Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 25 -Témoignages du 1er novembre 2012
OTTAWA, le jeudi 1er novembre 2012
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 4, pour examiner, la teneur des éléments de la section 19 de la partie 4 du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012, et mettant en œuvre d'autres mesures.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables collègues, je vous remercie d'assister à la séance de ce matin. Je tiens à profiter de l'occasion pour souhaiter la bienvenue au ministre, l'honorable Jerry Ritz. Avant d'inviter M. Ritz à lire sa déclaration, je voudrais demander à mes collègues de se présenter. Par la suite, je présenterai officiellement nos invités.
Le sénateur Mercer : Je m'appelle Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Marchant : Je m'appelle Pana Merchant, de la Saskatchewan.
Le sénateur Callbeck : Je m'appelle Catherine Callbeck, de l'Île-du-Prince-Édouard.
Le sénateur Mahovlich : Je m'appelle Frank Mahovlich, de l'Ontario.
Le sénateur Plett : Je m'appelle Don Plett, du Manitoba.
Le sénateur Buth : Je m'appelle JoAnne Buth, du Manitoba.
Le sénateur Eaton : Je m'appelle Nicole Eaton. Bienvenue à tous. Ça fait plaisir de vous voir.
[Français]
Le sénateur Maltais : Sénateur Ghislain Maltais, du Québec.
Le sénateur Rivard : Sénateur Michel Rivard, du Québec.
Le président : Aujourd'hui, notre comité va commencer son étude sur la teneur de la de la Section 19 de la partie IV du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement, le 29 mars 2012, et mettant en œuvre d'autres mesures.
[Traduction]
Honorables collègues, le ministre Ritz sera le premier à témoigner. Je vous remercie infiniment d'avoir accepté d'étudier avec nous l'objectif des modifications apportées à la Loi sur les grains du Canada. Cet objectif consiste à rationaliser et à mettre à jour les activités de la Commission canadienne des grains en réduisant les coûts de cette dernière et en répondant mieux aux besoins du secteur des grains. Le gouvernement tient à améliorer la Loi sur les grains du Canada.
J'aimerais vous présenter notre premier invité, l'honorable Gerry Ritz, C.P., député, ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et ministre responsable de la Commission canadienne du blé. Nous accueillons également Elwin Hermanson, commissaire en chef de la Commission canadienne des grains.
Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Monsieur le ministre, auriez-vous l'amabilité de lire votre déclaration. Par la suite, les sénateurs vous poseront des questions. Le tout devait prendre 45 minutes.
L'honorable Gerry Ritz, C.P., député et ministre d'Agriculture et Agroalimentaire Canada : Bonjour à tous. Je vous remercie de votre invitation. Je tiens tout d'abord à signaler le magnifique travail que votre comité a accompli à l'égard du projet de loi S-11. Nous avons accueilli favorablement les modifications proposées. Comme vous le savez, elles étaient très opportunes étant donné qu'elles avaient été présentées le printemps dernier. Vous avez très bien tiré votre épingle du jeu en examinant rapidement la question.
Je souhaiterais ajouter qu'on a proposé notamment d'autoriser le vérificateur général à effectuer les examens qu'il juge nécessaires. Je peux vous assurer qu'il est déjà en mesure de le faire en ce qui concerne n'importe quel ministère ou organisme fédéral.
Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui à vous entretenir de cet important texte législatif qui renforcera une industrie canadienne de classe mondiale, celle des grains.
Comme vous le savez, nos clients de partout dans le monde reconnaissent le blé, le canola, les légumineuses, l'orge et d'autres grains canadiens pour leur uniformité et leur qualité sans pareilles. Ces produits favorisent la création d'emplois et la croissance de notre économie. Chaque année, les agriculteurs canadiens gagnent environ 16 milliards de dollars grâce à la production de grains. Dans l'ensemble, les grains constituent la principale exportation agricole du Canada, avec des ventes annuelles de 7 milliards de dollars.
Nos agriculteurs sont concurrentiels sur les marchés du XXIe siècle. Ils ont besoin d'un système de grains du XXIe siècle qui leur permettra de continuer de stimuler l'économie canadienne et de nourrir une population croissante ici et dans les autres pays.
La Commission canadienne des grains a 100 ans. Au cours des 40 dernières années, la Loi sur les grains du Canada n'a pas fait l'objet de modifications importantes.
Mesdames et messieurs les sénateurs, tout comme le secteur canadien du grain change, les outils législatifs nécessaires pour garder l'industrie concurrentielle doivent évoluer de concert. C'est pourquoi notre gouvernement a collaboré avec l'industrie pour faire croître ses exportations en élargissant les accords de libre-échange ainsi que pour s'assurer qu'elle demeure concurrentielle au moyen d'investissements dans l'innovation et qu'elle profite de nouveaux débouchés commerciaux grâce à la libre-commercialisation du blé et de l'orge. Déjà, la libre-commercialisation crée comme jamais auparavant de nouveaux débouchés pour nos producteurs de blé et d'orge de l'Ouest.
Grâce à notre gouvernement, les producteurs de grains profitent désormais de la transparence au point de vente. Dans le nouveau contexte de la libre-commercialisation, les agriculteurs ne sont plus responsables de leurs grains une fois livrés. Ils sont alors payés et repartent aussitôt. Ils ne sont plus astreints à des droits de surestaries et ne sont plus tenus de composer avec les changements de grains et les modalités d'entreposage. Les avantages de la libre-commercialisation ne seront qu'amplifiés par ces modifications opportunes à la Loi sur les grains du Canada.
Dans le contexte de cette nouvelle réalité, ces modifications aideront le secteur à continuer d'évoluer afin de parvenir à une compétitivité accrue. Après tout, la Loi sur les grains du Canada n'a pas été modifiée de façon importante depuis plus de 40 ans, comme je l'ai déjà dit. Ces modifications opportunes aideront les agriculteurs à mieux relever les défis de leur secteur, qui devient plus concurrentiel et davantage axé sur le marché du XXIe siècle. Il s'agira notamment de maintenir une étroite surveillance réglementaire là où c'est nécessaire.
Ces modifications contribueront à rendre le secteur des grains concurrentiel et novateur en réduisant les coûts, en améliorant la réglementation et en fournissant des choix à nos producteurs ainsi qu'aux autres intervenants dans le secteur des grains. En particulier, les modifications budgétaires proposées par notre gouvernement à la Loi sur les grains du Canada permettront d'alléger le fardeau de la réglementation et les coûts pour l'industrie et le gouvernement, d'améliorer le programme de protection des paiements aux producteurs de la Commission canadienne des grains, et d'éliminer les services obligatoires non nécessaires.
En bref, les modifications que nous proposons allégeront le fardeau réglementaire et réduiront les coûts de quelque 20 millions de dollars, des coûts que devraient sinon assumer les agriculteurs canadiens.
L'élimination du double emploi et de la redondance constitue également une bonne nouvelle pour les contribuables canadiens. Une Commission canadienne des grains plus viable comptera moins sur l'aide des contribuables, et elle donnera de meilleurs résultats pour le secteur. Les changements que nous proposons aideront la commission à continuer de bâtir l'image de marque de grande qualité qui a permis d'établir la réputation mondiale des produits canadiens.
Le texte législatif que nous proposons est orienté par les multiples observations de l'industrie qui nous ont été présentées dans le cadre de nombreuses consultations tenues dans les dernières années. Les représentants du secteur nous ont demandé d'éliminer les services inutiles qui ne sont pas nécessaires pour assurer la qualité des grains, et qui ne font qu'imposer des coûts. Nous avons tenu promesse avec le texte législatif que nous proposons. L'industrie a aussi demandé que les expéditeurs conservent le droit de demander l'inspection optionnelle par une tierce partie aux terminaux. Nous avons là aussi tenu promesse. Elle nous a en outre demandé de conserver et d'améliorer la protection des paiements pour les producteurs. Encore là, promesse tenue. En fait, nous sommes même allés plus loin en ouvrant la voie à un modèle de remplacement fondé sur l'assurance, qui éliminerait du système des coûts qui sont payés au bout du compte par les producteurs.
J'ajouterais que l'industrie a très bien accueilli les changements que nous proposons. Doug Robertson, président de la Western Barley Growers Association a dit ceci :
Comme les agriculteurs contrôlent désormais leur commercialisation, ils ne veulent pas payer pour un service dont ils ne veulent ou dont ils n'ont pas besoin, et les frais de pesée et d'inspection à l'arrivage en constituent un bon exemple.
À cet égard, je voudrais apporter une précision sans équivoque : les modifications que nous proposons aux inspections à l'arrivage ne seront pas préjudiciables à la salubrité des aliments, comme d'aucuns l'ont prétendu. Il est important que la population canadienne et le comité sachent que les inspections à l'arrivage ne visent pas et n'ont jamais visé à s'assurer de la salubrité de nos aliments. Ces inspections ne constituent qu'un fardeau réglementaire, dont le coût est assumé au bout du compte par les producteurs de grains canadiens. Les agriculteurs nous ont demandé d'éliminer ce fardeau, ce qui est l'objectif des modifications que nous examinons aujourd'hui.
La Western Canadian Wheat Growers et les Producteurs de grains du Canada ont aussi approuvé les changements proposés par notre gouvernement, reconnaissant l'avantage de la réduction du fardeau de la réglementation et de la paperasserie pour notre secteur des grains. Naturellement, la sûreté et la qualité qui ont contribué à l'excellente réputation des grains du Canada seront maintenues. La CCG continuera d'établir et de maintenir des normes de qualité pour les grains canadiens, de recueillir des échantillons de grains auprès de silos terminaux agréés pour surveiller et tester la sûreté des grains, et de disposer des pouvoirs nécessaires afin d'adopter les correctifs qui s'imposent.
Encore une fois, l'industrie a confiance dans la sûreté de notre système.
Rick White, directeur général de la Canadian Canola Growers Association, a déclaré ceci :
Nous sommes confiants de voir ces mesures maintenir l'intégrité de notre système de classement. Aucune de ces modifications ne touche la qualité des grains. Notre système de classement demeure en place. Il est solide, et il le restera.
Pour conclure, ces changements apportés à la Loi sur les grains du Canada et à la Commission canadienne des grains font écho à la réalité du contexte novateur qui existe actuellement en affaires.
Outre ces modifications budgétaires, nous maintenons notre engagement à instaurer d'autres changements réclamés par l'industrie. Ces changements permettent aussi de maintenir l'intégrité du système d'assurance de la sûreté et de la qualité des grains canadiens ainsi que la fiabilité de la marque canadienne.
Notre gouvernement a établi une solide assise pour le secteur de l'agriculture partout au Canada. Nous avons accordé la priorité aux agriculteurs canadiens, et nous continuons de le faire. Ce texte législatif que nous proposons n'en est qu'un autre exemple.
Une CCG plus solide sera mieux placée pour veiller à ce que le secteur des grains au Canada puisse continuer à profiter de la qualité, de la sûreté, de la recherche et de l'accès aux marchés, qui ont toujours constitué le fondement de la qualité des grains de marque canadienne.
Je sais que vous accorderez à ce texte législatif la surveillance attentive habituelle. Je vous invite instamment à voter en faveur du projet de loi, ce qui profitera à l'industrie des grains du Canada et à notre économie.
Je vous remercie et j'attends avec impatience vos questions.
Le sénateur Plett : Monsieur le ministre, merci de votre présence parmi nous. Nous vous sommes certes reconnaissants de tout ce que vous avez fait pour le compte du secteur agricole depuis votre nomination.
Je voudrais aborder les mesures que nous avons prises il y a quelque temps à propos de la Commission canadienne du blé et souligner les améliorations que vous avez apportées au système, ce dont nous vous sommes reconnaissants. J'ai été ravi d'avoir pu parrainer ce projet de loi au Sénat. Monsieur le ministre, c'était là une promesse que nous avions faite lors de la campagne électorale. Comme un de mes collègues d'en face l'a dit alors : « Je n'adhère peut-être pas à ce que vous proposez ni à ce que vous cherchez à accomplir, mais je conviens certes que vous vous êtes engagés à prendre des mesures et que vous avez tenu parole, ce qui s'imposait. »
Monsieur le ministre, s'agit-il là d'une promesse que nous avions faite dans le budget du printemps et que nous mettons en œuvre? Pourriez-vous répondre à cette question et me dire comment le tout a débuté?
M. Ritz : Ce que nous proposons dans ce deuxième projet de loi d'exécution du budget ne devrait prendre personne par surprise. Nous l'avions déjà annoncé dans le budget que nous avons déposé en mars dernier. Il ne devrait donc y avoir aucune surprise. Il s'agit tout simplement d'un projet de loi d'exécution du budget. Le budget donne les grandes lignes des mesures que nous envisageons, et les projets de loi d'exécution du budget — nous en avons présenté un au printemps et il y en a toujours un en automne — précisent les modalités de tout cela. Il ne devrait donc y avoir aucune surprise.
Nous avons pu ainsi tenir notre promesse de restructurer le secteur des grains en commençant par éliminer le guichet unique. Je vous remercie d'avoir parrainé le projet de loi au Sénat, monsieur le sénateur.
Lorsque nous avions ce guichet unique qui datait, les agriculteurs étaient propriétaires de leurs grains jusqu'au port, même s'ils ne le souhaitaient pas. Ils déchargeaient leurs grains dans un silo et recevaient le prix initial déterminé avant de retourner chez eux. Cependant, ils étaient toujours susceptibles notamment d'assumer les frais de surestaries et d'entreposage ainsi que les conséquences d'une modification de grade du grain. Dorénavant, l'agriculteur n'assume aucune responsabilité lorsqu'il a déchargé ses grains aux silos terminaux, qui sont surtout situés dans l'ouest du Canada, vous recevez votre montant, et la décision a été prise quant au grade et au taux d'impureté du grain. L'agriculteur retourne chez lui; il n'est plus responsable. Il n'y a plus de frais de surestaries.
C'est l'ensemble du système qui commence alors à être davantage efficace. Nous nous penchons sur les accords commerciaux entre les expéditeurs, les compagnies de chemin de fer et les installations de triage. Cela se traduit naturellement par des gains de rendement et de l'innovation, ce qui n'était pas possible lorsque tout était dissimulé dans les comptes de mise en commun de la Commission canadienne du blé.
Le sénateur Plett : J'ai bien compris la plupart des dispositions de la mesure législative. Cependant, je m'interroge sur la question de l'assurance. Je voudrais que vous nous parliez des cautions et de la protection. À l'issue des séances de négociation tenues au Yukon avec nos homologues provinciaux et territoriaux, vous auriez dit notamment que les agriculteurs devaient jouer un rôle plus proactif dans la gestion des risques. Plus précisément, vous avez préconisé que les agriculteurs s'en remettent aux diverses formes d'assurance. Les céréaliculteurs peuvent déjà contracter une assurance-récolte pour se prémunir contre les pertes en raison de mauvaises conditions météorologiques, notamment. Pourriez-vous nous expliquer l'engagement pris par le gouvernement afin de fournir aux agriculteurs les outils de gestion des risques par le volet assurance et comment cela montre encore une fois comment notre gouvernement tient ses promesses?
M. Ritz : Il y a deux situations distinctes. Dans le cadre de Cultivons l'avenir 2, nous nous engageons à ce que les éleveurs et les céréaliculteurs aient davantage accès à des outils de protection qui leur assurent des paiements en temps opportun dans le cadre de programmes plus prévisibles et plus tangibles que les programmes fondés sur la demande comme Agri-stabilité et Agri-relance. C'est là un aspect de la question.
Nous avons vu ce qui s'est fait en Alberta. L'Ontario envisage maintenant de mettre en œuvre un projet pilote en ce sens dans le domaine de l'élevage.
Dans le projet de loi, nous proposons un programme d'assurance pour toutes les installations relevant de la commission des grains et assujetties à la Loi sur les grains du Canada. Actuellement, la commission dispose d'un système de cautionnement lui permettant de déterminer le volume et la valeur des produits dans une année donnée. Une caution est versée pour permettre éventuellement de payer les créanciers, et ce sont, dans la plupart des cas, des agriculteurs.
Nous envisageons la mise en œuvre d'un programme de protection des paiements plutôt que le régime de cautionnement. L'argent comptant fait foi de tout en affaires. Par conséquent, il est illogique de se priver d'argent comptant en devant verser des cautions. Un programme de protection des paiements peut s'adapter aux circonstances, ce qui n'est pas le cas avec un régime de cautionnement, avec lequel on peut atteindre le maximum pendant un mois avant de tout recommencer.
Encore une fois, on peut mieux faire que refiler par le système les coûts en question à l'agriculteur. Nous pouvons proposer un modèle plus efficace, qui ménage l'agriculteur.
Aux États-Unis, c'est une vraie mosaïque, en fonction des États, mais la majorité des régions productrices de grain sont en train d'adopter un outil fondé sur l'assurance. L'Australie l'a fait aussi, il y a quelque temps. C'est un système beaucoup plus efficace, plus facile à gérer, sur lequel les agriculteurs peuvent compter en cas de pépin dans un établissement agréé.
Le sénateur Plett : Pour notre gouvernement, c'est une autre façon, simplement, de prendre bien soin des agriculteurs.
M. Ritz : Depuis la dernière révision en profondeur, il y a 40 ans, le secteur a radicalement changé. Nous sommes à l'ère de la culture continue, des semoirs pneumatiques, des empreintes écologiques moins étendues, mais notre loi sur les grains ne s'est pas adaptée. Grâce aux modifications importantes apportées à la Commission canadienne du blé, bien sûr, nous sommes dorénavant en mesure d'avancer, parce que les agriculteurs ne sont plus otages ni victimes de cette situation.
Le sénateur Mercer : Le problème ne semble pas compliqué, mais il fait entrevoir des changements préoccupants. Chaque diminution du nombre d'inspections de produits alimentaires devient un enjeu. Je suis d'accord avec vous : ce n'est pas une question de salubrité des aliments.
Vous et le sénateur Plett, vous vous applaudissez de la mort de la Commission canadienne du blé.
M. Ritz : La Commission existe toujours.
Le sénateur Mercer : Le guichet unique, alors; vous avez parlé des changements possibles de grade entre la livraison du grain par l'agriculteur au puits de réception et son arrivée au port d'expédition.
Je crois que la deuxième inspection n'aura pas lieu après l'adoption du projet de loi, ou bien, si elle a lieu, ce sera aux frais des agriculteurs et non de la commission des grains.
M. Ritz : En fait, il y a trois inspections. Quand le grain est déversé dans le puits de réception du silo-élévateur, il y en a une, à laquelle les agriculteurs tiennent puisqu'elle détermine le prix qu'ils obtiendront. Cette inspection peut être anticipée et elle peut recourir aux services de la commission des grains ou bien elle peut avoir lieu au silo-élévateur, dont les préposés prélèvent des échantillons de chaque chargement de camion, à mesure qu'il arrive. En cas de contestation, la commission des grains peut agir à titre d'arbitre.
Il y a ensuite le classement à l'arrivage, quand les silos mélangent les grains de grade 2 et 3 de façon à grossir la quantité de blé de grade 2. Chaque grade comporte une qualité supérieure et une qualité inférieure. L'exploitant du silo demandait une présence permanente des inspecteurs de la commission des grains, pour s'assurer de la qualité suffisante du produit. Bien sûr, les coûts se répercutent sur le prix à la ferme, parce qu'ils diminuent le prix payé pour le grain.
La troisième et dernière inspection a lieu à la sortie, au chargement du bateau, pour s'assurer que l'importateur étranger obtient exactement ce qu'il a demandé. Voilà pour les trois inspections.
Nous parlons actuellement de la deuxième, qui n'est utile qu'à l'industrie, et non à l'agriculteur ou à l'importateur. Le service sera maintenu, mais contre remboursement des frais, soit avec le concours d'une agence adjudicataire d'inspection privée, autorisée par la Commission canadienne des grains, soit par la commission elle-même.
Le sénateur Mercer : En Ontario, le recouvrement des coûts est un programme. Je pense que les agriculteurs en paient le tiers. Le recouvrement intégral et le maintien de l'inspection feront tripler leur facture. Ils entameront sa marge, directement. L'agriculteur, comme tout autre producteur, pourrait majorer d'autant les coûts du produit, ce qui, en fin de compte, se répercute à l'autre bout, sur le consommateur.
Nous avons donc ajouté un autre coût au système mais pas aux maillons que nous voulons tous stimuler, c'est-à-dire la production agricole et les exportations. Il me semble que nous avons un peu amorti le système.
M. Ritz : En plus de 20 ans, on n'a pas modifié la méthode de détermination du coût pour le travail effectué par la commission des grains pour assurer la qualité et sa constance. On a décrété un moratoire sur la majoration des frais. Depuis deux ans, presque trois dans la plupart des cas, notre secteur des grains prospère. Il est temps de commencer à apporter ces changements.
Actuellement, le contribuable supporte ces coûts. Quelqu'un doit payer. Le maintien du classement initial profite à l'agriculteur. D'après nous, il peut maintenant en supporter une partie des coûts, grâce à l'appréciation de sa production.
Le sénateur Mercer : Quelqu'un doit payer pour le recouvrement intégral, et cela touchera les profits de l'agriculteur, à moins qu'il ne refile le coût au consommateur final.
M. Ritz : D'après les chiffres que j'ai vus, cela représente moins de 1 p. 100 de la valeur globale des exportations.
Le sénateur Mercer : Il y a des années où ce 1 p. 100 a une importance critique. Actuellement, la situation est belle, mais vous connaissez la vie...
M. Ritz : Dans ce cas-là, je reviendrai.
Le sénateur Mercer : ... assez pour savoir que certaines années n'en donnent pas plus.
M. Ritz : L'activité est rentable ou elle ne l'est pas. Je ne suis pas sûr que ce 1 p. 100 compte vraiment.
Il est sûr que chacun cherche à augmenter ses profits par toutes les occasions qui se présentent. Un autre changement bienvenu, maintenant que le guichet unique obligatoire n'existe plus, serait la valorisation sur place de la production nationale, ce qui, bien sûr, est un système tout à fait à part. Les agriculteurs peuvent se concerter et commencer à construire des usines de transformation du blé dur, des usines de pâtes alimentaires. Il est question d'une de ces usines à Regina. J'espère que le projet démarrera le printemps prochain. Nous pourrons peut-être assister à la diversification des produits de la farine ou du malt. Cela modifiera tout le coût du classement, aussi, quand les agriculteurs commenceront eux-mêmes à valoriser leurs produits.
Le sénateur Mercer : La suppression d'une inspection a manifestement des répercussions sur certaines gens, et nous sommes toujours sensibles aux effets, positifs ou négatifs, de nos décisions sur les Canadiens. Cela fera perdre combien d'emplois?
M. Ritz : Je n'ai pas les chiffres sous les yeux. Vous pourrez demander à M. Hermanson. Il est peut-être mieux au courant. Je sais que nous déplaçons constamment les agents, d'un endroit à l'autre, en fonction de la demande. À ma connaissance, ce chiffre change constamment.
À la suite des modifications, des agents pourront être réembauchés par le secteur privé qui héritera d'une partie du travail. J'ignore quel est le chiffre net.
Le sénateur Mercer : Ce changement constant n'impressionnera pas les Canadiens qui perdront leur emploi à cause de cette loi. Cela ne donne rien de plus aux chômeurs.
M. Ritz : Vous devez vous rendre compte que des obligations contractuelles entre l'administration et les syndicats font que, tant que ces gens n'auront pas été avisés et qu'on ne leur aura pas donné la possibilité d'être réembauchés dans la fonction publique, quelque part, je n'ai pas le droit de vous révéler ces chiffres.
Le sénateur Mercer : Vous nous demandez de donner le feu vert à ce projet de loi sans que nous en connaissions les effets éventuels.
M. Ritz : Bien sûr, je ne peux pas reprendre la vieille rengaine : « Ayez confiance, je représente le gouvernement, mon rôle est d'aider. » Mais les conventions collectives entraînent des obligations, les intéressés doivent être informés de leur sort. Les lettres à cette fin seront expédiées si le projet de loi est adopté — quand il sera adopté — et nous ferons les ajustements en conséquence. Je n'ai pas le droit de vous révéler ce qui relève des conventions entre l'administration et la fonction publique.
Le sénateur Buth : Merci beaucoup d'être ici ce matin. Revenons aux marchés d'exportation. Tout d'abord, pour éclairer la situation et prendre un peu de recul. Le projet de loi ne touche que les agriculteurs de l'Ouest. Ces modifications, essentiellement, touchent l'Ouest canadien.
M. Ritz : L'immense majorité d'entre elles. Il y aura des modifications à l'agrément des établissements, et cetera, qui toucheront quelques entreprises de l'Ontario.
En ce qui concerne les changements de grade, l'inspection à l'arrivage était surtout commandée par les propriétaires du grain, sous le régime du guichet unique. Les agriculteurs continuaient d'en être les propriétaires jusqu'au port d'expédition et ils faisaient face à tous les risques en conséquence. La majorité des modifications touche effectivement cette partie du système.
Le sénateur Buth : Je tenais à ce qu'on me confirme qu'elles ne toucheront absolument pas les marchés d'exportation.
M. Ritz : Non.
Le sénateur Buth : Il s'agit de 85 à 90 p. 100 des grains et oléagineux exportés de l'Ouest canadien.
M. Ritz : Pas du tout. Beaucoup d'inexactitudes circulent au sujet des changements au guichet unique, selon lesquelles se serait comme en Australie. Dans ce pays, on a perdu la capacité de classer les produits, la capacité scientifique. L'Institut international du Canada pour le grain, dont nous sommes si fiers, la Commission canadienne des grains et la Western Grains Research Foundation, tout cela partirait en lambeaux en raison des modifications apportées au guichet unique. Rien de cela n'est vrai. Dans le modèle australien, toutes les fonctions relevaient d'une seule entité. Au Canada, ça n'a jamais été le cas.
La Commission canadienne du blé avait la réputation de diriger un paquet de choses alors que, en réalité, ce n'était pas le cas. Elle s'est approprié cette réputation et elle s'est attribué le mérite de réalisations qui ne relevaient pas de son mandat.
Le sénateur Buth : En ce qui concerne la protection des producteurs, que pouvez-vous dire? Qu'arrive-t-il s'ils ne sont pas d'accord avec le classement du produit qu'ils livrent aux silos-élévateurs? Est-ce que le projet de loi aura un effet sur cela?
M. Ritz : En général, dans le bon vieux temps, dans mon exploitation, et c'est probablement la même chose chez vous, quand j'étais agriculteur, je prélevais des échantillons de mon grain, pendant le transfert de la moissonneuse batteuse à la cellule à grain, des échantillons que je gardais et que je présentais successivement aux préposés des divers silos-élévateurs. Il y en avait avec qui je faisais affaire et d'autres que j'évitais, mais j'emportais toujours mes échantillons et je demandais toujours si c'était du grade 2 ou 3. En m'informant à la ronde, je trouvais moyen de conclure un meilleur marché.
Les préposés du silo-élévateur vérifiaient ensuite si ce que je leur envoyais correspondait à ce que je leur avais montré. C'était sur l'honneur. De temps en temps, il y avait une discussion sur la modification de l'état du grain, et ainsi de suite. Dans ce cas-là, on pouvait soumettre le même blé à l'arbitrage de la commission, qui le testait et le classait. Tout le monde se conformait à cet arbitrage par un tiers, et cela fonctionnait très bien.
Là où nous nous faisions prendre, c'était, de temps à autre, trois à six semaines après la livraison au puits de versement, quand le grain arrivait au port. On recevait alors une lettre selon laquelle l'orge brassicole avait été rétrogradée au rang d'orge fourragère. On devait donc de l'argent, et cetera. La réponse qu'on faisait, c'était qu'on n'y pouvait rien. L'orge livrée était brassicole, tout le monde était d'accord. Comment donc cela pouvait-il avoir changé?
Quand j'étais député, je recevais quatre ou cinq appels par année, d'agriculteurs qui se plaignaient que leur orge brassicole avait été rétrogradée au niveau 2, qu'il leur était impossible de la reprendre parce qu'elle était mélangée avec d'autres orges et qu'ils étaient obligés de croire sur parole une chose qui ne se pouvait pas. Ça ne peut plus se produire maintenant.
Certains se font dire que leur grain était infecté par de la fiente de cerf, c'est un des exemples dont nous avons parlé quand nous avons discuté de salubrité. L'addition d'autres impuretés pendant le trajet jusqu'au port échappe à la volonté de l'agriculteur, mais, d'une façon ou d'une autre, c'est sur lui que retombe le risque. C'est en train de changer.
Le sénateur Buth : Donc le producteur reste capable de contester ce que l'exploitant du silo-élévateur lui accorde.
M. Ritz : Tout à fait. Ça ne change pas. C'est l'inspection initiale. Tout ce que nous modifions, c'est l'inspection à l'arrivage qui était faite au détriment des agriculteurs ou des contribuables et dont le principal bénéficiaire était l'industrie, qui mélangeait le produit, et ce produit passait d'un grade 2 supérieur à un grade 2 inférieur, mais toujours en étant de grade 2. On peut, de cette manière, mettre la main sur un écart énorme de valeur pour un volume important.
Le sénateur Buth : Revenons à un autre enjeu pour les producteurs, le programme d'agrément. Je veux savoir si le projet de loi y a changé quelque chose.
M. Ritz : Le gouvernement et l'industrie ne veulent jamais devoir recourir aux assurances. Nous voulons agréer les établissements de manière à savoir à qui nous avons affaire et qui achète le produit. Il incombe alors au vendeur de s'assurer que l'établissement avec qui il fait affaire est cautionné et détient une assurance contre ses créances.
De temps à autre, au fil des années, il est survenu un certain nombre de problèmes, mais pas nécessairement chez les grandes entreprises, qui sont suffisamment diversifiées et qui ont leurs propres assurances. Si une sécheresse frappe l'Alberta mais non la Saskatchewan ni le Manitoba et que, en Ontario, ça s'est bien passé, elles répartissent leurs risques sur l'ensemble de ces provinces. Dans la plupart des cas, ce sont les petits joueurs, compte tenu des économies d'échelle, qui ont éprouvé des problèmes et qui ont été forcés à la mise sous séquestre. Bien sûr, les agriculteurs comptent sur cette caution ou cette assurance, selon le cas, par le truchement de la commission des grains, pour être payés. Nous ne voulons jamais y recourir, mais cette protection doit exister.
Le sénateur Buth : On n'y touche donc pas?
M. Ritz : C'est bien cela. Nous envisageons de moderniser le système, comme on l'a fait dans le reste du monde, et d'adopter un modèle fondé sur l'assurance plutôt que d'immobiliser des liquidités. Toutes ces industries dépendent du flux de trésorerie et de la capacité d'acheter, et cetera. Les millions de dollars mis en garantie sous forme de cautionnement — ou les centaines de milliers de dollars convertis en bons, selon le cas — ne peuvent plus être utilisés par l'industrie.
Le sénateur Buth : Avant de devenir sénatrice, j'ai participé aux consultations et aux discussions menées avec l'industrie. Je pense que la question de l'inspection à l'arrivage a été constamment soulevée par l'industrie. À votre avis, l'élimination de l'inspection à l'arrivage et la réduction des coûts du système représenteraient-elles le fond du projet de loi?
M. Ritz : Oui. En deuxième lieu, il y a évidemment les changements dans les garanties sous forme de bons et les assurances.
Le sénateur Merchant : Monsieur le ministre, ma question concerne les modifications et leurs répercussions sur les producteurs de courtes distances, les expéditeurs de wagons de producteurs sur de courtes distances et les installations terminales appartenant aux agriculteurs. Je suis certaine que vous avez vu tout cela en Saskatchewan.
M. Ritz : Oui; je connais plusieurs propriétaires.
Le sénateur Merchant : Ces gens devront maintenant embaucher, de leur propre initiative, un tiers pour inspecter et peser leur grain. Vos études vous ont-elles permis de déterminer les coûts engendrés? Avez-vous établi un coût approprié? Ils sont préoccupés par ces changements, car leurs coûts pourraient doubler ou tripler; ils ne savent pas.
M. Ritz : Tout d'abord, la capacité de demander et d'utiliser un wagon de producteurs est prévue dans la Loi sur les grains du Canada. Contrairement à ce qu'on a laissé entendre, cela ne relève pas de la Commission canadienne du blé. La commission demandait les grains pour remplir les wagons, car c'était son rôle, mais on avait toujours le droit de demander des wagons de producteurs. L'attribution d'un grade à du grain chargé dans le wagon de producteurs par l'agriculteur est toujours effectuée par la Commission des grains ou peut être effectuée par un tiers autorisé par la commission, selon l'option qui offre le coût le moins élevé.
Le sénateur Merchant : Qui établit le coût? Quel est le coût?
M. Ritz : Il n'y a pas de classement à l'arrivage dans un wagon de producteurs, car il se rend directement à l'utilisateur final, qu'il s'agisse d'un port ou d'une autre installation qui utilise le produit. En ce qui concerne les installations terminales intérieures, les gens que nous consultons régulièrement voient cela d'un bon œil, car ils vont pouvoir continuer à s'occuper du produit jusqu'au port. Les agriculteurs possèdent une bonne partie des installations terminales intérieures par l'entremise de l'Inland Terminal Association of Canada, et cela les encourage beaucoup, notamment parce qu'ils n'auront pas à payer des coûts qui ne sont pas nécessaires. Encore une fois, cela revient aux agriculteurs.
Dans le domaine des installations terminales intérieures, des lignes ferroviaires sur courtes distances ou des wagons de producteur, je ne vois pas quelles personnes pourraient vous avoir dit qu'elles étaient préoccupées à ce sujet.
Le sénateur Merchant : Je parle aux gens qui sont propriétaires des lignes ferroviaires sur courtes distances et des wagons de producteurs. Ils semblent être d'avis que connaître les coûts leur donnait une certaine sécurité. Maintenant, étant donné qu'ils doivent embaucher leurs propres tiers, ils ne savent pas si ces coûts vont doubler, tripler, ou si vous allez fixer un prix approprié.
M. Ritz : Peu importe qui s'en occupe, les coûts doivent augmenter. En effet, ils ont été établis il y a plus de 20 ans, et ils n'ont pas bougé. Il y a eu énormément de changements à cet égard. Ce n'est pas nécessairement les agriculteurs qui doivent assumer ces coûts de manière disproportionnée, mais aussi les contribuables. Évidemment, les agriculteurs sont aussi des contribuables et ils sont touchés sur deux fronts. Nous cherchons donc à éliminer environ 20 millions de dollars en frais généraux.
Le sénateur Merchant : Les changements leur feront-ils perdre leur commissaire aux grains?
M. Ritz : De qui parlez-vous?
Le sénateur Merchant : De ces personnes, c'est-à-dire les producteurs sur courtes distances.
M. Ritz : Non, nous ne modifions pas la gouvernance ou la structure de la Commission canadienne des grains. On a également discuté du meilleur modèle à adopter pour moderniser la commission, mais cela n'en fait pas partie du tout.
Le sénateur Merchant : Ma prochaine question concerne les wagons de producteurs. Il s'agit de l'article 378 du projet de loi, qui modifie le paragraphe 87(1) de la loi. Cet article semble avoir enlevé aux producteurs l'assurance qu'on mettrait des wagons de producteurs à leur disposition. En effet, la loi était ainsi libellée :
Chaque semaine, la Commission affecte, dans l'ordre des demandes reçues et selon les normes numériques et autres qu'elle ordonne, les wagons disponibles qui entrent, pendant cette période, dans chaque zone de contrôle d'expédition.
Ils veulent que je vous demande si les wagons de producteurs seront disponibles aussi rapidement qu'auparavant à ceux qui en font la demande et où sont les assurances à cet égard dans le projet de loi.
M. Ritz : Il n'y a aucun changement à cet égard dans le projet de loi. C'est prévu dans la Loi sur les grains du Canada depuis 1919, ou à peu près, et rien n'a changé. Il n'y a rien de cela dans le projet de loi. On peut toujours demander un wagon de producteurs. Si l'on se fonde sur les critères que vous avez soulignés, il n'y a rien de changé.
Le sénateur Eaton : Monsieur le ministre, dans tous les accords de libre-échange que vous négociez actuellement avec l'UE, le Japon, l'Inde et, je présume, la Chine, la Commission canadienne des grains a-t-elle un rôle à jouer en ce qui concerne l'excellence de la marque canadienne à l'étranger, afin qu'un client de l'Inde ou de la Chine qui commande de l'orge de malterie ou du blé roux de printemps obtienne ce qu'il a commandé et que la qualité du produit corresponde à ses attentes?
M. Ritz : Cela revient à l'inspection de sortie effectuée par la Commission canadienne des grains au port. En effet, la commission s'assure que la cargaison des conteneurs ou du bateau correspond exactement à ce que le pays importateur a commandé.
Le sénateur Eaton : Elle a toujours un rôle à jouer en ce qui concerne la marque canadienne?
M. Ritz : Pas tellement en ce qui concerne la marque canadienne, mais plutôt l'assurance de la qualité — qui mène à la marque canadienne — en collaboration avec l'Institut international du Canada pour le grain, c'est-à-dire l'IICG, qui effectue un grand nombre d'essais de panification. L'organisme aide un pays à établir le grade et le type de produits nécessaires pour répondre à ses besoins en matière de boulangerie, de pâtes, et cetera, et lui communique ensuite les caractéristiques des produits en question. Le pays importateur demande ensuite à ce que le grain lui soit livré par une société, que ce soit Cargill, Viterra, ou Richardson, ou les installations terminales intérieures. Le rôle de la Commission canadienne des grains au port est de veiller à ce que le produit chargé sur le bateau ou dans le conteneur corresponde bien aux caractéristiques demandées.
Le sénateur Eaton : Vous avez toujours un rôle à jouer.
M. Ritz : Oui, un rôle très important.
Le sénateur Callbeck : Monsieur le ministre, vous avez mentionné qu'on épargnera 20 millions de dollars dans le secteur des grains grâce au projet de loi. Pourriez-vous nous en donner la ventilation? Quel pourcentage de ces 20 millions de dollars profitera aux agriculteurs et dans quels domaines ces économies seront-elles réalisées?
M. Ritz : Ce n'est pas qu'il y aura de l'argent à dépenser; c'est que les coûts seront éliminés après l'adoption du projet de loi. En effet, on n'aura plus à soustraire l'inspection à l'arrivage de la valeur du produit de l'agriculteur, parce que l'industrie veut l'avoir, parce qu'il va le payer, ou que l'argent viendra des poches des contribuables. Cette somme ne devra plus être payée. Si l'industrie décide qu'elle veut faire un mélange et utiliser un peu de grain no 3 pour diminuer la valeur du grain no 2, mais rester dans les paramètres d'un grain no 2, elle peut toujours le faire, mais elle devra payer pour ce service.
Le sénateur Callbeck : Dites-vous que l'élimination de l'inspection à l'arrivage représentera la plus grande partie des économies de l'ordre de 20 millions de dollars?
M. Ritz : C'est le coût engendré par l'inspection à l'arrivage en ce moment. Que l'argent vienne des poches des agriculteurs ou de celles des contribuables, c'est ce qu'elle coûte en ce moment.
Le sénateur Callbeck : En ce qui concerne le programme de protection des paiements au producteur, le projet de loi passera d'un modèle fondé sur les bons à un modèle fondé sur l'assurance. Savons-nous si cela va diminuer ou augmenter les coûts?
M. Ritz : Partout où ce système a été mis en œuvre, les coûts ont diminué, car ils sont plus faciles à prévoir. De nos jours, les entreprises fonctionnent avec les flux de trésorerie. Il est contre-productif d'immobiliser une grande partie de votre actif quotidien dans la valeur d'un bon qui doit, en ce moment, être tenu à un taux encore plus élevé. Si vous êtes en mesure de souscrire une assurance, vous paierez une prime beaucoup moins élevée. Si vous ne faites pas de réclamation, la prime exigée diminuera, comme c'est le cas dans toutes les formes d'assurances. Tous les autres pays que nous avons consultés ont profité du passage d'un modèle fondé sur les bons ou sur les fonds détenus à un modèle fondé sur l'assurance.
Le sénateur Callbeck : Les coûts ont-ils diminué partout où il a été mis en œuvre?
M. Ritz : Oui, et de façon importante, d'après les études que nous avons consultées. L'Australie l'a fait. Aux États- Unis, c'est un assemblage hétéroclite; certains utilisent toujours les bons, d'autres sont en train d'adopter le système fondé sur l'assurance et d'autres ont déjà l'assurance et sont en processus de changement. On ne peut pas mettre cela en œuvre du jour au lendemain. Il faut garder les bons pendant que les gens se procurent une assurance et changent de système, alors cela prendra un certain temps.
Le sénateur Callbeck : J'aimerais clarifier la question des grades. Actuellement, il y en a trois, et nous allons éliminer le deuxième.
M. Ritz : Trois inspections; il ne s'agit pas des grades.
Le sénateur Callbeck : En ce qui concerne la première catégorie, les inspections sont-elles effectuées par des gens embauchés par la Commission canadienne des grains?
M. Ritz : Elles peuvent l'être.
Le sénateur Callbeck : Mais doivent-elles l'être?
M. Ritz : Non. Si un agriculteur est d'accord avec le grade attribué par Viterra, l'affaire est réglée. S'il remet Vittera en question, s'il a déterminé le grade ou qu'il pense qu'il le connaît et que selon Viterra, il s'agit plutôt d'un grade no 3, et non d'un no 2, il peut faire appel à la Commission canadienne des grains pour qu'elle tranche la question. Ses membres diront, par exemple, que selon l'échantillon, il s'agit d'un grade no 2.
Le sénateur Callbeck : C'est ce que fera le projet de loi?
M. Ritz : Non, c'est ce qui se passe en ce moment. Cela ne change pas.
Le sénateur Callbeck : Comment cela change-t-il?
M. Ritz : Cela ne change pas.
Le sénateur Callbeck : Cela ne change pas du tout?
M. Ritz : Non. On ne touche pas au système de classement du grain, et il demeure ce qu'il a été depuis des années.
Le sénateur Callbeck : J'ai lu au sujet des règlements. Lorsque des règlements sont pris ou modifiés, la nouvelle loi offre à la population une autre occasion de faire des commentaires. Comment la population aura-t-elle l'occasion de se faire entendre à ce sujet?
M. Ritz : Nous menons un grand nombre de consultations à ce sujet depuis plusieurs années. C'est la troisième fois que nous parlons de cette modification précise. Le premier effort est mort au Feuilleton, un autre a été reporté par l'opposition, et maintenant, nous abordons encore une fois la question. Dans l'autre cas, il y avait d'autres problèmes avec le projet de loi. Il s'agit d'un changement simple dont l'industrie, les agriculteurs et le gouvernement parlent depuis des années, et nous le formulons dans les termes les plus simples pour montrer qu'il peut profiter à tout le monde.
Le sénateur Callbeck : Dans deux ans, si les règlements sont modifiés, comment les gens qui sont concernés pourront-ils se faire entendre?
M. Ritz : Cela dépendra des règlements et si une parution dans la Gazette ou des consultations sont nécessaires. Nous avons mené de nombreuses consultations chaque fois que nous avons agi. Nous n'allons pas entreprendre quelque chose qui nuira à l'industrie. En tant qu'acteur à l'échelle mondiale, nous devons être en mesure de suivre nos partenaires commerciaux, afin de ne pas ralentir nos agriculteurs ou de ne pas les pousser trop loin. Nous envisageons tout dans cette optique. Nous nous demandons si cela est dans le meilleur intérêt de la communauté agricole et de l'ensemble de l'industrie. Ensuite, nous commençons à prendre des règlements en ce sens. Tout le monde a l'occasion de faire entendre son avis.
Le sénateur Callbeck : J'ai une autre question et elle concerne les pesées de contrôle. Quelle est leur raison d'être, et pourquoi les éliminons-nous?
M. Ritz : Je poserais plutôt la question à M. Hermanson, car il s'agit d'une question technique. Des concepts comme la perte de masse, l'humidité, et cetera sont des critères des grains et ils peuvent varier, et la valeur du produit peut changer de façon importante si vous passez de 13 p. 100 d'humidité à 7 p. 100 ou vice versa, et on parle alors de dégradation de la qualité, et cetera. Il s'agit d'une question technique.
Elwin Hermanson, commissaire en chef, Commission canadienne des grains : La meilleure façon d'expliquer cela, c'est que les pesées et aussi un processus appelés enregistrement et annulations sont intégrés à l'inspection à l'arrivage. Évidemment, l'inspection à l'arrivage est effectuée surtout lorsque les wagons sont déchargés aux installations terminales. En raison de l'élimination de l'inspection à l'arrivage obligatoire par la Commission canadienne des grains, il devient redondant de procéder à l'enregistrement et à l'annulation et d'exiger la pesée aux installations terminales. Il s'agit d'une autre façon de rendre le système de transport du grain plus efficace.
[Français]
Le sénateur Rivard : Monsieur le ministre, bienvenue. Merci de votre présence.
Je ne viens pas de l'Ouest du pays, je viens du Québec; et j'ai entendu plusieurs histoires contradictoires au sujet du monopole de l'ancienne Commission canadienne du blé. Je voudrais donc profiter de votre présence pour remettre les pendules à l'heure sur quatre points que j'aimerais soulever.
[Traduction]
Le premier concerne le fait qu'on attribue des wagons de producteurs aux agriculteurs qui en font la demande pour éviter les installations terminales. L'opposition soutient catégoriquement que c'était l'ancienne Commission canadienne du blé.
Deuxièmement, les agriculteurs auront-ils toujours l'option d'obtenir une deuxième inspection de la Commission canadienne des grains en ce qui concerne les grades déterminés aux installations terminales? L'opposition a tenté de mélanger le Tribunal d'appel pour les grains et l'inspecteur en chef des grains pour le Canada. Le Tribunal d'appel pour les grains ne s'occupe-t-il pas de l'inspection à l'arrivage et l'inspecteur en chef des grains ne s'occupe-t-il pas d'examiner les différends entre les agriculteurs et les entreprises céréalières?
Enfin, l'inspection à l'arrivage a-t-elle quelque chose à voir avec la salubrité des aliments? L'opposition n'a jamais trouvé d'enjeu que davantage de bureaucratie et de formalités administratives ne pouvaient pas régler.
[Français]
Monsieur le ministre, il serait intéressant, pour les membres du comité et l'ensemble des Canadiens qui se questionnent sur ces affirmations, d'entendre les réponses à ces questions.
[Traduction]
M. Ritz : Les wagons de producteurs sont une créature de la Loi sur les grains du Canada. Ils étaient remplis à la demande de la Commission canadienne du blé; ses dirigeants ont voulu se les approprier à cet égard, mais l'existence même des wagons de producteurs est prévue par la loi depuis le début des années 1900, il y a donc une centaine d'années. Depuis ce temps, on a demandé de nombreux wagons de producteurs.
La majorité de ces wagons, soit plus de 90 p. 100, servaient aux produits de la Commission canadienne du blé. Il y en avait quelques-uns pour le canola, l'avoine, les légumineuses, et ainsi de suite, qui allaient du point A au point B, pour la transformation à valeur ajoutée, mais la quasi-totalité étaient des wagons de produits de la Commission canadienne du blé acheminés au port parce qu'il y avait un différentiel en ce qui concerne les frais de manutention. Pour le canola, entre autres, compte tenu de la concurrence au sein même de l'industrie, il n'était pas rentable d'utiliser un wagon de producteur. Il n'y avait tout simplement pas d'argent supplémentaire à faire.
Les wagons de producteurs sont toujours prévus par la Loi sur les grains du Canada et le resteront. Les dispositions qu'a lues le sénateur Merchant sont encore pertinentes et encore en vigueur aujourd'hui. C'est surtout que les agriculteurs doivent décider s'ils vont se servir ou non des wagons de producteurs.
Par ailleurs, il y a des sociétés ferroviaires secondaires qui demandent des wagons. Encore une fois, les grandes sociétés ferroviaires et les sociétés ferroviaires secondaires concluent des accords commerciaux relativement à la disponibilité de ces wagons.
Pour ce qui est de la réinspection des grades, oui, cela se fait toujours aux installations primaires. S'il y a un différend avec une compagnie ferroviaire ou un acheteur privé, on a le droit de le porter en arbitrage à la Commission canadienne des grains. C'est encore là et ce sera toujours là.
Les tribunaux se concentraient sur les différends en matière de classement à l'arrivage seulement. S'il n'est pas question de classement obligatoire à l'arrivage, il n'est plus nécessaire pour le tribunal de régler les différends, car il n'est plus obligatoire de le faire.
L'inspection à l'arrivage n'a vraiment rien à voir et n'a jamais eu à voir avec la salubrité des aliments. Certaines personnes ont tenté d'établir un lien entre les deux, mais ce n'est pas du tout la même chose. L'inspection à l'arrivage était encore axée sur le grade pour s'assurer de la qualité, et la reprise de la pesée visait à s'assurer que le volume était encore le même. Si ce n'est plus obligatoire, alors l'industrie même commencera à se prononcer là-dessus.
Je le répète, cela n'a absolument rien à voir avec la salubrité alimentaire. Il s'agit de produit primaire brut, pas de produit alimentaire.
Le sénateur Mahovlich : Monsieur Ritz, je vous remercie de votre présence. J'ai une question simple à vous poser. Contrairement à l'Australie, nous avons la frontière des États-Unis d'Amérique qui borde nos provinces de l'Ouest, et bon nombre de nos exploitations agricoles sont situées tout près de cette frontière. Quel est le pourcentage des agriculteurs qui transportent leur blé à une installation des États-Unis?
M. Ritz : C'est une infime proportion. On le fait déjà depuis un certain nombre d'années. Des agriculteurs cultivent indépendamment de l'existence du 49e parallèle, qui passe directement sur leurs terres; il y a donc déjà une certaine proportion de ce « glissement » entre les deux pays. Les différences de grade visent à empêcher cela, mais une certaine quantité de produits s'en va au sud et parfois monte également au nord. On le fait déjà.
L'hiver dernier, il y a eu une levée de boucliers au sujet d'une grande quantité de produits qui s'en iraient vers le Sud pour bloquer et inonder ce marché. C'est un marché très important pour nous. On estimait que ce serait en quelque sorte un préjudice. Cela ne s'est pas produit et ne se produira pas tant que nous aurons un système logistique pour transporter nos produits jusqu'au port. Que ce soit à l'est, à l'ouest ou au sud, les agriculteurs vont prendre la décision en fonction de leurs intérêts financiers.
Toutefois, à ma connaissance, nous n'avons pas connu d'augmentation du nombre de produits qui ont franchi la frontière. Nous entendons toutes sortes d'histoires au sujet de camions faisant la queue, mais je ne vois pas ces camions.
Le sénateur Mahovlich : Beaucoup d'agriculteurs étaient très inquiets. J'étais ici lorsqu'ils sont venus témoigner, et ils craignaient que le transport du blé jusqu'à Churchill ne leur coûte trop cher. Est-ce le cas?
M. Ritz : Churchill a connu une bonne année. Nous avons conservé pour cinq ans — il en reste quatre, maintenant — la subvention qui était en place pour que les sociétés céréalières utilisent le port de Churchill. La Commission canadienne du blé était le principal expéditeur, mais cette année, Richardson en a pris une bonne partie et de petits acteurs en tirent parti, ainsi que certaines cultures spéciales, transportées à Churchill. Les premiers rapports que j'ai consultés indiquaient une année supérieure à la moyenne.
Le sénateur Mahovlich : Parlons un peu de la qualité du grain. Je sais que les Japonais exigent une certaine qualité. Peuvent-ils la vérifier avant le départ de Churchill?
M. Ritz : Le Japon ne commande pas une grande quantité de grains passant par le port de Churchill. Le principal expéditeur pour eux serait Vancouver ou parfois Prince Rupert, selon que le produit est conteneurisé, par exemple. Ce sont ses deux principaux ports au Canada.
Cela dit, les Japonais sont effectivement très stricts en ce qui a trait aux grades. Ils reconnaissent la valeur de la commission des grains et l'assurance qu'elle leur apporte. Ils continuent d'acheter; ce sont des acheteurs importants de produits canadiens, et nous nous en réjouissons.
[Français]
Le sénateur Maltais : Je souhaite la bienvenue au ministre ainsi qu'à M. Hermanson. Le Canada a une excellente réputation mondiale en ce qui concerne l'exportation des grains. La loi dont nous sommes saisis renforcera cette réputation, ce qui est très important afin d'avoir de meilleurs prix sur les marchés internationaux.
Je viens de la Côte-Nord, au Québec, où la société Calgon Grains possède d'énormes silos, à Baie-Comeau et Port- Cartier, pour la bonne raison que l'hiver la voie maritime est fermée entre les Grands Lacs. Ce grain provient en grande partie de Thunder Bay, en Ontario.
Comment ce grain est-il inspecté et comment avez-vous, en tant que ministre de l'Agriculture, l'assurance que lorsqu'ils quittent Baie-Comeau ou Port-Cartier pour l'exportation, et qu'ils ont reçu votre approbation de catégorie première classe?
Avez-vous un système d'inspection particulier pour ces entreposages? Ou est-ce que c'est fait dans l'Ouest ou à Thunder Bay et on n'en parle plus, ou si avant de partir du Canada, vous avez, en tant que ministre de l'Agriculture du Canada, la certitude qu'ils sont de très bonne qualité?
[Traduction]
M. Ritz : Ce qui m'en donne la certitude, c'est que lorsque je voyage dans le monde et que je fais la promotion des produits canadiens, j'obtiens une excellente réaction de tous ceux qui achètent nos produits céréaliers, que ce soit les oléagineux ou les produits céréaliers mêmes. Ils disent que le Canada est le meilleur pays au monde pour la qualité et l'uniformité de ses produits. Ils se plaignent toujours du prix — c'est dans la nature des acheteurs et des vendeurs —, mais au bout du compte, je n'ai jamais entendu quelqu'un se plaindre de la qualité. Jamais.
Nous savons que les acteurs de l'industrie jouent un rôle important à cet égard, car ils ont des clients très précieux dans le monde avec lesquels ils veulent continuer de faire des affaires. Cela dit, nous demandons à la Commission canadienne des grains de se prononcer, et il y a d'autres entités du secteur privé qui font aussi des inspections qui sont reconnues par certains acheteurs internationaux.
Mais essentiellement, les normes de classement établies par la commission des grains sont celles auxquelles adhèrent même les groupes du secteur privé.
Le sénateur Plett : Monsieur le ministre, vous avez déjà en partie répondu à la question que je voulais poser, mais je dirai seulement que le sénateur Mercer a vu juste lorsqu'il a dit au début que je nous félicitais, notre gouvernement, vous et moi-même, car lorsque quelqu'un fait bien son travail, on doit le féliciter. Ce n'est certainement pas à mon collègue d'en face de le faire, et je comprends cela.
Le 1er août, j'étais à Kindersley, comme vous, et j'y ai vu un millier d'agriculteurs heureux. J'étais à Churchill plus tard ce mois-là, lorsque le premier navire a été chargé, et j'ai vu les céréales de Richardson être embarquées sur un bateau. J'étais avec le maire, qui se réjouissait de ce qui arrivait à la ville de Churchill. J'étais aussi en compagnie du propriétaire du port de Churchill, qui était satisfait de l'exportation des céréales.
Pour moi comme pour vous, monsieur le ministre, l'important, au fond, ce sont les agriculteurs. Je crois que nos agriculteurs ont été bien servis par l'élimination de la commercialisation à guichet unique — pas par l'élimination de la Commission canadienne du blé, et cela doit être souligné. En fait, les représentants de la Commission canadienne du blé étaient aussi avec moi à Churchill sur ce bateau, et les choses allaient bien.
Monsieur le ministre, en fin de compte, nous devrions penser avant tout aux agriculteurs. Comment entrevoient-ils les changements que nous prévoyons mettre en place à la Commission canadienne des grains?
M. Ritz : Dans l'ensemble, les agriculteurs de l'Ouest canadien ont connu une année exceptionnelle. Les rendements n'ont peut-être pas été à la hauteur des attentes parce que la pluie n'est pas tombée au bon moment, ou qu'il a trop plu ou pas assez. Ce sont les caprices de l'agriculture en terre sèche.
Cela dit, je vais vous donner deux exemples. J'ai reçu deux coups de fil au cours du dernier mois. Le premier venait d'un jeune agriculteur, qui m'a dit : « J'étais l'un des seuls. Tout le monde dit que ce sont les vieux agriculteurs qui voulaient la CCB et que les jeunes ne la voulaient pas. » Il a 40 ans et est considéré comme un jeune agriculteur. Il m'a dit : « J'étais dans l'autre camp; je ne croyais pas en ce que vous faisiez. Je pensais qu'il nous fallait l'assurance du guichet unique pour accéder aux marchés mondiaux. Mais je viens de récolter mon blé et j'ai passé 20 000 boisseaux de la moissonneuse- batteuse à l'installation. Le montant net que j'ai eu est 9,17 $ le boisseau. » Il a produit 58 boisseaux l'acre. Il a dit n'avoir jamais reçu autant d'argent pour son blé.
Il a indiqué : « J'ai pu conserver mon canola — il avait perdu un dollar le boisseau, et je vais maintenant pouvoir le conserver. Auparavant, j'aurais été obligé de le vendre parce que mon blé ne rapportait pas assez. »
Selon les derniers rapports que j'ai consultés, nous avons déjà acheminé quelque 40 p. 100 des produits de la Commission canadienne du blé vers les marchés. Sous l'ancien plan de commercialisation de la CCB, c'était seulement 12 p. 100 par mois, afin qu'ils ne s'emballent pas et qu'ils ne soient jamais bloqués au plus bas ni au plus haut. C'est ce qu'on appelle de la médiocrité.
Dans le cadre du nouveau plan, la commission gère également une caisse commune. Elle achète ou vend. Elle va de l'avant. Les agriculteurs voient plus d'argent comptant; ils n'attendent pas un paiement final, des paiements provisoires et des montants complémentaires. Ils ramènent cet argent chez eux.
Les agriculteurs ne se plaignent que d'une chose, sénateur Plett, et c'est qu'ils veulent que nos règles fiscales soient modifiées parce qu'ils paieront trop. C'est une belle lutte à mener.
Le sénateur Plett : Merci, monsieur le ministre.
Le président : Le ministre a dépassé ses 45 minutes, et je sais qu'il a d'autres obligations à l'autre endroit. Ceux qui ont d'autres questions pourront les poser au deuxième groupe de témoins.
Monsieur le ministre, à titre de président du comité, permettez-moi de dire que votre présence a été très utile. Merci d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer et de nous faire part de vos commentaires. Merci aussi du leadership dont vous faites preuve.
J'aimerais en profiter pour vous remercier d'avoir pris le temps, l'été dernier, de visiter le nord du Nouveau- Brunswick, vous avez réuni les dirigeants de l'industrie, peu importe leur allégeance politique, ce qui vous a permis d'échanger des informations.
Si vous avez un mot de la fin à ajouter, je vous invite à le faire. Ensuite, nous passerons au deuxième groupe de témoins.
M. Ritz : Merci de m'avoir permis de venir témoigner aujourd'hui. J'ai beaucoup de plaisir à discuter avec tout le monde. Comme vous l'avez souligné à juste titre, monsieur le président, lorsqu'on tient une réunion avec les agriculteurs, on parle d'agriculture et non de politique. Tous veulent savoir comment améliorer leurs résultats. Je trouve cela très encourageant.
Le président : Chers collègues, avant de présenter le deuxième groupe de témoins, j'aimerais vous informer qu'avant d'ajourner la réunion, j'aimerais tenir une petite réunion à huis clos de cinq minutes pour que nous puissions mettre la dernière main à la liste des témoins que nous souhaitons rencontrer dans les prochaines semaines.
Le second groupe de témoins est formé des personnes suivantes : de la Commission canadienne des grains, nous accueillons M. Elwin Hermanson, qui est commissaire en chef; Agriculture et Agroalimentaire Canada est représenté par M. Frédéric Seppey, directeur général, Direction de l'élaboration et de l'analyse des politiques et enfin, de la Commission canadienne des grains, nous accueillons M. Gordon Miles, chef de l'exploitation.
Messieurs, merci d'avoir accepté notre invitation; cela nous permettra de poursuivre notre étude de la section du budget.
Je sais que M. Hermanson fera un exposé. Nous avons reçu les documents et ils ont été distribués.
Avez-vous des documents à distribuer ou s'agit-il d'un exposé?
Elwin Hermanson, commissaire en chef, Commission canadienne des grains : Je ferai un exposé et je donnerai des explications au sujet des documents.
Mesdames et messieurs les sénateurs, bonjour. Au nom de la Commission canadienne des grains, c'est un plaisir de comparaître au comité. Merci de me donner l'occasion de venir parler du projet de loi C-45 et des frais d'utilisation.
Avant de commencer mon exposé, permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Elwin Hermanson. Je suis le commissaire en chef, de la Commission canadienne des grains. Je suis originaire de Beechy, en Saskatchewan. J'ai travaillé dans le secteur agricole et j'occupe le poste de commissaire en chef depuis 2008.
Je suis accompagné de Gordon Miles, chef de l'exploitation de la Commission canadienne des grains. Il a un long parcours au sein de l'industrie. Il est chargé de coordonner et de superviser l'exécution des programmes, services et activités de la division des Services à l'organisme, de la division des Services à l'industrie et du Laboratoire de recherches sur les grains.
Je suis également accompagné de Frédéric Seppey, directeur général de la Direction de l'élaboration et de l'analyse des politiques d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Aujourd'hui, le secteur céréalier se trouve à une étape critique où les politiques publiques et les structures de réglementation doivent s'adapter à l'évolution rapide du marché.
La modernisation du secteur constitue une grande priorité pour le gouvernement, et elle a été lancée le 1er août dernier par l'élimination du régime de commercialisation à guichet unique de la Commission canadienne du blé visant le blé et l'orge. Nous tirons parti de cette initiative, et le gouvernement a proposé des modifications à la Loi sur les grains du Canada dans le cadre du projet de loi sur l'emploi et la croissance qui a été déposé récemment. Ces réformes contribueront à la modernisation du secteur céréalier. Je vous donnerai plus de détails sur ces modifications un peu plus loin dans mon exposé.
En outre, j'aimerais aussi vous informer que la Commission canadienne des grains a lancé aujourd'hui, une période de consultation de 30 jours sur les changements aux frais d'utilisation. Les frais proposés reflètent les services rationalisés que la Commission canadienne des grains offrirait si le projet de loi C-45 était adopté. En fin de compte, nous devons créer une structure de recouvrement des coûts qui fournira à la Commission canadienne des grains les ressources dont elle a besoin pour assurer la prestation de ses services aux producteurs et à l'industrie. J'ai remis au greffier des exemplaires de nos documents de consultation afin que vous puissiez les examiner.
Maintenant, comme je crois que ni moi ni l'un de mes collègues n'avons comparu devant le comité sénatorial auparavant, j'ai pensé qu'il serait bon d'expliquer un peu ce qu'est la Commission canadienne des grains et ce qu'elle fait.
La Commission canadienne des grains applique la Loi sur les grains du Canada, adoptée par le Parlement en 1912. Notre mandat, aux termes de la Loi, consiste à fixer et faire respecter, au profit des producteurs de grains, des normes de qualité pour le grain canadien et régir la manutention des grains au pays afin d'en assurer la fiabilité sur les marchés canadiens et internationaux. Ce mandat exige la mise en place d'un système national d'assurance de la qualité du grain dont le fonctionnement est assuré par de nombreux employés partout au pays.
La Commission canadienne des grains est axée sur quatre principales activités qui reflètent son orientation et l'exécution de ses programmes au quotidien. Ces activités sont les suivantes : d'abord, il y a l'assurance de la qualité qui consiste à veiller à l'uniformité et à la fiabilité de la qualité des grains afin de répondre aux besoins du marché céréalier national et international. Deuxièmement, il y a l'assurance de la quantité, qui vise à veiller à l'uniformité et à la fiabilité des expéditions de grain canadien. Troisièmement, il s'agit de mener des recherches sur la façon d'évaluer la qualité et la salubrité des grains; élaborer des technologies et des méthodes pour évaluer la qualité à l'utilisation finale. Enfin, il y a la protection des producteurs. Il s'agit de défendre les droits des producteurs afin qu'ils bénéficient d'un traitement équitable au sein du réseau de manutention des grains. Cela comprend des choses comme les wagons de producteurs et d'autres sujets abordés aujourd'hui.
La Loi sur les grains du Canada, qui régit notre organisme, n'a pas été modifiée de façon importante depuis 1971. Pour notre industrie, c'est une longue période. Pendant ce temps, nous nous sommes acquittés de notre mandat avec efficacité. Nous y sommes arrivés en mettant en oeuvre diverses initiatives stratégiques et réglementaires et en établissant les priorités de façon à pouvoir affecter les ressources aux nouveaux enjeux. Par exemple, nous avons établi des protocoles de retrait de l'enregistrement des variétés afin d'aider le secteur à abandonner progressivement la distinction visuelle des grains. Nous avons renforcé l'assurance de la salubrité des grains grâce à l'élaboration de meilleures méthodes d'analyse objectives visant à détecter des substances toxiques. Nous avons résolu des questions liées à l'accès aux marchés. Nous avons amélioré notre programme d'agrément et de garantie en veillant à ce que les sociétés assurant la manutention du grain de l'Ouest canadien satisfassent à leurs obligations légales.
Tandis que nous continuons de nous acquitter de notre mandat, notre secteur fait l'objet de profonds changements. On observe une augmentation du nombre de silos en béton de grande capacité; l'élimination des subventions au transport; la mise en œuvre de divers modes de transport; l'augmentation des demandes liées à l'assurance de la qualité et de la salubrité du grain et l'évolution des besoins et des préférences des utilisateurs finaux. Et bien entendu, plus récemment, la transformation de la commercialisation en raison de l'abolition du régime de commercialisation à guichet unique de la Commission canadienne du blé. Étant donné tous ces changements, la majorité des intervenants sont d'avis qu'il faut modifier la Loi sur les grains du Canada afin de veiller à ce que le secteur céréalier demeure moderne, concurrentiel et profitable. Ce point de vue a été confirmé lorsque nous avons discuté du sujet avec les intervenants plus tôt cette année.
Les modifications proposées par le gouvernement constituent un important point de départ en vue de réagir aux préoccupations des intervenants. Les modifications permettraient de rationaliser nos opérations et services, d'alléger le fardeau réglementaire et de réduire d'environ 20 millions de dollars les coûts supportés par le secteur et d'améliorer la protection des producteurs tout en assurant le maintien d'un système d'assurance de la qualité des grains solide.
Plus précisément, la Commission canadienne des grains n'offrirait plus de services d'inspection et de pesée à l'arrivage lors de la réception du grain aux silos terminaux. Dans l'environnement actuel, ces services ne sont plus nécessaires, particulièrement lorsque du grain est expédié d'un silo des Prairies à un silo portuaire appartenant à la même société. Si un expéditeur ou un exploitant de silo juge que ces services d'inspection sont utiles, il pourra recourir aux services d'un fournisseur autorisé par la Commission canadienne des grains. En cas de contestation, ces inspections feraient l'objet d'un examen mené par la Commission canadienne des grains. Les modifications donneraient par ailleurs un recours aux expéditeurs dans le cas où un exploitant de silo terminal ne ferait pas inspecter ou peser le grain au moment de sa réception au silo.
En raison de l'élimination des services obligatoires d'inspection et de pesée à l'arrivage offerts par la Commission canadienne des grains, d'autres modifications sont nécessaires. D'abord, le Tribunal d'appel pour les grains, qui a pour mandat de rendre des décisions définitives et exécutoires visant les inspections à l'arrivage, n'aurait plus sa raison d'être. Les pesées de contrôle deviendront superflues, car les exploitants de silos terminaux auront conclu des accords commerciaux avec les expéditeurs. À l'origine, la pesée de contrôle avait pour but d'assurer l'exactitude de la pesée et le rapprochement des stocks entreposés aux silos terminaux et aux silos de transbordement. En l'absence de pesées de contrôle, il n'y aurait aucune raison de poursuivre l'enregistrement et l'annulation des récépissés. Toutes ces activités peuvent donc être éliminées.
Les membres de l'industrie nous ont demandé d'offrir des services qui répondent aux besoins changeants de l'industrie et qui ont une valeur. Aucune des modifications ne change le rôle de la Commission canadienne des grains pour ce qui est de la collecte et de la diffusion des données. Les fournisseurs de services et les sociétés céréalières recueilleront des données et les transmettront à la Commission canadienne des grains afin qu'elle les publie sur son site Web, comme elle le fait actuellement.
Il est important de ne pas oublier que les modifications ne changeront pas le rôle obligatoire de la Commission canadienne des grains quant à l'inspection du grain destiné à l'exportation à partir des silos terminaux. La qualité et la fiabilité des expéditions de grain canadien ne seront pas compromises.
Nos programmes de salubrité des grains seront maintenus. La Commission canadienne des grains continuera d'échantillonner, d'analyser et de surveiller le grain en vue de détecter tout risque lié à sa salubrité, notamment la présence de toxines, de métaux lourds et de résidus de pesticides.
Enfin, les producteurs ont indiqué au gouvernement qu'ils accordent de la valeur au programme de protection des paiements aux producteurs. Les modifications permettraient d'améliorer le programme en favorisant la transition vers un nouveau régime fondé sur l'assurance, dans le cadre duquel on pourrait réduire les coûts des licences et améliorer la protection. L'adoption d'un tel régime permettra de réduire les coûts du système céréalier qui, en fin de compte, sont payés par les producteurs.
Ces modifications contribueront grandement à redéfinir le rôle de la Commission canadienne des grains. Le ministre a indiqué qu'il reste du travail à faire pour s'assurer que l'organisation peut servir le secteur céréalier de façon optimale. Nous voulons continuer de collaborer avec les intervenants afin de créer un programme de recherches sur les grains qui appuie notre système d'assurance de la qualité du grain. Nous devons continuer de mettre au point des façons de mesurer la qualité du grain — c'est un travail continu —, d'évaluer les facteurs de classement du grain, de cerner de nouvelles utilisations pour le grain canadien, et de surveiller la salubrité de nos produits. Le marché devient de plus en plus exigeant en ce qui a trait aux divers facteurs de qualité et de salubrité. Nous devons être prêts à fournir les garanties dont ont besoin les intervenants pour accéder aux marchés.
Dans le même ordre d'idées, dans un monde où la commercialisation à guichet unique a été éliminée et où de nouvelles relations commerciales s'établissent entre les producteurs et les sociétés céréalières, de nouvelles formes de surveillance pourraient s'avérer nécessaires. Nous continuerons de collaborer avec les producteurs et les sociétés céréalières afin de mettre en place les bons instruments de politique pour faire en sorte que les transactions — c'est-à-dire les livraisons de grain — demeurent équitables et transparentes pour tous.
Je pense que cela vous fournit le contexte général. Nous avons peut-être examiné la question de façon plus détaillée qu'au cours de l'heure précédente; j'espère donc que cela ouvre la voie à une discussion très instructive. Je vous cède la parole.
Le président : Merci, monsieur Hermanson. Il ne fait aucun doute que vous avez suscité notre intérêt, car six sénateurs veulent vous poser des questions.
Le sénateur Plett : Premièrement, messieurs, merci beaucoup d'être venus. Il est formidable de voir le document que vous nous avez fourni et d'être parmi les premiers à le consulter. Manifestement, nous entreprenons notre étude aujourd'hui, et cela suscite beaucoup d'enthousiasme. Ma première question porte sur les frais d'utilisation.
Dans votre exposé, monsieur Hermanson, vous avez fait allusion aux économies que la Commission canadienne des grains réalisera grâce aux présentes modifications législatives. Vous avez également mentionné que des consultations relativement aux frais d'utilisation se tiennent depuis un certain temps, et vous nous avez remis un document portant sur les modifications.
En le feuilletant, je constate que certains frais augmentent, alors que d'autres diminuent pour les agriculteurs. En termes clairs, pourriez-vous nous expliquer ce que cela signifiera pour les agriculteurs des Prairies? Prenons l'exemple du canola qui s'affiche à 650 $ la tonne. Combien l'agriculteur doit-il débourser actuellement en frais d'utilisation, et combien cela lui en coûtera-t-il lorsque les nouveaux frais entreront en vigueur? Débutons par cela.
M. Hermanson : Vous avez raison, parce que l'industrie économisera environ 20 millions de dollars. En grande partie, cette économie proviendra de l'élimination de l'utilisation obligatoire de l'inspection à l'arrivage. Je tiens à être clair. L'inspection à l'arrivage est faite aux silos terminaux lorsque les wagons ferroviaires sont déchargés et n'a aucune incidence sur le mouvement des grains à la sortie de ces installations.
Il faut également tenir compte d'un autre élément. Nos frais sont gelés depuis 1991. Tout le monde, y compris les gens de l'industrie qui devront assumer la facture, reconnaît que nous ne pouvons pas maintenir éternellement ce gel. En nous tournant vers l'avenir, il nous est apparu évident que nous devions repenser le modèle de financement pour assurer notre pérennité, ainsi que la prestation des services dont l'industrie a besoin, des services que l'industrie veut et des services nécessaires.
Vous avez raison. Certains frais augmenteront, parce que les coûts de prestation des services ont également augmenté. Les frais en 2012 sont loin d'être les mêmes qu'en 1991. Par contre, si nous pouvons éliminer certains services, dont l'inspection à l'arrivage, réaliser des économies et utiliser plus efficacement le programme de garantie pour en réduire les coûts pour l'industrie et, par conséquent, les agriculteurs, il en résultera des économies.
Il y a deux aspects à considérer. L'inflation nous force à hausser nos frais pour être réalistes et justes envers les contribuables, mais il faut également nous assurer de nous concentrer sur ce qui doit être fait en 2012, plutôt que sur ce qui était approprié en 1971, soit l'année de la dernière refonte majeure de notre loi.
M. Miles a les données exactes concernant votre exemple sur le canola.
Gordon Miles, chef de l'exploitation, Commission canadienne des grains : Je n'ai pas les chiffres exacts concernant le canola, mais voici une comparaison. Si nous n'allons pas de l'avant avec les modifications concernant nos frais d'utilisation, les coûts passeront à plus de 3 $ la tonne, selon notre précédente consultation. Avec ces modifications, nous prévoyons des frais de moins de 2 $ la tonne, et nos coûts actuels sont d'environ 1,20 $. Cela vous donne une bonne idée de l'importance des effets des modifications. Comme M. Hermanson l'a dit, au cours de nos consultations, les gens ont convenu qu'une augmentation était de mise après 20 ans de gel, mais nous aiderons ainsi à en minimiser les effets sur les agriculteurs.
Le sénateur Plett : Je viens d'une collectivité agricole du Manitoba dans l'Ouest canadien, et j'ai évidemment toujours à coeur les intérêts des agriculteurs. Étant donné les améliorations visant la simplification du processus, qui en bénéficiera le plus : l'industrie, les agriculteurs ou les acheteurs des produits à l'étranger? Qui tirera profit de ces économies?
M. Hermanson : Les économies profiteront aux contribuables canadiens, aux agriculteurs et aux autres intervenants de l'industrie, qui ont évidemment la capacité d'en faire profiter dans bien des cas les producteurs. Donc, si nous arrivons à faire économiser l'industrie, les intervenants ont l'occasion d'en faire profiter les producteurs. Si nous pouvons éliminer des coûts du système et offrir un programme de garantie plus efficace et plus rentable aux producteurs, ces derniers réaliseront également des économies. Nous considérons qu'il s'agit d'une situation dont tout le monde sort gagnant. Nous n'avons pas l'impression qu'un secteur perd des plumes, au détriment d'un autre. Chaque intervenant en tire profit, en débutant par les agriculteurs. Si nous avons un système plus efficace, c'est évident que même les consommateurs à la fin de la chaîne en tireront certains avantages.
Le sénateur Plett : J'ai posé une question au ministre concernant le cautionnement, et vous étiez présent. Dans mon ancienne vie, j'avais une petite entreprise et j'ai souvent eu des problèmes relatifs au cautionnement lorsque nous connaissions une mauvaise année. L'année précédente devait servir de cautionnement. Nous avons parfois eu beaucoup de fil à retordre. Des agriculteurs m'ont dit que le système actuel concernant le dépôt de garantie sous forme de cautionnement, de lettre de crédit ou d'autre instrument financier pour couvrir les obligations impose des coûts importants à l'industrie, parce que des sommes considérables doivent être mobilisées à cet effet. Je m'y connais certainement à cet égard. Je crois également comprendre que le présent programme ne garantit pas le paiement d'un pourcentage déterminé. Je sais que le ministre y a brièvement touché, mais j'aimerais que vous nous expliquiez plus en détail ce que l'assurance apporte de plus que le cautionnement.
M. Hermanson : Je vais d'abord expliquer le présent programme de garantie. Tous nos titulaires de licence doivent fournir un certain instrument financier, comme vous l'avez mentionné, qui couvre en tout temps l'ensemble des obligations auxquelles s'exposent les producteurs. Il s'agit d'un système cloisonné. Nous avons plus de 130 titulaires de licences qui achètent les grains des producteurs. Chacun doit avoir un instrument financier pour payer aux producteurs la totalité de ses exigibilités s'il n'est pas capable de le faire.
Nous avons actuellement à notre disposition plus de 600 millions de dollars en capital. Cette somme ne se trouve pas dans notre compte bancaire, parce que ce n'est pas permis, mais elle pourrait servir de fonds de roulement en vue d'accroître l'industrie, si NOS titulaires de licences étaient libres d'utiliser autrement ces fonds, mais ce n'est pas le cas. Nos titulaires doivent laisser ces fonds à la disposition de la Commission canadienne des grains, au cas où ils ne seraient pas en mesure de payer les producteurs.
Si nous avons plutôt un programme d'assurance, au lieu de mesurer les obligations envers les producteurs, nous tiendrons compte des risques, et il s'agit de la méthode du panier, parce que c'est la nature de l'assurance. Le système évalue les moyennes et les probabilités, au lieu de présumer que le pire surviendra, parce que cela n'arrivera pas tout en même temps. Nous prévoyons que le coût serait considérablement moindre pour les titulaires de licence si nous mesurons les risques, au lieu de l'ensemble des exigibilités envers les producteurs.
Il y a également un autre grand gagnant. L'administration du présent système est lourde. Tous nos titulaires de licence doivent faire parvenir des rapports mensuels sur le passif à la Commission canadienne des grains. Ils doivent donc mandater chaque mois du personnel pour passer en revue leurs finances et nous dire le risque auquel s'exposent les producteurs pour un mois donné. Nous devons aussi avoir du personnel pour vérifier les mêmes documents et nous assurer d'abord que c'est bien fait et qu'il y a ensuite une protection adéquate en place pour les producteurs. De temps à autre, nous devons auditer nos titulaires de licence. Nous faisons parfois des vérifications du bureau, mais il arrive que nous nous déplacions partout au Canada pour vérifier que nos titulaires de licence respectent la loi et qu'ils ont une garantie adéquate en place.
Si nous passons à un programme de garantie fondé sur l'assurance, le fardeau sur l'administration sera considérablement réduit. Le capital ne sera plus laissé en garantie, et le fonctionnement de notre programme de garantie n'accaparera plus autant nos ressources humaines.
Le sénateur Plett : Merveilleux. Merci beaucoup.
Le sénateur Mercer : Tout d'abord, messieurs, monsieur le président, au début de la séance, nous avons reçu un document dont la version anglaise compte 53 pages et la version française en compte 60. C'est un peu trop volumineux.
Monsieur le président, monsieur le greffier, il serait illusoire de penser que nous pouvons prendre connaissance du contenu des 53 pages ou des 60 pages en français. Il faut être honnête. Nous sommes bons, mais il y a tout de même une limite. Ce n'est qu'un commentaire, monsieur le président, et j'espère que nous pourrons apporter les correctifs nécessaires à l'avenir. C'est illogique d'essayer de comprendre le document.
Revenons à nos moutons, soit le projet de loi C-45 et les modifications à la Loi sur les grains du Canada. Dans votre discussion avec le sénateur Plett au sujet de la question de l'assurance, vous avez évoqué des économies possibles pour les agriculteurs. Cependant, vous avez également dit que les modifications élimineront l'obligation de produire des rapports mensuels pour la Commission canadienne des grains, ainsi que les producteurs. Cela touche une assez grande proportion d'employés.
Savez-vous environ combien de gens perdront leur emploi à la suite de cette modification? De plus, avons-nous évalué ce que rapportera aux sociétés d'assurance la vente de leurs produits à l'industrie?
M. Hermanson : Tout d'abord, nous voulons confirmer que nous sommes ici pour discuter du projet de loi C-45. Je tiens à préciser que nous avons déposé le document au comité pour bien faire, parce que l'information est rendue publique aujourd'hui, par la Commission canadienne des grains, et nous ne voulions pas que vous soyez les derniers au courant; nous avions cru qu'il serait en fait préférable que vous en soyez les premiers informés.
Deuxièmement, en ce qui a trait aux répercussions sur les ressources humaines de la Commission canadienne des grains, nous prévoyons que des effets se feront sentir. Ce n'est aucunement finalisé, et le gouvernement du Canada exige que nous nous conformions à certaines procédures. Nous utiliserons la Directive sur le réaménagement des effectifs, et c'est par respect à nos employés qui seront touchés. Autant que faire se peut, nous souhaitons les en tenir informés.
À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas vous communiquer cette information, mais nous serons ravis de vous en faire part dès que nous le pourrons, dès qu'elle sera disponible, et dès qu'il sera approprié de le faire.
Vous avez raison de dire que la Commission canadienne des grains aura une importance réduite à l'avenir. Nous croyons que c'est approprié, parce que d'autres parties de l'industrie ont également une importance réduite. Comme je l'ai dit, nous croyons que notre organisme a sa raison d'être et que nous serons encore là à long terme pour nous assurer de la qualité des grains, ce qui garantit l'accès au marché, et de la protection des producteurs et pour assumer nos autres responsabilités, que j'ai déjà mentionnées, en vertu de la présente Loi sur les grains du Canada.
Le sénateur Mercer : Le sénateur Maltais a posé une question au ministre lors de la précédente série de questions, mais je crois que nous n'avons pas eu une réponse précise. Je ne suis pas certain que tout le monde ait compris la question. Si je l'ai bien comprise, elle portait sur la qualité des grains de l'Ouest canadien expédiés à Baie-Comeau et la nécessité de l'assurance de qualité.
Nous comprenons l'inspection lorsque nous exportons des grains, et nous comprenons l'inspection lorsque les grains sont livrés par l'agriculteur. Nous éliminerons maintenant l'inspection médiane, et nous le comprenons. Cependant, d'après moi, voici ce qu'était la question. Comment l'utilisateur final dans l'Est québécois peut-il être certain que la qualité est ce à quoi il ou elle s'attend?
Nous sommes réputés pour avoir les meilleurs grains au monde. Je ne remets pas notre réputation en question. Par contre, j'aimerais revenir sur la question du sénateur Maltais, parce qu'elle ne semble pas avoir été répondue.
M. Hermanson : Ce sont d'excellentes questions. En passant, j'ai déjà visité les installations de Baie-Comeau et de Port-Cartier; elles sont incroyables. Nous avons du personnel sur place qui donne un coup de main relativement à l'assurance de la qualité des grains.
C'est un bon point à soulever, parce que le projet de loi modifie la désignation de silo terminal et de silo de transbordement. Ce sera maintenant tout simplement un silo terminal.
En passant, les installations à Baie-Comeau et à Port-Cartier et les autres installations situées le long du Saint- Laurent sont maintenant classées comme des silos de transbordement. Ils reçoivent donc des grains d'autres terminaux. Les grains proviennent principalement de Thunder Bay. Ils sont chargés à bord de navires, et ce sont souvent des navires-citernes. Ils sont expédiés par la voie maritime du Saint-Laurent, sont déchargés à Baie-Comeau ou à Port- Cartier dans ce que nous appelons un silo de transbordement, puis les grains sont chargés à bord de gros navires océaniques.
Sur le site de ces installations de transbordement, aux termes de la présente loi, il n'y a aucune inspection à l'arrivage; cette inspection a déjà été faite. Il n'y a aucun changement à ce sujet. L'inspection à l'arrivage ne sera plus à l'avenir un service obligatoire de la Commission canadienne des grains, et cela n'aura aucune incidence sur les silos de transbordement. Le personnel procédera encore à l'inspection à la sortie, parce que c'est l'inspection primordiale; c'est à ce point que la réputation du Canada est en jeu et que la satisfaction des clients est assurée.
Par conséquent, en ce qui a trait aux silos de transbordement, qui seront reclassés en silos terminaux lorsque les modifications seront adoptées, le personnel continuera de procéder aux inspections à la sortie, et cela maintient les effets positifs associés à cette inspection dont nous avons parlé.
Le sénateur Mercier : Dans mes autres fonctions, je siège au Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Il y a quelques années, nous avons réalisé une étude sur la conteneurisation. J'aimerais encore une fois revenir sur un commentaire du ministre au sujet de l'utilisation de conteneurs pour transporter les grains et tous les produits agricoles. Cette méthode est beaucoup plus répandue que la population peut le penser, et je crois que c'est l'avenir.
Par contre, je suis curieux de voir s'il y a eu des améliorations. À l'époque, soit il y a deux ou trois ans, nous avions notamment examiné la disponibilité des conteneurs, où ils se trouvent et quand ils sont nécessaires. Il y a un nombre impressionnant de conteneurs vides qui traînent au pays. Les sociétés ferroviaires n'ont pas nécessairement comme priorité de s'assurer d'avoir des conteneurs aux endroits stratégiques pour le milieu agricole, ou ce ne l'était pas par le passé. La situation a-t-elle progressé, ou est-ce encore un problème qui devrait nous interpeller?
M. Hermanson : C'est probablement quelque chose dont vous devez vous préoccuper. Ce n'est pas du tout un élément qui est de notre ressort. Je ne me sens donc pas libre de faire de commentaires à cet égard, parce que ce n'est pas un domaine au sujet duquel j'ai beaucoup de connaissances et ce n'est pas un domaine que je devrais aborder.
Cela étant dit, pour votre information, je peux vous dire que le mouvement du grain par conteneur est à la hausse. Nous estimons maintenant qu'entre 10 et 15 p. 100 de la totalité des exportations de grains du Canada se font par conteneur, ce qui représente une hausse par rapport à ce qui se faisait avant.
Vous soulevez un point pertinent et important, mais je ne suis pas en mesure de me prononcer à cet égard.
Le sénateur Mercer : Je vais poser ma dernière question. Vous avez parlé du besoin de hausser les prix, car il y a 20 ans qu'ils ne l'ont pas été. Vous avez parlé d'une baisse des prix. Tout à l'heure, nous avons parlé de réaliser des économies d'environ 20 millions de dollars en éliminant la seconde inspection. Au bout du compte, lorsque vous additionnez toutes les augmentations et tenez compte de certaines diminutions, les 20 millions de dollars ont-ils disparu dans cet autre document?
M. Hermanson : C'est une excellente question. Je vais vous donner quelques renseignements.
Premièrement, les crédits ponctuels que nous recevons du gouvernement du Canada — parce que nos droits n'étaient pas aussi élevés qu'ils auraient dû l'être — dépassaient les 30 millions de dollars. Nous disposons d'un budget de 80 millions de dollars ou plus. Par conséquent, près de la moitié de nos crédits étaient soit ponctuels soit d'un autre type, ce qui était jugé être complètement déplacé parce que la majorité de ce que nous faisons profite aux intervenants de l'industrie. Voilà pourquoi nous tentons de corriger cet élément et d'aider les contribuables.
D'un autre côté, étant donné que notre loi n'a pas été modifiée depuis 41 ans, une partie de ce que nous faisons ne s'applique pas au monde d'aujourd'hui. Voilà pourquoi nous pensons pouvoir permettre à l'industrie d'économiser une vingtaine de millions de dollars.
Une simple mise en garde : ce n'est pas parce que la Commission canadienne des grains élimine l'inspection à l'arrivage qu'elle ne pourrait pas être faite à la demande d'un expéditeur. Cela dit, il s'agit maintenant d'une décision commerciale ou opérationnelle. Est-ce qu'il vaudrait la peine d'inspecter notre grain avant de l'envoyer vers un silo terminal? Est-ce nécessaire? La plupart du temps, ce ne l'est pas, mais si ce l'était, la loi en vigueur les autoriserait toujours à négocier une inspection à l'arrivage, et ils paieraient le prix demandé, quel qu'il soit. Il s'agit d'une décision commerciale comme le coût du levage ou du nettoyage du grain ou autre qu'ils devraient fixer.
Ces coûts refléteraient le besoin commercial. Il ne s'agirait pas d'un règlement non nécessaire que le gouvernement impose. Nous ignorons ce qu'il sera. Nous ne nous attendons pas à ce qu'il soit important, mais il reviendra à l'expéditeur et au terminal de le déterminer.
Le sénateur Buth : Merci d'avoir fourni des renseignements détaillés. Ils montrent vraiment ce que sera l'incidence.
J'ai une seule question et elle se rapporte aux droits. Quel type de consultations avez-vous déjà mené concernant la hausse des droits? Cela créera-t-il une véritable onde de choc dans l'industrie et chez les producteurs ou avez-vous déjà mené des consultations?
M. Hermanson : Nous avons mené des consultations lorsqu'il a été déterminé dans le budget 2010, je crois, que nos droits devraient mieux refléter les coûts. Nous avons mené des consultations exhaustives auprès de l'industrie. C'est là que j'ai fait allusion au fait que tous nos intervenants reconnaissaient que nous ne pourrions pas continuer à jouir d'un gel des droits, c'est tout simplement exagéré. Les intervenants ne s'entendaient pas tous sur le montant de la hausse et sur la question de savoir si nous devrions bénéficier d'un recouvrement complet des coûts et si nous devrions reconnaître plus un moins l'intérêt du public. Ce sont des débats qui pourraient persister maintenant que nous menons une deuxième ronde de consultations, mais à moins grande échelle, car nous devons maintenant consulter les parties prenantes concernant les droits pour nos services puisqu'ils seraient fixés en fonction des modifications que nous envisageons dans le projet de loi C-45.
Nous avons mené des consultations exhaustives dans le cadre desquelles on a reconnu que ce que nous faisons est utile et nécessaire. On a reconnu que nous aurions avantage à mieux évaluer nos services et à veiller à bien faire ce qu'il faut en raison de la hausse des coûts, et que si nous faisons quelque chose que nous ne devrions pas faire, qu'il n'y ait pas lieu de le faire au départ ou que ce soit quelqu'un d'autre qui doive le faire, il faudrait que la loi en tienne compte.
En révisant nos droits d'utilisateur et en révisant et en modifiant aussi la loi, nous espérons avoir le meilleur des deux mondes.
Le sénateur Callbeck : Êtes-vous responsable d'élaborer le modèle axé sur l'assurance?
M. Hermanson : Oui, nous avons déjà commencé à élaborer des modèles. Nous en avons étudié un certain nombre. Ce processus n'est pas terminé, mais les renseignements initiaux que nous avons reçus sont très prometteurs. De toute évidence, il y aura des économies de coûts et des économies administratives. Nous n'avons toujours pas déterminé le modèle exact que nous utiliserons, et lorsque nous déciderons, nous devrons tenir de plus amples consultations à cet égard.
Le sénateur Callbeck : On dirait que cela coûtera moins cher aux agriculteurs.
M. Hermanson : En effet, il semble que cela leur coûtera moins cher. En fait, il serait plus exact de dire que ce serait plus avantageux que « moins cher ».
Le sénateur Callbeck : Nous avons parlé de ces 20 millions de dollars et vous avez dit que la majorité de ces économies découle de l'élimination de l'inspection à l'arrivage. Qu'en est-il du reste?
M. Hermanson : Le programme de sécurité, l'élimination du Tribunal d'appel pour les grains, celle de l'enregistrement et de l'annulation, et celle des pesées de contrôle, réduiraient tous les coûts.
Le sénateur Callbeck : Vous avez mentionné que tout le monde a quelque chose à gagner dans ce cas — les contribuables, les agriculteurs, les intervenants de l'industrie. En gros, qu'est-ce que les agriculteurs ont à gagner?
M. Hermanson : Les agriculteurs ont des choses à gagner sur deux plans. Ils jouiront toujours du service dont ils ont besoin. Ils auront toujours le droit de présenter un échantillon. Ils auront le droit de se soumettre au classement et à la détermination des impuretés. J'utilise des termes techniques et je m'en excuse, mais le classement et la détermination des impuretés est ce que le ministre a mentionné comme étant la première inspection. Nous ne l'appelons pas normalement comme cela, mais cela pourrait être une meilleure façon de la décrire. Les producteurs jouiront toujours d'un programme de sécurité, alors ils bénéficieront de paiements garantis. Ils jouiront toujours de la protection que nous offrons par le truchement de l'inspection à la sortie, ce qui devrait assurer nos marchés.
Autrement dit, l'un des meilleurs attributs qu'un exportateur peut avoir sur le marché est d'être un fournisseur fiable. Les pays moins fiables obtiennent des prix moindres pour leurs grains et éliminent nombre de leurs débouchés commerciaux. Si nous pouvons maintenir cet accès au marché, cela profite assurément aux agriculteurs. En éliminant le coût de l'inspection obligatoire à l'arrivage, ils n'ont pas à s'inquiéter que les entreprises qui paient ces droits les leur imposent à eux, producteurs. Il y en a probablement bien d'autres. Je les ai nommés au hasard et ce sont les exemples qui me sont venus à l'esprit.
Le sénateur Callbeck : Lorsqu'il est question des 20 millions de dollars que cela permettra d'épargner dans tout le secteur, les agriculteurs en économiseront-ils la moitié? Avez-vous des données là-dessus?
M. Hermanson : C'est impossible à déterminer parce que, comme je l'ai mentionné, les parties concernées peuvent toujours demander une inspection à l'arrivage. Il y aurait des coûts, et nous ignorons combien cela coûterait. Je crois que nous avons probablement intérêt à examiner le montant global et à reconnaître qu'à ce stade, il est impossible de dire dans quels secteurs toutes les économies seront réalisées. Il est clair que les agriculteurs en feront, tout comme d'autres intervenants de l'industrie. Nous devrions être plus concurrentiels dans le marché, ce qui veut dire que nous devrions maintenir ou même accroître notre part du marché.
Le sénateur Callbeck : Du côté de l'inspection, vous avez dit que vous faites en sorte que la qualité réponde aux critères du marché d'exportation et du marché intérieur. Vous avez éliminé l'inspection à l'arrivage, alors vous allez inspecter les cargaisons qui sont exportées. Je vis dans l'Est canadien. Si les grains sont envoyés de l'ouest à l'est, ils ne seront pas inspectés comme s'il s'agissait d'exportations. Pourquoi?
M. Hermanson : La Commission canadienne des grains dispose actuellement d'un système d'inspection à l'arrivage et à la sortie pour les exportations, mais nous avons des responsabilités ayant une portée tant nationale qu'internationale, car nous sommes chargés d'assurer la surveillance des grains au Canada.
J'ai mentionné brièvement que nous sommes responsables de la salubrité du grain. Nous surveillons constamment les échantillons de grains partout au Canada. Nous commençons au moment des récoltes avec le Programme d'échantillons de récolte dans le cadre duquel nous recevons des échantillons des céréaliculteurs, non seulement de l'Ouest canadien, mais de partout au Canada. Nous analysons ces échantillons pour veiller à ce que les grains soient salubres, que les niveaux de micro-toxines ne soient pas au-dessus du niveau de tolérance, que les grains soient exempts de résidus de pesticides et qu'ils ne contiennent pas d'excédent de métaux lourds. C'est un rôle que nous avons joué et que nous continuerons de jouer. Le projet de loi C-45 n'y changera rien. Voilà pourquoi vous pouvez être certains que les grains utilisés dans les denrées alimentaires au Canada sont des grains salubres de qualité élevée.
Le sénateur Callbeck : Je ne comprends toujours pas pourquoi cela est fait pour les exportations et pas pour les cargaisons nationales.
M. Hermanson : M. Miles aimerait formuler un commentaire.
M. Miles : La Commission canadienne des grains a un Guide officiel du classement des grains, donc lorsque les producteurs livrent les grains aux silos primaires, ces transactions se font en fonction des règles qu'elle a fixées en s'appuyant sur des renseignements scientifiques comme les grades de grain pour chacun des produits dont elle est responsable.
Cette transaction a lieu lorsqu'un agriculteur livre son grain à un silo primaire. Une entreprise céréalière, le manutentionnaire des grains, assure ensuite le relais pour l'expédier du silo primaire au silo terminal. Le producteur a déjà reçu l'avantage du grade de la commission des grains. S'il y a un différend au silo primaire, il y a des clauses, comme M. Hermanson l'a signalé, sujettes au classement et à la détermination des impuretés par l'inspecteur, qui permettent d'envoyer un échantillon représentatif à la Commission qui arrêtera une décision contraignante concernant le grade pour le producteur et le silo primaire.
Lorsque les grains arrivent au silo terminal, on procède à une inspection à l'arrivage. L'entreprise céréalière l'a déjà payée au silo primaire. Dans bien des cas, elle expédie une cargaison à sa propre entreprise, et ils procèdent à la même évaluation.
Il y a 20 ans, les grains étaient envoyés de multiples silos dans tout le pays et il était souvent mis en commun dans des ports, alors les grains pouvaient venir d'un silo ou d'un autre, et les entreprises voulaient qu'un tiers décide que le grade qui avait été donné au grain canadien était juste.
Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Dans bien des cas, avec les silos à fort débit et de multiples capacités de chargement de 50 et 100 wagons, les entreprises s'envoient des cargaisons à elles-mêmes. Elles font cette évaluation lorsque les grains arrivent au silo terminal. En conséquence, du point de vue de l'inspection à l'arrivage et de la pesée, on juge qu'il s'agit d'un chevauchement des efforts qui n'est pas nécessaire. Du point de vue des exportations, la Commission continuera de faire l'inspection et l'évaluation de ces grains pour veiller à ce que les clients obtiennent ce qu'ils ont commandé. Voilà comment les grains circulent dans le système et comment la Commission canadienne des grains joue un rôle.
[Français]
Le sénateur Maltais : Bienvenue Monsieur Hermanson et vos collègues. C'est le matin des surprises. Dans votre mémoire, à la page 27 de la version francophone, je suis surpris d'apprendre que ça coûte moins cher d'expédier le grain via l'Est que par le Pacifique. Il y a un différentiel de trois dixième de 1 p. 100. Ce n'est pas gros. J'ai de la difficulté à le comprendre parce que c'est plus près, si on parle de la Saskatchewan, du Manitoba et de l'Alberta, d'envoyer le grain via le Pacifique que de le faire par le fleuve St-Laurent et de l'entreposer. Il y a une différence quand même assez importante si on considère le volume. Comment expliquer cela? Je croyais que ce ça coûtait moins cher par train que par bateau, surtout qu'il faut payer l'entreposage. Comment expliquez-vous cette différence?
Frédéric Seppey, directeur général, Direction de l'élaboration et de l'analyse des politiques, Agriculture et agroalimentaire Canada : Je comprends le point mathématique que vous mentionnez; vous référez au fait qu'à vrai dire, le coût est plus faible pour expédier vers l'Ouest d'un point central vers les Prairies. C'est moins cher pour expédier vers l'Ouest, si les frais d'expédition proposés vers l'Ouest sont de 1,82 $, si ces frais sont moins importants, ce 1,82 $ représente une plus grande proportion du coût d'expédition vers l'Ouest que vers l'Est.
On peut utiliser un exemple mathématique. Si le coût d'expédition vers le Pacifique est de deux dollars et que le coût d'expédition vers l'Est est de trois dollars et qu'aux fins du calcul, on dit qu'on aurait des frais d'un dollar, ça représente 50 p. 100 des frais d'expédition vers l'Ouest, mais seulement un tiers, soit 33 p. 100 des coûts vers l'Est.
À vrai dire, votre intuition est juste, ça coûte moins cher d'expédier vers l'Ouest que vers l'Est.
Le sénateur Maltais : Il aurait peut-être fallu placer une annexe parce que si un journaliste prend ce rapport, il n'aura pas votre explication. Je pense qu'il faudrait corriger ou clarifier cette situation parce que ça peut représenter beaucoup de dollars. Cela peut aussi laisser une mauvaise impression dans la population. Je pense que ça vaudrait la peine de le mettre en annexe parce que la presse va vous rentrer dedans à tout de bras.
Je ne savais pas qu'il y avait du grain de l'Est qui pouvait transiter vers l'Ouest. La sénatrice Callbeck a bien dit, si j'ai bien compris, je croyais que le grain de l'Ontario et du Québec était en circulation dans la province de l'Ontario et du Québec et était entreposé soit à Montréal, à Québec ou dans un port de Toronto. Je ne croyais pas que ça transitait. C'est la première fois que j'entends parler de ça. Pouvez-vous m'éclaircir cette situation? Je viens de l'apprendre.
[Traduction]
M. Hermanson : Je pense qu'il y a peut-être eu méprise. Il y a très peu de grains qui sont envoyés de l'Est à l'Ouest canadien, et pas parce que c'est impossible de le faire. Il y a des raisons économiques qui le justifient. Je crois qu'il est question du fait que les grains de l'ouest sont expédiés vers l'est en passant par le St-Laurent. En outre, d'habitude les grains de l'Est canadien sont envoyés vers l'est ou le sud. Les grains peuvent être envoyés vers l'ouest, mais cela n'arrive quasiment jamais.
Le sénateur Mahovlich : L'avenir est très imprévisible, et je me demandais ce que le gouvernement ou la Commission fera pour contrer le réchauffement planétaire. Nous sommes menacés de tempêtes de vent, d'inondations et de sécheresses. Cette année dans le Nord de l'Ontario, le maïs était de mauvaise qualité. Nous n'avons pas eu une goutte de pluie du mois d'août; il n'a pas plu pendant cinq semaines. Les dégâts causés par la tempête à New York nous rappellent qu'on ne peut pas prévoir. Ils s'inquiètent tous du réchauffement planétaire maintenant.
Le gouvernement se préoccupe-t-il du réchauffement planétaire?
M. Hermanson : Je ne suis pas climatologue et je ne peux pas parler de réchauffement planétaire. Cependant, vous m'avez donné l'occasion de parler du fait que nous évaluons de nouvelles variétés de grains que l'on cherche à faire enregistrer au Canada. Nous tenons compte du rôle que joue l'environnement dans l'apparition de nouvelles variétés. Nous devons veiller à ce qu'elles soient efficaces et qu'elles profitent non seulement aux producteurs, mais aussi aux utilisateurs finaux.
Je suis heureux de le mentionner parce que bien des gens ne reconnaissent pas que la Commission canadienne des grains évalue les nouvelles variétés qui lui sont présentées. C'est l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui est responsable de l'enregistrement des nouvelles variétés, mais c'est nous qui sommes responsables d'en évaluer l'incidence environnementale. Cela nous aide à remettre aux agriculteurs les variétés qui leur seront le plus utiles.
Le sénateur Mahovlich : Qu'en est-il de la construction des silos? Sont-ils loin de l'eau, près des rivières, ou loin des rivières et des lacs? Y a-t-il une règle ou une loi?
M. Hermanson : Non, les silos sont placés où ils ont besoin de l'être pour la manutention du grain. Les silos primaires se trouvent habituellement dans les Prairies. Il y a aussi des silos dans le centre et l'Est du Canada pour desservir les producteurs de là-bas. Les silos terminaux mis en place pour charger les navires doivent bien entendu se trouver dans les ports maritimes.
Le sénateur Merchant : J'ai une clarification. Peut-être pourriez-vous me dire rapidement pourquoi il était nécessaire de fermer le Tribunal d'appel pour les grains. Est-ce que cela minera les droits du producteur à un processus équitable?
M. Hermanson : C'est une excellente question. En fait, le Tribunal d'appel pour les grains n'examine presque aucune demande de réinspection et de changement de grade des producteurs.
Le Tribunal d'appel pour les grains compte trois membres. Le président du Tribunal est un inspecteur principal des grains de la Commission canadienne des grains qui ne participe pas aux processus d'inspection quotidiens que nous menons. Cette personne est, en quelque sorte, à l'écart des autres inspecteurs. Les deux autres membres du Tribunal sont choisis parmi un répertoire d'inspecteurs principaux et proviennent du secteur privé. Ils travaillent pour des sociétés comme Cargill, Viterra, Richardson, Paterson, Parrish & Heimbecker, et un certain nombre d'autres.
Comme nous faisons actuellement l'inspection à l'arrivage, nous plaçons une livraison de grains dans la première catégorie. Si l'une des parties n'est pas satisfaite du grade que nous lui avons accordé, elles peuvent appeler de la décision. Elles le feraient d'abord auprès de notre bureau régional. Nous en avons trois : un à Vancouver, un à Thunder Bay et l'autre à Montréal.
S'ils ne sont toujours pas satisfaits du grade que nous leur avons accordé, ils peuvent interjeter un autre appel auprès de l'inspecteur en chef des grains du Canada, qui a un petit bureau où travaillent des inspecteurs des grains très expérimentés. S'ils ne sont toujours pas satisfaits, ils peuvent se tourner vers le Tribunal d'appel pour les grains, et c'est l'ultime organe qui arrêtera une décision.
Au tribunal, si les deux inspecteurs du secteur privé s'entendent sur le grade, l'affaire est réglée; le grade qu'ils accordent aux grains est définitif. S'ils ne sont pas d'accord, c'est notre président qui tranchera.
L'inspection à l'arrivage ne sera plus un service obligatoire de la Commission canadienne des grains. Elle pourra toujours être faite, par contre, mais ce sera maintenant les entreprises qui évalueront le grade ou embaucheront un tiers du secteur privé pour ce faire. Ainsi, le processus d'appel est seulement inversé : au lieu de laisser la décision finale au secteur privé, il déterminera maintenant le grade dès le départ, au stade de l'inspection à l'arrivage. En cas de différend, c'est l'inspecteur en chef des grains du Canada, et non le Tribunal d'appel pour les grains, qui déterminera le grade définitif. Honnêtement, je crois que c'est la meilleure façon de procéder.
Le système actuel fonctionne, mais je crois que l'inspecteur en chef des grains, qui est l'inspecteur des grains le plus compétent au Canada, est probablement la meilleure personne à investir de cette autorité.
Le président : Avant de terminer et de poursuivre la séance à huis clos, je voudrais clarifier un point que le sénateur Mercer a soulevé au début de la réunion, auprès du deuxième panel. Il s'agit d'un document sur le processus de consultation.
M. Hermanson : Tout à fait, et il a été publié aujourd'hui.
Le président : Nous sommes les premiers à le recevoir. Merci. L'objectif de la consultation se trouve à la page 5, en français et en anglais.
Merci aux témoins.
(Le comité poursuit la séance à huis clos.)