchés à la disposition de l'industrie, de manière à accroître la transparence et la symétrie de l'information sur les marchés.

À l'heure actuelle, de 60 à 70 p. 100 des exportations canadiennes de fruits et légumes frais sont expédiées vers les États-Unis. Les Canadiens bénéficient des avantages et de la sécurité offerts par le PACA lorsqu'ils font du commerce aux États-Unis. En l'absence d'un mécanisme offrant la réciprocité en matière d'atténuation des risques au Canada, on s'expose à ce que l'industrie américaine exerce des pressions sur son gouvernement pour nous éliminer de la liste des pays recevant un traitement préférentiel au titre du PACA, ce qui revient à mettre en péril les producteurs canadiens qui exportent vers les États-Unis. L'industrie reconnaît la valeur des efforts déployés en ce moment par Agriculture et Agroalimentaire Canada, mais il faut rapidement redoubler ces efforts.

Les barrières commerciales en Amérique du Nord constituent un autre sujet de préoccupation pour l'ACDFL et ses membres. Sur ce point précis, l'Association est favorable à une approche fondée sur le périmètre nord-américain, tel qu'il a été élaboré par le premier ministre Harper et le président Obama, parce que nous souhaitons que cette initiative permette l'élimination des barrières commerciales entre nos deux pays.

Enfin, et c'est peut-être notre plus important sujet de préoccupation, nous souhaitons aborder la question de l'obésité chez les enfants et des maladies qui y sont associées. Les fruits et légumes frais peuvent jouer un rôle important dans la santé des enfants et de tous les Canadiens. Les données publiées par Statistique Canada en 2010 montrent un recul dans le nombre de portions de fruits et légumes consommées par les Canadiens. Il faut que le gouvernement du Canada intervienne pour freiner ce recul. L'accès à des fruits et légumes frais, et la perception qu'ils sont coûteux et difficiles à préparer sont des facteurs qui ont une incidence sur la sécurité alimentaire. L'éducation des consommateurs et des programmes visant à rapprocher les Canadiens des exploitations agricoles sont des mesures importantes pour s'attaquer à ce problème. On trouve des exemples de ce genre de programme un peu partout autour du globe, notamment au Royaume-Uni, en Irlande et chez nos voisins du Sud. Tous ces pays ont investi dans un programme d'envergure nationale pour favoriser la consommation de fruits et légumes. Il faut reconnaître que chaque dollar dépensé aujourd'hui dans des programmes visant à faire consommer par les Canadiens une portion de fruits ou de légumes de plus aura des répercussions exponentielles sur la réduction des dépenses à venir des gouvernements en soins de santé, sur les questions de sécurité alimentaire ainsi que sur la garantie d'approvisionnement durant toute l'année en fruits et légumes frais et sains pour les enfants et la population en général.

En guise de conclusion, je signale que l'ACDFL, de concert avec son partenaire, le Conseil canadien de l'horticulture, organise une manifestation pour célébrer les récoltes d'automne les 22 et 23 novembre prochains, au centre-ville d'Ottawa. Elle nous donnera l'occasion d'aborder bon nombre des questions que j'ai soulevées aujourd'hui. Elle comprend notamment des réunions avec vos collègues du Parlement et vise à sensibiliser davantage la population aux enjeux qui touchent l'industrie canadienne des fruits et légumes, et au rôle important qu'elle joue dans la santé des Canadiens et la viabilité financière du Canada. Merci.

Le président : Merci, monsieur Lemaire.

[Français]

Anne Fowlie, vice-présidente exécutive, Conseil canadien de l'horticulture : Bonjour et merci beaucoup. C'est vraiment un privilège pour nous de partager des informations avec vous.

[Traduction]

Le Conseil canadien de l'horticulture, créé en 1922, est une association nationale qui représente des producteurs, des conditionneurs et des intermédiaires d'entreposage pour un assortiment divers de plus de 120 cultures de fruits et de légumes. Parmi ses membres, notons des organisations provinciales et nationales de produits horticoles représentant plus de 25 000 producteurs au Canada ainsi que des organisations alliées et des organisations de services, des gouvernements provinciaux et des producteurs à titre individuel. Notre mission nous engage à promouvoir une plus grande rentabilité de l'horticulture en encourageant la coopération et la compréhension pour dégager un consensus national sur des enjeux clés, vous livrer des messages clairs et cohérents et assurer une représentation auprès de vous, d'autres collègues et de parties internationales.

L'industrie est fortement diversifiée, comme la production agricole, et c'est l'un des plus importants secteurs agroalimentaires au Canada. Par exemple, les Canadiens dépensent plus de 14 milliards de dollars en fruits et légumes frais et transformés, ce qui représente 25 p. 100 des dépenses au détail en alimentation. Ce n'est donc pas négligeable. C'est même l'un des secteurs de production agricole les plus importants, car ses recettes dépassent les 5 milliards de dollars. C'est la principale source de recettes en Colombie-Britannique et dans l'Île-du-Prince-Édouard et il représente plus de la moitié des recettes des productions végétales dans toutes les provinces sauf celles des Prairies.

Comme tous les secteurs agricoles, l'horticulture a été profondément touchée par la mondialisation, le raffermissement de la devise canadienne, l'augmentation des coûts attribuables à la réglementation et, bien entendu, la concentration aux deux extrémités de la chaîne d'approvisionnement.

Notre organisation a remporté un certain succès au fil du temps. Le Programme des travailleurs agricoles saisonniers a été d'abord un partenariat réunissant les producteurs, le Conseil canadien de l'horticulture et le gouvernement du Canada, il y a plus de 40 ans. Il prospère aujourd'hui, et bien des producteurs lui doivent d'être en activité. Le protocole d'entente sur le partenariat a été établi par le gouvernement du Canada et le Conseil canadien de l'horticulture et il est toujours en place.

À propos du Centre de la lutte antiparasitaire, à Agriculture et Agroalimentaire Canada, le Conseil et ses efforts ont été indissociables de la mise en place de ce service très important qui contribue à la compétitivité de l'horticulture.

Quant à la sécurité alimentaire, le programme CanadaGAP — Salubrité des aliments à la ferme, à l'intention des producteurs, des conditionneurs et des intermédiaires en entreposage est le seul programme de salubrité alimentaire du Canada qui ait satisfait aux exigences de la Global Food Safety Initiative. Il faut reconnaître un énorme mérite aux producteurs, au ministre, au ministère et à l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Nous sommes très heureux que, dans le cadre de votre ordre de renvoi, vous examiniez ces questions. Je vais commencer par quelques observations sur l'amélioration de la diversité et de la salubrité des aliments par les Canadiens et pour les Canadiens, comme nous aimons à le dire. C'est une priorité qu'il ne sera possible de concrétiser que par le dialogue, la compréhension et la collaboration stratégique.

De quoi avons-nous besoin? Vous avez déjà entendu mon collègue, M. Lemaire, évoquer un certain nombre de choses et j'en aborderai d'autres également : fournir des fonds suffisants pour la recherche et l'innovation; prendre les mesures voulues pour élaborer et mettre en œuvre des politiques et programmes propres à favoriser la rentabilité des producteurs, ce qui comprend des programmes traditionnels et non traditionnels de gestion du risque dans le sens le plus large; assurer un cadre de réglementation favorable qui soit propice au commerce et facilite l'accès à de nouvelles protections des cultures et, bien entendu, appuyer et promouvoir des initiatives relatives à la salubrité des aliments et à la traçabilité.

Toutefois, il faut commencer au niveau de l'exploitation agricole, et la prospérité à ce stade entraînera la prospérité aux stades suivants. Un produit stable, salubre, nutritif et de qualité, produit de façon durable et concurrentielle, ce qui suppose un accès rapide aux technologies nouvelles et innovatrices et une multitude d'outils d'atténuation des risques, mis en marché à un prix raisonnable et payé intégralement dans les meilleurs délais assurera des profits à long terme. Voilà la vraie recette à suivre pour assurer l'innovation et la rentabilité.

La recherche et l'innovation sont indispensables au maintien de la compétitivité du secteur horticole au Canada. L'annonce de l'initiative Grappe agro-scientifique pour l'horticulture a été accueillie avec enthousiasme. On a eu l'impression que c'était là une occasion à saisir pour l'horticulture et toute l'agriculture. L'objectif déclaré de l'initiative est d'inciter les principales organisations agricoles à mobiliser et à coordonner une masse critique de capacités scientifiques et techniques dans l'industrie, l'administration publique et les milieux universitaires pour créer, concevoir et mettre en œuvre un programme national de sciences appliquées, de transferts technologiques et de plans de commercialisation à l'appui de stratégies et de priorités sectorielles pour favoriser la rentabilité et la compétitivité.

En 2009, l'horticulture a rationalisé ses besoins et priorités en matière de recherche et d'innovation autour de cinq thèmes : santé et mieux-être; salubrité et qualité des aliments; production et systèmes de production; comportement environnemental du système horticole, ce qui englobe la lutte antiparasitaire; gestion de l'énergie et efficacité énergétique. Nous estimons que ces thèmes correspondent bien aux priorités du gouvernement du Canada.

Notre mandat, à l'égard de la Grappe agro-scientifique, est d'assurer les liens voulus avec les parties intéressées en sciences et technologie pour contribuer à accélérer l'innovation en horticulture; faciliter l'adoption de nouvelles technologies dans tout le secteur horticole; offrir une tribune pour aborder et utiliser le nouveau programme d'agri- innovation, Cultivons l'avenir, qui, espérons-nous, sera maintenu dans la prochaine politique cadre sur l'agriculture; protéger les intérêts des membres et leur investissement grâce à une protection suffisante de la propriété intellectuelle et à l'acquisition de droits de licence, lorsqu'il y a lieu.

Le programme permet à l'industrie et aux chercheurs de collaborer et de poursuivre l'objectif d'une meilleure rentabilité et d'une compétitivité supérieure au moyen des ressources scientifiques et techniques qui appuient des stratégies d'innovation. L'innovation revêt une importance cruciale pour les producteurs s'ils veulent préserver leur compétitivité. Les avantages possibles et les synergies acquis grâce à la Grappe agro-scientifique par une meilleure coordination des initiatives de recherche appliquée entre les diverses organisations canadiennes vouées à la recherche sont très précieux pour l'industrie ainsi que pour le bien public.

La série d'initiatives en cours à la faveur de la Grappe agro-scientifique se trouvent dans les annexes du document que vous avez reçu.

J'ai parlé de la recherche en production, et nous ne pouvons certes pas la minimiser. Voici quelques exemples. Il en est un qui m'est familier, puisque j'ai travaillé pendant 20 ans dans l'industrie de la pomme de terre au Nouveau- Brunswick. Il s'agit de la larve de taupin, problème qui a pris une envergure nationale. Les ravages que cette larve a causés dans le secteur de la pomme de terre à l'Île-du-Prince-Édouard s'accumulent et la valeur pécuniaire associée à ces pertes augmente de façon marquée. Selon les estimations, des indemnités d'environ 3 millions de dollars, soit 20 p. 100 de toutes les indemnités d'assurance-récolte versées aux agriculteurs de l'île, sont attribuables aux ravages de la larve de taupin. Cela, dans la seule Île-du-Prince-Édouard. Mais le problème se pose dans toutes les régions productrices de pommes de terre.

La culture de la carotte est également touchée. Dans l'Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse, des champs entiers ont été abandonnés à cause des dommages subis. Ce n'est là qu'un exemple parmi d'autres qui illustrent le besoin de recherche et de technologie. Comme je l'ai dit, le point de départ, c'est l'exploitation agricole. Si nous n'avons pas des produits sains qui entrent ensuite dans la chaîne d'approvisionnement à l'état frais ou sous une forme transformée, nous ne pouvons prétendre à la compétitivité, ni conserver le moteur économique qu'est ce secteur.

Un élément essentiel à une meilleure viabilité de l'agriculture est la gestion des risques, qui englobe la lutte contre les parasites et les maladies ainsi que la recherche de nouveaux modes de production. Au moment où nous nous tournons vers de nouveaux types nombreux d'aliments et de technologies, nous chercherons de nouveaux modes de production et de commercialisation. On ne parlera pas forcément du boisseau traditionnel de pommes de terre, mais peut-être de grammes ou de livres d'éléments nutritifs provenant des bleuets ou d'autres productions.

On aura besoin d'outils différents de gestion des risques en raison de cette évolution. Pour préparer l'avenir, nous devons réfléchir à différents éléments, dont les suivants : un cadre réglementaire favorable; la salubrité des aliments et la traçabilité — et tenons-nous en à la dimension scientifique; la biosécurité; et dans notre secteur particulier, nous tenons beaucoup à l'élaboration et à l'adoption d'une stratégie nationale de lutte contre les parasites des plantes. Il n'y en a aucune pour les plantes. Il y en a une qui porte sur les animaux, mais aucune pour les plantes, et nous avons la chance que le ministre ait récemment approuvé un projetqui nous permettra de franchir les premières étapes vers cette stratégie.

Pour ce qui est des difficultés et des occasions qui se présentent à l'industrie, j'ai parlé de certains défis à relever en production. C'est un aspect souvent négligé, mais c'est là que tout a commencé. Il y a également l'accès à de nouvelles variétés et leur commercialisation; l'entreposage et la gestion après les récoltes; et enfin, la commercialisation et la sensibilisation.

À propos de l'ouverture de nouveaux marchés au Canada et à l'étranger, le ministre Ritz a annoncé en 2009 la création du Secrétariat à l'accès au marché. Il vient de tenir cette semaine sa réunion annuelle. Le ministre était présent pour rendre public le premier rapport, qui fait état de certaines réussites. Il s'agissait de la première réponse aux recommandations de l'industrie sur la façon de renforcer l'approche canadienne de l'accès au marché.

Les producteurs d'un certain nombre de produits participent à des programmes rendus possibles par le programme Agri-marketing et songent à élaborer des stratégies internationales à long terme. Il y a par exemple la pomme, les produits cultivés en serre, la pomme de terre et les fruits fragiles.

Parmi les défis et obstacles de ce secteur, notons le fait que la réglementation et les normes ne sont pas uniformes. Le Canada s'est donné des normes réglementaires de niveau mondial dans les domaines de la santé et de la salubrité des aliments et à l'égard de la main-d'œuvre et de l'environnement. Le Canada se plie à ces normes réglementaires et absorbe les coûts et autres conséquences qui en découlent. Toutefois, bien d'autres pays n'ont pas d'obligations semblables. Au moment où nous envisageons de négocier des accords commerciaux internationaux, il est peut-être temps d'y ajouter des dispositions qui nous aideront à obtenir des conditions davantage comparables à celles de nos concurrents.

Il existe beaucoup de barrières commerciales non tarifaires, dont des exigences réglementaires phytosanitaires, le coût élevé des inspecteurs étrangers qu'il faut faire venir au Canada lorsqu'il ouvre de nouveaux marchés et l'absence d'accord de libre-échange avec certains marchés cibles. Il y a une chose qu'il ne faut pas perdre de vue, à propos des marchés cibles : il n'y a peut-être pas de solution qui convienne à tous, car il y a beaucoup de secteurs qui peuvent livrer concurrence, mais de taille variable et à des stades de maturité différents.

Comment relever certains de ces défis? Mon collègue a parlé de nos lacunes en matière de renseignement stratégique sur le marché. Je ne saurais trop insister sur ce point. C'est tellement évident dans bien des choses que nous faisons. Et la chose la moins importante n'est pas le fait que, au fil du temps, nous avons utilisé de l'information produite aux États-Unis sur les importations pour nous défendre contre les mesures commerciales américaines. C'est inadmissible.

La formation à l'intention des exportateurs sur les exigences de la réglementation et le partage d'adaptation et développement du matériel de la campagne Image de marque Canada commencent à donner des résultats. Nous pouvons maintenant utiliser cela sur le marché canadien. Il a été excellent que nous puissions le faire.

Quant à une conception d'ensemble, cela suppose l'obtention de renseignement sur le marché; l'examen de l'état de préparation sur les plans sanitaires et phytosanitaires, y compris la prévention et l'intervention; l'existence d'un mécanisme acceptable de règlement des différends; le fait de connaître le seuil à partir duquel des indemnités sont accordées.

Enfin, il y a l'avantage sur le plan de la santé, sur lequel mon collègue a conclu. Nous voyons là une occasion extraordinaire pour notre secteur. Si les Canadiens sont en meilleure santé, la demande faite aux services de santé financés par l'État sera moindre. Nous avons une occasion unique d'apporter une contribution à cet égard.

Nous travaillons en production alimentaire, mais nous estimons également être présents dans le domaine de la santé. Nous sommes le seul groupe qui peut vraiment dire : « Mangez davantage. » Et il y a bien des données pour le confirmer. Hippocrate a toujours eu raison de dire : « Que l'aliment soit ton remède et ton remède ton aliment. » Il y a si longtemps, et il n'avait pas tellement tort.

Comme mon collègue l'a dit, nous avons une manifestation qui aura lieu dans quelques semaines. Nous en avons eu une autre il y a près d'un an. Le Dr Colin Carrie, de Santé Canada, a alors eu une réflexion encourageante pour tous ceux qui étaient présents, car il a dit que l'horticulture tenait une occasion sans précédent d'avoir un effet sur la vie des Canadiens. Voilà qui reflète tout à fait l'impression qui a cours dans notre secteur.

Là-dessus, j'ai hâte d'entendre vos questions et de participer à des échanges.

Le président : Merci beaucoup, madame Fowlie. Avant de passer aux questions, je voudrais vous raconter, à propos de commercialisation, que, la semaine dernière, j'ai vu dans un entrepôt du Nouveau-Brunswick des pommes de terre à chair blanche, à chair rouge et à chair bleue. Les exploitants s'intéressent aussi à l'élément santé de l'alimentation au Canada.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Merci pour votre présentation. Le sénateur Mockler a oublié de mentionner qu'il y avait aussi des patates rouges. Chez nous, où j'ai grandi, on avait besoin de patates rouges avec le poisson. Ça se prenait très bien!

Vous parlez de « market intelligence »; vous y avez tous les deux fait allusion. Comment suggérez-vous que ce soit fait? D'un côté, les producteurs et vos associations ont certainement un rôle à jouer, mais de l'autre côté, comment les agences du gouvernement pourraient-elles vous aider?

[Traduction]

M. Lemaire : Le problème que nous éprouvons en ce moment, c'est le changement dans les ressources et dans la structure et la collecte des données. Par le passé, il y a 20 ou 25 ans, nous avions des fonctionnaires à Agriculture Canada ou à l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui étaient présents sur les marchés pour recueillir les données. La collecte des données exige beaucoup de ressources. Aux États-Unis, on peut observer certaines des meilleures pratiques qui soient en matière de collecte de renseignements sur le marché. On y affecte des ressources assez intensives sur le terrain, sur les marchés de gros et au niveau de l'exploitation agricole, ce qui permet de comprendre les données sur l'entreposage et la production ainsi que les prix qui ont cours sur le marché.

Avec le temps, ces ressources ont été réaffectées à d'autres domaines prioritaires. Nous sommes passés à un système d'information à participation volontaire. Le système Infohort, actuellement exploité à Agriculture et Agroalimentaire Canada, est un système à participation volontaire de collecte de données. Ses résultats n'ont aucune exactitude.

Nous avons travaillé avec Agriculture Canada, le Conseil canadien de l'horticulture et l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, l'ACDFL, à la recherche de solutions. L'une des difficultés réside dans l'information qui est fournie. Par exemple, les prix de gros sont indiqués d'après le feuillet de vente. Il ne s'agit pas du vrai prix sur le marché. La différence peut être de 20 $ la caisse. Ce qui se passe, c'est que l'information sur le marché indique le prix de gros, mais il y a ensuite des négociations sur le prix réel de vente. Le prix réel n'est pas retenu. Lorsque nous discutons des prix réels — la valeur à laquelle le produit se vend sur le marché —, nous ne pouvons pas recueillir cette donnée. Nous ne pouvons pas non plus recueillir les données sur le prix réel du marché aux niveaux de l'exploitation, du commerce de gros et du commerce de détail.

Tous ces renseignements aident les producteurs primaires à comprendre l'activité sur le marché, à voir comment obtenir le meilleur prix pour leurs produits sur le marché et, lorsqu'ils considèrent d'autres facteurs économiques, s'ils cultivent et fournissent le bon produit pour les Canadiens. Il faut avoir une longueur d'avance sur l'évolution de cet ensemble complexe d'éléments. En ce moment, nous observons un profond changement dans les habitudes alimentaires à cause de l'évolution du contexte canadien. Les consommateurs se découvrent un nouvel appétit pour des aliments différents. Le producteur canadien doit se positionner pour s'adapter à ces nouvelles préférences et présenter ses produits en fonction de la dynamique en évolution sur le marché canadien. Si on ne possède pas la bonne information sur le marché pour comprendre ce qui se vend ou se consomme et comment le prix des produits s'établit, il est difficile d'élaborer une stratégie d'entreprise pour la production et la chaîne d'approvisionnement d'un produit afin de commercialiser ce produit comme entité.

Le sénateur Robichaud : C'est la poule ou l'œuf qui vient en premier? Par où faut-il commencer?

M. Lemaire : Je suis tout à fait d'accord. Vous faites valoir un très bon point. La clé du problème, c'est la structure. Actuellement, nous n'avons pas la structure voulue pour recueillir les données. C'est le point de départ. La structure ne fonctionne plus de façon à répondre aux besoins du gouvernement et de l'industrie.

Il se fait un certain travail grâce à la Table ronde sur la chaîne de valeur du secteur horticole : elle vise à déterminer de quoi l'industrie a besoin et quelle information pourrait être recueillie. Le Conseil d'horticulture du Québec est à l'avant- plan pour une partie de cette collecte des données sur le marché. Il dirige un projet pilote. Il faut beaucoup de main- d'œuvre. Nous constatons que c'est une question d'investissement. Qu'investissons-nous dans la collecte des données pour améliorer nos entreprises et nos pratiques commerciales de façon à être plus productifs au plan économique.

[Français]

Mme Fowlie : Vous avez bien raison. Cela débute avec les producteurs, mais il faut qu'on leur fasse confiance et que les informations soient bien utilisées. Comme mon collègue l'a dit, la structure n'est pas là pour bien servir. Il y a plusieurs années, l'Agence canadienne d'inspection des aliments était impliquée dans la collecte d'information. Elle ne l'est plus. Statistique Canada non plus. C'est très important pour gérer les risques parce que si les producteurs ne sont pas au courant du vrai prix sur le marché, ils vendent moins cher. Cela a un effet sur tout le marché, non seulement chez eux, que ce soit à Grand-Sault ou à Charlottetown, mais également à Toronto et à Montréal. Cela nécessite une structure et une coordination. Il faut vraiment regarder les structures qui fonctionnent bien ailleurs.

Le sénateur Robichaud : Vous auriez besoin d'une gestion de l'offre, d'une sorte de structure de cette nature, n'est-ce pas? C'est bien, merci.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Madame Fowlie — et je voudrais que vous et M. Lemaire répondiez à ma question — vous avez parlé dans votre exposé d'acheter des produits canadiens pour les Canadiens. Nous sommes contrariés lorsque le président Obama réclame que les Américains achètent des produits de chez eux. Nous sommes très dépendants de nos exportations. Je voudrais que vous donniez davantage de précisions sur la destination et le volume de nos exportations. Si nous faisons la promotion des achats chez nous, n'y a-t-il pas un peu d'hypocrisie à vouloir exporter nos produits?

Mme Fowlie : N'est-ce pas toujours l'enjeu, lorsque nous négocions des accords commerciaux? Nous voulons obtenir un accès au marché de l'autre partie, mais nous devons également accorder l'accès à notre marché.

Dans le document qui vous a été remis, j'ai inséré des graphiques qui illustrent les 10 premiers marchés d'exportation pour les produits à base de fruits et de légumes du Canada, ainsi que pour la pomme de terre et les produits de la pomme de terre. Ce sont des catégories distinctes. Il est certain, et cela n'a rien d'étonnant, que les États-Unis sont notre principal partenaire commercial.

Il n'est pas étonnant que les Canadiens soient un peu timides ou pas aussi enthousiastes qu'ils pourraient l'être à l'égard de nos produits et de l'achat de nos produits. Une partie de l'effort peut commencer chez nous. Nous avons peut-être quelques petites choses à apprendre de nos collègues du sud de la frontière. Je ne souhaite pas provoquer des perturbations commerciales ni rien de la sorte, mais il y a des choses que nous pouvons faire chez nous, peut-être grâce à des institutions du domaine de l'alimentation et aux fournisseurs de services de restauration. L'offre de produits canadiens n'est peut-être pas toujours ce qu'elle devrait être ou pourrait être.

Si je m'éloigne légèrement du sujet en parlant de la santé et de ce qui se passe aux États-Unis, c'est parce qu'il y est arrivé quelque chose de phénoménal. En janvier, les Américains ont publié leur nouveau guide alimentaire. Tous les messages et les éléments visuels suggèrent que les fruits et légumes doivent occuper la moitié de l'assiette. Cela cadre bien avec ce que nous attendons des acheteurs dans notre secteur pour contribuer à la cause de la santé au Canada. Le problème tient en partie à ce que ce n'est pas du court terme; ce n'est pas un fruit qui soit à portée de la main, si vous permettez la comparaison. Il s'agit d'un investissement à long terme et d'une nouvelle attitude à adopter. Aux États- Unis, les coûts des soins de santé représentent 18 p. 100 du PIB 18. Cela ne peut pas continuer. Au Canada, le pourcentage n'est pas encore aussi élevé, mais c'est la tendance et c'est vers la même situation que nous évoluons.

La solution réside dans une nouvelle conception des choses, et il s'agit d'un enjeu multidisciplinaire et multiministériel, car un certain nombre de ministères et de ministres doivent se faire les champions de cette cause et collaborer.

M. Lemaire : À propos de la demande de programmes d'approvisionnement à proximité, nous observons à l'échelle de la planète une demande accrue, à l'intérieur des diverses régions géographiques, pour la production locale, ce qui est constructif. Nous devons nous greffer à ce mouvement et l'utiliser. Par ailleurs, il nous faut reconnaître que, compte tenu du climat du Canada, nous ne produisons pas forcément toute la gamme des produits que la population changeante du Canada exige. Par exemple, nous ne pouvons produire ni agrumes, ni des bananes. Il y a un certain équilibre entre ce que nous importons et ce que nous vendons au Canada. L'industrie a commencé à s'adapter et à travailler de concert.

Les détaillants canadiens veulent vendre des produits locaux. Cela fait partie de leur conception et de leur vision : la meilleure qualité et le plus grand volume de produits sur le marché. Une partie du processus consiste à comprendre quand la production est disponible au début de la saison et avec quelle facilité les producteurs peuvent fournir des approvisionnements tout au long de la saison tout en s'assurant que, comme Mme Fowlie y a fait allusion, le produit fourni a une excellente valeur, ce qui nous ramène à la question de l'innovation et du niveau de production.

L'industrie s'associe à des industries connexes dans le monde entier. Par exemple, une industrie des fruits de verger au Canada reconnaît que, même si elle a une certaine production qu'elle souhaite écouler sur le marché intérieur, elle exporte également. Le travail avec l'industrie américaine correspondante est placé sous le signe de la coopération, pour les pêches, par exemple. Lorsque notre saison débute, à telle époque de l'année, on s'assure que la période qui suit et celle qui précède sont couvertes au moyen de produits importés et que les produits locaux répondent à la demande pendant la saison. C'est un marché sain du point de vue de la relation entre les producteurs et de la base de production. Pour nous assurer de répondre aux besoins du consommateur, nous créons un marché intérieur et un marché d'exportation pour ménager un équilibre entre les ventes locales et les ventes à l'étranger

[Français]

Mme Fowlie : Il est certain qu'au Canada, on ne produit pas d'oranges ou d'autres fruits, comme M. Lemaire l'a dit.

[Traduction]

Imaginez un bar à salades et un four à pommes de terre dans chaque école au Canada. Les enfants adorent ça. Imaginez le volume supplémentaire de produits cultivés au Canada qui pourrait être consommé de cette manière pendant l'année scolaire. C'est une très grande tendance au sud de notre frontière. On cherche absolument à avoir des bars à salades dans toutes les écoles, en partie parce qu'on a l'impression que les écoles du noyau central des villes sont des déserts sur le plan de l'alimentation. Souvent, on n'y a pas accès à des marchés et à des transports qui permettent de se procurer des fruits et légumes comme ceux qu'on peut trouver dans un marché du centre-ville. Installer un bar à salade dans une école n'exige pas la même infrastructure qu'une grande cuisine. Lorsqu'on construit de nouvelles écoles, on peut facilement y prévoir un bar à salade sans une lourde infrastructure. Dans les écoles remises en état, on retire les vieilles cuisines. Le bar à salade est mobile, facile, amusant et sain.

Le sénateur Plett : Nous fermons les cafétérias scolaires parce que les enfants ne veulent pas y manger.

Mme Fowlie : Nous devons faire en sorte qu'ils aient envie d'y manger. C'est ce qui est en train de se passer.

M. Lemaire : Si je peux me permettre, je vais répondre à la question sur la consommation. Il y a un problème qui concerne l'infrastructure dans les cafétérias des écoles. Le modèle américain de service de restauration dans les écoles est différent en ce sens qu'il y est possible de fournir des aliments de façon efficace dans les écoles élémentaires et secondaires, mais cela ne devrait pas empêcher les Canadiens de trouver une solution. Il faut prendre une mesure avant l'étape de la distribution d'aliments à l'école. C'est ce qu'on a fait pour le recyclage.

Par exemple, j'ai trois jeunes enfants qui n'apportent pas de contenants de boisson jetables à l'école. Ils versent leur jus ou leur lait dans un contenant réutilisable. Cela fait désormais partie de leur mode de vie. Ils sont conscients de leur impact sur l'environnement. Nous n'avons pas été aussi efficaces que pouvions l'être dans nos efforts visant à faire augmenter la consommation de fruits et de légumes. Nous devons faire comprendre aux jeunes Canadiens, les consommateurs de demain, que les fruits et légumes devraient constituer une partie très importante de leur alimentation. Les aliments peu nutritifs auxquels ils ont facilement accès devraient être secondaires.

Le sénateur Plett : Je suis sceptique. Nous devons fermer les portes des écoles à clé et obliger les enfants à manger à l'école, si c'est ce que nous voulons qu'ils fassent. S'il y a un McDonald à côté de l'école, les enfants voudront y manger.

Je rentre de Chine, où nous avons visité une école de 1 200 élèves avec un groupe d'élèves, un directeur et de nombreux enseignants du Nouveau-Brunswick; chose certaine, tous les enseignants étaient originaires du Canada.

Tous les élèves, depuis la maternelle jusqu'à la 12e année, sont tenus de manger à la cafétéria de l'école. Ils ont une carte sur laquelle les parents versent de l'argent. Il suffit aux élèves de passer leur carte pour pouvoir manger à la cafétéria de l'école. J'ai posé des questions sur les jeunes de la 11e et de la 12e année, et on m'a répondu que, puisqu'il n'y avait aucune autre solution commode, la plupart de ces élèves mangeaient également à l'école. Simple observation. Avant de vous laisser répondre, je signale que la Chine figure dans votre graphique.

Pendant notre séjour en Chine, nous avons eu droit à un exposé de nos bons amis de chez McCain, qui produit beaucoup de frites là-bas. La majeure partie des pommes de terre proviennent de la Mongolie. Quel est le volume de nos exportations alimentaires en Chine, où 1,35 milliard de personnes mangent beaucoup de légumes et de frites? Faisons-nous le nécessaire pour exploiter ce marché?

M. Lemaire : Le marché chinois est une priorité pour beaucoup de producteurs et d'exportateurs canadiens, comme il l'est pour bien d'autres dans le monde entier. C'est un marché où la concurrence est très vive. En dehors des simples exportations, certains producteurs-expéditeurs et producteurs primaires établissent des relations avec des entreprises chinoises pour exploiter des entreprises secondaires là-bas, de façon à contourner certains problèmes d'expédition. Cette démarche en est à ses débuts. De ce côté, il faut davantage d'investissement et de travail de la part du gouvernement et de l'industrie afin de nouer des relations. Le marché chinois est vraiment fondé sur les relations à établir lorsqu'on veut faire du commerce.

Pour en revenir à votre dernière observation sur les programmes alimentaires à l'école, je dirai que j'ai fait partie d'un sous-comité de la Table ronde sur la chaîne de valeur du secteur horticole chargé de la commercialisation, à Agriculture Canada. Nous avons examiné la possibilité d'élaborer un concept ou des programmes semblables. Le financement est toujours un problème. J'appuie sans réserve l'idée d'un bar à salades ou d'un genre quelconque de programme pour favoriser la consommation de fruits ou de légumes dans les écoles élémentaires et secondaires, mais il faut en revenir à ce que je disais tout à l'heure : il n'y a pas de solution magique, pas de solution unique pour régler tous nos problèmes. Pour aborder les modes de consommation alimentaire des jeunes, il faut une approche intégrée qui ne tient pas compte uniquement de ce qu'ils mangent à l'école. Il serait difficile, mais très intéressant, de verrouiller les portes et de les garder à l'école pour le repas de midi. Je crois qu'il y a possibilité d'agir sur le contenu de la restauration rapide. Nous commençons à voir une transition chez certains de nos partenaires de la restauration rapide, qui ajoutent davantage de pommes tranchées, plus de salades et d'autres mets, en plus de leur menu classique. C'est une tendance que nous avons commencé à implanter, une évolution, pour amener le jeune consommateur, lorsqu'il a une occasion d'acheter, à choisir des fruits et légumes frais. Il faut de la sensibilisation.

Il faut adopter une approche double. D'abord, il faut donner accès aux aliments et les présenter pour que les jeunes y goûtent et comprennent ce qu'ils mangent et pour qu'ils soient mis en contact avec les produits grâce à un programme scolaire, qu'il s'agisse d'un bar à salade ou d'un type quelconque de programme de repas légers. Deuxièmement, il faut s'occuper de ce qu'ils ont à manger à l'extérieur, dans leur famille et dans la restauration rapide, pour essayer d'avoir une action concertée. Il faut que tous les éléments soient liés entre eux.

Le sénateur Plett : Je crois que le Québec a essayé d'interdire la poutine dans les arénas où on pratique le hockey, n'est-ce pas? J'ignore ce qu'il a réussi à faire.

Le sénateur Mercer : Je me souviens de l'agitation dans la rue au sujet de l'interdiction de la poutine. Je suis sûr qu'il a dû y avoir de l'agitation.

Merci de votre présence. Nous vous en savons gré. Monsieur Lemaire, dans votre exposé, vous avez dit qu'environ 67 p. 100 des fruits et légumes frais du Canada vont aux États-Unis. Nous profitons des avantages et de la sécurité du PACA lorsque nous faisons du commerce aux États-Unis sans qu'il y ait au Canada un mécanisme réciproque d'atténuation des risques. Vous avez dit que l'industrie américaine risquait d'exercer des pressions sur le gouvernement américain pour qu'il retire au Canada le traitement préférentiel dont il jouit aux termes du PACA, par exemple.

C'est la première fois que j'entends parler d'une menace qui pèserait sur les fruits et légumes du Canada. Je siège au comité depuis huit ans. Je connais très bien les problèmes du bœuf, occasionnés par la crise de l'ESB et d'autres difficultés. Existe-t-il une vraie menace? Est-ce que les gens en discutent? Y a-t-il des gens qui se regroupent aux États- Unis comme on l'a vu dans l'offensive contre le bois d'œuvre? Nous avons fini par leur céder de l'argent, de sorte qu'ils en auront davantage pour contester de nouveau nos exportations à l'avenir. La menace est-elle réelle ou bien est-ce une chose qui, selon vous, risque d'arriver?

M. Lemaire : Je peux répondre, après quoi j'inviterai Mme Fowlie à aborder également la question. De nos deux organisations, c'est le Conseil canadien de l'horticulture qui s'est chargé d'attirer l'attention sur ce problème au nom des producteurs primaires et des agriculteurs canadiens, qui sont dans la ligne de tir.

Pour répondre rapidement à votre question, je dirai qu'oui, c'est une grave préoccupation. Comme je l'ai dit, c'est un problème depuis les années 1980. Dans les années 2000, nous avons pu dissiper les inquiétudes pour ce qui est de l'impact financier direct. Les Américains qui expédient des produits au Canada, et qui sont aussi touchés par les problèmes de non-paiement, de lenteur des paiements ou d'insolvabilité sont prêts à réclamer une intervention, irrités qu'ils sont parce que le système canadien laisse traîner le problème depuis si longtemps.

J'ai parlé du rapport Hedley, qui a été remis en 2005 à Agriculture Canada, et que je peux mettre à la disposition du comité. Il traitait du problème. Le gouvernement du Canada, par l'entremise d'Agriculture Canada, a commandé un nouvel examen. Le titre de ce rapport m'échappe. Les deux rapports se contredisaient, si bien que nous nous retrouvons dans une situation où rien ne se fait, vraiment.

La seule chose qui se fasse en ce moment, et c'est un projet d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, est une analyse du problème que causent actuellement les faillites, l'insolvabilité et le non-paiement, ainsi que des solutions possibles. Ce problème a été soumis au comité de coopération en matière de réglementation, par l'entremise du Trésor. Il s'agit de voir comment nous pouvons nous attaquer au problème au moyen de la réglementation en place, mais le rapport Hedley a dit que ce n'était peut-être pas une solution possible, compte tenu de la structure actuelle du cadre réglementaire.

En fin de compte, étant donné nos produits exportés aux États-Unis et les produits importés au Canada et comme les entreprises américaines ne se font pas payer ou se font payer lentement, le niveau d'exaspération est élevé. Le problème a été soulevé à toutes les réunions du comité du commerce nord-américain que nous tenons dans notre organisation.

Mme Fowlie : Merci de cette question. Il s'agit d'un authentique problème.

[Français]

Comme je vous l'ai mentionné, j'ai travaillé dans l'industrie des pommes de terre pendant plusieurs années. Donc, de 1978 à 1986 j'étais impliquée dans la commercialisation des pommes de terre et je peux bien vous dire que ma préférence était de vendre à Boston ou New York, pas à Montréal ni à Toronto, parce que s'il y avait des problèmes, j'étais assurée d'être payée à cause de la PACA qui était en place aux États-Unis.

[Traduction]

C'est un vrai problème. Il y a plusieurs grands groupes aux États-Unis, de grandes associations de producteurs et des entreprises isolées qui commercialisent des produits au Canada qui en ont vraiment assez de ces problèmes de lenteur des paiements, de non-paiement ou de faillites frauduleuses ou non dans lesquelles ils ne sont pas payés. Ils se disent prêts à recourir au représentant américain au commerce. Cela s'est dit aux réunions dont M. Lemaire a parlé. Et nous avons vu la même chose dans des publications commerciales. Chose certaine, les gens de l'ambassade des États-Unis à Ottawa sont parfaitement au courant. Dans les annexes de la brochure qui vous a été remise, on trouve un document de deux pages sur l'atténuation des risques financiers dans le secteur des fruits et légumes. L'ambassadeur Doer s'est servi de ce document comme note d'information. Au Comité consultatif canado-américain sur l'agriculture, la question est à l'ordre du jour de toutes les réunions depuis 2005.

Le sénateur Mercer : Vous avez bien cerné le problème, et je comprends maintenant que c'est un vrai problème, mais je ne comprends pas comment on peut le résoudre. Ces choses-là arrivent. Il y a des cas d'insolvabilité et des faillites la plupart du temps honnêtes, mais parfois frauduleuses. Je soupçonne que cela continuera dans tous les secteurs. Quel rôle le gouvernement a-t-il à jouer pour régler le problème?

Mme Fowlie : Son rôle est de faciliter une solution proprement canadienne qui donnera des résultats analogues à ceux du Perishable Agricultural Commodities Act. À dire vrai, cela consiste notamment à conférer un statut de créancier privilégié à ceux qui vendent des fruits et légumes frais. Ce sont des produits très périssables. Ils ne portent pas de numéro de série. Si un problème surgit, il n'y a aucun recours pour récupérer son argent.

Honnêtement, la situation est un peu plus compliquée au Canada en raison de l'infrastructure fédérale-provinciale- territoriale et des compétences des divers ordres de gouvernement. Cela dit, ce n'est pas parce que c'est compliqué qu'il ne peut pas y avoir de solution. Il y a eu un certain nombre de rapports et d'avis juridiques assortis de recommandations sur les pouvoirs respectifs du gouvernement du Canada et des provinces en matière de droit contractuel. Je n'arrive jamais à me rappeler le deuxième élément. Il y en a deux. Chacun des ordres de gouvernement peut déléguer à l'autre ordre, fédéral ou provincial, certaines responsabilités ou ils peuvent tous deux déléguer leurs responsabilités respectives à un tiers. Il y a toujours des moyens d'y arriver.

Nous ne demandons pas de fonds pour cela au Conseil du Trésor. Il faut que ce soit une solution durable qui vienne des producteurs et soit maintenue par eux. C'est ce qui a été fait aux États-Unis. Si on considère l'historique de leur solution, on constate que la démarche a débuté il y a de longues années à cause du vol de bétail. On volait des bêtes, et les éleveurs ne se faisaient pas payer. Voilà la genèse de la solution américaine.

Le sénateur Mercer : C'est l'industrie qui va prendre l'affaire en charge, et non le gouvernement, n'est-ce pas?

Mme Fowlie : Le gouvernement a un rôle à jouer pour faciliter les choses.

Le sénateur Mercer : C'est un rôle bien plus simple. C'est un rôle que le gouvernement peut et doit jouer, à mon avis.

Le sénateur Robichaud : Question complémentaire. Comment les agriculteurs, les producteurs primaires, participeraient-ils? Est-ce que ce sont eux qui se trouveraient à fournir les fonds pour faire fonctionner le mécanisme?

Mme Fowlie : Nous pouvons vous fournir une information complémentaire pour que vous ayez plus de détails sur le fonctionnement du mécanisme. Plus particulièrement dans le secteur de la pomme de terre et dans le Canada atlantique, il y a eu beaucoup de pertes importantes à cause de ce genre de problème. Nous assurerons un suivi plus tard, car nous pourrions consacrer beaucoup de temps à cette question.

Le sénateur Mercer : Madame Fowlie, vous avez parlé un peu de prix, tout comme M. Lemaire, et dit que les producteurs ne savaient pas à quoi s'en tenir. Comme je suis un enfant de la ville, il y a ici beaucoup de nouveau pour moi. Le comité fait mon éducation. Toutefois, dans les exploitations que j'ai visitées, j'ai toujours été impressionné par le fait que tous les agriculteurs ont un ordinateur dans la cuisine ou au bureau, et l'une des choses qu'ils font, c'est surveiller les prix. Ils peuvent dire comment évolue à Chicago le prix du bœuf, du porc ou de quelque autre produit à tout moment de la journée, ainsi que le prix des aliments pour les animaux et tout le reste. Je suis étonné qu'ils ne sachent pas quels sont les prix un jour donné.

M. Lemaire : Vous abordez deux points importants, sénateur. D'abord, les producteurs obtiennent l'information sur les prix qui ont cours à Chicago parce que les États-Unis ont un programme complet de collecte des données sur le marché. Deuxièmement, les données sur les fruits et légumes frais ne sont pas recueillies. On les recueille sur le porc et d'autres produits.

Prenons le cas d'un producteur de pommes de terre ou de bleuets, mais ce pourrait être n'importe quel autre fruit ou légume frais. Ce producteur n'a pas accès à une information exacte sur le marché semblable à celle qui existe aux États- Unis. Cette information n'existe pas pour les marchés de Toronto, de Montréal ou de Vancouver ni pour d'autres marchés plus petits au Canada. Cela fait partie du problème de la distribution sur le marché au Canada.

Pour ce qui est des prix du marché au niveau international et plus précisément aux États-Unis, les producteurs peuvent avoir davantage de données exactes sur les prix qu'ils obtiendront de leurs acheteurs américains.

Le sénateur Eaton : Vos exposés m'ont beaucoup intéressée, car nous venons de consacrer une année à l'étude de l'industrie forestière. Ce que nous avons appris, c'est que certains secteurs de cette industrie sont pleins de débrouillardise. Grâce à FPInnovations, ils ont agi pour améliorer leur sort. Par contre d'autres secteurs sont venus nous dire que le gouvernement devrait faire ceci ou cela. Ce qui m'a sans doute frappée dans vos exposés, c'est que je n'aie rien entendu sur ce que vous tentiez de faire vous-mêmes.

Le sénateur en a touché un mot. Il y a des entreprises qui cessent leurs activités. Nous le savons tous. Pourquoi votre association n'aurait-elle pas une sorte d'assurance pour tous ses membres? Vous déplorez qu'on ne mange pas assez de légumes et de fruits. Or, à la différence du sénateur Plett, j'estime que tout commence à la maison. Que faites-vous? Pourquoi ne nous inondez-vous pas de documents de sensibilisation? Je suis sérieuse.

Je ne crois pas que ce soit le rôle du gouvernement d'apprendre aux consommateurs qu'ils doivent manger plus de fruits et légumes. C'est une bonne idée de donner des conseils sur l'alimentation, mais c'est à votre industrie d'agir. Il y a des acteurs riches dans cette industrie, comme les Loblaws et Sobeys, par exemple. Pourquoi ne vous aident-ils pas? Dites-moi : que faites-vous pour vos producteurs?

M. Lemaire : Prenons d'abord la question de la sensibilisation et de la commercialisation.

En 1994, l'ACDFL a créé, grâce à la Fondation fraîcheur égale saveur, un programme qui s'appelait « Allez-y ». Il s'agissait d'une coopération avec Santé Canada pour inciter les Canadiens à consommer de cinq à dix portions de fruits et de légumes chaque jour. Avant ce programme, il y a eu des activités mensuelles de promotion grâce à l'ACDFL, les activités de célébration de la récolte à l'automne, des efforts de sensibilisation du consommateur en ce qui concerne la préparation, l'entreposage et la mise en conserve des fruits et légumes frais, dans le cadre du programme Allez-y.

Depuis les programmes énergiques de 1994 qui s'adressaient directement au consommateur et auxquels l'ACDFL a participé, nous avons évolué dans nos programmes, passant de « Allez-y » à « cinq à 10 par jour pour votre santé ». C'est une nouvelle version du programme, qui est offert avec la coopération de la Fondation des maladies du cœur du Canada et de la Société canadienne du cancer.

Le sénateur Eaton : Où les Canadiens comme moi trouvent-ils cette information?

M. Lemaire : À ce propos, nous exploitons la possibilité d'utiliser les messages d'intérêt public. Pour offrir une campagne menée directement auprès des consommateurs, si on veut être vraiment efficace et faire évoluer les mentalités, il faut dépenser entre 8 et 12 millions de dollars par année. Le secteur des fruits et légumes fonctionne à la marge et non au volume. Elle n'a pas ce genre de fonds. Nous n'avons pas de régime de gestion de l'offre ni de programme de prélèvements pour recueillir des fonds. La diversité caractérise les groupes de denrées au Canada.

Le sénateur Eaton : Pourquoi n'auriez-vous pas un fonds constitué grâce à des prélèvements? Pourquoi vos membres associés ne paieraient-ils pas une cotisation? Pourquoi ceux qui vous achètent des fruits et légumes ne vous rendraient- ils pas de l'argent pour vous aider à vendre davantage? C'est avantageux pour tout le monde, si vous vendez davantage.

Mme Fowlie : Une partie du problème tient à l'infrastructure. Les campagnes du lait et des produits laitiers sont bonnes. Elles sont fantastiques. Nous voudrions bien faire la même chose, mais nous n'avons aucun mécanisme en place, dans un cadre de gestion de l'offre, pour que ces prélèvements soient possibles.

J'ai dit dans mon exposé qu'une même solution ne convient pas forcément à tous, et cela vaut pour bien des choses. Quand je considère les mécanismes en place pour les produits en régime de gestion de l'offre, je me dis que ces secteurs étaient à un stade de maturité bien différent, il y a un certain nombre d'années, lorsque ces mécanismes ont été mis en place. L'industrie des fruits et légumes n'était pas là, alors. C'est un élément d'explication.

Nous envisageons la possibilité de prélèvements pour financer la recherche et la promotion, mais il faudra probablement cinq ans pour mettre cela en place.

Le sénateur Eaton : Vous dites que votre association est encore très jeune, n'est-ce pas?

Mme Fowlie : Les associations ont un certain âge, mais ce sont les marges bénéficiaires qui font problème. Comme mon collègue l'a dit, du côté du producteur, dans le secteur des fruits et légumes, nous n'avons pas les marges bénéficiaires qui permettraient de financer des programmes comme ceux-là.

M. Lemaire : Par rapport à ce que nous avons pu réaliser — et le chiffre a varié —, l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, avec les partenariats de l'industrie et de l'association apparentée, a investi seulement 150 000 $ par année dans notre programme de communication directe auprès du consommateur. Nous avons fait preuve de beaucoup de créativité : médias sociaux, messages d'intérêt public, collaboration avec la Fondation des maladies cardiaques et la Société canadienne du cancer et d'autres partenaires de l'industrie pour diffuser le message de la campagne « Mélangez-les! » portant sur les fruits et légumes. Avant cela, il y a eu la campagne « cinq à 10 par jour pour votre santé » et le programme « Allez-y ». Ces programmes ont été efficaces. Des services sanitaires de tout le Canada se servent de nos affiches et de notre information.

Toutefois, il faut en revenir à l'argent investi dans le programme par rapport aux fonds actuellement à la disposition des producteurs primaires à partir non seulement de marges bénéficiaires minimes, mais aussi de toute la chaîne d'approvisionnement. S'il est vrai que Loblaws, Métro et tous les grands détaillants qui appartiennent à notre organisation sont des sociétés très importantes, ils fonctionnent quand même, en ce qui concerne les fruits et légumes, avec la même marge bénéficiaire étroite qui est aussi celle du producteur primaire et de toute la chaîne d'approvisionnement. Les montants s'ajoutent lentement dans la chaîne, mais les marges restent très serrées pour tous les chaînons.

Cherchons-nous une solution du côté de l'industrie? Bien sûr. L'industrie des fruits et légumes a prospéré, a grandi et s'est développée grâce à son mode de fonctionnement, mais nous fonctionnons ensemble dans une relation entre le public et le privé. Lorsque nous parlons de la nécessité de travailler avec le gouvernement, nous songeons à une recherche de solutions en collaboration. Chaque fois que nous proposons un programme ou soumettons un problème, par l'entremise de nos deux organisations, nous les accompagnons d'une approche fondée sur une solution. C'est indispensable si nous voulons réussir à trouver ce que le gouvernement et l'industrie peuvent faire pour parvenir à un terrain d'entente et à des solutions.

Vous demandez ce que nous avons fait. En ce qui concerne l'atténuation des risques, nous avons constaté que, jusqu'au début des années 2000, nous n'avions pas vraiment un bon programme de permis, ce qui est fondamental. Au Canada, il faut détenir un permis de l'ACIA pour vendre et commercialiser des fruits et légumes, mais il y a un problème du côté des permis. Nous avons travaillé avec Agriculture Canada, alors sous la direction du ministre Vanclief, afin de mettre en place la Corporation de règlement des différends, la CRD. À l'époque, le vice-président exécutif de l'ACDFL a quitté ses fonctions pour devenir le PDG de la CRD. Cette organisation, qui accorde aux entreprises les permis de vendre et de commercialiser des fruits et légumes au Canada et offre aussi des services de règlement des différends qui s'occupent de certains problèmes de paiement, a été une éclatante victoire pour l'industrie des fruits et légumes dans sa démarche en vue de régler les problèmes de non-paiement ou de lenteur des paiements. Une partie de ces résultats n'aurait pas pu être possible sans relations avec le gouvernement du Canada, sans son aide, et c'est pourquoi nous estimons que tous ont à gagner de relations entre les secteurs public et privé.

L'association veut examiner d'autres modèles possibles de ce côté-là. Quant à l'atténuation des risques, comme Mme Fowlie l'a fait remarquer, ce qui mobilise notre attention, c'est le moyen de trouver une solution ensemble. L'industrie américaine, tout en exprimant ses préoccupations, veut que les Canadiens trouvent une solution. C'est sa position actuelle : « Que devons-nous faire pour trouver cette solution? » On en est au point où une partie de l'industrie américaine est disposée à retenir les services de représentants de Harvard pour faire une analyse économique du Canada et trouver des pistes de solutions. L'ensemble de l'industrie travaille dans l'espoir d'obtenir des résultats, mais il faut agir ensemble, avec la collaboration du public et du privé.

Le sénateur Eaton : Merci.

Jane Proctor, vice-présidente, Gestion des politiques et des enjeux, Association canadienne de la distribution de fruits et légumes : Je voudrais revenir sur l'une des observations du sénateur Eaton. Je comprends assurément que nous, de l'industrie, avons un rôle à jouer au plan de la sensibilisation, pour aider les consommateurs et nous-mêmes à comprendre. Toutefois, j'espère que tous conviendront qu'il y a des possibilités de partenariat entre gouvernement et industrie en matière de sensibilisation. Nous sommes tous d'accord pour dire que le gouvernement a un rôle à jouer en ce qui concerne la santé des Canadiens. Étant donné que nos produits sont tellement bénéfiques pour leur santé, s'ils en consomment suffisamment, c'est ce que nous recherchons. Comment pouvons-nous collaborer avec le gouvernement, qui possède ces mandats, en santé par exemple? Comment pouvons-nous travailler ensemble comme industrie? Il ne fait aucun doute que l'industrie souhaite travailler avec le gouvernement à la moindre occasion. C'est ce que nous espérons faire. Nous sommes des associations sans but lucratif, bien que vous ayez raison de dire que nous comptons de très grandes sociétés parmi nos membres. Ce que nous essayons de faire, c'est de mobiliser ce que nous pouvons, comme organisations sans but lucratif qui, hélas, ont des fonds limités, c'est de travailler avec le gouvernement afin d'avoir un effet à long terme sur la santé des Canadiens. Nous savons ce que cela va donner à long terme pour les soins de santé.

Le sénateur Eaton : Lorsque vous vous adressez au gouvernement, est-ce que vous dites : « Voici ce que nous avons concocté; pourriez-vous assurer le financement? » Vous présentez-vous à lui après avoir travaillé ensemble et avoir bien réfléchi aux moyens précis à prendre?

Mme Proctor : Oui.

Le sénateur Eaton : Vous avez présenté des propositions pour la sensibilisation et d'autres pour l'atténuation des risques?

M. Lemaire : Lorsque nous abordons nos partenaires du secteur public, le gouvernement fédéral, par exemple, nous soumettons une approche fondée sur une solution. Nous définissons le problème et proposons une possibilité de solution. Si nous n'avons pas la solution, nous demandons à nos partenaires du gouvernement de constituer un groupe de travail avec notre participation pour trouver une solution, s'il est possible d'en trouver une.

Nous avons un comité du gouvernement et de la gestion des enjeux auquel participent l'ACIA, Agriculture Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada, Santé Canada et l'Agence de la santé publique du Canada. Nous avons mis sur pied ce groupe, qui se réunit deux fois l'an, parce que nous avons constaté que les différents ministères ne communiquaient pas entre eux au sujet des problèmes auxquels l'industrie doit s'attaquer. Nous avons réuni ces ministères avec l'industrie, le Conseil canadien de l'horticulture, l'ACDFL et la CRD pour cerner les préoccupations de l'industrie et des solutions possibles et trouver comment arriver à des solutions. Un bon exemple de problème a été celui que nous avons eu à la frontière, avec la façon dont se faisaient les inspections sur ce que nous appelons les « hot docks », les quais sans refroidissement. Il faut éviter la rupture de la chaîne du froid, au risque que les produits s'abîment, ce qui compliquerait encore les problèmes économiques de l'industrie.

En travaillant avec l'ASFC, nous avons pu offrir un programme de sensibilisation : nous nous sommes rendus dans un centre de distribution de Loblaws et nous avons expliqué au personnel ce que la chaîne du froid supposait. Puis, les représentants de notre industrie sont allés dans les installations frontalières, qu'on leur a fait visiter. À partir de là, nous avons conçu un énoncé de travail que l'agence peut utiliser à la frontière pour trouver les pratiques exemplaires et réduire le risque d'attente à la chaleur, de produits avariés ou de tout autre problème. Voilà un exemple parfait de situation où tout le monde sort gagnant grâce à la recherche d'une solution. Nous ne demandons pas d'argent. Il peut y avoir des besoins financiers parfois, mais, dans bien des cas, la solution émerge d'une meilleure compréhension de notre mode de fonctionnement et aussi de la nécessité d'une collaboration entre le gouvernement et l'industrie. Tout le monde y gagne.

Le sénateur Eaton : Merci.

Le sénateur Mahovlich : Je remercie les témoins, qui ont répondu à beaucoup de questions.

Vous avez dit que les exportations représentaient de 60 à 70 p. 100. Qu'en est-il de nos importations de légumes? Je ne veux pas parler des agrumes ni des bananes. Mais dans certains restaurants ici, on peut se faire servir des pommes de terre de l'Idaho. Le produit est encore populaire. Combien de légumes importons-nous?

M. Lemaire : Vous m'excuserez, mais je n'ai pas ces chiffres sur le bout des doigts. Je peux cependant les communiquer au comité. Ils sont disponibles à Statistique Canada.

De façon générale, au niveau du détail, 3 $ sur 4 $ qui sont dépensés en fruits et légumes frais vont à des produits importés.

Le sénateur Mahovlich : Trois dollars sur quatre?

M. Lemaire : On en revient à nos échanges de tout à l'heure sur les débouchés. Sur le marché intérieur canadien, il est possible d'inciter un plus grand nombre de Canadiens à acheter les produits canadiens et de collaborer avec les partenaires acheteurs pour élargir le marché, mais il faut apporter quelques éléments : le bon produit, la bonne qualité et le bon prix. Ce sont des éléments tout à fait fondamentaux. Pour en arriver là, il faut les éléments de compétitivité sur le marché dont Mme Fowlie a parlé à propos de l'innovation et de la technologie. Sur ce plan, certains secteurs de notre industrie ont toujours éprouvé des difficultés.

La mosaïque canadienne, que j'ai déjà évoquée, a une énorme influence. À Calgary, je suis allé dans un point de vente au détail. On y présentait des pitayas du Vietnam. J'ai été étonné. Pourquoi? Il y a une très importante communauté vietnamienne qui fait augmenter la demande de ce produit. Il nous faut une bonne information démographique, une bonne information sur le marché au Canada pour pouvoir comprendre ce qu'il nous faut produire, savoir si nous répondons aux besoins des Canadiens et, sinon, ce que nous devons faire pour les amener à essayer les produits que nous cultivons et bâtir le marché pour les producteurs canadiens. J'espère avoir répondu à votre question.

Le sénateur Mahovlich : Oui, vous avez répondu en partie. On peut aller dans le quartier chinois de Toronto et trouver constamment des légumes provenant de Chine.

Je voudrais passer à la salubrité alimentaire. Dès que je commence à préparer une salade, je dois laver toute la laitue. Il faut tout laver. Ma femme insiste tout le temps. Est-ce nécessaire?

M. Lemaire : Au niveau du consommateur, il est important de savoir comment utiliser les aliments. L'ACDFL fait partie du Partenariat canadien pour la salubrité des aliments. Ce groupe représente non seulement les producteurs de fruits et légumes frais, mais aussi toute l'industrie de l'alimentation, y compris les producteurs de bœuf, d'œufs et de volaille. Le Partenariat souligne l'importance d'un mot d'ordre : « Lavez, cuisez, nettoyez », car une manipulation sans danger par le consommateur est extrêmement importante et s'intègre à la chaîne de la salubrité des aliments. Les Canadiens doivent le reconnaître. Les producteurs primaires et les intervenants de la chaîne d'approvisionnement respectent les règles exemplaires et ont des programmes clairement identifiés de salubrité alimentaire, de sorte que les Canadiens puissent consommer des aliments sans danger et nutritifs.

Nous percevons un risque de manquement à la salubrité lorsqu'un consommateur prend un produit sur les tablettes, le rapporte chez lui, ouvre un sac de salade et commence à la couper sur une planche qui vient de servir à découper du poulet. Le Partenariat, qui est une autre entité sans but lucratif financée par nos organisations, c'est-à-dire l'ACDFL et d'autres organisations, renseigne les consommateurs sur la façon de manipuler les produits dans le respect de la salubrité. Oui, il faut manipuler le produit comme il convient pour en assurer la salubrité.

Le sénateur Mahovlich : Je suis originaire du Nord de l'Ontario et j'ai été nourri de bleuets. On me demande souvent : Pourquoi avez-vous aussi bonne mine? Ça doit être à cause des bleuets. Je constate qu'il se fait des recherches sur les bleuets et que les résultats seront publiés en novembre. Voulez-vous me dire que je vais pouvoir acheter des bleuets sauvages au milieu de l'hiver?

Le sénateur Plett : Vous aurez encore meilleure mine.

M. Lemaire : Actuellement, si on veut parler des niveaux et des techniques de production, vous remarquerez que vous pouvez acheter des fraises canadiennes plus tard dans la saison. Tous se rappellent que, dans leur enfance, il fallait manger les fraises dès qu'elles arrivaient à la maison. Leur durée de conservation était très courte. Les producteurs canadiens ont adopté de nouvelles variétés qui permettent d'allonger la saison pour répondre aux besoins du marché intérieur et des marchés d'exportation.

Il se fait des études sur les bleuets ainsi que sur toute une gamme d'autres produits, de façon à en arriver à ce que les Canadiens puissent manger des bleuets l'hiver. Si les recherches portent sur les bleuets, il y a toujours des possibilités. Dans l'ensemble, il y a de nouvelles variétés de bleuets qui ont une durée de conservation plus longue.

Mme Fowlie : Vous ne trouverez peut-être pas de bleuets sauvages en hiver, mais vous en trouverez certainement des congelés.

L'invasion de nouvelles variétés et techniques de culture est phénoménale. Il se cultive de nombreuses variétés de fraises d'automne au Canada, ce qui n'existait pas il y a quelques années. Au Canada, la saison des fraises peut se prolonger presque jusqu'au début d'octobre. Les recherches sur les bleuets qui ont été signalées sont très intéressantes. Le Collège d'agriculture de la Nouvelle-Écosse a travaillé avec des fabricants de caméras et des fabricants de tracteurs.

[Français]

Sénateur Robichaud, je pense que les travaux se font chez vous aussi.

[Traduction]

Les yeux électroniques et les appareils parcourent le champ à bord d'un tracteur et peuvent distinguer entre le plant de bleuet et une mauvaise herbe pour appliquer le produit de protection des cultures seulement là où on en a besoin. C'est vraiment ingénieux. Nous voudrions bien revenir vous montrer une vidéo à ce sujet et vous communiquer des résultats des recherches. Il se fait des choses intéressantes et innovatrices.

Le sénateur Mahovlich : Merci.

[Français]

Le sénateur Rivard : Merci, monsieur le président, j'avais beaucoup de questions et j'étais intrigué par le rapport Hedley de 2005 sur le Programme de protection financière, mais je pense que vous avez répondu largement à cela. La seule question que je me pose encore sur le rapport Hedley, est-ce que le Programme de protection financière, s'il existait, est-ce que ce serait seulement pour les ventes que vous faites à l'étranger, aux États-Unis ou en Chine ou ailleurs, ou si vous voulez également que cela s'étende sur le marché domestique?

Mme Fowlie : On pense que ce sera disponible sur les ventes au Canada et aux États-Unis. C'est pour être comparable avec l'outil disponible aux États-Unis. Ce n'est pas dire que cela ne pourrait pas s'appliquer à des ventes ailleurs, mais pour le moment, c'est vraiment pour s'occuper de ce qui se passe entre le Canada et les États-Unis et le manque d'outils au Canada.

Le sénateur Rivard : Je comprends que votre industrie est dans une situation précaire, les marges de profit ne sont pas élevés, mais je me demande l'impact que cela pourrait avoir dans la population pour les autres secteurs si le gouvernement joue ce rôle de garantir vos créances.

Mme Fowlie : Ce n'est pas le gouvernement qui garantirait les créances.

Le sénateur Rivard : Ce serait votre association.

Mme Fowlie : C'est exact, le gouvernement ne sera pas impliqué, sauf pour nous aider à « stick handle » entre les juridictions du gouvernement fédéral et les provinces. On peut bien vous envoyer d'autres informations qui pourraient expliquer plus en détails comment cela se passe aux États-Unis. Le gouvernement n'est pas impliqué, c'est vraiment géré par l'industrie, il a seulement assisté pour établir le « back-up ».

Le sénateur Rivard : J'aimerais que vous déposiez cela. On sait qu'au Québec, les producteurs laitiers ne font pas partie d'associations canadiennes, c'est l'UPA. Est-ce que pour le domaine de l'horticulture et des fruits et légumes, le Québec fait partie de l'Association canadienne pour les fruits et légumes?

Mme Fowlie : Oui, pour le Conseil canadien de l'horticulture. Le Conseil québécois de l'horticulture est membre. D'autres associations québécoises sont membres du CCH, les pommes de terre, les fraises, les framboises, les pommes, plusieurs sont membres du CCH.

Le sénateur Rivard : Merci. Pour reprendre le sujet du sénateur Plett sur les poutines, on sait qu'au Québec, comme partout ailleurs, il y a beaucoup d'arénas. Lorsque la patinoire est la propriété de la ville, celle-ci peut faire ce qu'elle veut. Je sais que certains arénas ont cessé de vendre de la poutine pour permettre de vendre plus de fruits et de légumes et pour changer les habitudes alimentaires. Il reste quand même que dans plusieurs arénas, ce sont des concessions et donc c'est difficile pour la ville de légiférer. Cela peut paraître curieux, mais certaines villes ont pris cette décision d'interdire la vente de poutine dans les arénas.

Le sujet d'étude de notre comité, c'est la recherche et l'innovation dans l'industrie agricole du Canada. On n'en a pas beaucoup parlé, mais d'autres témoins sont passés ici dans les dernières semaines et ils nous disaient qu'ils pouvaient assurer plus de production et moins de déchets grâce à l'innovation. De quelle façon vous traitez vos déchets? Pensez-vous qu'il y a des programmes de subvention de recherche qui pourraient faire en sorte de régler le problème des déchets tout en augmentant la productivité?

Mme Fowlie : Oui, mais c'est vraiment un partenariat entre les programmes et les producteurs et les membres de ACDFL. Surtout, ce qu'on voit dans le développement des nouvelles variétés, c'est très important et cela peut vraiment changer ce qui se passe avec le pourcentage des déchets. Que ce soit dans le secteur pommes de terre ou des pommes. C'est vraiment là. Les innovations dans les bonnes pratiques de production peuvent aider à avoir accès aux produits chimiques et autres technologies pour traiter les ravageurs. Cela a un impact sur la qualité des produits.

Il y a donc beaucoup de façons de gérer cela, mais il y en a certaines, surtout avec le développement, des variétés à long terme. Pour développer une nouvelle variété de pommes de terre, cela peut prendre de 15 à 20 ans. Pour changer des variétés de pommes, si vous allez faire des implantations cette année, cela peut prendre jusqu'à sept ans avant d'avoir une récolte.

Je ne sais pas si certains d'entre vous ont déjà essayé la variété de pommes Honeycrisp.

[Traduction]

Extraordinaire. C'est mieux au Canada que partout ailleurs. Si vous n'avez pas goûté à ces pommes, je vous dirai qu'elles sont les plus rafraîchissantes. C'est comme si on mangeait un bonbon ou buvait une boisson. C'est fantastique. Trouvez les pommes Honeycrisp pendant qu'il y en a encore sur le marché. Comme c'est une variété relativement nouvelle, il n'y en a pas des quantités énormes. Il y aura probablement des Honeycrisp canadiennes jusqu'au Premier de l'an. Si vous n'y avez pas déjà goûté, gâtez-vous. Nous vous enverrons de l'information sur l'origine de cette pomme.

M. Lemaire : De plus, l'innovation est un sujet très vaste, tout comme la viabilité.

Vous avez parlé d'oignons, faisant un lien entre viabilité et innovation, la viabilité se rapportant à la fois à l'économie et à l'environnement. L'un de nos membres américains, un producteur d'oignons de la Californie, a présenté un modèle de viabilité dont nous pourrions tirer des enseignements au Canada. Cette organisation essayait de trouver quoi faire des déchets d'oignons de son usine de transformation. Elle avait l'habitude de les épandre sur les champs. Le coût de l'épandage dans les champs s'élevait à environ 450 000 $, et il y avait le problème des difficultés sur le sol occasionnées par l'épandage.

En collaborant avec l'État de Californie et en travaillant à ses modèles d'efficacité énergétique et de production, l'entreprise a investi dans un programme de viabilité qui, à partir des déchets d'oignons, produisait un liquide ensuite acheminé dans un système produisant assez d'énergie électrique pour l'ensemble de l'installation. Non seulement l'entreprise a trouvé des gains d'efficacité en évitant de payer 450 000 $ pour épandre les déchets, mais elle a aussi trouvé l'occasion de réduire ses coûts d'exploitation et de revendre de l'électricité au réseau public. Voilà de l'innovation, par rapport à la façon dont l'industrie doit fonctionner chez nous.

Vous avez dit un mot des questions de compétences qui influent sur notre fonctionnement au Canada. C'est l'un des obstacles que nous avons à surmonter. Il faut veiller à collaborer avec tous les ordres de gouvernement, municipal, provincial, fédéral et territorial, et il est essentiel à l'avenir de trouver une approche coordonnée et harmonisée avec ces ordres de gouvernement multiples.

Pour en revenir au mode de fonctionnement de notre industrie, il faut qu'il existe un dialogue marqué par un esprit de collaboration et d'ouverture entre tous les ordres de gouvernement si nous voulons trouver des solutions, qu'il s'agisse d'innovation, de production ou de nouveaux emballages sous atmosphère, pour prolonger la durée de conservation de produits comme les bleuets sur les tablettes ou dans les boîtes-repas des enfants, emballages qui seraient biodégradables et sûrs pour l'environnement. Tous ces éléments sont en préparation dans l'industrie en ce moment, mais il faut encore plus d'innovation, et il faut travailler avec les divers ordres de gouvernement pour réaliser ces innovations, que ce soit sur le plan de la viabilité aux niveaux provincial et fédéral ou sur le plan économique, au moyen des divers autres moyens à notre disposition dans la production.

[Français]

Le sénateur Rivard : J'apprécie beaucoup vos commentaires mais je me demande si vous aviez le temps de le faire — peut-être que c'est dans les documents que vous avez produits, que nous avons eus seulement avant le début de la réunion, et que nous n'avons pas eu le temps de consulter— les programmes que vous avez en innovation, vous avez fait une très bonne remarque sur la consommation de bleuets et également l'épandage des restes d'oignons. Est-ce que vous pouvez nous faire un petit résumé de ce que vous faites en innovation et ce que vous aimeriez faire à moyen terme si vous aviez les fonds pour le faire?

Mme Fowlie : Cela nous prendra un peu de temps. C'est certain que comme secteur, nous avons des priorités pour les différentes cultures qui sont fondées dans les cinq thèmes auxquels j'ai fait référence. Nous avons une étude de projet d'innovation et recherche qui est en cours. En cycle, il y aura des rapports qui peuvent être partagés. Mais c'est certain, pour le long terme, comme M. Lemaire a dit, pour l'innovation, cela comprend le tout, de la production jusqu'à l'emballage, l'entreposage, cela comprend vraiment le tout.

Le sénateur Rivard : Vous donnerez ce que vous pouvez. Je ne demande pas ce que vous pensez qui pourrait être fait dans une génération. Mais qu'est-ce qu'on pourrait faire à court et moyen terme? Quelle aide gouvernementale pourrait vous aider en cours de développement pour augmenter la production tout en abaissant la quantité des déchets?

Mme Fowlie : Maintenir le programme agro-science pour les grappes, c'est vraiment très important parce que c'est vraiment un partenariat et l'industrie vient avec l'argent.

Le sénateur Rivard : Beaucoup de programmes fédéraux, d'une année à l'autre, vous ne savez pas s'ils vont être reportés. Si vous pouviez faire des suggestions, par exemple, pour garder la viabilité de l'industrie ou pour qu'on puisse continuer en recherche, on devrait avoir un engagement ferme du gouvernement, que ce soit une augmentation de tant par année mais surtout dans le temps. Est-ce que c'est un programme de cinq ou dix ans?

Mme Fowlie : Le cadre stratégique pour l'innovation et la recherche devrait être de 10 ans. Cinq ans n'est pas assez, ce n'est pas suffisant parce que ça prend du temps pour avoir des résultats. Alors vous avez raison, cela devrait être pour plus longtemps.

Le président : Pour faire un suivi, la question est très pertinente. Est-ce qu'il serait possible d'avoir de vous, les leaders, en regardant la gamme de produits qu'on appelle programmes, à travers le pays et les provinces, parce que vous avez de la juridiction provinciale, si vous pouvez porter à notre attention en passant par le greffier, vos commentaires sur ces programmes et de quelle manière le producteur, le transformateur et aussi les gouvernements peuvent ensemble permettre d'améliorer votre industrie dans le domaine et les commentaires que vous avez fait ce matin? C'est dans ce contexte.

[Traduction]

Le sénateur Ogilvie : Je voudrais faire suite aux observations de mon collègue, qui a attiré notre attention sur le mandat du comité en ce qui concerne la recherche et l'innovation. Je saisis l'exemple que vous venez de donner, celui de la pomme Honeycrisp, et je voudrais établir un lien avec la volonté des producteurs d'investir dans la recherche pour assurer leur propre avenir ou avec leur hésitation à le faire.

J'ai participé à une réunion entre des producteurs et un certain organisme gouvernemental dans une certaine région du Canada où le problème a été décrit de la façon suivante. Soit dit en passant, en guise d'entrée en matière ou comme suite à une observation sur la valeur de la Honeycrisp, je crois savoir que, au volume ou au poids, cette pomme vaut quatre ou cinq fois le prix de la pomme moyenne du producteur. C'est une prime plutôt bonne. Elle pénètre des marchés de grande valeur, notamment en Europe et ailleurs. Il y a d'autres concurrents sur ce marché. L'exemple précis qui a été discuté en ma présence, c'est le fait que, semble-t-il, il y a parfois un arbre, dans un verger de Honeycrisp, qui produira, dans une saison donnée, des pommes sujettes à la pourriture du cœur. Il n'est pas possible de dire quels arbres sont atteints au moyen d'un simple examen visuel des arbres ou de la pomme. Les pommes sont toutes récoltées. Il se peut que, dans un certain boisseau de pommes, il y en ait une qui provienne de l'arbre atteint. Et, lorsque cette pomme arrive sur un marché de grande valeur en Europe, on constate qu'elle a pourri à cause de cette maladie.

Je tiens à être prudent, mais je dois dire que certains des producteurs présents étaient parmi ceux qui obtiennent les meilleurs résultats financiers dans la région en question. Pourtant, il leur était extrêmement difficile de trouver à eux tous 25 000 $ pour égaler la participation de l'État à un programme qui est à leur disposition pour s'attaquer à ce genre de problème.

C'est une solution scientifique qu'il faut pour déceler ce problème et le régler. Il ne s'agit pas de modifier un équipement ou de former davantage le travailleur sur le terrain. Il faut des connaissances scientifiques claires sur la variété moderne.

Je veux simplement dire, puisqu'il est question de recherche et d'innovation, que, si je me fie à mes propres observations, il y a de votre côté des progrès à faire pour reconnaître l'importance de la recherche qui permettra de garantir la valeur finale du produit. Il s'agit ici d'un produit qui commande une prime énorme qui est cultivé par des producteurs très importants.

Je comprends la différence entre les secteurs en régime de gestion de l'offre et le vôtre. Ce fait a été très bien expliqué, et je le comprends. Néanmoins, la question de la recherche et de l'innovation est extrêmement importante. Nous sommes probablement à un stade de transition, en ce qui concerne l'attitude des grands producteurs, qui doivent reconnaître qu'il est important d'investir dans un secteur de leur propre entreprise alors que, par le passé, cela n'était pas reconnu comme important. Les producteurs semblent compter sur le gouvernement pour tout prendre en charge.

Ma propre impression, c'est que, à un moment où s'ouvre l'ère des produits à valeur ajoutée provenant des fruits — par exemple, lorsqu'on peut prendre la peau des pommes à jus, les presser et en extraire des liquides qu'on peut présenter comme riches en antioxydants —, nous sommes à un stade où vos membres doivent reconnaître qu'il est dans leur intérêt supérieur de trouver le moyen d'investir avec le gouvernement dans ce qui est maintenant une recherche de pointe, si on tient compte du bagage de connaissances qu'il faut exploiter. Je formule cette observation dans le sillage de la question de mon collègue sur l'importance de l'innovation et de la recherche dans ce secteur particulier.

Le sénateur Fairbairn : J'ai vite dressé l'oreille quand vous avez parlé de Calgary en énumérant ce que vous faites dans l'ensemble du Canada. Je suis de Lethbridge, dans le Sud de l'Alberta, près de Calgary, et je me demande quelles sont vos activités dans cette région. Il y a là toutes sortes de choses, mais je suis curieuse de savoir comment, sur le terrain, vous rassemblez tous ces éléments, je veux dire les sols et les différentes choses qu'on trouve autour de Calgary. Comment cela s'insère-t-il dans votre travail, dans ce que vous faites, dans votre façon d'agir dans une région comme celle-là?

M. Lemaire : Je vais commencer et inviter ensuite Mme Fowlie à poursuivre. Du point de vue de la chaîne d'approvisionnement, nous considérons une foule de choses à Calgary, mais cela peut aussi se transposer dans le reste du Canada.

J'ai parlé de la diversité et de la multiplicité des modes de fonctionnement de notre industrie. Lorsqu'il s'agit de Calgary et de la façon dont nous y envisageons la commercialisation ou la promotion des fruits et légumes frais, nous adoptons une approche plutôt générale, étant donné que nous avons des ressources très limitées pour informer les consommateurs sur ce qu'ils devraient manger et pourquoi. Nous cherchons à préciser pourquoi il faut consommer tels produits : ils sont bons pour vous, bons au goût et faciles à trouver; et nous abordons aussi des questions de sécurité alimentaire.

Nous ne sommes pas en mesure de faire un ciblage précis en disant par exemple qu'il faut manger des pommes de terre, des carottes, des bananes ou des brocolis. Les points de vente au détail, les services de santé et d'autres entités peuvent prendre notre documentation et proposer des activités plus ciblées afin de modifier les modes de consommation et d'augmenter la consommation de certaines produits. Nous devons également considérer l'approche de toute la chaîne de distribution en veillant à ce que l'industrie innove et investisse.

L'industrie est très diversifiée, comprenant aussi bien de très petits producteurs que des producteurs très bien positionnés sur le marché canadien et d'autres entités de la chaîne d'approvisionnement. Cela crée des difficultés lorsqu'il s'agit, dans une approche de toute l'industrie, de préconiser certaines innovations. Nous ne pouvons relâcher nos efforts en ce sens, car si l'ensemble de l'industrie ne va pas de l'avant, aucun de nous ne réussira.

L'approche de l'innovation et de la sensibilisation, depuis le producteur et l'expéditeur jusqu'au conditionneur, au grossiste et au détaillant, dans les domaines de la salubrité alimentaire, de la traçabilité, de la manipulation du produit, de la commercialisation et de l'information du consommateur, tout cela est indispensable si nous voulons que le bon produit se trouve entre les mains du consommateur et que, lorsqu'il se présente dans un point de vente au détail ou fait ses achats ailleurs, il prenne la bonne décision et achète un produit qui répondra à ses besoins immédiats.

Dans l'optique de l'ACDFL, nous avons changé notre orientation à l'égard des enfants. Par le passé, nos activités de commercialisation étaient axées sur l'acheteur primaire : la femme de 25 à 40 ans. Nos recherches ont montré que, même si nous avons connu du succès avec des investissements limités, la meilleure occasion à saisir est de réorienter nos documents d'information vers les écoles : travailler au niveau provincial à l'éducation des enfants, grâce à un soutien du programme d'études et à d'autres moyens, en insistant sur les bienfaits de la consommation de fruits et de légumes et en établissant un lien avec ce qui est disponible au niveau local.

Vous avez parlé de rapprocher les enfants de l'exploitation agricole. Cela se perd en raison de l'évolution et de l'urbanisation de notre pays. Le lien qui existait il y a 20 ou 30 ans encore n'est plus là. Tout le monde avait un parent ou un ami qui était agriculteur ou avait un lien avec le monde agricole. Ce lien est disparu et bien des Canadiens ne comprennent pas comment cela fonctionne.

Comment les amener à comprendre de quoi a l'air le chaîne d'approvisionnement dans le domaine alimentaire au Canada, d'où viennent les aliments et pourquoi il est important de soutenir l'industrie des fruits et légumes pour le bien de leur collectivité et du pays tout entier?

[Français]

Le sénateur Robichaud : On a parlé de la poutine. C'est important parce qu'il faut faire la distinction entre la poutine québécoise et la poutine acadienne. Cela ne se ressemble absolument pas, mais elles sont toutes les deux à base de pommes de terre. Peut-être qu'on devrait demander aux recherchistes de la Bibliothèque du Parlement de trouver une recette pour les deux sortes de poutine. D'ailleurs, j'invite les gens à manger de la poutine acadienne.

En ce qui a trait à la recherche et au développement, y a-t-il des secteurs où on pourrait faire plus d'efforts? Vous avez parlé des fruits que les producteurs ont pu utiliser. Quelles sont les pistes que nous devrions explorer et suivre davantage?

Mme Fowlie : Il y en a plusieurs. Mais au début, en tant que communauté productrice, on constate un manque de communication entre les centres de recherche. Les chercheurs en Colombie-Britannique, qui font des travaux en pomme de terre par exemple, ne sont pas tellement au courant de ce qui se passe avec les pommes de terre à l'Île-du- Prince-Édouard. Le même phénomène se produit aussi avec les pommes dans certaines régions. Nous n'avons pas un inventaire de ce qu'il y a en cours de recherche partout au Canada. Nous avons aussi besoin d'avoir ces informations, mais elles sont difficiles à trouver.

Il y a plusieurs années, le groupe Cark — qui n'existe plus aujourd'hui — rassemblait ce genre d'informations. Nous avons vraiment besoin de chercheurs à Agriculture Canada et leurs laboratoires, pour certaines disciplines, sont vraiment les seuls qui ont l'expertise au Canada.

[Traduction]

Je prends comme exemples la brûlure de la pomme de terre ou même la larve de taupin. Au Canada, toute l'expertise se trouve à Agriculture Canada. Il y a là des choses que nous ne pouvons pas nous permettre de perdre. Il faut donc examiner comment nous collaborons et communiquons à l'intérieur du ministère et entre les ministères et les usagers, et apporter des améliorations. Nous sommes très inquiets parce que beaucoup de chercheurs quittent l'industrie. La relève ne se manifeste pas. Nous sommes vraiment préoccupés par le vide qui se creusera dans des domaines comme la lutte antiparasitaire, la santé et les maladies des plantes et la création de nouvelles variétés. Nous perdons ces compétences et il y aura d'énormes lacunes. Le Canada aura un désavantage concurrentiel face aux pays qui savent conserver ces compétences.

M. Lemaire : Le problème se pose aussi bien pour le gouvernement que pour l'industrie à cause des départs à la retraite dans la fonction publique et de la perte de certaines compétences dans l'industrie. L'industrie elle-même est en transition et les nouvelles générations ne sont pas au rendez-vous. Les ressources humaines sont un domaine majeur auquel nous accordons notre attention.

Le sénateur Robichaud : Vous dites que la nouvelle génération n'est pas au rendez-vous, dans les centres de recherche. Où vont ces jeunes?

Mme Fowlie : Ou bien ils ne choisissent pas les disciplines de recherche au départ, ou bien ils s'en vont ailleurs. Nous observons les deux phénomènes.

M. Lemaire : Il n'existe plus de proximité avec le monde agricole, et beaucoup de jeunes font des choix qui les amènent loin de l'agriculture.

Mme Fowlie : Il y a tant de débouchés pour la génération actuelle et les générations montantes. Des possibilités et des carrières exceptionnelles et stimulantes s'offrent à elles en phytologie, en entomologie, en sciences de l'alimentation et bien d'autres domaines, mais, collectivement, il semble que nous n'arrivions pas à attirer de notre côté des jeunes brillants et talentueux.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous soulevez un point très important. Vous avez d'abord parlé de la communication entre les chercheurs, mais le renouvellement des chercheurs cause aussi un problème.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Je voudrais poursuivre dans l'esprit de la réponse que vous avez faite au sénateur Robichaud.

Les terres coûtent de plus en plus cher. J'habite près de la ville, dans un village-dortoir. Autour de mon village, les agriculteurs commencent à vendre leurs terres pour la construction résidentielle. Au lieu de les vendre de 2 000 $ à 3 000 $ l'acre, ils en obtiennent 50 000 $ l'acre s'ils les subdivisent en lots de deux acres. Ils gagnent mieux leur vie de cette manière qu'en cultivant. Je sais que les propriétaires de vergers, à Kelowna, voudraient les vendre pour la construction résidentielle, mais je crois qu'il y a des restrictions.

Le phénomène touche-t-il les producteurs de légumes? Au lieu de gagner leur vie en vendant leurs légumes, ils pourraient simplement subdiviser leurs terres en lots de deux acres et prendre leur retraite. Le problème existe-t-il?

Mme Fowlie : C'est un sujet d'inquiétude. Il s'agit d'une décision commerciale que des gens prennent pour diverses raisons qui tiennent à leur situation, mais c'est très préoccupant. Si nous nous soucions de la pérennité de la production et de la sécurité alimentaire, c'est très préoccupant. Il n'y a pas de réponse facile. Divers éléments jouent, et nous en avons abordé beaucoup ce matin. Nous avons parlé des talents à recruter pour la recherche. Comment garder la prochaine génération en agriculture ou attirer de nouveaux producteurs dans le secteur agricole? Je voudrais tant qu'il y ait une solution facile comme une recette de muffins aux bleuets. Il y a un ensemble d'éléments à considérer et il faudra de la part de bien du monde beaucoup d'engagement et une profonde réflexion stratégique.

Le sénateur Plett : Des producteurs laitiers ont comparu l'autre jour. Le président ou le greffier me corrigeront au besoin, mais ils ont parlé de la demande à satisfaire. Je ne suis pas sûr qu'elle doublera d'ici 2050, mais c'est de cet ordre-là. Peu importe les chiffres, il reste que la progression est énorme. Elle doublera d'ici 2050. La même chose se produira-t-elle dans votre secteur? Est-ce que ce ne serait pas très positif?

Mme Fowlie : Il serait merveilleux que cela se produise. Il y a des possibilités de croissance ici et sur les marchés d'exportation. Il y a des occasions de travailler avec un certain nombre d'autres marchés pour ce qui est de la transmission de la technologie et des compétences que nous avons au Canada. Le Secrétariat à l'accès aux marchés envisage notamment cette possibilité avec divers pays. Deux délégations sont venues de Russie cet été. Elles s'intéressent au secteur de la pomme de terre et veulent savoir comment travailler avec le Canada et examiner précisément certaines de ces choses-là. Je crois qu'il y a des possibilités. Un certain nombre de facteurs vont jouer.

Le sénateur Plett : Je vous dirais qu'il faut faire beaucoup d'efforts sur les exportations. Je crois qu'il y a une foule de débouchés dans d'autres pays, notamment dans des pays d'Asie qui sont très peuplés. Je vous encourage à poursuivre dans cette voie.

Le sénateur Eaton : Quand j'achetais des tomates en Floride, les canadiennes étaient les meilleures. Ce sont celles qui avaient le plus de goût. J'ai lu des choses sur l'entreposage et les insecticides. Parmi tous les facteurs, où se situe le goût?

M. Lemaire : Le goût est un élément du profil à l'achat. Le prix est toujours un facteur déterminant pour bien des Canadiens et des consommateurs au moment d'acheter des fruits et légumes. Dans ce profil, le produit doit avoir les bonnes caractéristiques de couleur, de texture et, bien entendu, de goût. Si nous ne fournissons pas un produit qui répond au profil de goût, il est très difficile d'en faire augmenter la consommation.

Le sénateur Eaton : Je suis d'accord, mais, par le passé, n'avons-nous pas insisté sur l'uniformité, l'emballage et la durée de conservation plutôt que sur le goût? Nous intéressons-nous maintenant au goût?

M. Lemaire : Le goût est un aspect de la plus haute importance. Nous organisons une foire nationale de l'industrie des fruits et légumes frais. En avril prochain, nous serons à Calgary. La foire est une véritable corne d'abondance et on y insiste surtout sur le goût des produits. Le goût des fruits et légumes, si on les compare à d'autres produits, est un élément essentiel si on veut que le consommateur en retire des avantages. En fin de compte, si le produit n'est pas agréable au goût et si on n'a pas envie de l'avoir dans la bouche, on ne le rachète pas.

Le président : Merci à l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes et au Conseil canadien de l'horticulture de nous avoir éclairés de leurs connaissances. J'ai deux questions auxquelles vous pourriez répondre par écrit pour le comité. Nous vous en serions reconnaissants. Dans la distribution alimentaire, il y a des géants comme Walmart et Costco. D'abord, quel est l'impact de ces magasins sur les producteurs locaux de produits alimentaires?

Deuxièmement, vous n'avez pas parlé longuement des barrières au commerce entre les provinces. Le comité voudrait savoir ce que vous avez à dire à ce sujet et comment nous pouvons aider à atténuer certains de ces obstacles. Cette question est liée à une question complémentaire qui vous permettra de nous communiquer vos connaissances et vos observations sur l'ALENA, surtout du point de vue du Canada. Que pouvons-nous recommander au gouvernement et aux autres partenaires que sont les États-Unis et le Mexique afin d'améliorer l'ALENA par rapport à vos associations?

Merci. Nous vous inviterons peut-être de nouveau.

[Français]

Il est vrai que les pommes de terre sont un bon produit.

(La séance est levée.)


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