Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 39 - Témoignages du 21 mars 2013
OTTAWA, le jeudi 21 mars 2013
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 10, pour étudier l'état actuel de la sécurité du transport en vrac des hydrocarbures au Canada.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld. Je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat et je suis le président du comité.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs, aux membres du public qui sont avec nous dans la salle et aux téléspectateurs de partout au pays qui nous regardent à la télévision.
Je demanderais aux sénateurs de se présenter. Je commencerai par notre vice-président, le sénateur Mitchell.
Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell, de l'Alberta.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Lang : Dan Lang, du Yukon.
Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, de Montréal.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, du Nunavut.
Le président : Je vous présente également notre greffière, Lynn Gordon, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Marc LeBlanc et Sam Banks.
Le 28 novembre 2012, le Sénat a autorisé notre comité à entamer une étude sur la sécurité du transport des hydrocarbures au Canada. L'étude examine et compare les régimes réglementaires au pays et à l'étranger, les normes et les meilleures pratiques liées au transport sécuritaire des hydrocarbures par pipeline, par pétrolier et par train. Jusqu'à maintenant, le comité a consacré huit séances à cette étude.
Nous accueillons par vidéoconférence de Vancouver le capitaine Kevin Obermeyer, président-directeur général de l'Administration de pilotage du Pacifique Canada.
Je vis en Colombie-Britannique; nous savons qu'il est assez tôt en ce moment dans cette province, soit 6 heures du matin. Nous sommes heureux que vous ayez trouvé le temps de venir discuter avec nous, malgré vos nombreux engagements, et nous avons hâte d'écouter votre exposé.
Capitaine Kevin Obermeyer, président-directeur général, Administration de pilotage du Pacifique Canada : Bonjour, monsieur le président, madame et messieurs les sénateurs. Je vous remercie pour l'occasion que vous m'offrez. C'est un peu tôt, mais cela ne pose pas de problème.
Je commencerai par ma déclaration préliminaire, et nous passerons évidemment aux questions par la suite.
L'Administration de pilotage du Pacifique est une société d'État fédérale régie par la Loi sur le pilotage de 1972. Notre organisme a pour mandat de fournir des services de pilotage sûrs et efficaces le long de la côte canadienne du Pacifique en étant financièrement autonome. Nous faisons cela dans le cadre d'un partenariat avec les pilotes et l'industrie du transport pour protéger les intérêts du Canada.
Je dois souligner que le mot « partenariat » n'est pas employé à la légère sur la côte Ouest. Nous utilisons la stratégie de la pleine participation afin que l'industrie du transport maritime, notre client, ainsi que les pilotes et les intervenants soient tous tenus pleinement au courant de toutes les questions allant des changements proposés pour améliorer la sécurité aux changements à nos tarifs et conventions collectives et de toute autre question opérationnelle qui pourrait surgir.
Le gouvernement surveille le fonctionnement de l'Administration au moyen du plan d'entreprise et du rapport annuel qu'elle lui présente annuellement. De plus, le Bureau du vérificateur général procède à des vérifications financières annuelles et à des vérifications spéciales tous les cinq à dix ans dans le cadre desquelles chaque facette de nos opérations est examinée. Le ministre chargé de la surveillance de notre portefeuille est l'honorable Steven Fletcher, député, ministre d'État Transports.
Transports Canada est une ressource pour nous sur le plan des opérations et nous offre entre autres une aide à la publication de notre réglementation en matière de pilotage et de tarifs et, à l'occasion, une aide relative aux opérations.
Pour ce qui est du public, nous travaillons depuis quatre ans à des programmes de sensibilisation communautaire à l'intention des municipalités et des Premières nations dans les régions dont nous sommes responsables, de la municipalité de Stewart dans le nord à la Première nation Tsawwassen dans le sud.
Les pilotes maritimes de la côte de la Colombie-Britannique sont tous capitaines de plein droit et comptent de nombreuses années d'expérience à naviguer dans les eaux locales. Nous fournissons des pilotes maritimes pour tous les navires de plus de 350 tonneaux de jauge brute, d'une longueur d'environ 50 m. Ils sont une ressource pour le capitaine et l'équipe à la passerelle grâce à leur expertise locale. Ils sont responsables à l'égard du capitaine de la navigation sécuritaire du navire lorsqu'il se trouve dans une zone de pilotage obligatoire dans le Pacifique.
Les exceptions à la règle des 350 tonneaux de jauge brute sont les traversiers et les navires du gouvernement, comme ceux du MDN et de la Garde côtière.
Le pilotage est l'assurance d'un pays contre une catastrophe maritime. En faisant monter un pilote à bord du navire, vous vous assurez qu'au moins un membre de l'équipe à la passerelle possède une connaissance approfondie des dangers locaux, n'est pas fatigué et est une ressource bien informée au cas où il arriverait quelque chose.
Enfin, le pilote apporte un niveau de sécurité supplémentaire au navire. L'équipage à la passerelle est plus attentif s'il interagit avec un étranger, et un pilote qui ne connaît pas l'équipe à la passerelle est tout aussi attentif. Cette situation est positive, car tout le monde est aux aguets et se surveille les uns les autres.
Notre secteur d'activité s'étend de la frontière de l'État de Washington au sud jusqu'à la frontière de l'Alaska au nord. En règle générale, si vous tracez une aire de deux milles autour de chaque point important au large de cette côte et que vous les reliez, vous obtenez le secteur d'activité qui correspond à notre zone de pilotage. Vous devriez avoir reçu l'annexe 1, que j'ai jointe à la documentation et qui indique avec précision la région dans laquelle nous opérons. Comme je l'ai déjà mentionné, il faut un pilote breveté à bord de tout navire de plus de 350 tonneaux de jauge brute. Tout nouveau projet et tout nouveau terminal exigent une consultation avec les pilotes et l'Administration pour que l'on puisse s'assurer que la sécurité de la navigation n'est pas compromise.
Nous avons élaboré des lignes directrices et des normes pour nombre de passages difficiles sur la côte. Lorsqu'il est question précisément de pétroliers, il y a toujours de longues consultations avant que des changements soient apportés à des pratiques acceptées, et un récent exemple de cela est le relèvement du tirant d'eau de 12,5 m à 13 5 m pour les pétroliers dans le port du Grand Vancouver. Cette proposition est le résultat de cinq années d'analyse et de consultation, et des changements importants ont été apportés aux procédures et aux pratiques pour qu'il n'y ait pas de répercussions négatives sur la sécurité. Chaque nouveau projet ou changement est soumis à un examen minutieux. Personne ne veut d'incident et nous nous donnons beaucoup de mal pour nous assurer de maintenir notre réputation en matière de sécurité.
Je suis persuadé que les nouvelles procédures en place dans le port de Vancouver amélioreront la sécurité. Pour nous assurer que les changements ne nuiraient pas à la sécurité, nous avons effectué des simulations en accéléré et des simulations complètes à la passerelle suivies d'essais réels avec des bateaux-remorqueurs et un pétrolier chargé pour valider l'exactitude des données de simulation. Résultat, nous avons modifié la façon de piloter les pétroliers en utilisant une méthodologie différente pour l'utilisation des remorqueurs et commencé à utiliser des unités de pilotage individuelles.
Somme toute, je crois que nous avons beaucoup amélioré le niveau de sécurité pour les pétroliers à Vancouver et je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas reproduire ce processus pour assurer la sécurité dans le cas des propositions concernant les pétroliers dans le nord.
Nous sommes extrêmement fiers de notre bilan en matière de sécurité, avec un taux qui surpasse souvent 99,9 p. 100. En 2012, nous avons assuré plus de 12 000 affectations et avons connu sept incidents, pour un taux de réussite de 99,96 p. 100. Je travaille dans le domaine de la navigation depuis 20 ans et, durant cette période, il y a eu un seul incident de pollution pétrolière lorsqu'un pilote était à bord. C'était dans le cas d'un cargo qui a été repoussé sur le quai par une rafale, et un morceau de métal a perforé le côté du navire. S'il s'était agi d'un pétrolier à double coque, il n'y aurait pas eu de déversement.
Ce succès n'est pas un hasard. Le processus d'examen est l'un des plus stricts qui soient pour le candidat, et nous consacrons beaucoup de temps et d'argent à la formation pour maintenir notre norme en matière de sécurité. En moyenne, l'Administration dépense plus de 500 000 $ par année pour la formation et, en 2010, lorsque nous devions modifier les exigences relatives aux pétroliers pour le port de Vancouver, nous avons y avons consacré plus de 1,2 million de dollars.
Tous les pilotes, tant les plus expérimentés que les jeunes, doivent suivre une formation en établissement tous les cinq ans en plus de la formation jugée nécessaire par suite de changements proposés ou de nouveaux projets.
Même si nous n'avons pas à intervenir directement en cas de pollution marine, nous pouvons servir de ressource s'il y a déversement. De plus, nous participons aux examens et donnons notre avis d'expert lorsque des analyses sont entreprises.
En terminant, je dirais que la question qu'on me pose le plus fréquemment est la suivante : est-ce qu'il est sécuritaire à mon avis d'avoir des pétroliers dans nos eaux? Pour répondre brièvement, oui, je crois que c'est sécuritaire. En ce qui concerne les pétroliers, il y a quatre niveaux de sécurité.
Le premier niveau correspond au navire proprement dit, y compris des caractéristiques comme une double coque et de l'équipement moderne, ainsi qu'un contrôle international et local.
Le deuxième niveau de sécurité est l'équipe à la passerelle. Les pétroliers et leur équipage ont plus à perdre que bien d'autres et la récente tendance à criminaliser les gens de mer s'est accompagnée d'une solide formation sur les pétroliers.
Le troisième niveau de sécurité est le pilote (dans bien des cas, il y a deux pilotes pour les pétroliers chargés). Pour la plupart des navires, là s'arrête la sécurité.
Dans le cas des pétroliers chargés toutefois, il y a un quatrième niveau de sécurité sous la forme d'exigences d'escorte par un remorqueur lorsqu'ils traversent le port de Vancouver, Second Narrows, le détroit de Haro et le passage Boundary. Bien des choses dans mes fonctions perturbent mon sommeil, mais pas la question de savoir si un pétrolier peut être piloté en toute sécurité sur nos côtes.
Le président : Merci beaucoup, capitaine, pour ces observations. Je vais d'abord commencer en vous posant quelques questions.
Votre bilan de sécurité est formidable — 99,96 p. 100. C'est un bilan exceptionnel. Comment se compare-t-il à celui des grands ports aux États-Unis, comme ceux de New York ou Los Angeles? Tiennent-ils le même genre de registre que vous pour démontrer la sécurité dans leurs ports?
Capt Obermeyer : Oui. Ils font pour la plupart le même travail que nous. Ce qui fait notre différence, par contre, c'est que nous avons des pilotes brevetés qui peuvent couvrir toute la côte, ce qui est pratiquement unique au monde, car dans la plupart des régions les pilotes sont titulaires d'un brevet pour un port en particulier. Nous avons cette particularité en plus d'avoir un bilan de sécurité exceptionnellement élevé, ce qui nous place donc à un niveau différent par rapport à d'autres régions du monde.
Le président : Vous avez un pilote à bord de tous les navires de plus de 350 tonnes s'ils se trouvent à une certaine distance du littoral de la Colombie-Britannique.
Capt Obermeyer : C'est exact. Ailleurs, ce sont habituellement des pilotes de ports, et le pilote descend lorsque le navire quitte le port. Sur notre côte, à deux milles au large de n'importe quel point terrestre important — si vous avez l'annexe 1 devant vous, vous verrez toutes les zones en rouge le long du littoral indiquant les endroits où nous avons besoin d'un pilote. Il ne s'agit pas simplement de pilotage dans un port, mais dans toute cette zone.
Le président : Je vois. Très bien.
Quelle était la raison motivant l'ajout d'un mètre de tirant d'eau dans le port de Vancouver? Pourquoi était-ce nécessaire?
Capt Obermeyer : Les navires que nous pilotions étaient des pétroliers Aframax. Ils peuvent prendre une charge de 15 mètres. L'ancien règlement stipulait 12,5 m. Lorsque cette consigne a été adoptée — j'ignore quand et personne ne sait pourquoi. Je pense que cette mesure repose sur des données de l'époque. Toutefois, dans le passage de Second Narrows, qui est le plus étroit, la profondeur de l'eau sous quille dépasse les 12 m, donc même si le navire est chargé à 13 m, il y a suffisamment d'eau.
Le problème, c'est l'étroitesse du chenal, et c'est la raison pour laquelle nous y avons effectué autant de travaux. Un mètre faisait en sorte que le navire pouvait prendre 10 000 tonnes de cargaison supplémentaire. Il y a deux raisons à cela. Si le port peut accueillir un certain volume et chaque navire peut prendre une charge plus lourde, un nombre moins élevé de navires devront traverser Second Narrows.
Le président : Pour ce qui est du chenal de Douglas, j'ai lu dans votre rapport que votre groupe participe activement au pilotage en ce qui regarde la façon dont les ports sont aménagés et les charges des navires qui sortent de ce chenal. Ai-je bien compris?
Capt Obermeyer : Oui. Les pilotes ont déjà effectué des simulations avec Enbridge. À deux occasions différentes, ils ont passé une semaine à Copenhague pour faire des simulations complètes sur le pont dans toutes les conditions météorologiques, et le navire qu'ils utilisaient était un très gros transporteur de brut TGTB. De notre point de vue, ces essais ont déjà été réalisés.
Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup, capitaine Obermeyer, tout cela est très intéressant.
J'aimerais revenir à votre annexe 1, qui indique les zones en rouge. Dans le détroit qui sépare Haida Gwaii du continent, le détroit d'Hécate, il y a une zone rouge qui borde l'île et le continent. Par contre, on peut voir une zone blanche assez grande au centre où vous n'auriez pas besoin d'un pilote, même s'il s'agit d'une zone préoccupante pour la population. N'auriez-vous pas avantage à exiger la présence d'un pilote à bord des navires qui traversent cette zone, tout ce détroit, sans exception, ou la présence d'un pilote est-elle superflue et aucunement nécessaire? Comprenez-vous ce que je veux dire?
Capt Obermeyer : Oui, tout à fait. De notre point de vue, nous ne croyons pas que la présence d'un pilote dans les zones d'eau libre aura pour effet d'accroître la sécurité. Les pilotes offrent une expertise locale qui leur est propre. Ils savent où se trouvent les rochers, les courants et les contre-courants, et ils connaissent la géographie et les paramètres météorologiques. Les équipages des navires qui transitent en eau libre sont parfaitement en mesure de naviguer sur cette voie maritime.
Par contre, je dois dire que pour les navires-citernes, nous envisageons actuellement la possibilité d'avoir des pilotes dans cette zone et nous le ferons au moyen d'hélicoptères, pour deux raisons : premièrement, pour nous assurer que les navires-citernes ne s'approchent pas des côtes avant qu'il y ait un pilote à bord et deuxièmement, pour que, dans l'éventualité peu probable d'un incident, il y ait une personne à bord qui possède l'expertise nécessaire.
Le sénateur Mitchell : Cette information est très intéressante. Vous songez essentiellement à étendre la zone de ce chenal dans laquelle les navires devront avoir un pilote et vous utiliserez des hélicoptères.
Capt Obermeyer : C'est exact. J'apporterai des précisions lorsque nous parlerons des navires-citernes.
Un TGTB chargé qui naviguerait jusqu'à notre station de pilotage à l'île Triple entrerait dans une zone plus dangereuse. À notre avis, si nous utilisons un hélicoptère, nous pouvons nous déplacer sur une distance maximale de 10 milles, ce qui nous amène au centre de cette zone blanche dont vous parlez.
Le sénateur Mitchell : Très intéressant.
Vous avez mentionné que le troisième niveau de sécurité dépend de la qualité des équipages. En fait, vous avez indiqué dans votre réponse à ma première question que les équipages sont certainement en mesure de piloter des navires dans une zone semblable. Comment pouvons-nous surveiller ces navires et comment pouvons-nous être sûrs de la qualité des équipages? Est-ce parce que nos entreprises font affaire uniquement avec les meilleures lignes de navigation? Il est permis de penser que là-bas, en haute mer, personne ne sait réellement qui se trouve à bord de ces navires.
Capt Obermeyer : C'est une bonne question. L'une des raisons pour lesquelles nous avons des pilotes à bord, c'est pour nous assurer que quelqu'un à bord connaît bien la région. Toutefois, les gardiens de ports de Transport Canada sont là pour mener des enquêtes. Quand il s'agit de navires-citernes, il y a un processus de contrôle qui vise à écarter les entreprises plus douteuses. Le bilan de ce navire — les incidents et les accidents, surtout ceux liés à l'erreur humaine — figure dans l'historique du navire et de la société.
Par exemple, les pétroliers qui entrent au terminal de Kinder Morgan à Vancouver sont tous inspectés bien avant d'être nolisés dans le cadre du processus d'affrètement. Ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais je sais que c'est la procédure. D'après mon expérience, je sais aussi que nous avons eu des problèmes avec certains vraquiers qui entraient avec leur équipage. Cependant, à ce jour, je peux vous dire que nous n'avons pas rencontré de problème majeur de langue ou de formation avec les équipages des pétroliers qui atteignent nos côtes.
Le sénateur Mitchell : Qui inspecte ces navires? Quand vous dites qu'ils sont inspectés, est-ce Kinder Morgan ou les gardiens de port ou le Bureau de la sécurité des transports qui les inspectent?
Capt Obermeyer : Kinder Morgan inspecte les navires avant qu'ils ne soient affrétés pour prendre une cargaison, et c'est ce qui se fait dans les terminaux ailleurs dans le monde et au Canada. Les navires sont préinspectés par le terminal et par le pays.
Le sénateur Mitchell : Nous parlons de navires ayant une capacité d'environ 2 millions de barils, 1 million de barils et 500 000 barils, soit le tonnage maximal à pouvoir entrer au port Vancouver à l'heure actuelle. Pouvez-vous nous donner une idée de la dynamique des manœuvres à effectuer sur des navires de 500 000 barils à 2 millions de barils? Les navires de 2 millions de barils sont-ils beaucoup plus difficiles à manœuvrer que les navires de 1 million de barils ou de 500 000 barils?
Capt Obermeyer : Tout d'abord, je ne suis pas pilote. Je suis capitaine d'un navire et je n'ai jamais navigué sur un TGTB. J'ai navigué sur de gros vraquiers et, à mon avis, oui, il y a une différence de manœuvre à cause de l'impulsion générée par ces navires. Ils sont beaucoup plus gros. Dans le milieu, certains les comparent à des limaces pour ce qui est de la vitesse de manœuvre.
Dans les simulations effectuées par les pilotes à Copenhague, on a déterminé que les TGTB, les très gros transporteurs de brut, peuvent partir de la haute mer et se rendre jusqu'à Kitimat en toute sécurité sans remorqueur. Cela peut se faire. Cependant, nous sommes tous d'accord sur le fait que ces navires doivent être accompagnés d'un ou deux remorqueurs de la haute mer jusqu'à Kitimat, simplement pour ajouter ce niveau de sécurité supplémentaire.
Pour ce qui est du chenal de Douglas, si on le compare à l'espace dont nous disposons à Vancouver, la zone de manœuvre n'est pas aussi étroite qu'on l'imagine. À son point le plus étroit, le chenal mesure 1 400 m de large. La largeur des pétroliers se situe entre 55 à 60 m. Dans le port de Vancouver, nous manœuvrons des navires de 42 m de large dans un chenal de 137 et 136 m à son point le plus étroit. Voilà pour la comparaison.
Le sénateur Lang : J'aimerais poser une question d'ordre général. Notre sujet d'étude porte sur le niveau de sécurité et sur la façon de réduire les risques au minimum. Vous avez fait référence aux pilotes canadiens qui ont reçu une formation à Copenhague afin d'obtenir les attestations nécessaires pour traverser le chenal de Douglas. Comment le système de sécurité des milieux marins au Canada que vous avez décrit, en particulier le système de la côte Ouest, se compare-t-il aux systèmes en vigueur dans d'autres pays en ce qui regarde les exigences?
Capt Obermeyer : J'ai fait la comparaison avec d'autres systèmes au Canada et nous avons comparé d'autres systèmes à l'étranger pour ce qui est de la formation et du type d'équipement que le pilote apporte à bord du navire. D'après ce que j'ai pu constater, je dirais que nous sommes probablement à l'avant-garde de ce qui se fait ailleurs.
Lorsque j'ai parlé des unités de pilotage individuelles dans ma déclaration préliminaire, je faisais référence aux ordinateurs portatifs intégrant les cartes marines électroniques indiquant déjà au pilote la voie à suivre vers sa destination. Il y a également, intégré à cet ordinateur, un indicateur de vitesse angulaire de giration indépendant de celui du navire, ainsi qu'un système de localisation GPS indépendant. Ces dispositifs peuvent être utilisés de manière indépendante si nécessaire, fournissant ainsi au pilote une double protection.
En ce qui regarde la formation, je dirais bien honnêtement que nous dépensons probablement plus en formation offerte aux pilotes que la plupart des autres pays, avec un budget de 500 000 $ par année, pouvant dépasser le million lorsque nécessaire. Pour ce qui est de la formation et des capacités sur la côte Ouest, je pense que nous faisons aussi bien ou mieux que la plupart des autres pays du monde.
Le sénateur Lang : Je vais changer de sujet avec une question qui concerne le danger des voies navigables sur la côte Ouest, par rapport à d'autres régions du monde, comme la baie de Fundy et ailleurs. Nous savons que les conditions météorologiques, les conditions hydrologiques et les marées varient dans les différentes parties du monde. Quelles difficultés rencontrons-nous sur la côte Ouest et peut-être plus précisément dans le chenal marin de Douglas comparativement à d'autres régions du monde en ce qui concerne notre capacité à naviguer dans ces eaux en toute sécurité et à réduire les risques au minimum?
Je pose cette question parce que tout le monde semble s'entendre sur le fait que cette voie navigable est différente, plus tumultueuse, et qu'elle doit conséquemment être abordée de façon différente. J'aimerais connaître votre avis. Qu'il s'agisse de la Norvège, de la baie de Fundy ou un autre coin du monde, quelles sont les différences par rapport à la côte Ouest du point de vue de la sécurité?
Capt Obermeyer : Je vais d'abord comparer la côte Est à la côte Ouest. Vous pouvez vous rendre sur le site web d'Environnement Canada et comparer la vitesse du vent, maximale et normale. Si vous comparez les phares de la côte Ouest à ceux de la côte Est, il y a très peu de différences entre eux. Je dirais cependant que, sur le site web d'Environnement Canada, vous constaterez en fait que les vents les plus violents sont sur la côte Est.
En ce sens, je ne pense pas vraiment que l'on peut dire que nos conditions climatiques sur la côte Ouest sont bien pires qu'ailleurs. Nous avons fait entrer de très gros charbonniers — 160 000 à 180 000 de port en lourd — à Prince Rupert. Comme vous le savez tous, Prince Rupert peut connaître de très violentes tempêtes de vent. À ce jour, très peu de retards ont été causés par les conditions de vents. Si les conditions sont trop mauvaises, nous avons toujours la possibilité de retarder un navire.
Pour ce qui est des TGTB, nous ne sommes pas allés dans tous les détails afin de déterminer s'il devrait y avoir des restrictions pour certains navires en raison de la température. Nous n'avons pas de restrictions sur les gros navires charbonniers, et sans doute que les TGTB n'en auront pas besoin non plus, mais c'est un sujet sur lequel nous devrons probablement nous pencher avant que n'arrivent les premiers TGTB.
Je ne peux pas comparer la côte Ouest à la Norvège parce que, pour tout vous dire, je n'ai pas eu l'occasion de travailler beaucoup dans ce pays. Je comprends cependant que tout cela sera accompli par le comité présidé par le capitaine Gordon Houston qui a été mis en place dernièrement par le gouvernement. Je crois que toutes ces réponses viendront du comité, qui effectue des comparaisons dans le monde entier.
Le sénateur Massicotte : J'aimerais poursuivre dans la même ligne de pensée. Nous savons que vous effectuez environ 11 000 déplacements par année sur la côte Ouest. Quel est le nombre de déplacements effectués à Kitimat, à Prince Rupert et au port de Vancouver? Avez-vous les chiffres approximatifs?
Capt Obermeyer : Environ 65 p. 100 de ces déplacements sont effectués dans le sud de la province — Vancouver, Nanaimo et Victoria. Ce sont les endroits où la majorité des activités ont lieu. L'activité augmente lentement à Prince Rupert : il y a trois ans, les activités se déroulaient à 75 p. 100 dans le sud. Pour le moment, la grande majorité des activités a lieu dans le sud de la province.
Le sénateur Massicotte : Donc, peut-on dire qu'il y a environ 7 000 déplacements par année au port de Vancouver? Est-ce un chiffre raisonnable?
Capt Obermeyer : Oui, c'est un chiffre raisonnable.
Le sénateur Massicotte : Si le projet de nouveau pipeline voyait le jour, à combien de déplacements par année ce nombre augmenterait-il?
Capt Obermeyer : Parlez-vous de Kinder Morgan, sénateur?
Le sénateur Massicotte : Oui.
Capt Obermeyer : Avec Kinder Morgan, nous passerons de cinq par mois à 25 par mois. C'est une augmentation considérable, mais je dois la comparer au nombre d'affectations que nous avions il y a 10 ans. Nous avons connu une baisse continue de navires dans la région, tant au nord qu'au sud en raison de l'augmentation de la taille des navires. Nous avions 14 000 affectations il y a 10 ans, et nous en comptons maintenant 12 000, donc nous avons une assez bonne capacité.
Le nombre de pilotes n'a pas diminué de façon aussi draconienne. En ce qui nous concerne, l'augmentation prévue avec Kinder Morgan nous ramènera, espérons-le, là où nous étions.
Le sénateur Massicotte : Si je ne me trompe pas, l'augmentation serait d'environ 240 par année si le pipeline était construit. Est-ce exact?
Capt Obermeyer : C'est ce que nous comprenons, oui.
Le sénateur Massicotte : De 7 000, ce nombre pourrait passer à 7 200 alors qu'il pouvait atteindre 9 000 il n'y a pas tellement d'années. Est-ce exact?
Capt Obermeyer : C'est exact.
Le sénateur Massicotte : Peut-on dire également que, malgré l'augmentation du trafic, qui n'est pas négligeable, vous ne voyez pas de risques accrus pour la sécurité découlant de cette augmentation?
Capt Obermeyer : C'est exact, en raison principalement du nombre de mesures d'atténuation que nous avons mises en place à la suite des cinq années d'évaluation des risques, uniquement pour apporter ce changement d'un mètre.
Le sénateur Massicotte : La Voie maritime du Saint-Laurent est une région densément peuplée. Avez-vous une idée du volume à cet endroit?
Capt Obermeyer : Malheureusement, non.
Le sénateur Massicotte : Est-ce beaucoup plus que 7 000 par année?
Capt Obermeyer : D'après moi — et je pourrais vérifier auprès mon homologue du Saint-Laurent — ils font plus d'affectations que nous. Je crois que c'est environ de 18 000 à 20 000 par année, comparativement à nous.
Le sénateur Massicotte : Leur bilan en matière de sécurité se compare-t-il au vôtre?
Capt Obermeyer : Oui.
Le sénateur Massicotte : Malgré le fait que cette région soit densément peuplée et que le volume soit pratiquement le double, ce qui entraîne évidemment des risques plus élevés, ils affichent le même bilan en matière de sécurité que nous. Cela veut dire que le volume ne fait pas une différence si importante dans la sécurité. Il semble que nos résultats sont les mêmes. Cela confirme que tout est très sécuritaire.
Capt Obermeyer : C'est exact. Si vous jetez un coup d'œil à notre bilan passé, lorsque nous en faisions 13 000 ou 14 000, nous étions tout de même près de 99,9 p. 100.
Le sénateur Massicotte : Malgré la géographie de Kitimat — on nous a décrit l'aspect de ce territoire — et les questions délicates concernant la nature et le style de vie des Autochtones, vous avez l'assurance, d'après ce que j'ai entendu de votre témoignage aujourd'hui, que le bilan de sécurité peut être maintenu même pour cette région. Est-ce que j'ai bien compris?
Capt Obermeyer : Oui, ce bilan peut être maintenu.
Le sénateur Wallace : Dans les faits, vous êtes manifestement convaincu de l'avantage que représentent les pilotes maritimes et de la sécurité qu'ils confèrent au transport par pétroliers sur la côte Ouest. En ce qui concerne les risques et les incidents qui pourraient survenir, vous avez indiqué que la performance d'un navire est consignée dans un registre qui fait l'objet d'un contrôle avant qu'un navire ne soit autorisé à entrer dans un port.
Cependant, le fait est que les équipages et les capitaines de navire peuvent changer et des incidents peuvent survenir et être causés par une erreur humaine au lieu d'une défaillance technique du navire. Si j'ai bien compris, c'est là le réel avantage des pilotes maritimes pour la sécurité maritime. Vous avez des pilotes maritimes à bord et, grâce à leurs connaissances des conditions locales, ils sont en mesure de porter assistance ou peut-être même de donner des instructions aux capitaines et aux équipages.
Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe en pratique lorsqu'un pétrolier approche d'un port sur la côte Ouest? Par exemple, comment le public est-il assuré qu'un navire n'entre pas au port sans la présence d'un pilote maritime à son bord? Comment cela se passe-t-il? Une fois que le pilote maritime est à bord, comment interagit-il avec l'équipage du navire? Comment transmet-il l'information sur les conditions locales au capitaine de façon à ce que, concrètement, la sécurité du navire soit toujours assurée? Comment cela fonctionne-t-il?
Capt Obermeyer : C'est une très bonne question, sénateur. Je pense que beaucoup de gens se demandent comment fonctionne l'ensemble du processus.
Un navire doit faire rapport aux services de trafic maritime et signaler toute défaillance dans les équipements et tout problème 96 heures avant son arrivée. À 24 heures de son arrivée, il devrait avoir effectué une demande auprès de son agent local pour obtenir les services d'un pilote. Cette demande sera confirmée à 12 heures de l'arrivée. À trois heures de l'arrivée, notre bureau de répartition communique avec le navire par radio lorsqu'il s'approche de la région de Victoria et de la station d'embarquement. Lorsqu'il se trouve à une demi-heure de la station, notre vedette quitte le port avec le pilote qui se trouve déjà à bord.
Lorsque le pilote se dirige vers le navire à bord de la vedette, il regarde d'abord l'aspect général du navire. Le navire est-il bien entretenu? Est-il rouillé et endommagé par les éléments naturels? Il vérifie également le tirant d'eau du navire qui s'approche de la vedette. Il grimpe ensuite l'échelle de pilote, et si l'échelle n'est pas en très bon état, tous ces indices permettent au pilote de se faire une idée et de penser que les choses ne vont peut-être pas aussi bien qu'il le croit.
Il se rend ensuite sur la passerelle, se présente au capitaine et fait ce que nous appelons une réunion sur la gestion des ressources à la passerelle. Durant cette réunion, il demandera qu'on lui confirme si l'équipement sur le navire fonctionne et est en bon état et s'il peut utiliser la machine arrière d'urgence au besoin.
Une fois que tous ces points auront été vérifiés et que le pilote aura expliqué au capitaine quelle direction ils prendront, quel passage et quel transit, le navire poursuit sa route vers Vancouver. Tout le temps que le pilote est à bord, il supervise les officiers de quart de la passerelle et le capitaine.
La Loi sur le pilotage stipule que le pilote est responsable de la sécurité de la navigation de leur navire. Il est responsable envers le capitaine, et le capitaine peut le remplacer seulement s'il croit que le pilote met le navire en danger. En gros, le pilote assure entièrement la conduite de ce navire. C'est lui qui donne les ordres de manœuvre de la barre et qui indique dans quelle direction le navire doit ou ne doit pas aller.
Il reste également en contact avec le centre de contrôle du trafic maritime pendant le passage et fait le point sur les ETA, et cetera. S'il a le sentiment à tout moment que le capitaine n'obéit pas aux ordres de manœuvre de la barre et de la machine, il communiquera avec le centre de contrôle et dira : « Le capitaine a repris la conduite du navire. Je ne suis plus responsable du navire et le navire va mouiller l'ancre. » Dans une telle situation, nous intervenons et nous tenons une audience. Il est très rare qu'un capitaine passe outre les ordres du pilote ou essaie de s'immiscer dans ses instructions.
Dès la première apparition du navire à l'horizon jusqu'à son accostage, il est surveillé de plusieurs façons. Le premier à voir ce qui se passe à bord du navire, c'est le pilote.
Il y a eu des situations où des problèmes sont survenus et où le pilote, n'étant pas satisfait, a dit : « Je vais mouiller l'ancre à Constance Bank au large de Victoria. Nous ne rentrons pas au port, pas avant que les problèmes ne soient réglés. »
Nous ne sommes pas une force policière, mais nous avons une grande autorité lorsqu'il s'agit d'assurer la sécurité des navires dans leurs déplacements.
Le sénateur Wallace : Merci beaucoup pour ces explications, capitaine. Elles ont été très utiles.
Lorsque nous pensons aux déplacements des pétroliers sur la côte Ouest, nous sommes nombreux à nous souvenir encore du Exxon Valdez. Cet accident a été une très mauvaise expérience. Vous avez mentionné que les pétroliers à double coque sont maintenant obligatoires. Comment comparez-vous les exigences actuelles relatives aux pétroliers à celles du Exxon Valdez, et le rôle des pilotes aujourd'hui par rapport à ce qui existait ou n'existait pas à l'époque du Valdez?
Capt Obermeyer : C'est une autre bonne question qu'on me pose souvent, parce que le Exxon Valdez est toujours cité comme le désastre qu'il a été.
Parlons du Valdez. Il s'agissait d'un pétrolier à coque simple. Il n'avait pas de pilote sur la passerelle, pas de remorqueur et il y avait de l'équipement défectueux à bord. Nous sommes tous au courant de ces détails.
Pour ce qui est de ce que nous avons aujourd'hui sur la côte Ouest, je précise que nous ne parlerons pas d'Enbridge. Nous parlerons de Kinder Morgan, parce que c'est la situation que nous vivons depuis 50 ans dans la région sud. Aujourd'hui, nous avons des pétroliers à double coque très bien équipés. Nous avons des pilotes, souvent deux pilotes, sur les navires qui entrent au port en traversant Second Narrows. Les pétroliers chargés ont deux pilotes à bord, tout comme les très grands transporteurs de brut qui traversent le détroit de Haro et le passage Boundary.
Nous avons aussi des remorqueurs pour les déplacements dans le port et pour traverser le détroit de Haro et le passage Boundary. Ajoutons à cela les unités individuelles des pilotes, les ordinateurs portatifs, avec tout leur équipement auxiliaire. Nous ne comparons pas des pommes à des pommes quand nous comparons l'équipement dont disposait le Exxon Valdez à celui dont nous disposons aujourd'hui.
Le sénateur Patterson : Vos rapports annuels indiquent que plus de 99 p. 100 des affectations entre 2007 et 2011 n'ont pas connu d'incident, pour un total de 24 incidents signalés durant cette période. De façon générale, on remarque également une diminution continue d'incidents durant cette période. Sans vouloir trop m'attarder à la chose, je sais qu'il y a des catégories d'incidents et que tous les incidents étaient classés dans la troisième catégorie, la catégorie C, et présentaient un risque limité pour la navigation. Pourriez-vous décrire en gros la nature de ces incidents?
Capt Obermeyer : Je suppose que vous parlez de notre rapport annuel de l'année dernière. La majorité des incidents à survenir sont dans la catégorie C. Je ne crois pas que nous ayons connu un incident de catégorie A sur la côte Ouest depuis que je suis en poste.
Un incident de catégorie C est ce qu'on appelle un « accrochage », comme lorsque le navire se prépare à accoster et qu'à la dernière minute quelque chose d'imprévu arrive ou lorsque l'accostage est plus lourd qu'à l'habitude et vous égratignez la peinture ou vous endommagez une défense.
Est-ce que cela répond à votre question, sénateur?
Le sénateur Patterson : Oui, merci.
Nous étudions la possibilité d'une augmentation du trafic maritime. Est-ce que votre organisation, l'Administration de pilotage, s'est préparée à répondre à cette augmentation? Serez-vous en mesure de répondre à l'augmentation du trafic en disposant des ressources nécessaires?
Capt Obermeyer : Voilà ce qui perturbe mon sommeil. Le problème que nous avons à l'heure actuelle, c'est qu'il y a tellement de projets sur papier : huit terminaux de GNL, un de pétrole brut dans la région nord et l'agrandissement du terminal de pétrole brut dans le sud. Si tous ces projets voient le jour, nous devrons avoir huit pilotes supplémentaires ainsi que huit pilotes expérimentés. Pour manœuvrer les TGTB en question, il nous faut un pilote comptant sept années d'expérience. Nous devons donc embaucher du personnel maintenant. Le problème que nous avons, c'est que personne ne sait combien de projets, ne serait-ce qu'un, verront le jour. Ce sont les difficultés qui se posent à nous en ce moment. Soit nous nous préparons et rien ne se passe, soit nous attendons qu'il se passe quelque chose et nous essayons d'être prêts.
À vrai dire, nous avons une marge suffisante qui nous permettrait de nous tirer d'affaire assez facilement si un ou deux projets étaient lancés. En ce qui concerne Kinder Morgan, qui est le projet le plus susceptible d'aboutir, nous n'avons aucun besoin additionnel. C'est uniquement dans le nord, si tous les projets de GNL et de pétrole brut aboutissent, que nous aurons besoin de huit pilotes supplémentaires. Ce n'est pas beaucoup, mais cela exige sept années de formation.
Le sénateur Patterson : Pouvez-vous nous parler des sources de revenus de vos opérations? Est-ce qu'une partie de vos recettes proviennent du volume actuel de trafic ou vos recettes sont-elles indépendantes du trafic et des droits?
Capt Obermeyer : Les recettes proviennent de quelques sources, la première étant les services de pilotage que nous offrons. Le montant dépend de la taille du navire et du nombre d'heures passées par le pilote à son bord. Nous sommes également payés pour l'utilisation de nos vedettes qui amènent les pilotes aux navires ou qui les ramènent. Toutes les vedettes nous appartiennent et tous les membres des équipages sont nos employés. Les pilotes, de leur côté, sont sous contrat pour la plupart et ils tirent leur revenu du travail qu'ils effectuent. Évidemment, s'ils ont plus de travail, ils auront un revenu plus élevé. S'il y a moins de travail, ils ont un revenu moins élevé.
La sénatrice Ringuette : Mes questions portent sur deux domaines. D'abord, vous avez mentionné dans votre déclaration que vous menez des activités de sensibilisation dans les collectivités auprès des municipalités et des Premières nations. Avez-vous également des discussions avec le gouvernement provincial et, si oui, à quelle fréquence?
Capt Obermeyer : Nous n'entretenons pas de discussions régulières avec le gouvernement provincial. Nous avons tenu des réunions avec le secteur des transports à l'occasion, mais nous concentrons davantage nos efforts sur la partie de la côte qui relève du gouvernement fédéral, donc notre action éducative vise dans un premier temps à expliquer aux gens qui nous sommes et ce que nous faisons et, dans un deuxième temps, à trouver des personnes intéressées à devenir pilotes. Nous visons toujours cet objectif double dans les collectivités.
La sénatrice Ringuette : Je comprends. J'ai un bon ami de longue date qui a déjà été pilote sur la Voie maritime du Saint-Laurent, ce qui m'amène à ma prochaine question.
Vous avez une association nationale de pilotes qui a déjà été très active sur la Colline parlementaire. Vous avez parlé de formation à Copenhague et de l'équipement très sophistiqué que vous apportez pour exécuter votre travail. Savez- vous si toutes les autres administrations de pilotage ont entrepris le même type de formation que vous? Est-ce devenu une norme nationale ou est-ce seulement votre administration qui offre ce genre de formation et qui dispose d'un équipement aussi perfectionné?
Capt Obermeyer : C'est une bonne question, madame la sénatrice. Toutes les administrations contribuent à la formation. Toutes les administrations n'utilisent pas les UPP, parce que toutes les administrations n'ont pas à franchir les mêmes passages que nous. Les pilotes du Saint-Laurent utilisent les UPP et suivent les mêmes formations que nous. L'Administration de pilotage des Grands Lacs, compte tenu des passages étroits des écluses, utilise également les UPP. L'Administration de pilotage de l'Atlantique étudie la question, mais n'a pas encore emprunté cette voie. C'est une situation bien différente, car ils font du pilotage de port et non du pilotage de fleuve ou du pilotage côtier comme nous.
Il y a des différences, mais nous participons tous à la formation et nous respectons toutes les normes de la résolution A.960 de l'OMI, qui prévoit qu'au moins une fois tous les cinq ans les pilotes doivent participer à des activités de formation.
Le président : Je vous remercie de votre témoignage, capitaine. Vous avez dit que le port de Vancouver assure le transport du pétrole brut depuis 50 ans, ce que je savais déjà. Y a-t-il déjà eu des incidents?
Capt Obermeyer : Il n'y a pas eu d'incidents qui ont été portés à ma connaissance et aucun incident n'est survenu depuis que je suis sur la côte Ouest, soit depuis 21 ans. On me dit qu'aucun incident n'est survenu avant mon arrivée. J'ai jeté un coup d'œil aux archives et aux registres et je n'ai trouvé aucune mention d'un incident impliquant un pétrolier. Je travaille depuis 21 ans sur cette côte et je peux affirmer de façon catégorique qu'il n'y en a jamais eu.
Le président : Quel est le port le plus achalandé au monde capable d'accueillir les TGTB? Connaissez-vous un port auquel nous pourrions nous adresser afin de recueillir un témoignage comme le vôtre?
Capt Obermeyer : De nombreux ports me viennent à l'esprit. Je ne suis pas sûr, monsieur le président, mais je pense que le port de Rotterdam serait en mesure de témoigner.
Le président : Notre personnel pourrait communiquer avec vous plus tard et essayer de le confirmer. Je pense qu'il serait important pour nous d'avoir d'autres témoignages.
Je présume que les pétroliers naviguant de Valdez, en Alaska, à Cherry Point dans le sud de l'île de Vancouver, seraient pilotés par des pilotes américains. Savez-vous combien de pétroliers empruntent cette voie de façon régulière et si des incidents sont déjà survenus?
Capt Obermeyer : Je ne connais pas les chiffres et je ne sais pas s'il y a déjà eu des incidents. J'ai demandé dernièrement aux pilotes de Puget Sound de me donner les chiffres, mais je n'ai toujours pas eu la réponse.
Le président : Allez-vous pouvoir nous fournir cette information? Cela pourrait certainement nous être utile.
Le chenal de Puget Sound est-il aussi large que le chenal de Douglas?
Capt Obermeyer : À certains endroits, c'est la même largeur, mais à d'autres endroits le chenal est plus étroit. Le point le plus étroit du chenal de Douglas Channel mesure environ 1 400 mètres, et je crois que certains endroits empruntés par les pilotes de Puget Sound à bord des pétroliers sont moins larges. Je fournirai cette information à votre personnel.
Le président : Je vous remercie beaucoup de votre témoignage. Nous avons posé des questions pertinentes et avons reçu de très bonnes réponses. Merci de vous être levé tôt ce matin pour nous aider dans la poursuite de cette étude très importante que nous aimerions terminer avant la fin juin.
Merci et bonne journée.
Capt Obermeyer : Merci, monsieur le président, et merci aux honorables sénateurs.
(La séance est levée.)