Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 14 - Témoignages du 27 février 2012
OTTAWA, le lundi 27 février 2012
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C- 10, Loi édictant la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme et modifiant la Loi sur l'immunité des États, le Code criminel, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et d'autres lois se réunit aujourd'hui, à 8 h 34, pour procéder à l'étude article par article du projet de loi.
Le sénateur John D. Wallace (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je déclare la séance ouverte et je voudrais souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs, aux téléspectateurs qui suivent nos délibérations sur le réseau CPAC et aux membres du public qui sont avec nous dans la salle. Je suis John Wallace, sénateur du Nouveau-Brunswick et je suis le président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
Nous sommes réunis aujourd'hui pour reprendre notre étude du projet de loi C-10 qui sera, je crois, la dernière. Avant de commencer, je voudrais profiter de l'occasion pour inviter tous les membres du comité qui ont consacré beaucoup de temps à l'examen de ce projet de loi au cours des quatre dernières semaines, et particulièrement la semaine dernière, à se présenter.
Sénateur Fraser, notre vice-présidente, je vais commencer par vous, si vous voulez bien vous présenter.
Le sénateur Fraser : Comment allez-vous? Je m'appelle Joan Fraser; je suis un sénateur du Québec et, comme l'a dit le président, la vice-présidente de ce comité.
Le sénateur Cowan : Jim Cowan. Je suis un sénateur de Nouvelle-Écosse et leader de l'opposition au Sénat.
Le sénateur Baker : George Baker, Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Chaput : Maria Chaput, Manitoba.
Le sénateur Jaffer : Mobina Jaffer, Colombie-Britannique.
Le sénateur Lang : Dan Lang, Yukon.
Le sénateur Angus : David Angus, du Québec.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Runciman : Bob Runciman, Ontario, Mille-Îles et lacs Rideau.
Le sénateur Frum : Linda Frum, Ontario.
Le président : Comme chacun sait, le projet de loi C-10 est un projet de loi très détaillé et complet qui regroupe les éléments de neuf projets de loi qui ont déjà été présentés au Parlement, mais qui n'ont pas été adoptés. Certains de ces projets de loi antérieurs ont été modifiés sous la forme dans laquelle ils font maintenant partie du projet de loi C-10.
Le projet de loi C-10 englobe un certain nombre de sujets. Il s'agit de la justice pour les victimes de terrorisme, des infractions sexuelles contre les enfants, de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, des peines avec sursis et de la détention à domicile, de la libération conditionnelle, de la suspension du casier, du transfèrement international des délinquants au Canada, du système de justice pénale pour les adolescents, de l'immigration et de la protection des travailleurs étrangers vulnérables. Bien entendu, cela représente un certain nombre de questions et nous sommes tous parfaitement au courant de celles qui font l'objet du projet de loi C-10.
Au cours des quatre dernières semaines, nous avons entendu environ 110 témoins. Nous avons tenu jusqu'ici 11 séances et nous avons siégé en séances publiques pendant une cinquantaine d'heures. Nous en sommes maintenant à l'étape où le comité va poursuivre son étude du projet de loi article par article.
Comme vous vous en souvenez peut-être, nous avons commencé cette étude article par article à notre dernière séance en convenant que l'examen de tout article pourrait, sur demande, être différé jusqu'à aujourd'hui. Nous sommes donc ici aujourd'hui pour reprendre l'étude des articles dont l'examen a été différé, et c'est ce que nous allons faire bientôt.
Avant, je voudrais rappeler certaines choses aux sénateurs. Si à un moment ou à un autre, vous ne savez plus trop où nous en sommes dans le processus, n'hésitez pas à demander des précisions. Je tiens à faire en sorte que chacun d'entre nous sache en tout temps où nous en sommes.
En ce qui concerne la procédure, je tiens à rappeler aux sénateurs que, lorsqu'on propose plus d'un amendement pour un même article, le paragraphe 697(2) du Beauchesne dispose que « Les amendements doivent être proposés suivant l'ordre des lignes du texte à modifier. »
Par conséquent, avant que nous n'examinions un amendement à un article, je vérifierai si d'autres sénateurs avaient l'intention de proposer un amendement modifiant une ligne précédente du même article. Si c'est le cas, ils auront l'occasion de le faire.
Une petite précision : si un sénateur s'oppose à un article en entier, la procédure normale en comité n'est pas d'adopter une motion pour supprimer l'article au complet, mais plutôt de voter contre le maintien de l'article dans la mesure législative. À ce propos, je vous renvoie au paragraphe 698(6) du Beauchesne, qui spécifie qu'un amendement est irrecevable :
S'il ne vise qu'à supprimer un article, puisqu'il suffit dans ce cas de voter contre l'article en question.
J'aimerais également rappeler aux honorables sénateurs que certains amendements proposés peuvent avoir des répercussions substantielles sur d'autres parties du projet de loi. Il est très important que le comité demeure conséquent dans ses décisions et qu'il les applique de façon cohérente dans tout le projet de loi. Je renvoie les sénateurs à la citation 698(2) du Beauchesne, qui dispose que le président ne peut recevoir un amendement :
S'il va à l'encontre ou s'écarte des dispositions du projet de loi adopté jusque-là par le comité, ou s'il contredit une décision que le comité a rendue au sujet d'un amendement antérieur.
Si on se fie à cet énoncé, il serait très utile qu'un sénateur qui propose un amendement indique au comité quels sont les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir une incidence. Autrement, il pourrait être très difficile pour notre comité de demeurer conséquent dans ses décisions.
Notre personnel s'efforcera de consigner les endroits où des amendements subséquents doivent être proposés et nous les signalera. Puisqu'il n'est pas nécessaire de donner un préavis pour proposer des amendements, il peut évidemment ne pas y avoir eu d'analyse préliminaire des amendements pour déterminer ceux qui peuvent avoir des répercussions sur les autres articles ou leur être contraires.
Si des membres du comité ont une question concernant le processus ou le bien-fondé de quoi que ce soit, ils peuvent invoquer le Règlement. La présidence écoutera les arguments, décidera du moment où nous aurons assez discuté de la question de procédure et rendra une décision.
Bien entendu, le comité est le maître de ses travaux dans les limites établies par le Sénat et un sénateur peut interjeter appel d'une décision de la présidence devant le comité en demandant si la décision doit être maintenue.
À titre de président, je ferai de mon mieux pour m'assurer que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole puissent le faire. Cependant, je vais devoir compter sur votre coopération et je vous demande à tous, de vous en tenir aux faits et de parler le plus brièvement possible.
Enfin, je tiens à rappeler aux sénateurs que s'ils ont le moindre doute quant aux résultats d'un vote par oui ou non, ou d'un vote à main levée, la façon la plus harmonieuse d'intervenir, c'est de demander un vote par appel nominal, qui aboutira à des résultats clairs. Les sénateurs savent qu'en cas d'égalité des voix, la motion sera rejetée.
Avez-vous des questions sur ce que je viens de dire? Sinon, je crois que nous pouvons commencer.
Comme je l'ai mentionné au départ, et je sais que vous le savez tous, nous avons entamé notre étude article par article vendredi. Certains articles du projet de loi ont été adoptés et d'autres articles ont été reportés. Les articles que je vais maintenant mettre à l'étude seront ceux qui n'ont pas été adoptés vendredi; autrement dit, ce sont ceux dont l'étude a été reportée vendredi.
Chers collègues, l'article 2 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : J'ai un certain nombre d'amendements concernant la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme et je vais bientôt les proposer, mais je voulais faire connaître mon intention de décrire brièvement la raison d'être de ces amendements. Si vous avez des questions, Mme Galadza, directrice principale, Politiques de la Sécurité nationale est ici et répondra à toute question que les membres du comité pourraient avoir au sujet des amendements proposés.
Le président : Très bien. Avez-vous des exemplaires de vos amendements?
Le sénateur Runciman : Je pensais qu'ils avaient été distribués.
Le président : Tout le monde les a reçus?
Le sénateur Angus : Oui. Ils ont été distribués en anglais et en français comme il se doit, vendredi dernier.
Le président : Oui.
Le sénateur Cowan : Sénateur Runciman, ces amendements sont-ils à peu près les mêmes que ceux que le gouvernement a essayé de présenter en troisième lecture à la Chambre des communes?
Le sénateur Runciman : C'est ce que je crois. Tous les partis ont donné leur accord, mais ils n'ont pas pu être étudiés pour une question de procédure.
Le sénateur Cowan : Oui, car selon le Règlement, il aurait fallu qu'ils soient étudiés en comité?
Le sénateur Runciman : En effet.
Le sénateur Baker : À peu près les mêmes.
Le sénateur Fraser : Là où ils ont été proposés.
Le sénateur Baker : Il y a toute une différence entre « à peu près les mêmes » et...
Le sénateur Runciman : Vous aurez largement l'occasion de le faire.
Le sénateur Cowan : Non, pas exactement. Je ne fais aucune objection; je voulais seulement que ce soit précisé.
Le sénateur Runciman : Vous vouliez que ce soit dit.
Le président : Cet échange me fait penser à une chose que je dois rappeler à chacun d'entre vous. Je suis sûr qu'au fur et à mesure que nous avancerons, vous voudrez répondre à certains arguments. Si vous avez une observation à formuler, comme le sénateur Cowan vient de le faire en s'adressant au sénateur Runciman, pourriez-vous vous adresser à moi au lieu de discuter de part et d'autre de la table? Je l'apprécierais.
Le sénateur Runciman : Monsieur le président, je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 2, à la page 3,
a) Par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« a) l'État étranger — dont d'immunité de juridiction est levée par application de l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États — ou toute entité inscrite ou autre personne »;
b) par substitution, à la ligne 30, de ce qui suit :
« b) l'État étranger — dont l'immunité de juridiction est levée par l'application de l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États — ou toute entité inscrite ou ».
Monsieur le président, c'est un des six amendements qui permettraient aux victimes du terrorisme de poursuivre les États étrangers inscrits sur la liste non seulement pour avoir soutenu le terrorisme comme le prévoyait la loi initiale, mais aussi pour avoir commis directement un acte de terrorisme, ce qui élargit les motifs de poursuite.
Le président : Chers collègues, avez-vous des questions ou des observations à ce sujet?
Le sénateur Baker : Je voudrais féliciter le motionnaire. C'est un excellent amendement et je vais certainement voter pour.
Le président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 2 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 3 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : Voulez-vous que je propose ma motion maintenant?
Le président : Oui.
Le sénateur Runciman : Il est proposé :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à la page 5, par adjonction, avant la ligne 10, du nouvel article suivant :
``3.1 L'article 2 de la même loi est modifié par adjonction, selon l'ordre alphabétique, de ce qui suit :
« activité terroriste » S'entend au sens du paragraphe 83.01(1) du Code criminel dans les cas où l'acte ou l'omission en cause est commis, le 1er janvier 1985 ou après cette date, par un État étranger inscrit sur la liste visée au paragraphe 6.1(2). »
Cet amendement définit, dans la Loi sur l'immunité des États, ce qui constitue une « activité terroriste d'un État étranger inscrit sur la liste. » Cet amendement est nécessaire, car l'immunité des États étrangers inscrits sur la liste sera levée en raison de leurs activités terroristes.
Le président : Vous avez entendu la motion du sénateur Runciman. Avez-vous des questions ou observations?
Le sénateur Baker : Encore une fois, je voudrais féliciter le motionnaire. C'est un excellent amendement que je vais appuyer.
Le président : Merci, sénateur.
Le sénateur Runciman : Je commence à m'inquiéter, monsieur le président.
Le président : Profitez-en tant que cela dure.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Je déclare la motion adoptée.
L'article 3 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 5 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : Monsieur le président, je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 5, à la page 7, par adjonction, après la ligne 6, de ce qui suit :
« (11) L'État étranger inscrit sur la liste visée au paragraphe (2) à l'égard duquel un tribunal compétent a conclu qu'il avait soutenu le terrorisme ne bénéficie pas de l'immunité de juridiction dans les actions intentées contre lui relativement à une activité terroriste à laquelle il s'est livré. »
Cet amendement spécifie dans la Loi sur l'immunité des États que l'immunité d'un État étranger est levée non seulement s'il soutient le terrorisme, mais aussi s'il se livre à des activités terroristes. Cela permettrait à un tribunal canadien d'entendre une action intentée contre un État étranger inscrit sur la liste pour ces raisons, c'est-à-dire le soutien du terrorisme et une activité terroriste.
Le président : Merci, sénateur Runciman.
Chers collègues, vous avez entendu la motion du sénateur Runciman. Avez-vous des questions ou observations?
Le sénateur Baker : Encore une fois, je voudrais féliciter le motionnaire. Cela permet à un tribunal compétent du Canada d'entendre et de juger ce genre de cause. C'est un excellent amendement qui aurait dû être apporté à la Chambre des communes. Je félicite le sénateur de le proposer ici et je vais certainement l'appuyer.
Le président : Merci, sénateur.
S'il n'y a pas d'autres questions ou observations, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté. Je déclare l'amendement adopté.
L'article 5 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Chers collègues, la greffière vient de signaler — et vous l'avez peut-être constaté — que l'article 3 que nous avons déjà étudié, avait pour effet d'ajouter un nouvel article au lieu de modifier un article existant. Je suppose que vous en êtes parfaitement conscients.
Chers collègues, l'article 6 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : Monsieur le président, je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié l'article 6, à la page 7, par substitution, à la ligne 13, de ce qui suit :
« contre lui pour avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste. ».
Cet amendement modifierait le paragraphe 11(3) de la Loi sur l'immunité des États pour ajouter qu'un État étranger inscrit sur la liste ne bénéficie pas de l'immunité à l'égard d'une action intentée contre lui pour s'être livré à une activité terroriste.
Cela veut dire qu'un plaignant qui gagne sa cause pourrait demander au tribunal une injonction, une exécution en nature, ou la récupération d'une terre ou d'un bien contre un État étranger inscrit sur la liste contre qui le jugement a été rendu parce qu'il a soutenu le terrorisme ou s'est livré à des activités terroristes. Au départ, le projet de loi C-10 permettait seulement de le faire si l'État étranger inscrit sur la liste soutenait le terrorisme.
Le président : Merci, sénateur Runciman.
Chers collègues, avez-vous des questions ou des observations concernant l'amendement proposé?
Le sénateur Baker : Encore une fois, cet amendement aurait dû être apporté à la Chambre des communes. La Chambre des communes l'a rejeté. Je suis très content de voir le Sénat prendre cette initiative, de même que le sénateur Runciman. Je suis certain que tous les membres du comité appuieront cet amendement.
Le président : Merci, sénateur.
Plaît-il alors, aux honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Je déclare l'amendement adopté.
L'article 6 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 7 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : Monsieur le président, je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 7, à la page 7 :
a) par substitution, aux lignes 18 et 19, de ce qui suit :
« commerciale, soit par l'État pour soutenir le terrorisme ou pour se livrer à une activité terroriste si celui-ci est inscrit sur la liste »;
b) par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste ».
La partie a) de cet amendement modifierait l'alinéa 12(1)b) de la Loi sur l'immunité des États pour permettre de saisir des biens ressortissant à la compétence du Canada dont un État étranger inscrit sur la liste se sert ou compte se servir pour ses activités terroristes. Au départ, le projet de loi autorisait seulement la saisie des biens que l'État étranger inscrit sur la liste a utilisés ou comptait utiliser pour soutenir le terrorisme.
La partie b) de cet amendement modifierait l'alinéa 12(1)d) de la Loi sur l'immunité des États en ajoutant une nouvelle circonstance dans laquelle les biens d'un État étranger inscrit sur la liste peuvent être saisis, c'est-à-dire en exécution d'un jugement rendu contre un État étranger inscrit sur la liste qui s'est livré à des activités terroristes. Néanmoins, cet alinéa stipule que les biens ayant une valeur culturelle ou historique ne peuvent pas être saisis. Au départ, le projet de loi permettait seulement cette saisie lorsqu'un jugement était rendu contre l'État pour son soutien au terrorisme.
Le président : Merci, sénateur Runciman.
Chers collègues, avez-vous des questions ou observations au sujet de l'amendement proposé?
Le sénateur Baker : Monsieur le président, je suis entièrement d'accord avec cet amendement. Il élargit notre compétence à l'égard des saisies. Cet amendement aurait dû être apporté à la Chambre des communes, mais c'est une bonne chose que le Sénat soit là pour pouvoir le faire. J'appuie le sénateur Runciman et je suis certain que tous les sénateurs feront la même chose.
Le président : Chers collègues, avez-vous d'autres questions ou observations?
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté. Je déclare l'amendement adopté.
L'article 7, modifié, est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Le président : L'article 9 est-il adopté?
Le sénateur Runciman : Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 9, à la page 8, par substitution, à la ligne 28, de ce qui suit :
« contre lui pour avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste. »
Cet amendement modifierait le paragraphe 13(2) de la Loi sur l'immunité des États en précisant que le tribunal peut imposer des sanctions et des amendes à un État étranger inscrit sur la liste qui s'abstient ou refuse de produire un document ou des renseignements dans le cadre de toute action intentée contre lui pour ses activités terroristes. Au départ, le projet de loi ne prévoyait cela que si l'État en question soutenait le terrorisme.
Le président : Merci, encore une fois, sénateur Runciman.
Chers collègues, avez-vous des questions ou des observations?
Le sénateur Baker : Monsieur le président, une fois de plus, j'appuie vivement cette modification nécessaire à la loi.
Le président : Merci, sénateur.
Y a-t-il d'autres questions ou observations?
Le sénateur Runciman : Je tiens à remercier le sénateur Baker de son solide soutien.
Le sénateur Baker : Monsieur le président, cela souligne simplement qu'il est absolument nécessaire que le Sénat corrige une erreur commise par la Chambre des communes ou apporte les modifications nécessaires qui n'ont pas été apportées. C'est là un excellent exemple. Je félicite les ministériels, surtout l'ancien solliciteur général de l'Ontario, de proposer ces amendements. Espérons que la Chambre des communes les acceptera quand nous lui renverrons le projet de loi.
Le président : Merci, sénateur Baker.
Y a-t-il d'autres observations ou questions? Dans ce cas, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Le président : Je déclare l'amendement adopté.
L'article 9, modifié, est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Chers collègues, l'article 21 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Le sénateur Fraser : L'article 21 se trouve à la page 12.
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 23 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 34 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Je demande un vote par appel nominal sur l'article 34, car nous nous y opposons.
Le président : Oui.
Le sénateur Angus : Sans amendement?
Le sénateur Fraser : Cet article ne nous plaît pas du tout.
Shaila Anwar, greffière du comité : L'honorable sénateur Wallace.
Le sénateur Wallace : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Angus.
Le sénateur Angus : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Baker.
Le sénateur Baker : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Boisvenu.
Le sénateur Boisvenu : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Chaput.
Le sénateur Chaput : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Cowan.
Le sénateur Cowan : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Dagenais.
Le sénateur Dagenais : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Fraser.
Le sénateur Fraser : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Frum.
Le sénateur Frum : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Jaffer.
Le sénateur Jaffer : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Lang.
Le sénateur Lang : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Runciman.
Le sénateur Runciman : Oui.
Mme Anwar : Pour : 7; contre : 5.
Le président : Je déclare l'article 34 adopté.
Chers collègues, nous en sommes maintenant à l'article 39. L'article 39 est-il adopté?
Le sénateur Baker : Non. Je voudrais proposer un amendement à l'article 39.
Monsieur le président, il y a quelques amendements à l'article 39 et vous pourriez donc peut-être nous permettre de les distribuer.
Le président : Nous allons prendre un instant pour les faire distribuer.
Le sénateur Baker : Voulez-vous que j'explique mon amendement pendant ce temps?
Le président : Attendons d'avoir les amendements sous les yeux.
Tous les membres du comité ont-ils reçu les amendements que le sénateur Baker va maintenant nous expliquer? Y a- t-il quelqu'un qui ne les a pas?
Sénateur Baker.
Le sénateur Baker : Monsieur le président, je vais parler du premier amendement et je demanderai ensuite au sénateur Fraser d'expliquer le reste des amendements.
Le sénateur Angus : J'invoque le Règlement. Simplement pour que nous comprenions bien, vous avez dit qu'il y avait plusieurs amendements à l'article 39, mais il y en a seulement un dans les documents que j'ai reçus.
Le sénateur Fraser : Il y en a seulement un qui se rapporte à l'article 39.
Le sénateur Baker : Désolé, mais le sénateur Angus a absolument raison, comme d'habitude. Il n'y a qu'un amendement concernant l'article 39, mais nous avons distribué les amendements qui suivent.
Le président : Pour le moment, nous examinons seulement les amendements à l'article 39, alors si vous vouliez bien en parler, sénateur Baker.
Le sénateur Baker : Monsieur le président, cet amendement porte ce qui suit :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 39, à la page 22, par substitution, aux lignes 32 à 34, de ce qui suit :
« infraction désignée et purgé une peine d'emprisonnement d'un an ou plus relativement à cette infraction, ».
Monsieur le président et chers collègues, cela vise à résoudre le problème que pose ce projet de loi lorsqu'une personne est condamnée à une peine minimale obligatoire pour une infraction relativement mineure. Je suppose que vous pourriez l'appeler le piège Tylenol ou Atasol. Pour le moment, cet article se lit comme suit :
[...] dans le cas de substances inscrites aux annexes I ou II, mais sous réserve de l'alinéa a.1), un acte criminel passible de l'emprisonnement à perpétuité [...]
C'est au cas où une personne est reconnue coupable de trafic. Selon la définition, il y a trafic si vous donnez ou vendez à quelqu'un de la codéine, que l'on trouve dans une pilule de Tylenol, par exemple. Si ce médicament vous est prescrit, la loi vous interdit d'en donner à qui que ce soit d'autre.
Comme je l'ai lu au Sénat, des poursuites sont parfois intentées contre une personne qui a donné des comprimés de Tylenol à une autre parce qu'elle avait un mal de tête ou un mal de dents. Cela figure dans la jurisprudence. Cela arrive de temps à autre.
La peine minimale obligatoire s'applique si la personne a été reconnue coupable d'une infraction désignée ou a purgé une peine de prison pour une infraction désignée au cours des 10 années précédentes : autrement dit, si une personne a été reconnue coupable d'une infraction désignée au cours des 10 années précédentes.
Une infraction désignée est une infraction autre que celle visée au paragraphe 4(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui est la simple possession. Si une personne a donné à quelqu'un une cigarette de marihuana et a été condamnée pour cette infraction à une amende, disons de 50 $, même si elle a bénéficié d'une libération conditionnelle, elle a été reconnue coupable. Si au cours des 10 années qui suivent cette personne donne à quelqu'un de la codéine sous la forme d'une pilule de Tylenol, elle sera passible d'une peine minimale obligatoire d'un an.
Nous avons discuté ici hier quant à savoir si deux cigarettes de marihuana suffiraient à commettre cette infraction. Comme l'a souligné l'imminent avocat-conseil Paul Saint-Denis, il faudrait que ce soit un gros joint, car c'est sous réserve de l'alinéa a.1) qui porte que l'objet de l'infraction est une substance inscrite à l'annexe II pourvu que la quantité en cause n'excède pas celle mentionnée à l'annexe VII. Comme il l'a souligné, il est dit à l'annexe VII que vous devez avoir trois kilogrammes de marihuana pour être visé par cette disposition, ce qui représente une cigarette de marihuana d'un gros calibre.
Toutefois, cette disposition s'applique, car si la cigarette de marihuana a été l'objet de la première infraction commise au cours des 10 années précédentes et qu'elle est suivie de la codéine contenue dans la pilule de Tylenol, la personne en question est passible de la peine minimale d'un an. Il est dit ici que si l'infraction est commise dans une université fréquentée par des personnes de moins de 18 ans, dans une école, la peine minimale obligatoire sera de deux ans.
J'estime que c'est très grave et mon amendement prévoit que la peine minimale obligatoire s'appliquera seulement si la personne a été reconnue coupable, au cours des 10 années précédentes, d'une infraction désignée, pour n'importe quelle substance obtenue contrairement au paragraphe 4(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et a purgé une peine d'emprisonnement d'un an ou plus. Selon le ministre et les membres conservateurs du comité, cette loi vise à s'attaquer aux gros trafiquants de drogue. C'est ce qu'on ne cesse de nous répéter. Si c'est le cas, rédigeons la loi en conséquence en précisant que la personne qui a commis l'infraction désignée au cours des 10 dernières années a purgé un an d'emprisonnement ou plus relativement à cette infraction. Cela permettra d'attraper les vrais trafiquants de drogue et non pas les innocents — pas tout à fait innocents. Vous donnez une pilule de codéine que le dentiste vous a prescrite à une autre personne parce qu'elle a un mal de dents. Cela évitera que quelqu'un soit condamné pour une infraction relativement mineure et soit envoyé en prison pendant un an ou deux et que tout cet article soit annulé si la Charte est invoquée.
Monsieur le président, c'est une possibilité. Voulez-vous que tout ce travail soit perdu? Si cet article est adopté tel quel, cela n'arrivera peut-être pas avant deux ans, mais cela finira certainement par arriver. J'ai lu au comité toutes sortes d'exemples de cas où les agents des escouades antidrogues vont dans les endroits où se trouvent les jeunes, habillés comme les jeunes dans le cadre d'une opération. Ils donnent à ces opérations différents noms et vont voir si les jeunes ont de la drogue, ils les invitent à faire un échange et les arrêtent pour trafic parce qu'un simple joint ou une pilule leur a été donné.
L'escouade antidrogue fait son travail. Elle applique la loi. Nous adoptons les lois. À mon avis, et je suis sûr que des agents de l'escouade antidrogue comparaissait devant le comité, ils seraient d'accord pour dire que cela les place dans une situation regrettable. Comme un policier l'a dit au comité : « Je ne porterais pas d'accusation contre quelqu'un qui n'aurait qu'une seule cigarette de marihuana ». En fait, il est allé jusqu'à dire : « Je ne peux pas comprendre qu'un procureur de la Couronne poursuive ce genre de cas. » Je regrette, mais j'ai cité toutes sortes de cas de ce genre. Le policier peut bien dire cela, et je suis d'accord avec lui, mais c'est ce qui se passe et ce n'est pas de la faute de l'escouade antidrogue. C'est de la faute des législateurs et tel est le sens de l'amendement que je propose. Merci.
Le président : Merci, sénateur Baker.
Avez-vous des questions ou observations?
Le sénateur Lang : Monsieur le président, je comprends le point de vue de mon éminent collègue, et quand nous avons commencé nos délibérations au sujet du projet de loi, j'étais d'accord avec ses arguments, mais j'aurais une ou deux choses à dire.
Premièrement, je pense qu'il simplifie les choses et qu'elles sont beaucoup plus compliquées qu'il ne l'a laissé entendre. Je dis cela, car lorsqu'il parle du piège du Tylenol, je ne sais pas s'il a eu l'occasion de lire les nouvelles de la semaine dernière. Un autre jeune est mort, en Colombie-Britannique, après avoir consommé une seule pilule. Je suppose que c'était une pilule d'ecstasy qui contenait d'autres substances chimiques. Cela fait au total, je crois, six morts sur la côte Ouest depuis ces derniers mois. La drogue pose un très grave problème au Canada, surtout les drogues chimiques et je pense que nous devons tous prendre la situation très au sérieux, tout comme le fait certainement mon collègue.
Ce qu'il oublie de mentionner c'est que la loi prévoit une soupape de sûreté pour les tribunaux à savoir les tribunaux de traitement de la toxicomanie si les tribunaux décident d'y déférer la cause compte tenu des circonstances. J'estime donc que ce serait beaucoup plus acceptable pour la personne dont parle le sénateur et dont la situation se situerait entre un cas très grave et un cas moins grave ne justifiant pas la peine obligatoire.
Néanmoins, je suis convaincu que pour faire face à la situation à laquelle nous sommes confrontés, à la fois dans les grandes villes et dans les régions rurales, nous devons avoir des lignes directrices pour faire comprendre aux gens que leurs actes auront des conséquences. J'aurais probablement appuyé cet amendement si nous n'avions pas les tribunaux de traitement de la toxicomanie comme soupape de sûreté et j'estime qu'on a présenté cette loi en tenant compte de ce genre de situation et du fait que les tribunaux ont certains pouvoirs discrétionnaires.
Je ne peux pas appuyer cet amendement.
Le président : Sénateur, quand vous dites que les tribunaux de traitement de la toxicomanie sont une soupape de sûreté, puis-je vous demander ce que vous entendez par là?
Le sénateur Lang : Si je comprends bien, cela permet au juge de renvoyer la cause devant un tribunal de traitement de la toxicomanie au lieu de suivre la procédure normale.
Le sénateur Fraser : Je voudrais apporter un petit éclaircissement. En vertu de ce projet de loi, lorsqu'une personne est renvoyée devant un tribunal de traitement de la toxicomanie, sa peine peut être différée, mais si je comprends bien, une fois que son programme de traitement est terminé, la peine minimale obligatoire s'applique.
Le sénateur Cowan : J'ajouterais, sénateur Lang, qu'il y a seulement six tribunaux de traitement de la toxicomanie au Canada et qu'ils se trouvent dans les grandes villes du pays. Il n'y en aura donc pas dans chacune des villes où ces infractions auront lieu.
Je tiens à revenir sur ce que le sénateur Baker a dit au sujet de l'objectif visé et de l'intention du gouvernement de s'attaquer aux gros trafiquants. Nous poursuivons les trafiquants. Nous ne nous attaquons pas à ceux qui commettent des erreurs comme nous en avons fait tous, surtout lorsque nous étions jeunes — mais peut-être encore. Ce sont les trafiquants que nous pourchassons.
Le danger est que, comme l'a souligné le sénateur Baker, vous pourriez avoir commis deux infractions relativement mineures à 10 ans d'intervalle, ce qui entraînerait une peine minimale obligatoire d'un an, ou de deux ans si l'infraction a lieu au voisinage d'une école ou d'un endroit fréquenté par des jeunes de moins de 18 ans.
Voilà le problème et je pense que ce que le sénateur Baker a proposé est tout à fait raisonnable à savoir que si la première infraction a été punie d'une peine d'emprisonnement, cela veut dire qu'elle a été plus grave et la peine minimale obligatoire s'applique alors.
Toutefois, dans l'exemple que le sénateur Baker a utilisé, l'infraction est relativement mineure — je ne dis pas que les gens devraient faire cela, mais ils le font. Si vous avez commis deux infractions relativement mineures à cet intervalle, je crois qu'il serait déraisonnable et peut-être même inconstitutionnel d'imposer une peine minimale obligatoire.
J'appuie l'amendement du sénateur Baker qui me semble très raisonnable, cohérent et ne va pas à l'encontre de l'intention du gouvernement de s'attaquer aux gros poissons et non pas au menu fretin.
Le président : Chers collègues, au moins un autre sénateur désire faire des observations. La question que le sénateur Fraser a soulevée me rappelle que si certaines questions se posent au sujet de l'interprétation juridique des articles, nous avons avec nous aujourd'hui, comme vous le savez tous, je crois, des fonctionnaires de Sécurité publique Canada, du ministère de la Justice et de Citoyenneté et Immigration Canada. Il y a notamment Mme Catherine Kane, que nous connaissons tous. Nous pouvons faire appel à eux si un membre du comité désire savoir ce qu'ils pensent des commentaires qui sont faits.
Vous avez soulevé une question très importante, sénateur Fraser, et je demanderais à Paul Saint-Denis et Catherine Kane de bien vouloir venir nous rejoindre. Catherine Kane du ministère de la Justice s'est maintenant jointe à nous. Mme Kane est directrice générale et avocate-générale principale, Section de la politique en matière de droit pénal. Il y a aussi M. Paul Saint-Denis, avocat-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal au ministère de la Justice.
Avant de vous demander de répondre à la question que le sénateur Lang a soulevée et à laquelle le sénateur Fraser a répondu, sénateur Lang, aviez-vous une observation à faire à ce sujet?
Le sénateur Lang : Je voudrais répondre au sénateur Cowan. Je pense que c'est important.
Oui, il y a des tribunaux de traitement de la toxicomanie dans les grandes villes, mais il y a aussi des programmes dans des régions rurales du pays qui peuvent également servir à cette fin. Il n'y en a pas dans chaque localité, je suis d'accord, mais ce programme est beaucoup plus vaste que cela n'a été dit jusqu'ici au sujet de cet article. Je me suis renseigné auprès des fonctionnaires du ministère, car cela me préoccupait vu que je représente une région rurale et ils m'ont dit clairement que d'autres programmes peuvent être désignés à cette fin au niveau des provinces, de la région ou des localités rurales du pays.
Je crois important que les gouvernements travaillent en collaboration très étroite, aux niveaux provincial et fédéral, pour offrir ces tribunaux de traitement de la toxicomanie, car le but est d'amener les gens à renoncer à la drogue et à devenir de bons citoyens au lieu qu'ils se retrouvent devant les tribunaux.
Le président : Merci, sénateur Lang.
Madame Kane et M. Saint-Denis, si j'ai bien compris, la question soulevée par le sénateur Lang concernait le cas d'un délinquant reconnu coupable d'une infraction désignée, d'une infraction de trafic sous le coup de l'article 39, qui accepte un traitement, dans le cadre d'un tribunal de traitement de la toxicomanie ou d'un autre programme de traitement de la toxicomanie désigné et approuvé. Si le délinquant suit le traitement avec succès dans un de ces établissements ou un de ces programmes, quelles conséquences cela aurait-il sur la peine minimale obligatoire qui s'appliquerait autrement? Je pense que vous avez entendu l'échange de vues. Qu'en pensez-vous?
Catherine Kane, directrice générale et avocate générale principale, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : La loi prévoit, au paragraphe (5) que si le délinquant suit le programme avec succès, le tribunal n'a pas l'obligation de lui imposer la peine minimale obligatoire. Elle prévoit une exemption pour ceux dont la peine est différée. Ils suivent un programme de traitement de la toxicomanie ou un autre programme de traitement approuvé et ils comparaissent de nouveau devant le tribunal. Selon le modèle de tribunal de traitement de la toxicomanie et certains autres modèles de tribunaux de traitement, souvent, le tribunal fait de nouveau comparaître l'intimé pour voir comment il progresse, mais une fois qu'il a suivi le programme avec succès, le tribunal n'a pas à lui imposer la peine minimale obligatoire. Il peut imposer une autre peine, comme la probation ou une autre mesure appropriée, une peine avec sursis ou aucune peine.
Le président : Monsieur Saint-Denis, avez-vous autre chose à ajouter?
Paul Saint-Denis, avocat-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Non, c'est exact.
Le sénateur Fraser : Ce n'est pas dans ce projet de loi. Dites-vous que c'est actuellement dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances?
Mme Kane : C'est dans ce projet de loi.
Le sénateur Fraser : Où dans ce projet de loi?
Mme Kane : Juste avant l'article 44, vous verrez le reste de la disposition qui modifie les paragraphes (4) et (5) de l'article 10 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.
Le sénateur Fraser : C'est là. Merci. J'ai lu ce projet de loi trop souvent et mon cerveau commence à fatiguer.
Le président : Sénateur Fraser, cela répond-il à votre question?
Le sénateur Fraser : Oui. Je pense quand même que cet amendement vaut la peine d'être appuyé, mais pour ce qui est de cette question juridique, cela y répond. Merci.
Si vous le permettez, maintenant que j'ai la parole, et je ne l'accaparerai pas de nouveau, je crois toujours que cet amendement mérite d'être appuyé, car les programmes de traitement de la toxicomanie s'adressent aux toxicomanes. L'amendement que propose le sénateur Baker s'appliquerait aux personnes qui ne sont pas toxicomanes, qui ont commis une infraction il y a 10 ans, mais qui n'ont peut-être plus consommé de drogue depuis. Ensuite, un week-end, elles offrent un joint à quelqu'un et se font prendre, mais sans être toxicomanes. Bien entendu, ce sont les toxicomanes qui ont besoin des programmes de traitement de la toxicomanie.
Le président : Pourrais-je demander à Mme Kane et à M. Saint-Denis si c'est vrai? Le tribunal pourrait-il envoyer un délinquant en traitement, comme mesure préventive, pour souligner le fléau qu'est la drogue ou pour ce genre de raison? Ou est-ce en fonction de sa dépendance?
M. Saint-Denis : Je dirais que c'est en fonction de la dépendance. C'est l'objectif des tribunaux de traitement de la toxicomanie, mais aussi des programmes de traitement qui s'adressent aux personnes qui ont une dépendance à la drogue. De nombreux trafiquants n'ont pas de problème de dépendance à la drogue, ils trafiquent pour l'argent et ne seraient probablement pas dirigés vers un programme de traitement.
Le sénateur Baker : C'est exactement ce que j'allais dire.
D'autre part, comme l'a mentionné le sénateur Cowan, il y a six tribunaux de traitement de la toxicomanie au Canada. Comme Mme Kane et M. Saint-Denis l'ont souligné, il y a l'autre article du projet de loi selon lequel si vous suivez un programme de traitement avec succès conformément à l'article 720 du Code criminel, il ne suffit pas de suivre ce programme jusqu'au bout; c'est avec l'approbation du procureur de la Couronne et après avoir consulté les victimes éventuelles. Le renvoi à un tribunal de traitement de la toxicomanie n'est pas si simple; le traitement de la toxicomanie fait l'objet de l'article 720 du Code criminel qui prévoit que la Couronne doit donner son accord avant qu'un juge ne puisse même envisager la chose. Mon interprétation est-elle juste?
M. Saint-Denis : La disposition qui existait en 2007 et qui a été modifiée depuis mentionnait que c'était avec le consentement de la Couronne. Elle a maintenant été modifiée et le consentement de la Couronne n'est plus prescrit dans la loi.
Néanmoins, à l'heure actuelle, l'accès aux tribunaux de traitement de la toxicomanie requiert le consentement de la Couronne. Je suppose, et Mme Kane pourra peut-être m'aider, que le consentement de la Couronne est également requis pour les programmes de traitement.
Mme Kane : Pour tout programme de traitement, la personne doit également remplir les conditions d'admissibilité. Il ne suffit pas qu'elle soit reconnue coupable d'une de ces infractions pour avoir droit automatiquement au renvoi devant le tribunal de traitement de la toxicomanie ou un autre programme de traitement. Chaque programme a ses propres conditions d'admissibilité. Si une personne est totalement réfractaire, je ne sais pas quel est le bon terme, mais si elle ne va pas bénéficier du programme, le tribunal peut hésiter à l'y envoyer.
Je préciserais, à propos des six tribunaux de traitement de la toxicomanie dont vous avez parlé, qu'il y en a six qui sont financés par le ministère de la Justice, mais qu'il y en a d'autres au Canada — un à Kitchener, un à Durham, un à London, un à Moose Jaw et un à Calgary — qui sont financés par d'autres moyens. Ce concept est en train de se répandre. En plus des tribunaux de traitement de la toxicomanie, il y a d'autres programmes de traitement auxquels un procureur de la Couronne, un procureur général ou une autre compétence pourrait adresser les délinquants.
Le sénateur Baker : Si vous le permettez, pour que ce soit clair, le projet de loi porte ceci :
[...] afin de permettre à la personne de participer à un programme conformément au paragraphe 720(2) du Code criminel.
Si vous allez au paragraphe 720 (2) du Code criminel, il est dit :
Il peut, si le procureur général et le délinquant y consentent et en tenant compte de l'intérêt de la justice et de toute victime de l'infraction...
Selon mon interprétation, le consentement du procureur général est le consentement du procureur de la Couronne. Ai-je raison ou non?
Mme Kane : Vous avez raison. C'est pour ce qui est prévu à l'article 720, c'est-à-dire pour les programmes de traitement autres que le tribunal de traitement de la toxicomanie. Le procureur général, c'est-à-dire le procureur de la Couronne responsable de la poursuite, doit donner son consentement.
Toutefois, comme l'a souligné M. Saint-Denis, la loi a été modifiée et le consentement de la Couronne a été supprimé dans une version précédente du projet de loi.
Le sénateur Baker : Néanmoins, dans cet article du projet de loi, il est dit que c'est conformément au paragraphe 720(2) du Code criminel, lequel exige la permission, le consentement du procureur de la Couronne.
Mme Kane : Je n'ai peut-être pas été assez claire. C'est exact, mais c'est pour les programmes autres que le tribunal de traitement de la toxicomanie.
Le sénateur Baker : Absolument. Je ne parle pas du tribunal de traitement de la toxicomanie. C'est vous qui avez parlé des autres programmes de traitement de la toxicomanie et je souligne simplement qu'il faut l'approbation du procureur de la Couronne et qu'il y a d'autres conditions à remplir pour être admissible.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J'aurais un commentaire sur les propos de certains sénateurs qui ont dit que l'objectif était d'attraper les gros vendeurs. D'après mes observations et suite à mes rencontres avec des jeunes dans les écoles, je constate que le modèle n'est plus que les gros trafiquants vendent de la drogue à des jeunes. Lorsqu'on se réfère à l'image du Tylenol, je crois qu'on généralise une problématique majeure. Le modèle aujourd'hui consiste à vendre des drogues non plus à des adolescents mais à des enfants. La drogue se vend désormais à l'école primaire, en cinquième et sixième années. C'est la nouvelle clientèle. L'adulte se sert de jeunes souvent âgés de 16, 17, 18 ou 19 ans pour vendre de la drogue à des enfants de huit ou neuf ans. Voilà le modèle. Même si le projet de loi ne s'attaquait qu'aux plus gros vendeurs, le problème n'est plus là. On fait affaires avec des réseaux de trafiquants, des adultes qui se servent d'adolescents ou de jeunes majeurs pour vendre de la drogue à des enfants.
Ce projet de loi ne vise pas que les gros vendeurs. Il vise une problématique qui est un des éléments du décrochage scolaire, soit l'usage de drogue à très bas âges. Il faut faire attention avant de banaliser et ouvrir des portes à des gens qui se glisseront à travers les mailles. Le projet de loi ne viserait alors pas l'objectif initial.
Je dicterais la prudence sur ce point pour faire en sorte de ne pas créer de telles ouvertures. C'est le propre des criminels, et surtout des vendeurs de drogue, lorsqu'une petite ouverture apparaît dans le Code criminel, que de se glisser à travers les mailles.
[Traduction]
Le sénateur Lang : Pour faire suite à ce qu'a dit le sénateur Boisvenu, je pense vraiment que nous devons veiller à ne pas minimiser le problème auquel nous sommes confrontés, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire. Ce qui se passe dans les cours d'école est très grave, souvent chez les jeunes est très grave et nous en constatons malheureusement les résultats.
J'ai deux autres choses à dire. Je tiens à souligner que selon les témoignages que nous avons reçus au cours des quatre dernières semaines, il est clair que les policiers ne pourchassent pas ceux qui ne font pas de trafic et qu'ils n'ont pas le temps de le faire.
Ils sont là pour appréhender les individus qui s'en prennent à leurs frères, sœurs et amis et pour veiller à ce qu'ils en assument les conséquences.
Je dirais également à mon éminent collègue de Terre-Neuve-et-Labrador qu'il faut aussi prouver le trafic. C'est le revers de la médaille. Il ne suffit pas d'arrêter quelqu'un. Il faut aussi présenter au tribunal une cause légitime.
Par conséquent, ce n'est pas aussi évident et je pense que nous simplifions trop le problème.
Je voudrais apporter un rectificatif à ce qu'a dit M. Saint-Denis à propos des tribunaux de traitement de la toxicomanie et de la façon dont cet article s'applique. Ce n'est pas réservé aux toxicomanes; cette disposition peut également être utilisée pour les trafiquants. C'est clairement énoncé dans les notes explicatives se rapportant à cet article. Là encore, la décision revient au tribunal et dépend de la gravité du cas. C'est une autre mesure de déjudiciarisation, si vous voulez, de justice réparatrice qui permet aux tribunaux d'exercer ce pouvoir discrétionnaire en tenant compte de la gravité des infractions qui sont commises un peu partout dans le pays.
Nous n'agissons pas contre ces infractions simplement parce que quelqu'un a pensé que c'était une bonne idée. Cela pose un sérieux problème au Canada, un problème vraiment grave. Il n'est pas abordé de façon cohérente, car la drogue est traitée à la légère dans certaines régions par rapport à d'autres. Nous pouvons dire que le Parlement a la responsabilité d'établir au moins des règles uniformes à l'échelle du pays quant aux conséquences auxquelles on s'expose. Nous avons appris ici, au cours des témoignages, que des personnes qui ont été arrêtées en Nouvelle-Écosse ont demandé à être jugées en Colombie-Britannique. C'était non pas à cause du climat, mais en raison de la façon dont le système judiciaire considère ce genre de cas en Colombie-Britannique.
Monsieur le président, je dirais de nouveau à mon éminent ami de Terre-Neuve-et-Labrador qu'à mon avis, la soupape de sûreté qu'il recherche est là, mais que le délinquant a la responsabilité de suivre ce cours avec succès pour comprendre ce qu'il fait à la société.
Le président : Merci, sénateur Lang. Vous avez apporté un éclaircissement et j'adresse cette question à Mme Kane ou à M. Saint-Denis. L'article 39 concerne le trafic de certaines drogues plutôt que leur production, importation ou exportation qui fait l'objet d'autres articles. L'article 39 porte sur le trafic.
Les substances inscrites à l'annexe II qui font l'objet d'un trafic comprennent le cannabis ou la marihuana. Pouvez- vous confirmer, l'un ou l'autre, si une quantité minimum de cannabis ou de marihuana doit avoir fait l'objet du trafic pour que la peine minimale obligatoire s'applique?
M. Saint-Denis : Oui, monsieur le président. La quantité minimum doit être de plus de trois kilogrammes pour que la peine minimum soit imposée. La peine minimum prévue en cas de trafic ne s'applique pas si la quantité est de trois kilogrammes ou moins.
Le président : Merci pour cette précision.
Le sénateur Jaffer : Y a-t-il des programmes de traitement de la toxicomanie auxquels on peut accéder facilement et quels sont les délais d'attente?
Mme Kane : Je ne sais pas quels sont les délais d'attente et la disponibilité. Tel qu'indiqué, il y a les six programmes qui sont financés par le ministère. Il y en a d'autres qui commencent à apparaître et je suppose que les délais d'attente varient et dépendent de l'admissibilité. Si vous désirez des renseignements supplémentaires, nous pourrions voir quels sont ceux que nous pourrions obtenir et vous les fournir.
Le sénateur Cowan : Personne ne prétend ou ne laisse entendre que les infractions graves dont le sénateur Boisvenu a parlé ne seraient pas punies d'une peine de prison et c'est certainement le genre de cas auxquels nous voulons nous attaquer. Cela viserait aussi le genre de situations dont le sénateur Baker a parlé. J'ajouterais que le trafic n'est pas seulement celui auquel nous pensons normalement, c'est-à-dire la vente organisée d'un stupéfiant ou d'une substance contrôlée. Cela comprend, comme la jurisprudence en témoigne très clairement, le fait de donner, de proposer ou de dire simplement : « Peux-tu garder cela pour moi un instant. » C'est du trafic. Si je vous offre de la drogue sans rien exiger en échange, sans demander d'argent ou quoi que ce soit en retour, c'est du trafic. Même si vous dites non, c'est du trafic.
Le président : Nous avons un certain nombre d'amendements à étudier. Je comprends votre argument, sénateur. Si les sénateurs n'ont pas de nouvelles questions à soulever, si nous pouvions nous limiter à cela, ce serait une bonne chose. Si vous avez des questions ou des préoccupations au sujet de ce qui constitue légalement un trafic ou d'autres interprétations juridiques, je suggère que nous les adressions aux fonctionnaires. Vous avez peut-être certaines idées à ce sujet, mais au lieu que nous émettions nos propres opinions au sujet de la légalité de certaines dispositions, ils peuvent le faire pour nous.
Le sénateur Baker va faire une dernière observation à ce sujet.
Le sénateur Baker : Pour conclure, j'ai lu des milliers de jugements concernant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, des milliers d'audiences de détermination de la peine au cours des années. Le problème souligné ici, monsieur le président, est la définition du trafic. Le trafic est parfois établi à partir de quelques traces de substance. Notre objection concerne la définition. C'est notre principale objection. Nous avons essayé d'y remédier il y a deux ans. Nous avions huit annexes concernant la drogue et nous en avons dressé la liste. Les plus dangereuses figuraient en tête de liste et les autres suivaient selon leur dangerosité. Que fait ce projet de loi? Il regroupe tout ce qui restait. Il n'y a plus que trois ou quatre annexes. Il regroupe tout dans l'annexe I, sauf la marihuana qui figure maintenant à l'annexe II. Tel est le problème avec lequel nous nous retrouvons.
Monsieur Saint-Denis a déclaré que, pour appliquer la peine minimale, il faut que la quantité de drogue soit de trois kilos, qu'il s'agisse de cannabis ou de marihuana. C'est exact s'il s'agit de la deuxième infraction qui déclenche la peine minimale obligatoire, mais la première infraction peut concerner un simple joint. Autrement dit, nous avons deux infractions, une qui a été commise au cours des 10 dernières années et l'autre qui déclenche la peine minimale obligatoire. La peine minimale obligatoire est déclenchée par la drogue visée à l'annexe I. La marihuana et le cannabis sont visés à l'annexe II.
Pour conclure, en ce qui concerne la détermination de la peine, j'ai lu des milliers de jugements et je peux assurer aux membres du comité qu'à mon avis, chaque juge utilise la jurisprudence pancanadienne et se réfère à cette jurisprudence pour déterminer la peine à imposer.
Pour ce qui est de l'infraction de trafic, l'actus reus est le mens rea, pourrait-on dire, car si je vous donne un comprimé de Tylenol 3 qui contient de la codéine et qui m'a été prescrite parce que vous avez mal à la tête, je trafique une substance visée à l'annexe I, qui est la codéine. C'est la loi. Nous ne pouvons pas dire que nous comptons sur les policiers pour ne pas porter d'accusation. Nous ne pouvons pas faire cela. Nous devons établir la loi et les policiers suivent la loi. Ils ne peuvent pas simplement dire : « Comme c'est une petite quantité, nous n'allons pas vous accuser. » Excusez-moi? La loi, c'est la loi. Vous devez porter l'accusation. Si vous dites à un procureur de la Couronne : « Vous avez le choix. Vous n'êtes pas obligé de tenir compte des antécédents d'une personne », dans quelle situation placez- vous les procureurs au Canada?
C'est tout ce que j'avais à dire. Je suis certain que chacun des membres de ce comité appuiera cet amendement important.
Le président : Merci, sénateur Baker. Je crois que cela met fin au débat sur l'amendement du sénateur Baker.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : D'après les réponses que j'ai entendues, je déclare l'amendement rejeté.
Le sénateur Baker : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L'article 39 est-il adopté?
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 41 est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Fraser : Il est proposé :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 41, à la page 24, par substitution, à la ligne 37, de ce qui suit :
« supérieur à vingt, ».
[Traduction]
En anglais, je propose :
That Bill C-10 be amended in clause 41, on page 24, by replacing line 40 with the following :
``than 201 and more than 20, and the''.
Voudriez-vous que je vous explique mon raisonnement?
Le président : Si vous le voulez bien, sénateur.
Le sénateur Fraser : Je pense qu'en général, une bonne partie de la discussion que nous venons d'avoir s'applique à tout ce qui est en rapport avec cet article du projet de loi et nous n'avons donc pas à répéter tout cela.
L'amendement porterait à 20 le nombre de plants de marihuana que l'on peut cultiver sans risquer d'être arrêté et condamné à une peine minimale obligatoire d'emprisonnement au lieu de 5 comme le prévoit actuellement le projet de loi. Vingt n'est pas un chiffre choisi au hasard. C'est un nombre que nous avons déjà proposé. Comme vous vous en souviendrez peut-être, si vous étiez ici à ce moment-là, la dernière fois que nous avons proposé cet amendement, le sénateur Baker a mentionné que la réglementation du gouvernement du Canada à l'égard de l'accès à la marihuana à des fins médicales permet d'émettre des permis pour cultiver jusqu'à 25 ou 30 plants pour son usage personnel à des fins médicales. Cet amendement ne va pas aussi loin. Il limiterait le nombre à 20 ce qui éviterait qu'il s'applique aux gros producteurs. Nous avons entendu la police dire qu'elle n'arrêterait probablement pas une personne qui ferait pousser seulement six plants. Je trouve très étrange d'adopter une loi alors que la police dit qu'elle ne va probablement pas l'appliquer.
Par conséquent, nous estimons souhaitable de porter le nombre de plants à 20, mais je précise que nous maintenons le nombre de plants autorisés le plus bas, car vous n'êtes pas censé cultiver de la marihuana. Néanmoins, ce projet de loi n'interviendrait pas, en général, s'il y a moins de 20 plants, mais nous maintenons la limite à 5 plants s'il y a des circonstances aggravantes.
Par conséquent, si quelqu'un fait pousser cinq plants dans des circonstances dangereuses ou douteuses, présentant un risque pour la santé ou la sécurité de personnes de moins de 18 ans ou créant un risque d'atteinte à la sécurité publique dans un secteur résidentiel ou si la personne a mis des trappes, appareils ou autres choses susceptibles de causer la mort ou des lésions corporelles à autrui — cette disposition viserait particulièrement ceux que nous considérons comme les méchants — l'amendement que nous proposons assujettirait toujours ces personnes à la limite la plus basse quant au nombre de plants autorisés. Toutefois, pour les gens ordinaires, nous proposons de porter ce nombre à 20 plants.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
Avez-vous des questions ou observations?
Le sénateur Lang : J'ai deux observations. Sauf erreur, et je ne vais pas retracer l'historique du projet de loi, le Parlement en a été saisi depuis un certain nombre d'années et il en a longuement discuté dans les deux Chambres. Sauf erreur, je crois qu'une modification a été apportée il y a quelques années pour fixer la limite à cinq plants. À ce stade, il faut examiner sérieusement les intentions de l'intéressé.
Il faut souligner, une fois de plus, qu'on peut minimiser le problème, en parler en termes généraux ou bien en parler de façon précise. Nous avons reçu des témoignages selon lesquels cinq plants ou plus pourraient valoir dans la rue au voisinage de 15 000 $. Dans certains cas, je crois avoir entendu des chiffres allant jusqu'à 25 000 $ pour ce qui est du trafic.
Je comprends le point de vue de ma collègue, mais je ferais également valoir qu'il faut fixer une limite. Les arguments et les raisons invoqués pour l'établir à cinq plants me semblent justifiés. Cela accorde une certaine indulgence à l'étudiant dont vous parlez, car je crois que cela nous préoccupe tous. Je ne pense pas que qui que ce soit ici tienne à envoyer quelqu'un en prison juste pour le plaisir. Le but de ce projet de loi est de punir les trafiquants comme ils le méritent. J'estime que cette limite est raisonnable compte tenu des témoignages que nous avons reçus et de la valeur marchande de cette drogue.
Mon autre observation concerne les personnes qui détiennent un permis médical de consommation. Je sais que dans certains cas, quelqu'un peut consommer de la marihuana de façon constante. C'est surtout comme médicament contre la douleur. Dans ce cas, il est certain que ces personnes consommeront beaucoup plus de cette drogue que les autres si elles détiennent un permis légitime et si elles en ont besoin pour tenir jusqu'à la fin de la journée. Je ne pense pas que vous puissiez comparer les deux cas, car la comparaison n'est pas juste. Nous avons là deux utilisations et deux situations distinctes.
Je comprends vos arguments, mais compte tenu de la discussion qui a eu lieu à la Chambre par le passé, ainsi qu'au Sénat, je pense que nous sommes parvenus à un compromis raisonnable.
Le président : Merci, sénateur Lang.
Y a-t-il d'autres questions ou observations?
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le président : Chers collègues, d'après ce que j'ai entendu, je déclare l'amendement rejeté.
L'article 41 est-il adopté?
Des voix : Avec dissidence.
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 42 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 43 est-il adopté?
Le sénateur Jaffer : Monsieur le président, je voudrais en parler.
Vous avez, je crois, sous les yeux, mon amendement concernant l'article 43. Je suggère d'ajouter, à l'article 43, page 27, un paragraphe 6 après le paragraphe 5 qui porte sur la peine minimale. Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 43, à la page 27, par adjonction après la ligne 11, de ce qui suit :
« (6) Le tribunal qui détermine la peine à infliger à une personne reconnue coupable d'une infraction prévue par la présente partie pour laquelle la loi prescrit une peine minimale d'emprisonnement n'est pas tenu d'infliger cette peine s'il estime :
a) qu'il existe des circonstances exceptionnelles liées à la perpétration de l'infraction ou à la situation du délinquant;
b) que l'imposition de la peine minimale d'emprisonnement, eu égard aux circonstances, serait excessive ou déraisonnable. »
Honorables sénateurs, c'est ce que nous avons entendu souvent, de la bouche de bien des gens, de l'Association du Barreau canadien et bien d'autres, y compris le juge Nunn. Comme chacun sait, le mérite de la teneur du projet de loi C-10 revient, en grande partie, au juge Nunn et ce dernier nous a dit qu'il n'était pas pour les peines minimales obligatoires. Je ne dis pas qu'elles ne devraient pas se trouver là. Ce que je voudrais faire comprendre au comité c'est que, dans certaines circonstances exceptionnelles, nous laissons au juge une certaine discrétion pour la détermination de la peine, même si le projet de loi impose des peines minimales obligatoires.
Cet amendement a pour effet de ne pas lier les mains du juge avec les dispositions relatives aux peines minimales obligatoires que prévoit le projet de loi C-10, et c'est seulement en ce qui concerne ce projet de loi — je ne parle pas du tribunal pénal, mais des effets de cet amendement sur le projet de loi C-10 — et de permettre au juge de tenir compte de facteurs qui rendraient cette peine excessive ou déraisonnable pour imposer une autre forme de peine ou une peine moins sévère.
Monsieur le président, vous savez qu'un grand nombre de témoins, notamment l'Association du Barreau canadien et Aboriginal Legal Services of Toronto voulaient une soupape de sûreté s'appliquant à toutes les peines minimales obligatoires qui figurent actuellement dans le Code criminel. Ils ont souligné que de nombreux autres pays en ont, notamment le Royaume-Uni, l'Australie et les États-Unis.
Pour que ce soit bien clair, monsieur le président, l'Association du Barreau canadien nous a suggéré de modifier l'article 718 du Code criminel, tout l'article sur les peines minimales obligatoires.
Ce n'est pas ce que je propose. Je propose de modifier l'article 43, simplement dans ce projet de loi pour donner au juge, dans des circonstances exceptionnelles, le choix de ne pas imposer la peine minimale obligatoire.
Tel est mon amendement.
Le président : Merci, sénateur Jaffer.
Le sénateur Angus : J'invoque le Règlement. Pour que ce soit bien clair, nous sommes saisis de trois amendements concernant l'article 43. Est-ce vous qui les proposez tous les trois, sénateur Jaffer, ou lequel des trois? Ils sont étiquetés, libéral 3, libéral 4 et libéral 5.
Le sénateur Jaffer : Sénateur Angus, merci de demander cette précision. C'est par mesure de prudence et j'espère que mes collègues seront d'accord avec moi et appuieront cet amendement qui est là comme soupape de sûreté. Si nous n'arrivons pas à nous mettre d'accord pour une raison quelconque, nous passerons alors à l'autre amendement.
Le sénateur Angus : Celui dont nous parlons maintenant est-il le premier, Libéral 3?
Le sénateur Jaffer : C'est exact.
Le sénateur Angus : Merci beaucoup.
Le président : Est-ce celui qui se termine par 6b)?
Le sénateur Jaffer : C'est exact.
Le président : Merci, sénateur Angus.
Y a-t-il des questions ou observations?
Le sénateur Lang : Monsieur le président, j'ai l'impression que si nous appuyons cet amendement, cela aura pour effet de supprimer l'obligation d'imposer la peine minimale obligatoire. C'est ainsi que je l'interprète.
Je vois le sénateur Cowan hocher la tête. Cela laisse pleinement cette possibilité au tribunal et tel n'est pas le but des peines minimales obligatoires. Les peines minimales obligatoires sont là pour faire comprendre ce que le Parlement et la société pensent de ce type d'infractions. Si nous appuyons cet amendement, nous allons laisser les peines minimales obligatoires entièrement à la discrétion des tribunaux.
Personnellement, je ne peux pas appuyer cet amendement, car je suis convaincu que le Parlement n'a pas établi de principes moraux depuis un certain nombre d'années. Nous avons entendu jour après jour, semaine après semaine, des témoignages de victimes se plaignant de ne pas avoir obtenu justice. Nous avons également entendu parler du manque d'uniformité des peines imposées dans les différentes régions du pays. Je ne suis pas là pour critiquer la magistrature; je suis là pour dire que nous devons établir une peine minimale pour faire comprendre la gravité de cette épidémie dont notre société est témoin depuis quelques années. Il faut prendre des mesures. Je ne peux donc pas appuyer l'amendement.
Le président : Merci.
C'est au tour du sénateur Frum, qui sera suivie du sénateur Fraser et du sénateur Cowan.
Le sénateur Frum : Je suis d'accord et j'appuie tout ce qu'a dit mon collègue. Je répète qu'il est important de ne pas oublier que les peines minimales obligatoires que prévoit ce projet de loi s'appliquent aux crimes graves avec violence, surtout contre des enfants. Ces peines sont appropriées et non pas excessives, surtout pour ce qui est des crimes contre les enfants. Comme l'a souligné le sénateur Boisvenu, le trafic de drogue est en grande partie également un crime contre les enfants. Mon collègue a fait valoir que si c'est de nouveau laissé entièrement à la discrétion du juge, cela ira à l'encontre de l'objectif de ce projet de loi et que ce projet de loi est là pour protéger les enfants.
Le sénateur Fraser : Cet amendement est plus modeste que ne le pensent certains de mes collègues. Il s'appliquerait seulement aux dispositions du projet de loi C-10 concernant les drogues et autres substances. Il ne s'appliquerait pas à la partie du projet de loi C-10 relative aux infractions sexuelles contre des enfants. Les pays auxquels nous nous comparons régulièrement, les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni, ont tous des soupapes de sûreté générales dans leurs lois qui prévoient des peines minimales obligatoires. C'est parce que vous ne pouvez jamais, quand vous rédigez une loi, envisager les cas les plus extrêmes.
Nous avons discuté, récemment, autour de cette table de l'affaire Smickle, à Toronto, qu'aucun de ceux qui ont rédigé la loi en vertu de laquelle il a été accusé n'aurait jamais envisagée. Ce n'était pas le genre de cas que les législateurs avaient envisagés lorsqu'ils ont rédigé la loi en y insérant une peine minimale obligatoire.
Bien entendu, il faudrait qu'il y ait des circonstances exceptionnelles. Les peines minimales obligatoires continueraient de s'appliquer et ce que le sénateur Lang a appelé, je crois, les principes moraux, seraient clairs. Néanmoins, dans des circonstances exceptionnelles, c'est-à-dire qui ne correspondent pas à la situation générale à laquelle ce projet de loi vise à remédier, il y aurait une soupape de sûreté que je crois tout à fait appropriée et qui correspondrait à ce que font les pays comparables au nôtre.
Le sénateur Cowan : J'ajouterais brièvement à ce sujet que nous avons toujours la Charte. Si un juge estime que dans les circonstances une peine minimale obligatoire serait une punition cruelle et inhabituelle, il ne l'appliquera pas. Comme l'a dit le sénateur Fraser, nous ne parlons pas ici des cas les plus graves; nous parlons des cas les moins graves pour lesquels une peine minimale obligatoire serait imposée. Il s'agit du genre de circonstances dont le sénateur Baker a parlé tout à l'heure au sujet d'une proposition d'amendement précédente. Il s'agit simplement de laisser cela à la discrétion du juge dans des circonstances exceptionnelles. Nous ne supprimons ou n'éliminons absolument pas le régime de peines minimales obligatoires. Il s'agit seulement de prévoir une soupape de sûreté qui, comme l'a dit le sénateur Fraser, existe dans les autres pays comparables au nôtre. J'estime que c'est un amendement parfaitement raisonnable qui ne nuirait en rien à l'approche que le gouvernement adopte à l'égard des peines minimales obligatoires.
Le sénateur Lang : Je répondrais ceci, car nous venons d'expliquer pourquoi nous n'avons pas appuyé les amendements précédents, et cela pour deux raisons. La première est que les autorités nous ont permis de croire — peut- être pas suffisamment pour certaines personnes autour de cette table — qu'elles ne sont pas là pour poursuivre ceux qui fument un joint de marihuana, mais pour s'attaquer à ceux qui font le trafic de la drogue en bande organisée et qui mènent ce genre d'activité devant les portes des Canadiens.
Deuxièmement, je dirais encore une fois que la soupape de sûreté dont vous parlez est, en ce qui me concerne, le tribunal de traitement de la toxicomanie. Les tribunaux ont cette possibilité. Vous avez parlé de l'unique pilule de médicament. Comme je l'ai souligné, nous avons eu six décès sur la côte ouest ces derniers mois à cause d'une pilule qui a été donnée à quelqu'un qui ne savait pas de quoi il s'agissait et voilà des familles dont la fille ou le fils est mort, tout le chagrin causé sous le prétexte d'un « amusement inoffensif ». Ce n'était pas un amusement inoffensif.
Nous avons la soupape de sûreté dont le sénateur Fraser a parlé. Elle est là, mais il y a des conséquences à assumer. Pour bénéficier de cette soupape de sûreté, vous devez suivre un programme pour bien comprendre ce que vous avez fait et pourquoi vous ne pouvez pas recommencer.
Le sénateur Angus : Je serai bref. Pour compléter ce qu'a dit le sénateur Lang, je vais me reporter à ce qu'ont dit le sénateur Cowan et le sénateur Fraser. Comme le sénateur Lang vient de le décrire, la soupape de sûreté est les tribunaux de traitement de la toxicomanie. Il y a aussi, comme l'a dit le sénateur Cowan, un recours en vertu de la Charte. Dans des circonstances exceptionnelles, vous avez tous les deux employé les expressions « soupape de sûreté » et « circonstances exceptionnelles ». Nous avons eu une jurisprudence récemment en Ontario ainsi qu'un certain nombre de cas au Québec. C'est à cela que sert la Charte. En cas de lacunes, de résultats extraordinaires ou de conséquences inattendues, nous avons une soupape de sûreté et j'estime que c'est tout ce dont nous avons besoin.
Le sénateur Jaffer : Pour ce qui est des tribunaux de traitement de la toxicomanie, si j'ai bien compris, ce sont les personnes qui ont un grave problème de dépendance qui y vont. Nous ne parlons pas ici de personnes qui seraient admissibles à ces tribunaux.
Sénateur Lang, je suis d'accord avec vous pour dire que nous essayons d'établir des principes moraux, et c'est pourquoi nous avons les peines minimales obligatoires. Ce que je propose, c'est de conserver les peines minimales obligatoires, mais que dans des circonstances exceptionnelles, le juge ait une soupape de sûreté. Le juge saura qu'il y a des peines minimales obligatoires, mais dans des circonstances exceptionnelles, il devra trouver la solution qui convient pour le délinquant qu'il a devant lui. C'est ce qu'on fait généralement dans l'ensemble du pays et je demande que nous tenions compte de la situation de la personne qui se trouve devant le juge et que nous donnions un peu de liberté au juge.
Le président : Je crois que cela termine notre discussion au sujet de l'amendement que le sénateur Jaffer a proposé.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Non.
Des voix : D'accord.
Le président : Chers collègues, d'après ce que j'ai entendu, je déclare l'amendement rejeté.
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Rejeté, avec dissidence.
L'article 43 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
[Français]
Le sénateur Chaput : J'aurais un amendement à proposer. Il vise les délinquants autochtones. Vous l'avez devant vous et il se lit comme suit :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 43, à la page 27, par adjonction, après la ligne 11, de ce qui suit :
« (6) Le tribunal qui détermine la peine à infliger à une personne reconnue coupable d'une infraction prévue par la présente partie n'est pas tenu d'infliger une peine minimale d'emprisonnement s'il est convaincu que, à la fois :
la personne à qui la peine est infligée est un délinquant autochtone;
la peine serait trop sévère compte tenu de la situation du délinquant;
il est possible d'infliger une autre peine et que celle-ci et raisonnable dans les circonstances.
(7) Le tribunal qui décide, en vertu du paragraphe (6), de ne pas infliger une peine minimale d'emprisonnement est tenu de préciser sa décision. »
Honorables sénateurs, à mon humble avis, cet amendement s'impose à la lumière des témoignages entendus par le comité. Il est clair que le système carcéral canadien n'adresse pas la criminalité de la manière souhaitée dans les communautés autochtones du Canada. Les citoyens autochtones sont surreprésentés dans la population carcérale et c'est inquiétant. Alors qu'ils représentent quatre p. 100 de la population canadienne, dans les prisons, ce pourcentage augmente à 20 p. 100.
Il faut appliquer des mesures qui fonctionnent et qui contribuent réellement à la baisse de la criminalité et l'amélioration de la sécurité des communautés autochtones du Canada.
Cet amendement vise aussi à respecter les efforts locaux et communautaires déployés pour combattre la criminalité dans les communautés autochtones. On a entendu parler de projets pilotes qui réussissent à combattre la criminalité et on n'a qu'à penser au témoignage du ministre du Nunavut.
Compte tenu de tout ceci, l'amendement abonde aussi dans le sens de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Gladue, 1999.
L'amendement respecte toujours l'objet du projet de loi C-10. Le juge qui décide de ne pas infliger une peine minimale d'emprisonnement est tenu de motiver sa décision. Les juges sont simplement tenus à considérer leur réalité.
C'est l'amendement que je propose.
[Traduction]
Le président : Merci, sénateur Chaput. Pour être sûrs que nous examinons tous le même amendement, comme le sénateur Angus l'a mentionné tout à l'heure, nous avons reçu trois amendements qui pourraient se rapporter à cet article 43, à la page 7, qui sont désignés comme « Lib 3 », « Lib 4 » et « Lib 5 ». Celui que nous examinons maintenant est « Lib 4 »?
Le sénateur Chaput : Oui.
Le président : Avez-vous des questions ou des observations au sujet de cette motion?
Le sénateur Frum : Ma première réaction est que je ne vois aucune raison de croire que ce projet de loi cible particulièrement les Autochtones. Par conséquent, si une exception est accordée pour les Autochtones, cela laisse entendre qu'ils seront touchés de façon disproportionnée par cette mesure. Je ne pense pas que nous ayons des preuves en ce sens.
Je tiens également à mentionner que le Code criminel prévoit toutes sortes de peines minimales obligatoires et qu'aucune exception n'est prévue pour les Autochtones à l'égard de ces peines. Nous en avons déjà pour les délinquants sexuels qui s'attaquent aux enfants et pour les infractions relatives aux armes à feu et il semble donc arbitraire de prévoir des exceptions pour ces peines alors qu'elles n'existent nulle part ailleurs dans le code.
J'ajouterais, sénateur Chaput, que nous comprenons tous les difficultés très particulières de la communauté autochtone et que nous en avons entendu parler. Néanmoins, l'autre aspect de ces difficultés concerne les victimes. Il y a peut-être un nombre disproportionné d'Autochtones dans nos prisons et nous savons qu'il y a donc un nombre disproportionné de victimes autochtones. Par conséquent, j'estime que si nous faisons des exceptions pour les délinquants autochtones, nous en faisons aussi pour les victimes autochtones, ce qui me semble tout à fait injuste. Pour ces raisons, j'aurais du mal à appuyer cet amendement.
Le sénateur Fraser : Une fois de plus, cet amendement ne s'applique qu'à la partie du projet de loi C-10 concernant la Loi sur la réglementation de certaines drogues et autres substances. Nous avons entendu de nombreux témoignages de gens qui ont dit que ce projet de loi toucherait les Autochtones de façon disproportionnée. Je crois que c'était le message de tous les témoins qui représentaient les Autochtones ou s'occupaient des Autochtones. Le plaidoyer le plus convaincant en faveur d'une exemption pour les Autochtones était peut-être celui de l'ancien juge en chef Barry Stuart, du Yukon, mais aussi celui de l'Association canadienne des commissions de police, par exemple.
Nous savons que le Code criminel prévoit déjà une disposition qui permet de tenir compte de la situation particulière des Autochtones pour la détermination de la peine. Cela reflète l'arrêt rendu par la Cour suprême dans l'affaire Gladue. Cet amendement n'accorderait pas une exemption générale aux Autochtones; il porte simplement que si le délinquant est Autochtone, si la peine était trop sévère en raison de sa situation et s'il est possible d'infliger une autre peine raisonnable, le tribunal devrait infliger cette autre peine et motiver sa décision.
J'estime que c'est le strict minimum pour répondre à l'obligation que nous avons au Canada, comme nous le savons tous, de remédier aux effets vraiment disproportionnés de notre système de justice sur les Autochtones.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
Le sénateur Lang : Encore une fois, je dois dire que le projet de loi dont nous sommes saisis est rédigé de façon à s'appliquer aux infractions qui sont réellement commises. Je m'inquiète, comme tout le monde, je pense, devant le nombre de personnes qui se sont retrouvées devant les tribunaux, bien souvent à cause de la situation dans laquelle elles ont grandi, une situation familiale qu'elles ont dû endurer, dans certains cas, et des pensionnats dont nous avons tous parlé.
En même temps — et je reviens à ce qu'a dit le sénateur Frum — ce projet de loi est conçu, en ce qui concerne la drogue, pour s'attaquer à ceux qui en font le trafic. Je peux vous assurer que les trafiquants, qu'ils soient Autochtones ou non, savent ce qu'ils font; ils le font intentionnellement et c'est prémédité. Ils causent du tort aux jeunes de leurs villages. Ils leur proposent de la drogue pour passer du bon temps. Au bout du compte, nous voyons les ravages que cela cause dans les communautés.
J'estime qu'il faudrait préconiser l'inverse, dire que nous devons chasser ces trafiquants de la communauté, du moins pendant un certain temps, afin que la communauté puisse évaluer la situation sans qu'ils soient là pour nuire à ses efforts de rétablissement.
Il faut bien comprendre que si vous faites ce genre d'exception, ces communautés ne sont pas toujours uniquement autochtones, mais mixtes. Des non-Autochtones et des Autochtones peuvent faire du trafic ensemble et nous aurons une exception pour les uns, mais pas pour les autres, moins de conséquences pour les uns que pour les autres alors qu'ils auront commis le même crime. Notre système de justice ne repose pas sur ce genre de principe. Il doit intervenir de façon juste et équitable pour toutes les parties en cause.
Je pense pouvoir parler pour le Canada rural, à bien des égards, car j'ai séjourné non seulement au Yukon, mais aussi dans d'autres régions du pays. Je ne peux tout simplement pas accepter qu'on dise : « Puisque vous êtes Autochtone, ce n'est pas grave, nous allons vous imposer une peine plus légère, même si vous avez pris part à des infractions très graves concernant la drogue. » Cela défit le bon sens.
Nous devons commencer à nous attaquer aux véritables problèmes qui ravagent ces communautés. C'est le genre de lois qui sont mises en place pour y parvenir. Je sais que cet amendement est bien intentionné, mais j'estime qu'il diminue l'importance du projet de loi. Un des aspects importants de cette mesure est que ceux qui participent à ce genre d'activités doivent en subir les conséquences.
Le sénateur Jaffer : À moins d'avoir mal compris, j'ai entendu des sénateurs dire que cela n'existe nulle part ailleurs. Cet amendement est simplement conforme à ce que prévoit déjà le Code criminel. Le paragraphe 718.2e) du Code criminel prévoit :
[...] l'examen de toutes les sanctions substitutives applicables qui sont justifiées dans les circonstances, plus particulièrement en ce qui concerne les délinquants autochtones.
Cela existe déjà dans le code. Nous n'avons pas voulu proposer de modifier le code, car tel n'était pas notre propos vu que nous étudions le projet de loi C-10. Il est souhaitable que ce qui figure dans le code se reflète dans le projet de loi C-10.
Les tribunaux ont déjà décidé dans l'arrêt Gladue que le cas des délinquants autochtones doit être examiné dans une optique différente dans certaines circonstances. Nous avons entendu le ministre de la Justice du Nunavut et le chef Evans, de Winnipeg, nous dire à quel point la situation est grave dans la communauté autochtone. Nous devons examiner leurs cas séparément.
Je dirais même que la Cour suprême du Canada a dit que le nombre d'Autochtones qui se trouvent dans nos prisons est effarant. La Cour suprême du Canada l'a reconnu. Nous disons que ce qui se trouve dans le code doit également être reflété dans le projet de loi C-10.
Le sénateur Frum : Il est important de mentionner que l'arrêt Gladue a été rendu alors que les peines minimales obligatoires figuraient déjà dans le code et que cet arrêt ne dit pas que ces peines contredisent la règle Gladue. Les deux peuvent donc coexister.
Il ne faut pas oublier non plus que selon cet arrêt, la peine infligée pour les crimes les plus graves doit correspondre à la peine normalement imposée à n'importe qui d'autre. Il y a ensuite un argument quant à savoir si les crimes reliés à la drogue sont des crimes graves. L'arrêt Gladue reconnaît que s'il s'agit d'un crime grave, la peine doit être la même.
Le trafic de drogues est-il un crime grave? Lorsqu'il y a une circonstance aggravante comme la possession d'une arme, est-ce un crime grave? La vente de drogue près d'une cour d'école est-elle un crime grave? Oui, je pense que ce sont des crimes graves et que la punition devrait donc être la même que pour tout le monde. Je ne pense pas que les crimes dont nous parlons bénéficieraient d'une exemption selon le principe Gladue.
Le sénateur Angus : Chers collègues, je me suis longuement penché sur cette question. D'après les questions que j'ai posées, vous avez peut-être déjà compris que je m'inquiète beaucoup de la situation de nos peuples autochtones, des différences culturelles et de la surpopulation de délinquants autochtones hommes et femmes dans nos prisons.
Néanmoins, j'en suis venu à une conclusion après avoir étudié la question attentivement et lu, au cours du week-end, sur le sujet de la recherche de solutions. Ce n'est pas l'endroit où le faire. Nous mélangeons les pommes avec les oranges. C'est ce que j'ai conclu. Les pommes sont ce projet de loi qui poursuit un objectif précis dont les sénateurs Lang et Frum ont parlé. Les difficultés de nos peuples autochtones sont les oranges. C'est une autre question qu'il faudra régler d'une autre façon. Malheureusement, je ne pense pas que ce soit l'endroit où le faire et je vais donc m'opposer à cet amendement.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Il ne faut pas oublier que le projet de loi C-10 s'adresse aux types de crimes qui sont en augmentation au Canada. Et on veut lancer un message clair selon lequel pour certains types de crime, ce sera tolérance zéro.
Selon les témoignages que j'ai entendus, la problématique autochtone semble se concentrer dans certaines parties du Canada. Et je ne crois pas qu'il y ait une problématique de surreprésentation de la clientèle autochtone dans les prisons du Québec.
Au lieu d'assouplir constamment le Code criminel, je crois qu'il vaut mieux aborder la problématique autochtone par d'autres solutions. Je pense, entre autres, à la formation et à la création d'emplois. Il y a aussi les jeunes de 18 à 30 ans qui sont surreprésentés dans les institutions fédérales et provinciales et qui comptent pour 25 p. 100 de la population carcérale.
Dans les pénitenciers au Québec, les gangs de rue sont surreprésentées par des communautés culturelles visibles. Est- ce qu'à eux aussi — parce qu'ils sont surreprésentés — on va attribuer des circonstances que j'appellerais entre guillemets « atténuantes » par rapport à la surreprésentation?
Moi, je ne suis pas tellement d'accord avec cela. Je rappelle que le projet de loi C-10 s'attaque aux crimes qui sont les plus en augmentation. Et là-dessus, je crois qu'il faut faire preuve de fermeté.
Le sénateur Chaput : Je crois que cet amendement respecte toujours l'objet du projet de loi C-10. Le juge qui décide de ne pas infliger une peine minimale doit expliquer sa décision. Mais cela ne signifie pas que les contrevenants autochtones auront toujours des peines moins sévères. Les juges sont simplement tenus de prendre en considération leur réalité.
Je termine en disant que nous continuons à imposer aux communautés autochtones un système qui ne leur va pas, qui ne respecte pas ce qu'ils sont et qui ne prend pas en considération leur réalité et ce, sans nécessairement trouver d'autres solutions.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, je crois que cela met fin à notre débat sur l'amendement que le sénateur Chaput a proposé.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Non.
Des voix : D'accord.
Le président : D'après les réponses que j'ai entendues, je déclare l'amendement rejeté.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence. L'article 43 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le sénateur Jaffer : Monsieur le président, j'ai un autre amendement à l'article 43, si vous le permettez. Cet amendement modifie également la page 27, après le paragraphe 5 qui porte sur la « peine minimale ».
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 43, à la page 27, par adjonction, après la ligne 11, de ce qui suit :
« (6) Le tribunal qui détermine la peine à infliger à une personne reconnue coupable d'une infraction prévue par la présente partie peut, s'il est convaincu que cette personne a besoin de soins de santé mentale, reporter la détermination de la peine afin de lui permettre de participer à un programme de santé mentale approuvé par le procureur général ou de recevoir un traitement en santé mentale.
(7) Le tribunal n'est pas tenu d'infliger une peine minimale d'emprisonnement à la personne qui termine avec succès un programme visé au paragraphe (6) ou dont le traitement en santé mentale est en cours. »
Je voudrais rappeler à mes collègues que nous avons entendu le commissaire Head dire ici que 13 p. 100 d'hommes et 29 p. 100 de femmes souffrent de troubles mentaux dans nos prisons. Je viens de recevoir un courriel d'une personne qui dit que l'inspecteur chef des prisons, Nick Hardwick, a averti que la situation est très tendue dans les prisons et que, selon ses paroles, « Cela ne peut pas durer indéfiniment ».
Nous le savons tous et nous devrions peut-être en tenir compte davantage. Cela s'applique uniquement aux dispositions concernant la drogue.
Le Conseil canadien des avocats de la défense a comparu devant le Comité des affaires juridiques et a proposé de modifier cet article. Je crois que le témoin le plus éloquent à ce sujet était M. Trudell, un avocat de la défense. Il aurait pu présenter de nombreuses requêtes au sujet de ce projet de loi, mais il nous a seulement parlé de la nécessité de cet amendement.
Bien entendu, vous m'avez souvent entendu parler de ce que M. Sapers, l'enquêteur correctionnel, a dit quant au fait que le profil des détenus est en train de changer. Il a dit que les prisons ne sont pas des hôpitaux, mais que certains délinquants y sont des patients.
J'ai demandé que nous envisagions d'accorder un pouvoir discrétionnaire au tribunal et vous verrez que, dans cet amendement, nous ne disons pas qu'il ne faut pas punir ces délinquants. Nous disons qu'il faut d'abord leur donner la possibilité d'obtenir des soins de santé mentale.
Cet amendement est dans le même esprit que notre amendement concernant les Autochtones et son but est, là encore, de laisser au juge la possibilité de ne pas imposer la peine minimale de deux ans d'emprisonnement lorsque le délinquant souffre de troubles mentaux. Cet amendement préconise de soigner les délinquants au lieu de les mettre en prison.
Le Dr Bradford a dit qu'en prison on place les gens dans une situation de contrôle alors que dans un établissement psychiatrique on leur dispense des soins individuels pour les aider à guérir. Commençons par les soigner et ils pourront ensuite comparaître devant un juge. Cet amendement préconise de soigner les délinquants au lieu de les mettre en prison.
Le Canadian Centre for Abuse Awareness est également d'accord avec cet amendement. Un témoin qui était pour les peines minimales obligatoires, Mme Campbell, à qui d'horribles choses sont arrivées, nous a dit :
Je conviens, à la lumière de toutes ces recommandations, qu' il faudrait peut-être envisager une soupape de sûreté pour les gens qui ont des troubles mentaux. Je travaille dans les prisons comme ministre. Quatre-vingt-cinq pour cent des femmes qui sont en prison ont été agressées sexuellement, et je crois que le chiffre est encore plus élevé chez les hommes. Si nous voulons vider les prisons, il faut que nous attaquions le problème à la racine.
Et elle ajoute :
Je ne crois pas que les personnes souffrant de troubles mentaux devraient être envoyées en prison. Ce n'est pas l'endroit où elles sont guérir.
Je voudrais aussi vous rappeler ce que M. Saint-Denis, de Justice Canada, a déclaré le 1er février au sujet des tribunaux de traitement de la toxicomanie :
[...] je crois comprendre qu'à l'heure actuelle, nous ne prévoyons pas vraiment augmenter le nombre des programmes judiciaires.
Honorables sénateurs, s'il est un changement que nous devrions faire, c'est la façon dont nous examinons la situation des personnes souffrant de troubles mentaux, non pas celles qui sont déclarées non coupables pour cause d'aliénation mentale, mais celles qui souffrent de troubles mentaux.
Nous avons souvent entendu dire qu'il faut un village pour élever un enfant. Je crois qu'il faut une communauté pour maintenir la sécurité dans les rues, mais qu'il faut un pays pour veiller sur tous les citoyens. Nous en avons la responsabilité. Nous devons prendre soin de tous, les victimes, les délinquants, les personnes qui souffrent de troubles mentaux. Nous ne pouvons pas les abandonner et nous avons la lourde responsabilité d'en prendre soin.
Monsieur le président, je ne sais pas si c'est approprié et si vous jugez que non, vous pouvez déclarer mes propos non pertinents. Néanmoins, j'ai vu une observation que le sénateur Runciman va faire plus tard. C'est à propos du fait que nous devons prévoir quelque chose pour les malades mentaux qui se retrouvent devant les tribunaux.
Je vais conclure sur cette dernière pensée. Le sénateur Runciman a dit qu'il aimerait vous emmener à Kingston pour voir quelle est la situation là-bas. J'ajouterais que j'aimerais vous emmener voir les cellules de la police et vous n'oublierez jamais cette expérience. Je suis allée là-bas de nombreuses fois et il arrive souvent la nuit que la moitié des personnes détenues dans les cellules de détention souffrent de troubles mentaux. Je crois que si nous sommes vraiment une Chambre de seconde réflexion, nous avons la responsabilité de nous pencher sur la situation des personnes souffrant de troubles mentaux.
Le président : Merci pour ces observations, sénateur Jaffer.
Le sénateur Runciman : J'apprécie l'intérêt et le souci très sincère que le sénateur Jaffer manifeste pour cette question. Il ne fait aucun doute que les délinquants malades mentaux créent d'importants problèmes non seulement pour le système de justice, mais pour l'ensemble de la société.
Comme de nombreux témoins nous l'ont dit, je pense que c'est attribuable en grande partie aux politiques de désinstitutionnalisation adoptées par les différentes provinces du pays ainsi qu'aux politiques qui ont été appuyées par toutes sortes de gens, des partis politiques et d'autres organisations. Comme nous avons constaté, bien entendu, le soutien communautaire voulu n'a jamais été mis en place adéquatement pour répondre aux besoins des personnes qui requièrent un traitement et nous avons donc vu le taux de criminalité des malades mentaux augmenter.
Nous avons parlé de témoins. Un des témoins les plus convaincants était le Dr John Bradford, un des psychiatres judiciaires les plus éminents du Canada. Il nous a rappelé, monsieur le président, qu'il existe des solutions. Les délinquants malades mentaux qui ne sont pas criminellement responsables sont déjudiciarisés avant et après leur arrestation aux termes de l'article 16 du Code criminel qui porte que la responsabilité criminelle d'une personne n'est pas engagée si elle est incapable d'apprécier la nature et la qualité de l'acte. Si sa responsabilité criminelle est engagée, je pense que personne ne serait d'accord pour lui permettre de se soustraire au système correctionnel. Il est certain qu'il vaut mieux déceler et gérer les maladies mentales avant qu'une personne n'ait maille à partir avec la justice et adopter une nouvelle approche pour assurer le traitement des délinquants pendant qu'ils purgent leur peine et, comme l'a mentionné le sénateur Jaffer, c'est l'observation qui sera adressée tout à l'heure au comité.
Même si je comprends les bonnes intentions de cet amendement, je pense que cette situation n'est tout simplement pas gérable. Des outils existent déjà. Si nous appuyons cet amendement et je crois, monsieur le président, que vous avez déjà soulevé cette question au cours des audiences, cela aura de lourdes conséquences pour le système étant donné les grandes difficultés auxquelles nos tribunaux sont déjà confrontés. Les psychiatres sont débordés et nous sommes loin d'avoir suffisamment d'établissements de traitement ou d'options de traitement sans quoi nous ne serions pas dans cette situation.
Je comprends les bonnes intentions de cet amendement, mais je ne peux pas l'appuyer.
Le président : Merci, sénateur Runciman.
Le sénateur Fraser : Je vais parler en faveur de l'amendement.
On n'a cessé de nous répéter que cette partie du projet de loi C-10 vise à attraper les gros poissons, ceux qui se livrent à ce que le ministre a appelé l'industrie du trafic, les gens que nous considérons tous comme malfaisants et que la loi devrait punir.
Néanmoins, nous avons également entendu des témoignages, y compris celui du ministère de la Justice, selon lesquels ce projet de loi, tel qu'il est libellé, visera aussi le menu fretin. Le fait est, surtout en ce qui concerne la drogue, que plus vous descendez la chaîne, plus vous risquez de trouver des gens qui souffrent de troubles mentaux en plus du problème de drogue. Ces troubles contribuent au problème de drogue, mais ce sont des problèmes distincts qui ne relèvent pas nécessairement des programmes des tribunaux de traitement de la toxicomanie.
C'est, je crois, le Dr Watts, un psychiatre, qui nous a dit que ce projet de loi serait l'équivalent de la pêche au filet traînant. Vous allez ramasser les gens que vous voulez attraper, mais vous ramasserez aussi beaucoup de menu fretin. Cet amendement aiderait à éloigner du filet les personnes les plus pitoyables qui sinon seront ramassées et je pense que nous devrions donc l'appuyer.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : La sénatrice Jaffer soulève un problème que nous avons tous entendu la semaine dernière; la problématique de la santé mentale dans les pénitenciers.
Le sénateur Runciman disait qu'il existe déjà des avenues pour la magistrature. Je pense, entre autres, à l'incarcération pour évaluation psychiatrique ou psychologique; la possibilité qu'un présumé accusé se fasse déclarer non apte à suivre son procès ou reconnu non criminellement non responsable. Il y a déjà des soupapes pour ce type de clientèle.
La problématique de santé mentale m'interpelle beaucoup étant donné ce que j'ai vécu dans le passé. J'étais à Saint- Romain cette fin de semaine pour assister aux funérailles religieuses de deux jeunes enfants assassinées par leur oncle et la grand-mère assassinée par son fils. Il n'y en a pas de services. La psychiatrie ou la maladie mentale est le parent pauvre des systèmes de santé au Québec et je crois qu'il en est de même dans les autres provinces.
Le temps d'attente au Québec est presque un an pour quelqu'un qui demande un suivi psychiatrique avant d'avoir l'aide du gouvernement. Le choix qu'on a c'est soit la rue ou c'est l'incarcération. Actuellement, si on veut protéger la personne, la famille, et la société, tant qu'on ne réglera pas tous les problèmes de psychiatrie — et ce ne sera pas demain matin — c'est un travail de longue haleine de remettre sur les rails les problèmes. Le système carcéral avec sentence minimale va mieux protéger la personne, la société et la famille. Il est utopique de penser que demain matin ces personnes qu'on va remettre au service public pour les traiter, vont l'être. Elles vont retourner dans la rue et continuer leur cheminement criminel et mettre à risque la vie de leurs proches comme c'est arrivé à Saint-Romain, cet homme qui a assassiné trois personnes. C'est arrivé dans 100 cas au Québec depuis dix ans, 100 personnes ont été assassinées par leur enfant à cause du manque de services, à cause de la désinstitutionnalisation. Ce sont des choix malheureux, mais je pense que c'est le meilleur choix pour ces personnes à l'heure actuelle.
[Traduction]
Le sénateur Runciman : Il serait peut-être utile de lire l'article 16 du Code criminel que j'ai mentionné tout à l'heure. Il porte ce qui suit :
La responsabilité criminelle d'une personne n'est pas engagée à l'égard d'un acte ou d'une omission de sa part survenu lorsqu'elle était atteinte de troubles mentaux qui la rendaient incapable de juger de la nature et de la qualité de l'acte ou de l'omission, ou de savoir que l'acte ou l'omission était mauvais.
L'article 672 du code établit également les règles régissant les évaluations de l'état mental de l'accusé qui sont ordonnées par le tribunal. Si une personne ne comprend pas la nature ou la qualité de l'acte qu'elle a commis, ou bien aucune accusation ne sera portée contre elle, comme l'a clairement dit le Dr Bradford, ou bien elle sera déclarée non criminellement responsable. Néanmoins, si elle est criminellement responsable, je ne pense pas que nous devrions créer une troisième catégorie et en fait lui permettre d'échapper à la prison.
Le président : Merci, sénateur Runciman. Vous avez mentionné tout à l'heure une observation que j'ai faite au cours des audiences quant à la nécessité d'offrir des soins de santé mentale appropriés. Ce qui me frappe dans tout cela, c'est que nous reconnaissons tous sans aucun doute que la santé mentale pose de sérieux problèmes dans notre pays et que ces problèmes se répercutent sur le droit pénal. Cela ne fait aucun doute.
Néanmoins, pour résoudre le problème — et cela vaut également pour la situation de notre communauté autochtone — il ne semble pas qu'il y ait des solutions simples du côté des autorités fédérales et provinciales, des ressources communautaires et des dirigeants communautaires.
À bien des égards, il me semble évident que l'utilisation du Code criminel et du droit pénal pour trouver des solutions et les appliquer à quelque chose d'aussi complexe que les problèmes de santé mentale auxquels un si grand nombre de nos citoyens sont confrontés a un rôle à jouer, mais que le droit pénal est, à bien des égards, mal équipé pour ce faire. Cela exige la participation de nombreux autres groupes et intérêts.
Je sais qu'après tout ce que nous avons entendu au cours de ces audiences, nous voulons tous qu'on reconnaisse le problème et que des mesures concrètes soient prises pour y faire face. Je ne connais pas toutes les solutions et je ne suis pas sûr que l'un de nous les connaisse, mais cela exige beaucoup d'attention. Nous devons faire mieux que ce n'est le cas actuellement.
Le sénateur Jaffer : Je tiens à souligner, et mes collègues le savent, j'en suis sûre, que je ne suggère pas un seul instant de permettre à ces personnes d'échapper à la prison. Je dis qu'avant qu'elles ne soient condamnées pour une infraction, il faut reporter la détermination de la peine afin de leur permettre de participer à un programme de santé mentale approuvé par le procureur général et de recevoir des soins de santé mentale.
Mon collègue, le sénateur Runciman, a parlé d'une situation différente. Les personnes déclarées non criminellement responsables seraient traitées différemment, de toute façon. Ce n'est pas ce dont nous parlons.
Le commissaire Head a déclaré que 13 p. 100 des hommes et 29 p. 100 des femmes qui se trouvent dans notre système judiciaire souffrent de troubles mentaux. Ce sont les personnes dont je parle et non pas de celles qui ont déjà été dirigées ailleurs à cause de problèmes mentaux encore plus graves. Je ne suggère pas de laisser les gens échapper à la justice. Je dis qu'au lieu de créer des lits pour les patients dans les prisons, commençons par les soigner et occupons nous ensuite des conséquences de leurs actes.
Le président : Merci.
Chers collègues, je crois que cela met fin à notre débat sur la motion d'amendement du sénateur Jaffer.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Ayant entendu vos réponses, sénateurs, je déclare l'amendement rejeté.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : L'article 43 est-il adopté?
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
Chers collègues, nous allons maintenant passer à l'article 54. Avant cela, je précise que lorsque nous aurons terminé l'examen de l'article 54, nous prendrons une pause de 15 minutes et nous continuerons ensuite.
L'article 54 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Monsieur le président, je désire proposer un amendement. Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 54, à la page 32,
a) par substitution, à la ligne 5, de ce qui suit :
« le degré »;
b) par substitution, aux lignes 22 à 26, de ce qui suit :
« c) il prend les mesures qui sont le moins restrictives possible compte tenu de la protection de la société, des agents et des délinquants; »
[Français]
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 54, à la page 32 :
a) par substitution à la ligne 5, de ce qui suit :
« le degré »;
b) par substitution, aux lignes 22 à 26, de ce qui suit :
« c) il prend les mesures qui sont le moins restrictives possible compte tenu de la protection de la société, des agents et des délinquants; ».
[Traduction]
Cet amendement, qui est en deux parties, répond particulièrement aux préoccupations très graves soulevées par l'enquêteur correctionnel, M. Sapers, et par M. Michael Jackson et M. Graham Stewart qui, comme vous le savez, ont fait une étude approfondie du système correctionnel.
Ces modifications se rapportent aux objets et aux principes du système correctionnel qui sont énoncés dans le projet de loi C-10. Elles ont pour effet, premièrement, de supprimer la nature et la gravité de l'infraction commise par le délinquant de la liste des éléments que le service correctionnel évalue pour l'exécution de la sentence. C'est de cela que je vais parler en premier.
M. Sapers, en particulier, a fait valoir que ce sont les tribunaux et non pas les prisons qui évaluent la nature de la gravité d'une infraction et qui imposent une peine en conséquence. Cette peine peut aller de quelques mois de prison à l'emprisonnement à perpétuité, mais ce sont les tribunaux qui prennent cette décision. Une fois que la décision est prise, le système correctionnel a pour rôle d'administrer les prisons en tenant compte de tous les renseignements pertinents dont il dispose, notamment les motifs et recommandations donnés par le juge qui a prononcé la peine, les obligations et les responsabilités du délinquant, les renseignements obtenus au cours du procès ou de la détermination de la peine et bien d'autres objets et principes énoncés dans le projet de loi.
Toutefois, la nature et la gravité de l'infraction ne regardent pas le service correctionnel et cet amendement supprimerait donc cet élément des objets et principes du service correctionnel.
Également, l'amendement rétablirait le libellé initial à l'égard des méthodes que doit utiliser le service correctionnel.
La loi actuelle, et non pas le projet de loi, porte que le service doit prendre les mesures qui sont les moins restrictives possible compte tenu de tous les autres principes.
Ce projet de loi modifierait ce libellé pour dire que le service doit prendre les mesures qui ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire et proportionnel aux objectifs de la loi. Comme l'a dit M. Sapers, « nécessaire » et « proportionnel » sont deux des trois piliers sur lesquels le système doit reposer, mais « le moins restrictives possible » constitue le troisième pilier.
M. Jackson qui a participé, je crois, à la rédaction de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, nous a expliqué que les « mesures le moins restrictives possible » répondent en partie à l'arrêt Oakes de la Cour suprême et à d'autres jugements reliés à la Charte.
On nous a dit aussi que l'expression « les mesures le moins restrictives possible » est claire; elle est facile à comprendre pour le système correctionnel et les personnes qui s'y trouvent. Les termes « nécessaire » et « proportionnel » seront beaucoup plus difficiles à interpréter, surtout « proportionnel », particulièrement s'il faut prendre une décision rapidement, comme c'est certainement souvent le cas dans le système correctionnel.
Enfin, M. Sapers dit que « nécessaire » et « proportionnel », sans « le moins restrictives possible » sont des critères qui rendraient son travail beaucoup plus difficile, car il a pour rôle d'évaluer le travail du système correctionnel et pour ses enquêteurs, les mesures « nécessaires » et « proportionnelles » seront beaucoup plus difficiles à évaluer que les « mesures le moins restrictives possible ».
Par conséquent, je propose l'amendement que vous avez sous les yeux.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Vous ne serez pas surpris d'entendre que je ne partage pas du tout le point de vue de la sénatrice sur ce point. Les problématiques dans le système carcéral canadien sont connues et certaines sont à la hausse, je pense, entre autres, à l'usage de drogues dans les prisons. On sait que 80 p. 100 des détenus consomment des drogues. Le taux de réincarcération s'élève à près de 70 p. 100. Plusieurs criminels ne participent pas aux programmes de réhabilitation, et ce, par choix plus que par lacune.
Le système de discipline dans les prisons a été dénoncé par le syndicat des agents carcéraux. Ces derniers ont indiqué que, au cours des années, ils ont perdu le pouvoir dans les pénitenciers. On estime même que, dans certains pénitenciers, le pouvoir et l'administration sont entre les mains des criminels. C'est une situation grave.
On a aussi, dans le système carcéral canadien, un système administratif de gestion des plaintes. Un tribunal administratif, formé de juges disciplinaires, assiste les criminels lorsque ceux-ci se voient infliger une punition. Le criminel est défendu et l'agent d'incarcération est représenté par un assesseur. Il existe toute une procédure dans les pénitenciers pour s'assurer que si un criminel reçoit une punition, elle sera juste. Elle ne sera toutefois pas au minimum. On a tiré vers le bas tout ce qui était discipline et tout ce qui était rigueur. Cela fait en sorte, aujourd'hui, que plusieurs criminels reviennent dans les pénitenciers car ces établissements ne posent plus de menace et c'est un milieu qui est de moins en moins contraignant pour eux. Le projet de loi C-10 veut remettre de la discipline et de la rigueur.
Il m'apparaîtrait contradictoire de dire que lorsqu'on va infliger une punition à un criminel qui manque de discipline ou de respect, cette punition sera la moins rigoureuse possible, alors que toute notre procédure judiciaire et disciplinaire dans les écoles est basée sur la gravité du geste posé.
Dans les pénitenciers fédéraux il existe un processus qui doit faire l'envie de plusieurs systèmes pénitenciers à travers le monde. On compte au Canada 1 400 criminels incarcérés. Or, ceux-ci ont logé 26 000 plaintes. On ne peut pas dire que ces détenus n'ont pas d'endroit où se plaindre si la punition n'est pas proportionnelle à l'infraction commise. On leur a donné des outils que beaucoup de citoyens n'ont pas.
Prenons l'exemple de Valery Fabrikant. Il n'y a personne qui ne soit pas au courant des meurtres que cet individu a commis. On me dit que, à Montréal, un employé gère à temps plein les plaintes que ce détenu produit. On parle d'un employé pour un criminel!
Le projet de loi C-10 vient équilibrer les choses en mettant une discipline à l'intérieur des pénitenciers. Il vient supporter les gardiens qui, tous les jours, sont devant des gens qui manifestent peu de respect pour leur travail. Le projet de loi C-10 vient donc fermer une brèche à la Loi sur l'incarcération canadienne, où vraiment on va remettre de la discipline et de la rigueur.
Le sénateur Dagenais : Mon commentaire sera bref. Il faut se rappeler que l'agent de police Sandra Dion, dans son témoignage, disait clairement qu'il fallait redonner aux victimes un sentiment de confiance envers le système judiciaire. C'est ce que le projet de loi veut faire. Le projet de loi vise à augmenter la sécurité de la population. Je suis donc en désaccord avec la position de l'honorable sénateur Fraser.
[Traduction]
Le sénateur Angus : C'est encore un domaine qui me rend très perplexe. Nous avons siégé ici toute la semaine pour faire un tour d'horizon intense de notre système correctionnel et de notre système de justice pénale dans le contexte d'une initiative du gouvernement visant à améliorer la sécurité dans nos rues et nos communautés.
C'était très intense pour nous tous. J'en ai parlé personnellement à la plupart d'entre vous.
Une des conclusions que j'ai tirées vendredi, et je ne veux pas donner l'impression que j'ai passé tout le week-end à lire mes livres de criminologie, mais c'est une question qui me préoccupe; je ne pense pas que le projet de loi aille assez loin et cet amendement non plus.
La raison pour laquelle je dis cela m'est apparue d'abord quand le juge Nunn nous a parlé du fameux détenu AB qui avait fait de gros progrès à la fin de son séjour dans l'établissement pour adolescents de Nouvelle-Écosse. Sa descente aux abysses avait été stoppée. Il commençait à lire de la littérature constructive. Le sentiment général était que ce garçon était récupérable. Il avait été condamné à six ans de réclusion en vertu des lois pénales pour adolescents, ce qui était la peine maximum, je crois. Quand il a été transféré dans le système carcéral pour adultes, son changement d'attitude a été presque immédiat.
Le témoignage qui a été pour moi le corollaire ou le complément de celui du juge Nunn a été celui du commissaire Head, qui dirige le système carcéral et à qui j'ai posé des questions. Quand on n'entre pas dans les détails, cela stimule notre imagination. Le témoignage que j'ai retenu, comme la plupart d'entre vous, je pense, et je ne vois pas comment il pourrait en être autrement, est que tout d'abord la criminalité règne dans nos prisons. J'ai entendu dire ici que des gens qui entrent en prison pour avoir fumé une cigarette de marihuana en ressortent avec une forte dépendance à l'héroïne et aux drogues dures. Je me demande comment cela peut se passer dans nos prisons, où les détenus obtiennent ces drogues et comment on peut permettre aux gangs de prospérer dans le système carcéral. Nous avons entendu parler des sévices sexuels et autres dont sont victimes les détenus handicapés mentaux ou autres.
Nous avons réfléchi aux moyens de transmettre ce message à nos collègues sous la forme d'observations ou autrement, mais j'estime que nous devons le faire comprendre. La situation est hors de contrôle.
Nous avons également entendu des témoignages, et c'est mon troisième point, selon lesquels il est très difficile de recruter du personnel pour travailler comme gardiens ou employés dans nos établissements pénitentiaires pour adultes. Les gens ont peur. Quelqu'un m'a offert pour Noël le film Shawshank Redemption et j'ai pensé que je devrais envoyer ce CD à toutes les personnes qui sont ici pour leur rappeler à quel point la situation est horrible en prison. Si nous ne sommes pas capables, en 2012, de faire régner la loi et l'ordre dans les prisons et dans les régimes punitifs, nous avons un sérieux problème.
Nous essayons de donner des moyens aux autorités, subtilement, dirais-je, dans cet amendement — pas le vôtre, sénateur Fraser, mais celui du gouvernement. Je dois m'opposer à cet amendement. Je pense qu'il ne va pas assez loin. Il faudrait des sanctions sévères et donner le pouvoir voulu aux autorités. Autrement, la situation ne fera qu'empirer.
Le sénateur Fraser : Je répondrais simplement que les graves problèmes qui règnent dans les prisons sont de notoriété publique. Je ne crois pas que ce projet de loi éliminera l'influence des gangs criminels dans les prisons, mais comme nous l'avons entendu dire, il augmentera le risque que des cas comme celui d'Ashley Smith et d'autres se reproduisent. C'est le genre de situation dont nous devrions nous préoccuper énormément et éviter par tous les moyens possibles.
Le président : Chers collègues, je crois que cela termine notre débat sur l'article 54. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le président : Ayant entendu vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L'article 54 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Le prochain article que nous allons étudier est l'article 57. L'article 57 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : J'ai un amendement à proposer. Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 57,
a) à la page 34,
(i) par substitution, à la ligne 32, de ce qui suit :
« (ii.3) les programmes se rapportant à l'infraction commise et visant à répondre »,
(ii) par suppression des lignes 38 et 39;
b) à la page 35, par suppression des lignes 1 à 6.
Cet amendement porte sur la divulgation aux victimes de renseignements concernant les délinquants. Nous conviendrons tous, je pense, que les victimes ont le droit d'être informées d'un certain nombre de choses au sujet de la personne qui a commis l'infraction; néanmoins, comme vous vous en souviendrez, la commissaire à la protection de la vie privée a soulevé des questions au sujet de la limite à partir de laquelle les renseignements fournis ne sont plus pertinents pour la victime et le délinquant et commencent à empiéter sur le droit à la vie privée des délinquants, étant donné que ces derniers continuent d'avoir des droits en tant que citoyens canadiens. Ces droits sont limités tant qu'ils sont dans le système correctionnel, mais ils existent.
Par exemple, nous proposons que lorsque des renseignements sont communiqués aux victimes au sujet des programmes, ce soit seulement à propos des programmes en rapport avec l'infraction. Un exemple hypothétique serait celui d'une personne condamnée pour une infraction avec violence qui suit, dans le système pénitentiaire, un programme pour sa dépendance au jeu. Ce n'est pas forcément en rapport avec l'infraction. C'est une démarche beaucoup plus personnelle.
Également, au sujet des absences temporaires, nous proposons simplement de supprimer le paragraphe qui en fait mention, mais si nos collègues le désirent, nous pourrions supprimer seulement la disposition concernant les raisons d'une absence temporaire, car c'était la principale objection de Mme Stoddart; là encore, quelqu'un peut être absent du système pénitentiaire, par exemple pour recevoir un traitement médical, peut-être pour le cancer. Cela n'a rien à voir avec l'infraction ou la victime et fait partie de ce qui devrait rester confidentiel. Je sais que, d'après les renseignements que nous avons reçus et les témoignages que nous avons entendus, le service correctionnel gère avec prudence les renseignements qu'il communique. Il essaie d'établir un juste équilibre entre le droit des victimes, leur droit moral et le droit du délinquant de présumer que certains renseignements resteront confidentiels.
Nous savons que le système correctionnel essaie de bien gérer cela, mais nous croyons toutefois qu'au lieu de se fier entièrement au système correctionnel, nous devons veiller à ce que la loi qui sera adoptée reflète les principes fondamentaux que nous jugeons nécessaire de respecter, en tant que parlementaires.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je tiens tout d'abord à saluer l'initiative du gouvernement d'avoir inscrit dans le projet de loi C- 10, le droit à l'information pour les victimes d'acte criminel. Cela a été une des critiques formulée, entre autres, par l'ombudsman des victimes d'acte criminel, qui est venu nous dire que le droit à l'information sur le criminel droit être reconnu aux victimes. Le criminel, souvent, a choisi l'acte qui sera commis, la victime ne l'a pas choisi.
Toutes les victimes qui sont venues témoigner ont souligné l'importance de connaître le cheminement du criminel dans son processus de réhabilitation. Je pense, entre autres, à l'agente de police Dion et à Mme Diane Tremblay. Cette dernière a mentionné que si la deuxième conjointe du criminel avait su ce qui s'était passé lors de son incarcération, il n'aurait peut-être pas pu faire d'autres victimes.
Le processus de réhabilitation peut être long et complexe. Dépendamment des influences que le criminel aura à l'intérieur du pénitencier, ce cheminement peut être positif ou négatif, il peut régresser ou évoluer.
Il est important pour les victimes d'acte criminel de savoir si, à la libération du criminel, ce dernier représente encore un risque pour elles. Prenons comme exemple un criminel condamné pour une agression sur son ex-conjointe qui développe, en prison, des problèmes de toxicomanie. Si la victime n'est pas mise au courant de ce problème au moment de sa libération conditionnelle, cet individu peut être encore plus dangereux que lorsqu'il est rentré parce qu'il a développé d'autres comportements délinquants en prison.
Donc, les victimes ne peuvent se satisfaire uniquement de l'information liée au crime qui a eu lieu il y a cinq, dix ou 25 ans. Elles doivent également savoir quel a été le processus de réhabilitation du criminel.
A-t-il connu des contraintes ou un laisser-aller dans la criminalité? Dans la rue — on l'a vu avec l'agent Dionne, à quelque 100 mètres de chez elle —, est-il encore un danger pour ma sécurité ou est-il réadapté? Donc, en limitant l'information sur le crime commis dans le temps, je crois que nous limitons aussi l'information sur le niveau de risque de la victime après sa période d'incarcération. Je ne peux pas admettre qu'on limite l'information aux victimes, je crois que les criminels seront avantagés si on le fait.
Le sénateur Dagenais : Évidemment, je ne répéterai pas tout ce que le sénateur Boisvenu a dit; je veux simplement dire que les victimes ont le droit de connaître le cheminement du délinquant. Je pense que la victime doit être considérée dans le système et elle doit avoir un poids lors de l'audience sur une éventuelle libération conditionnelle. Elle a droit de savoir s'il y a eu un changement dans le comportement du prévenu pendant son incarcération. C'est une question de transparence et c'est cela que le projet de loi C-10 apporte.
Le sénateur Fraser : Je voudrais réitérer qu'on ne veut pas nuire aux droits des victimes. Nous sommes d'accord sur le fait que les victimes doivent être entendues, elles doivent recevoir des renseignements. Il nous semble pourtant qu'il y aurait lieu d'ajuster ces portions du projet de loi pour vraiment cibler les renseignements qui sont pertinents pour la victime et éviter de créer la possibilité de divulgation de renseignements qui n'ont rien à voir ni avec le crime ni avec la sécurité des victimes. C'est tout. C'est tout ce que l'on envisage ici.
Le sénateur Boisvenu : Croyez-vous que la Commission des libérations conditionnelles n'a pas cette compétence de discernement par rapport à l'évolution du criminel dans son cursus de réadaptation et à d'autres types d'informations qui relèveraient plus d'informations strictement personnelles? Je pense à ses enfants, à son épouse, ce type d'information; à la limite, même son adresse, lorsqu'il sera remis en liberté. Pensez-vous que la Commission des libérations conditionnelles n'a pas cette capacité de faire la différence entre ce qui est important pour la victime par rapport au processus criminel ou de réadaptation ou à d'autres types d'informations qui ne concernent pas le crime commis?
Le sénateur Fraser : La Commission des libérations conditionnelles fait un travail très professionnel, c'est sûr, mais il me semble qu'il faut que la loi soit claire. Il ne faut pas que la loi fasse trop confiance aux personnes qui ont un pouvoir immense sur des individus. C'est sûr que la Commission des libérations conditionnelles doit exercer une très grande discrétion. Chaque cas est différent. Donc, on compte sur la Commission des libérations conditionnelles pour juger ce qu'il faut faire dans chaque cas individuel. Un petit peu de précision dans la loi ne me semble pas une mauvaise idée.
Le sénateur Boisvenu : La loi, à mon avis, ne change pas beaucoup de choses par rapport aux habitudes que la Commission des libérations conditionnelles a développées depuis 2002. Le projet de loi vient le mettre dans la loi. C'est maintenant une obligation pour la commission de le faire. Avant, c'était davantage une directive. Cela repose sur trois principes : un, on informe la victime sur les programmes auxquels le criminel participe, à quelle fréquence; deux, on regarde si, pendant sa période d'incarcération, il a fait preuve d'indiscipline, de discipline, s'il a commis des actes criminels et s'il a été puni; et le troisième élément est ses déplacements d'un pénitencier à un autre ou ses sorties, accompagné ou pas. L'ensemble des informations ne changent pas beaucoup par rapport à avant le projet de loi C-10, sauf qu'on le met dans la loi et on le rend obligatoire.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, je crois que cela clôt notre débat sur l'article 57.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Compte tenu de vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
Une voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L'article 57 est-il adopté?
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
Nous en sommes à l'article 64. L'article 64 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J'aimerais informer mes collègues que, ces derniers jours, nous avons réussi à mettre la main sur deux études, qui portent sur l'efficacité du bracelet électronique, faites en 1993 et en 2006, en Floride, et qui incluent environ 60 000 criminels incarcérés. Des exemplaires sont disponibles pour les sénateurs. Ces études comparent les cas de récidive et d'évasion ainsi que les infractions commises avec bracelet et sans bracelet. Ce sont deux études intéressantes qui démontrent un niveau d'efficacité.
Le sénateur Fraser : Ces études concernent-elles les technologies les plus récentes, les plus avancées? GPS?
Le sénateur Boisvenu : La dernière, en date de 2006, m'apparaît relativement récente. On pourrait les déposer au comité, monsieur le président.
Le sénateur Fraser : Ce serait intéressant.
[Traduction]
Le président : Pour les téléspectateurs qui suivent nos délibérations, l'article 64, qui vient d'être adopté, concernait la surveillance à distance des délinquants.
Merci, sénateur Boisvenu.
L'article 69 est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Fraser : Il est proposé :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 69, à la page 38, par adjonction, après la ligne 42, de ce qui suit :
« m.2 concernant la collecte, l'utilisation, le stockage, la divulgation, le retrait et la destruction des renseignements obtenus au moyen du dispositif de surveillance à distance prévu à l'article 57.1 »
[Traduction]
Cet amendement répondrait aux préoccupations qui ont été émises, non seulement par la commissaire à la protection de la vie privée, mais aussi dans le rapport d'évaluation du service correctionnel au sujet de ces dispositifs de surveillance électronique. Ces inquiétudes portent sur le fait qu'il n'y a aucune règle régissant la façon dont les renseignements doivent être recueillis, utilisés, stockés, divulgués, retirés, détruits, et cetera. Vous trouverez cela à la page 62 du rapport d'évaluation.
Cet amendement permettrait au gouvernement — il n'exige pas, mais permet — de prendre des règlements concernant la collecte, l'utilisation, le stockage, la divulgation, le retrait et la destruction des renseignements obtenus au moyen de ces dispositifs de surveillance. Cela semble particulièrement pertinent en ce sens qu'il s'agira, généralement, de renseignements assez personnels — peut-être pas généralement, mais dans certains cas précis.
Par exemple, j'ai parlé tout à l'heure des personnes qui vont subir un traitement médical. Le GPS dira que cette personne s'est rendue à la clinique du cancer XYZ ou à un autre endroit.
Nous ne disons pas qu'il ne faut pas recueillir ces renseignements. Nous disons qu'il faut prendre des mesures de précaution pour qu'ils soient recueillis, stockés et utilisés comme il se doit. Lorsqu'ils ne sont plus pertinents, ils devraient être détruits.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Sans vouloir faire d'affirmation, je crois que ce type d'information est comparable à celle qu'on recueille sur une période de 10 ou 20 ans auprès de criminels déclarés dangereux ou à contrôler. Par la suite il y a des mécanismes pour disposer de l'information liée au déplacement des criminels qui en sont à la fin de leur incarcération. Je pense que c'est cinq ans après la fin de la sentence. Donc en ce qui concerne le port du bracelet, je pense qu'il n'y a pas lieu de prévoir un règlement spécifique et qu'on devrait se servir des règlements ou des lois actuelles pour gérer l'information.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, je crois que cela termine notre débat sur l'amendement du sénateur Fraser.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Honorables sénateurs, ayant entendu vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
Une voix : Avec dissidence.
Le président : Rejeté avec dissidence.
L'article 69 est-il adopté?
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 92 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 115 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Fraser : Nous avons un amendement à proposer pour cet article :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 115, à la page 65, par substitution, à la ligne 36, de ce qui suit :
« b) trois ans pour l'infraction qui est punis- ».
C'est au sujet des nouvelles règles qui rallongent la période qui doit s'écouler avant qu'une personne soit admissible à la libération conditionnelle. Cette période sera maintenant de 10 ans pour les infractions qui ont été poursuivies par mise en accusation.
Il est dit dans le projet de loi que le nouveau délai sera de cinq ans pour les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Nous proposons de ramener ce délai à trois ans. Par définition, les déclarations de culpabilité par procédure sommaire s'appliquent aux infractions nettement moins graves que celles qui sont poursuivies par mise en accusation. Un bon nombre d'entre elles donnent lieu à de simples amendes et trois ans nous semble être une période d'attente amplement suffisante pour demander la suspension du casier. Il n'est jamais garanti que la suspension du casier sera accordée, mais nous estimons qu'on devrait pouvoir en faire la demande au bout de trois ans dans le cas d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Le président : Avez-vous des observations ou des questions?
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Que ce soit ici ou à la Chambre des communes, le débat sur le pardon a soulevé des débats. Ça fait presque deux ans qu'on en discute et le projet de loi 23A est venu un peu resserrer les critères d'obtention du pardon.
On se souvient qu'en 2007, parmi toutes les demandes de pardon, 97 p. 100 ont été accordées et c'était devenu un automatisme qui enlevait toute crédibilité à une demande de pardon. Beaucoup de citoyens et de victimes ont critiqué la rapidité avec laquelle les gens obtenaient un privilège. Demander le pardon est un droit, l'obtenir est un privilège.
On a décidé de fixer des balises pour faire en sorte qu'un criminel qui reprend sa vie normale ait toutes les chances de ne plus retomber dans la criminalité et de faire ses preuves en tant que bon citoyen. Ce qu'on entend de la part des victimes, c'est que ces balises sont raisonnables. C'est ce que nous croyons aussi.
N'oublions pas que lorsque son pardon est accordé, le dossier du prévenu ou du criminel réhabilité disparaît du radar des policiers. En 2007, parmi les 30 000 demandes de pardon, au-delà de 800 provenaient de prédateurs sexuels dont quelques-uns avaient récidivé quatre fois.
Lorsque le pardon est accordé, l'information sort du radar des policiers et elle va se retrouve ailleurs à la GRC. Les policiers ont donc moins accès à cette information. Il est important que ce délai nous permette de nous assurer que plus jamais le criminel ne va récidiver et je crois que cela répond aux attentes de la société.
Le sénateur Fraser : Je voudrais réitérer le fait que nous parlons ici d'infractions punissables sur déclaration de culpabilité, c'est-à-dire qui sont plus ou moins mineures, qui ne sont pas des crimes sérieux.
Les balises dont parle le sénateur Boisvenu ont déjà été renforcées par des projets de loi antérieurs. Non seulement avons-nous haussé de façon drastique les frais, mais nous avons aussi créé des conditions beaucoup plus rigoureuses pour l'obtention de ce qu'on appelait auparavant un pardon. Je le répète. On parle ici d'infractions relativement mineures.
Avec tout le respect que j'ai pour toutes les victimes —elles méritent notre respect, elles l'ont, nous les respectons. Elles ont droit de recevoir des renseignements, elles ont un mot à dire.
Toutefois, ce n'est pas à eux que revient la décision finale à savoir si un pardon doit être accordé ou non. Je préfère la terminologie proposée dans ce projet de loi. Le terme record suspension est beaucoup plus juste.
Le sénateur Boisvenu : Avec le projet de loi C-10, c'est la première fois dans l'histoire du Parlement canadien qu'autant de victimes viennent s'exprimer. Depuis 150 ans, on les a écartées du processus judiciaire parce qu'un jour l'État a décidé de remplacer la victime dans le processus judiciaire plutôt que d'avoir des procès rapides comme cela se faisait dans le temps du Far West.
Les victimes ont un mot à dire. Elles n'ont pas choisi leur état. Le criminel, avec toute l'influence négative qu'il peut avoir, a choisi son état.
Les victimes d'acte criminel se sont exprimées et elles l'ont fait haut et fort, en disant qu'elles voulaient être dans le coup. Je suis d'accord avec le fait qu'elles ne sont pas toujours les meilleurs juges et que ce n'est pas à eux de prendre les décisions. Mais maintenant qu'ils ont pris la parole, elles ne resteront plus dans le silence.
Il y a des procès pour crimes à caractère d'agression qui se font dans les cours municipales et au terme desquels les individus seront condamnés à une amende. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas parce qu'il y a une amende qu'un crime n'est pas violent. Il y a des gens qui ont commis des gestes d'agression et qui ont été condamnés à une amende parce que les cours municipales fonctionnent de cette façon. Les gouvernements ont délégué ce type de procès.
Les infractions par voie sommaire ne sont pas nécessairement non-violentes. Il faut faire attention. Des causes de violence conjugale et de grossière indécence sont entendues à la cour municipale. C'est souvent le début d'un processus qui peut mener plus loin.
[Traduction]
Le président : Merci, sénateur Boisvenu.
Chers collègues, en ce qui concerne l'article 115, je crois que nous avons terminé notre débat concernant l'amendement du sénateur Fraser.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Compte tenu des réponses que j'ai entendues, je déclare l'amendement rejeté, avec dissidence.
L'article 115 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Avec dissidence.
Le sénateur Fraser : J'aimerais savoir si je pourrais rouvrir l'article 115, car j'avais un autre amendement à proposer.
Le président : J'allais vous poser la question, car on nous a distribué trois amendements éventuels pour l'article 115.
Le sénateur Fraser : C'est l'amendement numéro 10.
Le président : Nous venons d'étudier l'amendement libéral 9.
Une voix : En fait, il y en a deux de plus.
Le sénateur Fraser : Oui; 11b) est un amendement corrélatif.
Le président : Nous allons rouvrir l'étude de l'article 115.
Je vais de nouveau poser la question. L'article 115 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : En remerciant mes collègues pour leur indulgence, je désire proposer un autre amendement :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 115, à la page 66, par substitution, à la ligne 3, de ce qui suit :
« chacune découle d'incidents ou d'ensembles d'incidents distincts et a fait l'objet d'une poursuite par voie ».
Mes collègues se souviendront de la discussion que nous avons eue autour de cette table au sujet de la disposition du projet de loi disant que la suspension du casier peut être refusée ou doit être refusée à une personne qui a été reconnue coupable de plus de trois infractions dont chacune a été l'objet d'une poursuite par voie de mise en accusation, ou, s'agissant d'infractions d'ordre militaire passibles d'emprisonnement à perpétuité, s'il lui a été infligée pour chacune une peine d'emprisonnement de deux ans ou plus.
L'intention de ces dispositions est claire. Cela vise les dangereux récidivistes. Nous avons soulevé le cas de quelqu'un, probablement un jeune — je ne veux pas parler d'un jeune délinquant, mais d'un jeune de 19 ou 20 ans, qui a eu, disons, une très mauvaise journée qui s'est terminée par une bonne cuite, qui a été impliqué dans une bagarre et a commis beaucoup d'erreurs ce jour-là. Il a eu une très mauvaise journée.
On nous a dit que le ministre partageait notre inquiétude et ne voulait pas que cette disposition s'applique à quelqu'un dont la journée s'est très mal passée. Néanmoins, nous estimons que tel qu'il est libellé, le projet de loi pourrait effectivement s'appliquer à quelqu'un qui a eu une très mauvaise journée, étant donné qu'il arrive souvent que lorsqu'une personne commet une série d'infractions graves un jour donné, des accusations distinctes soient portées contre elle et qu'elle fasse l'objet de condamnations distinctes.
Cet amendement inclurait simplement dans le projet de loi, dans la loi éventuelle, ce que le ministre souhaitait au départ, selon ce que nous avons compris, à savoir que cela ne doit pas s'appliquer à quelqu'un qui a eu une mauvaise journée, mais à des récidivistes. C'est ce que M. Churney a dit quand il a témoigné.
Le président : Merci, sénateur. Avez-vous des observations à formuler à ce sujet?
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Sénateur Fraser, on comprend que la suspension du pardon sera pour les récidivistes qui ont commis trois infractions punissables d'une sentence de deux ans plus un jour.
Le sénateur Fraser : Et qui ont été punis par une sentence de deux ans.
Le sénateur Boisvenu : Deux ans plus un jour.
Le sénateur Fraser : Deux ans ou plus.
Le sénateur Boisvenu : On comprend que ce sont des gens qui ont été sentenciés dans un pénitencier fédéral.
Le sénateur Fraser : Oui.
Le sénateur Boisvenu : Ils peuvent avoir commis au préalable des crimes pour lesquels ils ont reçu une peine de deux ans moins un jour, comme par exemple, six ou neuf mois dans la collectivité. Toutefois, tant et aussi longtemps qu'ils ne reçoivent pas une sentence de deux ans plus un jour, ils ne sont pas touchés par l'interdiction du pardon. Est-ce que nous comprenons la même chose?
Le sénateur Fraser : Je comprends la même chose.
Le sénateur Boisvenu : Lors de mes visites dans cinq pénitenciers fédéraux l'an dernier, j'ai demandé « combien avez- vous de gens interné pour la première fois qui ont déjà été sentencié dans une prison provinciale auparavant, » on me répondait « la majorité. » C'est pour cette raison que je m'interroge et c'est ce qui me rend mal à l'aise face à votre proposition.
Malgré qu'on dise qu'après trois crimes qui méritent une peine de deux ans plus un jour, on va être interdit de pardon, on va se retrouver devant des gens qui, possiblement, auront quatre, cinq sentences provinciales de deux ans moins un jour, mais il ne sera pas interdit au pardon. Comprenez-vous?
Le sénateur Fraser : Oui, je comprends très bien.
Le sénateur Boisvenu : Voyez-vous comment la notion de récidive est très flexible dans le système?
Le sénateur Fraser : Je comprends très bien sénateur Boisvenu. Mais ce projet de loi ne touche pas à ces gens ni tel qu'écrit ni si vous acceptez mon amendement.
L'amendement touche juste à ce qui est proposé ici. Et ce qui est proposé ici, vous avez raison, ne touche pas aux gens qui auraient déjà eu des peines de moins de deux ans. Là, il faudrait faire un autre amendement. Si vous voulez que cela touche aux gens qui ont déjà eu des peines de moins de deux ans, il faudrait proposer votre propre amendement.
Tout ce que je veux faire, c'est de m'adresser à l'article du projet de loi qui touche aux gens qui ont déjà eu trois peines, ou plus, de deux ans, ou plus, et je voulais juste être sûre qu'il ne s'agit que de récidivistes. Je ne voudrais pas capter avec ce projet de loi des gens qui auraient juste eu une mauvaise journée et auraient fait des erreurs monumentales, mais une fois dans leur vie. C'est tout ce que je propose.
Le problème que vous décrivez existe, mais ne touche absolument pas à cela avec ce projet de loi. C'est autre chose. Je vous encourage à proposer votre propre amendement.
Le sénateur Boisvenu : J'aurais été plus sévère. Cela aurait été toute sentence, quelle soit de trois mois ou un prédateur sexuel qui a commis trois crimes, le pardon, pour moi, ne devrait plus être admissible. Ce qu'on propose est encore plus souple pour ces gens. Vous comprenez ce que je veux dire. Je n'irai pas plus loin que cela.
Le sénateur Fraser : Même s'il s'agit juste d'un jeune homme qui a fait une série d'erreurs une fois dans sa vie; un jour?
Le sénateur Boisvenu : Il doit être punissable. Il est rare que lorsque vous commettez une erreur, vous serez condamné à une peine de deux ans plus un jour. C'est une vue de l'esprit sur le plan juridique. Même des gens pris pour avoir consommé de l'alcool au volant, on en voit qui ont été arrêtés huit, 10, 15 fois et n'ont jamais fait une journée de prison. C'est une vue de l'esprit, sénatrice. Vous pensez qu'on commet une petite erreur et qu'on va écoper d'une sentence de deux ans plus un jour.
Le sénateur Fraser : C'est une grosse erreur.
Le sénateur Boisvenu : Là, je suis d'accord avec vous. S'il s'agit d'une grosse erreur, on n'est plus dans votre discours des petites erreurs.
Le sénateur Fraser : Je ne parlais pas de petites erreurs. Je parle juste d'un événement qui comprendrait plusieurs grosses erreurs à la suite desquelles la personne ne commettrait plus d'erreur. Devrait-on lui interdire la reconnaissance de cela pour le reste de sa vie?
Le sénateur Boisvenu : C'est un débat intéressant. J'ai suivi des dizaines de procès. Prenons l'exemple d'un jeune criminel ayant commis une panoplie d'infractions. Qu'est-ce qui se passe dans la vraie vie? Il va plaider coupable à la plus grave des infractions, par après, on laisse tomber les autres. C'est cela la vraie vie.
Le sénateur Fraser : Il y a aussi d'autres cas. Monsieur le président, le sénateur Boisvenu et moi n'arriverons pas à être d'accord à ce sujet.
[Traduction]
Le président : Sénateur Fraser, je voudrais simplement un éclaircissement. Comme nous n'avons pas vu ces amendements avant qu'ils ne nous soient présentés, nous essayons de les lire et de vous écouter. Je veux être certain d'avoir bien compris. L'amendement que vous proposez se rapporte à un alinéa qui, si je comprends bien, concerne la période d'inadmissibilité des demandes de suspension du casier ou de libération conditionnelle. L'alinéa b) vise les personnes faisant l'objet d'une poursuite pour les infractions les plus graves. Le libellé actuel s'applique à celles qui ont commis plus de trois infractions ayant fait, toutes les trois, l'objet d'une poursuite par voie de mise en accusation ou passibles de l'emprisonnement à perpétuité. Ce sont des infractions extrêmement graves. Si j'ai bien compris, vous estimez que nous devrions prévoir une exception pour quelqu'un qui a eu, comme vous l'avez dit, une très mauvaise journée, qui s'est retrouvé avec trois infractions punissables par mise en accusation dont l'une est passible de l'emprisonnement à perpétuité.
Le sénateur Fraser : Si nous pouvions laisser de côté les infractions d'ordre militaire pour le moment étant donné qu'elles font l'objet d'un régime légèrement différent, mon amendement ne s'y rapporterait pas. Il concernerait les trois infractions dont chacune a fait l'objet d'une poursuite par voie de mise en accusation.
Je ne propose pas cela pour les personnes qui ont commis les crimes les plus haineux, un meurtre, car vous ne pouvez pas obtenir la libération conditionnelle, de toute façon, puisque la peine est l'emprisonnement à perpétuité et qu'elle n'expire jamais. Je ne suggère pas de permettre à ceux qui ont commis les crimes les plus haineux puissent s'en tirer impunément et d'obtenir une libération conditionnelle ou une suspension de leur casier. L'amendement que je propose ici ne s'appliquerait probablement qu'à quelques personnes, mais pour ces quelques personnes, cela pourrait représenter une différence très importante.
Nous savons tous que les gens peuvent perdre complètement les pédales, surtout quand ils sont jeunes, pendant un jour ou deux, et faire des choses terribles. Je parle de ce qui se passerait dans une même journée, car l'amendement fait mention d'un incident ou d'une série d'incidents. Nous en avons énormément discuté de ce côté-ci de la table et je dirais simplement que pour être certains de ne pas viser les personnes que nous ne voulons pas viser, nous devrions apporter cette modeste modification au projet de loi. Nous ne proposons certainement pas de faire bénéficier les récidivistes de mon amendement. Ce n'est pas du tout son but.
Le président : Son but serait toutefois de créer une exception pour les personnes qui ont fait l'objet d'une poursuite par voie de mise en accusation pour trois infractions. Tel est son effet.
Le sénateur Fraser : L'exemption s'appliquerait à trois infractions commises à peu près en même temps.
Le président : Votre amendement ne dit pas que c'est en même temps.
Le sénateur Fraser : Il le dit.
Le président : Je ne vais pas en discuter. Je voulais seulement m'assurer d'avoir bien compris.
Le sénateur Baker : Il y a bien des années, nous appelions cela un délit. Autrement dit, les infractions résultent-elles d'un délit? Étant donné la rapidité avec laquelle nous adoptons les modifications au Code criminel, il y a 30 ans, quelqu'un aurait été accusé d'une infraction et aujourd'hui, pour le même délit, cette personne pourrait être accusée de trois ou quatre infractions punissables par mise en accusation résultant du même délit — autrement dit, du même acte criminel. C'est, je pense, ce dont nous avons discuté en détail, privément, pour arriver à cet amendement. C'est pour éviter de viser une personne accusée de quatre ou cinq infractions criminelles suite au même délit, autrement dit, à un seul acte criminel. L'amendement préciserait que les infractions doivent résulter de trois délits différents. Je voulais utiliser le mot « délit », mais le légiste a dit que j'étais trop vieux jeu et n'a pas accepté le mot « délit ». S'il l'avait accepté, le texte aurait été beaucoup plus clair, car vous auriez pu comprendre, monsieur le président. Même si vous êtes beaucoup plus jeune que moi, vous auriez compris exactement ce que j'ai voulu dire.
Le président : Je pense que je vais vous arrêter là.
Le sénateur Angus : Nous parlons de « délit civil » au Québec.
Le président : Merci. Je crois que nous avons suffisamment fait le tour de cet amendement. Cela met fin au débat sur l'amendement proposé par le sénateur Fraser.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le président : Chers collègues, compte tenu de vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
L'article 115 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : J'ai un autre amendement à proposer, monsieur le président.
[Français]
Le sénateur Fraser : Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 115, à la page 66, par suppression des lignes 25 à 27.
[Traduction]
Tel qu'il est libellé, le projet de loi permettrait au gouverneur en conseil, au Cabinet, par décret, d'ajouter ou de supprimer — bien entendu, le plus inquiétant, c'est l'ajout — une infraction à l'annexe I alors qu'une infraction visée à l'annexe I est l'un des motifs qui permet de refuser pour toujours l'admissibilité à la suspension du casier ou à la libération conditionnelle. Nous estimons que c'est conférer un pouvoir énorme au gouvernement — énorme, pour ne pas dire potentiellement arbitraire. D'autres mécanismes peuvent être utilisés. Normalement, si vous allez jusqu'à définir une infraction pour laquelle le casier ne pourra jamais être suspendu, c'est-à-dire pour laquelle aucune libération conditionnelle ne sera jamais accordée, cela ne se fait pas au moyen d'une mesure aussi arbitraire qu'un décret. L'idéal serait de le faire en adoptant une loi. Vous devriez au moins utiliser le processus de réglementation qui exige des consultations et une publication préalable ainsi que d'autres formalités. Un simple décret ne semble pas souhaitable.
Le président : Chers collègues, avez-vous des observations ou des réponses?
Comme il n'y a pas d'autre débat, plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le président : Compte tenu de vos réponses, je déclare l'amendement proposé rejeté.
L'article 115 est-il maintenant adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
Chers collègues, l'article 131 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Fraser : Si vous le permettez, l'amendement que vous avez sous les yeux proposait une modification corrélative à l'amendement que les collègues viennent de rejeter.
Le président : L'article 131 est donc adopté.
L'article 132 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 136 est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Fraser : Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 136, page 75,
a) par substitution, à la ligne 18 de la version anglaise, de ce qui suit :
« serving their sentence or »
b) par substitution, aux lignes 21 et 22, de ce qui suit :
« chargé de l'application de la loi ».
[Traduction]
Cet amendement se rapporte aux facteurs dont le ministre peut tenir compte pour décider s'il consent au transfèrement du délinquant canadien qui purge une peine de prison dans un autre pays. Le projet de loi énonce une très longue liste de facteurs, mais le dernier alinéa de cette très longue liste porte que le ministre peut tenir compte de tout autre facteur qu'il juge pertinent.
À notre avis cela va trop loin en disant que le ministre peut tenir compte de n'importe quoi d'autre. Par conséquent, nous proposons de supprimer le dernier alinéa et de s'en tenir à la liste — une très longue liste que je ne vais pas vous lire — de facteurs dont le ministre peut tenir compte. Cette liste nous semble complète et même exhaustive.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
Chers collègues, voulez-vous formuler des observations ou débattre au sujet de l'amendement du sénateur Fraser?
Le sénateur Angus : Je m'opposerai à cet amendement pour les raisons suivantes. Premièrement, je ne prétends pas citer textuellement le sénateur Fraser, mais elle a dit plus tôt que lorsque les rédacteurs rédigent des lois, on ne peut pas s'attendre à ce qu'ils envisagent toute éventualité — c'était il y a environ une heure et 27 minutes. Bien entendu, l'honorable sénateur comprend très bien que lorsqu'on dresse ce genre de listes, on risque de se retrouver dans la terrible situation de l'inclusio unius est exclusio alterius, ce qui signifie que lorsqu'on précise un certain nombre de choses, on risque d'en oublier d'autres. Il y a d'ailleurs une règle d'interprétation des lois à cet effet.
Par conséquent, je me permets d'affirmer que la phrase « tout autre facteur qu'il juge pertinent » est extrêmement importante dans ce cas. La liste que vous avez qualifiée de « très longue » n'est pas si longue, en réalité. Elle a été établie, nous a-t-on dit, je crois — et c'est tout à fait logique — pour décrire le genre de facteurs que le ministre devrait examiner.
Nous avons entendu dire, et j'en ai fait l'expérience personnelle, que le ministre a une grosse pile de demandes de transfèrement sur son bureau et qu'il y a parfois eu des critiques quand des demandes ont été rejetées par les tribunaux. C'est devenu un problème pour l'administration de cette partie de notre loi. Je pense que cela nous a été dit par le ministre, M. Toews, et certains fonctionnaires.
Le principe ici est qu'il s'agit surtout d'une question administrative, car le pouvoir discrétionnaire du ministre a toujours existé. Cela décrit le genre de choses dont le ministre devrait tenir compte. Il est dit « à son avis » et cetera. Je crois que ou bien vous n'êtes pas du tout d'accord avec cet article ou bien vous le laissez tel quel.
Le sénateur Fraser : D'accord.
Le sénateur Angus : Ou vous dites : « Il est important pour les Canadiens de pouvoir revenir ici pour purger le reste de leurs peines dans des établissements canadiens » ou non, selon les circonstances. Si vous étiez le ministre, vous comprendriez, je pense, que nous avons besoin de cet outil pour savoir quelle est l'intention de la loi.
Je m'oppose à cet amendement pour ces raisons et j'espère que nous allons adopter cet article tel qu'il nous a été proposé dans le projet de loi C-10.
Le sénateur Fraser : J'ai le plus grand respect pour mon éminent collègue dont le latin est bien meilleur que le mien, mais je dirais que, comme chacun sait, une bonne partie de la discussion au sujet de ce projet de loi a porté sur l'utilisation répétée de l'expression « à son avis ». La liste de facteurs dont le ministre peut tenir compte comprend 11 alinéas et trois sous-alinéas. Cela va du risque que le retour au Canada du délinquant mette en péril la sécurité publique à la santé du délinquant.
En ce qui nous concerne, nous partageons les inquiétudes exprimées notamment par l'Association canadienne des libertés civiles. Nous partageons ses préoccupations à l'égard de la latitude que confère au ministre l'expression souvent répétée « à son avis », mais ces mots sont là. Au lieu de proposer un amendement pour supprimer tous ces facteurs, nous proposons de limiter au moins très légèrement ce que le ministre peut faire s'il le juge bon. Il est assez évident, du moins pour certains d'entre nous, que cette liste qui confère des pouvoirs discrétionnaires au ministre résulte d'un certain nombre de jugements des tribunaux qui ont reproché au ministre certaines décisions peut-être arbitraires qui ont été prises récemment; ce sont des décisions récentes. Ce projet de loi conférera au ministre toute latitude pour faire à peu près n'importe quoi, et nous pensons qu'il faudrait au moins prévoir cette dernière petite restriction à l'égard de ce qu'un ministre peut faire.
Le sénateur Angus : Comme vous l'avez dit vous-même, la liste vous semble exhaustive. Néanmoins, pour les raisons que vous avez expliquées plus tôt ce matin, il se peut qu'elle ne le soit pas. Dans une société en pleine évolution comme la nôtre, dans une société ouverte, où tellement de choses sont très différentes, même en 2012, de ce qu'elles étaient il y a un an, si nous voulons vraiment donner au ministre un cadre législatif plus souple et plus complet pour examiner les demandes de transfert, je pense que la suppression de cette clause lui lierait les mains. J'insiste pour que nous la laissions là.
Le sénateur Jaffer : Sénateur Angus, je comprends exactement ce que vous dites à propos des pouvoirs discrétionnaires à donner au ministre. Tout à l'heure, le sénateur Lang a parlé de donner des pouvoirs discrétionnaires à la police et pourtant, nous enlevons des pouvoirs discrétionnaires à ceux à qui nous sommes censés en donner, c'est-à- dire aux juges. Nous soufflons le chaud et le froid en disant : « Donnez des pouvoirs discrétionnaires au ministre, mais enlevez-en aux juges. »
Les tribunaux ont vivement critiqué la façon dont le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire. Cela a fait l'objet de nombreuses causes. Un des fonctionnaires a dit que cette disposition visait à tenir compte des jugements rendus par les tribunaux et à conférer davantage de pouvoirs discrétionnaires au ministre.
Je ne comprends plus. Vous donnez davantage de pouvoirs discrétionnaires au ministre et à la police, davantage de pouvoirs discrétionnaires aux procureurs de la Couronne, mais vous en enlevez aux juges. Je ne comprends pas ce genre de raisonnement.
Le président : Je crois que cela termine le débat sur l'article 136.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Non.
Des voix : D'accord.
Le président : Ayant entendu vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L'article 136 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Bien entendu, l'article 136 concernait la Loi sur le transfèrement international des délinquants. Le prochain article que nous allons étudier porte également sur le même sujet.
L'article 166 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Chers collègues, nous allons maintenant étudier l'article 167, mais avant, il y a un certain nombre d'articles qui concernent également le système de justice pénale pour les adolescents, le sujet que nous allons maintenant aborder.
Chers collègues, l'article 167 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Fraser : J'ai un amendement à proposer.
Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 167, à la page 87,
a) par substitution, à la ligne 18, de ce qui suit :
« l'un des éléments constitutifs est l'infliction intentionnelle » :
b) par substitution, à la ligne 26, de ce qui suit :
« qu'il en résulte des lésions corporelles et dont l'un des éléments constitutifs est le caractère délibéré. »
C'est un léger raffinement de la définition proposée pour l'expression « infraction avec violence ». Cette expression revient à de nombreuses reprises dans les modifications que ce projet de loi propose d'apporter à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Le problème est que la définition qui figure actuellement dans le projet de loi est la suivante :
« infraction avec violence » Selon le cas :
a) infraction commise par un adolescent dont l'un des éléments constitutifs est l'infliction de lésions corporelles;
Nous proposons de préciser clairement dans cette définition que l'infliction de lésions corporelles doit avoir été intentionnelle ou, si vous allez plus loin dans la définition, que l'adolescent en question doit avoir été conscient de la probabilité qu'il allait causer des lésions corporelles et qu'il les a néanmoins causées délibérément.
Nous cherchons ici à éviter que la définition de « infraction avec violence », qui a des conséquences sur le plan de la punition et de divers autres éléments du projet de loi, n'englobe pas certaines choses qui arrivent par accident.
Au cours d'une audience précédente, j'ai donné l'exemple d'un jeune — car il faut être jeune pour le faire — qui lance des boules de neige contre les autobus. Une boule de neige part en l'air en direction de l'autobus, l'autobus se déplace et la boule de neige frappe une vieille dame comme moi qui se trouvait sur le trottoir juste derrière l'autobus. Il se peut qu'elle soit blessée, qu'elle ait une coupure à la tête. Néanmoins, l'adolescent n'avait pas l'intention de causer des lésions corporelles à cette piétonne et la loi ne devrait pas le traiter comme s'il en avait eu l'intention.
J'espère avoir pu expliquer le but de cet amendement.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
Avez-vous des observations?
Le sénateur Runciman : Le sénateur Fraser n'a pas utilisé l'expression « édulcorer », mais tel est l'effet de cet amendement et de cette interprétation d'une « infraction grave avec violence ».
Le sénateur Fraser : Je ne parle pas d'une « infraction grave avec violence », mais simplement d'une « infraction avec violence ».
Le sénateur Runciman : Oui. Cela nous amène à la question de la détention avant le procès et de l'interdiction de publication, qui sont des éléments de cette loi.
À notre avis, sénateur Fraser, il n'est pas évident que ces modifications viseraient les comportements imprudents ou irresponsables que la définition cherchait à inclure. Une conduite imprudente peut avoir des résultats tragiques, mais peut- on dire qu'on a causé intentionnellement des lésions corporelles?
Dans son rapport, le juge Nunn a parlé de la nécessité d'une définition plus large d'une « infraction avec violence » et c'est reflété dans la loi. Elle élargit la définition pour y inclure une infraction au cours de laquelle :
[...] un adolescent met en danger la vie ou la sécurité d'une autre personne en créant une probabilité marquée qu'il en résulte des lésions corporelles.
Cela inclut les comportements imprudents et c'est vraiment nécessaire pour protéger le public.
Le sénateur Fraser : Sans vouloir vous offenser, je ne pense pas que ce libellé englobe un comportement imprudent et le juge Nunn était d'accord à ce sujet quand il a comparu devant nous.
Cela englobe tout ce qui cause ou va probablement causer des lésions corporelles, que l'adolescent ait eu ou non l'intention de les causer ou qu'il ait pu ou non raisonnablement s'attendre à ce que son geste crée un risque grave ou un risque de lésions corporelles.
Nous sommes d'accord pour dire que les infractions avec violence doivent être prises au sérieux. J'éviterais d'employer le mot « grave », car cela entre dans une définition différente, mais ce sont des infractions qu'on ne doit pas prendre à la légère. Néanmoins, cela ne devrait pas inclure une conduite qui était au départ relativement innocente, mais qui a eu des conséquences vraiment inattendues et imprévisibles.
Le sénateur Runciman : Nous ne sommes pas d'accord et nous englobons ici les conséquences tragiques.
Le sénateur Fraser : Parfois tragiques, mais parfois pas si tragiques.
Le sénateur Runciman : Oui, mais le juge Nunn s'est penché sur les limitations des tribunaux en pareilles situations. Il a fait des recommandations et je crois que cette loi en tient compte.
Le sénateur Fraser : J'aurai plus tard un autre amendement à proposer qui pourra peut-être y remédier.
Le président : Je veux être sûr d'avoir bien compris. Vous avez dit quelque chose en réponse au sénateur Runciman. Vous avez dit qu'à votre avis, et j'ai pensé que vous parliez du libellé actuel du projet de loi, la définition n'inclurait pas un comportement inconsidéré, ou ai-je mal compris?
Le sénateur Fraser : Elle engloberait un comportement inconsidéré, mais la définition d'une « infraction avec violence » qui figure actuellement dans le projet de loi n'exclurait pas non plus un comportement qui ne serait pas inconsidéré.
Lancer une boule de neige, c'est le genre de choses que font les adolescents tandis que si vous placez une grosse pierre au milieu de votre boule de neige et que vous la lancez contre quelqu'un c'est un geste inconsidéré qui entrera certainement dans cette définition.
Nous essayons de faire en sorte d'inclure ce qui, aux yeux de tous, constitue vraiment une infraction avec violence au lieu d'aller à la pêche au filet traînant, pour reprendre la même analogie que tout à l'heure, afin de ne pas attraper des gens qu'on ne voulait pas attraper.
Le président : Pour bien comprendre, votre amendement ferait mention du caractère délibéré des lésions corporelles.
Le sénateur Fraser : Oui.
Le président : Pour prendre un exemple de comportement inconsidéré, lorsqu'on fait une utilisation imprudente d'une automobile en roulant à grande vitesse dans la rue, c'est sans d'avoir l'intention de blesser qui que ce soit, mais c'est totalement imprudent et inconsidéré; le délinquant perd le contrôle de l'automobile et cause des lésions corporelles.
En pareil cas, l'infliction des lésions n'était peut-être pas intentionnelle, mais le comportement était si excessif et imprudent qu'il a causé des lésions corporelles.
Le sénateur Fraser : Ce serait toujours visé à l'alinéa c) de la définition d'une infraction avec violence, même avec notre amendement.
Le président : Cela introduit la notion de geste intentionnel. Il faut que le délinquant ait eu cette intention avant de commettre l'infraction.
Le sénateur Fraser : Aux termes de la définition de l'alinéa c), ce qui serait intentionnel, c'est d'avoir roulé imprudemment à grande vitesse dans la rue. Tout le monde sait, même un jeune de 12 ans, que si vous roulez à grande vitesse dans une rue, vous allez probablement causer un accident. Ce serait visé par la définition.
Le président : Ce n'est pas dans votre amendement.
Le sénateur Fraser : Si, c'est dans mon amendement.
Le président : Très bien.
Paula Kingston, avocate-conseil à la Section de la justice applicable aux jeunes a écouté et est prête à formuler quelques observations. Pourquoi ne pas le faire maintenant et le sénateur Cowan voudra peut-être répondre ensuite.
Paula Kingston, avocate-conseil, Section de la justice applicable aux jeunes et des initiatives stratégiques est maintenant avec nous à la table.
Madame Kingston, vous avez entendu la discussion. Avez-vous des commentaires à formuler qui pourraient nous éclairer?
Paula Kingston, avocate-conseil, Section de la justice applicable aux jeunes et des initiatives stratégiques, ministère de la Justice Canada : Oui. Ces dispositions sèment peut-être un peu la confusion, car elles modifient les diverses définitions des infractions qui figurent dans le projet de loi.
Je dois préciser que la nouvelle définition d'une infraction grave est celle qui s'applique à la détention avant le procès, mais ce n'est pas ce dont nous parlons ici.
La définition d'une infraction avec violence entre en jeu dans les dispositions sur la publication qui lèvent l'interdiction de publication et c'est également un des critères pour envoyer un adolescent en détention.
Si vous examinez la définition d'une infraction avec violence, elle comporte trois éléments. Il y a d'abord une infraction dont l'un des éléments constitutifs est l'infliction de lésions corporelles. Il y a ensuite une infraction qui a consisté à tenter ou menacer de commettre une infraction visée à l'alinéa a), c'est-à-dire l'infliction de lésions corporelles; dans le cas de b) il y a eu une menace et dans le cas de c) il s'agit d'une infraction commise par un adolescent au cours de la perpétration de laquelle il met en danger la vie ou la sécurité d'une autre personne en créant une probabilité marquée qu'il en résulte des lésions corporelles. L'infraction de l'alinéa c) est la mise en danger; il n'y a pas eu effectivement de lésions corporelles. Je tenais à apporter ces précisions.
Le président : Je vous en remercie.
Le sénateur Cowan : C'est seulement cela. C'est a), b) ou c). La situation que vous avez décrite relèverait de c), je crois.
Mme Kingston : Elle relèverait de c).
Le sénateur Cowan : Elle relèverait de c). L'amendement que propose le sénateur Fraser se rapporte à a).
Le sénateur Fraser : Il se rapporte aussi à c). J'ai utilisé le mot « délibéré ».
Le sénateur Cowan : Si c'est délibéré, c'est à c).
Le président : Sans vouloir me lancer dans un débat, c) ne couvre pas l'infliction de lésions personnelles, mais une probabilité marquée de lésions corporelles; cela correspond à a) et dans l'exemple que j'ai donné, il y a effectivement des lésions corporelles ce qui, selon moi, serait visé par l'alinéa a).
Le sénateur Jaffer : Madame Kingston, l'UNICEF nous a dit au cours de son témoignage que cette disposition serait contraire au paragraphe 37(2) de la Convention relative aux droits de l'enfant selon laquelle la détention ou l'emprisonnement d'un adolescent ne peut être qu'une mesure de dernier ressort.
Je sais que vous avez fait une évaluation de la convention. Estimez-vous que cette disposition répond aux exigences de la convention?
Mme Kingston : Premièrement, cette définition d'une infraction avec violence n'est pas celle qui s'applique à la détention avant le procès. C'est une infraction grave.
Le sénateur Jaffer : Je ne parle pas de la détention avant le procès. Je parle seulement de l'infraction avec violence.
Mme Kingston : Oui. Quant à savoir si c'est ou non en dernier ressort, toutes les dispositions actuelles de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents restent telles quelles et n'ont pas été modifiées. La loi contient un certain nombre de dispositions stipulant que la détention avant le procès et les peines de détention ne peuvent être que des mesures de dernier ressort.
Le sénateur Jaffer : Cela répond-il aux exigences de la convention?
Mme Kingston : Oui.
Le sénateur Jaffer : Nous avons mentionné le juge Nunn à plusieurs reprises. Voici ce qu'il a dit quand il est venu ici :
[...] lorsque vous dites « ayant commis plusieurs infractions avec violence », vous devez vous assurer qu'il s'agit bien d'une « infraction avec violence » selon la définition. Il est difficile de convaincre les tribunaux qu'il s'agit bien d'infractions avec violence. Un vol de voiture qui entraîne des gestes violents par la suite ne constitue pas une infraction avec violence.
Si nous citons le juge Nunn, nous devrions également citer ce qu'il a déclaré ici.
Le président : Je crois que cela met fin à notre débat concernant l'amendement du sénateur Fraser à l'article 167.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Compte tenu de vos réponses, je déclare l'amendement rejeté, avec dissidence.
L'article 167 est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 168 est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Fraser : Monsieur le président, j'ai un amendement à proposer :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 168, à la page 87...
[Traduction]
Le président : Je suis désolé d'interrompre le sénateur Fraser. D'après ce que j'ai vu, il y a d'autres amendements à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Sénateur Fraser, je vais vous donner la parole.
Le sénateur Fraser : Merci infiniment. Je vais simplement recommencer au lieu de reprendre au milieu d'une phrase.
[Français]
Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 168,
a) à la page 87, par substitution
(i) aux lignes 33 à 35, de ce qui suit :
« cents vise la protection durable du public en :
(i) obligeant les adolescents à répondre de »;
ii) à la ligne 39, de ce qui suit :
« (ii) favorisant la réadaptation et la réin- »;
b) à la page 88, par substitution à la ligne 1, de ce qui suit :
« (iii) contribuant à la prévention du crime. »
[Traduction]
Ces amendements font suite aux suggestions de nombreux témoins, notamment le gouvernement du Québec. L'élément clé est, en fait, la première proposition qui est d'assurer la protection durable du public. Tel serait l'objectif du système de justice pénale pour les adolescents.
Pour le moment, le projet de loi porte que le système de justice pénale pour les adolescents vise à protéger le public. Contrairement au projet de loi, la loi actuelle parle de la protection durable du public. Nous proposons de rétablir ce libellé en reconnaissant que, comme le confirme la majorité des preuves et des recherches dont nous avons pris connaissance, la réadaptation et tous les autres principes du système de justice pénale pour les adolescents assureront la protection durable du public s'ils sont bien administrés et que l'enfermement des gens ne fait pas grand-chose pour assurer la protection durable du public.
L'objectif du système de justice pénale, que ce soit pour les adultes ou les adolescents, est de protéger le public. À notre avis, l'expression « protection durable » reflète mieux ce que nous essayons de faire que le simple verbe « protéger » auquel on peut trop facilement donner le sens de « enfermer les gens et jeter la clé ».
Le sénateur Runciman : On remarquera sans doute que le sénateur propose ses amendements en français, car je pense qu'on pourrait parler d'un amendement du Québec. Elle a mentionné de nombreux témoins et, en ce qui me concerne, je ne me souviens pas que de nombreux témoins aient demandé ce changement, mais elle pourra peut-être me rafraîchir la mémoire.
J'ai abordé la question avec un certain nombre de témoins, y compris un ancien ministre de la Justice du Québec, car j'avais du mal à comprendre le problème. Je crois que le changement de terminologie englobe la protection à court terme et à long terme du public. C'est conforme à la recommandation de la commission Nunn, monsieur le président.
Bien entendu, le parti veut rétablir l'ancienne définition qui, à mon avis, n'accorde pas assez d'importance à la protection à court terme du public. La définition qui figure dans le projet de loi C-10 couvre toutes circonstances et ne réduit en rien l'importance de la réadaptation.
Le sénateur Fraser : Je précise seulement que je n'ai pas dit qu'énormément de témoins ont demandé ce changement. J'ai parlé de l'énorme quantité de preuves selon lesquelles le système de justice pénale fonctionne mieux dans l'intérêt de l'enfant et que nous avons l'obligation légale de fonctionner dans l'intérêt de l'enfant, mais aussi dans l'intérêt de la société si nous voulons des résultats à long terme. Autrement dit, si nous sauvons les enfants, ils pourront mener une vie longue, productive et utile comme citoyens de notre pays. Je n'ai pas dit que 500 témoins avaient demandé précisément cette modification. Elle a été suggérée par un certain nombre de gens, notamment le gouvernement du Québec, mais il n'était pas le seul. Je ne veux pas faire dire aux autres ce qu'ils n'ont pas dit.
Le sénateur Runciman : Je ne pense pas que le libellé actuel du projet de loi soit contraire à l'idée d'une protection durable. Si vous prenez les conférences fédérales-provinciales-territoriales, je pense que pratiquement toutes les autres compétences sont d'accord pour que cet élément figure dans la loi. Cela préoccupe surtout, je crois, le gouvernement du Québec, mais je ne dirais pas que c'est l'ensemble de la population québécoise, et mes collègues pourront peut-être en parler brièvement. Quand j'ai soulevé la question à plusieurs reprises, les opinions des témoins à qui je l'ai posée ne partageaient pas les préoccupations du gouvernement du Québec.
Le sénateur Fraser : Tout dépend à qui la question a été posée, n'est-ce pas? Je me souviens d'avoir posé moi-même la même question à d'autres témoins. J'ai le plus grand respect pour les opinions du gouvernement du Québec, peut- être parce que je suis Québécoise, mais je ne claque pas les talons en disant : « Oui, monsieur ». Je crois que c'est un amendement utile et constructif.
Le président : Sénateur Runciman, à propos de vos commentaires, vous pensez que le but et l'objectif de ces modifications est la protection à court terme et à long terme du public.
Le sénateur Runciman : Des témoins l'ont également affirmé, monsieur le président.
Le président : Chers collègues, je crois que cela met fin à notre débat sur la motion du sénateur Fraser.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Chers collègues, compte tenu de vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
Le sénateur Cowan : Avec dissidence.
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
L'article 168 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 169 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : J'ai un amendement, monsieur le président.
Le président : Oui, sénateur Fraser?
Le sénateur Fraser : Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 169, à la page 88,
a) par substitution, aux lignes 21 à 24, de ce qui suit :
« grave ou d'une infraction avec violence ou, si plusieurs accusations pèsent toujours contre lui ou qu'il a fait l'objet de plusieurs déclarations de culpabilité, d'une infraction autre qu'une infraction grave ou une infraction avec violence; »;
b) par substitution, à la ligne 38, de ce qui suit :
« commettra une infraction grave ou une infraction avec violence, »
c) par substitution, à la ligne 40, de ce qui suit :
« accusé d'une infraction grave ou d'une infraction avec violence et que sa ».
Chers collègues, cela se rapporte à la disposition du projet de loi qui a été proposée suite à ce qu'on pourrait considérer comme la principale recommandation de la commission Nunn, à savoir qu'il devrait être possible de mettre des adolescents en détention avant le procès, avant la détermination de la peine, dans certaines circonstances.
La cause qui a conduit à l'établissement de la commission Nunn portait sur une longue série d'accusations de vol d'automobile et de conduite imprudente causant la mort d'une femme innocente. À peu près tout le monde reconnaît, je pense, qu'il faudrait prévoir la détention des adolescents avant le procès dans certaines circonstances soigneusement contrôlées. Je crois qu'en général, les garanties établies dans cette partie du projet de loi C-10 devraient faire en sorte que les adolescents placés en détention avant le procès ne soient pas détenus injustement. Je pense que ces dispositions offrent une garantie contre la détention inappropriée d'adolescents.
Néanmoins, vous vous souviendrez peut-être du témoignage très intéressant de Mme Marie-Pierre Blouin, l'avocate de l'aide juridique de Longueuil, au Québec. Mme Blouin nous a dit que tel qu'il est actuellement libellé, le projet de loi ne s'appliquerait probablement pas à tous les adolescents que nous estimons nécessaire de détenir avant le procès, car le premier critère est que l'adolescent doit avoir été accusé d'une infraction grave ou avoir de lourds antécédents. Toutefois, dans ce projet de loi, selon la définition, une infraction grave est un acte criminel passible d'un emprisonnement de cinq ans ou plus. Comme Mme Blouin nous l'a fait remarquer, si l'on parle simplement d'infractions graves, cela pourrait ne pas s'appliquer à certaines autres infractions disons dangereuses.
Par conséquent, il nous semble souhaitable de dire que l'adolescent doit être accusé d'une infraction grave ou d'une infraction avec violence. De toute évidence, nous nous inquiétons davantage de la violence ou du risque de violence que des infractions non violentes, mais graves quand nous parlons de la détention avant le procès. C'est pourquoi nous avons proposé de faire mention à la fois d'une infraction grave et d'une infraction avec violence.
Néanmoins, comme nous en avons parlé un peu plus tôt, ce projet de loi contient une définition particulièrement large de ce qui constitue une infraction avec violence, une définition qui ratisse trop large selon moi. Elle s'appliquerait à des comportements dont on n'aurait jamais pu imaginer qu'ils aient ou qu'ils puissent avoir des conséquences violentes.
Par conséquent, avec énormément de regret et sachant que nous allons adopter une loi inadéquate et inappropriée à bien des égards, mais pour éviter une situation encore plus inadéquate et le risque d'injustice pour les adolescents, je retire cet amendement.
Le président : Merci, sénateur Fraser.
L'article 169 est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 172 est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le sénateur Fraser : Je voudrais un vote par appel nominal sur cet article, s'il vous plaît, monsieur le président.
Le président : Sur l'article 172?
Le sénateur Fraser : Oui.
Le président : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Wallace?
Le sénateur Wallace : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Angus?
Le sénateur Angus : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Baker?
Le sénateur Baker : Non.
[Français]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Boisvenu.
Le sénateur Boisvenu : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Chaput.
Le sénateur Chaput : Non.
[Traduction]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Cowan?
Le sénateur Cowan : Non.
[Français]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Dagenais.
Le sénateur Dagenais : Oui.
[Traduction]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Fraser.
Le sénateur Fraser : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Frum.
Le sénateur Frum : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Lang?
Le sénateur Lang : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Runciman.
Le sénateur Runciman : Oui.
Mme Anwar : Pour : sept; contre : quatre.
Le président : Adopté.
L'article 185 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Monsieur le président, je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié, à l'article 185, à la page 94, par substitution, à la ligne 15, de ce qui suit :
« fique à l'adolescent ayant atteint l'âge de quatorze ans et déclaré coupable d'une ».
Tel qu'il est actuellement libellé, le projet de loi C-10 permettrait au tribunal d'autoriser la publication de l'identité d'un adolescent de 12 ans qui a été déclaré coupable d'une infraction avec violence. Nous venons de discuter de la définition très large d'une « infraction avec violence ».
La façon dont le système de justice pénale pour les adolescents a fonctionné jusqu'ici a eu pour effet d'autoriser la levée de l'interdiction de publication uniquement après que le jeune délinquant a atteint l'âge de 14 ans. Nous avons entendu des témoignages selon lesquels c'est quand même un très jeune âge compte tenu des torts que cela peut causer à cet adolescent, pendant toute sa vie, sur le plan de sa réputation et de son estime de soi. Les témoins nous ont parlé du risque probable de choses comme l'intimidation à l'école et nous savons que c'est le genre de problème qui peut, trop souvent, conduire un adolescent jusqu'au suicide.
Il est certain que ce genre de notoriété peut causer des torts très importants à un enfant de 12 ans. Je ne vois pas comment nous pourrions nous acquitter de notre obligation de respecter l'intérêt supérieur de l'enfant, sur lequel M. le juge Nunn a tellement insisté au cours de son témoignage, si nous autorisons la publication de l'identité de jeunes délinquants âgés de 12 ans. Par conséquent, cet amendement porte que l'adolescent doit avoir atteint l'âge de 14 ans pour que son identité puisse être publiée.
Le président : Merci, sénateur.
Le sénateur Runciman : Je crois important de mentionner ici que cela élargit le pouvoir discrétionnaire du juge. Tout à l'heure, nous avons entendu le sénateur Jaffer s'inquiéter de ce que les juges perdent leur pouvoir discrétionnaire en disant qu'elle ne pouvait pas le comprendre. Dans ce cas-ci, le gouvernement élargit ce pouvoir discrétionnaire. Ce sera aux juges d'en décider. Cela doit seulement servir, si nécessaire, à protéger le public. Je pense que nous pouvons faire confiance aux juges pour qu'ils n'utilisent ce pouvoir que lorsque la sécurité du public est en jeu. Cette clause vise à protéger le public, surtout les enfants, nos propres enfants. Je ne peux pas appuyer l'amendement du sénateur Fraser.
Le président : Chers collègues, il semble — sénateur Fraser? Oui, prenez votre temps.
Le sénateur Fraser : Il serait plus approprié, si la sécurité du public est en jeu, d'ordonner que l'adolescent soit mis sous garde pour recevoir des soins. Les adolescents peuvent changer et plus ils sont jeunes, plus la possibilité qu'ils changent est grande, mais également plus cela risque de leur causer des torts durables.
Ce changement nous a été recommandé par des témoins allant de la commissaire à la protection de la vie privée au Conseil canadien des organismes provinciaux de défense des droits des enfants et des jeunes. Il ne rétablit pas tout à fait le statu quo dans le système de justice pénale pour les adolescents, mais il nous rapproche un peu de ce qui a été, d'après tout ce qu'on en a dit, une loi efficace.
Le sénateur Runciman : Nous avons entendu des témoignages au sujet de l'utilisation de cette disposition. Elle sera utilisée extrêmement rarement, dans des circonstances extraordinaires. Encore une fois, cela augmente le pouvoir discrétionnaire des juges. C'est un cas dans lequel nous devons dire que nous leur faisons confiance.
Le président : Chers collègues, je crois que cela met fin à notre débat sur l'amendement du sénateur Fraser à l'article 185.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : D'accord.
Des voix : Non.
Le président : La motion d'amendement — je termine par les mots « d'amendement ». Il semble y avoir une certaine confusion. Je n'ai peut-être pas parlé clairement. Je vais répéter.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le sénateur Baker : Absolument.
Le président : Chers collègues, ayant entendu vos réponses, je déclare l'amendement rejeté.
L'article 185 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : J'ai un autre amendement à proposer, monsieur le président.
Le président : Très bien.
[Français]
Le sénateur Fraser : Je propose :
Que le projet de loi C-10 soit modifié à l'article 185, à la page 94, par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :
« (5) Le gouverneur en conseil d'une province peut, par décret, soustraire la province à l'application du présent article ou fixer un âge supérieur à quatorze ans pour son application. ».
[Traduction]
C'est toujours en rapport avec l'interdiction de publication et la possibilité de la lever pour publier l'identité d'un jeune délinquant. Cela permettrait aux provinces de fixer un âge minimum plus élevé au-dessous duquel l'interdiction de publication ne pourrait pas être levée. Le modèle suivi ici est la disposition de la loi actuelle concernant l'imposition de peines pour adultes pour lesquelles l'âge minimum est normalement de 14 ans, mais que les provinces peuvent décider de relever à 16 ans. C'est un modèle qui respecte le fait que nous formons une fédération et qu'au sein du grand système législatif canadien il existe des normes de jugement différentes, d'une région à l'autre, quant à ce qui est socialement ou moralement approprié. Cela laisserait également aux diverses provinces suffisamment de marge de manœuvre pour établir les normes qu'elles estiment appropriées pour leur société, leur communauté et leur situation.
Le président : Merci, sénateur.
Le sénateur Runciman : Monsieur le président, j'ai parlé de l'accroissement du pouvoir discrétionnaire des juges à propos du dernier amendement et je ne vais pas me répéter, mais cet article vise à protéger les enfants et le public partout au Canada.
Le président : Je dirais deux choses, sénateur. Quand vous avez présenté votre amendement — j'ai peut-être mal compris ce que vous avez dit — j'ai cru vous entendre dire qu'il s'appliquait à la page 95.
Le sénateur Fraser : Non, je pense avoir dit 94.
Le président : J'ai peut-être mal entendu.
Le sénateur Fraser : Je lisais en français et c'était une longue journée après une longue semaine. Ma langue a peut- être fourché.
Le président : Je voulais simplement vérifier que c'est bien la page 94.
Le sénateur Fraser : C'est à la page 94, après la ligne 37.
Le président : Je précise seulement que votre amendement aurait pour conséquence de créer d'autres dispositions du Code criminel, d'importantes dispositions du Code criminel.
Le sénateur Fraser : Non, de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Le président : Désolé, les dispositions de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents s'appliquant dans les diverses provinces. Il y aurait des règles différentes, des normes différentes dans chaque province au lieu d'une norme pour toutes les provinces.
Le sénateur Fraser : C'est déjà le cas. Une disposition similaire existe déjà dans la loi et va y rester à l'égard de l'imposition de peines pour adultes. C'est une différence entre la façon dont le Canada aborde la justice pénale pour les adolescents et le Code criminel. Bien entendu, le Code criminel est le même dans l'ensemble du pays. Néanmoins, il y a quelques années, nous avons décidé que dans le cas des jeunes délinquants, il était souhaitable de laisser aux provinces une certaine latitude en raison des différences idéologiques importantes qui existent d'une région à l'autre en ce qui concerne la justice pénale pour les adolescents.
Le président : Je comprends. Merci pour cette explication.
Chers collègues, je crois que cela termine le débat sur la motion du sénateur Fraser. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?
Des voix : Non.
Des voix : D'accord.
Le président : Ayant entendu vos réponses, je déclare l'amendement rejeté, avec dissidence.
L'article 185 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
L'article 186 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Laissez-moi rafraîchir ma mémoire, monsieur le président, si vous le voulez bien. Oui, d'accord.
Le président : Adopté?
Le sénateur Cowan : Avec dissidence.
Le sénateur Fraser : L'article 186 est acceptable. En fait, il est bon. Il y a quelques bonnes choses dans ce projet de loi.
Le président : Il nous a fallu longtemps pour le découvrir.
Le sénateur Fraser : Ma liste est courte, les doigts d'une seule main.
Le président : Cette étude dure depuis sept heures.
Nous allons maintenant passer à un article se rapportant à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et c'est l'article 206.
L'article 206 est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
C'était le seul article que nous avions à l'égard de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Nous en sommes maintenant à l'annexe.
L'annexe est-elle adoptée?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
L'article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
Le titre est-il adopté?
Le sénateur Fraser : D'accord.
Le président : Adopté.
Le projet de loi, modifié, est-il adopté?
Le sénateur Fraser : Pourrions-nous avoir un vote par appel nominal, s'il vous plaît, monsieur le président?
Mme Anwar : L'honorable sénateur Wallace.
Le sénateur Wallace : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Angus.
Le sénateur Angus : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Baker, C.P.
Le sénateur Baker : Non.
[Français]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Boisvenu.
Le sénateur Boisvenu : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Chaput.
Le sénateur Chaput : Non.
[Traduction]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Cowan.
Le sénateur Cowan : Non.
[Français]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Dagenais.
Le sénateur Dagenais : Oui.
[Traduction]
Mme Anwar : L'honorable sénateur Fraser.
Le sénateur Fraser : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Frum.
Le sénateur Frum : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Jaffer.
Le sénateur Jaffer : Non.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Lang.
Le sénateur Lang : Oui.
Mme Anwar : L'honorable sénateur Runciman.
Le sénateur Runciman : Oui.
Mme Anwar : Pour : sept; contre : cinq.
Le président : Nous déclarons le projet de loi, modifié, adopté.
Le comité autorise-t-il la greffière à renuméroter les articles pour tenir compte des articles du projet de loi qui ont été modifiés et à numéroter tout renvoi en conséquence?
Des voix : D'accord.
Le président : Le comité désire-t-il joindre des observations au rapport?
Des voix : Oui.
Le président : Avant de le faire, nous pourrions peut-être suspendre la séance pendant 15 ou 20 minutes et nous examinerons alors ces observations.
Le sénateur Fraser : Est-ce que ce sera à huis clos? Normalement, c'est le cas.
Le président : Oui, nous allons le faire à huis clos et le personnel de soutien de chaque sénateur peut rester dans la salle pendant cette discussion.
(La séance se poursuit à huis clos.)
(La séance publique reprend.)
Le président : Chers collègues, la motion à l'étude est la suivante :
Que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale des observations devant être jointes au rapport en tenant compte de la discussion d'aujourd'hui et en faisant toutes les corrections de forme, grammaticales et de traduction requises.
Est-ce d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Est-il convenu que je fasse rapport au Sénat du projet de loi modifié en y joignant des observations?
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté.
Chers collègues, cela met fin aux travaux de notre comité concernant le projet de loi C-10. Nous allons maintenant lever la séance.
(La séance est levée.)