Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 20 - Témoignages du 21 juin 2012
OTTAWA, le jeudi 21 juin 2012
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 8 heures pour étudier le projet de loi S-11, Loi concernant les produits alimentaires, et portant notamment sur leur inspection, leur salubrité, leur étiquetage, la publicité à leur égard, leur importation, leur exportation, leur commerce interprovincial, l'établissement de normes à leur égard, l'enregistrement de personnes exerçant certaines activités à leur égard, la délivrance de licences à ces personnes, l'établissement de normes relatives aux établissements où de telles activités sont exercées ainsi que l'agrément de tels établissements.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je suis le sénateur Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick, et je suis le président de ce comité.
[Traduction]
Honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Nous allons débuter par nous présenter. Je m'appelle Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick, et je préside le comité. J'aimerais que les sénateurs se présentent à leur tour, s'il vous plaît.
Le sénateur Peterson : Sénateur Bob Peterson, de la Saskatchewan.
Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de Toronto, en Ontario.
Le sénateur Buth : JoAnne Buth, du Manitoba.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Sénateur Fernand Robichaud, Saint-Louis-de-Kent au Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Maltais : Sénateur Ghislain Maltais, du Québec.
Le sénateur Rivard : Sénateur Michel Rivard, les Laurentides, Québec.
[Traduction]
Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.
Le président : Honorables sénateurs, nous avons l'occasion et l'honneur d'accueillir l'honorable Gerry Ritz, ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et ministre de la Commission canadienne du blé.
Monsieur le ministre, messieurs les représentants, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à venir témoigner devant notre comité pour nous éclairer et nous faire part de vos opinions au sujet du projet de loi S-11.
Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada a présenté au Parlement le projet de loi S-11, Loi sur la salubrité des aliments au Canada, pour renforcer notre système de salubrité des aliments et réduire le chevauchement pour les producteurs d'aliments au Canada.
Le projet de loi donne à l'industrie des règles claires, cohérentes et directes en matière d'inspection et d'application. Les gens de l'industrie pourront ainsi mieux assumer leur responsabilité de garnir nos tablettes d'aliments salubres.
Au cours de la première heure, le ministre fera son exposé, et il y aura une période de questions et de réponses.
Le greffier m'a informé que George Da Pont, président de l'Agence d'inspection des aliments, et Brian Evans, chef de la salubrité des aliments et vétérinaire en chef du Canada de l'Agence d'inspection des aliments du Canada, accompagnent le ministre.
Merci encore une fois d'avoir accepté notre invitation. C'est un honneur de vous accueillir ce matin.
[Français]
Je vous demanderais, monsieur le ministre, de faire votre présentation.
[Traduction]
L'honorable Gerry Ritz, C.P., député, ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et ministre de la Commission canadienne du blé : Merci, monsieur le président. C'est évidemment avec plaisir que je comparais ce matin devant votre comité pour vous parler du projet de loi S-11, Loi sur la salubrité des aliments au Canada. Je suis accompagné par George Da Pont, président, et Brian Evans pour aborder les divers enjeux que vous voudrez bien soulever aujourd'hui. Nous pouvons tous convenir que la salubrité des aliments est une priorité absolue tant pour les Canadiens que pour le gouvernement Harper. Le gouvernement continue de collaborer avec les consommateurs, les producteurs, l'industrie et nos partenaires provinciaux et territoriaux pour que notre système de salubrité des aliments demeure l'un des meilleurs au monde. La Loi sur la salubrité des aliments au Canada est la plus récente mesure d'une initiative sur cinq ans entreprise par notre gouvernement pour renforcer le système de salubrité des aliments du Canada.
Cette loi donne suite à l'engagement que nous avons pris en vue de moderniser les lois sur la salubrité des aliments lorsque nous avons présenté en décembre 2007 le Plan d'action du Canada pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation.
Comme vous le savez, le gouvernement a commandé une enquête indépendante du système canadien de salubrité des aliments à la suite de l'éclosion de listériose en 2008. Le gouvernement s'est engagé à donner suite à chacune des 57 recommandations issues de cette enquête menée par Sheila Weatherill. En septembre 2009, nous avons annoncé un investissement initial de 75 millions de dollars pour répondre aux recommandations.
Nous fournissons, entre autres, aux Canadiens l'information dont ils ont besoin pour réduire les risques d'intoxications alimentaires par l'entremise d'un nouveau portail Web sur la salubrité des aliments et de campagnes d'information publique nationales.
Le discours du Trône de 2010 a réaffirmé l'engagement du gouvernement à renforcer le système de salubrité des aliments, et le budget de 2010 prévoyait 13 millions de dollars supplémentaires pour accroître la capacité en matière d'inspection des viandes. La capacité de l'ACIA a encore été accrue grâce au budget de 2011 qui a affecté 100 millions de dollars additionnels à l'ACIA pour la formation des inspecteurs, les technologies et les capacités scientifiques.
Dans le présent budget, le gouvernement maintient son appui à l'égard de la salubrité des aliments en investissant 51 millions de dollars sur deux ans en vue de renforcer le système de salubrité des aliments.
Monsieur le président, j'ai le plaisir de rapporter que le gouvernement Harper a embauché plus de 700 nouveaux inspecteurs depuis 2006 et a donné suite à la totalité des 57 recommandations formulées par Sheila Weatherill.
Au Canada, l'environnement en matière de salubrité des aliments est en constante évolution. Nous vivons dans une économie mondiale complexe et de plus en plus intégrée. Il y a constamment des avancées dans les sources d'aliments, ainsi que les méthodes de production et de distribution des aliments.
Les Canadiens achètent des aliments importés depuis un nombre croissant de pays, dont certains sont dotés de systèmes réglementaires différents. La technologie et l'innovation modifient les processus de fabrication des aliments, et il est difficile de répondre aux attentes en matière de salubrité des aliments.
Il faut corriger les incohérences entre les diverses méthodes d'inspection en ce qui a trait à la manière de traiter des risques semblables.
Nous ne pouvons pas avoir de manques d'efficacité ou de lacunes en matière de surveillance en raison de lois dépassées ou qui se chevauchent. Les Canadiens ont besoin d'un système qui permet de prévoir et de prévenir les problèmes tout au long de la chaîne d'approvisionnement des produits nationaux et des produits importés; de cibler les secteurs qui posent les risques les plus élevés; et d'intervenir rapidement lorsqu'un problème survient. C'est pourquoi le gouvernement, en collaboration avec l'industrie, prend des mesures pour offrir un système de salubrité des aliments solide et unifié.
La Loi sur la salubrité des aliments au Canada est l'instrument principal de nos mesures en vue de nous assurer de la salubrité de tous les produits alimentaires vendus au Canada ou exportés, peu importe la source. Cette nouvelle loi simplifiera la législation et renforcera les pouvoirs d'application de la loi pour les importations et les exportations. De plus, de lourdes amendes seront imposées à ceux qui mettent intentionnellement en danger la salubrité de nos aliments.
Ces amendes ne seront plus qu'un simple coût de fonctionnement; elles serviront de mesure dissuasive importante à l'égard de ceux qui veulent brûler des étapes ou altérer des produits alimentaires.
Tout ce qu'apporte cette loi contribuera ultimement à améliorer la salubrité des aliments pour les Canadiens. Et c'est là notre principal objectif. Par exemple, la loi aidera les inspecteurs en rendant leur travail plus cohérent et plus simple. Grâce aux exigences réglementaires simplifiées en une seule loi, il sera plus facile pour l'industrie de comprendre ses responsabilités et de s'y conformer. L'industrie profitera d'un accès accru aux marchés internationaux grâce à la certification améliorée des exportations.
La nouvelle loi contribuera à harmoniser notre système de salubrité des aliments avec ceux de nos principaux partenaires internationaux, notamment les États-Unis.
En janvier 2011, le président Obama a signé la nouvelle Food Safety Modernization Act. Cette loi confère à la Food and Drug Administration des pouvoirs accrus pour prévenir les maladies d'origine alimentaire. La loi américaine renferme également des dispositions permettant de reconnaître les systèmes d'autres pays, ce qui donne au Canada la possibilité d'obtenir une reconnaissance de la FDA et de renforcer les relations de travail étroites établies entre l'ACIA et cet organisme américain. Notre gouvernement ne se reposera jamais sur ses lauriers. Nous reconnaissons que le renforcement de notre système de salubrité des aliments est un processus continu, et nous sommes pleinement engagés dans ce processus.
Nous reconnaissons également qu'un système efficace de salubrité des aliments exige une collaboration entre les partenaires gouvernementaux, l'industrie et les consommateurs. Nous sommes activement engagés à travailler avec nos partenaires pour nous préparer aux risques émergents en matière de salubrité des aliments et y répondre.
Comme toujours, notre but est de veiller à ce que notre système de salubrité des aliments demeure l'un des meilleurs au monde pour nos familles, l'industrie et tous les Canadiens.
Merci. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Le président : Merci, monsieur le ministre.
Le sénateur Plett : Encore une fois, bienvenue, monsieur le ministre. Il me tarde que le projet de loi S-11 soit adopté. À la Chambre, dans les médias, dans les questions que j'ai entendues lorsque j'ai fait mon exposé l'autre jour et encore une fois lors de l'intervention de mon collègue au Sénat, les gens s'inquiètent notamment des compressions budgétaires. Je sais que les compressions contenues dans le projet de loi C-38 ne se trouvent pas dans la présente mesure législative, mais je crois comprendre que les compressions à l'ACIA seront de l'ordre d'environ 56 millions de dollars sur une certaine période et qu'elles sont considérablement neutralisées par des investissements de 52 millions pour la salubrité alimentaire. Les gens se plaignent que vous réduisiez le nombre d'inspecteurs, et vous avez dit plus tôt que notre gouvernement a créé 700 nouveaux postes — des inspecteurs des viandes. Je suis du Manitoba. En Colombie-Britannique, en Saskatchewan et au Manitoba, le problème était notamment que les inspecteurs fédéraux faisaient, dans bien des cas, le travail des fonctionnaires, et le gouvernement fédéral en subventionnait certains. Je crois que certains changements sont apportés.
En ce qui a trait aux questions de l'inspection des viandes et de l'étiquetage sur la scène provinciale, pouvez-vous nous confirmer que l'opposition se trompe lorsqu'elle dit que nos provinces seront traitées à cet égard au même titre que l'Ontario, le Québec, les provinces de l'Atlantique et l'Alberta?
M. Ritz : Vous avez en gros répondu à votre question. Ce serait un manque de vision que de mettre uniquement l'accent sur les 56 millions que nous considérons comme des gains d'efficacité. Il ne s'agit pas de compressions; ce sont des moyens efficaces de fonctionner. Il y a de nouvelles technologies et des façons novatrices d'assurer le même service, et cela nous permet de faire économiser 56 millions aux contribuables au cours des trois prochaines années. Dans la foulée, au cours de la même période, nous investirons 151 millions de fonds additionnels dans le système de salubrité des aliments, soit 100 millions qui proviennent du budget du dernier exercice et 51 millions qui proviennent du présent exercice. Les 51 millions seront dépensés au cours des deux prochaines années, et les 100 millions seront écoulés sur cinq ans. Bref, d'un côté nous avons des gains d'efficacité de l'ordre de 56 millions, et de l'autre nous investissons 151 millions de fonds additionnels au cours de la même période. C'est loin d'être une réduction; il y a en fait un gain net. Les 100 millions seront investis dans l'innovation, les technologies, les certifications électroniques et d'autres éléments en vue de moderniser notre système de salubrité des aliments et de suivre le rythme de l'industrie, ce qui est une bonne chose. C'est ce que l'industrie demandait.
Pour ce qui est du nombre d'inspecteurs, comme je l'ai souvent dit, ils ne poussent pas dans les arbres. Il s'agit de personnes très intelligentes et très bien formées qui accomplissent un travail remarquable. Nous continuons d'augmenter nos effectifs à mesure que la demande croît. Depuis 2006, nous avons embauché 700 nouveaux employés de première ligne. Par la même occasion, comme vous l'avez mentionné, nous apportons des changements en Colombie-Britannique, en Saskatchewan et au Manitoba. Ces provinces n'avaient pas la capacité d'inspecter leurs propres établissements provinciaux. Les inspecteurs fédéraux s'en chargeaient donc. Nous récupérions environ 17 cents par dollar; nous avons donné le choix aux provinces concernées de payer le manque à gagner, soit 83 cents, ou de retourner à un système provincial. Elles avaient le choix d'assumer la totalité des coûts ou nous arrêtions d'assurer les services. Elles ont choisi de retourner à un système provincial.
Parmi les 56 inspecteurs concernés qui travaillent actuellement pour le gouvernement fédéral, certains choisiront peut-être d'enfiler un uniforme provincial et de rester dans leur région. Ils ont peut-être des enfants qui vont à l'école. Ce sera leur décision. Nous espérons que ces inspecteurs demeurent à notre emploi. Autrement, nous devrons engager des gens pour les remplacer et les affecter ailleurs dans l'organisme.
En fin de compte, nous ne perdons pas d'inspecteurs. Ils continueront de faire leur travail, mais ils travailleront pour les gouvernements provinciaux, au lieu du gouvernement fédéral.
Le sénateur Peterson : Monsieur le ministre, merci de votre présence et de votre aide au sujet du projet de loi.
Comme je l'ai dit hier, nous sommes heureux de constater que le gouvernement va de l'avant avec la modernisation du système de salubrité des aliments et de la loi en la matière au Canada, et je suis certain que vous êtes reconnaissant et fier du travail réalisé par Sheila Weatherill dans le cadre de ses examens. Je crois que le thème principal qui en est ressorti était l'insuffisance des ressources pour les inspections. Si nous ne sommes pas capables de faire appliquer les règlements en vue de prévenir une épidémie majeure ou de réduire les éclosions, si nous n'avons pas les ressources humaines pour accomplir la tâche, ce beau projet de loi ne vaudra rien. Cela étant dit, nous avons les grandes lignes. Comment les mettrons-nous efficacement en oeuvre? Voilà l'aspect au sujet duquel vous pourrez, je l'espère, nous éclairer.
À la suite des compressions, est-ce que l'ACIA aura suffisamment d'inspecteurs pour s'assurer que le système de surveillance de la salubrité des aliments fonctionne adéquatement et ainsi veiller à la salubrité des aliments au Canada?
M. Ritz : La réponse courte est oui, mais j'aimerais corriger certains éléments de votre intervention.
Dans son rapport, Sheila Weatherill ne parle jamais d'un manque d'effectif ou d'une capacité insuffisante. Elle mentionne des lacunes et des chevauchements. Elle dit que nous devrions mettre davantage l'accent sur la communication avec nos partenaires provinciaux et collaborer davantage avec l'industrie, et c'est ce que nous cherchons à faire avec le plus récent changement.
Il s'agit en fait de la 57e recommandation, la dernière, à laquelle nous donnons suite. Nous l'avons fait au cours des trois dernières années avec des hausses budgétaires. Le présent budget ne comporte pas de compressions. Il s'agit du plan d'action pour réduire le déficit, ce qui n'est pas la même chose. Comme je viens de l'expliquer au sénateur Plett, nous avons trouvé des gains d'efficacité de l'ordre de 56 millions de dollars et nous avons investi 151 millions de fonds additionnels en vue de renforcer l'excellent travail accompli par l'ACIA et d'en tirer profit.
Comme vous le savez, c'est la troisième initiative en la matière de la part du gouvernement. En 2005, je crois que les libéraux ont proposé le projet de loi C-51, si ma mémoire est bonne, qui essayait d'aborder la question. Nous avons aussi essayé de le faire plus tôt. Il s'agit de la troisième mouture. Comme on dit, jamais deux sans trois, et voilà le projet de loi. Il y a une bonne combinaison et un bon équilibre entre ce qui est demandé du gouvernement, des contribuables et de l'industrie pour nous assurer de la salubrité de nos aliments.
Le sénateur Peterson : Monsieur le ministre, je crois vraiment que le rapport Weatherill a mis l'accent sur les ressources humaines adéquates. À cet égard, vous avez dit à de nombreuses reprises que le gouvernement a embauché plus de 700 inspecteurs depuis 2006. Parmi eux, combien y a-t-il en fait d'inspecteurs des aliments comparativement aux inspecteurs de végétaux, d'insectes, et cetera?
M. Ritz : Tout ce que l'ACIA fait est axé sur le risque. L'organisme met l'accent sur les problèmes potentiels et y affecte les ressources nécessaires. Les tâches des inspecteurs, soit les tâches en ce qui a trait aux aliments ou le travail de première ligne, sont majoritairement interopérables. Le présent projet de loi cherche à s'assurer que les inspecteurs possèdent la formation et la capacité d'en faire une grande partie.
Le projet de loi condense quatre lois, quatre directives, concernant les inspecteurs de l'ACIA en une seule, ce qui leur donnera la formation globale pour être encore plus efficaces. Les chaînes de production multiples dans un même établissement nous posent problème en raison des différents protocoles pour chaque chaîne. Dans le cas d'une entreprise qui fabrique de la soupe au poulet avec des légumes, il y a des protocoles pour le poulet et des protocoles pour les légumes, et les protocoles sont parfois opposés. Si une soupe en conserve fait l'objet d'un rappel, différentes procédures entrent en ligne de compte. Il s'agit du système le plus redondant et le plus nébuleux que vous pouvez imaginer.
Le projet de loi vise à préciser beaucoup de ces points. Les tâches de nos 700 nouveaux inspecteurs, ce qui porte leur nombre à environ 3 500, seront ainsi plus prévisibles et se feront plus efficacement. L'inspection sera en fait de meilleure qualité avec le même nombre de personnes, et nous continuerons d'embaucher des inspecteurs en fonction des besoins.
Le sénateur Peterson : Je crois comprendre que vous avez rencontré des inspecteurs des viandes, mais pas d'inspecteurs des pêches ou de volaille.
Dans le budget de 2012, l'ACIA a moins d'argent que ce qu'elle avait avant l'éclosion dans les installations des Aliments Maple Leaf, et il y aura moins de gens. J'ai de la difficulté avec le nombre d'inspecteurs et le fait qu'environ 500 d'entre eux soient des employés nommés pour une période déterminée. Seront-ils tous renouvelés? Comment savons-nous ce qui se passe avec ces gens? Cela ne ressort pas vraiment.
M. Ritz : Monsieur le sénateur, je ne suis pas certain des éléments sur lesquels vous fondez votre question. Nous continuons d'embaucher du personnel au sein de l'ACIA, et l'accent est mis sur les inspecteurs de première ligne. Voilà le domaine où le travail est fait. Ils ont bien entendu besoin de personnel de soutien; ils ont besoin de données scientifiques. Ils ont besoin de tout le reste pour les soutenir et ainsi nous permettre de continuer à renforcer la capacité de l'ensemble de l'organisme. De plus, nous avons analysé régulièrement les gains d'efficacité réalisés. Vous constaterez une fluctuation des effectifs. Vous constaterez une fluctuation des ressources à mesure que nous trouvons des gains d'efficacité et continuons d'accomplir un travail de calibre mondial au sein de l'ACIA.
Le sénateur Peterson : La rationalisation est une chose merveilleuse, mais il faut en fait être en mesure d'accomplir la tâche. Ce sera la première fois que nous réglementerons les importations, et c'est une autre bonne chose.
M. Ritz : Ce ne sera pas la première fois; nous avons toujours réglementé les importations. Il y a un malentendu; c'est totalement faux que nous nous occupons beaucoup plus des produits nationaux que des importations.
Le sénateur Peterson : Actuellement, nous inspectons seulement 2 p. 100 des importations. Il y aura une augmentation, et nous aurons besoin de plus de gens pour ce faire. Nous avons de la difficulté à déterminer si nous avons suffisamment de personnel pour répondre aux besoins.
M. Ritz : Monsieur le sénateur, j'espère donc que vous soutiendrez le budget qui affecte 51 millions en fonds additionnels à l'ACIA.
Le sénateur Peterson : Encore une fois, cette somme n'ira pas entièrement à l'ACIA. Vous pouvez citer les chiffres comme bon vous semble, mais ce montant ne sera pas entièrement affecté à l'ACIA.
Le président : Une question, s'il vous plaît.
Le sénateur Peterson : J'y arrive.
D'un côté, nous avons un projet de loi qui améliore la salubrité et l'inspection des aliments; c'est une bonne chose. De l'autre, nous avons des compressions budgétaires sévères; ce n'est pas très positif.
M. Ritz : Monsieur le sénateur, il ne s'agit pas de compressions, mais bien de gains d'efficacité.
Le sénateur Peterson : J'arrive à ma question. Vous me devancez encore une fois.
Est-ce que le ministre serait prêt à accepter un amendement au projet de loi qui exigerait la tenue d'un audit annuel par une tierce partie pour nous assurer de la présence de ressources adéquates pour mettre en application le nouveau projet de loi?
M. Ritz : Monsieur le sénateur, je devrai tout d'abord voir cela par écrit. Cela ne me dérange évidemment pas, et des décisions par une tierce partie sont en fait déjà possibles. Nos partenaires commerciaux réalisent des audits, qui nous sont par la suite remis pour nous permettre de voir s'il y a des lacunes ou si les autorités veulent que nous fassions quelque chose différemment. L'ACIA fait l'objet d'un certain nombre d'audits, ce qui témoigne de la qualité de l'organisme. Chaque fois que les groupes internationaux procèdent à des vérifications, nous obtenons des A+. Par conséquent, je recevrai avec joie un tel amendement, même si c'est quelque peu redondant, parce que nous devrons faire l'objet d'un autre audit. Si cela peut vous rassurer, proposez l'amendement, et nous l'examinerons.
Le sénateur Peterson : Je crois que cela me rassurerait, ainsi que tous les Canadiens.
M. Ritz : Qui avez-vous en tête pour mener à bien cet audit?
Le sénateur Peterson : Je pense que cela devrait être une tierce partie indépendante.
M. Ritz : Avez-vous une idée d'un organisme qui en aurait la capacité?
Le sénateur Peterson : Je propose cette idée, et je suis ravi de vous entendre dire que vous acceptez de la considérer. Ce serait une bonne chose. Les Canadiens seraient ainsi rassurés, et nous pourrions dire chaque année que nous avons les ressources et l'argent et que le travail est fait.
M. Ritz : Ces données se trouvent déjà bien entendu dans nos rapports au Parlement.
Le sénateur Peterson : Je le sais, mais cela le renforcerait un peu plus.
M. Ritz : Je suis tout à fait prêt à considérer votre idée. Je me demande bien quel organisme a en fait la capacité, selon vous, de le faire.
Le sénateur Peterson : Nous nous pencherons sur la question au cours des prochains jours. Votre engagement à considérer un tel amendement me redonne espoir.
M. Ritz : C'est tôt le matin que je suis le plus conciliant.
[Français]
Le sénateur Maltais : Bienvenue, monsieur le ministre. Nous sommes très heureux de vous avoir parmi nous aujourd'hui et nous vous en remercions.
Je vous félicite de mettre de l'ordre dans la Loi sur l'inspection alimentaire. Je crois qu'il était grand temps, d'autant plus que le Canada s'ouvre de plus en plus aux marchés internationaux et, par conséquent, nous devons nous conformer à des règles précises.
Monsieur le ministre, une nouvelle culture s'est développée au cours des 20 dernières années — une agriculture ou une nouvelle culture, appelons cela comme on veut —, et il s'agit de la culture biologique. Les consommateurs semblent avoir de la difficulté à s'y retrouver pour s'assurer que les produits biologiques sur le marché sont de vrais produits biologiques et qu'ils ont été contrôlés par votre ministère; les consommateurs sont souvent très inquiets de la provenance et de la qualité des produits biologiques.
[Traduction]
M. Ritz : C'est une bonne question. Étant donné que le Canada a la capacité de cultiver des aliments beaucoup plus efficacement que d'autres pays, nous exportons de 50 à 85 p. 100 de notre production, mais nous importons également 50 p. 100 des aliments consommés au pays. Cela témoigne de la variété exigée par les consommateurs canadiens. C'est un travail continu. C'est quelque chose qui n'aura pas de fin, et l'ACIA évolue continuellement en vue d'aborder la question.
Pour ce qui est des produits biologiques, le gouvernement a adopté un logo certifié biologique qui est maintenant accepté par nos homologues américains et européens. Cet élément nous donne la réciprocité et l'exploitabilité pour nous permettre d'exporter nos produits, d'en importer et de reconnaître les normes des autres pays. Des gens essayeront toujours de tricher, et c'est parfois difficile de les attraper. Voilà pourquoi nous demandons l'aide des consommateurs, des gens directement concernés. Si les gens achètent un produit, l'examinent et se disent que ce n'est pas correct et qu'ils nous en font part, nous vérifierons auprès du fabricant qui a apposé la mention biologique sur le produit que c'est bien un produit biologique.
Il y a des normes. Il s'agit d'une industrie très solide. Le secteur des produits biologiques est en forte croissance; il y a une demande. Ce n'est pas seulement une question de prix. Des gens recherchent cette valeur dans leurs produits biologiques.
On entend souvent dire que ces produits sont plus riches en nutriments et sont de plus grande qualité. Je n'ai jamais rien vu qui le prouve, mais les gens sont persuadés qu'ils n'ingéreront pas de résidus d'insecticides ou de pesticides lorsque c'est un produit biologique. Nous venons de terminer des études sur les résidus présents sur les autres produits. Nos résultats nous indiquent que dans 99,6 p. 100 des cas, il n'y a pas de résidus. Bref, les aliments au Canada sont salubres; les producteurs biologiques poussent tout simplement la donne un peu plus loin.
[Français]
Le sénateur Maltais : Merci beaucoup, monsieur le ministre; cela va rassurer les consommateurs.
Un débat au Québec s'est déroulé plus tôt cette année, au printemps. Je ne sais pas si cela relève de votre ministère ou si c'est uniquement du ressort du gouvernement provincial; il s'agit du fameux débat sur les viandes halal et casher. Le gouvernement fédéral a-t-il autorité pour l'inspection de ces abattoirs et est-ce fait selon les normes édictées dans les lois de votre ministère?
[Traduction]
M. Ritz : Si c'est un établissement fédéral, nous le faisons. Il y en a deux ou trois dont c'est le cas, et nous les inspectons évidemment. La seule différence dans les viandes casher ou halal se situe dans les méthodes utilisées pour abattre l'animal. Pour ce qui est de la manutention, du découpage, de l'emballage et de l'étiquetage, c'est exactement la même chose. La seule différence se situe dans les processus rituels au moment de l'abattage.
Le sénateur Mercer : Merci de votre présence. Nous vous en sommes reconnaissants. L'esprit du projet de loi est pertinent. Je trouve inquiétant que vous continuiez à dire qu'il y a des gains d'efficacité de l'ordre de 56 millions de dollars au sein de l'ACIA. L'expression « gains d'efficacité » est un euphémisme pour dire beaucoup de choses, et certains d'entre nous comprennent en fait autre chose. Parlez-moi de ces gains d'efficacité. Ce n'est pas un montant négligeable. Il s'agit de gros gains d'efficacité à trouver au sein d'un ministère qui n'est pas très grand. Parlez-m'en.
M. Ritz : Monsieur le sénateur, je peux vous en parler de manière générale. Nous avons examiné le tout au cours de l'année dernière; nous avons cherché ce que l'industrie pourrait mieux faire et ce qui pourrait être mieux fait relativement aux chevauchements que nous constatons entre ce que nous et nos collègues provinciaux faisons en matière de salubrité alimentaire et de santé publique. Toutefois, je crois que Dr Evans serait mieux placé que moi pour vous en parler. Il s'y connaît.
Dr Brian Evans, chef de la salubrité des aliments et vétérinaire en chef du Canada, Agence canadienne d'inspection des aliments : Merci de votre question. C'est évident que l'ACIA ne fonctionne pas en vase clos. Par exemple, nous faisons partie d'un plus grand portefeuille, et nous et nos collègues d'Agriculture et Agroalimentaire Canada rendons des comptes au ministre.
Dans certains domaines, les gains d'efficacité incluent tous les points relatifs à l'examen de la façon dont nous administrons globalement les ressources au sein du portefeuille. À cet égard, Agriculture Canada a procédé par le passé à l'examen de la gestion du parc de véhicules partout au pays. Le Conseil du Trésor et d'autres ont reconnu que l'ACIA était un exemple au Canada sur le plan de la gestion des dépenses et du parc de véhicules. Je vais vous donner un bref exemple. Il y a un secteur qui regroupe ces deux éléments sous la même structure de gestion.
Nous avons l'habitude de collaborer au sein de l'ACIA. Par exemple, le gouvernement a lancé Services partagés Canada, soit une initiative globale concernant la technologie de gestion de l'information. L'ACIA collabore avec Agriculture Canada concernant les logiciels communs et les systèmes de gestion des personnes. Nous continuons d'étendre cette intégration dans nos services informatiques partout au pays en vue d'essayer d'éliminer les redondances dans les domaines clés à ce sujet.
Le soutien dans d'autres domaines, dont notre collaboration dans les services juridiques, et la gestion à l'échelle du portefeuille permettent un rendement élevé. Nous continuons d'évaluer les possibilités avec les autres partenaires gouvernementaux, outre Agriculture Canada, en ce qui concerne le partage des installations, y compris les installations de recherche et les laboratoires. Là où c'est possible, nous cherchons à consolider les domaines d'expertise commune et à maximiser l'ensemble des initiatives entreprises non seulement dans l'appareil fédéral, mais aussi dans le milieu universitaire au Canada et les campus qui jouent un rôle dans l'exécution de notre mandat en ce qui a trait à la santé animale et végétale, ainsi qu'à la salubrité des aliments.
En plus des initiatives relativement à Services partagés Canada, certains gains d'efficacité sont directement en lien avec la formation de notre personnel; nous cherchons des manières communes d'utiliser un programme de base pour les compétences au premier jour. Cela nous permet de nous assurer que ce que nous faisons améliore la capacité de nos inspecteurs d'acquérir des connaissances, une expertise et des aptitudes de calibre mondial, tout en collaborant avec ceux qui, sur la scène provinciale ou dans l'industrie, offrent des formations semblables en ce qui concerne les systèmes de gestion de la qualité.
Tout cela fait partie de notre philosophie, à savoir que la salubrité des aliments est un travail d'équipe. Il faut collaborer avec d'autres organismes au sein du portefeuille et d'autres ministères, y compris Santé Canada et l'ASPC. Une part considérable de nos investissements provient de nos examens. Comme le ministre l'a dit au cours du processus, nous essayons de regarder ce que nous faisons, ce que les autres font, et de trouver où il y a des synergies qui nous permettent de procéder de manière plus rentable et ce qui peut donner des technologies et des outils de qualité égale ou supérieure à notre personnel de première ligne.
Le sénateur Mercer : Il me semble que c'est tout de même une somme considérable, soit 56 millions, qui provient de la rationalisation des services entre ce qui est de la responsabilité de l'ACIA, de l'industrie et des provinces. Chaque fois, dans tout ce que nous faisons concernant le gouvernement sur la scène fédérale, nous parlons de la responsabilité des provinces.
Le seul message que les provinces retiennent, c'est qu'elles assumeront plus de coûts, même si je comprends le point de vue du ministre. Il a dit que nous récupérons seulement 17 cents par dollar, si je me souviens bien, pour mener des inspections dans les usines provinciales. Il vaut la peine de le mentionner. Selon moi, si nous faisons le travail, nous devrions récupérer le plein montant.
Ma question concerne plus précisément ce que vous avez dit au sujet de la rationalisation des installations. À mesure que les gouvernements se mettent à rationaliser leurs activités et essaient de mettre de l'ordre dans leurs finances, on commence à se rendre compte qu'il y a beaucoup de contrats de location de bâtiments. Pour rassembler les employés, on déménage donc dans une seule installation, comme vous l'avez dit.
Suivons-nous une telle démarche dans les installations qui appartiennent au gouvernement du Canada, que ce soit l'ACIA, Travaux publics et Services gouvernementaux, et cetera, ou transférons-nous les employés dans des installations louées? Autrement dit, sommes-nous en train d'abandonner les installations louées — que nous sommes légalement tenus de payer — d'un bout à l'autre du pays? Je suis au courant d'un certain nombre de cas pareils, mais cela s'est passé auprès d'autres ministères.
M. Ritz : Je dirais que c'est une combinaison de toutes ces mesures, monsieur le sénateur. Nous cherchons à accroître l'efficience. À ce titre, je vais utiliser l'exemple de l'épidémie de grippe aviaire qui a sévi dans les basses terres de la Colombie-Britannique en 2004.
Votre parti, qui était au pouvoir à l'époque, n'a pas profité du laboratoire provincial qui se trouvait juste là. Tout était envoyé à Winnipeg et à Ottawa, ce qui entraînait des pertes de temps. Pourtant, il y avait une installation de calibre mondial au cœur même de la région touchée par l'épidémie, mais personne n'y a eu recours. Voilà donc le genre de gains en efficience que nous avons cernés et que nous allons mettre en application, au lieu de dédoubler les efforts. Nous allons reconnaître les capacités des provinces et veiller à ce qu'elles soient à la hauteur de nos attentes. Désormais, nous ne manquerons pas d'y recourir.
Le sénateur Mercer : Allons-nous financer ces services?
M. Ritz : Oui, tout à fait; ce sera selon la formule du paiement par l'usager. Il est beaucoup moins coûteux d'utiliser une telle installation que d'en bâtir une semblable et de travailler en vase clos. On gagne aussi en efficience parce qu'il y a plus d'employés sur le terrain. Voilà le genre de trucs que nous avons découverts avec le temps et que nous pouvons utiliser. Comme M. Evans l'a souligné, la plupart des gains d'efficience que nous avons trouvés concernent l'administration de l'agence et n'ont rien à voir avec l'inspection de première ligne. C'est pourquoi les 151 millions de dollars en nouveaux fonds sont directement injectés dans les services de première ligne pour s'assurer que les employés ont la technologie et la capacité nécessaires pour faire leur travail de façon plus efficace.
Le sénateur Buth : C'est un plaisir de vous voir, monsieur le ministre, monsieur Da Pont et monsieur Evans. J'aimerais bien connaître les répercussions commerciales possibles du projet de loi. Vous avez mentionné la Food Safety Modernization Act des États-Unis. Pouvez-vous en faire le bilan ou nous expliquer comment vous avez pris en considération cette loi et si vous entrevoyez des questions qui pourraient nuire aux échanges commerciaux, surtout si l'on tient compte du fait que les États-Unis sont notre principal partenaire commercial et que nous voulons éviter à tout prix de créer des problèmes à la frontière?
M. Ritz : Tout cela fait partie de l'initiative Par-delà la frontière que le président et le premier ministre ont conclue. Nous favorisons les échanges commerciaux. Pendant des années, nous avons créé notre propre capacité scientifique, tout en reconnaissant celle qui existe dans des pays comme les États-Unis; il y a des similitudes. Au lieu de repartir à zéro, nous reconnaissons leurs données scientifiques, auxquelles nous ajoutons probablement deux ou trois autres analyses, voilà tout. C'est beaucoup plus efficace, tant sur le plan des importations que des exportations. Nous collaborons sur bien d'autres fronts dans le but de favoriser les échanges commerciaux.
Comme vous le savez bien, la grande majorité des produits agricoles ont une date de péremption suivant la mention « meilleur avant ». Tout retard à la frontière peut parfois raccourcir le délai qui reste avant la date de péremption. Cela n'a rien à voir avec la salubrité des aliments; il s'agit surtout d'une question liée à la qualité et la régularité de l'offre, en fonction de la demande des consommateurs. Tous les aliments qu'on trouve dans nos épiceries sont frais et propres, et tous ceux qui sont retenus à la frontière ne sont pas à la hauteur de cette norme et finissent parfois par être jetés.
Nous cherchons à travailler au rythme du commerce grâce, entre autres, à l'utilisation de certificats électroniques, laissant de côté les certificats papier qui sont en usage depuis des années. D'ailleurs, l'ACIA est l'un des derniers organismes à se servir encore du télécopieur, alors que tous les autres utilisent le courriel. Nous essayons d'uniformiser bon nombre des certificats requis pour veiller à ce qu'ils soient semblables et éviter ainsi de réinventer la roue chaque fois qu'un nouveau chargement de produits agricoles nous provient d'une autre région des États-Unis ou du Mexique. Nous préconisons l'harmonisation : nous nous assurons d'avoir la capacité pour effectuer des analyses un peu plus poussées, si cela s'avère nécessaire; sinon, nous acceptons leur régime d'analyse et autorisons l'entrée de leurs produits.
Le sénateur Buth : Quel est le processus actuel pour ce qui est de la loi proposée concernant la modernisation de la salubrité des aliments, maintenant que les États-Unis s'apprêtent à élaborer leur réglementation? Où en est le processus de consultation entre les deux pays?
M. Ritz : Comme M. Da Pont l'a dit, les États-Unis viennent à peine de commencer les consultations auprès de l'industrie. Le président a fait part de l'orientation à prendre et des paramètres à suivre. Nous surveillons la situation.
Comme vous le savez bien, de nombreuses multinationales mènent des activités des deux côtés de la frontière et, bien entendu, les sociétés choisiront le chemin de la moindre résistance. Nous voulons que notre régime soit tout aussi rigoureux que celui des États-Unis, mais pas plus. Nous voulons maintenir les normes élevées et la grande qualité pour lesquelles nous sommes reconnus. Nous n'allons pas abaisser nos normes. Nous cherchons à établir le juste milieu entre les deux.
Le sénateur Buth : Il s'agit d'un bon équilibre entre la nécessité de protéger la salubrité des aliments pour les Canadiens et celle d'assurer notre capacité d'exportation.
M. Ritz : Absolument. Nous exportons 50 à 85 p. 100 de notre production nationale et nous importons 50 p. 100 de notre consommation nationale. La charge de travail est en évolution constante.
Le sénateur Mahovlich : Combien de gens sont morts d'un empoisonnement alimentaire au Canada au cours des 20 dernières années?
M. Ritz : À ma connaissance, l'Agence de la santé publique du Canada devrait connaître ces chiffres. Des quelque 11 millions de cas de maladies d'origine alimentaire qui se produisent au Canada chaque année, environ 99,9 p. 100 se passent dans la cuisine. Notre agence ou l'Agence de la santé publique n'y sont rien.
Le sénateur Mahovlich : C'est lié à la façon dont on prend soin de soi.
M. Ritz : Oui. Par exemple, on laisse la volaille sur le comptoir en prévision d'un barbecue plus tard en journée; toutefois, on rentre à la maison deux heures plus tard, et le soleil brille par la fenêtre; on a là un problème. Un autre exemple, c'est quand on mange un hamburger trop saignant, à défaut d'avoir cuit la viande assez longtemps. Pressé par le temps, on met rapidement la viande sur le pain, sans remarquer qu'elle n'est pas bien cuite; et voilà que les ennuis commencent.
Le sénateur Mahovlich : Certaines personnes aiment leur viande saignante.
M. Ritz : Tout à fait, mais ce n'est pas une bonne idée s'il s'agit de viande hachée; c'est correct pour le steak.
Le sénateur Mahovlich : Les Canadiens voyagent dans le monde entier. Quand nous sommes allés à Moscou, on nous a prévenus de faire attention à la nourriture. Certains des mets étaient bizarres. Nous ne savions pas de quoi il s'agissait; cela aurait pu être de la viande de chevreuil ou quelque chose d'autre. À notre retour, beaucoup de personnes sont tombées malades, mais c'était peut-être à cause de l'eau. Les Russes sont probablement immunisés contre cela parce qu'ils y sont habitués, mais pas nous. À notre arrivée, nous avons dû subir un examen de selles pour nous assurer que tout était correct.
Où en est le Canada? Les gens qui viennent ici, par exemple de la Russie, ont-ils le même problème? Sommes-nous inquiets de notre eau?
M. Ritz : Je ne saurais dire. Évidemment, en été, des avis d'ébullition d'eau sont émis dans des collectivités partout au pays, selon la source de l'eau et la qualité des eaux pluviales dans certains des puits, et cetera.
Dans l'ensemble, chaque fois que le Canada a fait l'objet d'une évaluation par des tiers provenant d'autres pays, de l'OCDE ou de différents groupes, il s'est toujours retrouvé presque au début de la liste, voire au premier rang.
Le sénateur Mahovlich : Le Canada occupe-t-il la tête du peloton?
M. Ritz : Oui, tout à fait.
Le sénateur Mahovlich : Le mot « consolidation » évoque pour moi la fusion de mines et l'idée de gagner en force. La capacité canadienne en matière d'inspection des aliments deviendra-t-elle plus forte? Les gens sont préoccupés par les pertes d'emplois. Quand on fusionne des sociétés minières, beaucoup de mineurs finissent par perdre leur emploi. Bien des gens craignent une telle éventualité. Devrions-nous nous en inquiéter?
M. Ritz : Non, pas du tout. Comme M. Evans l'a dit, dans le cadre de nos efforts visant à trouver des gains d'efficience, il faut déplacer les gens vers d'autres postes et les aider à s'y adapter. Les gains d'efficience de 56 millions de dollars que nous proposons se feront surtout par attrition, à mesure que les employés prendront leur retraite ou changeront de travail. Nous modernisons sans cesse nos services d'inspection et nous augmentons le nombre d'effectifs qui y sont attribués. Les gains d'efficience que nous repérons sont surtout fondés sur la capacité des inspecteurs de faire le travail plus efficacement, et ce, sur le terrain.
En même temps, dans le cadre de notre transition de l'économie de papier à l'économie numérique, on a moins besoin de consacrer 57 personnes à la saisie de données. Ce domaine présente des gains d'efficience. Les capacités d'emploi changeront toujours au sein du gouvernement, et pas seulement à l'ACIA. Ce qui compte pour nous, c'est de toujours mettre l'accent sur les services de première ligne et le travail qui doit être accompli sur le plan de l'approvisionnement alimentaire.
Le sénateur Mahovlich : Le changement est inévitable.
M. Ritz : C'est probablement le mot d'ordre.
[Français]
Le sénateur Rivard : Monsieur le ministre, à l'exception du projet de loi budgétaire, celui qui touche le plus les citoyens est le projet de loi S-11 sur la salubrité des aliments. On peut penser que beaucoup de gens sont à l'écoute de nos délibérations, mais pour le bénéfice de ceux qui ne seraient pas au courant, pouvez-vous nous dire où commence le travail de l'inspecteur fédéral et où commence celui de l'inspecteur provincial?
[Traduction]
M. Ritz : Cela dépend de la classification de l'installation dans laquelle l'inspecteur travaille. Dans le contexte du commerce interprovincial, il faut une installation fédérale et une inspection fédérale. Si on cherche à vendre le produit au marché local, alors une inspection provinciale suffira probablement. C'est le premier indice.
Au bout du compte, il s'agit d'une compétence partagée entre l'ACIA et la santé publique aux niveaux fédéral et provincial. Chaque palier se concentre sur différents aspects de la salubrité des aliments. Au provincial, la santé publique vise davantage les restaurants, les cuisines et les préparations. Au fédéral, nous intervenons surtout dans les dossiers liés à la transformation, à la distribution, à la capacité en matière de traçabilité, et cetera, si jamais les choses prennent une mauvaise tournure.
[français]
Le sénateur Rivard : Dans le projet de loi, on met sur pied un bureau d'appel des plaintes. Cela fait suite à la demande des fermiers et des transformateurs. Est-ce que vous croyez que ce bureau d'appel pourra traiter suffisamment rapidement les plaintes sans que le travail des inspecteurs soit arrêté ou ralenti? Pourrez-vous vous assurer que les plaintes seront traitées rapidement?
[Traduction]
M. Ritz : C'est la directive générale que nous avons donnée aux gens du centre d'appels. Grâce à une liste que nous avons mise à leur disposition, ils savent qui a appelé et à quel sujet. La liste indique aussi de quel ressort relève la question — du fédéral ou du provincial. Ils peuvent ensuite aiguiller la personne dans la bonne direction ou poursuivre l'appel.
Nous espérons que ce sera un des organismes du ministère qui n'auront pas beaucoup de cas à régler, mais il arrive parfois que les consommateurs relèvent quelque chose qui cloche. C'est alors qu'ils pourront appeler le centre et dire : « J'ai un problème avec une boîte de haricots de telle ou telle marque. Y a-t-il quelque chose que vous pouvez faire à ce sujet? ». Nous ne manquerons pas de faire un suivi. Ces questions peuvent être réglées au cas par cas.
À l'heure actuelle, outre le courrier ordinaire, il y a d'autres moyens beaucoup plus lents, et il est parfois impossible de suivre une piste qui est froide. Quand on travaille au rythme du commerce et avec des sites Web, et cetera, on peut vérifier ces renseignements d'heure en heure et y donner suite bien plus rapidement.
[Français]
Le sénateur Rivard : Lorsqu'il s'agit d'une plainte de consommateur, ce bureau d'appel aura à trancher, mais si c'est un transformateur ou un fermier qui déclare son produit insalubre, ce transformateur pourra-t-il s'adresser au bureau d'appel?
[Traduction]
M. Ritz : Il le peut, mais la plupart des transformateurs ont probablement des employés qui travaillent chaque jour sur le terrain, dans l'usine; ils pourraient donc en discuter avec la personne qui est affectée à l'usine. Comme autre option, ils peuvent utiliser le centre d'appels s'ils ne font pas confiance à la personne avec qui ils traitent à ce moment-là. Oui, c'est tout à fait possible.
Le sénateur Seth : Merci, monsieur le ministre. En vous écoutant, j'ai appris certaines choses sur les aliments que nous mangeons tous les jours.
Je ne suis pas membre du comité, mais ces derniers temps, j'écoute les nouvelles américaines à la télévision et j'ai décelé une préoccupation à l'égard de la salubrité des produits alimentaires canadiens, auxquels on attribue l'éclosion de la listériose, la maladie de la vache folle, et cetera. J'en ai entendu de toutes les couleurs.
Pouvez-vous me renseigner sur le projet de loi S-11? Comment aidera-t-il à réduire cette mauvaise publicité et à renforcer notre partenariat commercial avec, entre autres, les États-Unis?
M. Ritz : Si je savais comment réduire la mauvaise publicité, je me lancerais probablement dans une autre carrière.
Les gens aiment les nouvelles négatives; personne n'aime les nouvelles positives. Pour chaque cas de listériose ou de E. coli, il y a un million de tonnes de produits qui ne posent aucun problème. Quand je dis qu'on importe 50 p. 100 de notre consommation nationale, cela englobe des millions de tonnes d'aliments. En ce qui concerne l'exportation, on parle d'un nombre bien plus grand de produits bruts et de quelques produits transformés.
Le Canada affiche une excellente moyenne sur le plan de ses résultats. Peut-on tout prévenir? Non. On ne peut empêcher la nature d'intervenir. Parfois, on trouve un peu de saleté sur les laitues, ce qui crée des problèmes plus loin dans la chaîne. On n'obtiendra jamais une note de 100 p. 100; il y a trop de variables. Dans la mesure du possible, nous nous efforçons d'être proactifs plutôt que réactifs.
Avant, l'ACIA mettait l'accent sur l'intervention après coup, c'est-à-dire les mesures à prendre pour corriger la situation. Grâce au projet de loi S-11, ainsi qu'à d'autres initiatives et fonds budgétaires et à l'accroissement du nombre d'inspecteurs, nous prenons les devants et nous nous assurons d'avoir la capacité nécessaire pour chercher et repérer des cas avant qu'ils ne posent problème.
Le projet de loi S-11 nous permet maintenant de retenir des produits importés avant qu'ils soient acheminés aux épiceries. Avant, nous devions attendre jusqu'à ce qu'ils soient rendus à l'épicerie avant de procéder à un rappel. Nous pouvons maintenant le faire pendant qu'ils sont encore dans les conteneurs, à bord du bateau, sans même autoriser leur entrée. C'est une approche beaucoup plus proactive, et les Canadiens peuvent avoir l'assurance que nous faisons tout en notre pouvoir pour garantir que tous les aliments qu'ils achètent et apportent chez eux sont aussi salubres que possible.
Le sénateur Seth : Merci. Ce que je voulais faire valoir, c'est que devant ce genre de publicité, les chaînes de télévision canadiennes devraient rassurer la population, parce qu'on devient vraiment nerveux lorsqu'on entend un tel discours. C'est là où je voulais en venir.
M. Ritz : Je n'en disconviens pas. M. Evans est probablement notre plus grand expert en la matière, mais sachez que l'ACIA compte aussi des employés chargés d'informer les gens de la situation réelle.
Durant l'éclosion de la listériose, nous avons organisé une conférence de presse tous les jours afin d'expliquer ce qui se passait. Nous avons essayé d'être aussi ouverts, responsables et transparents que possible. Les médias se concentraient sur un certain point et oubliaient de parler des mesures positives. Ce n'est pas facile. C'est là que les sites Web entrent en jeu. Les consommateurs avertis vérifient des informations en ligne. À partir de notre site Web, ils peuvent apprendre ce qui se passe réellement.
Le président : Mesdames et messieurs les sénateurs, avant que nous passions au deuxième tour, le sénateur Robichaud aimerait poser une question supplémentaire.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Des témoins sont venus nous parler des produits frais qui étaient importés. On disait que lorsque les résultats des tests qui étaient faits pour les résidus d'insecticide ou de pesticide nous arrivaient, s'il s'agissait de fraises ou d'autres produits frais, le tout avait déjà été vendu et aucune action ne pouvait donc être prise pour ces produits.
Est-ce qu'on va réussir à faire en sorte que le système soit plus efficace et avoir des moyens pour trouver ces résidus dans les plus brefs délais afin de les retirer des étagères? On disait que cela arrivait souvent parce que certains pays ne sont peut-être pas aussi stricts que nous le sommes dans l'application des normes pour les insecticides et les pesticides.
[Traduction]
M. Ritz : Nous avons augmenté le nombre d'analyses. Nous ciblons en particulier les produits qui proviennent de pays dont le système de salubrité des aliments n'est pas, selon nous, aussi robuste que le nôtre. C'est pourquoi je dis que nous sommes plus proactifs que réactifs.
Nous avons récemment terminé un certain nombre d'analyses. Comme vous l'avez souligné à juste titre, ces analyses sont effectuées après coup. Cependant, à partir de là, nous pouvons sans cesse vérifier les faits pour être sûrs que nos analyses de première ligne sont exactes. Nous faisons des analyses beaucoup plus approfondies après les faits pour nous assurer qu'il y a moins de résidus et que c'est conforme à notre seuil de tolérance. D'ailleurs, nous avons observé un taux de conformité de 99,6 p. 100. C'est tout à fait étonnant de voir à quel point les produits sont de bonne qualité.
Nous cherchons également à travailler avec nos collègues de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, qui relève de Santé Canada, afin de veiller à ce que nos agriculteurs aient accès aux plus récents produits qui ont une empreinte écologique plus légère, qui présentent moins de danger pour les consommateurs, et cetera. Nous évaluons constamment ce genre de questions.
L'ACIA s'occupe de l'évaluation des engrais — c'est-à-dire, des intrants comme les semences et les engrais — pour s'assurer que les agriculteurs cultivent la terre avec ce qu'il y a de mieux. Nous n'analysons pas tant l'efficacité ou la valeur des cultures que l'effet résiduel ou néfaste qui pourrait en découler. Nous nous occupons donc des deux aspects. Nous effectuons une analyse au début pour nous assurer que le produit est salubre, mais nous réalisons ensuite une analyse plus approfondie pour avoir l'assurance que notre analyse de première ligne est toujours exacte.
Dr Evans : Comme le ministre l'a laissé entendre, le projet de loi vise, en grande partie, à améliorer notre capacité de prévention et de prévision. Je crois que vous avez soulevé un bon point en ce qui concerne l'application des analyses aux produits importés.
Le projet de loi prévoit, entre autres, la délivrance de permis aux importateurs, ce qui est un des pouvoirs envisagés dans les dispositions habilitantes. En vertu de ces dispositions, l'importateur est tenu de démontrer qu'il dispose d'un programme préventif de salubrité des aliments dans sa chaîne d'approvisionnement.
En ce qui concerne l'intervention et la prévention, lorsqu'on constate une infraction — et vous avez parlé de cas où un produit est retiré du marché parce qu'il est périssable —, on connaît l'importateur et la source des produits; on peut donc cibler les importations ultérieures, exiger que les produits soient tous retenus et les analyser au besoin, afin de démontrer que le problème qui aurait pu être détecté a été corrigé dès le début, à la source.
Par conséquent, nous pouvons accroître la prévention en adaptant la fréquence de nos inspections, y compris dans le contexte des importations, et en prenant les mesures nécessaires après coup.
Le Canada fait également partie du réseau international appelé INFOSAN, par l'entremise de l'Organisation mondiale de la santé. Lorsqu'on détecte un problème, cela ne concerne pas uniquement les produits entrant au Canada; en effet, il se peut que nous ne soyons pas le seul pays à recevoir des fruits et légumes frais à partir de cette source. Si d'autres pays découvrent un problème, ou si le pays d'origine le découvre, nous en sommes immédiatement avisés. Nous pouvons prendre des mesures préventives, puis sachant qu'un produit a été rappelé par un autre pays ou par le pays d'origine, nous pouvons continuer de retracer et de surveiller le produit d'une façon différente à partir de là.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Vous dites que vous pouvez conserver les produits périssables frais. Cependant, par le temps que les résultats des tests que vous effectuez n'arrivent, les produits ne valent plus rien, n'est-ce pas? Est-ce que vous ne vous retrouvez pas face à un dilemme?
[Traduction]
Dr Evans : Non. En réalité, la détection de problèmes après coup nous permet d'améliorer nos activités préventives. Ainsi, nous pouvons retenir et analyser les produits, si nous le souhaitons. Toutefois, n'oublions pas que nous vivons dans un monde où les méthodes d'essai évoluent sans cesse. Nous en sommes rendus au point où nous pouvons faire des analyses sans tarder, alors qu'avant, il fallait un délai de 7 à 10 jours. Grâce à certaines des récentes technologies, analyses et technologies d'essai à plateformes multiples, nous pouvons maintenant mener des analyses en l'espace de 24 à 48 heures, sans nuire au délai de péremption du produit.
Tout ce que j'essaie de dire, sénateur, c'est que le projet de loi nous permet de mettre beaucoup plus d'accent sur la prévision et la prévention grâce à l'obtention de nouveaux renseignements. Ainsi, les autorités peuvent empêcher l'entrée d'autres produits jusqu'à ce que le pays ou l'importateur puisse démontrer que des mesures préventives appropriées ont été prises dans le cadre de leur système pour s'assurer que les Canadiens ne seront pas exposés à des effets néfastes dans l'avenir.
Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé de l'importateur, puis du pays. Qu'est-ce qui vient en premier? Par où commence-t-on?
M. Ritz : Nous savons ce qui entre au pays, sénateur, grâce aux certificats d'importation. Nous savons exactement quel importateur a commandé quel produit de tel ou tel pays, avant même que les produits accostent sur nos rives. Si nous recevons une alerte, disons, des États-Unis parce qu'ils ont trouvé des résidus de pesticides dans une boîte de fraises venant d'un pays X, nous savons d'emblée que nous recevrons un conteneur dans deux ou trois jours et que nous aurons à analyser le tout. Nous en sommes donc informés.
Le sénateur Robichaud : Je parlais plutôt de la responsabilité de l'importateur par rapport à celle du pays et de la question de savoir par où on commence. Merci.
Le sénateur Plett : Je veux poursuivre un peu sur la même lancée et parler des importations, si vous me le permettez, monsieur le ministre.
L'Alliance de la fonction publique du Canada, qui représente les inspecteurs de l'ACIA, a beaucoup critiqué le régime d'importation. Lors de leur comparution à la Chambre, les représentants de l'alliance ont demandé que des inspecteurs des aliments soient placés à chaque poste frontalier parce que, selon leur dire, nous ne pouvons pas faire confiance aux aliments en provenance des États-Unis ou d'ailleurs. La viande est évidemment un aliment à risque plus élevé que certains autres produits, et je sais qu'à votre instigation, monsieur le ministre, l'ACIA a cessé d'émettre des préavis d'inspection concernant les importations de viande.
J'aimerais que vous nous parliez un peu des mesures qui ont été prises pour empêcher les importations d'aliments insalubres dans notre pays. Bon nombre d'entre nous sont préoccupés par ce qui entre au pays, et je sais que vous avez pris quelques mesures efficaces. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
M. Ritz : Comme je l'ai dit en réponse à la dernière question, nous savons d'avance ce qui va entrer au pays et à quel moment grâce aux certificats qui sont envoyés aux importateurs.
Nous avons cessé d'informer d'avance les importateurs de notre intention d'inspecter leurs produits. Avant, nous leur disions : « Nous savons que vous allez faire entrer un chargement de viande; nous allons l'inspecter mardi. » Souvent, le chargement n'arrivait pas le mardi, et les importateurs trouvaient un autre moyen. Maintenant, ils n'ont aucune idée de ce que nous allons analyser ni à quel moment. Nous faisons ce que nous appelons des « opérations éclair à la frontière »; je pense que nous en avons fait environ 480 l'année dernière. C'est à l'insu des importateurs. Ils sont soumis à une vérification constante. Avant, c'était comme si on leur donnait d'avance les questions d'un examen; on ne fait plus cela. On les prend au dépourvu. Les résultats ont été très positifs, comme en témoigne le taux de réussite élevé. Nos importateurs sont de calibre mondial. Ils savent qu'il y a un prix à payer s'ils font entrer un produit insalubre et qu'ils vont subir de graves dommages.
Par ailleurs, nous avons conclu une entente avec l'Agence des services frontaliers du Canada. Grâce au programme des certificats, cette dernière sait quels produits entreront au pays parce que nous l'informons de notre intention d'inspecter certains aliments. À part cela, l'Agence des services frontaliers du Canada représente notre première ligne de défense grâce aux accords réciproques que nous avons conclus avec elle. Cela fonctionne très bien. Nous continuerons d'harmoniser le volet des services frontaliers et celui de l'ACIA par l'entremise d'un plus grand nombre d'appareils électroniques et de technologies, pour que nous puissions accomplir le travail plus efficacement que dans le passé. À cette fin, nous rationaliserons la façon dont l'information est communiquée de part et d'autre afin que les deux agences ne fonctionnent pas en vase clos.
Nous continuons de bâtir un système solide en matière de services frontaliers. On entend par là non seulement les frontières terrestres, mais aussi tout ce qui provient par avion ou par bateau. De nos jours, beaucoup de produits sont envoyés par fret aérien, et ils sont prêts à être distribués. Quand le risque est plus grand, nous renforçons la surveillance de ces produits. Nous mettons beaucoup plus d'accent sur la viande prête à manger que tout autre produit importé qui doit être cuit ou qui doit subir une transformation secondaire.
Le sénateur Plett : Lorsque j'ai déposé le projet de loi au Sénat il y a quelques semaines, nous avons participé à une conférence de presse plus tard en journée et vous avez évoqué la question de l'altération des aliments. Je suis impressionné de voir à quel point le projet de loi profitera directement aux consommateurs et parviendra à les rassurer. Le sénateur Seth a d'ailleurs fait allusion à la crainte qu'éprouve le public.
À la conférence de presse, j'ai été assez surpris de vous entendre parler du manque de lois sur l'altération des aliments. Quelqu'un peut téléphoner à Safeway un jour pour dire : « On a inséré une aiguille à l'intérieur d'une de vos dindes, mais on ne vous dira pas dans laquelle ni à quelle épicerie ». Il ne semble pas y avoir de lois à cet égard.
J'aimerais que vous rassuriez les sénateurs ici présents et, par le fait même, les téléspectateurs en expliquant les mesures prévues dans le projet de loi pour contrer l'altération des aliments destinée à semer la peur, même s'il n'y a pas d'aiguille. Quelles amendes sont déjà en place? Vous avez évoqué cette question dans vos observations préliminaires. Pourriez-vous nous parler des amendes et des pénalités prévues lorsqu'une personne altère les aliments dans le but de faire peur aux gens?
M. Ritz : Volontiers. Nous avons instauré des amendes pour créer un effet dissuasif, sénateur Plett. Toutefois, lorsqu'une personne n'a rien à perdre, elle n'a pas peur de se faire prendre et de se faire imposer une amende; cela n'a aucun effet.
Par contre, nous avons augmenté le montant des amendes qu'un juge peut imposer; le montant maximal est passé de 250 000 $ à 5 millions de dollars ou plus, selon que le caractère intentionnel de l'acte et la gravité de la situation. Presque chaque année, durant la période de l'Action de grâce, on reçoit un appel de la part de quelqu'un qui prétend avoir mis du cyanure ou avoir inséré des aiguilles dans une dinde. C'est tout à fait ridicule. Cela crée un problème non seulement pour les épiceries concernées, mais aussi pour les producteurs de dinde, si ces derniers sont ciblés. C'est également lourd de conséquences pour l'économie. Il faut du temps pour se réapproprier cette part du marché et pour dissiper l'inquiétude des gens.
Nous avons donc augmenté les amendes, les peines d'emprisonnement, et cetera, afin de dissuader les gens de commettre de tels actes. De plus, nous assurerons une communication très ouverte avec le public pour faire en sorte que les auteurs de ces actes comprennent ce qu'ils risquent d'encourir.
Le problème ne disparaîtra probablement jamais. Tout ce qu'on peut faire, c'est rassurer les Canadiens que nous tenons réellement à prévenir ce genre d'incidents. C'est comme si nous nous battions contre des fantômes, mais au bout du compte, nous devons donner l'assurance aux consommateurs canadiens que nous faisons tout en notre pouvoir pour protéger leurs aliments contre ce type d'attaques.
Le sénateur Plett : Merci pour votre bon travail, et merci aux fonctionnaires.
Le sénateur Peterson : L'ACIA m'a informé qu'aucun programme lié à la salubrité des aliments n'a fait l'objet de compressions budgétaires. Pourtant, les gens des opérations ont dit : « On ne sait pas comment vous pouvez prendre 10 p. 100 du budget et ne pas vous occuper des services de première ligne ».
L'ACIA affirme qu'il y a 3 500 employés de première ligne, dont 500 employés nommés pour une période déterminée qui pourraient être renvoyés sans préavis. Pouvez-vous confirmer aujourd'hui qu'on renouvellera les contrats des 500 employés nommés pour une période déterminée?
M. Ritz : Je vais laisser M. Da Pont parler de l'administration, mais sachez que notre gouvernement veut s'assurer que tout le monde dispose des outils nécessaires pour faire leur travail de façon efficace et efficiente, et nous continuerons d'embaucher des employés de première ligne.
George Da Pont, président, Agence canadienne de l'inspection des aliments : Nous avons les ressources nécessaires dans notre budget pour embaucher un peu plus de 3 500 inspecteurs. À tout moment, certains seront nommés pour une période indéterminée et d'autres, pour une période déterminée. Quoi qu'il en soit, notre budget de base permet l'embauche d'un peu plus de 3 500 employés.
Le sénateur Peterson : Voyons voir si je comprends bien. Le budget est réduit de 56 millions de dollars. Monsieur le ministre, vous avez dit que vous remettrez 51 millions de dollars dans le budget.
M. Ritz : J'ai dit 151 millions de dollars.
Le sénateur Peterson : D'accord; donc, 151 millions de dollars seront remis aux travailleurs de première ligne. N'aurait-il pas été préférable d'annoncer qu'il n'y aura aucune réduction budgétaire pour l'ACIA, un point c'est tout?
M. Ritz : Sénateur, comme vous l'avez souligné plus tôt, les gouvernements devraient toujours être à la recherche d'économies au nom des contribuables, et c'est ce que nous avons fait. Il n'y a pas de compressions; ce sont des économies continues. Nous avons trouvé des économies du côté administratif et, comme l'a indiqué le Dr Evans, beaucoup d'entre elles résultent de l'harmonisation de certains services avec Agriculture Canada et d'autres ministères, de façon à éviter les chevauchements.
Les modifications relatives aux inspections provinciales dont nous avons parlé par rapport aux trois provinces représentent à elles seules deux millions de dollars. Donc, il n'est pas difficile de réaliser ces économies. Parfois, il est difficile de les vendre, sur le plan politique. Lorsque les gens parlent de compression budgétaire plutôt que d'économies, cela rend les choses plus difficiles. Et lorsque l'on parle seulement des économies et non des 151 millions de dollars qui sont réinvestis, cela rend les choses encore plus difficiles. Cependant, en fin de compte, alors que nous avons trouvé des façons d'économiser 56 millions de dollars sur les trois prochaines années, pendant la même période nous investissons 151 millions de dollars pour renforcer le système de salubrité des aliments.
Le sénateur Peterson : Monsieur le ministre, pour notre bien à tous, j'espère certainement que tout cela est exact.
Enfin, de quelle façon les gens de Santé Canada collaborent-ils avec l'ACIA sur ces questions? Interviennent-ils après les faits, lorsqu'il y a eu un problème important? Travaillent-ils avec vous au préalable?
M. Ritz : Santé Canada collabore beaucoup avec l'ACIA au préalable, sénateur. Certaines des modifications prévues dans ce projet de loi sur les aliments permettront à Santé Canada de disposer des pouvoirs nécessaires de collaborer avec nous en ce qui a trait au rappel, ce qu'il n'avait pas auparavant. Il y a là des dispositions qui renforceront aussi certaines de leurs mesures en matière de surveillance, ce qui concerne davantage les aliments enrichis que la salubrité des aliments.
Le président : Comme l'a indiqué le président au début de la réunion, nous disposons d'une heure pour discuter avec le ministre. Monsieur le ministre, comme vous avez pu le constater d'après les questions des sénateurs, la salubrité alimentaire est une très grande priorité pour les Canadiens, et nous aurons une autre série de questions pour le prochain groupe d'experts. Au nom des sénateurs ici présents, nous remercions le ministre Ritz d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui et de nous avoir fait part du point de vue de son ministère et du gouvernement sur la salubrité des aliments et la traçabilité.
M. Ritz : Merci, monsieur le président.
Le président : Honorables sénateurs, nous allons maintenant entendre le deuxième groupe d'experts, qui va nous parler du projet de loi S-11. On m'informe que nous accueillons les témoins suivants, et je vois que nous accueillons le Dr Brian Evans, qui est le chef de la salubrité des aliments et le vétérinaire en chef du Canada à l'Agence canadienne d'inspection des aliments.
[Français]
Nous recevons également M. Neil Bouwer, vice-président, Politiques et programmes, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.
[Traduction]
Nous accueillons aussi Mme Colleen Barnes, qui est directrice exécutive de la Direction des politiques nationales au sein de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.
Mesdames et messieurs les témoins, merci d'avoir accepté notre invitation à comparaître afin de nous éclairer et de nous donner votre point de vue sur la salubrité des aliments, sur le projet de loi S-11. On m'informe que le Dr Brian Evans présentera l'exposé; ensuite, nous passerons aux questions.
Dr Evans : Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs les sénateurs, permettez-moi de dire d'entrée de jeu qu'étant donné que je travaille au sein de l'Agence canadienne d'inspection des aliments depuis sa création en 1997, je considère que le projet de loi est à la fois une très importante mesure législative qui nous permettra de bien servir les Canadiens et qu'il vient fortement appuyer la vision qu'avait le gouvernement lorsque l'agence a été créée pour s'assurer que nous sommes en mesure de réagir à des situations dangereuses en constante évolution, au Canada et à l'étranger.
Aujourd'hui, je crois que notre système d'assurance de la salubrité des aliments figure parmi les meilleurs au monde. Cependant, la salubrité des aliments ne devrait pas être tenue pour acquise, que ce soit par l'agence canadienne d'inspection des aliments ou par quiconque. De toute évidence, il est nécessaire de consolider et de moderniser davantage les lois canadiennes qui réglementent la salubrité des aliments.
Comme vous l'aurez remarqué, le projet de loi a trois principaux objectifs. Le premier est d'améliorer la surveillance de la salubrité des aliments importés et les aliments produits au Canada afin de mieux protéger les familles canadiennes. Le deuxième objectif est de simplifier et de renforcer les pouvoirs législatifs. Quant au troisième, il s'agit d'accroître les débouchés sur les marchés internationaux pour l'industrie alimentaire canadienne et pour les Canadiens qui dépendent de ce secteur pour assurer leur subsistance.
Le premier de ces objectifs est manifestement le plus important pour l'ACIA. Il vise à nous aider à maximiser les possibilités de prévention tout en maintenant la capacité d'intervention nécessaire afin de surmonter les dangers et les problèmes lorsqu'ils surviennent. La salubrité des aliments est une priorité pour la population canadienne, nous croyons qu'elle l'est aussi pour le gouvernement du Canada et elle l'est sans doute pour l'ACIA. Toutefois, les deux autres objectifs sont aussi importants et profiteront au Canada ainsi qu'à notre industrie alimentaire.
Je suis certain que vous connaissez déjà bien la mesure législative proposée, mais permettez-moi de prendre quelques minutes pour en décrire les principaux avantages.
Premièrement, le projet de loi protégera les consommateurs et l'industrie contre l'altération des aliments, les pratiques trompeuses et les mystifications. Il renferme une nouvelle disposition qui permettra de combler une lacune des pouvoirs actuels. De plus, il prévoit une majoration des sanctions des amendes afin de décourager les menaces délibérées ou inconsidérées pour la santé et la sécurité des Canadiens, conformément aux pratiques exemplaires internationales.
Deuxièmement, il renforcera notre capacité de retracer les éléments ainsi que d'en effectuer le suivi et le rappel. Pour lutter contre les maladies d'origine alimentaire et pour composer avec la mondialisation de l'approvisionnement alimentaire, il est essentiel de pouvoir retracer les éléments de la ferme à l'assiette, ou de leur source à l'extérieur du Canada au marché. Les lois actuelles n'accordent pas au gouvernement le pouvoir d'exiger que les fabricants et les importateurs aient des systèmes de traçabilité et de suivi. Le projet de loi établira les pouvoirs nécessaires pour l'élaboration de règlements liés à la traçabilité, au suivi et au rappel d'aliments, et permettra d'avoir les outils nécessaires pour prendre des mesures à l'égard des produits qui présentent des risques, au besoin. Cela inclura l'interdiction de vendre des produits qui pourraient compromettre la santé des Canadiens ou des produits qui ont fait l'objet d'un rappel.
Troisièmement, le projet de loi resserrera les contrôles à l'importation pour que l'on puisse encore mieux s'assurer que les aliments importés sont salubres. Les aliments importés doivent satisfaire aux mêmes normes que les aliments produits au Canada, mais il est plus difficile de contrôler les importations parce que l'on dispose de moins de renseignements à leur sujet et que l'on a moins de contrôle sur les produits et les processus de fabrication de l'étranger. La nouvelle mesure législative accordera le pouvoir de délivrer des permis aux importateurs, d'interdire l'importation de certains aliments lorsqu'un risque est détecté et d'intercepter les aliments importés insalubres à la frontière de façon à ce qu'ils ne se retrouvent pas sur le marché canadien. Elle permettra également à l'ACIA de suspendre ou de révoquer le permis d'un importateur au lieu d'intenter des poursuites en cas de non-conformité, ce qui est la procédure actuelle. En ce qui a trait à la salubrité des aliments, il est toujours préférable d'avoir des mesures préventives plutôt que de devoir intervenir après coup.
Quatrièmement, le projet de loi harmonisera les pouvoirs d'inspection et d'application de la loi pour tous les produits alimentaires. Les lois en vigueur renferment des incohérences au chapitre des pouvoirs d'inspection et d'application de la loi. Cela signifie que des risques semblables pour différents éléments sont traités de façon différente. À titre d'exemple, un inspecteur des viandes peut ordonner le retrait d'un produit importé illégalement, alors qu'un inspecteur de poisson, dans des circonstances semblables, ne le peut pas. La nouvelle mesure législative harmonisera les pouvoirs d'inspection et d'application de la loi en assurant leur uniformité pour l'ensemble des viandes, des poissons et des produits agricoles. L'établissement d'un seul ensemble normalisé de pouvoirs d'inspection comporte un certain nombre d'avantages. Cela permettra de garantir aux Canadiens que tous les produits alimentaires sont soumis aux mêmes exigences rigoureuses. Les inspecteurs chargés d'inspecter plusieurs produits trouveront qu'il est plus efficace de travailler avec un seul ensemble de règlements. L'harmonisation des pouvoirs d'inspection et d'application de la loi sera aussi avantageuse pour les exportateurs canadiens, car on s'assurera ainsi que les produits alimentaires exportés satisfont aux mêmes normes rigoureuses que les produits consommés au Canada.
Cinquièmement, le projet de loi conférera à l'ACIA le pouvoir de certifier tous les produits alimentaires destinés à l'exportation. La nouvelle loi nous permettra de traiter uniformément tous les produits alimentaires exportés et d'en attester la salubrité. Ce point est important, car un nombre croissant de pays exige la certification des aliments importés, ce qui est le reflet des efforts réalisés à l'échelle internationale pour assurer la salubrité des aliments. À l'heure actuelle, l'ACIA a le pouvoir de certifier certains aliments destinés à l'exportation provenant d'établissement agréé par le gouvernement fédéral comme les fruits et légumes. La nouvelle loi lui conférera toutefois le pouvoir de certifier tous les produits alimentaires destinés à l'exportation, au besoin. Cette mesure contribuera à accroître l'accès aux marchés internationaux et les perspectives économiques de l'industrie alimentaire canadienne.
Si aisément, le projet de loi prévoit la création d'un mécanisme d'examen interne auquel les parties réglementées pourront avoir recours si elles veulent faire examiner certaines décisions d'inspection ou faire traiter des plaintes. Ce mécanisme sera plus rapide et moins coûteux que la procédure d'examen judiciaire actuelle.
Le sénateur Peterson : Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
Dr Evans, comme nous l'avons indiqué plus tôt, nous appuyons le projet de loi et ce qu'il cherche à accomplir. Comme nous l'avons aussi indiqué notre seule préoccupation, c'est que vous ayez le soutien financier et les services professionnels nécessaires pour s'assurer que vous serez en mesure de le faire.
Croyez-vous que vous avez les ressources et l'argent nécessaires pour mettre en oeuvre de façon efficace les dispositions du projet de loi?
Dr Evans : Nous sommes certainement d'avis que le gouvernement a investi de façon constante dans l'agence ces dernières années pour améliorer les capacités en matière d'inspection. Je crois qu'à l'agence, nous avons atteint l'équilibre adéquat en ce qui a trait à la capacité d'inspection de première ligne nécessaire pour avoir des contacts directs avec les fabricants de produits alimentaires et d'autres.
Il est important de reconnaître que la salubrité des aliments ne se fait pas toute seule et ne commence pas à l'étape de l'abattage ou de la transformation des aliments. La salubrité des aliments est liée à un ensemble d'activités, ce qui inclut une bonne partie des mesures que nous prenons dans le cadre de nos programmes de santé animale et qui ont une incidence directe sur la salubrité des aliments. Nous produisons des aliments sécuritaires parce que les animaux sont en santé. Ce que nous faisons sur le plan de contrôle des maladies a aussi une incidence sur la salubrité des aliments. Le contrôle des substances qui pourraient entrer dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire — par l'intermédiaire de la chaîne d'approvisionnement en aliments des animaux et des produits avec lesquels nous nourrissons les animaux, et qui pourraient se retrouver dans la viande ou d'autres produits — fait partie de la filière alimentaire.
En même temps, nous reconnaissons que les risques associés aux aliments continuent aussi d'évoluer. Alors qu'il y a plusieurs décennies, nous avons pu être confrontés à des problèmes de tuberculose, à certaines situations où des lésions évidentes pouvaient être constatées par un inspecteur sur le terrain, ou que nous pouvions procéder à ce que l'on appelle des tests organoleptiques du côté des poissons — des tests visuels, gustatifs ou olfactifs —, de nos jours, bon nombre des risques auxquels nous sommes confrontés ne peuvent pas être observés au point d'inspection. En conséquence, lorsqu'on parle d'avoir les ressources nécessaires, cela signifie qu'il faut procéder, sur le terrain, à des vérifications de la conformité et à un échantillonnage au besoin, mais cela signifie aussi qu'il faut avoir des ressources pour réaliser des épreuves diagnostiques, que ce soit pour la résistance antimicrobienne ou les résidus — comme vous l'avez indiqué auparavant — ou pour les produits chimiques, les pesticides et ce genre de choses.
Pour répondre à votre question, je crois que l'agence a maintenant une capacité qu'elle n'avait pas auparavant, que cette capacité va plus loin que ce qui se fait en ce moment à un point d'inspection donné et que l'on prend en compte nos évaluations liées aux problèmes de qualité de l'eau, que l'on s'assure que l'eau qui est utilisée dans les usines de transformation et consommée par les animaux est salubre, de sorte que nous ne transmettons pas des bactéries ou d'autres choses par l'intermédiaire du système de production alimentaire. Il en va de même du côté des plantes, où l'on inspecte les produits cultivés sur le terrain, pour déterminer s'il y a des champignons ou des moisissures qui pourraient créer des toxines si ces produits étaient incorporés dans la farine.
Ce que je veux dire, c'est que je crois que la salubrité des aliments ne nous oblige pas seulement à être une ressource au point d'inspection; il faut aussi que tous les éléments de soutien que nous mettons en œuvre dans les autres programmes et qui mènent aux éléments de la salubrité des aliments soient harmonisés. Dans sa structure actuelle, l'agence a travaillé fort pour obtenir l'équilibre nécessaire.
Nous avons aussi un bon soutien, en ce sens qu'à l'agence, nous faisons partie d'un système élargi visant à assurer la salubrité des aliments au pays. La Loi sur les aliments et drogues établit plutôt clairement que la responsabilité de la production d'aliments salubres incombe à l'industrie. Le fait d'avoir une industrie qui est résolue à assurer la salubrité des aliments et d'avoir des producteurs qui assurent l'intendance du système de salubrité des aliments sur le terrain et à la ferme sont des éléments essentiels à la mise en place d'un système robuste en matière de salubrité des aliments au pays, comme le fait d'avoir des détaillants qui ont un grand intérêt à s'assurer que les produits qui se retrouvent sur leurs tablettes sont sécuritaires et qui participent à l'éducation et la sensibilisation des consommateurs.
Bien que nous ayons un ensemble de ressources qui cadrent très bien avec le travail qu'on nous demande de faire, nous ne serons efficaces que si nous pouvons aussi être en harmonie avec tous les autres intervenants du système de salubrité des aliments et s'ils adoptent la même culture de prévention et s'engagent aussi à avoir la capacité nécessaire pour obtenir les résultats en matière de salubrité des aliments qu'attendent et méritent les Canadiens.
Le sénateur Peterson : Je vais considérer qu'il s'agit d'un oui conditionnel.
Pour ce qui est des inspecteurs de première ligne, en ce moment, vous avez trois secteurs : la viande, la volaille et le poisson. En vertu de cette loi, les inspecteurs continueront-ils de se spécialiser dans un domaine précis ou devront-ils toucher à tous les domaines?
Dr Evans : En ce moment, cette mesure législative permettrait aux inspecteurs, avec une formation adéquate et des outils adéquats, de se charger de l'inspection de plus de produits. Grâce à notre recrutement stratégique et à notre travail relatif à la qualification des inspecteurs, nous espérons être en mesure d'augmenter le plus possible la capacité des inspecteurs de travailler avec plus d'un produit.
Je ne voudrais pas donner l'impression que chaque inspecteur sera chargé de tous les types d'aliments. Il existe des différences très claires dans la façon dont les divers aliments sont produits. Dans le jargon de l'inspection des aliments, par exemple, si vous travaillez dans le programme laitier, il y a l'avantage de la pasteurisation, qui constitue une étape importante pour régler les problèmes ou éliminer les bactéries qui pourraient se propager dans la chaîne d'approvisionnement du lait et avoir une incidence sur la salubrité des aliments.
Nous voulons nous assurer que ce ne seront pas tous les inspecteurs qui seront des spécialistes des procédés thermiques ou de la transformation des aliments. Il serait irréaliste d'avoir une telle attente pour l'ensemble de l'effectif des inspecteurs. Cependant, nous croyons que cette mesure législative, de concert avec les mesures que nous avons prises pour moderniser les inspections, nous permettra d'avoir recours aux services des inspecteurs pour plusieurs produits. Toutefois, comme je l'ai indiqué, je ne voudrais pas donner l'impression que chaque inspecteur sera chargé d'inspection pour les huit programmes d'inspection des aliments.
Le sénateur Peterson : Combien de temps faut-il pour qu'un inspecteur obtienne la qualification pour diverses administrations?
Dr Evans : Actuellement, nous avons un ensemble d'exigences amélioré en ce qui a trait à l'embauche et au recrutement. Nous travaillons en étroite collaboration avec les facultés d'agriculture et de médecine vétérinaire des universités canadiennes afin de poursuivre la création d'un programme d'enseignement en matière de santé publique et de salubrité des aliments. Lorsque les gens ont des compétences au moment de l'embauche, nous pouvons plus rapidement les mettre à niveau grâce à des programmes de formation individualisée centrés sur les programmes dans lesquels ils travaillent, de façon à ce qu'ils connaissent bien la loi et leurs pouvoirs en matière d'inspection.
Actuellement, cela peut varier selon la denrée alimentaire avec laquelle ils travaillent. Nous offrons une formation collective, il faut de trois à six semaines pour qu'une personne puisse obtenir la certification nécessaire à certaines activités d'inspection des aliments. Nous avons un programme de mentorat dans lequel les jeunes sont jumelées à des inspecteurs plus expérimentés, ce qui permet une surveillance en cours d'emploi et une formation améliorée.
Selon le secteur alimentaire, par exemple, il faut parfois jusqu'à six mois après l'embauche pour qu'une personne devienne un inspecteur pleinement qualifié et puisse travailler sans supervision.
Le sénateur Peterson : Nous croyons comprendre que l'ACIA a éliminé l'unité chargée du suivi et de la surveillance des aliments insalubres en provenance des États-Unis. Est-ce exact?
Dr Evans : Non.
Le sénateur Peterson : Ce n'est pas le cas? D'accord. Bien.
Madame Barnes, vous avez mentionné que du côté des produits alimentaires, nous avons eu des problèmes par rapport au lait en provenance de Chine. Vous avez indiqué que le problème prend de l'ampleur et que cela pourrait aussi se retrouver dans les biscuits, les friandises et ce genre de choses. Vous en avez amélioré la portée de façon à couvrir ce genre de choses, est-ce exact?
Mme Barnes : Oui, sénateur. La raison pour laquelle nous avons amélioré les dispositions sur l'importation contenues dans le projet de loi, c'était en réaction à l'exemple de la mélamine. Ce qui se passait auparavant, c'est que nous avions un ensemble de règlements sur les produits laitiers. Il était facile de demander à l'ASFC de bloquer à la frontière l'importation d'un produit en provenance de Chine qui, à notre connaissance, contenait de la mélamine, comme le lait maternisé, notamment. Il s'agissait de produits laitiers et cela contrevenait à notre réglementation. C'était clair. Tandis que nous surveillions la situation en Asie, nous avons remarqué que des biscuits et des friandises fabriquées avec des produits de mélamine étaient aussi envoyés au Canada et que d'autres pays dans le monde procédaient à des rappels.
Dans ce cas, nous avons demandé aux agents de l'ASFC de surveiller la situation de près à la frontière et de nous informer si ces produits arrivaient au pays, ce qu'ils ont fait, mais nous ne pouvions pas leur demander de bloquer l'entrée des produits. Nous n'avions pas ce pouvoir. Le produit devait entrer au pays. Ensuite, nous avons travaillé avec les importateurs afin, dans ce cas, de procéder à un rappel volontaire. En conséquence, cela a été un peu plus long et cela a représenté beaucoup plus de travail pour tout le monde.
Grâce au nouveau pouvoir prévu dans le projet de loi qui nous permet simplement d'indiquer que des aliments non sécuritaires ne peuvent pas être importés, nous pourrons maintenant dire à l'ASFC que nous savons qu'il y a, à l'échelle internationale, des preuves selon lesquelles ce n'est pas sécuritaire et que cela ne peut être importé au Canada.
Le sénateur Buth : Je vous remercie d'être encore ici, docteur Evans. Je m'intéresse à la traçabilité — en raison de certains des problèmes qui sont survenus — et l'importance d'être en mesure de remonter au lieu d'origine s'il y a des problèmes dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire. Je constate que les modifications proposées à la Loi sur la santé des animaux du projet de loi renforceront nos autorités réglementaires et optimiseront nos exigences actuelles en matière de traçabilité.
Pouvez-vous nous parler de la façon dont cela sera optimisé? Aussi, les intervenants et les gouvernements provinciaux vous ont-ils fait part de leurs commentaires en ce qui a trait à l'optimisation de la traçabilité?
Dr Evans : En fait, ce projet de loi sur les aliments comporte deux éléments liés à la traçabilité. Il y a en effet une disposition sur la traçabilité des aliments. Je crois que l'article 51 porte sur les aliments, précisément sur les dispositions entourant la traçabilité des aliments qui nous permettraient d'exiger — dans le cas de la certification des importateurs ou de l'enregistrement des processus à l'échelle nationale — que pour chaque aliment, le fabricant ou l'importateur doive être en mesure de fournir les renseignements permettant de déterminer les lieux d'origine et de destination. D'où vient le produit? Quels étaient les fournisseurs? Quel a été le chemin parcouru? L'idée est d'augmenter la capacité de retirer rapidement du marché un produit qui présente un risque et de régler le problème à la source en même temps.
Comme vous l'avez indiqué, dans le projet de loi, il y a un deuxième aspect de la traçabilité qui est lié à la Loi sur la santé des animaux. Actuellement, nous avons des pouvoirs relatifs à l'identification des animaux. Cependant, cela nous procurerait un plus large éventail d'outils de traçabilité qui permettrait de progresser au chapitre de la promulgation de règlements relatifs aux autres caractéristiques de l'animal, comme la date de naissance, par exemple.
Cela a été un important problème pour nous lorsque nous avons dû composer avec le problème de l'ESB sur les marchés internationaux parce que certains tissus qui pouvaient être porteurs de la maladie étaient liés à l'âge de l'animal. Certains pays ont permis le commerce pour des animaux âgés de moins de 30 mois ou de plus de 30 mois. Il serait utile d'adopter une disposition qui nous permettrait d'exiger que des renseignements relatifs à la date de naissance soient accessibles au lieu de l'abattage ou pour la certification aux fins d'exportation, de façon à satisfaire aux exigences du pays importateur.
De plus, il y a des dispositions sur le déplacement des animaux. Bien entendu, dans le système de production du Canada, un éleveur n'est pas nécessairement celui qui fournit l'animal à l'abattoir. Pour ce qui est du boeuf, l'animal peut transiter chez un éleveur de bovins d'engrais et un parc d'engraissement avant de se retrouver à l'abattoir. Cet animal, à compter de sa naissance, lorsqu'il quitte sa ferme d'origine — ce qui est notre programme d'identification actuel — peut, tout au long de sa vie, être en contact avec d'autres animaux avant de devenir, en fin de compte, un aliment.
Disposer des renseignements sur les déplacements devient alors plutôt important, particulièrement en cas d'épidémie, ce qui nous permet de savoir d'où proviennent les animaux et par où ils sont passés s'ils ne sont pas allés directement à l'abattoir. Cela devient un aspect important que l'on observe dans certaines des pratiques exemplaires à l'échelle internationale.
La possibilité d'avoir une exigence en matière d'identification des installations est aussi une option en ce qui a trait à l'autorité habilitante. C'est une question dont les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux ont beaucoup discuté lors de leurs réunions, ces quelques dernières années. Beaucoup de provinces s'emploient activement à l'échelle provinciale à mettre en œuvre des mécanismes de collecte de renseignements relatifs à l'identification des installations.
Cela apporterait une dimension nationale à la question, de façon à assurer l'uniformité dans l'ensemble du pays. Encore une fois, dans nos systèmes de production habituelle, les animaux peuvent être déplacés d'une province à l'autre. Dans cette optique, l'identification des installations est importante, comme ce l'est aussi dans une situation d'épidémie importante. Connaître la population des animaux et savoir où ils se trouvent devient un élément important lorsque nous essayons de fixer les limites relatives aux activités de lutte contre les maladies afin de réduire le plus possible l'interruption du commerce ou les répercussions sur les producteurs.
Il y a un large éventail d'autorités habilitantes qui découlent de l'aspect de la traçabilité. Encore une fois, nous croyons que cela s'harmonise bien avec des pratiques exemplaires internationales. Je crois qu'il sera important de démontrer à nos partenaires commerciaux à l'échelle internationale que notre système est solide, qu'il a un haut degré d'intégrité et qu'il continuera de satisfaire à leurs besoins, c'est-à-dire faire du Canada leur fournisseur privilégié.
Le sénateur Buth : Lorsque vous avez parlé de l'identification des installations, de quoi parliez-vous exactement? Parlez-vous des fermes, des parcs d'engraissement, des abattoirs, de tout cela?
Dr Evans : Oui; tout lieu où pourraient être gardés des animaux d'élevage serait visé par ces dispositions. Puisqu'il s'agit d'une autorité habilitante en vertu de la réglementation, c'est de la réglementation elle-même que proviendrait une définition plus précise concernant la consultation élargie avec les intervenants touchés.
Le sénateur Buth : Merci beaucoup.
Le sénateur Mahovlich : Vous avez parlé des critères de qualification d'un inspecteur. Il doit être formé pendant cinq ou six mois. Doit-il aussi avoir un diplôme en agriculture?
Dr Evans : Merci, sénateur. Lorsque l'ACIA a été créée, on a réuni les programmes d'inspection des aliments de trois ministères. À l'époque, il y avait différentes exigences. Depuis la création de l'ACIA, nous avons essayé d'adopter une approche plus uniforme en ce qui a trait aux compétences du personnel d'inspection.
Contentons-nous de dire que ce ne sont pas tous les inspecteurs qui ont un diplôme universitaire, étant donné la courbe démographique et la façon dont l'agence a été créée. De toute évidence, maintenant, la norme n'est pas seulement qu'un certain nombre d'inspecteurs détiennent un diplôme universitaire dans diverses spécialisations des sciences de la santé. En fait, nous constatons que de plus en plus d'inspecteurs ont fait des études de deuxième cycle, à la maîtrise ou ont d'autres diplômes. Actuellement, tandis que nous examinons notre modèle d'inspection et que nous mettons en œuvre le processus de modernisation des inspections, nous constatons que nous sommes en voie de redéfinir ce que devraient être les exigences fondamentales et les compétences nécessaires à l'embauche d'embauche.
Nous avons demandé l'aide de l'un des membres du corps enseignant de l'Université de Calgary — un ancien expert international qui a travaillé avec les États-Unis sur les questions relatives à l'inspection des viandes et qui a mené un exercice d'analyse comparative en Australie, en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis et ailleurs — pour étudier les meilleurs programmes de formation sur la salubrité des aliments offerts à l'échelle mondiale et pour nous aider à créer un modèle pour cette activité.
Encore une fois, nous avons des inspecteurs aux horizons et aux compétences diversifiées. Par exemple, du côté des viandes, ils peuvent très bien avoir un diplôme universitaire. Du côté des produits laitiers, j'ai parlé de gens qui ont des connaissances sur le traitement thermique, sur le traitement à la chaleur, et cetera. Dans le passé, avoir un diplôme précis n'était pas une exigence, mais nous évoluons dans cette direction à l'avenir.
Le sénateur Mahovlich : Nous n'en sommes pas encore là.
Dr Evans : Nous ne sommes pas encore là, mais étant donné l'évolution des systèmes d'inspection que l'on connaît aujourd'hui, nous redéfinissons les besoins de façon à nous assurer que l'on recrute les personnes qui peuvent faire ces inspections.
Le sénateur Mahovlich : Le samedi, ma femme et moi nous aimons souvent aller dans les marchés publics. Si vous allez à Kitchener, vous pouvez avoir des coupes de viande que vous ne pouvez pas avoir dans les épiceries. Donc, nous aimons aller à ces endroits. Je peux acheter du boudin et des choses de cette nature que l'on ne peut pas acheter tous les jours à l'épicerie. Ces marchés publics font-ils l'objet d'inspections?
On peut acheter des fruits et légumes frais. Dans ces marchés, tout est frais. Ils sont plutôt populaires, parce que je ne peux jamais trouver une place de stationnement. Donc il y a là beaucoup d'activité.
Est-ce que vous y menez parfois des inspections ou est-ce simplement leur réputation qui fait en sorte qu'ils deviennent populaires? Il n'y a aucun problème, mais je vois une mouche de temps en temps.
Dr Evans : Je suis certain que vous en verriez.
Comme le ministre l'a indiqué précédemment, nos activités d'inspection liées à la prévention sont surtout concentrées sur les établissements agréés par le gouvernement fédéral. Il s'agirait des établissements d'emballage, des entreprises de transformation et des groupes de transformations des aliments qui transportent des produits d'une province à une autre ou qui franchissent les frontières internationales. Voilà le secteur des établissements agréés par le gouvernement fédéral.
Cependant, dans un même temps, nous travaillons de façon intégrée avec les provinces. L'inspection des marchés publics serait habituellement assujettie à la loi provinciale ou à des règlements municipaux et serait menée par des inspecteurs de la santé publique. Contentons-nous de dire qu'étant donné la façon dont les aliments sont produits, les animaux utilisés pour la fabrication de la saucisse que vous achèteriez devront satisfaire aux exigences zoosanitaires fédérales et cela serait traité en conséquence.
Nous pouvons avoir affaire à ce genre de marchés s'il y a une plainte de la part d'un consommateur ou si l'on associe une maladie à cet achat. Une partie de notre enquête consisterait à travailler avec les autorités locales et provinciales chargées de la santé publique afin de déterminer la cause fondamentale du problème et les mesures à prendre à l'avenir. Nous pouvons être appelés à jouer un rôle dans le cadre d'une enquête, mais pour ce qui est des opérations quotidiennes des marchés, cela relève de nos collègues provinciaux ou municipaux.
Le sénateur Mercer : Je vais poursuivre dans la même veine que les questions du sénateur Mahovlich au sujet des compétences des inspecteurs. Dans son témoignage, le ministre a donné l'exemple de la production de soupe au poulet, et j'espère qu'il y a du poulet dans cette soupe. Il a aussi mentionné que la soupe pourrait contenir des légumes. La formation nécessaire pour un inspecteur des produits de viande est différente de celle dont on a besoin pour devenir inspecteur de fruits et légumes. Le ministre a indiqué qu'il espère que plutôt que d'avoir un inspecteur pour les légumes contenus dans la soupe au poulet et un inspecteur pour le poulet de la soupe, nous pourrions avoir un inspecteur pour les deux produits.
Sera-t-il facile pour vous de trouver des gens qualifiés de façon à satisfaire à la demande du ministre? Ce ne sont pas tous vos inspecteurs qui ont un diplôme. D'un point de vue historique, je comprends d'où viennent beaucoup d'entre eux. Cependant, à l'avenir, je suppose que vous avez de plus en plus de difficulté à satisfaire à cette demande. Avez-vous consulté des écoles d'agriculture ou d'autres établissements d'enseignement postsecondaire pour leur indiquer ce dont vous aurez besoin à l'avenir?
Dr Evans : Oui, tout à fait. Dans la plupart des cas, comme vous l'avez décrit, lorsque l'on a affaire à un fabricant de produits alimentaires qui utilise de multiples produits alimentaires, comme la pizza ou la soupe, selon toute probabilité, par exemple, le poulet aura été inspecté au préalable à l'abattoir par un inspecteur de l'ACIA dans un établissement agréé par le gouvernement fédéral. Ce serait alors une viande qui avait été inspectée dans cet établissement. Ensuite, il est passé à une autre étape de transformation. Ce que l'on souhaite dans de tels cas, comme nous l'avons indiqué, c'est d'avoir des inspecteurs chargés de l'inspection de produits multiples, là où c'est possible. Dans cette situation, il s'agirait de quelqu'un qui connaît bien le temps et les températures nécessaires au traitement thermique, ainsi que la gestion des ingrédients de la soupe. Comme vous l'avez mentionné, elle peut contenir beaucoup plus de choses que du poulet, comme des fruits, des légumes et des épices, c'est-à-dire tous les ingrédients qui entrent dans la composition de ce genre de produit. L'intention est d'éviter le dédoublement des activités d'inspection à cet endroit précis. Puisque nous avons l'occasion d'inspecter de multiples produits, nous nous assurons qu'il n'y a qu'un seul inspecteur dans cette usine pour examiner tous les produits qui y entrent et étudier les contrôles du traitement de cette entreprise. À cette étape, leur travail consiste à examiner les contrôles du traitement et non chacun des produits. Ces produits ont peut-être été inspectés avant qu'ils aient été achetés à titre d'ingrédients par le fabricant de soupe. Un inspecteur de poulet a inspecté la viande, mais pas nécessairement dans ces installations. Il a été acheté d'avance pour cette usine. Dans cet établissement de transformation, nous choisirions de n'avoir qu'un seul inspecteur.
Le sénateur Mercer : Au moment de l'abattage — dans le cas du poulet — et au moment de la récolte des légumes, ces produits sont traités de deux façons différentes. Je ne suis pas un spécialiste, manifestement, mais je ne suis pas aussi préoccupé par rapport à ce que l'on fait avec les légumes une fois qu'ils ont été récoltés que je le suis par rapport à ce que l'on fait avec le poulet lorsqu'il a été abattu. Comme on le sait, si le poulet n'est pas conservé de manière appropriée, il peut se détériorer et des problèmes de santé peuvent se produire, comme la salmonelle, notamment. Voilà pourquoi je pose cette question. Je comprends la nécessité d'avoir diverses catégories d'inspecteurs.
Dr Evans : Dans ce genre d'établissement de transformation des aliments, les compétences de l'inspecteur devraient lui permettre de vérifier de quelle façon le produit a été manipulé de l'abattoir jusqu'à son incorporation dans la soupe. On vérifierait les contrôles du traitement de l'entreprise et les mesures en matière d'assurance de la qualité pour s'assurer que le poulet n'a pas perdu son innocuité pendant le transport, si vous voulez, et qu'il n'a pas été soumis notamment à des températures non conformes dans cet établissement pendant la production de la soupe. On appelle « phase létale » l'étape de la production d'un produit pendant laquelle il est chauffé à une température adéquate pour s'assurer qu'il n'y aura pas de transmission de bactéries. Voilà le genre de travail dont serait chargé un inspecteur dans ce genre d'environnement. Leur formation leur permet de procéder à ce genre d'évaluation pour s'assurer que les contrôles de traitement fonctionnent et que la salubrité des aliments n'a pas été compromise.
[Français]
Le sénateur Maltais : Monsieur Evans, je pense que l'harmonisation faite dans la loi pour les trois services d'inspection : viande, poulet et poisson est une excellente chose. Enfin, ces trois spécialités pourront mettre en commun leur expertise. Il faut avoir visité des centres spécialisés comme ceux que j'ai visités au Québec pour réaliser à quel point il y a de nouvelles technologies d'inspection sur le marché; des nouvelles technologies mises à la disposition des inspecteurs. Ce n'est plus comme en 1940.
Contrairement au sénateur Peterson, je ne suis pas inquiet concernant le nombre d'inspecteurs car il y a des nouvelles technologies et on n'inspecte plus les aliments aujourd'hui comme en 1930 ou 1940. Il y a des nouvelles technologies et c'est extraordinaire de voir cela. C'est donc une bonne chose; les diverses expériences pourront être mises en commun et vont aider à la formation de nouveaux inspecteurs qui eux ne sont tout de même pas des néophytes.
Il y a quand même une question que je n'ai jamais osé poser à tous les intervenants entendus depuis le mois de février; que fait-on avec les produits saisis et enlevés dans les supermarchés? Par exemple, si un produit de jambon ou de viande hachée est considéré détérioré, qui a la responsabilité de le détruire? Les gens se posent la question. Est-ce que le supermarché le recycle en saucisse, en pâté ou en autre chose? Ou bien est-ce le ministère qui le détruit? Je vous donne la chance d'expliquer clairement aux Canadiens et aux Canadiennes de quelle façon sécuritaire c'est détruit afin que cela ne réapparaisse pas sur le marché.
[Traduction]
Dr Evans : Une fois qu'un rappel d'aliments a été effectué parce qu'un produit alimentaire pose une menace ou un risque, l'ACIA travaille à confirmer l'efficacité du rappel. Elle fait des vérifications à divers moments, souvent en collaboration avec l'organisme de santé publique de la province, par exemple. Nous collaborons pour confirmer que les produits ont été retirés des commerces de détail. L'entreprise a la responsabilité de fournir l'information sur la volumétrie — la quantité de produits qui a été récupérée et qui doit être récupérée en fonction du lot de production ou du repérage des risques dans le cadre du rappel.
Au bout du compte, il incombe à l'entreprise de détruire le produit ou de s'en débarrasser d'une façon qui est approuvée par l'ACIA. Dans la plupart des situations, nous collaborons avec l'entreprise pour vérifier cette composante de leur usine et nous assurer que le produit n'entre pas de nouveau dans le commerce de manière inappropriée.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Pour faire suite à ce qu'a dit le sénateur Peterson, nous sommes sommairement d'accord avec ce projet de loi. Bien sûr, si on devait adopter l'amendement que propose le sénateur Peterson, cela pourrait nettement accélérer le processus.
Ma question concerne la traçabilité. Je suis un peu au courant; chez nous, ceux qui œuvrent dans le domaine de la transformation des mollusques ont un système très rigide de traçabilité, à savoir où a été pêché ou cueilli le mollusque, par quel pêcheur, quel en est l'acheteur, le transporteur, et ceci jusqu'à la transformation. C'est très rigide bien sûr, parce qu'il est question de santé. Où en sommes-nous pour les produits agricoles? Y a-t-il déjà en place un système aussi rigide? Si c'est le cas, devons-nous l'améliorer?
[Traduction]
Dr Evans : Merci, monsieur le sénateur. Il existe effectivement au pays des systèmes de traçabilité pour divers groupes de produits alimentaires. Comme vous l'avez dit, certains sont plus avancés que d'autres. Il est vrai que le système de traçabilité pour les crustacés, les mollusques et les fruits de mer est très bon, du lieu de cueillette au détaillant.
Dans d'autres secteurs, il y a un système de traçabilité jusqu'à l'étape de l'abattage. Par exemple, dans le cas des animaux vivants, depuis 2001, il y a des exigences en matière d'identification des bovins pour la traçabilité; il est obligatoire d'indiquer l'exploitation agricole d'origine de l'animal au moyen d'une étiquette, qui est attribuée à l'animal jusqu'à ce qu'il soit abattu ou exporté. L'Agence canadienne d'identification du bétail est une tierce partie qui conserve l'information liée à la traçabilité.
Dans le secteur du porc, on utilise le tatouage depuis longtemps. On identifie la volaille par lots de production, parce qu'on ne traite pas ces espèces de façon individuelle; on les amène à un poids préétabli ou à une certaine étape dans la production.
Nous avons des systèmes de traçabilité dans différents secteurs d'élevage, mais il n'y a pas d'uniformité quant aux renseignements et aux données disponibles. Comme nous l'avons dit en réponse à la question de la sénateur Buth, par la loi, nous tentons d'établir le lien, de la récolte ou de la production jusqu'à la transformation en produit alimentaire. Nous savons que dans bon nombre de pays européens et sud-américains, les consommateurs aiment le fait que dans un supermarché, non seulement le pays d'origine du produit est indiqué, mais par différents moyens, des codes à barres, par exemple, ils peuvent scanner le produit sur place et ainsi obtenir des renseignements sur l'animal, comme le lieu de naissance et d'abattage.
Par exemple, en Uruguay, un pays similaire au Canada, qui exporte une grande partie de ses produits agricoles, j'ai eu l'occasion de manger du bifteck dans un restaurant. Comme au Canada, on peut avoir un petit animal en plastique qui indique si la viande est saignante, à point ou bien cuite, mais il y a aussi un code à barres. Le serveur peut apporter un scanner et l'on peut voir une photo de l'exploitation agricole, de l'animal et d'où il vient.
Ce niveau d'identification et de traçabilité devient la norme dans bon nombre de pays, et c'est le type de norme que nous voulons que le Canada puisse offrir à ses partenaires commerciaux en raison de l'importance qu'ils accordent à cet aspect dans leurs exigences relatives à l'importation.
Le sénateur Peterson : Quels sont les liens entre l'ACIA et l'ASFC, et la loi les solidifiera-t-elle?
Dr Evans : Nous avons une relation très interopérable avec l'ASFC. Comme on l'a mentionné durant la première heure de la séance, nous avons harmonisé nos programmes de certificat d'importation avec le système de l'ASFC, de sorte que notre Centre de service national à l'importation est lié à l'ASFC pour tous les renseignements sur les produits agricoles importés dans notre pays.
Dans l'une de vos questions précédentes, vous avez fait référence à la question de l'examen de la viande provenant des États-Unis avant son importation, comme exemple, qui est maintenant la responsabilité du Centre de service national à l'importation. En raison de tous les chargements qui arrivent, le centre examine les documents et une décision relative à une nouvelle inspection est prise — on « refuse » ou « permet » l'importation sans faire de nouvelle inspection —, et c'est un processus intégré avec l'ASFC.
Nous effectuons des opérations éclair, et je crois que le ministre y a fait référence. Elles sont basées sur nos activités courantes visant à améliorer continuellement la salubrité des aliments. Nous identifions certains produits ou certaines combinaisons produits-pays à différents moments au cours de l'année en fonction de l'information que nous obtenons et qui découle de vérifications internationales, d'analyses de la salubrité des aliments d'autres pays, ou même de renseignements sur les importations précédentes au Canada.
Nous coordonnons donc nos activités avec les opérations éclair de l'ASFC à la frontière, où nous nous concentrons sur certains produits pendant un certain temps. Nous faisons des tests ou avons recours à d'autres vérifications, pour accroître les autres activités.
Nous avons un programme de formation avec l'ASFC. Nous utilisons ses installations au collège de Rigaud, au Québec, où nous offrons de la formation aux agents de l'ASFC sur nos programmes de contrôle liés aux animaux, aux aliments et aux plantes. Parallèlement, comme nous l'avons dit lorsque nous parlions avec le sénateur Mahovlich des exigences quant au recrutement, nous collaborons très étroitement avec l'ASFC dans l'examen des compétences avant l'embauche et des qualités qu'il faut avoir pour être un bon inspecteur : entregent, capacité à communiquer clairement, capacité à travailler dans des situations de stress avec quelqu'un qui est coincé depuis longtemps dans une file d'attente à la frontière et nous permet de faire notre travail.
Nous avons de très bons liens avec l'ASFC au niveau opérationnel. Comme on l'a déjà dit, nous continuons à collaborer avec les États-Unis dans le cadre de l'initiative « Par-delà la frontière » et des efforts menés par le Conseil de coopération en matière de réglementation, et à harmoniser la réglementation. L'ASFC participe avec nous aux discussions sur les effets que cela aura sur la première inspection à la frontière.
Le président : Honorables sénateurs, c'est ce qui nous amène à la fin de la séance. De la déclaration du ministre à la vôtre, docteur Evans, nous voulons vous remercier. Nul doute que vous êtes conscient que la salubrité des aliments est une grande priorité de notre gouvernement et des Canadiens. Cela dit, les Canadiens sont soucieux d'en savoir plus sur les aliments qu'ils consomment, leur contenu et leur origine. Par conséquent, les consommateurs exigent des aliments plus salubres et veulent savoir s'ils sont produits au Canada ou à l'étranger. Cela dit, monsieur, vous pouvez dire au ministre que nous avons aimé vos commentaires — ils étaient très instructifs.
(Le comité s'ajourne.)