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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 21 - Témoignages du 25 septembre 2012


OTTAWA, le mardi 25 septembre 2012

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, auquel a été renvoyé le projet de loi S-11, Loi concernant les produits alimentaires, et portant notamment sur leur inspection, leur salubrité, leur étiquetage, la publicité à leur égard, leur importation, leur exportation, leur commerce interprovincial, l'établissement de normes à leur égard, l'enregistrement de personnes exerçant certaines activités à leur égard, la délivrance de licences à ces personnes, l'établissement de normes relatives aux établissements où de telles activités sont exercées ainsi que l'agrément de tels établissements, se réunit aujourd'hui, à 17 h 7, pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, en tant que président, je déclare la séance ouverte.

Conformément à l'ordre du jour distribué par le greffier, nous avons deux groupes de témoins, aujourd'hui. Je vous avise qu'on m'a annoncé que deux sénateurs proposeront des amendements au projet de loi S-11 au moment de l'étude article par article. La présidence entendra ces amendements à la suite du deuxième groupe de témoins.

Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation à venir nous faire part de vos commentaires. Comme vous le savez, le comité se penche sur le projet de loi S-11, Loi concernant les produits alimentaires, et portant notamment sur leur inspection, leur salubrité, leur étiquetage, la publicité à leur égard, leur importation, leur exportation, leur commerce interprovincial, l'établissement de normes à leur égard, l'enregistrement de personnes exerçant certaines activités à leur égard, la délivrance de licences à ces personnes, l'établissement de normes relatives aux établissements où de telles activités sont exercées ainsi que l'agrément de tels établissements.

[Français]

Cela dit, j'aimerais remercier nos témoins d'avoir accepté notre invitation.

[Traduction]

Je m'appelle Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick et président du comité. Avant que nous présentions officiellement les témoins, j'invite tous les sénateurs à se présenter. Nous commencerons à ma gauche.

Le sénateur Peterson : Sénateur Peterson, de la Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, Saint-Louis-de-Kent, Nouveau-Brunswick. Bonsoir.

[Traduction]

Le sénateur Merchant : Pana Merchant, de la Saskatchewan.

Le sénateur Mercer : Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.

Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.

Le sénateur Buth : JoAnne Buth, du Manitoba.

Le sénateur Eaton : Nicky Eaton, de Toronto.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, Québec.

[Traduction]

Le sénateur Duffy : Mike Duffy, de l'Île-du-Prince-Édouard.

[Français]

Le sénateur Rivard : Michel Rivard, Québec.

Le président : Honorables sénateurs, je vous remercie. Aujourd'hui, nous étudions le projet de loi S-11, Loi sur la salubrité des aliments au Canada.

[Traduction]

Comme vous le savez, le gouvernement a déposé ce projet de loi au Parlement dans le but de renforcer notre système de sécurité alimentaire et de réduire les chevauchements pour les producteurs d'aliments canadiens.

[Français]

Cette loi donne à l'industrie des règles simples, claires et directes en matière d'inspection et d'application de la loi pour qu'elle puisse mieux s'acquitter de sa responsabilité d'offrir aux consommateurs des aliments salubres...

[Traduction]

... et ainsi offrir aux consommateurs des aliments sûrs.

Aujourd'hui, notre premier groupe de témoins est composé de M. Keith Mussar, vice-président aux affaires réglementaires de l'Association canadienne des importateurs et exportateurs, et de Mme Sukhdeep Bilkhu, présidente de la Canadian Association of Regulated Importers.

[Français]

Nous recevons également M. Robert Devalk, directeur exécutif, Canadian Association of Regulated Importers.

[Traduction]

Encore une fois, nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation. Le greffier me dit que M. Mussar va faire la première présentation, suivi de M. Devalk.

Monsieur Mussar, la parole est à vous.

Keith Mussar, vice-président, Affaires réglementaires, Association canadienne des importateurs et exportateurs : Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis Keith Mussar. Je travaille pour IE Canada, l'Association canadienne des importateurs et exportateurs. C'est pour moi un privilège de comparaître devant le comité au sujet du projet de loi S-11, la Loi sur la salubrité des aliments au Canada.

IE Canada est une association commerciale nationale qui représente les commerçants canadiens depuis plus de 80 ans. Nos membres sont des importateurs, des exportateurs, des fabricants de produits alimentaires canadiens qui importent et exportent des aliments, des grossistes et distributeurs, des détaillants importateurs et des fournisseurs de services. Nous représentons certains des plus importants importateurs et exportateurs d'aliments au Canada, ainsi que de petites et moyennes entreprises. Nos membres importent et exportent des aliments de toutes les catégories.

IE Canada appuie la modernisation de la législation canadienne sur la salubrité des aliments et nous accueillons favorablement le projet de loi S-11. Ce projet de loi remplacera et modifiera les lois qui régissent actuellement la salubrité des aliments, l'emballage et l'étiquetage; l'inspection en vertu de la Loi sur l'inspection des viandes, de la Loi sur l'inspection du poisson et de la Loi sur les produits agricoles au Canada; et les dispositions sur l'étiquetage alimentaire en vertu de la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation.

La loi donne au ministre le pouvoir de délivrer à des gens des permis qui leur permettront d'importer, d'exporter des aliments, ou d'en transporter d'une province à une autre. Cela s'ajoute aux règlements qui seront pris en vertu de la Loi sur les produits agricoles au Canada et qui permettront à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, l'ACIA, de délivrer des permis aux importateurs de produits alimentaires du secteur non régi par le gouvernement fédéral ou de produits alimentaires régis par la Loi sur les aliments et drogues. La loi donne donc plus de pouvoir au ministre concernant l'octroi de permis à tous les importateurs de produits alimentaires. De plus, la loi donne au ministre le pouvoir de fixer les conditions d'octroi de permis, comme l'obligation de mettre en place un système de contrôle préventif de la salubrité des aliments pour obtenir un permis et le conserver.

La nouvelle loi permettrait un certain nombre d'autres améliorations. Entre autres, les infractions seraient punies d'amendes plus sévères, les inspecteurs exerceraient des pouvoirs accrus, et tous les produits seraient uniformément soumis aux inspections et à l'exécution de la loi. La loi pourrait aussi prévoir la prise de règlements qui établiraient les exigences à respecter pour obtenir l'approbation préalable de produits alimentaires importés, quels qu'ils soient. Cela pourrait faciliter l'entrée au Canada de produits alimentaires importés, et cela correspondrait aux dispositions qui sont proposées en vertu de la U.S Food Safety Modernization Act.

Comme l'a signalé un membre du comité à l'occasion d'un témoignage antérieur au sujet du projet de loi S-11, il n'en reste pas moins que ce sont les détails qui posent problème. Certains aspects de la loi doivent être examinés de plus près. Je vais en aborder trois.

Premièrement, en vertu de l'article 4, la nature générale des interdictions pourrait se traduire par des conséquences négatives et causer une perturbation réelle de la chaîne d'approvisionnement alimentaire au Canada. Par exemple, les fabricants de produits alimentaires pourraient ne plus avoir accès aux épices importées au Canada qui doivent subir une autre transformation pour répondre aux exigences de sécurité alimentaire liées à la consommation humaine, ce qui se traduirait par la perte d'emplois au Canada. On estime qu'environ 50 p. 100 du volume total annuel des épices importées au Canada est destiné à des entreprises canadiennes qui doivent en compléter la transformation.

Deuxièmement, les marchés d'exportation pourraient avoir un accès limité aux produits fabriqués au Canada en raison de l'exigence selon laquelle les produits canadiens destinés à l'exportation doivent être conformes aux règlements canadiens, ainsi que de l'interdiction d'exporter de tels produits en vertu du paragraphe 10(3) s'ils ne sont pas conformes aux règlements. Par exemple, si l'on exige des fabricants canadiens qu'ils utilisent de la farine enrichie selon les normes canadiennes pour les produits de boulangerie-pâtisserie et les autres produits qui contiennent de la farine pour les marchés d'exportation, ils ne seront pas conformes dans les marchés où les exigences sur ce plan diffèrent de celles du Canada. Certains marchés interdisent l'ajout d'acide folique à la farine, alors que c'est exigé au Canada.

Troisièmement, en vertu des règlements actuels, les entreprises canadiennes peuvent importer un produit qui n'est pas conforme, à condition de le rendre conforme avant de le vendre au Canada. C'est permis sans qu'il soit nécessaire d'en avertir préalablement l'ACIA. Les inspecteurs de l'ACIA visitent les entreprises canadiennes pour veiller à ce que ces produits soient conformes aux règlements canadiens, tout comme ils le font pour tout produit alimentaire d'ici. Cette façon de faire est particulièrement utile, car il est possible de corriger les étiquettes alimentaires qui ne sont pas conformes; c'est une solution de rechange efficace à l'offre d'un produit dont l'emballage est unique au petit marché canadien. L'interdiction d'importer des produits en vertu du paragraphe 6(2) pourrait empêcher cela.

Les membres d'IE Canada ont aussi exprimé des préoccupations au sujet de deux autres aspects du projet de loi. Premièrement, le pouvoir sans restriction qui est donné aux inspecteurs de prendre des photographies en vertu de l'alinéa 24(2)g) soulève des inquiétudes liées à la sécurité et au risque de divulgation intentionnelle ou non d'information confidentielle, comme le processus, ou la conception et la fonction de l'équipement. Souhaitant atténuer ce risque, de nombreuses entreprises ont pris des mesures pour interdire à tout employé ou visiteur d'utiliser ou d'avoir en sa possession un appareil photo, un téléphone cellulaire ou quelque autre appareil pouvant servir à prendre des photographies dans les installations de fabrication.

L'incorporation des documents par renvoi dans les règlements est un pouvoir important selon lequel les règlements pourront demeurer à jour et être modifiés au moment opportun, en fonction du rythme soutenu de l'innovation. C'est avantageux, mais il faut un processus qui garantira la consultation des parties prenantes, de sorte que ceux qui sont touchés par un changement aient l'occasion d'exprimer leurs opinions. De plus, il faut un processus qui servira à veiller à ce que les changements aux documents incorporés par renvoi dans les règlements soient diffusés à l'étranger et à ce que les parties touchées puissent exprimer leurs points de vue.

En résumé, IE Canada appuie le projet de loi S-11. Cependant, certaines dispositions du projet de loi méritent un examen plus approfondi. Nos membres se sont engagés à mener des consultations avec les responsables afin de parler de leurs inquiétudes.

Au nom d'EI Canada et des entreprises qu'elle représente, je vous remercie de cette occasion qui m'a été donnée de venir témoigner sur une question d'importance vitale pour tous les Canadiens. Je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.

Le président : Merci, monsieur Mussar. Nous allons maintenant écouter M. Devalk, puis les membres du comité poseront leurs questions.

Robert Devalk, directeur exécutif, Canadian Association of Regulated Importers : Mesdames et messieurs les sénateurs, c'est pour moi un réel plaisir d'être ici. Je me sens à l'aise, dans cette pièce, entouré de personnes possédant une si vaste expérience. Votre comité a la réputation de faire du bon travail. Je pense que c'est la raison pour laquelle le gouvernement vous a confié ce projet de loi important, qui garantira probablement une culture bien ancrée de sécurité alimentaire au sein du secteur de l'agroalimentaire, et ce, pour au moins 20 ans. Nous assistons à un changement de paradigme nécessaire, et nous commençons à le mettre en place.

Quand nous, gens de l'industrie, discutons de ce genre de mesures législatives, nous tenons à garder deux choses à l'esprit, et je pense que c'est valable ici aussi, au moment d'envisager ce projet de loi. Premièrement, le Canada est l'un des quelques pays du monde qui peuvent produire plus d'aliments qu'ils en consomment. Ce n'est pas le cas de bien des pays du monde.

L'agriculture canadienne est comparable à l'exploitation forestière et minière, au secteur de l'automobile et à bien d'autres secteurs. Le Canada a de bonnes industries, mais celle de l'agroalimentaire est sans doute au sommet. C'est l'une de nos industries gagnantes, et nous devons veiller à ce qu'elle le demeure. Grâce à ce projet de loi, nous espérons qu'en ce qui concerne l'agroalimentaire, le Canada tiendra son rang à l'échelle mondiale. Il ne faut pas oublier cela. Si des éléments de ce projet de loi font obstacle à l'objectif de placer le Canada au premier, deuxième ou troisième rang dans le monde, il faut les en retirer. Et si les éléments qui favoriseraient l'atteinte de cet objectif n'y sont pas, il faut les y inclure.

Le sénateur Mahovlich vient de me dire qu'il aime ce comité car il aime l'agriculture. Je suis content de constater que de tels sénateurs siègent à ce comité. Nous avons besoin de gens qui aiment le Canada et qui aiment l'agriculture pour faire ce travail. Je pense que c'est votre cas à tous.

Le deuxième facteur est la sécurité alimentaire. La sécurité alimentaire est une culture. Ce n'est pas quelque chose que les gens au sommet peuvent imposer à la base — quelque chose que vous pouvez enfoncer dans la tête de votre enfant. Il faut l'enseigner, donner l'exemple. Il faut s'en occuper, aborder la question soigneusement.

Encore là, nous en sommes à un tournant. Au Canada, la situation est unique. Nous avons grandi avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Nous l'avons créée ensemble — l'industrie et le gouvernement. Nous nous sommes dit que c'était la bonne manière d'assurer la sécurité alimentaire. C'est encore très particulier dans le monde. Maintenant, nous faisons enfin les choses qu'il fallait faire. Nous devons changer la législation que l'Agence canadienne d'inspection des aliments applique.

Nous avançons à grands pas, mais il faut être prudent. Ce projet de loi comporte de nombreux outils. Nous n'avons pas de feuille de route pour ces outils, et mes collègues, derrière moi, en parleront davantage demain. Il est risqué de donner des outils à des gens sans leur donner de directives sur leur utilisation, ou un plan d'utilisation. C'est le danger qui nous guette, mais nous devons en même temps veiller à ce que ces outils soient mis en place, car nous avons vécu une situation de crise et avons constaté que nous n'avions pas tous les outils qu'il fallait.

Nous ne disons pas qu'il faut s'arrêter tant qu'il n'y aura pas de plan, mais qu'il faut mettre les outils en place, puis travailler sérieusement avec l'industrie pour veiller à l'établissement du plan. C'est la raison pour laquelle j'ai mentionné que la sécurité alimentaire était une culture. Ce projet de loi pourrait devenir le marteau qui enfonce le clou de la sécurité alimentaire dans l'industrie et nous ne voulons pas cela. Nous voulons que la sécurité alimentaire relève d'un effort de coopération entre l'industrie et le gouvernement. C'est ce qui fait que les plans ne font pas que traîner sur les tablettes, mais qu'ils finissent par être appliqués. Comme vous le savez, nous vivons en ce moment même une crise. Il est très important de savoir que les gens qui fabriquent les produits alimentaires pour vous tiennent absolument à la sécurité alimentaire, du premier au dernier. Encore là, de nombreux éléments du projet de loi sont liés à cela.

Je vais vous donner un peu d'information au sujet de notre association commerciale. Nous sommes aussi de portée nationale, et nous représentons les importateurs d'un ensemble très particulier de produits : le poulet, la dinde, les oeufs et le fromage. Ce sont des produits que votre gouvernement a décidé de réglementer. C'est pourquoi nous nous appelons la Canadian Association of Regulated Importers. Nous comblons les trous pour bon nombre de ces produits particuliers. Nous produisons ici certaines espèces de poulet, mais nous ne produisons pas assez d'ailes, par exemple. C'est là que notre association intervient. Tout le monde dans le système peut faire plus d'argent sans avoir de surplus. Cela fonctionne très bien.

L'association a été constituée en personne morale en 1986, car une bonne partie des agences de commercialisation l'avaient fait juste avant. Ma présidente est ici aussi. Elle possède une vaste expérience de l'importation, alors si vous avez des questions sur ce qui fonctionne et sur la façon dont notre gouvernement en assure le contrôle, elle peut y répondre.

Pour ce qui est du projet de loi en soi, la CARI appuie la modernisation et la consolidation de la législation visant les produits alimentaires. Nous approuvons aussi la surveillance accrue que le projet de loi S-11 propose pour tous les produits alimentaires, tant canadiens qu'importés.

Étant donné que tous les fabricants et importateurs de produits alimentaires se font la concurrence pour une partie de l'estomac du consommateur canadien, tous les produits alimentaires devraient être soumis à la même loi régissant la sécurité alimentaire. C'est ce que nous commençons à faire. Avant, il y avait la réglementation de la volaille, puis la réglementation du bœuf, puis la réglementation des fruits et légumes, puis celle des produits laitiers. Nous disons maintenant que la règle qui vise la salubrité des aliments vise tout le monde de la même manière. Nous voulons cela depuis des années, et le temps est maintenant venu.

Le projet de loi jette aussi les bases de la traçabilité nationale. C'est une question sur laquelle nous nous sommes penchés dans l'industrie, mais à laquelle l'on doit accorder une attention à l'échelle nationale. Voilà ce qu'apporte ce projet de loi. Il accroît aussi les sanctions imposées en cas de violation relative à la salubrité des aliments. Cela est aussi nécessaire. Nous avons aussi finalement traité la question de l'altération des aliments, ce qui a l'heur de plaire à tout le monde dans l'industrie alimentaire, car c'était une question laissée en suspens que nous devions régler.

Vous vous demandez peut-être : « Pourquoi privilégier une approche commune? » Ce n'était pas comme cela que nous procédions par le passé. Pourquoi parlons-nous maintenant d'une approche commune? Alors que les consommateurs demandent de plus en plus de renseignements, l'un des points intéressants que l'on remarque est l'utilisation du mot « naturel ». Vous le voyez peut-être sur de plus en plus de produits. Vous vous dites peut-être « J'aime ces produits naturels. Ils sont bien. Ils ne contiennent pas de produits chimiques ni telle ou telle substance ». Vous les aimez. Le terme « naturel » ne peut s'appliquer aux produits de la viande ou de la volaille parce que l'ACIA a dit « Désolé, si vous élevez du bétail, des poulets ou des poules pondeuses dans des granges, ce n'est pas naturel. S'il y a un cochon qui court dans votre champ, si vous arrivez à l'attraper, vous pouvez dire qu'il est naturel ». Nous avons rétorqué : « Un instant; pour nous, ça n'a pas de sens puisque nous voyons le mot « naturel » sur d'autres produits au Canada. Pourquoi sont-ils naturels et pas les nôtres? Nous avons tenu cette discussion, et l'ACIA commence à reconnaître que nous avons peut-être besoin de règles pour que le mot « naturel » puisse s'appliquer à tous les produits de base. Voilà pourquoi nous avons besoin d'une approche commune.

Il en va de même pour l'enregistrement des étiquettes préalablement à la mise en marché. L'un des aspects de cet enregistrement que vous ignorez peut-être est que lorsqu'il est question de volaille et de viande, nous devons enregistrer ces étiquettes avant de pouvoir aller au marché. Cette exigence ne s'applique à personne d'autre dans l'industrie. Ce projet de loi nous permettra de faire l'enregistrement des étiquettes préalablement à la mise en marché de façon générale, et cela facilitera vraiment le contrôle des exportations, comme Mme Bilkhu saura vous le dire. Une fois que vous avez une étiquette préalablement enregistrée, tout ce dont vous avez besoin c'est d'un numéro à la frontière pour contrôler cette importation. C'est la meilleure façon de procéder. Nous pensons que cette règle devrait s'appliquer à tous les produits de base.

J'ai d'autres commentaires dans mes notes, mais peut-être que nous pourrons les aborder pendant la période de questions. Merci.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Devalk.

Le sénateur Plett : L'un des principaux objectifs de ce projet de loi est d'assurer la cohérence entre les importations, les exportations et les produits nationaux. Aux termes de la loi proposée, « le gouvernement du Canada disposera de nouveaux pouvoirs lui permettant d'établir des règles plus claires pour les exportateurs canadiens de produits alimentaires et les partenaires commerciaux qui importent des produits alimentaires au Canada ».

« En outre, le projet de loi contribue à harmoniser le système canadien de salubrité des aliments à ceux de nos partenaires commerciaux, notamment la Food Safety Modernization Act des États-Unis. Des pouvoirs souples et modernes permettront de répondre rapidement aux nouvelles exigences internationales en matière de commerce. »

J'ai deux ou trois questions. Premièrement, ce projet de loi rationalise un certain nombre de lois relatives à la salubrité des aliments, y compris les régimes d'inspection. En quoi cela aura-t-il des conséquences positives pour vos membres?

M. Devalk : Les conséquences positives pour nos membres ont beaucoup à voir avec la déclaration que vous avez faite plus tôt, que le projet de loi nous permet d'être concurrentiels face à nos partenaires commerciaux. C'est très important. À l'heure actuelle, on juge que les systèmes canadien et américain sont équivalents — c'est certainement le cas dans le secteur de la viande. Si vous n'aviez pas suivi cette voie avec le projet de loi, il y aurait de fortes chances pour qu'ils ne le soient pas à l'avenir. L'équivalence compte beaucoup pour toute l'industrie de la viande et de la volaille au Canada.

M. Mussar : Pour continuer dans la même veine que M. Devalk, je vais vous donner deux exemples pour vous montrer en quoi cela profitera à nos membres.

Premièrement, si un produit qui arrive des États-Unis doit être inspecté par l'ACIA, il doit l'être par un inspecteur désigné pour inspecter ce produit en particulier lorsque le camion arrive à la frontière. Par exemple, si je suis inspecteur des viandes, je ne peux pas inspecter les fruits et légumes frais, ni les produits finis. Il faut attendre qu'un inspecteur autorisé à faire ce type d'inspection arrive à la frontière, fasse l'inspection et dédouane le produit.

Nous croyons comprendre que le projet de loi facilitera le mouvement des marchandises de part et d'autre de la frontière en élargissant cette capacité. Au lieu de cataloguer un inspecteur, le projet de loi lui permettra d'inspecter les aliments en général; il deviendra « inspecteur des aliments » au lieu d'être « inspecteur des viandes ».

De façon similaire, lorsqu'un inspecteur entre dans une usine au Canada, il est possible que l'on y fabrique tout un éventail de produits. Dans cette usine, ils voient peut-être des représentants de divers groupes de produits alimentaires de l'ACIA qui viennent faire des inspections. Nous sommes donc assujettis à de multiples inspections et certifications. Encore une fois, en rationalisant le système et en permettant aux inspecteurs d'accomplir diverses tâches, de devenir des inspecteurs alimentaires au lieu d'être des inspecteurs spécialisés, l'on s'attend à ce que la fréquence des inspections diminue — mais pas la rigueur. Ce sera plus efficace à la fois pour l'industrie et pour les consommateurs et contribuables canadiens.

Le sénateur Plett : Vous avez répondu à ma deuxième question concernant la frontière, alors je vais en poser une autre.

Depuis l'avènement de la mondialisation et du libre-échange, les Canadiens achètent de plus en plus de produits alimentaires du monde entier, et vous y avez fait allusion. En quoi le projet de loi accroît-il la salubrité des importations alimentaires canadiennes?

M. Mussar : Le projet de loi aborde quelques questions. Premièrement, il offre aux importateurs de produits au Canada des directives claires concernant leurs responsabilités, c'est peut-être le point le plus important. Nous croyons savoir que l'une des dispositions qui l'accompagneront au cours du processus réglementaire est l'exigence pour tous les importateurs d'aliments, et tous les producteurs nationaux qui expédient leurs produits d'une province à l'autre, d'avoir mis en place un système préventif de contrôle de la salubrité des aliments. Ce processus se concentre sur le produit importé ou sur le processus employé dans la fabrication d'un produit, il en évalue les risques et il s'assure que l'importateur ou le fabricant met en place les processus nécessaires pour atténuer ou éliminer ce risque. Nous nous attendons à ce que cela accroisse le niveau de sécurité alimentaire en général ou du moins à ce que cela réduise le risque de maladies d'origine alimentaire.

M. Devalk : Je crois que les dispositions sur la délivrance de permis sont vraiment primordiales dans ce cas. Avant, il y avait des lacunes et il n'était pas clair que toutes les importations au Canada étaient visées par la réglementation en vigueur. Le projet de loi clarifie le fait que toutes les importations doivent être accompagnées d'un permis, si c'est la direction que prendra ce régime. Une fois qu'un permis a été délivré, on connaît au moins l'importateur. On peut ensuite adopter des règles pour dire qu'il est possible d'avoir un permis, mais que pour en obtenir un, produire des aliments et en importer au Canada, il est nécessaire d'avoir un plan de salubrité des aliments. En conséquence, nous devons connaître les détails de votre plan. C'est ce que M. Mussar a mentionné.

Vous pouvez aller un peu plus loin et demander le dédouanement préalable de tous les envois. Vous devez nous dire quand vous comptez importer cette cargaison au Canada pour que nous puissions être prêts. Vous pouvez dire que vous aimeriez voir l'étiquetage des produits avant qu'ils arrivent et s'il n'est pas bilingue, par exemple, en refuser l'entrée au Canada — mais pour l'instant, il l'est. L'enregistrement de tous les étiquetages préalablement à la mise en marché réglerait ce problème très rapidement. Vous sauriez aussi avec qui prendre contact à ce moment-là.

Ce projet de loi comble des lacunes que nous avions. Comme je l'ai mentionné, lorsqu'il est question d'outils, nous voulons nous assurer que cette nouvelle loi est bien utilisée, mais elle devrait donner aux Canadiennes et aux Canadiens l'assurance que les produits importés au Canada respectent les normes canadiennes.

Le sénateur Peterson : Monsieur Mussar, il y a un certain temps, j'ai eu l'occasion dans le cadre des travaux de notre comité de demander à M. McAlpine de Maple Leaf Foods si les transformateurs seront obligés de déménager à l'extérieur du pays quelle que soit leur taille et de réexpédier les produits à des taux très réduits à cause des nouvelles exigences en matière d'étiquetage et d'emballage. Il m'a répondu :

C'est une menace très réelle à notre compétitivité. Les importations d'aliments transformés augmentent rapidement, de même que la fermeture des usines au Canada.

Pouvez-vous vous prononcer sur ce point? Risquons-nous l'exode des transformateurs et des emballeurs canadiens avec ces modifications à l'étiquetage des aliments?

M. Mussar : Je ne suis pas certain que je dirais que les Canadiens risquent de perdre leur industrie de la transformation. Il est indéniable que le pourcentage de produits importés au Canada a augmenté d'année en année, mais c'est en partie en raison de la diversité de notre population. Je crois que le dernier recensement a montré que notre population avait augmenté de 2,5 millions et que, de ce nombre, seulement 1,2 million étaient des bébés nés de parents canadiens, les autres étaient des immigrants. En conséquence, les goûts alimentaires changent en fonction, notamment, de notre population changeante.

Un autre facteur est que nombre de Canadiens ont maintenant la chance de voyager pour le plaisir ou autre, alors nous avons l'occasion de vivre des expériences à l'étranger que nos parents n'ont jamais vécues. Nous sommes nombreux à trouver que certaines de ces choses sont très bonnes. Qui aurait cru il y a quelques années qu'on verrait autant de restaurants de sushis?

Les préférences des Canadiens changent et ils acceptent que certains de ces produits doivent absolument être importés.

M. Devalk : Je crois que vous avez raison si on en juge par les statistiques réelles. Il est évident que nous fermons les usines de fabrication de produits alimentaires plus rapidement que nous les construisons, mais c'est en partie à cause de la situation réglementaire au Canada. Elle en est partiellement responsable.

Cependant, je crois qu'un autre transformateur, avec lequel j'ai beaucoup d'expérience, influe beaucoup sur les économies d'échelle au Canada. Nous avons exactement besoin de ce dont j'ai parlé au départ. Nous avons besoin d'une vision de ce que notre industrie alimentaire devrait être. Nous devons nous rappeler que le Canada a un avantage comparatif lorsqu'il est question d'aliments, et nous avons besoin de politiques et de règlements qui nous encouragent à en profiter et à le vendre à l'étranger. Si nous le faisons, nous aurons des économies d'échelle et nous construirons des usines au Canada au lieu de les fermer.

Le projet de loi a le potentiel d'alléger le fardeau réglementaire qui pèse sur nos industries et de le clarifier. L'étiquetage ne sera pas à lui seul responsable du déménagement d'une usine à Buffalo, contrairement aux économies d'échelle. Le gouvernement au pouvoir s'évertue à créer des emplois au Canada. Nous devons nous assurer que chaque fonctionnaire au pays suit son exemple. Nous n'avons pas besoin de fonctionnaires qui freinent la création d'emplois avec de la réglementation. Voilà le genre de chose qui se passe en ce moment. Le projet de loi contribuera à le faire.

Le sénateur Peterson : Pour être bien clair, l'opposition est très favorable à ce projet de loi. Nous avons seulement quelques réserves, dont l'une est la capacité fiscale de vraiment faire ce que le projet de loi vise à faire. Sous le régime de ce projet de loi, le gouvernement ne s'attend pas à embaucher des travailleurs de première ligne ou du personnel supplémentaire. Cependant, Bob Kingston, inspecteur d'aliments chevronné, a déclaré :

Le projet de loi est bon. Il est tout à fait correct, mais ce qui nous préoccupe c'est qu'ils ne seront pas capables de livrer la marchandise... Chaque fois qu'ils se sont trouvés en situation de ne pas pouvoir le faire, ils ont rejeté plus de responsabilités sur les parties réglementées.

Pouvez-vous préciser ses commentaires en nous disant de quelle façon ils influent sur votre industrie?

M. Devalk : Oui. Il faudrait remercier Bob d'avoir continué à débattre de ces questions. Il est bon de les mettre à l'avant-plan.

Lorsque l'Agence canadienne d'inspection des aliments a été formée, on y a affecté entre 4 000 et 5 000 inspecteurs. L'une de leurs premières tâches a été de tenter d'obtenir un budget pour couvrir leurs activités et ils ont eu du mal. À l'époque, l'industrie a recommandé à l'agence de déterminer ce qu'elle voulait faire concernant la production d'aliments salubres au Canada et les ressources dont elle aurait besoin, et ensuite de voir si elle avait suffisamment d'inspecteurs pour atteindre cet objectif.

Avec ce nouveau projet de loi, je crois qu'il incombe encore à l'agence de revoir le nombre d'employés qu'elle a. Voilà pourquoi la discussion que nous avons eue concernant la feuille de route est si importante. Si l'on s'entend pour dire que l'on veut atteindre l'objectif du projet de loi S-11, il faut déterminer si l'on dispose de suffisamment de ressources pour assurer la salubrité des aliments au Canada. Cela n'a jamais été fait, mais ce doit l'être.

En ce sens, je suis d'accord avec Bob, mais il ne sera probablement pas d'accord avec moi lorsque je dis que cette enquête révélera peut-être que l'on a besoin de moins d'inspecteurs et non le contraire. C'est une possibilité.

Vous avez raison de dire que nous n'avons pas la réponse. Peut-être qu'il a raison, mais peut-être aussi qu'il a tort.

M. Mussar : Pour ajouter à ce que Bob a dit, nous travaillons avec un nombre réglementaire d'inspecteurs et nous avons fait ce que nous avions à faire avec ces gens. Il est de plus en plus accepté, non seulement ici au Canada, mais dans le monde entier, qu'il faut utiliser l'argent des contribuables à meilleur escient. Une façon de le faire est de procéder à des inspections fondées sur les risques, c'est-à-dire de cerner les produits les plus susceptibles de causer un problème de sécurité alimentaire et d'y consacrer plus de ressources qu'à l'inspection de toutes les denrées alimentaires au même niveau, et je crois que c'est la voie que nous suivons.

Le sénateur Eaton : Vous avez parlé d'une vision de ce que l'industrie alimentaire devrait être. Vous représentez tous les trois les exportateurs et les importateurs. Cette vision ne pourrait-elle pas venir des gens de l'industrie? C'est toujours dangereux lorsque la vision est celle du gouvernement. Ce serait vraiment bien si, pour changer, les témoins nous faisaient part de leur vision à eux.

Vos associations songent-elles à formuler une vision et à ensuite dire au gouvernement ce dont elles ont besoin pour la concrétiser?

M. Devalk : Je vais être accusé de poser ma propre question.

Vous avez tout à fait raison. L'industrie alimentaire du Canada se trouve exactement dans cette position. Il est temps pour nous d'avoir une stratégie alimentaire canadienne. Bien des gens de notre industrie y travaillent. Le Conference Board du Canada mène une grande étude à cet égard. Nous avons eu des politiques alimentaires jusqu'à un certain point et nous avons des politiques agricoles, mais nous n'avons jamais vraiment eu de stratégie alimentaire nationale.

Le sénateur Eaton : C'est vous les experts.

M. Devalk : Je suis d'accord avec vous. Nous ne devrions pas nous attendre à ce que le gouvernement définisse pour nous la question. L'industrie présentera des idées au gouvernement à ce sujet. Mon collègue, Albert Chambers, vous en dira plus long à ce propos demain. Il vous parlera de certains des critères qui forment une bonne stratégie alimentaire canadienne.

Le travail à cet égard se poursuit. Les fonctionnaires de l'ACIA y travaillent en ce moment. Ils sont aussi d'avis qu'il vaut la peine de le faire. C'est une bouffée d'air frais. L'industrie et le gouvernement semblent agir de concert et le gouvernement semble prêt à faire précisément ce dont vous parlez. Les responsables veulent qu'on leur en dise plus sur ce que nous aimerions voir.

Le sénateur Eaton : Merci de ce commentaire. C'est très positif.

Monsieur Mussar, vous avez parlé de farine enrichie. Éclairez-moi à ce sujet. Selon vous, pourquoi le gouvernement insiste-t-il pour que toute la farine exportée soit enrichie? Est-ce une erreur ou y a-t-il des raisons à cela?

M. Mussar : Je ne suis pas certain qu'il y ait une raison précise à cela. J'ai choisi cela parce qu'il s'agit d'un exemple que je connais bien et qu'il s'agit d'un corps avec lequel nos sociétés membres ont eu des difficultés au fil des ans. Actuellement, il n'y a qu'une disposition qui prévoit qu'ils peuvent importer de la farine qui n'est pas enrichie conformément aux normes canadiennes, de façon à pouvoir l'utiliser dans la fabrication de produits destinés à l'exportation.

Le sénateur Eaton : Nous importons de la farine?

M. Mussar : Actuellement, il est permis d'importer de la farine.

Le sénateur Eaton : En importons-nous?

M. Mussar : Oui.

Le sénateur Eaton : Nous importons de la farine?

M. Mussar : Sans substance nutritive.

Le sénateur Eaton : Pourquoi faisons-nous cela, étant donné la quantité de farine que nous avons au pays?

M. Mussar : Pour que les entreprises canadiennes puissent avoir accès à de la farine non enrichie qu'elles peuvent utiliser dans des produits qui satisfont aux exigences des marchés étrangers.

Le sénateur Eaton : Je vois; c'est comme un cercle vicieux. C'est intéressant.

Lorsque nous entamerons des pourparlers sur un accord de libre-échange avec la Corée, le Japon et l'UE, sera-t-il question de choses comme la farine enrichie?

M. Devalk : Oui.

Le sénateur Eaton : Cela pourrait-il avoir une incidence intéressante sur ces règlements?

M. Devalk : Oui.

Savez-vous pourquoi le Canada a décidé d'ajouter de l'acide folique dans la farine?

Le sénateur Eaton : Non, je ne le sais pas.

M. Devalk : C'est une décision que Santé Canada a prise pour des raisons sociales.

J'aurais besoin de votre aide sur ce point, monsieur Mussar. Je crois que c'est lié à la grossesse.

M. Mussar : L'acide folique est une vitamine qui aide à réduire le risque d'anomalies du tube neural chez les bébés.

Le sénateur Eaton : Je suppose que si on a une mauvaise alimentation, mais qu'on a du pain, on aura un apport en acide folique.

M. Mussar : Le Canada a recours au pain, notamment, pour procurer des éléments nutritifs aux Canadiens. D'autres pays n'approuvent peut-être pas cette stratégie; en conséquence, particulièrement dans le cas de l'acide folique, ils ont accepté les conclusions ou d'autres recherches et ont interdit l'enrichissement alimentaire.

Le sénateur Eaton : Nous, les Canadiens, savons qu'ils ont tort et que nous avons raison, évidemment.

M. Mussar : Je demanderais à mes collègues de Santé Canada de répondre à cette question.

Le sénateur Merchant : Le projet de loi S-11 touche les produits carnés inspectés par le gouvernement fédéral, mais n'a aucune incidence sur la viande inspectée par les provinces. Premièrement, qui a les normes les plus élevées? Qui a le plus d'argent à consacrer à l'inspection? Que font les consommateurs qui désirent faire le bon choix pour décider s'ils doivent acheter de la viande inspectée sous autorité fédérale ou sous autorité provinciale?

M. Devalk : Les consommateurs canadiens peuvent avoir bon espoir qu'en ce qui concerne la sécurité alimentaire, il n'y a pas une très grande différence entre les deux types d'installation. Il ne fait aucun doute qu'il est plus coûteux d'obtenir l'agrément du gouvernement fédéral, mais je serais le dernier à dire que cela signifie qu'on a nécessairement un degré de sécurité plus élevé. Actuellement, la salubrité des aliments fait l'objet de beaucoup de discussions entre les provinces et le gouvernement fédéral. Il y a 10 ans, les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux ont adopté les principes HACCP qui seraient intégrés dans les usines. HACCP signifie analyse des risques et maîtrise des points critiques; il s'agit d'une invention de la société Pillsbury, qu'il a mise au point pour les aliments destinés aux astronautes. On voulait s'assurer que les astronautes n'auraient pas la diarrhée, parce que cela nuit aux activités dans le secteur des satellites.

Nous avons emprunté cette technologie et l'avons adaptée à l'industrie alimentaire. En conséquence, ces systèmes sont en place tout au long du processus; on vérifie la qualité des aliments de façon à ce qu'ils soient sécuritaires à la fin de la chaîne. Ces principes ont été acceptés par tous les intervenants au Canada, tant au provincial qu'au fédéral. Je ne pense pas, qu'en tant que consommateur, il y ait vraiment lieu de se préoccuper de l'endroit où cela a été traité, que ce soit à l'échelle fédérale ou provinciale.

Vous avez raison de dire que le projet de loi s'applique principalement aux pouvoirs fédéraux, c'est-à-dire au commerce interprovincial, aux exportations et aux importations. Le commerce intraprovincial n'est pas visé, mais nous pensons — il s'agit d'une question que nous voulons poser — que cela concerne certainement le mouvement entre deux usines fédérales, ce qui serait d'ordre intraprovincial. Lorsque le projet de loi et la réglementation seront mis en oeuvre, il y aura des consultations avec les provinces. Il y a maintenant beaucoup d'usines provinciales qui ont réussi à satisfaire à la réglementation fédérale à un coût beaucoup moins élevé que dans le passé.

Le gouvernement fédéral — l'ACIA — a déjà fait un travail sur ce que nous appelons les usines de petite et moyenne taille et sur la façon dont elles peuvent plus facilement être admissibles aux programmes de salubrité des aliments. Nous sommes d'avis que grâce au projet de loi, le monde de la réglementation sera un peu plus simple, ce qui facilitera l'harmonisation entre les provinces et le fédéral. En fin de compte, quel est notre objectif? Nous voulons doter le Canada d'un système de salubrité des aliments unique et applicable à tous.

Le sénateur Merchant : En ce qui a trait aux amendes, je constate que la sanction maximale a été portée à cinq millions de dollars, mais jusqu'à maintenant, l'amende la plus élevée qui ait été imposée s'élevait à 100 000 $. Je pense qu'elle a été imposée par un juge. Pensez-vous qu'il y aura une augmentation des amendes? Dissuaderont-elles les gens de s'adonner à des manipulations, des canulars ou des supercheries?

M. Devalk : Je ne pense pas que les amendes elles-mêmes peuvent être un moyen de dissuasion, en ce sens qu'elles peuvent être augmentées à n'importe quel montant. Cependant, le fait que ces amendes existent signifie certainement que les entreprises qui s'adonnent à une activité pouvant être contraire aux lois ont davantage de quoi être préoccupées. En ce sens, elles ont un rôle à jouer dans la culture de l'entreprise. Elles permettront de faire savoir aux employés que si une infraction est commise et que l'entreprise se fait prendre, l'employé sera responsable.

Les entreprises peuvent utiliser cette amende à leur avantage pour s'assurer que la culture de l'entreprise est respectée. Cependant, à mon avis, une amende est quelque chose que l'on ne veut jamais avoir à payer. On ne peut pas se retrouver devant les tribunaux. L'idée est d'instaurer dans les usines une culture axée sur la salubrité des aliments, et ces choses sont des mesures externes.

En ce qui a trait à la manipulation, il n'y avait certainement aucune mesure dissuasive, et je pense que ce que nous avons fait à cet égard est bien, parce que certaines personnes réussissaient à se tirer d'affaire après avoir fait une menace concernant la dinde, par exemple, ou le poulet — peu importe. Ces gens pouvaient s'en tirer à bon compte et rien n'était fait. Cette mesure donne aux autorités le pouvoir de le faire.

Dans l'industrie alimentaire, notre espoir n'est pas de voir ces choses être utilisées. Nous espérons voir l'adoption de règlements, que tous travaillent ensemble, qu'une culture axée sur la salubrité des aliments soit ancrée dans les entreprises et, en conséquence, que les infractions seront très rares.

Le sénateur Robichaud : Monsieur Mussar, vous êtes d'accord avec le projet de loi. Vous aimeriez qu'il soit adopté. Vous avez parlé de quelques articles qui pourraient poser problème, mais ensuite, à la toute fin de votre exposé, vous avez dit que certains articles ou certains aspects du projet de loi devraient être examinés plus attentivement. Pourriez- vous nous en dire plus à ce sujet? Est-ce avant ou après l'adoption du projet de loi, ou les deux?

M. Mussar : Il y a deux ou trois façons d'aborder les points qui devront, à notre avis, être examinés. Notre recommandation serait de le modifier à l'adoption du projet de loi. En général, notre préoccupation ne porte pas sur l'intention du projet de loi, mais plutôt sur le libellé qui a été choisi et qui pourrait avoir des conséquences imprévues. La meilleure approche serait de trouver une façon de choisir un ensemble de mots qui reflètent l'intention et qui réduisent aussi le risque de conséquences imprévues.

Il y avait des discussions quant à savoir si nous pourrions régler ces problèmes à une étape ultérieure, peut-être pendant l'étape de l'élaboration des règlements qui suit l'adoption du projet de loi. Certains sont d'avis que oui, c'est ce que nous pourrions faire. Cependant, pour moi, les problèmes que cela soulève, c'est que nous commençons à régler des exceptions; l'une des difficultés que nous avons essayé de régler et le fait que l'innovation se produit très rapidement. Nous avons de la difficulté parce qu'en règle générale, il faut deux ans pour obtenir une modification de la réglementation, à condition que quelqu'un souhaite s'en occuper. En conséquence, le faire à l'étape de la réglementation est un état beaucoup plus complexe du processus de réglementation.

Ce que nous espérons, c'est que l'on traite de l'intention de mesure législative, mais qu'on utilise un libellé qui la reflète vraiment, mais sans les conséquences imprévues.

Le sénateur Robichaud : Pourriez-vous me donner un exemple de mots que vous aimeriez modifier de façon à ce qu'ils reflètent mieux l'intention de la mesure législative?

M. Mussar : Oui. Par exemple, nous croyons comprendre que l'intention de la première disposition dont j'ai parlé est d'empêcher l'entrée au Canada d'aliments qui seraient insalubres s'ils étaient vendus au Canada. Ayant quelque peu réfléchi à la question, nous essayons de déterminer si ces aliments peuvent être bloqués. Lorsque le gouvernement sait que quelque chose de dangereux en provenance du point A se dirige vers le Canada, peut-il l'intercepter? C'est là l'intention; c'est ce que nous essayons de faire. Si nous pouvions trouver un ensemble de mots qui correspondent à « lorsque le gouvernement du Canada prend connaissance de », alors voilà la mesure que nous prenons.

Quant à savoir si cela est suffisant, c'est une question qui demeure ouverte à d'autres discussions, à mon avis, mais il s'agit du genre de discussion qu'il vaudrait la peine d'avoir.

M. Devalk : Il y a un exemple dans la version anglaise du paragraphe 24(1), avec le mot « they ». Nous ne savons pas si le mot « they » fait référence à un inspecteur, mais nous pensons qu'il devrait désigner l'ACIA.

De même, vous devez ajouter le mot « documentés » après « motifs raisonnables ». Je sais que d'autres personnes ont des préoccupations par rapport à cet article. Cela accorde beaucoup de pouvoirs aux inspecteurs, en particulier celui de saisir des ordinateurs et de prendre connaissance des données qu'ils contiennent. Je veux m'assurer que l'inspecteur a documenté les raisons pour lesquelles il veut utiliser cet ordinateur. Vous pouvez régler le problème en insérant les mots « ACIA » et « documentés ». À ce moment-là, on a un processus.

Le sénateur Mahovlich : Le Canada est un pays fortement réglementé et les Canadiens voyagent beaucoup. Les autres pays regardent-ils de notre côté? En ce qui a trait à la réglementation, où en sommes-nous par rapport au reste du monde? Y a-t-il une réglementation en Russie, en Inde ou d'autres pays? Ont-ils une réglementation semblable à la nôtre? À quoi sert-il d'avoir une réglementation ici lorsqu'on voyage de par le monde?

M. Devalk : Sénateur, d'abord, le gouvernement a la responsabilité de s'assurer que les Canadiens consomment des aliments salubres. Je pense que tous les pays prennent cette responsabilité au sérieux — certains plus que d'autres — et certains s'en remettent à l'industrie. Il ne fait aucun doute qu'en ce qui concerne la salubrité des aliments, le gouvernement est enclin à intervenir, et je pense que notre industrie respecte cette approche.

J'aurais aimé que vous nous demandiez de parler de notre position par rapport à l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et l'Europe. Lorsqu'on le fait, on constate que le Canada soutient plutôt bien la comparaison. Le Canada est un chef de file au sein du Codex, qui est un autre groupe qui établit des normes à l'échelle mondiale. HACCP a été créé avec l'aide du Canada et les règles en matière de salubrité des aliments que nous utilisons sont des principes qui ont été adoptés partout dans le monde. Nous ne lésinons pas lorsqu'il est question de réglementation gouvernementale. Nous sommes bons dans ce domaine. Je suppose que nous avons hérité cela de nos amis britanniques.

Le sénateur Mahovlich : Lorsque les Canadiens voyagent, le Canada les avise-t-il des pays dans lesquels ils devraient faire preuve d'une plus grande vigilance?

M. Devalk : Je crois qu'on le fait. Dans certains pays, notre ambassade vous donnera des conseils.

M. Mussar : Pour renchérir sur les propos de M. Devalk, nous nous trouvons dans une situation unique en Amérique du Nord : en effet, pour la première fois les États-Unis et le Canada examinent simultanément leurs lois respectives sur la salubrité des aliments. Dans les deux cas, il s'agit de les améliorer. Si nous arrivons à aligner nos législations, nos deux pays auront un très bon système. Cela permettra la circulation des biens du Canada vers les États-Unis et de vraiment atteindre certains des autres objectifs que nous nous sommes fixés dans le cadre du groupe de travail Par-delà la frontière et du Conseil de coopération en matière de réglementation et qui consistent à accroître la prospérité des entreprises canadiennes et américaines.

C'est donc un moment vraiment unique dans l'histoire de nos nations.

Le président : Lorsque le comité s'est rendu à Washington, nous avons porté à l'attention des sénateurs et du gouvernement des États-Unis la question de la salubrité des aliments et indiqué que le Canada étudierait cette question sérieusement.

M. Mussar : Nous vous savons gré de cette démarche puisque, en tant qu'association professionnelle, nous œuvrons activement avec les responsables de la réglementation au Canada, mais aussi aux États-Unis. Nous avons communiqué le même document de travail aux deux pays afin de susciter une vision commune sur les moyens d'assurer la salubrité des aliments sans nuire à la circulation des biens entre les deux pays.

Le sénateur Robichaud : Lorsque j'ai posé une question sur le libellé, vous avez mentionné l'article 24 et parlé du mot « il ».

M. Mussar : Oui, c'est ce qu'a dit M. Devalk.

Le sénateur Robichaud : Je n'arrive pas à le trouver.

M. Devalk : C'est dans le chapitre « Inspection » au paragraphe 24(1), qui se lit comme suit :

Sous réserve du paragraphe 26(1), l'inspecteur peut, à toute fin liée à la vérification du respect ou à la prévention du non-respect de la présente loi, entrer dans tout lieu — y compris un véhicule — s'il

Le sénateur Robichaud : Vous aimeriez avoir comme sujet : « ACIA » ou « inspecteur »?

M. Devalk : Non, non.

Le sénateur Robichaud : Plus loin, le projet de loi parle d'« inspecteur ».

M. Devalk : Je pense que l'inspecteur est un agent de l'ACIA. Lorsque l'inspecteur examine les ordinateurs et d'autres types de matériel, il est important — je crois — qu'il ait pu prouver, à l'aide d'un document communiqué à un agent de l'ACIA, qu'il a des motifs raisonnables et c'est la raison pour laquelle nous devons agir ainsi. Autrement dit, il faut que la démarche soit documentée.

Le sénateur Duffy : Pour conclure, il importe que Mme Bilkhu réponde à une question fondamentale. Les gens qui, d'un océan à l'autre nous regardent ce soir à la télévision, vont tous les jours faire leurs courses. Après tout ce que nous avons entendu et quelqu'un a dit à la télévision : « À cause du bœuf, je vais devenir végétarien », quel message voulez-vous envoyer aux consommateurs canadiens, avez-vous des conseils à leur donner sur leurs achats d'épicerie et peuvent-ils avoir confiance pour l'avenir?

Sukhdeep Bilkhu, présidente, Canadian Association of Regulated Importers : Je leur donnerais comme message que nous avons confiance en notre système et dans notre Agence canadienne d'inspection des aliments. Des accidents arrivent pour toutes sortes de biens, qu'il s'agisse de fruits et de légumes, de volaille ou de viande. Toutefois, notre agence d'inspection des aliments a les choses bien en main et ils ne devraient pas s'inquiéter.

Le président : Avez-vous un commentaire, monsieur Devalk, je vous ai vu lever la main?

M. Devalk : Non, mais j'ai une question. Dans nos notes, nous avons des sujets que nous n'avons pas pu traiter en raison du temps. Nous pensons toutefois que certains articles devraient être réexaminés. Je me demande si le comité le fera ou comment il compte procéder?

Le président : Oui il y a une procédure, monsieur Devalk. Je demanderai au greffier de vous voir immédiatement après la rencontre et ce sera remis au comité.

M. Devalk : Excellent.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Mussar, monsieur Devalk et madame Bilkhu.

Chers collègues, j'aimerais vous présenter le deuxième groupe de témoins.

Messieurs, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation et de nous communiquer vos points de vue sur le projet de loi S-11.

Nous avons avec nous M. Ron Versteeg, vice-président des Producteurs laitiers du Canada, M. Martin Unrau, président de la Canadian Cattlemen's Association, et M. Dennis Laycraft, vice-président exécutif de cette même association.

On m'informe que M. Versteeg fera le premier exposé. Vous avez la parole, monsieur.

Ron Versteeg, vice-président, Producteurs laitiers du Canada : Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité de cette possibilité que vous me donnez de présenter, au nom des Producteurs laitiers du Canada, un exposé sur la salubrité des aliments dans le cadre de l'examen, par le comité, du projet de loi S-11. Les producteurs laitiers du Canada pensent que la modernisation du système réglementaire des produits alimentaires contribuera à renforcer le système déjà solide dont disposent les Canadiens.

Je suis moi-même un exploitant de ferme laitière et ma ferme se trouve près de Russell, près d'Ottawa, à une demi- heure de route par l'autoroute 417. Avec ma famille, j'exploite une terre de 650 acres et 225 vaches laitières.

À titre d'introduction, Les producteurs laitiers du Canada sont une organisation nationale qui fait du lobbying et représente les intérêts des 12 746 membres qui la composent. Nous cherchons à soutenir des politiques propres à assurer la viabilité des producteurs laitiers canadiens et à promouvoir les produits laitiers et leurs bienfaits pour la santé.

Les Producteurs laitiers du Canada appuient le projet de loi S-11. À la suite de sa présentation, ils ont publié une déclaration saluant la nouvelle législation, étant donné la grande priorité qu'ils accordent à la salubrité des aliments. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'une responsabilité partagée et qui est bien comprise par nos membres.

Notre organisation constate que la nouvelle loi modifiera l'actuelle Loi sur la santé des animaux en y intégrant une réglementation destinée à suivre les déplacements des animaux et à rendre possible la traçabilité. La traçabilité est d'ailleurs un outil supplémentaire pour atténuer les risques liés à la santé animale et, partant, les risques associés à la salubrité des aliments. Elle permettra en outre de rétablir plus rapidement l'accès au marché et le retour à la normale après une importante épizootie.

Voilà deux importantes raisons de rendre obligatoire la traçabilité du bétail.

Les producteurs laitiers du Canada voient d'un bon œil la consolidation en une seule loi des diverses législations relatives à la salubrité des aliments. Cela permettra de rendre encore plus clairs le rôle et les responsabilités de l'ACIA pour assurer la salubrité des aliments et protéger les consommateurs. L'organisation a manifesté en outre son appui en faveur d'un système d'inspection plus cohérent à l'égard de tous les produits alimentaires et de sanctions plus sévères des actions qui mettent en danger la santé et la sécurité des Canadiens.

On salue en outre la disposition visant à mieux contrôler les importations et les exportations et à renforcer la traçabilité et l'étiquetage des aliments.

Les Producteurs laitiers du Canada espèrent bien voir de quelle façon la nouvelle loi tiendra compte du rôle de la technologie dans la production alimentaire, renforcera le contrôle des importations alimentaires, découragera les falsifications et les pratiques trompeuses, et préservera les pouvoirs de proposer des normes pour l'alimentation au Canada.

Notre organisation salue l'engagement qu'a pris le gouvernement d'élaborer des règlements d'inspection et d'application clairs et uniformes, qui consolident et modernisent les diverses lois en vigueur qui sont sous la responsabilité de l'ACIA. Nous nous réjouissons à la perspective de prendre part à l'examen de la loi et à l'élaboration d'une nouvelle série de règles pertinentes.

Notre organisation souhaite la consolidation de la Loi sur les produits agricoles au Canada, assortie d'une réglementation pertinente dans la Loi sur les aliments et drogues. Nous tenons en particulier à ce que les normes de composition des produits laitiers qui figurent actuellement dans la Loi sur les produits agricoles au Canada soient intégrées, avant que cette loi ne soit abrogée, dans la réglementation que prévoit la Loi sur les aliments et drogues.

[Français]

Les engagements des PLC à l'égard de la salubrité des aliments.

Aujourd'hui, les consommateurs de produits laitiers veulent savoir que les aliments qu'ils consomment sont sans danger et nutritifs. Les PLC ont mis au point le Programme de lait canadien de qualité, ou LCQ, un programme de salubrité des aliments à la ferme basé sur les risques pour aider les producteurs à éviter et à réduire le danger concernant la salubrité des aliments et les risques à leur ferme.

Ce programme, obligatoire pour tous les producteurs laitiers d'ici la fin 2015, fournira aux consommateurs l'assurance que les viandes canadiennes et le lait canadien sont produits de façon salubre. Il est déjà obligatoire dans de nombreuses provinces, et près de la moitié de nos 12 000 fermes laitières ont déjà été validées dans le cadre du programme.

Le programme LCQ aide les producteurs à améliorer les pratiques de gestion de salubrité des aliments dont le refroidissement et l'entreposage efficace du lait, le suivi étroit et la consignation de l'utilisation d'agents chimiques et médicamenteux pour la prévention des résidus dans le lait et la viande, la désinfection de l'équipement de traite ainsi que la mise en œuvre de processus de formation du personnel comme des procédures normalisées.

Tout le lait produit dans les fermes canadiennes fait l'objet d'une analyse en fonction des résidus d'antibiotique au moment de son arrivée à l'usine de transformation. Tout le lait pour lequel les tests donnent des résultats positifs quant à la présence d'antibiotiques est jeté et, donc, non vendu au public.

Le producteur en cause est retracé grâce à l'échantillon prélevé à chaque ferme chaque fois que le lait est ramassé par le camion, et il ou elle est responsable de toutes les dépenses connexes à l'élimination du chargement. Les producteurs sont payés pour la qualité de leur lait et se voient imposer de lourdes amendes en cas d'irrespect des bonnes normes. Lorsque le lait est accepté par les transformateurs laitiers, les lois provinciales et fédérales exigent que tout le lait destiné à la consommation sous forme liquide soit pasteurisé.

Il s'agit d'une protection supplémentaire pour assurer aux consommateurs que le lait est libre de toute bactérie pathogène. D'autres processus optionnels peuvent être utilisés pour d'autres produits laitiers comme le fromage. Les PLC sont convaincus que la qualité des aliments est directement liée à la santé des animaux ainsi qu'au bien-être des animaux et que le consommateur se soucie du respect de l'environnement dans le cadre du processus de production du lait.

Des animaux sains et bien traités produisent du lait de grande qualité. La traçabilité obligatoire est une étape nécessaire pour attribuer des responsabilités individuelles pour chaque animal le long de la chaîne alimentaire. La traçabilité comblera une lacune importante en mettant l'information à la disposition de chaque partenaire qui s'occupe du bétail.

Sur le plan environnemental, les producteurs laitiers utilisent des outils tels que les plans agroenvironnementaux. Les PLC mettent également en œuvre un programme destiné à atténuer l'effet de la production laitière sur les changements climatiques grâce à la réduction de l'empreinte carbone du lait, en préconisant de nombreuses pratiques de gestion optimale dont l'efficacité pour réduire la production de gaz à effet de serre a été prouvée.

Compte tenu de la relation étroite entre la santé des animaux, leur bien-être, la traçabilité et l'environnement, les PLC cherchent des moyens d'intégrer ces éléments de la production de lait à la salubrité des aliments dans une même infrastructure, comme celle du programme Lait canadien de qualité. Les producteurs montreraient ainsi qu'ils font ce qu'ils disent en produisant du lait et de la viande salubre et de qualité, avec des vaches saines dont ils prennent bien soin, dans un environnement durable.

[Traduction]

Pour conclure, monsieur le président, les Producteurs laitiers appuient ce projet de loi qui renforce les mesures prises pour assurer la salubrité des aliments. Notre organisation se réjouit à la perspective de l'adoption de cette loi et de l'élaboration de la réglementation correspondante, en consultation avec l'industrie.

Je vous remercie de votre attention et serai heureux de répondre à vos questions.

Le président : Je vous remercie beaucoup, monsieur Versteeg. Si vous avez d'autres informations à nous communiquer, n'hésitez pas à les transmettre, au greffier ou à moi.

Nous allons maintenant entendre M. Unrau. Auriez-vous l'obligeance de faire votre exposé?

Martin Unrau, président, Canadian Cattlemen's Association : Je voudrais tout d'abord vous remercier de cette possibilité que vous m'offrez de comparaître devant le comité. Je suis agriculteur et éleveur à MacGregor, au Manitoba, à une heure et demie de route à l'ouest de Winnipeg. J'élève actuellement du bétail et des veaux, je fournis du fourrage et je cultive des céréales et des oléagineux. Je suis actuellement président de la Canadian Cattlemen's Association et, en son nom, représente 83 000 producteurs de bovins.

Pour faire le point sur l'industrie, le nombre de bovins n'est plus ce qu'il était et le marché n'a pas fini de s'ajuster à la crise de la vache folle. Notre industrie est, comme les autres, touchée par la démographie, mais en bonne partie grâce à la priorité qu'accorde au dossier le gouvernement actuel, l'accès au marché du bœuf et du bétail canadiens continue de croître. C'est une bonne nouvelle.

Franchement, l'un des plus grands défis que nous aurons à relever pour reconstruire nos troupeaux est la concurrence qu'exercent d'autres secteurs agricoles. La production céréalière se porte bien pour l'instant et ne cause pas le stress associé à l'élevage du bétail — je pense par exemple au vêlage de nuit et à l'alimentation hivernale. Si l'élevage sera, au cours des prochaines années, un secteur très prometteur au plan mondial, ce choix doit être évalué en fonction de nombreux facteurs. Je suis optimiste quant aux perspectives de l'industrie bovine et je travaille fort pour les améliorer.

Le projet de loi sur lequel nous faisons des commentaires aujourd'hui s'inscrit dans la refonte, par le gouvernement, du dossier de la salubrité des aliments. Il s'agit d'une mesure législative. La modernisation de la réglementation qu'entreprend l'ACIA fait partie du même processus. Nous appuyons cette modernisation, qui est importante pour que les agriculteurs et éleveurs de bovins restent concurrentiels. Nos instances gouvernementales doivent être des chefs de file mondiaux pour que nous puissions battre des records.

Nous apprécions en outre la volonté d'appliquer une règle de « un pour un » qui fait en sorte que le nombre de nouveaux règlements est compensé par la suppression d'un nombre égal d'anciens. Nous appuyons vivement le Conseil de coopération en matière de réglementation mis sur pied avec les États-Unis et nous exhortons les législateurs à faire en sorte que cette instance réalise son plein potentiel.

Je mentionnerai un autre facteur, le caractère scientifique de notre régime réglementaire. C'est un facteur important pour les décideurs au Canada et à l'étranger. Les options non fondées sur la science sont des options politiques qui suscitent quelquefois de l'incertitude. Nous appuyons des décisions fondées sur la science en raison des certitudes et des avantages concurrentiels qu'elles entraînent.

Les inquiétudes que je manifeste aujourd'hui concernent la portée du projet de loi. Les fonctionnaires nous disent que la plupart des enjeux qui nous inquiètent sont déjà couverts par la loi actuelle, mais ce que nous craignons, c'est un nouveau fardeau que l'on ferait peser sur les producteurs et les autres intervenants dans la chaîne de valeur. À notre avis, ces changements n'apporteraient rien de plus à la salubrité des aliments. Ce qui nous inquiète en tout premier lieu, c'est l'exigence de permis et de contrôle imposée aux agriculteurs et aux éleveurs, ainsi qu'aux transporteurs, les marchés aux enchères ou les points de rassemblement dont il est question à l'article 10.

Vues sous l'angle de l'alimentation, ces exigences sont raisonnables. Le projet de loi cherche à surveiller l'état de nos aliments : savoir qui les transporte dans le pays, qui les importe ou qui les exporte. Toutefois, l'expression « produit alimentaire » utilisée dans le projet de loi est définie comme suit :

a) aliment au sens de l'article 2 de la Loi sur les aliments et drogues;

b) tout ou partie d'un animal ou d'une plante dont un aliment visé à l'alinéa a) peut provenir; ou...

Pour nous, ces exigences d'enregistrement et de licence concernent tous ceux qui pourraient vendre ou transporter du bétail dans une autre province. Sur un grand nombre d'années, cela représente une grande proportion des producteurs.

Cela implique également que si vous décidez de changer de culture, de vous occuper d'animaux âgés d'un an ou d'ouvrir une entreprise de bovins, vous devriez obtenir ou prolonger une licence.

Aux termes de l'article 20 du projet de loi, le ministre a le pouvoir d'octroyer ces licences. Ce pouvoir entraîne des conséquences qui, à notre avis, n'ajoutent pas de valeur ou de sécurité à la chaîne alimentaire. Ainsi, un autre niveau de licence est créé pour ceux qui transportent du bétail. À notre avis, cela n'a rien à voir avec les compétences, mais cela pourrait être le cas à l'avenir, puisque le ministre a le pouvoir, aux termes du paragraphe (3), d'ajouter des conditions qu'il estime indiquées.

En outre, on ne sait pas exactement quelle serait la procédure d'obtention de la licence, ce que la licence couvrirait et quelles en seraient les conditions.

Il y a un autre sujet d'inquiétude, je veux parler du chapitre du projet de loi sur les règlements. Aux termes de l'article 51, le gouverneur en conseil peut, par règlement, prendre des mesures pour l'application de la présente loi et, notamment, au paragraphe h) :

h) régir, relativement aux établissements où une activité régie par la présente loi est exercée, le matériel et les installations à utiliser, les méthodes à suivre et les normes à respecter pour le traitement et l'abattage sans cruauté des animaux...

Définir et inclure du bétail dans le projet de loi donneraient plus que jamais au gouvernement le pouvoir d'intervenir dans les décisions concernant la production et la gestion agricoles. Ce n'est pas ce que demande le public aujourd'hui ni quelque chose qui peut être géré de façon significative, ni enfin — et c'est là le point le plus important — un élément qui soit lié à la salubrité des aliments.

Comme je l'ai dit, les fonctionnaires affirment que ce pouvoir existe déjà et ne devrait pas être utilisé, mais il y a lieu de le mentionner.

Plus loin dans les règlements, une disposition permet au ministre d'accorder des exemptions à la loi. Dans certains cas, par exemple, le ministre pourrait exempter la production primaire d'être visée par la loi. Nous préférerions que cette production primaire soit explicitement exemptée plutôt que soumise aux décisions incertaines d'un ministre.

Nous apprécions l'objectif visé par la loi. Et dans la plupart des cas, cela ne nous pose pas de problème. Nous pensons par contre que la loi peut être améliorée en accordant une exemption à la production primaire. Cette exemption s'appliquerait aux producteurs de bovins, de porcs, de moutons et d'autre bétail. Elle s'appliquerait également aux producteurs céréaliers qui seraient soumis à l'obtention d'une licence.

Le projet de loi modifie en outre la Loi sur la santé des animaux afin de permettre la traçabilité du bétail. C'est là un point important. La Canadian Cattlemen's Association soutient la traçabilité du bétail dans la mesure où celle-ci offre aux producteurs une certaine valeur qui ne soit pas annulée par d'autres coûts. Elle ne doit pas non plus nuire à l'efficacité actuelle du secteur. La traçabilité des animaux est une question de santé et non de salubrité des aliments. Se servir d'un projet de loi sur la salubrité des aliments pour permettre la traçabilité des animaux est regrettable, car cela pourra amener certains à faire un amalgame entre les deux questions, ce que l'on ne devrait certainement pas faire.

Merci encore de l'occasion de participer au processus législatif.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Unrau. Nous apprécions votre déclaration.

Le sénateur Plett sera le premier à poser des questions. Il sera suivi du sénateur Peterson.

Le sénateur Plett : Merci messieurs d'être venus.

Monsieur Unrau, les agriculteurs sont assujettis à la Loi sur la santé des animaux, la Loi sur la protection des plantes et la Loi sur les semences; aucune de ces lois n'est touchée par le projet de loi S-11. La Loi sur l'inspection des viandes réglemente déjà le transport sans cruauté des animaux et leur bien-être. Si je comprends bien, les articles que vous mentionnez s'appliquent aux transformateurs et non aux agriculteurs. Est-ce nous qui ne les comprenons pas ou bien vous?

Dennis Laycraft, vice-président exécutif, Canadian Cattlemen's Association : Nos responsables de la réglementation ont indiqué, lorsque nous avons soulevé cette question, que ces dispositions existent déjà et qu'elles ne sont pas utilisées et ils ne voient pas de situations qui nécessiteraient qu'on les utilise. Pour moi, cela veut dire qu'il est possible qu'elles soient utilisées à un certain moment. Nous disons simplement que nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire d'octroyer des licences aux personnes qui élèvent des bovins et des porcs car notre industrie dispose de moyens de délivrer ce type de licence tout en évitant la paperasserie administrative.

Le sénateur Plett : Ma question est la suivante : Est-il indiqué dans le projet que nous voulons octroyer des licences aux agriculteurs ou aux transformateurs?

M. Laycraft : Notre interprétation des articles nous donne à penser que c'est tout à fait possible.

Le sénateur Plett : Est-ce actuellement inscrit dans le projet de loi? Non pas que nous ne pourrions pas présenter plus tard un projet de loi dans lequel ce serait inscrit. N'importe quoi peut être ajouté ultérieurement. Est-ce inscrit dans le projet de loi maintenant? C'est vous qui êtes le témoin ici.

M. Laycraft : Pour répondre brièvement, oui, nous croyons que c'est inscrit.

Le sénateur Plett : Pour moi, le projet de loi ne s'applique à ce dont vous parlez, j'aimerais donc qu'au moins cela soit clairement énoncé dans le compte rendu. À mon avis, vous parlez de choses qui ne s'appliquent pas à vous mais plutôt aux transformateurs.

Merci. C'est la seule question que j'ai pour le moment. Je pourrais en poser d'autres plus tard.

Le sénateur Peterson : Monsieur Versteeg, vous avez dit être en faveur du projet de loi et je crois comprendre que vous avez rencontré des responsables cet été pour parler du projet de loi. Craignez-vous que le projet de loi puisse modifier le programme Lait canadien de qualité?

M. Versteeg : Je n'ai aucune raison de le croire. Le programme Lait canadien de qualité a été élaboré en consultation avec des responsables de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Bien que ce programme ne soit pas un programme HACCP officiel, il est vraiment fondé sur le HACCP dans la mesure où il traite de la maîtrise des points critiques où il existe des risques pour la salubrité du lait et des produits laitiers.

Le sénateur Peterson : Vous avez dit qu'il fera l'objet d'un examen en 2015, n'est-ce pas?

M. Versteeg : Non. En 2015, tous nos agriculteurs seront inscrits au programme. Il y a plusieurs années que nous poursuivons la mise en oeuvre de ce processus au niveau des fermes et nous espérons terminer d'ici 2015.

Le sénateur Peterson : Monsieur Unrau, le projet de loi S-11 porte sur les produits carnés inspectés par le gouvernement fédéral, pas par les gouvernements provinciaux. Certains acteurs prétendent qu'il crée un système à deux niveaux. Est-ce que le fait qu'il y ait deux groupes dotés d'un pouvoir d'inspection pose problème à votre secteur ou devrions-nous plutôt envisager un programme pancanadien simplifié?

M. Unrau : Je pense que nous devrions envisager un programme simplifié. Après le 19 mai 2003, l'industrie bovine a vraiment pris conscience des coûts supplémentaires dans tous les domaines. C'est ce jour-là qu'une vache atteinte de l'ESB a été découverte et que nos marchés ont été fermés. Depuis, nous faisons très attention aux coûts, même les plus infimes. Certains peuvent penser que nous nous inquiétons de coûts peu élevés, mais nous avons appris à cette époque que pour éviter la faillite dans un secteur comme le nôtre — l'industrie de l'élevage bovin —, il fallait accepter que nos exploitations soient très simplifiées. Nous faisons toujours très attention aux coûts supplémentaires, donc un programme simplifié nous sera certainement d'un grand secours.

Le sénateur Peterson : Vous avez aussi indiqué que vous souhaiteriez un certain nombre de modifications au projet de loi. Avez-vous eu l'occasion cet été de rencontrer des représentants du gouvernement pour leur faire part de vos préoccupations? Les ont-ils ignorées ou sont-ils en train de les examiner?

M. Laycraft : Nous avons eu de nombreuses rencontres au sujet de diverses questions, notamment la modernisation. Nous sommes très satisfaits des discussions que nous avons eues. Nous avons parlé de l'article que nous venons de soulever et débattre ici, pour déterminer s'il était inclus dans le projet de loi. Ils nous ont assuré qu'ils n'envisageaient pas de circonstances qui nécessiteraient son application, mais il est effectivement inscrit ici. Nous sommes ravis du fait que s'il n'est pas censé s'y trouver, il sera facile de l'abroger. Dans l'ensemble, nous sommes relativement satisfaits du niveau de consultation.

[Français]

Le sénateur Rivard : À l'heure actuelle, les pêcheurs commerciaux et les éleveurs de poisson sont exemptés, lorsqu'il s'agit de consommation personnelle, de l'inspection obligatoire. Nous allons, avec le projet de loi S-11, étendre ce privilège aux producteurs laitiers et aux éleveurs de bovins. Pensez-vous que ce soit pertinent de le faire, et y a-t-il, selon vous, un danger?

M. Versteeg : Je pense que le projet de loi concerne la santé du public. Si un producteur prend la décision de mettre sa santé à risque, ce n'est pas un risque public; c'est là qu'on définit la différence entre consommation personnelle et consommation par le public.

Le sénateur Rivard : En d'autres mots, le fait que cette demande soit introduite dans le projet de loi, cela ne vient pas de vos associations respectives?

M. Versteeg : Non.

Le sénateur Rivard : Vous ne voyez pas d'impact possible; si le producteur a confiance dans son bétail, qu'il soit inspecté ou non, il n'y a pas de danger, donc. Si quelqu'un doit prendre à cœur la santé, c'est bien les producteurs.

M. Versteeg : Sur la ferme, le lait va être produit selon les règles imposées. Il n'y a donc pas vraiment de différence entre le lait envoyé pour la consommation publique et celui qu'il consommerait lui-même. C'est la même norme.

Le sénateur Rivard : Ce n'est pas l'élément le plus controversé du projet de loi. Merci.

[Traduction]

Le président : Monsieur Unrau, avez-vous une observation?

M. Unrau : Pas pour l'instant.

Le sénateur Buth : Ma question porte sur la traçabilité.

Monsieur Versteeg, vous avez parlé du programme LCQ et dit que d'ici 2015, tous les exploitants de fermes laitières respecteront les normes de votre industrie et que vous étiez nettement en faveur d'un système de traçabilité national. Est-ce que le projet de loi aura des répercussions sur le programme LCQ? Va-t-il l'accélérer ou de quelle façon changera-t-il les normes de ce programme?

M. Versteeg : Il ne devrait pas avoir d'incidence sur le programme LCQ. Comme je l'ai dit plus tôt, le programme a été élaboré en consultation avec l'ACIA; le programme a donc été approuvé par cette agence qui continuera de vérifier notre mise en oeuvre du programme. Même s'il s'agit d'un programme de l'industrie sur la salubrité et la qualité des aliments, il est assujetti à l'inspection de l'ACIA. Si l'agence constate quelque chose qui ne lui semble pas convenable, elle peut nous demander d'apporter des changements au programme en vue de mieux assurer la salubrité de notre lait et de nos produits laitiers.

Le sénateur Buth : Monsieur Unrau, il me semble vous avoir entendu dire quelque chose de différent au sujet de la traçabilité. Pouvez-vous nous dire quelle est la position de l'industrie bovine vis-à-vis la traçabilité? Pourriez-vous nous décrire plus en détail ce que vous pensez de la traçabilité dans le cadre du projet de loi?

M. Unrau : Oui, je peux. On confond trop souvent la traçabilité et la salubrité des aliments, et c'est absolument une erreur de faire cette confusion. La traçabilité est un moyen de retracer les animaux pour les questions relatives à la santé animale. Par exemple, quand l'ESB s'est déclarée, on a pu retracer très rapidement la ferme dans laquelle l'animal est né, son âge et ainsi de suite.

Ce qui nous préoccupe, c'est qu'en associant la traçabilité à la salubrité des aliments, nous créons un faux sentiment de sécurité. C'est une association qu'il ne faut pas faire. La salubrité des aliments est une question de transformation de la viande qui survient bien après. C'est une question de protection des aliments après les avoir achetés et la façon de les préparer. La traçabilité en tant que telle n'a pas grand-chose à voir avec la salubrité du produit alimentaire à retracer.

M. Laycraft : Si vous me permettez d'ajouter quelque chose. Nous travaillons sur toute une gamme de programmes, comme par exemple le programme Verified Beef Production, soit la manipulation sécuritaire des produits et la tenue des dossiers, tout ce qui est nécessaire pour assurer la qualité et les instruments de contrôle de la salubrité des aliments à la ferme et qui sont utilisés à travers le pays par les producteurs. Il y a tout un éventail de ce type d'instruments qui, à notre avis, contribuent au commencement d'une production et d'une utilisation en toute sécurité des produits que nous utilisons dans notre industrie.

Encore une fois, nous ne travaillons pas de façon concurrentielle. Par conséquent, les membres de notre industrie ont convenu d'échanger, à tous les niveaux, les renseignements qui peuvent assurer la salubrité des aliments. Une grande part de notre budget de recherche sert à déterminer les façons dont nous pouvons travailler ensemble. Il s'agit vraiment de la façon dont nous nous partageons les tâches — nous collaborons avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Santé Canada et le Conseil des viandes du Canada — à toutes les étapes du système et de la responsabilité partagée que nous, l'industrie et les producteurs, voyons dans le système de salubrité.

Nous sommes en faveur de l'amélioration de la traçabilité. Notre message est qu'il faut procéder de façon à ce qu'elle soit efficace et à pouvoir créer des instruments de traçabilité.

Nous sommes en train d'élaborer un système de renseignements sur le bœuf, par exemple, dont le commencement peut être le transfert de l'information des abattoirs jusqu'aux éleveurs-naisseurs dans notre secteur. Nous croyons que ces programmes sur lesquels nous travaillons nous permettront de valider nos systèmes et de profiter davantage des marchés internationaux.

Avons-nous besoin du projet de loi pour accomplir cela? Non. Nous pouvons chercher des moyens efficaces. Cependant, nous collaborerons étroitement avec des organismes comme l'Agence canadienne d'inspection des aliments afin de nous assurer une crédibilité à l'échelle internationale.

Le sénateur Buth : Le système de renseignements sur le bœuf est donc l'un des instruments dont vous parlez.

M. Laycraft : Oui.

Le sénateur Buth : Pouvez-vous décrire ce système plus en détail?

M. Laycraft : Nous procédons actuellement à sa mise en oeuvre. Les éleveurs-naisseurs peuvent y inscrire les dates de naissance des animaux et toutes sortes de renseignements. On peut inclure la question : « Êtes-vous membre du système Verified Beef Production? » qui est notre programme de salubrité des aliments à la ferme. Avez-vous un plan environnemental de la ferme, par exemple? Nous ajoutons des sujets tels que « Avez-vous suivi une formation sur le transport des bestiaux? » Nous pouvons inclure tous les animaux élevés. Et aussi, les vaccins utilisés dans l'élevage.

Habituellement, les éleveurs-naisseurs élèvent l'animal jusqu'à ce qu'il atteigne un poids de 450 à 650 livres. Ils le vendent à quelqu'un spécialisé dans l'engraissement jusqu'à l'étape de la finition ou jusqu'à ce que nous appelons « la semi-finition ». Cette personne vendra éventuellement cet animal à un parc d'engraissement pour la finition. Cette personne inscrira la date d'achat de l'animal. Elle peut enregistrer des renseignements tels que les aliments utilisés pour nourrir l'animal et les traitements médicaux reçus, le cas échéant, par l'animal durant cette période. Ces renseignements peuvent être transmis au transformateur qui partage ensuite des renseignements concernant l'animal, des informations détaillées sur la carcasse pouvant remonter à la date de transformation de l'animal.

Le but est d'échanger plus de renseignements en remontant jusqu'à l'éleveur-naisseur. En même temps, cela entre dans le cadre de ce que nous appelons notre initiative d'avantages pour l'industrie du bœuf au Canada qui vise une commercialisation de nos produits partout dans le monde. Ces produits porteront un logo de notre feuille d'érable et des renseignements.

Certains de nos clients veulent être plus assurés quant au type de produit que nous vendons en Europe, par exemple. Ils veulent une confirmation qu'aucun facteur de croissance n'a été utilisé durant l'élevage des animaux. Nous pouvons le certifier et le valider. Beaucoup de gens veulent simplement savoir que l'animal est un bœuf Angus, qu'il fait partie d'un programme de bœuf Angus certifié ou d'un programme certifié d'une autre race.

Nous sommes en mesure de collaborer avec diverses personnes, mais en même temps, de toujours chercher les moyens d'avoir, en tant qu'industrie, les meilleurs programmes de participation tels que le programme Verified Beef Production et chercher aussi les moyens d'échanger des renseignements. Bien que nous estimions avoir la meilleure génétique au monde, nous nous efforçons constamment de l'améliorer. Notre objectif ultime est d'être le fournisseur mondial de bœuf de céréales de qualité supérieure.

Le président : Avant de donner la parole au sénateur Eaton, le sénateur Robichaud a quelque chose à ajouter au sujet de la traçabilité.

Le sénateur Robichaud : La traçabilité est très importante dans ma région d'origine, en particulier dans le secteur des mollusques et des coquillages, car certains de ces produits sont directement commercialisés. Nous avons connu des situations par le passé où il était très important de retracer l'origine de ces produits. Je suis entièrement en faveur de la traçabilité. Elle n'est peut-être pas appliquée de la même manière dans votre industrie, mais dans ma région elle était très importante. Je ne voudrais pas que votre témoignage réduise l'importance de la traçabilité. C'est la raison de mon intervention.

M. Unrau : Moi non plus, je ne voudrais pas diminuer l'importance de la traçabilité qui je pense est très importante. Cependant, nous pourrions finir par croire dur comme fer que la traçabilité est la solution à nos problèmes de sécurité alimentaire, or ce n'est pas le cas. Ce qui compte, c'est de maintenir la traçabilité et nous pouvons le faire au niveau de notre bétail. Tous les animaux sont identifiés individuellement. Nous pouvons les retracer jusqu'au lieu exact de leur naissance. Nous pouvons le faire s'il y a une maladie animale. En cas de problèmes d'aliments ou de sécurité alimentaire causés directement par un animal et son mode d'élevage, nous pouvons retrouver l'origine de ces problèmes.

Par exemple, si une aiguille est découverte dans de la viande. Nous pouvons retracer l'animal. Cependant, déclarer que la traçabilité est un élément de la sécurité alimentaire est irresponsable de notre part car elle ne touche en rien la salubrité. Une telle notion donne un faux sentiment de sécurité alimentaire.

Le sénateur Robichaud : C'est ce que vous pensez, mais je vois les choses différemment. Je ne suis pas un expert. Convenons que nous ne sommes pas d'accord.

Le président : Honorables sénateurs, je vois que M. Laycraft a quelque chose à dire.

M. Laycraft : Un petit mot rapide sur la vérification de l'origine. Nous sommes probablement l'un des premiers pays producteurs de bœuf au monde à avoir mis en oeuvre un programme d'identification obligatoire qui nous permet de retracer le lieu de naissance de l'animal. Nous enregistrons aussi la date de retrait de l'étiquette, soit durant le processus de transformation ou dans le cas d'une inspection post-mortem. Une autopsie est faite en cas de mort d'un animal. Nous inspectons ces animaux pour des raisons de surveillance. Quand un animal est exporté, cette information est consignée.

Nous recueillons des informations d'une extrémité à l'autre de notre système. Nous avons l'origine et le moment de transformation de l'animal. Nous savons qui est le premier propriétaire et qui est le dernier propriétaire. La vraie difficulté est qu'il y a des informations entre les deux. Quelle quantité de renseignements pouvons-nous enregistrer efficacement et quels avantages leur enregistrement ajoute-t-il au système?

Bien sûr, nous sommes entièrement d'accord quant à l'importance de la vérification de l'origine grâce au système d'identification obligatoire. En fait, c'est notre association qui a demandé la mise en place de ce système.

Le sénateur Eaton : Monsieur Versteeg, j'ai d'heureux souvenirs d'enfant à la ferme laitière de mon oncle. Il avait aussi des Holsteins. Vous êtes au courant, bien sûr, des gros efforts déployés par le ministre Ritz et le gouvernement pour soutenir la gestion des approvisionnements dans votre secteur et vous en êtes satisfaits, n'est-ce pas?

M. Versteeg : Oui, nous apprécions vraiment les efforts du ministre et nous le remercions certainement; et merci aussi au gouvernement.

Le sénateur Mercer : J'aimerais juste revenir sur la question de la traçabilité. J'apprécie ce que vous avez dit, soit que la traçabilité n'est pas un instrument de contrôle de la sécurité alimentaire; c'est vraiment un outil de gestion de l'industrie. À l'occasion, il peut être utile dans le domaine de la sécurité alimentaire, mais ce n'est pas son but premier.

Le sénateur Mahovlich et moi étions ici pendant l'affaire de l'ESB, et c'était une période difficile. Cependant, en reconnaissant que la traçabilité était devenue un problème votre industrie a extrêmement bien réagi.

Le problème que je constate encore, et j'aimerais que vous m'informiez des derniers développements, est que les bovins de votre industrie traversent la frontière beaucoup plus souvent qu'un grand nombre de Canadiens. Ils font l'aller et retour plusieurs fois entre le moment de leur naissance et celui où ils sont transformés. Est-ce que, lorsque les bovins se trouvent au sud de la frontière, nos amis américains tiennent le même genre de registre de traçabilité que nous tiendrions si les bovins passaient toute leur vie au Canada?

M. Laycraft : Il y a deux volets à la réponse à cette question. Quand nous exportons des bovins vers les États-Unis, quelques-uns reviennent pour des expositions bovines, par exemple. Ils sont surveillés très attentivement, mais les États-Unis n'ont pas de système d'identification obligatoire. Ils sont en train d'élaborer un système de déplacement entre États, mais il est clair qu'ils n'ont pas le type de vérification de l'origine que nous avons au Canada. Quand nous exportons nos bovins vers les États-Unis, les Américains peuvent les suivre mieux que les leurs car nos bovins portent une identification permanente.

[Français]

Le sénateur Maltais : Monsieur Versteeg, vous avez dit au début de votre mémoire que la plupart des provinces avaient accepté le programme LCP. Parmi ceux qui n'ont pas accepté — mais sans les nommer — y a-t-il de gros producteurs?

M. Versteeg : À ma connaissance, une seule province prend un peu de retard. Elle n'a pas refusé d'implanter le programme, mais c'est parce que c'est une plus petite province et il s'y trouve une variété de grosseurs de troupeaux : des petits comme des gros. Mais il n'y a aucune province où il y a seulement de grosses fermes; il y a une variété de grosseurs de fermes partout au Canada.

Le sénateur Maltais : Vous travaillez dans l'industrie du lait. C'est drôle parce qu'on n'entend jamais, à ma connaissance, de plaintes concernant le lait. On a entendu des plaintes concernant le poulet, le jambon et il y a eu la période de la vache folle, mais pas concernant le lait. Je ne sais pas si vous faites très bien votre travail, mais on entend peu de plaintes et, s'il y en a, c'est très occasionnel. Vraiment, les agriculteurs font très bien leur travail à ce niveau. Un fort pourcentage de la consommation de lait provient des enfants. Si le lait n'était pas de bonne qualité, vous auriez tous les parents sur le dos. Je veux vous féliciter pour cela parce que c'est très important. C'est nos enfants et nos petits-enfants qui sont les gros consommateurs de lait et on sait maintenant qu'ils peuvent en boire en toute sécurité.

À votre connaissance, y a-t-il du dumping de fromage industriel provenant des États-Unis vers le Canada, c'est-à- dire de la contrebande de fromage industriel? Ce fromage est-il bien inspecté et est-il nocif lorsqu'il est incorporé dans une pizza ou autre chose?

M. Versteeg : Au Canada, le lait est certainement l'aliment le plus inspecté et le plus vérifié de tous. Il est inspecté à la ferme, à l'usine et aussi après sa sortie de l'usine. Nous avons une réputation; on dit que le lait est l'aliment le plus parfait de la nature et c'est une réputation qu'on cherche à préserver. C'est un atout pour nous et on veut le garder.

Le sénateur Maltais : Je pense que vous l'avez.

M. Versteeg : Concernant le deuxième point, cela a fait la une des journaux hier et aujourd'hui. Tous les faits ne sont pas connus, alors nous attendons de savoir ce qui s'est vraiment passé. Je pense qu'il ne faut pas adopter des projets de loi qui seraient basés sur des histoires parues dans les journaux. Il faut bien comprendre les faits pour ensuite s'ajuster en conséquence.

Le sénateur Maltais : Je m'inquiétais pour les consommateurs qui auraient par hasard, sans le savoir, dans leur pizza ou dans un autre aliment, ce fromage qui vient du dumping ni plus ni moins et qui coûte beaucoup moins cher. Les consommateurs savent-ils ce qu'ils mangent? Ce fromage-là n'est-il pas contaminé? Je ne sais pas; peut-être est-il de très bonne qualité. Je ne sais pas, mais c'est inquiétant.

J'ai une dernière petite remarque : l'acronyme CQM donne en français LCQ et cela porte à confusion.

[Traduction]

Le sénateur Eaton : Ma question concerne l'excellence de notre lait, qui ne contient aucune hormone. Les Canadiens affirment souvent que le lait canadien coûte plus cher que celui des Américains. En fait, nous savons qu'ils franchissent la frontière et font le plein. Pourquoi n'indiquons-nous pas sur nos boîtes à lait que celui-ci est exempt d'hormones et de toute matière de ce genre? Je ne crois pas que les consommateurs canadiens en soient conscients, parce que le lait américain contient des hormones de croissance et toutes sortes de substances que les Américains y ajoutent. Pourquoi n'indiquons-nous pas la différence, et pourquoi ne vous faites-vous pas valoir?

M. Versteeg : Je suis de la vieille école, et un ancien principe de marketing soutient que, si l'on est incapable de dire quoi que ce soit de positif à propos d'un concurrent, il vaut mieux se taire.

En ce qui concerne les avantages du lait produit au Canada, nous avons conçu un logo pour indiquer les produits qui sont fabriqués à partir de lait entièrement canadien. Ainsi, les consommateurs peuvent les repérer dans leur magasin d'alimentation.

Le sénateur Eaton : Si vous ne souhaitez pas parler en mal du lait américain, je n'y vois pas d'inconvénient, mais mentionnez-vous sur la boîte que notre lait est exempt d'hormones et qu'il est comme ceci et cela?

M. Versteeg : Encore une fois, nous préférons signaler ce que contient le lait, à savoir 16 nutriments essentiels, plutôt que ce qu'il ne contient pas.

Le sénateur Eaton : Oui, mais si nous ne le mentionnons pas, les consommateurs ordinaires, qui peuvent choisir sur les rayons des produits canadiens ou des produits américains beaucoup moins chers, mais remplis d'hormones, n'en sauront rien. En tant que consommateur, je pense qu'il est dommage que vous vous absteniez de me le dire. Avant de siéger au comité et d'en entendre parler, je n'étais pas au courant.

M. Versteeg : Le problème, c'est que plus on parle des aspects négatifs, comme les hormones, plus les gens s'inquiètent à ce sujet, et c'est inutile. Nous parlons de la qualité du lait canadien et du soin que les agriculteurs canadiens apportent à sa production. Je pense que les Canadiens reconnaissent la valeur du travail que nous accomplissons et y réagissent positivement — pas la totalité d'entre eux, malheureusement, mais la plupart d'entre eux.

Le président : Nous allons maintenant passer au sénateur Peterson, et nous allons conclure avec le sénateur Plett, le parrain du projet de loi.

Le sénateur Peterson : Monsieur Laycraft, en ce qui concerne la question de la traçabilité, pouvez-vous retracer l'origine d'un aliment également jusqu'à l'animal?

M. Laycraft : Faites-vous allusion aux aliments du bétail transformés?

Le sénateur Peterson : Je parle des aliments que consomment les animaux. Mangent-ils des aliments génétiquement modifiés? En quoi consiste leur alimentation?

M. Laycraft : Ils passent le début de leur vie dans les pâturages. Par conséquent, ils mangent l'herbe qui s'y trouve. Une fois qu'ils ont intégré les parcs d'engraissement, les provenderies et les fabricants d'aliments pour animaux qui les approvisionnent doivent satisfaire un éventail d'exigences en ce qui concerne les documents qu'ils doivent conserver. Bon nombre de ces fournisseurs sont maintenant accrédités par l'ISO, dont les normes dépassent les exigences de la réglementation. Par exemple, ces fournisseurs conservent la trace des échantillons pendant un certain temps. Il y a également l'interdiction frappant les aliments du bétail qui rend illégal le fait de nourrir les animaux avec des produits interdits. Cette interdiction est liée aux mesures que nous avons prises pour lutter contre l'ESB. Notre système prévoit un ensemble de procédures obligatoires de tenue de dossiers. Selon la taille et le genre de l'entreprise, ainsi que le degré de commercialisation de ses céréales fourragères, par exemple, l'approbation de ces dernières fera l'objet de contrôles très stricts. Ces céréales doivent également satisfaire des exigences provinciales.

Le sénateur Peterson : Maintenant que la question de la gestion de l'offre a été soulevée, j'aimerais savoir, monsieur Versteeg, à quel point votre industrie aurait du mal à demeurer viable si ce système était aboli?

M. Versteeg : Je ne crois pas que nous envisagerions un avenir sans gestion de l'offre. Ce système fonctionne bien non seulement pour les exploitants de ferme laitière, mais aussi pour les transformateurs. Il appuie plusieurs centaines de milliers d'emplois partout au Canada. Dans sept des 10 provinces, le lait représente un des deux principaux produits vendus. Parce que notre industrie est rentable, nous payons des impôts qui contribuent à appuyer des programmes comme ceux qui assurent la prestation de soins de santé et d'autres programmes auxquels les Canadiens tiennent. Nous pensons que ce régime est tout à fait défendable et qu'il devrait continuer d'exister.

Le sénateur Plett : Heureusement que notre gouvernement prend également sa défense.

Le sénateur Duffy : Monsieur Versteeg, je veux revenir sur ce que vous venez de dire. Depuis déjà quelque temps, des gens parcourent le pays et avertissent les exploitants de ferme laitière que le système tire à sa fin. Bon nombre d'habitants de l'Île-du-Prince-Édouard m'ont parlé de cette question. Vous a-t-on rassuré parce que tous, depuis le premier ministre jusqu'aux échelons inférieurs, nous ont affirmé qu'ils appuyaient notre système de gestion de l'offre? Je suis préoccupé par le fait que des gens qui n'ont pas les intérêts des agriculteurs à cœur angoissent inutilement ces derniers par malignité.

M. Versteeg : Tous les principaux partis politiques appuient notre système de gestion de l'offre. Des menaces ont toujours été proférées à son sujet. Depuis le début, des gens soutiennent qu'il devrait être aboli, mais nous continuons de le faire valoir. Je pense que sa réussite est éloquente.

Le sénateur Plett : Je vous demanderais d'être indulgent, monsieur le président, si je prolonge un peu mon intervention. J'ai été clairement légèrement surpris par une partie du témoignage de M. Unrau. Par conséquent, j'ai quelques questions à lui poser.

Vous n'avez pas semblé être tellement en faveur de la mesure législative, j'ai donc quelques questions à vous poser, monsieur Unrau. Votre organisation n'a-t-elle pas diffusé un communiqué, le 7 juin, indiquant qu'elle accueillait favorablement le projet de loi sur la salubrité des aliments au Canada, déposé au Sénat par le gouvernement du Canada?

De plus, monsieur Unrau, n'avez-vous pas déclaré vous-même que vous étiez « particulièrement satisfait qu'en vertu de cette loi, les produits importés soient forcés de respecter les normes élevées auxquelles les producteurs et les transformateurs canadiens doivent déjà se conformer »?

M. Unrau : Oui, je dirais qu'en général, nous sommes favorables à la loi. Il y a seulement une ou deux situations que nous aimerions voir clarifiées.

Le sénateur Plett : En fait, je lisais une citation. Il ne s'agissait pas d'une observation générale, mais d'une déclaration très précise.

Vous parlez d'agrément. Seuls les établissements devront être agréés. Le projet de loi indique ce qui suit :

« établissement » Lieu, y compris un véhicule, où se fait la fabrication, le conditionnement, l'entreposage, l'emballage ou l'étiquetage d'un produit alimentaire.

Je ne crois pas qu'une vache soit un établissement. Vous le pensez peut-être, mais ne croyez-vous pas que les abattoirs devraient être agréés? Il ne s'agit pas d'agréer les exploitations agricoles. Toutefois, si un agriculteur possède son propre abattoir, celui-ci ne devrait-il pas être agréé pareillement à tout autre abattoir? Ces agriculteurs devraient-ils jouir de privilèges particuliers parce qu'ils ont élevé la vache et pouvoir, par conséquent, l'abattre sans être agréés? Devraient-ils être assujettis aux mêmes règlements que tous les autres transformateurs?

M. Unrau : Nous sommes tout à fait d'accord pour dire que les abattoirs et les usines de transformation doivent être agréés. Je pense que c'est une façon d'assurer la salubrité des aliments canadiens.

Le sénateur Plett : Convenez-vous que par « établissement » on n'entend pas une vache, mais plutôt un lieu où se fait la fabrication, le conditionnement, l'entreposage, l'emballage ou l'étiquetage d'un produit alimentaire?

M. Unrau : Je suppose que nous interprétions le mot « établissement » comme pouvant signifier une exploitation agricole ou une ferme d'élevage.

Le sénateur Plett : Oui, mais ce n'est pas le cas. En fait, si je me souviens bien, il me semble que le ministre Ritz a indiqué clairement au comité qu'à l'exception de la traçabilité, ce projet de loi s'applique uniquement aux transformateurs. Pourquoi sa définition diffère-t-elle de celle de votre avocat, qui va et vient et cherche à remplacer les témoins en ce moment?

Le sénateur Mercer : Monsieur le président, au sein de notre comité, nous permettons sans cesse aux témoins de consulter d'autres personnes, qui les accompagnent et qui travaillent avec eux ou sont membres d'associations. Le commentaire du sénateur Plett est déplacé. Je pense qu'il doit des excuses au témoin et aux représentants officiels qui l'accompagnent.

Le sénateur Plett : Fort bien, sénateur Mercer. Je vais simplement reformuler ma question.

Pourquoi pensez-vous que la définition du ministre Ritz est incorrecte — alors qu'en fait, c'est le ministère qui a présenté le projet de loi —, contrairement à celle de votre avocat?

M. Laycraft : Je pense que nous argumentons à propos d'une question sur laquelle nous nous entendons probablement. Nous ne voyons pas la nécessité que les agriculteurs et les éleveurs soient assujettis à cette loi, et nous n'avons jamais dit qu'elle ne devrait pas s'appliquer aux gens qui récoltent et transforment le bétail, quel que soit l'établissement dans lequel ils revendent le produit ou produisent des aliments pour la revente.

Nous lisons mot pour mot des articles tirés de la loi. Si nous les interprétons mal, nous accepterons ce verdict. Nous souhaitons soulever ce sujet d'inquiétude. Si l'on peut nous assurer qu'il n'y a rien à craindre à ce sujet, cela nous satisfera.

Le sénateur Plett : Donc, vous convenez que la façon dont le ministre Ritz interprète le mot « établissement » est correcte?

M. Laycraft : Si c'est le cas, c'est avec plaisir que nous approuverons cette définition, mais nous lisons simplement un article de la loi qui fait allusion à des animaux.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le président.

Le président : Vous avez le droit, monsieur Laycraft, de présenter vos observations. Le comité les prendra en considération. Toutefois, une analyste officielle de notre comité aimerait formuler des observations afin de clarifier la question. Chers sénateurs, acceptons-nous qu'une clarification liée précisément à la loi soit apportée officiellement?

Des voix : D'accord.

Martha Butler, analyste, Bibliothèque du Parlement : Je pense qu'il y a des articles liés au pouvoir de prendre des règlements qui concernent directement les personnes. Il y en a assurément qui font allusion à des établissements mais si, par exemple, vous examinez le sous-alinéa 51(1)k)(i), vous constaterez qu'il indique ce qui suit : « l'enregistrement de personnes et la délivrance de licences au titre de l'article 20 et les agréments donnés en vertu de l'article 21. » Je pense que c'est de là que découle la confusion. L'article 20 est lié à la délivrance de licences à des personnes alors que l'article 21 est lié à l'agrément d'établissements.

Le président : Messieurs Unrau, Versteeg et Laycraft, je vous remercie de nous avoir communiqué des renseignements. Les observations formulées par notre analyste seront ajoutées à vos exposés à titre de clarification.

Chers témoins, au nom du comité, je tiens à vous remercier de votre présence. Vous pouvez demeurer dans la salle ou partir.

Pour conclure la séance, je vous indique que deux sénateurs ont informé la présidence qu'ils souhaitaient présenter des amendements. L'un d'eux a choisi de présenter son amendement au cours de la séance consacrée à l'étude article par article du projet de loi S-11 que nous tiendrons ultérieurement. L'autre sénateur a déclaré qu'il allait donner avis de son intention immédiatement. L'avis est distribué en ce moment même, par notre greffier et notre personnel. Il sera présenté par le sénateur Plett.

Ces amendements ne seront pas discutés ce soir. Conformément à l'intention d'un des sénateurs, ils seront présentés au cours de la séance consacrée à l'étude article par article du projet de loi S-11. C'est la procédure normale.

Cela dit, je demanderais au parrain du projet de loi, le sénateur Plett, de rendre compte des amendements qu'il souhaite présenter.

Le sénateur Plett : Il y en a deux. Je crois qu'ils ont été distribués dans les deux langues officielles. L'amendement 1 est le suivant :

Que le projet de loi S-11, à l'article 51, soit modifié par substitution, à la ligne 34, page 21, de ce qui suit :

names in respect of any food commodity and...

L'amendement remplace un mot qui était incorrect dans la version anglaise, mais correct dans la version française.

Le président : Merci.

Le sénateur Plett : L'amendement 2 est le suivant :

Que le projet de loi S-11, à l'article 68, soit modifié par substitution, à la ligne 23, page 30, de ce qui suit :

des conséquences de son application, notamment en évaluant les ressources affectées à son exécution et au contrôle de son application.

Nous discuterons de ces deux amendements au cours de l'étude article par article du projet de loi. Je vous remercie de m'avoir permis de les faire figurer dans le compte rendu.

Le président : Honorables sénateurs, deux amendements ont été proposés. Comme je l'ai mentionné, ils ne seront pas débattus aujourd'hui, mais nous en discuterons au cours de l'étude article par article du projet de loi S-11 sur la salubrité des aliments au Canada.

Le sénateur Robichaud : Je pense que le sénateur responsable du projet de loi de notre côté, c'est-à-dire le sénateur Peterson, a également annoncé son intention de présenter un amendement, et des copies de celui-ci ont été remises au sénateur Plett. Je pense qu'il serait très satisfait si elles étaient distribuées à tous les sénateurs. Je tenais simplement à faire valoir cet argument.

Le président : Le greffier remettra une copie de l'amendement du sénateur Peterson à tous les membres du comité. Il sera également discuté et débattu lorsque nous mènerons l'étude article par article du projet de loi S-11.

Le sénateur Robichaud : Cela n'empêche nullement les autres sénateurs de présenter des amendements au cours de notre étude article par article.

Le président : Nous sommes tout à fait d'accord avec vous, sénateur Robichaud.

(La séance est levée.)


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