Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 7 - Témoignages du 23 novembre 2011
OTTAWA, le mercredi 23 novembre 2011
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 50, pour examiner, en vue d'en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis, et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada.
Le sénateur Lillian Eva Dyck (vice-présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La vice-présidente : Bonsoir. J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les sénateurs et à tous les téléspectateurs qui suivent cette réunion du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur CPAC ou sur le web. Je m'appelle Lillian Dyck; je viens de la Saskatchewan et je suis vice-présidente du comité. Je remplace le président, le sénateur St. Germain, qui ne peut pas être avec nous ce soir.
Notre comité a pour mandat d'examiner des projets de loi et des questions relatives aux peuples autochtones du Canada en général. Pour mieux comprendre les problèmes de notre clientèle, nous invitons régulièrement les représentants des organisations autochtones à témoigner devant notre comité. Plutôt que de limiter les discussions à un seul thème, nous laissons les témoins nous parler des problèmes qui préoccupent le plus leurs membres. Ce genre de réunions permettent ensuite au comité de décider quelles études entreprendre pour répondre au mieux aux besoins de la communauté autochtone.
Ce soir, nous allons entendre six témoins, que nous répartirons en deux groupes. Le premier groupe sera composé de représentants de l'Assemblée des Premières Nations, de l'Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis. Les témoins du deuxième groupe parleront surtout des questions qui préoccupent les jeunes. Il sera composé de représentants du National Inuit Youth Council, du Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations et du Ralliement national des Métis. Je suis heureuse de voir autant de jeunes dans la salle ce soir. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire, et nous saluons également la présence des aînés qui sont assis au bout de la table.
[Français]
Avant d'entendre nos témoins, j'aimerais présenter les membres du comité qui sont présents aujourd'hui.
[Traduction]
Le sénateur Nick Sibbeston vient des Territoires du Nord-Ouest. Le sénateur Sandra Lovelace Nicholas vient du Nouveau-Brunswick, et le sénateur Larry Campbell, de la Colombie-Britannique. Le sénateur Nancy Raine vient elle aussi de la Colombie-Britannique. Le sénateur Dennis Patterson vient du Nunavut, le sénateur Don Meredith, de l'Ontario, et notre entraîneur, le sénateur Jacques Demers, du Québec.
Je souhaite la bienvenue à notre premier groupe de témoins. Nous accueillons Richard Jock, directeur général de l'Assemblée des Premières Nations; Élisabeth Ford, directrice de la santé et du développement social, à l'Inuit Tapiriit Kanatami; et Clément Chartier, président du Ralliement national des Métis. Je vous invite à nous donner un aperçu des problèmes les plus pressants de vos membres, après quoi, nous passerons aux questions des sénateurs. Je vous en prie.
Richard Jock, directeur général, Assemblée des Premières Nations : De combien de temps disposons-nous, madame la présidente?
La vice-présidente : Nous accordons généralement cinq minutes à chaque témoin, ce qui laisse amplement de temps aux sénateurs pour vous poser des questions.
M. Jock : Je voudrais tout d'abord vous remercier de nous donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Je vous transmets les salutations du chef national Shawn Atleo. Il étudie en ce moment un projet de loi qui a été déposé aujourd'hui, au sujet de la reddition de comptes, et cela occupe une bonne partie de son temps.
J'aimerais dire quelques mots des principaux enjeux auxquels font face les Premières nations. Notre population est très jeune, mais, en comparaison de l'ensemble de la population canadienne, les Premières nations sont défavorisées sur le plan de l'éducation, comme nous l'avons récemment expliqué à votre comité. Les Premières nations connaissent également une pénurie d'emplois rémunérés, le taux de chômage pouvant atteindre 80 p. 100 dans un grand nombre de communautés.
Les Premières nations font également face à des problèmes sanitaires chroniques. Le taux de prévalence de certaines maladies est beaucoup plus élevé qu'ailleurs au Canada, à l'exception peut-être de nos parents les Inuits, chez qui le taux de tuberculose est 8 à 10 fois plus élevé que dans le reste de la population canadienne. S'agissant du diabète, les taux sont en nette progression et sont déjà trois fois plus élevés que dans la population en général.
Les communautés des Premières nations connaissent également de graves problèmes sur les plans fiscal et structurel, qui découlent directement de la Loi sur les Indiens, celle-ci ayant été adoptée, comme chacun sait, il y a plus de 100 ans. Ces contraintes se répercutent sur notre société, nos conditions de logement et nos services sanitaires.
Les Premières nations aspirent de plus en plus à créer de nouvelles structures, de nouvelles administrations et de nouvelles façons de transiger les unes avec les autres et avec les autres paliers du gouvernement, sans oublier bien sûr le secteur privé. La relation que nous avons en ce moment est marquée par de longues années de méfiance, et aussi par la perception que le gouvernement s'immisce dans la conduite de nos affaires quotidiennes.
Certes, les excuses qu'a présentées le premier ministre en 2008 au sujet des pensionnats indiens a marqué le début d'une nouvelle ère et en quelque sorte une nouvelle donne. L'adoption par le Canada de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones est elle aussi une étape importante, qui constitue un premier jalon dans l'établissement d'une relation fondée sur le respect mutuel et le partenariat. Enfin, le chef national et le gouvernement du Canada ont annoncé la mise sur pied d'un plan d'action conjoint, dont on peut espérer qu'il permettra le règlement de ces problèmes sur une base de collaboration et de respect des priorités mutuelles.
Tout le monde reconnaît qu'il faut faire mieux. Bien sûr, vous avez pris connaissance des études et des rapports qui ont été faits en 1981, avec Penner, et en 1996, avec la Commission royale sur les peuples autochtones. En 2011, la vérificatrice générale a publié un rapport sur les recommandations qu'elles a faites sur une période de 10 ans au sujet des Premières nations. Ce rapport indiquait que les conditions ne s'étaient pas vraiment améliorées dans les domaines que son service a examinés, et qu'elles s'étaient même parfois détériorées, ce qui témoigne de l'existence d'obstacles structurels qui entravent tout progrès.
Bref, la priorité, pour les Premières nations, est de recadrer la relation. La clé du succès passe par une approche équilibrée et pragmatique. Il faut revaloriser la relation Premières nations/Couronne si l'on veut franchir les étapes critiques qui se présentent à nous, et la rencontre Premières nations/Couronne qui devrait avoir lieu d'ici la fin de l'année est un pas dans cette direction.
Il faut établir de nouveaux arrangements fiscaux si l'on veut que les Premières nations soient en mesure d'assurer des services viables et équitables, fondés sur des normes reconnues. Il faudra certes apporter des changements structurels à la façon dont on pourra s'entendre sur de meilleurs arrangements fiscaux, mais la clé du succès, c'est assurément la mise en place de gouvernements des Premières nations et la reconnaissance de leur capacité de créer leurs propres institutions et de se doter des mécanismes de planification et de reddition de comptes qui sont indispensables à tout gouvernement.
Autrement dit, le progrès passe par la responsabilisation, et le remplacement d'un régime de contrainte et de contrôle par une relation fondée sur le respect, la reconnaissance et le soutien qui caractérisent le partenariat et la responsabilité mutuelle. La responsabilité, ça va dans les deux sens.
Il faut remplacer les modèles fondés sur la dépendance et les allocations budgétaires par un système de financement durable des services de base comme la santé et l'éducation, dont bénéficient tous les habitants du Canada. Il faut aussi faire disparaître la délégation unilatérale qui se fait au moyen de contrôles ministériels et de la Loi sur les Indiens, et la remplacer par une responsabilité partagée dans les diverses sphères de compétence, conformément aux normes dont je parlais tout à l'heure.
Par ailleurs, un grand nombre de communautés vivent dans des conditions qui menacent leur stabilité et leur sécurité, notamment lorsqu'elles sont affligées par des désastres comme des inondations, car les secours tardent souvent à venir et ils ne profitent pas à ceux qui en ont le plus besoin.
Enfin, nous voulons établir de nouveaux mécanismes financiers qui nous permettront de mettre en place les infrastructures de base comme l'alimentation en eau potable, le logement et les services essentiels aux enfants et aux familles.
Comment pouvons-nous travailler ensemble? J'ai plusieurs idées là-dessus. Bon nombre des approches législatives adoptées dans le passé ne reflétaient pas les priorités et les aspirations des Premières nations, ce qui aboutissait bien souvent à des conflits puisqu'il n'y avait pas d'entente, au départ, sur les objectifs à atteindre; il faut plutôt adopter des lois ciblées sur des secteurs particuliers.
L'APN préconise depuis longtemps l'élaboration en partenariat de tous les textes législatifs visant à modifier la situation des Premières nations, ce qui comprend une discussion approfondie de la portée et des objectifs du projet de loi, ainsi que sa rédaction conjointe. Une fois cela établi, on pourrait s'entendre sur les mécanismes à adopter pour la prise de décisions et la résolution des conflits.
Nous avons eu un excellent dialogue sur l'éducation, et nous savons que le comité sénatorial va déposer un rapport d'ici quelques jours ou quelques semaines. Pour nous, c'est une priorité, et nous avons hâte de mettre en oeuvre ses recommandations, avec votre aide. Bien entendu, une nouvelle approche, pour être efficace, nécessite de nouveaux mécanismes, de nouveaux systèmes et de nouveaux arrangements financiers. Dans ce dossier, il ne faut pas rater notre coup, car c'est l'avenir des jeunes qui est en jeu.
Parmi les autres priorités, il y a aussi l'éducation postsecondaire, après le cycle de la maternelle à la 12e année, qui est aussi importante que l'éducation préscolaire. C'est l'ensemble du parcours scolaire qu'il faut prendre en compte. Bien entendu, le système d'éducation, pour être efficace, doit comprendre également des volets sur la culture et la langue des Premières nations, sans oublier les activités sportives.
Nous sommes tout à fait disposés à mettre en place avec vous un système de responsabilité réciproque et éventuellement de nouvelles institutions comme un médiateur des Premières nations ou un vérificateur général des Premières nations. Nous pourrions également voir ensemble comment supprimer les obstacles qui entravent nos économies, obstacles qui sont souvent causés soit par des politiques soit par des systèmes. Il y a aussi d'autres dossiers à examiner, comme les revendications globales et les autres politiques qui n'ont pas été mises à jour depuis 10 ans. Il est temps de les actualiser, si nous voulons accélérer la cadence du changement.
Cela dit, je suis prêt à répondre aux questions.
La vice-présidente : Merci, monsieur Jock.
Monsieur Chartier, vous avez la parole.
Clément Chartier, président, Ralliement national des Métis : Merci.
Tout d'abord, j'aimerais présenter un bref aperçu du Ralliement national des Métis à ceux d'entre vous qui sont nouveaux dans ce comité. Nous sommes le gouvernement national des peuples métis sur nos terres historiques, lesquelles s'étendent des provinces des Prairies jusqu'à l'Ontario et à la Colombie-Britannique, et des Territoires du Nord-Ouest jusqu'au nord-ouest des États-Unis, ce qu'on appelle depuis toujours le Territoire américain du Nord- Ouest.
Nos cinq organisations affiliées provinciales sont les membres de notre exécutif. Leurs dirigeants sont élus par scrutin à l'échelle provinciale, et elles adhèrent toutes au même code de citoyenneté de la Nation métisse pour l'inscription de leurs citoyens. Elles administrent un grand nombre de programmes et services des gouvernements fédéral et provinciaux, généralement par l'entremise d'institutions affiliées indépendantes, dans les domaines du développement du marché du travail, du financement des entreprises, du développement économique, du logement, des services à l'enfance et à la famille, de l'éducation et de la culture. Nos priorités cadrent parfaitement avec votre mandat général, qui consiste à examiner, en vue d'en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis.
À lui seul, l'énoncé de votre mandat donne une bonne idée des enjeux auxquels nous faisons face dans nos relations avec le gouvernement du Canada. En dépit du fait que la Constitution reconnaît les Métis comme l'un des trois peuples autochtones du Canada, et que la Cour suprême du Canada a décrété, en 2003, dans l'arrêt Powley, que les Métis constituaient un peuple autochtone à part entière et qu'ils jouissaient de certains droits, les gouvernements fédéraux qui se sont succédé ont toujours prétendu que nos droits fonciers avaient été abolis par la loi.
En pratique, cela signifie que, à l'exception des Métis établis au nord du 60e parallèle, le gouvernement fédéral nous exclut de son processus de règlement des revendications. Cette position a un effet particulièrement néfaste sur les communautés métisses eu égard à l'obligation de consultation et d'accommodement. Et à cause de cet état de choses, les entreprises privées font très peu de cas de nos intérêts lorsqu'elles planifient un projet important sur notre territoire.
S'agissant du peuple métis, votre comité devrait examiner en priorité la question des droits fonciers que détient le peuple métis en vertu des dispositions non respectées des deux lois fédérales qui reconnaissent ces droits : la Loi sur le Manitoba, de 1870, et la Loi des terres fédérales, de 1879.
L'article 31 de la Loi sur le Manitoba concédait un territoire de 1,4 million d'acres aux enfants des chefs de familles métisses pour l'extinction du titre indien sur les terres de la province. Il s'agissait là d'une disposition clé de l'entente négociée par le premier gouvernement provisoire métis, dirigé par Louis Riel, et le gouvernement Macdonald, en 1807. C'est ce qui a donné naissance à la Loi sur le Manitoba et à la création de la province du Manitoba dont la population, à l'époque, comptait 90 p. 100 de Métis. L'arrivée massive de colons de l'Ontario retarda de 10 ans la distribution de ces terres, si bien que la grande majorité des Métis ont quitté cette province qui, à l'origine, occupait une superficie minuscule.
Les Métis continuant à réclamer des titres sur leurs terres, le gouvernement a adopté la Loi des terres fédérales de 1879, qui accordait des concessions aux Métis établis à l'extérieur du Manitoba. Il est important de signaler ici que, pour la mise en oeuvre de la Loi sur le Manitoba aussi bien que pour celle de la Loi des terres fédérales, nous étions considérés comme des individus et non pas comme un peuple, comme cela aurait dû être le cas.
Ce n'est qu'après que les Métis de la vallée de la Saskatchewan ont constitué un deuxième gouvernement provisoire, sous la direction de Riel, et qu'ils ont résisté à l'invasion de l'Armée canadienne en 1885, que le gouvernement fédéral a commencé à donner suite à la loi qu'il avait adoptée. Pour s'acquitter de ses obligations, il a choisi de créer des commissions des Sang-Mêlé qui, au lieu de terres, ont délivré des certificats aux Métis établis ailleurs dans les Prairies, dans le nord-est de la Colombie- Britannique et dans le district de la Mackenzie, mais tout ce processus a été entaché de nombreuses fraudes, à tel point que la Cour suprême du Canada l'a décrit, en 2003, comme un « triste chapitre de l'histoire de notre nation ».
La bataille que la Manitoba Metis Federation mène depuis 30 ans pour faire reconnaître la validité des concessions promises aux Métis par la Loi sur le Manitoba et toujours pas accordées va se décider devant la Cour suprême du Canada le 13 décembre. Le Ralliement national des Métis est un intervenant dans cette affaire.
La décision qui en résultera modifiera certainement l'approche du gouvernement fédéral vis-à-vis des Métis, étant donné que la cour d'appel du Manitoba a déjà confirmé certains principes qui devraient avoir des conséquences importantes pour l'avenir.
Il faut également que vous sachiez que le Ralliement national des Métis et notre gouvernement de la Saskatchewan, Métis Nation — Saskatchewan, ont déposé une demande introductive d'instance dans le nord-ouest de la Saskatchewan eu égard à des concessions promises dans la Loi des terres fédérales et jamais accordées. L'affaire concernant les Métis du Manitoba va ouvrir la porte à d'autres revendications et à d'autres poursuites relativement à des terres situées sur notre territoire traditionnel dans l'Ouest du Canada et pour lesquelles des certificats ont été délivrés.
Votre comité se doit d'examiner les raisons pour lesquelles les Métis continuent d'être exclus du processus fédéral des revendications territoriales et du programme de financement des causes types, ce qui nous empêche de défendre nos intérêts. Il serait souhaitable que vous recommandiez notre inclusion dans le processus des revendications territoriales ou bien la création d'une nouvelle commission des revendications métisses, ce qui éviterait des poursuites judiciaires coûteuses.
Le refus du gouvernement fédéral d'assumer ses responsabilités à l'égard de nos revendications territoriales participe d'une position plus générale qui consiste à nier toute responsabilité constitutionnelle à l'égard des Métis, et qui se traduit par la non-admissibilité des Métis aux prestations accordées par le fédéral aux Autochtones en matière d'éducation et de soins de santé. Et c'est pourquoi le gouvernement fédéral continue de refuser d'assumer la responsabilité de l'indemnisation des victimes métisses du système des pensionnats, sauf pour le petit nombre de Métis qui ont fréquenté des pensionnats autochtones reconnus par l'accord de règlement. J'ai eu l'occasion, à de nombreuses reprises, de signaler ce problème au comité et au Sénat dans son ensemble. Ayant moi-même fréquenté un pensionnat en Saskatchewan, j'ai connu les horreurs de ce système et je peux témoigner des angoisses dont souffrent les centaines de survivants — certains sont déjà morts, et d'autres ont une santé précaire — qui n'ont toujours pas été indemnisés malgré les grands espoirs qu'ils nourrissaient depuis les excuses formulées par le premier ministre.
Votre comité devrait également s'intéresser aux démarches que nous avons entreprises, avec le gouvernement fédéral, pour sortir de cette impasse constitutionnelle et donner des assises plus concrètes à la relation entre le Canada et le peuple métis. Cela s'inscrit dans le cadre du Protocole avec la nation métisse, qui a été conclu avec le gouvernement du Canada en 2008. Jusqu'à présent, ce protocole a porté essentiellement sur le développement économique. À ce chapitre, des progrès ont été faits avec le ministre Strahl et maintenant le ministre Duncan, qui se traduisent par des résultats concrets et misent sur le dynamisme de notre marché du travail et de nos institutions financières au cours des dernières décennies.
Les ministres fédéraux et moi-même avons aussi réussi à réunir les ministres des cinq provinces les plus à l'ouest ainsi que des autres fonctionnaires pour essayer d'élaborer une stratégie favorisant une participation plus grande et plus efficace des Métis au développement économique. Cette collaboration a donné lieu à une série d'investissements fédéraux et provinciaux dans des établissements financiers de la nation métisse, ce qui a favorisé l'accès des entrepreneurs métis à des prêts et à des capitaux. Nous avons profité de l'intérêt qu'a manifesté le premier ministre pour les enjeux qui nous sont propres, notamment le développement économique, au cours des trois réunions que nous avons eues, lui, moi et les autres dirigeants autochtones au cours des trois dernières années. Après les dernières élections fédérales, j'ai proposé au premier ministre d'invoquer le Protocole avec la Nation métisse pour conclure des ententes de gouvernance et de développement économique, afin d'accélérer les progrès que nous avons réalisés jusqu'à présent.
Cette proposition fait fond sur l'intérêt qu'ont à la fois le gouvernement fédéral et le Ralliement national des Métis à réduire la bureaucratie fédérale dédiée aux affaires des Métis, et à renforcer la capacité de la nation métisse d'administrer des services importants comme le développement économique. Cette proposition fait fond également sur les efforts que nous déployons au niveau national pour adopter une nouvelle constitution de la Nation métisse, efforts qui sont appuyés par le gouvernement fédéral. Nous espérons que les pourparlers que nous avons récemment entamés avec le ministre Duncan sur ce genre d'ententes aboutiront à la délégation de nouveaux pouvoirs et à l'adoption d'arrangements financiers plus fermes.
Nous espérons que les nouveaux pouvoirs qui nous seront délégués nous permettront, grâce à nos institutions démocratiques en matière de responsabilité et de citoyenneté, d'élaborer une nouvelle constitution de la nation métisse qui sera reconnue par une loi fédérale comme la source de l'autonomie gouvernementale de la nation métisse.
Votre comité pourrait également examiner comment élaborer une telle loi — que nous proposons d'appeler la loi sur les relations entre le Canada et les Métis. Cela dit, je suis prêt à répondre à vos questions.
Elizabeth Ford, directrice, Santé et développement social, Inuit Tapiriit Kanatami : Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui.
Permettez-moi de féliciter votre comité d'avoir pris l'initiative d'inviter les organisations autochtones du Canada à venir à vous proposer des sujets d'études. Je tiens également à saluer la présence d'étudiants du Nunavut, que je suis ravie de voir ici.
Je vais commencer par un bref rappel historique. Comme le savent ceux qui ont assisté à la conférence sur notre 40e anniversaire, ITK a été fondé en 1971 par des Inuits qui voulaient détenir le contrôle de leurs terres et de leurs ressources. Nos quatre régions — Nunavut, Nunavik au nord du Québec, Nunatsiavut au nord du Labrador, et Inuvialuit dans les Territoires du Nord-Ouest — ont obtenu des règlements de leurs revendications territoriales globales qui nous donnent les outils nécessaires pour aménager nos terres et pour tirer profit de l'exploitation de nos ressources.
Aujourd'hui, nous nous employons principalement à nous assurer que les intérêts des Inuits sont pris en compte dans les politiques adoptées pour l'Arctique et à promouvoir des initiatives qui fédèrent nos quatre régions. Notre Stratégie nationale sur l'éducation des Inuits en est un exemple récent. Un certain nombre d'entre vous ont assisté au lancement de ce document, au printemps dernier.
Cela m'amène à l'objet de la réunion d'aujourd'hui. Il y a un certain nombre d'études fort utiles que votre comité pourrait entreprendre au sujet des Inuits et de l'Arctique, au cours des prochains mois. Comme les sujets vont du changement climatique à la dévolution de pouvoirs et de revenus supplémentaires aux régions de l'Arctique, il n'est pas facile de faire un choix. Je vous conseille toutefois de vous intéresser en priorité aux problèmes sociaux que connaissent actuellement les Inuits. Ces problèmes ne sont pas nouveaux. Nous savons depuis longtemps que les Inuits ont pris beaucoup de retard par rapport aux Canadiens à de nombreux égards, notamment en ce qui concerne le bien-être de base, le niveau d'instruction, l'espérance de vie, l'accès à un logement adéquat, le taux d'emploi, et j'en passe. De plus, c'est parmi les Inuits qu'on enregistre, au Canada, les taux les plus élevés de méfiance sociale, notamment de suicide, de maladies chroniques et infectieuses, et de crimes violents. Cette liste aussi est longue. Si ces problèmes existent, ce n'est pas parce que ceux qui sont au pouvoir le veulent. On ne peut pas leur attribuer une cause unique ou en imputer le blâme à certaines personnes en particulier, mais au cours des dernières années, on a quand même réussi à faire des progrès.
Il est particulièrement réconfortant pour les dirigeants inuits de ma génération de voir qu'aujourd'hui, un si grand nombre de jeunes Inuits accèdent à un niveau d'instruction impressionnant et se font remarquer par leur réalisations professionnelles. Les Canadiens ont pu constater que, depuis 40 ans, les Inuits ont fait preuve de beaucoup d'imagination et de créativité pour se doter de nouvelles structures de gouvernance et pour assurer la répartition des pouvoirs entre les quatre régions qui composent le territoire des Inuits.
À l'heure où votre comité poursuit ses délibérations, des représentants inuits participent à des négociations complexes au sujet de notre participation à des projets d'exploitation des ressources naturelles. Nous avons donc des raisons de nous montrer optimistes, mais cet optimisme ne doit pas fausser notre jugement. Ce n'est pas en restant dans l'expectative que nous allons progresser. La passivité est lourde de conséquences pour les Inuits qui souffrent directement des problèmes sociaux qui accablent notre société, et ce ne sont pas seulement des statistiques, ce sont des réalités pour nos communautés, nos familles et nos foyers.
Que peut faire votre comité? Je vous recommande vivement de vous intéresser à trois grands thèmes. Ce sont les mêmes thèmes que l'ITK a présentés lors de discussions publiques et dans sa correspondance avec des ministres fédéraux au sujet des priorités du budget. Ce sont : l'éducation, la santé et le logement des Inuits. Ces trois thèmes sont importants. Un grand nombre d'études confirment la forte imbrication qui existe entre ces trois thèmes pour ce qui est des causes et des effets, si bien que les progrès réalisés dans un domaine ont des chances de se répercuter sur les autres. Il faut créer un cycle de changement positif. Tous sans exception, les premiers ministres provinciaux et territoriaux comme les dirigeants autochtones nationaux, demandent au premier ministre Harper d'organiser une rencontre des premiers ministres sur l'éducation des Autochtones. Votre comité pourrait réfléchir à l'importance d'une telle réunion pour faire en sorte qu'un plus grand nombre d'élèves autochtones terminent leur secondaire.
Les Inuits ont déjà beaucoup d'idées là-dessus, notamment pour que la Stratégie nationale sur l'éducation des Inuits optimise les ressources disponibles et cible minutieusement les nouveaux investissements, sans parler de l'importance cruciale de la langue inuite dans nos systèmes d'éducation et de développement des compétences.
S'agissant de la santé des Inuits, il faudrait accorder une attention toute particulière à un certain nombre de sous- thèmes, comme l'absence totale de programmes et de services appropriés de santé mentale, notamment l'absence de traitement en établissement et hors établissement pour ceux qui ont des problèmes de dépendance à l'alcool et aux drogues, ainsi que la sous-alimentation et la malnutrition chez un pourcentage très élevé de familles inuites, comme l'ont tristement confirmé de récents articles parus dans le Canadian Medical Association Journal et ailleurs.
Pas besoin d'avoir la tête à Papineau pour comprendre les ravages que peuvent causer ce genre de problème. Un enfant qui a faim a du mal à bien travailler à l'école. Un étudiant qui rate ses études a du mal à trouver un métier plus tard. Un adulte qui a faim ne peut pas donner à ses enfants ou à ses parents âgés les soins dont ils ont besoin.
S'agissant du logement, les tendances ne sont pas bonnes. Un rapport sur le logement, déposé le 21 octobre dernier à l'assemblée législative du Nunavut, indiquait que la pénurie de logements s'élevait à 3 580 unités. Ce n'est pas rien. En fait, pour une population aussi petite que la nôtre, c'est un chiffre astronomique.
L'ampleur du problème n'est pas la seule difficulté. Le ministre du logement du Nunavut a annoncé à l'assemblée législative que le gouvernement fédéral ne verserait pas de nouveaux crédits pour le logement dans un avenir rapproché, et que le budget de fonctionnement et d'entretien de la Société canadienne d'hypothèque et de logement pour le Nunavut, qui est actuellement de 23,9 millions de dollars, serait progressivement éliminé d'ici à 2037.
Le Nunavut n'est qu'un exemple. La pénurie de logements est aussi grave dans toutes les autres régions inuites.
Il y a un autre sujet que votre comité pourrait envisager d'étudier en ce qui concerne les Inuits et l'Arctique. L'ITK a maintenant 40 ans. Nous avons célébré cet anniversaire il y a tout juste quelques semaines, dans le cadre de plusieurs manifestations publiques. Il est toujours bon de revenir un peu en arrière et de tirer des leçons du passé, mais il faut que nous sachions appliquer ces leçons pour l'avenir. Dans la foulée du 40e anniversaire de l'ITK, votre comité pourrait étudier quel type de relation le Parlement et le gouvernement du Canada, c'est-à-dire la population canadienne, aimeraient établir avec les Inuits du Canada et avec le monde circumpolaire au cours des 40 prochaines années. Il sera alors tout aussi important d'examiner comment cette relation doit être établie.
Le Parlement et les comités parlementaires sont là pour générer de nouvelles idées, de nouvelles façons de voir les choses, de nouveaux projets qui respectent nos valeurs communes et qui répondent à nos aspirations communes. Votre rôle consiste à la fois à entretenir l'espoir et à faire face à la dure réalité. Je pense que ce serait un beau sujet d'étude, pour vous, que d'examiner ce que devrait être, dans 40 ans, la relation entre les Inuits et les autres Canadiens.
Je peux vous assurer que, pour tous ces projets de recherche, vous aurez le soutien total de l'ITK. Je vous remercie de votre attention.
La vice-présidente : Je remercie vivement tous les témoins de ce groupe des exposés qu'ils nous ont présentés.
La présence dans cette salle des dirigeants de trois organisations nationales me donne l'impression de vivre un moment historique. En plus, nous avons les représentants des jeunes, qui sont les futurs dirigeants. Ils ont écouté les dirigeants des trois grandes organisations et vous, vous écouterez ce qu'ils ont à nous dire, quand ce sera leur tour.
Cela dit, nous allons passer aux questions et aux commentaires des sénateurs.
Le sénateur Campbell : Je souhaite la bienvenue à tous les témoins, y compris aux jeunes gens, hommes et femmes, qui sont ici. Vous avez réussi à faire quelque chose que je n'ai jamais vu en près de six ans. Vous avez abaissé l'âge médian de ce comité autour de 30 ans, ce qui n'est pas chose facile au Sénat. C'est extraordinaire de voir cette salle pleine de jeunes qui sont venus participer à nos délibérations.
J'ai trois questions à poser, une pour chaque témoin.
Monsieur Jock, vous avez parlé des secours d'urgence. Il y a une ou deux semaines — je ne me souviens malheureusement pas du nom de la communauté, mais c'est dans le Nord de l'Ontario —, une communauté a déclaré se trouver dans une situation d'urgence généralisée. Pas assez de logements, pas assez d'école, pas assez d'eau potable. Ça dure depuis un certain temps.
Premièrement, comment se fait-il que les secours tardent à arriver dans votre communauté? Deuxièmement, est-ce du retard ou de la négligence de la part de ceux qui, au gouvernement, ont la responsabilité de veiller à ce que les conditions sanitaires des communautés soient adéquates?
M. Jock : C'est une excellente question.
Le nom de la communauté est Attawapiskat. Le problème est en partie causé par la multiplicité des compétences qui s'exercent lorsqu'il est question des Premières nations. Le président Chartier y a également fait allusion.
Normalement, c'est à la province qu'il incombe d'ordonner et d'exécuter l'évacuation. Ensuite, le gouvernement fédéral a la responsabilité de rembourser la province. Il arrive que les différentes parties en cause tardent à prendre les décisions nécessaires. C'est attribuable en partie au fait que les responsabilités sont mal définies.
Nous estimons que, pour les situations d'urgence, on devrait adopter une loi comme celle qu'on a adoptée pour les services à l'enfance à la suite du cas Jordan, et que les secours devraient être organisés le plus rapidement possible, avant même qu'on ait déterminé les arrangements financiers.
On ne peut pas attendre quand la santé et la sécurité des gens sont en jeu. Il faut trouver les moyens d'intervenir plus rapidement, de façon à répondre adéquatement aux besoins de ces gens et de ces communautés.
Le sénateur Campbell : Quand je parle de négligence, je veux dire qu'on laisse les communautés se retrouver dans une situation telle qu'il faut appeler les secours d'urgence. Si cette situation d'urgence est attribuable à l'absence d'écoles et à des conditions de logements épouvantables, ça ne s'est pas produit du jour au lendemain. Il faut donc parler de la négligence dont on a fait preuve pendant un certain temps, jusqu'à ce que cette communauté se retrouve dans une situation d'urgence. Quand une grosse tempête de neige s'abat sur Toronto, le maire de la ville peut faire appel à l'armée. C'est ce que je ne comprends pas.
J'aimerais poser ma deuxième question à M. Chartier. Lorsque vous avez des dossiers à régler avec le gouvernement fédéral et n'importe quel autre gouvernement, en discutez-vous avec les Premières nations, l'APN, les Inuits et les Métis?
M. Chartier : Je vous remercie de votre question.
Nous ne collaborons pas de façon régulière, mais les dirigeants des trois organisations se rencontrent à l'occasion pour discuter de dossiers cruciaux. Par exemple, en ce moment, nous discutons ensemble de tout le dossier de la santé. Nous le faisons à l'occasion, pour des dossiers prioritaires. Donc, la réponse à votre question est oui, nous collaborons et avons des rencontres au sommet à l'occasion. Cette relation existe bel et bien.
Le sénateur Campbell : Ne pensez-vous pas que vous auriez intérêt à faire front commun? Je comprends tout à fait qu'il y ait des différences entre les nations fondatrices, mais quand il s'agit de santé, d'éducation et de terres, il me semble que ces trois dossiers concernent vos trois organisations.
M. Chartier : Comme je vous l'ai dit, nous nous rencontrons à l'occasion pour discuter ensemble de certains dossiers, mais nous nous concentrons sur nos propres mandats. Lorsque cela est nécessaire, les autres nous appuient.
Le sénateur Campbell : Je m'adresse enfin à Mme Ford pour lui dire que nous allons bientôt publier un document sur l'éducation. Nous avons fait une étude approfondie de la question, et j'espère que certaines de nos recommandations répondront aux problèmes que vous avez mentionnés.
Il y a une chose que je n'ai pas bien comprise : la SCHL et les 23,9 millions de dollars. C'est le budget de quoi?
Mme Ford : Le budget de fonctionnement et d'entretien.
Le sénateur Campbell : Pour le logement au Nunavut?
Mme Ford : Oui.
Le sénateur Campbell : Et ce budget va disparaître?
Mme Ford : Oui, en 2037.
Le sénateur Campbell : Pouvez-vous m'expliquer pourquoi? Le soleil va-t-il tout d'un coup briller en 2037? Chacun aura un beau logement, et il n'y aura plus de problème?
Mme Ford : Je ne sais pas vraiment pourquoi. Ce serait bien que nous n'en n'ayons plus besoin en 2037, mais ça m'étonnerait.
Le sénateur Campbell : Y a-t-il eu des négociations entre la SCHL et le gouvernement du Nunavut ou les Inuits?
Mme Ford : Non, pas que je sache.
Le sénateur Meredith : Moi aussi je me réjouis qu'il y ait autant de jeunes dans cette salle. Ça fait du bien. Je disais justement au sénateur que c'est encourageant de voir autant de jeunes gens participer à nos délibérations. Nous avons souvent des réunions sans que des jeunes soient là. Encore une fois, bienvenue dans notre comité.
Monsieur Jock, vous avez parlé de développement économique. J'ai travaillé dans l'entreprise privée pendant une vingtaine d'années, et je crois beaucoup à l'esprit d'entreprise. Je crois qu'il faut créer des débouchés, pour nos jeunes en particulier, pour qu'ils puissent démarrer leurs propres entreprises et être ainsi en mesure de subvenir à leurs propres besoins, plutôt que de dépendre du système.
Quels sont les mécanismes qui sont en place? Que faites-vous pour encourager les investissements du secteur privé? Pouvez-vous nous dire quelques mots là-dessus?
M. Jock : Oui. Je ferai deux observations. Premièrement, les communautés des Premières nations sont situées à proximité de milliards de dollars de revenus susceptibles de provenir de l'exploitation des ressources. L'un des objectifs que l'Assemblée des Premières Nations poursuit activement, c'est de faire en sorte que les communautés des Premières nations participent de façon plus systématique aux projets commerciaux d'exploitation de ces ressources. Plutôt que d'être consultées après coup, une fois que les projets de pipelines, de constructions ou de mines sont prêts, les Premières nations doivent faire partie du projet dès le départ, et être considérées comme de véritables partenaires dans tout le processus. Il y a déjà des entreprises qui s'orientent dans cette direction. Ce modèle va permettre de créer une multiplicité de débouchés économiques.
Une fois que ces projets seront menés à bien d'une façon sensée, durable et respectueuse de l'environnement, je pense qu'ils attireront tous les services connexes nécessaires, les entreprises privées, les agences de services, les entreprises de services comme les approvisionnements, et cetera.
L'APN veut que les Premières nations fassent vraiment partie des discussions, et que les discussions aient lieu dès le début et à un rythme soutenu. Pour ce qui est des autres aspects du développement économique, nous devons nous assurer que nous avons les compétences, la formation et l'accès à l'éducation, afin que nos jeunes obtiennent les diplômes commerciaux et les expériences dont ils auront besoin dans la profession qu'ils ont choisie, et afin qu'ils aient les outils nécessaires pour participer pleinement à l'activité économique.
Nous nous intéressons donc à plusieurs aspects de cette question, qui joue un grand rôle pour la sécurité de notre avenir et les nouvelles formes de partenariat que nous pourrons nouer.
Le sénateur Meredith : J'aimerais vous poser une autre question, monsieur Jock, au sujet du partage des revenus provenant des ressources naturelles. Nous avons parlé des revendications territoriales, et du fait qu'en Colombie- Britannique, on délaisse un peu le modèle des ententes et des accords, conclus ou à conclure, vu que ces ressources attirent des investisseurs prêts à les exploiter. Mme Ford a parlé des trois piliers que sont l'éducation, la santé et le logement, et M. Chartier a dit à peu près la même chose au sujet des ressources qui sont exploitées dans certaines régions. On en revient encore à la question du leadership et de la collaboration entre les dirigeants, qui doivent travailler ensemble pour atteindre cet objectif.
Avez-vous rencontré de la résistance à ce sujet? Pensez-vous pouvoir progresser à ce niveau-là même s'il n'y a pas encore d'ententes signées? Elles sont en cours de négociation, mais vous voulez que le développement économique se fasse sans tarder.
M. Jock : J'ai deux remarques à faire. Premièrement, n'importe quel gouvernement, et c'est le cas de tous les gouvernements au Canada, a besoin d'un financement de base stable. Quand on parle d'éducation et de santé, les taux de croissance sont fixés quel que soit le gouvernement qui assure les services. Pour les communautés des Premières nations, ces taux de croissance sont de 2 p. 100 alors que pour les provinces, ils se situent à 6 p. 100 et qu'on envisage même, dans les nouvelles négociations de l'accord sur la santé, des taux de croissance de 6,6 p. 100.
Avec l'augmentation démographique que nous connaissons dans nos communautés, l'écart ne fait que se creuser. C'est pour ça que j'ai parlé de financement viable. Vous avez beau avoir toute la capacité locale nécessaire, si vous n'avez pas un financement de base stable, vous ne pouvez rien faire.
Deuxièmement, pour ce qui est des possibilités de partage des revenus provenant des ressources et des autres façons de créer de nouveaux débouchés, Attawapiskat en est un bon exemple. Cette communauté est située sur la ceinture de feu de l'Ontario, soit l'une des zones potentiellement les plus riches du monde, mais, dans la situation actuelle, il faut qu'elle trouve le moyen de participer à toutes les activités qui se développent, afin de ne pas se retrouver comme le parent pauvre de la zone la plus riche du Canada.
Ce sont deux éléments qu'il importe de prendre en considération quand on essaie de déterminer quel type de relations ces futurs gouvernements devraient établir, à quel niveau elles devraient se situer et comment on pourrait encourager une plus grande participation des communautés à de tels projets.
Le sénateur Meredith : Madame Ford, vous avez parlé de la santé des jeunes, notamment des programmes de petits- déjeuners et des autres programmes d'alimentation qui aident les enfants à mieux travailler à l'école. Quels programmes existe-t-il à l'heure actuelle? Vous avez des idées en matière d'éducation, pourriez-vous nous en dire quelques mots? Vous êtes en train de faire une étude sur l'éducation des Premières nations, de la maternelle à la 12e année. Pouvez-vous me dire comment ça se passe avec le système actuel, quelles en sont les lacunes, afin que nous ayons davantage de munitions pour notre rapport?
Mme Ford : Pour toutes les régions, c'est un véritable défi. Nous avons une nouvelle stratégie sur l'éducation qui a été signée par nos dirigeants, par les provinces et par les territoires, et c'est un défi pour nous parce que le système d'éducation n'est pas le même dans tout le Nunangat, les quatre régions inuites. Nous traitons avec deux provinces et deux territoires. Mais il y a quand même des choses qui vont nous aider. Pour l'instant, on en est à la mise en oeuvre de cette stratégie, et on va se concentrer d'abord sur l'éducation préscolaire et sur la mobilisation des parents.
S'agissant de l'éducation des Inuits, nous avons une stratégie qui a été élaborée par les régions inuites et par les provinces et territoires qui l'ont signée. L'objectif est d'appuyer la stratégie qui a été élaborée en partenariat.
Là encore, la stratégie n'est pas la même entre les quatre régions, car nous avons affaire à deux provinces et à deux territoires, et ce sont les provinces et les territoires qui sont responsables de l'éducation. Nous voulons travailler en étroite collaboration avec eux, afin de nous assurer que ces programmes sont mis en place, les programmes préscolaires en étant un élément important.
Je me réjouis de voir tous ces étudiants ici, sachant qu'ils vont à Nunatsiavut. Nous avons pas mal de diplômés, la difficulté, c'est d'amener les élèves à terminer l'école secondaire. Nous devons donc nous employer à convaincre les étudiants de terminer le secondaire et à poursuivre des études postsecondaires.
Le sénateur Meredith : Quel est le pourcentage d'élèves qui terminent leur secondaire?
Mme Ford : Vingt-cinq pour cent.
Le sénateur Meredith : C'est plus faible, donc. Merci.
Le sénateur Sibbeston : J'aimerais poser une question à M. Chartier au sujet des Métis et des pensionnats. Je l'ai entendu lorsqu'il a pris la parole, l'été dernier à Inuvik, à une conférence sur les pensionnats, ainsi qu'à plusieurs autres occasions. Il a dit que des Métis n'avaient pas reçu d'indemnisation pour leur séjour dans des pensionnats. Tout le monde sait que le gouvernement fédéral a réglé la question des pensionnats indiens, et que ceux qui ont fréquenté ces pensionnats ont reçu une indemnisation.
Monsieur Chartier, pourriez-vous nous dire quelques mots sur les pensionnats que les Métis ont fréquentés? Pourquoi, à votre avis, les Métis ont-ils pas été inclus dans le règlement sur les pensionnats?
M. Chartier : C'est essentiellement une question de sphère de compétence. Le gouvernement fédéral estime qu'il n'a pas de services à fournir au peuple Métis parce que nos titres autochtones sur les terres sont soi-disant éteints. Depuis 1900 à peu près, il s'en lave les mains.
L'école pour les enfants autochtones d'Île-à-la-Crosse, dans le nord-ouest de la Saskatchewan, a brûlé en 1906. Un traité a été signé avec les Dénés et les Cris, mais les Métis ont reçu des certificats. Sur ces entrefaites, l'église a construit une nouvelle école en aval de la rivière, à Beauval, et l'école d'Île-à-la-Crosse a été reconstruite. Les enfants couverts par le traité sont allés à l'école de Beauval, et les enfants métis ont continué d'aller à l'école d'Île-à-la-Crosse.
À partir de ce moment-là, le gouvernement fédéral n'a versé que des paiements minimums, essentiellement l'allocation familiale fédérale. L'église a donc dû trouver de l'argent ailleurs pour garder les enfants métis. Dans un certain sens, cela a eu un effet doublement négatif sur nous. Premièrement, le gouvernement fédéral a décrété que, étant donné que nous étions Métis, il ne verserait plus rien d'autre à l'église que les montants d'allocations familiales. Nous en avons souffert parce que nous n'avions pas assez à manger, alors que dans les pensionnats indiens, ils avaient les ressources suffisantes pour subvenir aux besoins des enfants.
Maintenant qu'un règlement a été conclu, le gouvernement fédéral prétend que, étant donné que l'école était gérée par une église et non pas financée par le fédéral, il ne nous doit rien. Nous sommes donc doublement punis à cause de cette première décision négative de la part du gouvernement fédéral.
J'étais présent dans la Chambre des communes lorsque les peuples autochtones ont reçu les excuses du gouvernement. Je tenais à manifester mon soutien aux Autochtones et au petit nombre de Métis qui avaient eu la chance d'aller dans un pensionnat indien plutôt que dans un pensionnat métis.
Nous ne sommes pas inclus dans ces excuses, ni dans le règlement qui a été conclu, ni dans le mandat de la Commission de vérité et de réconciliation. En fin de compte, c'est le gouvernement du Canada, lequel représente « le gouvernement », qui est responsable de toutes les écoles, quels qu'en aient été les administrateurs, car elles appliquaient toutes la même politique d'assimilation.
Depuis, nous avons essayé de faire des démarches auprès de la province de la Saskatchewan au sujet de cette école. Nous avons essayé de réunir le gouvernement fédéral, la province et les survivants de cette école autour d'une même table, sur une base tripartite. Le gouvernement provincial à nous envoyé une lettre il y a quelques mois nous disant que ses ministres avaient examiné la situation mais que ce n'était pas leur responsabilité, si bien qu'il ne nous reste plus qu'à nous adresser aux tribunaux. Malheureusement, nous n'avons pas les ressources pour le faire.
Le sénateur Sibbeston : J'aimerais bien en savoir plus sur la situation des Métis. Pourriez-vous nous envoyer plus de précisions à ce sujet, car cela nous serait certainement utile? Je vous invite à réitérer ce que vous venez de nous dire et à nous expliquer pourquoi, à votre avis, le gouvernement fédéral devrait assumer une certaine responsabilité en ce qui concerne les pensionnats. Je vous en remercie d'avance, car ça nous sera certainement très utile.
M. Chartier : Nous le ferons. J'ai déjà soulevé la question lors d'audiences précédentes. Le 14 octobre 2009, j'ai adressé une lettre au président Kinsella. J'ai reçu une réponse le 28 avril 2010, du sénateur St. Germain. Nous demandions que le Sénat examine pourquoi le gouvernement n'a pas offert aux Métis qui ont fréquenté des pensionnats des indemnisations semblables à celles qu'il a accordées dans le cadre des ententes sur les pensionnats indiens. La lettre disait expressément : « Nous travaillons actuellement sur d'autres projets de loi, mais notre comité espère être en mesure d'examiner de près vos recommandations à une date ultérieure. »
La date ultérieure, c'est maintenant. Je suis ici parce que vous m'avez invité à venir vous faire des suggestions sur des sujets d'études pour votre comité. Nous vous soumettons donc encore une fois les mêmes recommandations, en espérant que, dans votre sagesse, vous déciderez de les prendre en compte.
Le sénateur Sibbeston : Étant donné que certains sénateurs ne sont pas membres de ce comité depuis très longtemps, il serait utile que vous nous fassiez parvenir toutes ces informations. Je n'ai pas vu les lettres dont vous avez parlé, et j'aimerais bien prendre connaissance des documents que vous avez à ce sujet.
M. Chartier : Volontiers.
Le sénateur Demers : Je vous remercie de comparaître devant notre comité ce soir. Tout cela nous touche beaucoup. Et je suis très impressionné par la présence de tous ces jeunes gens dans cette salle. Je dois dire qu'ils se tiennent bien, je ne sais pas si quelqu'un leur a fait la leçon. En tout cas, ils n'ont pas l'air de s'ennuyer, ils écoutent attentivement. Celui qui a « coaché » toute cette délégation a fait du beau travail.
Tout cela nous préoccupe beaucoup. Vous pensez peut-être que, une fois que nous aurons quitté la salle, nous aurons tout oublié, mais ce n'est pas vrai. Nous nous préoccupons beaucoup de la situation. Je suis le père de quatre enfants, et je ne voudrais pas qu'ils partent à l'école le matin sans avoir pris leur petit-déjeuner.
Les jeunes gens qui sont ici représentent l'avenir de notre pays et celui de votre peuple. Si nous n'intervenons pas rapidement, nous allons perdre un certain nombre voire un grand nombre d'entre eux, même si nous nous démenons pour ne pas les perdre.
Ce soir, le chef Atleo participe à une réunion sur la reddition de comptes, ce qui est très important. La situation est problématique. Nous ne pouvons pas attendre deux, trois ou quatre ans. Il faut que ces enfants retrouvent une situation normale. Nous sommes à peu près à un mois de Noël. Il est inconcevable que des enfants ou des êtres humains manquent d'eau ou de nourriture. Il faut faire quelque chose.
Le sénateur Sibbeston veut avoir plus d'informations, mais nous devons agir rapidement, car dans cinq ans, ce sera trop tard. Je sais que vous comprenez ce que je veux dire. Même avant cinq ans, nous aurons perdu un grand nombre de ces jeunes.
J'espère que ce que je dis vous paraît sensé. Il ne faut pas que ces enfants continuent de vivre dans des conditions pareilles, sans espoir pour l'avenir. Nous devons agir rapidement.
M. Jock : C'est justement la raison pour laquelle nous estimons que l'éducation est une priorité absolue, et qu'il faut donner aux enfants toutes les chances de réussir, et non pas un minimum de chances. On vous a indiqué tout à l'heure le pourcentage d'élèves inuits qui terminent leur secondaire. Chez nous, c'est à peu près 39 p. 100, ce qui fait que les 61 p. 100 restants n'ont guère de chances de trouver un emploi stable.
Je crois que vous avez mis le doigt sur quelque chose d'important, et le chef national Atleo serait d'accord avec vous. C'est par l'éducation qu'il faut commencer, car si nous faisons des progrès dans ce domaine, le reste ira de pair.
Le sénateur Patterson : J'aimerais féliciter tous les témoins de nous avoir fait des recommandations très intéressantes.
Je voudrais simplement dire, au sujet de l'exposé de l'APN, que lorsque vous nous recommandez de nous engager sans tarder dans la préparation d'un projet de loi, je peux vous dire que ça tombe bien, puisque nous allons bientôt publier notre rapport sur l'éducation. Je n'en dirai pas plus sur les recommandations de notre rapport, mais ce n'est pas un secret pour personne que les dispositions de la Loi sur les Indiens en matière d'éducation sont complètement anachroniques, voire pathétiques. Si nous voulons avoir un socle législatif solide, et c'est ce que notre comité envisage, nous savons parfaitement que nous ne pouvons pas répéter les erreurs du passé et mettre les Premières nations devant un fait accompli en leur disant que c'est à prendre ou à laisser. Votre recommandation tombe à point.
S'agissant du Ralliement national des Métis, nous avons le privilège d'avoir comme interlocuteur un dirigeant qui a une longue expérience. Je me souviens que Clément Chartier a participé au rapatriement de la Constitution, aux pourparlers qui visaient à définir les droits ancestraux, dans les années 1980, et j'ai beaucoup de respect pour lui. Ce qui m'a surpris, dans ce que vous avez dit, c'est tout cet argent qu'on gaspille en honoraires d'avocats, je veux parler du gouvernement fédéral et du RNM. Il va falloir qu'on trouve un meilleur système, et vous nous proposez d'ouvrir davantage le processus des revendications territoriales. À mon avis, ce qu'il vous manque, c'est un territoire, pour toutes sortes de raisons historiques. Ça m'a frappé quand vous avez fait votre exposé.
J'aimerais également souhaiter la bienvenue aux étudiants inuits de Nunatsiavut. Je vous poserai peut-être quelques questions puisque c'est moi qui représente le Nunavut au Sénat. Je vais être un peu provocateur.
En guise d'introduction, j'aimerais dire que les Inuits sont un peuple très fier, très autonome, et ce, depuis des siècles, qu'ils vivent dans le climat le plus rigoureux du monde, et qu'ils réussissent à survivre avec beaucoup d'humour, de résistance et de créativité. On les a attirés dans les communautés en leur promettant des services de santé gratuits, des allocations familiales, des loyers infimes, et un système d'éducation. Tout allait aller mieux. On a construit des maisons, qui ont été confiées à la gestion des provinces ou des territoires. Les maisons de nos communautés anneaux ne sont pas entretenues par le gouvernement. Les crédits de fonctionnement et d'entretien accordés par la SCHL, qui sont calculés en fonction de la durée de vie des logements et du fait qu'ils finissent toujours par se détériorer, ces crédits, donc, sont dégressifs, et c'est c'est prévu comme ça. C'est un problème qui existe depuis longtemps.
Les administrations locales ont du mal à percevoir les loyers. Les logements ne sont pas entretenus. Partout dans Iqaluit, où j'ai mon bureau, il y a des maisons avec des fenêtres condamnées, car l'administration du logement n'a pas les moyens de faire les réparations.
Devrait-on à votre avis adopter une approche différente, donner de vrais incitatifs aux Inuits en misant sur ce sens de l'autonomie et de la débrouillardise qui les a si bien servis depuis des milliers d'années, dans ce climat aussi difficile? Devrait-on leur dire qu'il est temps qu'ils deviennent propriétaires de leur logement et qu'ils en assument l'entretien? Il nous faudrait alors de bons incitatifs, mais ne pensez-vous pas que ce serait une stratégie qui mérite d'être envisagée?
Mme Ford : Pourquoi pas, mais il y a tellement d'autres problèmes à régler au sujet du logement, dans toutes les régions. On parle du coût de fonctionnement et d'entretien des logements existants, mais il y a aussi le coût de construction des logements qui est tellement élevé dans le Nord, car il faut faire venir les matériaux. Il faut penser aussi à la viabilisation des terrains, à l'installation de canalisations d'eau et d'égouts, et au coût d'achat des terrains. Il n'y a pas toujours assez de terrains dans les communautés. De plus, il est difficile d'obtenir une hypothèque quand il n'y a pas de banque dans la communauté, ce qui est le cas la plupart du temps. Il y a donc toutes sortes de problèmes qui se posent. C'est bien de dire qu'il faudrait qu'ils soient propriétaires de leur logement, mais quand il n'y a pas de terrains viabilisés, que le coût de construction est tellement élevé dans le Nord, et qu'il y a tellement d'autres problèmes auxquels nous faisons face... Même si vous voulez être propriétaire de votre logement, c'est une véritable gageure. Ce n'est pas aussi facile qu'acheter une maison déjà construite dans le Sud, et trouver une hypothèque pour la financer. Chez nous, il faut tenir compte du coût de viabilisation des terrains, du coût d'achat des terrains, du coût de l'infrastructure, les canalisations d'eau et d'égouts, et cetera.
Le sénateur Patterson : Je reconnais que ce sont de vrais défis, mais on pourrait peut-être aider les gens à acheter leur logement, pas tout le monde, mais un petit pourcentage de la population. Je crois qu'à peine 10 p. 100 de ceux qui occupent un logement au Nunavut ont des revenus considérés comme suffisants pour devenir propriétaires.
Je crois qu'il faut offrir des incitatifs si on veut encourager les gens. Ce qu'il y a de bien, c'est que si vous aidez les gens à acheter et à entretenir leur logement, ce qui se fait dans beaucoup d'autres régions au Canada, le gouvernement n'a plus à s'occuper de l'entretien de ces logements ad vitam aeternam. Les gens de la SCHL disent qu'ils diminuent progressivement le budget de fonctionnement et d'entretien parce qu'il ne peut pas durer éternellement. On ne peut pas continuer ainsi.
Je suis convaincu qu'il faut trouver une nouvelle approche vis-à-vis du problème du logement. C'est simplement une idée que je vous propose pour une partie de la population — je sais qu'il y aura toujours des gens dans le besoin, les familles monoparentales, les personnes âgées seules et les handicapés —, mais c'est peut-être une façon de miser sur l'autonomie et la débrouillardise qui caractérisent les Inuits depuis si longtemps.
J'aimerais poser une autre question, avec votre permission. Cathy Towtongie, présidente de Nunavut Tunngavik Inc., NTI, a dit l'autre jour, avant l'assemblée générale annuelle qui doit avoir lieu cette semaine, que les Inuits ne savent pas encore ce qu'ils vont faire des revenus qu'ils vont tirer de l'exploitation des ressources. Il y a un projet de mine, sur l'île de Baffin, qui, s'il se réalise, générera 2,1 milliards de dollars pour les Inuits du Nunavut pendant les 21 premières années. C'est le double de l'indemnisation qui a été accordée aux Inuits en 1993, quand ils ont renoncé à leurs terres.
Avez-vous eu l'occasion de réfléchir à ce que vous pourriez faire avec ces revenus? Je ne dis pas qu'il faut libérer le gouvernement de ses responsabilités, mais quand on évalue tous les besoins en jeu — les problèmes sociaux, les questions de langue et de culture, le logement, la santé et l'éducation —, j'aimerais savoir si l'ITK a des suggestions à faire?
Il en va de même pour tous les territoires des Inuits. Les Inuits de Nunatsiatvut reçoivent des revenus de la mine de la baie de Voisey. L'ITK a-t-il jamais songé à un partenariat entre les Inuits et le gouvernement pour s'attaquer à ces problèmes avec les revenus provenant de l'exploitation des ressources abondantes de ces terres? En avez-vous déjà eu l'idée?
Mme Ford : Nos dirigeants en ont déjà parlé, mais chaque région a son propre processus de revendications territoriales et ses propres modalités en ce qui concerne les revenus qu'elle touche de l'exploitation des terres qui lui appartiennent ou qu'elle a reçues dans le cadre d'un accord de revendication territoriale. Ça varie d'une région à l'autre. Nous avons signé avec la mine de la baie de Voisey une entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits. Je crois que cela a été envisagé.
Pour ce qui est de l'ITK en général, je sais que les dirigeants en ont parlé, mais maintenant, c'est plus un dossier régional, et c'est à chaque région de déterminer comment elle veut profiter des activités d'extraction des ressources qui se déroulent ou qui se dérouleront sur les terres qui entourent leurs communautés.
Le sénateur Raine : Je crois que nous nous sommes tous investis à fond dans ce dossier de l'éducation, et que nous reconnaissons que, sans éducation, il est difficile de gagner sa vie. Nous allons bientôt mettre un point final à notre étude sur l'éducation, de la maternelle à la 12e année. Il y aura bien sûr deux autres volets à étudier : l'éducation préscolaire et l'éducation postsecondaire. Pourriez-vous, chacun d'entre vous, me dire par lequel on devrait commencer?
M. Jock : Pour les Premières nations, je pense que c'est l'éducation postsecondaire qui devrait être examinée en priorité, car nous continuons de recevoir les mêmes niveaux de financement alors que, avec l'augmentation rapide de notre population, il y a beaucoup plus de jeunes qui font des études universitaires. C'est vraiment un problème.
On est obligé de limiter les places, alors que ce ne serait pas le cas si le programme était financé sur une base plus stable. L'éducation postsecondaire est donc un dossier prioritaire à cause de ce financement insuffisant, mais sur le plan idéologique, il est évident que l'éducation préscolaire est un dossier très important. La mise sur pied de programmes préscolaires est l'un des meilleurs moyens d'assurer le développement à long terme.
M. Chartier : Il est difficile de dire lequel des deux est plus prioritaire que l'autre car les deux sont très importants. Pour les Métis, le plafonnement du financement ne nous pose pas de problème étant donné que nous n'avons pas de financement du tout. Nous aimerions bien obtenir des crédits pour l'éducation postsecondaire.
À l'heure actuelle, il y a une initiative du programme d'emploi et de formation de RHDCC qui nous permet d'utiliser une partie des ressources pour nouer un partenariat avec les universités qui sont disposées à créer des fonds de dotation. C'est ce que nous faisons depuis à peu près huit ans. Les membres de notre exécutif, comme nous les appelons, s'entendent avec une université pour utiliser une partie de ce fonds, dont l'un des objectifs est d'accorder des bourses à des étudiants métis. On n'utilise que les intérêts accumulés. C'est minime, mais ce fut très utile jusqu'à présent.
Il faudrait que ces sommes soient plus élevées, pour nos étudiants. Un grand nombre d'entre eux, surtout dans le Nord, terminent leur 12e année mais restent ensuite à la maison. Ils ne peuvent pas poursuivre leurs études parce qu'ils n'en ont pas la capacité ou parce qu'ils n'en ont pas les moyens. Dans le passé, il y en a qui ont obtenu des prêts aux étudiants — surtout les mères célibataires —, mais c'est fini, car ils se retrouvent ensuite avec une dette de 40 000 ou 60 000 $, et se demandent à quoi bon. Et ils abandonnent. Il faut revoir toutes ces questions de l'éducation postsecondaire pour les Métis.
Mme Ford : Pour les Inuits aussi, c'est l'éducation postsecondaire qui est prioritaire. C'est important, et c'est ce que nous indiquons dans notre stratégie; je vous ai indiqué le pourcentage d'élèves qui terminent leur 12e année. Toutefois, pour nous, l'objectif prioritaire, c'est de nous assurer que les jeunes terminent l'école secondaire. Pour y parvenir, nous devons nous concentrer dès maintenant sur l'éducation préscolaire, car c'est de cette façon que les élèves, plus tard, seront encouragés à finir leur secondaire. Nous devons également nous assurer que le système que nous mettons en place est fondé sur la culture inuite, et que nous pouvons leur offrir des programmes dans nos langues, jusqu'à la fin du secondaire, afin qu'il puissent être admis dans des établissements postsecondaires.
Le sénateur Raine : Il y a une autre question que je brûle de vous poser. Au cours de notre étude sur l'éducation, j'ai constaté que, dans les programmes d'éducation des non-Autochtones, on ne parlait quasiment pas de l'histoire et de la culture des Métis, des Inuits et des Premières nations. Pour vous, est-il important que le reste du Canada sache d'où vous venez?
M. Chartier : C'est très important, absolument, et je pense qu'il faut revoir les programmes d'études en conséquence. Je sais qu'en Saskatchewan, nous avons l'Institut Gabriel Dumont qui s'occupe de l'éducation postsecondaire, ainsi que des programmes de la maternelle à la 12e année. Nous essayons d'inclure du contenu métis dans les programmes scolaires.
Tout récemment, il y a un nouveau livre d'histoire qui est sorti, au Manitoba, pour les élèves de 10e année, je crois. Il traite de l'histoire des peuples autochtones au Canada, surtout au Manitoba. C'est un bon livre, pas seulement parce que mon portrait y figure, mais parce que c'est important qu'on en parle, et nous espérons que la même chose va se faire dans le reste du Canada. Je ne sais pas si c'est le cas, mais ça pourrait fort bien devenir un programme national, même si le livre porte plus précisément sur l'histoire du Manitoba. Encore une fois, je ne sais pas si d'autres provinces font la même chose, mais il me semble que ce serait très utile.
Mme Ford : Je pense qu'il est très important que le reste du Canada connaisse notre histoire. Si nos taux d'échec scolaire sont aussi élevés, c'est pour toutes sortes de raisons et à cause de toutes sortes de problèmes. Nous avons beaucoup à faire au niveau de la mobilisation des parents, à cause de leur expérience avec les pensionnats. Ils ne peuvent pas s'empêcher d'y penser, et les jeunes aussi, quand on parle d'éducation. Il faut que les Canadiens comprennent mieux tous ces problèmes — l'expérience des pensionnats et les autres problèmes.
Nous nous concentrons sur l'éducation préscolaire pour nous assurer que les jeunes vont terminer leur secondaire, mais malheureusement, il n'y a pas d'université dans aucune de nos régions, si bien que c'est un autre problème. Les élèves doivent quitter leur communauté et renoncer à leur mode de vie s'ils veulent poursuivre leurs études à l'université, et pour eux, c'est un véritable défi qu'il faut que les autres Canadiens comprennent. Il faut qu'ils comprennent mieux les difficultés que nous avons à encourager nos jeunes à faire des études.
Le sénateur Raine : Travailler aux côtés de la ministre Aglukkaq est, depuis quelques années, une expérience incroyable. C'est une femme étonnante, stimulante, et je me réjouis qu'on lui ait confié la responsabilité de la santé au niveau national. C'est un modèle pour tout le monde. C'est ce que pensent aussi les Premières nations?
M. Jock : Tout à fait. Je pense qu'il est également important de se concentrer sur les nouveaux immigrants, car ce groupe est en augmentation constante.
C'est important aussi de connaître l'histoire et le rôle des Premières nations. Il y en a qui disent aussi que les gens qui accèdent à certaines professions, que ce soient des médecins, des travailleurs sociaux ou autres, devraient acquérir, au cours de leur formation, une certaine sensibilisation culturelle. Bien sûr, c'est en se concentrant sur les besoins des Premières nations, des Métis et des Inuits qu'on peut offrir des services efficaces, mais cette sensibilisation culturelle devrait être une compétence de base pour toutes ces professions.
Pour terminer, j'aimerais donner l'exemple de la guerre de 1812, puisqu'on parle de mieux faire connaître le rôle d'alliés qu'ont joué les Premières nations et les autres peuples autochtones. Ils étaient considérés comme des égaux. C'est important de se le rappeler quand on songe aux solutions qu'il faudra adopter à l'avenir. L'histoire est souvent une source d'inspiration pour l'avenir, et si on ne la connaît pas, on ne comprend pas les causes, les raisons ou les motivations du présent.
La vice-présidente : Au nom de tous les sénateurs, j'aimerais remercier le premier groupe de témoins que nous avons entendus ce soir. Vous nous avez présenté un aperçu à la fois condensé et précis des grands enjeux qui se posent aux trois peuples autochtones du Canada : les Premières nations, les Métis et les Inuits. Vous nous avez fait des recommandations quant aux sujets d'étude que nous devrions retenir en priorité.
J'aimerais vous dire que je suis très fière de notre comité. Tous ses membres se sont investis dans ce dossier, souvent avec passion. Je crois que chacun d'entre eux désire sincèrement améliorer le sort des Autochtones, et vous pouvez donc être sûrs que vos suggestions seront prises très au sérieux et que nous n'oublierons pas ce que vous nous avez dit.
Chers sénateurs, je vais maintenant, avec vous, souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins. Avant de commencer, j'aimerais dire, encore une fois, combien nous sommes heureux que des jeunes Inuits, des jeunes Premières nations et des jeunes Métis soient venus nous rencontrer ce soir. Nous avons hâte de vous entendre. La salle est pleine de jeunes gens, et on sent une certaine excitation, c'est palpable. Je pense que ça n'est jamais arrivé dans un autre comité, c'est certainement un précédent. Nous sommes très fiers de vous accueillir ce soir et avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.
Nous accueillons ce soir Thomasie Johnston, membre du conseil d'administration du National Inuit Youth Council; Kluane Adamek, membre exécutif du Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations; et, pour représenter les Métis, nous avons deux témoins : Mitchell Case, membre du Conseil des jeunes de la Métis Nation of Ontario, et Adrian Mrdeza, agente de communications, du Ralliement national des Métis.
Jeunes gens, croyez-moi, les membres du comité s'intéressent vivement à tout ce qui touche les jeunes Autochtones. Nous venons de terminer notre étude sur l'éducation. Notre comité est parfaitement conscient des défis auxquels vous faites face, et nous avons hâte d'entendre vos suggestions sur la façon dont nous pouvons vous aider à faire du Canada un pays plus prospère et à rendre ses habitants plus heureux et en meilleure santé.
Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire. Avez-vous décidé, entre vous, qui allait commencer, ou voulez-vous que je le fasse?
Le sénateur Meredith : Les dames d'abord.
La vice-présidente : Nous allons commencer par la gauche.
[Français]
Kluane Adamek, membre exécutif, Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations : Bonjour.
[Le témoin s'exprime dans sa langue maternelle.]
Je m'appelle Kluane Adamek. Je me présente au nom du Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations. J'habite présentement au Yukon et je travaille pour le Conseil des Premières nations.
[Traduction]
Bonsoir, je m'appelle Kluane Adamek et je suis issue de la Première nation Kluane. J'ai des ancêtres Tlingit et Tutchonis du Sud. J'appartiens au clan du loup. Le tuchone du Sud est l'une de mes langues traditionnelles, et je parle aussi français. J'ai obtenu mon baccalauréat à l'Université Carleton en 2009, avec une mineure en français et une majeure en études autochtones et canadiennes.
Je représente aujourd'hui le Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations, qui comprend 10 régions, représentées chacune par un homme et une femme. Pour nous, il est important de maintenir l'égalité entre les sexes.
J'aimerais tout d'abord remercier les Algonquins qui nous accueillent ici, sur leur territoire traditionnel. J'aimerais également remercier votre comité de m'avoir invitée avec les autres jeunes qui sont ici ce soir.
J'ai quelque chose de spécial à vous montrer. Cette plume est un cadeau de William Commanda, que bon nombre d'entre vous connaissent sans doute. Lorsque ma promotion de 2009 a obtenu son diplôme à l'Université Carleton, nous étions parmi les premiers Autochtones à obtenir ce diplôme, et il a remis une plume à chacun d'entre nous. Je l'ai apportée parce qu'elle est un symbole de notre peuple des Premières nations, symbole que je veux partager avec vous aujourd'hui.
C'est un privilège pour moi que de représenter le Conseil national des jeunes de l'Assemblée des Premières Nations et, par ricochet, tous les jeunes des Premières nations du Canada. Mais je dois vous dire qu'il est difficile d'exprimer ce que ressentent tous ceux que nous nous efforçons de représenter, dans les actions que nous prenons ici comme à l'étranger.
Pour les jeunes des Premières nations, il y a toute une série de dossiers qu'on pourrait considérer comme prioritaires, et ces dossiers ne sont guère différents de ceux qui ont été identifiés pour l'ensemble de la population des Premières nations. Je vais profiter de l'occasion pour vous en dire quelques mots.
Comme vous le savez sans doute, les Premières nations de moins de 25 ans représentent près de 50 p. 100 de toute la population des Premières nations du Canada. Autrement dit, la population des Premières nations est une population jeune, à croissance rapide. En fait, la Loi sur les Indiens n'est pas seulement une méthode d'assimilation des Premières nations, c'est aussi une loi qui ne tient pas compte de notre identité.
Puisque le nombre de jeunes augmente, cela devrait signifier qu'un nombre croissant de jeunes des Premières nations poursuivent des études avec succès, mais, comme on l'a fait remarquer tout à l'heure, ce n'est malheureusement pas le cas.
Les jeunes des Premières nations se heurtent à des obstacles dès le départ, s'ils veulent faire les études dont ils ont besoin. Personnellement, j'ai dû quitter ma communauté, qui est située dans la Première nation Kluane, à Burwash Landing, pour faire mes trois dernières années de secondaire à Whitehorse.
Les écoles des réserves sont, dans bien des cas, inadéquates et n'ont pas les outils nécessaires pour encourager les jeunes à s'investir dans leurs études. Il n'y a pas d'école sur le territoire traditionnel de ma Première nation, si bien que les élèves doivent parcourir 15 km chaque jour pour aller jusqu'à Destruction Bay, et revenir le soir chez eux.
Beaucoup d'élèves des Premières nations, aussi bien sur les réserves qu'en dehors, doivent composer avec des programmes qui ne sont pas pertinents sur le plan culturel. Les services d'éducation préscolaire sont minimes, et les ressources secondaires et tertiaires sont insuffisantes dans un grand nombre de communautés des Premières nations. Tout cela contribue à un certain désintérêt et à une certaine apathie vis-à-vis de l'école, qui se traduisent plus tard par des taux de décrochage élevés. Pour couronner le tout, la plupart de nos langues sont en voie d'extinction. Les jeunes des Premières nations ne devraient pas avoir à le redouter.
Le pourcentage d'élèves des Premières nations qui ne terminent pas leur secondaire oscille autour de 30 p. 100. Cela signifie, bien sûr, qu'un faible pourcentage va poursuivre des études dans des établissements postsecondaires. Et ceux qui réussissent à le faire n'ont pas accès à des ressources financières stables.
Étant donné la situation actuelle au Canada, il est extrêmement difficile pour ces jeunes d'abord de trouver un emploi correctement rémunéré et ensuite d'avoir des possibilités d'avancement. En fait, dans certaines communautés des Premières nations, le taux de chômage frise les 80 p. 100.
Il y a de moins en moins d'emplois disponibles et la concurrence est de plus en plus dure pour les obtenir, de sorte que le taux de chômage augmente dans beaucoup de régions du pays. Il faut ajouter à cela l'augmentation des maladies chroniques, surtout dans les communautés rurales et septentrionales. Des maladies comme la tuberculose et le diabète, entre autres, sévissent davantage dans nos communautés que dans le reste du pays. Tous ces problèmes, et bien d'autres, ont un effet délétère sur la santé mentale d'un grand nombre de jeunes des Premières nations.
C'est sans doute difficile pour vous de comprendre vraiment la situation à partir de ce bref aperçu des problèmes que connaissent les jeunes des Premières nations du Canada. Songez simplement que, dans bien des cas, la situation est encore pire que celle que je décris. Vous comprenez alors pourquoi les suicides sont si fréquents dans nos communautés. Et chaque fois, c'est un suicide de trop. Les gens essayent de se prendre en main. Ils essaient d'organiser des campagnes de prévention et d'intervention pour lutter contre le suicide.
Nous avons cependant besoin de l'aide de l'ensemble de la population, et nous comptons sur des engagements financiers et des investissements plus conséquents et à plus long terme, pour nous aider à nous prendre en main.
J'ai donné plusieurs exemples de dossiers prioritaires. Les conditions que j'ai décrites sont épouvantables, mais elles ne sont cependant pas irréversibles. Il y a encore lieu d'être optimiste, mais cela va nécessiter des efforts et des investissements considérables de la part de tous les niveaux de gouvernement, sans oublier le secteur privé. Le comité qui a étudié l'éducation chez les Premières nations va soumettre son rapport la semaine prochaine. J'espère, et je le dis en tant que jeune femme, que ce ne sera pas une autre série de recommandations qui seront reléguées aux oubliettes. J'ai beaucoup étudié toutes ces questions, et j'espère que nous saurons travailler en partenariat pour franchir les étapes qui vont conduire à la prise de contrôle, par les Premières nations, de l'éducation des Premières nations. Je me réjouis de voir que le gouvernement fédéral travaille avec l'Assemblée des Premières Nations sur un plan d'action conjoint qui permettra d'accroître la prospérité à long terme non seulement des Premières nations mais aussi de l'ensemble de la population canadienne.
Nous sommes nombreux à penser que le système d'éducation publique devrait intégrer dans ses programmes d'études des cours sur l'histoire des Autochtones au Canada. Par exemple, il est anormal qu'un élève qui termine l'école secondaire au Yukon ne soit pas capable de donner la liste des 14 Premières nations du Yukon. Il en résulte qu'à l'heure actuelle, bon nombre de jeunes Premières nations qui terminent leur secondaire ne sont pas capables eux non plus de nommer les 14 Premières nations du Yukon.
En soulignant l'importance de la culture et des langues des Premières nations dans notre histoire et pour notre avenir, on encourage les jeunes à avoir une impression positive de ce qu'on fait pour les aider à se faire une place dans la société. Les jeunes Premières nations sont réconfortées par l'adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, mais ils aimeraient avoir un plan clair et détaillé des mesures que compte prendre le gouvernement fédéral pour la mettre en oeuvre. Le fait que je sois ici aujourd'hui est la preuve qu'il est possible pour une jeune femme des Premières nations de réussir malgré les nombreux obstacles qui se posent à un grand nombre d'entre nous.
A l'avenir, j'espère pouvoir continuer mes études postsecondaires et entrer à la faculté de droit à l'automne prochain. J'ai réussi à franchir toutes les étapes du système d'éducation. Ça n'a pas été facile, et je suis sûre que je rencontrerai d'autres obstacles, surtout dans le cadre de mon travail auprès de mes compatriotes des Premières nations. En tant que jeune dirigeante de la communauté des Premières nations, je tiens à vous dire que je suis heureuse d'avoir l'occasion aujourd'hui de vous parler de tous ces problèmes, et de tous ceux que je n'ai pas eu le temps d'aborder.
En conclusion, j'aimerais vous remercier de m'avoir invitée à venir vous parler des dossiers que nous jugeons prioritaires, non seulement pour les jeunes des Premières nations mais aussi pour l'ensemble des Premières nations.
Shannen, de la Première nation Attawapiskat, a lancé une initiative, Shannen's Dream (le rêve de Shannen), dont certains d'entre vous ont peut-être entendu parler. Il n'y avait pas d'école pour elle dans sa communauté, et maintenant, malheureusement, comme on l'a dit tout à l'heure, sa communauté a déclaré l'état d'urgence. Il est impératif que le gouvernement fédéral respecte les engagements qu'il a pris de mettre en oeuvre, dans l'esprit et dans la lettre, les accords sur les revendications territoriales et les ententes contemporaines. Comme beaucoup de dirigeants qui ont comparu devant vous venaient du Yukon, j'aimerais conclure en citant Together Today for Our Children Tomorrow, qui illustre bien les efforts qu'il faut faire pour aider les jeunes des Premières nations à réussir leur vie.
Thomasie Johnston, membre du conseil d'administration, National Inuit Youth Council : Merci. Bonsoir.
[Le témoin s'exprime dans sa langue maternelle.]
Je m'appelle Thomas Johnston. Je vous remercie d'avoir invité le National Inuit Youth Council. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de nous faire connaître et de parler de ce que nous faisons.
Comme je l'ai dit, je m'appelle Thomasie Johnston, et je suis membre du conseil d'administration du National Inuit Youth Council. J'habite à Iqaluit, au Nunavut. J'ai grandi à Igloolik, au Nunavut; c'est une petite île perdue au milieu de l'océan Arctique, tout là-haut.
Pendant plusieurs étés, j'ai séjourné dans un chalet aux abords de Quaqtaq, dans le Nord du Québec — le Nunavik — avec mes grands-parents.
Jennifer Watkins, de Kuujjuaq, qui est notre présidente, n'a pas pu venir vous rencontrer car c'est une jeune femme très occupée, avec des enfants et un emploi à temps plein, en plus de la présidence de notre organisation.
Je suis un peu nerveux, et je vous prie de m'en excuser.
Le sénateur Meredith : Tout va bien aller. Prenez votre temps.
M. Johnston : Soixante pour cent de la population inuite du Canada a moins de 25 ans. On nous dit souvent que nous sommes l'avenir du pays et que nous devons investir dans l'éducation et dans les activités qui renforcent nos capacités. Les jeunes Inuits accèdent déjà à des fonctions de leadership, parfois par choix et parfois parce qu'il n'y a pas d'autre choix. Les jeunes sont vraiment l'avenir de notre pays.
Le National Inuit Youth Council, au NYIC, a été créé il y a 18 ans, en 1993, dans le but d'offrir aux jeunes Inuits de l'ensemble du pays une tribune où ils peuvent exposer leurs problèmes afin de trouver de l'aide. La liste des problèmes soulevés lors du premier sommet du National Inuit Youth, en 1994, ressemble beaucoup à celle d'aujourd'hui. Ces problèmes sont le suicide, l'éducation, le logement et les conditions d'hébergement, et la préservation de la culture et de la langue inuites. Ce sont nos priorités, et elles le sont depuis 20 ans.
Près de 20 ans plus tard, le NIYC continue d'être le porte-parole des problèmes des jeunes Inuits dans tout le Canada, en utilisant des médias comme notre site web, niyc.ca, et un magazine fait pour les jeunes et par les jeunes — j'en ai apporté un exemplaire — qui s'appelle Nipiit, ce qui signifie « votre voix, votre son ». Les membres du NIYC participent également à un certain nombre de conseils et de comités nationaux qui examinent les priorités et les problèmes des jeunes Inuits.
À l'heure actuelle, nos priorités sont, entre autres, la langue et la culture, la santé, l'éducation, le réseautage et la communication entre les jeunes Inuits, les services d'aide aux jeunes, les conseils de jeunes, les initiatives prises par les jeunes, et le logement.
Voici une partie du message qu'a livré notre présidente lors d'une rencontre nationale des jeunes Inuits à Inuvik dans les Territoires du Nord-Ouest, l'été dernier :
Mon objectif est de réaffirmer sans honte notre identité, notre culture et notre langue, de réaffirmer notre fierté d'être Inuks.
Dans tout l'Inuit Nunangat, nous aspirons à retrouver notre culture et notre héritage. Plus nous nous en éloignons, plus nous voulons les récupérer. Plus nous nous en éloignons, plus nos grands-parents nous semblent des étrangers. Nous sommes la génération intermédiaire, qui est prise en sandwich entre le mode de vie traditionnel et le mode de vie moderne. Beaucoup de jeunes Inuits n'ont qu'une vague idée de ce que sont le mode de vie traditionnel et le mode de vie moderne, tout comme un grand nombre d'entre eux ont une connaissance limitée de ce qu'ils sont et de ce que sont les autres Inuits du monde.
Au NIYC, notre objectif est de construire des passerelles sur lesquelles nous pouvons nous tenir solidement et fièrement, entre le mode de vie traditionnel Inuk et le mode de vie moderne, passerelles qui aideront les jeunes Inuits à se débarrasser des multiples personnalités que les jeunes générations ont souvent du mal à assumer. Les jeunes Inuits veulent être aussi forts et aussi égaux que tous les autres Canadiens, de façon à la fois moderne et traditionnelle.
Nous voulons progresser sur un certain nombre de fronts. À l'heure actuelle, les écoles du Grand Nord n'enseignent pratiquement rien sur l'histoire et la langue inuites. Comme on l'a dit, environ 25 p. 100 des élèves terminent l'école secondaire, et encore, leur niveau de compétence est bien inférieur à celui des autres élèves canadiens. Nous vivons dans des logements qui sont inadéquats et qui nécessitent d'importantes réparations. Les taux de chômage des communautés inuites sont les plus élevés au Canada. Et nous sommes les champions dans bien d'autres domaines, malheureusement. Je veux parler du suicide, entre autres. Tous ces problèmes sont la cause de graves dysfonctionnements chez les jeunes Inuits. Il n'y a pas un seul jeune Inuk qui n'ait été touché par le suicide d'un membre de son entourage. C'était peut-être un ami proche, un oncle, un cousin; c'était peut-être une tentative de suicide; c'était peut-être son propre frère. Ce sont ces dossiers-là — l'éducation, le logement et le taux de suicide — que je vous recommande d'étudier en profondeur avec les jeunes Inuits et avec le NIYC, pour nous aider à définir nos priorités et à atteindre nos objectifs. Un pays qui est fier de son identité multiculturelle devrait s'employer à maintenir les traditions inuites dans toute leur vitalité. Tout ce que nous voulons, c'est que nos enfants aient une vie saine et heureuse et qu'ils soient fiers de ce qu'ils sont. Je ne demande peut-être pas grand-chose, mais en fait si, car ce que je vous demande, il n'y a pas que les Inuits qui le demandent : tous les Canadiens, tous les citoyens de ce pays en demandent autant. Tout ce que nous voulons, c'est l'égalité.
La vice-présidente : Nous allons maintenant donner la parole aux représentants du Ralliement national des Métis. Allez-vous faire des déclarations séparées, ou ensemble?
Adrian Mrdeza, agente de communications, Ralliement national des Métis : M. Case va vous donner un aperçu de ce que nous avons préparé au niveau national, et il pourra également vous parler de ce qui se fait au niveau de son conseil provincial des jeunes. J'apporterai des précisions s'il y a lieu.
La vice-présidente : Merci.
Mitchell Case, membre du conseil des jeunes, Métis Nation of Ontario :
[Le témoin s'exprime dans sa langue maternelle.]
Je remercie tous les membres du comité de nous avoir invités à comparaître devant vous pour vous parler des principaux enjeux et opportunités qui se présentent aux jeunes Métis du Canada.
Je suis le représentant de la quatrième Région du Conseil des jeunes de la Métis Nation of Ontario. La Métis Nation of Ontario est l'un des cinq membres de l'exécutif du Ralliement national des Métis.
À l'instar des autres jeunes Canadiens, les jeunes Métis rêvent d'avoir la possibilité de réaliser leurs rêves et d'avoir autant confiance dans l'avenir que dans leur passé. Dans certains cas, ces rêves consistent à trouver un emploi stable, à suivre une bonne formation ou à faire des études supérieures. Nous voulons également être libres d'exprimer notre identité métisse dans nos activités quotidiennes, et ce, de façon traditionnelle ou de façon moderne.
La population métisse augmente rapidement, avec plus de 50 p. 100 de jeunes de moins de 19 ans. Cela signifie que, d'ici 10 à 15 ans, plus de 100 000 jeunes Métis seront prêts à entrer sur le marché du travail ou à poursuivre des études supérieures. C'est donc le moment de mettre en place les aides nécessaires pour que les jeunes Métis soient en mesure de franchir ces étapes cruciales.
S'agissant du taux de réussite à l'école secondaire, l'écart s'est considérablement rétréci entre les Métis et l'ensemble de la population, au cours des années. Notre taux de participation au marché du travail atteint presque celui de la population en général. Toutefois, les Métis ont du mal à aller plus loin. Un écart considérable sépare toujours la population générale et les Métis pour ce qui est de l'éducation postsecondaire, puisque seulement 7 p. 100 des Métis font des études postsecondaires, en comparaison de 18,2 p. 100 de la population en général.
Pour les jeunes Métis, l'un des principaux obstacles à l'éducation postsecondaire est d'ordre financier. Contrairement aux Premières nations et aux Inuits, les Métis sont exclus des financements accordés par le gouvernement fédéral pour l'éducation des Autochtones. La plupart des cinq membres provinciaux de l'exécutif du Ralliement national des métis ont créé des fonds de dotation, avec contrepartie des universités, pour offrir des bourses d'études à des Métis inscrits dans des établissements postsecondaires. Toutefois, seuls les intérêts accumulés sur ces fonds de dotation peuvent servir à cette fin, ce qui limite le nombre d'étudiants qui peuvent en profiter. Les demandes d'aide financière pour poursuivre des études postsecondaires dépassent de beaucoup les financements disponibles, si bien qu'un grand nombre de jeunes Métis décident de ne pas poursuivre leurs études.
L'un des meilleurs investissements que le gouvernement fédéral et les provinces pourraient faire serait d'accorder des financements directs aux étudiants Métis pour leur permettre de poursuivre des études postsecondaires, et de renflouer les fonds de dotation actuels de la nation métisse. Ces investissements importants se traduiraient par de meilleures perspectives d'emploi et de carrière pour les Métis ayant des diplômes postsecondaires, et au final, par un accroissement des recettes fiscales des gouvernements.
Par ailleurs, le gouvernement fédéral pourrait augmenter son aide au cinq agences d'emploi et de formation des Métis ou aux divers programmes qui ont aidé 35 000 Métis, dont un grand nombre de jeunes, à trouver un emploi entre 1999 et 2007.
Le gouvernement fédéral pourrait également devenir un partenaire important de l'éducation des Métis en appuyant des instituts d'éducation de la Nation métisse comme l'Institut Gabriel Dumont, à Saskatoon, et l'Institut Louis Riel, à Winnipeg, ainsi que d'autres programmes d'éducation offerts par tous les membres de l'exécutif. À l'heure actuelle, ces initiatives sont principalement financées par les provinces. À l'Institut Gabriel Dumont, l'Urban Native Teacher Education Program a permis de délivrer un baccalauréat en éducation à plus de 1 000 étudiants.
Beaucoup d'entre nous qui avons décroché un diplôme encourageons les jeunes Métis à prendre leur scolarité au sérieux, de la maternelle à la 12e année. Les cinq membres de l'exécutif du Ralliement national des Métis se démènent pour faire participer les jeunes à leurs décisions, dans les conseils. Les jeunes Métis sont représentés à la plupart des conseils provinciaux.
Malheureusement, nous recevons très peu d'aide financière pour nos activités, et certains membres de l'exécutif peinent à rassembler les fonds nécessaires pour organiser une rencontre des jeunes une fois par an. Les jeunes Métis arrivent à se débrouiller pour trouver l'argent dont ils ont besoin ou pour recueillir des dons en nature qui les aideront à organiser des activités orientées sur la culture et la vie saine, mais on pourrait faire tellement plus.
À l'heure actuelle, la principale source de financement pour des activités organisées par des jeunes Autochtones est le programme Connexions culturelles pour la jeunesse autochtone, de Patrimoine canadien, mais les membres de l'exécutif du Ralliement national des Métis ont du mal à obtenir des fonds parce que ce programme ne reflète pas la réalité démographique de la population métisse. En effet, notre population est répartie dans les villes, dans les zones rurales et dans l'arrière pays des provinces situées les plus à l'ouest. Or, les critères de financement du programme Connexions culturelles pour la jeunesse autochtone privilégient les activités organisées dans des zones où sont concentrés des Autochtones.
Comme les budgets sont limités, les groupes de jeunes Métis ont du mal à persuader les jeunes d'entreprendre ces projets par eux-mêmes. Les membres de l'exécutif du Ralliement national des Métis sont alors obligés de puiser dans leurs propres budgets pour payer le personnel et pour faire venir des jeunes qui habitent très loin. C'est d'autant plus regrettable que les représentants des jeunes Métis qui font ça bénévolement cherchent désespérément des occasions de consulter leurs membres, à l'échelle de la province, afin de transmettre leurs opinions aux conseils décisionnels des membres de l'exécutif. On voudrait aussi créer une organisation nationale de la jeunesse qui encouragerait le dialogue entre nos différents territoires et qui serait en quelque sorte le porte-parole des jeunes Métis au niveau national.
Le RNM a déjà eu un conseil des jeunes Métis, mais il est actuellement inactif à cause des réductions de crédits. Malgré l'absence d'un financement régulier pour les jeunes Métis, le Ralliement national des Métis organise des rassemblements de la jeunesse au niveau national, comme le Metis Youth Leadership Camp, qui s'est déroulé pendant quatre jours sur le site historique de Batoche, l'été dernier.
Le thème du camp était l'héritage des pensionnats et ses conséquences pour nos familles et nos communautés. L'objectif était de mobiliser tous les outils et ressources disponibles en matière de réseautage social pour reconstituer l'histoire et les expériences des Métis dans les pensionnats et dans les écoles, et de préparer un document que le Ralliement national des Métis utilisera dans les médias sociaux pour informer le public sur toute cette question.
Les jeunes participants ont pu entendre en direct les témoignages de survivants métis sur leurs expériences et sur l'incidence que cela a eu sur leur vie et sur leur capacité d'élever des enfants et de nouer des relations. Les autres thèmes abordés étaient, entre autres, l'histoire de la nation métisse, l'utilisation des médias sociaux, les communications stratégiques, ainsi que la création d'une peinture murale illustrant le passé, le présent et l'avenir. C'est la première fois que des jeunes ont participé à des activités d'éducation sur ce dossier des écoles et des pensionnats.
Le fait que des jeunes puissent utiliser des outils modernes pour favoriser la guérison et aider les Canadiens à mieux comprendre l'incidence que ces expériences ont eue sur nos familles et nos communautés constitue une approche tout à fait originale vers une meilleure connaissance de tout ce dossier. C'est tout à fait le genre de projet que le programme Connexions culturelles pour la jeunesse autochtone devrait financer.
La vice-présidente : Avez-vous d'autres choses à ajouter, madame Mrdeza?
Mme Mrdeza : À l'heure actuelle, l'exécutif du ralliement compte cinq membres, et il existe un conseil des jeunes dans trois provinces, je parle des conseils qui sont actifs. Les jeunes sont représentés au conseil d'administration, où ils ont le droit de vote.
Dans les deux autres provinces, si j'ai bien compris, il y avait un conseil des jeunes, mais ils sont inactifs en raison du financement irrégulier octroyé par le CCJA, de Patrimoine canadien. D'après ce qu'on m'a dit, il est extrêmement difficile d'avoir accès à ces fonds car les critères sont tellement stricts que ce programme ne sert pas à grand-chose. Les provinces ont un portefeuille de la jeunesse, par lequel elles communiquent aux groupes de jeunes des informations qui concernent les Métis et qui ne relèvent pas directement du membre de l'exécutif de la province.
La vice-présidente : Merci beaucoup.
Avant de passer aux questions, j'aimerais saluer la présence des autres jeunes qui sont dans la salle. Je crois que la plupart, sinon tous, viennent de la même école. Je propose que Thomas Johnston consigne au procès-verbal le nom de l'école d'où viennent tous ces jeunes.
M. Johnston : Ces jeunes gens viennent du Nunavut. Ils fréquentent l'école Nunavut Sivuniksavut — qui signifie « notre terre, notre avenir ». Ils sont ici pour huit mois, loin de leur famille, pour apprendre l'histoire et la langue inuites. Je suis très fier qu'ils soient ici aujourd'hui. Je connais la plupart d'entre eux depuis longtemps. Mes anciens professeurs sont aussi présents, ce qui me rend encore plus nerveux.
La vice-présidente : Je remercie tous les témoins de leur exposé. Vous nous avez donné un très bon aperçu des défis qui se posent à la jeunesse et aussi des opportunités qui s'offrent à elle. Manifestement, vous êtes tous les quatre des exemples de ce qu'on peut réussir à faire malgré les obstacles. Je suis très impressionnée par vous tous, et je suis sûre que tous les membres du comité sont fiers de votre parcours.
Nous allons passer aux questions des sénateurs, mais je vais exercer ma prérogative de poser la première.
Je viens de la Saskatchewan, et je connais bien l'Institut Gabriel Dumont. En fait, cet institut a publié un rapport la semaine dernière, en collaboration avec un professeur d'économie, un certain Eric Howe, de l'Université de la Saskatchewan. Je sais pas si vous êtes au courant, c'est un rapport assez récent. L'auteur démontre, avec d'excellentes preuves à l'appui, pourquoi l'investissement dans l'éducation, c'est payant. C'est payant non seulement pour celui ou celle qui poursuit des études, et l'auteur donne des chiffres sur le salaire qu'on touche quand on a un diplôme de l'école secondaire, un diplôme technique et un diplôme universitaire. Il explique en termes simples que, plus vous faites des études, plus votre salaire sera élevé. L'éducation apporte énormément sur le plan personnel, et vous êtes tous bien placés pour le savoir, mais ça apporte aussi énormément à la société en général, car, plus on est instruit, plus on contribue à l'économie et moins on dépend de l'aide du gouvernement, ce qui représente une économie nette pour le reste de l'économie canadienne. Rien qu'en Saskatchewan, ces économies sont de l'ordre de 90 milliards de dollars, ce qui, d'après l'auteur, est supérieur à la contribution de la potasse à l'économie de la Saskatchewan, laquelle est pourtant le principal moteur économique de la province.
L'éducation a donc des retombées considérables, et j'ai constaté que vous en avez pratiquement tous parlé ce soir.
Le sénateur Meredith : Je suis ravi, et je le redis, de voir tous ces jeunes dans la salle. Tout d'abord, j'aimerais remercier les témoins de nous avoir fait des exposés magnifiques. Madame Adamek, je vous félicite d'avoir décroché votre diplôme. Je sais que c'est un jalon important pour vous, et sans doute aussi pour votre famille. Vous avez réussi à surmonter de nombreux obstacles, et je vous en félicite sincèrement.
Je milite en faveur des jeunes depuis 10 ans, en parlant publiquement de la violence parmi les jeunes dans la ville de Toronto et en essayant d'obtenir de l'aide du gouvernement, mais je constate, depuis que j'ai été nommé sénateur, qu'il y a vraiment une crise nationale au sein de la jeunesse canadienne, et pas seulement de la jeunesse autochtone. Certes, votre situation est certainement plus urgente.
Je vous félicite tous du travail que vous faites et du leadership dont vous faites preuve. Je salue également vos professeurs qui sont dans la salle et à qui je dis que leur travail n'a pas été vain. Quant aux autres jeunes qui sont dans la salle, je les encourage à ne pas baisser les bras. Vos camarades vous regardent, ils voient que vous quittez votre famille pour venir vivre une nouvelle expérience. Certains d'entre vous éprouvent peut-être de la lassitude, mais je vous encourage à tenir bon parce qu'il y en a qui vous regardent et qui comptent sur vous. Je vous encourage à ne pas baisser les bras malgré l'adversité, la discrimination et le racisme, sans parler des horribles inégalités qui existent encore au Canada en ce XXIe siècle. Ne renoncez pas. Tenez bon. Il y a de la lumière au bout du tunnel.
Le comité qui siège devant vous est déterminé à faire avancer les choses pour les Inuits, les Métis et les Premières nations en général. Ça me fend le coeur de voir la situation dans laquelle se trouvent certains Canadiens, et vous êtes des Canadiens.
Je voudrais poser une question à Mme Adamek : que faites-vous pour encourager vos alliés, c'est-à-dire les femmes, les hommes et les jeunes qui partagent vos idées, à militer à vos côtés pour que votre voix se fasse entendre sur tous ces dossiers, pour mobiliser un plus vaste auditoire par un médium quelconque, pour vous assurer que les politiciens entendent votre message, bref, pour rallier tous les appuis possibles afin que les choses changent vraiment?
Voilà pour ma première question. J'en aurai d'autres pour les autres témoins.
Mme Adamek : Merci, sénateur, de vos commentaires et de votre question, qui est une question importante.
Il se trouve que, juste avant cette réunion, mes collègues et moi avons discuté de la nécessité de faire quelque chose. Notre Conseil national des jeunes va se réunir à Ottawa en décembre, et nous y avons officiellement invité les autres témoins ici présents afin que nous puissions commencer à discuter tous ensemble de ce que nous pouvons faire. Même si, sur le plan culturel, nous avons des traditions différentes, nous avons beaucoup de points communs en ce sens que nous sommes jeunes et que nous voulons faire avancer les choses pour les prochaines générations.
S'agissant de nos alliés, pour reprendre le terme que vous avez employé, nous avons notre Conseil national des jeunes. Au niveau régional, nous avons aussi des conseils des jeunes qui disposent de certains moyens pour encourager des jeunes Premières nations à être des modèles et à acquérir des compétences de leadership. Nous allons avoir notre sommet national de la jeunesse, à la fin de l'été prochain, qui permettra de réunir des jeunes Premières nations de tout le Canada pour élaborer un plan d'action stratégique sur cinq ans. Comme on l'a dit tout à l'heure, nous sommes dans la dernière année de notre plan d'action stratégique, dont l'éducation et la santé étaient les principales composantes.
S'agissant des initiatives que nous avons entreprises, je vous dirai que « le rêve de Shannen » visait non seulement à mobiliser les jeunes des Premières nations mais aussi à sensibiliser tous les Canadiens sur les graves inégalités qui existent dans le système scolaire des Premières nations et des autres jeunes autochtones. Pour ce qui est des autres initiatives, je peux vous citer la société d'entraide des Premières nations, dont Cindy Blackstock s'occupe activement. Elle a participé à l'organisation d'un rassemblement de la jeunesse de tout le Canada pour discuter de ces questions. Il y a eu le sommet virtuel de l'éducation postsecondaire qui a eu lieu cette année, qui a réuni des jeunes Premières nations de tout le Canada pour discuter du financement actuel de l'éducation postsecondaire, de ce qu'il devrait être et des principaux obstacles qui se dressent.
Il y a donc eu, au cours de ces 12 derniers mois, de nombreuses initiatives pour nous aider, d'abord à communiquer les uns avec les autres et ensuite, à déterminer ce que nous pouvions faire.
J'espère que cela répond à peu près à votre question. Si cela est nécessaire, je peux vous donner des précisions.
Le sénateur Meredith : Monsieur Johnston, vous avez dit que 60 p. 100 des jeunes avaient moins de 25 ans. Nous avons entendu parler de ces horribles histoires de suicides et des maladies qui touchent nos jeunes. J'en reviens toujours au leadership. Vous êtes en train d'en faire la démonstration, et je vous en félicite. Soyez courageux. Nous avons tous été nerveux, à un moment ou à un autre, alors détendez-vous un peu. Vous êtes manifestement un vrai leader, et les autres vous suivent.
Pensez-vous que vos dirigeants en font assez pour que les choses changent réellement dans vos communautés? Leur dites-vous que vous en avez assez de tous ces rapports qui s'accumulent, de ces millions de dollars qui sont investis sans aucun résultat concret? Pensez-vous que vos dirigeants en font assez lorsque ces rapports sont publiés et que ces réunions sont organisées? En font-ils assez pour que les choses changent réellement dans vos communautés?
M. Johnston : Je vous remercie de votre question.
Le sénateur Meredith : N'hésitez pas à dire ce que vous pensez, et pas le contraire simplement parce qu'ils sont dans la salle; dites ce que vous pensez.
M. Johnston : J'allais dire que c'est une question plutôt dangereuse.
Le sénateur Meredith : Les sénateurs vous défendront, ne vous inquiétez pas.
M. Johnston : Je ne connais pas toutes les régions, mais je connais bien le Nunavut. Je connais presque tous les députés territoriaux, même qu'on se tutoie. Je les vois souvent. Je sais que lorsqu'ils ne sont plus à leurs fonctions officielles, à l'assemblée législative, ce sont généralement des gens calmes et heureux. J'aime bien aller les voir quand ils ne sont pas l'assemblée législative, car à ce moment-là, ils communiquent vraiment et ils font à nouveau partie de la communauté. Nous avons un gros problème avec nos dirigeants. Nous vivons dans des communautés minuscules qui ne sont accessibles que par avion; vous ne pouvez pas vous y rendre par voie terrestre, sauf en motoneige. Toutes ces communautés ont chacune leurs dirigeants. Les plus dynamiques d'entre eux quittent généralement la communauté pour aller à Iqaluit ou à Ottawa. Ils sont censés y défendre nos intérêts, mais nous ne les revoyons plus jamais.
Le sénateur Meredith : Y a-t-il un manque de communication entre vos dirigeants et la population?
M. Johnston : Le problème, c'est qu'ils ne sont jamais dans la communauté. Une fois qu'ils sont partis, ils ne sont plus avec nous, alors que nous aimerions bien qu'ils reviennent, non seulement parce que ce sont nos dirigeants et que nous les admirons, mais aussi parce que nous les considérons comme des membres de notre famille. Nos dirigeants actuels pourraient faire beaucoup plus pour entretenir l'esprit de la communauté. Les membres des communautés sont très solidaires. Malgré tous les problèmes que nous avons, nous ne nous tournons pas systématiquement vers le gouvernement pour qu'il trouve une solution. Nous nous tournons vers un membre de la famille ou vers un ami.
Nos dirigeants sont déconnectés de cette réalité. Parfois, je pense qu'ils ne défendent plus nos intérêts. L'Assemblée législative du Nunavut fait pourtant du bon travail. Un document a été présenté récemment, un plan stratégique de prévention du suicide; le gouvernement du Nunavut a créé le bureau du défenseur des droits des enfants et des jeunes, et il a fait adopter un projet de loi sur l'éducation qui va être mis en oeuvre, mais malgré tout ça, nous nous retrouvons toujours avec les mêmes problèmes. Nous avons tous ces mécanismes qui sont en place et qui sont super et sophistiqués; c'est bien beau sur le papier, mais la plupart du temps, ça ne va pas plus loin. Pour le reste, on peut rêver.
Le sénateur Meredith : J'aimerais vous poser une question au sujet des perspectives économiques. Pour notre comité, il est indispensable que votre message soit entendu et consigné au dossier. Vous dites qu'il est difficile de trouver un emploi et que 50 p. 100 des jeunes ont moins de 19 ans. Vu les ressources limitées dont vous disposez, que faites-vous pour créer des débouchés, nouer des partenariats avec le secteur privé, et cetera, afin de créer des emplois pour ces jeunes? Qu'est-ce qui se fait actuellement?
M. Case : Malheureusement, on n'en fait pas assez. Étant donné les ressources dont nous disposons, c'est déjà un miracle de faire ce que nous faisons. Les statistiques indiquent que notre programme de développement du marché du travail et notre programme SFCEA ont permis d'aider 35 000 Métis, la plupart des jeunes, à trouver un emploi sérieux. Nous ne relevons pas de la compétence fédérale, de sorte que nos organisations provinciales sont beaucoup plus actives que notre organisation fédérale. Je peux vous parler plus précisément de la Métis Nation of Ontario, dans laquelle je suis très engagé. Le volet éducation est tout à fait nouveau. Auparavant, c'était seulement un programme de développement du marché du travail, qui établissait des relations avec les nouvelles industries. Ce programme est en quelque sorte administré à partir de Sault Ste. Marie, ma ville natale. Nous avons réussi à nouer des relations de travail avec des entreprises des secteurs émergents comme l'énergie. Je ne sais pas si c'est vrai, mais Sault Ste. Marie prétend être la ville la plus verte du Canada parce que nous abritons la plus grande ferme éolienne et la plus grande ferme solaire. Je ne sais pas si ça veut dire quelque chose, mais c'est ce que la ville prétend. Nous avons réussi à établir beaucoup de relations avec des entreprises des secteurs émergents et à trouver ainsi des emplois sérieux pour nos jeunes.
Le sénateur Meredith : Est-ce qu'il y a un volet mentorat? Est-ce que ces entreprises encadrent ces jeunes?
M. Case : C'est un objectif à long terme, mais ce n'est pas encore la réalité. Notre centre d'éducation en fait un objectif pour dans cinq ou 10 ans, et il espère qu'il se concrétisera, mais nous n'en sommes pas encore là. Je ne peux pas vous donner de détails sur les quatre autres membres de l'exécutif, mais en tout cas voilà ce qu'il en est pour la Metis Nation of Ontario.
Mme Mrdeza : Permettez-moi d'ajouter que le Ralliement national des Métis a préparé, avec l'aide des membres de son exécutif, une présentation vidéo des succès obtenus par notre programme SFCEA, notamment le cours de formation culinaire de la Nation métisse de la Colombie-Britannique. Les candidats de la Metis Nation of British Columbia suivent un cours de formation culinaire et suivent ensuite un programme de mentorat avant d'occuper un emploi. Ils ont trouvé cela très utile. Quand on parcourt le territoire de la Nation métisse, d'ouest en est, on voit bien tous ces exemples de réussite, qui sont incroyables, comme par exemple la construction immobilière à Calgary et à Edmonton. Au Manitoba, des logements sociaux sont offerts à des familles monoparentales qui apprennent comment bien élever leurs enfants, et les jeunes mères peuvent retourner à l'école. Elles ont donc un logement. En Ontario, il existe un programme de construction qui permet à des jeunes Métis de travailler sur un chantier comme apprentis. Ensuite, c'est à eux de faire des efforts pour devenir compagnons. Il y a beaucoup de choses qui se font, et nous nous efforçons, bien sûr, de nouer d'autres relations de travail. La Nation métisse s'emploie à élaborer un plan de développement économique qu'elle va porter au niveau national. Nous appuyons les membres de l'exécutif du mieux que nous pouvons, et nous veillons à ce que cela inclue nos jeunes.
M. Case : Permettez-moi d'ajouter qu'il y a eu le Centre de formation d'apprentis autochtones, qui était un partenariat entre la Metis Nation of Ontario et le Sault College. Ce centre a fonctionné pendant deux ans. Comme ce n'était pas mon secteur, je ne sais pas d'où venaient les fonds. Quoi qu'il en soit, que ce soit le provincial ou le fédéral, le financement a été supprimé et le centre est aujourd'hui uniquement administré par le collège, qui se rend compte de l'importance du programme et de son succès. Donc, au bout de deux ans, le gouvernement a décidé de cesser toute aide financière.
C'est réconfortant de voir que des collèges et des universités se rendent compte de l'utilité des programmes d'éducation pour les Premières nations, les Métis et les Autochtones, et qu'ils décident eux-mêmes de poursuivre ces programmes, même lorsqu'il n'y a plus d'aide financière du gouvernement.
Le sénateur Raine : Je me réjouis d'entendre des témoignages aussi intéressants. J'ai beaucoup de questions à vous poser, mais notre temps est limité. Nous savons qu'il y a des problèmes au Nunavut en ce qui concerne les logements, car les gens ne font pas les réparations nécessaires. Faudrait-il mettre sur pied des programmes de formation pour apprendre aux gens à construire, à entretenir et à réparer leurs maisons? Pensez-vous que ce serait utile?
Les études universitaires, c'est bien, mais pour les gens qui vivent dans une communauté où ils n'ont pas vraiment besoin d'un diplôme universitaire, il faudrait leu faire comprendre qu'il est très important aussi d'acquérir des compétences techniques agricoles. J'aimerais bien que les compétences agricoles traditionnelles soient reconnues comme de précieuses compétences de base. Qu'en pensez-vous?
M. Johnston : Pour la construction et les autres métiers du genre, il y a une école qui a récemment ouvert ses portes à Rankin Inlet. C'est sa première année de fonctionnement. Il n'y a pas encore beaucoup d'étudiants. À l'école secondaire, j'ai fait un peu de construction. Je vous prie de m'excuser mais l'Inuktitut est ma langue maternelle, et mon anglais est parfois un peu curieux. À l'école secondaire, donc, j'ai participé à la construction d'un igloo, et j'ai donc cette expérience. Je n'ai pas eu à utiliser du bois, des cloisons ou des clous, mais j'ai quand même appris comment construire une maison solide. L'endroit où vous décidez de construire est aussi important que les matériaux de construction. Il y a aussi un certain type de neige qui est préférable pour la construction d'un igloo. Nous essayons d'intégrer nos valeurs et nos traditions dans notre système gouvernemental par ce que nous appelons « Les piliers de la sagesse inuite ». Chaque projet de loi doit être associé à l'un des principes IQ (ou valeurs inuites). Le gouvernement a décidé d'en retenir huit, mais il existe des centaines de valeurs différentes.
À part l'école de formation professionnelle à Rankin Inlet, il existe des cours de formation d'opérateur d'équipements lourds qui sont offerts aux étudiants du Nunavut, tout près d'Ottawa. À part cela, il n'y a pas d'école professionnelle particulière pour les jeunes Inuits.
Le sénateur Raine : Pensez-vous que ce serait nécessaire?
M. Johnston : Absolument. Nos besoins sont multiples, et c'en est un. Les Inuits sont très habiles de leurs mains, et en plus, ils sont capables de visualiser une structure avant même qu'elle soit construite. Pour être compagnon ou pour construire une maison, vous avez besoin d'un certificat, et je pense que si les Inuits avaient ces certificats, ils seraient capables de construire de belles maisons.
Le sénateur Patterson : Je remercie nos témoins, mais je vais leur poser des questions essentiellement sur ma région.
Monsieur Johnston, vous avez parlé du taux de chômage le plus élevé au Canada, du nombre alarmant de suicides, de votre désir de retrouver votre identité culturelle, et de vos aspirations à l'égalité. Il n'y a certes pas de solutions faciles à tous ces problèmes, mais j'ai l'impression que les choses sont sur le point de changer dans l'Inuit Nunangat, du Nunatsiavut vers l'ouest. Je veux parler de l'exploitation des ressources naturelles dont regorgent les terres inuites, notamment les diamants et le minerai de fer le plus pur au monde. Cela va créer beaucoup d'emplois. Vous avez grandi à Igloolik. Plus bas le long de la côte, à Hall Beach, il est question d'ouvrir une mine d'exploitation du minerai de fer. Il y a aussi un projet de mine à l'île Baffin, qui va donner des emplois aux gens qui habitent le long du détroit. La première mine d'or du Nunavut est maintenant en production au lac Baker, et une autre est en cours de construction. Ce sont des emplois qui payent bien, qui laissent du temps aux travailleurs pour cultiver leur terre et pour rester auprès de leur famille, avec les roulements. Ces emplois vont également permettre aux travailleurs d'acheter de la terre, car on sait que ça coûte cher.
Autrement dit, la perspective de toutes ces créations d'emplois doit donner beaucoup d'espoir à vos compatriotes, car jusqu'à présent, il n'y en a pas eu beaucoup, à part les quelques emplois que crée le gouvernement dans une communauté. Quand vous parlez de rêves et d'aspirations — je sais que ces mines doivent être aménagées dans le respect de l'environnement, et j'y crois vraiment —, est-ce que les jeunes se rendent compte que les choses sont en train de changer véritablement et que cela va certainement leur apporter de nouveaux débouchés? Est-ce que vous pensez à tous ces métiers, ces professions, par exemple dans la géologie pour les nouvelles mines, qui vont être créés? Si les Inuits ne les prennent pas, il y a d'autres travailleurs qui vont les prendre. Y avez-vous songé?
M. Johnston : L'activité minière apporte beaucoup de changement. Sur l'île de Baffin, on prévoit que, vu la richesse du sous-sol, cette mine d'extraction du minerai de fer va fonctionner pendant 102 ans, avec une production de plusieurs trillions de dollars par an. Les habitants des communautés savent que cela va créer de l'emploi. Grâce à l'école professionnelle de Rankin Inlet et au programme de formation d'opérateur d'équipements lourds ici, à Ottawa, nous avons réussi à former une poignée de travailleurs qui peuvent occuper ces emplois et les garder. Pour les prochaines années, nous espérons — d'autant plus que notre projet de loi sur l'éducation vient d'être adopté — que d'autres programmes de formation seront mis sur pied, afin que nous puissions occuper ces emplois. Cela me fait un peu peur. Je ne pense pas qu'on ait quoi que ce soit à craindre des mines, car elles vont apporter des emplois bien rémunérés. Mais ce qui m'inquiète, c'est que nous allons devoir apprendre à faire un budget. Je voulais vous dire autre chose, mais j'ai perdu le fil...
Le sénateur Patterson : Ça va vous revenir.
M. Johnston : Au début, ça va provoquer des conflits. Il ne faut pas que le Nunavut mette tous ses oeufs dans le même panier, celui des mines, car si les mines ne donnent pas les résultats escomptés ou qu'il n'y a plus rien à extraire, on se retrouvera Gros-Jean comme devant. Je me demande ce qu'il arriverait alors. Nous allons avoir besoin d'autres travailleurs, avec des qualifications différentes. Il va falloir que les étudiants reviennent chez eux.
Le sénateur Patterson : Merci.
La vice-présidente : J'aimerais poser à chacun des représentants des groupes d'étudiants la question suivante : si le gouvernement fédéral vous offrait de l'aide au niveau des programmes, ou autre chose, que lui demanderiez-vous qui puisse vous aider à réaliser vos rêves? Quel genre d'intervention de la part du gouvernement fédéral vous donnerait de l'espoir pour l'avenir, vous montrerait que vous pouvez, tout en conservant votre identité, vous détacher du passé et passer à la modernité? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire? Qui est prêt à se lancer?
M. Case : Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, je pense que l'éducation postsecondaire est la priorité numéro un pour les jeunes Métis. Il faut donc faciliter l'accès à l'éducation postsecondaire, consentir des financements stables au programme d'éducation des Métis et augmenter les financements pour les fonds de dotation dont nous avons parlé, le président Chartier et moi-même.
Je suis moi-même en deuxième année d'université. J'étudie l'histoire à l'Université Algoma, et la langue ojibway à l'université de Sault Ste. Marie. La demande que j'ai adressée à l'un de ces fonds de dotation, l'an dernier, a abouti à un chèque de 300 $. Nous avons besoin d'aide, d'aide financière. Je ne suis ni un économiste ni un mathématicien, mais il faut absolument refaire les calculs pour ce qui est de l'aide aux étudiants. Il est difficile de se concentrer sur ses études quand on sait qu'on est de plus en plus endetté. C'est difficile de se consacrer à ses études lorsqu'on est obligé d'avoir deux emplois pour pouvoir rester à l'université. C'est ce qu'on disait tout à l'heure à propos de la malnutrition. On ne peut pas étudier dans des conditions pareilles.
Deuxièmement, je pense que c'est une responsabilité non seulement du gouvernement fédéral mais aussi des gouvernements provinciaux et municipaux. C'est la responsabilité de tous les Canadiens d'apprendre l'histoire des peuples autochtones.
Comme je l'ai dit, nous avons peu d'occasions de nous rencontrer, mais s'il y a une chose que mes amis métis me disent, c'est qu'ils en ont assez de devoir expliquer qui ils sont. Nous savons qui nous sommes. Nous connaissons notre histoire. Nous savons par quoi nous sommes passés. Nous savons tous ce qui nous est arrivé, le bon comme le moins bon. C'est fatigant de devoir toujours essayer d'expliquer aux autres qui on est.
Par conséquent, c'est la responsabilité non seulement du gouvernement fédéral mais de tous les Canadiens de se renseigner là-dessus. Nous essayons de reconstruire nos communautés, mais nous devons sans arrêt répondre à la question : « Qui êtes-vous? » On ne la pose à personne d'autre. Il n'y a que nous qui devons y répondre. Imaginez si quelqu'un vous demandait, à brûle-pourpoint : « Qui êtes-vous? Expliquez-nous qui vous êtes. » Cela n'arrive jamais. Nous sommes les seules personnes à qui ça arrive, et je veux parler des trois groupes autochtones, mais surtout des Métis. Nous ne devrions pas avoir à répondre à ce genre de questions.
Je suppose que ma première réponse va vous être utile, mais pour ce qui est de la deuxième, il était important que je le dise parce qu'il en va de l'identité de notre peuple.
Le sénateur Meredith : Avez-vous fait une demande au RAFEO?
M. Case : Oui, je suis lié par contrat au RAFEO.
Le sénateur Patterson : Puis-je poser une petite question supplémentaire? Vous avez parlé du programme SFCEA. S'agit-il d'un programme de RHDCC?
Mme Mrdeza : Oui.
Le sénateur Patterson : Pensez-vous qu'il est efficace?
Mme Mrdeza : Je ne suis pas du tout une experte en la matière, mais comme je suis agente des communications auprès du Ralliement national des Métis, j'entends ce que les membres de l'exécutif ont à dire, les initiatives qu'ils entreprennent et les succès qu'ils connaissent.
Je pense que ça marche. Je pense que ce programme est efficace, mais c'est toujours une question de temps, d'argent et d'énergie à investir pour obtenir les fonds nécessaires à ce programme. La nation métisse fait des prévisions pour son développement économique. Elle organise de petits symposiums sur le développement économique pour les Métis, dans le but de stimuler ce développement dans une province, par exemple. De cette façon, les établissements d'enseignement ainsi que les membres de notre exécutif peuvent se renseigner sur le genre d'entreprises qui sont implantées et le type de travailleurs qu'elles recherchent. Les membres de l'exécutif sont ensuite en mesure de mettre sur pied des programmes de formation axés sur ces besoins, si bien que les Métis qui veulent suivre une formation pour mieux gagner leur vie peuvent s'inscrire à ces programmes. Le potentiel est considérable, et ça ne fait que commencer.
M. Case : Le succès du SFCEA ne se mesure pas seulement aux statistiques, mais aussi à son impact sur la communauté. J'entends souvent les gens, dans notre communauté, dire que s'ils avaient un emploi à temps plein et qu'ils savaient qu'ils pourraient payer leur loyer, ils pourraient participer à des activités communautaires, faire des choses, donner bénévolement de leur temps dans un conseil ou ailleurs, ou faire de la permanence dans un centre où les jeunes viennent passer du temps.
Quand on se demande comment on va faire pour payer son loyer, quand on n'a pas un emploi stable, on n'a pas le temps de penser aux autres membres de la communauté, on essaie simplement de survivre.
Les statistiques démontrent que ce programme est efficace, mais il y a autre chose, et ce sont les retombées au niveau communautaire.
La vice-présidente : Nous allons donner la possibilité à M. Case et à M. Johnston de répondre à la question sur ce que pourrait faire le gouvernement fédéral pour vous aider à réaliser votre rêve.
Mme Adamek : Je vais vous faire plusieurs suggestions qui, à mon avis, reflètent les aspirations non seulement du Conseil national des jeunes, mais aussi de l'ensemble des Premières nations du Canada.
La première chose que nous aimerions, c'est un financement stable pour l'éducation postsecondaire. À l'heure actuelle, des plafonds sont imposés aux crédits accordés aux Premières nations.
Deuxièmement, et ça a un lien direct avec le financement de l'éducation postsecondaire, il faut revoir et remplacer la Loi sur les Indiens. Pour les Premières nations, cette loi a été un outil d'assimilation. Or, chacune de nos communautés a ses propres caractéristiques. Il y a plus de 634 Premières nations au Canada, et chacune d'entre elles a ses propres structures de gouvernance et sa propre définition de citoyen, que ce soit par le clan, par exogamie des moitiés, ou par filiation matrilinéaire. J'estime que nous ne devrions pas être tributaires de l'article 1 ou de l'article 2 pour déterminer qui nous sommes en tant que Premières nations.
La troisième suggestion concerne l'éducation primaire et secondaire, de la maternelle à la 12e année; comme on l'a déjà dit bien des fois, le plafond de 2 p. 100 qui est imposé au financement que nous recevons doit être supprimé. Ce plafond existe depuis 10 ans, m'a-t-on dit, si ce n'est pas plus.
S'agissant des financements qui sont alloués aux Premières nations, nous estimons qu'ils devraient être versés directement aux Premières nations, au lieu de passer par les systèmes provinciaux. Il arrive très souvent que les montants que reçoivent les communautés et les financements alloués au départ ne correspondent pas. Or, le financement qui est alloué à ces écoles doit aller à ces écoles.
Prenons l'exemple d'équipements de base comme les bibliothèques. Je suis sûre que tous ceux qui sont assis autour de cette table ont déjà eu la chance d'utiliser un magnétophone. Quand nous avons eu notre réunion avec le comité national, il a été question de tous ces enfants qui n'ont pas de magnétophone et qui n'ont donc pas les mêmes opportunités que les enfants qui fréquentent une école publique, par exemple. Par conséquent, les bibliothèques, les ordinateurs, les bureaux — tous les équipements auxquels ont accès tous les élèves des écoles publiques devraient aussi être accessibles aux élèves des Premières nations dans les réserves.
Il y a aussi toute la question des aides à apporter aux élèves qui ont des problèmes d'apprentissage ou qui ont tout simplement besoin de soutien supplémentaire. Il existe des modes d'apprentissage différents, et il est démontré qu'avec certaines méthodes expérimentales, les élèves, et plus particulièrement les Premières nations, réussissent mieux à l'école. Par exemple, nous avons eu il y a quelques années une réunion sur l'éducation au Yukon. L'un des élèves avait des problèmes dans le programme secondaire régulier. Tous nos élèves fréquentent des écoles publiques. Nous n'avons pas d'écoles dans nos réserves, comme vous le savez. Tous nos enfants doivent donc aller dans des écoles publiques, ils n'ont pas le choix. Cet élève a demandé pourquoi il ne pouvait pas apprendre dans sa communauté, car c'était pour lui la meilleure salle de classe. Il estimait qu'au lieu de cours de gymnastique, il valait mieux faire du canoë, construire une cabine et apprendre la géométrie. Il faut donc envisager différents modèles d'apprentissage non seulement pour les jeunes Premières nations et les jeunes Autochtones, mais aussi pour tous les Canadiens. Nous devons essayer de voir comment nous pouvons intégrer les nouveaux modes d'apprentissage du XXIe siècle.
La langue est une autre priorité, ainsi que l'adoption de modèles de succès différents.
Des témoins ont dit tout à l'heure qu'il fallait que nos élèves sur les réserves et en dehors ainsi que l'ensemble des Canadiens connaissent mieux l'histoire du Canada, mais ce n'est pas ce qui est enseigné dans les manuels d'histoire. C'est important, car il faut que les Canadiens comprennent pourquoi nous sommes fiers de notre identité.
S'agissant de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Canada l'a signée, et il y a quelques années, le gouvernement a présenté des excuses, mais depuis, aucune mesure n'a été prise. M. Jock en a parlé tout à l'heure, et moi j'ai parlé d'un document qui a été relégué aux oubliettes. Quand on adopte ce genre de choses, il ne faut pas que ce soit dans un souci purement électoral, il faut que ça se traduise par des actes concrets. Il faut donc mettre en oeuvre la déclaration onusienne, notamment l'article 24 qui traite des droits des enfants à l'éducation et à l'apprentissage de leur langue dans la communauté de leur choix, et ce doit être notre priorité.
Si le gouvernement envisage d'élaborer une loi, il est impératif que les Premières nations participent à sa préparation. On a parlé tout à l'heure du mécanisme qui pourrait être mis en place, mais comme l'a dit Ovide Mercredi au comité national, les Premières nations doivent participer à ce processus. La Loi sur les Indiens a été élaborée sans la participation des Premières nations, et nous ne voulons pas que cela se reproduise. Il faut que nous participions dès le début.
L'autre priorité consiste à respecter les traités contemporains, les traités qui ont été signés, sans parler de toutes ces Premières nations qui n'ont pas de traités. Par exemple, l'éducation et les services de santé sont reconnus comme des priorités dans un grand nombre de traités. Le gouvernement fédéral doit reconnaître et respecter l'esprit et la lettre de ces ententes, ainsi que le Yukon, et assurer la mise en oeuvre des accords de revendications territoriales et des ententes d'autonomie gouvernementale, car 11 Premières nations sur 14 ont des difficultés dans ce domaine-là.
Enfin, il faudrait envisager des modèles de mentorat. Il en a été question tout à l'heure. Il se trouve que nous avons un programme de mentorat au Yukon, qui s'adresse surtout aux élèves qui viennent des communautés rurales et qui vont à l'école à Whitehorse. Nous les jumelons avec un élève plus âgé, qui les aide à s'adapter au système scolaire ou qui les accompagne au gymnase. Nous organisons beaucoup d'activités culturelles, surtout depuis que je dirige le département d'éducation du Conseil des Premières nations du Yukon. Ça marche plutôt bien. Ce modèle de mentorat pourrait s'appliquer aux étudiants du Nunavut qui sont ici, par exemple, ils pourraient être jumelés avec quelqu'un qui travaille au Nunavut de sorte qu'ils pourraient se familiariser avec la façon dont les choses fonctionnent, voir ce qu'il est possible de faire. Le fait de nous avoir invités ici aujourd'hui est, indirectement, un bon exemple de la façon dont vous pouvez être nos mentors et aider les jeunes Autochtones que nous sommes à acquérir des compétences de leadership.
Pour conclure, je voudrais dire qu'il faut passer à l'action. Nous l'avons dit, des études ont été faites en abondance. Le mot « consultation » est employé à toutes les sauces, et je n'ai rien contre ce terme, mais maintenant, il faut passer à l'action. Les conclusions du comité national, par exemple, seront très importantes, surtout pour les Premières nations. Il faut se parler franchement, et j'estime que le gouvernement fédéral doit reconnaître les graves inégalités qui existent actuellement.
La vice-présidente : Merci de cet excellent résumé.
M. Johnston : J'ai l'impression qu'elle a dit tout ce que j'avais à dire.
J'aimerais quand même ajouter plusieurs choses.
Combien coûte un sac de 4 litres de lait ici : 3 ou 4 $? J'habite à Iqaluit, j'ai deux enfants et j'ai trois emplois, en ce moment. Je n'ai pas le choix car je dois payer un loyer de 2 500 $ par mois pour un appartement minuscule de 700 pieds carrés, avec deux chambres à coucher. Quand je vais acheter du lait pour les enfants, je dois casquer 15 $ pour 4 litres. Comme le dit mon copain, c'est « invraisemblable ».
J'ai parlé tout à l'heure d'égalité. Si nous étions égaux à ce niveau-là, et que vous deviez acheter votre lait au prix où nous le payons, je crois que vous diriez vous aussi que c'est invraisemblable.
En plus, il y a la question de la sécurité : il faut que nos rues et nos communautés soient plus sûres. Il ne faut pas que nos enfants se retrouvent en prison plutôt que d'être à l'école. Je me souviens de ce que l'ancien premier ministre Paul Martin disait il y a quelques semaines : il vaut mieux que les enfants soient à l'école qu'en prison.
On parle beaucoup de « souveraineté » dans l'Arctique. Je suis sûr que vous voyez ce que je veux dire. Dans mon cercle d'amis, on appelle ça « La colonisation, chapitre 2 ». Bien sûr que le gouvernement doit assurer une présence militaire pour montrer que nous faisons partie du Canada, mais il y a certainement d'autres façons d'affirmer que nous sommes un pays souverain. Je ne pense pas qu'il soit indispensable de construire ces nouveaux bateaux qui vont fendre la glace en hiver. C'est notre éducation qui est la priorité. Nos logements et notre niveau de vie devraient être bien supérieurs à ce qu'ils sont. À mon avis, ce serait la meilleure façon pour le Canada d'affirmer sa souveraineté. Les Inuits préféreraient nettement qu'on fasse cela plutôt que de militariser l'Arctique.
Enfin et surtout, je tiens à vous dire que la majeure partie de mes revenus proviennent de subventions fédérales de Patrimoine canadien. L'an dernier, j'ai dû réduire mon budget de près de 33 p. 100.
Du jour au lendemain, les programmes que j'administrais à partir de mon bureau depuis des années n'étaient plus admissibles parce que de nouvelles règles ont été mises en place pour ce type de crédits. Quand le gouvernement décide de modifier les critères d'octroi des subventions que je reçois depuis des années, il me semble que je devrais pouvoir lui dire que ces nouveaux critères ne fonctionnent pas pour moi.
En conséquence, je ne peux plus emmener un groupe de jeunes chasser pendant une semaine. Je ne peux plus organiser une semaine de formation en Inuktitut dans des écoles secondaires du Nunavut, et je ne peux plus faire venir des jeunes, une fois par an, à Iqaluit, par avion, pour suivre un cours de formation en leadership. Du jour au lendemain, avec les nouvelles règles, on me dit que je ne peux plus organiser ces cours. Il me semble que ce genre de décision mérite d'être examinée de plus près.
Je crois que nous commençons à avoir faim et qu'il se fait tard. Je vais m'en tenir là.
La vice-présidente : Je remercie vivement tous les témoins qui viennent de comparaître. Vous nous avez donné des tonnes d'informations, avec beaucoup de sagesse, sur la réalité que vous vivez tous les jours et sur ce que vous voudriez que nous fassions. Je suis sûre que tous les sénateurs se félicitent, comme moi, de vous avoir invités à venir nous rencontrer. Nous allons examiner très sérieusement toutes les idées que vous avez exprimées.
Avant de lever la séance, je vous informe que le sénateur Meredith a organisé une visite du Sénat à laquelle il vous invite cordialement; nous allons vous accompagner, pour vous montrer où nous travaillons chaque jour. Si cela vous intéresse, suivez-le.
Encore une fois, je vous remercie d'être venus nous rencontrer.
(La séance est levée.)