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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 30 - Témoignages du 1er novembre 2012


OTTAWA, le jeudi 1er novembre 2012

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 3, pour examiner la teneur des éléments des Sections 4, 18 et 21 de la Partie 4 du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue à la présente réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la Colombie-Britannique au Sénat, et je suis le nouveau président du comité.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public ici présents et à tous ceux qui suivent nos débats à la télévision depuis toutes les régions du pays. Je vais maintenant vous présenter les membres du comité qui sont présents aujourd'hui autour de la table. Tout d'abord, le vice-président du comité, le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta. Sont également présents le sénateur Bert Brown, de l'Alberta; le sénateur Judith Seidman, du Québec; le sénateur Wallace, du Nouveau-Brunswick; le sénateur Patterson, du Nunavut et le sénateur Baker, de Terre-Neuve.

J'aimerais souhaiter la bienvenue à un nouveau membre du comité, à savoir le sénateur Ringuette, du Nouveau- Brunswick.

Le sénateur Dan Lang, du lointain Yukon, et le sénateur Paul Massicotte, du Québec, participent également à la réunion.

Notre très compétente greffière, Lynn Gordon, est parmi nous, de même que Sam Banks et Marc LeBlanc, de la Bibliothèque du Parlement.

Le 30 octobre, divers comités du Sénat ont été autorisés à examiner la teneur du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures, déposé à la Chambre de commune le 18 octobre 2012, avant que ce projet de loi ne soit soumis au Sénat. En d'autres termes, le comité a été autorisé à mener une étude préliminaire du projet de loi.

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a été autorisé à mener une étude préliminaire des éléments des Sections 4, 18 et 21 de la Partie 4 du projet de loi C-45.

À l'intention des personnes ici présentes et de celles qui suivent nos débats sur Internet et la chaîne parlementaire CPAC, je vais fournir quelques précisions concernant les sections sur lesquelles le comité va se pencher. Premièrement, il s'agit de la Section 4 de la Partie 4, qui modifie la Loi sur les pêches et quelques articles du projet de loi C-38 — Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures —, qui a reçu la sanction royale le 29 juin 2012. Les dispositions pertinentes de cette section de la loi, qui ne sont pas encore entrées en vigueur, concernent les quatre sujets suivants : l'obstruction du passage du poisson, l'affectation des amendes, la définition de pêche autochtone et les dispositions transitoires relatives aux permis permettant actuellement d'exercer des activités pouvant entraîner la mort du poisson ou la détérioration de son habitat.

Deuxièmement, il s'agit de la Section 18 de la Partie 4, qui concerne la Loi sur la protection des eaux navigables, dont l'application relève de Transports Canada. Parmi les modifications proposées, mentionnons celle de renommer Loi sur la protection de la navigation la Loi sur la protection des eaux navigables, et celle de restreindre son application aux eaux navigables énoncées à l'annexe 2 du texte législatif.

Troisièmement, la Section 21 de la Partie 4 porte sur des modifications de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Les divers comités, y compris le nôtre, qui sont autorisés à examiner la teneur d'éléments particuliers du projet de loi C-45 doivent déposer au Sénat leur rapport final au plus tard le 30 novembre 2012.

Honorables sénateurs, votre bureau a dû recevoir hier une trousse qui vous a été remise aujourd'hui, du moins je l'espère, et qui contient les notes documentaires qui ont été distribuées. Je ne les lirai pas toutes, mais aujourd'hui, je suis heureux de souhaiter la bienvenue aux représentants des trois principaux ministères touchés par les modifications proposées des sections susmentionnées du projet de loi C-45.

J'aimerais rappeler aux témoins que, pour faciliter le travail des interprètes, nous leur demandons de parler avec un débit modéré. Je suis certain qu'ils le savent tous déjà.

En outre, vous constaterez que les membres du comité tentent d'utiliser le moins de papier possible. Nous formons un comité qui s'occupe de questions environnementales. Ainsi, vous pourrez remarquer qu'un certain nombre de sénateurs, plus particulièrement le sénateur Mitchell, utilisent un iPad — s'il le fait, c'est non pas parce qu'il ne porte pas attention à ce que vous dites, mais parce qu'il prend des notes, que je peux lire d'ici. Je vais m'assurer que les notes qu'il prend sont pertinentes.

Nous allons commencer par les représentants de Pêches et Océans Canada, à savoir Kevin Stringer, sous-ministre adjoint, Secteur des sciences, des écosystèmes et des océans, et Jeff MacDonald, directeur général, Affaires législatives et intergouvernementales. Nous entendrons ensuite, de Transports Canada, Nathan Gorall et Ekaterina Ohandjanian. Enfin, nous entendrons les représentants de l'ACEE, soit John McCauley, directeur, Direction des affaires législatives et réglementaires, et Steve Mongrain. Nous allons procéder dans l'ordre où les questions abordées par ces représentants apparaissent dans le texte législatif. Cet ordre diffère un peu de celui qui figure sur l'ordre du jour, mais, pour la raison que je viens de mentionner, nous avons décidé de procéder dans cet ordre.

Kevin Stringer, sous-ministre adjoint, Secteur des sciences, des écosystèmes et des océans, Pêches et Océans Canada : Merci beaucoup. Je prendrai quelques minutes pour présenter une déclaration préliminaire, et je serai heureux de répondre ensuite à vos questions concernant les modifications proposées de la Loi sur les pêches qui figurent dans le projet de loi.

Je suis heureux de m'adresser à vous pour vous parler des nouvelles modifications proposées de la Loi sur les pêches qui figurent dans le projet de loi C-45, et je répondrai avec plaisir à vos questions à ce sujet. Les modifications proposées découlent des modifications de la Loi sur les pêches qui ont été apportées par suite de l'adoption, en juin, de la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable, ancien projet de loi C-38.

Plus particulièrement, les modifications proposées dans le cadre du projet de loi C-45 sont bien définies et très ciblées. Il y en a très peu et, pour l'essentiel, elles visent à apporter davantage de clarté et certitude juridiques à quelques-unes des modifications de la Loi sur les pêches qui ont été approuvées en juin.

Pour comprendre le présent projet de loi, il faut le replacer dans le contexte de l'ancien projet de loi C-38. Vous vous rappellerez que les modifications initiales de la Loi sur les pêches prévoyaient l'instauration d'un régime qui était axé sur la protection des pêches commerciale, récréative et autochtone du Canada; qui permettait de protéger ces pêches contre tous dommages sérieux pouvant leur être occasionnés; qui permettait de gérer les menaces posées à ces pêches par, entres autres, les espèces aquatiques envahissantes, et risquant de causer des problèmes à l'habitat du poisson; qui fournissait des outils améliorés de conformité et de protection de ces pêches; et enfin, qui facilitait l'établissement de partenariats avec les provinces, les territoires, les organisations du secteur de la conservation et d'autres intervenants de manière à ce que notre travail puisse être plus harmonisé avec le leur et que nous puissions obtenir de meilleurs résultats au chapitre de la protection des pêches.

Pour la plupart, les modifications contenues dans le projet de loi visent à accroître la clarté et la certitude juridiques relatives à quelques-uns de ces éléments. Il convient de souligner que la majeure partie des modifications substantielles de la Loi sur les pêches qui ont été approuvées en juin ne sont pas encore entrées en vigueur. Quelques-unes des modifications sont entrées en vigueur, mais les modifications majeures, non. Il est proposé que les nouvelles modifications proposées dans le cadre du projet de loi, si elles sont approuvées, entrent en vigueur en même temps que les modifications approuvées antérieurement.

[Français]

Cette initiative modifie la Loi sur les pêches et la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable pour apporter plus de précisions sur le plan juridique à des articles modifiés antérieurement et pour établir des pouvoirs de transition visant des autorisations actuelles susceptibles de nuire à l'habitat du poisson.

Par exemple, une disposition est ajoutée à l'article 40 pour faire verser toutes les amendes perçues aux termes de l'article 40 de la Loi sur les pêches à l'actuel fonds pour dommages à l'environnement pour qu'elles servent à des initiatives proactives visant à renforcer la protection des pêches du Canada.

[Traduction]

Une modification proposée concerne la définition du terme « autochtone » dans le contexte d'une pêche; le terme « subsistance » est remplacé par le terme « fins », tel qu'il est énoncé dans un accord sur une revendication territoriale, pour faire en sorte que la responsabilité de protéger les pêches définie dans les accords sur une revendication territoriale existants et futurs soit clairement visée par les dispositions législatives.

En ce qui a trait au passage du poisson, on propose la modification des dispositions pertinentes des articles 20 et 29 de la Loi sur les pêches de manière à ce qu'il soit manifeste que les dispositions de l'article 35, qui énoncent la principale interdiction contenue dans la loi, s'appliquent à tout ce qui peut obstruer le passage du poisson. Des dispositions transitoires visent à clarifier le fait qu'une autorisation octroyée en vertu de la version antérieure de la loi s'applique sous le régime de sa nouvelle version, et que les modalités dont s'assortit l'autorisation peuvent être appliquées conformément aux nouvelles dispositions de la loi.

Il s'agit là d'une vue d'ensemble très générale des modifications proposées, et je serai heureux de répondre à toute question que les sénateurs voudront bien me poser.

Le président : Nous passerons à la période de questions lorsque tous les témoins auront présenté leur exposé. À ce moment-là, les sénateurs pourront poser leurs questions aux témoins de leur choix. Je vais maintenant céder la parole à M. Gorall, de Transports Canada.

Nathan Gorall, directeur général, Groupe de travail, Programme de protection des eaux navigables, Transports Canada : Je vous remercie de me donner l'occasion de clarifier les objectifs et les avantages du projet de loi. Comme vous le savez, les modifications visant à moderniser la Loi sur la protection des eaux navigables ont été présentées au Parlement le 18 octobre dans le cadre de la nouvelle Loi d'exécution du budget. Au cours des prochaines minutes, je passerai en revue quelques-unes des dispositions de la loi et vous parlerai de leur raison d'être.

Tous les échelons de gouvernement, l'industrie et les petits constructeurs privés se plaignent depuis longtemps du fait qu'il faut beaucoup de temps pour faire approuver des projets au titre de la Loi sur la protection des eaux navigables, non seulement en raison du temps nécessaire, mais également en raison des coûts supplémentaires rattachés à l'attente des approbations. Ils se demandent pourquoi, si la loi vise à appuyer les échanges commerciaux, le fardeau réglementaire actuel a pour effet d'ériger de multiples obstacles à la navigation commerciale. Pour traiter cette question, il est important de revenir en arrière et de se pencher sur l'évolution de la LPEN.

L'Acte de l'Amérique du Nord britannique a conféré au gouvernement fédéral la compétence exclusive en matière de transport maritime et de navigation. Cela lui a conféré le pouvoir de mettre en place la Loi sur la protection des eaux navigables, que l'on désigne, à des fins de concision, sous l'appellation de LPEN. À l'origine, lorsqu'elle a été créée, en 1882, la loi visait à approuver les projets d'infrastructure dans les voies navigables qui appuient les échanges commerciaux. Elle visait également à établir un équilibre entre la circulation efficace du trafic maritime commercial et le besoin de construire des ouvrages susceptibles d'obstruer la navigation.

En fait, la première version de la loi s'intitulait « Un acte concernant les ponts établis en vertu d'actes provinciaux sur des eaux navigables ». Ce titre illustre explicitement l'objectif de la loi, à savoir autoriser la construction d'ouvrages essentiels tels que des ponts, des barrages et des quais.

Je tiens à insister sur le point suivant : pour l'essentiel, la LPEN légalise la construction d'ouvrages qui pourraient autrement porter atteinte au droit du public à la navigation en vertu de la common law. Le droit à la navigation en common law, qui existe depuis l'époque de l'Empire romain, assure le passage libre et sans entraves sur les eaux navigables.

Au cours des quelque cent dernières années, les tribunaux ont interprété de façon libérale la question de la navigabilité. À l'heure actuelle, tout ouvrage construit sur un cours d'eau navigable, même s'il est uniquement emprunté par un canoë, est assujetti à la loi. Cela a considérablement élargi la portée de l'application de la LPEN, qui va bien au-delà de la navigation commerciale.

La loi s'applique actuellement à tous les cours d'eau, même les ruisseaux et les autres eaux où il n'y a généralement pas de navigation commerciale. Toutes sortes de petits projets n'ayant pas d'incidence sur la navigation ou sur les eaux utilisées pour les activités de navigation récréative de portée limitée ou négligeable doivent actuellement être examinés par Transports Canada. Cela se traduit par un énorme arriéré pour le ministère.

En 2008 et en 2009, divers comités parlementaires — y compris des comités sénatoriaux — ont examiné la loi. Plus particulièrement, des provinces et des municipalités ont demandé que les voies navigables peu utilisées soient exclues de la supervision de Transports Canada. Le ministère a aussi appuyé une révision de la loi, et a réclamé un régime moderne simplifié qui réduirait le nombre d'examens inutiles de projets.

En 2009, certaines améliorations accessoires ont été apportées. Principalement, l'Arrêté sur les ouvrages et les eaux secondaires est entré en vigueur. Il en résulte que les ouvrages à faible risque, par exemple un quai ou une remise à bateaux, peuvent être construits comme s'ils étaient préapprouvés. Fait intéressant — et il s'agit d'une observation cruciale —, au cours des trois années qui ont suivi l'adoption, en 2009, de ces modifications, aucune plainte découlant de cet arrêté n'a été portée à l'attention du ministère.

Malgré cette amélioration, Transports Canada demeure aux prises avec un arriéré considérable de demandes; des retards et une incertitude en découlent, ce qui décourage les investissements des secteurs public et privé. Par conséquent, les administrations municipales, les gouvernements provinciaux et territoriaux, l'industrie et les petits constructeurs privés nous ont tous exhortés à apporter des modifications importantes à la loi.

La Fédération canadienne des municipalités a présenté de nombreux exemples de retard dans la construction d'infrastructures critiques qui se sont traduits par des coûts supplémentaires considérables. Souvent, ces plaintes proviennent de petites collectivités où vivent peu de contribuables pour payer la note. Les représentants municipaux de l'Alberta nous ont dit qu'ils sont responsables d'environ 9 700 ponts dans cette province. Bon nombre de ces ponts enjambent des petites voies navigables, de sorte qu'il faut obtenir une approbation de Transports Canada avant d'entreprendre des travaux de réfection ou de remplacement. Tout le pays est touché par des problèmes de ce genre.

Par exemple, si le ministère des Transports du Québec souhaite remplacer le garde-fou d'un pont et en repaver la chaussée, il faudrait qu'un examen officiel au titre de la LPEN soit mené au préalable, ce qui retarderait sans doute inutilement le projet.

Sous le régime de la loi actuelle, si le pont Maryland, à Winnipeg, s'effondrait dans la rivière Assiniboine en raison d'inondations printanières, les autorités ne pourraient pas le reconstruire sans d'abord obtenir une approbation au titre de la LPEN ou du programme.

Ce ne sont pas juste les grandes entreprises de construction qui réclament ces changements. Nous approuvons encore des centaines de quais et de remises à bateaux chaque année. Même après l'entrée en vigueur de l'Arrêté sur les ouvrages secondaires, nous avons approuvé, au cours des trois dernières années seulement, la construction de 80 quais sur un seul et même lac albertain. En moyenne, en raison de l'arriéré, il faut environ un an pour traiter chacune de ces demandes soumises pour la construction d'un quai. Pour cette raison, la majeure partie des groupes qui soumettent fréquemment des demandes font appel à nous pour que nous réduisions le fardeau réglementaire et accélérions le processus d'approbation.

Il y a d'autres préoccupations concernant la loi que nous n'avons pas été en mesure d'atténuer au moyen des modifications de 2009. L'une des questions qui ont été portées à notre attention concernait le besoin de renforcer les amendes et les sanctions à l'égard des personnes ou des groupes qui contournent la loi.

Avant de conclure, j'aimerais me pencher sur quelques détails.

Les nouvelles dispositions législatives tiennent compte de toutes ces questions. Elles permettront de rationaliser et de mettre à jour la loi en vue de la rendre plus adaptée aux réalités des navigateurs et des constructeurs qui exercent leurs activités sur les eaux canadiennes et les eaux limitrophes.

Le plan proposé comporte quatre éléments clés. Premièrement, nous consacrons notre temps et nos ressources exclusivement aux voies maritimes les plus achalandées du Canada. Les dispositions législatives modifiées définiraient clairement les voies maritimes exigeant un examen réglementaire avant le début des travaux de construction liés à un projet. Seuls les travaux considérés comme susceptibles de nuire considérablement à la navigation devraient faire l'objet d'une approbation. Ainsi, il nous serait possible de nous concentrer sur les plans d'eau où la navigation est la plus forte ou qui sont les plus fréquentés du pays. Cette conclusion repose sur des statistiques qui indiquent des niveaux élevés de navigation de plaisance ou de mouvements de fret. Cette modification nous permettrait d'étudier en détail les projets sur ces importantes voies navigables et de veiller à ce qu'ils soient conformes à toutes les exigences législatives.

Cela dit, les gouvernements et les promoteurs n'auraient pas carte blanche pour construire ce qu'ils veulent là où ils le veulent sur les voies navigables non inscrites sur la liste.

Comme je l'ai déjà dit, le droit de navigation est protégé depuis des siècles en vertu de la common law. Ce droit continuera de protéger les plaisanciers et les autres utilisateurs récréatifs qui ne peuvent pas parvenir à une entente avec leurs voisins sur les voies navigables partagées.

Deuxièmement, un autre élément clé du plan tient à l'accroissement de l'ampleur de la catégorie des ouvrages secondaires admissibles au titre de l'Arrêté sur les ouvrages et les eaux secondaires. Cela permettrait à des projets à plus faible risque d'être préapprouvés parce qu'ils ont très peu d'incidence — voire aucune — sur la navigation.

Troisièmement, les constructeurs qui prévoient mener des projets sur des cours d'eau non répertoriés pourraient choisir, s'ils le souhaitent, d'être assujettis aux dispositions législatives. Ils pourraient demander que le ministre examine et, le cas échéant approuve leurs projets de la même façon que le seraient des projets de construction sur des eaux répertoriées. Cela aurait l'avantage de procurer une plus grande certitude en ce qui concerne la construction d'ouvrages sur des cours d'eau navigables non répertoriés.

Enfin, quatrièmement, le titre de la loi serait changé. Elle porterait dorénavant le titre Loi sur la protection de la navigation, ce qui confirmerait le fait qu'elle vise principalement la protection de la navigation.

Je tiens à souligner que, à lui seul, Transports Canada administre huit autres lois qui protègent la sécurité et la navigation maritimes, y compris la Loi sur la marine marchande du Canada. Il ne se produira absolument aucune détérioration de la sécurité publique.

Sur ce, je tiens à mentionner que nous serons heureux de tenter de répondre à toute question que vous pourriez avoir à nous poser.

Le président : Merci beaucoup.

Enfin, nous allons entendre John McCauley et Steve Mongrain, de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Je ne sais pas si vous allez nous présenter une ou deux déclarations préliminaires.

John McCauley, directeur, Direction des affaires législatives et réglementaires, Agence canadienne d'évaluation environnementale : Merci beaucoup. Je suis heureux d'être ici ce matin pour vous présenter un exposé et répondre à vos questions sur les modifications proposées de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. J'ai quelques observations à formuler. Je vais d'abord passer en revue les modifications proposées, et je serai ensuite heureux de répondre à vos questions.

Comme vous le savez, la Section 21 de la Partie 4 apporte un certain nombre de modifications mineures de nature technique à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012. Comme vous le savez peut-être aussi, cette loi est entrée en vigueur le 6 juillet dernier.

[Français]

Les articles 425, 426, 427, 429 et 431 visent à assurer la concordance entre les versions anglaise et française de la loi. L'article 428 vise à corriger une omission en ce qui concerne les conditions pouvant être définies dans une déclaration de décision.

[Traduction]

Comme vous le savez, à la fin d'une évaluation environnementale, une déclaration de décision est transmise au promoteur d'un projet. Cette déclaration énonce la conclusion tirée en ce qui concerne la question de savoir si le projet est susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants. Elle énonce également des conditions obligatoires pour le promoteur. Celles-ci portent notamment sur les mesures d'atténuation et les exigences qui feront partie d'un programme de suivi.

La modification propose une formulation plus générale — « sont notamment les suivantes » au lieu de « sont les suivantes » — relativement aux conditions visant à assurer qu'une déclaration de décision peut comprendre des exigences administratives comme l'établissement de rapports sur la mise en œuvre des mesures d'atténuation ou la fourniture de renseignements sur la surveillance et le suivi.

L'article 430 précise que l'obligation imposée aux autorités fédérales de s'assurer que les mesures qu'elles prennent relativement aux projets réalisés sur le territoire domanial ne sont pas susceptibles d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants est limitée aux effets environnementaux occasionnés par les composantes du projet réalisées sur le territoire domanial.

Enfin, l'article 432 vise à combler une lacune dans les dispositions transitoires. Il existe actuellement une possibilité qu'un projet soit soustrait à une évaluation environnementale aux termes des dispositions transitoires, même s'il serait assujetti à une évaluation environnementale au titre de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale antérieure et qu'il le serait normalement en vertu de la nouvelle loi. La modification ferait en sorte qu'un projet désigné, exempté aux termes des dispositions transitoires actuelles soit assujetti aux exigences de la loi s'il est établi, avant le 1er janvier 2014, que le projet exige une décision fédérale qui aurait déclenché une évaluation environnementale sous le régime de la loi antérieure.

Il s'agit là des huit modifications proposées de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup.

J'ai d'abord deux brèves questions à poser, et je céderai ensuite la parole au vice-président du comité, le sénateur Mitchell.

Avons-nous une idée du montant des amendes qui est destiné aux pêcheurs? Comment les sommes découlant de ces amendes seront-elles affectées?

M. Stringer : La modification proposée de l'article 40 prévoit que les fonds découlant de toute amende perçue soient versés dans le Fonds pour dommages à l'environnement plutôt qu'au Trésor. Il était possible de faire cela dans le passé, mais il revenait à un tribunal de décider de l'endroit où les sommes allaient être versées. Il y a deux ou trois éléments dont il est important de tenir compte au moment d'examiner les possibilités que cela offrirait. L'un d'entre eux est le type d'amende perçue. D'une année à l'autre, c'est différent. Les amendes en vertu de l'ancienne Loi sur les pêches n'avaient ni minimum, et le maximum était de 300 000 $. Selon les modifications proposées qui figuraient dans le projet de loi C-38, elles sont bien plus élevées. Il y a une pénalité minimale de 5 000 $. Il y a une augmentation progressive, de la première infraction à la deuxième, à la troisième infraction, et ainsi de suite, et il y a une différence entre les pénalités imposées aux grandes sociétés, aux petites sociétés et aux particuliers.

Il est difficile de dire à combien s'élèveront les amendes perçues dans l'avenir, mais, par le passé, elles variaient de 500 à 10 000 $ en moyenne. Il y a eu des amendes très substantielles, avec un maximum, je pense, de 300 000 $. Il y en a eu entre 9, je pense que c'était en 2010-2011, et 32, en 2004-2005. C'est le nombre habituel d'amendes que nous avons souvent et qui pourrait s'appliquer ici.

Le Fonds pour dommages à l'environnement est un compte à fins déterminées établi afin que les fonds provenant des amendes — non pas en vertu seulement de la Loi sur les pêches, mais également de différentes lois — puissent servir aux projets de remise en état et aux projets liés à l'amende imposée. Il y en a eu des exemples au cours des dernières années. En voici un : il y a quelques années, une société immobilière de la Colombie-Britannique a reconnu sa culpabilité à l'accusation d'avoir modifié illégalement l'habitat du poisson, et elle s'est vu imposer une amende de plus de 300 000 $. Les frais de réparation ont été versés à la région du lac Shuswap, et 70 000 $ ont été versés au Conseil du bassin du Fraser pour des travaux spécifiques de remise en état du site.

Il existe d'autres exemples au Canada, mais l'idée, c'est de s'assurer que les amendes pour des infractions liées à la protection des pêches servent à la remise en état et à la protection des pêches. Les sommes perçues sont portées au crédit du Fonds pour dommages à l'environnement, qui est administré par Environnement Canada, et peuvent ensuite être versées à des groupes particuliers, à des groupes s'intéressant aux bassins versants et à d'autres groupes qui travaillent effectivement à la protection des pêches.

Le président : Simplement pour m'éclairer à ce sujet, si une amende — et j'utilise un exemple de 300 000 $ — est imposée à une personne qui a fait quelque chose, est-ce que cet argent servirait d'abord à réparer ce qui a eu lieu ou est-ce que le propriétaire ou la personne qui, en réalité, a contrevenu en premier lieu est responsable de remettre en état ce qu'il a endommagé?

M. Stringer : Si quelqu'un est reconnu coupable d'une infraction, le juge dira souvent : « Vous devez réparer cela ». Le tribunal lui ordonnera de réparer le tout, précisément à l'endroit en question, puis une amende sera imposée en plus. C'est le montant de cette amende qui serait porté au crédit du Fonds pour dommages à l'environnement, et qui est appliqué aux travaux de remise en état, pour la protection des pêches en l'occurrence.

Le président : Lorsque vous dites « le tribunal », l'affaire finit-elle toujours devant le tribunal? C'est ce qui s'est passé?

M. Stringer : En ce qui concerne une amende, oui. Lorsque nous portons des accusations contre une personne, l'affaire se rend devant le tribunal. Elle se défendra ou non, mais le tribunal imposera une peine.

Le président : Pour une amende moins élevée, disons pour un particulier, l'affaire ne se rendra pas devant le tribunal. Il est impossible de se battre contre le gouvernement. On le sait très bien depuis longtemps. Vous risquez d'être ruiné très rapidement si vous le faites.

Est-ce que l'argent versé par un particulier afin de payer l'amende qui lui a été imposée pour une infraction liée aux pêches est simplement porté au crédit du fonds, et on décide ensuite à quel endroit il sera dépensé?

M. Stringer : C'est exact.

Le président : Je pense que le sénateur Lang a une question supplémentaire.

Le sénateur Lang : J'aimerais simplement obtenir des précisions sur le montant projeté par année. À en juger d'après les dernières années, avec la liste des amendes en vigueur, vous avez dit neuf et 32. Voulez-vous dire 9 000 $?

M. Stringer : Je veux dire neuf cas pour lesquels des amendes s'appliquaient, et 32 cas dans une autre année. Chaque année, cela dépend des types d'amendes perçues et du nombre d'infractions. Dans l'avenir, cela dépendra du nombre d'infractions.

Le sénateur Lang : Avez-vous les montants pour les trois dernières années?

M. Stringer : Nous pouvons les obtenir de façon précise. Aujourd'hui, j'ai le nombre d'infractions et l'amende moyenne.

Le président : Ma deuxième question porte sur la disposition relative à la pêche autochtone et le fait qu'on changera « à des fins de subsistance » pour « à des fins de consommation personnelle ». Je crois que c'est la modification. Cette modification a-t-elle suscité des commentaires de la part des Premières nations? Je comprends que vous dites que cela fait allusion aux accords sur une revendication territoriale, mais dans la province d'où je viens, plus de 200 bandes n'ont pas d'accord, même si nous nous évertuons à en obtenir. Je pense que c'est la plus importante parmi toutes les provinces au Canada. Est-ce que cette modification a une incidence sur les Premières nations qui n'ont pas conclu d'accord sur une revendication territoriale?

M. Stringer : Essentiellement, la définition fournie, qui a été adoptée dans le projet de loi C-38, indiquait qu'« autochtone » qualifie la pêche pratiquée à des fins de consommation personnelle ou de subsistance ou à des fins sociales ou cérémoniales. Selon la modification proposée, « autochtone » qualifie la pêche pratiquée à des fins de consommation personnelle, à des fins sociales ou cérémoniales et à des fins prévues dans un accord sur des revendications territoriales. La raison pour laquelle nous avions le mot « subsistance » dans la version précédente, c'est que le mot figure dans les accords sur des revendications territoriales. Notre proposition de modification visant à inclure « à des fins prévues dans un accord sur des revendications territoriales » permet d'indiquer que l'on pourrait inclure d'autres éléments dans l'avenir, outre la pêche pratiquée à des fins de subsistance. Nous voulons nous assurer que les dispositions relatives à la protection des pêches s'appliquent à la pêche pratiquée à des fins de consommation personnelle ou à des fins sociales ou cérémoniales ainsi qu'à des fins prévues dans un accord actuel ou futur sur des revendications territoriales. C'est pourquoi nous avons utilisé ce libellé.

Le sénateur Mitchell : Félicitations, monsieur le président, de cette première réunion en tant que président. J'aurais aimé que vous me disiez bien avant qu'il est impossible de se battre contre le gouvernement parce que j'ai justement passé la majeure partie de ma vie adulte à le faire, dans l'opposition.

Le président : Parfois, il faut plus de temps.

Le sénateur Mitchell : Gagner est une chose, mais on peut sûrement se battre.

Ces modifications surviennent dans le contexte de nombreux faits qui renforcent l'urgence et l'intensité des préoccupations des gens à l'égard de telles modifications. Hier, monsieur le juge Cohen a présenté son étude sur les problèmes liés au saumon rouge. Il s'est dit fort préoccupé du déroulement de ces modifications qui touchent les pêches. C'est très percutant et très révélateur. Les gens intéressés ouvrent ce document et constatent que 99,7 p. 100 des rivières au Canada ne sont pas inscrites sur la liste des rivières protégées, et 99,9 p. 100 des lacs ne sont pas inscrits sur la liste, ou vice-versa. Quoi qu'il en soit, beaucoup ne sont pas inscrits. C'est réellement urgent et préoccupant. La question est technique, et je vais l'effleurer.

Ces modifications semblent ouvrir la porte à la possibilité de déléguer à quelques endroits au moins et peut-être plus. On peut déléguer, entre autres, des responsabilités aux municipalités et aux provinces, ce qui n'est pas nouveau, mais que l'on retrouve ici encore une fois, et on peut en déléguer à des tiers. J'aimerais connaître votre avis à cet égard, de façon générale. Je crois que cela fait partie de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. De quelle façon évalue-t-on la capacité d'une municipalité de s'acquitter des responsabilités qui pourraient être déléguées? Quels sont les autres tiers envisagés lorsque ce terme est utilisé?

M. McCauley : Dans le contexte de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, un certain nombre d'instruments sont inclus pour faciliter la double gestion avec les provinces en particulier. Dans le projet de loi, des dispositions prévoient la délégation de la conduite de l'évaluation à des tiers. Une province ou un autre organisme pourrait être chargé de l'évaluation et de la conformité avec les exigences de la LCEE de 2012 — essentiellement, le respect du processus prévu dans la loi. Il y a également des dispositions qui autorisent la substitution d'un processus provincial ou d'un processus aux termes d'une revendication territoriale ou d'une entente avec les bandes autochtones avec le processus prévu dans la LCEE de 2012. En pareil cas, le processus fédéral est suspendu, et le processus provincial est amorcé pour satisfaire aux exigences de la LCEE de 2012 et pour produire les renseignements requis afin de permettre au décideur de prendre une décision; dans ce cas, afin que le ministre fasse une déclaration.

Le sénateur Mitchell : Je pensais que cela était déjà prévu.

M. McCauley : Oui, ces modifications n'ont pas d'incidence sur ces dispositions.

Le sénateur Mitchell : Quelle est leur raison d'être? Leur incidence?

M. McCauley : C'était l'occasion d'harmoniser l'intention originale avec le libellé de la loi. Pendant les trois ou quatre mois où nous avons dû mettre en œuvre la loi, d'autres ont examiné le libellé et ont suggéré d'interpréter différemment ce que nous avions écrit; c'est pour préciser l'intention originale.

Le sénateur Mitchell : L'article 430 du projet de loi mentionne que les autorités fédérales devront prendre des mesures concernant les projets qui ne sont pas désignés — des projets sur le territoire domanial — seulement pour les composantes du projet réalisées sur le territoire domanial. Je crois comprendre que, si quelqu'un construit une raffinerie — nous pourrions le faire et garder des emplois au Canada — à côté d'un territoire domanial, par exemple une voie navigable, et que toutes sortes de choses sont déversées dans la voie navigable, mais, en réalité, pas sur le territoire ou que seulement le garage pour l'équipement lourd était situé sur le territoire, est-ce que cela voudrait dire que le gouvernement ne serait aucunement responsable de vérifier les effets environnementaux occasionnés?

M. McCauley : Non, je ne pense pas. En ce qui concerne votre exemple d'une raffinerie, nous avons un règlement désignant les activités concrètes qui précise les types de projet auxquels la loi s'applique. Les raffineries sont un type de projet figurant sur cette liste. De même, nous sommes tenus d'examiner les situations où ces types de projet ont des effets à l'extérieur du territoire domanial et sur le territoire domanial. En fait, nous pourrions examiner la situation lorsqu'un projet désigné a des effets sur le territoire domanial.

Le sénateur Mitchell : À propos de la délégation, il y a délégation en vertu de la Loi sur la protection de la navigation. Est-ce vrai? De quelle façon allez-vous évaluer si celui à qui vous déléguez les responsabilités a les ressources pour gérer ces travaux?

M. Gorall : Les collectivités ou les autorités locales ont des occasions d'interagir avec le ministre concernant les modifications que nous proposons. Par exemple, dans la liste des voies navigables, on prévoit qu'une autorité locale peut nommer une voie navigable que le gouvernement pourrait ajouter à cette liste au moyen d'un règlement.

Ou encore, le ministre délègue à une autorité locale les pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de la loi s'ils parviennent à un accord et que le ministre est convaincu que l'autorité a les ressources voulues pour mettre en œuvre la loi au nom du ministre et qu'elle a l'intention de le faire. J'ajouterais que le ministre a le pouvoir de déléguer une partie de ses pouvoirs à d'autres organismes, par exemple un autre organisme de la Couronne. On pourrait penser, disons, à un port. Dans ce cas, si un accord est conclu, les pouvoirs pourraient être délégués à cette autorité.

Le sénateur Mitchell : C'est à se demander si le ministre aura encore des choses à faire.

À une certaine époque, une évaluation environnementale fédérale était déclenchée par des éléments qui devaient être évalués en vertu de la Loi sur la protection des eaux navigables; je pense que ces éléments ont été essentiellement exclus de sorte qu'une mesure ou un processus prévu dans la LPEN ne déclenche pas une évaluation. J'ai l'impression que vous pourriez réaliser un projet non désigné qui pourrait avoir une incidence sur l'habitat du poisson d'une façon plus restreinte encore que celle exigée par les modifications les plus récentes. Le projet non désigné est réalisé sur une voie navigable non énumérée et aura des effets sur les pêches, ou quelqu'un soupçonne que ce sera le cas, aux termes de la Loi sur les pêches. De quelle façon pourrions-nous déclencher une évaluation environnementale de ces effets sur les pêches?

M. Stringer : Si le projet ne relève pas de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, mais qu'il a une incidence sur les pêches, la Loi sur les pêches mentionne essentiellement que, s'il y a des répercussions sur la pêche commerciale, récréative ou autochtone, il faut obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.

Vous devrez obtenir une autorisation de notre ministre en vertu de l'article 35, qui a été adopté en juin. Essentiellement, c'est l'interdiction qui indique que vous ne pouvez pas entreprendre des travaux ou une activité qui entraîne des dommages à la pêche commerciale, récréative ou autochtone ou à tout poisson dont dépend une telle pêche. Indépendamment de la réalisation d'une évaluation environnementale, il faut obtenir l'autorisation en vertu de la Loi sur les pêches si des dommages sérieux sont causés à une pêche commerciale, récréative ou autochtone. Ce n'est pas forcément une évaluation environnementale complète, mais on étudierait l'aspect touchant les pêches.

Le président : Avez-vous une question supplémentaire à ce sujet?

Le sénateur Patterson : J'en ai une. Avec tout le respect que je dois à notre vice-président, il a dit dans sa première question que 99,7 p. 100 des eaux ne sont pas protégées.

Le sénateur Mitchell : J'ai dit qu'elles « ne sont pas inscrites sur la liste ».

Le sénateur Patterson : Vous avez dit « pas inscrites »? Je pensais que vous aviez dit « pas protégées ».

Dois-je comprendre que la Loi sur la protection des voies navigables portait non pas réellement sur la protection des eaux, mais sur la protection de la navigation commerciale? Elle était correctement désignée lorsqu'elle a été présentée la première fois puisqu'elle concernait les ponts traversant des eaux navigables. Beaucoup de gens sont un peu perdus : ils pensent que nous fragilisons nos mesures de protection des eaux tandis que, en réalité, il a toujours été question de la navigation, et la common law prévoit des mesures de protection des eaux en ce qui concerne la navigation. Est-ce exact, et la loi a-t-elle réellement été mal désignée lorsqu'on l'a intitulée Loi sur la protection des eaux navigables?

M. Gorall : Je ne peux certainement pas me prononcer sur des décisions prises en 1882, mais j'affirmerais que la majeure partie de vos propos sont exacts. Je veux préciser un élément qui est généralement mal compris : quand la loi a été créée en 1882, elle ne l'a pas été pour protéger la navigation; en fait, elle a été créée comme une exception statutaire à la common law. Des ponts ont été érigés au-dessus de voies navigables très achalandées au pays, et ils ont commencé à créer des conflits.

Je précise : comme le gouvernement fédéral a la compétence exclusive à l'égard du transport maritime et de la navigation dans la Constitution, c'est lui qui a présenté une loi qui autoriserait des exceptions à un obstacle à la navigation. C'est ce que fait la loi. Le reste de ce que vous avez décrit est tout à fait exact. Le problème que nous avons constaté, c'était que, si elle n'était pas appelée la Loi sur la protection des voies navigables, elle ne renvoie pas à la notion de protection des eaux elles-mêmes dans l'esprit des Canadiens. Je ne suis pas en mesure de m'exprimer au nom d'autres ministères, mais ce sur quoi on avait mis l'accent en 1882, et que nous aimerions continuer à faire, c'est de permettre des exceptions au droit de navigation dans la common law afin que les projets intéressants puissent aller de l'avant. Cela n'a rien à voir avec l'environnement ou la qualité de l'eau potable; l'accent est mis uniquement sur la navigation.

Le sénateur Baker : J'aimerais féliciter les témoins de leur exposé et vous souhaiter la bienvenue également en tant que nouveau président du comité. Après avoir été ministre de l'Énergie de la province de la Colombie-Britannique pendant une dizaine d'années, vous étiez bien préparé pour présider notre comité.

Vous remarquerez que les questions supplémentaires ont été posées par l'ancien premier ministre des Territoires du Nord-Ouest, le sénateur Patterson, et un ancien ministre de plusieurs ministères du Yukon. Avec un peu de chance, nous arriverons à maintenir l'ordre quand ces sénateurs poseront leurs questions supplémentaires. C'est simplement parce qu'ils ont eu à administrer ces sujets pendant de si nombreuses années et qu'ils complètent bien le comité.

J'ai une question principale, et elle porte sur tout ce que les journaux publient aujourd'hui au Canada à propos de l'enquête judiciaire en Colombie-Britannique sur ce qui est arrivé aux saumons qui doivent remonter les rivières pour frayer, sur leur disparition et sur les propos du juge Cohen concernant les modifications particulières qui sont actuellement étudiées.

J'imagine que M. Stringer a probablement passé une nuit blanche à essayer de trouver les mots appropriés pour décrire ces modifications. Toutefois, nous vous assurons que vous êtes le messager, et nous n'allons pas tirer sur le messager. Jetons un coup d'œil rapide sur la modification qui est faite. En vertu de l'ancien projet de loi, le projet de loi C-38, sous les interdictions générales en vertu de la Loi sur les pêches, les articles 26 et 27 de la loi ont été éliminés, supprimés. L'intitulé de l'article 26 est — et je pense qu'il s'agit du saumon qui remonte les rivières — « Ouverture permanente du chenal principal ». L'article 26, qui est maintenant enlevé de la loi, indiquait ce qui suit :

Un tiers de la largeur des cours d'eau et au moins les deux tiers à marée basse de la largeur du chenal principal des courants de marée doivent toujours être laissés libres; il est interdit d'y employer ou d'y placer des filets ou autres engins de pêche, des grumes de bois ou des matériaux de quelque nature que ce soit.

Maintenant, en vertu de la loi qui est présentée, ce paragraphe est remplacé par l'alinéa 29(1)b) :

Il est interdit de construire, d'utiliser ou de mouiller tout engin ou équipement de pêche tel que filet simple, filet- piège ou senne qui : [...] obstrue plus des deux tiers de la largeur d'un cours d'eau ou plus d'un tiers de la largeur à marée basse du chenal principal d'un courant de marée.

Qu'est-il arrivé aux grumes de bois? Qu'est-il arrivé aux autres matériaux qui étaient indiqués ici? Il est interdit d'y employer ou d'y placer des grumes de bois ou des matériaux de quelque nature que ce soit?

C'est ma question principale. Vous avez enlevé les grumes de bois et tous les autres matériaux, et vous les avez simplement remplacés par engin ou équipement de pêche.

M. Stringer : La raison pour laquelle ces modifications sont proposées par rapport à l'ancien projet de loi C-38, c'est pour préciser que les grumes de bois, les barrages et les autres obstacles sont visés à l'article 35. L'interdiction de l'article 35 s'applique à tout obstacle, y compris les grumes de bois et les barrages et toute autre chose faisant obstacle.

Lorsque cette loi a été présentée en juin, des intervenants ont exprimé des préoccupations en disant : « Attendez un peu, vous avez une interdiction en vertu de l'article 20 qui stipule qu'il est interdit de faire telle chose et il n'y a pas de plan d'autorisation ». Nous avons dit que le plan d'autorisation, c'est l'article 35. Nous avons compris que ce n'est pas clair.

Nous avons supprimé cet article, et nos gestionnaires des pêches ont dit que nous avons absolument besoin de cet article pour nous assurer que des gens ne jetteront pas un filet dans la rivière. Par conséquent, nous l'avons déplacé dans cet article sur la gestion du poisson. Toutefois, les grumes de bois et les obstacles ou toute autre chose faisant obstacle sont visés à l'article 35, selon lequel il est interdit de causer des dommages sérieux à une pêche commerciale, récréative ou autochtone ou à tout poisson dont dépend une telle pêche, sauf autorisation. C'est le plan d'autorisation pour les barrages, les grumes de bois et les autres choses. Nous voulions nous assurer d'avoir des éléments précis dans le texte pour la gestion du poisson et les filets.

Le sénateur Baker : Toutefois, cela ne couvre pas les poissons qui ne sont pas visés par ces trois types de pêche et les poissons qui y vivent.

M. Stringer : Vous avez tout à fait raison; il s'agit de la pêche commerciale, récréative ou autochtone. Par ailleurs, on nous a demandé quelle serait l'incidence de cette modification. Combien de fois avons-nous eu recours à cet article au cours des 20 dernières années? Nous n'avons pas utilisé cet article, sauf pour la gestion des pêches. Ce que nous disions, c'est que l'article 35 s'applique de toute façon, et cela le précise, tout simplement.

Le sénateur Baker : Je peux comprendre ce que vous dites. Vous avancez une explication logique, mais cela laisse quand même la possibilité d'offrir une protection complète, sur le plan de la conservation, aux espèces qui ne sont pas précisément visées par une licence ou un permis, et pour lesquelles une licence ou un permis est demandé.

Voici ma question supplémentaire concernant ce que vous avez dit. Je conviens avec vous que le mot « obstacle » à l'article 2 de la Loi sur les pêches est défini de la façon suivante : « barrage, glissoire ou toute autre chose faisant obstacle au passage du poisson ». Toutefois, aux termes de l'article que vous présentez, il est indiqué « l'obstruction visée à l'alinéa 1a) ou b) ». Quels sont ces alinéas? Vous avez enlevé les grumes de bois et les autres matériaux et vous les avez remplacés seulement par « engin et équipement de pêche ».

M. Stringer : C'est le but de cet alinéa. Les éléments faisant obstacle qui font partie de la définition d'« obstacle » au paragraphe 2 seraient visés au paragraphe 35.

Le sénateur Baker : Seulement pour les espèces spécifiques.

M. Stringer : Oui, l'accent est mis sur la pêche commerciale, récréative et autochtone, le poisson dont dépend une telle pêche et les dommages sérieux à ces poissons.

Le sénateur Baker : C'était remarquablement bien dit, monsieur Stringer, et je vous remercie de l'avoir précisé.

Le sénateur Lang : En ce qui concerne la question des modifications touchant les pêches, je pense que les intentions du ministère sont valables pour ce qui est de présenter des modifications visant à préciser les pêches et la loi parce que, dans le passé, je pense que ce n'est pas un secret, il y avait beaucoup de confusion. Par la suite, beaucoup de personnes devant se conformer à la Loi sur les pêches ne savaient pas exactement de quelle façon cela les touchait et ce qu'elles devaient faire. C'est la même chose pour les eaux navigables et cette pléthore de lois qui s'appliquent à une organisation individuelle qui tente de faire quelque chose de manière constructive pour sa collectivité.

Je veux poser un certain nombre de questions. Je veux revenir à la pêche autochtone, et je veux que cela soit précisé pour le compte rendu.

Au cours des témoignages l'année dernière, il régnait une certaine confusion : on se demandait si la façon dont la loi était libellée allait remettre en question la manière dont une personne avait présenté une demande relative à la pêche commerciale, qu'il s'agisse d'une personne autochtone ou non autochtone. Évidemment, cela a soulevé des préoccupations concernant la gestion des pêches et la personne qui en était responsable.

Je veux juste le préciser pour le compte rendu. Est-ce que cet article, comme il est modifié, clarifie la loi en ce qui concerne la pêche autochtone et la pêche commerciale de façon à ce qu'il n'y ait pas de confusion et à ce qu'elle ne crée pas une situation dans laquelle, tout à coup, à cause du libellé de la loi, nous voyons d'autres entreprises commerciales accéder aux pêches auxquelles elles ne se destinaient pas?

M. Stringer : Je pense que oui. Je devrais cependant ajouter que trois définitions méritent d'être soulignées en ce qui concerne l'article 2. N'oubliez pas que nous voulons assurer la protection de la pêche commerciale, récréative et autochtone. La « pêche commerciale » se définit comme la pêche pratiquée sous le régime d'un permis en vue de la vente, de l'échange ou du troc du poisson. La « pêche récréative » est définie d'une manière qui nous permet de nous assurer que nous protégeons la pêche commerciale et la pêche récréative.

Nous savons que des Autochtones et des groupes autochtones pêchent dans le cadre de la pêche commerciale. Nous savons également que ces deux définitions n'englobent pas tout ce que nous voulons protéger. Nous avons utilisé le terme « autochtone » en ce qui concerne la pêche, car nous devions préciser ce qui s'ajoute à la pêche commerciale et à la pêche récréative, indépendamment du fait qu'elle soit pratiquée par des groupes autochtones ou non. Nous avions la pêche pratiquée « à des fins de consommation personnelle », « à des fins sociales » et « à des fins cérémoniales ». Puis, le mot « subsistance » a semé la confusion chez certaines personnes parce qu'il donne une certaine orientation. Nous pensions que ce n'était probablement pas le cas, mais par souci de clarté, nous avons déterminé que c'était toute chose qui est assujettie à une entente de revendication territoriale; si une pêche est indiquée dans une entente de revendication territoriale, c'est quelque chose que nous voulons protéger. Nous pensons que c'est utile dans le présent débat, sur le plan de la clarté.

Le sénateur Lang : Je veux juste que ce soit clair. Par conséquent, le système en place avant les modifications présentées l'année dernière sera essentiellement en place, comme il l'était auparavant? Une certaine confusion entourait la manière dont la loi allait être interprétée avec les modifications qui y ont été intégrées la dernière fois.

M. Stringer : Je crois que cela permettra de régler la question.

Le sénateur Lang : C'est rassurant pour ceux qui pratiquent la pêche commerciale, n'est-ce pas?

M. Stringer : À mon avis, cela devrait être le cas.

Le sénateur Lang : Je vais aborder un autre aspect. Il s'agit des eaux navigables. Personnellement, je pense qu'on l'attendait depuis longtemps. Vos observations au début, monsieur Gorall, étaient pertinentes parce qu'il n'y a eu aucune plainte en trois ans au sujet des modifications apportées en 2009. Si je ne m'abuse, des sénateurs ici présents pensent que le ciel nous tomberait sur la tête si nous allions de l'avant avec ces modifications.

Je veux vous faire part d'une préoccupation que j'ai au sujet des eaux navigables. Je viens du Yukon. Le fleuve Yukon figure dans la liste des 97 voies navigables. Il y a aussi la rivière Stewart, et elle est presque aussi grosse que le fleuve Yukon. Je veux clarifier dans mon esprit la façon dont cela fonctionne.

Supposons qu'il y a un projet d'envergure sur ce cours d'eau et qu'un entrepreneur individuel passe un contrat pour y ériger un barrage. D'après ce que j'ai lu, je crois que l'entrepreneur peut présenter une demande afin que cette voie soit assujettie à la nouvelle loi, la Loi sur la protection de la navigation.

Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi la province ou le territoire ne demande pas cette désignation par rapport au constructeur. Ce sont eux qui sont responsables, à l'échelle régionale, de la surveillance de la construction et probablement d'une partie du financement de la construction.

M. Gorall : J'ai deux ou trois points à soulever. D'abord, vous avez raison en ce sens que bon nombre des constructeurs auxquels nous avons affaire sont des provinces et des municipalités, qui veulent traverser des ruisseaux, des fleuves et des rivières partout au pays. Évidemment, cela ne touche pas seulement le Yukon.

Laissez-moi revenir en arrière. Bon nombre de ces changements visent à redonner aux constructeurs la responsabilité de quelque chose qui nous semble approprié. Les provinces, les municipalités et l'industrie nous disent depuis longtemps qu'elles savent comment construire et favoriser la navigation, alors encourageons-les à le faire sans paperasse inutile et sans délai de un ou deux ans, voire trois, avant qu'un projet soit mis en œuvre. Nous allons permettre la navigation.

Nous disons en partie que, si on construit, il faut permettre la navigation. S'il s'agit d'une voie navigable non énumérée dans la loi, on doit veiller à ce que la construction soit adéquate parce que tout ce que nous disons sur notre site Web à propos de la construction responsable et des façons de ne pas empêcher la navigation s'adressera non seulement aux constructeurs, mais aussi aux utilisateurs de la voie navigable. Les plaisanciers et les autres utilisateurs de la voie navigable seront au courant de la common law et des conséquences sur eux si un promoteur construit un barrage sur un fleuve ou une rivière, comme dans votre exemple.

Dans le cas où un barrage empêcherait considérablement la navigation sur le fleuve ou la rivière, s'il n'y avait aucune solution qui permettait la navigation, un tribunal pourrait envisager la possibilité de faire détruire le barrage. Je ne peux certainement pas me prononcer au nom d'un tribunal; je ne suis pas avocat. Ce sont dans de telles circonstances que nous avons déterminé qu'il revient au constructeur d'adopter notre régime, s'il le désire, et nous traiterons le projet comme s'il touchait une voie navigable énumérée dans la loi et assortirons l'approbation de conditions, comme s'il s'agissait de la Voie maritime du Saint-Laurent.

Le sénateur Massicotte : En outre, monsieur Gorall, d'après ce que je vois dans la loi et ses modifications, disons que, si vous n'êtes pas d'accord avec la décision de la municipalité ou — d'après ce que je comprends — si vous permettez la construction en vertu d'une certaine disposition de la loi, le ministre pourra dire : « Je me suis trompé, je n'ai rien à voir là-dedans; levez l'interdiction, vous devez l'éliminer ». Ai-je raison?

M. Gorall : Oui et non. Le ministre pourrait apporter un changement. Disons qu'il s'agit d'un promoteur du secteur privé. Je sais que ce n'est qu'un scénario hypothétique, mais prenons l'exemple d'un promoteur du secteur privé. Le territoire ou la localité aurait la possibilité de recourir au tribunal, si le constructeur ne s'est pas prévalu du régime. Je crois que la plupart des conseillers juridiques recommanderaient fortement à l'entreprise de se prévaloir du régime afin qu'elle puisse bénéficier de la protection de la common law. Dans un tel scénario, si tel n'était pas le cas, la collectivité — peut-être le PG du territoire — pourrait intenter une action en nuisance publique ou une personne pourrait entamer une poursuite pour atteinte au droit du public à la navigation.

Le sénateur Massicotte : Lorsque vous dites « se prévaloir du régime », ils doivent demander la permission? C'est bien ce que vous dites?

M. Gorall : Ce que je veux dire, c'est que le constructeur aura le raisonnement suivant : « Je crois qu'il y a aura entrave à la navigation. Je crois qu'il y a un risque élevé d'obstacle à la navigation, de non-respect de la common law ou de poursuite pour nuisance publique. Je préférerais rencontrer des représentants de Transports Canada et leur demander de vérifier les projets et d'établir les conditions qui s'imposent pour réduire le risque de me retrouver devant les tribunaux. »

Le sénateur Massicotte : Disons que le constructeur a agi ainsi et que vous lui avez donné votre aval. Cependant, vous vous rendez compte plus tard que vous vous êtes trompé et que vous n'auriez pas dû le faire. Vous affirmez que vous avez toujours le droit d'apporter des modifications, mais que, dans de telles circonstances, c'est comme une expropriation, et il faut verser une indemnité? Est-ce que j'ai bien compris?

M. Gorall : Non. Je dis que, dans le cas d'une voie navigable non énumérée dans la loi, le constructeur se préoccupe des conséquences sur la navigation.

Le sénateur Massicotte : Disons qu'il se prévaut du régime.

M. Gorall : Une fois qu'il s'est prévalu du régime, le traitement est le même que dans le cas d'un promoteur qui veut construire un pont au-dessus de la Voie maritime du Saint-Laurent.

Le sénateur Massicotte : Vous avez le pouvoir d'apporter des modifications, mais vous êtes également responsable financièrement des conséquences, je suppose?

Ekaterina Ohandjanian, conseillère juridique, Transports Canada : On aurait choisi d'adhérer au régime, parce que la voie navigable n'est pas énumérée dans la loi. Dès que le choix est fait, on est assujetti à l'ensemble du régime. Par exemple, dans le scénario hypothétique où le ministre a commis une erreur dans le cadre de l'évaluation de l'impact sur la navigation, ces modifications prévoient des pouvoirs qui permettront au ministre de revoir sa décision et de régler la situation. C'est une question non pas d'indemnité, mais de sécurité.

Le sénateur Lang : J'aimerais ajouter quelque chose, mais je ne veux pas m'y attarder trop longtemps.

Quelle est la définition de « constructeur », dans le cas d'un pont ou d'un barrage? La Yukon Energy Corporation est l'organisme qui a soumissionné pour ce projet. Est-ce que c'est elle, le constructeur ou s'agit-il de l'entrepreneur?

Mme Ohandjanian : Le terme « constructeur » est utilisé seulement aux fins des exemples.

« Propriétaire » est le terme utilisé dans la loi, et sa définition est assez large pour inclure toute entité responsable des travaux. Par conséquent, dans votre exemple, la Yukon Energy Corporation serait assujettie à la loi, comme c'est le cas de la municipalité ou du territoire à qui appartient l'infrastructure.

Le sénateur Lang : D'un point de vue pratique, dans l'ensemble des provinces et des territoires, dans 99 p. 100 des cas, c'est le gouvernement régional ou la municipalité qui est responsable de ces projets parce qu'ils touchent habituellement des voies navigables publiques. Cela ne relève pas du secteur privé. Est-ce bien le cas d'un point de vue pragmatique?

M. Gorall : Je ne veux pas donner de pourcentage, mais la majorité des demandeurs sont des gouvernements ou de grandes entreprises.

Le sénateur Lang : Nous pouvons nous réjouir du fait que les administrations régionales participeront à de tels projets et que, ainsi, elles connaîtront les lignes directrices nécessaires pour assurer la protection des voies navigables d'un point de vue pratique. C'est ce que je retiens de votre commentaire.

M. Gorall : Nous avons rencontré chaque province et chaque territoire avant le dépôt du projet de loi. Nous avons discuté des voies navigables énumérées. Évidemment, je ne suis pas en mesure de parler au nom d'une province ou d'un territoire. Je vais leur laisser l'occasion de le faire.

Nous avons reçu beaucoup d'appuis concernant non seulement la liste des voies navigables, mais aussi les modifications que nous proposons, pour les raisons que vous avez mentionnées.

Le sénateur Lang : Je crois que c'est clair maintenant, monsieur le président.

Le président : J'ajouterais que, selon moi, énormément de grandes entreprises chercheront à obtenir ces permis, que ce soit l'industrie pétrolière, gazière ou forestière. Elles construisent des ponts temporaires, des ponts de glace et toutes sortes de choses pour atteindre les ressources, tandis que les provinces et les territoires ne passent pas leur temps à construire des routes et des barrages.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Je ne suis pas très connaissant dans ce domaine, mais à la Section 4, on dit « qu'à marée basse, tout obstacle ne doit pas excéder les deux tiers de l'eau navigable. » Je présume qu'on est très connaissant et que les poissons sont assez intelligents pour savoir que s'il y a deux tiers, il reste un tiers, il va aller rejoindre l'autre bout de la rivière. Pour quelle raison est-ce deux tiers et non un tiers?

M. Stringer : C'est vraiment une question d'histoire. Cet article est là et cela dit deux tiers depuis les années 1920. Cela a toujours été deux tiers. Je pense qu'il n'y a aucune explication magique pour dire que c'est deux tiers. Cependant, l'idée est que les poissons devraient être capables de trouver un moyen. Alors, les deux tiers, c'est ce que nous avons depuis à peu près 100 ans, je pense.

Le sénateur Massicotte : Personne n'a contesté cette proportion?

M. Stringer : Non, je pense que non.

Le sénateur Massicotte : Quand on indique qu'on a choisi les lacs, les rivières sur les eaux navigables, c'est basé sur la circulation et sur une méthode scientifique. Cependant, lorsqu'on lit les journaux, on peut se demander si c'est une coïncidence que certains comtés de certains députés sont dotés d'une protection à hauteur de 80 p. 100. Sur quelle base est-ce que cela a été déterminé et est-ce vraiment scientifique sans aucune implication politique?

[Traduction]

M. Gorall : Je vous remercie de votre question. Afin de dresser la liste des voies navigables, il fallait trouver le responsable des voies navigables les plus utilisées au pays; nous nous sommes donc fiés sur les données les plus à jour à notre disposition, surtout les données publiques, dont celles du SHC de Pêches et Océans Canada, dont le travail consiste notamment à cartographier les voies navigables. Le SHC dispose de diverses cartes de service, selon l'utilisation des cartes et la portée de la navigation sur les eaux. Nous avons utilisé les données publiques sur les voies navigables cartographiées du pays à titre d'indicateur. Nous avons également examiné le trafic des marchandises à l'aide des données de Statistique Canada. Nous voulions savoir dans quelle mesure les marchandises étaient transportées en aval et en amont sur ces voies navigables, et nous avons utilisé une série de données historiques de programme, dont celles concernant les travaux liés à la navigation.

Par exemple, s'il y avait une série de quais, de marinas et de remises à bateau, qui sont des types de constructions que nous approuvons, contrairement, disons, aux conduites d'eau et aux lignes hydroélectriques — choses qui supposent un certain niveau de navigation de plaisance —, nous examinions les voies navigables de cette façon aussi. Nous avons également pris en considération le savoir local. Nous avons mené une analyse auprès des agents sur le terrain afin de pouvoir savoir quelles sont les voies navigables les plus empruntées, selon leur expérience, et nous avons pu établir l'ordre des voies navigables les plus fréquentées. Forts de cette information, nous avons dressé une liste de voies navigables en fonction de tous ces ensembles de données. Grâce à une analyse rigoureuse fortement axée sur les données, nous avons dressé la liste des voies navigables les plus fréquentées au Canada. Nous avons utilisé les statistiques les plus fiables à notre disposition pour dresser la liste des voies navigables les plus utilisées au pays.

Dans le cadre de ce processus, nous sommes allés aux quatre coins du pays. Nous avons rencontré les provinces et les territoires et nous avons discuté des voies navigables que nous nous proposions d'ajouter à la liste des autres plans d'eau qui pouvaient sembler importants, mais qui n'étaient pas très fréquentés, selon les données. Comme je l'ai déjà mentionné, je ne me prononcerai pas au nom des provinces et des territoires, mais nous avons été bien reçus.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Le processus que vous décrivez me satisfait beaucoup, mais il n'y a eu aucune intervention de nature politique à aucune étape de son élaboration. Il s'agit d'un choix totalement scientifique, basé sur des faits réels. Le projet de loi illustre la conclusion de ce raisonnement et aucune opinion discrétionnaire politique aurait pu influencer les résultats scientifiques, n'est-ce pas?

[Traduction]

M. Gorall : D'une part, le projet de loi est examiné au Parlement en ce moment, alors il y a évidemment matière à discussion. D'autre part, le document peut toujours être modifié. Il ne sera pas intégré au projet de loi. C'est une annexe de la loi. Des processus et des examens réguliers seront mis en place en vue d'ajouter des voies navigables.

[Français]

Le sénateur Massicotte : À ce jour, c'est totalement scientifique?

[Traduction]

M. Gorall : Tout à fait. Je vais vous donner un exemple.

Le sénateur Massicotte : Merci. C'est ce que je voulais. C'est bon; la réponse me satisfait.

Le sénateur Seidman : On a assez bien répondu à mes questions, dont une concernait les critères que vous utilisez pour déterminer quels plans d'eau sont visés par la nouvelle Loi sur la protection des eaux navigables, et vous venez tout juste d'y répondre. Pa curiosité, combien de plans d'eau sont maintenant visés par la loi, compte tenu des nouveaux critères?

M. Gorall : La liste compte 161 voies navigables au pays. Il y a toutefois une différence entre le nombre et la protection réelle des voies navigables. Laissez-moi vous expliquer.

Nous continuerons de nous pencher sur la grande majorité des voies navigables déjà visées. En fait, nous disposerons de plus de ressources pour le faire. Nous pourrons les surveiller de manière plus efficace que par le passé. À titre d'exemple, l'océan Atlantique figure dans la liste des voies navigables. Le lac Muskoka aussi. Je conviendrais que ce sont des plans d'eau très différents sur le plan de leurs caractéristiques et de leur géographie, mais ils font partie tous les deux des 161 voies navigables.

L'océan Pacifique fait aussi partie des 161 voies navigables. Si je vous montrais une carte du Canada sur laquelle étaient tracées en couleur toutes les voies navigables que Transports Canada continuera de protéger activement, la carte serait pleine.

La voie navigable Trent-Severn est une des plus fréquentées au pays, car elle relie deux des Grands Lacs. Nous avons dû le décomposer en petits lacs, petites rivières et ruisseaux pour être plus précis dans le cadre du projet de loi, mais il s'agit en fait d'une seule voie navigable, Trent-Severn, où circulent en masse les marchandises et les plaisanciers.

Le sénateur Seidman : Monsieur Gorall, je crois que vous avez également dit dans votre témoignage qu'aucune de ces modifications n'a une incidence sur les rôles et les responsabilités des autres ministères et organismes fédéraux ni des gouvernements provinciaux et territoriaux ou des municipalités. C'est une question très importante, car les lois sur la protection de l'environnement sont toujours en vigueur. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Je crois qu'il est important de reconnaître cette question.

M. Gorall : Je ne suis pas en mesure de vous parler d'autres lois. Je rappellerais au comité que la présente loi concerne la navigation. Le but est d'établir des exceptions au droit à la navigation assuré par la common law. Nous permettons aux constructeurs d'empiéter un peu sur le droit à la navigation. Évidemment, nous ne voulons pas nous mêler à la question de la qualité de l'eau potable. Cela relève des pêches et de la protection de l'environnement. Ces autres lois ne concernent pas le domaine d'application de la loi dont il est question ici.

Un très bon point est soulevé ici. Par le passé, la loi a été utilisée pour favoriser d'autres intérêts que ceux de la navigation. Nous nous sommes notamment préoccupés du développement. Nous avons soulevé des préoccupations à l'égard de la pêche, et en voici une intéressante. Il a aussi été question de disputes de voisinage. Nos agents doivent composer avec des disputes de voisins d'un bout à l'autre du pays. Un de mes exemples préférés a trait aux parcours de slalom nautiques. On peut tracer un parcours sur un lac. Il s'agit essentiellement d'installer des bouées pendant une brève période. Les propriétaires de chalet font le parcours à tour de rôle, et le tracé est mis en évidence. C'est une activité temporaire, mais nous devons intervenir. D'accord. Nous sommes responsables de cette voie navigable. Nous nous y rendons et nous examinons le parcours. Il est clairement tracé. Il est évident que la navigation se poursuit autour du parcours. En fait, les parcours de slalom servent à la navigation.

Le problème, c'est que bon nombre de propriétaires de chalet s'y opposent. Ils n'aiment pas entendre le bruit des bateaux de course, par exemple.

C'est une source de conflit. L'approbation d'un parcours de slalom nautique peut prendre quatre, cinq ou six mois. Le ministère estime que le règlement de différends opposant des propriétaires de chalet n'est probablement pas la meilleure façon d'utiliser l'argent des contribuables.

Le sénateur Seidman : Je crois qu'il est utile et important de nous rappeler que ce n'est pas parce que nous modifions cet aspect de la loi que nous modifions aussi les exigences environnementales. Elles n'ont pas changé.

M. Gorall : C'est exact.

Le sénateur Seidman : Excellent.

Vous avez tous parlé de vos consultations auprès des municipalités, des gouvernements provinciaux et territoriaux et des autres intervenants. J'aimerais que vous nous expliquiez brièvement chacun à votre tour votre processus de consultation et la collaboration à laquelle vous vous attendez en proposant ces modifications.

M. Gorall : Nous n'avons pas mené de consultations, car il s'agit d'un projet de loi d'intérêt privé. Nous avons eu ce que je qualifierais de discussions enrichissantes avec les provinces et les territoires. Nous n'avons pas parlé aux municipalités avant le dépôt du projet de loi. Nous avons seulement abordé les provinces et les territoires.

En 1980 et ensuite en 1986-1987, 1990, 1995 et 2004, le ministère a tenté de mener des discussions sur la loi, ses restrictions et ses exigences à l'égard des constructeurs. Il a été mentionné entre autres que certains éléments manquaient de bon sens. Le ministère a demandé des changements considérables.

En 2008, le ministère s'est présenté devant le comité du Parlement et a demandé des discussions approfondies et des consultations générales auprès des Canadiens.

En raison de la crise économique de 2008-2009, au lieu d'effectuer un examen plus approfondi à ce moment-là, nous avons opté pour la solution de facilité. Toutefois, durant tout le processus parlementaire, les comités du Sénat et de la Chambre ont entendu de nombreux témoins qui appuyaient les modifications que nous avons apportées en 2009 ou qui s'y opposaient. Nos travaux d'aujourd'hui reposent sur cela.

M. Stringer : En ce qui concerne la Loi sur les pêches, les circonstances se ressemblent à de nombreux égards. Elles étaient visées par le projet de loi C-38. La Loi sur les pêches n'a fait l'objet d'aucune consultation. Cependant, le régime de protection des pêches qu'elle a permis de créer a fait l'objet d'importantes discussions avec les intervenants, qui ont donné leur opinion sur les éléments à changer et les éléments à favoriser. Le vérificateur général a formulé quelques commentaires à ce sujet dans un rapport. Nous avons établi des processus avec l'industrie des ressources, l'industrie du développement et des groupes de protection de l'environnement, et nous avons tenu des discussions avec les provinces et d'autres intervenants. Tous se sont penchés sur le « régime de l'habitat » que nous appelons maintenant le « régime de protection des pêches ».

J'ajouterais aussi que les modifications de la Loi sur les pêches dans le cadre des projets de loi C-38 et C-45 exigent des précisions et un certain étoffement, grâce à des dispositions réglementaires et des politiques. C'est à ce moment-là que des discussions se tiendront sur le fond. Nous nous sommes prononcés sur ce que nous souhaitions, et nous avons la loi. Maintenant, nous allons discuter des prochaines étapes, et le règlement exigera certainement de plus larges consultations publiques.

Steve Mongrain, conseiller principal en politiques, Secteur d'élaboration des politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale : En ce qui concerne les sept articles du projet de loi C-45 qui proposent la modification de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, nous avons discuté avec des responsables de projet, les provinces et les intervenants dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle loi. Elle est maintenant en vigueur. Nous avons un règlement concernant les projets et d'autres instruments. Honnêtement, la plupart des changements d'ordre technique découlent de commentaires d'autres ministères fédéraux, dont le ministère de la Justice, par exemple, qui a fait remarquer que la traduction française de certains articles n'était pas assez précise. Le libellé n'était pas aussi précis qu'il aurait pu l'être.

De manière plus générale, une multitude de consultations, d'études et de rapports sur l'évaluation environnementale, y compris les travaux du comité ont servi à l'élaboration du projet de loi C-38. Pour ce qui est des changements que vous examinez en ce moment et de leur technicité, rien d'officiel n'a été fait, comme l'a affirmé mon collègue.

Le sénateur Ringuette : Comme vous l'avez entendu au début de la séance, je suis nouvelle au comité, alors mes questions vous sembleront peut-être un peu naïves, mais je dois comprendre.

Pour qu'un projet puisse être réalisé sur une des 161 voies navigables énumérées dans la loi ou en dessous ou à proximité, il faut obtenir l'approbation du ministre. C'est bien cela?

M. Gorall : Eh bien, oui et non. Je vais vous donner un exemple. Disons que vous possédez un quai qui répond aux critères énoncés dans l'ordre du ministre. Si votre quai répond aux critères et qu'il se trouve sur une voie navigable énumérée dans la loi, vous n'avez pas besoin de consulter les représentants de Transports Canada. Vous n'avez pas à vous préoccuper de nous.

Le sénateur Ringuette : D'accord. Disons que vous menez un projet d'importance moyenne sur la même voie navigable.

M. Gorall : Disons que le quai que vous voulez construire est sur la rivière des Outaouais. Ce n'est pas ce que nous avons défini comme des ouvrages secondaires et des eaux secondaires parce que vous voulez construire un plus gros quai.

Le sénateur Ringuette : Votre ministère effectuerait une évaluation environnementale afin que le ministre puisse donner son approbation.

M. Gorall : Non.

Le sénateur Ringuette : Ne fait-on pas d'évaluation environnementale pour que le ministre puisse donner son approbation?

M. McCauley : Je peux peut-être répondre à la question. Grâce à des modifications apportées à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012, nous sommes passés d'un système d'intervention qui consistait à déterminer si une évaluation environnementale devait être exigée à l'échelle fédérale, à un système fondé sur une liste de projets désignés qui pourraient relever du gouvernement fédéral. Si le projet était énoncé dans le règlement, l'agence serait tenue d'effectuer l'évaluation.

Le sénateur Ringuette : La construction d'un pont fait-elle partie des projets visés?

M. McCauley : Ce n'est pas dans le règlement.

Le sénateur Ringuette : Ce n'est pas dans le règlement?

M. McCauley : Non.

Le sénateur Ringuette : Disons que le ministre a octroyé un permis. Qui surveille la construction pour qu'on puisse s'assurer qu'elle est faite conformément au règlement et à la loi?

M. Gorall : En se concentrant sur les voies navigables les plus fréquentées au Canada et en évitant de...

Le sénateur Ringuette : Pour être plus précise, ma question est : après que le ministre a donné son aval pour un grand projet, qui le surveille?

M. Gorall : Vous parlez de la surveillance sur les voies navigables.

Le sénateur Ringuette : Pour s'assurer que le règlement et la loi sont respectés.

M. Gorall : Les représentants de Transports Canada s'en chargeraient dans le cas des voies navigables énumérées dans la loi.

Le sénateur Ringuette : Votre ministère assure la surveillance.

M. Gorall : Nous allons nous charger de la surveillance, bien sûr. Le point que je veux faire valoir — et je veux répondre à votre question — c'est que, par le passé, nous n'avions pas la capacité de le faire aussi bien que nous le voulions. En mettant l'accent sur les voies navigables les plus fréquentées au Canada et en évitant de régler une partie des différends entre voisins, nous aurons plus de ressources pour effectuer ce type de surveillance. En outre, ces modifications nous permettront pour la première fois d'imposer ce que nous appelons des sanctions administratives pécuniaires, des SAP, qui ressemblent aux pénalités infligées aux pêcheurs.

Le sénateur Ringuette : À titre d'exemple, si les travaux n'ont pas été faits de manière adéquate, y a-t-il une amende? Y a-t-il une pénalité?

M. Gorall : Oui. Ces modifications accordent au ministre une multitude de pouvoirs, dont le pouvoir d'émettre un ordre pour arrêter les travaux.

Le sénateur Ringuette : Y a-t-il une amende maximale?

M. Gorall : Il y a deux possibilités. Actuellement, la pénalité maximale est de 50 000 $ par jour. C'est un montant important. Le problème de cette disposition, c'est que le fardeau de la preuve est si lourd que nous n'avons jamais eu recours à cette pénalité. Ce pouvoir ne s'est jamais concrétisé à la connaissance des responsables du programme.

Le sénateur Ringuette : Concernant ces modifications, vous avez indiqué que le choix revient aux constructeurs et que, s'ils choisissaient de se prévaloir du régime, ils seraient assujettis à votre surveillance et pourraient faire l'objet d'une amende au lieu d'une poursuite civile intentée par des groupes environnementaux ou d'autres entités qui n'ont pas été traitées correctement. Selon moi, ce choix permet aux constructeurs d'éviter les poursuites civiles, ce qui est une bonne protection pour eux.

M. Gorall : C'est ce qu'ils ont maintenant. Actuellement, ils doivent venir nous voir, et nous évaluerons leur impact sur la navigation. S'ils craignent d'empêcher la navigation et qu'ils veulent être rassurés pour les raisons que vous venez tout juste de mentionner, ils pourraient se prévaloir de notre régime. Sans ces modifications, ils seraient encore assujettis à notre régime et n'auraient pas le choix.

Le sénateur Ringuette : Vous semblez indiquer qu'il est possible que les ressources soient insuffisantes pour surveiller efficacement un projet dans le cadre du régime. Comment allez-vous assurer un suivi efficace? Au cours de la dernière année, combien avez-vous perdu de ressources qui assurent la surveillance des permis pour les petits et les grands projets approuvés par le ministre? Il vous faut des ressources pour réaliser cela.

M. Gorall : Vous avez raison. C'est le nœud du problème. Laissez-moi vous conter une histoire que j'adore raconter.

Il y a un camp d'entraînement dans les Prairies — une base militaire — qui est complètement clôturé. Les militaires ont fait appel à nous parce qu'ils voulaient que leurs ingénieurs construisent un pont et qu'ils le démolissent — tout ça dans le cadre de leur instruction. Ils ont dû attendre quelques mois pour que nous approuvions ce projet. Plutôt que ce soit nous qui fassions ce type de travail, on disposera d'un plus grand nombre de ressources disponibles afin de se concentrer sur des choses comme l'exemple du barrage dont il a été question plus tôt.

Le sénateur Ringuette : En ce qui a trait à l'exemple que vous venez de donner sur la construction et l'enlèvement d'un pont à des fins d'instruction, il y aura beaucoup d'activité. Je suppose qu'il y a une voie navigable. Si vous construisez un pont, vous devriez avoir un scénario le plus réaliste possible. Si vous ne surveillez pas cela, qui le fera?

M. Gorall : Le pont du MDN?

Le sénateur Ringuette : Le MDN le fera?

M. Gorall : Oui. Je ne connais pas les dimensions exactes de la voie navigable, mais elle se trouve entièrement sur les terrains du MDN. Autant que je sache, il n'y a aucune navigation publique sur celle-ci.

Le sénateur Ringuette : Environnement Canada ne prend position nulle part, et Transports Canada ne se prononcerait aucunement sur la question?

M. Gorall : Transports Canada ne se prononcerait pas, mais, cela dit, je ne voudrais pas parler au nom d'autres ministères.

Le sénateur Patterson : Je suis également tout nouveau. Je suis très heureux de siéger au comité et je me réjouis à l'idée de travailler avec vous tous.

Le président : Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.

Le sénateur Patterson : Je veux remercier M. Gorall, qui a décrit de façon très claire la Loi sur la protection des eaux navigables ainsi que la perte de temps et de l'argent des contribuables qui sont consacrés à l'amélioration de projets mineurs plutôt qu'aux voies navigables les plus achalandées. Les exemples étaient révélateurs, comme les 90 quais sur un lac de l'Alberta, les ponts sur des pistes cyclables, les rambardes sur des ponts et les parcours de slalom nautiques. Il semble que vous ayez fait face à une armée d'organismes de réglementation, ce qui a entraîné des retards importants dans les projets mineurs.

Si le projet de loi est adopté, est-ce que Transports Canada prévoit une réduction du personnel en ce qui concerne l'application de la loi vu cette toute nouvelle orientation visant à économiser du temps et l'argent des contribuables, ou est-ce qu'il la prévoit dans son budget?

M. Gorall : Comme je l'ai mentionné, le ministère sait depuis un certain temps que des modifications devaient être apportées à cette loi, qui date de 130 ans et qui commence à montrer des signes de désuétude. Nous avons fait valoir depuis un certain temps que nous ferions, au besoin, une refonte de la loi. Nous recevons nos ordres courants du gouvernement. Le gouvernement a tout intérêt à réduire les règlements et nous a indiqué qu'il voulait équilibrer le budget. Comme vous le savez, chaque ministère est censé faire tout en son pouvoir pour contribuer à la réduction du déficit.

La création de ce projet de loi règle deux problèmes pour nous. Cela nous permet de concentrer nos ressources sur les voies navigables les plus achalandées et de ne pas être concernés dans certains des exemples que j'ai mentionnés. Cela réduira le fardeau réglementaire qui incombe aux Canadiens et réduira de façon considérable l'arriéré de demandes. Au cours d'une année normale, nous reportons deux ou trois mille demandes que nous étudions. Ces modifications permettront de réduire les coûts des provinces et des municipalités, qui n'auront plus à embaucher du personnel pour traiter les documents.

En créant ce régime, nous sommes convaincus que nous pourrons nous concentrer sur les voies navigables les plus achalandées et effectuer la surveillance, comme l'a suggéré le sénateur Ringuette, de manière plus efficace que par le passé. Parallèlement, nous réduirons la taille de notre empreinte écologique en tant que ministère. Que d'affirmer la mesure dans laquelle nous pouvons y parvenir serait, actuellement, une pure spéculation de notre part puisque le projet de loi doit être adopté. Nous devons présenter le nouveau programme et déterminer combien de gens y donneront leur aval. Je pourrais vous fournir une estimation maintenant, mais je ne serais pas à l'aise de vous donner un chiffre que je pourrais devoir justifier plus tard.

Le sénateur Patterson : Je crois que vous avez indiqué, en ce qui a trait à la loi, que les municipalités en soi n'ont pas été consultées, mais que vous aviez engagé des discussions avec la Fédération canadienne des municipalités concernant ces modifications; est-ce exact? Est-ce exact de dire qu'elles accueillaient les changements proposés?

M. Gorall : Oui, absolument. L'exemple que j'ai utilisé, c'est que les municipalités de la Saskatchewan sont responsables de 9 700 ponts, et bon nombre de ces ponts traversent des voies navigables. Elles ne peuvent pas réasphalter un de ces ponts sans demander un examen de Transports Canada. Elles nous appuient entièrement, et, surtout, l'ouvrage que nous présentons — ces modifications — s'appuie sur un ensemble de documents, de demandes et de discussions que nous avons eues avec des intervenants, des clients, des provinces, des municipalités et des territoires depuis des décennies.

Je crois que le comité, ou sous-comité, a eu, par exemple, des conversations avec des municipalités régionales de la Saskatchewan ou la FCM. Oui, absolument, c'est ce que les municipalités demandent.

Le sénateur Wallace : Monsieur Gorall, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de l'industrie de l'aquaculture et des problèmes que la loi pose pour celle-ci. Je viens de la région de l'Atlantique, et l'industrie de l'aquaculture dans la baie de Fundy est importante pour la région. Pourriez-vous en dire davantage sur les difficultés que la loi, dans sa version actuelle, occasionne pour cette industrie, et en quoi le changement est censé influer de manière positive sur elle?

M. Gorall : C'est une bonne question. Il y a deux ou trois différents aspects du problème qui touchaient l'industrie de l'aquaculture. Je vais passer en revue le plus important. C'est ce que le bureau appelle les ouvrages dynamiques. Ce n'est pas comme s'ils construisaient un pont; ils plongent véritablement ces casiers dans l'eau, qui peuvent être déplacés. Il faut les déplacer. Malheureusement, certains d'entre eux ne sont pas bien entretenus. Il s'agit d'une nouvelle industrie qui commence à prendre de l'expérience, mais certains d'entre eux peuvent tirer les casiers vers le fond en raison du poids du poisson ou de la prise, quelle qu'elle soit. Vous pouvez tirer les bouées vers le fond, et, ainsi, elles présentent un danger pour la navigation. Parfois, ils veulent déplacer les casiers afin de mieux les positionner ou d'en ajouter deux ou trois autres. Ils ne peuvent rien faire de tout cela sans une nouvelle approbation de notre part étant donné la façon dont est rédigée la loi.

Nous proposons de présenter une disposition assez singulière concernant ce que nous appelons les « zones adjacentes ». Nous prévoyons créer une approbation pour un ouvrage d'aquaculture dans laquelle il est indiqué que, tant que vous n'entravez pas davantage la navigation et que votre empreinte est nettement délimitée, vous pouvez faire tout ce que vous voulez. Vous pouvez déplacer, ajouter ou enlever des ouvrages sans nous en faire part; il suffit de rester à l'intérieur des limites. S'il y a des changements et que cela a une incidence sur la navigation, le propriétaire a désormais le devoir de nous en aviser. Nous ne serons pas nécessairement tenus de nous rendre sur place et d'examiner les sites d'aquaculture après une tempête, par exemple.

Le plan global comportera un autre élément, c'est-à-dire le financement de l'aquaculture. Comme cela est relativement nouveau, les bailleurs de fonds sont un peu craintifs. Il est difficile d'obtenir du financement parce que Transports Canada impose actuellement une limite maximale de cinq ans pour toute approbation relative à l'aquaculture. Après cinq ans, vous devez revenir, même si vous avez mené vos activités de façon irréprochable. Cela pose problème en ce qui a trait aux bailleurs de fonds, puisque vous détenez un permis de cinq ans du gouvernement et que vous voulez emprunter de l'argent pour 10 ans; ils ne sont pas à l'aise. Nous souhaitons leur donner une plus grande marge de manœuvre et les aider à obtenir du financement plus facilement.

Le sénateur Wallace : Compte tenu de cette plus grande marge de manœuvre au sein de votre ministère, dans votre domaine, c'est-à-dire les voies navigables, travailleriez-vous de concert avec le ministère de l'Environnement étant donné qu'il y a, évidemment, des enjeux environnementaux reliés à l'industrie de l'aquaculture également? Travaillez- vous en collaboration avec le ministère de l'Environnement?

M. Gorall : Je le répète, je ne veux pas parler au nom d'un autre ministère fédéral. Je vais laisser mes collègues répondre à la question. Ce qui nous préoccupe, c'est le permis que nous accordons pour la navigation.

Le sénateur Wallace : Avez-vous des commentaires à formuler au sujet de l'aspect environnemental?

M. Stringer : Nous avons chacun nos domaines de responsabilité. Oui, nous travaillons ensemble. Nous communiquons et nous assurons de savoir ce que l'autre fait. L'objectif global de l'exploitation responsable des ressources est d'effectuer un seul examen pour chaque projet, qu'il faut rationaliser et intégrer le plus possible, et c'est pourquoi nous travaillons ensemble.

Comme l'ont fait remarquer mes collègues, nous avons tous une responsabilité en particulier. Dans notre cas, en ce qui a trait à l'aquaculture, il s'agit de l'impact sur les pêches. Dans leur cas, c'est comme l'a décrit mon collègue, mais nous restons en contact afin de s'assurer de savoir ce que l'autre fait.

Le sénateur Brown : Il y en a un parmi vous qui a parlé du système du lac Shuswap, en Colombie-Britannique. C'est un secteur important, et il y a une migration anadrome des saumons chaque année dans la rivière Adams, je crois, et, tous les quatre ans, il y a une très forte migration des saumons.

Je crois aussi savoir qu'il y a cinq lacs liés au système Shuswap. L'un d'eux est le lac Mara, qui croise la route 1 et qui n'a qu'environ 12 milles de longueur. Tous les deux ou trois ans, il y a une accumulation de neige plutôt importante, et puisque ce lac est entouré de forêt, il y a beaucoup d'arbres morts sur l'eau.

Supervisez-vous toutes les tentatives visant à rendre la rivière à nouveau navigable? J'ai vu le lac lorsqu'il était presque entièrement recouvert d'arbres morts. Je me demande qui est responsable de cela. Effectuez-vous une surveillance pour vous assurer qu'il est nettoyé?

M. Gorall : Si j'ai bien compris votre question, il y a une série de phénomènes naturels, notamment les arbres morts qui s'y trouvent, et cela peut nuire à la navigation, et vous voulez savoir qui en est responsable.

Ce n'est pas un domaine qui relève de nous. Je suppose que ce lac donne accès aux voies navigables. Ce n'est pas un secteur que nous réglementerions. Si quelqu'un devait construire quelque chose sur la voie navigable, il aurait à venir nous voir, mais en ce qui a trait aux phénomènes naturels, cela ne nous concerne pas.

Le sénateur Brown : Ce que vous dites, c'est que cela n'est pas couvert à la page 334? Il est question des lois environnementales et de déterminer si l'autorité fédérale peut exercer les attributions qui lui sont conférées sous le régime d'une loi du Parlement autre que cette loi. Pourrait-elle permettre qu'une activité concrète soit réalisée en totalité ou en partie? Avez-vous un quelconque intérêt à veiller à ce que le lac soit nettoyé?

M. Gorall : Non. On ne participerait pas à la gestion de ce type d'obstacle ou d'obstruction créé de manière naturelle. Par exemple, si un arbre devait tomber en travers d'une rivière, il serait peu probable que vous trouviez des employés de TC sur place en train de le sortir à l'aide d'une scie à chaîne.

Le sénateur Brown : Savez-vous de quelle façon le nettoyage s'effectue chaque année?

M. Gorall : Je ne le sais pas. J'imagine que ce n'est probablement pas différent de ce que les groupes communautaires font. Les associations de gardiens de l'eau jouent un rôle important. Si vous descendez le canal Rideau, vous pouvez apercevoir les gens de la CCN dans leurs bateaux en train de procéder au nettoyage, mais ce ne sont pas les fonctionnaires de Transports Canada qui seraient là en train de faire ça.

Je pourrais certainement tenter d'obtenir certaines recherches auprès d'agents dans ce domaine et de fournir certaines options à cet égard.

Le sénateur Brown : Cela m'intéresserait. Les gens n'iront pas sur un lac avec leur bateau pour nettoyer. J'ai vu la moitié du lac Mara couverte d'environ 200 verges de grumes qui flottaient de manière naturelle en raison de l'énorme quantité d'arbres morts. Les grumes ont l'air de se bousculer dans les travées étroites du pont, au croisement de la route 1.

M. Gorall : Si les membres du comité le veulent bien, je reviendrais volontiers avec d'autres informations à ce sujet.

Le sénateur Brown : Salmon Arm dispose d'un système de débardage. C'est la seule à pouvoir faire flotter les grumes jusqu'au système Shuswap, mais elle ne peut pas utiliser les arbres morts.

Le président : Nous allons passer à notre deuxième série de questions. Il nous reste un peu moins de 15 minutes, et il y a quatre sénateurs dans la deuxième série. Je vous demanderais de poser des questions brèves afin que nous puissions entendre les quatre intervenants.

Le sénateur Mitchell : Je constate que, sur la liste des lacs, vous avez indiqué Okanagan et Mara, mais non Kalamalka; en Alberta, il y a Pigeon, mais Sylvan et Wabamun ne sont pas là, et ce sont des lacs très semblables. Pourquoi?

M. Gorall : C'est très difficile pour moi de parler de voies navigables en particulier. Le problème, pour nous, c'est que nous utilisons les ensembles de données que je vous ai décrits, et, au cours de ce processus, nous avons pris en considération les connaissances locales concernant les voies navigables les plus fréquentées. Il y a énormément de voies navigables sur lesquelles on peut naviguer et qui peuvent sembler extrêmement achalandées. Cependant, cela ne figurait tout simplement pas dans les toutes dernières statistiques disponibles.

Le sénateur Mitchell : Malheureusement, le lac Pigeon est pratiquement inutilisable pendant une bonne partie de l'été en raison de l'algue bleue, qui est très toxique. Par contre, les eaux du lac Sylvan sont cristallines, et, chaque fois que j'y vais, il y a beaucoup de bateaux. Vous pourriez peut-être nous répondre plus tard.

Quant à Wabamun, j'ai remarqué dans votre déclaration préliminaire que vous avez dit que, au cours des trois dernières années, vous avez approuvé 80 quais sur ce lac, mais je croyais que tout cela avait été réglé dans le cadre des changements mineurs apportés aux ouvrages en 2009. Comment se fait-il que vous approuviez encore des quais?

M. Gorall : Je vous remercie de me poser la question. On se l'est également posée en tentant de comprendre ce qui fait que ce lac exige cela. J'ai une photo aérienne du lac, et on peut voir qu'il est parfaitement ovale. La majeure partie du rivage est en fait très peu profonde, et sur la photo aérienne, vous pouvez voir que sa couleur passe d'un brun clair à un bleu foncé. Les gens doivent aller au-delà de ce que notre réglementation exige pour construire un quai s'ils veulent accéder à un lac et y faire de la navigation de plaisance.

Le sénateur Mitchell : Cela est attribuable à la décrue des eaux. Je le sais, je vais souvent à ce lac.

M. Gorall : Cela semble être un beau lac, mais nous devons tout de même nous rendre sur chacun de ces lacs et véritablement les examiner et les approuver.

Cela m'amène à un autre point. Nous avons notamment constaté qu'il y a une série d'aberrations lorsque nous consultons nos données, et nous nous demandons de quoi il s'agit. Nous nous sommes demandé — et cela est le propre des chalets — pourquoi certains chalets sont à l'origine d'une énorme quantité de demandes, tandis que d'autres ne le sont pas. Nous en sommes venus à comprendre, après avoir discuté avec certains intervenants locaux et certaines personnes sur le terrain, que cela dépend parfois de la mesure dans laquelle l'association de propriétaires de chalet est active. Il y a des gens qui discutent avec leurs voisins et leur demandent s'ils ont un permis. Cela nous apporte du travail, et ce, pour la construction de quais qui ont très peu d'impact sur la navigation, voire aucun.

Le sénateur Lang : Je voudrais dire que je suis très heureux de voir que nous adoptons une approche qui fait appel au gros bon sens. Je crois qu'il était grand temps. Nous verrons si cela fonctionne dans l'avenir, mais, compte tenu de tout ce que vous avez dit, lorsqu'on écoute votre témoignage, il est difficile de s'opposer à la direction que vous prenez.

Vous avez mentionné qu'il a fallu jusqu'à trois ans pour approuver certains projets en raison du processus et de ce qu'exigeait votre ministère, et aussi parce que vous manquez vraiment de ressources pour faire tout ce que vous avez indiqué plus tôt.

Maintenant, à la lumière de ces précisions et des lignes directrices, que vous avez définies du mieux que vous le pouviez, sur ce que sont vos responsabilités, pouvez-vous nous fournir l'assurance que ces approbations seront données bien à l'avance, contrairement à ce qui se produisait par le passé? Ces délais de deux et de trois ans sont totalement inacceptables du point de vue de quiconque participe à l'un de ces projets, et, au bout du compte, cela fait du gouvernement la risée de la communauté. Vous pourriez peut-être nous dire, pour l'avenir, ce que vous en pensez.

M. Gorall : Je vais être bref, ici, pour une question de temps. Une des choses que nous pourrions faire, c'est que, en se concentrant sur les voies navigables les plus fréquentées, nous devrions pouvoir libérer des ressources afin de réduire l'arriéré.

La deuxième chose que nous pourrons faire, c'est élargir la notion d'ouvrages mineurs. Peut-être qu'un plus grand nombre de quais, de remises à bateaux et de rampes d'accès à l'eau pourraient être couverts sans que l'on vienne nous voir. Cela continuera de réduire la charge de travail.

Enfin, même si, en tant que constructeur potentiel, vous vous trouvez sur une voie navigable répertoriée, nous donnons à nos agents pour la toute première fois le pouvoir de rejeter d'emblée un projet et de dire : « Vous n'êtes plus tenu de venir nous voir. Votre projet de construire ce quai est plus important que nos ouvrages mineurs. Vous nous avez fourni suffisamment d'information, soit une demande d'autorisation d'une page ou deux. Nos agents l'examineront. » Pour la toute première fois, grâce au pouvoir que leur confère la loi, ils pourront dire : « Je peux déterminer, selon ce que vous avez dit, que votre projet n'aura pas un impact important sur la navigation ou ne lui nuira pas de manière importante, et je vous permets donc d'aller de l'avant. » Maintenant, si vous construisez quelque chose d'autre que ce que vous venez tout juste de mentionner, vous pourriez recevoir une de nos nouvelles amendes.

Ce sont des choses qui nous permettront de simplifier l'ensemble du processus d'approbation. Nous pourrons nous concentrer sur nos ressources. Les approbations officielles portent sur les projets qui entravent la navigation de manière importante. C'est sur ça que nous devrions nous concentrer.

Le sénateur Baker : J'ai une observation, et si un témoin souhaite formuler un commentaire, ce n'est pas un problème.

En réponse à une question posée par le sénateur Massicotte, le témoin a parlé d'une disposition sur laquelle il faut maintenant se pencher, où on dit :

Il est interdit de construire, d'utiliser ou de mouiller tout engin ou équipement de pêche tel que filet simple, filet- piège ou senne qui : [...] obstrue plus des deux tiers de la largeur d'un cours d'eau ou plus d'un tiers de la largeur à marée basse du chenal principal d'un courant de marée.

Puis, le témoin a dit que, de mémoire, il n'y avait eu aucune poursuite aux termes de cet article.

Je l'inviterais à examiner plusieurs cas, notamment un dont je me souviens bien, c'est-à-dire R. c. Doucette, 1996 Carswell N.-É. 585, où le tribunal, à l'instar de plusieurs autres tribunaux, a affirmé que le paragraphe 26(1), qui avait été éradiqué aux termes de cette loi, l'ancienne loi, et que le paragraphe 29(1), qui est désormais passablement modifié, a été contesté. Il était question d'une structure ou — ce que nous émettons ici, ce sont les « grumes de bois ou les matériaux de quelque nature que ce soit ». Le fait est que nous la limitons maintenant au matériel de pêche, tandis que dans les cas qui ont fait jurisprudence, il était question d'autres choses qui ne figurent désormais plus dans la loi : des matériaux de quelque nature que ce soit, des grumes de bois et ainsi de suite.

En ce qui a trait à la réponse du témoin, je comprends entièrement que vous êtes en train de dire que les vastes pouvoirs du ministre qui lui sont conférés par l'article 35, au sujet de la construction, peuvent être utilisés afin d'avoir la même incidence. Le fait est que, lorsque vous retirez quelque chose de la loi, lorsque vous retirez d'une loi les grumes de bois et tous les déchets déversés dans les rivières, vous devez vous fier au ministre pour qu'il utilise ses vastes pouvoirs afin que les répercussions soient les mêmes. Je peux vous affirmer, d'après mon expérience personnelle, que cela n'a pas fonctionné par le passé.

M. Stringer : Si vous me le permettez, ce que j'en comprends, c'est que, au cours des dernières années, on a utilisé ce pouvoir relativement à la gestion des pêches, et non pas pour d'autres types d'obstructions. Cependant, je vais vérifier cela, et ça a sûrement déjà été utilisé par le passé.

L'article 35 ne prévoit pas seulement que le ministre « peut » l'utiliser. Il y a des éléments de l'article 20 que le ministre peut utiliser; il peut exiger que certaines choses soient faites. Toutefois, l'article 35 constitue une interdiction absolue. Il y est indiqué qu'il est interdit d'exploiter un ouvrage ou une entreprise ou d'exercer une activité qui pourrait causer des dommages sérieux aux poissons dans le cadre d'une pêche commerciale, récréative et autochtone. Nous croyons effectivement que cela est couvert. Cependant, le sénateur a tout à fait raison lorsqu'il dit que cela touche principalement les pêches commerciale, récréative et autochtone ainsi que les dommages sérieux.

Le sénateur Ringuette : J'ai deux questions. Il y en a une pour M. McCauley. Avez-vous bien dit que la construction d'un pont n'est pas un projet désigné comme exigeant un examen environnemental?

Ma deuxième question est pour M. Gorall. Je crois fermement qu'une loi dont est saisi le Parlement ne peut sortir de nulle part; c'est une réaction à quelque chose. Je ne vous demanderai pas combien il y avait de lobbyistes au sein du ministère, mais je vais vous demander combien de poursuites civiles concernant les voies navigables ont été intentées au cours des cinq dernières années.

M. McCauley : Pour répondre à votre question, les ponts ne sont pas un type de projet qui fait partie des activités physiques désignées dans la réglementation.

Le sénateur Ringuette : C'est incroyable.

M. McCauley : Cette réglementation était fondée sur le Règlement sur la liste d'étude approfondie aux termes de l'ancienne loi, qui comprenait la liste des grandes catégories de projets qui pouvaient entraîner des effets nocifs importants.

Cela dit, le ministre a la capacité, en vertu de l'article 14 de la loi, de désigner un projet qui pourrait avoir des répercussions sur des secteurs de compétence fédérale en vue d'exiger une évaluation environnementale.

Le sénateur Ringuette : C'est incroyable.

Mme Ohandjanian : Je vais répondre à cette question au moyen d'un exemple récent. Cameco a présenté une demande d'examen judiciaire d'une décision du ministère, qui demandait que les travaux que Cameco proposait d'effectuer sur un plan d'eau, des travaux qui sont entrepris sur de nombreux lacs sur le territoire canadien, soient assujettis à la Loi sur la protection des eaux navigables. Cameco a contesté cette décision, expliquant, en guise d'arguments, tous les éléments qui indiquaient que ce plan d'eau était non navigable, au sens de la common law, malgré le fait qu'on peut y faire flotter un canot.

C'est une chose importante qu'il faut garder à l'esprit. Le régime traite du droit public de navigation, qui repose sur le fait qu'il y a présence d'eaux navigables.

Le sénateur Ringuette : Ma question précise — et il s'agit d'une question très courte qui exige une réponse très courte — est combien de poursuites civiles sont intentées et ont été intentées au cours des cinq dernières années en ce qui a trait aux eaux navigables?

Mme Ohandjanian : Cela dépend du but de la poursuite. Une poursuite civile, ce n'est pas une chose à laquelle le ministère s'intéresse simplement parce que, comme l'a dit mon collègue, c'est une exception législative. Nous sommes là pour fournir une protection — c'est ce que nous faisons — afin d'éviter les poursuites. Je ne peux pas parler des poursuites civiles.

Le sénateur Ringuette : Afin d'éviter que des poursuites soient intentées contre les constructeurs. Ce choix, selon moi, est certainement conçu comme une mesure de protection financière à l'égard des constructeurs.

Le président : Nous n'avons plus de temps. Si nous pouvions obtenir plus de précisions par écrit de votre part, si cela est possible, cela nous aiderait un peu.

Mme Ohandjanian : J'ai seulement besoin d'éclaircir quelque chose. Une poursuite civile, ce n'est pas quelque chose que le ministère surveillerait entre des parties privées. La raison d'être de la loi, c'est effectivement l'autorisation. C'est le cas, actuellement. La loi permet de placer l'infrastructure en eaux navigables, sans risque qu'une poursuite civile soit intentée.

Le sénateur Ringuette : Exactement.

Le sénateur Baker : Les cas qu'elle a mentionnés ont tout simplement été renvoyés à un autre décideur de votre ministère afin qu'il s'en occupe.

Mme Ohandjanian : Cette décision a été retirée; exactement.

Le président : Ma demande n'est donc pas nécessaire.

Je veux remercier les témoins de leurs témoignages. Vous avez été brefs et nous avez fourni de très bonnes explications. Merci beaucoup d'avoir pris du temps, malgré vos horaires chargés, pour nous aider.

(La séance est levée.)


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