Aller au contenu
ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 24 - Témoignages du 29 mai 2012


OTTAWA, le mardi 29 mai 2012

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles s'est réuni ce jour à 17 h 3 afin d'étudier la teneur des événements de la partie 3 du projet de loi C-38, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures.

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs, éminents invités, je vous souhaite le bonjour et déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous savons tous quel est l'objet de notre séance d'aujourd'hui : le projet de loi budgétaire C-38. Je dirai simplement, à l'intention des personnes qui suivent nos délibérations sur le réseau CPAC, sur Internet et sur les médias sociaux qu'il s'agit de la poursuite de notre étude préliminaire du projet de loi C-38, lequel est encore à l'examen à la Chambre des communes. Suite à un accord unanime des parties représentées au Sénat, nous traitons de cinq parties différentes du projet de loi au titre des études préliminaires, et notre comité est chargé de la partie 3.

Chers collègues, point n'est besoin de présenter nos témoins d'aujourd'hui. Je dirai toutefois que c'est un grand honneur pour nous que de recevoir trois ministres de la Couronne. Étant donné que nous nous approchons de la publication de notre rapport sur le secteur énergétique, nous commençons également à recueillir des illustrations graphiques et audiovisuelles qui accompagneront ce rapport à vocation de convivialité médiatique.

J'ai besoin de l'autorisation des membres du comité pour la présence d'un photographe pendant tout ou partie de nos délibérations.

Le sénateur Baker : Je propose une motion dans ce sens.

Le président : La motion est donc présentée par le sénateur Baker, avec l'appui du sénateur Peterson. Qui est en faveur de la motion?

Des voix : D'accord.

Le président : La motion est adoptée, merci beaucoup.

Je disais donc que nous recevons aujourd'hui trois ministres : l'honorable Keith Ashfield, C.P., député, ministre des Pêches et des Océans; l'honorable Joe Oliver, C.P., député, ministre des Ressources naturelles, originaire de l'Ontario; et, de l'Ontario également, un ministre que nous connaissons bien, l'honorable Peter Kent, C.P., député, ministre de l'Environnement.

Messieurs, nous vous remercions d'être des nôtres cet après-midi. Nous savons que vous suivez de près les délibérations de notre comité et que vous seriez prêts à nous donner acte de notre propre engagement dans ce domaine. L'étude approfondie et intensive du secteur énergétique à laquelle nous nous sommes dédiés au cours des trois dernières années a fait apparaître, entre autres, combien sont nécessaires certaines des mesures proposées dans la partie 3 du projet de loi C-38, à savoir une rationalisation — puisque c'est le terme employé par le gouvernement —, de la mise en valeur des ressources de notre pays ainsi que la mise en place d'un nouveau régime pour la tenue des évaluations nécessaires, dans une optique environnementale mais aussi tournée vers d'autres facteurs, préalablement à l'octroi aux soumissionnaires de la permission d'entreprendre de grands projets. Tel est donc l'objet de notre séance.

Cette séance est la troisième de la série; auparavant, si je ne m'abuse, nous avons reçu des agents de vos trois ministères. Nous entendrons également les représentants de certaines agences, telles que l'Agence nucléaire et l'Office national de l'énergie. Votre témoignage, messieurs, est d'une importance capitale et nous apprécions que vous ayez fait l'effort de venir témoigner en premier. Cela dit, vous n'avez pas le don d'ubiquité et vous ne pouvez être à la fois à la Chambre des communes et dans votre circonscription. C'est pourquoi, puisque vous êtes des nôtres ce soir, nous allons sans plus tarder laisser chacun d'entre vous faire une déclaration, puis nous passerons au cycle de questions. Je crois savoir que vous avez un vote important à la Chambre en soirée.

Permettez-moi de présenter très brièvement notre comité. Je suis le sénateur David Angus de Montréal, et j'assure la présidence. À ma droite, le vice-président qui nous vient de l'Alberta, le sénateur Grant Mitchell. Monsieur le ministre Ashfield, je vous signale que la personne que je vous indique ici est le sénateur Wallace qui nous vient de Saint John, au Nouveau-Brunswick; et un peu plus loin le sénateur Lang, du Territoire du Yukon. À notre gauche, notre greffière à la compétence reconnue, Lynn Gordon. À côté de Mme Gordon, le sénateur McCoy, de Calgary. À sa gauche, de la grande province de Terre-Neuve-et-Labrador, le sénateur George Baker; à sa gauche encore, nous venant de la Saskatchewan, le sénateur Robert Peterson. Enfin, des Territoires du Nord-Ouest, le sénateur Nick Sibbeston. Deux ou trois autres sénateurs se joindront peut-être à nous ultérieurement, mais nous allons commencer sans plus attendre.

Monsieur le ministre Oliver, à vous l'honneur, je crois.

L'honorable Joe Oliver, C.P., député, ministre des Ressources naturelles : En effet, monsieur le président, et je vous remercie de me donner la parole.

Monsieur le président, honorables sénateurs, c'est avec un immense plaisir que je comparais aujourd'hui devant le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Avant de répondre à vos questions, j'aimerais vous entretenir brièvement des avantages du projet de loi C-38 qui touchent spécifiquement le développement responsable des ressources.

[Français]

Le développement responsable des ressources renforcera les mesures déjà rigoureuses de protection de l'environnement du Canada et offrira aux Canadiennes et aux Canadiens un processus plus efficace et plus prévisible d'examen des grands projets. Il contribuera ainsi à la création d'emplois et à la croissance économique à l'échelle du pays, en plus de générer de nouvelles recettes qui contribueront au financement de programmes et de services gouvernementaux qui profiteront à tous les Canadiens.

[Traduction]

Nous devons mettre en place un régime de réglementation moderne instaurant un climat propice à l'investissement et à la création d'emploi au Canada, et qui accroîtra la compétitivité de nos industries primaires.

Monsieur le président, le régime de réglementation du Canada a évolué au fil des ans, souvent de façon indépendante et sans que l'on porte vraiment attention à la façon dont les processus engagés interagissent. Nous nous retrouvons donc aujourd'hui avec un régime désuet, encombrant, d'une complexité inutile et fauteur de chevauchements et de doubles emplois. Il arrive parfois que le même projet doive faire l'objet de deux évaluations pratiquement identiques à l'échelon fédéral, provincial ou territorial, à des moments différents, et dont les conclusions peuvent diverger.

Les problèmes pratiques d'une telle approche sont évidents : une réglementation inefficace retarde les projets, et ces retards inutiles et imprévisibles engendrent des coûts supplémentaires pour les promoteurs et empêchent ces derniers d'attirer les capitaux et de stimuler les activités économiques. L'industrie et le gouvernement s'entendent sur le fait que ce mauvais régime de réglementation afflige depuis trop longtemps le Canada.

Le développement responsable des ressources prend les mesures nécessaires pour corriger ce problème à l'aide de quatre objectifs clés : premièrement, rendre les examens des projets plus prévisibles et plus rapides; deuxièmement, réduire le double emploi dans l'examen des projets; troisièmement, renforcer les mesures de protection de l'environnement; quatrièmement, améliorer la consultation auprès des Autochtones.

Le président : Monsieur le ministre, me permettrez-vous de vous interrompre brièvement? Vous avez dit que tant l'industrie que le gouvernement conviennent que le Canada subit depuis trop longtemps ce mauvais régime réglementaire. Il y a une chose que nous considérons comme très importante, si nous voulons faire comprendre à l'opinion l'objet de ces dispositions, et c'est que nous entendons le mot « gouvernement » comme englobant les instances gouvernementales des provinces. Est-ce bien cela? Pouvez-vous le confirmer?

M. Oliver : Je le confirme. Nous avons tenu des consultations élargies à tous les niveaux de gouvernement. J'ai rencontré un grand nombre de premiers ministres provinciaux et me suis entretenu personnellement avec eux de notre initiative. Avant ma nomination au mois de mai dernier, les provinces ne cessaient de nous adresser des plaintes. Comme vous le savez, aux termes de la Constitution, la propriété des ressources revient aux provinces, si bien que ces dernières sont très directement impliquées dans la politique des ressources naturelles. L'initiative concernant le développement des ressources a un impact très profond sur les provinces où elles sont localisées; et bien entendu, même dans les autres provinces, le développement des ressources à travers chacun des projets qui sont lancés ne manque pas d'avoir des retombées, notamment au niveau industriel, ce dont je vous parlerai volontiers. C'est pourquoi je réponds par l'affirmative à votre question.

Le président : Merci beaucoup, veuillez poursuivre.

[Français]

M. Oliver : Le développement responsable des ressources offrira de nombreux avantages pratiques. Il éliminera les chevauchements en permettant que les évaluations environnementales réalisées par les gouvernements provinciaux et territoriaux remplacent celles du gouvernement fédéral, plutôt que de faire double emploi.

[Traduction]

Notre plan prévoit également des échéances qui devront être respectées du début à la fin du processus d'évaluation, lequel prendra au plus deux ans, sans compromettre la rigueur de notre processus d'évaluation. Nous apporterons ces améliorations tout en renforçant les normes environnementales déjà rigoureuses du Canada.

Un autre point dont il importe de tenir compte concerne les droits des Autochtones du Canada et l'obligation légale qui est faite à notre gouvernement de les consulter avant de prendre des décisions pouvant les affecter. Nous prenons cette obligation très au sérieux. Notre plan améliorera l'intégration, au processus d'examen, de la consultation auprès des peuples et des communautés autochtones. De nouveaux fonds sont également prévus dans le but de favoriser la participation des Autochtones à ce processus.

Afin de moderniser notre régime réglementaire désuet, nous adopterons une approche pangouvernementale. Notre objectif ultime est simple : mener un seul examen par projet, dans des délais clairement établis.

La nécessité de moderniser notre régime réglementaire est largement admise et appuyée par tous les gouvernements. Les provinces et les territoires conviennent que le renouvellement de la réglementation est une priorité. Tous les gouvernements encouragent les efforts déployés pour réduire les chevauchements et les dédoublements d'efforts entre les diverses compétences.

[Français]

Monsieur le président, j'ai traversé le pays pour parler de notre plan de développement responsable des ressources et je peux vous assurer que les Canadiennes et les Canadiens comprennent qu'il est possible de développer nos ressources rapidement et de façon responsable tout en protégeant l'environnement.

En fait, selon un récent sondage Ipsos-Reid, plus de deux-tiers des Canadiens croient que l'on peut développer notre économie tout en respectant l'environnement.

[Traduction]

Notre plan ne fera pas que maintenir les excellents programmes de protection de l'environnement, il les renforcera. Pour ce faire, nous concentrerons les efforts en évaluations environnementales du gouvernement fédéral sur les projets d'envergure dont les conséquences pourraient être néfastes pour l'environnement.

Dans de tels cas, nous prendrons des mesures pour renforcer la conformité et présenter de nouveaux outils d'application. Par exemple, de nouvelles conclusions d'évaluation environnementales exécutoires sont prévues pour veiller à ce que les promoteurs de projets respectent les mesures de protection environnementale. Par ailleurs, de nouvelles sanctions sont prévues pour les cas d'infraction à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Dans le budget de 2012, le gouvernement a aussi prévu d'investir 165 millions de dollars sur deux ans à l'appui du développement responsable des ressources. Il s'agit notamment de nouvelles mesures visant à renforcer la sécurité maritime et celle des pipelines. Les pétroliers seront munis de coques doubles, le pilotage deviendra obligatoire, et les outils de surveillance aérienne et de navigation seront améliorés. Le nombre d'inspections des pipelines passera de 100 à 150 par année, et leurs activités seront visées par deux fois plus de vérifications approfondies. Voilà quelques-unes des nouvelles mesures de sécurité qui nous permettront de repérer et corriger les problèmes avant que des incidents ne se produisent.

Nous nous appuierons ainsi sur nos réussites antérieures pour protéger l'environnement du Canada. Tous les projets, qu'ils soient d'envergure ou non, demeureront assujettis aux exigences environnementales des lois, règlements et normes applicables du gouvernement fédéral et des provinces.

[Français]

Nous nous appuierons ainsi sur nos réussites intérieures pour protéger l'environnement du Canada. Tous les projets, qu'ils soient d'envergure ou non, demeurent assujettis aux exigences environnementales des lois, règlements et normes applicables du gouvernement fédéral et des provinces.

[Traduction]

Nous n'escomptons pas seulement des avantages immédiats, mais aussi des avantages futurs. Au cours de la prochaine décennie, dans le secteur de l'énergie et dans le secteur minier seulement, jusqu'à 500 nouveaux projets, pour une valeur de 500 milliards de dollars en investissements, pourraient être réalisés. On estime que ces projets devraient créer 700 000 emplois aux quatre coins du pays.

[Français]

Monsieur le président, nos critiques ont tenté de monter les différentes régions du Canada les unes contre les autres, mais le plan de développement responsable des ressources est totalement impartial. Chaque région a tout à gagner, car notre objectif est de renforcer les industries primaires à travers le pays, de créer des emplois et d'assurer la prospérité de tous les Canadiens.

[Traduction]

Nos adversaires ont également évoqué le soi-disant syndrome hollandais, affirmant que le développement des ressources fait monter le cours du dollar canadien, ce qui nuirait au secteur de la fabrication. Cette vision sème la discorde en dressant les régions les unes contre les autres. Par ailleurs, elle n'est pas basée sur une analyse économique rigoureuse et a été réfutée par plusieurs études économiques. L'une de ces études a été supervisée par l'économiste Jack Mintz, de l'Université de Calgary, qui a découvert que les industries manufacturières du Michigan et de l'Ohio ont connu la même baisse d'emploi que l'Ontario, évidemment pas à cause de la valeur du dollar canadien, mais à cause de la compétitivité croissante des producteurs dont les coûts sont moins élevés dans les pays moins développés.

[Français]

Pour conclure, je tiens à souligner que l'approche de notre gouvernement est basée sur la preuve irréfutable de l'effet bénéfique du développement des ressources pour toutes les régions du pays. En outre, nous n'appuierons que les projets de développement des ressources qui sont sans danger pour les Canadiens et pour l'environnement.

[Traduction]

C'est avec plaisir que je répondrai maintenant en temps voulu aux questions des membres du comité.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Je pense que nous allons passer aux ministres suivants. Si vous en êtes d'accord, nous allons entendre les deux autres ministres, puis nous vous adresserons nos questions à tous les trois ensemble. Est-ce M. le ministre Kent qui prend la suite?

[Français]

L'honorable Peter Kent, C.P., député, ministre de l'environnement : Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être ici alors que vous poursuivez votre étude préliminaire du projet de loi C-38. Je vais orienter mes remarques sur les propositions d'une nouvelle loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ainsi que sur les changements importants à la Loi sur les espèces en péril et à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999.

Comme les honorables sénateurs le savent, grâce à leurs travaux d'envergure dans ce domaine, l'évaluation environnementale est un élément clé de mon portefeuille. Il s'agit d'un élément important des plans du gouvernement visant à renforcer la protection environnementale aujourd'hui et pour les générations futures des Canadiens et des Canadiennes.

[Traduction]

C'est pourquoi nous avons protégé le financement de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale dans une période de restriction budgétaire. Malgré ce qui a été rapporté dans les médias, aucune réduction ne sera opérée au financement de l'agence. En fait, le budget de l'agence augmentera de 5 p. 100.

Les changements découlant du projet de loi C-38 rendront le processus plus prévisible et plus rapide, réduiront la duplication, renforceront la protection environnementale et rendront possibles des consultations significatives avec les peuples autochtones.

Tel que l'a souligné mon collègue, ce sont les quatre piliers du développement responsable des ressources.

Il y a eu de nombreux débats sur les répercussions du projet de loi C-38 quant au processus d'évaluation environnementale fédéral. La conclusion est claire. Il renforcera l'évaluation environnementale et, du coup, notre capacité à protéger l'environnement. La question de l'application des lois environnementales a été prépondérante dans le budget de 2008. On y a indiqué que pour assurer un environnement meilleur et plus propre, il ne suffit pas d'adopter des lois sur l'environnement, encore faut-il les faire respecter.

Mon prédécesseur y a donné suite par l'intermédiaire de la Loi sur le contrôle d'application de lois environnementales, que les membres de ce comité ont examinée avec compétence et qui a été adoptée par le Parlement en 2009. Toutefois, l'actuelle Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne renferme toujours aucune disposition d'exécution.

Le projet de loi C-38 mise sur l'excellent travail de mon prédécesseur et comble l'écart en matière d'application de la Loi en ce qui concerne l'évaluation environnementale. La nouvelle Loi canadienne sur l'évaluation environnementale crée une déclaration de décision qui comprendra des conditions exécutoires. Ces conditions sont appuyées par des pouvoirs d'inspection visant à confirmer que l'on met en œuvre des mesures d'atténuation. Il y a des pénalités allant de 100 000 $ à 400 000 $ en cas d'infractions.

Cependant, la législation n'est qu'une partie de la solution. Le gouvernement a augmenté de façon permanente les ressources affectées à l'application des lois environnementales de 21 millions de dollars par année afin de s'assurer que nous disposons des agents, du matériel et de la science judiciaire pour accomplir le travail.

Aujourd'hui, il y a 50 p. 100 de plus d'agents d'application de la loi qu'il n'y en avait voilà seulement cinq ans. Ils sont établis dans des bureaux partout au pays, ils travaillent sur le terrain afin de repérer les personnes qui violent nos lois environnementales et de prendre des mesures contre elles.

Ces agents pourront désormais mener des inspections et prendre des mesures à l'égard des infractions à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Ces nouvelles dispositions d'exécution sont complétées par une exigence d'exécuter un programme de suivi après chacune des évaluations environnementales. Ces programmes permettent de vérifier l'exactitude des prévisions d'une évaluation environnementale et de déterminer si les mesures d'atténuation fonctionnent comme prévu.

Le projet de loi prévoit également de nouveaux pouvoirs permettant au ministre de l'Environnement de lancer des évaluations environnementales régionales en collaboration avec d'autres instances. La loi actuelle se limite à une orientation visant un projet unique. Il est difficile d'évaluer les effets cumulatifs de plusieurs projets et activités dans une région qui connaît un développement important. L'exigence d'évaluer les effets cumulatifs est néanmoins reportée de la loi actuelle. Elle constitue un élément essentiel du régime fédéral.

[Français]

Vous devez vous souvenir du témoignage que M. Pierre Gratton de l'Association minière du Canada a présenté récemment devant ce comité. Il a déclaré au sujet des études régionales :

C'était une recommandation particulière que nous avions faite et je pense que beaucoup de personnes ont négligé son importance pour l'amélioration de l'environnement. Je crois que les groupes environnementaux et le secteur de l'industrie demandent ce type de mesure depuis des années et c'est ce qu'offre cette législation.

[Traduction]

Les résultats de ces études peuvent s'ajouter à l'évaluation de projets particuliers. Les gains sont doubles : premièrement, nous comprendrons mieux l'écosystème en question. Cela se traduira par de meilleures évaluations environnementales et de meilleures approches en matière d'atténuation. Deuxièmement, en effectuant la majeure partie des travaux scientifiques initiaux, les études régionales permettront de rationaliser les exigences propres aux projets.

Encore une fois, la conclusion est claire : nous proposons des changements qui appuient la gérance environnementale et les quatre piliers du développement responsable des ressources.

Les études régionales donnent aussi aux peuples autochtones une occasion de faire connaître leurs préoccupations, guidant ainsi les consultations ultérieures concernant des projets particuliers. Le processus d'évaluation environnementale est particulièrement placé pour aider le gouvernement du Canada à respecter son obligation constitutionnelle de consulter les groupes autochtones, et, s'il y a lieu, de satisfaire à leurs demandes, lorsque leurs droits pourraient être touchés négativement par un projet proposé.

L'évaluation environnementale commence tôt dans la planification d'un projet, lorsqu'il est encore possible d'apporter des modifications au modèle, et ce, dans le but de réduire les répercussions. Le processus comprend aussi des étapes logiques visant à obtenir directement les commentaires des groupes autochtones, de prendre connaissance de leurs préoccupations et de formuler des moyens d'éviter ou de réduire les effets négatifs. C'est pourquoi le gouvernement continuera, dans la mesure du possible, d'intégrer les consultations auprès des Autochtones dans le processus d'évaluation environnementale.

Le budget de 2012 prévoit des fonds de 6,8 millions de dollars par année à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale afin d'appuyer les consultations auprès des peuples autochtones. Une somme de 5,3 millions de dollars représente un renouvellement du financement octroyé pour la première fois en 2007. Elle est complétée par de nouveaux fonds de l'ordre de 1,5 million de dollars. Le personnel de l'agence et les comités de révision consultent les peuples autochtones et continueront de les consulter directement dans leur collectivité.

Dans le cadre du plan du développement responsable des ressources, le gouvernement propose aussi certains changements à la Loi sur les espèces en péril et aux dispositions sur l'immersion en mer de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999). Ces changements permettront au gouvernement de prendre un règlement qui établit des échéanciers contraignants pour les décisions relatives à la délivrance de permis.

Dans le but d'améliorer l'efficacité, les modifications au processus de délivrance de permis pour l'immersion en mer permettront le renouvellement de permis pour les projets réguliers à faible risque. Elles changeront les exigences afin de permettre la publication dans le site Web du registre de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement plutôt que dans la Gazette du Canada.

Les modifications à la Loi sur les espèces en péril prévoient des permis de plus longue durée et rendent les conditions des permis exécutoires. Ces changements viendront appuyer la protection efficace des espèces inscrites tout en permettant au gouvernement d'émettre des autorisations pour une période qui se prête mieux aux grands projets.

Pour terminer, je souhaite aux membres du comité une bonne poursuite de cette étude importante. Merci de votre attention.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.

J'ai mentionné précédemment que nous serions rejoints par d'autres sénateurs. Eh bien, là à ma gauche et donc à votre droite, se trouve le sénateur Paul Massicotte, du Québec. Et au bout de la rangée se trouve le sénateur Bert Brown de l'Alberta, et deux places plus loin se trouve l'honorable sénateur Asha Seth.

Madame le sénateur, c'est là votre première expérience, et je vous souhaite tout particulièrement la bienvenue. Vous êtes ici à titre de remplaçante de Mme le sénateur Frum, et nous sommes très heureux de vous avoir parmi nous. J'espère que vous trouverez les délibérations intéressantes.

Je signale enfin la présence, à côté du sénateur Lang, de Mme le sénateur Seidman, du Québec, ainsi que de notre experte du comité en matière de pêches, Mme le sénateur Janis Johnson du Manitoba.

Comme vous le voyez, monsieur le ministre Ashfield, vous avez à qui parler. Je vous donne la parole.

L'hon. Keith Ashfield, C.P., député, ministre des Pêches et des Océans : Mesdames et messieurs les sénateurs, bonsoir. Je suis heureux d'être des vôtres aujourd'hui pour tenter de vous décrire les modifications qui ont été apportées à la Loi sur les pêches dans notre projet de loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité à long terme.

Je dois dire que je m'enorgueillis du travail qui a été accompli dans le cadre de ce projet de loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité à long terme, afin de permettre au gouvernement de mieux cibler ses efforts visant à rendre plus efficace notre contribution à la croissance économique et à la création d'emplois, dans une optique durable, responsable et orientée vers les générations futures. Il est essentiel, dans le cadre économique actuel, de veiller à ce que les immenses ressources naturelles du Canada, y compris les pêches, soient bien gérées. Telle est précisément notre intention en ce qui a trait aux pêches.

Les amendements proposés à la Loi sur les pêches ont un triple effet en ce qui a trait à la protection de ces dernières au Canada : en premier lieu, ils focalisent nos efforts de protection là où ils sont nécessaires; en deuxième lieu, ils améliorent la clarté et l'efficacité des règlements; troisièmement et enfin, ils promeuvent les partenariats avec les provinces, les territoires, les groupements autochtones, les organisations de conservation et d'autres entités qui se préoccupent de la protection des pêches.

Il convient de souligner que les amendements proposés ne modifient pas la façon dont l'article 36, qui concerne la pollution, est appliqué par mes collègues d'Environnement Canada. En fait, je parlerai principalement des dispositions qui s'appliquent à la protection des pêches mais ne concernent pas la pollution.

Je dirai tout d'abord que ces amendements nous permettent de concentrer nos efforts sur la protection des pêches commerciales, récréatives et autochtones. En d'autres termes, nous nous écartons du régime actuel qui applique un traitement uniforme à toutes les espèces piscicoles et à tous leurs habitats. Ainsi, aux termes de la Loi sur les pêches dans sa forme actuelle, un fossé d'irrigation qui contient des poissons et qui traverse un champ d'une exploitation agricole est assujetti au même niveau de protection qu'une région sensible dédiée à l'élevage du saumon dans le fleuve Fraser. La loi s'applique sans tenir compte de l'ampleur de l'impact, qu'il s'agisse d'un ponton dans un lac, d'un pont à portée libre ou encore d'un chantier de grande envergure à vocation industrielle ou de la mise en développement de ressources. Cette approche n'est ni logique ni durable.

Les Canadiens attendent de nous que nous concentrions nos efforts sur la protection des pêches. C'est pourquoi les changements proposés nous permettront de mettre l'accent sur les pêches commerciales, récréatives et autochtones, afin de veiller à ce qu'elles soient protégées contre tout un éventail de menaces, y compris les impacts sur l'habitat des poissons ainsi que leur destruction non autorisée, mais aussi la protection contre les espèces aquatiques envahissantes — menace récente et qui n'a pas été prise en compte lors des derniers amendements à la Loi sur les pêches.

La section de la Loi sur les pêches consacrée aux objectifs en matière de protection des poissons précise que les dispositions adoptées devront être appliquées afin d'appuyer la durabilité et le maintien de la productivité des pêches commerciales, récréatives et autochtones. Nous améliorons également les instruments visant à assurer la protection et la conformité. Les changements proposés prévoient une harmonisation avec le régime des sanctions de la Loi sur le contrôle d'application de lois environnementales. Ces amendements faciliteront la mise en œuvre des conditions régissant l'octroi de permis. Le non-respect des conditions d'octroi de permis sera considéré comme un délit, et nous pourrons ainsi veiller à ce que les mesures d'atténuation, de compensation et de surveillance soient appliquées. Le changement permet d'identifier des zones importantes au plan écologique. Il convient de renforcer la protection de ces zones afin que les périmètres importants du point de vue des pêches soient clairement délimités et qu'une planification adéquate leur soit appliquée de manière à les protéger.

Notre gouvernement s'est fixé un autre objectif, à savoir fournir un cadre réglementaire, et nous énoncerons clairement les modalités d'application ces nouvelles dispositions. Nous avons prévu un pouvoir réglementaire en vue de l'édiction de normes en matière de protection des pêches; je pense en particulier aux débits minimums permettant le passage des poissons, ainsi qu'aux périodes de l'année durant lesquelles les chantiers sont interdits afin de protéger le frai ou les migrations.

Les Canadiens attendent de nous que nous énoncions clairement les règles, leur portée et leurs modalités d'application. Parallèlement, nous allons élaborer une réglementation précisant, à l'intention des promoteurs, les informations qu'ils devront nous fournir sur leurs projets et le temps qui nous sera nécessaire pour examiner leurs dossiers et délivrer des permis.

Les changements proposés instaureront de nouveaux mécanismes pour une meilleure coordination des activités avec les provinces et les territoires, de manière à éviter les chevauchements et les doubles emplois. Si un gouvernement provincial ou territorial dispose déjà de normes qui satisfont aux normes fédérales ou leur sont supérieures, nous sommes prêts à nous retirer et à laisser s'appliquer le processus existant à leur niveau. Nous pouvons également déléguer l'autorité décisionnaire, sous réserve que soient en place les dispositions appropriées ainsi que les mécanismes d'obligation redditionnelle.

Nous nous attacherons à établir la transparence, la clarté et l'efficacité avec le même sérieux que pour la protection des pêches commerciales, récréatives et autochtones. Les Canadiens veulent savoir en quoi consistent les règles, comment elles s'appliquent, ce que l'on attend d'eux lorsqu'il s'agit de promoteurs et combien de temps il faudra pour prendre les décisions. Les amendements proposés vont précisément dans ce sens.

L'une des initiatives qui a le plus ma faveur est celle des partenariats catalyseurs. Nous nous appuierons sur les partenariats existants avec les provinces et les territoires pour éviter les chevauchements et les doubles emplois, mais j'ai également à l'esprit les partenariats catalyseurs avec les associations de conservation et les autres entités qui ont à cœur la protection des pêches. Certes, nous avons d'ores et déjà des partenariats solides avec des groupements qui représentent des milliers et des milliers de Canadiens qui se dédient, avec nous, à la protection des pêches du pays; cependant, nous savons que nous pouvons encore améliorer ces partenariats, et c'est pourquoi les amendements proposés offrent la possibilité de conclure des accords avec des tierces parties afin d'entreprendre des projets et des initiatives sous-tendant les objectifs de conservation de la loi.

Qu'il s'agisse des associations de conservation ou de pêcheurs à la ligne ou encore de pêche récréative de façon plus générale, les intervenants ont été nombreux à nous décrire le travail qu'ils accomplissent afin de protéger les pêches du Canada, de même que les approches innovantes qu'ils appliquent ou qu'ils développent à cette fin. C'est une expérience extrêmement stimulante que d'interagir avec des groupements qui démontrent un tel engagement et aussi une telle compétence de terrain. Je dois dire que leurs réseaux sont tout à fait remarquables et que nous avons toutes les raisons de passer par leur entremise pour atteindre le public en général.

En résumé, je dirai que les changements apportés à la Loi sur les pêches présentent trois volets : la priorité accordée aux impacts importants sur les pêches commerciales, récréatives et autochtones du Canada; les instruments promouvant la clarté et l'efficacité au plan réglementaire; enfin, les instruments visant à dynamiser les partenariats avec les parties prenantes en matière de protection des pêches. Je dois dire que les perspectives ouvertes par ces propositions d'amendements, qui nous permettront de concentrer notre action là où elle sera plus efficace, me semblent extrêmement prometteuses car elles nous permettront de nous dégager des actions par trop localisées et d'œuvrer davantage de concert avec les Canadiens qui sont déjà engagés dans ce travail important.

Je suis convaincu que, grâce à ces changements, nous nous serons dotés des orientations, des instruments et des partenariats nécessaires pour veiller à ce que les pêches commerciales, récréatives et autochtones du Canada continuent d'exister et de profiter aux générations à venir.

Le président : Je vous remercie tous les trois pour ces excellentes synthèses de vos responsabilités respectives en matière de développement responsable des ressources.

Je pense qu'il n'aura échappé à aucun sénateur que vous avez dit, chacun à votre façon, combien le statu quo serait inacceptable et incohérent. Mais comment en sommes-nous arrivés là?

M. Oliver : Comme je l'ai dit dans mes propos liminaires, c'est le résultat d'une évolution qui s'est faite en sourdine. Il y a toutes sortes de pouvoirs, répartis à plusieurs niveaux. Par exemple, au niveau fédéral, il existait toute une série d'organisations créées au fil du temps, et puis différents ministères se sont trouvés impliqués, mais peut-être que personne ne prêtait attention au tableau d'ensemble et à l'effet cumulatif. Et je rappelle qu'il existe des interactions fédérales-provinciales, et puis voilà, un beau jour, le point de non-retour avait été dépassé et nous avions perdu le contrôle de la situation.

J'ai moi-même l'expérience de différents types de réglementation, la réglementation des titres, par exemple, et je peux vous dire qu'il est infiniment difficile d'améliorer une réglementation. En fait, les autorités réglementaires ne sont jamais porteuses de changement fondamental; c'est pourquoi nous avons décidé qu'il était temps d'intervenir, d'autant que les enjeux étaient énormes, compte tenu de notre immense patrimoine de ressources naturelles. Nous avons la chance d'avoir un pays riche en ressources et qui nous permet d'assurer la sécurité et la prospérité des Canadiens, et cela pour bien des générations. C'est pourquoi nous ne pouvons pas nous laisser paralyser par les pesanteurs bureaucratiques qui retarderaient, voire empêcheraient indéfiniment la création de centaines de milliers d'emplois. Les enjeux de la partie sont trop importants pour le Canada.

M. Kent : En 2007, le gouvernement a pris la mesure des défis à relever et il a amorcé le dialogue avec les provinces et avec l'industrie pour en débattre.

Vous vous souviendrez que lors de ma dernière comparution, je vous ai rappelé qu'en juin 2010 des améliorations ont été apportées à la LCEE afin de s'attaquer à certains problèmes de chevauchements et de doubles emplois. Cependant, il apparaissait clairement qu'il fallait aller plus loin dans la refonte du processus liant l'Office national de l'énergie à des projets de grande envergure tels que les pipelines. C'est pourquoi nous avons encore approfondi les consultations avec nos différents homologues provinciaux pour nous pencher sur les échéanciers établis.

Lorsqu'on dit évaluation achevée en temps opportun, on ne dit pas forcément évaluation bâclée. Cela a d'ailleurs été largement reconnu, même parmi les nombreuses ONG écologiques, et l'idée a été admise que l'on pouvait procéder à une évaluation et à un examen rigoureux tout en respectant les temps impartis.

Le président : On ne peut pas dire que dans ce cas-là, c'est le poisson qui cachait la forêt...

M. Ashfield : Même le sénateur Baker est dépassé, lui qui excelle dans ce domaine.

Le président : Privilège présidentiel, dirons-nous.

M. Ashfield : Comme vous le savez, je suis aux prises avec une loi qui a été rédigée en 1868, si bien que nous sommes face à une accumulation de strates de politiques et de règlements qui n'ont cessé d'évoluer au cours des années, ce qui ne simplifie pas les choses. La dernière modification de fond apportée à la loi remonte à 1977.

Les temps ont changé. Je pense que peu à peu, nous avons évolué à partir de notre mandat de base, à savoir les pêches, pour assumer le soutien à apporter au secteur afin qu'il réponde aux besoins des générations futures.

C'est justement ce que les amendements nous permettront de faire, et je suis prêt à me consacrer à ce travail pendant le temps nécessaire pour qu'il en soit ainsi.

Le sénateur Mitchell : Merci, messieurs, de comparaître devant nous aujourd'hui. Lorsque je vous écoute, et que je vous entends proclamer de façon collective — parce qu'en effet, vous formez une équipe, c'est une chose indéniable lorsqu'on vous entend présenter votre message —, lorsque, donc, je vous entends proclamer votre engagement total envers l'environnement, je dois en même temps constater que vous avez éliminé la table ronde sur le Nord, que vous avez porté la hache dans tous les programmes liés au changement climatique et dans tous les budgets des stations de recherche dans ce domaine, que vous vous en êtes pris aux ONG écologiques et que vous avez répudié le Protocole de Kyoto. Et ce ne sont là que quelques exemples.

Je vous écoute et je ne peux pas m'empêcher de penser au sketch du Monty Python dans lequel l'acheteur ramène le perroquet acheté parce qu'il est mort; il ne cesse de dire : « Ce perroquet est mort », et le préposé aux relations avec la clientèle, lui, ne cesse de lui répondre : « Non, non, le perroquet n'est pas mort, il dort tout simplement mais il n'est pas mort. »

Eh bien je suis convaincu pour ma part que tous nos interlocuteurs internationaux, et bon nombre de Canadiens, vous observent et disent : « Bon, pour ce qui est de la gérance de l'environnement par ce gouvernement, le perroquet est mort et bien mort. »

Alors comment pouvez-vous prétendre renforcer la responsabilité civile, ce que j'appelle la responsabilité sociale mais aussi la crédibilité dont vous avez besoin à l'échelle mondiale et à l'échelon du pays pour obtenir l'adhésion à ces projets et pour vendre nos produits, alors même que les gens vous entendent proclamer que ce qui est noir est blanc, que le jour c'est la nuit, sans oublier que le perroquet n'est pas mort? Comment pensez-vous réussir à faire croire à qui que ce soit que vous entendez protéger l'environnement?

Le président : La question est posée.

M. Kent : Je me ferai un plaisir de répondre et de désamorcer la campagne de propagande et de désinformation. S'agissant de la table ronde nationale, le fait est qu'après avoir accompli sa tâche pendant un quart de siècle, son heure est arrivée, d'autant qu'il y a toute une pléiade d'autres organismes, au niveau universitaire et dans le secteur privé, qui se penchent sur l'interaction entre l'économie et l'environnement.

Voici un an, nous avons également mis fin aux activités du Réseau canadien de l'environnement, qui avait lui aussi, en son temps, rempli utilement sa fonction. Cependant, compte tenu de l'évolution technologique, de l'avènement de l'Internet et de l'amélioration du contexte dans lequel se déroulent les relations communautaires et le dialogue avec les instances gouvernementales, il n'avait tout simplement plus de raison d'être.

Nous n'avons fermé aucune installation de recherche dans l'Arctique. Nous continuons à héberger, à Eureka, le Laboratoire de recherche atmosphérique sur l'environnement polaire; mais il faut ajouter que, pour l'instant, aucun organisme scientifique n'a réussi à obtenir de subventions permettant de poursuivre cette étude. Nous allons continuer de dépenser, chaque année, un quart de million de dollars afin que les installations puissent accueillir la recherche. Je signale d'ailleurs au passage que c'est nous qui avons rouvert ces installations, alors que nos prédécesseurs libéraux les avaient mises en veilleuse en 2002. Vous voyez donc que nous sommes prêts à agir parce que nous pensons que la recherche doit continuer. Nous accordons des financements à travers le CRSNG pour ce qui est d'Environnement Canada, mais la recherche se fait dans toutes les instances gouvernementales; s'agissant du domaine de l'évaluation environnementale, nous avons les moyens de nous montrer beaucoup plus rigoureux. Ainsi, nous pouvons beaucoup mieux respecter les échéanciers et agir de façon plus efficace en actualisant et en renforçant les dispositions législatives. C'est essentiellement ce que nous faisons à travers la LCEE, l'ONE et la Commission canadienne de sûreté nucléaire, mais aussi à travers la Loi sur les pêches.

Le sénateur Mitchell : Lorsque vous taxez de façon très agressive les ONG écologiques, notamment celles d'envergure internationale, de « blanchiment d'argent » — et ce sont là des termes que vous souhaiterez peut-être retirer, ou peut-être pas —, quel message pensez-vous que cela adresse à certains éléments qui, aux États-Unis, cherchent à démontrer à toute force que le Canada n'est pas crédible pour ce qui est de la protection de l'environnement? Nous ne sommes pas en mesure de faire état de réductions des émissions qui provoquent un changement climatique. Et ces personnes, aux États-Unis, vont utiliser vos déclarations comme prétexte classique pour justifier les retraits, les obstacles à la responsabilité sociale indispensable à la mise sur pied d'un projet comme Keystone. Alors pouvez-vous m'expliquer ce qui se passe?

M. Kent : Je commencerai par dire que nous n'avons pas fait de critique généralisée des organismes caritatifs ou des ONG écologiques. J'ai déclaré de façon très spécifique qu'il existe sans aucun doute certains organismes étrangers qui ciblent leurs activités de levée de fonds et de pénétration en utilisant comme vecteurs des organismes canadiens bénéficiant, au pays, du statut d'organisations caritatives, afin de faire obstacle au processus d'évaluation environnementale, au lieu de participer de façon constructive.

Cela dit, notre gouvernement reconnaît volontiers qu'il existe un grand nombre d'organismes qui contribuent de façon constructive à la protection et à la conservation de l'environnement au Canada, comme Canards Illimités, et ils ne sont pas les seuls; et la contribution des ONG se chiffre à plusieurs millions de dollars par an.

Le sénateur Mitchell : Je pense à Tides Canada.

M. Kent : Je ne suis pas sûr de vouloir inscrire cette organisation dans le nombre. Je dirais cependant qu'il y a certaines organisations aux États-Unis et au Canada qui ont été mises au jour par suite des investigations du Sénat, d'autres organismes et de certains éléments des médias, et qui ont modifié leurs sites Web, leurs comportements et même leurs modes opératoires précisément parce qu'elles se sont trouvées sous le feu des projecteurs et soupçonnées d'agissements irréguliers, non seulement par l'intermédiaire d'entités canadiennes jouissant du statut d'organisations charitables, mais également par le biais d'organismes américains, qu'il s'agisse de philanthropes égarés ou d'autres organisations; et je rappelle que, dans le passé, ils ont déclaré sans se gêner que leur objectif, comme l'a dit si éloquemment le premier ministre, est de transformer le Canada, notre pays si riche en ressources naturelles, en une sorte d'immense parc national; or, notre gouvernement s'oppose à ces agissements.

M. Oliver : Toute révérence gardée, monsieur le sénateur, je ne crois pas que l'exagération ou la diffusion d'informations erronées contribue à la bonne réputation du Canada ou nous aide à mieux vendre nos ressources à l'échelle internationale. Mes collègues et moi-même n'avons pas attaqué tous les organismes environnementaux sans distinction. Cependant, certains d'entre eux sont opposés à quelque forme de développement des ressources que ce soit. Certes, ils ne le diront jamais publiquement, mais le fait est qu'ils s'opposent à toute mise en valeur des ressources énergétiques, et on s'en aperçoit chaque fois que les projets de développement des ressources sont annoncés au public. Parce que cela ne s'arrête pas au projet de Keystone, ou au projet de pipeline Northern Gateway ou à celui de Kinder Morgan, ou au renversement par Enbridge du segment entre Sarnia et Westover, ou encore à la possibilité de faire passer le câble à travers le Bas-Churchill, et cetera. Chacun de ces projets, quel qu'il soit, fait naître l'opposition d'un certain nombre de ces organismes, et il faut bien en conclure qu'ils sont tout simplement opposés au développement des ressources de notre pays, que leur motivation soit idéologique, commerciale ou politique.

Nous, nous avons engagé un dialogue sur une vaste échelle avec les Canadiens afin de leur expliquer quels sont les enjeux, et aussi pourquoi la voie à suivre pour notre pays, c'est le développement responsable des ressources.

Le sénateur Lang : Je voudrais aborder la question sous un angle différent de celui choisi par mon collègue le sénateur Mitchell. Pour moi, et je l'affirme, le rouge c'est rouge, le noir c'est noir, et nous pouvons nous réjouir que le nombre des ours polaires de l'Arctique soit en augmentation, pas en diminution. Je crois donc que l'environnement nous envoie un certain nombre de signaux extrêmement positifs et que nous, en tant que Canadiens, devrions considérer que notre verre est à moitié plein plutôt qu'à moitié vide.

C'est pourquoi, selon moi, les Canadiens devraient poser au gouvernement cette question très importante : Que se passera-t-il si nous ne faisons rien et que nous laissons perdurer le statu quo? Monsieur Oliver, compte tenu de la répartition des ressources dans le monde et de la façon dont les choses évoluent, quelles seraient les conséquences d'un maintien du statu quo?

M. Oliver : Nous risquons tout simplement de laisser nos ressources se déliter et de dilapider notre patrimoine et notre héritage. Pour prendre l'exemple des sables bitumineux, nous y avons un gisement estimé à 174 milliards de barils, soit la troisième réserve au monde. Compte tenu des améliorations technologiques, qui, selon moi, contribueront à augmenter ces réserves, le Canada pourrait devenir le premier détenteur de réserves prouvées de pétrole au monde, et il ne s'agit là que d'une ressource naturelle. Je rappelle qu'il y a également les ressources forestières et les ressources minières — et, pour ces dernières, nous sommes un géant.

Si l'on fait un bilan général du pays, on voit qu'en Colombie-Britannique, nous avons les ressources forestières et le gaz naturel; bien entendu, en Alberta, ce sont le pétrole et le gaz; et puis nous avons parmi les premières réserves mondiales de potasse et d'uranium en Saskatchewan; en Ontario, le secteur Ring of Fire, le Plan Nord au Québec, et l'énergie hydroélectrique au Canada atlantique. Chacun de ces projets, pris individuellement, bénéficie non seulement à sa propre région, mais également à l'ensemble. Rien qu'avec les sables bitumineux, nous pouvons compter sur 3 billions de dollars d'activité économique, mais si l'on examine l'ensemble du tableau, on voit qu'il s'agit de 4 billions, avec création de plus d'un million d'emplois et, pour les gouvernements, des milliards de dollars de recettes provenant des impôts et des redevances et permettant d'alimenter des programmes sociaux d'importance cruciale comme le logement, les soins médicaux, l'éducation et les pensions de retraite.

En dépit du contexte financier international extrêmement instable dans lequel nous nous trouvons, notre pays se voit offrir l'occasion de progresser, mais à condition de tirer parti de nos atouts, plutôt que de nous contenter de regarder nos concurrents, les Australiens, les Iraniens, les Iraquiens et les Saoudiens, prendre l'avantage et nous regarder, nous, en se demandant pourquoi nous nous laissons distancer ainsi. Je pense que tourner le dos à nos ressources, c'est nous condamner à une tragédie d'envergure nationale.

Le sénateur Lang : N'oubliez pas d'ajouter à votre liste le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest ainsi que le Nunavut pour les ressources minières.

M. Oliver : En effet, nous commençons à peine à prendre conscience de l'immense potentiel que contient le Nord du pays, mais nous ne sommes qu'au début de notre apprentissage, et nous savons bien que ce potentiel offre la possibilité de transformer une fois pour toutes les communautés qui ont souffert d'un chômage élevé en communautés prospères, génératrices d'emplois, pour l'ensemble de notre vaste pays.

Le sénateur Lang : Je suis qualifié pour parler du Yukon et je peux dire que la situation y est infiniment meilleure aujourd'hui qu'il y a une dizaine d'années, lorsque nous n'avions pas de mines en exploitation. Aujourd'hui, trois mines ont été mises en production et plusieurs autres seront bientôt ouvertes, sans parler des autres secteurs de l'économie.

On peut dire, je crois, qu'il y a consensus dans l'ensemble du pays entre les provinces et les territoires pour ce qui est d'adopter les modifications recommandées dans le projet de loi et que nous étudions aujourd'hui. Cependant, j'ai entendu exprimer une préoccupation, et peut-être pourriez-vous me rassurer. Étant donné que l'on parle d'appliquer le principe d'équivalence ou de substitution entre les provinces et les territoires d'une part et le gouvernement fédéral d'autre part dans le cas des pêches et même pour l'adoption de certaines réglementations, pouvez-vous nous donner l'assurance qu'à long terme, cela ne sera pas l'occasion, pour le gouvernement fédéral, de se défaire de ses responsabilités en les confiant aux provinces et aux territoires, avec le surcroît de coût que cela entraînera?

M. Kent : Je puis vous communiquer le point de vue d'Environnement Canada en ce qui a trait à la LCEE. Comme vous l'avez dit, la nouvelle loi prévoit l'application du principe de substitution et d'équivalence. Le principe de substitution permettra à une province ou à un territoire d'effectuer une évaluation environnementale, mais dans ce cas la décision ultime serait prise par le ministre fédéral de l'Environnement.

S'agissant de l'équivalence, il pourrait en effet y avoir transfert dans certaines circonstances. Cependant, nous avons tenu des consultations avec les provinces et l'expérience nous garantit qu'elles disposent des compétences et des capacités permettant de conduire, projet par projet, tant l'évaluation environnementale que le processus décisionnel conforme à la LCEE 2012 ou aux dispositions du projet de loi C-38. En d'autres termes, la loi fédérale conserve sa préséance, mais dans certains cas, elle permet aux provinces d'effectuer les évaluations en vertu du principe de substitution ou d'équivalence.

M. Oliver : Permettez-moi un complément d'information, s'agissant de l'ONE, étant donné qu'il s'agit de projets interprovinciaux relevant du ressort fédéral, représenté par l'ONE, c'est ce dernier qui restera chef de file et le principe de substitution ne s'appliquera pas.

Le président : Nous allons devoir aller de l'avant, même si je sais que les ministres nous accorderont un petit supplément de présence.

Le sénateur Baker : Messieurs les ministres, ma question, ou mes questions, selon le degré de sollicitude de notre président, porteront sur un seul et même sujet, qui occupe certainement l'esprit de notre président, juriste estimé de tous.

L'Association minière du Canada et l'Association de prospecteurs et développeurs du Canada, qui ont comparu devant nous ainsi que vous le confirmera — n'est-ce pas? — notre président, étaient préoccupées par la grande question que représente l'interprétation des amendements apportés par ce projet de loi aux articles 35 et 36 de la Loi sur les pêches, dans leurs dispositions concernant l'exploitation minière.

Monsieur le président, auriez-vous l'amabilité de confirmer que c'était bien là le souci de ces associations?

Le président : Je le confirme.

Le sénateur Baker : Vous modifiez donc l'article 35, en appliquant la gravité de l'infraction non plus à l'« habitat du poisson », mais au « poisson ». Vous modifiez le libellé, qui devient « dommages sérieux aux poissons » et vous éliminez le mot « habitat ». Cependant, à l'article 36, vous gardez le mot « poisson ». Donc, à l'article 35, vous restreignez l'application aux pêches commerciales, mais à l'article 36, la disposition s'applique au « poisson ».

Pour l'Association minière du Canada, cela ne semble pas poser problème. Ils comprennent que, s'agissant de l'article 35, il vous faut être spécifiques quant à l'application de la disposition, mais il demeure qu'à l'article 36, le risque de poursuites existe de toute façon pour la même infraction. Ils nous ont donc demandé si les amendements apportés à l'article 35 s'appliquent à l'article 36. Voilà, j'ai essayé d'être aussi simple que possible.

Le président : C'est bien ainsi que vous l'entendez, n'est-ce pas?

M. Ashfield : L'expression « habitat du poisson » se trouve encore dans la loi.

Le sénateur Baker : Oui, mais le paragraphe 35(1) a été modifié.

M. Ashfield : La notion d'« habitat du poisson » est définie dans la loi, il s'agit des frayères et de tout autre secteur, y compris les pépinières, les zones d'élevage, d'alimentation et de migration, dont le poisson dépend directement ou indirectement pour ses différents cycles de vie; vous voyez donc que la notion d'« habitat du poisson » n'a pas du tout été éliminée du texte de loi.

Le sénateur Baker : Sans doute, mais le paragraphe 35(1) a été modifié.

M. Ashfield : Pour revenir aux préoccupations des grands développeurs ou promoteurs, il faut bien que nous nous assurions la protection du poisson. Tel est le mandat du ministère des Pêches et nous nous en acquittons selon différentes modalités.

Vous avez évoqué, entre autres choses, le principe d'équivalence. Il se trouve que nous avons, mes amis d'Environnement Canada et d'Énergie Canada et moi-même, la possibilité d'affronter ces questions de façon efficace.

M. Kent : Je voudrais ajouter que l'article 36 contient une série de dispositions, dans la forme que lui donne le projet de loi. Cependant, l'interdiction générale contenue dans l'article 36 concerne également le dépôt de substances délétères dans les eaux habitées par des poissons. Cependant, un peu plus loin, on permet le déversement de substances délétères sous certaines conditions et dans certaines situations. L'article 36 demeure donc tel quel dans la LCEE.

Le sénateur Baker : Je conclurai sur l'observation suivante : selon les termes des articles 35 et 36 de la loi actuelle, le ministre peut adopter des règlements qui influent sur l'application des articles en question. Or, en dépit des critiques qui vous ont été adressées par les gens qui vous reprochent de procéder par voie de règlement, la situation demeure inchangée, puisque les articles 35 et 36 vous laissent la latitude d'édicter des règlements.

Comme je vous le disais, l'association minière a des préoccupations à ce sujet. Puis-je vous demander de bien vouloir prendre connaissance de la déposition de l'association minière devant notre comité et de nous dire, par écrit, si leurs préoccupations vous semblent justifiées? Personne ne dit que vous êtes en train d'assouplir les règlements, en fait, vous ne les assouplissez pas, mais vous les rendez un peu plus compliqués dans le nouvel article 36, croyez-moi.

M. Kent : Nous en avons rendu le libellé plus efficace.

Le sénateur Baker : Efficace, vous l'avez dit. Pourriez-vous nous donner une réponse écrite? C'est une demande que nous vous présentons et, en cas de refus, nous serons contraints de signaler au Parlement que vous ne vous êtes pas montré coopératif.

M. Kent : Comptez sur moi. Afin de compléter cette réflexion, je dirai qu'à l'époque, on ne se préoccupait pas de l'exploitation des gisements de minerais non métalliques. Par exemple, il n'y avait pas de mines de diamant au Canada. L'Association minière du Canada et le secteur en général nous ont demandé d'actualiser les dispositions de la loi, et notamment d'adopter de nouveaux règlements aux gisements miniers métalliques et non métalliques, notamment en rapport avec les poissons et leur habitat.

Le sénateur Baker : Nous nous sommes compris.

Le président : Sénateur Baker, vous parvenez toujours à vous entendre avec la présidence. Je rappelle que les témoins de l'Association minière du Canada ont également déclaré qu'ils travaillaient, en ce moment même et dans une excellente atmosphère de coopération dont ils se félicitent, avec les représentants de ces ministères pour résoudre la question de l'ambiguïté posée par les articles 35 et 36.

Le sénateur Sibbeston : Je commencerai par remercier les trois ministres ici présents de la reconnaissance apportée aux peuples autochtones et au rôle important qu'ils jouent dans l'ensemble de ce processus.

L'un des avantages de ces commissions environnementales ainsi que des offices nationaux traitant de l'énergie et d'autres organismes, c'est qu'ils offrent depuis longtemps une tribune aux populations autochtones afin qu'elles puissent exprimer leur position concernant les terres, les ressources en eau, et cetera. On peut donc dire que nous avons, en tant que pays, beaucoup progressé pour ce qui est de tenir compte de leurs besoins et de la place qui leur est faite autour de la table.

Je puis attester que le processus fonctionne de façon effective dans les Territoires du Nord-Ouest, où j'habite, à Fort Simpson plus précisément. Il y a, à quelque 150 kilomètres de Fort Simpson, une petite mine d'où l'on espère pouvoir extraire du zinc. Cela fait six ou sept ans que le processus a été amorcé, et la mine ne tourne pas encore, après tout ce temps-là.

Cela dit, alors qu'initialement les communautés autochtones étaient toutes opposées à cette mise en exploitation, aujourd'hui, grâce à l'attitude de la société qui coopère avec eux et tient compte de leurs préoccupations, leurs inquiétudes pour le milieu ambiant sont pratiquement dissipées, et ils peuvent appuyer aujourd'hui le projet.

Il s'agit là de progrès importants, qui sont à porter au crédit de notre pays car, partout, au lieu de piétiner les droits de nos populations autochtones ou de les tenir à l'écart, on leur donne voix au chapitre.

Je crois que fondamentalement, on s'efforce de favoriser la participation des Autochtones et de les faire bénéficier des actions entreprises. Si l'on prend comme exemple certains des chantiers du Nord, les mines de diamant ou les gisements de pétrole à Fort McMurray, les choses vont sans aucun doute dans ce sens.

Je suis bien entendu au courant du projet Northern Gateway et de la tentative de construction d'un pipeline reliant l'Alberta au littoral de la Colombie-Britannique. Certaines populations autochtones y sont favorables, d'autres, qui résident dans les zones côtières et qui risquent d'être affectées par d'éventuels déversements, y sont opposées.

J'aimerais vous demander comment, selon vous, nous pouvons nous y prendre en tant que pays pour obtenir l'approbation d'un tel projet, compte tenu de la forte opposition qu'il suscite actuellement?

M. Kent : Permettez-moi de commencer, et je suis sûr que mes collègues interviendront eux aussi. Au cours des dernières années, nous avons pris conscience du fait que la Constitution et la loi doivent être respectées et que nous devons amorcer les consultations de façon beaucoup plus précoce, je parle non seulement des consultations menées par le gouvernement avec les Premières nations, mais également de celles qui incombent au secteur privé. Lors des pourparlers que j'ai eus récemment et au cours des quelques derniers mois avec l'Assemblée des Premières Nations et avec le grand chef Atleo, nous avons débattu d'un concept qu'il a été le premier à nous présenter, à savoir la création d'un collège virtuel chargé de colliger les expériences, positives mais aussi négatives, qu'ont eues les Premières nations dans le domaine des projets de développement des ressources, afin d'échanger ces informations entre les Premières nations.

À titre d'exemple, à mesure que progresse le secteur Ring of Fire en Ontario, on s'inquiète beaucoup, dans certains milieux, des modalités de mise en exploitation des ressources. Pour ma part, je conviens avec le grand chef que le processus consultatif — y compris, d'ailleurs, le partage des expériences, bonnes ou mauvaises — encouragera le processus d'évaluation et permettra d'affronter les faits et la réalité, plutôt que de s'abandonner à la désinformation et à la propagation de la peur, qui risque de faire dérailler le processus.

Le sénateur Sibbeston : Le ministre Oliver a-t-il quelque chose à dire sur ce sujet important?

M. Oliver : Bien entendu, et je confirme que nous prenons nos obligations constitutionnelles très au sérieux. La loi concernant le développement responsable des ressources vise à renforcer, à approfondir et à rendre plus efficace le processus consultatif spécifiquement élaboré à cette fin.

Je ne peux pas me prononcer sur le projet Northern Gateway, car il fait actuellement l'objet d'un examen réglementaire. Vous n'ignorez pas, cependant, que notre gouvernement y voit un objectif stratégique de première importance dans l'optique de la diversification de nos marchés. Certes, pour y parvenir, nous devons construire les infrastructures permettant d'acheminer les ressources depuis le point d'extraction jusqu'au point d'exploitation.

Nous avons adopté une approche qui implique l'ensemble des instances gouvernementales, avec intégration directe des consultations menées avec les Autochtones au nouveau processus. Il s'agit de les impliquer plus en amont, afin de donner tout son sens au processus, et de renforcer la coordination interministérielle au niveau fédéral, notamment en désignant un coordonnateur unique pour les projets relevant du fédéral, tout en élaborant des protocoles avec les provinces et les territoires et avec les groupements autochtones.

Il nous faut adopter une approche basée sur une atmosphère, mais aussi une réalité de respect mutuel. Sur un autre plan, nous espérons que les énormes avantages que peuvent apporter certains de ces projets aux communautés impliquées seront de nature à les persuader et à les rallier.

Je voudrais également avancer l'idée que le soutien à ces initiatives est probablement plus large; en outre, on peut s'attendre à ce que des ententes actuellement en cours de négociation soient annoncées ultérieurement.

Le sénateur Peterson : Messieurs les ministres, je vous remercie de vos exposés. Permettez-moi quelques questions, en commençant par vous, monsieur Oliver.

Si j'ai bien compris, la majeure partie des dispositions de la Loi sur la sûreté nucléaire au Canada seront transférées au ressort provincial. Je voudrais savoir si cela comprend également les responsabilités juridiques en cas d'incident grave.

M. Oliver : Je précise tout d'abord que cette loi ne s'applique pas à la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Nous avons consulté la Commission, et son président, M. Binder, prendra à titre volontaire certaines mesures concernant le calendrier; mais il s'agit là de décisions autonomes et distinctes, nullement mandatées par le gouvernement.

Quant à la responsabilité, elle ne sera pas affectée.

Le sénateur Peterson : Monsieur le ministre Kent, la nouvelle loi sur l'évaluation instaure, si j'ai bien compris, une limite maximale de deux ans pour la conduite de l'examen. Et je crois aussi que la période pourrait être inférieure. Qui détermine la durée de l'étude?

M. Kent : Je crois qu'on peut dire que les délais fixés découlent directement de l'expérience acquise lors d'une majorité d'évaluations antérieures. S'agissant de la LCEE, vous avez tout à fait raison, les commissions fédérales disposent d'une période de deux ans. L'application d'une marge discrétionnaire ministérielle en vue d'une prolongation de trois mois a été prévue en cas de circonstances atténuantes. Les cas de figure sont nombreux et, comme je le disais, en cas de circonstances exceptionnelles, le gouverneur en conseil peut accorder une extension du délai.

Nous pensons que, de manière générale, une période de deux ans devrait suffire à l'examen préliminaire par la Commission et à une prise de décision, et cela sans difficulté. L'adoption de la nouvelle loi et l'instauration de limites temporelles devraient inciter les commissions à accomplir leur tâche avec diligence. Dans le passé, nous avons eu des exemples de retards inacceptables du fait que certaines commissions ne se consacraient pas à plein temps à la tâche assignée. Des circonstances atténuantes sont également prévues, par exemple lorsqu'un soumissionnaire a besoin d'un délai supplémentaire, et cela s'est produit; il y a également les cas de vente ou de transfert de responsabilité, de mouvements dans les prises de part, ou encore de demande de délai supplémentaire de la part d'un partenaire provincial ou territorial. Nous pensons qu'à quelques rares exceptions près, la période de deux ans représente un objectif facilement réalisable.

Le sénateur Peterson : Vous pensez que cela permet d'entendre tous les témoins qui souhaiteraient comparaître?

M. Kent : Absolument.

Le sénateur Peterson : Sans devoir ajuster le temps imparti en fonction des témoignages?

M. Kent : Au cours des dernières années, plus précisément depuis les améliorations apportées à la LCEE en juin 2010, ces délais, fixés avec une certaine souplesse, ont généralement été respectés. Certes, il y a quelques exceptions. Je crois cependant qu'avec la nouvelle loi, les commissions seront encouragées à retrousser leurs manches et à mener leur tâche à bien.

Le sénateur Peterson : Par ailleurs, j'imagine que les commissions savent pertinemment que, quelle que soit leur décision, le dernier mot revient au Cabinet, n'est-ce pas?

M. Kent : Cela a toujours été le cas avec la LCEE. J'ajoute que le processus de l'OLE sera actualisé en fonction de la LCEE. L'application de la LCEE se fera sans grand changement par rapport à son régime actuel, avec l'adjonction des limites temporelles et de certaines nouvelles dispositions découlant des amendements apportés à la Loi sur les pêches. Mais dans l'ensemble, les choses ne changeront guère.

Le sénateur Peterson : Je l'espère, nous verrons bien.

Le président : Messieurs les ministres, on nous signale que le moment est venu de nous séparer. J'ai six personnes sur ma liste. Est-ce que vous devez tous nous quitter? N'y a-t-il vraiment rien à faire?

M. Kent : J'ai un engagement ferme pour une rencontre fédérale-provinciale.

M. Ashfield : J'ai également un engagement ferme, monsieur le président.

Le président : Madame le sénateur Johnson a été retardée par une pluie violente, et elle m'annonçait ce matin qu'elle souhaitait poser une question très importante. Permettez-moi de lui donner le dernier mot.

Le sénateur Johnson : Merci infiniment, monsieur le président. Certains de mes collègues ont déjà abordé la question. Ma question porte essentiellement sur le fait que, s'agissant du ministre, la Loi sur les pêches n'interdirait plus les altérations préjudiciables à l'habitat des poissons, ou encore sa perturbation ou sa destruction, mais interdirait que des dommages sérieux soient causés aux poissons dans le cadre d'une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou encore aux poissons qui sous-tendent une telle pêche. Voici donc ma question : compte tenu du fait que même les perturbations temporaires risquent d'avoir un impact sérieux sur les poissons, je voudrais savoir comment les amendements apportés contribueraient à protéger les poissons tout au long de leur cycle de vie. Pourriez-vous me donner un exemple d'une action qui pourrait altérer de façon négative l'habitat des poissons sans créer un dommage sérieux aux poissons?

M. Ashfield : Les exemples ne manquent pas. Prenez le cas d'un habitat piscicole le long des rives d'un fleuve, par exemple, avec une perturbation temporaire de la végétation le long de cette rive. Cela aurait une incidence temporaire sur les poissons, sans pour autant que cet impact soit profond ou prolongé. Donc, l'impact sur les poissons et sur leur habitat serait mineur; voilà pour le premier exemple. Par contre, si des interventions risquaient de détruire de façon permanente l'habitat des poissons le long de secteurs d'un fleuve, toute intervention y serait interdite et nous veillerions à ce que l'interdiction soit respectée.

Le sénateur Johnson : J'appartiens depuis des années aux comités des pêches du Sénat et je viens d'une région où se trouve un lac en difficulté, le lac Winnipeg. Le projet concernant les lacs expérimentaux a été interrompu. Je rappelle que nous avons tous été très occupés cette fin de semaine. Je sais aussi que toutes vos activités visent à apporter des améliorations. Certes, tout ce qui vise à apporter des changements dans ce pays nécessite du temps et de la compréhension, mais il faut aussi que nous adressions au public un message positif. Ce que vous entreprenez a une valeur bel et bien positive, car vous êtes en train d'avancer et non pas de régresser. J'espère que vous y réussirez, et que vous réussirez également à obtenir que les dispositions concernant les pêches et les océans, et notamment l'habitat des poissons, soient effectivement appliquées. C'est un aspect très important. Vous dites que ce que l'on a fait dans le passé ne laisse pas de vous inquiéter. Pour autant que je sache, au cours de toutes mes années au sein du comité des pêches, on n'a pas imposé de dispositions concernant la protection de l'habitat.

M. Ashfield : En fait, les modifications que nous proposons élargissent les pouvoirs qui nous sont attribués. Ils nous permettront également, s'ils sont adoptés, d'imposer les règles de façon plus pertinente, notamment par le biais de nouvelles amendes dans le cadre de la LCEE. Ainsi, nous disposerons des outils dont nous avons besoin pour obtenir la conformité. S'agissant du volet réglementaire, cela nous permettra d'obtenir l'application des règlements, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

M. Kent : Si vous me permettez quelques mots concernant les lacs expérimentaux, je voudrais dire que c'est là un exemple de réaction impulsive et négative à ce changement. L'initiative concernant les lacs expérimentaux, qui remonte aux années 1970, a contribué de façon précieuse à l'adoption du traité sur les pluies acides. Nous avons ainsi pu accumuler un vaste éventail de données très détaillées au cours des quatre dernières décennies, et notre partenariat avec le ministère des Pêches et des Océans a été d'une qualité remarquable. Actuellement, nos services d'Environnement Canada se déplacent davantage vers l'ouest afin d'évaluer notamment l'impact potentiel sous forme d'acidification que pourraient subir les lacs situés sous le vent des sables bitumineux. Cela fait partie de notre mandat de surveillance des eaux, de l'air et de la biodiversité, mandat que nous avons renforcé dans le bassin de l'Athabasca et dans les bassins atmosphériques à l'ouest et au sud-ouest de cette région. Les choses évoluent, et comme pour tous les programmes appliqués par n'importe quel ministère, il y a un moment opportun pour les créer, et puis une période pendant laquelle on les évalue, soit pour les renouveler lorsqu'ils ont conservé leur pertinence, soit pour y mettre fin lorsqu'ils sont caducs. C'est, pour l'essentiel, ce que nous avons fait au cours des derniers mois pour l'ensemble des instances gouvernementales.

Le président : J'ai encore six témoins sur ma liste, que j'inscris donc dans cet ordre. Nous avons devant nous des représentants des agences, et nous disposons de tout le temps nécessaire pour siéger aussi longtemps que nous le souhaitons.

Je pense que vous devez nous quitter, n'est-ce pas, messieurs?

M. Kent : Je pense que si nous voulons poursuivre le renforcement de nos partenariats fédéraux-provinciaux, il nous incombe de vous quitter.

Le président : Merci infiniment à vous tous pour cette excellente séance.

Nous poursuivons notre réunion sur les dispositions de la partie 3 du projet de loi C-38, la loi d'exécution du budget. Nous allons maintenant entendre trois organismes importants qui participent à l'administration du plan de développement responsable des ressources enchâssé dans la loi budgétaire. Ce sont l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, la Commission canadienne de sûreté nucléaire et l'Office national de l'énergie du Canada.

Je crois que nos témoins étaient dans la salle pendant la comparution du groupe précédent. Par conséquent, vous savez tous qui nous sommes, mais je voudrais que chacun de vous se présente, ou je pourrais vous aider. Je sais qu'au centre se trouve Mme Helen Cutts, vice-présidente, Secteur d'élaboration des politiques de l'ACEE. Je crois nous vous avons déjà rencontrée. Nous avons déjà vu un certain nombre d'entre vous et nous avons donc hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire au sujet de ce projet de loi. Steve Mongrain, conseiller principal en politiques, Secteur d'élaboration des politiques de l'ACEE est également présent.

Les représentants de la Commission canadienne de sûreté nucléaire sont Gord White, vice-président, Affaires réglementaires; Patsy Thompson, directrice générale, Direction de l'évaluation et de la protection environnementales et radiologiques et Peter Elder, directeur général, Direction de la réglementation du cycle et des installations nucléaires.

L'Office national de l'énergie est représenté par Robert Steedman, spécialiste en chef, Environnement.

Merci à tous d'être venus et bienvenue. Je crois que Mme Cutts va commencer. La parole est à vous.

Helen Cutts, vice-présidente, Secteur d'élaboration des politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale : Merci, monsieur le président. C'est un plaisir pour moi d'être ici pour expliquer plus en détail la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012. Mes commentaires s'appuieront sur ce qui a été présenté au comité le 10 mai et sur quelques points importants que le ministre de l'Environnement vient de présenter.

Je voudrais vous donner aujourd'hui un aperçu de la séquence qui sera suivie dans le cadre d'une évaluation environnementale. J'analyserai comment une évaluation environnementale serait entamée, comment elle serait réalisée et finalement, ce qu'il faut pour achever une évaluation. C'est un aperçu des caractéristiques du nouveau processus du début jusqu'à la fin.

Nous allons d'abord voir comment débute une évaluation environnementale. Le principal élément déclencheur est la liste de projets. Une liste de projets serait prévue par règlement. Les promoteurs de projets seraient tenus de présenter une description de projet à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale.

Comme mesure de précaution, le ministre de l'Environnement pourrait exiger l'évaluation environnementale d'un projet ne se trouvant pas sur la liste. L'agence aurait 45 jours pour déterminer si une évaluation environnementale est nécessaire. Ce délai comprend une période de consultation du public de 20 jours. Cette étape ne serait pas applicable aux projets réglementés par la Commission canadienne de sûreté nucléaire ou l'Office national de l'énergie. Ces projets feraient d'emblée l'objet d'une évaluation environnementale s'ils figurent dans le règlement.

Je vais maintenant passer à la réalisation d'une évaluation environnementale. Les effets environnementaux qui seraient évalués sont ceux qui sont de compétence fédérale, comme les effets sur le poisson. Ces effets sont visés au paragraphe 5(1). Les effets découlant d'une décision fédérale relativement au projet proposé doivent également être évalués. Par exemple, une évaluation environnementale tiendrait compte des effets découlant d'une décision fédérale de financer un projet. Ces effets sont visés au paragraphe 5(2). Les évaluations seraient réalisées par l'agence, la Commission canadienne de sûreté nucléaire pour les projets qu'elles réglementent et par l'Office national de l'énergie pour les projets qu'il réglemente.

Lorsque l'agence est responsable, le ministre de l'Environnement peut renvoyer le projet à une commission d'examen composé d'experts indépendants. Le ministre aurait alors 60 jours à compter du début d'une évaluation pour effectuer ce renvoi.

Comme vous le savez, le projet de loi prévoit des échéanciers. L'agence disposerait de 365 jours pour une évaluation normalisée et de 24 mois pour une évaluation réalisée par une commission d'examen. Les délais accordés à l'Office national de l'énergie et à la Commission canadienne de sûreté nucléaire sont visés par leur loi respective. Mes collègues en parleront un peu dans leur présentation.

Une évaluation environnementale comprend une occasion de participation publique. Lorsque l'agence réalise une évaluation environnementale, le public pourra commenter le rapport provisoire.

Si c'est une commission d'examen qui fait l'évaluation, elle doit tenir des audiences publiques. Les parties intéressées qui sont directement concernées par le projet ou qui ont de l'expertise ou des renseignements pertinents pour l'évaluation environnementale peuvent faire des présentations orales. Les exigences de la loi actuelle relative à l'aide financière aux participants seraient maintenues de même que le registre public en vue de faciliter l'accès du public aux documents.

Les mécanismes de coopération actuels avec d'autres instances ont été retenus, tels que la capacité de déléguer une évaluation environnementale ou de constituer une commission d'examen conjoint. De nouveaux outils ont été ajoutés : l'équivalence et la substitution. La substitution permet de substituer le processus d'une autre instance au processus fédéral, à l'exception de la prise de décision. Le Cabinet peut également reconnaître l'équivalence d'un processus provincial pour un projet donné. Dans ces cas-là, la loi ne s'appliquerait pas.

Je vais maintenant parler des dernières étapes d'une évaluation environnementale. À la fin d'une évaluation environnementale, une décision est prise quant à savoir si un projet est susceptible d'entraîner des effets négatifs importants sur l'environnement. Comme c'est le cas en vertu de la loi actuelle, le Cabinet déterminerait si les effets importants sont justifiés dans les circonstances. Des exigences relatives à des mesures d'atténuation et de suivi seraient établies dans une déclaration de décision ayant force exécutoire. Des programmes de suivi seraient obligatoires après toute évaluation environnementale. Ces modalités s'appuient sur des pouvoirs d'inspection et des pénalités possibles allant de 100 000 $ à 400 000 $ en cas d'infraction.

J'aurais deux autres choses à mentionner. Les autorités fédérales seraient tenues de s'assurer que leurs actions, en ce qui concerne les projets sur le territoire domanial et à l'extérieur du Canada, n'entraînent pas d'effets négatifs importants sur l'environnement. Un nouveau pouvoir permet également de réaliser, avec la collaboration des provinces, des évaluations environnementales à l'échelle régionale au lieu d'un projet particulier. Le ministre Kent l'avait également souligné dans sa présentation.

En conclusion, ce n'est qu'un compte rendu rapide de ce que pourrait être le processus. Mes collègues vont présenter maintenant un aperçu de la façon dont l'évaluation environnementale s'intègre dans le contexte plus large de leurs responsabilités.

Robert Steedman, spécialiste en chef, Environnement, Office national de l'énergie du Canada : Merci de me donner l'occasion de me présenter devant vous aujourd'hui et d'appuyer votre examen de la partie 3 du projet de loi C-38. L'Office national de l'énergie a pour raison d'être de réglementer, dans l'intérêt public canadien, les pipelines, la mise en valeur des ressources énergétiques et le commerce de l'énergie. Il est responsable envers le Parlement et lui fait rapport par l'intermédiaire du ministre des Ressources naturelles. Il réglemente la construction et l'exploitation des oléoducs, gazoducs et productoducs interprovinciaux et internationaux de même que les lignes internationales de transport d'électricité. Il réglemente aussi l'exploration et la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières dans les régions pionnières et les zones extracôtières non assujetties à des accords de gestion fédéraux ou provinciaux.

La surveillance réglementaire de l'office s'applique à des pipelines qui parcourent le pays en tout sens, sur une distance de 71 000 kilomètres, et à des lignes internationales de transport d'électricité qui s'étendent sur quelque 1 400 kilomètres. Les projets énergétiques qui ne débordent pas des limites d'une province ne relèvent pas de la compétence de l'office.

L'office tient les sociétés qu'il réglemente responsables de la sécurité de leurs installations et de la protection de l'environnement qui les entoure. Ses programmes sont conçus de manière à assurer l'efficacité des sociétés en matière de gestion de la sécurité et de protection de l'environnement à toutes les étapes du cycle de vie d'un pipeline — de la conception, en passant par la construction et l'exploitation, jusqu'à la cessation d'exploitation.

À nos vérifications et inspections de conformité se greffe la recherche de systèmes de gestion pouvant servir d'assise solide à une culture de sécurité omniprésente, soutenue vigoureusement par la haute direction de l'organisation, rigoureusement documentée, connue de tous les employés et constamment mise en pratique sur le terrain.

En vertu de la fonction de conseil que lui confère la Loi sur l'Office national de l'énergie, l'office surveille et analyse toutes les questions qui relèvent de sa compétence et fournit des renseignements et des avis dans les domaines de l'offre, du transport et de l'utilisation d'énergie à l'intérieur et à l'extérieur du Canada.

L'office tient une audience publique pour toutes les demandes visant la construction de pipelines dont la longueur est supérieure à 40 kilomètres et pour diverses autres questions concernant la réglementation de l'énergie. Lorsque l'office évalue un projet, il considère tous les facteurs reliés à l'intérêt public, y compris les effets sur l'environnement.

Nous avons une expérience considérable en ce qui a trait à l'étude des effets possibles sur l'environnement, dans le cadre de nos décisions de réglementation, et nous effectuons des évaluations environnementales en vertu de la Loi canadienne sur les évaluations environnementales depuis son entrée en vigueur en 1995. Au cours des dernières années, l'office a mené environ 30 évaluations environnementales préliminaires par année. Bon nombre de ces évaluations préliminaires s'inscrivaient dans une audience publique. L'office a dirigé des études approfondies et des commissions d'examen en application de la LCEE, toutes reliées à des audiences publiques tenues en vertu de la Loi sur l'ONE.

L'Office national de l'énergie a le mandat, les processus et la capacité nécessaires pour mener des évaluations environnementales inclusives, rigoureuses sur le plan technique et transparentes pour le public pour toutes les installations qu'il réglemente. L'ONE compte parmi son personnel environ 50 spécialistes de l'environnement, de l'aspect socioéconomique, des terres et de la participation des parties prenantes, et environ 40 spécialistes en sécurité et en génie.

L'office réglemente les installations tout au long de leur cycle de vie. Les projets approuvés sont assortis de conditions environnementales, que nous surveillons et appliquons, même après l'évaluation environnementale — dès l'approbation du projet, pendant la construction et l'exploitation, jusqu'à la cessation d'exploitation. Tout au long de la durée de vie d'un projet, nous surveillons les activités afin que la société gère et exploite les installations de manière à assurer la sécurité, la sûreté et la protection de l'environnement.

Notre programme de vérification de la conformité inclut des activités de vérification, de construction et d'inspection de sécurité, ainsi que des réunions sur la conformité, des évaluations d'exercices d'urgence et des enquêtes. Lorsque nous jugeons qu'une société ne remplit pas ses obligations réglementaires, nous utilisons différents outils pour faire respecter nos décisions, assurer la sécurité et protéger l'environnement. Ces outils peuvent aller de la demande verbale à la poursuite au criminel. Il peut s'agir également d'ordonnances visant l'arrêt des travaux ou la modification des activités d'une installation.

Si les modifications proposées à la loi sont adoptées, l'office s'en tiendra au cadre révisé. L'office continuerait à appliquer un processus d'évaluation environnementale et d'examen de la réglementation indépendant, juste et accessible pour les grands projets pipeliniers. Il recommanderait des conditions visant à assurer la sécurité du projet pour la population et l'environnement.

Les modifications à la loi portent sur les délais fixés pour l'évaluation réglementaire de l'office, et donnent au gouverneur en conseil la responsabilité d'approuver ou non la délivrance de certificats pour les pipelines. Les délais proposés correspondent au rendement habituel de l'office, et des outils sont fournis pour faire face aux imprévus.

À l'heure actuelle, l'office prend la décision, mais il faut une ordonnance du gouverneur en conseil avant de pouvoir délivrer un certificat pour un projet. Avec les modifications proposées, le gouverneur en conseil prendrait la décision au lieu de simplement approuver la décision de l'office. En outre, si l'office ne recommandait pas l'approbation d'un projet, l'analyse et les conditions recommandées seraient transmises au gouverneur en conseil pour la décision finale.

Merci de m'avoir permis de passer en revue le mandat et la démarche de réglementation de l'Office national de l'énergie. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Steedman. GIC, en anglais, correspond à gouverneur en conseil?

M. Steedman : Oui, monsieur.

Gord White, vice-président, Affaires réglementaires, Commission canadienne de sûreté nucléaire : Monsieur le président, messieurs les sénateurs, mesdames les sénatrices, je vous remercie pour cette invitation à venir discuter des éléments de l'initiative de Développement responsable des ressources du gouvernement qui sont liés au mandat de la Commission canadienne de sûreté nucléaire.

La CCSN, qui est l'unique organisme de réglementation nucléaire au Canada, est responsable du maintien de la santé, de la sûreté et de la sécurité des Canadiens et de l'environnement dans le contexte de notre industrie nucléaire. Nous nous acquittons de notre mandat aux termes de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires et de ses règlements. L'initiative de Développement responsable des ressources du gouvernement propose certains changements à la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires et à ses règlements qui fourniront à la CCSN de nouveaux pouvoirs. Je vous entretiendrai de ceux-ci dans quelques instants.

Pour vous aider à comprendre le régime réglementaire de la CCSN, j'aimerais vous donner un aperçu de notre mode de fonctionnement.

[Français]

La CCSN et la Commission de contrôle de l'énergie atomique qui l'a précédée, réglemente les activités nucléaires depuis plus de 65 ans. Les activités réglementées comprennent l'ensemble du cycle nucléaire, dont l'extraction minière et la concentration de l'uranium, la fabrication du combustible, les installations nucléaires telles que les centrales nucléaires et, ultimement, la gestion des déchets.

La surveillance réglementaire porte aussi sur les substances nucléaires et sur les applications commerciales, médicales, universitaires et de recherche, de même que sur le respect des engagements du Canada liés à la sécurité nucléaire et à la non-prolifération.

[Traduction]

La CCSN est un tribunal quasi judiciaire. Celui-ci est formé de commissaires permanents à temps plein et de commissaires à temps partiel issus de domaines professionnels, scientifiques et environnementaux variés, et reçoit le soutien du personnel de la CCSN. Les décisions de la commission sont principalement liées au régime d'autorisation de la CCSN et peuvent faire l'objet d'un appel uniquement à la Cour fédérale.

Le régime d'autorisation de la CCSN est solide et progressif, et ce, de la construction au déclassement en passant par l'exploitation. Les évaluations environnementales sont adaptées au type de projet nucléaire étudié, par exemple une mine d'uranium ou une centrale nucléaire. Depuis 2000, la CCSN a participé à 600 évaluations environnementales aujourd'hui achevées ou en cours.

La loi que la Chambre étudie en ce moment clarifie et augmente la capacité de la CCSN de réglementer l'industrie nucléaire au Canada.

[Français]

En phase avec les projets évalués et en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la CCSN modifiera la réglementation afin d'établir officiellement une échéance de 24 mois en ce qui concerne la prise de décision relative à un permis de préparation d'un emplacement pour une installation nucléaire de catégorie 1, ou un permis de préparation d'un emplacement et de construction d'une mine, ou d'une usine de concentration d'uranium.

Ce délai commence par la réception d'une demande complète. Il comprend le temps requis par la CCSN pour réaliser une évaluation environnementale et celui dont a besoin la commission pour tenir des audiences et rendre une décision concernant un permis de préparation d'emplacement.

[Traduction]

De plus, la loi proposée donne à la CCSN le pouvoir d'établir et d'appliquer un programme de sanctions administratives pécuniaires pour l'aider à assurer la conformité des titulaires de permis par le biais de l'application des conditions de permis et, en particulier, de la conformité environnementale.

Le projet de loi contient aussi deux dispositions d'ordre administratif. Premièrement, on propose que la LSRN soit modifiée afin de permettre au gouverneur en conseil de faire passer de six mois à trois ans la durée maximale du mandat d'un commissaire temporaire, à des fins de flexibilité et de rapidité dans les décisions prises par la commission.

Deuxièmement, on propose d'ajouter à la LSRN des dispositions qui permettraient à la CCSN de transférer des permis à d'autres parties qualifiées sous réserve que les conditions du permis continuent d'être respectées. Ce nouveau pouvoir réduirait le fardeau réglementaire et les activités redondantes, tant pour les promoteurs que pour la CCSN, dans les cas où aucun changement important ne justifie la présentation d'une demande pour l'obtention d'un nouveau permis.

[Français]

Aux termes de la loi proposée, la CCSN sera l'un des trois organismes — avec l'Office national de l'énergie et l'Agence canadienne d'évaluation environnementale — responsables des évaluations environnementales.

La CCSN continuera d'exercer son rôle de mandataire de la Couronne et respectera l'obligation de celle-ci de consulter les peuples autochtones du Canada. Nous sommes fiers d'avoir élaboré une politique de consultation des Autochtones productive et transparente.

Au début de 2011, la CCSN a lancé son Programme d'aide financière aux participants pour faciliter la participation du public— notamment les organismes autochtones — à ses délibérations réglementaires.

[Traduction]

En conclusion, la loi proposée s'inscrit dans la foulée des modifications apportées à la LCEE, en 2010. De plus, elle reconnaît le fait que la CCSN a assuré la protection de l'environnement grâce aux décisions préalables en évaluation environnementale qu'elle a prises en vertu de la LCEE et à son solide processus d'autorisation découlant de la LSRN. Les changements proposés clarifieront le rôle de la CCSN au regard des projets nucléaires au Canada. Ils réduiront le plus possible les retards et contribueront à l'adoption du principe « un projet, un examen ». Ils nous permettront de nous rapprocher de notre but, c'est-à-dire « un projet, un examen, un organisme de réglementation ».

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de dresser un aperçu du mandat et du régime réglementaire de la CCSN. Vos questions sont les bienvenues.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Ma question s'adressait au ministre, mais je suis certain que vous pouvez y répondre. Je comprends que le système actuel ne fonctionne pas. Les délais sont trop longs et inefficace. C'est pourquoi je suis en faveur des objectifs visés par les amendements proposés aux lois concernées.

La population en général a toujours le souci de dire qu'on redéfinit les types de projets qui feront l'objet d'une révision et qu'on baisse les standards de qualité du côté environnemental.

Pouvez-vous nous assurer que ce n'est pas le cas, qu'on ne se sert pas des mots et des nouvelles définitions pour réviser les standards d'environnement qui s'appliqueront?

Mme Cutts : Avec la nouvelle loi, il n'y a pas de changement des exigences. Par exemple, si on introduit des provisions de substitution, on a des mesures pour s'assurer que les exigences de base fédérales seront respectées complètement.

[Traduction]

Il y a certainement dans le projet de loi un certain nombre d'éléments environnementaux qui garantissent que la qualité des évaluations environnementales ne diminuera pas. Cela nous permet tout d'abord de regrouper les pouvoirs. Au lieu de 40 organismes différents, nous n'en avons que trois et l'amélioration de la gouvernance est un élément essentiel de cette loi. Les trois organismes qui sont ici aujourd'hui peuvent centrer leur attention sur ces questions et ils sont les experts dans ce domaine.

Nous avons également des nouvelles mesures qui vont améliorer l'environnement. Il n'y a aucun risque que nous réduisions nos normes environnementales. Nous allons pouvoir renforcer la protection de l'environnement grâce aux mesures régionales dont le ministre a parlé. Quand le gouvernement fédéral collabore avec une province pour entamer une étude environnementale régionale, cela nous permet de nous attaquer à un problème fondamental, celui des effets environnementaux cumulatifs, sur lequel il est difficile de se pencher dans le cadre d'un projet.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Cette assurance-là s'applique-t-elle aussi au sens de la Loi sur les pêches, avec les amendements qu'on y apporte, pour les poissons menacés?

[Traduction]

Mme Cutts : Nous travaillons en collaboration très étroite avec nos collègues du ministère des Pêches et nous sommes certains que les deux lois s'accordent très bien ensemble. Par exemple, comme le poisson relève du gouvernement fédéral, la Loi sur l'évaluation environnementale nous permet d'examiner les effets sur le poisson et nous utilisons la même définition du poisson que nos collègues du MPO.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Ce matin dans The Globe and Mail, je crois, ou dans un autre quotidien, quatre anciens ministres de la pêche — conservateurs et libéraux — exprimaient une position contraire. Selon eux, le ministre ne satisfait pas à sa responsabilité constitutionnelle de protéger la pêche et, conséquemment, on a une dilution importante de responsabilité dans les prévisions proposées. Pouvez-vous nous donnez votre réaction et vos commentaires? Je crois que ces quatre anciens ministres vont venir témoigner ici dans peu de temps, mais si vous pouviez nous donner votre réaction à ce moment, ce serait plus intéressant.

[Traduction]

Mme Cutts : Il m'est difficile de vous donner une opinion. Quand nous avons entendu le ministre des Pêches, il était venu pour parler de la Loi sur les pêches. Néanmoins, les trois organismes qui sont ici ne représentent pas le ministère des Pêches et il serait malvenu de ma part de commenter cet article.

Le sénateur Wallace : Madame Cutts, dans votre exposé, vous avez mentionné que le projet de loi C-38 modifiera les délais actuellement accordés pour les évaluations environnementales. Si l'évaluation est faite par l'agence, elle devra être terminée dans un délai d'un an et si elle est réalisée par une commission d'examen, ce sera dans un délai de 24 mois ou de deux ans.

Compte tenu de votre expérience, pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la réduction des délais? Semblent-ils adéquats? Ils sont trop serrés selon certaines critiques. Les ministres nous ont dit que ce n'est pas le cas. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?

Mme Cutts : Nous avons énormément d'expérience à l'agence. Nous avons fixé des délais par voie de règlement, l'année dernière. Avant même de le faire, nous avions établi qu'il fallait viser un délai de 365 jours pour une étude approfondie et nous avons donc adopté une politique à cet effet. Nous avons constaté que nous pouvions respecter ce délai. Nous travaillons très bien avec les autres ministères pour réunir les renseignements dont nous avons besoin et nous sommes donc certains que nous pouvons faire notre évaluation en 365 jours.

Nous avons une certaine expérience sur ce plan-là. Pour les examens par des commissions, nous nous sommes accordé deux ans. Il s'agit d'un processus différent. Une période est prévue pour la tenue d'une audience publique et cela prend plus de temps. D'après notre examen des mesures que l'agence doit prendre pour faire ce travail, deux ans conviennent parfaitement. Si un projet se révélait plus complexe que la normale, nous avons prévu dans la loi la possibilité d'une prolongation. Nous n'y aurons peut-être pas recours, mais c'est une bonne chose qu'elle soit là au cas où des circonstances inhabituelles se présenteraient.

Le sénateur Wallace : En ce qui concerne l'examen par une commission, comme vous l'avez mentionné, le public y participe ou y participerait. Le public tient beaucoup à participer au processus et c'est une bonne chose que ce soit prévu dans la loi. Je remarque toutefois que ce sont les parties intéressées directement touchées par le projet qui participeraient à la procédure d'examen par une commission. Comment va-t-on établir qui est directement touché ou non? Je suis certain que beaucoup de gens voudront comparaître. Comment établira-t-on qui sera directement touché? Qu'est-ce que cela signifie?

Mme Cutts : La loi porte que les parties intéressées sont les personnes directement touchées par la réalisation du projet ou celles qui possèdent des connaissances ou une expertise utiles. C'est à la commission qu'il revient d'établir qui sont les parties intéressées. En pratique, cela veut dire qu'elle recherchera des personnes possédant des renseignements qui lui permettront de rendre la bonne décision. C'est la qualité des connaissances et non pas de la personne qui compte. Il faut que dans toute audience, la commission puisse dire : « Nous jugeons ces renseignements très pertinents ». Si une personne commence par donner des renseignements pertinents et part ensuite sur une tangente, ce n'est pas une bonne utilisation du temps de la commission et cette dernière dira alors : « Ces renseignements ne sont pas pertinents - revenez sur les éléments importants ».

Nous donnons un outil à la commission et les parties intéressées sont simplement celles qui sont directement touchées ou qui possèdent des connaissances ou une expertise utiles. Ces connaissances pourraient être celles de personnes vivant dans la région, de quelqu'un qui possède de l'expérience de ce genre de projets ou d'un spécialiste du domaine en question. Cela pourrait être un professeur d'université qui comprend l'ingénierie utilisée. Lorsque la commission obtient des bons renseignements des personnes touchées, que ce soit des groupes autochtones, des scientifiques ou d'autres personnes possédant des renseignements utiles, cela lui permet de faire une bonne évaluation environnementale du projet.

Le sénateur Wallace : Je suis sûr qu'un certain nombre de personnes voudront comparaître à chaque audience. Fait- on une sélection préalable pour établir qui la commission entendra? Établit-on à l'avance qui sont les parties intéressées? Décide-t-on à l'avance qui possède ou non des renseignements pertinents ou attend-on que les participants comparaissent devant la commission pour décider si on les laisse continuer ou non?

Mme Cutts : La loi établit les principes de base au sujet des parties intéressées, mais sans préciser comment la commission prendra ces décisions. D'après mon expérience de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, il n'a pas été nécessaire jusqu'ici d'imposer des restrictions ou de faire une sélection préalable. Nous avons réussi à gérer des projets très compliqués en laissant toutes les parties intéressées comparaître sans processus de sélection.

Je m'attends à ce que les commissions d'examen puissent juger au cas par cas ce qui convient le mieux et s'il est nécessaire ou non de faire une sélection préalable.

Le sénateur Brown : Je m'intéresse beaucoup à une déclaration qui commence par : « les échéanciers s'appliquent aux activités gouvernementales et non pas aux périodes nécessaires au promoteur... ». Ce qui a été fait pour redresser certaines lignes de conduite qui ont eu cours pendant des années, me semble très positif. Je me réjouis aussi de voir que les trois ministres protègent non seulement l'environnement, mais également les ressources naturelles lorsqu'elles sont exploitées, ou quelles que soient les ressources.

Pendant environ une décennie et demie, on s'est préoccupé de ce qu'on appelait le « réchauffement climatique » et comme cela n'a pas donné de très bons résultats, l'attention a été dirigée vers les émissions de gaz à effet de serre. Je voudrais simplement savoir si les gens comme vous qui travaillent avec les ministres sont aussi déterminés que ces derniers à protéger l'environnement et les ressources.

Mme Cutts : Vous demandez si nous protégeons à la fois l'environnement et le patrimoine de ressources naturelles du Canada.

Le sénateur Brown : Oui, la mise en valeur de ces ressources.

Mme Cutts : L'expression « protection de l'environnement » a une importance capitale. Le projet de loi est conçu pour protéger l'environnement. Il a également des objectifs qui sont reliés à un processus efficace. Il ne sert à rien d'avoir un processus plus long que nécessaire et c'est pourquoi nous avons des échéanciers. Le processus est efficace. Un des objectifs est de faire en sorte que la mise en valeur des ressources naturelles, une entreprise d'une énorme envergure, puisse avancer au cours des 10 prochaines années et que nous puissions bénéficier des emplois et de la croissance associés à ces projets d'une valeur de 500 milliards de dollars.

Le projet de loi réussit extrêmement bien à équilibrer les objectifs. Il nous permettra de bénéficier de notre patrimoine de ressources naturelles et de créer des emplois pour ceux qui en ont besoin, tout en nous permettant d'avoir un excellent processus d'évaluation environnementale qui générera des examens de haute qualité et protégeant l'environnement.

Le sénateur Brown : Merci beaucoup. C'est exactement ce que je voulais entendre.

Le président : Voilà un sénateur heureux.

Le sénateur McCoy : C'est un plaisir de revoir chacun d'entre vous. Pour que ce soit bien clair dans mon esprit, la loi prévoit des nouveaux outils appelés, d'une part, « substitution » et d'autre part « équivalence », je crois. Pour que je comprenne bien, prenons l'exemple de la mine Prosperity », en Colombie-Britannique. Cette mine d'or et de cuivre a proposé d'utiliser un lac existant comme bassin de résidus. L'évaluation de la Colombie-Britannique a été terminée avant l'évaluation fédérale. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a décidé d'autoriser le projet. L'évaluation fédérale s'est terminée plus tard et le Cabinet fédéral a dit que l'impact environnemental n'était pas acceptable dans les circonstances, même avec les mesures d'atténuation.

Avec les dispositions d'équivalence, si les lois de la Colombie-Britannique avaient été déclarées équivalentes, le gouvernement de la Colombie-Britannique aurait été seul à décider d'autoriser cette mine, n'est-ce pas?

Mme Cutts : Je n'ai pas mentionné dans ma déclaration préliminaire que la substitution et l'équivalence ne s'appliquent pas aux examens par une commission. Nous avons décidé sciemment qu'il y aurait deux types d'examens : nos examens normalisés et les examens par une commission. Les projets complexes qui présentent des risques plus importants pour l'environnement sont soumis à un examen par une commission et les dispositions concernant la substitution et l'équivalence ne s'y appliquent pas.

Nous ne pouvons pas dire que c'est ce qui se serait passé dans le cas de la mine Prosperity. Le gouvernement fédéral n'aurait pas été en mesure de laisser cette décision à la province si cette loi avait été en vigueur.

Le sénateur McCoy : À un moment donné, quelqu'un doit décider, au début du processus, qu'il s'agit d'un projet complexe. Où est-ce précisé dans le projet de loi?

Mme Cutts : Le projet de loi accorde d'abord 45 jours pour un examen préalable et prévoit ensuite que si une évaluation environnementale est jugée nécessaire, le ministre a 60 jours pour décider si l'examen sera fait par une commission.

Autrement dit, avant de parler aux provinces pour voir si nous allons nous prévaloir de ces excellents outils, pour voir si nous allons envisager la substitution ou l'équivalence, il faut d'abord décider s'il y aura ou non une commission d'examen.

Le sénateur McCoy : La substitution est générale.

Mme Cutts : Je ne vois pas ce que vous voulez dire par « générale ».

Le sénateur McCoy : Elle s'applique à un certain type de projets.

Mme Cutts : La substitution s'applique dans deux cas : d'une part, projet par projet et d'autre part, à une catégorie de projets.

Le sénateur McCoy : De toute façon, la décision est quand même prise au niveau fédéral en cas de substitution. Je m'intéresse à l'équivalence.

Mme Cutts : La décision concernant l'équivalence est prise autrement. C'est une décision importante et je comprends que tout le monde s'y intéresse. C'est important, car si on décide que le processus provincial est équivalent pour le projet en question, le projet n'est plus assujetti à la loi et le gouvernement fédéral n'intervient plus. Ce n'est pas lui qui prend la décision définitive. La province se charge de tout le processus d'évaluation. Elle fait le travail jusqu'au bout et prend la décision.

Premièrement, pour faire la distinction entre la substitution et l'équivalence dans le projet de loi, nous avons dit qu'il faut une décision du Cabinet à propos de l'équivalence, car c'est la plus importante des deux décisions. Deuxièmement, nous avons dit qu'elle ne peut s'appliquer qu'au cas par cas et non pas à toute une catégorie de projets. Troisièmement, nous avons dit que la décision concernant l'équivalence est discrétionnaire alors que la substitution est automatique si les conditions sont réunies.

Le sénateur McCoy : Je pense que je vais vous demander de m'expliquer les étapes du projet de loi après la réunion, car le temps passe vite aujourd'hui et j'ai une autre question à poser.

Nous n'avons pas encore parlé du recouvrement des coûts. C'est également quelque chose de nouveau, ou du moins je ne me souviens pas d'avoir vu cela dans d'autres lois alors que je les étudie depuis une vingtaine d'années.

Steve Mongrain, conseiller principal en politiques, Secteur d'élaboration des politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale : L'agence recouvre actuellement le coût des examens effectués par des commissions. Elle le fait conformément à un arrêté pris en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques. Cet arrêté date de 1998. Le projet de loi propose que cela ne relève plus de la Loi sur la gestion des finances publiques, car il y a eu certaines contestations. Nous avons créé des dispositions à cet effet dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Ces dispositions entreront en vigueur quand le gouverneur en conseil aura pris des règlements à cet égard. Le but est de poursuivre le recouvrement des coûts qui a lieu actuellement pour les examens faits par des commissions, si cette loi entre en vigueur.

Le sénateur McCoy : Quel montant avez-vous recouvré pendant toutes ces années? Je suppose que ce sont les promoteurs qui ont payé les frais.

M. Mongrain : Les frais payés par les promoteurs varient d'une année à l'autre. Il serait sans doute préférable que nous fournissions des chiffres précis au comité ultérieurement, mais c'est de l'ordre de 2 millions, 3 millions ou 5 millions de dollars par année, selon le volume de projets.

Le sénateur McCoy : Pour le pipeline de la vallée du Mackenzie, les coûts ont donc été plus élevés que ce que vous avez dit.

M. Mongrain : C'était une anomalie.

Le sénateur McCoy : Avez-vous recouvré tous ces coûts? Je suppose que l'ONE n'a pas dû les recouvrer non plus étant donné qu'il n'a pas assumé cette responsabilité bien longtemps.

M. Mongrain : Nous avons recouvré les coûts visés par l'arrêté et cela comprend donc...

Le sénateur McCoy : Ce n'est donc pas le recouvrement des coûts totaux?

M. Mongrain : C'est compliqué, car l'arrêté en vigueur s'applique seulement une fois que la commission est nommée. L'arrêté qui était en vigueur pour le pipeline du Mackenzie inclut des choses comme la traduction des audiences d'examen, la transcription des audiences d'examen par une commission, la location des salles de réunion, et cetera.

D'autre part, nous n'étions qu'un participant parmi bien d'autres. Par conséquent, il vaudrait mieux que nous vous fassions parvenir des précisions au sujet des sommes que nous avons recouvrées. De toute façon, ce projet représentait sans doute une anomalie quant à la somme recouvrée. Nous pouvons trouver ces chiffres pour le comité, monsieur le président.

Le sénateur Mitchell : Nous savons tous que bien des gens s'inquiètent de ces changements qui vont édulcorer, réduire et diminuer le processus d'évaluation environnementale. Je voudrais donc quelques précisions sur le plan pratique.

On décide que l'examen sera réalisé par une commission. Le gouvernement fédéral n'est pas obligé de s'en charger lui-même; il peut le faire lui-même ou avoir une commission mixte. Toutefois, pourrait-il aussi déléguer simplement à la province la responsabilité de procéder à l'examen par une commission?

Mme Cutts : Non. Il n'y a aucune disposition permettant de déléguer cette responsabilité aux provinces.

Le sénateur Mitchell : Disons qu'un projet est prévu dans une certaine province et qu'il est assujetti à la réglementation provinciale. Tous les règlements de la province s'appliquent, de même que la réglementation fédérale.

Le gouvernement fédéral pourrait-il dire à la province : « Vous allez faire l'évaluation en fonction de votre réglementation et pouvez-vous également évaluer le projet en fonction de notre propre réglementation? » Cela pourrait-il arriver?

Mme Cutts : Vous voulez dire dans le cadre d'une évaluation environnementale normalisée?

Le sénateur Mitchell : N'importe quelle évaluation. Cela va-t-il changer ou le gouvernement fédéral va-t-il dire simplement : « Peu nous importe, nous ne ferons pas notre propre évaluation. Faites la vôtre »?

Mme Cutts : Il faut appliquer les dispositions de la loi telles qu'elles sont. Vous ne pouvez pas simplement conclure un accord parallèle. Vous devez appliquer les dispositions selon lesquelles si la province met son processus en marche, la substitution s'applique.

Il m'est difficile de répondre à votre question, car elle sous-entend un fossé entre ce qui se passe au niveau provincial et au niveau fédéral. Il y a un chevauchement de certaines compétences et il est difficile de dire : « C'est à vous de faire ceci et à nous de faire cela. »

Par exemple, si nous décidons que le gouvernement fédéral va financer un projet, cela veut dire qu'une décision doit être prise au niveau fédéral au sujet du financement. Ensuite, nous examinons les effets environnementaux de ce projet et nous sommes obligés de les examiner, qu'ils relèvent ou non de la compétence fédérale. Nous pouvons examiner les effets sur une espèce comme le grizzly. Nous ne sommes pas limités aux éléments relevant habituellement du gouvernement fédéral.

Le sénateur Mitchell : Certaines personnes ont l'impression que l'équivalence s'appliquerait dans tous les cas, que le gouvernement fédéral ne renoncerait pas à faire l'évaluation ou ne demanderait pas à une autre instance de s'en charger s'il ne pensait pas obtenir un examen aussi bon que s'il l'avait fait lui-même. Toutefois, je pense que l'équivalence n'est pas utilisée dans les mêmes circonstances que la substitution. Comment l'équivalence sera-t-elle établie si le gouvernement fédéral renonce à faire l'examen? Comment peut-on garantir aux Canadiens que si quelqu'un d'autre s'en charge, il sera au moins aussi rigoureux que l'aurait été le processus d'examen fédéral?

Mme Cutts : Nous avons établi un certain nombre de conditions qui doivent être remplies pour que l'équivalence puisse s'appliquer. Par exemple, l'article 19 de notre loi précise quelles sont les choses à faire pour effectuer une évaluation environnementale. Vous devez établir quels sont les effets importants, quelles sont les mesures d'atténuation prévues et quels seront les effets cumulatifs.

Nous exigeons également que le public soit consulté. Nous exigeons que la province fasse respecter la réglementation et les mesures d'atténuation et qu'elle assure le suivi.

Nous devons rencontrer nos collègues des provinces pour parler avec eux de la nature de leur régime et de sa coordination avec le nôtre. Le Canada est une fédération. Nous avons un gouvernement fédéral et 10 régimes qui sont tous un peu différents. Nous avons déjà commencé à discuter avec les autorités de chaque province pour examiner leur système avec elles. Elles nous diront : « Nous pensons que notre législation remplit toutes les conditions que vous exigez » ou elles pourraient dire : « Notre réglementation ne prévoit pas telle chose, mais nous acceptons de la faire sur une base politique. »

Il nous reste à conclure un accord selon lequel la province se charge du travail et répondra aux exigences fédérales même si elles s'écartent un peu du processus provincial habituel. Cela exige quelques concessions de la part des autorités provinciales et nous veillerons à ce qu'elles les fassent.

Le sénateur Mitchell : Craignez-vous que certaines provinces n'aient pas suffisamment de connaissances, de moyens ou d'expérience? Par exemple, une province se lance peut-être dans un projet de gaz de schiste qui est entièrement nouveau pour elle. Direz-vous simplement : « Vous ne pouvez pas vous charger de l'évaluation; peu importe que vous teniez à le faire, c'est nous qui nous en chargerons »? Serait-ce le cas?

Mme Cutts : En ce qui concerne l'équivalence, la décision sera prise par le gouverneur en conseil. Le Cabinet obtiendra donc des renseignements sur la province et la situation en question. Avant qu'un document ne soit transmis au Cabinet, l'agence aura fait le travail préparatoire nécessaire, parlé avec la province et donné des conseils.

M. Mongrain : Pour ce qui est des compétences, il y a le processus d'évaluation et il y a l'examen technique des documents fournis par le promoteur. Ces dispositions permettent notamment aux autorités fédérales qui possèdent les compétences scientifiques et techniques voulues de continuer à participer. En fait, nous leur avons conféré l'obligation d'apporter leur concours aux provinces si on leur demande de le faire.

Le sénateur Mitchell : C'est intéressant et cela m'amène à ma prochaine question. Par le passé, les organismes qui sont représentés ici ont fait des évaluations environnementales. Alors qu'il y avait 40 autres organismes, vous avez eu recours aux ressources d'autres instances; vous avez employé des chercheurs qui ont peut-être été congédiés depuis. Vous vous êtes servis de stations de recherche et de surveillance qui ont peut-être été fermées.

Par conséquent, même si vous dites que l'ACEE a 200 employés de plus ou je ne sais combien, suffiront-ils à remplacer les autres ressources auxquelles vous avez fait appel ou n'y avez-vous jamais fait appel?

Mme Cutts : C'est une initiative d'une grande ampleur. Il y a eu un énorme effort de développement des ressources et les ministères ont fait un travail incroyable pour préparer ce projet de loi. Je ne pourrais pas vous affirmer en toute confiance que c'est une bonne loi si je ne pensais pas que nous avons fait le travail préparatoire et que les ministères compétents disposent des ressources nécessaires. Je suis convaincue que lorsqu'un agent de l'ACEE ira à Environnement Canada, à Transports Canada ou au MPO pour dire : « Nous avons besoin de vos compétences pour ce projet », les ressources seront là. Toute la grande famille fédérale a travaillé très fort et en collaboration étroite à ce projet de loi. Nous ne laisserions pas cette initiative échouer faute de disposer des compétences requises.

Le sénateur Mitchell : Je crois que par le passé, Pêches et Océans faisait des évaluations environnementales, mais il semble que désormais c'est l'ACEE qui s'en chargera ou avez-vous toujours fait des évaluations relatives aux pêches?

Mme Cutts : Pêches et Océans était l'un des 40 ministères et organismes chargés d'effectuer des évaluations environnementales par le passé. Il faisait donc l'examen préalable, ou avant 2010, il faisait même l'étude approfondie.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que le personnel de Pêches et Océans qui remplissait cette fonction est maintenant muté à l'ACEE ou à quels experts vous adresserez-vous?

Mme Cutts : Les experts seront toujours ceux de Pêches et Océans.

M. Mongrain : Pour ce qui est du poisson et de l'habitat du poisson, mais en ce qui concerne les effets environnementaux plus vastes, le ministère n'aura plus à les examiner dans le cadre d'une évaluation environnementale. Nous ferons appel à d'autres ministères comme Environnement Canada ou Ressources naturelles Canada et à certaines de nos ressources internes, mais nous nous adresserons surtout à ces ministères scientifiques. Nous continuons de compter sur eux pour les questions qui font directement partie de leur mandat.

Le sénateur Mitchell : Si vous choisissez la substitution et que la province fait l'évaluation et prend la décision, mais se trompe lourdement, avez-vous un recours?

Mme Cutts : Bien entendu, nous avons pensé au risque que quelque chose se passe mal. Après mûre réflexion, nous avons décidé qu'il valait mieux s'arranger pour ne pas se retrouver dans cette situation. Nous ne voulons pas que notre ministre se retrouve devant un rapport qui ne sera pas assez bon pour permettre de prendre une décision.

Nous proposons de travailler avec la province et de lui demander des renseignements à certains stades critiques du processus. Ces vérifications permettront de s'assurer qu'elle est sur la bonne voie.

Comme M. Mongrain l'a mentionné, le deuxième élément est que les employés fédéraux qui sont experts dans un domaine dans lequel la province n'est pas particulièrement compétente participeraient toujours à l'évaluation. Le gouvernement joue deux rôles pour s'assurer que les choses n'iront pas de travers. C'est, d'une part, un rôle de coordination et d'autre part, un rôle d'expert.

Le sénateur Mitchell : Avant que ce changement ne soit apporté, l'ACEE se chargeait des évaluations environnementales, mais désormais, elle en fera quelques-unes et vérifiera que les provinces font comme il faut les évaluations qui leur seront confiées. C'est bien cela? Est-ce un changement fondamental?

Mme Cutts : Oui, je pense que c'est un changement fondamental. Pour le moment, l'ACEE effectue les évaluations, ou ce sont d'autres organismes, et à l'avenir, il y aura peut-être deux processus.

Le sénateur Mitchell : En toute logique, alors que nous avons maintenant deux évaluations faites par deux groupes, ce qui constitue un dédoublement, nous risquons de nous retrouver avec deux groupes qui appliqueront le processus d'évaluation, ce qui entraîne un autre dédoublement, ou est-ce que j'exagère?

Mme Cutts : Si nous cherchons à réduire le double emploi, nous devrons trouver un moyen de travailler différemment avec les provinces. Pour le moment, nous collaborons et nous essayons de faire en sorte que nos deux systèmes fonctionnent ensemble. Si nous choisissons la substitution, nous ne serons pas là à chaque étape. Nous laisserons la province faire le travail, mais le gouvernement fédéral devra quand même exercer une certaine surveillance. Néanmoins, c'est le degré qui est important et ce n'est donc pas comme s'il y avait deux joueurs travaillant sur un projet 7 jours sur 7, 24 heures sur 24.

Le président : Monsieur White, j'ai une question. Cela n'est peut-être pas pertinent, mais je crois que si.

Ce comité s'est intéressé de près à la situation du nucléaire au Canada et nous sommes allés visiter Chalk River, Darlington et Bruce. Nous sommes très impressionnés par les installations que nous avons vues, par le cadre réglementaire qui est en place et par les efforts déployés pour passer à un autre niveau de gestion des déchets; malgré cela, il y a cet énorme article sur Pickering, publié dans des quotidiens nationaux, il y a une semaine ou 10 jours. Il racontait que c'est dangereux, même à Darlington. On nous a dit que Darlington a plusieurs unités. Il y aura une nouvelle installation, puis une chose et une autre et, enfin, la mise au rencart ou la fermeture de Pickering et, pourtant, la centrale est en exploitation. Je ne sais pas si c'est le résultat d'un rapport, s'il s'agissait d'un rapport d'enquête ou quoi. Savez-vous à quoi je suis en train de faire allusion?

M. White : Personnellement, je ne suis pas au courant de ce rapport, mais peut-être que M. Thompson sait de quoi vous voulez parler.

Nous travaillons dans le domaine de la sûreté nucléaire. Nous n'accordons pas de permis aux installations qui ne sont pas sécuritaires. Le dossier de sécurité doit être très bien monté, y compris l'activité d'évaluation environnementale qui mène à une décision, et c'est le processus d'octroi de permis qui dicte ce qui est possible et ce qui ne l'est pas.

Dans notre cas, OPG se prépare à fermer Pickering définitivement, mais la centrale doit toujours fonctionner en toute sécurité jusqu'à ce qu'elle soit totalement arrêtée, ensuite, il y aura un processus de démantèlement.

Le président : Juste pour votre gouverne, nous l'avions compris et nous pensions que c'était quelque chose de rigoureux. Vos propres activités sont surveillées par l'AIEA, l'agence internationale, et nous avons même vu des équipes de gens de Vienne et d'ailleurs qui étaient là-bas.

M. White : Nous ne sommes pas chapeautés par l'AIEA. L'entité de réglementation canadienne est indépendante, mais nous travaillons en collaboration.

Le président : Pourquoi alors ces gens-là sont-ils là-bas?

M. White : Il s'agit d'un organe onusien. En fait, M. Elder a été employé de l'ONU.

Peter Elder, directeur général, Direction de la réglementation du cycle et des installations nucléaires, Commission canadienne de sûreté nucléaire : Je tiens à préciser une chose. Je vais tout d'abord revenir à votre question initiale.

Le rapport vient du fait que l'entité de réglementation provinciale examinait la performance, c'est-à-dire le rendement économique de Pickering. Il n'examinait pas la sûreté de sa performance. Il examinait vraiment la performance, à savoir des choses comme le nombre de jours dans l'année où la centrale était en activité, par rapport à la moyenne de l'industrie. À cet égard, ce n'était pas très flatteur pour Ontario Power Generation, mais cela n'avait rien à voir avec sa performance sur le plan de la sécurité, ce que d'ailleurs nous évaluons indépendamment.

L'Agence internationale de l'énergie atomique a un droit de surveillance sur le Canada pour s'assurer que nous honorons nos engagements en matière d'utilisation pacifique de l'énergie atomique. Encore une fois, ils reviendraient pour s'assurer que nous ne faisons rien de malveillant avec la matière nucléaire. Toutefois, pour ce qui est de la sécurité, nous travaillons en collaboration et nous les considérons comme des homologues pour qu'ils fassent un examen par les pairs de la sécurité.

Le président : Vers la toute fin de l'article, je me souviens qu'on y disait que, peu importe ce qui précédait, on respectait toujours les normes de sécurité à Pickering. Toutefois, si vous vous apercevez que quelque chose ne fonctionne qu'à 30 p. 100 d'efficacité et que cela entraîne une hausse importante des coûts par kilowattheure, ça veut dire qu'il y a sûrement quelque chose de défectueux et que c'est peut-être dangereux. C'est tout. La population commence alors à imaginer toutes sortes de choses.

M. Elder : Parmi les organes chargés de la réglementation nucléaire — et il s'agit là d'un sujet de discussion international — on ne s'entend pas pour savoir si la fréquence de fonctionnement vous permet de déterminer la sécurité du fonctionnement. Les versions ne sont pas les mêmes. Vous pouvez avoir des situations avec de très bonnes performances de fonctionnement et, tout d'un coup, vous vous apercevez que c'est parce qu'on néglige toute une série de détails de sécurité et qu'on aurait dû fermer la centrale, le temps des réparations. Vous ne pouvez pas établir de relation directe à partir de cela.

Nous ne nous penchons pas vraiment là-dessus. Nous examinons les événements pour voir s'ils ont une incidence sur la sécurité. Il ne s'agit pas de voir s'il faut fermer l'installation à cause d'une pièce d'équipement défectueuse, qui ne pose aucun problème de sécurité, mais qui empêche de produire de l'énergie.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Lang : Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui et d'être restés plus tard. De plus, j'apprécie tout le travail assidu que les différents employés de vos ministères ont fait au cours des douze derniers mois. Cela n'a bien évidemment pas dû être facile à mettre sur pied.

J'aimerais revenir un peu en arrière pour faire le point sur ce qui a été fait et sur ce qui s'en vient. J'ai demandé des renseignements sur d'anciens projets pour voir combien de temps il leur avait fallu pour parcourir tout le système, dans sa forme actuelle.

Je vais vous donner un exemple, pour mémoire, celui de la mine Midwest, dans le Nord de la Saskatchewan et des travaux d'extraction et de concentration; l'examen du projet a commencé en mars 2006 et se poursuit encore. À la centrale nucléaire de Darlington, l'examen du projet a duré presque cinq ans. Une fois qu'on a décidé qu'il fallait que ce soit étudié par un comité d'examen, il a fallu 12 mois pour préparer les documents d'orientation nécessaires.

On a commencé un examen du projet pipelinier Northern Gateway en 2005. Au début du processus, cela a pris huit mois pour confirmer que ce projet devrait être soumis à un comité d'examen. Ensuite, il y a le projet d'expansion de la mine de sables bitumineux de Jackpine. La compagnie a soumis sa demande en 2008 et l'examen est toujours en cours — et nous sommes en 2012, je vous le rappelle — en raison d'une discordance entre les processus d'examen fédéral et provincial. L'examen fédéral a formellement débuté plus de deux ans après le dépôt de la demande.

Quant au projet de centrale hydroélectrique du bas Churchill, la phase d'examen s'est étalée sur plus de cinq ans. La compagnie a soumis la description du projet en 2006 — et nous sommes en 2012, n'oubliez pas — et une évaluation environnementale a débuté en 2007. Les ministères fédéraux responsables ont finalement approuvé le projet en mars 2012.

Passons ensuite au gazoduc Mackenzie qui dure depuis une éternité ou, pour être plus précis, depuis une trentaine d'années. Vous avez parlé de recouvrement des coûts. D'après l'information dont je dispose, l'examen du projet, cette fois-ci, a pris plus de neuf ans.

Et puis, il y a la mine de sables bitumineux de Joslyn. À cause de la situation actuelle, à savoir les demandes faites à la province de l'Alberta en 2006 — et n'oubliez pas que nous sommes en 2012 — l'évaluation environnementale fédérale a débuté en 2008 et le feu vert a finalement été donné en 2011.

J'évoque tout cela, car je veux des garanties. Pouvez-vous nous garantir qu'avec ce projet de loi, compte tenu des échéanciers qui y ont été inscrits et des responsabilités qui y ont été ajoutées, avec les amendements proposés — et hormis les situations où une prolongation a été accordée par le gouverneur en conseil — nous allons respecter ces échéanciers de manière à ce que la raison l'emporte et que nous puissions avoir une réponse positive ou négative sur ces projets?

M. White : Je vais commencer par les deux premiers projets, car ils sont reliés à la Commission de sûreté nucléaire.

Mme Thompson dispose d'informations intéressantes à ce sujet.

Patsy Thompson, directrice générale, Direction de la protection de l'environnement, de la radioprotection et de l'évaluation, Commission canadienne de sûreté nucléaire : Je veux essentiellement vous fournir des renseignements sur les projets Midwest et Darlington. Afin de placer les choses en contexte, depuis 2000, la CCSN a réalisé environ 66 évaluations environnementales dont 47 ont été achevées. Bon nombre d'entre elles ont été réalisées en moins de deux ans, temps de préparation du dossier par le promoteur inclus.

À propos de l'installation Midwest, le promoteur s'est manifesté en 2006. À cette époque, la CCSN a entamé l'étude en liaison avec l'autre autorité responsable, le ministère des Pêches et des Océans. Pendant un certain temps, le ministère des Pêches et des Océans était plus ou moins concerné et, par conséquent, il y a eu beaucoup de négociations pour décider de qui participerait à l'évaluation environnementale. Finalement, nous nous retrouvons maintenant avec trois autorités responsables. Si la CCSN avait été responsable des installations nucléaires, comme le propose la loi, cela aurait permis de régler une situation comme celle-ci.

Dans le cas du projet de Darlington, on a mentionné un retard de 12 mois pour faire approuver les lignes directrices. Je le rappelle, la CCSN n'était pas soumise au régime proposé et les lignes directrices devaient alors être approuvées par un ministre. Malheureusement, des élections ont été déclenchées et aucun ministre n'était disponible. Cela arrive également.

Madame Cutts : Je vais davantage vous assurer que les échéanciers seront respectés. D'abord, il a parfois été difficile, par le passé, de faire démarrer le processus. Le projet de loi actuel prévoit qu'une décision doit être prise au départ, c'est-à-dire qu'il faut décider, en collaboration avec les ministères, s'il s'agit, par exemple, d'une autorisation qui relève de la Loi sur les pêches. Il a parfois fallu du temps pour prendre une telle décision. Il est maintenant possible d'invoquer directement cette loi. Ainsi, si une question touche aux poissons, on peut invoquer la loi sans qu'il soit nécessaire de déterminer s'il faut une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.

Depuis que la loi peut être invoquée différemment, nous commençons plus rapidement. Non seulement nous avons l'échéancier long de 365 jours, mais nous avons aussi un échéancier interne de 45 jours pour décider si nous avons besoin d'une évaluation ou pas. Cela sera essentiel. Puisqu'en vertu de la LCEE, nous sommes chargés de prendre la décision, nous nous efforçons de le faire dans des délais opportuns.

Par ailleurs, nous avons introduit la possibilité de dissoudre le comité d'examen. Certains de ces groupes étant devenus inefficaces, ils ne fonctionnaient pas bien et rien n'était plus possible; c'est pour cela que des mesures supplémentaires ont été adoptées.

M. Steedman pourrait peut-être vous en parler.

M. Steedman : Je peux confirmer que, plus il faut d'intervenants pour coordonner le processus, plus il y a de chances que ça prenne du longtemps. Le projet de loi proposé repose sur le principe voulant que la responsabilité des évaluations environnementales soit consolidée et ne revienne qu'à une seule entité. Vu son expérience historique, l'Office national de l'énergie pense vraiment, à l'exception des exemples soulignés par le sénateur Lang, que les 15 mois de délai que l'Office national de l'énergie serait censé respecter sont tout à fait raisonnables et réalisables.

En cas d'urgence, il existe des mécanismes pour prolonger cette période, mais l'autre élément fondamental, c'est qu'il existe désormais des outils, aux termes de la Loi sur l'ONE et de la LCEE, qui facilitent la conduite d'évaluations de haute qualité dans la limite des échéanciers fixés.

Le sénateur Lang : J'apprécie les réponses.

J'aimerais maintenant passer à autre chose. Une fois de plus, je ne partage pas nécessairement la vision du monde du sénateur Mitchell voulant que le gouvernement fédéral soit toujours là pour voler à notre secours. Ayant été en politique territoriale pendant de nombreuses années, je peux dire que le fédéral n'a pas toujours été là pour nous sauver. C'est pour cela que je suis tout à fait favorable au concept de substitution et d'équivalence et je pense que les provinces sont bien placées pour ça et qu'elles en ont le pouvoir.

Il y a un autre domaine qui n'a pas été abordé ici. La qualité des évaluations environnementales a été mentionnée maintes et maintes fois au cours de nos audiences. La question qui n'a pas été soulevée est celle des contestations juridiques. Pourriez-vous faire un commentaire à ce sujet? Si ces évaluations ne sont pas réalisées comme il se doit, il existe un véritable risque que le processus soit juridiquement contesté, ce qui, en l'absence d'une évaluation minutieuse, pourrait provoquer le blocage d'un projet, n'est-ce pas?

M. White : Je vais parler des projets nucléaires. Les décisions concernant les permis qui sont prises par la commission peuvent faire l'objet d'un appel devant la Cour fédérale du Canada. On pourrait alors effectivement se retrouver avec une poursuite sur les bras. En fait, c'est actuellement le cas. La commission d'examen conjoint du projet de Darlington fait l'objet d'une contestation juridique. Dans le monde du nucléaire, il n'y a pas nécessairement que les évaluations environnementales qui font l'objet de contestations, il y a aussi les décisions qui concernent les permis, au sens large.

Dans le cas de Darlington, il s'agissait essentiellement de l'ÉE. Notre processus est un processus intégré, à savoir que l'ÉE est réalisée en même temps qu'un permis est émis au titre de la préparation du site à aménager. Nous effectuons les deux en même temps.

Madame Thompson : Pour préciser davantage le contexte, depuis que la CCSN participe à des évaluations environnementales, à savoir depuis l'entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, nous avons essuyé trois contestions juridiques. Depuis 1995, plus de 70 évaluations environnementales ont été réalisées. Il s'agit d'un très petit nombre de contestations. Sur ces trois cas, deux ont échoué. Le processus s'est avéré robuste. Le tribunal est présentement saisi de la troisième contestation.

Le sénateur Lang : Sans vouloir m'éterniser sur ce point, je crois qu'on réconforterait ceux qui sont un peu cyniques face aux changements si on disait qu'il incombe aux diverses autorités gouvernementales et au promoteur de veiller à ce que le processus se déroule de manière adéquate pour qu'aucune contestation juridique ne risque d'aboutir. Est-ce bien cela?

Madame Cutts : C'est tout à fait exact. Ici, nous fixons des échéanciers. Il serait ridicule de faire un mauvais travail, de s'exposer à des poursuites, de se retrouver en train de débattre de ces enjeux devant les tribunaux, parce que les échéanciers ne voudraient alors plus rien dire. Les échéanciers sont inextricablement liés à la qualité du travail, sinon ils ne veulent rien dire.

Le sénateur McCoy : J'ai une petite question complémentaire à poser. Je ne veux pas induire nos auditeurs en erreur. Les contestations juridiques des décisions reposent sur une base relativement limitée. Le fait que quelqu'un puisse contester n'est pas, en soi, une garantie de réussite et telle était votre prémisse, sénateur Lang. Loin de moi l'idée de polémiquer, mais je crois que nous devrions, pour qu'il en soit pris note, reconnaître que le processus d'appel comporte certaines limites.

Le sénateur Lang : Rien n'est jamais garanti. Je dis simplement qu'il y a une assurance supplémentaire, une raison pour laquelle les choses doivent être faites correctement.

Le sénateur McCoy : Peut-être.

Le sénateur Peterson : Madame Cutts, si j'ai bien compris, la LCEE proposée pour 2012 ne prévoit pas d'examen statistique annuel de la loi. Est-ce bien cela? Si oui, pourquoi?

Madame Cutts : Avez-vous parlé d'examen statistique?

Le sénateur Peterson : Oui, de la loi, soit un résumé des évaluations environnementales.

Madame Cutts : Une fois par an, nous ferions rapport au Parlement pour indiquer le nombre d'évaluations environnementales que nous aurions réalisées; nous indiquerions également si nous avons respecté nos échéanciers.

Le sénateur Peterson : Vous faites un examen annuel?

Madame Cutts : Oui, un rapport annuel au Parlement.

Le sénateur Peterson : Monsieur White, avant ce nouveau projet de loi, les mines d'uranium étaient assujetties à un examen environnemental aussi rigoureux que pour un réacteur nucléaire. Si j'ai bien compris, cela va désormais changer?

M. White : Non, cela ne va pas changer, Monsieur, pas du tout. M. Thompson pourrait vous faire un point à ce sujet.

Madame Thompson : Cette déclaration a été faite à plusieurs occasions. La CCSN a toujours fait en sorte que la portée d'une évaluation environnementale soit appropriée pour un projet. Les évaluations environnementales pour les mines d'uranium n'ont rien à voir avec les évaluations environnementales de l'uranium dans les centrales nucléaires. Les enjeux sont très différents. L'étendue et la complexité des évaluations sont très différentes.

Pour la plupart des mines d'uranium, nous avons travaillé de concert avec les provinces lorsqu'un processus coordonné répondait aussi bien aux besoins de la CCSN qu'à ceux de l'évaluation environnementale provinciale.

Le sénateur Peterson : Les permis sont désormais renouvelés pour trois ans ou plus. Combien de temps cela prend-il?

M. Elder : Les renouvellements des permis varient, mais vous vous intéressez à la Saskatchewan. Une mine située en Saskatchewan dispose d'un permis de huit ans et les autres ont actuellement un permis de cinq ans. Nous avons déjà expliqué aux responsables à quoi ressemblera le processus de demande, quand le temps sera venu pour eux de renouveler leur permis, l'automne prochain, mais la demande se fait un an avant la tenue d'audiences publiques. Nous nous attendons à ce qu'ils nous demandent des permis de cinq à dix ans.

Le sénateur Peterson : Ce sont de bonnes nouvelles.

Monsieur Steedman, à propos du projet Gateway, j'ai cru comprendre que l'examen est en cours. Tombe-t-il sous le coup des nouvelles règles ou des anciennes?

M. Steedman : Les amendements à la Loi sur l'Office national de l'énergie et la LCEE 2012 traitent tous de la question d'une commission d'examen conjoint dont la création est antérieure au projet de loi et qui se poursuit après. Les dispositions transitoires indiquent clairement que le président de l'Office national de l'énergie et le ministre de l'Environnement doivent, après promulgation du projet de loi, établir un échéancier pour l'achèvement de l'évaluation. Ce serait à eux de le faire.

Le sénateur Peterson : Les témoins qui ont jusqu'ici été approuvés — et j'imagine qu'ils sont assez nombreux à s'être manifestés — ont-ils été informés qu'il est fort possible qu'ils ne soient pas appelés à comparaître?

M. Steedman : Je ne pense pas pouvoir faire de commentaire là-dessus. Ce sera au président et au ministre de l'Environnement d'établir un échéancier. J'imagine que cela risque peut-être d'affecter le calendrier existant.

Le sénateur Peterson : Merci.

Le président : Nous avons deux petites questions complémentaires.

Le sénateur Johnson : Merci, monsieur le président. Je voulais obtenir une précision de M. White.

À propos de vos commentaires à la page 3, vous avez parlé du fait d'être constant avec les projets évalués en vertu de la loi. La CCSN va modifier les règlements de manière à établir formellement des échéanciers de 24 mois pour les décisions concernant les permis. Premièrement, à quoi cela servirait-il?

M. White : Nous établirions des échéanciers de 24 mois pour un projet, qu'il s'agisse d'une mine d'uranium ou d'une usine de concentration d'uranium, ou bien d'un important projet de modernisation, d'un grand projet de réhabilitation ou d'une nouvelle installation de gestion de déchets comme le DFGP, dans le Sud-Ouest de l'Ontario, voire d'une nouvelle construction. J'aime à croire que nous aurons une nouvelle construction, mais nous verrons.

Le sénateur Johnson : Vous dites ici que vous modifierez cette période de 24 mois.

M. White : Non, il ne s'agit pas d'un amendement; nous allons instaurer une période de 24 mois.

Le sénateur Johnson : Vous allez modifier les règlements.

M. White : Nous procéderons par voie de règlement.

Le sénateur Johnson : De quel échéancier s'agissait-il, avant?

M. White : L'échéancier, avant, n'était pas...

Le sénateur Johnson : C'est vrai, c'était là le problème. C'est d'ailleurs une des raisons pour cela.

Madame Thompson : Cela n'est pas réglementé, pour l'instant; on procède par entente de projet.

Le sénateur Johnson : C'est ce que je cherchais à faire ressortir.

Deuxièmement, lorsque vous parlez de préparer un site pour une installation nucléaire de catégorie 1 ou d'un permis pour un site, combien de temps prennent habituellement ces préparations et en quoi consistent-elles?

M. Elder : En vertu de nos règlements, les choses peuvent énormément varier, car la catégorie 1 contient une multitude de choses, de la compagnie qui fabrique du carburant pour un réacteur nucléaire, jusqu'au réacteur nucléaire, en tant que tel. La préparation d'un site pour un bâtiment de fabrication conventionnelle est rapide. Dans la plupart des cas, on combine le permis de préparation du site et le permis de construction des installations. La séparation se fait davantage quand on a affaire à un réacteur, notamment, et qu'il faut examiner plusieurs facteurs sur ce site, comme l'adéquation de l'approvisionnement en eau. Il y a un certain nombre d'enjeux à régler avant de commencer à construire un réacteur. Dans un tel cas, en fonction de la complexité de la situation, la société pourrait devoir passer plusieurs années à préparer le site.

Le sénateur Johnson : Merci.

Le sénateur Mitchell : La question d'examen statistique m'a également fait penser à la question d'examen législatif. Je crois que la loi prévoit désormais un examen législatif, tous les cinq ans, mais je crois que cela a été supprimé à la faveur de ces changements, n'est-ce pas?

M. Mongrain : La loi d'origine contient une clause qui prévoit un examen quinquennal par le ministre de l'Environnement. L'agence a réalisé l'examen en 2000 et 2001; les amendements ont été adoptés en 2003. Ces amendements comprenaient une clause d'examen septennal par un comité parlementaire. Le comité de l'environnement de la Chambre s'en est chargé au cours de la dernière année. Le projet de loi, sous sa forme actuelle, ne contient aucune disposition d'examen législatif.

Le sénateur Mitchell : Merci.

Le président : Sénateurs, avez-vous d'autres questions pour les témoins?

Comme il n'y en a pas, merci beaucoup. Vous avez été des nôtres pendant quatre bonnes heures et je crois que la séance a été fructueuse. Nous pensons que ce projet de loi renferme de bonnes choses. Merci beaucoup d'être venus.

Collègues, nous nous retrouvons jeudi matin pour entendre d'autres témoins et pour une mise à jour sur notre rapport.

(La séance est levée.)


Haut de page