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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 34 - Témoignages du 6 décembre 2012


OTTAWA, le jeudi 6 décembre 2012

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 2, pour étudier l'état actuel de la sécurité du transport en vrac des hydrocarbures au Canada.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat et je suis le président du comité. Je tiens à souhaiter la bienvenue à mes collègues sénateurs, aux membres du public qui sont avec nous dans la salle et aux téléspectateurs de partout au pays qui nous regardent à la télévision.

Je demanderai aux sénateurs de se présenter à tour de rôle, mais permettez-moi d'abord de vous présenter notre vice-président, le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta. Il y a aussi Sam Banks, de la Bibliothèque du Parlement et Lynn Gordon, notre greffière. Je vais commencer de ce côté-ci, par le sénateur Ringuette.

[Français]

Le sénateur Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Seidman : Judith Seidman, Montréal, Québec.

[Traduction]

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.

Le sénateur Brown : Bert Brown, de l'Alberta.

Le président : Le 28 novembre 2012, le Sénat a autorisé notre comité à entreprendre une étude sur l'état actuel de la sécurité du transport des hydrocarbures au Canada. Dans le cadre de l'étude, le comité examinera et comparera les régimes de réglementation, les normes et les pratiques exemplaires appliqués au Canada et à l'étranger relativement au transport sécuritaire des hydrocarbures au moyen de pipelines, navires pétroliers et trains. La première partie de l'étude portera sur les éléments liés à la sécurité des pipelines de transport, c'est-à-dire des oléoducs et des gazoducs à haute pression et de plus grand diamètre qui sont utilisés pour le transport à longue distance. Le comité tiendra également compte du rôle des organismes de réglementation et de l'industrie pour ce qui est de promouvoir le rendement en matière de sécurité tout au long du cycle de vie des pipelines de transport au Canada.

Je suis ravi d'accueillir nos invités, qui participent tous à la séance par vidéoconférence, à partir de Calgary.

De l'Office national de l'énergie, nous recevons Iain Colquhoun, spécialiste en chef de l'ingénierie; et Patrick Smyth, chef d'unité de travail aux opérations. De l'Association canadienne des producteurs pétroliers, nous accueillons Greg Stringham, vice-président de la division des marchés et des sables bitumineux; et Dave Pryce, vice-président aux opérations.

Je tiens à remercier chacun de vous, car il a fallu faire de grands ajustements pour pouvoir recevoir les deux groupes aujourd'hui. Je pense que c'était surtout de notre faute, puisque nous avons dû annuler la réunion de mardi soir, à laquelle l'Office national de l'énergie était initialement convoqué, parce que le Sénat avait siégé plus longtemps que prévu.

Nous serons relativement pressés par le temps aujourd'hui, messieurs; je vous prie donc de vous en tenir à des observations aussi succinctes que possible. Nous avons en main la documentation que vous nous avez envoyée à l'avance, et nous vous en sommes reconnaissants. J'inviterais d'abord l'Office national de l'énergie à faire un exposé, suivi de l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Ensuite, nous passerons à la période des questions et réponses.

À vous la parole, messieurs.

Iain Colquhoun, ingénieur en chef, Office national de l'énergie : Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous parler aujourd'hui de la façon dont l'Office national de l'énergie, ou l'ONÉ, réglemente le volet sécurité de l'infrastructure pipelinière au Canada. L'Office national de l'énergie est, au Canada, l'organisme fédéral à qui il incombe, entre autres, de réglementer la construction et l'exploitation de pipelines internationaux et interprovinciaux. Environ 71 000 kilomètres de pipelines sont assujettis à la réglementation de l'ONÉ. En 2011, ces pipelines ont acheminé du pétrole brut et d'autres hydrocarbures d'une valeur de plus de 100 milliards de dollars vers des clients au pays et à l'étranger.

Au Canada, les ressources pétrolières et gazières font de plus en plus l'objet d'un examen approfondi, notamment quand il s'agit de leur mise en valeur et de leur transport sans danger. Nous croyons que les Canadiens ont le droit de poser des questions et de savoir ce que fait l'ONÉ pour exiger une exploitation sûre de la part des sociétés qu'il réglemente à toutes les étapes du cycle de vie d'un pipeline — de la conception, en passant par la construction et l'exploitation, jusqu'à une éventuelle cessation d'exploitation. L'ONÉ estime que la meilleure façon d'y arriver, c'est par des systèmes de gestion robustes et une culture de sécurité bien ancrée dans chacune des sociétés assujetties à sa réglementation.

Aux différentes phases de mise en valeur et d'exploitation d'un pipeline, l'ONÉ supervise les sociétés qu'il réglemente au moyen d'inspections et de vérifications rigoureuses et, au besoin, par la prise de fermes mesures de mise en application. Si l'ONÉ est d'avis, à un moment ou à un autre du cycle de vie d'un pipeline, que l'exploitation de ce dernier par une société pose un danger, il peut abroger les autorisations précédemment accordées, prendre des décrets de sécurité restreignant les activités, ou suspendre les opérations. Il pourrait aussi intenter des poursuites au criminel. L'ONÉ mettra à profit tous les pouvoirs qui lui sont accordés par le Parlement pour protéger les Canadiens et l'environnement.

En ce qui concerne le cadre réglementaire et la surveillance, l'ONÉ a mis en place un cadre de réglementation qui vise à promouvoir, dans l'intérêt du public canadien, la sûreté et la sécurité, la protection de l'environnement et l'efficience de l'infrastructure et des marchés énergétiques. Les attentes sont connues et regroupent ce qui suit : les exigences énoncées dans les lois et les règlements; les engagements des sociétés réglementées, y compris ceux pris pendant le processus de demande d'autorisation; les conditions rattachées aux approbations; les autres directives fournies à l'occasion par l'ONÉ.

Au moment d'élaborer un règlement, l'ONÉ commence par définir les résultats à atteindre en matière de sécurité, de sûreté, de protection de l'environnement et d'efficience économique. En général, cette démarche laisse aux sociétés réglementées la latitude pour choisir les moyens de parvenir aux buts fixés. Elle encourage également l'innovation et l'utilisation de la technologie la plus appropriée. Les sociétés doivent démontrer qu'elles ont choisi des moyens appropriés en vue de l'atteinte de ces résultats de sécurité, de sûreté, de protection de l'environnement et d'efficience économique.

L'ONÉ s'attend à ce que les sociétés assujetties à sa réglementation élaborent et mettent en œuvre des systèmes de gestion qui énoncent des politiques, des processus et des marches à suivre en matière de gestion de la sécurité des personnes et de protection de l'environnement. Il estime que des systèmes de gestion bien pensés et intégralement mis en place constituent la méthode fondamentale que l'industrie doit utiliser pour assurer la sécurité des personnes et la protection de l'environnement. Un système de gestion est un ensemble de méthodes et de processus interdépendants dont se servent les organisations pour mettre en œuvre leur politique et atteindre leurs objectifs. De tels systèmes permettent aux sociétés réglementées de repérer les problèmes éventuels, de décider de ce qu'il faut faire pour les éviter et d'établir le degré d'efficacité des mesures prises en vue de faire la promotion d'une amélioration continue. L'ONÉ oblige les sociétés à rendre compte de leur rendement et de l'efficacité de leurs systèmes de gestion.

Passons maintenant à la conception de pipelines et à l'évaluation de projets. À l'étape de la conception et de l'examen d'une demande visant un projet de pipeline, l'ONÉ évalue si le projet en question est dans l'intérêt public canadien et s'il peut être construit et exploité sans danger. La conception, les matériaux, la construction et l'exploitation sont autant d'aspects régis par le Règlement de 1999 sur les pipelines terrestres de l'ONÉ et par l'Association canadienne de normalisation.

Les sociétés qui demandent l'autorisation de construire et d'exploiter un pipeline doivent clairement indiquer les dangers en rapport avec son intégrité. Au Canada, nous tenons toujours compte de la nature des produits transportés au moment de la conception des pipelines et avant d'accorder les autorisations requises. Les propriétés des liquides et des gaz transportés sont également prises en compte dans le contexte de l'exploitation des installations.

Avant même la mise en chantier d'un projet, l'ONÉ exige des sociétés pipelinières qu'elles anticipent les situations pouvant constituer un danger afin de les prévenir, de les gérer ou d'en atténuer la menace. Les sociétés pipelinières réglementées par l'ONÉ sont tenues de disposer de plans d'ensemble bien mis en œuvre traitant à la fois de la sécurité, de la protection de l'environnement et des interventions en cas d'urgence.

L'ONÉ n'accordera jamais d'autorisation à l'égard d'un pipeline sans avoir la conviction que son exploitation est sans danger, et il tiendra les sociétés responsables des engagements pris pendant le processus d'examen de la demande. Un projet approuvé est habituellement assorti de conditions imposées par l'ONÉ et visant à atténuer les risques éventuels ainsi que les effets qui s'y rattachent.

Au moment de la construction d'un projet pipelinier, l'ONÉ surveille et vérifie la conformité aux exigences propres à cette étape, notamment par la voie d'un examen minutieux des principaux documents portant sur les programmes adoptés par la société ainsi que d'inspections sur place menées à l'atteinte de certains jalons clés par du personnel spécialisé. Une telle évaluation précède souvent la mise en service d'une installation. Les documents sont en outre régulièrement examinés dans le cadre d'activités annuelles de vérification de la conformité.

Les inspections sur place permettent d'être « tout yeux, tout oreilles », et elles constituent un mode d'examen et d'évaluation méthodique des activités réglementées en fonction des exigences de l'ONÉ et des normes de la CSA. Celles menées pendant la construction portent principalement sur l'intégrité, la sécurité des travailleurs et la protection de l'environnement. Si, à un moment ou à un autre des travaux de construction d'un pipeline, un inspecteur constate un problème, il a le pouvoir de prendre des mesures sur-le-champ pour que la société corrige la situation de non- conformité.

En ce qui a trait à l'exploitation de pipelines, l'ONÉ surveille et vérifie la conformité aux exigences liées à son fonctionnement. Les sociétés doivent faire rapport de toutes leurs activités à l'ONÉ, dont le personnel mène couramment des vérifications de la conformité qui s'inscrivent toutes dans une démarche préventive ayant comme objectif ultime de réduire à néant le nombre d'incidents.

L'ONÉ oblige les sociétés à surveiller les pipelines qui leur appartiennent et qu'elles exploitent. Il tient ces sociétés responsables de produire des résultats dans l'intérêt public au moyen d'un programme rigoureux de surveillance de la conformité et du respect des exigences imposées. Les emprises pipelinières font l'objet de fréquentes inspections. Les exploitants de pipelines survolent les canalisations, en suivent le tracé par voie terrestre, dans la mesure du possible, et font des fouilles exploratoires pour en évaluer l'état.

Nous exigeons en outre des sociétés qu'elles surveillent activement l'intégrité de leurs pipelines. L'examen le plus exhaustif à cette fin comporte des inspections de l'intérieur des canalisations, généralement au moyen d'outils à haute résolution, connus sous le nom de racleurs intelligents, en mesure de déceler la présence de corrosion, de fissures, de bosselures et de déplacement des tuyaux et d'en cerner avec précision l'endroit ainsi que la position.

Je vais maintenant parler de la gestion de situations d'urgence et des interventions en cas de déversement. En cas d'urgence, la priorité absolue de l'ONÉ est d'assurer la sécurité des personnes, de protéger l'environnement et de préserver les biens matériels. L'ONÉ exige à cette fin que toutes les mesures raisonnables soient prises. L'ONÉ tient les sociétés qu'il réglemente responsables d'anticiper, d'atténuer et de gérer les incidents, peu en importe l'ampleur et la durée. Si jamais un incident survient, l'ONÉ dispose d'un programme de gestion des urgences et est toujours prêt à intervenir en pareilles circonstances. En présence d'un incident grave, l'ONÉ peut envoyer son personnel sur place afin de surveiller ce qui se passe dès les premières mesures d'intervention prises par la société.

L'ONÉ a en outre signé des accords avec des ministères et d'autres organismes gouvernementaux en vue d'une coordination des interventions et d'une communication efficace en temps de crise. En cas d'incident qui surviendrait sur un des pipelines ou une des installations qu'il réglemente, l'ONÉ est l'organisme fédéral responsable. Le Bureau de la sécurité des transports peut également faire enquête dans le cas d'un incident sur un pipeline réglementé par l'ONÉ. Si une situation d'urgence met en cause différents organismes et domaines de compétence, l'ONÉ préconisera une approche intégrée pendant la situation d'urgence, mais aussi par la suite. En dernier ressort, l'ONÉ vérifiera si les opérations de nettoyage et d'atténuation des effets environnementaux découlant de l'incident et exécutés par une société réglementée sont suffisantes et appropriées.

Parlons maintenant de la cession d'exploitation de pipelines. L'étape de cessation d'exploitation du cycle de vie d'un pipeline commence lorsqu'une société décide d'arrêter pour toujours de fournir un service de transport sur un pipeline et demande à l'ONÉ l'autorisation de cesser l'exploitation de ce pipeline ou des installations connexes. Pour toutes les demandes de cessation d'exploitation d'un pipeline, l'ONÉ tiendra une audience publique afin de permettre l'intervention de personnes directement touchées ou de gens qui disposent d'une expertise sur un sujet précis que l'ONÉ juge pertinent dans le but de rendre une décision définitive éclairée.

En se fondant sur l'information recueillie pendant le processus d'audience, l'ONÉ décidera si la cessation d'exploitation faisant l'objet de la demande peut être effectuée sans danger. Si l'ONÉ autorise la cessation d'exploitation, il peut imposer des conditions qui doivent être remplies, sans quoi les travaux effectués seront jugés incomplets. Une fois que toutes les conditions de l'ONÉ sont remplies, les risques pour la sécurité publique, pour les biens matériels et pour l'environnement doivent se situer à un niveau acceptable. L'ONÉ n'a laissé planer aucun doute à l'effet qu'à la conclusion du processus de cessation d'exploitation, l'emprise doit se trouver dans un état comparable à l'environnement avoisinant.

De plus, l'ONÉ exige des sociétés pipelinières assujetties à sa réglementation qu'elles financent toutes les activités liées à la cessation d'exploitation de leurs pipelines. L'audience en cours sur les coûts estimatifs de la cessation d'exploitation s'inscrit dans la perspective d'amener les sociétés à mettre de côté les fonds voulus pour parer aux futurs coûts attribuables à la cessation d'exploitation.

En terminant, je tiens à préciser que l'Office national de l'énergie maintient l'engagement qu'il a pris en vue d'une amélioration continue, et il est toujours à la recherche de façons innovatrices de rehausser la sécurité et de procurer une meilleure protection de l'environnement tout en répondant aux besoins énergétiques des Canadiens.

Je vous remercie encore une fois de nous avoir donné l'occasion de participer à cet important débat sur la façon dont le réseau pipelinier au Canada facilite le transport sûr et efficace des ressources pétrolières et gazières du pays. Mon collègue, M. Smyth, et moi serons heureux de répondre à vos questions. Toutefois, je crois comprendre que les représentants de l'Association canadienne des producteurs pétroliers feront d'abord quelques observations préliminaires. Merci, monsieur le président.

Le président : Merci, monsieur Colquhoun. Nous passons maintenant à M. Stringham.

Greg Stringham, vice-président, Marchés et Sables bitumineux, Association canadienne des producteurs pétroliers : Bonjour, et merci infiniment de nous avoir invités à nous joindre à vous ce matin et d'avoir pris les dispositions nécessaires pour nous permettre de témoigner par vidéoconférence à partir de Calgary. Cela nous a beaucoup facilité la vie. Je suis accompagné aujourd'hui de Dave Pryce, vice-président aux opérations.

Je vais vous expliquer notre approche globale des enjeux liés aux pipelines et au transport maritime, puis M. Pryce vous donnera un aperçu de la sécurité et de l'intégrité des pipelines que possèdent et exploitent les entreprises productrices. Nous conclurons ensuite par quelques commentaires récapitulatifs.

Je veux m'assurer que vous comprenez bien que nous vous avons remis, sous pli séparé, une série de diapositives à titre de référence, qui traitent de l'importance, pour notre industrie, de l'accès aux marchés et du transport vers ces marchés. Je crois que vous en avez tous reçu des copies. Je ne les analyserai pas en détail aujourd'hui, mais sachez qu'elles contiennent des prévisions sur la production pétrolière et gazière, des cartes sur l'emplacement des pipelines et des réseaux de transport ainsi que des renseignements sur les marchés et des données économiques sur les facteurs déterminants des prix. Vous y trouverez aussi des renseignements utiles pour situer le contexte, et nous pourrons y revenir si vous le souhaitez. Je trouvais important de vous fournir ces informations.

Alors, où en sont les choses dans notre industrie? En résumé, il est important de savoir que notre industrie injecte environ 100 milliards de dollars dans l'économie canadienne chaque année. Cela comprend les investissements en capital que nous effectuons partout au pays, les produits et services que nous achetons dans presque l'ensemble des provinces et territoires, ainsi que les recettes gouvernementales qui proviennent des redevances et des impôts.

Ce qu'il faut retenir aujourd'hui, c'est que chaque molécule d'énergie qui génère ces revenus et ces emplois partout au Canada doit être transportée de sa source jusqu'au marché de destination.

Ainsi, il est essentiel pour notre industrie et pour l'économie canadienne de se doter d'une capacité de transport sûre, suffisante, fiable et rapide. Comme vous l'avez dit dans vos observations préliminaires, monsieur le président, pour notre industrie, une telle capacité englobe les pipelines, les voies ferrées, le transport maritime et même, dans une certaine mesure, le transport par camion qui joue un rôle important dans le tout.

Pour situer le contexte, il est important de comprendre que notre industrie produit et transporte environ 3 millions de barils de pétrole par jour et plus de 14 milliards de pieds cubes de gaz naturel par jour, à destination des consommateurs canadiens et des marchés d'exportation, aujourd'hui presque entièrement situés aux États-Unis, comme vous le savez.

En outre, au Canada, les provinces de l'Ontario, du Québec et de l'Atlantique importent 680 000 barils de pétrole par jour provenant de fournisseurs outre-mer, dont l'intégralité est acheminée au Canada par des pétroliers vers les principaux ports de ces régions.

En ce qui concerne le sujet à l'étude devant le comité, à savoir le transport sécuritaire des hydrocarbures, nous insisterons ici sur les principaux éléments des pratiques sécuritaires et sur les rôles de l'industrie, des gouvernements et des responsables de la réglementation en matière de prévention des incidents, d'intervention et de rétablissement.

Comme vous le savez, les gouvernements fédéral et provinciaux participent à l'établissement des normes et des politiques visant la production et le transport de pétrole et de gaz; à l'échelle fédérale, c'est le cas notamment de Transports Canada et de la Garde côtière. De plus, les responsables de la réglementation gouvernementale, comme l'Office national de l'énergie et, à l'échelle provinciale, l'Energy Resources Conservation Board de l'Alberta et l'Oil and Gas Commission en Colombie-Britannique, participent à l'approbation et à l'exploitation de ces réseaux de transport.

Le rôle de l'industrie consiste à établir et à diffuser des pratiques exemplaires parmi tous ses membres, et à veiller à ce que les pipelines et les autres réseaux de transport qu'elle construit et exploite respectent les normes et règlements gouvernementaux. En outre, l'industrie participe aux activités des organisations chargées de la prévention des incidents, des interventions et du rétablissement, sur terre et en mer. Il s'agit d'organisations comme Western Canadian Spill Services pour le transport terrestre, la Société d'intervention maritime, Est du Canada Ltée et la Western Canada Marine Response Corporation pour le transport maritime. Ces deux dernières organisations appartiennent à des sociétés privées, dont plusieurs importantes sociétés pétrolières et gazières, et sont accréditées par Transports Canada pour offrir des services d'intervention en cas de marée noire; cela inclut la formation, l'expertise, les outils et le stock d'équipement nécessaire dans des endroits clés.

En tant que producteur de pétrole et de gaz à l'échelle du Canada, nous construisons et exploitons une partie de ce réseau de transport, la plupart du temps près des sources de production, et nous comptons sur les sociétés de transport, par exemple celles qui exploitent les principaux pipelines, pour acheminer nos produits jusqu'aux marchés. Nous sommes donc ravis de pouvoir présenter notre vision; d'ailleurs, nous croyons comprendre que vous recevrez la semaine prochaine nos collègues de l'Association canadienne de pipelines d'énergie, qui représente les exploitants de pipelines.

Je vais maintenant céder la parole à notre vice-président aux opérations, Dave Pryce, qui va vous expliquer notre vision de la sécurité et de l'intégrité des pipelines détenus et exploités par les producteurs.

Dave Pryce, vice-président, Opérations, Association canadienne des producteurs pétroliers : Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Étant donné qu'une vaste majorité des pipelines d'énergie réglementés par les provinces sont centrés dans les provinces productrices de l'Ouest — surtout en Alberta, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan —, nous axerons nos commentaires et nos observations sur les pipelines exploités par les producteurs dans ces trois provinces.

L'Energy Resources Conservation Board, ou l'ERCB, et la BC Oil and Gas Commission, l'OGC, sont les organes provinciaux qui réglementent les pipelines en Alberta et en Colombie-Britannique, respectivement. En Saskatchewan, c'est le ministère de l'Économie qui fait appliquer la réglementation. Ces organismes sont chargés de faire respecter les exigences techniques énoncées dans la réglementation, à savoir le Pipeline Regulation en Alberta, le Pipeline and Liquefied Natural Gas Facility Regulation en Colombie-Britannique et les Pipelines Regulations en Saskatchewan.

En ce qui concerne les exigences techniques applicables à la conception, à la construction et à l'exploitation des oléoducs et des gazoducs, ces règlements s'appuient sur la plus récente version de la norme Z662, intitulée Réseaux de canalisations de pétrole et de gaz, de l'Association canadienne de normalisation. L'annexe N de cette norme porte précisément sur l'intégrité des pipelines. À ce stade-ci, je crois qu'il est important de mettre en lumière le rôle tout à fait essentiel que joue l'Association canadienne de normalisation pour la sécurité et l'intégrité des pipelines. Sa norme a été largement adoptée par les organismes de réglementation provinciaux et fédéraux du Canada et sert de code définitif et unique pour les pipelines canadiens.

Enfin, du point de vue de l'assurance de la conformité, l'organisme de réglementation doit superviser les activités tout au long du cycle de vie réglementaire du pipeline, de la conception à l'abandon, en passant par la construction, afin de garantir le respect des exigences énoncées dans la réglementation.

Pour ce qui est du rôle de l'industrie, les exploitants de pipelines doivent se doter de programmes et de systèmes de gestion qui définissent les processus, les procédures, les méthodes et les responsabilités garantissant l'intégrité des réseaux de pipelines et le respect de la réglementation.

Les exploitants de pipelines doivent également disposer de programmes d'inspection, de lutte contre la corrosion et de mise à l'essai, à l'appui de leurs programmes de gestion de l'intégrité des pipelines. Un des principaux volets d'un programme de gestion de l'intégrité des pipelines est l'évaluation des risques, qui garantit que le fonctionnement et la maintenance des pipelines préservent un niveau de risque acceptable. Les résultats de ces évaluations permettent vraiment de classer par ordre de priorité les activités de maintenance, d'inspection et de réparation. En cas d'incident, les exploitants de pipelines reconnaissent que les mesures de prévention des déversements et d'intervention constituent un important volet de leur acceptation sociale.

En outre, les exploitants de pipelines doivent, en vertu de la réglementation, prendre des mesures immédiates pour bloquer la source de tout rejet, contenir le déversement et procéder au nettoyage. Ils doivent aussi signaler les incidents aux autorités de réglementation, qui doivent s'occuper du nettoyage et évaluer la cause de l'incident, afin de déterminer s'il faut prendre des mesures correctrices.

Comme l'a mentionné M. Stringham tout à l'heure, des coopératives spécialistes des déversements de pétrole, comme Western Canadian Spill Services, ont été mises sur pied pour offrir une formation et des services de préparation aux déversements accidentels et d'intervention, conformément à la réglementation provinciale, aux détenteurs de permis exploitant des puits et des pipelines. Les exploitants sont tenus de participer à ces coopératives ou d'avoir leur propre équipement d'intervention en cas de déversement.

La prévention, l'intervention et le rétablissement sont les pierres angulaires de la gestion de la sécurité et de l'intégrité des pipelines par les producteurs.

En ce qui a trait à l'amélioration continue, compte tenu du rôle essentiel que jouent la sécurité et l'intégrité des pipelines pour notre acceptation sociale, les exploitants de pipelines et les autorités de réglementation doivent constamment chercher des moyens d'améliorer la situation.

Dans cette optique, en 2010, la BC Oil and Gas Commission a mis en œuvre un nouveau programme visant à déterminer le respect des programmes de gestion de l'intégrité des pipelines. Ce programme d'assurance est appuyé par des vérifications sur le terrain et des examens de la documentation.

En outre, l'ERCB a récemment annoncé un examen de pipelines en Alberta, qui consiste à évaluer la pertinence des règlements applicables aux pipelines qui relèvent de l'ERCB. Dans le cadre de cet examen, on fera un survol de la réglementation dans les principaux domaines de préoccupation : processus de gestion de l'intégrité des pipelines et planification; sécurité des pipelines franchissant des cours d'eau; interventions en cas d'incidents liés à des pipelines.

En Saskatchewan, en vue de garantir que les lois demeurent à jour et pertinentes, le ministère de l'Économie a annoncé qu'il soumettrait le Pipelines Act à un examen et à une consultation en 2013.

Enfin, le ministère de l'Environnement de la Colombie-Britannique a publié cette semaine un document faisant état des politiques qu'il entend adopter. Le document décrit le processus que le gouvernement veut mettre en œuvre pour examiner les capacités terrestres de préparation et d'intervention de la province.

L'industrie en amont appuie ces initiatives, qu'elle voit comme des moyens de garantir la performance des membres de l'industrie et des responsables de la réglementation.

Les exploitants de pipelines jouent aussi un rôle pour l'amélioration continue. Les comités techniques de l'ACPP analysent les données sur les incidents touchant les pipelines, données qui sont accessibles au public, afin de définir les aspects de la sécurité et de l'intégrité des pipelines qui pourraient être améliorés grâce à l'élaboration de nouvelles pratiques exemplaires et de nouveaux documents d'orientation au sein de l'industrie.

À mesure que de nouveaux enjeux sont mis en lumière, l'ACPP fournit les ressources aux équipes de travail chargées d'examiner le bien-fondé de l'élaboration d'autres pratiques et lignes directrices recommandées à l'industrie. Jusqu'à maintenant, l'ACPP a participé à l'élaboration de 13 pratiques recommandées à l'industrie, adaptées à l'infrastructure énergétique des pipelines.

Quant à l'avenir, à mesure que cet examen avancera, nous proposons au comité de s'intéresser en priorité aux possibilités d'amélioration dans les domaines suivants.

Tout d'abord, il faut rassurer et sensibiliser le public. Le rapport du comité permettra de mieux comprendre les aspects de la sécurité du transport en vrac d'hydrocarbures au Canada. Comme on l'a dit, les pipelines sont essentiels à la croissance de l'industrie et, par extension, à la prospérité économique et à la création d'emplois. Leur sécurité et leur intégrité sont donc des facteurs déterminants de notre acceptation sociale. Dans pareil contexte, l'ACPP encourage le comité à déterminer de quelle façon son rapport peut servir d'outil pour mieux faire comprendre au public la sécurité et l'intégrité des pipelines et, à plus grande échelle, la façon dont leur infrastructure énergétique s'inscrit dans des politiques et une réglementation plus globales, axées sur une exploitation responsable des ressources naturelles au Canada.

La réglementation applicable à la sécurité et à l'intégrité des pipelines devra trouver le juste équilibre entre une approche normative et une approche fondée sur les risques. Il est important de noter qu'une approche fondée sur les risques ne se traduit pas par moins de supervision; elle vise plutôt à optimiser la répartition des rôles en matière de supervision réglementaire. Cette approche permet en outre aux exploitants d'utiliser des solutions innovatrices pour obtenir les résultats et satisfaire aux exigences qu'énonce la réglementation.

En ce qui concerne le rôle des normes applicables à l'ensemble de l'industrie, l'Association canadienne de normalisation entretient des liens avec d'autres organismes de normalisation, ce qui lui permet de mettre en place une harmonisation entre provinces ou territoires ou encore, avec d'autres pays. En outre, le mode de fonctionnement de la CSA crée une plateforme stable propice à l'amélioration continue. À cette fin, toutes les normes établies par la CSA font l'objet d'un examen périodique, qui permet, le cas échéant, des adaptations et des mises à jour. Dans l'esprit de ces éléments positifs, l'ACPP encourage le comité à déterminer quel rôle, s'il y a lieu, les normes visant l'ensemble de l'industrie devraient jouer pour répondre aux besoins des différentes instances et aux besoins opérationnels.

Je vais conclure par quelques observations récapitulatives. L'ACPP sait que les intervenants et le public réclament une information plus pertinente, plus transparente et transmise plus rapidement à propos de la sécurité et de l'intégrité des pipelines. Nous considérons qu'il s'agit là d'un enjeu pour les responsables de la réglementation de tout le pays et une occasion d'appliquer les observations issues de nos études à l'amélioration de la surveillance assurée par la réglementation et de l'efficacité de celle-ci. La production et le transport sécuritaires et responsables du pétrole et du gaz naturel constituent le fondement du bien-être économique de l'Alberta; on n'insistera jamais assez sur leur importance.

Enfin, le rapport en question facilitera l'évolution vers une amélioration du rendement et démontrera qu'on peut exploiter le pétrole et le gaz naturel, puis les transporter en toute sécurité vers les marchés qui en ont besoin.

Le président : Merci, messieurs. J'aurai quelques questions à vous poser avant de céder la parole aux autres sénateurs.

Monsieur Stringham, vous avez dit à juste titre que nous cherchons à mieux faire connaître les mesures prises par le Canada relativement à la sécurité et au transport du pétrole et du gaz, surtout au moyen des principales canalisations de transport et tout le reste. Nous avons lancé notre première étude, que nous avons menée pendant trois ans, pour essayer de fournir de plus amples renseignements aux gens parce qu'ils en demandent plus.

Dans cet esprit, je tiens à remercier l'ACPP de ce qu'elle a accompli grâce à ses annonces à la télévision. Selon moi, vous avez fait un excellent travail pour ce qui est de montrer aux Canadiens les activités que vous menez et comment vous vous y prenez. C'est, à mon avis, une façon remarquable de faire passer le message de votre association et de ses sociétés membres. Vous pourriez même encourager l'autre association, soit l'Association canadienne des pipelines d'énergie, à suivre votre exemple. Je crois que cela vaut la peine.

Je vous remercie de vos observations. C'est ce que nous essayons de faire, et nous voulons collaborer avec vous dans la mesure du possible. Ne vous gênez surtout pas pour nous donner un coup de fil. De toute façon, je ne vous ai jamais vu hésiter à ce sujet; je ne vois donc pas pourquoi vous ou M. Pryce hésiterez à nous dire ce que nous pouvons faire pour vous aider. Nous devons travailler ensemble parce que nous en bénéficierons tous, peu importe l'endroit où nous vivons dans ce grand pays.

J'aimerais vous poser quelques questions aux représentants de l'ONÉ. Au début, vous avez dit que si une société n'adhérait pas aux normes prescrites, l'ONÉ pourrait abroger les autorisations accordées. Pouvez-vous peut-être nous expliquer ce point un peu plus en détail? Cela comporte-t-il un aspect monétaire? Vous pourriez peut-être nous en dire plus à ce sujet. Y a-t-il des amendes? Que se passe-t-il?

M. Colquhoun : Cela peut comprendre toute une gamme de mesures possibles. Par exemple, si un inspecteur se rend sur place et découvre une pratique dangereuse ou susceptible de compromettre l'intégrité du pipeline, de diminuer la sécurité, de nuire à l'environnement ou de causer des dommages, l'Office national de l'énergie accorde à l'inspecteur tous les pouvoirs nécessaires pour mettre un terme aux travaux à ce moment-là. Ce serait sûrement un des cas.

Je vais laisser mon collègue, M. Smyth, expliquer certains des autres cas, notamment celui que vous venez d'évoquer, à savoir les sanctions administratives pécuniaires.

Patrick Smyth, chef d'unité de travail, Opérations, Office national de l'énergie : Merci, monsieur Colquhoun. Comme mon collègue l'a dit, l'ONÉ utilise une échelle de mise en application. Il commence tout simplement par envoyer ses inspecteurs sur le terrain. Si ces derniers observent un cas de non-conformité, ils tiennent une discussion avec la société. S'il est possible de corriger la situation sur-le-champ, c'est ce qu'on fait, puis on en prend note dans la documentation.

Selon la nature de la non-conformité, l'Office national de l'énergie peut aller jusqu'à imposer des restrictions concernant l'exploitation du pipeline, c'est-à-dire des ordonnances de restriction de la pression; dans les cas extrêmes, il pourrait annuler l'autorisation de la société d'exploiter le pipeline. Autrement dit, on pourrait fermer le pipeline.

En vertu de notre cadre de réglementation actuel, nous pourrions même recommander aux tribunaux d'intenter une poursuite au criminel. À l'avenir, aux termes de la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable, l'ONÉ aura la capacité d'imposer des sanctions administratives pécuniaires, ou des SAP, chose que nous comptons mettre en place d'ici juillet 2013. Grâce à ces pouvoirs, nous pourrons imposer une sanction maximale de 25 000 $ à un particulier et de 100 000 $ à une société. C'est pour chaque infraction par jour, et il n'y a pas de limite.

Le président : L'ONÉ a-t-il déjà fermé un pipeline parce que celui-ci n'était pas conforme?

M. Colquhoun : Ce n'est certainement pas une pratique très courante, et il n'y a pas eu de tels cas récemment, mais si je me souviens bien, on avait fermé un pipeline de soufre à un moment donné à cause d'une infraction. Prenons le cas de Keystone; l'exploitation en tant que telle n'a pas été suspendue. C'était, bien sûr, à l'étape de la construction, mais le projet a été retardé d'environ deux mois en raison d'une infraction pour non-conformité.

Le président : Si vous pouviez faire parvenir à notre greffière des renseignements sur les cas éventuels de fermeture de pipeline en raison d'une non-conformité, nous vous en serions très reconnaissants.

En ce qui concerne la modification du produit dont parlent les gens ou qui pourrait même se faire pour le pipeline de TransCanada entre l'Ouest et l'Est canadien, soit le passage du gaz naturel au pétrole brut, les normes sont-elles différentes pour la construction d'un pipeline destiné uniquement au transport du pétrole par rapport à un pipeline destiné au gaz naturel? S'il y en a, quelles sont-elles?

M. Colquhoun : Les deux fluides que vous mentionnez, le pétrole et le gaz naturel, sont couverts dans la version à jour de la norme Z662 de la CSA, l'Association canadienne de normalisation. Elle traite de tous les types de fluides qui sont transportés dans nos pipelines.

Toutefois, il y a des différences en ce qui concerne les propriétés physiques des deux fluides. Toutes les sociétés doivent être particulièrement prudentes lorsqu'elles passent du service gazier au service pétrolier, puisque le gaz est un liquide compressible. De petits changements de volume n'entraînent pas de changements de pression ni de variations correspondantes dans les tensions, alors que le pétrole est incompressible, et que de petits changements de volume entraînent des variations et des tensions. Par conséquent, s'il y avait des défauts bénins dans un pipeline gazier, nous voudrions avoir l'assurance qu'avec le nouveau régime de fonctionnement pour le pétrole, puisqu'il peut y avoir des variations de pression, ces anomalies demeureraient négligeables.

Le président : Les représentants de l'ACPP veulent-ils répondre à cette question?

M. Pryce : Oui. Qu'il s'agisse ou non du pipeline dont nous parlons en particulier, advenant tout changement dans l'état d'un pipeline, dans le produit ou les circonstances, on s'attend à ce que l'opérateur réévalue son système de gestion de l'intégrité et ajuste ses programmes d'entretien et d'inspection pour tenir compte des différences dans les risques pouvant être associés à un produit par rapport à un autre. On changerait non seulement le pipeline, mais aussi le système de gestion de l'intégrité, afin de prendre en compte les risques potentiels.

M. Stringham : J'ajouterais que nous avons une certaine expérience à cet égard, comme vous le savez. Nous avons converti le système de gaz naturel qui était utilisé sur la ligne principale de TransCanada, pour le premier système de base de Keystone — pas XL, mais le système de Keystone —, en le faisant passer du service de transport gazier au service pétrolier. Il y a un historique des protocoles et de l'évaluation qui doivent être effectués durant ce processus qui pourrait être utilisé ici également.

M. Colquhoun : J'aimerais ajouter une petite observation, en appui à ce qu'a dit M. Pryce au sujet non seulement des exigences physiques, mais aussi des exigences qui peuvent nécessiter un ajustement relativement au système de gestion et à l'évaluation des risques. L'ONÉ souhaiterait que l'on procède à une évaluation particulière pour s'assurer que le nouveau pipeline, ou celui qui transporte le nouveau produit, est en bon état pour le service.

Le sénateur Mitchell : Merci, messieurs. J'aimerais revenir sur la question du pipeline d'ouest en est. Le pétrole que nous enverrions à l'Est dans ce pipeline remplacerait, si j'ai bien compris, le pétrole qui y est actuellement expédié et qui, soit dit en passant, est peut-être considéré comme du pétrole non éthique et incertain, et qu'il vaudrait la peine de remplacer par le pétrole de l'Alberta, qui n'a bien sûr pas ces caractéristiques. Ce n'est peut-être pas une question juste ni facile, mais strictement sur le plan de la sécurité, quelle est la différence entre le transporter par pipeline et le livrer par bateau? Toutes choses étant égales, pouvez-vous faire une évaluation à cet égard, ou s'agit-il en quelque sorte simplement d'une configuration de probabilités?

M. Colquhoun : C'est une excellente question. Vous avez raison de dire que ce n'est pas une question facile, monsieur le sénateur.

Un certain nombre d'études scientifiques ont démontré de façon concluante que pour le transport sur longues distances d'hydrocarbures en vrac, le pipeline est le moyen de transport le plus sûr et le plus économique. Ces études sont appuyées par les rapports du Bureau de la sécurité des transports, qui sont disponibles aux fins d'examen.

Le sénateur Mitchell : Ma prochaine question est peut-être difficile elle aussi. Les problèmes relatifs à la sécurité des pipelines ont suscité beaucoup d'intérêt à cause de ce qui s'est produit au Michigan et dans la rivière Kalamazoo, je pense. Lorsque mon collègue, le sénateur Lang, a parlé de cette idée, qu'il m'en a parlé, du moins, je ne suis pas certain que ce n'était pas dans ce contexte, et que nous voudrions nous pencher sur la sécurité des pipelines.

L'un de vos exposés portait sur les techniques d'inspection, notamment en avion, en voiture et à pied. Or, l'incident de la rivière Kalamazoo m'a porté à croire qu'il y avait en fait — et j'en suis certain — des systèmes pour surveiller la pression, et que vous avez des centres où il y a toutes sortes d'outils techniques, de cadrans, d'écrans, et ainsi de suite.

Pourriez-vous nous parler de cette technologie, nous dire où elle se trouve et comment il se fait — et je ne le dis pas de façon négative — que le personnel d'une société peut surveiller ces écrans durant 17 heures et ne pas être en mesure d'intervenir? Comment cela se fait-il? Croyez-vous que cette technologie peut être améliorée? Est-elle de plus en plus présente dans la sécurité des pipelines?

M. Colquhoun : Il y a eu des progrès considérables en matière de technologie de surveillance, et cela continuera. L'office s'est engagé à améliorer continuellement ses façons de faire, et nous aimerions que les sociétés que nous réglementons le fassent aussi en ce qui concerne leur système de gestion.

Il y a des éléments précis dans les systèmes de gestion qui sont liés à la formation, à la compétence du personnel et aux interventions de gestion des urgences. Le thème récurrent n'est pas tant lié à la technologie, mais à la façon dont la technologie est utilisée et à la façon de traiter les alarmes faussement positives ou faussement négatives, par exemple. Nous aimerions collaborer avec les sociétés réglementées afin d'apporter des améliorations.

M. Pryce : Permettez-moi de poursuivre sur le sujet. Je ne peux faire de commentaire sur cet incident précis — l'ACPP n'en connaît pas les détails —, mais je pense, comme l'a indiqué M. Colquhoun, que les deux choses qui doivent être conjuguées sont la compétence technique en matière de conception et le personnel qui y participe. Je dirais que l'industrie se penche probablement ce qui s'est produit là-bas et sur ses propres systèmes de gestion interne en matière de personnel, de formation et de procédures opérationnelles, afin de disposer d'un processus lui permettant d'intervenir et de prendre des décisions rapidement dans ce genre de situation. Je crois que de dures leçons seront tirées de ces incidents relativement aux procédures internes.

Le président : J'aimerais ajouter que nous voulons aussi voir comment les choses se sont améliorées dans l'industrie. Les représentants de l'ACPP et de l'ONÉ ont dit que les choses se sont beaucoup améliorées ces derniers temps; pourriez-vous nous faire parvenir un document indiquant quelles améliorations ont été apportées au cours de la dernière décennie, ou même sur une période plus courte, afin que nous sachions quels ont été ces changements et ces améliorations? Je voulais simplement vous le demander avant de l'oublier. Merci.

Le sénateur Mitchell : J'ai une autre question. Le ministère des Transports a demandé à la National Academy of Sciences des États-Unis de réaliser une étude sur la sécurité liée au transport du bitume des sables pétrolifères par pipeline. Selon l'angle sous lequel on examine ces questions, cela peut être inquiétant ou encourageant. Je me demande si l'ONÉ a une idée de ce qui se passe de ce côté. Vous a-t-on contacté à ce sujet? Savez-vous où on en est?

M. Colquhoun : Oui, nous sommes au courant. J'en ai parlé un peu plus tôt avec M. Stringham. Des représentants de l'ACPP et de l'ONÉ ont assisté aux audiences. Nous avons mené notre propre évaluation interne. Vous parlez en fait du bitume dilué. Le bitume en soi est très difficile à faire circuler dans les pipelines à des températures normales. Il est souvent dilué par condensation. Vous le savez.

Nous le savons également et nous avons fait nos propres vérifications relativement aux propriétés du bitume dilué. Nous nous sommes aussi penchés sur notre propre expérience opérationnelle. Le bitume dilué est transporté par pipeline depuis le milieu des années 1980, je dirais, en particulier en Alberta; nous avons donc acquis notre propre expérience, tout comme l'organisme de réglementation de la province. Jusqu'à présent, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'existe pas de différence importante sur le plan de la corrosivité entre ce qu'on appelle le brut classique et le bitume dilué. Donc, il serait raisonnable de penser que nous recevrons des nouvelles encourageantes à la suite de l'étude de la National Academy of Sciences.

M. Stringham : J'ajouterais, monsieur le sénateur, qu'il y a eu trois audiences publiques sur cette question. Comme vous l'avez mentionné plus tôt, la transparence est essentielle à la compréhension. Nous croyons qu'une organisation comme la National Academy of Sciences des États-Unis permettra d'assurer la transparence. L'ONÉ s'est penché là- dessus. Le gouvernement de l'Alberta, par l'entremise d'Alberta Innovates, a réalisé des travaux scientifiques à ce chapitre. Et d'autres parties ont examiné cette question. Nous sommes persuadés que cela va permettre de mieux faire comprendre aux Américains que le bitume dilué est semblable à tout autre pétrole lourd transporté dans le système depuis de nombreuses années. Nous participons pour nous assurer que l'information est transmise; toutefois, toutes les preuves qui leur ont été présentées jusqu'ici ont été relativement positives.

Le sénateur Seidman : J'aimerais aller un peu plus loin parce que cela m'inquiétait, étant donné que je suis du Québec. Ces dernières semaines, on a beaucoup parlé aux nouvelles du projet d'inversion de la canalisation 9 et de ses répercussions, car cette canalisation transporterait du pétrole directement à Montréal, je crois. Le débat portait sur ce bitume dilué et sur le fait que le ministre de l'Environnement du Québec estimait qu'il était plus corrosif et, du coup, que cela augmenterait le risque de déversement dans l'environnement ou de problèmes majeurs. Vous venez d'en parler. Pourriez-vous nous donner un peu plus de précisions? On a publié récemment un rapport d'étude qui démontrait que ce bitume était l'un des pétroles les moins corrosifs, je crois. J'aimerais que vous nous en parliez davantage.

M. Colquhoun : Comme l'a mentionné M. Stringham, il y a probablement eu deux études récentes sur le sujet. Alberta Innovates a réalisé une étude approfondie de la corrosivité du bitume dilué et, plus récemment, RNCan, en utilisant le protocole ASTM, est arrivé à la même conclusion, soit qu'il n'y a pas de différence entre les deux sur le plan de la corrosivité.

La confusion, et j'en suis certain parce que je l'ai vu sur papier, est attribuable à l'indice d'acidité. Dans les raffineries qui traitent le produit à plus de 200 degrés Celsius, l'indice d'acidité a des répercussions précises, mais il n'a absolument aucun effet sur les pipelines. Nous continuons d'affirmer que le bitume dilué n'est pas plus corrosif que tout autre pétrole brut.

Le sénateur Seidman : En conséquence, vous dites que selon ces données, les probabilités de déversement ne sont sans doute pas supérieures en ce qui concerne le bitume?

M. Colquhoun : Oui, c'est exact, sénateur. Selon cette étude, selon nos propres vérifications et selon quelques décennies d'exploitation du bitume dilué, c'est exact.

M. Stringham : En ce qui a trait à la canalisation 9, quand nous avons commencé à envisager cette possibilité afin de remplacer le pétrole que l'on importe actuellement, nous avons constaté qu'il y a actuellement un écart de prix, comme je l'ai indiqué dans le document, qui constitue un incitatif économique. Nous nous sommes penchés sur l'aspect de la sécurité; pour la canalisation 9 que vous avez mentionnée, et possiblement pour d'autres, il s'agit d'un pipeline existant. Il a été construit dans les années 1970 pour transporter le pétrole dans cette direction. Le flot a été inversé, et on envisage maintenant de l'inverser de nouveau. Le troisième élément, c'est que les raffineries de Montréal et Québec, comme vous le savez sans doute, traitent le pétrole léger, du moins pour le moment. Elles ne traitent pas encore le bitume dilué. Elles étendront peut-être leurs activités, et je ne veux donc pas exclure cette possibilité, mais pour l'heure, ces raffineries sont prêtes à traiter 300 000 barils de pétrole léger par jour, qui pourrait provenir de la Saskatchewan, de l'Alberta ou du Manitoba, ou même certains pétroles synthétiques. Il n'est pas question de bitume dilué pour commencer. Il est important d'examiner tous les aspects de la question, mais il est important de comprendre ces trois éléments également.

Le sénateur Seidman : Je vous remercie. Monsieur Pryce et monsieur Stringham, vous avez beaucoup parlé du permis social. J'aimerais vous poser une question au sujet de ce que nous avons constaté dans le cadre d'une étude que nous avons menée à la suite d'un important déversement de pétrole survenu dans le golfe il y a quelque temps. Je suis sûr que vous vous en souvenez. Nous avons parlé de garantir la sécurité et l'intégrité des pipelines, de l'importance du permis social et de la communication avec les Canadiens. J'aimerais simplement vous poser une question à propos des budgets de R-D, si vous le permettez. Ma question s'adresse aux représentants de l'organisme de réglementation ou aux deux représentants de l'industrie. Pourriez-vous me dire quelle proportion des budgets de R-D est consacrée aux mesures d'intervention, c'est-à-dire les moyens de contenir et de nettoyer un déversement, les interventions en cas de déversement ou l'élaboration de protocoles? Comment cela fonctionne-t-il? L'industrie est-elle tenue de consacrer un certain montant à la R-D dans ce domaine?

M. Stringham : Je vais d'abord parler de la R-D en fonction de ces aspects. Lorsqu'il est question de prévention, nous consacrons beaucoup d'efforts à la R-D. Vous avez probablement parlé aux compagnies de pipelines, et cela constitue une partie de leur budget. Comme vous le savez, les producteurs paient des droits pour ces pipelines. Quand ces coûts sont présentés à l'organisme de réglementation, nous nous assurons qu'ils sont raisonnables. Quant à ce type d'éléments liés à la prévention, aux interventions en cas de déversement et à la sécurité, nous y sommes toujours très favorables. Je ne connais pas le pourcentage. La semaine prochaine, vous pourriez leur demander quels sont leurs budgets. Pour ce qui est de nos droits qui servent à payer cela, nous avons toujours souhaité que les interventions soient de premier ordre et qu'il y ait suffisamment de ressources pour faire ce qui est nécessaire.

Dans d'autres secteurs, de notre point de vue, lorsqu'il est question de cet aspect, la R-D a une portée plus large, car il s'agit des ressources sur le terrain. Comme nous l'avons mentionné au sujet des coopératives ou de la Western Canada Marine Response Corporation, c'est l'industrie qui fournit le financement, y compris l'industrie pétrolière et gazière, pour que le personnel soit formé et que les ressources adéquates soient en place en cas d'incident. Même si notre but est qu'il n'y ait aucun incident, nous voulons être bien préparés, afin que les ressources et les personnes soient au bon endroit. Tout cela est financé par l'industrie, et c'est ce qui est nécessaire selon le risque évalué. Ce n'est pas vraiment la R-D, mais c'est une proportion de ce qui est consacré à faire en sorte qu'il y ait des mesures appropriées en matière d'intervention et de rétablissement en cas d'incident.

Le sénateur Patterson : J'ai une question complémentaire, si vous le permettez. C'était une question que je voulais poser au sujet du rôle de l'industrie en matière de pratiques exemplaires, comme il en a été question. Vous avez mentionné 13 domaines de pratique auxquels vous travaillez, ainsi que des domaines importants comme les services d'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures en milieu marin. Est-ce régi par la loi? Est-ce facultatif? Comment l'industrie en est-elle arrivée à jouer ce rôle important?

M. Pryce : Je vais commencer, et les représentants de l'organisme de réglementation pourront intervenir s'ils le veulent.

Nos sociétés membres ont des experts en matière de technologie des pipelines qui, chaque année, examinent les statistiques publiques et les données relatives au rendement des pipelines et aux déversements causés par les pipelines, entre autres. Dans le cadre de cette analyse, ils considèrent cela comme des activités prudentes en ce qui concerne la gestion du risque. Là où ils estiment que des améliorations sont nécessaires, par l'entremise de l'ACPP, ils recommandent l'élaboration de pratiques exemplaires.

Vous avez mentionné les 13 pratiques exemplaires que nous avons élaborées au fil des ans. Nous le faisons de façon volontaire, car nous voulons être certains de nous améliorer. Nous voulons nous améliorer parce que nous ne voulons pas assumer les coûts des incidents. C'est une raison d'ordre fiscal, mais nous sommes également conscients du fait que le public serait très inquiet s'il survenait un certain nombre d'incidents.

Par exemple, nos pratiques exemplaires sont liées aux pratiques de gestion de la corrosion. Selon moi, à mesure que nous élaborerons et utiliserons des pratiques exemplaires, ces pratiques ne passeront pas inaperçues auprès des organismes de réglementation, qui compteront sans doute sur l'utilisation de ces pratiques, s'ils les jugent acceptables, par les sociétés.

M. Colquhoun : C'est une excellente réponse à une excellente question. Dans nos systèmes de gestion, nous demandons aux sociétés d'incorporer les pratiques exemplaires aussitôt qu'elles en prennent connaissance. Nous ne menons pas expressément nos propres activités de R-D, mais nous encourageons assurément la R-D dans les domaines dont a parlé M. Pryce.

Le volet fondamental du système de gestion est l'amélioration continue. Nous cherchons continuellement à nous améliorer dans bon nombre des domaines qu'a mentionnés M. Pryce. Nous croyons qu'un pipeline conçu, fabriqué, installé et exploité de façon adéquate est parfaitement sécuritaire. Nous nous attendons à ce qu'il y ait des activités de R-D dans ces quatre domaines — la conception, la fabrication, l'installation et l'exploitation. De plus, comme je l'ai dit dans mon exposé, nous croyons que notre cadre de réglementation, en précisant les résultats requis, donne aux sociétés exploitantes la marge de manœuvre nécessaire pour innover.

M. Smyth : Je vais aller un peu plus loin. M. Colquhoun a parlé des systèmes de gestion, et nous donnons aux sociétés la marge de manœuvre nécessaire pour déterminer quel système de gestion est approprié au système qu'elles exploitent. Lorsqu'elles le déterminent, elles peuvent choisir d'adopter ou de reconnaître des pratiques exemplaires. Du point de vue de la réglementation, quand nous menons des activités de vérification de la conformité, comme un audit, si la société nous dit avoir adopté une pratique exemplaire dans le cadre de son système de gestion, nous nous assurerons qu'elle respecte les exigences réglementaires. Nous ferons ensuite une vérification pour déterminer si la société respecte l'essence de cette pratique exemplaire.

M. Pryce : À titre de précision, les pratiques exemplaires dont nous déterminons la nécessité et que nous présentons sont censées s'ajouter aux exigences réglementaires et aux normes rigoureuses déjà en vigueur.

Le sénateur Ringuette : J'ai une série de questions pour vous deux. Monsieur Colquhoun, à la page 2 de votre document, vous déclarez : « Les sociétés doivent démontrer qu'elles ont choisi des moyens appropriés en vue de l'atteinte de ces résultats de sécurité, de sûreté, de protection de l'environnement et d'efficience économique. » J'aimerais que vous nous parliez plus en détail des résultats en matière d'efficience économique et de leur classement dans l'évaluation que vous devez fournir pour l'approbation ou le refus.

Quels sont vos coûts relativement à tous les règlements en matière de conception, de construction, d'exploitation, de gestion et de cessation d'exploitation des pipelines? Le promoteur a-t-il un droit à payer?

Comment établissez-vous et appliquez-vous le coût de la cessation d'exploitation d'un pipeline?

Monsieur le président, voulez-vous que je pose maintenant mes autres questions?

Le président : Laissez-les répondre à celles-ci, et vous pourrez ensuite poser les autres.

M. Colquhoun : Merci, sénateur. Je crois que M. Smyth et moi allons essayer ensemble de répondre aux questions du sénateur. En ce qui concerne la première, qui porte sur l'aspect financier, personne n'a le mandat de dilapider les ressources canadiennes; nous comptons donc sur un transport efficient. Toutefois, la sécurité est la grande priorité de l'Office national de l'énergie. Je pense que la question concernait le classement. Le sénateur peut être assuré que la sécurité arrive en premier et est suivie de près par la protection de l'environnement et la protection de la propriété.

En ce qui a trait aux coûts et aux droits, M. Smyth pourra peut-être clarifier cette question mieux que moi.

M. Smyth : L'ONÉ, pour les activités régies par la Loi sur l'Office national de l'énergie, fonctionne selon le principe du recouvrement des coûts. Cela veut dire que nous obtenons des fonds, dans le cadre du budget annuel du gouvernement, pour assurer notre fonctionnement durant un an. Selon la nature de nos activités, l'industrie remboursera le gouvernement pour une partie du travail qu'accomplit l'ONÉ. Si ma mémoire est bonne, je crois que généralement, environ 90 p. 100 de nos coûts sont recouvrés chaque année.

Pour ce qui est des coûts associés à la cessation d'exploitation d'un pipeline, l'ONÉ crois fermement que ces coûts seront entièrement assumés par la société. Une société sera tenue, pour cesser d'exploiter un pipeline, de présenter une demande à l'office, qui tiendra une audience. Grâce à cette audience, nous entendrons les témoignages de toutes les parties touchées par la cessation d'exploitation du pipeline, et l'office pourra décider d'établir des conditions, que la société devra respecter. Il lui faudra démontrer qu'elle respecte ces conditions avant d'être exonérée de l'aire de ce pipeline, de cette emprise. Cette aire redeviendra ensuite une propriété traditionnelle ou conventionnelle.

Le sénateur Ringuette : Pour clarifier deux choses au sujet des résultats économiques, monsieur Colquhoun, je crois que nous aimerions avoir plus d'explications à propos de ce que vous recherchez et de la façon dont vous évaluez les résultats économiques par rapport aux exigences en matière de sécurité, de sûreté et de protection de l'environnement.

Est-il déjà arrivé que le promoteur d'un pipeline présente une demande, et qu'on exige qu'il réserve des fonds pour la cessation d'exploitation du pipeline dans l'avenir?

M. Colquhoun : Merci, sénateur. Je vais répéter ma réponse à la première partie : l'ONÉ n'autorisera jamais la construction ni l'exploitation d'un pipeline non sécuritaire ou qui constitue un danger pour l'environnement, peu importe les incidences financières du transport. La sécurité est toujours la priorité. Dans nos systèmes de gestion, nous concevons les éléments de façon à encourager une culture fortement axée sur la sécurité dans les sociétés.

Parmi toutes les considérations, y compris les facteurs financiers, nous classons la sécurité des gens en tête de liste. Aucune considération financière ne la compromettra jamais.

M. Smyth pourrait peut-être répondre à la deuxième partie de la question.

M. Smyth : En 2007-2008, l'ONÉ a mené une Initiative de consultation relative aux questions foncières, ou ICQF. Il en est ressorti qu'il était nécessaire de fournir quelques précisions sur la façon dont l'ONÉ gèrerait la cessation d'exploitation des pipelines. C'est grâce à cette initiative que nous travaillons avec l'industrie et les propriétaires fonciers à définir le besoin d'un fonds de cessation d'exploitation, notamment en vue de déterminer les coûts acceptables relativement à la cessation d'exploitation des pipelines. Nous nous employons à l'office à calculer combien d'argent devrait être mis de côté pour financer entièrement la cessation d'exploitation des pipelines.

Nous avons accompli passablement de travail à ce chapitre, et c'est avec plaisir que nous fournirons un résumé de ce travail aux membres du comité.

Le sénateur Ringuette : Je vous remercie de votre réponse.

Le président : Puis-je revenir à vous au deuxième tour?

Le sénateur Ringuette : Bien sûr.

Le président : Je suis sûr que nous aurons amplement de temps; c'est seulement pour que tout le monde ait l'occasion de prendre la parole.

Le sénateur Massicotte : Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. En lisant votre mémoire et en entendant votre exposé au sujet des mesures que vous prenez, on ne peut qu'être impressionné. Malheureusement, malgré toutes ces belles paroles et cette documentation, il se produit tout de même environ 75 incidents en moyenne chaque année. Je voudrais comprendre ce qu'il en est.

Je présume que l'un des représentants de l'Office national de l'énergie ou quelqu'un d'autre doit avoir en main une étude de comparaison des dossiers de sécurité, peut-être par millier de milles ou par mille, des pipelines dans le monde ou dans les grands pays, ainsi qu'en comparaison à d'autres moyens de transport. Est-ce possible? Quelqu'un doit pouvoir nous dire quel est le bilan de sécurité, quels sont les dommages, les fuites ou les déversements par mille ou millier de milles. Cette information est-elle disponible? Y a-t-il une comparaison avec d'autres grands pays et une comparaison entre les moyens de transport?

M. Colquhoun : Oui, ces comparaisons sont disponibles. J'ai récemment lu un document préparé par l'ERCB, en Alberta, dans lequel on a fait précisément ce que le sénateur demande. Pour une menace particulière, on a signalé le nombre d'incidents par kilomètre au Canada et aux États-Unis. Je ne sais pas si nous avons ces informations pour d'autres régions, comme l'Europe, l'Amérique du Sud ou l'Asie du Sud-Est, par exemple, mais nous pouvons certainement vérifier s'il y a d'autres comparaisons à part ces très bonnes comparaisons de l'ERCB.

Le sénateur Massicotte : Si vous pouviez nous les envoyer, ce serait très utile. Nous parlons ici d'une mesure du risque pour la sécurité par kilomètre, uniquement pour les pipelines. Pouvons-nous avoir la même information relativement aux autres moyens de transport? Tout à l'heure, vous avez parlé du fait que les pipelines sont le moyen de transport le plus sûr, mais avons-nous une mesure semblable pour d'autres moyens de transport?

M. Colquhoun : J'ai mentionné un peu plus tôt que le Bureau de la sécurité des transports a d'excellentes statistiques que vous pouvez consulter. Il est un peu difficile de faire une comparaison exacte, mais vous pouvez certainement vérifier le nombre d'accidents selon les divers moyens de transport. Bien sûr, vous devrez consulter également les données de Transports Canada pour ceux qui ne sont pas traités par le Bureau de la sécurité des transports. Ces données sont disponibles, oui.

Le sénateur Massicotte : Pourriez-vous nous les transmettre également?

M. Colquhoun : Oui, nous pouvons vous envoyer ces données.

M. Smyth : L'ONÉ a un protocole d'entente avec le Bureau de la sécurité des transports. Nous travaillons en étroite collaboration en ce qui concerne les incidents liés aux pipelines. Le bureau enquête aussi sur le transport ferroviaire, maritime et aérien. Nous communiquerons avec le Bureau de la sécurité des transports pour vérifier de quelle documentation il dispose, et si elle pourrait répondre à vos besoins.

Le sénateur Massicotte : Merci. Cela concerne la sécurité, et c'est important. Dans votre exposé, vous parlez d'équilibre. Nous devons de toute évidence établir un équilibre entre la sécurité, le fardeau réglementaire et les coûts. Qu'en est-il des coûts? Cette information serait-elle aussi disponible? Je parle de nos coûts par kilomètre, ou peu importe, pour transporter ces produits par pipeline, comparativement aux Américains, et par rapport au transport maritime ou ferroviaire. Ces données sont-elles disponibles?

M. Colquhoun : Je ne connais qu'une seule étude à ce sujet. Elle date de neuf ans, mais elle semble être encore actuelle, et nous pourrions certainement la faire parvenir au sénateur. C'est la seule à laquelle je pense qui traite directement de cette question.

Le sénateur Massicotte : Si vous pouviez nous l'envoyer, nous vous en serions reconnaissants.

M. Colquhoun : Nous allons tâcher de le faire, sénateur. Merci.

Le sénateur Massicotte : À titre d'expert, quand vous comparez toutes ces informations, qui sont très pertinentes parce que la sécurité est une mesure relative, comment soutenons-nous la comparaison avec le reste du monde? Comment la sécurité de nos pipelines se compare-t-elle à celle des Américains, des Européens et des Russes? Quel est le verdict? Quelle est la conclusion? Y a-t-il une petite ou une grande différence par rapport à d'autres moyens de transport? Sommes-nous réellement des chefs de file mondiaux? Avons-nous quelque chose à apprendre d'autres pays?

M. Colquhoun : C'est une très bonne question. Si nous ne sommes pas les meilleurs, nous figurons assurément parmi les meilleurs. J'ai travaillé dans de nombreuses régions du monde et je peux en attester. L'organisme de réglementation, ni d'ailleurs l'industrie, ne peut jamais cesser d'apprendre d'autres pays; je suis sûr que mes collègues ici, à ma droite, en conviendront. Par exemple, pour améliorer notre évaluation du risque, nous pouvons regarder ce qui se fait en Europe.

Nous pouvons effectivement apprendre des choses d'autres pays, mais nous pouvons dire, en général, que les pipelines canadiens sont parmi les plus sûrs dans le monde.

Le sénateur Massicotte : Comment se comparent-ils aux navires et aux chemins de fer? Je sais que nous allons obtenir les statistiques, mais j'aimerais connaître vos impressions.

M. Colquhoun : Nous avons rencontré de nombreuses personnes de ces secteurs qui ont reconnu que pour le transport en vrac sur longue distance, les pipelines sont nettement plus avantageux. Plusieurs facteurs font en sorte qu'ils sont plus économiques et plus sûrs. À certains endroits, les autres moyens de transports ont leurs avantages et continueront d'exister. Mes amis de l'Association canadienne des producteurs pétroliers pourraient peut-être vous en parler plus en détail, mais nous allons continuer de chercher à nous améliorer sur le plan de la sécurité.

En somme, la réponse à votre question, c'est que les pipelines ont sans contredit une longueur d'avance lorsqu'il s'agit de la sécurité et des coûts liés aux grands projets de transport en vrac d'hydrocarbures.

Le sénateur Massicotte : Malgré tout cela, il reste que des incidents ou des déversements surviennent. En général, selon vous, pourquoi surviennent-ils? Tout semble parfait dans un exposé, mais ce n'est manifestement pas le cas. Des choses surviennent. Pourquoi y a-t-il des déversements? Des incidents? Quel est le problème?

M. Colquhoun : L'honorable sénateur m'a volé ma réponse. Il faut examiner les causes individuelles. Il y a des thèmes sous-jacents. Le génie des pipelines est un secteur en pleine maturité; la plupart des mécanismes pouvant causer le malfonctionnement d'un pipeline sont reconnus, et des contrôles sont mis en place pour éviter cela. L'une des choses que nous voyons souvent, par rapport aux défaillances, c'est que la culture de la sécurité n'est peut-être pas encore partout la même dans les sociétés. Il y a toujours une bonne culture de la sécurité qui est exigée, et elle varie selon les niveaux à l'échelle de la société, mais ce que nous aimerions, c'est qu'elle soit mise en œuvre de façon plus uniforme. Je crois que si je devais nommer une seule chose qui améliorerait la sécurité des pipelines, ce serait la mise en place d'un système de gestion global, qui favorise une culture très saine de la sécurité. Je crois que cela répond en partie à votre question.

L'autre aspect de votre question est bien entendu que les défaillances mécaniques des pipelines ne se produisent pas de manière uniforme. Nous avons très tendance à réagir, comme il se doit, à un récent déversement fortement médiatisé. Toutefois, il est important d'étudier les statistiques concernant les défaillances sur une longue période. Si nous examinions les déversements de pétrole qui sont survenus, disons, au cours des cinq, six ou sept dernières années, nous constaterions que leur nombre et leur gravité tendent légèrement à diminuer. Par pure coïncidence, c'est la période au cours de laquelle les systèmes de gestion ont été mis en œuvre. Il est trop tôt pour leur attribuer n'importe quel pourcentage de cette amélioration, mais la tendance est encourageante.

Le président : Merci. Sénateur Massicotte, j'inscrirai votre nom sur la liste des gens qui interviendront au cours de la deuxième série de questions. Vous avez repoussé les limites de plus d'une façon.

Le sénateur Patterson : Je vais poser une question très brève pour compenser la durée des interventions de certains de mes collègues.

Je m'adresse à l'ACPP. J'ai une question précise à vous poser à propos des règlements proposés pour modifier le Règlement de 1999 sur les pipelines terrestres qui a fait l'objet d'une publication préalable dans la partie I de la Gazette du Canada, le 27 octobre 2012. L'ACPP ou certains de ses membres ont-ils été consultés avant la rédaction des modifications proposées? Quelle sera l'incidence de ces modifications sur les membres de l'ACPP, et cette dernière appuie-t-elle ces modifications?

M. Pryce : Je vais devoir vous revenir là-dessus. Je sais que l'ACPP est au courant de leur existence, mais j'ignore dans quelle mesure nous avons participé aux discussions. Je vais devoir m'engager à obtenir une réponse à votre question et à la communiquer au comité.

Le sénateur Lang : J'aimerais passer à la question concernant la façon dont les tuyaux sont fabriqués. Premièrement, la composition des tuyaux fabriqués a-t-elle considérablement changé de 1970 à aujourd'hui, en 2012? Dans l'affirmative, les changements qui ont été apportés ont-ils réduit davantage le facteur de risque lié à leur longévité et à leur corrosivité.

M. Colquhoun : J'aimerais remercier le sénateur de sa question. Oui, en effet, des changements et des améliorations ont été apportés. J'ai mentionné un peu plus tôt que le secteur des pipelines était une industrie pleinement développée. Au cours des quelque 30, 40 ou 50 dernières années, nous avons appris à mieux concevoir les tuyaux, à mieux préciser les matériaux et à mieux fabriquer les pipelines.

Si vous avez choisi l'année 1970 par hasard, elle constitue une année pivot. Les tuyaux ont tendance à réagir aux éléments que j'ai mentionnés en fonction de leur période de fabrication. Les tuyaux fabriqués avant 1970 diffèrent énormément de ceux fabriqués ultérieurement. L'industrie a appris à intégrer ces améliorations afin d'offrir les avantages dont vous avez parlé — une fiabilité accrue et, par conséquent, une réduction des risques.

Cependant, tout en intégrant ces améliorations et en reconnaissant que l'industrie est pleinement développée, le secteur, les responsables de la réglementation, les milieux de la recherche et les consultants ont une bonne idée des problèmes qui pourraient survenir dans les tuyaux datant, disons, d'avant 1970, aux fins de notre discussion. De plus, l'industrie connaît les mesures de contrôle appropriées qui peuvent être prises sur le plan de la surveillance, de l'évaluation du risque et de la gravité des anomalies, ainsi que de la prise de mesures correctives adéquates.

M. Pryce : Si vous me le permettez, j'aimerais insister sur ce point. Selon moi, l'industrie n'estime pas que le problème est lié à l'âge des pipelines. La question est de savoir si nous avons mis en œuvre des systèmes de gestion qui tiennent compte de la nature des tuyaux, des produits et des milieux qui entourent les tuyaux, et si nous avons bien conçu nos systèmes de surveillance, que ce soit en utilisant des racleurs intelligents ou en exposant régulièrement les tuyaux à la lumière du jour afin de confirmer leur qualité. L'industrie est au courant des différents aspects des tuyaux, et elle doit s'assurer de régler ses systèmes d'entretien et de gestion de l'intégrité des pipelines en fonction d'eux.

Le sénateur Lang : L'entretien des pipelines semble être continu puis, lorsqu'il y a une fuite, l'industrie semble gérer la crise. J'ai posé la question initiale parce que je voulais savoir si un programme de remplacement des tuyaux anciens était en cours. Ainsi, nous pourrions empêcher continuellement ces incidents de survenir surtout — et je tiens à le souligner — à proximité des cours d'eau. Nous, les Canadiens, devenons très inquiets lorsque nos cours d'eau sont touchés, et les conséquences à long terme de ces incidents nous alarment. En toute honnêteté, ils ne donnent pas un bon renom à votre industrie, et ils perturbent énormément le public. Pourriez-vous me dire si l'ONÉ a déjà envisagé la mise en œuvre d'un programme de remplacement des tuyaux ou recommandé celle-ci à l'industrie? Sinon, prennent-ils cette idée en considération, en raison de ce que vous appelez le développement de l'industrie ou l'âge des pipelines?

M. Stringham : Je vais commencer par cette question, et je vais renvoyer à M. Colquhoun celle concernant l'ONÉ.

Il est clair que cette idée est prise en considération, étant donné que les systèmes en place font ressortir toute anomalie ou tout danger lié aux tuyaux, quel que soit leur âge. Par conséquent, l'âge des tuyaux n'est pas le seul facteur déterminant. En fait, parmi les tuyaux en excellent état à l'heure actuelle, on retrouve certains des anciens tuyaux, à condition de ne pas les exposer à des pressions qui dépassent celles pour lesquelles ils ont été conçus.

En ce qui concerne les principaux pipelines — et, la semaine prochaine, vous pourrez parler aux promoteurs de pipelines des leurs —, l'industrie appuie en particulier le remplacement d'importantes parties des réseaux pipeliniers d'Enbridge qui est en cours à l'heure actuelle. Les coûts de ces travaux s'élèvent à plusieurs milliards de dollars, mais, comme leur programme de surveillance, leur vaste projet d'excavation et leur utilisation des racleurs intelligents dont ils disposent ont permis de déceler des problèmes, nous sommes maintenant en train de financer, par leur entremise, le remplacement de plusieurs longues sections de tuyau qui sont considérées comme des risques potentiels. Cela se produit régulièrement au fur et à mesure que nous franchissons les étapes de ce processus.

Vous avez mentionné en particulier les cours d'eau, et il est clair que ce sont des zones à risques élevés. Ce sont à ces endroits que des systèmes de surveillance et de sécurité supplémentaires ont été installés. Par conséquent, ces zones sont surveillées plus fréquemment, et tout type d'anomalie détectée là-bas pourra entraîner soit le remplacement du tuyau, soit son enchâssement dans un autre tuyau, dans certaines situations. Dans le dernier cas, les responsables appliqueront un enduit et entoureront l'extérieur du tuyau d'un autre tuyau pour continuer d'assurer la protection des zones à proximité des cours d'eau.

Voilà quelques exemples des genres de mesures qui sont prises aujourd'hui, au moment où nous nous parlons. Elles ne sont pas prévues pour les années à venir, elles sont prises de manière continue.

M. Colquhoun : En ce qui concerne la position de l'ONÉ au sujet des exigences, je pense que, comme cela a été mentionné plus tôt, il exige que les entreprises élaborent des systèmes de gestion efficaces et globaux, dont l'une des fonctions très importantes consiste à détecter tous les dangers et les risques liés aux pipelines. Les entreprises doivent les déceler et mettre en œuvre des programmes visant à les contrôler. Si je prenais comme danger possible la corrosion externe, la série de mesures correctives à la disposition de l'industrie pourrait comprendre l'application d'une autre couche d'enduit, l'emploi de la soi-disant protection cathodique pour préserver davantage le tuyau, mais aussi, dans certains cas, son remplacement.

Le sénateur Mitchell : Plus tôt au cours des témoignages d'aujourd'hui, il a peut-être été mentionné à quelques reprises que, dans les années à venir, les entreprises devraient mettre de côté des fonds au cas où elles seraient tenues responsables lorsque l'exploitation des pipelines cessera, ou au cas où elles devraient moderniser les pipelines dans les années à venir pour prévenir des accidents. Monsieur Stringham, vous venez de dire que, par l'entremise d'Enbridge, « nous » dépensions ou envisagions de dépenser littéralement des milliards de dollars pour remplacer des tuyaux. Cela me porte à croire que « nous », les dirigeants de l'ACPP, qui gérons ces fonds, les utilisons à cet effet, ou exigez-vous en ce moment que les entreprises vous versent de nouvelles sommes? Comment ces travaux sont-ils financés? Est-ce le pipeline d'Enbridge, ou avez-vous fait appel à la société de pipelines Enbridge pour mener les travaux?

M. Stringham : Je vous remercie de votre question, sénateur. J'ai utilisé Enbridge comme exemple. Ces travaux sont exécutés systématiquement sur tous les pipelines. Je tenais simplement à citer ceux-là en exemple, parce qu'ils sont en cours en ce moment.

Lorsque je fais allusion à « nous », je désigne vraiment l'industrie qui verse des droits aux sociétés de pipelines. Les coûts sont introduits dans un système fondé sur des tarifs et régi par l'Office national de l'énergie, puis ils sont répartis entre les expéditeurs qui utilisent ces pipelines à l'aide d'un système de perception de droits. Voilà comment ces coûts sont assumés. Ce sont ces expéditeurs qui paient les coûts supplémentaires occasionnés par ces travaux. Cela fait partie du dialogue continu concernant les droits qui roule sous l'égide réglementaire de l'Office national de l'énergie.

Le sénateur Mitchell : Des fonds de responsabilité sont-ils mis de côté, ou ces coûts sont-ils financés au fur et à mesure? Étant donné qu'il s'agit presque de produits de base, vous n'avez pas à vous inquiéter d'être privés de sources de revenus dans les années à venir pour assumer ces coûts, n'est-ce pas?

M. Stringham : Les droits servent au remplacement continu des pipelines. Cela fait partie des coûts réguliers d'exploitation des pipelines qui sont introduits dans le calcul des tarifs, lequel est constamment en cours. Ce calcul tient compte de la durée de vie prévue des pipelines et de la dépréciation qui s'y rattache. Cela n'a rien à voir avec la responsabilité; les droits financent les activités d'exploitation des pipelines et leur remplacement. Le calcul des droits, qui s'inscrit dans le cadre du processus de réglementation des droits, tient également compte des coûts liés à la sécurité.

Le président : Vous avez parlé de pipelines qui franchissent des cours d'eau. Le sénateur Lang a mentionné cette question. Peut-être pourriez-vous nous aider un peu à cet égard. Je fais allusion à l'oléoduc Northern Gateway. Cet oléoduc doit franchir de nombreuses rivières, dont certaines sont importantes. Je présume que la plupart des rivières, voire la totalité d'entre elles, sont franchies par forage directionnel horizontal. Est-ce exact? L'ONÉ a-t-il établi des règles qui s'appliquent dans ces genres de situations? Lorsque vous avez parlé d'enchâsser un tuyau dans un autre tuyau pour accroître la sécurité dans des milieux où des rivières sont franchies, est-ce une mesure que vous prenez lorsqu'un pipeline franchit une rivière?

M. Colquhoun : Monsieur le président, je suppose que nous devons d'abord indiquer clairement que nous ne pouvons pas discuter d'une affaire dont l'office est saisi. Nous ne pouvons pas parler directement de l'oléoduc Northern Gateway.

Le président : Je suis désolé.

M. Colquhoun : Votre question est excellente et, avec l'aide de tous, nous nous efforcerons d'y répondre d'une manière générale. Encore une fois, l'ACPP peut vous fournir des éclaircissements à ce sujet, mais la méthode de forage directionnel horizontal n'est pas nécessairement utilisée pour installer tous les pipelines. C'est la méthode que l'on privilégie, mais, pour franchir de petites rivières, il se pourrait que ce ne soit pas la meilleure façon de procéder. En ce qui concerne la question de savoir si un organisme de réglementation a une incidence sur cette décision, je reprends une des déclarations que j'ai faites plus tôt en disant que l'organisme exige que le système de gestion de l'exploitant détecte tous les dangers et tous les risques. Si l'exploitant choisit une méthode autre que le forage directionnel horizontal, nous nous attendons à ce qu'il présente une évaluation technique qui explique que tous les dangers associés à cette méthode de franchissement ont été pris en considération et que les risques ont été minimisés adéquatement.

M. Smyth : Si vous me le permettez, j'aimerais formuler quelques observations supplémentaires à cet égard. Lorsque sont entrepris des projets comme le Northern Gateway ou toute initiative de cette envergure, les entreprises sont tenues de procéder à une évaluation environnementale. Il leur incombe de déterminer si des habitats fragiles de la faune sont touchés par leur projet et de présenter, dans le cadre de leur demande d'autorisation, un plan à l'Office national de l'énergie qui montre qu'elles ont repéré ces sujets de préoccupation et qu'elles proposent des mesures d'atténuation. L'office exige ce plan pour s'assurer qu'elles tiennent compte de l'environnement et de ces habitats, et qu'elles les protègent.

M. Stringham : Peu importe où passe le pipeline, dans le cadre du processus de demande, tous les détails de son parcours sont rendus publics et celle-ci indique comment nous proposons de franchir tous les ruisseaux et les rivières. Dans certains cas, les cours d'eau seront franchis par forage directionnel horizontal, dans d'autres, ce ne sera pas le cas parce que les cours d'eau sont petits. Dans le cadre de la demande présentée à l'Office national de l'énergie et de ses audiences, tous les aspects environnementaux et fauniques, entre autres, sont pris en considération. Comme vous le savez, dans certains cas, ce processus est en cours à l'heure actuelle.

M. Pryce : Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelque chose. D'autres ministères et d'autres organismes du gouvernement fédéral et, en fait, des gouvernements provinciaux peuvent participer à ce processus — le ministère des Pêches et des Océans, Transports Canada et les organismes provinciaux de réglementation environnementale. Ils peuvent tous avoir leur mot à dire concernant la valeur de la méthode de franchissement, que ce soit par forage directionnel horizontal ou par enchâssement dans un batardeau. Selon la taille et la nature du cours d'eau et du franchissement, on tiendra compte de tous leurs points de vue.

Le sénateur Wallace : Messieurs, ma première observation est dans le même ordre d'idées que ce que le sénateur Massicotte a déclaré lorsque vous avez parlé de l'information disponible relativement à la gestion des incidents. Je pense que vous n'avez pas décrit les situations comme des incidents, mais des incidents surviennent. Dans le cadre de toute évaluation, qu'elle soit effectuée par l'organisme de réglementation ou par le public, c'est le rapport entre les risques et les avantages qui importe. Je pense que nous sommes conscients de l'importance de développer nos ressources naturelles, mais à quels risques?

Nous vous avons entendu décrire en détail les pratiques et le processus qui sont mis en œuvre pour minimiser les risques, mais ce qui reste présent dans mon esprit, ce sont les questions suivantes : Quels sont les faits? Quels incidents de déversement ont été causés par des déplacements de tuyaux dans le passé?

Une réponse du même genre a été donnée au sénateur Massicotte. Ce qui me frappe lorsque je pense aux pipelines canadiens, c'est le terrain très accidenté qu'ils franchissent. Certains tuyaux sont en surface, d'autres sont souterrains, et d'autres encore passent sous des cours d'eau. Ils sont exposés à des températures extrêmement froides, ils traversent des régions montagneuses, et cetera. Dans chacun de ces cas, le risque que courent les pipelines varie. Le public devra être convaincu que les risques que posent les pipelines sont raisonnables et qu'ils ne changeront pas ou qu'ils peuvent être délimités.

Le prélude à ma question était long, mais je me demande si des données ou des statistiques sont disponibles. Y a-t-il des renseignements qui ventilent les risques non seulement par kilomètre de pipeline, mais aussi en fonction des diverses conditions géographiques? Si ces renseignements existent, l'ONÉ exige-t-il qu'on les lui présente pour lui permettre de décider si un projet sera autorisé ou non?

M. Colquhoun : Je préfère la façon dont vous avez décrit votre question, sénateur. Merci beaucoup.

Dans le prélude à votre question, vous avez énuméré un certain nombre de conditions qui peuvent endommager les pipelines, et elles comprennent les dangers auxquels ceux-ci peuvent être exposés. Tous ceux liés au franchissement de cours d'eau, que ce soit le caractère montagneux du terrain, les mouvements de terrain, les mouvements de pente ou les zones sismiques, sont bien compris.

La position de l'ONÉ, à savoir que les dangers doivent être mentionnés explicitement dans la demande et que les mécanismes de contrôle doivent y être décrits, est par ailleurs très générale, et cela nous accorde une grande latitude pour évaluer les demandes.

Quant à savoir s'il existe des listes particulières qui énumèrent ces dangers par région géographique, c'est un peu plus difficile à dire. Pour choisir et évaluer le parcours d'un pipeline, il faut l'étudier kilomètre par kilomètre et déterminer où pourraient se trouver les dangers dont il faut tenir compte à l'étape de la conception du pipeline. Par exemple, lorsqu'on sélectionne le parcours, on indique clairement où se trouvent les zones sismiques et les pentes qui pourraient être instables, et ces dangers sont pris en considération au cours de la conception, de la construction et de l'exploitation du pipeline. Voilà essentiellement en quoi consistent les exigences de l'ONÉ.

M. Smyth : Si, au cours du processus de demande, lorsque l'entreprise expose ce qu'elle planifie de faire pour atténuer les risques, l'office détermine que certaines conditions doivent être remplies, il les indiquera dans l'autorisation, si le gouverneur en conseil approuve la demande.

Une fois que l'autorisation aura été accordée et que l'entreprise commencera la construction du pipeline, les inspecteurs de l'ONÉ iront sur le terrain pour vérifier que le travail de l'entreprise satisfait aux exigences de la réglementation et que l'entreprise remplit toutes les conditions imposées et les engagements qu'elle a prises au cours du processus de demande. De plus, notre rôle ne prend pas fin dès que la construction est terminée. Nous continuons de surveiller les activités de l'entreprise à l'étape de l'exploitation, et nous prêtons attention à toutes les zones de risque que ses employés peuvent avoir signalées. Cela influe sur la façon dont nous définissons nos activités de contrôle de la conformité. Notre modèle est fondé sur les risques. Nous utilisons cette information et des renseignements provenant de diverses sources pour orienter en conséquence nos activités de contrôle de la conformité.

M. Colquhoun : Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter une brève observation. Nous exigeons que les entreprises repèrent les dangers. Toutefois, pendant que nous examinons leurs activités ou leur demande, il se peut que nous décelions des lacunes dans leur processus de détection des dangers et, dans un cas comme celui-là, nos inspections seront suivies d'une demande de renseignements. Nous poursuivrons alors notre processus de repérage et de surveillance des dangers. De plus, au cours de son examen des demandes que lui soumettent les sociétés de pipelines, il se peut que l'ONÉ découvre d'autres dangers.

Le sénateur Wallace : Le cœur même de la question que je soulevais avait trait à l'évaluation initiale des risques, qui a lieu avant que le projet soit approuvé, et à ce sur quoi elle était fondée. Cela reprend la question que le sénateur Massicotte a soulevée. J'essayais de me faire une idée de la mesure dans laquelle vous vous appuyez sur des analyses statistiques détaillées des événements qui sont survenus par le passé dans des circonstances semblables, sur des terrains semblables, et cetera. On entend les gens dire que les risques sont négligeables, et cela est fort bien. Cependant, ces mots ne veulent pas dire grand-chose pour les citoyens. Ce que je voulais savoir, c'est dans quelle mesure vous vous appuyez sur des données, ou dans quelle mesure vous vous attendez à ce que l'on vous en fournisse. À quel point ces renseignements sont-ils détaillés? Sont-ils disponibles? Vous appuyez-vous sur eux? Vous attendez-vous à ce qu'on vous en communique?

M. Colquhoun : L'honorable sénateur touche du doigt un domaine que nous contribuons à améliorer. Il a fait allusion à certaines mesures qualitatives du risque. Nous collaborons avec l'industrie afin d'élaborer un plus grand nombre de méthodes quantitatives. En fait, M. Pryce a mentionné plus tôt le fait que nous nous fions énormément à l'Association canadienne de normalisation. L'annexe O de la norme CSA Z662 est une annexe fondée sur le risque que les entreprises peuvent utiliser dans certaines circonstances.

Dans ma réponse précédente, j'ai mentionné les tremblements de terre. Ces statistiques sont disponibles, et elles sont employées à l'étape de l'évaluation des risques pour toutes les menaces et tous les dangers qui sont communément signalés relativement aux pipelines. Ce serait le cas en particulier pour les tremblements de terre, la stabilité des pentes et la croissance de la corrosion en cas de défaillance du mécanisme de protection du pipeline contre la corrosion. Ces données existent, et elles sont utilisées comme intrants de base de l'évaluation du risque.

Le sénateur Wallace : Mon temps de parole est-il écoulé?

Le président : Vous avez plutôt bien utilisé votre temps. Sénateur Lang, vous souhaitiez poser une brève question complémentaire à celle du sénateur Wallace.

Le sénateur Lang : Vous avez parlé de la question du terrain, des possibilités de tremblement de terre et de divers autres aspects concernant peut-être les avalanches. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur l'utilisation des satellites au chapitre de la gestion du risque? Je sais qu'ils sont utilisés dans une certaine mesure à l'heure actuelle. Comment cela se rattache-t-il à vos activités quotidiennes?

M. Colquhoun : Voilà une autre excellente question parce qu'elle attire l'attention sur un outil auquel les exploitants de pipelines peuvent avoir accès, à savoir la surveillance par satellite. Encore une fois, au cours des 15 à 20 dernières années, la façon d'utiliser les satellites s'est étendue à deux principaux champs d'application. Celui qui nous vient spontanément à l'esprit est la sécurité, mais cette application est plus récente. Le champ d'application le plus traditionnel est celui de l'observation de la stabilité des pentes. Vous avez mentionné les avalanches, mais ce champ d'application englobe probablement aussi des incidents comme des glissements de terrain et des défaillances catastrophiques. Ces événements se produisent, bien qu'ils soient relativement rares. En ce qui concerne les pentes, il est parfois impossible d'éviter d'en traverser une qui se déplace très lentement, à raison de, disons, 25 millimètres par année ou à une vitesse de ce genre. Outre les indicateurs de pente qui examinent la nature même du sol, il convient d'avoir recours aux techniques de surveillance par satellite dans ces cas-là. Celles-ci ont été élaborées à cet effet, et elles sont maintenant utilisées.

Le président : Sénateur Wallace, vous aviez une autre question à poser.

Le sénateur Wallace : Ce n'est peut-être pas une question, mais je vais tout de même l'énoncer. Ce sont peut-être des renseignements que vous pouvez nous fournir.

Une discussion a eu lieu concernant la capacité d'intervention en cas de déversement qu'on s'attend à ce que l'industrie possède. Je ne suis pas certain que le gouvernement ait une capacité d'intervention en cas de fuite d'un pipeline. Par exemple, si un incident lié à un navire pétrolier survient, le secteur privé possède des capacités d'intervention en cas de déversement, mais la Garde côtière a également la sienne. Le gouvernement et l'industrie interagissent dans ces cas-là.

J'aimerais que vous nous fournissiez des renseignements sur les responsabilités que l'industrie et le gouvernement assument lorsque des incidents liés à des pipelines surviennent et que l'industrie et le gouvernement interviennent. Qui fournit le matériel? Qui est tenu de fournir des ressources humaines? Qui supervise le programme d'intervention en entier lié au cas de déversement? Est-ce le gouvernement ou l'industrie? Le public veut être certain que ces incidents seront gérés de manière appropriée. Comment se déroule cette interaction entre le gouvernement et l'industrie? Si vous pouviez nous fournir des renseignements à ce sujet, il y aurait au moins moi qui vous en serais reconnaissant.

M. Smyth : Certainement. Je vais maintenant répondre brièvement à votre question, puis nous pourrons assurément vous communiquer d'autres renseignements par écrit.

Lorsqu'une entreprise présente une demande en vue de construire et d'exploiter un pipeline, elle doit, entre autres, démontrer sa capacité d'intervenir efficacement en cas d'urgence. Ses dirigeants doivent présenter à l'Office national de l'énergie un manuel d'intervention d'urgence qui sera examiné par celui-ci. Ils doivent décrire ce qu'ils feront en cas d'urgence et comment ils le feront. Ils doivent donner des détails comme où ils se procureront le matériel nécessaire, comment ils aviseront les résidents et comment les premiers intervenants pourront être identifiés.

L'ONÉ met également en œuvre un programme d'intervention d'urgence. Certains de ses employés sont formés pour intervenir en cas d'urgence, pour assurer une surveillance et pour veiller à ce que l'entreprise gère adéquatement l'incident. Nous assurons cette surveillance à partir de notre Centre des opérations d'urgence établi ici, à Calgary, qui, selon la nature de l'incident, peut également être rattaché au Centre des opérations d'urgence du gouvernement du Canada, qui se trouve à Ottawa.

Le président : Merci. En ce qui concerne les renseignements que vous vous êtes engagés à nous faire parvenir, je vous demanderais, messieurs, de les envoyer à la greffière afin qu'ils soient transmis à tous les sénateurs.

Le sénateur Brown : J'aimerais connaître votre position concernant les entreprises de construction qui endommagent des lignes lorsqu'elles croisent d'autres pipelines. Les forcez-vous à assumer les dépenses qui doivent être engagées pour remettre les lignes dans l'état où elles étaient auparavant?

J'aimerais également savoir ce que vous faites du produit déversé du pipeline. Je sais qu'il y a certaines façons de se débarrasser de celui-ci. Y a-t-il une loi qui vous permet de vous assurer que le pétrole ou le produit, quel qu'il soit, ne s'infiltre pas dans le sol et n'est pas laissé là-bas? Le sol contaminé est-il extrait, et utilisez-vous des bactéries pour éliminer ce pétrole?

M. Smyth : Du point de vue de l'ONÉ, si un entrepreneur en construction percute un pipeline et endommage ou rompt la ligne, le Règlement de l'Office national de l'énergie sur le croisement de pipelines indique que toute activité non autorisée exercée dans l'emprise ou dans la zone de sécurité doit être signalée à l'office. De plus, le propriétaire du terrain, l'entrepreneur en construction ou qui que soit qui envisage l'activité est tenu de communiquer avec l'entreprise soit directement, soit en passant par un centre d'appel clé en main, avant d'exécuter l'activité.

Si la personne rompt la ligne, la société de pipelines sera au courant et pourra l'arrêter. Avec un peu de chance, il n'y aura pas d'explosion, car cela serait fâcheux. En ce qui concerne les coûts à assumer pour rétablir la ligne, ils seront négociés entre la société de pipelines et l'entreprise, quelle qu'elle soit, qui a causé les dommages. Quant à nous, nous superviserons l'enquête sur l'activité non autorisée et, si des dommages ont été causés, nous participerons à une enquête visant à déterminer leur cause première et les facteurs qui y ont contribué.

Dans la deuxième partie de votre question, vous vouliez savoir ce qu'on faisait du produit en cas de déversement. Si le déversement provient d'un pipeline réglementé par l'ONÉ, dans le cadre de notre enquête, la société devra nous fournir un plan de remise en état qui, premièrement, décrit très clairement ce que ses employés feront du produit. Habituellement, ils surveillent comment il pourrait s'infiltrer sous terre. Par conséquent, ils installent des appareils de mesure et creusent des puits. En général, on s'attend à ce qu'ils retirent tout le produit qui n'a pas été absorbé et tout le sol contaminé du site, et qu'ils les confinent et les éliminent de manière appropriée. Ces étapes seront décrites dans le plan de remise en état qui sera présenté à l'office afin que nous l'examinions et que nous l'approuvions.

Le sénateur Brown : Vous dites que le produit et le sol contaminé sont enlevés, mais qu'est-ce que la société de pipelines en fait? Je sais qu'au Olds College, en Alberta, de nombreuses recherches ont été menées dans ce domaine, et les chercheurs ont prouvé qu'en introduisant des bactéries dans les lignes où le sol est contaminé, celles-ci absorbent le pétrole. Il suffit de retourner la terre de temps en temps et, à la fin du traitement, le pétrole a disparu. Cette méthode n'est-elle pas utilisée? Que font-ils du produit déversé et du sol retiré? Est-ce qu'ils l'empilent simplement quelque part?

M. Pryce : En effet, sénateur, un certain nombre de recherches ont été menées pour déterminer la capacité de la biotechnologie à dégrader le pétrole et à le rendre inerte. Dans certains cas, les sociétés utiliseront cette technologie pour récupérer la terre et la remettre en état. Il peut être avantageux de le faire, en ce sens que la terre récupérée peut être déposée de nouveau sur le terrain. Lorsque cette solution est possible, nous l'envisagerons certainement.

Toutefois, l'un des facteurs à prendre en considération est le site lui-même. Permet-il de confiner la terre pendant la biodégradation, ou le produit risque-t-il de s'infiltrer et de contaminer les eaux souterraines? Lorsque ce risque n'existe pas, les sociétés examineront certainement cette solution parce qu'elle contribue à préserver le sol.

Dans d'autres circonstances, qu'elles soient liées à des pipelines ou à des têtes de puits, les responsables de la réglementation, du moins à l'échelle provinciale, s'attendent à ce que le produit déversé et le sol contaminé soient gérés de manière sécuritaire. Partout dans l'Ouest canadien, il existe un certain nombre de décharges sécuritaires qui pourraient recevoir ces sols. Nous préférons les utiliser le moins possible, mais nous ne sommes en aucun cas autorisés à les déposer à des endroits non sécuritaires ou à nous en débarrasser d'une manière qui risque de contaminer d'autres lieux.

Le sénateur Brown : Il y a un règlement qui vous permet d'imposer ce genre de limitation des dégâts, n'est-ce pas?

M. Pryce : Je vais donner à nos collègues de l'ONÉ la chance de répondre à cette question, mais, en ce qui concerne la réglementation provinciale, c'est assurément le cas. Il faut que nous fassions approuver la stratégie que nous emploierons pour gérer tout sol contaminé.

M. Smyth : De même, à l'ONÉ, nous avons des exigences réglementaires, mais nous pouvons aussi établir des conditions très rigoureuses pour chaque incident.

M. Colquhoun : Le principe général est que le terrain doit être remis dans l'état où il était avant l'incident.

M. Stringham : En ce qui concerne la question précédente, j'aimerais également formuler une observation. Je ne veux pas vous donner l'impression qu'une discussion aura lieu pour déterminer qui paiera pour le nettoyage. L'avantage que présentent certaines des sociétés d'intervention établies tient essentiellement au fait que, si un incident se produit, ce que nous nous efforçons de prévenir le plus possible, elles entrent immédiatement en jeu. Elles s'occupent aussi ensuite de démêler qui paiera la facture. Ce n'est pas une question que nous attendons de régler avant d'intervenir. Je tenais simplement à m'assurer que nous ne vous avions pas donné cette impression. L'intervention est immédiate; elle est déclenchée par l'organisme de réglementation, et ses employés supervisent ce qui se passe là-bas. Les entreprises s'occupent du problème et déterminent plus tard comment les coûts seront répartis entre les intervenants qui ont causé l'incident.

Le sénateur Sibbeston : Ma première question est d'un ordre plutôt administratif, alors je suis conscient qu'il se peut que vous n'en connaissiez pas la réponse, mais si vous pouviez nous fournir l'information, je vous en serais reconnaissant. En raison de changements apportés aux lois au cours des dernières années, l'ONÉ est devenu responsable des évaluations environnementales liées aux pipelines. Qu'est-ce que cela signifie pour l'ONÉ? Cela entraîne-t-il une augmentation de ses effectifs? J'aimerais savoir comment l'ONÉ planifie de gérer cette responsabilité accrue.

Deuxièmement, lorsque des déversements se produisent, ils sont réglés et analysés pour en déterminer la cause. Existe-t-il des rapports portant sur les principales causes des déversements? Je pense que des renseignements à ce sujet nous seraient très utiles.

M. Smyth : Je vous remercie de votre question. Si vous me le permettez, je vais parler d'abord des évaluations environnementales. La Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable a certainement apporté des changements, mais, en ce qui concerne la capacité de l'ONÉ, nous nous livrons à des évaluations environnementales depuis des années. L'Alliance de l'Efficacité Énergétique du Canada ou la Loi sur l'Office national de l'énergie ne changera pas la façon dont nous exerçons nos activités. Grâce à nos spécialistes en matière d'environnement et d'économie sociale et à d'autres membres de notre personnel, nous avons la capacité requise pour procéder à des évaluations environnementales de manière appropriée. Sur le plan de la capacité, nous possédons déjà ce dont nous avons besoin.

En ce qui a trait à votre deuxième question qui porte sur la cause première des incidents et sur les facteurs qui y contribuent, nous cherchons certainement à les découvrir lorsque nous menons une enquête. Quand nous sommes les seuls à enquêter sur des incidents majeurs, nous publions un rapport. Si le Bureau de la sécurité des transports du Canada est l'enquêteur en chef, il publiera un rapport auquel nous contribuerons.

Vous avez demandé principalement à quoi tout cela se résumait. Dernièrement, nous avons publié sur notre site web deux rapports d'enquête sur des incidents. Je crois qu'ils constituent de bons exemples de la nature de nos enquêtes. Si vous examiniez les deux, vous constateriez, selon moi, que cela se résume à des défaillances des systèmes de gestion.

Le président : Cela nous amène à 10 heures. Messieurs Pryce, Stringham, Smyth et Colquhoun, je vous remercie de vos réponses. Elles ont été très instructives. S'il y a autre chose que vous aimeriez que nous sachions, n'hésitez pas à communiquer avec moi.

(La séance est levée.)


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