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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 31 -Témoignages du 21 mars 2013


OTTAWA, le jeudi 21 mars 2013

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 4, pour examiner, en vue d'en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujet : les débouchés du marché), et pour examiner la proposition de l'Agence canadienne d'inspection des aliments visant à imposer un prix pour l'obtention d'un permis d'importation pour importer des produits du secteur des établissements non agréés par le gouvernement fédéral, conformément à la Loi sur les frais d'utilisation, L.C. 2004, ch. 6, par. 4(2).

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour aux témoins d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation et d'être venus nous parler des droits que perçoit le ministère.

Chers collègues, je vous invite à vous présenter. Nous passerons ensuite à l'exposé de nos témoins et aux questions. Je m'appelle Percy Mockler; je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je préside le comité.

Le sénateur Mercer : Je suis le sénateur Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, de Saint-Louis-de Kent au Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Tardif : Bonjour, je suis Claudette Tardif, de l'Alberta.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Catherine Callbeck, de l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Plett : Moi, je suis Don Plett, du Manitoba

La sénatrice Buth : JoAnne Buth, du Manitoba.

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, Québec.

Le président : Merci. Ce matin nous recevons, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, Mme Kristina Namiesniowski, sous-ministre adjointe à la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés.

[Traduction]

Nous accueillons aussi Frédéric Seppey, négociateur en chef et directeur général de la Direction des accords provinciaux et des négociations, et Fred Gorrell, directeur général du Secrétariat à l'accès aux marchés.

[Français]

Nous avons aussi, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, M. Paul Mayers, vice-président associé, Direction générale des politiques et des programmes.

[Traduction]

Nous recevons aujourd'hui deux groupes de témoins. Avec le premier, le comité poursuivra son étude des débouchés du marché. Le deuxième nous parlera des frais d'utilisation que perçoit l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Le greffier m'a informé que la sous-ministre adjointe fera l'exposé, après quoi les sénateurs pourront poser leurs questions.

[Français]

Kristina Namiesniowski, sous-ministre adjointe, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs. Nous sommes très heureux de pouvoir témoigner devant vous aujourd'hui. Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître dans le cadre de votre étude sur la recherche et l'innovation dans le secteur agricole canadien. Nous comptons vous parler de la façon dont la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, que je dirige, soutient l'industrie en tirant parti de nouveaux débouchés commerciaux. Pour ce faire, nous mettons l'accent sur des domaines précis. Nous cherchons à ouvrir l'accès aux marchés. Nous favorisons les échanges commerciaux fondés sur la science et nous aidons l'industrie à tirer profit de ces débouchés.

Puisque le président a déjà présenté les personnes qui m'accompagnent, je ne le ferai pas à nouveau. J'ajouterai cependant que Fred Gorrell et Frédéric Seppey travaillent dans mon organisation. Nous collaborons étroitement avec mon collègue, M. Mayers, de l'ACIA, et avec divers membres de son personnel.

[Français]

J'aimerais commencer en disant que le secteur agricole et agroalimentaire canadien est très dynamique. Chaque jour, ce secteur cherche activement de nouveaux marchés et débouchés commerciaux. Nos statistiques préliminaires sur les échanges commerciaux indiquent que ce secteur a connu, en 2012, sa meilleure année au chapitre des exportations.

[Traduction]

En effet, les exportations de produits agricoles et de produits de la mer canadiens, qui se chiffraient à 44,4 milliards de dollars en 2011, ont atteint 47,7 milliards de dollars en 2012, ce qui représente une hausse de 7,4 p. 100. Il s'agit d'un sommet sans précédent, que l'on doit surtout à la croissance des exportations d'huile et de graines de canola et de blé.

Ces sommes représentent aussi une part croissante des exportations vers les marchés émergents, contribuant ainsi à une diversification des échanges commerciaux avec d'autres pays que les États-Unis. Ainsi, en 2012, les États-Unis ont reçu un peu moins de la moitié de nos exportations, soit une diminution de 60 p. 100 depuis le début de la décennie.

Ces données sont évidemment porteuses de bonnes nouvelles pour l'industrie. Le mois dernier, le gouvernement a conclu une entente avec le Japon afin d'élargir l'accès au marché pour les bovins canadiens âgés de moins de 30 mois. Cet élargissement de l'accès devrait permettre de doubler la valeur des exportations potentielles du Canada vers le Japon et représenter jusqu'à 150 millions de dollars par année.

De plus, l'élimination du guichet unique de commercialisation du blé et de l'orge dans l'Ouest canadien permet maintenant aux agriculteurs de vendre leurs produits aux acheteurs de leur choix et de tirer profit des nouveaux débouchés.

De nouvelles tendances se dessinent à l'horizon, et elles devraient se traduire par de nouveaux débouchés commerciaux pour le secteur.

[Français]

Par exemple, les préoccupations croissantes que suscite, à l'échelle mondiale, la question de la sécurité alimentaire permettent au Canada de jouer, en tant que pays exportateur net, un rôle important dans l'alimentation mondiale.

[Traduction]

Par ailleurs, devant l'accroissement de la demande de produits alimentaires et les contraintes environnementales, les nouvelles applications de la biotechnologie deviennent de plus en plus nécessaires. Dans ce contexte, la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés joue un rôle central en aidant l'industrie à accéder à de nouveaux débouchés commerciaux, tant au Canada qu'à l'étranger, et à en tirer profit, tout en contribuant au renforcement d'un secteur agricole et agroalimentaire innovateur et vivant.

La capacité d'accéder aisément et librement aux marchés internationaux est essentielle au succès et à la compétitivité à long terme de l'industrie agricole et agroalimentaire canadienne; c'est aussi un élément clé du programme commercial dynamique du gouvernement fédéral. Pour appuyer ce programme, Agriculture et Agroalimentaire Canada s'emploie sans relâche à faire en sorte que nos producteurs et transformateurs puissent tirer parti des débouchés internationaux.

En complément des travaux du Canada à l'Organisation mondiale du commerce, le gouvernement poursuit ses négociations en vue de conclure des accords de libre-échange bilatéraux et régionaux, pour offrir de nouvelles occasions d'exportation au secteur agricole.

[Français]

Les accords de libre-échange sont essentiels pour les secteurs qui font face à des barrières tarifaires et non tarifaires comme ceux du porc, du bœuf, des céréales et des oléagineux.

La conclusion d'un accord économique et commercial global avec l'Union européenne est l'entreprise de négociation la plus ambitieuse jamais lancée par le Canada depuis l'Accord de libre-échange nord-américain. L'accord global présente un formidable potentiel pour le renforcement de nos relations commerciales qui sont déjà bien solides dans le secteur agricole.

[Traduction]

L'an dernier, le Canada s'est aussi joint aux pourparlers du Partenariat transpacifique, un accord commercial régional qui fait actuellement l'objet de négociations avec 11 pays. Des négociations sont également en cours avec un certain nombre d'autres partenaires commerciaux importants.

Pour mieux aider l'industrie à accéder à de nouveaux débouchés commerciaux à l'étranger, le gouvernement a mis en place un modèle unique de coordination des enjeux relatifs à l'accès aux marchés agricoles et agroalimentaires.

[Français]

En 2009, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a créé le Secrétariat de l'accès aux marchés afin de donner suite aux recommandations de l'industrie en faveur d'une meilleure coordination entre les différents niveaux de gouvernement et l'industrie afin d'accroître l'accès aux marchés.

[Traduction]

Il s'agit du secrétariat que dirige M. Gorrell.

[Français]

Le secrétariat fait office de guichet unique pour l'industrie, les provinces et les autres ministères en ce qui concerne les enjeux relatifs à l'accès aux marchés agricoles et agroalimentaires.

[Traduction]

Il coordonne les efforts de l'Équipe fédérale chargée de l'accès aux marchés, qui rassemble Agriculture et Agroalimentaire Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Cette équipe travaille à la réouverture, au maintien et à l'élargissement de l'accès pour les produits agricoles et agroalimentaires dans le monde entier.

Pour faciliter cette collaboration, certains membres du personnel de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada travaillent dans les bureaux du Secrétariat à l'accès au marché. Des experts techniques de l'Agence canadienne d'inspection des aliments ont également été déployés à l'étranger afin de rendre possible une intervention rapide sur le terrain en cas de problèmes concernant l'accès aux marchés.

Chaque année, à l'occasion de la réunion annuelle sur l'accès aux marchés, nous déterminons, avec l'industrie et les provinces, les marchés qui sont prioritaires, c'est-à-dire les marchés qui permettent d'atteindre des résultats durables au chapitre de l'accès.

Du fait que la négociation de ces accords a pour objectif d'accroître les possibilités pour les exportateurs agricoles canadiens, il se peut que d'autres barrières, prenant la forme de mesures non tarifaires, empêchent ces derniers de tirer profit de nouveaux débouchés commerciaux. Afin d'assurer un système robuste et des règles du jeu équitables, un commerce ouvert à l'agriculture doit reposer sur la science. À cette fin, nous travaillons à promouvoir et à appuyer des échanges commerciaux fondés sur la science, par l'élaboration et la mise en application de normes internationales.

Ces mesures sont particulièrement importantes lorsqu'on songe aux nouveaux débouchés commerciaux qui s'offrent à des produits agricoles novateurs. Comme de plus en plus de pays s'engagent à faire l'usage de ces technologies pour améliorer leurs aliments destinés à la consommation humaine ou animale et pour respecter d'autres exigences, il devient de plus en plus nécessaire de collaborer à l'échelle internationale pour trouver des façons de faciliter le libre- échange de ces produits novateurs. C'est pourquoi le Canada se fait le défenseur, à l'échelle internationale, d'une plus grande collaboration et d'un plus grand engagement à l'égard de la mise en œuvre de mesures de réglementation fondées sur la science avec, pour objectif, une amélioration de la transparence, de la prévisibilité et de l'efficacité des échanges commerciaux.

Une fois que l'accès aux marchés est assuré, nous aidons l'industrie à tirer le meilleur parti de ces nouveaux débouchés. Nos agents et nos spécialistes du secteur, de partout au Canada, collaborent étroitement avec l'industrie pour soutenir chacun des différents secteurs concernés.

[Français]

Les renseignements sur les marchés, comme les données commerciales et la recherche axée sur la clientèle, aident l'industrie à exploiter tout le potentiel de ces occasions.

[Traduction]

Au moyen de rapports publiés tout au long de l'année, nous offrons à l'industrie des données sur les tendances du marché et les tendances en matière de consommation, comme la taille du marché, les changements d'attitude chez les consommateurs et les nouveaux produits introduits par les concurrents.

Les délégués commerciaux, qui assurent un soutien sur le terrain dans les marchés clés, jouent un rôle essentiel pour ce qui est de favoriser l'établissement de liens entre les entreprises, d'acquérir et de diffuser des renseignements sur les débouchés d'exportations et de proposer des pistes commerciales à l'industrie.

[Français]

La promotion des produits canadiens dans les nouveaux marchés contribue à faire connaître notre industrie. En utilisant la marque Canada, l'industrie aide les produits alimentaires canadiens à se distinguer de leurs concurrents, accroître leur visibilité, et contribue à soutenir les ventes du secteur.

[Traduction]

Enfin, nous aidons l'industrie à exploiter de nouveaux débouchés commerciaux grâce au financement d'activités et de missions à l'étranger par l'entremise du programme Agri-marketing, offert aux associations nationales et aux petites et moyennes entreprises.

La nouvelle version du programme Agri-marketing se poursuivra dans le cadre de notre programme fédéral- provincial-territorial intitulé Cultivons l'avenir 2, qui devrait être lancé en avril. Pour qu'il soit efficace, nous ne pouvons faire ce travail sans collaborer avec l'industrie. Nous travaillons continuellement avec nos partenaires de l'industrie pour nous assurer que l'approche que nous adoptons est cohérente et coordonnée.

Nous employons différents mécanismes pour faire participer l'industrie. Parmi ceux-ci, les plus importants sont nos tables rondes sur les chaînes de valeurs, qui rassemblent des producteurs, des transformateurs, des détaillants, des ministères du gouvernement fédéral et des administrations provinciales, afin de déterminer les débouchés offerts sur les marchés et d'élaborer des stratégies de collaboration qui leur permettront de relever les défis commerciaux.

Pour terminer, j'aimerais souligner que lorsque nous entreprenons ces activités, nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues du gouvernement fédéral, les membres de l'industrie et les gouvernements provinciaux. C'est en conjuguant l'ensemble de nos efforts que nous pourrons obtenir les meilleurs résultats possibles pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien.

[Français]

Nous apprécions l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de comparaître devant vous et nous nous ferons un plaisir d'essayer de répondre à toutes vos questions.

[Traduction]

Le président : Merci beaucoup, madame Namiesniowski.

Le sénateur Plett : Je tiens à vous remercier tous pour votre présence ce matin.

J'ai deux questions à vous poser. Dans votre exposé, vous n'avez pas parlé de l'étiquetage du pays d'origine. Il y a eu récemment quelques problèmes à cet égard. Pourriez-vous nous expliquer comment nous composons avec ces problèmes, et s'il y a moyen pour nous d'amener les États-Unis à adopter notre point de vue?

Mme Namiesniowski : Vous savez, je crois, que le Canada et le Mexique ont contesté les règles de l'étiquetage du pays d'origine auprès de l'OMC, et le comité d'examen et l'organe d'appel ont statué en faveur du Canada. Les États- Unis ont jusqu'au 23 mai pour répondre à la décision de ces organes de l'OMC.

Entretemps, le Canada a exercé des pressions sur le gouvernement américain en exprimant très clairement nos attentes en ce qui concerne la réponse à cette décision. Voici nos attentes : nous estimons que, pour être conforme aux règles, le gouvernement américain doit adopter des mesures législatives. À cet égard, nous avons toujours communiqué le même message au gouvernement américain.

Jusqu'à maintenant, les États-Unis ont en revanche choisi de ne pas adopter de loi, mais plutôt de procéder par règlement. Récemment, ils ont introduit un avis de projet de réglementation, lequel n'est pas suffisant à nos yeux. En fait, nous pensons qu'il pourrait même entraîner encore plus de discrimination contre notre industrie.

Le Canada œuvre en vue de répondre formellement au règlement, tout comme d'autres pays, dont le Mexique. Nous examinons certainement toutes les mesures éventuelles de rétorsion que nous pourrons prendre pour pousser le gouvernement américain à s'orienter de manière à se conformer à la décision. Selon moi, il est juste de dire que cela prendra un certain temps, mais nous espérons, entretemps, que les États-Unis nous écouteront et qu'ils répondront de manière positive aux exigences stipulées par l'OMC.

Le sénateur Plett : Le ministre a fait, et continue de faire, un excellent travail dans ce dossier. Dans ses commentaires, il a également parlé de rétorsion. Pourriez-vous nous dire quels genres de mesures que nous pourrions prendre en guise de rétorsion?

Mme Namiesniowski : Je vais demander à mon collègue, M. Seppey, de vous donner plus de renseignements.

Frédéric Seppey, négociateur en chef et directeur général, Direction des accords commerciaux et des négociations, Agriculture et Agroalimentaire Canada : En fait, comme l'a indiqué la sous-ministre adjointe, les États-Unis ont été jugés incompatibles avec leurs obligations dans le cadre de l'OMC. Ils ont jusqu'au 23 mai pour se conformer au règlement de l'OMC. Nous doutons qu'ils le fassent d'ici là, étant donné la nature du règlement proposé.

Ensuite, nous aurons un certain nombre d'options à notre disposition à l'OMC. Par exemple, si les États-Unis ne se conforment pas d'ici le 23 mai, nous pouvons demander la constitution d'un groupe spécial sur la compatibilité, c'est-à- dire la mise sur pied d'un groupe d'experts qui viendrait confirmer fort probablement que les États-Unis ne sont pas en conformité. Ensuite, s'ils sont toujours jugés incompatibles, le Canada aura le droit d'invoquer le droit de rétorsion dans le cadre de l'OMC.

Nous n'avons pas besoin d'attendre jusque-là pour consulter les intervenants canadiens afin de déterminer les marchandises dont nous pourrions viser en cas de rétorsion, le moment venu. C'est ce que nous sommes en train de faire actuellement.

Par le passé, dans quelques cas semblables, nous avons pris des mesures pour nous préparer en vue de représailles. La plupart du temps, nous n'avons pas eu à aller jusqu'au bout des représailles, car le fait d'indiquer notre intention avait suffi à pousser l'autre partie à se conformer, qu'il s'agisse des États-Unis avec l'amendement Byrd ou le Brésil, dans le cas de son programme de subventions à l'exportation pour venir en aide à son industrie aéronautique.

Ce que nous aurions le droit de faire, c'est d'imposer des surtaxes sur un certain nombre de marchandises qui sont importées des États-Unis, jusqu'à concurrence d'une valeur qui devra être établie par un groupe spécial chargé des mesures de rétorsion, en fonction de la valeur du tort causé.

Vous savez peut-être que l'industrie évalue à environ 1 milliard de dollars les retombées de l'étiquetage indiquant le pays d'origine sur les industries porcine et bovine au Canada.

Nous sommes en train d'examiner quelles marchandises pourraient éventuellement être inscrites à une liste de rétorsion. Toutefois, quand on dresse cette liste, il faut tenir compte de plusieurs facteurs. Par exemple, étant donné qu'un certain nombre d'industries canadiennes dépendent d'intrants venant des États-Unis pour produire leurs produits, nous essayons de ne pas inclure ces produits de base, mais il y a un certain nombre de produits qui, si nous venions à imposer une surtaxe sur ces éléments, enverraient un message clair aux États-Unis, à savoir que nous prenons cette question au sérieux et qu'elle a une incidence sur nos intérêts en matière d'exportation.

Le sénateur Plett : Je comprends, et je suis convaincu que c'est tout ce que nous pouvons faire. Ce genre de mesure de rétorsion pourrait envoyer un message clair aux États-Unis, mais n'aiderait en rien les éleveurs de porcs touchés. Ils seraient toujours pénalisés. Des mesures de rétorsion n'aideraient en rien les agriculteurs.

M. Seppey : Vous avez tout à fait raison. Les mesures de rétorsion ne sont jamais la meilleure solution, mais plutôt une solution de second choix. Elles ne compensent jamais les dommages causés par la mesure d'origine. C'est pourquoi les mesures de rétorsion ne sont qu'un des outils à notre disposition pour remédier à la situation. Nous continuons de déployer des efforts soutenus pour influencer les décideurs, sachant que le processus décisionnel relève surtout du Congrès, en tant que législateur. C'est ce que nous nous employons à faire.

Cependant, un avis d'intention d'imposer des mesures de rétorsion est un moyen efficace de convaincre les décideurs que cette mesure nuit véritablement aux intérêts canadiens et qu'il n'est peut-être pas non plus dans l'intérêt des États- Unis de conserver une mesure qui ne respecte pas pleinement leurs obligations internationales.

Nous envisageons toute une série de mesures pour convaincre les États-Unis de modifier la mesure législative de sorte qu'elle soit conforme. C'est le principal objectif. Nous avons divers outils à notre disposition pour essayer d'influencer les décideurs au Congrès.

Le sénateur Plett : J'ai une question supplémentaire sur la traçabilité, depuis l'exploitation agricole jusqu'au port : dans quelle mesure est-ce faisable et important?

Mme Namiesniowski : C'est important. Par rapport à d'autres pays, nous considérons que l'industrie canadienne a enregistré d'énormes progrès dans la mise en œuvre de mesures permettant de retracer l'origine des produits.

J'ai eu le plaisir d'accompagner le ministre au Japon récemment. L'un des points qu'il a systématiquement fait valoir auprès des représentants japonais que nous avons rencontrés, c'est la solidité du système canadien. Est-il parfait? Probablement pas — selon moi, aucun système ne l'est —, mais on peut certainement affirmer qu'en ce qui concerne l'approche du Canada à l'égard de la sécurité de son approvisionnement alimentaire, la traçabilité est un élément extrêmement important, notamment pour nos collègues à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. M. Mayers pourrait avoir d'autres observations à formuler.

Paul Mayers, vice-président associé, Direction générale des politiques et des programmes, Agence canadienne d'inspection des aliments : Nous considérons que la traçabilité contribue énormément à faciliter l'intervention en cas de problèmes; par exemple, lorsqu'il est question de santé animale, on veut rapidement limiter le problème pour montrer à nos partenaires commerciaux qu'il a été circonscrit afin de rapidement regagner l'accès à nos marchés.

En ce qui concerne le retrait du marché des produits qui pourraient poser un risque pour les consommateurs, la Loi sur la salubrité des aliments au Canada nous a ouvert des portes en créant un nouveau pouvoir en ce qui concerne la traçabilité dans le système alimentaire. Il s'agit, pour nous, d'une occasion extraordinaire.

La sénatrice Eaton : Monsieur Mayers. Il y a une question à laquelle le professeur Charlebois n'a pas pu répondre hier lorsque nous discutions de la traçabilité des aliments. Cette mesure fera-t-elle partie des négociations d'un accord de libre-échange au PTP ou même avec l'UE? Est-ce qu'on a soulevé la question?

M. Mayers : La question de la traçabilité n'est pas nouvelle dans le contexte des négociations.

L'approche que nous avons adoptée en ce qui concerne la traçabilité concerne les problèmes au niveau du système. Qu'une administration donnée applique ou non des mesures de traçabilité n'est pas en soi particulièrement important. Nous mettons plutôt l'accent sur la question de savoir si le système dispose des outils nécessaires pour offrir les protections dont nous avons besoin, parce qu'il a plus d'une façon d'atteindre le même niveau de protection.

La sénatrice Callbeck : J'aurais des questions concernant la stratégie de la marque Canada qui a été lancée. Il s'agit d'une initiative tant nationale qu'internationale. Du côté national, depuis combien de temps le programme est-il en vigueur, et comment les Canadiens sont-ils mis au courant?

Mme Namiesniowski : L'initiative de la marque Canada, à ma connaissance, en est à sa quatrième année. L'Initiative de promotion de la marque Canada, pour sa part, a reçu du financement sur cinq ans, et nous en sommes à la quatrième année; ce sera la cinquième l'an prochain.

Vous avez raison; cette stratégie comporte un volet national et un volet international.

Nous avons accompli beaucoup de travail dans la promotion de la marque Canada, qui est un outil de commercialisation. Par exemple, le logo de la marque Canada occupe une place de choix dans les salons internationaux et au pavillon canadien qui s'y trouve. La marque Canada a ses utilisateurs autorisés. En fait, nous avons atteint la barre des 500 utilisateurs autorisés. Ceux-ci ont le droit d'utiliser le logo de la marque Canada.

En ce qui concerne les activités de promotion à l'échelle nationale, nous avons collaboré avec divers petits épiciers de partout au pays pour faire de la promotion en magasin leur permettant d'afficher — je ne veux pas utiliser le mot « étiqueter » en raison de la connotation différente que pourrait y attribuer votre comité — ce qu'on appelle des étiquettes promotionnelles à support. Il s'agit d'affichettes autocollantes qui indiquent les produits canadiens en magasin afin que les consommateurs puissent les repérer facilement sur les tablettes. Nous avons recours à la même stratégie dans les marchés étrangers.

La sénatrice Callbeck : Vous avez dit qu'il y avait 500 utilisateurs autorisés de la marque Canada. Supposons qu'un utilisateur autorisé vende cinq produits différents; a-t-il le droit d'utiliser l'appellation pour ces cinq produits? Y a-t-il certains critères qui doivent être respectés auparavant?

Mme Namiesniowski : Faites-vous référence au contenu du produit?

La sénatrice Callbeck : Oui.

Mme Namiesniowski : Au Canada, certaines exigences en matière d'étiquetage des produits concernent le contenu d'ingrédients canadiens. Les règles permettant aux entreprises canadiennes d'indiquer le contenu canadien permettent une certaine flexibilité en ce qui concerne l'étiquetage. Ce sont les entreprises qui s'en chargent.

Du point de vue des consommateurs, ils peuvent facilement reconnaître les produits canadiens.

La sénatrice Callbeck : Savez-vous si ce programme est efficace auprès des consommateurs canadiens, ou dans quelle mesure il l'est?

Mme Namiesniowski : Je n'ai pas ces renseignements sous la main, mais nous pourrions les fournir au comité. Nous avons effectué une analyse des répercussions et de la portée du programme de promotion de la marque Canada pour connaître son effet sur les consommateurs.

Selon ce que j'en comprends, si les consommateurs canadiens sont mis au courant de la présence d'un produit canadien sur les tablettes, ils seront plus susceptibles d'acheter le produit canadien plutôt qu'un produit d'un autre pays. Pour nous, c'est une réussite.

La sénatrice Callbeck : Puisqu'il s'agit d'un programme quinquennal, une évaluation sera-t-elle effectuée avant la fin des cinq années pour déterminer si le programme doit être reconduit? Est-ce qu'on procède à une évaluation seulement après cinq ans?

Mme Namiesniowski : Pour ce qui est de la promotion de la marque, le ministère a évalué le développement des marchés, ce qui comprend la stratégie de marque. Quant à l'Initiative de promotion de la marque Canada, je crois que les produits nécessaires sont maintenant disponibles et que le secteur peut les utiliser.

En ce qui a trait au matériel promotionnel supplémentaire, une fois ces cinq années écoulées, nous ne créerons probablement pas de nouveaux produits. Nous aurons recours aux étiquettes et au matériel promotionnel existants et nous continuerons de les mettre à la disposition du secteur.

Grâce au nouveau cadre stratégique Cultivons l'avenir 2 et au programme Agri-marketing, le secteur pourra maintenant tirer profit de ces derniers à des fins de commercialisation nationale, ce qui n'était pas possible auparavant. Nous croyons que c'est une mesure positive qui permettra au secteur d'avoir accès à des outils qu'il pourra utiliser au pays ainsi qu'à l'étranger.

La sénatrice Buth : Au moment où nous négocions de nouveaux accords de libre-échange et que nous éliminons les tarifs douaniers, et au fur et à mesure que les pays se soucient davantage de la salubrité alimentaire et du protectionnisme, de plus en plus de barrières non tarifaires surgissent. Pourriez-vous nous dire brièvement où nous en sommes quant au problème de la jambe noire du canola, une question que je connais bien, mais, plus important encore, pouvez-vous nous dire ce que vous faites pour éviter les barrières commerciales non tarifaires? À quelles stratégies et techniques avez-vous recours?

Mme Namiesniowski : Je vais demander à mon collègue, M. Gorrell, de vous parler en détail de la jambe noire.

J'aimerais faire un commentaire sur les stratégies que nous utilisons. Nous avons activement recours à nos délégués commerciaux pour nous représenter dans les marchés. Grâce à eux et à nos institutions canadiennes internationales à l'étranger, soit les ambassades, nous surveillons de près les mesures législatives et réglementaires que les pays envisagent d'adopter et qui pourraient avoir une incidence sur notre capacité de percer les marchés. Grâce à la promotion et à d'autres stratégies, nous surveillons la situation afin d'essayer d'influencer les gouvernements étrangers pour qu'ils n'érigent pas de barrières non tarifaires susceptibles de nuire à notre capacité d'exporter nos produits.

Je dirais que ce mécanisme est une de nos stratégies clés. M. Gorrell peut maintenant nous parler de la jambe noire en particulier.

Fred Gorrell, directeur général, Secrétariat à l'accès aux marchés, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Bien entendu, madame la sénatrice, vous êtes bien au fait de ce problème. Notre objectif a toujours été de laisser le marché ouvert, surtout en ce qui a trait à la Chine, qui nous rapporte entre 1,5 et 1,8 milliard de dollars par année. Nous travaillons avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le groupe de la protection des végétaux et nos collègues aux Affaires étrangères. Nous avons maintenu l'ouverture du marché et nous espérons pouvoir enfin terminer, cette année, la recherche que nous avons entreprise pour prouver que le canola canadien ne peut pas transmettre la jambe noire en Chine.

Nous avons assujetti les graines de canola à des traitements thermiques et, une fois broyée, la jambe noire est détruite et ne représente pas de risque pour la Chine. Les Chinois nous ont indiqué qu'ils sont enchantés des résultats que nous avons obtenus jusqu'à présent, et tout laisse croire qu'ils approuveront la construction d'une usine de trituration dans les régions où pousse le colza, près du fleuve Yangtze.

Il s'agit d'un important changement de politique de la part des Chinois. Au cours des trois ou quatre dernières années, ils ont limité notre accès à des régions qui nous étaient interdites par le passé. S'ils vont de l'avant, cela corroborera nos recherches, et nous espérons avoir accès aux marchés et aux usines de trituration, comme avant.

Il importe aussi de souligner que la Chine a approuvé la construction de nouvelles usines de trituration; le marché peut donc accepter environ 4 millions de tonnes de canola importé. Le seuil maximal d'exportations du Canada vers la Chine a été de 2,9 millions de tonnes. La quantité de canola canadien que la Chine peut accepter a maintenant atteint un sommet historique.

Comme vous l'avez dit au début et comme la sous-ministre adjointe l'a également indiqué, les barrières non tarifaires demeureront un problème pour nous. Toutefois, je crois que nos mécanismes, tant par l'entremise du Secrétariat à l'accès aux marchés que de l'équipe interministérielle plus large, nous permettent de réagir de façon très coordonnée et globale. Nous espérons pouvoir réduire au maximum ces barrières non tarifaires à l'avenir.

La sénatrice Buth : Pouvez-vous expliquer comment vous collaborez avec le secteur privé et quel rôle celui-ci joue?

M. Gorrell : C'est une bonne question parce qu'on entend souvent parler de tout ce que fait le gouvernement. Au cours des dernières années, nous avons conclu ce que j'appelle un partenariat presque complet avec l'industrie et les provinces afin de déterminer comment réagir.

Grâce à ses négociants, l'industrie a une capacité que nous n'avons pas et à laquelle nous avons recours, soit sa capacité de colliger des renseignements. Parallèlement, quand nous prenons des décisions et que nous examinons notre stratégie, nous sommes conscients du fait que, comme M. Mayers le sait, nous réglementons l'industrie, mais ce n'est pas nous qui prenons les risques; ainsi, l'industrie doit être au fait des pourparlers quand nous prenons nos décisions.

Vous constaterez que l'industrie peut librement communiquer avec nous, mais elle participe également aux discussions quant à l'avenir de la stratégie. Nous sommes conscients que c'est l'industrie qui doit composer avec l'incidence des mesures prises ou laissées de côté; elle fait donc partie intégrante de l'équipe.

La sénatrice Buth : L'industrie a souvent soutenu qu'elle appuie le Secrétariat à l'accès aux marchés. Étant donné que nous sommes en période de restrictions budgétaires et que tout le monde doit faire des économies, que faites-vous au sein du ministère pour conserver le financement alloué à l'accès aux marchés? Avez-vous assez de ressources?

Mme Namiesniowski : La réponse à cette question est toujours la même : nous avons les ressources que le gouvernement juge nécessaire de nous donner pour faire notre travail.

J'ai mentionné à quelques reprises ce matin que le cadre stratégique Cultivons l'avenir 2 reconnaît l'importance du Secrétariat à l'accès aux marchés. Pour la première fois, nous avons du financement voué à cette fin, ce qui m'enchante énormément.

Je crois que vous avez tout à fait raison quant à l'appui de l'industrie au secrétariat. En fait, le secrétariat a été créé en grande partie pour répondre aux demandes de l'industrie d'avoir accès au gouvernement selon une approche intégrée de guichet unique pour réagir de façon rapide et cohérente aux défis qui l'empêchent d'atteindre son potentiel d'exportations vers d'autres marchés.

J'occupe mon poste au ministère depuis assez peu de temps, mais les représentants de l'industrie secteur me disent constamment que l'Équipe chargée de l'accès aux marchés est des plus productives et qu'elle joue un rôle clé dans la réussite du secteur. Je crois que les collègues d'autres ministères appuient énormément M. Gorrell et son équipe. Le secrétariat compte du personnel de l'ACIA. Ainsi, quand on porte à notre attention un problème qui nécessite une solution, nous pouvons réagir de façon rapide et efficace.

Le sénateur Robichaud : Dans la même veine, si vous pouviez avoir davantage de ressources dans votre ministère, cela voudrait dire que vous pourriez faire encore beaucoup plus de travail, n'est-ce pas? Vous n'avez pas besoin de répondre.

M. Gorrell : Si vous me le permettez, sénateur, c'est une bonne question. On a tendance à croire qu'avec davantage de ressources, on peut faire plus; toutefois, nous avons appris qu'une meilleure coordination nous permet d'en faire plus. Grâce à une meilleure coordination entre les ministères, les organismes et les portefeuilles, nous nous débrouillons maintenant extrêmement bien.

C'est un défi, parce que nous avons chacun nos mandats, mais je pense que l'essentiel, c'est qu'une meilleure coordination et une meilleure collaboration avec l'industrie et les provinces nous permettront d'aller plus loin qu'une simple affectation de ressources supplémentaires. Je vous remercie quand même, sénateur.

Le sénateur Robichaud : Vous seriez un bon politicien.

Le sénateur Mercer : Merci pour votre exposé; c'était très instructif.

J'aimerais revenir à la question initiale du sénateur Plett. Je n'ai pas interrompu en posant une question complémentaire à ce moment-là parce que je voulais entendre la réponse.

L'étiquetage du pays d'origine pose problème, mais vous avez semblé indiquer, monsieur Seppey, qu'il y a espoir que le Congrès des États-Unis puisse trouver une solution. Je suis rentré récemment d'un voyage à Washington avec le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis. Nous avons rencontré environ 50 membres du Congrès en deux jours. Nous n'avons pas parlé uniquement d'agriculture, puisque nous discutions essentiellement de l'exportation du pétrole, mais lorsque nous avons abordé l'agriculture et l'étiquetage du pays d'origine, j'ai vu qu'il n'y avait aucune volonté de leur part de changer les choses.

Je sais aussi que si l'on examine la situation actuelle, on constate que le Congrès américain n'a adopté aucune loi importante depuis des années. Le Congrès se trouve dans une impasse, puisqu'une chambre est contrôlée par les républicains et que l'autre, par les démocrates. Par exemple, un projet de loi agricole est mort au Feuilleton à force d'avoir été reporté.

J'espère que vous vous fondez sur de meilleurs renseignements que ce que j'avais lors de mon séjour à Washington. Nous étions accompagnés de fonctionnaires de l'ambassade, et ils ont pu constater que tout n'est pas rose. Chaque fois que nous utilisons l'expression « mesure de rétorsion » relativement à un secteur primaire, ça me rappelle le dossier du bois d'œuvre. Les gouvernements — peu importe lesquels — disent que nous avons remporté cette bataille, mais nous avons quand même laissé 1 milliard de dollars sur la table aux personnes qui luttaient contre nous afin qu'ils puissent reprendre la bataille. Je suis très nerveux, lorsqu'il s'agit de mesure de rétorsion, puisqu'il faut voir si nous avons retenu des leçons de notre débat sur le bois d'œuvre, qui pourrait survenir de nouveau. Je ne pense pas que l'étiquetage du pays d'origine figure sur le programme des parlementaires américains.

Avez-vous une opinion à ce sujet, monsieur Seppey?

M. Seppey : Il y a un certain nombre de choses qui sont sûres relativement à l'étiquetage du pays d'origine. Premièrement, cette mesure est tout à fait incompatible avec les obligations des États-Unis imposées par l'OMC, comme cela a été prouvé par un groupe d'experts et l'organe d'appel de l'OMC. Voilà un élément de certitude.

Le deuxième élément de certitude, c'est que cela nuit considérablement à notre industrie de la viande.

Il y a aussi une troisième quasi-certitude : s'il n'y a aucune pression de la part des partenaires commerciaux ni des membres du Congrès ayant de l'influence, les sénateurs ou les représentants, il sera difficile de changer les choses.

En réponse à la question antérieure du sénateur Plett, il est clair que c'est une question complexe parce que, d'une part, les mesures de rétorsion ne seront jamais la meilleure façon d'aborder les préoccupations de notre industrie, mais d'autre part, si nous échouons à obtenir des changements, nous ne voulons pas que les choses restent telles quelles et que les États-Unis s'en tirent à bon compte.

C'est pourquoi nous avons une approche à volets multiples. À l'heure actuelle, nous avons l'occasion de présenter des observations sur le règlement proposé. Nous avons jusqu'au 11 avril pour faire part de notre point de vue. Nous travaillons de près avec l'industrie, le Conseil canadien du porc, les bouviers et le Conseil des viandes du Canada pour nous assurer que nos observations sont bien coordonnées avant de les présenter aux États-Unis, et nous espérons qu'elles pourront être reçues. Nous coordonnons également de près nos activités avec celles du gouvernement mexicain, parce que le Mexique est tout aussi touché par cette mesure et qu'il en est tout aussi insatisfait. Nous essayons de convaincre les États-Unis de changer leurs mesures. Nous exercerons nos droits conférés par l'OMC le plus tôt possible si les États-Unis ne se conforment pas à leurs obligations d'ici le 23 mai.

Toutefois, les mesures de rétorsion peuvent être un outil efficace. L'indication que nous avons l'intention de prendre des mesures de rétorsion, si nous nous rendons là, pourrait avoir une certaine influence sur le Congrès. J'ai parlé de l'amendement Byrd; c'était un élément clé. À l'époque, nous avons publié un avis dans la Gazette du Canada indiquant soigneusement le type d'articles tarifaires que nous envisagions d'inscrire à la liste des mesures de rétorsion ou bien le type d'obligations aux termes des accords de l'OMC que nous étions prêts à suspendre.

Le sénateur Mercer : Est-ce que cet avis a été rendu public?

M. Seppey : Oui, c'était un avis d'intention d'avoir recours à des mesures de rétorsion qui a été publié lorsque l'amendement Byrd a été adopté, soit vers 2003-2004. Une fois que les Américains avaient mis cette mesure en place, c'était une situation semblable à celle de l'étiquetage du pays d'origine. Il a été déterminé que les États-Unis étaient en violation de leurs obligations de l'OMC. Nous avons publié un avis dans la Gazette du Canada. Nous avions consulté des intervenants au sujet d'une liste possible de produits ou de choses qui pourraient servir de mesures de rétorsion. Cette indication a suffi à influencer les principaux décideurs au Congrès. C'est ce qui les a amenés à se conformer.

C'est un des outils dont nous disposons, et lorsqu'on parle de préjudice, notre droit de rétorsion est directement proportionnel à la valeur du préjudice. Cette valeur devra être déterminée par un groupe spécial de l'OMC, mais nous parlons d'un montant de près de 1 milliard de dollars. Un milliard de dollars en échanges commerciaux, ce n'est pas rien, surtout si cela touche des produits propres à certains États et à certains districts électoraux. Voilà le type d'analyse auquel nous nous adonnons actuellement, et nous savons que nos partenaires commerciaux songent à adapter les mesures de rétorsion de la façon la plus stratégique possible, si jamais nous devons en arriver là.

Le sénateur Mercer : Je veux vous indiquer clairement que j'appuie vos efforts à cet égard. Vous pourriez peut-être, par l'entremise du greffier, nous faire parvenir cette liste. Je suis certain que nous en avons peut-être pris connaissance à un moment donné, mais si c'est un document public, il serait bien d'y jeter un second regard.

Je sais que vous pouvez attirer l'attention du secrétaire de l'agriculture des États-Unis assez rapidement. C'est plutôt avec les autres acteurs que vous pourriez avoir des problèmes.

Ma dernière question porte sur l'étiquetage du pays d'origine, mais également sur la marque Canada. N'est-il pas contradictoire d'être contre l'étiquetage du pays d'origine, alors que nous faisons la promotion de la marque Canada et que nous sommes fiers qu'elle compte maintenant 500 membres? Nous disons essentiellement : « Collons des feuilles d'érable sur les produits de 500 entreprises différentes », mais nous ne voulons pas d'étiquetage du pays d'origine sur nos produits agricoles aux États-Unis? S'agit-il d'une incohérence? C'est peut-être une question trop politique pour que vous puissiez y répondre.

M. Seppey : Je pense que la question est très pertinente. Je voudrais faire remarquer que la caractéristique clé du programme d'étiquetage indiquant le pays d'origine est qu'il est obligatoire. Les usines de transformation de la viande aux États-Unis doivent apposer une étiquette qui indique clairement l'origine, ce qui est une exigence très normative et fastidieuse. La nature discriminatoire de ces exigences strictes, qui n'existent pas au Canada de la même façon, crée une véritable distorsion. Cela décourage les transformateurs de viande américains de tirer le meilleur parti du marché nord- américain intégré de la viande. L'organisation est telle que le bétail né au Canada, engraissé aux États-Unis, revient de nouveau de ce côté-ci de la frontière. C'est très complexe et intégré. Étant donné l'exigence d'étiqueter selon le pays d'origine, les transformateurs de viande doivent changer leur exploitation et à vrai dire, les usines américaines ne sont pas incitées à transformer du bétail ou de la viande provenant de carcasses canadiennes. Voilà le défi. Des groupes d'experts à l'OMC en ont conclu qu'il s'agissait là d'une mesure discriminatoire, et voilà pourquoi la règle proposée, qui semble accentuer le facteur discriminatoire, ne fait, à notre avis, qu'augmenter l'incohérence de la mesure, telle que proposée, étant donné l'obligation des États-Unis dans le cadre de l'OMC.

Le sénateur Plett : Je vous remercie de cette réponse. Je viens d'une région qui compte énormément sur l'agriculture et l'élevage, plus particulièrement celui du porc. Vous avez dit, dans vos remarques, que vous étiez en contact avec le Conseil canadien du porc. Ce faisant, aidez-vous les divers conseils à profiter de certaines mesures de rétorsion?

M. Seppey : Oui, absolument. En fait, par le passé, quand le gouvernement canadien envisageait la possibilité d'imposer des mesures de rétorsion, il y a toujours eu un avis publié dans la Gazette du Canada invitant la réaction d'un grand nombre d'intéressés afin de veiller à ce que ceux qui seraient potentiellement touchés expriment leurs points de vue. Dans le cas de l'étiquetage indiquant le pays d'origine, à part la publication dans la Gazette du Canada, comme je viens de le dire, nous consultons toujours très étroitement les trois grandes organisations, soit le Conseil des viandes du Canada, le Conseil canadien du porc et l'association des éleveurs; nous les invitons à réagir et, au besoin, à protester ou à envisager des mesures juridiques afin que nous comprenions pleinement l'incidence de mesures de rétorsion pour ces organisations et leurs membres, mais aussi afin que nos efforts soient les plus efficaces possibles.

La question de la sénatrice Buth portait sur l'importance de la coordination avec les gens de l'industrie. Lors de la contestation à l'OMC, nous n'aurions pas pu obtenir gain de cause sans les connaissances et les preuves que nous avions réunies au niveau des producteurs particuliers. De la même façon, sans les organisations et le rapport unique qu'elles entretiennent avec les importateurs et les transformateurs américains qui sont touchés par l'exigence d'étiquetage indiquant le pays d'origine et qui s'y opposent, il est inutile de penser que nos efforts seront couronnés de succès. Par conséquent, nous menons des consultations et nous assurons une coordination très étroite. Si on en vient à des mesures de rétorsion, ce sera nettement grâce à une coordination étroite avec ces organisations.

Le sénateur Plett : Merveilleux. Merci beaucoup.

La sénatrice Eaton : Je pense que Mme Namiesniowski a parlé de produits axés sur la science. Nous sommes sur le point de signer un accord de libre-échange avec l'Union européenne. Dans quelle mesure la recherche scientifique dans les universités canadiennes subit-elle les décisions de l'Union européenne qui ne sont pas fondées sur des données scientifiques? Je songe aux semences génétiquement modifiées et au miel.

M. Mayers : La question est très intéressante, madame la sénatrice. Nous voyons des difficultés dans un certain nombre de positions que nos collègues de l'Union européenne adoptent du point de vue des données scientifiques. À cet égard, nous intervenons couramment. Il est difficile de mesurer l'incidence que ce marché a eue en ce qui concerne un ralentissement éventuel de la recherche innovatrice au Canada; je ne peux donc pas me prononcer là-dessus.

Le sénateur Eaton : Peut-on savoir quel pourcentage?

M. Mayers : Ce serait purement hypothétique.

Je dirais que nous continuons un travail d'excellence en matière d'innovation au Canada en ce qui concerne l'introduction de produits génétiquement modifiés, et cet excellent travail nous a donné l'occasion de montrer que ces produits peuvent être mis en marché, qu'ils peuvent être produits et consommés de façon salubre et que les craintes de certains peuvent être apaisées efficacement. Voilà les preuves que nous présentons quand nous plaidons la cause.

En effet, nous savons que la présence d'une faible teneur en produits génétiquement modifiés dans un produit non génétiquement modifié a entraîné la perte de marchés dans l'Union européenne. Par conséquent, nous avons contré cela grâce à un travail considérable de politiques ici au Canada en ce qui concerne la gestion de cette faible teneur. Avec nos collègues d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, nous avons tenu des consultations poussées sur la façon de gérer la situation, car nous savons qu'il nous fait faire la preuve qu'il y a moyen de réussir à gérer ces approches. Ailleurs que dans l'Union européenne, on constate une adhésion de plus en plus grande à cette innovation à l'échelle internationale.

Cela étant dit, l'impact de la position de l'Union européenne a assurément ralenti les choses. L'innovation n'a pas pour autant disparu, mais elle en a certainement été touchée. Je ne peux cependant pas chiffrer cette incidence en pourcentage.

La sénatrice Eaton : Avez-vous réussi à démentir les perceptions non fondées sur des données scientifiques concernant nos produits en Europe?

M. Mayers : Je dirais que oui.

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous nous donner un exemple?

M. Mayers : J'ajouterai qu'il s'agit d'un processus très lent.

Je vais m'en tenir à l'exemple des produits génétiquement modifiés. En Europe, on continue cette production. L'acceptation par les consommateurs pose toujours un défi considérable mais, cela dit, notre ministre a été joué un rôle très actif pour mobiliser ses homologues européens. Les Européens sont venus nous consulter, parce qu'ils étaient soucieux de répondre à des considérations de salubrité pour apaiser les inquiétudes concernant les produits génétiquement modifiés. À cet égard, nous avons réussi à mobiliser directement les parlementaires européens, car ils souhaitent trouver des solutions et faire avancer les choses. Je ne dirais pas qu'il s'agit d'une position tout à fait gagnée, mais il y a des signaux positifs.

La sénatrice Eaton : Avez-vous l'impression qu'on assiste ou qu'on assistera à la même réaction négative dans le cas des pays qui participent aux négociations du Partenariat transpacifique ou encore de la part du Japon? Sont-ils plus ouverts à l'égard des aliments génétiquement modifiés, ou ont-ils moins de barrières non tarifaires?

M. Mayers : Dans le cas des pays qui participent aux négociations du Partenariat transpacifique, les réactions face aux aliments génétiquement modifiés varient. Je ne dirais pas qu'il y a une position unanime à cet égard.

M. Seppey : Sur les 11 pays qui participent aux négociations du Partenariat transpacifique, cinq produisent des OGM, y compris le principal producteur d'OGM du monde, soit les États-Unis. Le Canada vient au quatrième rang. L'Australie, pour sa part, se classe au treizième rang. Le Chili en produit une quantité appréciable également.

Il faut dire qu'il y a des points de vue différents au sein du Partenariat transpacifique quant à l'accueil que l'on fait aux biotechnologies. Dans le contexte de ces négociations, c'est nettement un élément pour lequel nous souhaitons instaurer des règles qui garantissent de solides principes d'échanges commerciaux fondés sur des données scientifiques et la prévisibilité des règlements, tout en assurant des homologations synchronisées.

Je vais faire une brève remarque concernant l'Union européenne. Par le passé, j'ai été responsable de la politique en matière d'innovation. Il y a un facteur intéressant : la position très arrêtée qui est parfois exprimée dans les règlements de l'Union européenne, qui boude parfois les biotechnologies, a le potentiel d'avoir des conséquences économiques réelles pour les Européens. Certaines sociétés qui élaborent de nouvelles technologies envisagent de quitter l'Union européenne, quand elles n'ont pas déjà réinstallé leurs services de recherche dans un autre pays, et ce, en raison du régime réglementaire trop contraignant.

Quand on regarde quels pays élaborent des biotechnologies autres que les OGM, on est porté à se demander comment relever les défis de la production agricole grâce aux toutes nouvelles technologies. On constate qu'il y a toute une gamme de pays qui s'adonnent à cet exercice. Il est très poussé en Amérique du Nord et en Amérique du Sud. Il l'est aussi en Asie. À côté de cela, l'Europe ne fait presque rien, même s'il y a une très petite production là-bas. Les Européens commencent à se demander s'ils ne sont pas en train de rater le coche en matière d'innovation en agriculture.

[Français]

Le sénateur Robichaud : J'aimerais enchaîner sur la question des OGM. Je lisais dans la revue Discover un article sur tous les efforts déployés en Europe à ce sujet. Certains groupes sont très actifs contre toute forme de modification génétique. Vous avez touché ce point, monsieur Seppey. Ces efforts ont-il une influence à l'extérieur de la communauté européenne?

M. Seppey : Ils ont une incidence compte tenu du fait que l'Union européenne est un très grand marché, sans doute le marché le plus lucratif en termes d'importations agricoles. C'est le plus grand importateur agricole et un marché extrêmement riche, où le niveau de vie est élevé et mature. Par conséquent, lorsque des entreprises et des exportateurs, sur une base purement commerciale, doivent prendre une décision de commercialisation, on ne doit pas confondre avec une décision réglementaire scientifique. Quand un exportateur se demande s'il pourra, en vertu de la réglementation actuelle, exporter vers l'Union européenne, cette question pourra affecter ses méthodes de production. C'est ce qui fait en sorte que dans certaines régions du Canada, en matière de porc, par exemple, on tentera d'avoir une ligne de production où on n'utilise pas ce qu'on appelle la ractopamine, qui est un médicament vétérinaire, parce que son usage est interdit au sein de l'Union européenne.

Nous considérons que l'interdiction de la ractopamine n'est pas basée sur la science. Au Canada, on a fait des études, et l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Santé Canada ont reconnu que c'était autorisé. Il existe également une norme internationale CODEX. Ceci étant, lorsqu'on parle d'une entreprise particulière qui veut exporter son produit au sein de l'Union européenne, elle pourra espérer que la réglementation change. Toutefois, en attendant, elle devra ajuster sa méthode de production.

La réponse à votre question est donc que, oui, ces efforts ont une incidence à l'extérieur de la communauté, compte tenu de l'importance de cette zone géographique comme importatrice de produits alimentaires agricoles.

Le sénateur Maltais : Bienvenue, madame et messieurs. Je suis très heureux de vous avoir avec nous ce matin. On a beaucoup parlé de libre-échange, soit avec les États-Unis, l'Europe ou l'Asie. On a cependant oublié un petit marché de 34 millions d'habitants, celui du Canada. C'est celui qui m'intéresse.

Je vais vous mettre, ce matin, en situation, et j'aimerais une réponse à cette question que je pose depuis un an, au sein de ce comité, et à laquelle personne n'est en mesure de répondre. Or, vous êtes la plus haute autorité en matière de salubrité et de santé alimentaire au Canada.

Une dame fait son épicerie, avec son panier d'épicerie, au supermarché. Elle a trois enfants et préfère les produits canadiens, même si parfois ils sont un petit peu plus chers — car les gens aiment acheter canadien.

Je vais vous amener dans un domaine dont vous ne parlez jamais, celui de l'aquaculture.

Nous savons qu'au Canada l'aquaculture est bien contrôlée par votre ministère et les ministères provinciaux. Nous savons ce que mangent les saumons de la Nouvelle-Écosse, les truites de l'Ouest, le saumon du Pacifique et les huîtres. Nous sommes au courant de la façon dont cela fonctionne, comme vous qui le contrôlez.

Comment peut-on garantir aux consommateurs canadiens que vous avez un contrôle sur la façon dont se nourrissent les poissons importés de l'étranger?

[Traduction]

M. Mayers : Merci de cette question. La Loi sur l'inspection du poisson et les règlements pris en vertu de ses dispositions établissent les mêmes attentes pour le poisson importé que pour le poisson qui provient du Canada. Les Canadiens peuvent compter sur les contrôles prévus dans ces mesures législatives et réglementaires.

Les produits importés sont assujettis aux mêmes exigences que les produits canadiens. L'Agence canadienne d'inspection des aliments mène à bien des inspections sur les produits importés, et le but de ce programme d'inspection est de donner aux Canadiens l'assurance que ces produits respectent les exigences canadiennes.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je comprends ce que vous dites. Toutefois, je m'interroge. Pouvez-vous placer sur une étiquette ce que mange le tilapia en Thaïlande, avant qu'il ne soit importé au Canada? Pouvez-vous indiquer, sur l'étalage du poissonnier, ce dont se nourrit le tilapia en Thaïlande pour devenir un beau poisson blanc, inodore, incolore et sans saveur? Que mange ce poisson? Devant cette information, je ne suis pas sûr que la dame à laquelle je fais référence dans mon exemple en achètera plusieurs livres.

Pouvez-vous m'assurer que l'on puisse rendre public ce que mange ce poisson?

[Traduction]

M. Mayers : S'il s'agit des assurances que nous pouvons donner, cela dépend des programmes que nous pouvons mettre en œuvre.

Nous en avons parlé plus tôt, car il y a des obligations en ce qui a trait à l'étiquetage indiquant le pays d'origine, mais elles varient selon les denrées. Pour pouvoir offrir l'assurance que vous recherchez...

[Français]

Le sénateur Maltais : Je vous arrête. Pour le bœuf de l'Ouest, le porc, le poulet et tous les produits fabriqués au Canada, on exige cet étiquetage. Ne peut-on pas faire de même pour les produits importés? Si les autres pays exigent l'étiquetage de nos produits, ne pourrait-on pas leur demander la même chose, soit d'indiquer ce que mange le tilapia le matin, le midi et le soir? Après quoi, les Canadiens seront en mesure de décider s'ils désirent en acheter ou non.

Pouvez-vous me donner cette garantie?

[Traduction]

M. Mayers : En fait, notre démarche à cet égard est l'inverse. Nous avons plutôt instauré une approche visant à mettre en évidence les produits du Canada. Par conséquent, si un consommateur canadien veut éviter les produits d'un pays en particulier ou des produits importés de façon générale, il y a des règles qui permettent d'indiquer les produits canadiens. Nous avons soulevé cet aspect auprès des Américains pour ce qui est de la façon dont ils qualifient un produit importé. Nous devons respecter nos obligations en vertu de l'OMC et dans le cas qui nous occupe, nous ne pouvons pas faire une discrimination inappropriée à l'égard de certains produits. Par conséquent, nous avons choisi de permettre aux Canadiens qui souhaitent éviter les produits importés de pouvoir concentrer leurs achats sur des produits canadiens et nous avons choisi de ne pas imposer un étiquetage obligatoire général indiquant le pays d'origine.

[Français]

Le sénateur Maltais : Nos auditeurs sont à l'écoute. Or, je n'ai pas de réponse à ma question. Normalement, on devrait pouvoir étiqueter les produits vendus dans les épiceries au Canada, puisque les autres pays l'exigent de nous chez eux. Cette pratique devrait aller dans les deux sens.

Vous êtes la première autorité en matière de santé, et je n'ai pas plus de réponse que de la dernière autorité. Pouvez- vous informer les Canadiens à ce sujet? Les gens n'ont pas le temps de se soucier de ce qui en est. Par contre, comme gouvernement, nous devons nous assurer que les produits qui sont vendus sur nos étalages sont de saine qualité et ne se nourrissent pas de substances qui peuvent s'avérer nocives, puisqu'on exige que nos viandes et poissons soient d'une très haute qualité. Nous devrions exiger la même chose des autres.

[Traduction]

M. Mayers : Absolument. Nous sommes tout à fait d'accord. En fait, aux termes de la loi et des règlements, il faut démontrer que les produits importés répondent aux mêmes normes que les produits locaux. On peut donner l'assurance aux consommateurs que les produits importés, dont la vente est autorisée sur le marché canadien, sont assujettis aux mêmes règles, aux mêmes exigences que ce qui est produit ici et qu'ils respectent le même niveau de salubrité.

[Français]

Le sénateur Maltais : C'est ça, merci.

Le président : Merci, sénateur Maltais. J'ai un commentaire à faire au sous-ministre, pour faire suite aux commentaires du sénateur Maltais. Pouvez-vous nous faire parvenir de l'information additionnelle pour clarifier les commentaires et la question, s'il vous plaît le faire parvenir au greffier.

[Traduction]

Chers collègues, en tant que président du comité, il faut que je dise ceci : Mme Namiesniowski et son équipe ont illustré ce matin la réputation du Canada à l'échelle mondiale. Agriculture et Agroalimentaire Canada se démarque par son leadership, et ses fonctionnaires sont toujours considérés comme étant des professionnels bien renseignés, ce que nous avons pu constater ce matin. Merci.

Chers collègues, nous allons maintenant aborder la proposition de l'Agence canadienne d'inspection des aliments visant à imposer un prix pour l'obtention d'un permis d'importation pour importer des produits du secteur des établissements non agréés par le gouvernement fédéral. Nous accueillons Paul Mayers, vice-président associé de la Direction générale des politiques et des programmes à l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Monsieur Mayers, merci d'avoir accepté notre invitation pour nous expliquer ces modifications. Le greffier m'informe que vous voulez faire un bref exposé, après quoi nous passerons aux questions des sénateurs.

M. Mayers : Mesdames et messieurs les sénateurs, c'est avec plaisir que je comparais devant vous aujourd'hui pour vous expliquer le contexte de la proposition relative aux frais d'importation que vous examinez actuellement.

Tout d'abord, je pense que les membres du comité devraient comprendre que le projet de réglementation pour un mécanisme de délivrance de permis pour les importateurs s'inscrit dans le Plan d'action pour assurer la salubrité des produits alimentaires. Il s'agit du volet confié à l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans le cadre d'un plus vaste plan d'action du gouvernement du Canada, annoncé en décembre 2007, à savoir le Plan d'action pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation.

L'établissement d'un permis pour les importateurs apportera une contribution importante à la surveillance de la salubrité des aliments au Canada, et c'est l'une des nombreuses annonces qui suivront bientôt. Les pouvoirs conférés par la Loi sur la salubrité des aliments au Canada permettront à l'ACIA d'avancer sur de nombreux autres fronts pour améliorer le système de salubrité des aliments du Canada, système qui est déjà excellent.

Permettez-moi de dresser un portrait du contexte canadien actuel en matière d'importation d'aliments. Le Canada est le sixième plus gros importateur de produits agricoles et agroalimentaires au monde. Plus de 40 p. 100 des produits alimentaires vendus au Canada sont importés. En outre, la plupart des produits alimentaires canadiens contiennent des ingrédients importés.

[Français]

Au cours des neuf dernières années, nous avons connu une augmentation de 45 p. 100 des importations d'aliments. Le problème est beaucoup plus complexe en raison de l'augmentation du nombre de chaînes d'approvisionnement mondiales qui se traduit par des incidents touchant la salubrité des aliments qui peuvent avoir une portée considérable. À présent, de nombreux aliments doivent être retracés au niveau transnational afin d'en retrouver l'origine.

[Traduction]

Il y a également eu un changement dans la demande globale des consommateurs pour des aliments qui reflètent notre société composée de cultures et de religions multiples. Il est clair que la demande d'aliments importés au Canada est grande et qu'elle poursuivra sa croissance.

Pour vous donner une idée de l'ampleur de ce règlement, vous devez savoir qu'en 2011-2012, près de la moitié, c'est- à-dire 44 p. 100, de tous les rappels concernaient des produits alimentaires qui seraient couverts par cette réglementation.

Depuis plusieurs années, nous avons observé des risques répétés au sein des réseaux alimentaires mondiaux, notamment, la présence de clostridium botulinum, l'agent responsable du botulisme, dans du jus de carotte; des préparations pour nourrissons contaminées par la mélamine, un incident considérable qui est survenu en Chine et de par le monde; l'utilisation de DEHP, un plastifiant dans des boissons pour sportifs et des confitures; des fragments de verre dans des boissons alcoolisées à la vodka; la présence de salmonelle dans du chocolat et du beurre d'arachide; et la présence d'allergènes non déclarés dans des pignons et de la farine d'avoine.

Les Canadiens ont généralement confiance dans la salubrité de l'approvisionnement alimentaire. Selon un sondage du Centre de recherche Décima, effectué en 2010, 90 p. 100 des Canadiens pensent que le système de salubrité des aliments canadiens fonctionne bien. Un sondage de la firme Léger Marketing, effectué en 2011, a par ailleurs révélé que la plupart des Canadiens sont conscients que les aliments importés doivent se conformer aux mêmes normes de salubrité des aliments que les aliments produits au Canada avant d'y être vendus. Les Canadiens devraient avoir confiance dans les aliments importés, car la grande majorité des importateurs canadiens fournissent des produits alimentaires salubres.

[Français]

Les importateurs d'aliments au Canada ont déjà accordé leur soutien au régime de licence d'importation. Au cours de leurs comparutions précédentes devant le comité, des intervenants clés, comme l'Association canadienne des importateurs et exportateurs et l'Association canadienne des importateurs réglementés, ont exprimé leur approbation relativement aux intentions du gouvernement.

[Traduction]

Le projet de règlement serait l'assise d'un système réglementé par le gouvernement fédéral pour le secteur des aliments importés au Canada. Les produits alimentaires régis par le règlement sont des produits agricoles soumis à la Loi sur les produits agricoles au Canada. Actuellement, ils ne sont pas réglementés par l'ACIA en vertu de règlements fédéraux propres à chaque type de produit.

Le projet de règlement établirait un régime de délivrance de permis pour favoriser une industrie qui accepte la responsabilité à l'égard de la salubrité et de l'étiquetage adéquat des produits qu'elle importe; la confiance des Canadiens dans la salubrité des produits alimentaires, peu importe leur provenance; la confiance des partenaires commerciaux dans le système canadien d'assurance de la salubrité des aliments; et des règles équitables permettant de démontrer que les produits canadiens et importés respectent les exigences canadiennes.

Selon le nouveau règlement, les importateurs d'aliments du secteur des établissements non agréés par le gouvernement fédéral devront obtenir un permis d'importation; instaurer un plan préventif de contrôle de la salubrité des aliments; élaborer un plan de rappel; tenir des registres écrits ou électroniques; et aviser l'ACIA au sujet des aliments insalubres.

Grâce aux inspections éclair à la frontière et à ses inspections régulières axées sur les risques, l'ACIA pourrait déterminer que le permis de certains importateurs doit être annulé ou suspendu si des aliments non salubres sont détectés. Cette démarche est semblable à celle qu'ont adoptée nos principaux partenaires commerciaux, dont les États- Unis, la Nouvelle-Zélande, l'Australie et l'Union européenne. Les États-Unis et le Canada travaillent de concert sous l'égide du Conseil de coopération en matière de réglementation afin d'élaborer une nouvelle réglementation à l'intention des importateurs qui prévoient des exigences de contrôle préventif. Le Canada a aussi avisé l'Organisation mondiale du commerce de son intention de mettre en place un régime de délivrance de permis. Du coup, nous nous conformerons à la politique gouvernementale de réduction des formalités administratives.

[Français]

Comme je l'ai souligné, cette initiative de délivrance de permis est importante pour appuyer la salubrité des aliments et créer des règles de jeu équitables entre les produits alimentaires canadiens et importés. Conformément à la politique du Conseil du Trésor, l'ACIA a l'intention d'imposer des frais d'utilisation liés à la délivrance des permis d'importation. C'est la question qui vous est présentée aujourd'hui.

[Traduction]

On propose des frais de 259 $ par permis d'importation, qui serait valide pour deux ans. Le permis d'importation délivré par l'ACIA profitera directement aux importateurs, car il permettra aux importateurs de produits du secteur des aliments importés de réaliser des activités d'importation. La norme de service envisagée pour la délivrance de permis sera de 10 jours ouvrables, ce qui cadre avec l'Accord sur les procédures de licences d'importation de l'Organisation mondiale du commerce.

J'espère avoir pu informer le comité sur le contexte actuel et sur le bien-fondé de ces frais d'utilisation. Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président : Merci, monsieur Mayers.

Le sénateur Plett : Monsieur Mayers, vous nous avez très bien informés. J'ai quelques questions concernant vos consultations.

Dans vos documents, vous parlez du nombre de répondants à votre questionnaire. Il me semble que le chiffre est peu élevé. Vous dites ensuite que vous avez invité 12 000 abonnés à se prononcer sur les frais proposés après en avoir fait la publicité dans la Gazette du Canada. Combien d'abonnés ont commenté votre proposition de frais?

M. Mayers : Je n'ai pas le chiffre à portée de main, mais nous pouvons le remettre au greffier.

Le sénateur Plett : Merci beaucoup. Je constate que vous avez le chiffre pour la consultation Web.

À la page 7 de votre document, vous dites « Les répondants appuyaient-ils l'imposition d'un prix pour obtenir un permis? » Quarante pour cent ont dit oui, 40 p. 100 étaient incertains, et seulement 20 p. 100 ont dit non. Il s'agit d'une excellente réponse.

Pouvez-vous nous parler rapidement de la réponse de ces 12 000 abonnés, même si vous n'avez pas les chiffres devant vous? Les chiffres ne sont pas si importants pour moi. Je m'intéresse davantage à la réponse globale.

M. Mayers : Parmi ceux qui ont répondu de façon positive, plusieurs voyaient les avantages au niveau de la confiance des consommateurs. Ils voyaient aussi l'occasion de réduire les effets nuisibles que pourraient avoir des événements négatifs sur le marché. Bien sûr, un événement négatif ne touchera pas que l'entreprise concernée. On a reconnu que tout le secteur en ressent les effets pendant un certain temps. Les répondants ont aussi perçu l'occasion de rendre les règles plus équitables pour tous.

Parmi ceux qui ont exprimé des réserves, plusieurs voyaient l'approche des permis comme une forme de taxe. De plus, plusieurs croyaient qu'il n'y aurait aucune incidence positive sur la salubrité des aliments.

Le sénateur Plett : Et pourquoi?

M. Mayers : Je ne vais pas émettre d'hypothèses sur leurs convictions, mais ils croient peut-être que certains importateurs détenant un permis ne prendraient pas les responsabilités qui s'imposent. Ils pourraient peut-être vouloir œuvrer dans un secteur d'activité pendant une courte période seulement, pour ensuite tout laisser tomber lorsque les choses tournent mal. Il s'agit d'un genre d'approche sans scrupule.

Le sénateur Plett : Ma dernière question porte sur les affaires en général. J'ai été homme d'affaires presque toute ma vie. J'ai dû obtenir des permis dans chaque province où je travaillais, si bien que je vois cette approche comme étant cohérente avec tout type d'industrie. Êtes-vous d'accord?

M. Mayers : Je suis tout à fait d'accord.

L'approche dont il est question aujourd'hui nous offre des avantages importants en tant qu'organe de réglementation. Elle comble un secteur de vulnérabilité potentielle. Étant donné que les produits en question ne sont pas visés par des règles concernant les produits alimentaires, nos activités sont plutôt réactives à l'heure actuelle.

Un système de délivrance de permis offre une plus grande clarté quant aux responsabilités des importateurs. Qui plus est, il nous permet en tant qu'organisme d'entretenir de meilleurs liens avec la communauté d'importation. Si les importateurs détiennent des permis, nous savons qui ils sont et nous pouvons leur transmettre des renseignements et des mises à jour. Prenons l'exemple de la mélamine. L'absence d'une relation continue avec les importateurs nous empêche de leur transmettre des renseignements concernant un événement émergent, ce qui signifie qu'ils doivent être prudents quant aux importations d'un pays qui éprouve des problèmes. La délivrance de permis nous permet d'entretenir des liens permanents avec les importateurs, de leur rappeler leurs responsabilités et, surtout, de leur transmettre des renseignements lorsque les choses vont mal.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé du processus pour l'obtention d'un permis d'importation. Je suppose que l'importateur devra fournir l'information sur ce qu'il importe et la source de ses importations. Vous avez également indiqué qu'il devrait exister un système de rappel des produits, au cas où il y aurait des problèmes. Vous dites que vous allez livrer la licence dans une période de dix jours. Comment allez-vous faire cela?

[Traduction]

M. Mayers : Comme vous l'avez noté, un permis sera délivré à la suite d'une demande de la part de l'importateur. Il devra fournir des renseignements et s'engager à respecter les conditions du permis en question. Nous pourrons respecter le délai de 10 jours si nous avons l'infrastructure nécessaire pour le faire. Cette infrastructure comporte un outil informatique. Il s'agira d'une approche en ligne. De plus, une équipe sera créée afin de traiter les demandes de permis. C'est ainsi que nous nous engageons à respecter ce délai.

Le sénateur Robichaud : Une équipe sera établie pour se pencher précisément sur ces permis d'importation.

M. Mayers : En effet. Gardez à l'esprit que cela ne se fera pas pour chaque article importé. Il s'agira plutôt d'un permis de deux ans qui permet à l'importateur d'importer ses aliments.

Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé d'inspection éclair à la frontière. Ces inspections se font-elles fréquemment? Y en aura-t-il davantage pour surveiller les nouveaux importateurs?

M. Mayers : La réponse à votre deuxième question est oui. On continuera d'effectuer des inspections éclairs, mais j'aimerais apporter une précision importante. Les inspections éclair ne sont pas la seule méthode à notre disposition. Elles constituent un moyen supplémentaire qui nous permet de nous concentrer sur un secteur particulier. Ils nous permettent de surveiller l'importation d'un produit de façon plus ciblée, et ce, en réponse à toute question émergente potentielle.

Au cours des trois dernières années, nous avons effectué plusieurs inspections éclair à la frontière. Je peux certainement faire parvenir les critères de ces inspections éclair au greffier pour en faire part au comité. Elles nous ont permis de mener des activités d'inspection qui visent des marchandises précises qui entrent au pays. Elles s'ajoutent à nos activités d'inspection plus génériques. Ce sont des activités complémentaires à nos activités régulières, et non pas notre seul moyen de contrôler les importations.

Le sénateur Robichaud : Vous avez utilisé le mot « générique ». Dans la plupart des cas, c'est l'Agence des services frontaliers du Canada qui fait l'inspection initiale, n'est-ce pas?

M. Mayers : C'est exact. L'Agence des services frontaliers du Canada est le premier point de contact. Nous travaillons en étroite collaboration avec l'ASFC quand il s'agit de ses responsabilités en matière d'importation des produits agricoles et agroalimentaires.

[Français]

Le sénateur Rivard : Avant de poser ma question, j'aimerais faire une mise au point. Ma question concerne les exemptions pour la réserve d'Akwesasne. Je crois sincèrement que plus de 90 p. 100 des citoyens d'Akwesasne sont honnêtes. Pour ce qui est des autres, c'est discutable.

Prenons l'exemple du commerce des cigarettes. Il est prouvé que si toutes les cigarettes qui transitent ou qui sont fabriquées à Akwesasne étaient destinées à la consommation par ces habitants, toutes personnes âgées de plus de dix ans seraient mortes du cancer du poumon, étant donnée les quantités extraordinaires.

Ce qui me mène à la question suivante. Si l'on permet l'importation à Akwesasne de produits alimentaires américains à condition qu'ils ne pèsent pas plus de 20 kilos, pouvez-vous me rassurer sur un point. L'exportateur qui envoie ces produits à Akwesasne est généralement Américain. Les Américains pourraient faire venir des produits, d'Asie ou d'ailleurs, qui seraient peut-être impropres à la consommation — et je suis persuadé que les Américains ne feraient pas une telle chose. Toutefois, quelle garantie a-t-on que, par exemple, 20 kilogrammes d'un produit qui aurait été importé par les Américains sont sains pour la consommation, que ce soit pour eux ou pour quiconque après qu'il aura été envoyé n'importe où? La clientèle potentielle est le Québec et le l'Ontario. Je ne crois pas qu'ils pourraient importer un produit destiné à être exporté dans les provinces maritimes ou dans l'Ouest.

Ma première question est la suivante : cette situation vous inquiète-elle? Rassurez-nous s'il n'y a pas inquiétude en la matière.

Ma deuxième question est à savoir si certaines personnes pourraient être assez habiles pour faire plusieurs livraisons, mais se limiter à 20 kilos? Par exemple, est-ce qu'un conteneur pourrait avoir 200 colis, dont chacun fait moins de 20 kilos, ce qui serait acceptable étant donné que chaque coli pèse moins de 20 kilos?

[Traduction]

M. Mayers : Permettez-moi de répondre à votre deuxième question en premier. C'est le conteneur qui représente l'importation. Donc, on ne pourrait pas contourner les règles de cette façon.

Quant à votre première question, nous pouvons continuer à vous rassurer que l'exemption est semblable à celle qui s'applique à tous les Canadiens en ce qui a trait à l'importation personnelle. L'exemption existe dans le but de reconnaître la position prise par la réserve d'Akwesasne et de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les résidents de décider où ils veulent acheter leurs produits alimentaires.

Je comprends le scénario qui inquiète l'honorable sénateur. Je ne connais pas le dossier des cigarettes, alors je n'essayerai pas de faire des comparaisons à cet égard. Cependant, un autre facteur qui peut nous rassurer grandement, c'est le fait que ces produits proviennent des États-Unis. Comme je l'ai mentionné dans mes observations, nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues américains parce que, comme nous, ils exercent des contrôles sur les importations aux États-Unis. Donc, il y a un très faible risque que les États-Unis servent de source transfrontalière d'importation non conforme provenant d'un autre pays. Nous collaborons avec le Conseil de coopération en matière de réglementation dans le but de soutenir une démarche nord-américaine dans la gestion des importations de produits alimentaires afin d'assurer les consommateurs nord-américains de leur salubrité.

[Français]

Le sénateur Rivard : Je termine en vous remerciant. Je suis plus rassuré et confiant que nos voisins américains, nos principaux clients, ne pourront pas nous jouer de tours en nous envoyant, par Akwesasne, des produits impropres à la consommation.

[Traduction]

La sénatrice Callbeck : Monsieur Mayers, je sais que le sénateur Plett a posé une question concernant la consultation. Cependant, je veux parler du questionnaire en ligne que vous aviez. Selon le document, je vois que 145 personnes se sont connectées et que 51 y ont participé. Combien d'importateurs seraient touchés par ce permis?

M. Mayers : Nous estimons qu'au final, nous accorderions un permis à 25 000 importateurs de produits alimentaires.

La sénatrice Callbeck : Avez-vous été surpris par le faible nombre de personnes qui ont répondu au questionnaire, de seulement 51?

M. Mayers : N'oubliez pas que la consultation en ligne n'était qu'un volet de la démarche de consultation globale. Nous communiquions régulièrement et de façon importante avec l'Association des importateurs et des exportateurs qui, bien sûr, représente une grande partie de la communauté d'importateurs et d'exportateurs. Je ne peux pas parler pour chacun d'entre eux, mais il faut prendre en considération le fait que les gens ont choisi de participer par l'entremise de leur association plutôt que directement.

La sénatrice Callbeck : Je vois ici qu'il n'y a eu aucune réponse de la part de cinq provinces et des Territoires du Nord-Ouest. Il n'y a eu aucune réponse de la part du Canada atlantique. Pouvez-vous me parler des consultations qui ont eu lieu avec les importateurs au Canada atlantique?

M. Mayers : Comme vous voulez plus de détails, j'ai un collègue que je pourrais inviter à la table pour vous répondre, avec la permission de la présidence.

La sénatrice Callbeck : Pas de problème.

M. Mayers : Je vous présente M. Mark Burgham, directeur exécutif par intérim, Direction des stratégies de la salubrité des aliments.

Le président : Merci. Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît?

Mark Burgham, directeur exécutif par intérim, Direction des stratégies de la salubrité des aliments, Agence canadienne d'inspection des aliments : Mesdames et messieurs les sénateurs, nous consultions les intervenants de l'industrie partout au pays, donc nous menions des discussions avec les associations industrielles. Nous nous sommes rendus dans la plupart des provinces, y compris celles du Canada atlantique, pour parler aux fonctionnaires provinciaux des ministères de l'Agriculture et à nos collègues provinciaux dans les ministères de la Santé.

Nous avons aussi discuté avec des entreprises individuelles et des associations, et nous avons essayé de tendre la main à des micro-entreprises parce que nous comprenons que la situation sera particulièrement difficile pour certaines d'entre elles. Par exemple, nous poursuivons les discussions avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ainsi qu'avec des entreprises de plus grande taille qui importent la plupart des produits en termes de dollars.

La sénatrice Callbeck : Est-ce qu'on peut m'assurer que toutes les provinces de l'Atlantique ont été consultées?

M. Burgham : Oui. Si le règlement est publié dans la partie I de la Gazette du Canada, nous avons l'intention de visiter chaque province pendant la période consacrée aux observations. Nous pouvons ainsi nous assurer que tous les intervenants qui peuvent être touchés par cette situation auront l'occasion de nous parler et de mieux comprendre le but du règlement.

La sénatrice Callbeck : Qui avez-vous l'intention de consulter au Canada atlantique?

M. Burgham : Nous mettons sur pied une tribune publique dans toutes les provinces. Nous allons produire une annonce qui sera affichée à certains endroits quelques semaines avant la tenue de ces tribunes. C'est une invitation ouverte.

La sénatrice Callbeck : Avez-vous consulté tous les gouvernements provinciaux du Canada atlantique?

M. Burgham : Oui.

Le président : Merci beaucoup d'avoir apporté ces éclaircissements.

La sénatrice Eaton : Je vais continuer dans la même veine que le sénateur Robichaud. Un importateur est obligé d'avoir un permis, peu importe le nombre de produits qu'il importe. Disons que je suis un importateur et que je viens vous voir pour obtenir un permis. Je dis que j'ai cinq produits mais, six mois plus tard, j'en ai 10. Je n'ai plus de démarche à suivre parce que j'ai déjà fait mes preuves pour le premier produit, donc il en va de même pour les 10 prochains produits.

M. Mayers : Vous avez raison. Il ne faut pas oublier que le permis ne sert qu'à vous autoriser à importer des produits, mais vous êtes toujours soumis à l'inspection de surveillance. Une fois que vous avez le permis, vous vous engagez à mettre en place, de façon continue, un plan de prévention et de contrôle pour vous assurer que les produits importés respectent les exigences canadiennes.

La sénatrice Eaton : Quand j'augmente le nombre de produits que j'importe, est-ce que je suis tenue de vous informer que j'importe des produits supplémentaires?

M. Mayers : Lorsque vous renouvelez votre permis, vous allez mettre à jour le type et le nombre de produits que vous importez.

La sénatrice Eaton : Est-ce que le renouvellement se fait à tous les deux ans?

M. Mayers : Oui, c'est exact.

La sénatrice Eaton : Êtes-vous entièrement convaincu que ce délai de deux ans est suffisant? J'imagine que vous ne voulez pas rendre le processus trop lourd ou bureaucratique pour l'importateur, mais je trouve le délai surprenant. Vous rendez l'importateur entièrement responsable de la traçabilité et de la fabrication des produits qu'il importe.

M. Mayers : C'est exact. Nous nous attendons à ce qu'un importateur ait une relation avec ses fournisseurs pour qu'il puisse, par l'entremise de sa chaîne d'approvisionnement, s'assurer que les produits importés sont conformes aux exigences canadiennes. Les importateurs sont toujours soumis à notre surveillance. Il est donc très important de garder à l'esprit que le permis n'est pas le seul contrôle en place. Ce n'est qu'un élément parmi un ensemble de contrôles.

La sénatrice Eaton : Quels sont ces autres contrôles?

M. Mayers : Les autres contrôles comprennent des mesures existantes telles que l'inspection, une enquête lorsqu'un problème survient et les rappels si les produits présentent des risques pour les consommateurs. Toutes ces mesures s'appliquent toujours.

La sénatrice Eaton : Si j'étais importateur de 10 produits, est-ce que je serais soumise à une inspection éclair?

M. Mayers : Vous pourriez faire l'objet d'une inspection régulière. C'est un mécanisme qui fait partie de notre démarche. Vous pourriez aussi faire l'objet d'une enquête précise dans le cas où un problème est signalé en lien avec un produit que vous importez.

La sénatrice Eaton : Je crois que c'est une question très importante. Quand vous faites une inspection, est-ce que l'inspecteur va littéralement suivre la route de traçabilité, ou est-ce que vous prenez le produit dans vos mains pour l'examiner?

M. Mayers : Cela dépend entièrement du produit. Quand vous parlez de la route de traçabilité, voulez-vous dire retracer le parcours du produit dans la chaîne d'approvisionnement jusqu'à son pays d'origine?

La sénatrice Eaton : Oui.

M. Mayers : Non, on n'enverrait pas des inspecteurs dans le pays d'origine. Nous comptons sur les organismes de réglementation dans les pays d'origine pour obtenir de l'information, plutôt que d'envoyer des inspecteurs dans ces pays pour faire des inspections régulières. Nous effectuerions une vérification pour certains produits, en fonction des risques qu'ils présentent.

La sénatrice Eaton : En raison de tous nos accords de libre-échange, j'imagine que nous avons importé beaucoup plus de produits au Canada. Évidemment, les inspections et les normes pour chacun de ces pays font partie de vos négociations de libre-échange.

M. Mayers : Quant aux normes, sur la scène internationale, nous comptons sur les instances internationales de normalisation pour servir de mécanismes principaux. En collaboration avec d'autres pays membres, nous travaillons avec le Codex Alimentarius des Nations Unies, qui établit des normes alimentaires internationales.

Le panier de produits alimentaires au Canada est déjà assez diversifié. Nous importons déjà des aliments ou des ingrédients provenant de plus de 140 pays. Donc, les accords de libre-échange n'augmentent pas forcément le nombre de produits de façon importante parce que nous menons des discussions sur le libre-échange avec des pays avec qui nous avons déjà une relation commerciale.

La sénatrice Eaton : Merci beaucoup.

Le sénateur Mercer : Monsieur Mayers, je suis content que vous soyez là. Cette question semble être simple, mais elle est un peu plus complexe qu'elle en a l'air. C'est la première fois que nous voyons pareille situation. Je ne veux pas compliquer les choses, mais il s'agit d'un nouveau frais pour importer des produits alimentaires. Selon vos prévisions, cela représentera environ 3,2 millions de dollars par année pendant les deux premières années. Si j'ai bien compris ce que j'ai lu, vous dites qu'il en coûte environ 3,2 millions de dollars pour faire des affaires et que le bénéfice sera de 3,2 millions de dollars, si bien qu'il n'y aura aucune incidence sur les recettes. Est-ce bien ce qui est prévu?

M. Mayers : Absolument. En fait, en vertu de la Loi sur les frais d'utilisation et de la politique du Conseil du Trésor en ce qui concerne les frais d'utilisation, nous sommes obligés de récupérer seulement nos frais de livraison lorsque nous établissons nos coûts.

Le sénateur Mercer : C'est sans incidence sur les recettes pour le gouvernement fédéral, mais cela représente un coût pour l'importateur.

M. Mayers : C'est exact.

Le sénateur Mercer : L'importateur reçoit son argent du consommateur, n'est-ce pas?

M. Mayers : Vous avez absolument raison. Il s'agit de nouveaux frais que doivent payer les importateurs. Il faut bien le reconnaître. Il s'agit de l'imposition de frais pour un marché d'une valeur d'environ un milliard par mois des produits alimentaires importés au Canada dans ce secteur.

Le sénateur Mercer : Certains répondants perçoivent les frais comme une nouvelle forme d'imposition. Si l'on décide d'imposer ces frais d'utilisation, je veux voir un avantage pour l'autre côté. Si l'on doit maintenant donner au gouvernement 3,2 millions de dollars supplémentaires par année, je veux qu'on m'assure que cet argent améliorera la salubrité alimentaire, chose que je ne vois pas ici. Vous avez maintenant l'autorité ainsi que les règlements en place pour faire ce qu'il faut. Mais cette mesure ne fait qu'acheminer plus d'argent à la mise en œuvre d'un régime de délivrance de permis. Est-ce que j'ai raison ou est-ce que je me trompe?

M. Mayers : Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas du tout d'accord avec vous sur ce point. Cette mesure améliorera sensiblement la salubrité de ces produits alimentaires qui ne sont visés par aucune loi régissant ces produits. Cela veut dire qu'une personne qui désire se lancer en affaires dans ce secteur n'est pas tenu d'obtenir un permis. Le régime de délivrance de permis nous donne l'occasion d'agir de façon proactive pour améliorer la salubrité alimentaire, chose qui n'était pas possible avant cette mesure.

Vous vous rappellerez qu'après l'incident de la mélamine en Chine, les Canadiens se sont dits très préoccupés quant à la capacité d'évaluer le risque relatif aux aliments importés, et ce, de façon proactive. Cette mesure répond à cette préoccupation. Elle constitue également une réponse au plan d'action pour assurer la sécurité des produits alimentaires et de consommation du gouvernement de l'époque et, en effet, complète de façon tout à fait efficace la Loi sur la salubrité des aliments au Canada, ce qui comprend l'autorité de délivrer des permis à cet égard.

Le sénateur Mercer : Disons que je suis un importateur. J'obtiens un permis et j'importe deux produits. Il s'agit de produits salubres qui ne posent aucun problème. L'année suivante, ou même le jour suivant l'obtention de mon permis, j'élargis l'offre. Vous n'aurez aucun détail relatif à ces produits avant le renouvellement de mon permis dans deux ans.

Il y a une lacune ici. Si l'objectif consiste à protéger les consommateurs, eh bien, il va falloir les protéger 24 heures sur 24, sept jours par semaine, plutôt que de permettre cette lacune signalée par la sénatrice Eaton. Comment protéger les Canadiens face à ces produits signalés par la sénatrice Eaton?

M. Mayers : Je vous comprends tout à fait. Nous avons dû, bien entendu, trouver un équilibre entre un renouvellement de permis hebdomadaire, qui ne serait pas pratique, et un délai raisonnable. Il faut néanmoins garder à l'esprit que cette mesure nous donne quelque chose qu'on n'avait pas auparavant, c'est-à-dire un lien direct avec chaque importateur. Cela veut dire que si jamais un problème fait surface, nous avons la capacité de communiquer directement avec les importateurs. Nous n'avons plus à nous limiter à ceux qui disent simplement qu'ils veulent importer des crevettes de Thaïlande aujourd'hui. Si jamais il y a un problème émergent relatif aux crevettes, nous pourrons communiquer avec tout le réseau d'importateurs de produits alimentaires pour leur faire part de notre préoccupation pour qu'ils puissent par la suite en tenir compte lorsqu'ils décident quels produits ils veulent faire venir.

Le sénateur Mercer : Merci.

La sénatrice Buth : Je connais mieux les produits de base. Est-ce que les importateurs de produits de base doivent obtenir un permis?

M. Mayers : Tout dépend du produit de base. Nous avons toute une gamme de produits de base. Par exemple, dans le cas de la viande, seulement les installations qui ont un permis octroyé par le gouvernement fédéral ont le droit d'importer de la viande au Canada. Le système varie selon le produit de base. Vous vous rappellerez notre intérêt, lors des discussions relatives à la Loi sur la salubrité des aliments au Canada, à consolider toutes les normes de chacun des produits de base dans un même système. À la suite de l'adoption de cette loi sur la salubrité des aliments au Canada, nous avons pris des mesures à cet égard, mais chacun de ces produits de base inscrits est doté d'un mécanisme différent nous permettant de communiquer avec chaque réseau en particulier.

La sénatrice Buth : Je verrais cela essentiellement comme une mesure visant à combler une lacune du système où l'on entretient ces rapports avec des compagnies qui importent des produits plus grands ou des produits de base. Je présume que vous êtes en train de corriger cette lacune.

M. Mayers : C'est exact. Nous essayons de corriger cette vulnérabilité qui nous empêchait de réagir de façon proactive.

La sénatrice Buth : Et ces frais, comment se comparent-ils à ceux des autres pays, surtout ceux de notre plus grand partenaire commercial, les États-Unis?

M. Mayers : Les États-Unis ont adopté une approche différente. À l'heure actuelle, les Américains n'imposent pas de frais. Ils visent les installations plutôt que les importateurs. Cependant, grâce à leur nouvelle loi sur la modernisation de la salubrité alimentaire, ils ont le pouvoir de demander des frais pour l'obtention des permis dans ce domaine, alors nous nous attendons à ce que les États-Unis poursuivent dans cette voie. À l'heure actuelle, par contre, on n'impose pas de frais aux États-Unis.

L'Australie a un régime d'obtention de permis d'importation. Il y a des frais connexes, mais ce régime, contrairement à un régime de délivrance de permis, est plutôt transactionnel. Je ne peux pas vous fournir une analyse des coûts directs. L'intention est la même, mais la façon de faire varie d'un pays à l'autre.

La sénatrice Buth : Mais il y a une certaine cohérence dans les approches adoptées par les pays.

M. Mayers : C'est exact.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Mayers.

Chers collègues, nous allons poursuivre à huis clos pour examiner notre ébauche de rapport sur les frais d'utilisation.

(La séance se poursuit à huis clos.)


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