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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 35, Témoignages du 9 mai 2013


OTTAWA, le jeudi 9 mai 2013

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 4, pour examiner, afin d'en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujets : l'innovation dans le système agricole et agroalimentaire de la perspective des producteurs agricoles; et les débouchés pour les jeunes dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire).

Le sénateur Terry M. Mercer (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je m'appelle Terry Mercer. Je suis un sénateur de la Nouvelle- Écosse et le vice-président du comité. J'aimerais d'abord inviter mes collègues à se présenter, en commençant par la sénatrice Callbeck, à ma gauche.

La sénatrice Callbeck : Catherine Callbeck, Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice Buth : JoAnne Buth, Manitoba

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, Toronto.

[Français]

Le sénateur Maltais : Sénateur Ghislain Maltais, du Québec.

Le sénateur Rivard : Sénateur Michel Rivard, Québec.

[Traduction]

Le vice-président : Le comité poursuit son étude sur les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole. Aujourd'hui, nous entendrons deux groupes de témoins. Dans la première partie de la séance, nous nous attarderons sur l'innovation dans le système agricole et agroalimentaire de la perspective des producteurs agricoles. Dans la seconde partie, nous mettrons l'accent sur les débouchés pour les jeunes dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

J'attire votre attention sur l'ordre de renvoi que nous avons reçu du Sénat : que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole. Le comité sera autorisé à examiner les efforts en matière de recherche et de développement, notamment en ce qui concerne : a) le développement de nouveaux marchés domestiques et internationaux; b) le renforcement du développement durable de l'agriculture; c) l'amélioration de la diversité et de la sécurité alimentaires.

Sur ce, nous allons entendre nos deux témoins de ce matin. M. Art Enns est le propriétaire-exploitant d'Art Enns & Sons Ltd., et M. Jeff Yorga est le propriétaire-exploitant de J. Yorga Farms Ltd.

Merci d'avoir accepté notre invitation à venir témoigner devant le comité. Sans plus tarder, je vous invite à faire vos exposés. Commençons par M. Enns.

Art Enns, propriétaire-exploitant, Art Enns & Sons Ltd : Je tiens à remercier le comité de me donner l'occasion de parler de certaines des questions auxquelles fait face notre industrie agricole.

Il y a déjà plus de 40 ans que je possède et que j'exploite une ferme céréalière dans le Sud du Manitoba. Je n'ai jamais été aussi optimiste qu'aujourd'hui au sujet de l'avenir de mon industrie. J'ai œuvré au sein de plusieurs organisations — les Producteurs de grains du Canada, la Prairie Oat Growers et la Western Canadian Wheat Growers — tout au long de ma vie. Depuis que je travaille au sein de cette industrie, le monde agricole a connu d'importantes modifications sur le plan du marché mondial, de la concurrence et de la technologie. Toutefois, il nous reste encore quelques obstacles à surmonter afin de maintenir notre concurrence.

L'agriculture a toujours été composée de trois éléments : de l'innovation, d'une capacité d'adaptation et d'un peu de hasard.

Tout le secteur agricole évolue plus rapidement que vous ne le croyez. Des technologies novatrices voient le jour chaque année. On élabore des variétés de plantes ciblant des secteurs bien précis et répondant à des besoins nutritionnels particuliers et à des préoccupations d'ordre diététique. Les agriculteurs d'aujourd'hui s'efforcent sans cesse de s'adapter à ces nouvelles technologies et techniques et aux marchés émergents quand vient le temps de décider ce qu'ils sèment, quand ils sèment, à qui ils veulent vendre leur produit et quelle est la meilleure façon de prendre soin de leurs terres.

Autrefois, les agriculteurs n'avaient à se préoccuper que de la concurrence locale, c'est-à-dire de l'exploitation agricole des voisins ou de la localité voisine. Ce n'est plus le cas. Maintenant, les agriculteurs doivent pouvoir soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux. La concurrence avec les producteurs d'Amérique du Sud, de l'Australie, de l'Europe de l'Est et de la Russie est aussi réelle que celle avec la ferme au bout du chemin.

Il est essentiel que les agriculteurs d'aujourd'hui soient au fait de la situation. Il ne s'agit plus uniquement des prix du marché; il faut savoir ce qui se passe dans l'ensemble de l'industrie aujourd'hui. Toute crise qui a lieu dans un autre pays nous touche aussi. S'il y a une maladie dans l'industrie de la volaille en Chine, nos champs de soja n'en sortiront pas indemnes. Si une sécheresse sévit en Amérique du Sud, elle aura des répercussions sur mes prix. La fluctuation du dollar canadien influe sur la façon dont les coûts de mes intrants augmentent, ainsi que sur le coût de ma machinerie.

La technologie nous a aidés à rester concurrentiels. L'adoption très répandue de matériel guidé par satellite et d'équipement de levé sur le terrain permet aux agriculteurs de microgérer le rendement de leurs terres. Les agriculteurs embauchent maintenant des conseillers techniques pour les aider à cartographier leur terre selon sa fertilité. Cela leur permet de programmer leur matériel de semis en fonction des circonstances. Ainsi, je peux adapter mon matériel de manière à utiliser des taux variables d'engrais en fonction de la fertilité de diverses parties du champ.

Les agriculteurs utilisent aussi cette technologie de cartographie pour lutter contre les mauvaises herbes et les maladies. En ciblant uniquement les parties touchées de la récolte, ils peuvent réduire les doses d'application tout en réduisant leurs coûts et, surtout, leur utilisation de produits chimiques.

Ces techniques ont des répercussions qui vont au-delà de celle de la microgestion des cultures. Les consommateurs veulent de plus en plus comprendre d'où viennent les aliments qu'ils consomment. Les grands détaillants manifestent de l'intérêt à l'égard du recours à ce genre de techniques pour suivre l'ensemble des aliments dans la chaîne d'approvisionnement. Les agriculteurs qui souhaitent tirer profit de cette nouvelle tendance doivent être à la fine pointe du progrès.

Les fermes sont exploitées comme toute entreprise. Les agriculteurs déploient des efforts pour répondre à la demande des consommateurs de la façon la plus efficace et la plus rentable possible. Ils sont constamment à l'affût de nouveaux produits destinés aux marchés émergents. Auparavant, ils n'avaient pas beaucoup de choix en matière de sélection de culture et de commercialisation. Ce n'est plus le cas.

De nouvelles variétés de cultures sont constamment mises au point. La demande à l'égard de ces produits continue d'augmenter, et la mise au point de plantes à haut rendement qui poussent dans un grand nombre de conditions environnementales contribue à cette montée en flèche.

Malgré la hausse importante de cultures comme le soja et le maïs, les récoltes de beaucoup d'autres produits agricoles, comme le blé, sont limitées à cause de règlements incompatibles et restrictifs. L'enregistrement des variétés, en particulier pour le blé, n'est pas du tout uniforme, même au Canada. Les règlements dans l'Est du Canada sont différents de ceux de l'Ouest. Pour que je puisse, à titre d'agriculteur de l'Ouest, faire pousser une variété de blé qui a été autorisée dans l'Est du Canada pour le marché international des exportations, je dois enregistrer à nouveau cette variété dans l'Ouest du Canada. Ce processus oblige les producteurs à engager d'importants coûts supplémentaires, mais le plus grand inconvénient, c'est qu'il faut habituellement y consacrer beaucoup de temps, et nous ne pouvons pas nous le permettre dans un monde axé sur la concurrence.

Pour demeurer concurrentiels sur le marché mondial, les agriculteurs canadiens doivent avoir accès aux plus récentes technologies végétales et aux plus récents types de variétés. Toutefois, en raison de règles internationales incompatibles, ils n'ont pas accès à ces technologies, contrairement à leurs concurrents internationaux. Le gouvernement doit donner aux agriculteurs un accès aux mêmes mesures législatives sur le droit d'obtention végétale que celles d'autres pays ailleurs dans le monde. L'UPOV 91 est un accord visant à protéger les nouvelles obtentions végétales de grain. La ratification de l'UPOV 91 permettrait d'éliminer beaucoup de contradictions internationales en matière de réglementation sur les obtentions végétales, ce qui mettrait les agriculteurs canadiens sur un pied d'égalité.

Ces difficultés n'empêchent pas les agriculteurs de prendre des initiatives. Je suis membre d'une organisation, appelée la Prairie Oat Growers Association, et nous utilisons le financement provenant des prélèvements auprès de nos producteurs, ainsi que des fonds de contrepartie versés par le gouvernement. Nous cherchons à pénétrer de nouveaux marchés.

Nous avons perdu le marché de l'avoine pour chevaux dans le sud des États-Unis. Nous réalisons des études et des recherches pour essayer de reconquérir ce marché. Nous poursuivons également le marché émergent du Mexique, en ce qui concerne les flocons d'avoine. D'ailleurs, nous effectuerons une étude là-bas à une date ultérieure. Les agriculteurs sont très innovateurs lorsqu'il est question de ce genre d'initiatives.

En raison de l'évolution rapide du domaine agricole, les agriculteurs doivent constamment faire des prodiges pour trouver des solutions à de nouveaux problèmes. Les défis qu'ils devront relever dans l'avenir seront probablement très différents des problèmes auxquels ils sont confrontés aujourd'hui, mais les agriculteurs sont compétents. Ils s'adaptent à de nouveaux marchés, innovent à l'aide de nouvelles techniques et cherchent constamment des façons d'augmenter leur productivité. J'encourage notre gouvernement à nous donner les outils dont nous avons besoin pour réussir. Les agriculteurs s'occuperont du reste. Notre groupe d'entrepreneurs est très confiant.

Jeff Yorga, propriétaire-exploitant, J. Yorga Farms Ltd : Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. La question de l'innovation est vaste, et je vais tenter d'aborder un certain nombre de sujets durant la période qui m'est allouée. Lorsqu'on souhaite parler de l'avenir, il est parfois utile de parler brièvement du passé.

Il y a 10 ans, chaque segment de l'industrie du bœuf — le producteur primaire, l'exploitant de parc d'engraissement, le transformateur et le détaillant — travaillait en vase clos. Chaque segment fonctionnait de façon indépendante, et les secteurs se livraient concurrence afin d'obtenir une plus grande part de marché. Lorsque le désastre a frappé et que les frontières ont été fermées, ce marché a rétréci considérablement, et certains ont dû abandonner. Toutefois, une industrie nouvelle et dynamique renaît de ses cendres. J'aimerais vous parler aujourd'hui de la façon dont nous sommes en train de récupérer ce marché.

La première innovation nous a été imposée : l'identification obligatoire des installations. Parmi les grands pays exportateurs du monde, le Canada est le seul pays qui peut déclarer avoir mis en place une traçabilité complète. Les autres pays accusent des années de retard à ce chapitre et, en toute franchise, n'y arriveront peut-être jamais. Les coûts de ce système sont assumés par les producteurs primaires et peuvent être utilisés à l'échelle internationale pour aider à régénérer notre industrie.

Ce qui m'emballe, c'est que les possibilités qu'offre la traçabilité se concrétisent. Les premiers efforts visant à libérer de la valeur se sont traduits par le Beef InfoXchange System. Cet outil d'échange de données en ligne commence à mettre fin au fonctionnement en silo dans notre industrie du bœuf. Pour la toute première fois, les producteurs primaires auront accès à des données relatives au rendement pour tous les maillons de la chaîne de valeur. Ce qui est emballant, c'est que si les producteurs s'inscrivent gratuitement et fournissent régulièrement des données, l'industrie du bœuf pourra enfin adopter une approche proactive à l'égard des problèmes liés à la qualité et à l'uniformité et prendre d'autres mesures pour créer le bœuf parfait, qui ajoutera naturellement de la valeur à toutes les parties de la chaîne de valeur.

Parallèlement, les producteurs qui élèvent du meilleur bétail auront des données réelles sur lesquelles fonder la commercialisation de leur produit. Cette base de données permet aussi de consigner les renseignements relatifs à la gestion, comme les dossiers de vaccination, le type d'utilisation alimentaire et d'autres pratiques de gestion à la ferme. L'amélioration de l'uniformité grâce à un outil de consultation rapide pour les pratiques de gestion permet aux détaillants d'adapter des programmes de commercialisation en fonction des données; ces programmes contribueront à agrandir le marché et à ajouter de la valeur aux programmes de traçabilité que nous avons déjà payés. Ce qui est vraiment emballant, c'est que ce système, s'il est complètement adopté, ajoutera de la valeur à chaque maillon de la chaîne de valeur.

L'industrie commence également à bien comprendre l'efficience alimentaire. Les essais de recherche révèlent que cette caractéristique est génétique et que nous pouvons la reproduire chez les bovins au fil du temps. Une partie de la recherche concerne le domaine de la génomique, que l'industrie du bœuf commence tout juste à comprendre. Nous espérons que dans l'avenir, ces données nous permettront d'améliorer l'efficacité et de réduire les coûts. Toutes les économies de coûts améliorent immédiatement les activités du producteur primaire et de l'engraisseur.

J'aimerais profiter de cette occasion pour parler de la différence entre la recherche et l'innovation. La recherche, c'est l'étude d'un sujet; l'innovation, c'est quand cette recherche peut être appliquée concrètement, dans la vraie vie. Il est important pour les producteurs canadiens que des recherches soient menées au Canada, afin qu'ils puissent mettre à profit ces données et améliorer notre industrie.

Le lancement de l'organisation Bœuf Canada Inc. aura un immense succès. Elle mesure les résultats en dollars et fait la promotion du bœuf canadien dans le monde entier. Même si nous sommes rassurés par les campagnes de bœuf de marque, elles ne contribuent pas à agrandir le marché de l'industrie. À long terme, Bœuf Canada Inc. aura de plus en plus de succès, et l'organisation doit être soutenue.

Comme nous le voyons ici aujourd'hui, les jeunes s'intéressent à nouveau à l'industrie du bœuf. Le Cattlemen's Young Leaders Program fait figure de proue à l'échelle mondiale. Je vois que le prochain témoin est une représentante de ce programme. Je ne veux pas lui voler la vedette, mais je tiens à mentionner que je suis un diplômé du programme, et que des représentants d'autres pays viennent au Canada pour en apprendre plus sur ce programme et s'en inspirer.

De plus, j'ai eu l'occasion de passer du temps au niveau provincial en Saskatchewan, où l'on applique ce programme à d'autres secteurs agricoles. La majorité des jeunes qui reviennent dans le secteur du bœuf sont obligés d'occuper des emplois non liés à l'exploitation agricole afin de payer leur ranch. Certains considèrent cela comme un facteur négatif pour notre industrie, car ce n'est pas la norme pour nos voisins en agriculture. Toutefois, à long terme, ce sera grandement avantageux pour nous. Les jeunes producteurs de bœufs sont obligés d'acquérir d'autres compétences et de vivre toutes sortes d'expériences qui peuvent leur servir dans leur ranch ou à l'association de leur industrie. Ils apprennent également à gérer leurs affaires en composant avec des marges serrées. Comme nous le savons tous, apprendre à gérer une entreprise en déficit vous permet de la rendre encore plus rentable lorsqu'elle est en situation excédentaire.

La durabilité est l'objectif de bien des secteurs, dont le nôtre. Pour tous les producteurs de bœuf, les pratiques de gestion des terres efficaces et respectueuses de l'environnement sont une priorité. J'ai trouvé intéressant d'apprendre, de la part des représentants des détaillants, que les consommateurs veulent qu'on assure la durabilité, mais qu'ils ne veulent pas en assumer les coûts. Je suis fermement convaincu que les producteurs de bœuf sont au cœur de la durabilité de l'environnement. Nous ne devons pas oublier que sans la viabilité économique, nous ne pourrons assurer la durabilité sur le plan environnemental, car nous ne serons plus là.

Le dialogue commence à s'installer entre tous les intervenants de la chaîne de valeur du bœuf, comme en témoignent la Table ronde sur la chaîne de valeur de l'industrie du bœuf et les discussions d'orientation de l'Alberta Livestock and Meat Agency, ou ALMA. L'industrie comprend que le seul moyen de faire croître notre marché commun est de le faire ensemble. De plus, tout système alimentaire solide doit avoir une quelconque surveillance réglementaire, mais nous devons continuer à travailler à l'harmonisation de la réglementation avec les équivalences des États-Unis, afin que nos amis de l'ACIA soient ici à la table avec nous.

Je tiens à vous remercier de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. J'aimerais également inviter personnellement tous les membres du comité à venir en Saskatchewan pour voir directement comment nous mettons en œuvre ces innovations. Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.

[Français]

Le vice-président : Nous vous remercions de vos présentations, monsieur Yorga et monsieur Enns. Nous allons passer maintenant à la période des questions avec la sénatrice Eaton.

[Traduction]

La sénatrice Eaton : Étant de l'Est, quoiqu'agricultrice dans l'âme, je ne m'étais pas rendu compte qu'il y avait des règlements distincts pour le blé dans l'Est et dans l'Ouest. Nous n'avons pas de réglementation nationale. Pourriez- vous nous en parler plus en détail, nous dire ce que vous souhaitez et quand cela pourrait arriver? Je crois que ce serait un point intéressant à inclure dans notre rapport.

M. Enns : Je ne sais pas comment c'est arrivé. C'est dû en partie aux systèmes de commercialisation différents dans l'Ouest et dans l'Est du Canada. Dans l'Ouest canadien, nous avions la Commission canadienne du blé, qui s'occupait de certaines variétés de blé, pour lesquelles elle cherchait des débouchés. L'Est du Canada se conformait plus ou moins aux demandes des meuniers et des gens de l'industrie. Ils ont un ensemble de critères distincts.

La sénatrice Eaton : Vous avez un auditoire qui vous suit. Donnez-moi un exemple de critères pour diverses variétés de blé.

M. Enns : L'un des critères, c'est qu'il faut moins de temps pour mettre sur le marché un nouveau produit qui est homologué dans l'Est du Canada que dans l'Ouest. Dans l'Ouest canadien, il faudra une ou deux années de plus. Les exigences diffèrent en ce qui a trait aux protéines, à l'agronomie et à certaines caractéristiques requises pour les céréales.

La sénatrice Eaton : Comme l'eau, et ce genre de choses.

M. Enns : En particulier pour ce qui est de la résistance aux maladies.

La sénatrice Eaton : Travaillons-nous à la mise en place d'une norme nationale?

M. Enns : Les discussions ont débuté l'hiver dernier. Je souhaiterais les voir aller de l'avant beaucoup plus rapidement, afin que nous soyons sur un pied d'égalité. Certaines règles et certains règlements sont un peu dépassés. L'agronomie est importante, mais grâce à la nouvelle technologie en matière de fertilisation, de produits chimiques et tout le reste, certaines maladies ne sont plus aussi graves qu'auparavant.

La sénatrice Eaton : Pensez-vous, par exemple, que ce sera fait dans les six prochains mois?

M. Enns : Non. Les gens de l'ACIA m'ont dit qu'il faudra des années.

La sénatrice Eaton : Mais ce n'est pas possible.

M. Enns : Je suis tout à fait d'accord avec vous.

La sénatrice Eaton : Monsieur Yorga, au moment où nous arrivons, espérons-le, aux dernières étapes de nos négociations commerciales avec l'UE, le bœuf canadien constitue-t-il l'un des obstacles? Selon vous, comment ces discussions progressent-elles?

M. Yorga : Personnellement, il n'est pas de mon ressort de parler de façon précise d'un accord commercial avec l'Union européenne. Je tiens à souligner que l'UE n'est pas notre principal partenaire commercial. De mon point de vue, il est important que nous fassions des affaires avec les gens qui veulent faire des affaires avec nous. Nous devrions nous concentrer là-dessus. Il ne faut pas oublier que les habitants d'autres pays du monde ne mangent pas nécessairement le bœuf de la même façon que nous. Nous devons essayer de traiter avec les pays qui ajoutent de la valeur au bœuf que nous ne mangeons pas nécessairement.

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous nous donner des exemples?

M. Yorga : En Asie, par exemple, on mange du bœuf déchiqueté. Au lieu de manger du bifteck de surlonge, on le déchiquette et l'incorpore à un mets que l'on prépare déjà. Il n'est pas très avantageux pour nous de vendre du faux- filet, du filet et du bifteck là-bas, mais il est très avantageux de vendre dans ce marché des produits comme le bifteck de hampe, le bifteck de flanc et d'autres coupes de moindre valeur en Amérique du Nord.

La sénatrice Eaton : Dans les grilladeries d'Amérique du Nord, on fait beaucoup la promotion du bœuf américain de catégorie « Prime ». Pourquoi ne vendons-nous pas du bœuf Canada Primé? Est-ce parce que nous n'avons pas suffisamment fait connaître notre marque, ou vendons-nous tout notre bœuf de la meilleure qualité aux États-Unis? Comme cela se fait-il?

M. Yorga : Il n'y a pas de système de classement harmonisé actuellement. Le bœuf transformé au Canada est classé en fonction du système canadien de classement, soit la classification A, AA, AAA et Primé. Aux États-Unis, les catégories sont différentes, et je ne peux vous en parler en détail. Toutefois, puisque les systèmes du Canada et des États-Unis ne sont pas coordonnés, nos mesures sont différentes. Ici, le bœuf peut être de catégorie Canada AAA, alors que dans les restaurants américains, il est désigné différemment. C'est la même chose; il est simplement évalué de manière différente.

La sénatrice Eaton : Des travaux sont-ils en cours à ce chapitre?

M. Yorga : À ma connaissance, l'Agence canadienne de classement du bœuf est assujettie à une loi du Parlement, et on fait tout ce qui est possible pour changer cela afin qu'elle soit gérée par l'industrie et harmonisée.

La sénatrice Merchant : Vous venez de l'Ouest canadien, et cela me plaît; je suis de la Saskatchewan. Nous sommes déjà allés en Saskatchewan. Nous avons pris une autre route; nous nous sommes rendus dans la partie nord-ouest. Où est située votre ferme?

M. Yorga : À Wood Mountain, en Saskatchewan, au sud d'Assiniboine.

La sénatrice Merchant : Nous irons peut-être là-bas.

Je tiens d'abord à vous féliciter. Pouvez-vous nous parler de vos activités agricoles? Vous avez fait allusion au fait que vous êtes jeune. S'agit-il d'une ferme familiale, d'une entreprise familiale dans laquelle vous travaillez? Je suis heureuse de voir que vous travaillez pour l'entreprise familiale, car bien souvent, les jeunes ne choisissent pas cela comme carrière. Parlez-moi de votre exploitation agricole.

M. Yorga : Nous sommes la plus importante exploitation enregistrée de bovins Limousin au Canada, nous sommes donc des producteurs d'animaux reproducteurs. Mes parents sont là pour gérer l'entreprise tous les jours, du lundi au jeudi. J'ai un emploi à temps plein, alors je ne suis pas là.

Nous avons pu suivre l'évolution de l'automatisation, ce qui nous permet de reporter les gros travaux à la fin de semaine, au moment où tous nos employés sont présents et où nous pouvons faire ce type de travaux. Nous avons beaucoup investi dans les installations de transformation et de manutention afin de pouvoir le faire.

En agriculture, comme ailleurs, on peut choisir de consacrer des fonds aux installations ou à l'embauche de personnel. Comme vous le savez, dans les régions rurales du Canada, il est de plus en plus difficile de recruter des employés. Par conséquent, nous avons choisi d'investir dans les installations, afin de ne pas avoir à emprunter cette voie.

La sénatrice Merchant : Vous vous consacrez strictement aux bovins Limousin.

M. Yorga : Oui.

La sénatrice Merchant : Vous êtes donc une exploitation spécialisée.

M. Yorga : Puisque nous sommes des producteurs d'animaux reproducteurs, nous vendons aux éleveurs commerciaux, qui utilisent les taureaux que nous produisons ainsi que le matériel génétique pour élever le bœuf que vous consommez. Nous sommes un sous-ensemble du producteur primaire.

La sénatrice Merchant : Où travaillez-vous? Wood Mountain est un peu loin de Regina ou de Saskatoon.

M. Yorga : Je suis vice-président des ventes chez Value Partners Investments Inc., à Winnipeg. Je suis donc constamment sur la route, et j'habite...

La sénatrice Merchant : Vous n'êtes pas près de l'exploitation agricole.

M. Yorga : En effet.

La sénatrice Merchant : Monsieur Enns, je vous souhaite à vous aussi la bienvenue. Vous êtes un voisin.

Je crois que l'on s'inquiète un peu actuellement, dans l'Ouest canadien, du fait que les agriculteurs ontariens sont autorisés à utiliser de la semence de luzerne génétiquement modifiée. Êtes-vous au courant de cette controverse?

M. Enns : Je suis simplement au courant. Je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais je suis au courant de la controverse, oui.

La sénatrice Merchant : Je crois que la quasi-totalité de la luzerne est produite en Saskatchewan et en Alberta — soit environ 80 ou 87 p. 100 — et qu'environ 7 p. 100 est produite en Ontario. Les semences sont transportées par la pollinisation et les abeilles; on craint donc qu'elles se propagent dans l'Ouest canadien, où la culture est plus importante.

Êtes-vous préoccupé par la croissance de variétés de semences génétiquement modifiées? Comme les sénateurs l'ont déjà mentionné, nous entretenons des relations commerciales avec des pays de certaines régions du monde, notamment de l'Europe, qui n'achèteront pas de denrées alimentaires génétiquement modifiées.

M. Enns : Je peux seulement parler de ce que je cultive. Je me concentre sur le canola, le soja et le maïs. Mon industrie a accepté le tout très facilement. Je crois que 90 p. 100 des cultures de canola, de soja et de maïs sont génétiquement modifiées, et cela fonctionne très bien. Je crois qu'il a été démontré que c'était sécuritaire, selon ce que nous en savons. Aucun cas n'a été rapporté, à savoir que c'était un problème.

Il est important de retenir que nous avons une très bonne agence d'inspection au Canada. Toutes les variétés doivent passer par un processus très rigoureux de vérification avant qu'une licence soit délivrée dans l'Ouest canadien. Comme beaucoup d'autres, ma famille mange les aliments sur le marché, et je ne ferais jamais poussé un aliment dont je doute de la salubrité. Bref, je me sens tout à fait à l'aise à cet égard.

Est-ce un élément qui préoccupe le marché? Absolument. Avant d'aller de l'avant, nous devons nous assurer qu'il y a un marché pour le produit. Ce n'est pas un problème dans le cas de certaines cultures dans l'Ouest canadien. Le canola, le soja, le maïs et les autres variétés qui s'en viennent, comme la betterave à sucre, ont tous été acceptés, selon ce que j'en sais. Avant de les commercialiser, nous devons nous assurer qu'il y a un marché prêt à les accepter.

La sénatrice Merchant : Vous ne considérez pas le marché européen comme l'un de nos meilleurs marchés, à savoir celui sur lequel nous devons nous concentrer. Les Européens n'acceptent pas ces produits.

M. Enns : C'est vrai.

La sénatrice Merchant : Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous avez dit, à savoir que leur salubrité a été prouvée. J'en mange moi aussi.

M. Enns : Certainement. Je respecte le marché européen. Les Européens s'y sont jusqu'à maintenant opposés. Néanmoins, ils acceptent l'huile de canola et le tourteau de soja. Ils sont donc prêts à accepter divers produits transformés. Nous devons nous adapter et nous assurer d'offrir des produits qu'ils sont prêts à accepter.

La sénatrice Buth : J'aimerais vous demander de nous parler du rôle des agriculteurs en ce qui a trait à la recherche et à l'innovation. Monsieur Enns, vous avez mentionné plusieurs organismes agricoles dans lesquels vous avez travaillé. Monsieur Yorga, vous avez parlé de l'organisme Boeuf Canada Inc. et de la situation dans le secteur bovin. Pourriez- vous nous expliquer le fonctionnement du système pour ce qui est des prélèvements et de votre participation dans les priorités de recherches?

M. Yorga : Les prélèvements des agriculteurs sont versés aux associations provinciales, qui acheminent ensuite les fonds à l'Association canadienne des éleveurs de bétail. Les associations provinciales, par l'entremise de l'ACEB, financent l'organisme Boeuf Canada Inc.

Pour ce qui est de l'innovation à l'échelle de la ferme, nous constatons que la vaste majorité des recherches menées s'avèrent d'excellentes idées. Cependant, pour ce qui est de l'application concrète à l'échelle d'un vaste territoire, c'est très difficile, et les résultats ne sont pas toujours les mêmes. Il est donc important que les associations de l'industrie puissent s'échanger des données et ainsi informer les agriculteurs britanno-colombiens de ce qui s'est passé au Manitoba. Les gens peuvent ensuite déterminer si c'est applicable. Si quelque chose d'intéressant se produit au Manitoba, les gens de l'Île du Prince-Édouard doivent aussi en être mis au courant. Le rôle des associations de l'industrie est de diffuser les connaissances et les résultats des recherches aux agriculteurs.

La sénatrice Buth : Quel est le montant des prélèvements dans le cas des producteurs bovins?

M. Yorga : Actuellement, je crois que c'est de 1 $ par tête. La moitié remonte la chaîne et est versée à l'organisme Boeuf Canada Inc. ou à l'ACEB, tandis que l'autre moitié finance l'association provinciale.

La sénatrice Buth : Monsieur Enns?

M. Enns : La Prairie Oat Growers est une association enregistrée dans les provinces de l'Ouest canadien. Le prélèvement est d'environ 0,50 $ la tonne vendue. Nous avons mis à contribution ces fonds avec certains programmes provinciaux et fédéraux, dont Agri-stabilité, Cultivons l'avenir et certains autres programmes fédéraux. Une partie des budgets provinciaux nous apporte également une aide en nature. Nous avons ainsi été en mesure de mettre à contribution beaucoup de fonds, et nous l'avons fait dans deux ou trois domaines différents. Il y a la commercialisation, l'agronomie et la recherche de nouveaux débouchés. J'ai mentionné le marché équin dans mon exposé; il s'agit en gros du marché équin des États méridionaux des États-Unis. C'est un marché très lucratif. Au milieu des années 1980, nous détenions une très grande part de ce marché, et nous l'avons perdu, en raison notamment du prix et de divers enjeux au sud.

Nous constatons maintenant que les universités américaines ont réalisé beaucoup d'études qui concluent que l'avoine est un aliment très sain pour les chevaux. Les gens se servent actuellement d'aliments granulés, ce qui ne nécessite pas beaucoup d'étiquetage. Nous essayons d'inciter le marché équin américain à utiliser de nouveau de l'avoine. Nous suscitons beaucoup d'intérêt, et nous y consacrons du temps, parce qu'il s'agit de l'un des plus gros marchés qu'il serait possible de reconquérir. Les agriculteurs ont vraiment de la difficulté à maintenir le nombre d'acres consacrés à la culture de l'avoine dans l'Ouest canadien. C'est une très petite culture, comparativement aux autres. Je crois qu'on cultive de l'avoine en Ontario, au Québec et un peu dans les provinces maritimes. Dans l'Ouest canadien, la culture de l'avoine n'occupe que 3 millions d'acres en moyenne. Ce n'est donc pas une culture très importante.

Si nous pouvons l'avoir, ce sera un bon marché de grande qualité, et cela nous permettra aussi d'avoir plus d'options. Actuellement, la majorité de nos options concernent l'industrie de l'alimentation; cela nous donnerait une autre option. C'est quelque chose que nous pourchassons activement, et le Mexique nous a demandé si nous étions enclins à examiner des débouchés dans leur région.

La sénatrice Buth : Vous avez tous les deux mentionné les questions réglementaires et des choses dont vous avez besoin. Pour ce qui est de la recherche et de l'innovation, vos associations reçoivent des prélèvements. Qu'avez-vous de besoin de la part du gouvernement fédéral en ce qui a trait à la recherche et à l'innovation? Imaginez-vous que c'est Noël. Dites-nous ce que vous voulez.

Le vice-président : Ou peut-être ce qu'ils ne veulent pas.

La sénatrice Buth : En effet, ou ce que vous ne voulez pas.

M. Yorga : La première étape est de soutenir les initiatives qui sont déjà en place. Par exemple, les activités du Centre d'information sur le boeuf, ainsi que le Cattlemen's Young Leaders Program ne sont pas entièrement financés. Les grappes scientifiques du boeuf qui ont été mises en place ne sont pas entièrement financées. Si nous avons des fonds illimités et une liste de souhaits, il y a des éléments déjà en place qui fonctionnent très bien, mais nous cherchons encore du financement futur à cet égard. Au lieu de réinventer la roue, je crois qu'il est pertinent de financer des outils qui donnent aux agriculteurs l'occasion d'innover.

M. Enns : J'inciterais le gouvernement à nous donner l'occasion d'importer les dernières technologies végétales au Canada. En même temps, je comprends que l'élaboration d'une nouvelle technologie dans le domaine est très dispendieuse. Cela coûte des centaines de millions de dollars. Honnêtement, nous avons un très bon système public d'amélioration des plantes au Canada, mais le gouvernement est restreint en raison du montant nécessaire pour financer les organismes. J'aimerais que les mesures réglementaires s'adoucissent, ce qui permettrait à d'autres entreprises de venir au Canada et d'être protégées en vertu de la Convention de l'UPOV de 1991; ce serait un excellent début. Ce ne sont pas seulement les grandes sociétés qui y auraient accès. Bon nombre de petites entreprises ont aussi des programmes d'amélioration des plantes en collaboration avec d'autres pays. Elles travaillent de concert avec des petites entreprises d'amélioration des plantes en Europe et en Amérique du Sud. Elles sont aux prises avec les mêmes restrictions que les grandes sociétés lorsque vient le temps d'importer des technologies végétales ou des caractères en matière d'amélioration des plantes. Nous devons vraiment nous assurer d'être sur la même longueur d'onde.

Le Canada est l'un des deux ou trois pays du monde industrialisé à ne pas avoir signé la Convention de l'UPOV de 1991. L'Italie et la Nouvelle-Zélande sont les deux seuls autres pays à ne pas l'avoir fait, et je ne crois pas que nous sommes un pays du tiers monde. Nous devons emboîter le pas si nous voulons nous assurer d'être sur le même pied d'égalité que les autres. En tant qu'agriculteur, j'ai vraiment l'impression que nous y perdons au change.

La sénatrice Buth : Pourquoi ne l'avons-nous pas signée?

M. Enns : Il y a diverses raisons. Je crois que les lourdeurs administratives y sont pour quelque chose. Une mesure concernant l'UPOV a été proposée il y a quelques années, mais elle a été proposée en même temps qu'un autre projet de loi qui apportait des modifications majeures à la réglementation de l'ACIA. Il y a eu des problèmes concernant le financement. Un projet de loi a suscité beaucoup de controverses. Il est mort au Feuilleton. Il a été déposé de nouveau à quelques reprises, mais étant donné que nous avions des gouvernements minoritaires, ce n'était pas une priorité. Avant même de nous en rendre compte, 10 ou 15 ans s'étaient déjà écoulés, et il est primordial que la question soit de nouveau mise à l'avant-scène.

M. Yorga : Au sujet de la recherche, lorsque nous avons un éleveur de bétail et un producteur de céréales côte à côte, certains éléments s'avèrent bénéfiques pour de multiples industries. Il est important de se rappeler que les industries influent les unes sur les autres. M. Enns pourra le confirmer, mais au cours des 10 ou 15 dernières années il y a eu très peu de recherches sur le fourrage et les céréales fourragères, en particulier l'avoine. Plus la culture de l'avoine occupe d'acres, et plus mes coûts en matière de céréales fourragères diminuent. Plus la culture du canola occupe d'acres, et plus mes coûts en matière de céréales fourragères augmentent. Il faut se rappeler que ce qui se passe dans le secteur céréalier influe sur l'industrie bovine, et ce qui se passe dans l'industrie bovine influe sur le secteur céréalier. En ce qui a trait à ce que le rôle du gouvernement pourrait être dans le secteur de la recherche et de l'innovation, il y a des possibilités en matière de recherche et de fourrage dans le domaine des céréales fourragères qui viennent en aide aux deux groupes.

La sénatrice Callbeck : Monsieur Enns, vous affirmez n'avoir jamais été aussi optimiste par rapport à votre industrie, et c'est certainement une excellente nouvelle. Vous avez parlé dans votre exposé de la cartographie. J'ai récemment discuté avec quelqu'un qui s'en sert justement, et son rendement a augmenté considérablement. J'aimerais vous parler du coût. J'imagine que les coûts initiaux, ainsi que les coûts de maintien, doivent être élevés. Est-ce seulement pour les grandes fermes ou est-ce quelque chose que les petits agriculteurs peuvent envisager de faire?

M. Enns : Je crois que c'est quelque chose que tout le monde peut faire. Je n'ai pas une grande ferme. Je cultive environ 2 000 acres. J'en avais 3 000 auparavant, mais j'en ai actuellement 2 000, et c'est logique dans mon cas. Je dois faire des calculs. Il faut qu'il y ait un rendement du capital investi. Une certaine partie n'est pas complètement là. À mesure que plus de gens commencent à l'utiliser, la technologie n'est pas si mal. Si on peut épargner 40 ou 50 $ par acre, que cela coûte 7 ou 8 $ et que cela augmente le rendement, c'est bon. Les agriculteurs sont des gens d'affaires très habiles. Ils l'adapteront très rapidement ou ils rejetteront très rapidement l'idée, selon ce qui fonctionne dans chacun des cas. Je ne dis pas que cela fonctionnera partout, mais il y a des types de sol pour lesquels cette technologie est beaucoup plus rentable.

La sénatrice Callbeck : Vous avez 2 000 acres, et cela fonctionne pour vous. Si un autre agriculteur avec les mêmes cultures avait 1 000 acres, cela fonctionnerait-il pour lui ou l'agriculteur devrait-il attendre que les coûts diminuent?

M. Enns : Non. Les agriculteurs peuvent partager le tout avec d'autres. Ils peuvent avoir recours aux services d'entrepreneurs à forfait qui le feront à un coût raisonnable. Il n'est pas nécessaire d'investir dans l'achat de la machinerie. On peut aussi avoir des entrepreneurs à forfait qui le font à un taux fort raisonnable. Pour ce qui est des fermes de grande dimension de 20 000 ou de 40 000 acres, cela devient évidemment un investissement beaucoup plus rentable pour ces exploitants.

La sénatrice Callbeck : Vous avez beaucoup parlé de la technologie et de l'innovation. Certains témoins ont dit que parfois les agriculteurs sont lents à adopter les innovations et les nouvelles idées. Pourquoi? Ne sont-ils pas au courant des nouvelles technologies? Est-ce en raison du coût? Qu'est-ce qui les retient?

M. Enns : Je ne suis pas un jeune agriculteur, mais je crois que je suis novateur et que j'aime le changement. Il faut comprendre que plus on vieillit et plus il est difficile de changer, mais notre industrie nous oblige à nous adapter. Il faut le faire, sinon on mord la poussière.

Je vois un grand groupe de jeunes agriculteurs qui arrivent sur le marché. C'est vraiment en leur nom que je suis ici. C'est la prochaine génération d'agriculteurs. Ces jeunes ne seront pas aussi compréhensifs au sujet de certains des règlements que j'ai mentionnés. Ils veulent du changement, et ils le veulent demain et non dans un an.

Je ne le sais pas; j'imagine que nous allons dans différents endroits. Des agriculteurs sont-ils lents à s'adapter? Absolument. Cependant, la majorité des agriculteurs auxquels je m'associe et ceux que j'ai l'occasion de côtoyer sont très novateurs et demandent des innovations.

La sénatrice Callbeck : Monsieur Yorga, vous avez mentionné que les associations au pays s'échangeaient des renseignements en ce qui a trait à ce qui fonctionne et à ce qui ne fonctionne pas. Selon vous, ce système fonctionne-t-il bien? Les renseignements se rendent-ils aux principaux intéressés?

M. Yorga : Je le crois. Il faut rappeler que même si les renseignements sont diffusés cela ne veut pas nécessairement dire que les gens les lisent et en tiennent compte.

La sénatrice Callbeck : En effet.

M. Yorga : Je crois que les associations de l'industrie accomplissent un excellent travail en vue de communiquer avec les agriculteurs. Pour revenir sur votre dernière question, il arrive parfois que les agriculteurs ne veuillent pas nécessairement entendre ce qu'on leur dit.

La sénatrice Callbeck : Vous avez également parlé des systèmes de traçabilité. Faisiez-vous allusion au concept de la ferme à l'assiette?

M. Yorga : Je faisais allusion au concept du pâturage à l'assiette. Oui, tout à fait. Nous avons actuellement la capacité, grâce aux lecteurs de boucles de type RFID, de savoir exactement où une bête est née, où elle a été nourrie, où elle a été transformée et où elle a été acheminée pour la vente au détail.

La sénatrice Callbeck : Pourriez-vous nous donner une idée de l'effet que la traçabilité a sur le prix de la livre de bœuf que le consommateur achète?

M. Yorga : Je ne peux pas vous le dire précisément. Je peux par contre vous dire que si nous n'avions pas un tel système, notre marché international ne serait probablement pas ce qu'il est aujourd'hui. C'est quelque chose qui a été imposé à l'industrie en vue de rouvrir les frontières. Nous commençons maintenant à mettre à contribution cette technologie pour en fait l'utiliser en vue de créer de la valeur. Je ne crois absolument pas qu'une partie de la facture est assumée par les consommateurs canadiens, étant donné que le prix du bœuf n'a pas beaucoup fluctué au cours de la dernière décennie.

La sénatrice Callbeck : Les producteurs ont donc accepté les frais.

M. Yorga : Oui.

Le vice-président : Ceux qui, comme la sénatrice Callbeck et moi, sont à l'Est s'étonnent toujours d'entendre des agriculteurs parler de leur petite ferme de 2 000 acres; ce n'est pas du tout petit pour nous.

[Français]

Le sénateur Maltais : Messieurs, permettez-moi de vous féliciter pour la qualité de votre mémoire. Nous avons reçu beaucoup de personnes ici et je pense que vous avez, c'est tout à votre honneur, un mémoire de qualité et des explications qui sont extrêmement claires.

Vous avez également souligné, dans votre mémoire, que vous vous serviez de la cartographie par satellite pour effectuer des travaux sur vos terres et que cela vous permet de caractériser vos sols. Est-ce que cela permet aussi d'éviter des infestations d'insectes? Est-ce que vous pouvez détecter avec cette technique des infestations d'insectes?

[Traduction]

M. Enns : Oui, la technologie y est presque. Toutefois, certains dommages ont déjà été faits lorsqu'on obtient une image. Par exemple, la technologie permet d'obtenir environ cinq photographies de la ferme par semaine; mais si elles sont prises par temps nuageux, comme aujourd'hui, elles ne seront pas claires. Cela dépend aussi de l'image que donnera le satellite. Il manquera peut-être un champ, mais on verra le reste.

La cartographie et l'imagerie jouent un grand rôle dans la détection des maladies et des insectes.

[Français]

Le sénateur Maltais : Est-ce que vous croyez que, à l'avenir cette technologie peut être développée, et que cela vous permettrait, malgré les nuages, de voir arriver les invasions d'insectes, et de les prendre en charge immédiatement avec des insecticides?

[Traduction]

M. Enns : Oui, une technologie est développée au Manitoba et permettra de faire voler des petits avions au-dessus des champs. Vous pourrez en fait les lancer vous-mêmes à partir d'un camion pour faire un survol de vos champs, et prendre des photographies. Malheureusement, ces avions sont pour l'instant un peu trop chers pour un producteur comme moi, mais les images seront en temps réel. Si vous faites un survol à 5 heures, vous pourrez voir les images sur votre ordinateur à 7 heures.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ce qui veut dire qu'il y a une possibilité d'adaptation de cette nouvelle technologie au cours des années futures à des coûts abordables.

Monsieur Yorga, vous êtes un éleveur de vaches Limousin dans l'Ouest; êtes-vous nombreux?

[Traduction]

M. Yorga : Selon les enregistrements, les trois plus importantes races de bovins sont l'Angus, le Hereford et le Simmental. Le Charolais et le Limousin font partie de la deuxième catégorie. C'est intéressant parce que selon les enregistrements, la taille des troupeaux est assez stable. On mise beaucoup sur la couleur du cuir. En l'occurrence, les éleveurs veulent reproduire la vache au cuir noir. Or, on sait que la couleur n'est pas un gage de qualité. Au fil de l'utilisation accrue de la technologie, les producteurs réaliseront qu'il n'y a pas que la couleur qui compte, et nous croyons que l'enregistrement des autres races s'accroîtra.

[Français]

Le sénateur Maltais : Pouvez-vous me dire si la qualité de la vache Limousin est une plus-value pour un producteur comme vous, comparativement aux autres types de bétail qu'il y a chez vous?

[Traduction]

M. Yorga : La réponse à cette question est en fait très longue. Je crois qu'il est important que chaque secteur de la chaîne de valeur de l'industrie du bœuf réalise des profits. Pour que ce soit possible, le veau du producteur primaire doit avoir un poids moyen à la naissance, se lever rapidement, être vigoureux et être assez lourd au moment du sevrage, puisqu'il est vendu à la livre. Il va ensuite au parc d'engraissement où il est maintenu en bonne santé et prend rapidement du poids, puis est transformé. Le rendement et le persillage sont aussi importants. Il est ensuite coupé selon les besoins et acheminé aux détaillants. Pour ce faire, on a besoin de toutes les races, qui produisent toutes de bons bovins.

Je crois qu'on pourrait intégrer la vache limousine aux troupeaux de vaches Angus et Hereford; elle permettrait d'améliorer leur rendement sans modifier leur cadre. C'est une très longue réponse, mais oui.

[Français]

Le sénateur Rivard : Monsieur Enns, si vous le permettez, je vais revenir à votre présentation. Vous indiquez :

Les agriculteurs choisissent leurs cultures de manière à satisfaire la demande des consommateurs;

Et, à la dernière ligne :

[...] ainsi que du blé et du maïs à partir desquels on peut produire des biocarburants à base d'éthanol.

Des experts nous ont dit que, en 2050, notre planète verra sa population doubler. Déjà, les trois quarts de l'Afrique et le tiers de l'Asie meurent de faim. Est-ce que vous pensez qu'on devrait produire plus — puisque vous dites qu'il faut satisfaire la demande des consommateurs — ou qu'on devrait employer une partie importante de la production du blé et du maïs pour produire de l'éthanol?

Je partage votre avis sur l'éthanol. En revanche, vu l'augmentation vertigineuse de la population, pensez-vous que les agriculteurs canadiens sont capables de répondre à une demande de plus en plus accrue? Est-ce qu'on a la qualité de terrains, suffisamment de terres, suffisamment de producteurs pour faire face à la demande mondiale des prochaines décennies?

[Traduction]

M. Enns : Je crois que cela dépend du marché. Malheureusement, les agriculteurs se préoccupent surtout du meilleur rendement des investissements. À l'heure actuelle, c'est dans le marché de l'alimentation. Les aliments qui produisent de l'éthanol ne suscitent plus beaucoup d'intérêt. On n'a qu'à penser à l'explosion de la production de pétrole aux États-Unis et à tout le reste. Je crois que la réalité a changé. Nous avons développé certaines variétés pour appuyer l'industrie de l'éthanol.

Je l'ai mentionné, mais vous avez raison. Il n'est plus en tête de liste à présent. Le marché de l'alimentation offre le meilleur rendement, et la production des agriculteurs vise en grande partie ce secteur.

[Français]

Le sénateur Maltais : J'ai oublié une petite question, monsieur Enns. Vous êtes dans la culture des grains; est-ce que vous avez des problèmes de transfert de ferme de père en fils? Parce que ce sont des entreprises maintenant, ce n'est plus la petite ferme familiale du siècle dernier. Est-ce que vous éprouvez certaines difficultés? Par exemple, je regarde vos cheveux gris comme les nôtres, tout autour de la table — à l'exception du président. Est-ce que vous avez quelques petits problèmes de transfert de ferme comme on en voit au Québec?

[Traduction]

M. Enns : Je crois que les agriculteurs du Canada feront leur part, mais nous ne pouvons pas nourrir le monde entier. Nous avons besoin de l'aide des autres secteurs, et il y a beaucoup de nouvelles terres, qui sont en fait des terres agricoles. Une grande révolution de l'industrie agricole s'opère dans les pays du bloc communiste, et en Amérique du Sud. Je crois que ces pays représenteront notre plus grand défi puisqu'à l'heure actuelle, leurs coûts de production, et particulièrement le coût des terres, sont beaucoup moins élevés que les nôtres. Nous pourrons toutefois tirer profit des nouvelles technologies qui sont offertes.

M. Yorga : J'aimerais faire un commentaire sur la production d'éthanol. Les grains utilisés sont souvent les mêmes que ceux donnés aux bovins. Les usines de production d'éthanol peuvent utiliser des grains de qualité inférieure; notre industrie est donc en concurrence directe avec elles. Je n'aime pas dire que c'est déloyal, mais nous ne sommes pas en concurrence directe avec elles, puisque les grains doivent y être acheminés en vertu des subventions.

Le sénateur Black : En tant qu'Albertain, je comprends non seulement l'importance de l'agriculture, mais aussi l'innovation dont font preuve les agriculteurs et les grands éleveurs, souvent par nécessité. Selon vous, quels sont les obstacles qui nuisent à la recherche, au développement et à l'innovation? Est-ce que les gouvernements sont des partenaires efficaces?

M. Yorga : Le plus grand défi dans l'industrie du bœuf vient des grandes irrégularités. Comme je l'ai dit, les essais peuvent donner de très bons résultats à Lethbridge, mais pas au nord du Manitoba, par exemple. Aussi, les résultats sont longs à obtenir et souvent, la recherche et le financement se font à court terme. Il faut obtenir une réponse dans un délai prescrit sinon on manque de fonds.

Pour que la recherche soit efficace et puisse être appliquée, et pour que les producteurs puissent innover, il faut voir à long terme. Ainsi, les données transmises au Manitoba pourront être retournées à Lethbridge aux fins de nouveaux essais.

Le sénateur Black : Est-ce que c'est ce qui se produit?

M. Yorga : Ce qui gêne surtout les chercheurs, c'est qu'ils passent plus de temps à demander des fonds qu'à faire la recherche.

M. Enns : Les gouvernements ont un important rôle à jouer auprès des agriculteurs. Par exemple, le gouvernement actuel travaille activement au développement des secteurs commerciaux. L'Ouest canadien est une région d'exportation. La plupart de nos produits céréaliers sont expédiés ailleurs. L'accès aux marchés nous ouvre des portes, surtout si nous pouvons obtenir des produits à des taux moins élevés. Je crois que le gouvernement joue un rôle crucial à cet égard.

Il n'y a pas que les subventions. Les gouvernements peuvent aider autrement, par l'entremise de règlements qui facilitent le travail. C'est dans ce domaine qu'il peut intervenir.

Je souhaiterais seulement qu'il soit plus rapide. Le processus semble très long.

Le sénateur Black : Toutefois, même si le dialogue est plus lent que ce que vous souhaiteriez, vous le jugez significatif?

M. Enns : Oui. Le gouvernement entretient de bonnes relations avec nous, et avec les organisations dont j'ai parlé. La porte est toujours ouverte; surtout celle du ministre de l'Agriculture et des autres groupes que nous souhaitons rencontrer. Je crois que nous avons une bonne relation, et c'est de bon augure pour notre industrie.

Est-ce qu'on est toujours d'accord? Peut-être pas, mais c'est la nature de notre entreprise. Si on maintient le dialogue, on pourra avancer.

Le vice-président : Étant donné les différences de génération, il sera intéressant de connaître le point de vue de nos invités.

M. Enns : C'est tout un défi. Je suis agriculteur de troisième génération. Mon grand-père a immigré du Sud de l'Ukraine et a bâti une ferme dans l'Ouest canadien.

Nous sommes la troisième génération, mais je ne sais pas s'il y en aura une prochaine. Mes fils ont emprunté d'autres chemins. Est-ce qu'ils reviendront à la ferme? Je ne le sais pas, mais c'est un milieu difficile.

Il n'est toutefois pas difficile de trouver d'autres personnes pour cultiver la terre. J'aimerais que la ferme reste dans la famille; nous serons donc confrontés à certains défis au fil de son évolution, mais nous pourrons les surmonter. Tout finit par se régler.

Le vice-président : Monsieur Yorga, puisque vous serez avec nous pour la deuxième table ronde, voulez-vous attendre les prochains experts? On abordera la question des jeunes agricultures. Soyez toutefois à l'aise de formuler un commentaire maintenant.

M. Yorga : Le sujet est intéressant et complexe à la fois, pour beaucoup d'agriculteurs. J'ai eu de la chance; nous avons terminé notre plan de relève il y a trois ans. L'un des principaux défis associés à la planification de la relève, c'est que les fermes ont aujourd'hui une valeur beaucoup plus importante qu'avant, et dans certains cas — surtout dans le domaine des céréales et des plantes oléagineuses —, la dette est beaucoup moins importante. Avant, on héritait de la ferme, et on héritait de la dette. Aujourd'hui, la ferme représente dans certains cas un héritage de plusieurs millions de dollars. Avant, les parents ou les enfants qui n'étaient pas sur la ferme ne voulaient pas hériter de cette dette, alors on ne parlait pas beaucoup de planification de la relève. La ferme allait aux enfants qui avaient choisi d'être agriculteurs.

Aujourd'hui, puisque des millions de dollars peuvent être en jeu, certains enfants qui ne travaillent pas sur la ferme disent avoir droit à cet argent. Il existe de nombreux moyens créatifs de contourner cette difficulté. Par exemple, l'assurance-vie constitue une bonne façon de répondre à ces obligations sans avoir à diviser la ferme. De nombreux agriculteurs craignent de devoir aller devant les tribunaux s'ils n'arrivent pas à régler ces questions eux-mêmes. Ainsi, la ferme est divisée en quatre, par exemple, et la personne qui souhaitait prendre la relève n'a maintenant plus une ferme assez grande pour soutenir ses activités.

C'est un sujet très important, qui est souvent abordé dans les revues spécialisées en agriculture et à l'occasion des rassemblements de producteurs. Je crois que les gens de ma génération comprennent l'importance de tenir cette discussion. Certains agriculteurs de la génération précédente ne veulent pas en parler. Ils ont 80 ans, et leur fils agriculteur de 60 ans ne détient aucun titre, et ne peut même pas signer un chèque. C'est très inquiétant.

Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Enns et monsieur Yorga. Nous avons beaucoup profité de votre témoignage. Si vous avez d'autres idées à partager, veuillez s'il vous plaît en faire part au greffier. Encore une fois, je vous remercie.

Nous entamons maintenant la deuxième table ronde. Je tiens à vous rappeler — et à rappeler aux téléspectateurs — que le comité poursuit son étude sur les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole. Nous discuterons aujourd'hui des possibilités offertes aux jeunes des secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Se joignent à nous aujourd'hui — et ceux qui ont assisté à la discussion précédente reconnaîtront un certain visage —, M. Jeff Yorga, propriétaire-exploitant de J. Yorga Farms Ltd. et Mme Joanne Solverson, diplômée du Cattlemen's Young Leaders Program.

Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation. Madame Solverson, nous vous cédons la parole. Monsieur Yorga, vous pourrez également formuler des commentaires. Nous passerons ensuite aux questions des sénateurs.

Joanne Solverson, diplômée, Cattlemen's Young Leaders Program : Je vous remercie de m'avoir invitée à cette réunion. Je m'appelle Joanne Solverson. Je viens d'une ferme d'exploitation bovine située à l'ouest de Camrose, en Alberta. Nous sommes producteurs de veaux et de vaches, et nous exploitons un parc d'engraissement. Nous vêlons environ 900 vaches par année, et nous vendons les veaux et génisses sur le marché après les avoir nourris pendant 14 à 16 mois. Notre entreprise se démarque en ce sens que nous gardons les bovins de la naissance jusqu'à ce qu'ils soient prêts à la vente.

Je participe aux activités de la ferme depuis que je suis petite. J'étais également membre du Programme des 4-H de ma région jusqu'à ce que je dépasse l'âge permis pour y participer, à 21 ans. J'y ai par la suite occupé le poste de guide principal. En tant qu'ancienne élève active, j'ai eu l'occasion de participer à un programme d'échanges agricoles international appelé Agriventure. J'ai eu la chance de travailler dans des élevages de bovins en Nouvelle-Zélande et en Australie. Depuis neuf ans, je travaille pour United Farmers of Alberta, une chaîne de détail en agriculture. J'ai récemment obtenu un diplôme d'études postsecondaires en gestion agricole du Olds College, et je prévois obtenir un diplôme en agroentreprise l'année prochaine. J'ai eu la chance d'être choisie pour participer au Cattlemen's Young Leaders Program en 2012.

Une chose que vous avez besoin de savoir à mon sujet est que je suis résolue à consacrer ma carrière à l'agriculture et à la production du bœuf, car l'agriculture m'intéresse : elle représente ma passion et mon avenir. Je suis venue vous parler de l'importance des jeunes dans le secteur agricole et des programmes qui ont été élaborés pour favoriser le développement du leadership chez les jeunes.

La recherche joue un rôle de premier plan, surtout chez les jeunes. C'est elle qui stimule l'innovation et c'est l'innovation qui contribue à développer des opérations agricoles profitables. À leur tour, ces opérations offrent des débouchés aux jeunes Canadiens.

Le Cattlemen's Young Leaders Program vise à former des leaders qui stimuleront l'innovation et la recherche dans le domaine agricole pour préparer l'avenir. Chaque année, des jeunes producteurs de 18 à 35 ans sont choisis pour participer au programme de développement des CYL. Ces personnes représentent habituellement un échantillon des valeurs qui sont celles des jeunes agriculteurs d'aujourd'hui. Les candidats reçus sont invités à participer et sont ensuite jumelés avec un mentor par un comité de sélection. Les mentors sont choisis parmi des professionnels chevronnés de diverses disciplines du secteur agricole. Après le jumelage, l'expérience commence.

Les participants au CYL se trouvent à différents stades de leur carrière et ont suivi divers parcours dans l'industrie du bœuf. Ils pourraient être intéressés à se renseigner en vue d'une éventuelle carrière dans l'industrie du bœuf, à parfaire leurs connaissances ou à tisser des liens avec les dirigeants de leur secteur. Dans le cadre de ce processus, les participants en apprennent davantage sur ce que cela signifie d'être un leader. Le programme profite tant aux participants qu'à leurs mentors. Par exemple, le fait d'exposer une jeune personne aux éléments d'un choix de carrière potentiel peut être une expérience très enrichissante, susceptible d'engendrer une relation de travail avec le mentor. La participation à des activités de l'industrie, les rencontres périodiques avec les mentors et l'achèvement du Masters of Beef Advocacy Program font partie des principales activités qui aident les candidats à parfaire leurs connaissances. L'on vise à former des personnes très compétentes capables de représenter et de diriger l'industrie du bœuf de demain.

L'industrie du bœuf est très diversifiée. Ce programme a aidé nombre de participants à comprendre l'ampleur du secteur et à reconnaître les possibilités de croissance. Pour ceux qui cherchent à se spécialiser dans différents secteurs de l'industrie, le CYLP sert à les jumeler avec des experts dans leur champ d'intérêt. Certains diplômés du CYLP ont eu pour mentor des experts très respectés de l'industrie. Même si le mentorat n'est qu'un programme de huit mois, les relations qui en découlent dureront habituellement beaucoup plus longtemps. Par exemple, Virgil Lowe, éleveur et étudiant en droit à l'Université de Calgary, a eu pour mentor John Weekes, négociateur en chef du Canada pendant les négociations de l'ALENA; Katie Wood, étudiante en recherche de l'Ontario, a été jumelée avec Reynold Bergen, directeur scientifique du Conseil de recherche sur les bovins de boucherie; et Eric Buyer, jeune producteur de la Saskatchewan, a eu pour mentor Travis Toews, ancien président de l'Association canadienne des éleveurs de bétail, qui a récemment participé à de nombreuses négociations commerciales. Ces personnes font partie de la quarantaine de diplômés du programme.

Les membres du CYLP bénéficient aussi d'un accompagnement spécialisé au plan technologique, notamment en ce qui concerne le rendement de la production, la gestion des fourrages, l'identification par radiofréquence et l'utilisation de la génétique pour améliorer le rendement des cultures, la santé animale et la production.

À titre de participante au CYLP, j'ai eu l'occasion de prendre part à de nombreuses activités, dont l'International Livestock Conference, la Table ronde sur la chaîne de valeur de l'industrie du bœuf et les réunions générales annuelles de la CCA, pour n'en nommer que quelques-unes. Cela m'a permis de rencontrer des intervenants de l'industrie du bœuf. À la Table ronde sur la chaîne de valeur de l'industrie du bœuf, nous avons pu travailler avec des intervenants importants de l'industrie et du milieu des affaires, comme Cargill, McDonald's et de multiples producteurs du pays. Cette table ronde a porté sur la viabilité de l'industrie du bœuf. Le programme s'est attaché à trois secteurs clés : les secteurs économique, environnemental et social. Il a été question du rôle des jeunes dans bon nombre de discussions. Il était encourageant de voir la mesure dans laquelle le groupe appuyait le CYLP et, plus précisément, la participation des jeunes et des jeunes producteurs. Il été clairement énoncé qu'il est nécessaire qu'un nombre accru de jeunes et de jeunes producteurs s'engagent activement dans l'industrie du bœuf.

Ce programme participe aussi à la Five Nations Beef Alliance. Dans le cadre d'une activité tenue l'an dernier à Banff, des représentants du Canada, des États-Unis, du Mexique, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande se sont rencontrés pour discuter de l'avenir de l'industrie. Deux participants au CYLP ont pris part à l'activité. Ils ont trouvé utile de discuter avec des producteurs de bœuf étrangers et d'apprendre d'eux. D'autres participants au CYLP se sont rendus aux États-Unis pour prendre part à des activités semblables, comme le National Western Stock Show, la réunion annuelle de la National Cattlemen's Beef Association, qui est la principale convention de l'industrie du bœuf, un forum important qui permet au Canada de défendre ses intérêts auprès des États-Unis et une table ronde Canada- États-Unis.

Je ne suis pas certaine que bien des sénateurs mangent chez McDonald's, mais si tel est le cas, vous avez peut-être vu mon visage sur leurs napperons cet été. Mon père et moi avons travaillé avec Cargill et McDonald's afin de trouver une façon de tisser des liens avec les clients. Nous visions à les informer de l'origine du bœuf et de la façon dont le bétail est élevé. Les napperons ont servi à la grandeur du Canada et ont été vus par des milliers de personnes. C'est un exemple d'approche innovatrice pour rejoindre les consommateurs canadiens et leur dire que le bœuf qu'ils consomment est salubre, sain et nutritif.

Tyson et Virgil Lowe, deux diplômés du CYLP, ont aussi travaillé avec McDonald's. Ils ont créé une vidéo concernant les méthodes contemporaines de production du bœuf pour sensibiliser les consommateurs aux efforts qu'ils investissent dans l'élevage du bœuf et montrer leur engagement à cet égard. Ils se sont attachés à montrer comment et où le bétail était élevé. Les représentants de McDonald's ont reçu de la rétroaction positive à l'issue de ces promotions et se sont dit intéressés à continuer à faire ce type de travail avec les éleveurs de bovins canadiens et le programme CYL.

La recherche est essentielle pour l'avenir de l'industrie du bœuf. Elle est nécessaire pour assurer la viabilité et la croissance du secteur. La recherche joue un rôle important en rehaussant la salubrité et la qualité du bœuf canadien. Nous devons assurer l'intégrité du cheptel canadien et des normes élevées en matière de santé animale. Nous devons encourager activement la diffusion du savoir dans l'industrie. Nous devons appuyer et encourager l'adoption rapide de nouvelles technologies pour favoriser la compétitivité. La population mondiale augmente et devrait atteindre les 9 milliards d'ici à 2050. Pour répondre à la demande croissante de bœuf, le Canada devra investir dans la recherche et l'innovation. Comme l'âge moyen des producteurs de bœuf augmente d'année en année, nous devons promouvoir des programmes comme le CYL pour assurer l'engagement des jeunes dans l'industrie du bœuf.

Il est impératif que les jeunes travaillent dans le domaine de l'agriculture pour assurer notre approvisionnement alimentaire.

Le vice-président : Merci, madame Solverson. Vos titres de compétences ne sont pas rehaussés par votre photo sur des napperons de McDonald's, mais par le fait que les diplômés du Olds College ont une excellente réputation dans le secteur. Je continue de féliciter l'école pour la qualité des étudiants qu'elle forme.

Monsieur Yorga, voulez-vous formuler des commentaires ou passer à la période de questions?

M. Yorga : Oui, j'aimerais formuler des commentaires concernant le programme. Selon moi sa plus grande qualité est de réunir des jeunes producteurs de 18 à 35 ans. Ils amènent des compétences très diversifiées de diverses régions du pays. Ils s'assoient tous ensemble comme nous le faisons maintenant et tiennent des discussions ouvertes sur à peu près tous les sujets qui touchent l'industrie du bœuf. Les gens sont libres de poser des questions et de débattre de sujets qu'ils ne pourraient pas normalement aborder.

Parallèlement, ils montrent tous un engagement à l'égard de l'éducation permanente. Toute personne ayant déjà participé à un programme de mentorat sait que l'on n'en retire que ce que l'on veut en retirer. Votre mentor n'est pas là pour vous enseigner; vous êtes là pour apprendre. Quand toutes les personnes qui se trouvent dans la pièce sont là pour apprendre, cela facilite un libre échange d'idées.

Le vice-président : Nous allons commencer la période de questions avec la sénatrice Eaton.

La sénatrice Eaton : C'était très intéressant.

Monsieur Yorga, combien d'animaux faut-il pour avoir une ferme d'élevage des bovins viable? Nous parlons de succession et vous faites partie d'une ferme bigénérationnelle. Vous soutenez deux générations.

M. Yorga : La profitabilité de chaque ferme varie par région. Divers facteurs entrent en ligne de compte, alors il est difficile de vous donner un nombre. Je dirais que si une exploitation agricole n'a pas de dettes et qu'elle peut fonctionner avec des liquidités, elle n'a pas besoin d'être bien grande. Afin d'atteindre ce niveau, les fermes doivent être de plus en plus grandes pour réaliser des économies d'échelle. Par exemple, un tracteur de trait coûte près de 100 000 $, mais il fait la même quantité de travail que vous ayez 10 ou 200 vaches. Il est difficile de dire de quelle taille vous avez besoin pour être profitable, car cela varie d'une région à l'autre.

La sénatrice Eaton : Qu'en est-il de votre région au Manitoba?

M. Yorga : En Saskatchewan.

La sénatrice Eaton : Désolée.

M. Yorga : Encore une fois, c'est difficile à dire. J'ai remarqué que la majorité des éleveurs de bovins commerciaux de ma région ont plus de 250 vaches.

La sénatrice Eaton : Si j'étais une jeune personne qui faisait appel à vous pour du mentorat et que je voulais travailler dans l'industrie du bœuf avec des ressources limitées, je pourrais louer des terres. Quel serait mon nombre optimal? Comment s'y prend-on pour commencer? Quel conseil donneriez-vous à quelqu'un qui veut se lancer dans l'élevage?

M. Yorga : Vous devez louer des terres, louer des vaches et avoir un deuxième emploi.

La sénatrice Eaton : C'est bon à savoir. Nous avons accueilli des représentants de banques la semaine dernière, et on leur aurait donné le bon Dieu sans confession — à les entendre, cela semblait si facile. C'est très intéressant.

M. Yorga : Après 10 ans, vous pourriez être propriétaire de vos vaches. Une fois que vous l'êtes et que vous demandez un prêt à la banque, elle ne les prendra pas comme capitaux, car il s'agit d'animaux vivants qui peuvent mourir.

La seule façon d'avoir des immobilisations sans capitaux propres est par le truchement d'un prêt garanti par la LCPA — la Loi canadienne sur les prêts agricoles. Ce sont les seuls qui financeront des terres, du bétail ou de l'équipement sans capitaux propres, et c'est une ressource à laquelle un jeune producteur peut avoir accès pendant ses cinq premières années d'exploitation. Vous devez obtenir ce prêt par l'intermédiaire d'une banque ou d'une coopérative de crédit et respecter leurs règles relatives aux prêts. Si vous faites appel à eux sans avoir de capitaux propres et de plan d'affaires, vous ne serez toujours pas admissible à un prêt garanti par la LCPA. Cependant, si vous avez un plan d'affaires et un type de bilan, vous pourriez y être admissible.

La sénatrice Eaton : Est-ce une école de commerce ou un mentor qui vous aide à élaborer un plan d'affaires pour vous présenter à la banque ou obtenir votre premier prêt? Est-ce que c'est quelque chose qu'un mentor vous aiderait à faire?

M. Yorga : Il pourrait vous aider s'il s'agissait de votre champ d'intérêt. Dans le contexte du CYLP, si vous participiez au programme dans le but d'aller chercher ce type de connaissances et que vous veniez tout juste de terminer vos études, étiez sans ressources et vouliez élever du bétail, il est clair que l'on vous jumellerait avec quelqu'un qui serait capable de vous transmettre les connaissances et les outils pour ce faire.

La sénatrice Eaton : Attirons-nous suffisamment de jeunes gens dans le secteur agricole ou y a-t-il trop d'obstacles financiers?

Mme Solverson : Les coûts des intrants et les personnes qui commencent sont deux des plus grands défis. Le CYLP présente une bonne partie des différents programmes qui existent. En Alberta, il y a aussi l'Alberta Feeders Association grâce à laquelle, encore une fois, il est possible d'obtenir des prêts; elle peut financer pour vous le bétail et vous la remboursez lorsque vous le vendez. Il y a aussi FAC, qui offre un prêt aux jeunes agriculteurs.

Dans le cadre du CYLP, on nous informe de bien des options potentielles, et il est possible d'être encadré et de bénéficier des conseils de nombreux mentors, pas nécessairement celui avec qui on est jumelé; il y a bien des gens qui travaillent aussi avec les mentors de différents participants. Il est beaucoup plus facile de trouver les ressources dont vous avez besoin ou les personnes qui vous fourniront les conseils et les ressources nécessaires pour commencer.

M. Yorga : Je vais parler de la question de savoir si les jeunes producteurs ont besoin d'aide pour commencer dans le domaine ou si on les encourage à y travailler. Je pense que les jeunes producteurs aimeraient revenir, et ceux qui le font sont conscients des défis.

Nous devons être très prudents lorsque nous tentons de concevoir des programmes visant précisément à les ramener. Lorsque vous avez de nombreux acheteurs dans un regroupement, cela gonfle les prix et complique la vie de tout le monde. En conséquence, faciliter le financement pose problème.

D'autres pays ont opté pour un modèle dans lequel au lieu de faciliter l'obtention de financement, ils changent les conditions. Au lieu de devoir rembourser un prêt garanti par la LCPA sur 15 ans, je pourrais le faire sur 30 ans. Mon problème n'est pas nécessairement de le rembourser, mais la variabilité de mes liquidités. Si je suis capable d'étaler ces paiements sur une certaine période, cela atténuera l'incidence sur mes liquidités, ce qui rendra l'entreprise plus viable pour une jeune personne qui commence.

La sénatrice Merchant : Monsieur Yorga, vous venez de mentionner que d'autres pays avaient des programmes. De quels pays s'agit-il?

M. Yorga : L'Australie, par exemple. Il est possible d'obtenir des prêts sur 100 ans sur des terres. Cela présente un certain défi là-bas parce que les terres ne sont pas aussi productives qu'elles le sont ici, alors il en faut davantage. Cela coûte donc plus cher. Voilà pourquoi les prêts sont consentis sur une plus longue période.

Je crois qu'il en va de même en Europe. On permet un amortissement sur une plus longue période compte tenu du coût des terres.

La sénatrice Merchant : Savez-vous si l'Australie est capable d'attirer plus de jeunes gens vers le domaine agricole? Avez-vous une idée de leur taux de réussite?

M. Yorga : Je ne connais pas la réponse. Je sais que l'Australie fait partie de la Five Nations Beef Alliance. C'est un point que nous pouvons soulever auprès d'eux et voir ce qui ressort des discussions du CYL. Le CYL est en train de rédiger un article sur la viabilité pour la Five Nations Beef Alliance, et c'est une des questions qui seront posées. Nous pouvons vous transmettre la réponse ultérieurement.

La sénatrice Merchant : Madame Solverson, concernant les programmes auxquels vous avez participé, comme le CYL, est-ce que la plupart des participants sont intéressés à avoir leur propre exploitation? Quelles autres possibilités de travail y a-t-il dans l'industrie pour les jeunes qui n'ont pas leur propre exploitation?

Mme Solverson : Exactement. Par exemple, Katie Wood ne travaille pas nécessairement directement dans sa ferme; elle s'intéresse plutôt à la recherche dans le secteur agricole. Je sais qu'il y a eu des personnes qui ont travaillé à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Bon nombre d'entre eux ont même travaillé avec des organismes prêteurs. Il y a eu divers participants qui ne sont pas nécessairement engagés dans l'exploitation directe de la ferme, mais qui travaillent quand même dans l'industrie agricole et du bœuf, dans des bureaux.

Dans le cadre de ce programme, nous avons aussi vu pas mal de jeunes qui travaillent dans le secteur et bon nombre de personnes qui veulent suivre leur exemple. Comme nous l'avons vu, une bonne partie du travail se fait en coulisse, comme celui des producteurs. Il y a Ryder Lee. Nous avons Fawn Jackson et Jill Harvie, qui était coordonnatrice de programme. On les considère toujours comme des jeunes qui travaillent dans l'industrie du bœuf, mais qui ne sont pas producteurs.

La sénatrice Merchant : Diriez-vous que la plupart des jeunes ne vont pas...

Mme Solverson : Il y a les deux. Il y a les producteurs classiques et les producteurs de formation, et certains doivent avoir un deuxième emploi. Je travaille à la ferme, mais je travaille aussi à temps plein au magasin de vente au détail.

Je ne saurais dire si la balance penche d'un côté ou de l'autre, mais il y en a un bon nombre qui font les deux et qui ont besoin d'un deuxième emploi, en particulier ceux qui sortent de l'école. Ils n'ont pas tout ce qu'il faut ou les fonds nécessaires pour travailler à temps plein sur la ferme, alors ils ont besoin d'un deuxième emploi dans le domaine agricole.

La sénatrice Merchant : Certains ont-ils plus de deux emplois? Ils n'en ont peut-être pas deux, mais trois. Si je me souviens bien, nous avons entendu dire cela.

Combien étiez-vous dans votre groupe au Olds College?

Mme Solverson : Pendant mon année, nous étions près de 60 qui participaient au programme de deux ans auquel j'étais inscrite. Trente-quatre ont obtenu leur diplôme. Au cours des deux ans, plus du tiers ont abandonné, échoué ou ont dû retourner à la ferme. Dans le programme que je viens de terminer, nous étions 32. Ce qui est un peu surprenant, c'est que 17 participants venaient de l'Ontario.

La sénatrice Merchant : Ils ont tous obtenu leur diplôme?

Mme Solverson : Il reste encore la deuxième partie du programme à faire. Nous avons terminé la partie en classe, et il nous reste maintenant la partie dirigée sur le terrain. Encore une fois, le stage est un peu comme l'apprentissage en milieu de travail. Dans ce programme, je pense qu'il n'y a qu'une personne qui a dû abandonner pour des raisons médicales, sinon, toutes les autres se sont rendues jusqu'au bout.

La sénatrice Merchant : Les élèves ont-ils des dettes en sortant, comme c'est le cas pour de nombreux programmes universitaires? Vous avez parlé de la nécessité de réunir des fonds pour lancer une exploitation. Avez-vous en plus des dettes d'études à rembourser? Est-ce que les programmes coûtent cher?

Mme Solverson : J'ai dû demander un prêt étudiant pendant mes trois années d'études. C'est une dette que je dois rembourser.

Certains étudiants, j'en suis certaine, n'ont pas eu besoin d'emprunter, mais la plupart ont dû demander des prêts étudiants ou ont obtenu d'autres types de fonds pour pouvoir poursuivre leurs études au niveau postsecondaire.

Le vice-président : En ce qui a trait aux élèves de l'Ontario qui vont étudier au Olds College, nous en prendrons un peu le crédit, car nous avons beaucoup appuyé le collège.

La sénatrice Buth : J'aimerais beaucoup en savoir davantage sur le programme des jeunes leaders, car il me semble être adapté à chacun. Il ne fond pas tout le monde dans un même moule, essentiellement. Qui est votre mentor?

Mme Solverson : Mon mentor tout au long du programme est Toby Oswald-Felker. Elle est maintenant consultante auprès de Kaleidoscope Solutions, mais elle travaillait auparavant pour une chaîne d'alimentation au détail. Elle a travaillé pour Safeway pendant près de 14 ans, et j'ai ainsi pu voir l'autre côté de la médaille, soit le point de vue du client et de la chaîne d'alimentation au détail.

Mon père participe aux activités de la ferme, et c'est un excellent mentor pour moi. On a examiné le point de vue du consommateur, les façons d'entrer en contact avec lui, ses décisions d'achat, de qui il achète, et aussi comment on s'occupe des communications avec le public lorsque des problèmes surgissent comme l'ESB ou lorsqu'il y a une épidémie, les répercussions sur les ventes, et ce qu'on fait notamment pour demeurer en contact avec les clients. On a abordé la question des activistes, et cetera, dans nos cours. Le volet communication était donc bien garni. Après mon expérience avec McDonald's et le couvre-plateau, j'ai bien vu les effets positifs que pouvaient avoir diverses façons de diffuser l'information auprès des consommateurs et d'établir des liens avec eux. On sait que les consommateurs font maintenant plus de choix santé ou avisés et qu'il n'y a plus seulement le prix qui compte.

M. Yorga : J'aimerais faire un bref commentaire à ce sujet. Pendant le processus de sélection, il y a deux séries d'entrevues. On prend des notes pendant les entrevues, et les membres du comité de sélection examinent les notes par la suite pour jumeler les mentorés avec les mentors en tenant compte du domaine d'apprentissage et de connaissances, mais aussi, en fonction de la personnalité. Il faut que le mentor soit une personne avec qui le mentoré va bien s'entendre et avec qui il aura le goût d'apprendre. Les connaissances ne sont pas tout; il faut aussi que la personne soit facile d'approche, et je pense que les responsables du programme ont fait un travail remarquable à cet égard en s'efforçant de jumeler les mentorés avec des mentors partout au Canada avec qui ils vont bien s'entendre et qui vont favoriser leur apprentissage.

La sénatrice Buth : Comment le programme est-il financé?

Mme Solverson : Le programme est financé par des commanditaires de la fondation. ALMA finance notamment le programme depuis deux ans, trois plutôt, puisque nous en sommes à la troisième année du programme complet. Il y a eu un projet pilote la première année auquel n'ont pris part que cinq participants, mais par la suite, il y a toujours eu 16 participants au total. Les partenaires de la fondation sont ALMA, UFA, Cargill et CCA, la Canadian Cattlemen's Association. Il y a aussi le commanditaire de la catégorie or, Financement agricole Canada, et le commanditaire officiel, le magazine Canadian Cattlemen, qui en fait la promotion.

Certaines sociétés souhaitent aussi agir comme mentors auprès de la prochaine génération. Elles sont quelques-unes à nous dire qu'elles aimeraient participer, jouer un rôle à cet égard. C'est le cas notamment de Cargill, et il y a aussi la CCA et la Canadian Western Agribition, pour ne nommer que celles-là, car il y a eu trois années de 16 participants, et ces participants ont tous eu un mentor provenant de divers milieux, soit une personne du monde des affaires, un producteur, un vétérinaire, et cetera.

M. Yorga : À l'heure actuelle, il n'y a que le gouvernement de l'Alberta qui soutient activement le programme. D'autres y songent. Celui de la Saskatchewan a récemment indiqué qu'il aidera financièrement les participants de la province, dans le cadre de Cultivons l'avenir 2, et qu'il participera à Agribition. Pour l'instant, il ne fait pas partie des commanditaires de la fondation. Voilà, c'est tout.

Le vice-président : J'aimerais rappeler à nos auditeurs que s'il s'en trouve parmi eux qui aimeraient participer au programme, les responsables seraient heureux d'en discuter avec vous.

La sénatrice Callbeck : Nous sommes très heureux d'accueillir des jeunes comme témoins ce matin.

J'aimerais moi aussi en savoir un peu plus au sujet du programme CYL. Je suis originaire de l'Île-du-Prince- Édouard où on offre un programme de cinq ans aux aspirants agriculteurs, et je crois savoir qu'il est très populaire. Si j'ai bien compris, vous avez eu 40 diplômés la première année.

Mme Solverson : Je dirais près de 40.

La sénatrice Callbeck : Il y avait cinq participants la première année, et depuis, ils sont 16.

Mme Solverson : Oui.

La sénatrice Callbeck : Combien d'années dure le programme?

Mme Solverson : Le mentorat dure huit mois. Nous avons reçu des fonds supplémentaires d'ALMA pour la phase 2 et nous avons des diplômés qui demeurent impliqués par la suite. Tout ne s'arrête donc pas après les huit mois de mentorat. Un bon nombre de diplômés demeurent impliqués pour assurer la viabilité du programme. Nous participons à différentes activités et conférences. Le programme de mentorat a une durée prévue de huit mois, mais la plupart de nos diplômés restent impliqués et participent à diverses activités et discussions sur ce qui s'en vient dans les années à venir. Pour l'instant, nous venons de recevoir des fonds pour la phase 2, et cela vise à garder les participants impliqués après la fin de leur première année.

La sénatrice Callbeck : Quand a eu lieu la première année? En quelle année?

Mme Solverson : Le projet pilote a eu lieu en 2010.

La sénatrice Callbeck : Cela fait donc trois ans. La première année, il y a eu 5 participants, puis 16 par la suite. Est-ce qu'ils travaillent tous dans le milieu agricole?

Mme Solverson : Je ne saurais dire, mais à ce que je sache, c'est le cas pour ceux avec qui j'ai gardé contact.

Le vice-président : Monsieur Yorga, vous êtes un diplômé. Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Yorga : La phase 2 a cela d'intéressant qu'elle réunit tout le monde à nouveau. J'ai mentionné au départ qu'il s'agissait d'un lieu qui favorise l'apprentissage continu, alors le fait d'avoir de nouveaux venus et d'élargir le groupe favorise le débat. Grâce à la contribution d'ALMA à la phase 2, nous avons été en mesure d'élargir le groupe, de le souder. On en a fait une organisation d'anciens. Si je suis à Grande Prairie, par exemple, je peux appeler un participant du programme CYL et aller visiter ses installations. Il en va de même si je suis à l'Île-du-Prince-Édouard, puisque nous avons notre premier participant de cet endroit au sein du groupe cette année.

La sénatrice Callbeck : Monsieur Yorga, vous avez parlé de l'amortissement et du fait qu'il serait sans doute utile d'allonger la période. Avez-vous des idées sur la façon d'améliorer les programmes fédéraux pour soutenir la prochaine génération?

M. Yorga : Le programme fédéral, la Loi canadienne sur les prêts agricoles qui est déjà en place, prévoit une période de remboursement de 15 ans. Si je demande un prêt à Financement agricole Canada, la période de remboursement est de 25 ans. Les banques ont diverses options, mais si la période était plus longue au départ, ou si elle correspondait à celle de l'industrie, le programme serait plus facile à comprendre. Si les jeunes vont sur le site web et font les calculs sur 15 ans, cela les effraie.

En sachant qu'ils peuvent étaler le tout sur une période plus longue, ils pourront utiliser un programme comme celui-là, dont bon nombre de jeunes producteurs ignorent l'existence, malheureusement. En ce qui a trait à ce que le gouvernement peut faire, comme je l'ai mentionné précédemment, si on examine attentivement les outils en place, ils pourront nous servir.

La sénatrice Callbeck : Les outils sont là. Y a-t-il des façons de les améliorer?

M. Yorga : À mon avis, ce qui serait le plus important, ce serait de changer la période de remboursement. Si vous apportez ce changement, vous ferez de la Loi canadienne sur les prêts agricoles un outil fantastique.

La sénatrice Callbeck : Madame Solverson, aimeriez-vous ajouter quelque chose?

Mme Solverson : Je suis d'accord avec ce qu'a dit M. Yorga et aussi avec le fait qu'il faut mieux informer les jeunes producteurs au sujet des outils disponibles. Ces outils sont nombreux, mais bien des jeunes ne savent pas qu'ils existent. Il serait utile qu'on trouve des façons de les renseigner et de faciliter pour eux les investissements.

Le sénateur Black : En ce qui a trait à nos deux témoins, la preuve est faite. Lors de mon dernier passage au Olds College, j'ai parlé avec le président et il me disait qu'autrefois, c'était les enfants de la famille pour qui les perspectives d'avenir étaient les moins bonnes qui revenaient à la ferme. Aujourd'hui, et c'est ce qu'on observe depuis quelques années, ce sont les enfants qui ont les meilleures perspectives d'avenir, qui ont le plus d'ambition et qui sont les plus intelligents qui reviennent à la ferme ou au ranch. Je pense que nos deux témoins le prouvent amplement.

J'ai une question à vous poser à tous les deux. Quelle est l'influence des grandes exploitations agricoles commerciales? Nous avons parlé des fermes familiales et de leurs intérêts, mais il y a aussi ce que j'appellerais les fermes industrielles. Quel rôle jouent-elles et quelle est leur influence sur votre avenir?

M. Yorga : Il y a deux façons de répondre à la question. Une grande exploitation permet à un jeune de travailler et de voir par lui-même comment une exploitation fonctionne. C'est un avantage. Là où j'ai des réserves, c'est au sujet des propriétaires non gérants. Comme la valeur des terres a beaucoup augmenté, les gens voient cela comme un investissement. Des personnes qui ne connaissent pas l'agriculture achètent des terres agricoles et les louent ensuite. Ceux qui les louent sont malheureusement bien souvent des jeunes qui ont besoin de terres. Ce qui risque de se produire, et ce qui va se produire, c'est que lorsque le prix des produits de base va baisser, ces jeunes ne pourront plus tout à coup louer ces terres parce que ces dernières ont été achetées à un prix trop élevé. Ce sont ces propriétaires non gérants qui en feront les frais. Lorsque les gens décident d'acheter des terres pour investir, les prix montent, et il est alors difficile pour les nouveaux venus de se lancer en affaires et de jouer un rôle actif dans le milieu.

Le sénateur Black : Vous voyez cela, toutefois. Est-ce un phénomène que vous voyez en Saskatchewan, ainsi qu'au Manitoba et en Alberta sans doute, c'est-à-dire des intérêts commerciaux qui achètent des terres et qui rendent cela difficile — et je ne présume de rien ici — pour les familles d'agriculteurs et votre génération de reprendre le flambeau?

M. Yorga : J'hésite à tout mettre dans le même panier. Oui, c'est un phénomène que j'ai observé, et, oui, j'ai vu des gens payer plus que la valeur perçue.

S'agit-il d'un problème à long terme? Je ne pense pas. Je pense que le marché réglera le problème de lui-même. Le prix des terres fluctue. Lorsqu'il y a de « l'argent passif » dans un secteur et que les prix chutent, ce sont les premiers à quitter le secteur. Pour un jeune intelligent prêt à sauter sur l'occasion, c'est une chance unique, car lorsque les prix baissent, il y a beaucoup d'acres de terre à vendre.

Mme Solverson : Je suis d'accord avec M. Yorga à ce sujet.

J'aime bien voir les grandes exploitations sous divers angles. Notre ferme est constituée en société. C'est une bonne façon pour ceux qui ont une grande famille de prendre de l'expansion. Lorsqu'on veut englober plus que les deux générations, soit les oncles et les beaux-frères, il est souvent plus facile de le faire, pour avoir une taille suffisante et multiplier les partenaires, en constituant la ferme en société plutôt que d'opter pour un partenariat. On peut ainsi garder l'entreprise au sein de la famille, ou de la famille élargie, et avoir une grande exploitation agricole plutôt que d'avoir seulement une ferme familiale ou un partenariat.

Dans certains cas, une grande exploitation est tout simplement une façon de garder les activités, ou de les élargir, au sein de la famille, au lieu de créer d'autres cellules ou des subdivisions.

Le vice-président : La dernière question de la journée revient au président du comité, le sénateur Mockler.

Le sénateur Mockler : Vous êtes les agriculteurs et les leaders de demain. Vous avez dit que vous aimeriez que la période d'amortissement soit plus longue. Nous avons de nouveaux marchés, pour lesquels les jeunes agriculteurs ont besoin de meilleurs outils technologiques, d'outils modernes, pour produire leurs produits. Nous avons en outre des marches à créneaux en raison de l'immigration. Les gouvernements, tant fédéral que provinciaux, devraient-ils envisager de consentir aux jeunes agriculteurs des prêts-subventions? La personne présente un plan stratégique, le met en œuvre et crée ainsi de l'emploi et de meilleurs produits pour le marché. Cela permettrait-il d'attirer des jeunes au sein du secteur agricole canadien?

M. Yorga : La question des prêts-subventions m'inquiète toujours. Étant donné la valeur des biens dont on parle, je pense que cela pourrait inciter des jeunes à prendre des risques inconsidérés.

S'il s'agit de prêts-subventions après, disons, 15 ans, la question est alors intéressante. Je pense qu'il serait important d'y accoler un délai, afin d'éviter que les gens se lancent dans n'importe quoi en sachant que leur prêt n'aura pas à être remboursé. Il faut que cela s'étende sur une certaine période de temps afin que la personne prouve le sérieux de son affaire.

Mme Solverson : Je n'ai pas grand-chose à ajouter. Je pense moi aussi qu'il faut être conscient de certains risques si on propose cela. Je suis d'accord avec ce que M. Yorga a dit à ce sujet.

Le sénateur Mockler : J'habite près d'une ville frontalière de l'État du Maine, et il y a quelques mois, je me suis rendu dans quelques villes aux États-Unis. Lorsque je suis allé dans des magasins comme Costco, Sam's ou Loblaws, et leur grand supermarché Publix, j'ai remarqué qu'il y avait une section pour les produits agricoles locaux, puis pour ceux de la Californie, et cetera. Est-ce une initiative qui fonctionnerait au Canada d'avoir une section réservée aux produits locaux? Il y aurait une section pour les produits de l'Atlantique, du Québec, de l'Ontario ou de l'Ouest canadien, par exemple. Pensez-vous que cela encouragerait les jeunes à se lancer? On entend trop souvent dire que les grandes entreprises prennent toute la place, et que les producteurs locaux sont absents. En tant que jeunes agriculteurs, qu'en pensez-vous?

M. Yorga : J'ai parlé de ma première préoccupation à ce sujet précédemment. Il a été prouvé que les programmes de marque dans l'industrie du bœuf ne sont pas nécessairement profitables pour l'industrie. Au niveau local, cela peut l'être pour le producteur qui se trouve à 10 milles de l'endroit. Au niveau de l'industrie, il est difficile de prouver que cela a donné lieu à quelque augmentation que ce soit.

Ce qui est important à mon avis, c'est l'étiquette Bœuf Canada : nous avons du bœuf canadien, du bœuf élevé au Canada, et nous en avons long à vous dire à ce sujet. Nous savons d'où il vient, nous connaissons son histoire et nous pouvons en faire la promotion. Lorsque nous parlons tous d'une même voix, les consommateurs entendent le même message et ils trouvent le même produit, qu'ils soient dans une épicerie à l'Île-du-Prince-Édouard ou dans une en Colombie-Britannique.

La sénatrice Eaton : J'aimerais poursuivre dans la même veine que le sénateur Mockler. On parle de la marque Bœuf Canada. Dans le cadre du libre-échange, envisagez-vous d'opter pour la production sans hormone? Certains pays de l'Union européenne, par exemple, ne veulent-ils pas du bœuf sans hormone?

M. Yorga : Ce n'est pas une option pour l'industrie. C'est une option pour une entreprise ou un producteur privé. Si une entreprise ou un producteur décide d'élever du bœuf sans hormone pour le vendre dans les pays de l'Union européenne, il s'agira alors d'un programme de marque qu'il gérera lui-même. Il le fera sous l'égide de nos organisations, mais le produit ne sera pas nécessairement commercialisé par Bœuf Canada, car il s'agira d'un programme distinct.

Le vice-président : Nos invités ce matin étaient Joanne Solverson et Jeff Yorga, qui ont participé tous les deux au Cattlemen's Young Leaders Program. Je tiens à vous dire qu'il a été rafraîchissant pour nous d'accueillir des jeunes de l'industrie ce matin. Nous vous remercions d'être venus et vous encourageons à poursuivre votre excellent travail.

Comme je l'ai mentionné à notre groupe de témoins précédent, si jamais il vous vient des idées par la suite et que vous aimeriez nous en faire part, ou que vous aimeriez commenter les propos d'autres témoins, n'hésitez pas à acheminer le tout à notre greffier.

(La séance est levée.)


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