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BANC - Comité permanent

Banques, commerce et économie

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 5 - Témoignages du 17 novembre 2011


OTTAWA, le jeudi 17 novembre 2011

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 10 h 37, pour examiner la situation actuelle du régime financier canadien et international (sujet : le financement de la croissance des PME).

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour, chers collègues, et bonjours aux témoins et à ceux qui suivent les délibérations sur les ondes.

[Français]

Bienvenue à notre séance portant sur la situation actuelle du régime financier canadien et international. Je suis le sénateur Meighen de l'Ontario et j'ai l'honneur de présider ce comité. Je vous présente à ma droite, le sénateur Hervieux- Payette, du Québec, qui est vice-présidente du comité. À sa droite, Larry Smith, également du Québec, le sénateur Irving Gerstein, de l'Ontario, le sénateur Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Sont également présents le sénateur Harb, de l'Ontario, le sénateur Moore, de la Nouvelle-Écosse et le sénateur Massicotte, du Québec.

Nous poursuivons notre étude du financement de la croissance des petites et moyennes entreprises, les PME. Vous vous rappellerez que, au cours de séances précédentes, on a mis en lumière la capacité de tisser et d'exploiter des réseaux d'affaires et personnels comme moyen important d'obtenir des fonds pour les PME.

Par exemple, un témoin que nous avons accueilli récemment, M. Jenkins, président-directeur et stratège en chef d'Open Text, et également président d'un groupe fédéral d'experts chargé d'étudier l'innovation, a attribué sa réussite en affaires au fait qu'il a dû frapper aux portes et tisser des réseaux à la recherche de fonds et d'autres formes de soutien. Si j'en crois mon journal de ce matin, plusieurs études ont conclu que les femmes ont tendance à posséder de meilleures compétences en réseautage que celles des hommes, surtout lorsque nous avançons en âge. Il s'agit bien sûr des hommes et non de nos témoins.

Cela dit, et au vu de bien d'autres raisons, c'est un sujet digne d'examen que celui de savoir comment les femmes entrepreneures assurent la promotion et l'investissement pour relever les défis de la productivité au Canada. Je tiens à remercier la vice-présidente du comité de son travail à cet égard et à l'en féliciter.

Se joignent à nous aujourd'hui, pour discuter des femmes et de leur apport à la compétitivité du Canada, Barbara Orser, professeure Deloitte en gestion des entreprises de croissance à l'école de gestion Telfer de l'Université d'Ottawa, Stephanie MacKendrick, présidente de l'Association canadienne des femmes en communications, et Lynda Partner, directrice de Canadian Women in Technology.

Barbara Orser, professeure Deloitte en gestion des entreprises de croissance, École de gestion Telfe, Université d'Ottawa : Bonjour. Je remercie le comité de l'occasion qu'il me donne de parler de l'entrepreneuriat féminin dans le contexte des interventions, des innovations et de la prospérité économique sous l'angle de la petite entreprise. Nous espérons que notre exposé stimulera les discussions sur la façon dont les interventions financées par les autorités fédérales auprès des petites entreprises, notamment en technologie, innovation et capital, peut répondre davantage aux besoins de tous les propriétaires d'entreprise orientés vers la croissance.

Cette discussion est importante, étant donné que 47 p. 100 des 1,6 million d'entreprises au Canada appartiennent en partie à des femmes. Et les femmes sont les propriétaires majoritaires de 16 p. 100 des entreprises canadiennes. Le groupe de travail estime que les femmes propriétaires d'entreprise apportent 117 milliards de dollars à l'économie canadienne. Pourtant, la majorité des entreprises appartenant à des femmes sont moitié moins grosses que celles qui appartiennent à des hommes.

Dans mon exposé, j'insisterai sur des recommandations extraites du rapport du groupe de travail, en novembre 2010, et des recherches canadiennes apparentées. Je mettrai l'accent sur quatre points. D'abord, la croissance des entreprises de femmes peut constituer une stimulation majeure pour l'économie canadienne, mais elles ont besoin d'un soutien plus solide.

Deuxièmement, les initiatives financées par des fonds fédéraux pour les petites entreprises, notamment celles qui portent sur le capital de croissance, ne tiennent pas compte, dans les besoins des clients, des différences entre les hommes et les femmes.

Troisièmement, le Canada tire de l'arrière par rapport à d'autres pays industrialisés, en ce qui concerne les interventions de politique visant à mieux soutenir la croissance des entreprises appartenant à des femmes.

Enfin, il faut une stratégie nationale de l'entrepreneuriat féminin pour tirer profit de la croissance des entreprises appartenant à des femmes.

Qu'est-ce que le Groupe de travail pour la croissance des entreprises appartenant à des femmes? Il a vu le jour par suite de discussions libres entre des dirigeantes. Toutes, elles se préoccupaient de l'écart de rendement entre les entreprises dirigées par des hommes et celles qui sont dirigées par des femmes. Il a été fondé en 2009, et il constitue maintenant un groupe non partisan composé de femmes entrepreneures en vue, d'organismes de formation pour les petites entreprises, d'universitaires et d'associations sectorielles comme Canadian Women in Technology et l'Association canadienne des femmes en communications.

Notre but est de soutenir les objectifs de croissance des femmes entrepreneures au Canada. Le travail est financé uniquement par des contributions en nature et beaucoup de bénévolat. Le groupe de travail a produit deux rapports : Plan directeur pour la croissance économique et Stratégies visant à appuyer le développement des entreprises appartenant à des femmes.

Le dernier rapport dit qu'une augmentation de 20 p. 100 des revenus de la majorité des entreprises appartenant à des femmes apporterait 2 milliards de dollars de plus par année à l'économie canadienne. Et il s'agit d'une estimation prudente.

Comment pouvons-nous faciliter la croissance des entreprises appartenant à des femmes? Pour répondre à la question, nous avons recueilli le point de vue de plus de 200 éminentes Canadiennes propriétaires d'entreprise un peu partout au Canada. Nous avons invité les participantes de la table ronde à discuter des difficultés qu'elles ont à affronter et des stratégies mises en œuvre pour le faire. Nous avons rassemblé les conclusions de la table ronde avec les résultats des recherches universitaires et les données de Statistique Canada.

Nous avons appris qu'il y avait disjonction entre la croissance des tensions et le rendement des entreprises appartenant à des femmes. Par exemple, Industrie Canada signale que la majorité des entreprises des femmes sont tout aussi portées que celles des hommes à rechercher la croissance. Les femmes veulent faire croître leurs entreprises. L'écart est réel. Les études Telfer sur les différences entre les sexes dans le comportement des petites entreprises ont permis de constater que, même si les chercheurs prennent en compte les influences les plus souvent associées à la croissance, comme l'âge de l'entreprise, le secteur, l'investissement en R.-D. et les intentions de croissance du propriétaire, la majorité des entreprises appartenant à des femmes sont moins susceptibles d'afficher une croissance de leurs revenus, de leurs bénéfices, du nombre d'emplois et de la masse salariale. Les disparités persistent. Les femmes partent en affaires avec moins d'expérience de la gestion, moins de capital et moins d'autres ressources associées à la croissance. Nous savons que les femmes sont moins portées à adopter ou à utiliser la technologie dans leurs entreprises, ce qui entrave la croissance et la progression de la productivité.

Il existe un grand décalage entre l'impression qu'on peut avoir des possibilités d'accès aux capitaux pour les femmes et la réalité des faits. Tournons-nous encore vers les recherches : globalement, les femmes sont plus susceptibles de se faire refuser des prêts à court terme. Toutefois, les études Telfer menées avec la coopération d'Industrie Canada donnent constamment à penser que les taux d'approbation et les conditions des prêts à court et à long termes tiennent au fait que les entreprises appartenant à des femmes sont en moyenne plus jeunes et concentrées dans certains secteurs.

De plus, les femmes propriétaires d'entreprise sont aussi portées que les hommes à chercher à se financer par emprunt. Par contre, elles sont beaucoup moins portées à se financer par du capital de risque. Des études ont fait état du fait que les entreprises dont des femmes sont les propriétaires majoritaires sont moins portées à faire appel au capital de risque, même si on tient compte des différences systémiques déjà signalées.

Nous ne comprenons pas tout à fait pourquoi les femmes sont moins portées que les hommes à faire appel au capital de risque, mais ces observations revêtent une importance évidente en raison des fonds nécessaires à un stade précoce pour soutenir la croissance de l'entreprise. Nous avons appris que tous les ordres de gouvernement se sont dotés de politiques et de programmes pour stimuler l'innovation. Dans la vaste majorité de ces interventions, on présume, sans s'appuyer sur aucune preuve, qu'elles sont aussi efficaces pour les femmes que pour les hommes. On suppose implicitement qu'il n'y a aucune problématique homme-femme. Des hypothèses semblables transparaissent dans des initiatives de grande envergure comme la Coalition pour l'action en matière d'innovation au Canada et le rapport paru cette semaine du Groupe d'étude sur la compétitivité, la productivité et les progrès économiques. Les rapports ne disent rien de la contribution originale que peut faire l'entrepreneuriat à la création d'emplois de grande qualité, à l'amélioration de la productivité et au renforcement de la productivité en innovations de haute qualité.

Néanmoins, les recherches nous rappellent l'association complexe qui existe entre sexe, innovation et entrepreneuriat. Par exemple, nous savons que les femmes gestionnaires au service d'entreprises de technologie sont nettement moins portées à lancer une entreprise. Elles tendent moins à commercialiser les innovations. Nous savons que, en moyenne, les femmes apportent moins d'expérience technique au démarrage d'une entreprise. C'est important, car l'expérience technique est liée à la croissance de l'entreprise.

Des études Telfer entreprises avec la coopération de Canadian Women in Technology ont montré également que les femmes entrepreneures qui travaillent dans les secteurs de la technologie de pointe citent des obstacles personnels et sectoriels au développement de l'entreprise.

Il subsiste des lacunes dans les données, l'information publique sur la participation des clients et les impacts de tous les programmes de technologie et d'innovation pour les petites entreprises. Nous devons penser aux femmes entrepreneures lorsque nous réfléchissons à la productivité et à l'innovation.

Négliger de le faire aujourd'hui, c'est diluer l'impact que les dépenses fédérales peuvent avoir. Quels sont les exemples de pratiques exemplaires?

Le groupe de travail a remarqué que, dans certaines régions, comme l'Ouest et le Canada atlantique, les propriétaires d'entreprise ont accès à des services axés sur les femmes financés par les autorités fédérales pour les petites entreprises. Ces programmes aident les femmes à lancer leur entreprise et à lui donner de l'expansion. Des études répétées sur l'efficacité de ces programmes ont toutes été favorables. L'impact de la formation, associée au programme de prêts, est particulièrement impressionnant. Par exemple, l'Initiative pour les femmes entrepreneures, financée par Diversification de l'économie de l'Ouest Canada, est proposée dans les quatre provinces de l'Ouest. Les organismes proposent des prêts d'un maximum d'environ 100 000 $ à des entreprises nouvelles ou existantes. Elles offrent des conseils sur les affaires, des consultations sur place, de la formation et du perfectionnement.

Des évaluations indépendantes établissent que 75 p. 100 de la clientèle est toujours en affaires au bout de cinq ans. À titre de comparaison, le taux moyen de survie des petites entreprises au bout de cinq ans s'élève à 38 p. 100. Les clientes du Centre de services pour les femmes entrepreneures créent un emploi pour environ 5 200 $. Le chiffre comparable pour le Programme de financement des petites entreprises du Canada se situe entre 5 600 $ et 8 000 $. Ressources humaines et Développement des compétences Canada présente des comparaisons sur le coût de chaque emploi pour des programmes publics semblables. Les faits donnent à penser que l'Initiative pour les femmes entrepreneures est un moyen rentable de créer des emplois. Ce programme a été encensé parce qu'il est axé sur la clientèle et qu'il développe de solides compétences en gestion grâce à un personnel motivé et efficace. Toutefois, aucun service de cette nature n'existe dans les deux régions les plus peuplées, l'Ontario et le Québec.

Toutes ces observations aident à expliquer pourquoi les femmes propriétaires d'entreprise qui ont participé au groupe de travail cherchent à améliorer leurs connaissances en finances, à employer des technologies pour faire progresser leur rendement opérationnel, à développer le commerce avec l'étranger et à exploiter, dans les secteurs privé et public, les occasions de conclure des marchés proposés aux minorités. Les Canadiennes propriétaires d'entreprise ne peuvent pas encore compter sur des programmes fédéraux d'approvisionnement favorables aux femmes comme elles peuvent le faire et le font aux États-Unis.

Enfin, je voudrais attirer l'attention sur une dernière recommandation du rapport du groupe de travail. Les femmes entrepreneures réclament une stratégie nationale qui appuierait la croissance des entreprises appartenant à des femmes. Cela comprendrait des fonds plus généreux pour les programmes existants axés sur les femmes, comme l'augmentation des portefeuilles de prêts pour tous les centres d'entreprises des femmes financés par le gouvernement fédéral et l'implantation des programmes dans les régions qui n'en sont pas encore dotées. Pareille stratégie exige l'engagement de la direction d'au moins quatre ministères ou départements clés, dont Industrie Canada, Affaires étrangères et Commerce international Canada, Ressources humaines et Développement des compétences Canada et Condition féminine.

Pour apporter ces changements, les participantes de la table ronde du groupe de travail ont fait écho à des rapports antérieurs qui ont réclamé la mise en place d'un bureau de l'entreprise féminine. L'action du bureau s'étendrait à toute l'administration fédérale et viserait à coordonner les programmes et politiques et à mettre en commun les connaissances sur l'entrepreneuriat féminin.

Beaucoup de pays prennent des mesures pour tirer profit de ce secteur sous-développé. En septembre, six membres du groupe du travail, y compris moi, se sont joints à la ministre Ambrose à un sommet économique des femmes de l'APEC. Cette réunion a servi à lancer le partenariat en politique sur les femmes dans l'économie dans les économies de l'APEC. Le Canada possède une expertise considérable dont il peut faire profiter ses partenaires commerciaux du Pacifique. Paradoxalement, la même expérience n'est pas encore à la disposition des femmes de tout le Canada.

Nous espérons que le travail du groupe de travail sera une source de motivation pour tous les ordres de gouvernement, afin qu'ils examinent l'utilisation et les impacts des interventions des petites entreprises et envisagent l'expansion de politiques et programmes à haut rendement axés sur les femmes pour aider les femmes entrepreneures.

Stephanie MacKendrick, présidente, Association canadienne des femmes en communications : Bonjour.

[Français]

J'aimerais tout d'abord remercier le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce de nous avoir invitées ce matin. C'est vraiment un plaisir d'avoir l'occasion de parler d'un sujet très important.

En tant que présidente de l'Association canadienne des femmes en communications, je vais vous faire part de nos observations et de notre apprentissage sur les femmes concernant l'un des secteurs ayant un énorme potentiel en innovation pour notre économie, le secteur des télécommunications, des médias et de la technologie. Mon rôle consistera à donner un aperçu de l'expérience de l'AFC pertinente à la discussion d'aujourd'hui.

[Traduction]

Il y a deux points que je voudrais aborder aujourd'hui. Le premier est celui des meilleurs moyens de tirer parti de la contribution des Canadiennes à l'économie, surtout en ce qui concerne le secteur des télécommunications, des médias et de la technologie. Deuxièmement, je voudrais vous faire part de l'expérience de l'AFC en ce qui concerne les programmes qui tiennent compte de la différence entre hommes et femmes et visent à promouvoir la carrière des femmes et à développer leur leadership Nous croyons que les mêmes facteurs sont pertinents dans le travail que nous faisons dans le monde des affaires et de plus en plus auprès des entrepreneurs, et cet acquis est tout à fait transférable.

L'AFC est l'une des associations les plus fermement établies dans le monde des affaires chez les femmes. Elle compte plus d'un millier de membres répartis en diverses sections au Canada. Elle aide depuis 20 ans des femmes à faire progresser leur carrière grâce au perfectionnement, au réseautage, à des prix et à la reconnaissance de leurs réussites. J'ai été présidente de l'association pendant 15 années sur 20. Il m'a donc été donné de voir beaucoup de choses. Des sociétés commerciales et les cotisations des membres subviennent aux besoins de l'association, et nous avons reçu cette année nos premiers fonds de l'État afin de créer un programme de formation sectoriel qui aidera à développer les compétences en direction dans l'économie du numérique.

En 1991, lorsque nous avons débuté sous le nom d'Association canadienne des femmes en radiotélévision, il y avait divers enjeux dans différents secteurs. Lorsque j'ai débuté, en 1996, il y avait exactement une directrice générale dans l'industrie de la radio, dans la radio privée. Aujourd'hui, des dizaines de femmes sont directrices générales, et il y a dans les médias des femmes qui occupent des postes de direction. La situation qui existait il y a 20 ans en radio et télévision est celle qui se présente à nous aujourd'hui dans les secteurs des télécommunications et de la technologie. Le taux de participation et de persévérance des femmes est faible, et peu de femmes occupent des postes de dirigeantes.

Ma collègue, Lynda Partner, abordera des points précis dans son exposé. Il y a là un grand défi, et c'est aussi une occasion perdue. Nous percevons la promotion des femmes comme une question économique. Ce sont les affaires qui comptent et pas tellement une question de justice sociale, bien que celle-ci soit une retombée intéressante.

L'étude The Bottom Line de Catalyst et un bagage de plus en plus important de faits confirment qu'il est rentable que les représentants des deux sexes soient présents aux postes de dirigeants et dans les affaires. Nous croyons que, étant donné la guerre qui devrait se livrer dans les prochaines années pour trouver des talents, la nécessité d'accroître la productivité du Canada et l'importance de la capacité concurrentielle du Canada, les femmes constituent une très importante ressource économique inexploitée, et pour exploiter à fond ce potentiel, nous devons trouver des moyens d'appuyer la progression des femmes dans la sphère des sociétés commerciales. De plus en plus, pour les membres de l'AFC, dans toutes les disciplines, cela veut dire aussi un meilleur soutien pour la réussite et la croissance des entreprises.

Nous avons eu la possibilité d'observer un grand nombre des facteurs qui freinent les femmes, et nous avons défini des idées claires sur les moyens de maximiser la contribution des femmes au monde des affaires. Ce que nous faisons ne diffère guère des bonnes pratiques commerciales normales. Quand on gère des gens, on en obtient le maximum en les comprenant et en tablant sur leurs forces. Voilà dans quel contexte nous envisageons la situation.

Les femmes n'abordent pas leurs carrières et leurs entreprises de la même façon que les hommes et elles doivent surmonter des difficultés différentes. Le magazine Forbes d'octobre 2010 publie un excellent article sur les 10 règles tacites qui s'imposent aux femmes. Je ne vais pas les énumérer toutes, mais j'en signalerai deux qui s'appliquent à la discussion d'aujourd'hui.

En tête de liste, signalons une double échelle de valeurs en ce qui concerne le comportement en affaires. Les hommes ont plus de chances d'être perçus comme des gens entreprenants qui savent s'affirmer lorsqu'ils réussissent et exigent des résultats, alors que des femmes qui adoptent un comportement identique risquent davantage d'être vues comme des êtres agressifs et difficiles, par exemple. La littérature sur ce point ne manque pas.

Si je parle de cela aujourd'hui, c'est parce qu'il existe un lien avec l'approche différente que les femmes adoptent en affaires. Comme les femmes observent ces réactions et ont l'impression d'être limitées à une gamme très étroite de comportements, si elles veulent être prises au sérieux, mais sans brûler les ponts ni rebuter les gens, elles deviennent parfois plus prudentes dans ce qu'elles disent et la façon dont elles le disent. Cela est lié et contribue à un deuxième problème, la confiance en soi en affaires. Que ce soit un fait de nature ou de culture importe peu. Les femmes voient leurs propres réalisations et leurs compétences avec plus de méfiance que les hommes. Une étude interne dans les entreprises a montré que les femmes ne postulent un poste vacant que lorsqu'elles répondent à la totalité des critères alors que les hommes le font s'ils n'en respectent que 60 p. 100. À dire vrai, je crois que les hommes ont raison. Voilà qui est révélateur du genre de problème que nous devons affronter.

Il est essentiel de comprendre ce qui se passe si on veut éviter de créer des programmes en présumant que, si les femmes ne postulent pas un poste ou ne participent pas à un programme, c'est parce qu'elles ne sont pas intéressées ou se soucient trop de l'équilibre à ménager avec leur vie de famille. Les femmes veulent progresser et réussir, mais elles sont moins directes dans l'expression de leurs ambitions ou de leurs réalisations.

Cela me rappelle l'époque où, en médecine, on a découvert avec horreur que les hommes et les femmes n'ont pas les mêmes genres de crise cardiaque, ce qui a aidé les médecins à concevoir de nouveaux traitements pour les femmes. C'est un peu le même genre de dynamique qu'on observe maintenant dans le monde des affaires.

Ce ne sont là que 2 des observations parmi les 10 qui sont énumérées dans l'article de Forbes, mais ce sont les deux qui sont les plus marquantes.

Permettez-moi d'illustrer ce comportement dans notre façon de faire les choses. Nous offrons un programme de formation en six jours pour les cadres, qui s'intitule Career Accelerator for Digital Convergence. Ce programme soumet 20 femmes à un camp d'entraînement intensif qui les aide à comprendre l'industrie et les compétences nécessaires, à appliquer à leur carrière ce qu'elles apprennent et à faire fructifier ces nouvelles connaissances dans leur entreprise.

Fait à signaler, ce cours est offert avec une bourse complète. Il suffit de trouver une semaine de congé. Pourtant, il faut que je fasse des efforts pour persuader les femmes de proposer leur candidature.

À des femmes qui me semblent de parfaites candidates, je dis souvent qu'elles doivent faire une demande, mais elles me répondent qu'elles ne savent pas trop si elles pourraient. Pour en revenir aux 10 critères, elles diront qu'il leur manque le dixième.

Nous devons travailler fort, mais cela rapporte, car les femmes qui suivent cette formation nous disent : « Je ne peux pas croire que j'ai failli ne pas faire la demande. Le cours a changé toute ma façon d'aborder mon travail, de concevoir les compétences, ma façon d'appliquer ce nouveau savoir et de considérer mes aspirations de carrière; et, soit dit en passant, je m'y mets tout de suite, et pas un beau jour. » L'impact du cours est énorme.

Un autre exemple que je voudrais donner fait ressortir la façon dont les programmes ciblés peuvent vraiment avoir des résultats. Nous avons passé 12 ans à suivre l'évolution de la représentation féminine dans les conseils d'administration de l'industrie. Nous avons suivi 52 sociétés. Au départ, en 1999, 20 p. 100 d'entre eux ne comptaient aucune femme.

Sur 12 ans, nous avons fait des mesures et aidé à proposer des façons de trouver des candidates, et une chose intéressante s'est produite. Au bout de 10 ans, nous avons fait une comparaison avec le FP500 et constaté que notre groupe d'observation avait une représentation féminine aux conseils d'administration de 55 p. 100 supérieure à celle qui était observée dans le FP500; et le taux de changement dans notre groupe était deux fois plus élevé que celui du FP500. Ce n'était pas 10 p. 100 par année, mais seulement 1,14 p. 100, comparé à 0,45 p. 100. C'est tout de même le double.

Notre organisation a plus d'expérience du côté des grandes sociétés, mais nous estimons que les mêmes principes s'appliquent aux femmes entrepreneures. Les recherches de Mme Orser confirment assurément cette opinion.

Une cohorte grandissante de nos membres deviennent des entrepreneurs par choix ou par nécessité. Nous estimons avoir un rôle essentiel à jouer pour les aider à prendre leurs connaissances et leur expertise collectives et à comprendre qu'elles sont transférables non seulement d'un secteur à l'autre, mais aussi dans l'entrepreneuriat, de sorte que nous ne perdions pas cette compréhension, car il s'agit là d'une source de connaissance vraiment importante.

Nous avons une initiative majeure de formation en cours et à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure. Grâce à la politique d'intérêt public, grâce à Condition féminine Canada et à ses projets-modèles, nous pouvons bâtir un programme solide qui permettra de réaliser des recherches afin de déceler les lacunes, de cerner les compétences nécessaires ainsi que les compétences propres à renforcer la confiance. Nous pourrons aider les femmes à appliquer ces connaissances dans divers domaines.

Enfin, j'ai reçu à mon bureau une femme qui veut créer une plate-forme pour offrir un contenu soigné et sérieux pour les femmes en affaires. Elle a de grands plans. Elle veut faire quelque chose de grande envergure, pas quelque chose d'artisanal. Elle explique donc qu'elle a un plan et que cela correspond aux recherches que j'ai faites; pouvez-vous m'aider à trouver du capital? Quelle est la prochaine étape? Je ne sais pas trop par où commencer.

Je me suis dit que, si elle était dans l'Ouest du Canada, je pourrais l'envoyer à tel endroit et que, si elle était dans le Canada atlantique, je pourrais l'envoyer à tel autre endroit. Mais il faudra que je la contacte de nouveau. Malgré toutes mes années d'expérience, je dois étudier la question et essayer de trouver le meilleur parcours pour elle. Elle a toutes les qualités voulues, et j'estime que son cas est un bel exemple. Si nous pouvons aider des femmes comme elle, ce sera excellent pour notre économie et pour notre compétitivité.

Pour ce qui est du soutien, notre expérience de 20 ans dit qu'une solution unique ne convient pas à tous. Je crois que le plan directeur du groupe de travail propose des recommandations pratiques qui ont été élaborées par une bande de femmes qui n'avaient pas de fonds, mais qui estimaient qu'il fallait faire quelque chose. Nous espérons que notre expertise vous aidera à formuler les recommandations que vous souhaiterez peut-être présenter en matière de politique d'intérêt public.

Le président : Merci beaucoup.

Soit dit en passant, nous avons le texte de l'exposé de Mme Orser et de celui de Mme Partner, mais nous n'avons pas le vôtre.

Mme MacKendrick : Mon exemplaire est plein de notes. Je vais le mettre au propre et le faire parvenir au greffier.

Le président : Ce serait utile.

Dans mes observations du début, j'ai fait une allusion déplacée à l'âge, mais je ne peux pas me porter garant de la mémoire de certains de mes collègues, surtout masculins. Il serait donc utile d'avoir un texte.

Lynda Partner, directrice, Canadian Women in Technology : Je comparais à deux titres. D'abord, comme PDG de quatre sociétés de haute technologie. J'incarne la petite entreprise type dirigée par une femme. Je suis également administratrice chez CanWIT, tribune nationale pour les Canadiennes dans le secteur de la technologie. J'essaie donc de représenter les femmes plus généralement dans le domaine de la technologie.

J'ai travaillé exclusivement dans l'industrie de la technologie pendant 28 ans. J'ai été dans les télécommunications, le logiciel, les communications sans fil et Internet. J'ai été présidente ou PDG de quatre entreprises, dont deux on été fondées par moi. Toutes ont été des entreprises vouées à la croissance; deux ont reçu l'appui de sociétés de capital de risque et une était une société ouverte.

Depuis cinq ans, je participe également aux activités de CanWIT, qui est une organisation sans but lucratif qui reconnaît que les femmes du domaine de la technologie ont besoin d'outils spécialisés et de soutien pour mieux réussir dans leur domaine. L'organisation propose du mentorat, du réseautage, du perfectionnement et la défense d'intérêts.

Pour ma part, j'ai été animée par la volonté de voir plus de jeunes femmes s'engager dans la filière des sciences, de la technologie, du génie et des mathématiques. Je voudrais qu'il y ait plus de femmes qui dirigent des entreprises. Lorsque j'occupais ce genre de poste, je me sentais un peu seule.

Pour faciliter la réalisation de ces objectifs, je dirige en ce moment une communauté électronique pour les jeunes femmes afin de les encourager à faire carrière en technologie. Et je fais actuellement partie du conseil consultatif de l'école de gestion Telfer, à l'Université d'Ottawa, où j'ai l'occasion de discuter avec les étudiants des difficultés et des gratifications liées au démarrage et à l'exploitation d'une entreprise dans le domaine de la technologie.

Je voudrais ajouter aux observations des autres témoins et glisser mon propre point de vue personnel, qui est appuyé par mes conversations avec des centaines de femmes dans le secteur de la technologie. Mon point de vue tient compte également des résultats d'une étude nationale menée auprès des membres de CanWIT, qui ont été consultées au sujet des problèmes qui les empêchent de lancer ou de faire progresser leurs propres entreprises.

Je veux aborder la question sous l'angle des affaires. Dans le monde des affaires, les meilleures entreprises comprennent que traiter tous leurs clients de la même manière n'est pas l'idéal. Il faut du temps et du talent pour comprendre les différents segments de son marché et adapter ses produits — qu'il s'agisse de programmes, de produits ou de services — aux besoins propres aux différents segments. Quand on y arrive, quand on peut adapter son message ou son produit aux besoins des différents groupes, on accélère la réussite globale, car chaque segment progresse plus rapidement que l'ensemble.

Les programmes qui visent à renforcer les petites entreprises au Canada, à les rendre plus compétitives et à les faire croître davantage ne sont pas différents. Comme la vaste majorité des entreprises sont dirigées par des hommes, si on n'adopte pas une approche déterminée de la segmentation, il est inévitable que le soutien, l'infrastructure et les programmes conçus pour les petites entreprises correspondront aux attributs de la majorité, dans ce cas les entreprises dirigées par des hommes. Si notre objectif est de faire progresser l'innovation pour améliorer la productivité des petites entreprises, il est logique de concevoir le marché comme une série de segments et d'élaborer des programmes qui ciblent ces segments au lieu d'appliquer une grande stratégie générale.

Je demande ensuite : quels sont les attributs d'une entreprise dirigée par une femme et qui la distinguent des entreprises dirigées par des hommes? Pour ma part, les généralisations me mettent mal à l'aise. J'ai retenu trois thèmes qui reviennent chez les femmes entrepreneurs. Mon intention est de montrer que les entreprises dirigées par des femmes peuvent constituer un segment assez différent pour tirer parti de programmes adaptés de façon à répondre à leurs besoins propres.

Le premier thème : l'inconfort face à la technologie. Les femmes PDG disent et répètent qu'elles ne sont pas aussi à l'aise avec la technologie que leurs collègues masculins. Cela peut dépendre de plusieurs causes.

L'une des causes les plus évidentes est le plus faible pourcentage de femmes qui, au niveau postsecondaire, s'engagent dans la filière des sciences, de la technologie, du génie ou des mathématiques. Ce sont des chiffres connus. On finit par avoir moins de femmes qui s'orientent vers la technologie; et celles qui le font optent plutôt pour les emplois non techniques, les rôles plutôt administratifs. À une époque où l'utilisation efficace et la compréhension de la technologie est un facteur clé du succès en affaires, lorsque les femmes deviennent PDG, elles accusent déjà du retard.

Je parle et j'écris au sujet de bien des éléments liés à la réussite des petites entreprises, mais mes exposés et mes interventions dans mon blogue sur la façon d'exploiter la technologie, non pour la technologie en soi, mais pour faire croître l'entreprise, sont toujours les plus populaires auprès des femmes. Les femmes reconnaissent qu'il leur faut faire du rattrapage dans le domaine de la technologie, et elles veulent avoir des ressources pour les y aider. Je ne vois pas cela dans la même mesure chez les hommes.

Deuxième thème : il y a moins d'occasions pour les femmes de développer le réseau de relations. Quelqu'un a dit tout à l'heure que, en affaires, les relations sont essentielles à la réussite. Rien ne permet de dire qu'il ne peut pas exister des relations solides en affaires entre hommes et femmes, mais les relations entre personnes du même sexe sont dans bien des cas plus faciles à établir et à conserver.

Il existe un lien commun inconscient qui donne aux relations entre personnes de même sexe un avantage au départ. Dans un milieu où les représentants d'un des deux sexes sont majoritaires, les relations entre eux se formeront toujours plus rapidement et, parfois, finiront par se limiter aux représentants de ce sexe. C'est ce qu'on observe, que la majorité soit masculine ou féminine. Il n'y a pas que les femmes. Les femmes PDG disent souvent que, comme il y a plus d'hommes, elles ont du mal à se faire accepter comme faisant partie du groupe et à se joindre au réseau informel mais essentiel qui se crée autour de la fontaine, au pub local ou même dans la salle de toilette des hommes. Elles ressentent aussi fortement l'absence de mentors du même sexe et elles reconnaissent que leur capacité de faire appel au réseau de leurs pairs est souvent plus faible que celle de leurs collègues masculins. Cela constitue un désavantage.

Troisième thème : la façon particulière qu'ont les femmes d'aborder la croissance de leur entreprise peut avoir des conséquences pour leur capacité d'obtenir du financement. Les femmes n'abordent pas la croissance et la stratégie de leur entreprise comme le font les hommes. Je suis persuadée qu'il existe de nombreuses études qui le confirment par des données concrètes. Mme Orser a dit que ses études permettaient de conclure que les femmes font appel au capital de risque moins fréquemment que les hommes. Je suis tout à fait d'accord. Si vous avez jamais essayé de convaincre un investisseur en capital de risque de vous financer, vous vous demandez peut-être pourquoi il en est ainsi, alors que le capital de risque est l'une des voies les plus rapides vers la réussite. Je me suis adressée plus d'une quarantaine de fois à ces investisseurs de capital de risque pour faire financer mes entreprises, et j'ai appris rapidement que leurs rencontres ont un rythme et un style qui se répète. Elles se caractérisent par la confrontation et des questions et réponses rapides. Ces investisseurs réagissent mieux aux plans d'entreprise et stratégies durs et agressifs qui donnent des résultats rapides sans égard aux coûts pour le capital humain. Les femmes sont plus portées à proposer une stratégie de croissance qui repose sur un solide fondement, celui d'employés productifs, engagés et bien soutenus, où l'équilibre des équipes et l'innovation sont des thèmes fréquents.

J'ai appris à changer ma présentation. J'ai appris très rapidement que ces investisseurs habitués à l'approche très différente de la vaste majorité des PDG ne répondent pas aux approches qui s'écartent de la norme. Je me rappelle distinctement que, sur les 40 investisseurs de capital de risque que j'ai rencontré, seulement trois comptaient des femmes dans leur équipe de prise de décisions. J'ai fini par faire affaire avec quatre de ces investisseurs pendant ma carrière, et deux d'entre eux avaient des femmes qui faisaient partie de l'organe de décision. Bref, 50 p. 100 de mes investisseurs avaient des femmes qui les représentaient à mon conseil, mais il n'y en avait que trois au total. Je ne crois pas que c'était une coïncidence. Cela n'est pas sans lien avec ce que j'ai dit des relations.

Au bout du compte, je crois qu'il peut être prouvé que les entreprises dirigées par des femmes ont des caractéristiques distinctes, mais c'est une bonne chose. Les différences ouvrent la possibilité de créer des programmes et des politiques d'intérêt public qui reconnaissent ces différences et adaptent les programmes à un segment particulier. Les programmes qui tiennent compte de ces différences rapportent de deux façons : la croissance économique dont nous avons parlé et une plus grande innovation grâce à la diversité. Il ne faut pas négliger le deuxième point. Pour stimuler l'innovation, une façon de penser différente, des points de vue différents, des perspectives différentes sont essentiels. Si nous avions plus d'entreprises où les équipes sont mieux équilibrées par la représentation de la diversité, il y aurait plus d'innovation.

Ce ne sont pas des observations systématiques, mais j'ai vu ce genre de chose se produire tant et plus. L'une de mes entreprises a été l'une des premières au monde à offrir comme service des logiciels d'infonuagique. L'idée de faire appel à l'infonuagique est venue lorsque les femmes de mon équipe ont dit qu'elles n'utiliseraient jamais le logiciel elles- mêmes parce qu'elles détestaient l'idée d'ajouter d'autres logiciels à leur ordinateur et de devoir ensuite résoudre les difficultés. Elles étaient intimidées et l'obstacle était tel qu'elles refusaient même d'essayer. Nous avons confirmé que cette inquiétude était partagée par une partie importante des femmes qui pourraient utiliser le logiciel, alors que les hommes rejoints par le sondage ne percevaient aucun problème. Dans une entreprise où le succès repose sur le modèle qui consiste à essayer avant d'acheter, une partie importante du marché auquel nous pouvions nous adresser aurait été éliminée, et il est probable que nous aurions échoué. Une solution originale a été de faire tourner le logiciel dans l'infonuagique en utilisant un fureteur et en le rendant absolument facile à utiliser. À ce moment-là, c'était vraiment révolutionnaire. Cette innovation ne serait jamais venue si l'équipe qui a eu l'idée et a développé le produit n'avait pas eu une solide représentation des deux sexes.

Mes exemples tiennent de l'anecdote, je l'admets. Comme femme d'affaires, j'insisterais pour en savoir plus, de façon à cerner plus clairement les différences qui me permettraient d'obtenir le meilleur rendement sur un programme personnalisé. Il nous faut effectivement faire plus de recherches pour quantifier les impacts à une échelle plus importante, mais je sais que la commercialisation auprès de segments de son audience marche bien et que la diversité donne de meilleures équipes et plus d'innovation. Il est important à bien des égards de reconnaître les besoins des différents segments du marché, mais pour moi, femme d'affaires, c'est une question d'ordre économique. Cela a tout bonnement du sens en affaires.

Des organisations comme CanWIT essaient d'aider en adaptant des programmes expressément pour les femmes en technologie. Elles ont un service électronique de mentorat, d'information et de réseautage, mais une organisation bénévole ne peut répondre à tous les besoins; la demande surpasse l'offre. Nous croyons que le gouvernement a une réelle occasion d'élaborer une politique et des programmes efficaces, parallèlement à des groupes comme CanWIT et l'APC, pour renforcer ce segment du marché, produire un meilleur rendement économique et assurer la diversité qui favorisera et encouragera l'innovation.

Le président : Avant de passer à la liste des sénateurs qui veulent poser des questions, je réitère mes remerciements à chacune d'entre vous. Ce que vous nous avez dit est très utile.

Madame Orser, vous avez dit que vos quatre points venaient, si j'ai bien compris, d'une étude du groupe de travail publiée en novembre 2011.

Mme Orser : Elle a été publiée la semaine dernière à Toronto. Le mémoire comprend également, dans les notes de la fin, une série de renvois à des travaux universitaires.

Le président : Pourrions-nous avoir un exemplaire de ce rapport du groupe de travail?

Mme Orser : Il se trouve dans votre dossier, en anglais et en français.

Le président : Je voulais m'assurer que nous l'avions. Merci beaucoup.

Vous avez utilisé deux acronymes, madame Partner. Merci d'en avoir donné le sens. C'est utile. TMT correspond à technologie, médias et télécommunications, au cas où certains collègues ne le sauraient pas.

Le sénateur Massicotte : Merci d'être parmi nous aujourd'hui. Si vous n'y voyez pas d'objection, je vais répéter ce que j'ai retenu de vos observations pour m'assurer que nous sommes tous d'accord. On dirait que les femmes sont aussi ambitieuses que les hommes. Considérez la croissance de votre crédit et la demande. J'ai l'impression qu'il n'y a pas là beaucoup de différence. Vous dites qu'il existe une différence importante pour ce qui est du recours au capital de risque. Difficile de comprendre pourquoi, mais on dirait que c'est un fait. Cet élément m'a plu plus particulièrement parce qu'il correspond à mon opinion. Vous dites que ce n'est pas un problème structurel, un problème de préjugés, mais vous remarquez, et c'est la réalité, que les hommes sont différents des femmes et que les hommes ont tendance à se tenir avec des hommes et les femmes avec des femmes. On le voit au golf. Que ce soit bon ou mauvais, nous sommes différents. Ce passage m'a plu. Vous dites : « Non, il n'y a pas de préjugés structurels, rien de mal, au plan structurel, mais seulement l'expression de la nature humaine. » Vous dites cependant que les femmes ne contribuent pas à leur plein potentiel au PIB ou à la croissance économique de notre pays et que c'est donc un problème auquel il faut s'attaquer. Est-ce un bon résumé de ce que vous avez dit? Est-ce que je me trompe?

Mme Orser : Je crois que vous avez bien résumé à l'exception d'un point. Lorsqu'il s'agit de la structure de notre secteur des services financiers, nous constatons que ces différences sont prises en compte selon la taille des entreprises et les secteurs. Ce n'est pas le cas pour le capital de risque. Toutefois, lorsque nous considérons les interventions sur le marché qui visent à stimuler l'innovation et la commercialisation de la technologie, nous ne savons pas si les femmes sont représentées. Les observations anecdotiques donnent à penser que les femmes propriétaires d'entreprise ne participent pas à ces programmes. Cela dépend de l'objet des échanges sur les interventions sur le marché.

Le sénateur Massicotte : Nous avons reçu beaucoup de témoins des milieux du capital de risque. L'objectif et notre discussion portent sur le financement de la croissance des entreprises. Tous les pays au monde essaient de bien faire dans ce secteur parce qu'ils disent que c'est l'enseignement fondamental pour une bonne croissance économique. À peu près tous les pays au monde s'entendent pour dire qu'il faut chercher les jeunes entreprises à fort potentiel de croissance. Les statistiques disent que 87 p. 100 des entreprises ne croissent pas et ne le veulent pas ou bien qu'elles n'ont pas de raison de stimuler la croissance parce qu'elles n'auront pas une influence suffisante sur l'économie. Nous cherchons ces jeunes entreprises à fort potentiel de croissance. Nous cherchons toujours les Google de ce monde qui créent beaucoup d'emplois.

Vous signalez que, pour quelque raison, et peut-être pour beaucoup de bonnes raisons, les femmes ne sont pas portées à se tourner vers les sciences ou le génie. Les universités ont du mal à les intéresser à ces domaines. Il y a peut- être sur le marché un préjugé réel contre les femmes à cet égard. On semble utiliser ce fait pour expliquer pourquoi certains secteurs ne croissent pas beaucoup. Vous vous adressez ici à des parlementaires. Utilisez l'argument voulant que nous puissions créer plus de croissance économique pour notre pays. Que devrions-nous faire? Êtes-vous convaincues que cela ne déplacerait pas la croissance qui se produit dans d'autres secteurs? Nous ne voulons pas aggraver les préjugés ni les susciter. Qu'en pensez-vous?

Mme MacKendrick : L'élément central, c'est que nous voyons une occasion de croissance. Si nous cherchons à frapper un coup de circuit ou à faire un grand chelem avec des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance, il est aussi possible de beaucoup jouer au baseball en frappant des coups sûrs. Nous disons que nous avons des frappeurs sur le banc. Je pousse trop l'analogie, mais il existe un potentiel inutilisé. Le grand point que nous voulons faire ressortir, c'est qu'il y a des moyens d'exploiter ce potentiel. Il y aura des femmes qui se trouveront dans le groupe des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance, mais il y a beaucoup d'entreprises et de femmes entrepreneurs dont les ambitions et les capacités sont plus discrètes.

Le sénateur Massicotte : Que pourrait faire le gouvernement pour éviter que cette croissance n'en déplace une autre?

Mme Orser : Je vais répondre en parlant de la création d'emplois. Lorsque vous comparez le Programme de financement des petites entreprises du Canada, l'une de nos interventions les plus importantes sur le marché, aux repères du Centre de services pour les femmes entrepreneurs, il n'y a aucun déplacement. Il y a une croissance de surcroît. Quant à la recherche des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance, je dois dire sauf votre respect que les gouvernements du monde ont du mal à trouver les gagnants, mais nous avons des faits qui confirment que les petites entreprises créent de l'emploi simplement à cause de leur masse, à cause du nombre d'entreprises appartenant à des femmes.

Le président : Est-ce dans votre exposé qu'on a comparé un organisme gouvernemental à quelque chose qui existe aux États-Unis?

Mme Orser : Il doit s'agir de WEConnect Canada. Pendant des années, les États-Unis ont appuyé des approvisionnements fédéraux ciblés. En ce moment, le secteur privé est le plus dynamique pour les stratégies d'approvisionnement qui font appel à la diversité. L'administration Obama a donné plus d'importance à l'engagement fédéral à l'égard des entreprises appartenant à des femmes. Nous avons des entreprises certifiées comme appartenant à des femmes qui font des affaires avec le gouvernement et des sociétés des États-Unis. Paradoxalement, nous n'avons pas de programme semblable à l'intention des Canadiennes entrepreneurs.

Le président : Je ne veux pas sembler frivole, mais j'ai été frappé d'entendre quelqu'un dire que, si des femmes participent au processus de prise de décisions, par exemple pour une subvention à une PME, la réaction sera plus favorable à une entreprise dirigée par des femmes. L'idée est là. Quelqu'un devrait faire un mémoire universitaire sur Dragons' Den. Une femme faisait partie de ce groupe. Je me demande combien de fois ce fut grâce à son intervention que des entreprises dirigées par des femmes ou comptant une forte présence féminine ont réussi.

Mme Orser : Des données américaines confirment que le fait d'avoir une femme qui fait partie de l'équipe d'un investisseur de capital de risque est associé au fait qu'un plus grand nombre d'entreprises dirigées par des femmes sont financées. Je n'ai vu aucune étude canadienne sur la question.

Mme MacKendrick : Il y a également une corrélation entre la présence de femmes au conseil d'administration et la représentation féminine parmi les dirigeants de l'entreprise. La corrélation entre la présence de femmes dans la prise de décisions et la présence de femmes à d'autres rangs et dans d'autres rôles est générale, il me semble.

Le sénateur Stewart Olsen : Quelques-unes de mes réflexions sur ces questions ont été les mêmes que celles de tout le monde.

Merci de l'explication sur les approvisionnements fédéraux favorables aux femmes. Je ne comprenais pas vraiment de quoi il s'agissait.

Nous souhaitons avoir plus de femmes dans le domaine de la technologie et dans les entreprises technologiques et, évidemment, il y en a moins. Est-ce parce que les femmes s'y intéressent moins? Y a-t-il d'autres obstacles que vous auriez remarqués à la faveur de vos évaluations statistiques?

Mme Partner : Un bon corpus de recherches donne à penser que les femmes ne fonctionnent pas comme les hommes et que la propension à éviter la technologie se manifeste à un âge très précoce. Les petites filles ne recherchent pas toujours la technologie comme une fin en soi. Elles s'en éloignent parce que leurs besoins les portent plutôt à se demander : comment la technologie peut-elle aider à faire du monde un lieu meilleur? Comment la technologie peut-elle m'aider à travailler dans un contexte où je travaille avec des gens?

Jusque récemment, notre système a eu tendance à mettre l'accent sur la technologie pour la technologie, qu'il s'agisse de génie, de TI ou de programmation informatique. Les jeunes filles n'ont pas trouvé là de quoi satisfaire les autres éléments de leurs besoins dans leurs aspirations de carrière. Récemment, les choses ont commencé à bouger parce que la technologie est devenue plus facile à utiliser. Avec la venue des médias sociaux, les filles et les femmes s'intéressent soudain à la technologie comme elles ne l'ont pas fait par le passé. Elle devient un outil plutôt qu'une fin en soi.

Des indications laissent entrevoir l'amorce d'une évolution, mais les préférences se dessinent très tôt, non au début de la vie professionnelle, mais à l'école primaire.

Le sénateur Stewart Olsen : Je dirais que nous devons chercher à susciter l'intérêt à un stade précoce. Ce serait un élément très important de l'éducation. Au moment de recevoir leur diplôme, même à l'école secondaire, les étudiants seraient programmés pour se tourner vers autre chose.

Je viens du Nouveau-Brunswick, et nous travaillons en étroite collaboration avec l'Université Mount Allison. Il y a des femmes dans tous les cours. En réalité, il y a plus d'étudiantes que d'étudiants. Elles sont toutes brillantes et s'engagent dans des parcours différents. J'ai du mal à comprendre. Je rencontre des femmes comme vous. Je rencontre des femmes ici, au comité. Elles sont énergiques, dynamiques, elles ne s'effacent devant personne. J'ai dû mal à toujours entendre ce discours à notre époque, et je trouve intéressant que vous ayez des statistiques récentes qui montrent que nous en sommes toujours là.

Le sénateur Hervieux-Payette : Vous dites que des femmes ont toujours peur de la technologie, mais je crois que tout cela tient à l'aversion au risque. Ce n'est pas que les hommes en savent plus long sur la technologie. C'est qu'ils prennent plus de risques.

Considérez toutes les grosses erreurs que les grandes sociétés ont commises pour le fameux bogue de l'an 2000. Tout devait s'effondrer et tous les cadres supérieurs au Canada ont dépensé des milliards de dollars en informatique et ailleurs. Ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient. Dans ce cas-là, je peux dire que ce n'est pas une question de différence entre hommes et femmes. C'est une question de génération.

Je voudrais également faire ici une distinction. J'ai beaucoup de contacts avec des femmes dans la quarantaine qui sont des battantes, il me semble, et elles sont parfaitement capables d'utiliser n'importe quelle technologie apte à servir leurs réalisations. Toutefois, je dois dire que c'est une question d'âge et aussi une question d'école.

Si on s'oriente vers la faculté de sociologie, je crois qu'il devrait y avoir des cours de technologie. En sociologie, on devrait connaître tout ce qui se rattache à la statistique. Lorsque nous rédigerons notre rapport, nous devrons nous intéresser aux universités et parler du programme d'études également, de façon que les femmes ne se laissent pas entraîner dans un secteur qui les amuse et où elles pourraient se faire un avenir, mais sans voir tous les outils dont elles auraient besoin à l'avenir.

S'il s'agit de gérer une entreprise qui compte 30 000 employés, j'ignore comment on peut y arriver sans connaître la technologie. Le premier intérêt a beau concerner les ressources humaines, il faut tout de même la technologie, au bout du compte.

Je voudrais être plus précise au lieu de simplement opposer hommes et femmes. C'est du groupe d'âge et du programme d'études qu'il faut tenir compte. Pour ma part, j'estime que, une fois qu'elles y ont été initiées, les femmes savent parfaitement utiliser la technologie. Je conviens malgré tout qu'il existe une lacune, et il faut la combler.

Êtes-vous d'accord avec moi en général, étant donné vos soupçons?

Mme Orser : J'ai deux réponses. D'abord, je serais heureuse de communiquer au comité les résultats de recherches sur les perceptions des femmes dans le secteur de la technologie de pointe. Ils devraient être publiés le mois prochain, je crois. Chose curieuse, lorsque nous creusons l'analyse des données, nous constatons que l'âge n'est pas un facteur important. Certaines des perceptions sont généralisées. Nous vous ferons parvenir les documents qui traitent de la nature de ces perceptions.

Plus important encore, l'un des principaux éléments que je retiens, lorsque nous discutons de connaissances en technologie, c'est que nous devrions aussi parler des connaissances en finances et avoir une discussion générale sur la connaissance des notions de croissance. Nous n'en sommes pas encore là.

J'enseigne l'entrepreneuriat, et une grande partie de nos échanges porte sur le démarrage. Toutefois, je ne crois pas que le discours sur la croissance soit bien informé. En ce qui concerne les universités et certains des secteurs dont vous parlez, ce pourrait être également un point à souligner.

Le sénateur Tkachuk : Je voudrais aborder la question sous un angle différent. Il me semble important de voir où les femmes ont réussi dans leur intégration à la population active. Je ne veux pas parler des statistiques que j'ai sous les yeux, mais de connaissances générales.

Je sais qu'il y a maintenant plus de femmes que d'hommes en droit et aussi en médecine. Elles font de grands progrès dans le domaine de la comptabilité et elles commencent aussi dans l'assurance, mais elles n'en sont pas au même point que dans ces autres disciplines. Elles dominent toujours dans les soins infirmiers et l'économie domestique et dans toutes les autres professions autrefois réservées aux femmes. Les hommes n'ont pas été très nombreux à s'intéresser à ces professions.

Pourquoi avons-nous besoin d'inciter les femmes à suivre des programmes d'administration des affaires, à s'intéresser aux affaires et au génie? Elles font de grands progrès dans les sciences, d'après tout ce que j'ai lu. C'est constructif, car ce sont ces gens-là qui vont en affaires.

La formation technique, c'est une autre histoire. Si on étudie la petite entreprise, on constate que c'est le charpentier qui lance une petite entreprise de construction. C'est le plombier qui démarre une entreprise de plomberie. C'est le jeune qui a tondu la pelouse du jardin de ses parents qui crée l'entreprise d'entretien au collège et en fait une grande entreprise, et qui crée ensuite une entreprise de conciergerie qui commence à nettoyer des immeubles. Les femmes ne sont pas présentes dans ces secteurs-là.

Si on étudie les petites entreprises et les statistiques sur les femmes qui y participent, on remarque qu'elles ne seront jamais présentes dans ces secteurs; mais je parie que la plupart des petites entreprises se trouvent dans les domaines que j'ai énumérés. C'est là qu'elles se trouvent.

Voyez les annonces d'offres d'emplois dans le Star Phoenix. Ce sont ces entreprises qui les font paraître. Nous ne pouvons attirer des gens vers les domaines techniques ou la charpenterie. Il nous manque des travailleurs dans ce secteur en Saskatchewan. Ils font cruellement défaut et nous faisons des annonces pour les recruter et les attirer. Tous ces emplois sont dominés par les hommes, et les petites entreprises en ont besoin.

Il faut s'interroger sur ceux que nous étudions, et cela aidera à nous guider. Les femmes seraient beaucoup plus engagées dans ces secteurs si le père donnait un marteau et un tournevis à sa fille et lui demandait de tondre le gazon aux 15 jours, ce que je n'ai jamais fait, bien sûr. Mon fils l'a fait. Cela a une influence.

Voilà pourquoi nous avons ce genre de problèmes qui restent sans solution. Nous discutons de ça depuis 25 ans. Il y a eu beaucoup de progrès dans toutes ces autres professions, où les femmes dominent maintenant, comme le droit et la médecine. Nous avons bien réussi. Que pensez-vous de tout cela?

Mme MacKendrick : Je voudrais revenir sur un ou deux points. La question ne se pose pas qu'à un seul niveau. Il y a la question du primaire, avant l'âge de 11 ans, où les filles et les garçons sont davantage sur un pied d'égalité par leurs notes en sciences et en mathématiques et dans les autres aptitudes. En neurosciences, on dit que c'est l'âge de la plasticité cérébrale. C'est à ce stade que les possibilités sont les plus nombreuses, et l'issue dépend du système d'éducation, de son mode de fonctionnement, des éléments qu'il tend à renforcer.

Au niveau postsecondaire, il y a la question d'orienter les femmes vers les bonnes filières, pour qu'elles aillent vers les secteurs où il y a des besoins et où elles auront un avenir. Quant au point que le sénateur souligne, je dirai qu'il ne s'agit pas de penser strictement au génie, aux sciences ou aux mathématiques; il faut voir comment appliquer ces sphères de la connaissance à différentes disciplines, pour qu'elles soient présentes dans toutes les disciplines.

Puis, il y a la mi-carrière, et c'est énorme. À propos des différences entre générations, il y a beaucoup de femmes qui ont beaucoup de compétences en divers domaines. Dans certains, comme la radiodiffusion, les choses prennent vraiment forme. Il y a une foule de possibilités sur le plan de la technologie.

Par exemple, si vous savez comment créer du contenu, le secteur du sans-fil est à la recherche de contenu pour les applications mobiles, et il y a des moyens de l'utiliser de différentes manières. Il y a fort peu de formation à mi-carrière, très peu d'évolution en ce sens.

Il y a aussi une question d'attitude, de confiance. Lorsque nous faisons de la formation, nous traitons de la matière à enseigner, mais devons aussi amener nos membres à réfléchir aux affaires, à la croissance, aux étapes suivantes à franchir, à l'application de certaines compétences transférables qu'elles possèdent déjà, mais ne savent pas vraiment comment utiliser ou dont elles ne sont pas même conscientes de les posséder au point où elles les possèdent. Il y a là un enjeu énorme.

Le sénateur Tkachuk : Il est important de prendre conscience du fait que les entreprises naissent des compétences acquises. Ce n'est pas tant que les gens veulent partir en affaires. C'est qu'ils aiment telle profession et donnent plus d'ampleur à leur activité.

Pour avoir une entreprise et bâtir des maisons, il faut être un architecte, ou adorer la finance et le secteur des prêts hypothécaires et du financement des entreprises, et on bâtit à partir de là. Ou bien on a un diplôme en génie. Voilà ce qui amène les gens dans le monde des affaires. On ne va pas en génie parce qu'on pense aux affaires. On étudie en génie ou en finances parce qu'on aime ça. Il faut travailler davantage à ce niveau.

S'il y a beaucoup de filles qui vont vers le droit et la médecine, c'est parce que leur père ou leur mère leur ont dit qu'elles devraient être médecins ou juristes, comme ils le disaient à leurs fils autrefois. Maintenant, ils le disent à leurs filles. Ils ne disent pas : « Pourquoi tu ne m'aiderais pas à réparer la voiture? » S'ils ne le disent pas, les filles n'iront jamais en électricité ni en charpenterie. Elles ne le feront pas, même si elles y excellent, car il y en a quelques-unes dans ces domaines, et elles sont très bonnes, mais ce n'est pas de ce côté qu'on les a orientées. Elles n'iront pas en affaires à moins d'avoir toutes ces compétences. Elles ne se retrouveront pas dans les petites entreprises.

Le sénateur Massicotte : Je voudrais savoir à quoi m'en tenir. Je crois comprendre que, à l'université, les filles dominent dans presque toutes les facultés, y compris dans l'administration des affaires et la comptabilité. Là où elles sont moins nombreuses, c'est dans le génie et notamment en électricité et en mécanique, et non en génie civil. Est-ce exact?

Mme Orser : Vous pouvez ajouter l'informatique et la physique, certaines des disciplines les plus difficiles, et les mathématiques.

Le sénateur Massicotte : D'après mon expérience, les filles, au niveau secondaire, font aussi bien que les garçons en sciences et en mathématiques. Quels sont les faits? Elles ne vont pas à l'université dans ces disciplines, mais elles comprennent les sciences et les mathématiques aussi bien que les garçons sinon mieux.

Mme MacKendrick : Lorsqu'elles prennent toujours ces disciplines. Autrefois, tout le monde suivait le même programme jusqu'à la fin des études secondaires. On étudiait toutes les matières. Aujourd'hui, on commence plus tôt à s'orienter dans une filière et on commence à s'orienter, par exemple vers les sciences ou la technologie. Le système m'a permis de n'étudier ni les sciences, ni les mathématiques après la 11e année et j'ai pu étudier beaucoup les langues. Quatre ou cinq ans plus tôt, j'aurais dû étudier les sciences et les mathématiques jusqu'en 13e année.

Le sénateur Massicotte : Lorsqu'elles n'ont pas ce choix, je crois savoir que les filles s'en tirent aussi bien, sinon mieux, que les garçons. Est-ce exact?

Mme MacKendrick : Elles peuvent le faire.

Le sénateur Massicotte : Ce n'est pas une question de capacité, mais d'intérêt.

Mme MacKendrick : Juste.

Le sénateur Harb : Je suis d'accord sur tout ce que vous avez dit. Il suffit d'aller se promener chez Toys `R' Us. C'est ce qui détermine tout, au fond : nous sommes ce avec quoi nous jouons. On va dans les rayons des jouets pour les garçons et ensuite dans ceux des jouets des filles, et cela dit tout. Dans notre système d'éducation, qu'il s'agisse des parents ou du système d'éducation dans son état actuel, dès qu'ils naissent, nous commençons à programmer les enfants d'une certaine façon. La petite fille joue avec des poupées, avec l'ourson, et elle reçoit les jouets qui sont doux, de couleur pastel. Le petit garçon reçoit un camion, un avion, des Lego, par exemple. C'est ainsi.

Ma question est simple. Je sais que les filles sont plus brillantes que les garçons. Inutile d'aller chercher bien loin. Comme mes collègues l'ont signalé, les filles ont des notes bien supérieures à celles des garçons au primaire et au secondaire. Mme MacKendrick a dit quelque chose de très vrai. Nous commençons à faire une sorte de séparation à un stade précoce : d'abord les parents, puis le système d'éducation.

Ne pensez-vous pas qu'il devrait y avoir une sorte de discrimination à rebours dans le système d'éducation pour rebrasser toutes les cartes, pour tout secouer, de façon que les garçons puissent jouer avec des Barbie, comme les filles, et, à l'inverse, que les filles puissent jouer avec des camions?

Mme MacKendrick : Il est intéressant de voir comment on établit le système. En Bulgarie et dans certains pays autrefois soviétiques qui ont beaucoup insisté sur les mathématiques et les sciences dans leurs programmes tout au long des études, et aussi dans certains pays d'Asie, les résultats sont différents. En Bulgarie, il y a plus de femmes que d'hommes en génie. L'impact est énorme. Pour revenir à ce que disait Mme Partner, on peut mettre l'accent sur la technologie, sur son intégration à d'autres éléments pour que les femmes et les filles n'y voient pas quelque chose de différent. Elle est intégrée dans tout ce qu'elles font.

Mme Partner : Je voulais ajouter un point : si on croit que les entreprises du secteur technologique sont parmi les plus importants moteurs de la croissance, je ne pense pas qu'il faille croire qu'on ne peut diriger une de ces entreprises que si on est technologue de formation. Les trois entreprises que j'ai dirigées s'occupaient toutes de logiciels, ou de matériel informatique, et je n'ai pas étudié en technologie.

De plus en plus, nous voyons des femmes DPI dans certaines des plus grandes sociétés au Canada. J'en ai interviewé huit, et aucune ne venait du milieu technique pur et dur. Pourtant, elles sont les dirigeantes principales de l'information dans certaines de nos plus grandes sociétés.

On ne peut pas présumer qu'il faut avoir une tournure d'esprit technique pour diriger une entreprise en technologie ou être un cadre qui s'occupe de la technologie. Aujourd'hui, les contours deviennent flous; il ne s'agit pas de technologie pour la technologie en soi; c'est la façon d'utiliser la technologie pour créer, innover et faire croître une entreprise.

Je ne rejette rien de ce qui s'est dit, mais ce n'est pas la seule chose dont il faut tenir compte lorsqu'il s'agit de favoriser une plus grande participation aux affaires ou d'encourager plus de femmes à diriger ces entreprises.

Le sénateur L. Smith : Mme Orser a parlé de programmes financés par les autorités fédérales pour des initiatives intéressant les petites entreprises. Il en était question aussi dans le rapport de Mme Partner. Que pensez-vous des programmes fédéraux? Y en a-t-il trop? Sont-ils faciles à comprendre?

Bien entendu, vous souhaitez avoir un plus grand nombre de programmes destinés aux femmes, mais je voudrais savoir ce que vous pensez de ce que le gouvernement fédéral propose : le nombre de programmes, la difficulté de les comprendre, l'accès. À partir de là, auriez-vous une recommandation que le comité pourrait relayer et qui serait utile aux femmes?

Mme Orser : Il y a trois points. Il est difficile de parler de l'impact des programmes à financement fédéral pour les petites entreprises parce qu'il n'y a pas de rapports publics sur le profil de la clientèle ni sur les résultats en matière de création d'emplois. Il y a de très nombreux programmes, par exemple pour la stimulation des exportations. Il y a des chevauchements. Ces programmes sont perdus dans des pages web, et les propriétaires de petites entreprises n'arrivent pas à les trouver. Il est urgent de regrouper ces programmes et de faire savoir où ils sont enfouis.

Enfin, où les programmes axés sur les femmes peuvent-ils s'inscrire? Je crois qu'il s'agirait de compléments des programmes existants. Mais en même temps, il faudrait tout regrouper et essayer de voir dans quelle mesure les programmes font augmenter l'emploi. Autrement, ce serait simplement proposer un gâteau plus gros. Nous n'avons pas besoin de cela, car les propriétaires de petites entreprises au Canada n'ont pas le temps de s'y retrouver dans la multitude des possibilités qui existent.

Le président : C'est une observation que nous avons entendue de la bouche d'autres témoins également. Il y a certainement un problème, cela ne fait pas de doute.

Le sénateur Moore : J'ai deux questions, et la première s'adresse à Mme Partner. Dans quel domaine avez-vous étudié avant de commencer à diriger ces entreprises?

Mme Partner : J'ai un baccalauréat en commerce de l'Université d'Ottawa.

Le sénateur Moore : Dans votre exposé, vous avez dit que 40 p. 100 des sociétés de capital de risque que vous avec rencontrées, seulement trois avaient des femmes dans leur équipe de prise de décisions, que vous avez conclu quatre ententes et que deux de celles-là ont été conclues avec des sociétés qui avaient des femmes dans leur équipe. Est-ce que ces entreprises étaient toutes canadiennes? Est-ce qu'il s'agissait d'entreprises ou de fonds de capital de risque des États- Unis?

Mme Partner : Trois des quatre étaient canadiennes, et deux de celles où des femmes avaient un rôle de prise de décisions étaient canadiennes.

Le sénateur Moore : Madame Orser, dans votre rapport, et le sénateur Smith y a fait allusion, lorsque vous parlez des recommandations qui figurent dans l'étude récemment publiée du groupe de travail, le deuxième point dit ceci : beaucoup d'initiatives financées par les autorités fédérales pour les petites entreprises, y compris celles qui portent sur le capital de croissance, la technologie et l'innovation, ne tiennent pas compte des différences entre hommes et femmes ni des besoins des clients. Selon vous, comment cela pourrait-il se faire? Quelle serait la marche à suivre? Je ne crois pas que vous réclamiez du favoritisme pour les femmes, mais comment faudrait-il tenir compte de ces différences? Quelle forme prendrait la mise en œuvre?

Mme Orser : Avant d'aborder la mise en œuvre, je pose une simple question : comment ces programmes servent-ils leurs clients? Par exemple, le Programme de financement des petites entreprises du Canada est énorme. Cette initiative vient en aide à des centaines de milliers d'entreprises canadiennes. Il n'y a à propos de cet investissement aucun rapport sur le profil de la clientèle avec ventilation selon les sexes. Avant de chercher à comprendre le comment, prenons un temps de recul et demandons-nous qui fait appel à ces programmes et quel est l'effet obtenu. Voilà le point principal que j'essaie de faire ressortir.

Le sénateur Moore : Si vous saviez, s'il y avait des rapports, alors quoi?

Mme Orser : Je soupçonne qu'il y aurait un besoin constant de programmes de microcrédit, avec l'appui d'une formation, pour amener des entreprises appartenant à des femmes à accélérer le pas pour s'intégrer à la structure formelle du marché.

Le sénateur Moore : J'ai regardé vos notes de fin de document. Vous avez fait des recherches considérables. Connaissez-vous le document dont le sénateur Catherine Callbeck, de l'Île-du-Prince-Édouard, a dirigé l'élaboration, il y a sept ou huit ans, et qui portait sur les Canadiennes et l'entrepreneuriat?

Mme Orser : Tout à fait. Dans notre premier rapport, nous attirons l'attention sur le travail du sénateur Callbeck et de l'honorable Sarmite Bulte, qui a présidé le Groupe de travail du premier ministre sur les femmes entrepreneurs. Chose curieuse, me semble-t-il, les recommandations mises en avant par les femmes en 2010 rappellent celles du sénateur Callbeck. Malgré le temps qui a passé, elles n'ont pas été mises en œuvre.

Le sénateur Massicotte : Pourriez-vous répondre à cette observation-ci? Il y a de toute évidence un enjeu : en ce qui concerne les sciences, les femmes n'ont aucun problème. Je n'en doute pas. Je suis assurément d'accord pour dire que, dans toute population, il y va de notre intérêt d'utiliser toutes les ressources disponibles le plus rapidement possible. Si on tient compte des progrès accomplis ces 30 ou 40 dernières années, on peut dire qu'il est crucial de faire entrer les femmes dans la population active et d'utiliser leurs aptitudes à fond. Je conviens qu'il existe un vrai problème, et c'est pourquoi vous comparaissez aujourd'hui.

Toutefois, comment réagiriez-vous à l'observation suivante. Projetons-nous dans l'avenir de 20 ou 30 ans. Si vous considérez ce que font les femmes aujourd'hui, pour toutes sortes de raisons, comme la maturité, mais peu importe, vous pouvez dire qu'elles réussissent beaucoup mieux que les garçons et les jeunes gens à l'école et à l'université. Il y a des lacunes dans certains secteurs, mais elles se débrouillent magnifiquement. Il y a eu un plafond à percer, et la société a eu du mal à changer et à accepter pleinement les femmes.

Toutefois, dans 20 ou 30 ans, nous pourrions nous retrouver ici avec un groupe et une foule d'hommes qui diraient : « Nous avons un gros problème. Les femmes dominent les facultés; elles dominent l'éducation et les gouvernements; et à cause d'un manque de maturité ou de la génétique, peu importe, les hommes sont très en retard. » Si on considère, les jeunes hommes, on peut dire qu'ils sont très en retard. Est-ce que c'est un point de vue acceptable?

Mme MacKendrick : Je dirai rapidement que j'ai deux fils. Il est essentiel d'être conscient du fait que les hommes et les femmes réagissent différemment, et je dirais qu'il y a un problème avec les jeunes garçons à l'école primaire. Il y a un problème de décrochage au secondaire, et il y a des problèmes propres aux garçons et aux hommes auxquels il faut s'attaquer également. De la même façon, il existe des problèmes propres aux filles et aux femmes. Soyons donc un peu plus précis dans la façon dont nous encourageons nos gens à prospérer et à contribuer à l'économie.

Mme Orser : Je vis dans l'espoir. Étant donné les rapports qui ont été cités à propos de notre productivité qui tire de l'arrière et de l'absence de PME, il me semble urgent de soutenir l'entrepreneuriat chez les Canadiennes pour que nous puissions demeurer compétitifs. Ce sont des problèmes à long terme à un certain niveau, mais je crois que les faits confirment que nous pouvons renforcer l'économie en nous intéressant dès aujourd'hui à l'entrepreneuriat chez les femmes.

Le sénateur Hervieux-Payette : Je dois dire que je suis d'accord sur ce que mes collègues ont dit des différences. Il est passionnant que, en 2011, nous prenions tout juste conscience que les femmes sont peut-être différentes. J'estime pour ma part que c'est une nouvelle extraordinaire, que nous devons aborder le programme sous des angles différents pour obtenir un excellent résultat. Nous n'avons pas à avoir peur d'être différentes.

Juste une observation. D'après ma propre expérience du capital de risque, les femmes étaient plus portées à travailler fort sur leur plan d'entreprise et elles étaient beaucoup plus avancées pour ce qui est des projections, par exemple. Elles avaient d'excellentes références pour préparer tout cela, mais elles réussissaient beaucoup moins bien à obtenir des fonds parce qu'elles ne promettaient pas la lune avant même que la société ne voie le jour.

Si vous étiez un homme et si vous aviez un plan d'affaires qui ne marche que la moitié du temps, qui est à moitié préparé, et ainsi de suite, et si vous promettiez un rendement de 25 p. 100 la première année, vous étiez en bonne posture. Lorsque des femmes se présentaient avec un plan bien élaboré et disaient que le rendement se situerait peut- être entre 15 et 20 p. 100, leur proposition était jugée moins attrayante.

Il y a un préjugé dans notre système. J'espère que nous éliminerons cette idée qui veut que ce soit une grande qualité de prendre beaucoup de risques. Nous avons vu comment l'économie mondiale a souffert à cause de gens qui prenaient beaucoup de risques. Si nous revenions aux bases, je me sentirais mieux.

Estimez-vous que nous devions simplifier ou fusionner nos programmes? J'entends parler de guichet unique depuis 25 ans. Nous disons toujours que les programmes sont cachés dans tous les ministères. Êtes-vous favorable à l'approche du guichet unique, de sorte qu'il y aurait un seul endroit où se présenter? Au besoin, des technocrates donneraient leur avis sur le fond, qu'il s'agisse de l'environnement ou d'un autre domaine scientifique. Croyez-vous que l'idée du guichet unique soit réaliste? Cette idée est-elle appliquée ailleurs? Dans d'autres pays, faut-il frapper à 50 portes pour réussir à obtenir un certain soutien?

Mme Orser : Il faudra un certain nombre de stratégies. Au Canada, nous avons vu la réussite d'initiatives privées visant à acheminer l'information, comme MERX et le nouveau Funding Portal. Ce sont des propositions du privé.

Les femmes veulent un guichet unique. Les femmes entrepreneurs le souhaitent, comme tous les entrepreneurs. Il faut assurément regrouper l'information. Si nous investissons dans ces programmes, nous avons envers les Canadiens le devoir de rendre l'information disponible.

Il nous faut aussi, parallèlement, des communications réelles en ligne avec des technocrates qui peuvent aiguiller les propriétaires d'entreprise vers le bon programme. Nous devons évoluer, et le secteur privé le fait, vers des communications personne à personne pour discuter des programmes qui se cachent derrière les pages Web.

Le sénateur Hervieux-Payette : Estimez-vous que, si nous voulons réussir et réorganiser l'enveloppe, il faudrait peut- être ajouter des fonds au besoin, que nous devrions avoir un mécanisme de rapports annuels sur la réussite et le rendement de ces programmes?

Mme Orser : C'est ce que j'essaie de dire, et il faut absolument avoir des données ventilées selon le sexe. Le groupe de travail du premier ministre l'a clairement précisé, mais nous n'avons rien vu de concret. Il y a là un paradoxe. La législation fédérale sur le respect des obligations contractuelles exige que le secteur privé fasse rapport sur l'équité, mais les responsables des programmes fédéraux ne le font pas.

Le sénateur Hervieux-Payette : Quand il est question de « fusionner tous les programmes », voulez-vous dire que les sociétés d'État devraient également participer à cette initiative? Je sais que l'ACDI signe beaucoup de contrats avec des entrepreneurs privés et il y a certainement des sociétés, comme Postes Canada, qui le font aussi. Dans tous les cas, ce sont de gros consommateurs. Devrions-nous avoir une politique qui s'applique aux sociétés d'État?

Mme Orser : Tout ce que nous pourrons faire pour regrouper l'information à l'intention des petites entreprises canadiennes sera une bonne nouvelle, et, si cette information donne un lien avec les sociétés d'État, alors les programmes offerts par la BDC pour le capital, EDC, pour faire gagner du temps aux propriétaires d'entreprise, seront logiques.

Le sénateur Hervieux-Payette : Un point a porté sur les approvisionnements du gouvernement fédéral, qui représentent des milliards de dollars. C'est la même chose. Par exemple, il devrait y avoir des ateliers pour montrer aux gens comment aborder ces questions et participer au processus. Nous ne pouvons pas tout mettre en ligne et compter que tout le monde va comprendre. Lorsque je traite avec nos propres bureaucrates, je dois poser beaucoup de questions si je veux obtenir une réponse pour un Canadien. Il y a une semaine, j'ai aidé quelqu'un à obtenir un nouveau passeport parce qu'il s'était fait voler le sien le jour même où il devait partir. Croyez-le ou non, j'ai dû faire imprimer le formulaire à partir de l'ordinateur avant de me présenter au bureau des passeports.

Qu'arrive-t-il à celui qui n'a pas accès à un ordinateur? Si on se présente au bureau des passeports, on n'y a pas ce formulaire. Si je dis cela, c'est parce que c'est la même chose dans tous les ministères. S'ils sont d'accord, nous devons veiller à ce que nos collègues aient une relation personne à personne, ou un moyen de transmettre l'information dans des ateliers ou par d'autres moyens. Avez-vous un mécanisme qui permettrait aux gens de comprendre comment l'administration publique fonctionne? Les approvisionnements, c'est énorme, et les règles sont énormes également.

Mme Orser : J'ai bon espoir que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada évoluera dans cette direction. La technologie existe. Nous pouvons avoir des échanges directs, au-delà des pages web. Dans le contexte de nos échanges d'aujourd'hui, j'espère que tous les ministères fédéraux sont ouverts d'esprit dans leur examen de leurs programmes et peuvent voir s'il y a des occasions à saisir pour les hommes et les femmes. Je crois que le programme d'approvisionnement auprès des fournisseurs minoritaires, aux États-Unis, montre que, une fois que les femmes propriétaires d'entreprises franchissent les portes de ce marché, elles réussissent. Leur rendement est égal à celui des autres entrepreneurs. Nous avons eu les marchés réservés pour les Canadiens autochtones. D'aucuns laissent entendre que les femmes propriétaires d'entreprise ne sont qu'une façade, et nous devons examiner la question. Tous les ministères fédéraux peuvent examiner ces questions et obtenir peut-être des résultats.

Le sénateur Hervieux-Payette : Le Programme de diversification de l'économie de l'Ouest donne 100 000 $ à quatre provinces. Quelqu'un a parlé de segments. À mes yeux, il n'y a pas de segments. Il est étrange qu'une région seulement applique pareil programme. S'il marche bien dans quatre provinces, ne pensez-vous pas qu'il serait aussi une réussite dans 10 provinces? Il est étrange qu'on ait une approche différente de l'aide aux petites entreprises. Je ne crois pas que les entrepreneurs aient une conception différente du lancement d'une entreprise en Colombie-Britannique ou en Alberta. Chose certaine, l'Alberta ne manque pas d'argent. Avez-vous l'impression que certaines mesures ont été adaptées spécialement à un certain secteur? Ce n'est pas ainsi que je conçois la segmentation.

Mme Orser : Absolument. Je crois que la recommandation clé de ce rapport demande un bureau de l'entreprise féminine qui coordonne l'expertise pour mettre un terme au chevauchement. Les femmes au Yukon peuvent mettre leurs compétences en commun avec les dirigeants du nord de la Saskatchewan et de Terre-Neuve. Elles peuvent mettre ces compétences en commun dans tout le Canada. Si cela ne se fait pas, il est probable que nous verrons beaucoup de doubles emplois et des courbes d'apprentissage qui sont bloquées. Nous avons des compétences de calibre mondial, et il faut qu'elles soient mises en commun.

Le sénateur Hervieux-Payette : Comment pouvons-nous aider les femmes à faire du commerce avec l'étranger? C'est un point que nous n'avons pas abordé. Ce sont des PME. Si on a une centaine d'employés, on peut exporter. Les femmes se prévalent-elles de ces programmes? Sont-ils mis à leur disposition? N'ont-elles pas autant de confiance que les hommes pour utiliser le programme afin d'exporter?

Mme Orser : Il existe une autre étude du MAECI. Elle porte sur les obstacles liés au sexe que les femmes doivent surmonter pour exporter et sur les difficultés d'ordre culturel qu'elles doivent affronter. Je serai heureuse de vous la faire parvenir. Les femmes veulent une information de pointe, opportune et pertinente. Il y a notamment des renseignements sur les différences culturelles propres aux pays destinataires des exportations et sur les différences relatives au commerce avec l'étranger et à l'importation. Nous avons eu une documentation; par le passé, lorsqu'on ne se servait que de missions commerciales. Quand nous établissons un rapport entre les débouchés et des entreprises axées sur la croissance, intelligentes, orientées vers le monde, il y a une solution immédiate qui peut aider.

Le président : Merci d'avoir pris l'initiative et d'avoir invité nos témoins d'aujourd'hui, sénateur Hervieux-Payette. La séance a été passionnante. On dirait que qu'il y a une étude sur chaque problème et chaque aspect. La question qui se pose maintenant, c'est celle de savoir comment réunir toute l'information et écarter les chevauchements, les redites et la confusion qui entourent certains programmes, de façon que les femmes, qui constituent un segment distinct sur le marché, puissent tirer le maximum d'avantages, tout comme les hommes.

Voilà qui a été utile à notre étude, et nous vous remercions d'avoir pris le temps, malgré un horaire certainement très chargé, de venir échanger avec nous ce matin.

Honorables sénateurs, nous allons rester pour discuter des prochaines séances. Je voudrais connaître votre sentiment sur notre programme d'ici Noël.

(La séance est levée.)


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