Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 40 - Témoignages du 26 mars 2013
OTTAWA, le mardi 26 mars 2013
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 18 h 1, pour étudier l'état actuel de la sécurité du transport en vrac des hydrocarbures au Canada.
Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld, je représente la Colombie-Britannique au Sénat et je préside ce comité.
Je tiens à souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux membres du public qui sont avec nous dans la pièce, ainsi qu'aux téléspectateurs qui suivent nos travaux d'un peu partout au pays.
Au nom du comité, j'aimerais prendre un instant pour accueillir chaleureusement nos deux nouveaux membres : le sénateur Mike MacDonald de la Nouvelle-Écosse et la sénatrice Betty Unger de l'Alberta. Nous sommes heureux de vous accueillir ici tous les deux.
Je tiens également à prendre une minute pour remercier la sénatrice Johnson, qui a fait partie du comité pendant quelque temps, mais qui doit assumer d'autres fonctions, ainsi que le sénateur Brown, qui a pris sa retraite récemment. Le sénateur Brown siégeait à ce comité quand je suis arrivé au Sénat il y a quatre ans, et nous avons beaucoup apprécié sa précieuse contribution.
Je demanderais maintenant aux sénateurs ici présents de se présenter, à commencer par le vice-président, le sénateur Grant Mitchell, de l'Alberta.
Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Unger : Betty Unger.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, Québec.
La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, Nouveau-Brunswick.
Le président : J'aimerais également vous présenter notre greffière, Lynn Gordon, de même que deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, Marc LeBlanc et Sam Banks.
Le 28 novembre 2012, notre comité a été autorisé par le Sénat à entreprendre une étude sur la sécurité du transport des hydrocarbures au Canada. Dans le cadre de cette étude, nous allons examiner et comparer les régimes réglementaires qu'on trouve au Canada et ailleurs dans le monde, les normes et les pratiques exemplaires qui existent pour transporter les hydrocarbures en toute sécurité au moyen de pipelines de transmission, de navires pétroliers et de wagons-citernes. Le comité a déjà tenu neuf séances sur le sujet à ce jour.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à Gerard McDonald, sous-ministre adjoint de la Sécurité et de la Sûreté à Transports Canada; à Marie-France Dagenais, directrice générale du Transport de marchandises dangereuses; à Luc Bourdon, directeur général de la Sécurité ferroviaire; ainsi qu'à Sylvain Lachance, directeur exécutif des Affaires législatives, réglementaires et internationales.
D'après ce que je comprends, monsieur McDonald, vous avez préparé une allocution que vous allez nous présenter au nom du groupe, après quoi nous pourrons vous poser des questions.
Je m'excuse de notre retard, mais nous devions nous acquitter d'un devoir à la Chambre, nous devions voter, et il était absolument impossible que nous commencions à 17 heures, donc je m'excuse de vous avoir pris du temps que vous auriez probablement pu mieux investir ailleurs, mais nous apprécions que vous soyez là. Je rappelle à tous que les membres du comité doivent partir pour l'aéroport ce soir, et je pense que nous devrions avoir fini d'ici 19 h 30. Nous avons environ une heure et demie, donc je vous prierais d'être le plus brefs possible dans vos questions et vos réponses. Cela nous permettra d'en faire plus, et si nous n'arrivons pas à tout couvrir, vous pourrez peut-être revenir une autre fois. Nous aurions beaucoup aimé avoir quelques heures de plus à vous consacrer, mais nous vous remercions d'être ici.
Gerard McDonald, sous-ministre adjoint, Sécurité et sûreté, Transports Canada : Je vous remercie de nous donner l'occasion de venir discuter avec vous aujourd'hui du transport sécuritaire du pétrole en provenance et à destination du Canada.
Je suis sûr que vous avez de nombreuses questions à nous poser, donc nous allons y arriver le plus vite possible. Auparavant, j'aimerais faire quelques brèves observations pour situer nos programmes de règlementation de la sécurité du transport des hydrocarbures au Canada.
Pour protéger les Canadiens et l'environnement, trois lois principales et leurs règlements et normes connexes établissent le filet de sécurité canadien du transport sécuritaire des hydrocarbures à destination et en provenance du Canada, de même qu'au sein du pays. Il s'agit de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, de la Loi sur le transport des marchandises dangereuses et de la Loi sur la sécurité ferroviaire.
En outre, les dispositions de la loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques visent les risques associés au transport des hydrocarbures dans le Nord.
[Français]
J'aimerais prendre quelques minutes pour discuter de trois programmes bien établis et des capacités d'intervention en cas d'urgence au Canada.
Tout d'abord, le Programme de la sécurité et de la sûreté maritime et la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada. La Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada est la principale loi qui régit les activités des navires canadiens dans toutes les eaux et de tous les navires dans les eaux canadiennes. Transports Canada dispose de programmes exhaustifs de réglementation, d'inspection et d'application de la loi en vue de renforcer la sécurité des navires hauturiers et des navires-citernes.
[Traduction]
Parmi les programmes clés en place figurent l'aide pour les zones de pilotage obligatoire; les mesures de sécurité de la navigation et le Régime canadien de préparation et d'intervention en cas de déversement d'hydrocarbures. Il y a aussi le contrôle par l'État du port et le contrôle par l'État du pavillon, le contrôle par l'État du port étant l'inspection des navires étrangers dans les ports canadiens tandis que le contrôle par l'État du pavillon comprend l'inspection des navires battant pavillon canadien. Il y a aussi la prévention des déversements d'hydrocarbures par l'intermédiaire de notre Programme national de surveillance aérienne et bien sûr, le recrutement et la certification des gens de mer.
Comme vous le savez peut-être, le 18 mars, le gouvernement a annoncé des mesures qui mèneront à la création d'un système de sécurité de classe mondiale pour les navires-citernes. La mise en œuvre de huit mesures de sécurité pour les navires-citernes a été annoncée en parallèle à la présentation de la Loi visant la protection des mers et ciel canadiens et à la création du Comité d'experts sur la sécurité des navires-citernes, qui entreprendra un examen du système de sécurité pour les navires-citernes actuel et proposera d'autres mesures pour le renforcer.
La Loi visant la protection des mers et ciel canadiens, qui modifie la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada renforcera les exigences actuelles en matière de prévention de la pollution et d'intervention aux installations de manutention d'hydrocarbures; elle accroîtra la capacité de surveillance et d'application de la loi de Transports Canada en fournissant aux inspecteurs de la sécurité maritime les outils qui leur permettront de veiller à la conformité de l'application de la loi; elle instaurera de nouvelles infractions à la loi et des sanctions plus importantes ayant trait à la pollution; elle améliorera les interventions en cas d'incidents de déversement d'hydrocarbures en supprimant les obstacles juridiques qui pourraient autrement empêcher les membres d'organismes d'intervention canadiens de participer aux activités de nettoyage.
[Français]
De plus, Transports Canada augmentera le nombre d'inspections afin que tous les navires-citernes étrangers soient inspectés lors de leur première visite au Canada et une fois par année par la suite.
Nous étendrons le Programme national de surveillance aérienne. Nous examinerons les exigences actuelles en matière de pilotage et de remorqueurs-escortes pour déterminer ce qui sera nécessaire à l'avenir. Un nombre plus important de ports seront désignés pour des mesures de contrôle de la circulation, en commençant par le port de Kitimat.
Nous mènerons, en collaboration avec Environnement Canada, de nouvelles recherches scientifiques sur les produits pétroliers non conventionnels, comme le bitume dilué, pour avoir une meilleure compréhension de ces substances et de leur comportement lorsqu'elles sont déversées en milieu marin.
[Traduction]
Nous travaillerons également avec la Garde côtière canadienne, qui établira un système de commandement en cas d'incident, ce qui lui permettra d'intervenir plus efficacement lors d'un incident et d'intégrer ses activités à celles de partenaires clés. Elle veillera à ce qu'un système d'aides à la navigation comprenant des bouées, des feux et d'autres dispositifs qui serviront à avertir en cas d'obstructions et à baliser l'emplacement des voies de transport privilégiées soit installé et entretenu. La Garde côtière canadienne élaborera également des options pour améliorer le réseau de navigation actuel — je pense, par exemple, à des aides à la navigation ou à des cartes hydrographiques.
Enfin, la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques, dont les dispositions s'appliquent au large du littoral septentrional du Canada au Nord du 60e degré de latitude nord jusqu'aux limites de notre zone économique exclusive, exige la présence à bord des navires-citernes d'officiers de navigation ayant de l'expérience des glaces et de systèmes de contrôle maritimes mis en œuvre pour éloigner les navires transportant plus qu'une certaine quantité d'hydrocarbures (dans ce cas-ci, 453 mètres cubes), notamment les navires-citernes, des conditions de glace pour lesquelles ils n'ont pas été conçus.
Je passe maintenant à la Loi sur le transport des marchandises dangereuses. Les éléments essentiels de cette loi ont été conçus dans le seul but de promouvoir la sécurité publique dans le domaine du transport des marchandises dangereuses. La sécurité publique se définit comme la protection de la vie humaine, des biens, de la santé et de l'environnement.
[Français]
Le Programme de transport des marchandises dangereuses exige que les marchandises dangereuses soient classifiées adéquatement, soient transportées dans un contenant adéquat assorti de marques de sûreté appropriées. De plus, les expéditeurs de marchandises dangereuses doivent s'assurer que les documents d'expédition appropriés accompagnent les marchandises; qu'ils ont un plan d'intervention d'urgence approprié pour les marchandises transportées, qu'ils signalent les incidents et que leurs employés sont formés pour manipuler et transporter les marchandises.
Il y a plus de 30 millions d'expéditions de marchandises dangereuses au Canada chaque année et 99,99 p. 100 d'entre elles atteignent leur destination sans incident. Les expéditions d'hydrocarbures et de gaz doivent être conformes à la loi, aux règlements et aux normes connexes. Les hydrocarbures et le gaz sont régulièrement expédiés en toute sécurité au pays chaque jour.
Transports Canada vérifie la conformité au moyen d'inspections. Le CN et le CFCP font régulièrement l'objet d'inspections dans le cadre du programme d'inspection axé sur les risques de Transports Canada.
[Traduction]
La loi et les règlements connexes sont mis en application par les inspecteurs fédéraux et provinciaux. Des protocoles d'entente existent avec chaque province et territoire concernant l'application conjointe, ce qui permet aux provinces de se concentrer principalement sur les inspections routières, attendu que le gouvernement fédéral gère le transport maritime, ferroviaire et aérien ainsi que les activités des expéditeurs pour tous les modes.
Finalement, en ce qui concerne la Loi sur la sécurité ferroviaire, elle aide à veiller à ce que les Canadiens, l'économie canadienne et l'environnement tirent parti d'un régime de sécurité bien établi pour les activités ferroviaires. La Loi sur la sécurité ferroviaire établit le Règlement sur la sécurité des wagons pour l'équipement. Ce règlement exige que les wagons soient exempts des défectuosités relatives à la sécurité au moyen de vérifications de sécurité par des inspecteurs accrédités de matériel remorqué à des endroits précis.
Elle établit également le Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada, qui couvre tous les éléments, allant des responsabilités de 1'équipe, des exigences relatives aux manœuvres, des mouvements aux passages à niveau publics, de l'immobilisation et de l'attelage du matériel roulant à la régulation de l'occupation de la voie.
[Français]
Le Règlement sur la sécurité ferroviaire énonce les exigences minimales concernant les compagnies de chemin de fer de compétence fédérale. Si la circulation ferroviaire augmente à des niveaux précis, des inspections de la voie plus fréquentes seront alors nécessaires, conformément au règlement, à la catégorie de la voie et au tonnage annuel transporté sur la ligne de chemin de fer.
La Loi sur la sécurité ferroviaire prévoit des améliorations à l'infrastructure afin de promouvoir la sécurité des passages à niveau, de sauver des vies et de prévenir des déraillements associés aux accidents aux passages à niveau. Le programme d'amélioration des passages à niveau prévoit un financement du gouvernement en partenariat avec les municipalités et les compagnies de chemin de fer pour améliorer la sécurité aux passages à niveau partout au Canada.
Les modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire qui entreront en vigueur le 1er mai 2013 exigeront que les compagnies de chemin de fer obtiennent un certificat d'exploitation ferroviaire fondé sur la sécurité et qu'elles soumettent des plans de gestion environnementale.
Maintenant que vous avez un portrait des lois et des règlements qui protègent les Canadiens et l'environnement lors du transport d'hydrocarbures, j'aimerais prendre les quelques minutes qu'il me reste pour discuter de l'intervention en cas d'urgence.
[Traduction]
Au chapitre du transport maritime, le régime canadien de responsabilité et d'indemnisation en cas de déversement d'hydrocarbures est axé sur le principe du pollueur-payeur, ce qui veut dire que le pollueur est toujours responsable des coûts liés au nettoyage du déversement d'hydrocarbures, y compris les dommages à une tierce partie. Cela veut dire que si un navire est la cause d'un déversement, son propriétaire est responsable des dommages et intérêts en vertu de la loi fédérale.
De plus, conformément aux conventions internationales, les propriétaires de navire sont assujettis à la règle de l'assurance obligatoire d'un montant qui est lié à la jauge brute de leur navire. Si le montant des dommages dépasse la responsabilité du propriétaire du navire, les fonds internationaux et nationaux octroient une indemnisation supplémentaire d'un montant maximal total d'environ 1,36 milliard de dollars.
Transports Canada examine le régime canadien de responsabilité et d'indemnisation et prend d'autres mesures pour veiller à ce qu'il dispose d'un système de sécurité de classe mondiale pour les navires-citernes en vue du transport maritime sécuritaire des ressources par les voies navigables du Canada avant que toute nouvelle infrastructure d'exportation de l'énergie soit fonctionnelle. Cet examen devrait être terminé à l'automne 2013. Il guidera Transports Canada à mesure que le ministère modernisera la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, en examinant son application et son utilisation générales.
Dans le même ordre d'idées, la Loi sur le transport des marchandises dangereuses est axée sur un principe de pollueur-payeur. Le Règlement sur le TMD exige des plans d'intervention d'urgence pour certaines marchandises dangereuses qui nécessitent une expertise et un équipement d'intervention particuliers. Pour ce qui est des hydrocarbures, un plan d'intervention d'urgence est requis seulement si le convoi ferroviaire se compose de 17 wagons- citernes ou plus raccordés et remplis à au moins 70 p. 100 de leur capacité d'hydrocarbures transportés selon la classification UN1202, UN1203 et UN1863. Toute personne qui offre de transporter ou d'importer l'une de ces marchandises dangereuses doit présenter un plan à la Direction générale du TMD, qui l'examinera, et s'il le juge adéquat, l'approuvera.
[Français]
Les plans d'intervention d'urgence visent à permettre à l'industrie d'aider les intervenants d'urgence locaux en leur donnant accès à des experts techniques et à de l'équipement spécialisé sur les lieux d'un accident. Une telle aide est offerte aux pompiers locaux sans frais à la suite d'un incident mettant en cause des marchandises dangereuses énoncées dans le plan d'intervention d'urgence lors du transport.
De plus, Transports Canada exploite le Centre canadien d'urgence transport, dont le mandat est d'aider le personnel d'intervention d'urgence à faire face à des urgences mettant en cause des marchandises dangereuses. Les employés de CANUTEC sont des scientifiques bilingues spécialisés en intervention d'urgence qui ont acquis une expertise en interprétation des renseignements techniques et qui dispensent des conseils aux premiers intervenants.
Le centre offre des services 24 heures sur 24 et reçoit plus de 30 000 appels par année liés à la sécurité. En cas d'urgence mettant en cause des marchandises dangereuses, les Canadiens peuvent appeler CANUTEC pour obtenir immédiatement de l'aide d'un professionnel. Les premiers intervenants, pompiers, policiers et ambulanciers, font régulièrement appel à ce service.
[Traduction]
C'est ce qui conclut ma présentation. Nous serons heureux de répondre à vos questions sur l'un ou l'autre des sujets abordés. Merci beaucoup.
Le président : Merci. J'aurais beaucoup de questions à vous poser, mais je vais commencer par quelques-unes, si vous me le permettez. Dois-je comprendre que les navires-citernes à double coque sont obligatoires dès maintenant, à partir d'aujourd'hui, tant sur la côte Est que sur la côte Ouest?
M. McDonald : Oui, c'est exact. Les navires-citernes à double coque existent depuis 2004 ou 2005, si je ne me trompe pas. En fait, tous les navires en opération sur la côte Est et la côte Ouest sont des navires-citernes à double-coque. En vertu de la loi, je pense que ce sera obligatoire pour les plus petits navires à partir de 2015 seulement, mais dans les faits, tous les navires en opération actuellement sont des navires à double coque.
Le président : J'ai lu quelque part et j'ai entendu dire que les navires-citernes qui se rendront à Kitimat, par exemple, devront être dotés de compartiments. Quelle taille auraient ces compartiments dans un très gros transporteur de brut (TGTB)? Certains continuent d'affirmer que la double coque n'est pas une garantie absolue contre les déversements. J'aimerais savoir quelle quantité de pétrole pourrait s'écouler si un de ces compartiments devait être perforé dans un accident grave. Combien de barils est-ce que cela pourrait représenter?
Sylvain Lachance, directeur exécutif, Affaires législatives, réglementaires et internationales, Transports Canada : Je vais devoir faire quelques calculs. Un TGTB, par exemple, peut contenir de 200 000 à 320 000 tonnes de pétrole, et est normalement divisé transversalement, avec trois réservoirs de large par sept ou huit réservoirs de long. On parle donc d'environ 24 réservoirs, dont huit au milieu. Dans un navire à double coque, le risque qu'un réservoir se vide entièrement est très, très minime. Il faudrait une défaillance catastrophique pour que cela se produise. Si un réservoir devait se vider, cela représenterait environ 20 000 tonnes de pétrole, soit peut-être 140 000 barils.
Le président : Ce sont des renseignements très utiles pour le comité. Je vous demanderais de nous revenir avec la configuration des TGTB, et aussi des Panamax, les quatre types de navires-citernes.
M. McDonald : Chaque navire est différent, bien entendu. Ils sont tous conçus différemment, alors la capacité de chaque compartiment peut varier, mais nous pouvons vous donner une idée générale.
Le président : Chaque navire devrait être doté de compartiments, n'est-ce pas? Pas seulement être à double coque, mais aussi avoir des compartiments, pas vrai?
M. McDonald : Oui, c'est exact.
Le président : Vous inspectez tous les méthaniers qui viennent au Canada. Inspectez-vous les navires-citernes maintenant sur la côte Est?
M. McDonald : Oui, absolument.
Le président : Combien accostent au terminal de Canaport chaque année?
M. McDonald : À Canaport? Parlez-vous des méthaniers? Je n'ai pas cette information. Nous pouvons certainement le vérifier pour vous.
Le président : D'accord, ce serait apprécié.
Les produits raffinés montent et descendent. Je sais ce qui se passe sur la côte Ouest, et il y a beaucoup de produits raffinés qui circulent. Est-ce que les produits raffinés sont transportés dans des barges à double coque et des navires du genre, ou est-ce quelque chose qui sera encore exigé?
M. Lachance : La double coque n'est pas encore obligatoire pour les plus petits navires, y compris les barges. Elle le sera à partir de 2015 ou de la fin de 2014. Dans un an environ, tous ces navires seront à double coque.
Le président : Même les petits navires se rendant dans les petites collectivités le long de la côte devront être à double coque.
M. Lachance : C'est exact; les barges, et cetera.
Le président : Merci.
Le sénateur Mitchell : J'aimerais d'abord vérifier certains détails avec vous, monsieur Lachance, car c'est important de rectifier les choses. Je crois que vous avez dit qu'un gros navire peut contenir au minimum 250 000 tonnes de pétrole.
M. Lachance : Ce n'est pas un minimum. Pour les TGTB, la capacité maximale est de 320 000 tonnes.
Le sénateur Mitchell : On parle donc de 250 à 320, pour simplifier le calcul. Vous dites qu'il y a 24 sections.
M. Lachance : Environ 24, oui.
Le sénateur Mitchell : Ce serait plutôt 10 000 tonnes, et pas 20 000. C'est important.
M. Lachance : Un calcul rapide, oui.
Le sénateur Mitchell : Je ne veux pas vous mettre dans l'embarras. Vous avez dit ensuite qu'il y avait environ 70 barils dans une tonne, mais je pense que vous vouliez dire 7.
M. Lachance : C'est effectivement environ sept barils la tonne.
Le sénateur Mitchell : Si le réservoir devait se vider, ce serait 70 000 barils et pas 140 000.
M. Lachance : Désolé. Vous avez raison.
Le sénateur Mitchell : C'est important de le savoir.
Je suis à la page 6 de votre présentation, monsieur McDonald. Ce n'est pas une question piège, mais nous avons rencontré les représentants d'une entreprise de Calgary il y a quelques semaines, et ils nous ont dit que le pétrole et le gaz n'étaient pas des marchandises dangereuses. C'est peut-être dans le sens qu'il ne s'agit pas de nitroglycérine ou de quelque chose comme cela, mais vous dites clairement que les expéditions d'hydrocarbures et de gaz doivent être conformes à la loi, aux règlements et aux normes connexes, et je pense que vous faites référence à la Loi sur le transport des marchandises dangereuses. Vous ne pouvez pas deviner ce que cette personne voulait dire par là, mais est-ce que cela vous dit quelque chose de façon générale?
Marie-France Dagenais, directrice générale, Transport des marchandises dangereuses, Transports Canada : Le pétrole et le gaz peuvent être classifiés par le transporteur de différentes manières. Dans la plupart des cas, le pétrole brut est transporté conformément à la classification UN1267, qui renvoie aux marchandises dangereuses. Tout dépend du point d'éclair. Il faudrait entrer dans des détails techniques.
Plus le pétrole ou le gaz est lourd, moins il est dangereux, car il ne présente pas la même inflammabilité et ne s'étale pas aussi rapidement. Toutefois, certains types d'hydrocarbures et de gaz — le diesel, par exemple — sont assujettis au programme des marchandises dangereuses.
Le sénateur Mitchell : C'est une précision très intéressante. Nous avions l'impression — c'est en tout cas ce que je pensais — que le gaz naturel liquide était moins nocif pour l'environnement que le pétrole lourd, qui semble inquiéter les gens. Cela me paraît logique, puisqu'il s'évapore, tout simplement. Est-ce que c'est considéré comme une marchandise dangereuse?
Mme Dagenais : Tout dépend du point d'éclair et de l'inflammabilité. Comme je le disais, Transports Canada n'est pas responsable de la classification des marchandises. C'est une obligation qui incombe au transporteur des marchandises dangereuses. Il doit déterminer la classification à laquelle les marchandises appartiennent et préciser de quel type il s'agit.
La majeure partie du pétrole transporté est du pétrole brut, qui est considéré comme une marchandise dangereuse.
Le sénateur Mitchell : Merci.
Monsieur McDonald, à la page 5 de votre présentation, vous dites ceci : « Nous travaillerons avec la Garde côtière canadienne, qui établira un système de commandement en cas d'incident, veillera à ce qu'un système... », et ainsi de suite. Quand établira-t-on ce système de commandement en cas d'incident? Où sera-t-il situé? Aussi, y a-t-il un budget consacré à cette initiative en ce moment?
M. McDonald : Oui, c'est une initiative qui s'inscrit dans le cadre des mesures de calibre mondiale annoncées le 18. Cela va s'appliquer à l'ensemble du Canada; pour tout déversement ayant lieu au Canada, la Garde côtière va assurer le commandement et pourra gérer toutes les ressources associées à l'incident.
Pour ce qui est de l'échéancier, je n'ai pas cette information avec moi, mais nous pouvons l'obtenir auprès de la Garde côtière et vous en faire part plus tard.
Le sénateur Mitchell : Vous avez dit qu'un budget était prévu à cette fin?
M. McDonald : Oui.
Le sénateur Mitchell : Pourriez-vous nous le fournir aussi, s'il vous plaît?
M. McDonald : Oui.
Le sénateur Mitchell : Je terminerai au prochain tour.
La sénatrice Seidman : Merci. Vous avez parlé du régime de responsabilité. J'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet, car vous avez répondu au rapport déposé par le commissaire à l'environnement à l'automne 2012. Il a signalé que le régime de responsabilité était désuet. Transports Canada l'a reconnu et a entrepris de réviser le processus.
Vous pourriez peut-être me dire quelle est la responsabilité du Canada à l'heure actuelle en cas de pollution marine.
M. McDonald : Je vais demander à mon collègue, M. Haché, de prendre part à la discussion. C'est un expert en la matière. Plutôt que de risquer de me tromper, je vais le laisser vous donner les chiffres exacts.
Daniel Haché, directeur, Politiques maritimes internationales, Transports Canada : Bonsoir, honorables sénateurs. Le régime canadien de responsabilité et d'indemnisation est l'un des meilleurs au monde, et je le pense vraiment. Il couvre essentiellement tous les coûts d'intervention raisonnables, ainsi que les mesures préventives et le nettoyage. On parle de pollution par les hydrocarbures causée par les navires. S'ajoute à cela les indemnisations prévues par les conventions internationales et différents fonds, comme on l'a mentionné. C'est un régime à paliers multiples, et la responsabilité est partagée par le propriétaire du navire et l'expéditeur, c'est-à-dire le propriétaire de la cargaison. Comme M. McDonald l'a dit tout à l'heure, le régime s'appuie sur le principe du pollueur-payeur, purement et simplement.
L'indemnisation totale disponible s'élève à 1,36 milliard de dollars pour les déversements d'hydrocarbures persistants causés par des navires-citernes. La responsabilité du propriétaire du navire est établie à un maximum de 145 millions de dollars pour l'assurance. Le montant de l'assurance est établi en fonction du tonnage du navire. La responsabilité du propriétaire est donc limitée à cet égard.
Une fois les 145 millions de dollars obtenus, entrent en jeu les fonds internationaux auxquels les expéditeurs contribuent. Le Canada est partie de quelques fonds et conventions. Il y a notamment le Fonds international d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, créé en 1992, et le fonds supplémentaire connexe.
Le fonds de 1992 ajoute à cela 180 millions de dollars. Le fonds supplémentaire ajoute quant à lui 875 millions. Ce sont les deux fonds internationaux.
Le régime du Canada est unique en ce sens qu'il a son propre fonds national. Pour chaque incident, ce fonds permet d'ajouter une tranche supplémentaire de 160 millions de dollars, ce qui amène le total à 1,36 milliard de dollars pour le régime du Canada.
La sénatrice Seidman : Parlez-vous du régime actuel?
M. Haché : C'est le régime actuel.
La sénatrice Seidman : Envisagez-vous, à l'issue de la réévaluation du régime, d'accroître la responsabilité des différentes parties?
M. Haché : D'une certaine façon, oui. Nous allons examiner différentes possibilités, mais nous ne pouvons contrôler que le volet canadien. Pour apporter des modifications aux fonds internationaux, comme la part du propriétaire du navire, il faut passer par les conventions internationales. Il en va de même pour les deux fonds internationaux. La seule chose que nous pouvons changer, c'est notre propre fonds d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.
Nous procédons à une analyse des risques pour déterminer si le montant est approprié. Ce n'est pas encore fait; nous examinons la chose en ce moment. Nous essayons aussi de voir comment on pourrait modifier le fonds en passant par nos propres lois et règlements.
Nous nous sommes par ailleurs rendus aux États-Unis pour voir ce qui se fait là-bas, les montants qui sont accordés et les types de fonds offerts. Ils ont un fonds d'urgence. Le président dispose en tout temps d'un montant de 50 millions de dollars. Il y a aussi un fonds de recherche et développement. Nous examinons tout cela aussi, de façon à pouvoir compléter le fonds canadien pour avoir une meilleure évaluation du montant total. Nous envisageons également la possibilité d'établir un fonds d'urgence et un fonds de recherche et développement.
Ce sont les aspects que nous allons examiner d'ici l'automne 2013.
La sénatrice Seidman : Vous examinez donc les normes internationales ou le genre de mesures que les autres pays appliquent?
M. Haché : Oui. Nous pensons que notre système est excellent. Aux États-Unis, les autorités peuvent consacrer au plus 1 milliard de dollars, selon le solde du fonds. Présentement, le total des tranches que j'ai décrites représente 1,36 milliard de dollars.
La sénatrice Seidman : Quelles sont les responsabilités en cas d'accident ferroviaire? Sont-elles différentes pour tout type d'accident par rapport à un accident maritime?
Luc Bourdon, directeur général, Sécurité ferroviaire, Transports Canada : Je ne le sais pas. La Loi sur la sécurité ferroviaire s'applique aux activités ferroviaires. Nous pouvons seulement intenter une poursuite si l'entreprise contrevient à la loi. En cas de déversement, si le train était conforme aux exigences, nous n'allons pas invoquer la Loi sur la sécurité ferroviaire pour poursuivre l'entreprise.
La sénatrice Seidman : Une assurance minimale est-elle requise?
M. Bourdon : La compagnie ferroviaire doit montrer à l'Office des transports du Canada qu'elle a les fonds nécessaires pour assumer ses responsabilités avant d'obtenir son certificat d'aptitude.
Le sénateur Wallace : C'est nouveau qu'il y ait autant de projets de transport de brut dans l'Ouest du Canada, contrairement à l'Est. Depuis le début des années 1960, du brut est expédié à la raffinerie Irving, la principale au pays. Selon ce que je comprends, un nouveau régime d'intervention en cas de déversement est en vigueur dans l'Est du Canada depuis les années 1990.
Je voudrais des explications sur le fonctionnement du régime dans la pratique. La plupart sinon tous les très gros transporteurs de brut, les TGTB, qui naviguent en eaux canadiennes battent pavillon étranger. Comme vous l'avez dit, la responsabilité incombe aux propriétaires de la cargaison et du navire, qui doivent avoir une entente avec une organisation canadienne d'intervention en cas de déversement. Comment cela se traduit-il concrètement? Étant donné que du brut est transporté en eaux canadiennes, la population veut savoir que toutes les protections sont mises en œuvre. Comment les organisations d'intervention en cas de déversement et ces ententes fonctionnent-elles?
M. McDonald : Je vais commencer, puis un de mes collègues pourra donner des précisions si nécessaire. En gros, il y a quatre organisations d'intervention en cas de déversement au Canada. Il y en a trois dans l'Est; la principale s'appelle la Société d'intervention Maritime, Est du Canada. Les deux plus petites sont Point Tupper et celle de Saint John.
Le sénateur Wallace : Alert.
M. McDonald : Merci. Vous en savez plus que moi. Dans l'Ouest, c'est Burrard Clean qui est responsable. Selon la réglementation actuelle, toutes ces organisations doivent être en mesure de s'occuper d'un déversement maximal de 10 000 tonnes dans leurs régions respectives.
Les responsables des pétroliers doivent avoir des ententes préalables avec une de ces organisations d'intervention pour expédier leurs produits au Canada. Ils sont facturés à la tonne dans le cadre de ces ententes. C'est grosso modo ainsi que le régime fonctionne. En cas de déversement, l'armateur doit prendre contact avec l'organisation d'intervention. Ces organisations ont des caches dans divers lieux stratégiques au pays et vont réagir aux déversements comme il se doit. Depuis une vingtaine d'années, le régime a été très efficace pour intervenir dans tous les cas de déversement maritime qui sont survenus au Canada.
Le sénateur Wallace : Dans l'Est, les navires transportent deux millions de barils. Depuis le milieu des années 1990, tous les pétroliers ont une double coque. Y a-t-il eu des déversements ou des navires échoués depuis qu'ils sont à double coque?
M. McDonald : Non. Il n'y a pas eu d'incident majeur au Canada depuis environ 30 ans.
Le sénateur Wallace : Des questions ont été posées plus tôt concernant le nombre de compartiments des TGTB à double coque. Je crois que la distance entre la coque extérieure et les réservoirs est de six ou sept pieds. La cavité est très grande et serait difficile à percer, n'est-ce pas?
M. Lachance : En effet. La cavité fait deux ou trois mètres de profondeur.
M. McDonald : C'est assez grand pour qu'un inspecteur s'y promène.
Le sénateur Wallace : Oui, c'est exact. Merci.
Le sénateur Massicotte : Merci de votre présence parmi nous. Voici les questions que j'aimerais vous poser.
[Français]
Dans votre présentation, monsieur McDonald, vous dites que vous êtes satisfait de notre système de réglementation et que les Canadiens et l'environnement sont bien protégés, mais avez-vous des comparaisons avec les États-Unis et l'Europe, par exemple, pour appuyer vos dires?
M. McDonald : Notre taux d'accident est un des meilleurs au monde. Par contre, je n'ai pas de données disponibles pour comparer notre système aux autres. Cette responsabilité serait celle du panel qui vient d'être annoncé par le ministre.
Le sénateur Massicotte : Vous dites que notre taux d'accident est très bon.
M. McDonald : Oui.
Le sénateur Massicotte : Parlons-nous de sécurité ferroviaire? De sécurité maritime?
M. McDonald : N'importe quel mode.
Le sénateur Massicotte : Les trois secteurs.
M. McDonald : Les trois secteurs, oui. Il s'agit du taux d'accident en décembre.
Le sénateur Massicotte : Ils sont bons, mais il n'existe aucun système de comparaison avec les États-Unis. Comment est-ce qu'on peut le savoir?
M. McDonald : Je vais donner la parole à M. Bourdon.
M. Bourdon : Pour ce qui est des accidents de train, les critères utilisés par les compagnies canadiennes sont les mêmes que les compagnies américaines, dans le but de pouvoir nous comparer avec leur industrie. Les comparaisons sont surtout faites au niveau des chemins de fer de classe 1, donc CN/CP et les quatre gros transporteurs aux États- Unis.
Depuis plusieurs années, l'industrie canadienne obtient de meilleurs résultats au niveau des accidents de train par million de trains/mille que nos voisins du sud.
Le sénateur Massicotte : Et le secteur maritime?
M. Bourdon : Ce n'est pas mon domaine.
Le sénateur Massicotte : Les résultats sont bons au niveau ferroviaire; au niveau maritime, on n'est pas certain. Les pipelines, est-ce sous votre responsabilité?
M. Bourdon : Non.
Le sénateur Massicotte : Le transport de gazoline par camion, est-ce votre responsabilité?
Mme Dagenais : Oui.
Le sénateur Massicotte : Nos résultats sont-ils bons dans ce secteur, comparativement aux normes internationales?
Mme Dagenais : Comme M. McDonald l'a indiqué, les statistiques démontrent que 99 p. 100 des marchandises dangereuses se rendent à destination de façon sécuritaire. Il y a très peu d'accidents. C'est très bon comparativement aux Américains.
Le sénateur Massicotte : Pourrions-nous recevoir une copie de vos documents de comparaison? J'aimerais voir les comparaisons avec les États-Unis.
M. Bourdon : On peut vous fournir cela. C'est le CN et le CP qui cumulent des statistiques constantes. Nous, on ne les tient pas vraiment.
Le sénateur Massicotte : Vous nous dites que nous sommes bons, vous devez bien avoir des documents qui confirment cela?
M. Bourdon : Oui. Je dois préciser, par contre, que c'est difficile de faire des comparaisons avec l'Europe, parce que leur système de transport ferroviaire est différent d'ici. De plus, la géographie est très différente, tout comme le climat.
[Traduction]
Le sénateur Lang : Merci beaucoup. Je veux reparler de la double coque des pétroliers. S'agit-il d'une exigence mondiale ou uniquement canadienne?
M. McDonald : Non, c'est une exigence mondiale de l'Organisation maritime internationale. Nous avons adapté notre réglementation aux exigences internationales.
Le sénateur Lang : Ces exigences s'appliquent-elles depuis longtemps?
M. McDonald : Je dois vérifier, mais je crois que c'est depuis le début des années 2000.
Le sénateur Lang : Je veux aussi parler de...
M. McDonald : Je précise que la mise en œuvre était progressive et dépendait de l'année de construction du navire.
Le sénateur Lang : Je veux parler d'une autre question. La capacité de gérer le risque sur la côte Ouest constitue bien sûr une préoccupation. Êtes-vous également préoccupés par les conséquences qu'entraîne l'activité accrue des pétroliers dans la région? Si vous ne l'êtes pas, veuillez nous expliquer pourquoi.
M. McDonald : Notre étude sur le transport du pétrole de l'Ouest, dont vous avez sans doute entendu parler, indique que les défis de navigation ne sont pas plus grands que ceux dans l'Est. Nous pensons que nous pouvons atténuer tous les risques liés au transport de pétrole à l'aide d'un certain nombre de mesures de sécurité. Nous avons parlé du recours à deux pilotes et aux escorteurs ainsi que de l'inspection accrue des pétroliers pour qu'ils arrivent à bon port dans les eaux canadiennes et pour confirmer qu'ils sont sécuritaires.
L'histoire montre qu'il est possible d'expédier du pétrole de façon sécuritaire au Canada. Nous le faisons depuis plus de 100 ans.
Le sénateur Lang : J'aimerais en savoir un peu plus, si possible. Une des questions actuelles au Canada consiste bien sûr à trouver un port sur la côte Ouest et à savoir si nous pouvons transporter du brut et d'autres produits pétroliers de manière sécuritaire.
Ma question porte sur Cherry Point, qui se situe tout près du détroit et du port de Vancouver. Beaucoup de pétrole y est transporté tous les jours, à l'heure actuelle.
M. McDonald : C'est exact.
Le sénateur Lang : Vous n'êtes peut-être pas au courant et vous devrez possiblement vous informer, mais combien de pétroliers vont à Cherry Point par rapport au port de Vancouver? Quelles sont les exigences de sécurité de ce port par rapport au port canadien? Avez-vous de l'information là-dessus?
M. McDonald : Je n'ai pas ces données sous la main. Je crains d'être dans l'incapacité de répondre à cette question précise.
Le sénateur Lang : Pouvez-vous vous informer? La comparaison serait intéressante.
M. McDonald : Nous pouvons trouver l'information sur le nombre d'expéditions. Qu'entendez-vous par port canadien?
Le sénateur Lang : Le port canadien, c'est celui de Vancouver, qui se trouve juste à côté. Selon ce que je comprends, beaucoup de pétrole de l'Alaska est acheminé à Cherry Point. Il serait intéressant pour nous de comparer ces expéditions à celles du port de Vancouver ou de Kitimat. C'est une question de risque et de gestion du risque. Ce serait intéressant de savoir comment on s'y prend là-bas.
M. McDonald : D'accord.
Le sénateur MacDonald : Je veux reparler du transport ferroviaire. Depuis quelques mois, il y a une augmentation importante des expéditions ferroviaires de brut lourd entre les raffineries canadiennes et États-Unis et de brut léger au pays.
J'aimerais connaître la différence entre les réglementations américaine et canadienne sur le réseau ferroviaire. À titre de comparaison, connaissez-vous le coût des assurances pour le transport ferroviaire de brut aux États-Unis par rapport à celui au Canada?
Si j'ai bien compris, le coût des assurances que doivent assumer les transporteurs qui vont aux États-Unis est bien plus élevé que s'ils ne se déplacent qu'au Canada. Je pense aussi que les responsabilités sont bien plus importantes aux États-Unis. Avez-vous des données qui nous permettent de faire la comparaison?
M. McDonald : Je crois que non, monsieur le sénateur. Je suis désolé.
Le sénateur MacDonald : Savez-vous où nous pouvons obtenir ces données?
M. McDonald : Nous ne recueillons pas ces informations présentement.
Le sénateur MacDonald : Je m'intéresse à la viabilité du transport ferroviaire du brut. La seule façon d'obtenir le prix mondial, c'est d'utiliser le transport maritime. À l'heure actuelle, tout le brut est expédié aux États-Unis. Nous vendons le West Texas Intermediate moins cher, mais le brut léger américain expédié au Canada est vendu au prix mondial.
Nous aimerions avoir le choix, mais nous ne l'aurons pas sans avoir accès au transport maritime de brut lourd. Je présume que les responsabilités et le coût des assurances sont bien plus importants si le pétrole est acheminé aux États- Unis plutôt que s'il reste au Canada. Ces chiffres pourraient servir à trouver une solution canadienne à un tel problème. Voilà pourquoi je pose la question.
M. McDonald : D'accord. Je répète que, malheureusement, nous ne recueillons pas ce genre de données. C'est le privé qui se charge des questions relatives aux assurances et aux responsabilités.
Le sénateur MacDonald : Un déraillement majeur est toujours possible. Pour des raisons économiques et politiques, je pense qu'il serait préférable pour nous qu'un déversement se produise au Canada plutôt qu'aux États-Unis, surtout si nous négocions l'accès au marché. C'est un simple commentaire visant à susciter la réflexion.
Le sénateur Mitchell : Monsieur Haché, je veux revenir à votre exposé. Vous avez parlé de quatre tranches, deux internationales et le supplément du Canada. La première tranche est-elle versée par l'entreprise?
M. Haché : La première tranche incombe à l'armateur.
Le sénateur Mitchell : Ma première question porte là-dessus. Je ne suis pas expert, mais il semble qu'une entreprise pourrait simplement créer de très modestes filiales pour chaque navire. Comment pourriez-vous poursuivre l'entreprise si elle n'avait qu'un navire?
M. Haché : La responsabilité de l'armateur est limitée en fonction du poids du navire.
Le sénateur Mitchell : Il ne s'agit pas d'une responsabilité illimitée?
M. Haché : Non.
Le sénateur Mitchell : Vous ne pouvez pas poursuivre la compagnie? C'est possible aux États-Unis, n'est-ce pas? Nos normes ne sont pas aussi sévères que les leurs.
M. Haché : Mais d'autres types de sanctions s'appliquent là-bas, comme les dommages-intérêts punitifs. Toutes sortes de sanctions peuvent être mises en œuvre.
Le sénateur Mitchell : Nous devrions peut-être en faire autant.
M. Haché : Ce n'est pas le cas en ce moment.
Le sénateur Mitchell : D'accord, mais c'est une possibilité. Le 1,36 milliard dont vous avez parlé représente une somme considérable par rapport aux fonds disponibles ailleurs dans le monde. Les autres pays ont sûrement accès à la partie internationale de ces fonds, composés de deux tranches de 180 millions de dollars et d'une tranche d'environ 800 millions. Comment pouvons-nous accéder à ces fonds? Devons-nous présenter une demande? Nous ne pouvons sans doute pas simplement encaisser ce chèque de 1 milliard de dollars à tout moment. Ce n'est pas aussi simple.
M. Haché : Pour chaque tranche, j'ai dit qu'il s'agissait d'un maximum. Je vais redonner quelques explications.
En cas de déversement, la mutuelle de protection et d'indemnisation de l'armateur et le fonds international vont établir un bureau mixte pour évaluer l'ensemble des diverses réclamations en fonction des tranches. La responsabilité de l'armateur varie selon le poids du navire et s'élève à 145 millions de dollars maximum.
Pour accéder aux deux fonds internationaux, il faut être signataire des conventions. Celle de 1992 réunit 111 pays contributeurs et prévoit une tranche maximale de 180 millions de dollars. Seuls 28 pays, dont le Canada, participent au fonds supplémentaire qui constitue la majeure partie des 875 millions de dollars.
Le sénateur Mitchell : Comment les 111 pays doivent-ils se répartir la tâche si un déversement majeur exige de reconstituer les fonds?
M. Haché : En gros, des prélèvements seront réalisés. Les 111 pays du fonds de 1992 seront mis à contribution. Les 28 pays qui participent au fonds supplémentaire devront aussi verser des fonds pour garantir le dédommagement.
Le sénateur Mitchell : Je sais que chaque déversement diffère des autres d'innombrables façons, et je ne parle pas d'un cas comme celui de BP où la fuite était au sol. Cela dit, combien coûte le nettoyage d'un déversement de, disons, 28 000 barils comme celui qui s'est produit sur la terre ferme à Kalamazoo? Qu'est-ce que cela coûterait au large des côtes? Est-ce qu'une somme de 1,36 milliard de dollars suffit? Est-ce beaucoup trop? Comment fait-on le calcul?
M. Haché : Je vais vous citer quelques chiffres. Par exemple, le plus important déversement pour lequel on s'est servi du fonds international serait celui du Prestige au large des côtes de l'Espagne en 2002, qui a coûté 1,4 milliard de dollars.
Le sénateur Mitchell : De combien de barils parle-t-on?
M. Haché : Je n'ai pas cette information; désolé.
Le sénateur Mitchell : Pouvez-vous l'obtenir pour nous?
M. Haché : Oui.
Le sénateur Massicotte : J'ai une question complémentaire.
Le sénateur Mitchell : Vous pouvez sans aucun doute obtenir ce renseignement, mais j'ai une dernière question, si c'est possible.
Le président : Pourvu qu'elle soit courte.
Le sénateur Mitchell : Je vais maintenant parler de pilotage. Il y a quelques semaines, un représentant de l'Administration de pilotage du Pacifique nous a présenté un exposé intéressant. Il a parlé d'une distance de deux miles dans certaines eaux agitées. Je crois qu'il s'agissait du détroit d'Hécate. Il est certain qu'il y a deux miles le long de chaque côté des îles et de la côte, suivis d'une section où il faut des pilotes et ensuite d'un passage ouvert où ce n'est pas nécessaire. Il a dit qu'ils commenceront à envoyer par hélicoptère des pilotes sur les bateaux qui empruntent le détroit.
Est-ce une activité qui devrait être réglementée, ou devraient-ils s'en occuper eux-mêmes? Quel est le contexte?
M. McDonald : Les zones de pilotage obligatoire, autrement dit les zones dans lesquelles il faut un pilote à bord, sont réglementées sur avis des autorités compétentes qui, après évaluation des risques, pourront désigner d'autres zones de pilotage obligatoire. Nous avons une méthodologie fondée sur le risque dont elles peuvent se servir et selon laquelle elles doivent consulter les parties concernées. Elles présentent ensuite une recommandation au gouvernement, et nous adoptons une réglementation appropriée.
Le sénateur Patterson : Nous avons entendu parler de l'efficacité de ce régime et de la bonne gestion des dossiers liés au transport des hydrocarbures, mais on a récemment annoncé l'adoption d'une nouvelle loi. Pouvez-vous nous dire si elle découle d'une analyse de lacunes qui devaient être comblées? Pourquoi a-t-on renforcé la Loi sur la marine marchande du Canada? Voulait-on améliorer davantage un bon système?
M. McDonald : Oui.
Le sénateur Patterson : Y avait-il des imperfections?
M. McDonald : Nous en avons trouvé. La nouvelle loi qui est déposée, la Loi visant la protection des mers et ciel canadiens, vise en fait à renforcer la Loi sur la marine marchande du Canada de 2001.
Nous avions constaté des points faibles dans la loi. L'un d'entre eux portait sur notre capacité à infliger des sanctions administratives pécuniaires à ceux qui polluent ou déversent du pétrole. Il fallait jusqu'à maintenant s'adresser aux tribunaux pour obtenir une réparation de la part de ceux qui ne respectaient pas la loi.
Un autre point faible que nous avons relevé concernait la responsabilité de faire venir des entreprises de nettoyage étrangères pour nous aider en cas de déversement. Selon les changements apportés au fil des ans, les régimes d'intervention en cas de déversements fonctionnent de manière à ce qu'il y ait une utilisation en cascade des ressources, ce qui veut dire que s'il y a un déversement au Canada qui dépasse nos capacités, nous ne pouvons pas faire le nettoyage nous-mêmes. Il faut s'adresser au prochain organisme d'intervention et lui demander de nous prêter du matériel. Nous nous sommes rendu compte qu'il y avait un problème de responsabilité dans la loi, car si nous avions décidé de faire appel à nos amis aux États-Unis, qui sont tout à fait disposés à nos fournir des ressources, on ne leur aurait pas accordé d'immunité en cas de poursuite. À notre avis, il s'agissait là d'un problème.
M. Lachance : Nous avons créé de nouvelles exigences pour les usines d'hydrocarbures afin que les plans soient tenus à jour et soumis avant l'exploitation. Nos inspecteurs ont quant à eux de nouveaux pouvoirs d'application de la loi pour faire leur travail dans ces usines et auprès des organismes d'intervention.
Le sénateur Patterson : Je pense que nous aurons une nouvelle usine dans l'Arctique, car on a annoncé dans le dernier budget la construction de l'installation navale de ravitaillement de Nanisivik.
Ce qui m'amène à ma prochaine question. Au Canada, il y a quatre organismes d'intervention répartis sur deux côtes, mais nous en avons une troisième dont l'étendue est plus importante. Au moment où le transport d'hydrocarbures et les activités minières augmentent, qui est responsable d'intervenir en cas de déversement dans l'Arctique? Les quatre organismes se partagent-ils la responsabilité? Quel est le système en place?
M. McDonald : La Garde côtière canadienne est responsable des déversements au nord du 60e parallèle. Notre groupe d'experts doit entre autres examiner cette question et nous conseiller sur la façon dont nous pourrions modifier le régime afin de tenir compte de l'accroissement du trafic dans le nord du Canada.
M. Lachance : Je dois ajouter au commentaire de M. McDonald que les armateurs sont responsables du nettoyage de tous les déversements, même dans l'Arctique, et que la Garde côtière se charge de surveiller les opérations et d'intervenir si le propriétaire d'un navire en est incapable ou qu'il ne coopère pas.
Le sénateur Patterson : Pouvez-vous nous décrire brièvement le groupe d'experts et son échéancier?
M. McDonald : Le groupe d'experts est composé de trois membres, dont certains que vous connaissez peut-être. Il est présidé par le capitaine Gordon Houston, qui est l'ancien PDG de Port Metro Vancouver. C'est un navigateur réputé ayant beaucoup d'expérience.
Il y a aussi M. Michael Sinclair, ancien directeur de l'Institut de Bedford à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse. Il est titulaire d'un doctorat de l'Université de Californie et a également travaillé à l'Institut maritime du Québec à Rimouski.
Le troisième membre est Richard Gaudreau, de Québec, avocat renommé en droit maritime.
Le groupe effectuera son étude en deux parties. La première portera sur l'examen du régime au sud du 60e parallèle. Un rapport doit être remis au ministre d'ici la mi-novembre cette année. La deuxième partie de l'étude concerne le transport dans l'Arctique et le transport de substances nocives et dangereuses. On a demandé au groupe de présenter ses conclusions au ministre en septembre 2014.
La sénatrice Unger : Dans vos notes, vous avez affirmé que Transports Canada augmentera le nombre d'inspections afin que tous les navires-citernes étrangers soient inspectés lors de leur première visite au Canada. Je me demande ce qui découle de cette mesure. Avez-vous déjà eu un problème de non-conformité?
M. McDonald : C'est essentiellement ce que nous appelons notre programme de contrôle par l'État du port. Quand des navires étrangers font escale au Canada, nous en inspectons certains en fonction des risques et nous conservons les données conformément à un système que nous avons établi avec nos homologues internationaux. Nous nous assurons ainsi qu'ils respectent la réglementation internationale.
En ce qui concerne les navires-citernes étrangers, nous avons décidé de les inspecter au moment de leur première visite chaque fois que l'un d'eux fait escale au Canada. Par la suite, nous les inspecterons une fois par année s'ils reviennent.
Nous faisons des inspections exhaustives pour vérifier le respect de l'ensemble des règlements internationaux. Si une des normes énoncées dans les diverses conventions n'est pas observée, nous exigerons que les lacunes soient corrigées avant que le navire quitte le port.
La sénatrice Unger : Vous avez dit que vous allez élargir le Programme national de surveillance aérienne. Pouvez- vous nous fournir une explication à ce sujet?
M. McDonald : Oui. Nous avons trois avions pour ce programme. Il y en a un à Moncton et un autre ici, à Ottawa, pour couvrir les Grands Lacs et l'Arctique. Le troisième est à Vancouver. Ces avions survolent régulièrement les principales routes maritimes à la recherche de pollution par des hydrocarbures.
Notre mécanisme de surveillance est très sophistiqué, et nous pouvons même repérer un déversement d'un litre d'huile jusqu'à 25 kilomètres des deux côtés de l'avion.
Nous avons prêté cette technologie aux États-Unis pour les aider à nettoyer le déversement causé par la plateforme Deepwater Horizon.
Nous survolons régulièrement les eaux du pays et, compte tenu de l'annonce de la semaine dernière, nous le ferons encore davantage pour nous assurer qu'elles ne sont pas polluées et, si elles le sont, pour prendre des mesures appropriées contre les responsables.
La sénatrice Unger : Merci.
La sénatrice Seidman : De toute évidence, ces situations d'urgence nécessitent énormément de coordination de la part de nombreux groupes d'intervention — privés, publics, ministériels. Beaucoup de mesures sont prises.
Pouvez-vous nous donner une idée de l'organisme qui dirige réellement les interventions?
M. McDonald : Encore une fois, cela dépend du moyen de transport. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, dans le cas du transport maritime, nous avons mis en place une structure de commandement unifiée qui autorisera la Garde côtière canadienne à superviser toutes les interventions en cas de déversement. C'est quand même l'utilisateur qui est responsable du nettoyage, mais la Garde côtière, si elle doit intervenir, pourra en prendre en charge tous les aspects.
En ce qui concerne le transport ferroviaire, la situation diffère un peu étant donné que diverses juridictions sont concernées. Les chemins de fer ont également des structures de commandement unifié qu'ils peuvent mettre en œuvre en cas de déversement. M. Bourdon ou Mme Dagenais pourraient vous donner plus de détails à ce sujet.
Mme Dagenais : Nous pouvons exécuter notre programme de Plans d'intervention d'urgence pour nous assurer que les responsables agissent en cas de déversement. Conformément à la loi, nous avons le pouvoir d'y soumettre n'importe quelle entreprise.
La sénatrice Seidman : Il y aurait donc un mécanisme de surveillance? C'est encore une fois une chaîne de commandement. En définitive, qui est responsable si l'on doit prendre rapidement une décision? Il y a beaucoup d'intervenants et d'opinions différentes. Quelqu'un a-t-il le pouvoir de dire : « Non, voici ce que nous avons décidé et tout le monde y donne suite »?
Mme Dagenais : Selon la loi, je peux exécuter un plan et insister pour que le CN et le CP en fassent autant. C'est un pouvoir délégué par le ministre au directeur général, Transport marchandises dangereuses.
La sénatrice Seidman : Monsieur McDonald, vous dites que la Garde côtière a également ce pouvoir?
M. McDonald : Elle l'aura dans le cadre de la structure de commande proposée.
Le sénateur Massicotte : J'ai seulement une petite question sur les responsabilités. Encore la semaine dernière, j'ai lu qu'un pipeline avait fui, donnant lieu à des dommages directs de plus de 1 milliard de dollars. Compte tenu de de l'ampleur des dommages qui peuvent être causés, pourquoi nous sentirions-nous à l'aise dans le monde d'aujourd'hui avec une couverture d'une valeur totale de 1 ou 1,3 milliard? Pensons seulement à ce qui s'est produit dans le golfe du Mexique.
M. Haché : Le montant de 1,36 milliard de dollars dont je parlais concernait la pollution par les hydrocarbures persistants causée par un navire-citerne. C'est à cela que sert ce budget.
S'il s'agit d'un déversement provenant d'un pipeline ou d'un wagon, je...
Le sénateur Massicotte : Ce que je veux dire, c'est que lorsque l'on songe aux autres déversements qui ont lieu dans le monde, on ne parle plus de 1 ou 2, mais bien de 8, 10 ou 12 milliards de dollars. Pourquoi donc se contenter de 1,3 milliard de dollars?
M. Haché : Selon les chiffres que j'ai, le plus important déversement a été celui de Prestige, et l'indemnisation a été de 1,4 milliard de dollars.
M. McDonald : En cas de pollution causée par les navires, il y a une limite à la quantité déversée.
Une voix : Qu'en est-il du Valdez?
M. Haché : Le déversement a coûté 4 milliards de dollars.
Le sénateur Massicotte : Il y a 20 ans. En dollars d'aujourd'hui, c'est 8 ou 9 milliards.
M. Haché : C'était 4 milliards de dollars; mais on compare des pommes et des poires ici, en quelque sorte, étant donné qu'il y a eu des dommages-intérêts punitifs. Il n'était pas visé par le système international.
Le sénateur Massicotte : Vous dites que c'est le pollueur qui paie. Selon votre opinion professionnelle, le montant d'assurance est-il encore approprié aujourd'hui?
M. Haché : Nous procédons à l'examen de notre régime de responsabilité et d'indemnisation afin de vérifier s'il est toujours approprié.
Le sénateur Massicotte : Vous pensez qu'il l'est, mais vous n'êtes pas certain.
M. Haché : Tout ce que je peux vous dire, c'est que notre système est l'un des meilleurs au monde. Nous sommes l'un des rares pays à avoir son propre régime national de 160 millions. C'est un système très exhaustif, mais nous tentons toujours de l'améliorer.
Le sénateur Massicotte : Merci.
La sénatrice Ringuette : Vous avez dit qu'à l'heure actuelle, votre seul recours était d'aller devant les tribunaux pour faire imposer des sanctions ou obtenir une indemnisation en vertu de la Loi sur la marine marchande. Depuis 12 ans que la loi est en vigueur, combien de fois êtes-vous allés devant les tribunaux?
M. McDonald : À de nombreuses reprises, mais je n'ai pas le nombre exact avec moi.
La sénatrice Ringuette : Vous êtes allés devant les tribunaux à de nombreuses reprises pour des cas de pollution et de déversements, mais vous avez dit dans votre exposé que votre système était efficace à 99,999 p. 100. Est-ce qu'on parle ici du 0,0001 p. 100 d'incidents?
M. McDonald : La plupart des cas portés devant les tribunaux ont trait à des déversements mineurs provenant de navires, par exemple un séparateur d'eaux mazouteuses qui ne fonctionne pas correctement ou une manipulation inappropriée du pétrole sur un navire. Il ne s'agit certainement pas de déversements importants causés par des navires- citernes.
La sénatrice Ringuette : Ce sont des incidents.
M. Lachance : Ce sont des incidents. Il y a eu des cas où l'on a déversé délibérément des eaux mazouteuses. Ces eaux s'accumulent toujours au fond des navires, et il faut s'en débarrasser. Certaines personnes peu scrupuleuses ont déversé ce pétrole dans l'eau, croyant qu'elles n'étaient pas surveillées.
Notre système de surveillance aérienne nous permet de détecter les déversements, même dans le noir ou dans le brouillard, et nous avons poursuivi les responsables dans certains cas.
La sénatrice Ringuette : Au cours des 12 dernières années, y a-t-il eu des sanctions pécuniaires pour les cas que vous avez mentionnés? Avez-vous plutôt demandé aux responsables de réparer les dégâts, ou avez-vous exigé les deux?
M. Lachance : Nous pouvons aller devant les tribunaux ou imposer des sanctions pécuniaires, et nous avons fait les deux. Dans les cas de déversements opérationnels, comme on les appelle, où quelques litres de pétrole sont déversés en raison d'un débordement des citernes, nous imposons des sanctions administratives pécuniaires.
Dans les cas de déversements délibérés, nous avons poursuivi en justice les responsables.
La sénatrice Ringuette : Vous les identifiez à l'aide des avions dont vous avez parlé?
M. McDonald : C'est notre principal moyen de poursuivre les délinquants.
Le sénateur Wallace : Mme Unger a parlé de l'inspection des navires-citernes au moment où ils entrent dans les eaux canadiennes, et vous avez décrit la marche à suivre.
Avant qu'un navire ne puisse y entrer, je présume qu'il doit passer par un processus de prédédouanement quelconque, par lequel votre ministère revoit ses antécédents, et qu'on ne se contente pas d'attendre qu'il entre au Canada pour faire l'inspection?
M. McDonald : Cela fait partie du programme de Contrôle des navires par l'État du port. Comme je l'ai dit, nous participons au programme en collaboration avec de nombreux pays, et nous partageons des bases de données communes. Lorsqu'un navire que nous ne connaissons pas fait escale dans un port canadien, nous les consultons et pouvons obtenir toutes les données consignées, y compris l'historique des inspections. Grâce à ces renseignements, nous déterminons si les autorités canadiennes doivent prendre des mesures supplémentaires pour inspecter le navire, ou s'il y a matière à préoccupation.
Le sénateur Wallace : Pourriez-vous interdire l'accès d'un navire en fonction de cet examen préalable au dédouanement?
M. McDonald : Nous pouvons faire cela.
Le sénateur Wallace : Comme vous l'avez mentionné, les organismes d'intervention en cas de déversements du Canada sont bien établis, particulièrement sur la côte Est. Selon ce que je comprends, les navires et les terminaux sont aussi dotés d'équipement et de personnel d'intervention en cas de déversement, et plus de ceux des organismes. C'est bien cela?
M. McDonald : Les navires ont à leur bord divers équipements d'intervention en cas de déversement, en fonction de leur chargement.
Le sénateur Wallace : Chaque terminal qui charge ou décharge des cargaisons doit avoir une certaine capacité d'intervention en cas de déversement. N'est-ce pas?
M. Lachance : Oui, cela fait partie des plans d'intervention en cas d'urgence.
Le sénateur Lang : J'aimerais revenir au Programme national de surveillance aérienne. Vous n'avez pas fait mention des satellites ou des drones pour la surveillance.
M. McDonald : Nous utilisons la Constellation RADARSAT et le programme de la Surveillance intégrée de la pollution par satellite, ou SIPPS, d'Environnement Canada pour connaître l'emplacement des navires, ce qui nous permet de survoler les eaux de manière efficace.
On ne part pas à la recherche des navires, mais on établit des cibles. Nous élaborons un plan et déterminons le nombre de navires que nous pouvons surveiller au cours d'un vol. C'est comme cela que nous procédons.
Le sénateur Lang : La Constellation RADARSAT cible les zones de pollution également, n'est-ce pas?
M. McDonald : Je ne connais pas très bien RADARSAT.
M. Lachance : Je crois que oui, mais pas aussi souvent que nos avions.
M. McDonald : Pour pouvoir intenter une action en justice, nous avons besoin des données obtenues à partir de nos vols.
Le sénateur Lang : Pourriez-vous vérifier? Selon ce que je comprends, la Constellation RADARSAT offre une surveillance efficace et a permis d'identifier les pollueurs. Sur la côte Est, on a envoyé la Garde côtière canadienne ou des responsables du MPO faire les arrestations nécessaires en vue de poursuites.
J'aimerais que vous vérifiiez. Il faut tenir compte du risque pour les Canadiens. Il faudrait leur dire comment la Constellation RADARSAT et les milliards de dollars injectés dans le nouveau programme sont utilisés, plutôt que de parler du programme de la Surveillance intégrée de la pollution par satellite que personne ne comprend. Je suggère qu'on décortique le tout et qu'on l'explique aux Canadiens.
M. McDonald : Nous pourrons vous transmettre d'autres renseignements. Comme je l'ai dit, nous utilisons la Constellation RADARSAT, et toutes les poursuites sont intentées par Transports Canada, et non par la Garde côtière canadienne.
Le sénateur Lang : Je suis membre du Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense, et nous avons entendu parler de l'utilisation des satellites dans l'Arctique. On songe également à utiliser les drones, qui coûtent moins cher et sont plus précis.
M. McDonald : Certainement.
Le président : Le sénateur Wallace vous a demandé si vous pouviez interdire l'accès à un navire. Est-ce déjà arrivé?
M. McDonald : Oui.
Le président : Est-ce que cela arrive souvent?
M. McDonald : Non, puisque les navires savent qu'il y a un contrôle par l'État du port. Ils connaissent leur cote. En gros, il y a une liste blanche, une liste grise et une liste noire. Si vous êtes sur la liste blanche, il ne devrait pas y avoir de problème, mais si vous êtes sur la liste grise ou la liste noire, nous vous aurons à l'œil. Les responsables savent que s'ils font escale dans un port canadien, ils seront immobilisés, ce qui leur coûte cher. Ils tâchent de nous éviter et passent par des États dont les régimes sont moins sévères.
Le président : Merci. C'était très intéressant. Je vous remercie tous les cinq de votre présence et d'avoir répondu à nos questions.
M. McDonald : Ce fut un plaisir; merci beaucoup.
Le président : Je propose une motion d'ajournement.
Une voix : La motion est acceptée.
Le président : La séance est levée.
(La séance est levée.)