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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 23 -Témoignages du 18 octobre 2012


OTTAWA, le jeudi 18 octobre 2012

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 8 h 5 pour examiner, pour en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujets : importance et enjeux de la recherche et de l'innovation dans le développement des échanges internationaux de produits agricoles et agroalimentaires et débouchés dans le secteur de l'énergie renouvelable et leurs répercussions sur l'innovation en agriculture).

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'aimerais tout d'abord remercier les deux témoins d'avoir accepté notre invitation. Je les présenterai officiellement sous peu. Avant de commencer, j'inviterais les sénateurs à se présenter. Je m'appelle Percy Mockler, je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je préside le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Mesdames et messieurs les sénateurs, pourriez-vous vous présenter, s'il vous plaît.

Le sénateur Peterson : Bob Peterson, sénateur de la Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Bonjour, Fernand Robichaud, sénateur de Saint-Louis-de-Kent au Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Merchant : Bonjour. Je m'appelle Pana Merchant, et je suis de la Saskatchewan.

Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.

Le sénateur Plett : Bonjour. Je m'appelle Don Plett et je suis du Manitoba.

Le sénateur Buth : JoAnne Buth, du Manitoba.

[Français]

Le sénateur Maltais : Bonjour, Ghislain Maltais, sénateur du Québec.

Le sénateur Rivard : Bonjour, Michel Rivard, sénateur des Laurentides, Québec.

Le président : Merci beaucoup, honorables sénateurs. Aujourd'hui, nous avons deux panels. L'objet du premier panel est d'étudier l'importance des droits de propriété intellectuelle pour l'innovation dans les secteurs agricoles et agroalimentaire.

[Traduction]

Le second groupe de témoins abordera les débouchés dans le secteur de l'énergie renouvelable et leurs répercussions sur l'innovation en agriculture.

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a reçu la permission d'examiner les efforts de recherche-développement dans le contexte de la mise en valeur de nouveaux marchés pour les produits agricoles au pays et à l'étranger, du renforcement de la durabilité de l'agriculture et de l'amélioration de la diversité et de la salubrité des aliments pour les Canadiens et pour les marchés internationaux.

Ce matin, nous avons l'honneur d'accueillir Richard Gray, professeur au département de la politique, du commerce et de l'économie des ressources biologiques de l'Université de la Saskatchewan. Nous entendrons également, par vidéoconférence, John Cranfield, professeur au département d'économie alimentaire, agricole et des ressources de l'Université de Guelph.

Messieurs, je vous remercie, au nom du Comité permanent de l'agriculture et des forêts, d'avoir accepté notre invitation à partager vos opinions, vos commentaires et vos points de vue sur l'agriculture pour les Canadiens dans les années à venir.

Maintenant, j'invite M. Gray à présenter son exposé.

Richard S. Gray, professeur, Département de la politique, du commerce et de l'économie des ressources biologiques, Université de la Saskatchewan : Monsieur le président, j'aimerais remercier chaleureusement le comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. Pendant la majeure partie des 10 dernières années, mes recherches ont porté sur le financement et l'organisation de la recherche dans le domaine agricole. En congé sabbatique, il y a deux ans, j'ai étudié les systèmes d'innovation agricole à l'OCDE, en France et en Australie. En juillet dernier, j'ai eu le bonheur de passer deux semaines avec un collègue à interviewer 16 spécialistes du Royaume-Uni au sujet de leur système d'innovation visant le blé.

Étant donné le peu de temps qui m'est accordé ce matin, je me contenterai d'aborder six points qui définissent ma vision de l'innovation agricole et trois recommandations qui, selon moi, renforceraient considérablement le système canadien d'innovation agricole.

Dans le mémoire que j'ai déposé, il y a plusieurs liens vers des documents plus volumineux qui mettent en contexte certaines des déclarations que je vous présenterai aujourd'hui.

Premièrement, la productivité agricole, qui est surtout stimulée par la recherche agricole, a profondément transformé l'agriculture. Les agriculteurs de l'Ouest canadien produisent environ trois fois plus d'extrants par unité d'intrant qu'en 1940 grâce à la recherche. Cela contribue aux revenus, à la richesse, à la croissance économique et à la durabilité environnementale, tout en contribuant à élargir l'approvisionnement alimentaire mondial.

Deuxièmement, des centaines d'études font état des retombées considérables des investissements dans la recherche agricole. Dans le cadre d'une seule étude, Alston et ses collaborateurs ont compilé 292 études qui montraient un taux de rendement interne de 65 p. 100 par année, ce qui est très élevé. J'ai ajouté dans mon mémoire un tableau mettant en lumière plusieurs études canadiennes qui démontrent aussi des taux de rendement élevés et un rapport coût-bénéfice élevé, beaucoup plus élevé que ce à quoi on s'attendrait sur le marché. Dans l'ensemble, les données probantes sont éloquentes : un rendement élevé des investissements consentis en recherche agricole a été enregistré dans toutes sortes de marchés et dans toutes sortes d'études. Cela donne à penser qu'on a raté une occasion d'investir davantage dans cette importante source de croissance économique.

Troisièmement, au Canada, les droits de propriété intellectuelle sont très peu contraignants pour les cultures non transgéniques et les cultures à pollinisation libre, et doivent être resserrés pour qu'on puisse attirer des investissements privés. Les sélectionneurs de plantes ont le droit de percevoir des redevances sur la vente de semences, et les agriculteurs ont le droit de replanter des semences récupérées. Ce privilège des agriculteurs signifie que les sélectionneurs ont une capacité limitée de percevoir des redevances et ont très peu d'avantages financiers à retirer de travaux de recherche sur d'importantes cultures, comme le blé.

Au Royaume-Uni, les agriculteurs doivent payer sur les semences récupérées une redevance équivalant à 53 p. 100 du taux de redevance moyen de l'année précédente. Ces droits de propriété intellectuelle constituent une amélioration par rapport à notre système, mais le système du Royaume-Uni a seulement généré des recettes suffisantes pour soutenir une petite industrie phytogénétique privée.

Le système australien de perception de redevances au point de vente est beaucoup plus solide et a un potentiel de génération de recettes à long terme bien supérieur, mais il est intéressant de noter que, même avec ce système assorti de DPI solides, on a mis 15 ans avant d'arriver au point où on pouvait soutenir une industrie privée.

Quatrièmement, le système de perception de redevance au point de vente utilisé en Australie et en France comporte plusieurs avantages par rapport aux systèmes de perception de redevance sur les semences. Parmi les avantages, on compte la réduction des risques pour le producteur, la conservation des semences par les agriculteurs et les faibles coûts d'administration. L'application de redevances au point de vente uniformes pour toutes les variétés peut générer un revenu immédiat pour les sélectionneurs.

Cinquièmement, en l'absence de droits de propriété intellectuelle solides et de contributions non remboursables, le financement de la recherche sur le blé dans l'Ouest du Canada est très faible par rapport à celui de la concurrence. Le financement pour le blé en Australie est d'environ 80 millions de dollars par année, et celui de la recherche sur le canola au Canada est d'environ 80 millions de dollars par année, soit un financement à peu près quatre fois plus élevé que celui de la recherche sur le blé, qui est d'environ 20 millions de dollars par année au Canada.

La recherche dans le secteur des légumineuses à grains, qui n'apparaît pas dans la figure 2, a aussi une intensité de recherche élevée. Elle est financée par une contribution non remboursable de 1 p. 100 fournie par les producteurs.

Sixièmement, des DPI solides ne constituent pas à eux seuls la solution au financement de la recherche agricole. Bien qu'ils stimulent la recherche et que l'investissement privé soit très important, ils sont loin d'être l'instrument idéal, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, vu les coûts fixes de la recherche et la possibilité d'utiliser les travaux de recherche infiniment une fois que l'investissement a été consenti, l'industrie ne peut pas être pleinement compétitive. L'industrie sera naturellement concentrée, ce qui peut entraîner des prix de semences très élevés. La figure 2 montre que les producteurs de maïs et de canola consacrent environ 10 p. 100 de leurs recettes brutes aux semences, mais que seulement 10 p. 100 environ du revenu des semenciers est réinvesti dans la recherche. Cet écart réduit le rapport coût- bénéfice pour les producteurs.

Deuxièmement, lorsque les droits de propriété intellectuelle sont solides, la mise en commun des connaissances est souvent limitée. Cela entraîne une fragmentation de la recherche et un dédoublement des efforts.

Troisièmement, au sud de la frontière, ou lorsqu'il y a un grand nombre de brevets relatifs à une culture, il y a un problème de « jungle des brevets », ce qui signifie qu'il faut répondre à de nombreuses exigences juridiques pour avoir le droit d'utiliser une technologie particulière, et cela fait augmenter le coût de la recherche, car les avocats ne s'adonnent pas à l'hybridation du blé. Cela fait simplement partie du système.

Enfin, de nombreux types de savoir, comme la recherche agronomique, ne seront jamais bien adaptés aux droits de propriété intellectuelle. Il sera impossible d'appliquer des droits de propriété intellectuelle pour protéger certains types de connaissances, alors les domaines en question continueront d'être sous-financés dans un système entièrement privé.

Après avoir étudié le système de recherche-développement agricole de nombreux pays, et compte tenu du contexte canadien, je formule trois recommandations qui, selon moi, amélioreront grandement le système canadien de recherche sur les cultures, qui est sous-financé.

Premièrement, le gouvernement devrait collaborer avec l'industrie pour adopter des mesures législatives portant création d'une taxe de 1 p. 100 sur la vente de toutes les cultures, laquelle serait versée aux propriétaires des variétés, producteurs privés et organisations publiques confondus. Ce droit procurerait à la recherche un financement plus adéquat et inciterait les phytogénéticiens à mettre au point de meilleures variétés. Il pourrait aussi faire en sorte que le Canada soit conforme à l'UPOV 91.

Ma deuxième recommandation est que le gouvernement fédéral se serve de son mandat de recherche pour créer une société financée grâce aux fonds de contributions non remboursables et contrôlée par l'industrie, comme l'a fait l'Australie en adoptant une loi sur le développement et la recherche en énergie et en industrie. Ces sociétés contrôlées par l'industrie permettraient à l'industrie de se donner les moyens d'investir de façon importante dans des sujets de recherche jugés de valeur par l'industrie. Compte tenu de la capacité des gouvernements de profiter de cette initiative, il serait souhaitable d'obtenir du financement de contrepartie des gouvernements fédéral et provinciaux.

Troisièmement, le gouvernement devrait continuer à faire des investissements publics dans la recherche scientifique de base. Il s'agit d'une assise pour la recherche appliquée en cours, surtout au moment où on parle du « siècle de la biologie ». L'expérience du Royaume-Uni donne à croire qu'il faudrait aussi continuer d'inciter les chercheurs du secteur public à inclure la recherche sur la présélection et la recherche appliquée dans leur portefeuille.

Mon dernier conseil pour le Canada serait de voir grand et d'oser. Alors que nous essayons tous de trouver des projets qui donnent un rendement positif des investissements, celui des investissements en agriculture s'est avéré élevé.

La mise en œuvre de ces trois recommandations permettrait de mettre en place un système bien financé de recherche- développement dans le secteur agricole qui permettrait d'accélérer la croissance au chapitre de la productivité, facteur qui contribue à la génération de la richesse et à la durabilité. Je crois que l'industrie est prête pour le changement. J'ai peur que, si nous ne voyons pas suffisamment grand, le sous-financement ne se prolonge encore longtemps.

Cela conclut mon discours liminaire.

John Cranfield, professeur, Département d'économie alimentaire, agricole et des ressources, Université de Guelph : Bonjour. Merci de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui. Comme vous le savez, je suis professeur au département d'économie alimentaire, agricole et des ressources à l'Université de Guelph. Mes travaux de recherche portent sur la demande des consommateurs en matière d'aliments et de produits alimentaires ainsi que sur l'innovation dans les secteurs agroalimentaire et biotechnologique. Je suis également membre du réseau canadien d'innovation et de réglementation en agriculture, un des cinq réseaux de recherche sur les politiques agricoles établis dans le cadre de Cultivons l'avenir.

Mes commentaires ce matin sont éclairés par mes propres travaux de recherche et ceux menés par d'autres ainsi que par mes interactions avec mes collègues de l'Université de Guelph et d'autres établissements, des intervenants du réseau canadien d'innovation et de réglementation en agriculture.

Mes travaux de recherche sur l'innovation sont fondés sur des données qu'a recueillies Statistique Canada auprès des entreprises pour mieux comprendre les facteurs liés à la capacité novatrice des entreprises des secteurs canadiens de la biotechnologie, des aliments fonctionnels et des produits de santé naturels et des bioproduits. Ces travaux permettent notamment de comprendre si — et, le cas échéant, comment — la propriété intellectuelle et sa protection influent sur l'innovation.

J'aimerais transmettre un certain nombre de messages clés aujourd'hui, en plus d'aborder deux ou trois autres idées qui, à mon avis, se rattachent à certaines des questions soulevées par M. Gray.

Premièrement, selon les données empiriques, la protection des brevets contribue moins à l'innovation qu'on pourrait s'y attendre. Plus précisément, le lien entre l'utilisation de brevets et le nombre de produits, soit en cours de développement, soit sur le marché, est faible. Afin de comprendre pourquoi, il faut reconnaître qu'une entreprise est libre de ne pas faire breveter de nouveaux produits ou de nouveaux processus. En effet, elle peut décider de protéger sa propriété intellectuelle à l'aide de secrets commerciaux ou d'accords de non-divulgation dans ses contrats d'emploi avec les membres du personnel concernés. Cela ne signifie pas que les brevets sont inutiles; cela illustre plutôt le choix que font certaines entreprises de ne pas utiliser le brevet. Les raisons qui amènent une entreprise à ne pas utiliser le brevet sont complexes, varient selon les circonstances et reflètent souvent le modèle de gestion de l'entreprise et les accords en matière de propriété intellectuelle qu'elle peut avoir conclus avec d'autres entreprises collaboratrices.

Deuxièmement, non seulement l'utilisation des brevets a-t-elle un effet défavorable sur l'innovation et la commercialisation, mais, en plus, la mise en place de modalités de protection de la propriété intellectuelle peut compromettre de façon générale le rendement de l'entreprise. Vous constaterez que je distingue l'innovation du rendement ici.

Par exemple, selon l'analyse des données du sondage sur les entreprises productives d'aliments fonctionnels et de produits de santé naturels menée par Statistique Canada en 2008, les entreprises de ce secteur qui prennent des mesures de protection de la propriété intellectuelle avaient des recettes de vente supérieures à celles qui n'ont recours à aucune protection de la propriété intellectuelle.

En outre, la différence était d'environ 2,3 millions de dollars. Il s'agit du résultat d'une seule étude portant sur un seul secteur, mais cela aide à illustrer l'importance de la protection de la propriété intellectuelle dans des secteurs qui utilisent des extrants du secteur agricole au Canada.

Troisièmement — et c'est peut-être encore plus important —, l'innovation et la commercialisation ont un lien solide et positif avec les accords de collaboration entre des entreprises. La collaboration permet aux entreprises d'accéder à la propriété intellectuelle d'autrui lorsqu'elle pourrait être essentielle à la mise au point d'un nouveau produit ou d'un nouveau processus. À cet égard, les centres et les groupes de recherche prennent beaucoup d'importance, parce qu'ils permettent aux entreprises de créer les réseaux et de nouer les relations nécessaires pour cerner les occasions de partenariats mutuellement avantageux.

Un certain nombre d'autres enjeux sont aussi importants. Certains ont parlé de leurs préoccupations relatives à la « jungle des brevets » qui freinerait l'innovation. Les jungles de brevets, comme l'a mentionné M. Gray, deviennent un problème lorsque les entreprises doivent composer avec des droits de propriété intellectuelle qui se chevauchent lorsqu'elles essayent d'innover. Autrement dit, si une entreprise détient un brevet, il est difficile pour une autre entreprise d'innover sans empiéter sur le brevet existant. C'est un problème pour certaines entreprises, surtout les petites entreprises en démarrage qui ont peu de capitaux, car les jungles de brevets peuvent non seulement faire augmenter le coût de la recherche, mais aussi réduire les possibilités d'obtenir l'approbation de sa demande de brevet, ou alors carrément créer un désincitatif à l'égard de l'innovation. Dans de telles circonstances, un manque d'efforts concertés par les entreprises novatrices pourrait freiner la mise au point de nouveaux produits ou de nouveaux processus.

De plus, la collaboration devient essentielle, car les entreprises novatrices peuvent trouver plus facile de composer avec une jungle de brevets en collaborant avec les entreprises titulaires des brevets liés au produit exploré. Ainsi, des accords d'octroi de licence entre des entreprises peuvent jouer un rôle semblable.

La jungle de brevets pose encore plus de problèmes lorsqu'on commence à examiner le rôle du secteur public. À partir de la moitié des années 1990 et jusque dans les années 2000, le Canada a vu une réduction de l'investissement public en recherche-développement dans le domaine de l'agriculture, mais une augmentation de l'investissement public en recherche ciblant les aliments et la conservation. En outre, l'augmentation des investissements du secteur privé dans le secteur de l'agriculture et des aliments a été telle qu'une plus large part de l'ensemble des investissements en R-D agricole est maintenant consentie par le secteur privé. Ces changements ont amené certains intervenants à demander si le gouvernement ne devrait pas investir dans la R-D agroalimentaire ou augmenter son investissement dans ce domaine. L'idée de départ ici, c'est que la R-D du secteur public mène habituellement à des innovations qui sont dans le domaine public et, donc, accessibles à autrui, réduisant ainsi les répercussions des jungles de brevets.

Je ferais valoir — et je suis d'avis — qu'il y a de la place pour un investissement gouvernemental accru en R-D agroalimentaire, mais selon le contexte. Je crois que la participation accrue du secteur public s'impose dans des cas où, par exemple, on a affaire à ce que les économistes appelleraient peut-être un « mal public », comme la pollution environnementale ou les maladies végétales et animales transmissibles. De plus, une telle participation est justifiée si ceux qui investissent dans la R-D, comme les entreprises privées, ne peuvent pas profiter des retombées de l'innovation.

L'intervention gouvernementale peut également être justifiée lorsque, par exemple, le marché n'est pas disposé à assumer les risques associés à l'investissement dans la recherche-développement ou est incapable de le faire.

Enfin, je crois que l'intervention gouvernementale est justifiée lorsque le déploiement d'activités de recherche entraîne des économies de coûts; autrement dit, plus le projet de recherche est vaste, moins le coût moyen ou le coût différentiel associé au projet sera élevé.

Je ne veux pas laisser entendre que le gouvernement devrait délier les cordons de sa bourse pour n'importe qui, mais j'avance toutefois qu'il y aurait peut-être de la place pour un investissement accru. Il importe aussi de comprendre que l'intervention du gouvernement ne signifie pas nécessairement une dépense de deniers publics. En effet, la Loi sur les offices des produits agricoles contient des dispositions qui permettent la création d'organismes agricoles nationaux ayant le pouvoir de prélever chez les producteurs des contributions qui servent à financer des activités pouvant inclure la recherche-développement. À cet égard, le rôle du gouvernement pourrait se limiter à adopter des dispositions législatives qui permettraient aux producteurs d'agir.

Nous avons observé une croissance des programmes gouvernementaux de financement de contrepartie ainsi que des exigences de financement de contrepartie dans le cadre de programmes non gouvernementaux, comme les programmes de contribution. L'idée ici, c'est que le gouvernement peut offrir des fonds du financement en contrepartie de celui consenti par l'industrie dans le cadre de programmes de subventions de la recherche-développement. C'est ce qu'on appelle des partenariats public-privé. De tels partenariats public-privé sont considérés par certains comme une façon d'appuyer la recherche, c'est-à-dire d'attirer de nouveaux dollars qui n'auraient pas autrement été dépensés. La mesure dans laquelle ces partenariats sont une source de nouveaux dollars pour la recherche n'est pas tout à fait claire.

Question encore plus importante, de tels accords peuvent entraîner des situations où le secteur public cofinance des innovations que pourrait s'approprier le secteur privé en vertu d'accords touchant la propriété intellectuelle. Certains pourraient se demander si les contribuables profitent d'une optimisation des ressources dans de telles circonstances, tandis que d'autres pourraient avancer que c'est le prix à payer pour cultiver l'innovation au Canada.

Monsieur le président, merci beaucoup de m'avoir permis de parler aujourd'hui. J'ai hâte de répondre aux questions du comité ce matin.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Cranfield.

Le sénateur Buth : Monsieur Gray, j'aimerais commencer par vous poser quelques questions.

Pourriez-vous décrire la différence entre le canola et le blé lorsqu'on parle du système de sélection public par opposition au système privé? De toute évidence, certains des renseignements que vous nous avez donnés révèlent une différence énorme sur le plan de l'investissement entre ces deux secteurs.

M. Gray : Bien sûr, avec plaisir. Si on remonte à la naissance du secteur du canola — il était autrefois question de colza —, il y avait des investissements publics massifs, mais organisés par le Conseil canadien du canola, à l'époque, ce qui a essentiellement permis aux chercheurs publics de transformer le colza, culture industrielle, en canola, produit comestible.

L'investissement dans la recherche sur le canola jusqu'à la moitié des années 1970 était essentiellement une activité publique, et une petite proportion des fonds de lancement provenait de l'industrie.

Avec les débouchés offerts par la biotechnologie et la capacité de génétiquement modifier le canola ou d'y transférer des gènes particuliers et de breveter le résultat, les entreprises privées ont commencé à s'intéresser à l'investissement dans le canola, ce qu'elles ont commencé à faire massivement à partir de la moitié des années 1980 jusqu'à la moitié des années 1990, parce qu'elles pouvaient protéger leur propriété intellectuelle à l'aide de brevets. La première protection qu'a obtenue le canola découlait de la capacité de breveter la propriété intellectuelle, si vous voulez, et cela a entraîné une augmentation considérable de l'investissement dans le canola.

Depuis cette époque, le canola est devenu une culture hybride, ce qui renforce encore plus les droits de propriété intellectuelle. Il n'est pas rentable pour un agriculteur de récupérer des semences hybrides, alors, chaque année, il plante une nouvelle variété hybride, et il doit acheter de nouvelles semences des mêmes sociétés. Par conséquent, il y a une source de recettes très importante pour la recherche sur le canola — environ de 800 millions à 1 milliard de dollars par année — que les producteurs consacrent aux nouvelles semences de canola et qui peuvent être réinvesties dans la recherche par cette industrie privée.

Le blé, en revanche, est seulement protégé aux termes de dispositions législatives sur les droits des sélectionneurs de plantes, qui contiennent le privilège de l'agriculteur, ce qui signifie que, une fois qu'un agriculteur a acheté de nouvelles semences et qu'il a payé une redevance pour la nouvelle semence, il est libre de cultiver les plantes qu'il veut dans son exploitation, de récupérer la semence et de la replanter. Cela a pour effet de réduire le montant qu'il serait prêt à payer ou la quantité de nouvelles semences qu'il serait prêt à acheter. Si le prix est très élevé, les agriculteurs ont tendance à les reproduire eux-mêmes. Cela signifie qu'il y a eu très peu d'incitatifs privés dans le secteur du blé, tandis que le canola était bien protégé par des brevets et l'hybridation, et il y a eu un important incitatif à la recherche privée dans ce secteur.

Le sénateur Buth : Comment stimule-t-on l'investissement dans le blé, alors, tout en respectant la question du privilège de l'agriculteur?

M. Gray : Je crois que la meilleure façon de faire, franchement, est d'imiter les Australiens en établissant des redevances au point de vente. En Australie, les sélectionneurs conservent les droits liés aux produits cultivés jusqu'au paiement des redevances. Autrement dit, si un agriculteur australien décide de replanter une semence, au moment où il livre le produit, une redevance est versée sur la production ou les ventes. Cela signifie que, pour chaque tonne d'une variété X produite, il y a une redevance qui retourne au propriétaire de la variété.

En fait, en Australie, on encourage les semences sûres à la ferme en même temps. Compte tenu des sécheresses et autres phénomènes, on estime que l'approvisionnement en semences est trop vulnérable si on s'en remet à un petit groupe sélect de producteurs. C'est beaucoup mieux si on peut encourager l'utilisation de semences sûres. Ces éléments peuvent être compatibles, mais la redevance doit être payée non pas sur la semence, mais sur la production d'un produit à partir de la semence. Cela fonctionne très bien en Australie, et la France et le Royaume-Uni ont aussi des systèmes comparables.

Le sénateur Buth : Vous avez parlé de redevances au point de vente. Dans la première recommandation, vous proposez aussi l'adoption de dispositions législatives pour créer une taxe de 1 p. 100 sur la vente de toutes les récoltes. Est-ce la même chose?

M. Gray : C'est pratiquement la même chose, madame le sénateur. Cela signifierait que, pour chaque tonne vendue, il y aurait essentiellement des recettes qui retourneraient au propriétaire de la variété. Le mécanisme serait très similaire.

La raison pour laquelle je propose un taux de 1 p. 100 pour commencer est que, en Australie, les nouvelles variétés assorties d'une redevance au point de vente entraient en concurrence directe avec des variétés que les agriculteurs pouvaient utiliser gratuitement. Par conséquent, on ne pouvait pas percevoir beaucoup pour les nouvelles variétés, et il a fallu mettre 15 ans avant d'obtenir un taux de redevance assez élevé pour soutenir une industrie privée.

Si nous adoptions cette formule, alors il faudrait mettre 15 ans avant de véritablement générer assez de recettes avec de nouveaux droits de propriété intellectuelle solides. Dans ma recommandation, je propose que nous commencions à 1 p. 100 pour tout le monde, qu'il s'agisse de nouvelles variétés ou d'anciennes variétés, et que tout cela retourne aux propriétaires de variétés. Ainsi, on commencerait à un tout autre niveau.

Le sénateur Buth : Quel montant générerait cette taxe de 1 p. 100?

M. Gray : La taxe de 1 p. 100 pourrait faire disparaître la disparité entre le blé et les cultures concurrentes, par exemple. Si vous prenez un produit de vente de récoltes de 10 milliards de dollars, alors on parle de recettes de 100 millions de dollars.

Le sénateur Peterson : J'aimerais obtenir des précisions sur une chose. Dites-vous que les droits de propriété intellectuelle se rattachent seulement aux semences transgéniques et que tout ce qui n'entre pas dans cette catégorie n'est pas protégé? Est-ce ce que vous dites ici?

M. Gray : Pour les cultures, il y a essentiellement trois types de protection. Il y a les cultures hybrides ou produites végétativement, dont vous ne pouvez pas replanter les semences; elles ne poussent pas très bien. Le canola et le maïs entrent dans cette catégorie.

Ensuite, il y a la protection par brevet. Selon l'interprétation de la Loi sur les brevets par les tribunaux, vous pouvez breveter des organismes vivants à condition qu'il y ait eu un changement sur le plan infracellulaire, ce qui comprend tous les organismes transgéniques. La modification génétique cadre très bien avec la protection par brevet; ces deux choses vont bien ensemble.

Dans le cas des cultures non transgéniques, elles sont visées par les droits des sélectionneurs de plantes, où les agriculteurs ont le droit de conserver les semences. Il n'y a pas de protection par brevet à ce chapitre. Les droits des sélectionneurs de plantes sont une forme de protection faible, les brevets sont un peu plus solides, et l'hybridation est le moyen le plus solide.

Le sénateur Peterson : Avez-vous eu l'occasion de regarder l'actuel projet de loi sur les droits de propriété intellectuelle et de déterminer s'il aidera l'industrie agricole ou la freinera?

M. Gray : Je n'ai pas examiné ce projet de loi, non.

Le sénateur Peterson : Il y a beaucoup de fusions et de concentration dans l'industrie biotechnologique. Quelle est l'incidence sur la recherche et l'innovation?

M. Gray : Il y a toujours des avantages et des inconvénients. Il y a des économies d'échelle en recherche. Essentiellement, plus vous êtes gros, plus vous pouvez mener de travaux de recherche pour un nombre de dollars donnés. Vous pouvez utiliser la même machine pour différentes choses et réutiliser infiniment les connaissances dans une grande entreprise. Les grandes sociétés peuvent peut-être mener plus de travaux de recherche de façon plus efficiente. Toutefois, s'il y a un petit nombre d'entreprises de vente dans une industrie, vous aurez aussi la capacité de percevoir un prix élevé pour votre produit; vous aurez un certain pouvoir sur le marché. Ça, c'est l'avantage.

Idéalement, nous aimerions que les nouvelles technologies soient accessibles à un faible prix pour accélérer l'adoption de ces technologies. Évidemment, les entreprises ont également besoin de recettes pour faire des investissements, et elles les obtiennent à mesure que se concentre l'industrie.

Le sénateur Peterson : Monsieur Cranfield, avez-vous des commentaires à faire sur ces questions?

M. Cranfield : Pour ce qui est de la concentration, M. Gray a soulevé un certain nombre de questions importantes. Il importe aussi de reconnaître que les brevets sont une façon pour le gouvernement d'inciter les entreprises à révéler leurs découvertes, et en contrepartie, elles jouissent de droits exclusifs. Un brevet confère à une entreprise le droit d'être le seul producteur d'un bien particulier ou d'octroyer une licence à quelqu'un d'autre. Cela suppose que certaines entreprises auront beaucoup de pouvoir sur le marché, et c'est le prix à payer.

En revanche, je ferais valoir que le secteur biotechnologique est un secteur très dynamique. Il y a beaucoup de fusions et d'acquisitions. Nous voyons souvent naître de petites entreprises, à la suite d'innovations dans les universités, qui établissent une nouvelle technologie, comme un processus ou un nouveau produit, et il n'est pas rare de voir ces jeunes pousses ensuite être acquises par de plus grandes entreprises qui considèrent que c'est le moyen le plus facile d'accéder à la nouvelle innovation. La structure inhérente au système fait que la concentration est presque un mal nécessaire pour obtenir ces innovations qui mènent réellement à de nouveaux produits et processus.

Le sénateur Plett : Monsieur Cranfield, les parlementaires sont toujours heureux d'accueillir un témoin qui dit qu'il n'est pas nécessairement en quête de deniers publics, alors je vous suis reconnaissant de ces commentaires.

Toutefois, vous avez aussi parlé d'un programme de contribution. J'aimerais que vous expliquiez le programme de contribution, s'il vous plaît, et votre conception de ce programme.

Après, vous avez mentionné les partenariats public-privé, qui supposent encore l'utilisation de deniers publics. Peut- être dans une moins large mesure, mais tout de même.

Pourriez-vous nous parler un peu du programme de contribution et de la façon dont vous en envisagez le fonctionnement?

M. Cranfield : Avez plaisir. Selon les dispositions législatives en place, les producteurs d'un bien particulier ont la possibilité d'établir des organismes agricoles nationaux qui auraient le pouvoir de percevoir une taxe sur la vente de biens agricoles en guise de contribution. Les contributions dont parlait M. Gray au sujet du canola en sont un exemple, et le mécanisme n'est pas nécessairement régi par une loi fédérale existante; c'est le groupe de producteurs qui s'en occupe. Ces fonds de contribution pourraient alors servir à différentes activités.

Pour illustrer mon propos, je prendrais l'industrie bovine. Au début des années 1990, on a modifié la loi pour permettre la création d'un organisme comme le Beef Cattle Check-Off, puis, vers la fin des années 1990, l'industrie bovine canadienne a tenu un vote. La majorité des producteurs au pays ont voté pour l'établissement d'un tel organisme. Nous avons maintenant un tel organisme. Il perçoit une contribution sur la vente de tout bovin vendu. Ces contributions sont ensuite recueillies par l'organisme national et affectées à des activités d'expansion du marché intérieur, de promotion de l'exportation ou de recherche-développement.

Ce sont réellement les producteurs qui doivent amorcer un tel changement s'ils veulent qu'un organisme national fasse cela. Il n'est pas nécessaire que cela se fasse à l'échelon national. Bien des provinces ont des contributions pour toutes sortes de marchandises. Les secteurs soumis à la gestion de l'offre n'y font pas exception; de fait, presque tous les secteurs soumis à la gestion de l'offre prélèvent une forme de contribution qui sert à financer soit la publicité — des programmes de publicité générique pour le lait, par exemple — soit la recherche sur la production primaire.

Cela part du principe qu'il n'est pas nécessaire qu'un organisme fédéral ou national s'en charge, que cela peut être fait à l'échelon provincial. Le problème d'une telle approche à l'échelon provincial, à mon avis, c'est qu'elle ne générera pas nécessairement l'argent nécessaire pour financer comme il faut des programmes de recherche-développement à grande échelle.

Je sais que, dans l'industrie du bœuf, le taux de rendement du programme de contribution à la R-D qui est en place est assez élevé, et on aimerait augmenter la portée de ces activités de recherche-développement afin de mettre au point de nouveaux produits ou de nouveaux processus qui réduiraient les coûts de production des producteurs.

En ce qui concerne la question des partenariats public-privé, oui, cela suppose encore l'octroi de fonds publics. Comme vous le dites, c'est à un niveau moins élevé. Comme je l'ai mentionné dans mes commentaires, l'une des choses qui me préoccupent est le fait que des fonds publics servent à la mise au point de nouveaux produits ou de nouveaux processus dont les entreprises privées sont ensuite les principaux bénéficiaires. On ne peut pas nécessairement dire que ce type de partenariat rapporte beaucoup au Trésor public. Je crains que notre régime de droits de propriété intellectuelle n'aide les entreprises qui participent à ce type d'arrangements à devenir les seuls bénéficiaires des retombées découlant, par exemple, d'un nouveau produit. J'espère avoir répondu à votre question.

Le sénateur Plett : Oui, tout à fait. Merci beaucoup. Je l'apprécie.

Monsieur Gray, dans la recommandation 1, vous parlez de créer une taxe de 1 p. 100. Est-ce que ce serait un mécanisme similaire, et à qui cette taxe serait-elle imposée?

M. Gray : Dans la recommandation, je parlais d'une taxe qui serait versée aux propriétaires de variétés. Cela ressemble davantage à une redevance au point de vente. La deuxième recommandation concerne la création d'un conseil de l'industrie qui serait financé grâce à une taxe, et c'est plutôt d'un mécanisme comme celui-là que nous parlions.

L'Australie utilise beaucoup ce type de taxes non remboursables. La Grains Research & Development Corporation, en Australie, compte dans son conseil d'administration des producteurs agricoles, et elle investit pour le compte des producteurs plus de 100 millions de dollars par année dans la recherche sur les grains. En Australie, la taxe non remboursable de 1 p. 100 est accompagnée d'une contribution du gouvernement de 0,5 p. 100. Il y a des fonds de contrepartie publics, mais les décisions touchant les dépenses liées aux grains sont bel et bien prises par les producteurs de l'industrie des grains plutôt que par le gouvernement, qui utiliserait peut-être l'argent à d'autres fins.

Le sénateur Merchant : Ma prochaine question s'adresse à vous deux. Est-ce que la résistance à l'herbicide Roundup, nouveau caractère introduit par modification génétique, est le caractère le plus utilisé dans le monde? La date d'expiration de ce brevet doit approcher. Savez-vous à quelle date il expirera et ce qui se passera ensuite?

M. Gray : Je ne suis pas sûr de ma réponse, mais je m'avancerais à dire que c'est probablement le caractère génétiquement modifié le plus utilisé dans le monde. C'est probablement une observation correcte.

Le brevet n'expire pas en même temps dans tous les pays. Au Canada, je crois savoir que, à l'époque où la demande de brevet du système Roundup Ready a été déposée, la Loi sur les brevets accordait à l'entreprise un brevet de 16 ans à partir du moment où le brevet a été délivré, et non à partir du moment où la demande a été déposée. Et il s'est écoulé de nombreuses années entre le dépôt de la demande et la délivrance du brevet. Cela veut dire qu'il reste encore quelques années avant que le brevet du système Roundup Ready n'expire. Je ne me rappelle plus en quelle année exactement.

Mais ce n'est pas si simple que cela : lorsque le brevet va arriver à échéance, tout le monde ne pourra pas utiliser les produits Roundup Ready. Toute entreprise qui utilise du canola hybride doit tenir compte des nombreux autres brevets utilisés dans ces processus. Quand un brevet tombe, cela ne veut pas dire qu'on peut, par exemple, utiliser le germoplasme de Monsanto, car il est protégé en même temps par plusieurs autres brevets. Vous pourriez mettre en place votre propre programme pour y introduire le caractère de résistance au Roundup, mais vous devrez le faire en respectant les autres brevets.

C'est, je crois, de cette façon que les choses passent. Peut-être que M. Cranfield pourrait ajouter quelque chose.

M. Cranfield : Je suis tout aussi ignorant que M. Gray de la date d'expiration du brevet. Je sais que la durée de vie des brevets diffère selon les pays. Je crois qu'il est important de savoir si nous parlons de Roundup Ready, qui est une marque de commerce, ou de son ingrédient actif, le glyphosate, que l'on trouve également dans divers herbicides génériques disponibles sur le marché. Donc, il s'agit non pas seulement de Roundup Ready, mais du glyphosate.

Je suis d'accord pour dire qu'il s'agit probablement de la lignée transgénique la plus utilisée dans le monde, et, si j'utilise le terme « transgénique », c'est qu'il y a des différences claires entre ce que l'on appelle la modification génétique et le génie génétique. Le génie génétique, c'est lorsqu'on introduit l'ADN d'une espèce dans l'ADN d'une autre. La modification génétique suppose pour sa part une certaine forme d'intervention humaine, par exemple lorsqu'un phytogénéticien fait le croisement par pollinisation de deux lignées de canola ou de pommes de terre. C'est une distinction importante. Et je suis d'accord pour dire que les semences résistantes au Roundup ou au glyphosate sont probablement les plus utilisées dans le monde.

Le sénateur Merchant : Ma seconde question est la suivante. Pourriez-vous nous renvoyer à certaines sources d'information — ou tout simplement nous dire, si vous avez étudié le sujet — si, par rapport au rendement de l'agriculture biologique, le rendement des cultures résistantes au Roundup est plus faible à long terme?

M. Cranfield : Je ne sais pas du tout si Roundup Ready abaisse ou non la productivité. Il est certain que les herbicides de ce type sont conçus dans le but d'augmenter la productivité, dans la mesure où le producteur n'a pas autant d'effort à consacrer à l'arrachage des mauvaises herbes. En ce qui concerne l'agriculture biologique, il existe toutes sortes d'études sur le sujet, et les avis sont partagés. Il faut faire attention et préciser de quel domaine on parle quand il s'agit de cela : est-ce bon ou mauvais pour la santé humaine? Est-ce bon ou mauvais pour l'environnement?

La plupart des systèmes de production biologique prévoient en effet des restrictions, touchant l'utilisation de pesticides synthétiques, voire une interdiction totale. De ce point de vue, on peut dire que ces systèmes introduisent moins de polluants dans l'environnement. Les données probantes au sujet des effets bons ou mauvais de l'agriculture biologique sur la santé humaine sont contradictoires; d'ailleurs, une étude récemment menée à l'Université Stanford révèle qu'il n'y a en réalité aucune différence nutritionnelle entre les produits alimentaires issus de l'agriculture classique et ceux issus de l'agriculture biologique. De ce point de vue, il est vraiment question de l'environnement et de l'impact de la production sur l'environnement.

M. Gray : J'aimerais ajouter un commentaire concernant le système Roundup Ready. Je crois savoir qu'on voit apparaître des mauvaises herbes qui possèdent le caractère de résistance au Roundup, ce qui pourrait entraîner une augmentation des coûts à un moment donné. Toutefois, il a fallu beaucoup de temps pour que cette résistance au Roundup se développe, beaucoup plus de temps que ce que les gens attendaient ou craignaient au départ.

En second lieu, il semble que l'on puisse facilement composer avec la résistance au Roundup en utilisant d'autres herbicides en rotation. Il existe une solution technique qui semble toute simple. Les technologies visant à assurer une résistance aux insectes et les caractères génétiquement modifiés semblent, à long terme, plus difficiles à maintenir. Toutefois, quand on parle de résistance au Roundup, on constate que peu de mauvaises herbes l'ont développée, et il semble qu'il soit facile de régler le problème par la rotation. Rien ne se profile à l'horizon qui permettrait d'avancer que cette technologie va rapidement disparaître ou qu'elle cause beaucoup de dommages. À l'heure actuelle, il s'agit tout simplement de réduire les coûts et d'augmenter la productivité.

[Français]

Le sénateur Rivard : Nous avons eu l'occasion, mardi dernier, de rencontrer des gens de votre domaine, celui des bioénergies, du biocarburant et autres. Il est établi que le Canada impose un maximum de 5 p. 100 pour un mélange de ce type de carburant avec le pétrole traditionnel. Aux États-Unis, la norme est de 10 p. 100, et cela pourrait même aller jusqu'à 15 p. 100. La réponse d'un témoin, qui nous disait qu'un pourcentage de 5 p. 100 représentait une baisse instantanée de 20 cents le litre, m'a surpris. Alors l'idée d'augmenter ce pourcentage à 15 semble alléchant pour les contribuables.

Le gouvernement impose les règles, mais il est toujours à l'écoute de toutes les parties impliquées. Faites-vous des efforts pour convaincre les gouvernements de permettre tout d'abord d'augmenter le pourcentage à 10, comme le font les Américains, ou, mieux, d'y aller jusqu'à 15 p. 100? De plus, croyez-vous, selon les statistiques, qu'il y a un impact de 20 cents le litre par tranche de 5 p. 100?

[Traduction]

M. Gray : M. Cranfield pourrait peut-être essayer de répondre. J'aimerais y réfléchir un peu.

M. Cranfield : Je ne possède pas vraiment beaucoup d'expérience dans le domaine des biocarburants, alors j'hésite un peu à répondre à la question. J'aimerais cependant signaler que les États-Unis ont adopté un règlement sur un mélange à 15 p. 100, mais que, d'après ce que j'ai compris, l'adoption de ce règlement a été largement politisée et très influencée par le lobby américain des biocarburants.

Je suis également d'avis que ce règlement imposant un mélange d'une teneur si élevée reflète les pressions budgétaires auxquelles les États-Unis font face, et je dis cela en pensant à la loi agricole américaine. Cette loi agricole — et, en particulier, la disposition sur les paiements aux producteurs de maïs — a eu dans le passé une très grande incidence aux États-Unis, en raison de la façon dont leur programme de soutien a été structuré. À mon avis, le gouvernement fédéral des États-Unis a vu l'exigence relative aux biocarburants et à la teneur élevée du mélange comme une façon de déplacer le fardeau du Trésor de l'État aux automobilistes, alors, vraiment, c'est une question budgétaire.

Quant au fait que ce pourcentage de 5 p. 100 entraîne une diminution de 20 cents le litre du prix de l'essence, je ne saurais dire si c'est le cas. C'est une question que vous devriez poser aux experts de l'industrie pétrolière, je crois.

[Français]

Le sénateur Rivard : Plusieurs personnes de l'industrie de l'agriculture et de l'agroalimentaire nous ont affirmé que s'il n'y avait pas d'aide gouvernementale pour la production de biocarburants on n'en parlerait pas du tout. C'est rentable à cause de l'aide gouvernementale. Peut-on espérer qu'à moyen terme, l'industrie des biocarburants sera rentable au point qu'elle n'ait plus besoin de l'aide gouvernemental pour fabriquer les biocarburants?

[Traduction]

M. Gray : J'étudie la question depuis un certain temps, et l'un des problèmes que nous avons cernés, c'est qu'il est impossible de séparer le prix actuel des grains de la politique américaine sur les biocarburants. Si, par exemple, le baril de carburant est à 100 $ et que le maïs est à 4 $, vous pouvez fabriquer du biocarburant de manière rentable. Toutefois, comme le prix du maïs est actuellement de 7 $, cela ne serait pas possible sans mandats gouvernementaux. Si vous supprimiez ces mandats, deux choses se produiraient : le prix des grains baisserait, et un volume réduit de grains serait converti en éthanol. Si le prix du grain baissait trop, l'industrie de l'éthanol pourrait reprendre ses activités et produire, en fait, davantage de biocarburant.

Je dirais que ces mandats gonflent la demande de grains et font en sorte que l'industrie de l'éthanol est plus importante qu'elle ne le serait normalement. Si vous les supprimiez à ce moment-ci, où la capacité existe, chaque fois que le prix du grain baisserait par rapport au prix du pétrole, vous verriez que l'on produirait de l'éthanol à base de maïs.

Le sénateur Mahovlich : Compte tenu de tous ces brevets et règlements, est-ce que les agriculteurs sont bien représentés par les avocats dans ce secteur? Sont-ils tous bien représentés? Les agriculteurs qui n'en ont pas les moyens peuvent-ils recevoir une aide quelconque?

M. Gray : Si vous voulez parler des litiges touchant des brevets ou l'utilisation des brevets dans les exploitations agricoles, je crois savoir qu'il s'agit généralement d'une question qui se règle en privé entre le producteur et l'entreprise qui soutient qu'il y a eu contrefaçon de son brevet. Il existe des organismes sans but lucratif qui aideraient probablement le producteur. Je crois en outre qu'il y a très peu de litiges de ce type. Dans le fond, les agriculteurs respectent les droits de propriété intellectuelle des entreprises, dans une grande mesure, et, de toute façon, les cas de contrefaçon sont très rares. Je ne crois pas que les frais juridiques occupent une grande place dans le dossier des brevets.

Le sénateur Mahovlich : Les litiges au sujet des brevets ne sont donc pas si nombreux que cela?

M. Gray : À l'échelon des exploitations agricoles, en ce qui concerne l'utilisation des brevets, je ne crois pas que les litiges soient si nombreux.

Le président : J'aimerais poursuivre sur cette question importante soulevée par le sénateur Mahovlich. Quoi qu'il en soit, les questions concernant la propriété intellectuelle sont de plus en plus nombreuses, en agriculture comme dans d'autres secteurs de l'économie. Pour en revenir à la question que le sénateur Mahovlich a posée, envisageons la situation sous l'angle des grandes sociétés, par exemple, mais sans nommer personne. Dans les grandes sociétés, il y a aux États-Unis des enquêtes antitrust. Auriez-vous un commentaire à faire à ce sujet?

M. Gray : Certainement. Comme je l'ai déjà expliqué, en raison des grandes économies d'échelle et de l'envergure des projets de recherche, il y a une tendance naturelle de l'industrie à la concentration. Prenez par exemple une industrie quelconque, disons, l'industrie du maïs; peu importe où vous irez, vous constaterez qu'il n'y a probablement que deux ou trois grands fournisseurs. Dans l'industrie du canola, dans l'Ouest canadien, vous ne trouverez probablement que quatre ou cinq grands joueurs. Quand, dans une même industrie, on se retrouve avec moins de cinq entreprises, la pertinence d'une enquête antitrust s'accroît.

Il y a eu au cours des cinq dernières années le cas de Bayer CropScience et de Monsanto, qui ne mettaient en commun aucune de leurs technologies respectives, ce qui veut dire qu'il était impossible de trouver un produit de la gamme InVigor présentant le caractère de résistance au Roundup. Les sociétés ne faisaient pas cela. Depuis, elles ont conclu des ententes d'échange de licences. En ce qui concerne ces ententes, il est difficile de soutenir que les sociétés mènent leurs activités de façon tout à fait indépendante l'une de l'autre. Je crois que c'est là une partie des questions abordées dans les enquêtes antitrust.

Le président : Qu'en pensez-vous, monsieur Cranfield?

M. Cranfield : Je serais d'accord avec M. Gray pour dire que la structure de l'industrie est telle qu'il est tout simplement inévitable, dans ce domaine d'activité, qu'un petit nombre seulement d'entreprises s'adonnent à ce que d'aucuns considèrent comme de la « mégascience ».

La question de l'échange de licences me semble liée à certains commentaires que j'ai formulés sur la collaboration, puisque, d'une certaine façon, si les collaborations ou les accords d'octroi de licences soulèvent des inquiétudes sur la possibilité de l'établissement d'un monopole, il y a un avantage, car cela peut déboucher sur des innovations susceptibles de résoudre des problèmes endémiques dans le secteur de la production agricole, qu'il s'agisse de maladies des végétaux ou de maladies du bétail, alors il y a clairement des avantages et des inconvénients.

Il est important de reconnaître que... Même s'il s'agit de grandes entreprises, je suis d'avis qu'elles cachent bien leur jeu, et je crois que l'enjeu concerne non pas tant le risque de collusion que le nombre réduit de joueurs. Le processus est donc très transparent : on voit qui établit le prix d'un nouveau produit, à quel niveau et de quelle façon les autres entreprises réagissent.

Le sénateur Robichaud : Monsieur Gray, dans votre seconde recommandation, vous parlez de sociétés financées grâce aux fonds de contributions non remboursables et contrôlées par l'industrie; vous dites ensuite que, compte tenu de la capacité des gouvernements de profiter de cette initiative, les gouvernements fédéral et provinciaux devraient verser un certain financement de contrepartie. Est-ce que cela ne tarirait pas la source de financement des chercheurs du secteur public, dont vous parlez dans votre troisième recommandation?

M. Gray : Dans ma vision du monde, trois types de recherches ont vraiment de l'importance.

Les chercheurs du secteur public devraient mener des recherches d'intérêt général, qui ne concernent pas une industrie plutôt qu'une autre, et cela comprend la mégascience, la génomique de base, et cetera.

Il y a un autre type de recherche qui va bien au-delà du cadre de l'entreprise, mais qui concerne une industrie. Le fait de chercher à comprendre, par exemple, quelle place donner à la culture des lentilles dans la rotation des cultures peut intéresser l'ensemble des producteurs d'une région donnée. Il s'agit là d'une recherche axée sur l'industrie.

Enfin, il y a les initiatives de recherche du secteur privé qui peuvent clairement être menées par des entreprises privées, qui utilisent leurs droits de propriété intellectuelle pour rentabiliser leurs investissements.

Ces trois types de recherche composent ensemble un bon système d'innovation, et les trois sont nécessaires.

En réalité, quand il est question des partenariats public-privé, il devrait s'agir de partenariats public-producteur- privé, ce qui suppose l'établissement d'un fonds de l'industrie pouvant couvrir la recherche menée dans l'intérêt de l'industrie, mais pas dans l'intérêt du grand public.

Je crois que la seconde recommandation vise à réunir à l'échelon des industries des fonds suffisants pour faire davantage de recherche de ce type. À l'heure actuelle, les gouvernements mènent une partie de ces activités. En Australie, on a constaté que le financement de contrepartie incitait l'industrie à assumer une partie de ces responsabilités, puisqu'elle savait qu'il ne s'agissait pas tout simplement de remplacer l'argent des contribuables. De fait, elles obtenaient l'appui des contribuables en faisant cela.

Le sénateur Robichaud : Il y a beaucoup de concurrence pour ces fonds publics.

M. Gray : Oui, et je crois que nous ne devrions pas perdre de vue le fait que nous devons vraiment faire augmenter le volume des recherches menées grâce au financement du secteur privé, des producteurs et du secteur public. Si nous n'en faisons pas suffisamment, nous ne pourrons pas profiter des taux élevés de rendement des investissements dans la recherche.

Le sénateur Robichaud : Monsieur Cranfield, à quel point est-il difficile pour une personne voulant mener des recherches innovatrices d'y voir clair dans le dédale de brevets et de mesures de protection actuellement en vigueur dans le secteur agricole? Est-ce que cela peut avoir un effet dissuasif?

M. Cranfield : Je crois que la réponse est oui, cela peut être décourageant. Mais il faut ajouter que cela dépend de la structure et de la taille de l'organisation qui soutient cette personne.

S'il s'agit par exemple d'une petite entreprise en démarrage qui a vu le jour grâce à un projet de recherche universitaire, cela peut être une tâche compliquée, et les responsables devront retenir les services d'avocats, ce qui coûte cher.

Quant aux grandes entreprises, comme les Monsanto de ce monde, elles sont dotées de services juridiques et d'experts et elles affectent du personnel à cette tâche.

Je crois que, pour que ces petites entreprises en démarrage réussissent à éviter les écueils, il faudrait soit qu'elles aient de gros moyens financiers, soit qu'elles puissent compter sur une personne qui les aidera à naviguer dans le système. Il serait difficile de repenser le système parce que nous pensons peut-être qu'il devrait être plus simple pour les petites entreprises que pour les grandes, car, au bout du compte, ce ne serait pas équitable. La notion d'un traitement égal pour tous est importante dans ce domaine.

Le sénateur Buth : Dans quelle mesure est-il important que le gouvernement tienne compte de l'UPOV 91 dans ses projets d'innovation à venir?

M. Gray : Je dirais qu'il est très important que les gouvernements tiennent compte de l'UPOV 91, surtout dans le cas des cultures qui ne sont pas protégées par un brevet au motif qu'elles ne sont pas un produit génétiquement modifié ou dans le cas des cultures qui ne sont pas hybrides. Il est important de prendre position et de donner plus de force aux droits de propriété intellectuelle. Ce qui m'inquiète un peu, si l'on applique l'UPOV 91, c'est que les gens présument que la question du sous-financement de ces cultures sera réglée, mais il s'agit là d'une solution à long terme, à moins qu'on prenne également des mesures à court terme plus énergiques. Toutefois, il est certain que nous devons appliquer l'UPOV 91.

M. Cranfield : Je crois qu'il est très important de renforcer les droits de propriété intellectuelle, puisque cela pourrait être un incitatif pour la recherche. De ce point de vue, je crois que M. Gray a parfaitement raison d'affirmer que c'est un enjeu crucial.

Le président : Je tiens à souligner, pour le compte rendu, que le sigle UPOV désigne l'Union internationale pour la protection des obtentions végétales.

Merci, messieurs, de votre participation. C'était très éclairant et très informatif.

J'aimerais rappeler aux honorables sénateurs que la séance sera levée à dix heures moins cinq et que je réserve cinq minutes pour les sénateurs qui veulent s'adresser au comité.

Nous accueillons maintenant M. Len Coad, directeur, Politique de l'énergie, de l'environnement et de la technologie, Conference Board du Canada.

Monsieur Coad, merci d'avoir accepté notre invitation et de bien vouloir nous faire part de vos commentaires et opinions au sujet de cette période difficile pour l'agriculture et de l'avenir de l'agriculture et de l'innovation. Le sujet dont vous allez nous entretenir est intéressant. Veuillez présenter votre exposé; les sénateurs vous poseront ensuite des questions.

Len Coad, directeur, Politique de l'énergie, de l'environnement et de la technologie, Conference Board du Canada : Merci d'avoir invité le Conference Board du Canada à prendre part à votre étude. Il est certain que l'éthanol représente une question et un sujet d'intérêt.

Nous avons été chargés, il y a près de trois ans maintenant, par l'Association canadienne des carburants renouvelables — nous dévoilons toujours nos sources de financement lorsque nous menons des études de ce type — de réaliser une étude minutieuse et indépendante sur l'éthanol. Nous avons examiné au bas mot plus de 100 articles, la plupart publiés dans des revues à comité de lecture et d'autres sources fiables, et avons étudié un certain nombre de questions liées aux avantages et aux coûts de la production et de la consommation de l'éthanol, surtout au Canada, mais aussi, évidemment, en Amérique du Nord. Nous avons suivi avec intérêt l'évolution d'une diversité de points de vue, en particulier au cours des 10 dernières années.

Nous avons abordé la question sous l'angle des retombées économiques, et la documentation étudiée montre que la production et la consommation de l'éthanol génèrent autour de 1,2 milliard de dollars par année au titre du PIB et représentent environ 1 000 emplois à temps plein.

Nous avons étudié la question des intrants et des extrants énergétiques, dont on a beaucoup parlé dans le cas de l'éthanol. Est-ce que l'éthanol contient davantage d'énergie que n'en exige sa production? Nous avons étudié les émissions de gaz à effet de serre. Est-ce que le recours à l'éthanol réduit le volume des émissions de gaz à effet de serre? Heureusement, grâce aux avancées des analyses du cycle de vie et aux protocoles de crédits compensatoires qui ont été mis au point en Alberta et à d'autres endroits, il est plus facile de répondre à ces questions aujourd'hui que ce ne l'était il y a 15 ans. L'éthanol dégage plus d'énergie qu'il n'en faut pour le produire, le ratio minimal étant de 2,3. Les émissions de gaz à effet de serre, sur un cycle de vie, peuvent être réduites de l'ordre de 40 à 60 p. 100 si on utilise de l'éthanol plutôt que de l'essence.

Le sénateur Robichaud : Je m'excuse, de 40 à 60 p. 100?

M. Coad : Oui. La différence peut même être plus grande que cela, et elle tient en général aux pratiques agricoles, aux pratiques de production liées à l'éthanol et à la source de pétrole brut que vous utilisez comme élément de comparaison.

Nous avons examiné les effets sur la santé, et les données sur le sujet restent ambiguës. Au bout du compte, les véhicules que nous conduisons aujourd'hui filtrent si efficacement les polluants qui se trouvent dans le carburant que cela se résume à une différence au chapitre des substances polluantes se trouvant dans l'éthanol par rapport l'essence. Les effets nets sur la santé seraient très minimes si on passait d'un carburant à l'autre.

En ce qui concerne l'utilisation des sols et l'utilisation d'aliments en tant que carburant, nous nous sommes attachés davantage à la question de l'utilisation directe des sols qu'à la question de leur utilisation indirecte, question beaucoup moins quantifiable et beaucoup plus ardue. En ce qui concerne l'utilisation directe, les données sur les cultures pour les 20 dernières années, tant aux États-Unis qu'au Canada, montrent tout à fait clairement que la production de maïs ou de blé en vue d'en faire de l'éthanol n'a pas vraiment exercé de pression sur l'utilisation des sols. Le maïs cultivé pour faire de l'éthanol — en fait, le maïs cultivé pour l'ensemble du marché — occupe environ la même superficie, ou une superficie légèrement supérieure, que le maïs qu'on produisait avant que l'éthanol ne devienne vraiment un enjeu. Tout cela est une question de rendement. Le rendement a augmenté assez rapidement pour qu'il soit possible de répondre à la demande accrue.

Nous avons brièvement étudié la technologie et l'évolution de la technologie, parce qu'il faut faire cela pour une étude de cette envergure. Nous ne sommes pas une organisation à vocation technique, alors nous nous sommes contentés de passer l'information en revue.

En ce qui concerne les politiques, nous avons étudié l'élaboration des politiques en matière d'éthanol au Canada et aux États-Unis, et nous soulevons dans nos conclusions quelques questions à ce sujet.

Pour terminer, la sécurité énergétique est l'un des arguments fondamentaux qu'on met de l'avant dans le dossier de l'éthanol. Au Canada, la question de la sécurité énergétique concerne surtout l'Ontario et le Québec, car c'est là qu'on produit le plus grand volume d'éthanol à base de maïs au Canada. L'état de la situation est le suivant : il y a encore quelques étapes à franchir pour faire de l'éthanol un élément important de notre sécurité énergétique.

C'est sur ces mots que je termine ma déclaration liminaire. J'attends avec impatience vos questions.

Le sénateur Plett : Étant donné le temps qu'il nous reste, je vais poser rapidement mes deux questions.

Il est évident que le prix des denrées agricoles augmente. Pensez-vous que cette augmentation tient davantage à l'augmentation du prix du pétrole, de 2006 à 2008, qu'à la production d'éthanol?

M. Coad : Les études dont nous avons pris connaissance donnent à penser que le prix du boisseau de maïs a augmenté de 30 à 50 cents en raison de la demande d'éthanol en Amérique du Nord; la plupart des sources font état d'une augmentation de 30 cents. Selon un certain nombre d'études, la forte augmentation constatée pendant cette période — et l'augmentation du prix des denrées agricoles de manière générale — est attribuable à l'éthanol. Quand nous avons analysé ces études, nous avons relevé un problème : elles ne tenaient pas compte des répercussions de la hausse des prix du pétrole; or, on sait que le carburant diesel est un coût important au chapitre des intrants de la production agricole. Nous n'avons trouvé qu'une seule étude, celle de l'Agence internationale de l'énergie de Paris, où l'on tente de distinguer les deux effets. Bien sûr, cette étude date du début des années 2000, à une époque où le prix du pétrole était beaucoup plus bas, mais les auteurs avaient relevé une augmentation de 5 à 7 p. 100 du coût des denrées agricoles liée à la demande mondiale de biocarburants. Dans le cadre de leur étude du choc des prix pétroliers, en se fondant sur des tranches d'augmentation de 20 $ le baril, les auteurs ont constaté que le prix des denrées agricoles augmentait de 20 p. 100 et plus. Il est évident que le facteur le plus important, c'est le prix des intrants agricoles.

Le sénateur Plett : Les gouvernements sont toujours en train d'offrir des incitatifs pour différents produits. Ils ont également offert des incitatifs touchant les mélanges éthanol-carburant. Pourquoi les stations-services offrant des mélanges carburant-éthanol à 85 p. 100 ne poussent-elles pas comme des champignons, au Canada? Est-ce parce que les pétrolières refusent de suivre le courant? Est-ce qu'elles s'opposent à l'utilisation de l'éthanol?

M. Coad : Je ne dirais pas que c'est nécessairement le cas. Bien sûr, notre recherche n'a pas porté sur l'attitude des pétrolières à l'égard de la production d'éthanol.

Ce que je dirais, toutefois, c'est qu'il faut, pour respecter l'exigence canadienne actuelle en matière de mélange, produire un peu plus d'éthanol que le pays n'en produit actuellement. La mise sur pied à l'échelle du pays d'une infrastructure de distribution du carburant E85 suppose des dépenses, et, même s'il ne s'agirait probablement que d'une dépense de moins de 5 cents le litre, cela veut dire que l'effet incitatif est limité, puisqu'on ne dispose pas d'une réserve d'éthanol suffisante pour y arriver. On voit sur la route de plus en plus de véhicules polycarburants, qui peuvent utiliser un mélange dont la teneur en éthanol est supérieure à 10 p. 100, mais il s'agit surtout de donner l'impulsion. Comme il n'y a pas d'infrastructure, je ne suis pas motivé à chercher du carburant E85, puisque je n'en trouverai pas. Je ne suis pas motivé à acheter un véhicule polycarburant capable d'utiliser un carburant à teneur élevée en éthanol, et on ne produit pas suffisamment d'éthanol pour que les stations-services trouvent rentable d'investir dans la conversion de leurs installations. En outre, le Canada n'a mis en œuvre aucun programme qui offrirait une mesure de soutien quelconque pour l'infrastructure qui serait nécessaire.

Le sénateur Plett : Mais si je vois une station-service qui offre du carburant à 85 p. 100, je ne pourrais pas décider de faire le plein?

M. Coad : Vous ne pourrez faire cela que si vous avez un véhicule polycarburant.

Le sénateur Peterson : Est-ce que la réduction de 40 à 60 p. 100 des GES est calculée en fonction de l'ajout de 5 p. 100 d'éthanol?

M. Coad : Voilà une très bonne question. En général, les calculs sont fondés sur le rendement réel d'un mélange à 10 p. 100, puisque les véhicules peuvent utiliser ce mélange sans subir de modification; on calcule alors les réductions en faisant la comparaison avec un carburant sans éthanol. Si votre véhicule roule à l'éthanol pur, les émissions de GES seraient, selon les données réunies au Canada, de 62 p. 100 inférieures à ce qu'elles seraient si votre véhicule utilisait seulement de l'essence. La source principale de cette réduction, c'est le fait que les GES emprisonnés dans le carburant, puisqu'il s'agit d'un biocarburant, ne sont pas comptabilisés dans les émissions : ils ont été récupérés dans l'atmosphère par la culture, et ils retournent de la culture à l'atmosphère. Le résultat est nul.

Le sénateur Peterson : Où en sommes-nous rendus dans le dossier du biocarburant à base de cellulose?

M. Coad : C'est une bonne question, et je ne suis probablement pas la personne la mieux placée pour y répondre. Il y a l'usine de démonstration d'Iogen. Elle ne produit pas de biocarburants cellulosiques, mais Enerchem possède une usine thermochimique à Edmonton qui utilise les déchets municipaux. Certaines personnes que nous avons rencontrées ont laissé entendre que la prochaine génération de carburants est à nos portes et qu'il suffit de les mettre à l'échelle et de les commercialiser. D'autres affirment qu'on attend cette percée depuis bien des années déjà. Toutefois, je ne me hasarderai pas à répondre à cette question technique.

Le sénateur Buth : J'aimerais revenir sur un de vos commentaires. Vous avez dit avoir mené une analyse comparative des politiques et programmes du Canada et des États-Unis. Vous avez constaté certaines divergences à ce sujet. Pouvez-vous nous fournir plus de détails?

M. Coad : Les États-Unis ont adopté une approche bien plus énergique que le Canada. Le mandat lié à la Renewable Fuel Standard — la RFS2 — est de produire environ 15 milliards de gallons d'éthanol par année en utilisant du maïs et des technologies de première génération, et il est presque atteint. Les prochains 15 milliards de gallons par année seront produits grâce à des technologies de biocarburant de pointe ou de troisième génération.

Le sénateur Buth : Vous parlez des États-Unis?

M. Coad : Oui. Il y a beaucoup d'argent investi là-dedans, ce qui nous donne une idée de la rapidité avec laquelle on peut commercialiser ces biocarburants et les mettre sur le marché.

Ici, au Canada, des incitatifs ont été offerts aux échelons provincial et fédéral. À l'heure actuelle, les incitatifs fédéraux sont plafonnés. D'ici 2017, le gouvernement fédéral n'accordera pas d'aide financière pour stimuler la production d'éthanol. Encore une fois, pour ce qui est des biocarburants de troisième génération, il est impossible de dire si des programmes gouvernementaux seront mis en œuvre pour soutenir la commercialisation de ceux-ci et des projets technologiques ni, le cas échéant, quelle en sera la nature. TDDC exploite son Fonds de biocarburants ProGen et déploie beaucoup d'efforts à ce chapitre. Cependant, il semble qu'aucune politique globale n'existe à l'heure actuelle et qu'il n'y en aura pas dans un avenir prochain.

Le sénateur Merchant : Est-ce qu'un litre d'éthanol est l'équivalent d'un litre d'essence à indice élevé d'octane? Sinon, combien d'énergie additionnelle permet de produire ce dernier?

M. Coad : Que voulez-vous dire par « équivalent »? Vous parlez seulement du contenu énergétique?

Le sénateur Merchant : Oui.

M. Coad : Je crois savoir que le rapport d'équivalence est d'environ 70 p. 100, tout dépendant de l'essence dont il est question et des additifs utilisés. Sur le plan énergétique, ce rapport est d'environ 70 p. 100.

Le sénateur Merchant : Les études que vous avez examinées comparent le coût de production de l'éthanol à la production énergétique occasionnée. Il est difficile de comprendre comment on arrive à ces chiffres quand on fait de telles comparaisons.

M. Coad : Habituellement, les comparaisons ne sont pas fondées sur le coût. Dans une étude comparative du contenu énergétique de l'éthanol, on tient compte de tous les intrants énergétiques requis pour produire le maïs, de l'équipement utilisé et de la quantité d'énergie nécessaire pour transformer le maïs en éthanol.

Le sénateur Merchant : On tient compte des engrais et de toute l'énergie nécessaire.

M. Coad : Les engrais, l'irrigation, tous les intrants. On déduit l'énergie qui aurait été nécessaire pour produire les drêches de distillerie — qui sont un produit dérivé —, puis on examine l'énergie totale contenue dans un litre d'éthanol et on la compare avec l'énergie nécessaire pour produire un gallon d'essence — qu'on déduit de son contenu énergétique — et on effectue les comparaisons en fonction de ces chiffres.

Aux fins du calcul du contenu énergétique de l'éthanol, on se penche habituellement sur ce qui entre en jeu dans sa production, alors il est question d'un pourcentage ou d'un ratio. Cette considération ne s'applique plus quand on calcule celui-ci. L'énergie contenue dans l'éthanol est 2,3 fois supérieure à celle utilisée pour tous les intrants nécessaires pour le produire, quel que soit son contenu énergétique.

Le sénateur Merchant : Est-ce que le fait de brûler de la nourriture entraîne une hausse du coût des aliments? Le cas échéant, quelle en est l'ampleur?

M. Coad : Selon les études que nous avons consultées, le prix du grain à l'échelle mondiale serait plus bas d'environ 5 p. 100 s'il n'y avait aucune demande de biocarburants. Il est impossible de déterminer avec précision leur impact pour le Canada seulement, car il ne s'agit que d'une toute petite partie du monde.

Certaines études ont tenté de prendre en considération l'utilisation des sols et la demande de maïs, mais elles se fondent habituellement sur des hypothèses telles que la cessation de toutes les importations de maïs vers le Canada — alors, il n'est déjà plus seulement question de l'incidence des biocarburants —, ou elles ne tiennent pas compte des fluctuations du prix du pétrole, de sorte qu'un autre facteur exogène entre en jeu. Les auteurs avancent ensuite un chiffre et affirment qu'il quantifie l'incidence des biocarburants, ce qui n'est pas tout à fait exact.

[Français]

Le sénateur Maltais : Monsieur Coad, une question m'intrigue. Est-ce que les grains qui servent à fabriquer de l'éthanol, soit le blé ou le maïs, sont des grains de première qualité ou peuvent-ils être de deuxième ou de troisième qualité?

[Traduction]

M. Coad : C'est une question fascinante. Les producteurs d'éthanol vous diront qu'ils cherchent du grain à teneur en amidon très élevée. Pour ce qui est du blé, cela tend à être le grain de qualité inférieure. Quant au maïs, je n'en suis pas si certain. Ils veulent l'amidon contenu dans la plante, car c'est ce qui est le plus facile à convertir en sucre, puis en alcool. Les produits dérivés sont très riches en protéines, et c'est ce que recherchent habituellement les engraisseurs de bovins. Tout le monde y gagne : les producteurs d'éthanol veulent du grain ayant une haute teneur en amidon — lequel n'est pas habituellement le plus cher sur le marché — et créeront un produit qui en contient toutes les protéines.

[Français]

Le sénateur Maltais : Votre réponse est claire, mais une question reste en suspens. Le Canada est fort peu attaché aux grains modifiés, aux OMG. Sur nos terres canadiennes, est-ce que les grains génétiquement modifiés sont plus productifs en éthanol que les gains ordinaires?

[Traduction]

M. Coad : C'est un ingénieur chimiste qui devrait répondre à cette question. Ma réponse de profane serait la suivante : si on les modifie pour accroître la teneur en amidon, cela les rendra plus attrayants pour le marché de l'éthanol. En contrepartie, si on les modifie pour accroître la teneur en protéines en vue d'en faire une céréale fourragère de meilleure qualité, cela les rendra moins attrayants pour un producteur d'éthanol.

[Français]

Le sénateur Maltais : On dit qu'au Mexique en particulier, un pays qui produit énormément de maïs, il ne reste pratiquement plus de terres productrices de maïs original parce qu'elles ont été envahies par des graines génétiquement modifiées. Pour la population, est-ce que c'est bon ou pas? Est-ce que les produits génétiquement modifiés sont plus propices à la production d'éthanol qu'à la production de nourriture régulière?

[Traduction]

M. Coad : Je ne pense pas pouvoir vous fournir une réponse très éclairante. Nous nous sommes penchés sur la production d'éthanol en particulier, et le Mexique n'en est pas un producteur important à l'échelle mondiale. Nous n'avons pas étudié le commerce de maïs entre ce pays et les États-Unis, qui produisent énormément d'éthanol. Nous n'avons pas trouvé d'éléments probants. Les États-Unis sont très près de l'autosuffisance en ce qui a trait à l'éthanol de maïs. La modification génétique est un aspect que nous n'avons pas examiné.

[Français]

Le sénateur Maltais : Est-ce que la Communauté européenne est un gros producteur d'éthanol?

[Traduction]

M. Coad : Non. Le rapport contient un graphique à ce sujet. Les chiffres sont en fait assez faibles. Ils sont plus élevés que pour l'ensemble du Canada, mais on consomme beaucoup plus de diesel en Europe qu'ici, et ce, même dans les véhicules légers. Le biocarburant le plus utilisé là-bas est le biodiesel et non l'éthanol. Il n'y a pas assez de terres en Europe pour cultiver le maïs à grande échelle afin de produire de l'éthanol. Le marché européen est très différent du nôtre.

[Français]

Le sénateur Maltais : Cela pourrait représenter un marché nouveau pour le Canada.

[Traduction]

M. Coad : Si nous avions la capacité de produire suffisamment d'éthanol pour l'exporter, la production serait suffisamment près des ports de mer pour l'envoyer à l'étranger à assez bon marché.

Le sénateur Mahovlich : L'essence aux États-Unis contient 10 p. 100 d'éthanol, et la nôtre, 5 p. 100. Je ne comprends pas tout à fait pourquoi nous ne pouvons pas produire plus d'éthanol au pays, compte tenu de la superficie des terres dont nous disposons. Il me semble que nous devrions pouvoir faire en sorte que notre essence contienne 10 p. 100 d'éthanol. Au Brésil, elle en contient 40 p. 100, mais là-bas, on utilise de la canne à sucre. Il vaudrait peut-être la peine de se doter de serres pour la culture de cette plante. Je sais qu'au Québec, on cultive des tomates en serre, mais ce serait peut-être une bonne idée d'y cultiver plutôt de la canne à sucre.

M. Coad : J'ai travaillé dans une serre, il y a 30 ans. Je ne suis pas certain des contraintes techniques ou économiques qui entreraient en jeu si on cultivait la canne à sucre dans de telles installations.

Pour revenir sur la question initiale, celle de savoir pourquoi nous n'avons pas assez d'éthanol pour faire en sorte que l'essence en contienne 10 p. 100, il s'agit vraiment d'une question d'investissements. À coup sûr, la technologie est là.

Le sénateur Mahovlich : Faut-il blâmer le gouvernement? Ce ne serait pas la faute des sociétés pétrolières.

M. Coad : Eh bien, ça l'est peut-être. Assurément, Husky Energy est un des principaux producteurs d'éthanol au Canada. Je pense que Suncor est maintenant devenu le plus important producteur grâce à ses récentes initiatives d'expansion. Je crois que Greenfield arrive au deuxième rang, sur le plan de la capacité et de la production.

Il faut se demander pourquoi il n'y a pas assez d'investissements pour faire bouger les choses. Il y a 20 ans ou peut- être même 15 ans, il n'y avait pas de production d'éthanol sans soutien gouvernemental. De nos jours, ce soutien est moins crucial et tend à diminuer. Il est concevable que la production d'éthanol soit rentable, et, encore une fois, tout dépend de l'écart entre la charge d'alimentation et le prix de l'essence à la pompe ainsi que des taxes respectivement appliquées à ces deux produits. Toutefois, pour que cela se produise, il faut vraiment qu'il y ait assez d'investissements au chapitre de la capacité et une offre suffisante pour ce qui est de la charge d'alimentation. Les seuils de 5 et de 10 p. 100 sont vraiment des choix stratégiques faits par les deux gouvernements. Celui de 10 p. 100 est une mesure un peu plus réalisable aux États-Unis qu'au Canada.

Le sénateur Mahovlich : Toutefois, il s'agit d'une matière renouvelable. C'est encourageant pour l'avenir. Le maïs et toutes les autres ressources de cette nature sont renouvelables.

M. Coad : Oui, et vous abordez également quelque peu la question de la sécurité énergétique, qui est bien moins préoccupante pour le Canada que pour les États-Unis. Vu les récentes percées réalisées là-bas au chapitre du forage horizontal, de la fracturation et de la production de pétrole de schiste, on songe maintenant à doubler la production de pétrole dans un délai raisonnable. L'orientation stratégique pourrait changer aux États-Unis et continuer à changer ici. Cependant, nous abordons là des questions assez hypothétiques.

Le président : Avant de céder la parole au sénateur Robichaud, le sénateur Plett a quelque chose à ajouter.

Le sénateur Plett : Premièrement, j'aime les tomates, alors ne transformons pas les serres que nous utilisons pour cultiver ce fruit en installations destinées à la culture de canne à sucre.

Pour revenir sur la question du sénateur Mahovlich, j'aimerais préciser aux fins du compte rendu que, si nous devions subventionner le programme d'éthanol et utiliser plus de maïs pour en produire, cela nuirait à l'industrie agricole en raison de la hausse du prix du maïs qui en résulterait. Ai-je raison?

M. Coad : Cela dépend grandement du taux d'accroissement de la demande de maïs aux fins de la production d'éthanol. Par le passé, cet accroissement s'est produit à un rythme qu'on a pu gérer grâce à une amélioration du rendement. Le rendement de la culture de maïs au Canada est plus faible que celui aux États-Unis, et cela tient en partie au fait que nous utilisons moins d'engrais chimiques. Tant que la demande de maïs aux fins de la production de biocarburants augmentera à un rythme qui n'est pas considérablement plus élevé que celui de l'augmentation du rendement, son impact sur l'industrie agricole demeurera peut-être assez négligeable. Si on essayait de doubler l'utilisation de maïs à cette fin en 10 ans ou moins que cela, alors on pourrait s'attendre à ce que cela entraîne les conséquences que vous avez décrites.

Le sénateur Plett : Les rendements supérieurs aux États-Unis n'ont rien à voir avec le climat?

M. Coad : Assurément.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Monsieur Coad, dans votre présentation, qui était très intéressante, tout ce que vous nous avez dit était positif. Y a-t-il des côtés qui ne sont peut-être pas aussi positifs, que vous aimeriez voir? Je ne cherche pas de problèmes. Tant mieux si tout est beau et bon.

[Traduction]

M. Coad : Selon nos recherches, il y a deux ou trois aspects qui pourraient s'inscrire dans la catégorie que vous décrivez. Il existe une relation entre la demande de maïs ou de blé visant la production de biocarburants et les activités d'engraissement de bovins, ainsi que l'effet d'éviction dans ce dernier secteur. En raison de la demande de biocarburants, les besoins en soja sont moins élevés. Cette relation n'a pas fait l'objet d'études approfondies et n'est pas très bien comprise. Les travaux de recherche que nous avons consultés étaient surtout fondés sur des techniques de programmation linéaire, dont les résultats tendent à s'appliquer davantage à un monde parfait plutôt qu'à un monde imparfait, comme l'est probablement le nôtre. Il faudrait probablement mener plus d'études à ce sujet.

Nous avons déjà abordé la question la plus difficile, c'est-à-dire celle de l'équilibre entre l'offre d'éthanol, les infrastructures de production d'éthanol et toute contribution que pourrait apporter l'éthanol à notre secteur des transports en tant que carburant. Sans infrastructures, on ne pourra pas vraiment aller au-delà de 5 à 10 p. 100 d'éthanol dans notre essence, et la motivation à mettre en place de telles infrastructures est limitée.

Voilà la difficulté à surmonter, avec celle des technologies de troisième génération. Verront-elles le jour, et, si oui, à quel moment? Sinon, alors le seuil d'utilisation d'éthanol dans l'essence demeurera de 5 à 10 p. 100, et on continuera d'utiliser ce produit pour diluer l'essence plutôt que la remplacer. Les efforts déployés à ce chapitre au Canada sont relativement modestes.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous avez anticipé ma deuxième question. Pour la deuxième génération, vous dites qu'on n'est pas sûr de combien de temps on aura besoin ni de ce qu'il faudra pour développer ce qu'on devrait faire. Devrait- on, dans nos recommandations, prévoir des incitatifs qui fassent qu'on accélérera le processus?

[Traduction]

M. Coad : C'est la question la plus fondamentale ayant trait à l'éthanol de nos jours. Est-ce que la technologie fonctionne? La réponse est oui. Il existe un procédé thermochimique et un procédé de fermentation qui fonctionnent tous les deux, et il y a des usines canadiennes — une en cours de construction à Edmonton et une autre en exploitation ici, à Ottawa — qui en font la démonstration. C'est une question non pas de faisabilité technique, mais plutôt de faisabilité commerciale et de coût. C'est là un aspect crucial de la situation au Canada, et il en était ainsi avant que je le sache : nous sommes particulièrement doués pour innover, c'est-à-dire pour trouver une idée, la mettre à l'essai et prouver qu'elle fonctionne. Cependant, d'autres pays semblent bien meilleurs que nous pour transformer cette idée en produit commercial profitable. Voilà le défi à surmonter en ce qui touche l'éthanol.

Nous sommes des leaders mondiaux au chapitre des technologies de troisième génération. Réussirons-nous mieux à utiliser la technologie pour créer un produit que nous pourrons vendre au reste du monde? Il s'agit assurément d'un scénario attrayant.

Aujourd'hui, la table ronde nationale a publié son rapport final, et elle y aborde la question de l'innovation dans un monde sobre en carbone. Sur ce plan, nous avons la possibilité d'accomplir ce cycle d'innovation et de demeurer un chef de file en nous engageant dans une voie qui sera profitable et attrayante. Je ne saurais dire, toutefois, si nous avons la capacité de le faire.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Que pourrions-nous faire pour retenir ce rôle de leader dans le développement de cette deuxième génération?

[Traduction]

M. Coad : Le courage d'investir. Il s'agit d'un partenariat entre le secteur privé, les gouvernements de tous ordres et le milieu universitaire. Le partenariat mobilise déjà des entreprises étrangères qui ont l'expertise nécessaire pour mettre en œuvre diverses étapes du processus et dont nous avons besoin. Il faut simplement avoir le courage de le faire.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous avez nommé trois joueurs. Souvent, un dépend de l'autre, et quelqu'un doit, à un moment donné, prendre la balle et la faire rouler. Est-ce le rôle du gouvernement dans ce cas-ci?

[Traduction]

M. Coad : Je dirais, selon nos recherches, que le gouvernement doit faire preuve de bonne volonté et jouer un rôle actif.

Le sénateur Plett : Voilà une réponse digne d'un politicien.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je savais que mon collègue, le sénateur Robichaud, reviendrait sur la question à savoir si c'est au gouvernement d'assumer le leadership dans ce domaine.

Monsieur Coad, il y a une question que j'aimerais vous poser, mais sentez-vous bien à l'aise pour y répondre.

Au Canada, et au Québec en particulier, il y a un lobby anti-ethanol. On nous fait croire qu'on prend des terres avec lesquels on pourrait nourrir des centaines, voire des millions de personnes si on produisait des grains qu'on pourrait envoyer en Amérique du Sud; on pourrait en envoyer dans tous les pays émergents, en Afrique, et cetera.

Honnêtement, est-ce que le fait qu'on produise de l'éthanol chez nous, sur nos terres, pour diminuer les émanations à CO2 , prive quelqu'un de manger?

[Traduction]

M. Coad : Les données probantes relatives à l'Amérique du Nord que nous avons consultées sont très claires. Nous n'accaparons pas des terres qui seraient destinées à d'autres usages, et nous ne réduisons pas la quantité de grains disponibles sur les marchés alimentaires au Canada. Toutefois, l'argument formulé est plus subtil. On laisse entendre que le prix élevé du grain et du maïs en Amérique du Nord exerce une pression à la hausse sur les prix mondiaux et encourage les gens à détruire des forêts dans diverses régions du monde afin de cultiver du maïs ou de la canne à sucre et de produire de l'éthanol. Cette hypothèse est peu plausible. Certaines études menées par des universités américaines crédibles l'appuient, d'autres la rejettent.

Ce que j'ai observé et ce sur quoi je me suis fondé pour produire ce rapport, c'est que certaines études antérieures à 2005 prévoyaient des augmentations de prix et des changements touchant l'utilisation des terres sur le marché américain pour la période s'étendant de 2005 à 2015. La période visée par nos travaux n'allait pas au-delà de 2009, et nous n'avons pas trouvé de données probantes indiquant que de tels changements avaient bel et bien lieu. Ces études s'appuyaient sur des méthodes de modélisation. Nous avons aussi examiné des études dont les prévisions allaient au- delà du secteur agricole et englobaient le secteur forestier, et l'impact projeté sur l'utilisation des sols était bien moindre.

Tout compte fait, nous avons conclu qu'il était difficile d'étayer les arguments relatifs à l'incidence indirecte sur l'utilisation des sols, compte tenu de notre compréhension actuelle de la dynamique mondiale touchant les cultures.

Le sénateur Peterson : Est-ce que l'exploitation et l'utilisation de gaz naturels dans les véhicules ont une incidence négative sur l'industrie de l'éthanol?

M. Coad : Les deux industries coexistent depuis plusieurs dizaines d'années. Les technologies utilisées sont très différentes. Comme le gaz naturel est un gaz, son exploitation exige des capacités particulières, et il est soumis à de très hautes pressions. Les technologies requises sont plus difficiles à mettre en place. La densité d'énergie du gaz naturel est très faible. Sa commercialisation s'est avérée très laborieuse. Je suppose que la meilleure réponse que je pourrais vous donner, c'est que ces deux produits pourraient facilement coexister s'ils demeuraient des carburants à créneau.

Nous n'avons pas examiné directement cette question. Je pense que les deux produits ont leur place sur le marché, compte tenu des résultats antérieurs.

Le sénateur Peterson : Je pense que l'industrie du gaz naturel se concentre actuellement sur le secteur du camionnage.

M. Coad : C'est vrai, pour ce qui est du gaz naturel liquéfié. Robert Transport et Westport Innovations disposent des technologies nécessaires. Il semble bien que ce marché va prendre de l'expansion. Nous avons également publié récemment un rapport à ce sujet.

Le président : Monsieur Coad, merci, de nous faire part de vos réflexions et de votre vision. Aux fins du compte rendu, je précise que le Conference Board du Canada a publié un rapport approfondi à ce sujet. Nous vous remercions de cette mine d'informations, monsieur.

Des sénateurs ont demandé que nous reconnaissions le travail d'un de nos collègues parlementaire, le sénateur Peterson, avant de lever la séance. Pour que cela figure au compte rendu du comité, nous allons rendre public cet hommage.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le président. Je l'ai fait hier durant au moins une partie de mon intervention en chambre, mais je tiens à le refaire ici pour que ce soit indiqué dans le compte rendu.

Ce fut pour moi un plaisir de travailler avec le sénateur Peterson à deux projets de loi déposés au Sénat. Comme je l'ai dit hier, j'aurais adoré que le sénateur Peterson siège à temps plein au comité. J'ai toujours cru qu'il manquait quelque chose au groupe de l'opposition en raison de l'absence du sénateur. Je ne dis pas que le parti est mal représenté, mais vous y auriez certainement ajouté quelque chose, monsieur le sénateur.

J'ai été ravi de travailler avec vous en Chambre pendant un peu plus de trois ans, c'est-à-dire depuis ma nomination. Je souhaite simplement souligner qu'à mon avis, vous êtes le genre de parlementaire et de personne dont le Sénat a besoin. Vous travaillez de façon non partisane. Vous êtes passionné par votre travail. Je vous souhaite bonne chance dans vos projets futurs, quels qu'ils soient, et je sais que vous n'allez pas prendre votre retraite. Vous quittez le Sénat, mais je suis convaincu que vous demeurerez actif. Je vous souhaite de la santé et du bonheur dans tout ce que vous entreprendrez.

Merci beaucoup du temps que vous avez consacré au comité dans le cadre de l'étude de deux ou trois projets de loi.

[Français]

Le sénateur Rivard : Premièrement, monsieur le président, je voudrais vous remercier de nous permettre de faire ce que nous faisons et d'avoir gardé la traduction. Ma langue maternelle étant le français, même si je me débrouille de mieux en mieux en anglais, il est tout de même préférable que nous puissions choisir nos mots pour dire que ce nous ressentons, et que quelqu'un les traduise.

Sénateur Peterson, cela fait trois ans et demi que je suis au Sénat et que j'ai la chance d'être en face de vous au Sénat, et j'ai toujours été impressionné par la qualité de vos questions, votre connaissance des dossiers, et, surtout, le respect que vous montrez pour les réponses qu'on vous donne. Comme parlementaire, vous le savez — ce n'est pas votre première expérience en politique, que ce soit dans les assemblées législatives des provinces ou au Sénat —, lorsqu'on pause des questions, dans l'opposition, on n'a peut-être pas les réponses qu'on espère; j'ai toujours été impressionné de la façon que vous acceptiez les réponses.

J'ai eu le plaisir de vous connaître également sous un autre angle. Nous avons fait une seule mission ensemble, c'était pour l'OSCE à Vienne, il y a plus de deux ans, et j'ai appris à connaître le côté humain de votre personnalité. Je vous reconnais comme un homme très cultivé et très affable.

Vous savez, durant l'année, il y a beaucoup de journées thématiques; je vois le sénateur Robichaud qui porte un macaron en l'honneur de la lutte contre la pauvreté, certaines journées sont consacrées à la lutte contre le cancer; il y a toujours des thèmes chaque semaine ou tous les 15 jours, pour lesquels on doit porter un symbole. Moi, aujourd'hui, j'ai décidé, pour vous rendre hommage, de porter une cravate de la couleur de votre parti. Croyez-moi, ce n'est pas un hasard, je savais que vous seriez ici aujourd'hui, et comme votre dernière journée, j'ai décidé d'en profiter pour le faire.

Demain sera la première journée de votre nouvelle vie. Si vous décidez de prendre votre retraite, je sais qu'elle sera confortable, remplie de bonheur, et je vous la souhaite aussi longue que vous l'espérez avec ceux que vous aimez.

Bonne continuation avec les gens que vous aimez. Vous allez nous manquer.

[Traduction]

Le président : Avant de lever la séance, j'aimerais savoir si le sénateur Peterson souhaite dire un mot.

Le sénateur Peterson : Oui. Merci beaucoup.

À mon arrivée au Sénat, j'ai siégé au Comité de l'agriculture et à celui des peuples autochtones, et j'ai beaucoup apprécié mon expérience. Puis, on m'a demandé de faire partie du Comité de l'énergie, ce qui entraînait malheureusement un conflit d'horaires, comme les séances avaient lieu au même moment que celles du Comité de l'agriculture. La décision a été difficile à prendre. Mes collègues du Comité de l'agriculture m'ont dit : « Vous devez rester ici. » Les membres du Comité de l'énergie m'ont dit : « Allez leur dire que vous siégerez à notre comité. » Quoi qu'il en soit, j'ai fini par me retrouver là-bas.

Je m'y suis plu, mais je me réjouis d'avoir pu revenir pour examiner les plus récentes questions au programme. L'expérience s'est révélée intéressante et stimulante, et, évidemment, ces questions sont très importantes pour la région que je représente. J'ai certes apprécié mon temps au comité. Il y a eu des débats francs et solides et de bonnes discussions. Parfois on gagne, parfois on perd, mais la vie est ainsi faite.

De façon générale, j'ai aimé mon expérience, et je vous remercie beaucoup. Vos paroles élogieuses me flattent énormément. Merci mille fois. Je suis sur le point de prendre ma retraite : il ne me reste plus que quelques heures. J'essayais désespérément de me résoudre à le faire. Les gens n'arrêtaient pas de me dire : « Quand va-t-il partir à la retraite? », ou « Comment se fait-il qu'il est encore ici? »

Le président : Merci, sénateur Peterson.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Monsieur le président, vous savez que je ne fais jamais d'éloge ou d'hommage dans la Chambre du Sénat, mais je crois qu'ici, en comité, je vais faire exception tout simplement pour reconnaître le rôle que le sénateur Peterson a joué à ce comité.

En ce qui me concerne, le sénateur Peterson a certainement allégé ma tâche lorsqu'il s'est occupé des projets de loi qui ont été étudiés devant ce comité, et il l'a fait avec un doigté exceptionnel. En travaillant de concert avec les sénateurs du gouvernement, il présentait des amendements en acceptant toujours la décision du comité. Je le remercie sincèrement.

Et, honorables sénateurs, je suis en train de vérifier son acte de naissance, afin de m'assurer qu'il n'y a pas eu erreur et qu'il ne pourrait pas rester un peu plus longtemps.

Le sénateur Maltais : Bonne idée.

Le sénateur Robichaud : Et finalement, pour faire suite au commentaire du sénateur Rivard, peut-être qu'il pourrait prêter sa cravate rouge au sénateur Plett en reconnaissance de la contribution que le sénateur Peterson a faite au comité. Je vous remercie.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs les sénateurs, je voulais m'assurer que cet hommage figure dans le compte rendu pour les Canadiens qui ont regardé et suivi les travaux du comité, surtout en ce qui concerne l'agriculture.

J'aimerais conclure la séance en disant que personne ne peut affirmer que vous n'étiez pas dévoué à votre travail, monsieur le sénateur. Personne ne peut affirmer que vous n'avez pas participé aux débats. Personne ne peut affirmer que vous n'avez pas servi la population canadienne. Moi qui vous ai vu à l'œuvre et qui ai constaté les résultats de votre travail, j'ai toujours été d'avis que vous vous démarquiez par votre grand respect du processus démocratique, et c'est ce qui nous caractérise en tant que Canadiens.

Que Dieu vous bénisse, vous et votre famille. Je vous souhaite de nombreuses années de bonheur.

Quant à vous, monsieur Coad, vous avez été témoin de notre camaraderie et avez pu constater que, en tant que sénateurs, nous avons le même objectif, c'est-à-dire d'améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens.

Mesdames et messieurs les sénateurs, la séance est levée.

(La séance est levée.)


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