Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 39 - Témoignages du 5 juin 2013
OTTAWA, le mercredi 5 juin 2013
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui ont été renvoyés le projet de loi C- 15, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence et le projet de loi C-350, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (responsabilisation des délinquants), s'est réuni aujourd'hui, à 16 h 19, pour étudier les projets de loi.
Le sénateur Bob Runciman (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour et bienvenue à mes collègues, à nos invités et aux membres du public qui suivent aujourd'hui la séance du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
Nous achevons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence. Nous allons procéder dans un instant à l'étude article par article de ce projet de loi.
Par la suite, nous allons commencer notre étude du projet de loi C-350, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (responsabilisation des délinquants).
Je rappelle à ceux qui nous regardent que les séances du comité sont publiques et qu'elles sont également diffusées sur le site web parl.gc.ca. Vous trouverez d'autres renseignements sur l'horaire des témoins sur ce même site web sous la rubrique « Comités du Sénat ».
Avant de procéder à l'étude article par article du projet de loi, je tiens à signaler aux membres du comité que des hauts fonctionnaires se trouvent dans la salle et qu'ils peuvent être invités à prendre place à la table pour répondre aux questions techniques des membres du comité : le colonel Mike Gibson, juge-avocat général adjoint de la Justice militaire, Cabinet du Juge-avocat général, lieutenant-colonel André Dufour, directeur juridique, Justice militaire — Opérations, Cabinet du Juge-avocat général et lieutenant-colonel Stephen Strickey, directeur juridique, Justice militaire stratégique, Cabinet du Juge-avocat général.
Nous allons maintenant passer à l'étude article par article. Est-il convenu de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
Êtes-vous d'accord de suspendre l'adoption du titre?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
Êtes-vous d'accord de suspendre l'adoption de l'article 1, qui contient le titre abrégé?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
Le comité consent-il à ce que les articles soient groupés selon les parties du projet de loi, comme il est décrit dans la table analytique du projet de loi C-15?
La sénatrice Fraser : Monsieur le président, je suis en général favorable au regroupement, mais j'aimerais vous demander d'apporter quelques changements mineurs. J'aimerais que vous commenciez par les articles 2 et 3, pour passer ensuite à l'article 4 seul, et ensuite, aux articles 5 à 73, à l'article 74 seul et ensuite, continuer selon votre formule.
Le président : Très bien. La formule est-elle adoptée?
Des voix : D'accord.
Le président : Les articles 2 et 3 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
L'article 4 est-il adopté?
La sénatrice Fraser : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Les articles 5 à 73 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
L'article 74 est-il adopté?
La sénatrice Fraser : Avec dissidence.
Le président : Adopté, avec dissidence.
Les articles 75 à 108 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne les dispositions transitoires, savoir de l'article 109, à la page 59, jusqu'à l'article 114, à la page 60, les articles 109 à 114 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne les modifications corrélatives à la Loi sur l'accès à l'information, les articles 115 et 116 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne le Code criminel, l'article 117 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur la gestion des finances publiques, les articles 118 à 123 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur la protection des renseignements personnels, les articles 124 et 125 sont-ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, les articles 126 à 128 sont- ils adoptés?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence, l'article 129 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, l'article 130 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur la sécurité publique, l'article 131 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne les dispositions de coordination, l'article 132 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 133 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne la Loi sur l'inamovibilité des juges militaires, l'article 134 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
En ce qui concerne l'entrée en vigueur, l'article 135 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
L'article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le comité souhaite-t-il ajouter des observations?
Le projet de loi est-il adopté?
La sénatrice Fraser : Avec dissidence.
Des voix : D'accord.
Le président : Adopté, avec dissidence. Est-il convenu que je fasse rapport de ce projet de loi au Sénat?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
Merci à tous et merci aux hauts fonctionnaires d'être venus.
Le sénateur Dallaire : Monsieur le président, je tenais à vous remercier de m'avoir permis de me joindre à vous et de m'avoir traité avec une grande courtoisie. J'ai beaucoup apprécié que vous nous ayez laissés présenter nos arguments au sujet de ce projet de loi et nous verrons bien comment la situation évoluera. Merci encore une fois.
Le président : Nous sommes heureux que vous ayez participé à nos travaux.
Nous allons maintenant poursuivre notre étude du projet de loi C-350, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (responsabilisation des délinquants). D'après le résumé du projet de loi, le projet de loi a pour but de :
[...] prévoir que les indemnités accordées à des délinquants dans le cadre d'actions ou de procédures engagées contre Sa Majesté la Reine du chef du Canada seront versées aux victimes et autres bénéficiaires désignés.
C'est la deuxième séance que nous consacrons à ce projet de loi. Nous allons poursuivre nos débats avec un premier panel où l'on retrouve des visages familiers. M. Don Head, commissaire et Michel Laprade, avocat-conseil, Services juridiques, du Service correctionnel du Canada. Il y a également dans la salle des représentants de Justice Canada qui pourraient prendre place à la table en cas de besoin : Pamela Arnott, directrice et avocate-conseil, Centre de la politique concernant les victimes; et Michelle Smith, avocate-conseil/coordonnatrice, Mise en œuvre de la politique d'appui à l'exécution des obligations alimentaires, Section de la famille, des enfants et des adolescents. Voilà qui remplirait une carte d'affaires de bonne dimension.
Monsieur le commissaire, voulez-vous faire une déclaration préliminaire?
Don Head, commissaire, Service correctionnel du Canada : Oui, effectivement, monsieur le président.
Monsieur le président, honorables sénatrices et sénateurs, bonjour. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler du projet de loi C-350 et de l'incidence qu'il aurait sur les opérations du Service correctionnel du Canada ou SCC, comme je vais le désigner dans mes commentaires.
En fait, le projet de loi C-350 modifierait la manière dont sont réparties les indemnités pécuniaires accordées aux délinquants par jugement des tribunaux contre la Couronne. Il propose de garantir que toutes les sommes accordées à un délinquant sous responsabilité fédérale à la suite d'une poursuite civile contre la Couronne soient d'abord remises aux créanciers qui attendent d'être payés par le délinquant. Les indemnités pécuniaires payées par la Couronne seraient réparties de manière séquentielle et au prorata des dettes entre les créanciers admissibles. L'argent servirait en premier lieu à payer toute pension alimentaire pour conjoint ou enfants, puis toute ordonnance de dédommagement, ensuite, toute suramende compensatoire et finalement, tout autre créancier détenant un jugement rendu contre le délinquant. S'il devait rester de l'argent après la distribution décrite ci-dessus, ce montant serait alors versé au délinquant.
De plus, le projet de loi C-350 ajouterait à la LSCMLC un texte favorisant la responsabilisation des délinquants et renforcerait leurs obligations envers la société.
Les délinquants, comme toute autre personne, peuvent intenter des actions en justice contre le gouvernement fédéral. En fait, le SCC a le mandat, selon les dispositions législatives et les politiques, de veiller à ce que les délinquants aient la possibilité de le faire. Il fournit donc un accès raisonnable aux services d'un avocat et aux tribunaux, ainsi qu'aux ressources juridiques que les délinquants peuvent consulter s'ils souhaitent intenter une telle action en justice.
Je soulignerais toutefois que, à moins que les accusations soient portées contre le SCC, que l'organisation soit visée par la cause ou que le délinquant avise volontairement le personnel qu'il est engagé dans une poursuite, il est peu probable que le SCC sache qu'un détenu est impliqué dans une procédure judiciaire contre un autre organisme gouvernemental. Par conséquent, seuls les cas où le SCC en serait avisé pourraient être, en fin de compte, visés par les dispositions du projet de loi C-350.
En ce qui a trait aux obligations financières imposées par les tribunaux à un délinquant, le SCC ne reçoit en ce moment que les données relatives aux obligations qui touchent les ordonnances de dédommagement, les suramendes compensatoires et les amendes imposées en vertu des lois fédérales et provinciales et des règlements municipaux. Ces renseignements sont habituellement transmis directement par les tribunaux et consignés dans le dossier de la gestion des peines du délinquant dans le Système de gestion des délinquants (SGD).
Toutefois, étant donné les changements législatifs apportés dans la Loi sur la sécurité des rues et des communautés, les obligations imposées par les tribunaux sont maintenant mentionnées dans le plan correctionnel des délinquants et des modifications ont été apportées à la base de données électroniques du SCC pour faciliter la consignation et le suivi des obligations de nature criminelle et civile des délinquants.
Malgré ces modifications, les nouveaux renseignements recueillis en raison de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés ne seront pas suffisamment complets pour l'application du projet de loi C-350, puisqu'ils ne comprendront pas le type de preuve requis pour qu'un créancier puisse établir son droit au paiement. Pour que le SCC soit au fait de l'existence d'une dette contractée par un délinquant, les créanciers devraient aviser le SCC, qui serait alors tenu d'établir un registre national pour assurer un suivi de ces obligations financières, conformément au projet de loi.
Les modifications apportées par la Chambre des communes au projet de loi C-350 corrigent ce problème. Elles veillent à ce que le projet de loi s'applique uniquement aux dettes dont le SCC a reçu un avis légal officiel. Si le projet de loi est promulgué sous sa forme modifiée, la responsabilité de transmettre un tel avis au sujet d'un ordre de paiement incombera au créancier et le SCC n'aura pas à chercher lui-même si un délinquant a contracté des dettes.
De plus, la version modifiée du projet de loi C-350 permettra la communication de renseignements entre le SCC et les autres ministères et organismes du gouvernement fédéral, sous réserve d'autres lois fédérales, ainsi que le pouvoir d'élaborer d'autres dispositions législatives pour encadrer ces communications. Il convient de noter que les modifications précisent également que le projet de loi C-350 ne doit pas nuire aux paiements versés aux délinquants à la suite de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.
Monsieur le président, honorables sénatrices et sénateurs, j'aimerais vous remercier encore une fois de me donner l'occasion de vous parler du projet de loi C-350 et de présenter l'incidence qu'il aura sur le système correctionnel fédéral. C'est avec plaisir que je répondrai aux questions des membres du comité.
Le président : Merci, monsieur le commissaire. Nous allons commencer les questions par celles de la vice-présidente du comité, la sénatrice Fraser.
La sénatrice Fraser : Merci. Comme vous le savez, le comité a reçu un mémoire de la commissaire à la protection de la vie privée, et j'aimerais qu'on remette une copie de cette lettre à M. Head et à M. Laprade — et je vous souhaite la bienvenue à tous les deux — parce que je vais vous poser des questions à ce sujet. Je vais vous indiquer les passages de la lettre auxquels se rapportent mes questions. La lettre elle-même n'est pas très longue.
À la page 3 de la lettre, au milieu de la page, il y a un paragraphe qui commence par « Mon organisation ». « Mon organisation » est le Commissariat à la protection de la vie privée. « Mon organisation souscrit depuis longtemps à la position selon laquelle la création de tout type de registre doit être évaluée avec une grande prudence » — et comme vous venez de le dire, il s'agit d'un nouveau registre.
Mme Stoddart poursuit en disant que « Des mesures d'authentification strictes des personnes désignées dans les avis écrits seraient nécessaires afin de garantir qu'il n'y ait pas de cas d'identifications erronées. » Je peux comprendre qu'il arrive que l'on identifie à tort certaines personnes lorsque vous avez deux prisonniers qui s'appellent Jean Tremblay ou John Jones, de là les problèmes.
Pourriez-vous nous donner des indications sur les mesures que vous prenez à l'heure actuelle pour authentifier les noms qui figurent déjà dans votre registre et sur les mesures supplémentaires que vous pourriez prendre pour répondre à ces préoccupations?
M. Head : Merci, madame la sénatrice. J'aimerais faire quelques brefs commentaires au sujet de la façon dont nous abordons cette question à l'heure actuelle au sein de notre organisation. Il y a de nombreux individus et de nombreux noms — vous venez de nous en citer quelques-uns — de sorte que nous avons plusieurs personnes qui répondent à ces noms.
Notre système utilise plusieurs autres identificateurs. Premièrement, étant donné que les personnes qui nous arrivent ont un casier judiciaire, nous avons un SED — le service d'empreintes digitales — qui nous permet de faire la différence entre un Michel Laprade et un autre Michel Laprade — non pas que mon ami n'ait jamais eu de démêlés avec la justice ou possède un mauvais numéro de SED. Nous sommes donc en mesure d'utiliser un identificateur supplémentaire.
Nous recevons également divers documents judiciaires. Par exemple, dans le régime que nous examinons, si un créancier proposait de récupérer une somme d'argent auprès d'un certain Don Head, nous serions non seulement en mesure de vérifier de quel Don Head il s'agit en utilisant le SED, mais nous pourrions également examiner les documents judiciaires pour vérifier si cette décision concerne ce Don Head pour certaines actions, en particulier si cela a été examiné par le système judiciaire.
Il est évident que si cette personne n'est pas facilement identifiable, nous allons veiller à prendre toutes les mesures possibles avant de divulguer un nom ou avant de faire un versement à un créancier.
La sénatrice Fraser : J'aimerais poser deux autres brèves questions et je vais les regrouper.
Premièrement, seriez-vous disposé à consulter la commissaire à la protection de la vie privée avant de mettre sur pied le nouveau système proposé? La deuxième question porte sur le paragraphe suivant de la lettre de Mme Stoddart, dans lequel elle fait remarquer que les décisions en question peuvent toucher des décisions de tribunaux civils dans des affaires non pénales, comme les pensions alimentaires ou les dommages et intérêts.
Elle déclare :
[...] les Services correctionnels devront signer des ententes de partage d'information beaucoup plus complexes avec les gouvernements provinciaux.
Partagez-vous cette façon de voir et encore une fois, comment projetez-vous de mettre en œuvre ce mécanisme?
M. Head : Je vous remercie encore une fois, madame la sénatrice. Ce sont deux très bonnes questions. Pour ce qui est de la première, cela est certain. Nous allons communiquer avec la commissaire à la protection de la vie privée pour effectuer une évaluation des répercussions sur la vie privée des renseignements que nous obtenons. Nous voulons être sûrs de ne pas porter atteinte à ces principes. La dernière chose que nous souhaitons est de figurer dans un de ses rapports annuels. Nous allons donc certainement collaborer avec elle.
Pour ce qui est de la question plus précise que vous avez posée, il y a une chose qu'il convient probablement de mentionner, c'est que le nombre des personnes qui obtiennent une indemnité est très faible. Si nous regardons dans nos dossiers depuis 2007, il n'y a que cinq personnes qui ont obtenu des indemnités dont nous devrions nous occuper si cela se produisait aujourd'hui. Nous ne prévoyons pas que le nombre de délinquants qui obtiennent des indemnités augmentera énormément et que cela créera pour nous un fardeau administratif excessif.
Cela dit, nous allons bien sûr veiller à viser la bonne personne. Par exemple, pour ce qui est des questions qui touchent les ordonnances de nature davantage familiale, nous travaillerons en collaboration avec les programmes d'exécution des ordonnances alimentaires pour vérifier encore une fois que nous avons bien identifié la bonne personne avant de lui remettre des fonds.
La sénatrice Fraser : Convenez-vous avec elle du fait que ce projet de loi s'appliquera à ce genre d'affaires? Il me semble qu'une poursuite contre Sa Majesté, contre un mandataire ou contre un employé de Sa Majesté débouchera rarement sur une ordonnance familiale, mais je me trompe peut-être. Je me trompe souvent dans ce domaine.
M. Head : Je vais demander à M. Laprade de répondre à votre question.
Michel Laprade, avocat général, Services juridiques, Service correctionnel du Canada : Je crois que vous parlez de deux choses. L'ordonnance alimentaire mentionnée à l'alinéa 78.1(1)a) est une ordonnance qui autorise un créancier...
La sénatrice Fraser : Je le savais. Je suis désolée.
M. Laprade : C'est au créancier de demander au délinquant qui n'a pas payé sa pension alimentaire, par exemple, de lui remettre cet argent. Ces ordonnances sont habituellement mises en œuvre par les programmes d'exécution des ordonnances alimentaires au niveau provincial et territorial.
Voilà comment nous allons procéder : au lieu de demander à tous les bénéficiaires d'une ordonnance alimentaire pour la famille et les enfants de s'enregistrer auprès du SCC, nous envisageons un mécanisme postérieur à l'octroi de l'indemnité dans lequel dès qu'un délinquant a obtenu une indemnité, étant donné qu'il n'y en a pas beaucoup, nous allons fournir, conformément à un protocole d'entente conclu avec les provinces au sujet du partage d'information, les renseignements concernant l'indemnité du délinquant et vérifier s'il correspond à un des dossiers de délinquants qui devaient verser une pension alimentaire pour la famille ou pour les enfants.
M. Head : Si je peux ajouter quelque chose, un des éléments importants concernant le projet de loi est que nous avons la capacité de conclure ces ententes de communication de renseignements; c'est là un élément clé qui nous permettra d'éviter d'avoir à mettre en place un lourd processus de vérification.
La sénatrice Fraser : Cela préoccupe Mme Stoddart, mais j'en parlerai au cours du deuxième tour de questions.
Le président : Monsieur le commissaire, avez-vous mentionné à la sénatrice Fraser, pour ce qui est des catégories visées par l'article 78.1, que, d'après vos calculs, il n'y aurait que cinq délinquants qui tomberaient dans ces catégories?
M. Head : Depuis 2007, il y a eu seulement cinq individus qui ont reçu une indemnité à laquelle ce mécanisme s'appliquerait. Telles que sont les choses actuellement, nous ne prévoyons pas que le processus de vérification sera trop lourd.
Le président : Le Vancouver Sun a publié un article au sujet du gouvernement provincial, de la Couronne, qui avait versé 3,5 millions de dollars au cours du dernier exercice financier à des détenus provinciaux, de sorte que cela semble faire référence à un chiffre très différent. Voyez-vous une explication?
M. Head : Il serait bon de noter un certain nombre de choses. Certaines de ces sommes proviennent peut-être de décisions rendues par des tribunaux judiciaires ou administratifs, mais il peut également s'agir de règlements à l'amiable, qui ne sont pas nécessairement qualifiés de décisions judiciaires ou administratives. Je crois que cette somme comprend tous les types de paiement dont ont bénéficié des délinquants.
Le sénateur White : Je n'avais qu'une seule question à poser avant votre intervention, monsieur le président.
Pensez-vous qu'il serait possible que ce chiffre augmente? Les gens ne savaient peut-être pas qu'ils auraient en fait pu présenter des demandes, étant donné que la législation ne les autorisait pas à demander les sommes reçues par le délinquant pendant son incarcération. Est-il possible que certaines personnes se décident maintenant à présenter des demandes à cause de ce projet de loi? Cinq individus, c'est vraiment très peu. Ce chiffre me surprend.
M. Head : Je crois qu'il y aura un certain nombre de personnes qui vont vouloir enregistrer leur demande, faute d'un meilleur terme, mais il y aura quand même très peu de poursuites qui entraîneront le versement d'argent aux créanciers. Il n'y a eu que cinq individus qui ont effectivement reçu une indemnité depuis 2007.
Le sénateur White : Pensez-vous également que cela pourrait s'appliquer à tous les éléments du système, lorsque le délinquant, par exemple, se trouve dans une maison de transition, lorsqu'il bénéficie d'une libération conditionnelle? Ces délinquants sont-ils considérés comme relevant encore du Service correctionnel du Canada?
M. Head : Oui, ils sont toujours en train de purger leur peine et ils relèvent du SCC.
Le sénateur White : Une poursuite civile qui donnerait lieu à une décision un an ou deux après la libération d'un délinquant, mais qui serait encore en libération conditionnelle, serait visée.
M. Head : Oui.
La sénatrice Jaffer : D'après la question que le président vous a posée, vous ne vous occupez pas des règlements relatifs aux pensionnats pour les Indiens.
M. Head : Pas du tout.
La sénatrice Jaffer : Il n'y a peut-être que cinq délinquants pour cette raison?
M. Head : Cela vient en partie du nombre des individus qui intentent des poursuites, qui arrivent à obtenir une décision d'un tribunal judiciaire ou administratif, et des cas où la poursuite a débouché sur l'attribution d'une indemnité. Le règlement relatif aux pensionnats indiens est exclu par l'effet du projet de loi, ce qui est une très bonne chose, de sorte que cet aspect ne posera pas de problème pour nous.
La sénatrice Jaffer : J'ai un peu de mal à comprendre les mécanismes applicables aux ordonnances alimentaires pour le conjoint et les enfants. Bien souvent, les aliments pour la conjointe, et en particulier, pour les enfants, ou la pension alimentaire, sont enregistrés auprès d'organismes provinciaux. Allez-vous mettre sur pied un tel système? Comment allez-vous vous intégrer à tout cela? Si une ordonnance a été enregistrée auprès d'un organisme provincial, allez-vous en tenir compte? Comment les deux organismes vont-ils collaborer ou comment cela va-t-il se passer avec les provinces?
M. Head : C'est une bonne question. Pour compléter les explications qu'a fournies M. Laprade, je vous dirais que, dans ce genre de cas, plutôt que de demander à ces personnes de venir s'inscrire chez nous, elles vont s'inscrire dans les programmes provinciaux et territoriaux d'exécution des ordonnances alimentaires.
Par exemple, si Don Head est un détenu qui a reçu une indemnité octroyée par un tribunal judiciaire ou administratif, nous allons communiquer ce nom, en respectant les mesures de protection appropriées, aux programmes provinciaux et territoriaux d'exécution des ordonnances alimentaires pour voir si ce délinquant est déjà visé par une ordonnance.
Nous n'allons pas refaire les registres qui existent déjà. Nous dirons seulement : « Nous avons cet individu qui porte le nom suivant. Figure-t-il dans votre système? Si c'est le cas, y a-t-il des créanciers enregistrés qui détiennent une créance contre cet individu? »
La sénatrice Jaffer : J'examine le projet de loi, j'écoute ce qui se dit et je l'étudie, mais je trouve que cela peut être compliqué. La pension alimentaire doit être versée régulièrement. Allez-vous mettre de l'argent de côté tant que le délinquant est incarcéré? Comment allez-vous calculer ces sommes? Je vais simplifier les choses en disant que nous allons parler uniquement de la pension pour les enfants. Est-ce le montant impayé? Est-ce que ces versements doivent s'effectuer jusqu'à ce que l'enfant atteigne l'âge de 21 ans? Comment allez-vous calculer tout cela?
M. Head : Le versement correspondra au montant impayé. Nous allons établir quel est le montant impayé accumulé. Si ce montant accumulé représente 50 000 $ pendant une certaine période et que l'indemnité n'est que de 10 000 $, seul ce montant sera versé à l'organisme chargé de l'exécution des ordonnances alimentaires. Aucune autre somme ne sera versée à moins que l'individu en question n'obtienne une autre indemnité.
La sénatrice Jaffer : Je ne me suis peut-être pas exprimée clairement; excusez-moi. Disons pour les fins de l'argument que cette personne reçoit 300 000 $. Allez-vous mettre de côté suffisamment d'argent pour la pension alimentaire de l'enfant jusqu'à ce que celui-ci atteigne 19 ans, ou allez-vous juste verser le montant impayé?
M. Head : Nous allons verser uniquement le montant impayé, tant que le délinquant est à notre charge. S'il purge une peine de quatre ans et que cela se produit la première année, nous allons calculer, avec l'aide des gens chargés de l'exécution des ordonnances, le montant correspondant à une période de quatre ans.
La sénatrice Jaffer : J'ai une question au sujet des créanciers. Quelle période allez-vous leur accorder pour l'enregistrement de leurs créances avant de commencer les versements? Pour que le rang des créanciers soit respecté, allez-vous verser l'argent sur la base premier arrivé premier servi? Comment allez-vous partager l'indemnité?
M. Head : Il y a quatre catégories dans le projet de loi. S'il y a quatre personnes qui font partie de la catégorie 78(1) a) et que j'ai une certaine somme d'argent, cette somme sera partagée entre eux en fonction des créances que ces personnes ont contre le délinquant.
Le sénateur McIntyre : Messieurs, je vous remercie pour votre exposé.
Le projet de loi C-350 vise uniquement les indemnités pécuniaires. À votre avis, devrait-il viser également d'autres sources de revenus, comme les gains des détenus, les biens, les prestations gouvernementales et les règlements à l'amiable?
M. Head : Non, il ne comprend pas ces éléments.
Le sénateur McIntyre : Devrait-il le faire?
M. Head : C'est au législateur de décider. J'explique uniquement la façon dont je vais appliquer la loi, telle qu'elle est rédigée.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Monsieur Head, c'est toujours un plaisir de vous recevoir à notre comité. Bonjour, monsieur Laprade.
Avez-vous des statistiques sur le nombre de cas annuels de criminels qui bénéficient d'un tel recours?
[Traduction]
M. Laprade : Nous n'avons pas de données statistiques qui portent directement sur le nombre de poursuites. Nous avons des données sur les poursuites intentées contre le SCC, mais elles ne permettent pas de savoir si l'auteur de la poursuite est un détenu ou quelqu'un d'autre. Nous savons que la grande majorité de ces actions sont intentées par des détenus, de sorte que nous avons des données statistiques sur le nombre de poursuites déclenchées chaque année, mais nous calculons également le nombre de dossiers que nous fermons.
Il arrive souvent que les poursuites intentées par des individus soient en fait abandonnées à un moment donné. Elles sont rejetées parce que personne ne s'en occupe. Cela se produit souvent dans notre cas.
Le nombre de demandes déposées nous donne une idée de cette activité, mais il faut également savoir quel est le nombre de poursuites inactives, parce que les gens ne s'en occupent pas. Il est difficile de savoir exactement combien il y en a. Il faut effectuer une recherche manuelle pour le savoir.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je sais que certains pénitenciers faisaient participer les criminels aux dépenses liées à leur incarcération, surtout ceux qui bénéficiaient d'une pension ou d'un revenu en prison. Dans le passé, lorsque ces gens recevaient un montant important, est-ce que vous vous serviez de ces montants pour imputer une partie des dépenses, soit la nourriture ou le logement, à des détenus, comme cela se fait dans certains pénitenciers?
[Traduction]
M. Head : Le règlement qui s'applique aux frais de nourriture et de logement, qui est l'aspect auquel, je crois, vous faites référence, nous autorise à prendre un pourcentage des fonds qu'obtient un détenu. La loi prévoit un maximum de 30 p. 100. À l'heure actuelle, je crois que ce pourcentage est de 25 p. 100 au-dessus d'un certain montant.
Nous sommes en train de changer ces pourcentages pour en arriver à un montant maximal. S'il restait des fonds après avoir effectué ce paiement, nous considérerions que cela permettrait également de récupérer les frais de nourriture et de logement.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Vous dites donc que si quelqu'un avait gain de cause et recevait un montant important, vous pouviez prélever le 30 p. 100?
[Traduction]
M. Head : Non, pas 30 p. 100 de l'indemnité, mais 30 p. 100 des sommes brutes qu'ils reçoivent toutes les deux semaines.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : En adoptant cette loi, les montants perçus par les criminels qui auront gain de cause ne pourront donc plus servir à défrayer une partie des dépenses et devront aller en priorité à la famille et ensuite aux victimes?
M. Head : Non.
Le sénateur Boisvenu : Lorsqu'on parle de surcharge, à mon avis, cela a trait aux victimes, n'est-ce pas?
[Traduction]
M. Head : Nous allons continuer à récupérer les frais de logement et de nourriture, parce que les délinquants ont toujours droit à une rémunération s'ils travaillent ou participent à un programme.
[Français]
Le sénateur Rivest : Vous dites que les modifications apportées au projet de loi C-350 ne doivent pas nuire au paiement versé au délinquant à la suite de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.
Qu'est-ce que vous voulez dire exactement par « ne doivent pas nuire »?
[Traduction]
M. Head : Selon la version actuelle du projet de loi, les sommes qu'un individu reçoit dans le cadre du règlement relatif aux pensionnats sont intouchables. Nous n'y avons pas accès.
La sénatrice Batters : Lorsque je travaillais pour le ministre de la Justice de ma province d'origine, la Saskatchewan, notre gouvernement provincial avait modifié certaines choses pour que les victimes puissent recevoir de l'aide aux termes du programme provincial de perception des amendes pour faciliter l'application des ordonnances de dédommagement et ce genre de chose. Étant donné que la plupart des délinquants fédéraux ne reçoivent aucune indemnité pendant qu'ils purgent leur peine, quels sont les moyens dont dispose le SCC pour inciter les délinquants à verser les sommes qu'ils doivent verser en raison d'ordonnances alimentaires, de pension alimentaire, de soutien à la famille ou d'ordonnances de dédommagement?
M. Head : C'est une bonne question. Le mécanisme dont nous nous servons pour inciter les délinquants à le faire s'appelle le plan correctionnel. Lorsque nous apprenons que le tribunal a imposé des obligations à un détenu, nous le mentionnons dans son plan correctionnel pour l'encourager à assumer ses responsabilités et à respecter ses obligations. Nous ne pouvons pas l'obliger à effectuer ces versements, à part ce que prévoit le projet de loi, mais en intégrant cet aspect à son plan correctionnel, cela peut avoir des répercussions sur les décisions futures le concernant, comme, par exemple, la semi-liberté ou la libération conditionnelle totale.
La Commission des libérations conditionnelles du Canada doit déterminer si l'individu en question a vraiment commencé à changer sa façon de vivre et à devenir un citoyen respectueux des lois; elle peut donc prendre en considération le fait que l'individu concerné est en mesure d'exécuter les obligations que lui ont imposées les tribunaux et qu'il refuse de le faire.
Le mécanisme que nous utilisons consiste à intégrer cette information dans le plan correctionnel et d'influencer ainsi les décisions prises à l'avenir à l'égard du délinquant.
Le sénateur Wallace : Monsieur Head, dans vos observations préliminaires, vous nous avez rappelé que l'objet du projet de loi C-350 était de faire en sorte que les sommes attribuées à un délinquant à la suite d'une poursuite civile contre la Couronne soient d'abord distribuées aux créanciers. C'est-à-dire « en vertu d'une poursuite civile ».
Vous avez également fait référence dans vos commentaires aux indemnités que peuvent attribuer les tribunaux administratifs.
Une précision, cela concerne-t-il uniquement les sommes découlant d'une ordonnance judiciaire ou cela couvre-t-il également les sommes attribuées à la suite d'une décision d'un tribunal administratif, autre que judiciaire?
M. Head : Les tribunaux administratifs sont visés par la définition. Par exemple, si le Tribunal canadien des droits de la personne rendait un jugement contre, par exemple, mon organisation, au sujet de la façon dont nous avons traité un contrevenant, les fonds attribués seraient visés par le projet de loi C-350.
Le sénateur Wallace : Si le paiement découlait d'une poursuite civile devant un tribunal judiciaire et si un règlement à l'amiable avait été conclu avant que le tribunal se soit prononcé — et cela arrive, comme vous le savez —, les sommes payables au délinquant aux termes d'un règlement à l'amiable découlant d'une poursuite civile seraient-elles visées par le projet de loi?
M. Head : Non.
Le sénateur Wallace : Il faut une décision d'un tribunal judiciaire ou d'un tribunal administratif?
M. Head : Oui.
Le sénateur Wallace : Vous avez dit que depuis 2007, il n'y avait eu que cinq délinquants qui avaient obtenu des indemnités versées par la Couronne. Quel est le montant total en dollars de ces cinq indemnités?
M. Head : Je pense que ce total s'élevait à environ 500 000 $.
Le sénateur Joyal : Monsieur Head et Monsieur Laprade, bienvenue. J'aimerais comprendre quel est l'effet de ce projet de loi sur les victimes et savoir s'il pourrait être utilisé pour aider celles-ci à obtenir l'argent que reçoit un délinquant aux termes d'une décision d'un tribunal administratif ou judiciaire.
Si je comprends bien le paragraphe 78.1(1), cela serait indirectement visé par l'alinéa c), la suramende compensatoire. Si la province a un programme de suramende compensatoire, cela pourra alors aider la victime. Si la province n'a pas mis sur pied un tel programme, cette personne ne pourra pas alors bénéficier indirectement de cette indemnité.
M. Head : C'est ce que j'ai également compris. Je dois m'en remettre aux déclarations de mes collègues de la Justice.
[Français]
Le sénateur Joyal : Monsieur Laprade, vous pouvez commenter?
M. Laprade : Les programmes de victims surcharge existent dans les provinces et territoires à travers le pays. La façon dont on entend fonctionner encore, c'est un peu de la même manière qu'avec les maintenance enforcement programs, c'est-à-dire avec une entente de partage d'information ou après qu'un délinquant a reçu un jugement lui accordant des dommages. On informerait alors les autorités compétentes de chaque province et territoire chargées de mettre en application le victims surcharge pour déterminer si le délinquant a effectivement une ordonnance de cette nature dans la province ou le territoire. Ce pourrait être plus d'une province ou territoire, dans le cas de certains délinquants. On ferait alors le transfert de fonds.
Le sénateur Joyal : Comment interprétez-vous le sous-paragraphe d)? Dans la version française, on lit : « toute autre somme à payer par le délinquant en vertu d'un jugement rendu par un tribunal compétent ». Supposons qu'un criminel à cravate poursuit au civil une personne qui a été trouvée coupable et qu'il ou elle a un jugement d'un tribunal compétent. Il ou elle pourrait faire exécuter ce jugement à partir des sommes encore disponibles?
M. Laprade : Effectivement.
M. Head : Oui.
Le sénateur Joyal : C'est le seul biais par lequel une victime pourrait être directement compensée?
M. Laprade : Les ordonnances de restitution au paragraphe b) sont aussi incluses.
Le sénateur Joyal : S'il y a eu des ordonnances de restitution en vertu de l'article 738 ou de l'article 739.
Un autre élément qui me préoccupe dans ce projet de loi est l'interprétation à donner aux paragraphes 8 et 9, qui sont en fait des exceptions. C'est la façon dont je lis le texte, en particulier le paragraphe 9, qui exclut toute somme que la personne condamnée pourrait recevoir en vertu d'un jugement sur la responsabilité de la Couronne. Comment interprétez-vous ce paragraphe?
M. Laprade : Le but du paragraphe 9 est d'éviter que le ministre des Finances n'ait l'obligation d'émettre un chèque au montant prévu par l'ordonnance, car le paragraphe 30(1) de la Loi sur la responsabilité civile de l'État prévoit que le ministre doit émettre un chèque au montant fixé par l'ordonnance. Or, ici nous sommes dans une situation où le montant fixé par l'ordonnance pourrait être modifié, parce que des montants auront été dispersés un peu partout, peut- être à d'autres créditeurs.
Le sénateur Joyal : Comment cela va-t-il fonctionner? Est-ce que l'argent que le détenu pourrait retirer d'un jugement rendu en vertu de la Loi sur la responsabilité de la Couronne reste encore disponible pour être distribué selon ce qui est prévu à l'article 78.1? J'ai l'article 30(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne et je vais le lire :
[Traduction]
Sur réception d'un certificat de jugement rendu contre l'État et délivré en vertu des règlements ou des règles des Cours fédérales, le ministre des Finances autorise le paiement, sur le Trésor, de toute somme d'argent accordée à une personne, par jugement contre l'État.
[Français]
Est-ce que cela signifie que le montant qu'un détenu obtiendrait en vertu d'un jugement rendu en vertu de la Loi sur la responsabilité de la Couronne reste disponible pour être distribué en fonction des alinéas a), b), c) et d) de l'article 78.1?
M. Laprade : Le montant que peut recevoir le délinquant en vertu d'une poursuite contre la Couronne — car la Loi sur la responsabilité de la Couronne s'applique à toute poursuite contre la Couronne — n'est pas celui prévu au paragraphe 30(1), mais le montant qui sera alloué après que les créditeurs auront été payés. L'objectif du paragraphe 9 est tout simplement de faire en sorte qu'on n'ait pas un conflit entre cette loi et le paragraphe 30(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, qui prévoit qu'on doit émettre le chèque au montant déterminé par le tribunal. Or, si d'autres créditeurs doivent être payés, le chèque au montant déterminé par le tribunal ne sera pas au même montant. Il devra être à un montant inférieur car on aura payé d'autres créditeurs. Cela ne fait que mettre de côté cette obligation du ministre des Finances d'émettre un chèque au même montant que celui de l'ordonnance du tribunal parce qu'un autre montant devra être émis une fois qu'on aura payé les créditeurs.
[Traduction]
Le président : Monsieur le commissaire, lorsqu'un projet de loi comme celui-ci vous est soumis, vous ou vos collaborateurs assistez à une séance d'information donnée par des représentants de la Justice. Je sais que vous avez déclaré, en réponse à une question du sénateur McIntyre, que cela dépendait du législateur, mais j'aurais tendance à penser que vous aimeriez poser parfois quelques questions sur ces sujets. Je comprends l'exception visant les pensionnats, mais j'aimerais savoir si ces personnes vous ont expliqué pourquoi le paragraphe 1 ne s'appliquait pas à un montant accordé à titre de dépens. Dans la plupart des affaires, les dépens concernent, je crois, les honoraires des avocats. Je me demande pourquoi l'on accorde aux avocats des délinquants un traitement plus favorable que celui qui est accordé aux victimes. Vous a-t-on fourni la raison pour laquelle cette exception a été créée?
M. Head : Oui, il y a plusieurs raisons. Une d'entre elles est bien sûr celle de la portée souhaitable de ce mécanisme. Plus on élargit la portée de ce mécanisme, plus les questions des coûts de fonctionnement ou de la lourdeur du mécanisme se posent. Un des autres aspects soulevés au sujet des règlements est que la plupart des règlements contiennent une clause de confidentialité. Ce sont là les raisons présentées par les avocats de la Justice pour expliquer la portée réduite de ce projet de loi.
La sénatrice Fraser : Permettez-moi de commencer par revenir sur les questions qu'a posées la sénatrice Jaffer au sujet de la répartition des fonds. Je vise plus particulièrement la notion de pension pour les enfants, parce que la pension pour les enfants est une obligation permanente.
Lorsque vous répartissez une somme qui n'est probablement pas très élevée — au moins d'après ce que vous savez à l'heure actuelle — prenez-vous en considération les obligations futures comme la durée de validité de l'ordonnance pour les aliments pour enfants ou simplement le présent et le passé?
M. Head : Uniquement le présent et le passé, vous avez raison.
La sénatrice Fraser : Très bien. C'est le présent et le passé et ensuite, toutes ces autres choses sont réglées. Lorsque vous parlez de pourcentage, prenez-vous tout simplement le montant total de toutes les catégories de créances pour ensuite les diviser par le montant de l'indemnité? Vous hochez la tête.
M. Head : Mon collègue de la Justice peut me corriger si je me trompe, parce que si je me trompe, il va falloir que je change ma façon de faire. Prenons, par exemple, la catégorie 1. S'il y a quatre délinquants qui font partie de la catégorie 1 et un dans la catégorie 3, et si les quatre de la catégorie 1 se partageaient le montant total, alors que l'un avait une créance correspondant à 50 p. 100 du montant total, l'autre 20 p. 100 et un autre 10 p. 100...
La sénatrice Fraser : C'est le montant total des créances?
M. Head : C'est exact.
Le montant, selon l'indemnité accordée, serait alors divisé selon ce pourcentage. S'il restait de l'argent, je m'occuperais alors des personnes qui font partie de la catégorie 3. Par contre, s'il ne reste plus d'argent après cette répartition...
La sénatrice Fraser : Tout cela va à la catégorie 1?
M. Head : Oui.
La sénatrice Fraser : Monsieur Laprade, avez-vous participé à la rédaction du projet de loi ou des modifications apportées par la Chambre des communes?
M. Laprade : Pas à la rédaction du projet de loi. C'est peut-être un de mes collègues qui a travaillé sur les amendements au projet de loi qui ont été proposés.
La sénatrice Fraser : C'étaient des amendements d'envergure, d'après ce dont je me souviens.
Revenons aux préoccupations de la commissaire à la protection de la vie privée. Je suis en haut de la page 3, et elle parle de la divulgation qui sera nécessaire pour que le mécanisme fonctionne. Elle dit ce qui suit au premier paragraphe :
Les Services correctionnels ainsi que les ministères et organismes concernés doivent divulguer tout renseignement permettant d'établir l'identité [de cette personne].
Elle poursuit :
Cette exigence semble un peu trop générale : les ministères et organismes qui doivent partager des renseignements personnels ne sont pas définis et la nature et l'étendue des renseignements personnels qui doivent être divulgués ne sont pas spécifiées. De plus, les mécanismes de divulgation ne sont pas clairs.
Voilà des critiques qui me semblent assez graves.
Avez-vous déjà établi des critères pour préciser qui peut divulguer quel genre de renseignements et comment est protégé le droit au respect de la vie privée? Pouvez-vous nous donner une idée, par exemple, du nombre ainsi que du genre des ministères et des organismes dont il s'agirait?
M. Head : Ce sont là de bonnes questions, madame la sénatrice. J'aimerais faire quelques commentaires et mon collègue pourra ensuite intervenir à nouveau.
Actuellement, aucun délinquant n'a, à notre connaissance, reçu une indemnité parce qu'il avait intenté une action contre d'autres ministères. Encore une fois, nous ne prévoyons pas qu'il y aura une forte augmentation du nombre de ces indemnités. D'un côté, cela nous donne un peu de latitude parce que nous aurons le temps de bien rôder le mécanisme. Cela nous donnera également plus de temps pour consulter non seulement la commissaire à la protection de la vie privée, mais également les ministères et les organismes.
Pour ce qui est d'une expérience parallèle, vous vous souviendrez, madame la sénatrice, que, lorsque le projet de loi concernant les chèques de pension destinés aux délinquants a été présenté — il a été adopté —, nous avons conclu une entente avec Ressources humaines et Développement des compétences Canada au sujet du genre de renseignements qui seraient transmis.
Là aussi, nous avons consulté la commissaire à la protection de la vie privée pour être certains de ne pas demander plus de renseignements qu'il n'est nécessaire pour établir de façon absolument certaine l'identité des intéressés. Dans cette situation, nous ne cherchons pas à comparer 10, 20, 30 ou 40 facteurs. Si nous réussissons à établir de façon certaine l'identité avec deux ou trois facteurs, nous n'irons pas plus loin.
Comme je l'ai dit, nous disposons à l'heure actuelle d'une certaine latitude parce qu'à notre connaissance, aucune indemnité n'a été attribuée à un délinquant à la suite d'une poursuite intentée contre un autre ministère. Cela nous donnera davantage de temps pour peaufiner le mécanisme avec ces ministères et plus précisément, avec le Commissariat à la protection de la vie privée.
La sénatrice Fraser : Ai-je le temps de poser une autre question?
Le président : Peut-être au troisième tour. Il y a encore cinq sénateurs sur la liste, et j'espère que tout le monde va essayer d'abréger les questions et les réponses.
Le sénateur McIntyre : Le projet de loi C-350 a été modifié de façon importante par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale et par la Chambre des communes. J'écoute votre témoignage et je crois pouvoir en déduire que vous êtes satisfait de ces amendements. Pensez-vous qu'il y aurait lieu d'en prévoir d'autres?
M. Head : De mon point de vue, les amendements proposés vont me faciliter la tâche consistant à administrer le régime prévu. Si le projet de loi avait été adopté sans amendement, mon organisation aurait eu beaucoup de difficulté à le mettre en œuvre; j'aurais dû littéralement m'appeler Service correctionnel et Agence de recouvrement du Canada.
Le sénateur McIntyre : Je comprends votre position parce qu'il y a eu six amendements majeurs présentés par le comité permanent et au moins, un par la Chambre des communes. Vous vous déclarez donc satisfait de ces amendements. Est-ce bien cela?
M. Head : Oui.
[Français]
Le sénateur Joyal : Je voudrais revenir au sous-paragraphe 8 de l'article 78.1. Lorsqu'on dit que le présent article s'applique sous réserve de toute autre loi fédérale, dois-je comprendre que, par exemple, la Loi sur la faillite ou la Loi sur l'impôt qui prévoient la distribution des montants selon un ordre défini, aurait préséance sur le projet de loi selon la distribution de l'article 78.1?
M. Laprade : Tout à fait. La modification apportée au projet de loi visait justement à éviter un conflit entre la Loi sur les services correctionnels et des lois fédérales existantes qui prévoient déjà des régimes de priorité dans certains cas et qui prévoient la façon dont les montants ou des dettes doivent être payés ou remboursés. L'objectif est aussi de faire en sorte qu'on maintienne, autant que possible, les priorités déjà existantes dans les lois similaires.
Une des raisons pour lesquelles, par exemple, les ordonnances en matière familiale sont la première priorité, c'est parce que c'est le cas aussi dans la plupart des autres lois fédérales où on établit une forme de priorité indirecte vis-à-vis les ordonnances de ce type et dans les lois provinciales également.
Le sénateur Joyal : Comment une personne qui détiendrait un jugement pour une pension alimentaire, par exemple, va savoir que la personne est détenue? Je comprends d'après votre présentation que c'est, en somme, le créancier qui doit vous contacter mais vous ne contactez pas le créancier. Comment une mère de famille responsable des enfants et ayant fait l'objet d'un jugement de pension alimentaire peut-elle savoir que la personne qui doit payer cette pension alimentaire est détenue par vous dans une prison qui pourrait être dans une province très éloignée de la province où vivent les enfants et le conjoint, par exemple?
[Traduction]
M. Head : Là encore, c'est une excellente question, sénateur, et c'est une des choses sur lesquelles nous travaillons pour pouvoir mettre en œuvre ce projet de loi. Il est bien évident que si ce projet de loi est adopté, nous allons devoir élaborer un solide volet communication pour l'accompagner. Je communiquerai avec les provinces et les territoires, par l'intermédiaire des divers tribunaux judiciaires, pour qu'ils puissent de leur côté faire savoir aux intéressés qu'il y a peut-être des possibilités nouvelles.
Quand un créancier pense qu'un de ses débiteurs est incarcéré, nous devons tout de même suivre le processus. Un créancier pourrait déposer un avis et dire : « J'ai une créance contre Don Head. » Il nous faudra quand même vérifier si Don Head figure bien parmi nos détenus.
Le sénateur Joyal : Ou si c'est le vrai Don Head.
M. Head : Le vrai Don Head et il faut également savoir si le vrai Don Head se trouve toujours parmi nos délinquants et s'il se trouve même dans notre province ou territoire. Cette opération soulève pour nous certaines difficultés et bien sûr, certaines difficultés qui touchent les individus.
M. Laprade : Lorsque nous parlons de pensions alimentaires et d'ordonnances d'aliments pour les enfants, ce sont les programmes d'exécution des ordonnances alimentaires, qui existent au palier provincial et territorial, qui s'en chargent normalement, ce sont habituellement ces programmes, les PEOA, qui récupèrent ces fonds au nom des créanciers et ce, pour l'immense majorité des ordonnances alimentaires. Il n'est pas nécessaire que ces personnes s'inscrivent auprès du SCC parce que nous allons informer les PEOA chaque fois qu'un délinquant obtient une indemnité et les responsables de ces programmes pourront savoir, grâce à leur propre base de données s'il s'agit d'un délinquant. Si c'est le cas, nous allons le faire aussi.
M. Head : Comme M. Laprade l'a fait remarquer, sénateur, il y a deux mécanismes. Le premier est du genre proactif et le deuxième se déclenche après l'octroi de l'indemnité. Si l'on prend comme exemple le programme d'exécution des ordonnances alimentaires, il y aura un mécanisme applicable une fois l'indemnité accordée qui consistera à communiquer avec les responsables des PEOA, les programmes d'exécution des ordonnances alimentaires, des provinces et territoires pour leur dire : « Nous avons un Don Head ici. Il vient d'obtenir une indemnité. Est-il visé par une ordonnance alimentaire? »
Le sénateur Joyal : Pour ce qui est de la rédaction du règlement prévu à l'article 78.3, allez-vous participer à l'élaboration de ce règlement? Si j'ai bien compris, la plus grande partie de la mise en œuvre du projet de loi se fera à l'aide d'un règlement. Les détails soulèvent toujours des problèmes et un bon nombre des principales applicables en matière de protection de la vie privée vont se retrouver dans le règlement. Allez-vous consulter la commissaire à la protection de la vie privée ou lui présenter ce règlement avant de démarrer le processus d'entrée en vigueur?
M. Laprade : Bien évidemment, nous allons participer à la rédaction du règlement parce qu'il nous appartient de préciser les modalités des avis qu'il faut donner au SCC ainsi que les renseignements que les créanciers doivent nous fournir. Comme nous l'avons expliqué, il y a deux mécanismes, le mécanisme proactif et le mécanisme postérieur à l'indemnité, et ils diffèrent tous les deux sur la façon dont est communiquée l'information. Quant à préciser dans le règlement le genre de preuve que nous allons exiger, vous voulez savoir à quel moment nous allons l'exiger? Vous pouvez imaginer que, si une personne veut informer le SCC qu'elle est bénéficiaire d'une ordonnance de dédommagement et qu'elle le fait aujourd'hui en nous fournissant des renseignements à ce sujet, il peut arriver que le délinquant attende 15 ans avant d'obtenir une indemnité; nous allons donc vérifier l'exactitude de ces renseignements avec la victime au moment où le délinquant obtiendra l'indemnité. Il faut que le règlement prévoie un mécanisme qui nous permette non seulement d'obtenir des renseignements de ceux qui nous informent du fait qu'ils se sont enregistrés à titre de créanciers, mais qui les obligent également à nous informer des modifications apportées à leur statut, à la modification de l'ordonnance, du fait que les sommes prévues ont déjà été versées et en fin de compte, il faudra vérifier que l'ordonnance est toujours valide. Il va falloir introduire dans le règlement un certain nombre de facteurs pour avoir un régime solide grâce auquel nous éviterons de verser des sommes qui ont déjà été versées et nous les verserons à la bonne personne.
Le président : Avant de donner la parole au sénateur Boisvenu, je rappelle aux témoins que nous aimerions obtenir de brèves réponses.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je sais qu'il existe l'Association des familles de détenus, je pense, pour avoir déjà participé à un de leur colloque. Cette association qui travaille à travers le Canada, je crois, est soutenue financièrement par le service. Je sais que ce projet de loi va accorder la priorité aux familles des détenus pour s'assurer qu'elles ont le minimum pour survivre après l'incarcération d'un mari ou d'un père. Est-ce qu'actuellement le service soutient financièrement ces familles-là directement ou par d'autres moyens?
[Traduction]
M. Head : Pas directement. Un soutien financier? Non, sénateur.
La sénatrice Jaffer : J'ai deux questions. Je ne voudrais pas trop insister sur ce point, mais vous avez parlé de pension alimentaire impayée et due et j'ai ensuite compris que vous disiez que, si la personne était incarcérée pendant quatre ans, vous mettriez de côté un montant correspondant à quatre ans de pension alimentaire pour enfant.
M. Head : Je suis désolé, sénateur. Je me suis peut-être mal expliqué. Ce serait effectivement la façon dont nous interviendrons. Si le délinquant doit être incarcéré pendant quatre ans et que le montant de l'indemnité qu'il a reçu couvre le montant correspondant à cette période de quatre ans, alors ces sommes seraient...
La sénatrice Jaffer : Vous les conserveriez?
M. Head : Elles seraient versées conformément à un processus. Il ne s'agirait pas nécessairement de mettre cet argent dans une banque et de le conserver.
La sénatrice Jaffer : Vous ai-je bien compris lorsque vous avez dit qu'il y avait eu cinq indemnités accordées depuis 2007?
M. Head : Oui.
La sénatrice Jaffer : Disons que cela fait cinq ans puisque nous sommes en 2013, vous avez donc eu un cas par année?
M. Head : C'est exact, oui.
La sénatrice Jaffer : Tout ce régime est mis en place pour traiter un cas par année?
M. Head : Ce sont les chiffres que nous avons, effectivement.
La sénatrice Batters : J'aimerais poser une brève question supplémentaire sur un sujet que la sénatrice Jaffer a abordé plus tôt. Pour ce qui est de la pension alimentaire pour enfant, s'il y avait un montant impayé et que le délinquant concerné devait purger une peine avec vous pendant quatre ans, s'il n'y avait pas d'arriéré de pension pour enfant, vous examineriez le montant que cela représenterait sur une période de quatre ans et vous verseriez la somme totale? Est-ce bien exact? Ai-je mal interprété votre dernière réponse? Disons qu'il devait verser un montant de 250 $ par mois.
M. Head : Je vais essayer d'expliquer cela le mieux que je peux. D'après ce que je comprends, si un individu reçoit une indemnité d'un montant de, disons, 20 000 $, et qu'il y a un créancier qui a présenté une demande qui a été vérifiée et que cela représente ce type de versement mensuel, alors ces sommes seraient versées, jusqu'à épuisement du montant de 20 000 $...
La sénatrice Batters : S'il s'agit d'une indemnité mensuelle pour enfant de 250 $ par mois jusqu'à ce que l'enfant ait 18 ans, allez-vous calculer ce montant sur quatre ans?
M. Head : Non.
La sénatrice Batters : Vous parlez simplement du montant mensuel de 250 $ plus éventuellement les arriérés, ce serait alors le montant versé et non pas 250 $ pendant quatre ans?
M. Laprade : C'est uniquement le montant impayé. C'est ce que prévoit la loi. Le montant impayé est impayé, cela veut dire qu'il n'a encore été payé. Ce qui appartient à l'avenir n'est pas encore impayé parce que le délinquant a encore la possibilité de verser de lui-même ces sommes. Le régime n'est pas conçu pour que nous soyons chargés de gérer les fonds que possède le délinquant pour qu'il rembourse ses dettes.
La sénatrice Batters : Très bien. Vous n'allez pas vous transformer en un bureau d'exécution des ordonnances alimentaires. Merci.
Le président : Merci, monsieur. Nous apprécions que vous soyez venu aujourd'hui ainsi que l'aide que vous nous avez apportée dans notre étude de ce projet de loi.
Notre dernier panel d'aujourd'hui est composé de Stephen Fineberg, vice-président de l'Association canadienne du droit carcéral. Bienvenue à vous. Nous sommes heureux que vous soyez ici.
Vous avez la parole.
Stephen Fineberg, vice-président, Association canadienne du droit carcéral : Merci. Je vous ai remis un mémoire — en retard, bien sûr, mais vous l'avez. Dans ce mémoire, je mentionne que notre organisation est une organisation nationale qui regroupe les praticiens du droit carcéral des différentes régions du pays. Nous défendons les droits des personnes incarcérées ainsi que le principe de la suprématie de la loi dans la mesure où elle touche l'environnement carcéral.
Je voulais mentionner que toutes les activités exercées pour le compte de l'ACDC l'étaient sur une base volontaire.
Je vais vous présenter un autre point de vue — une façon de voir qui ne vous a pas encore été présentée — de sorte que j'apprécie la possibilité que vous me donnez de vous offrir un autre point de vue.
Dans mon mémoire, j'insiste sur les répercussions inquiétantes de ce projet de loi. Nous nous opposons à ce projet de loi pour diverses raisons. Premièrement, nous nous y opposons à cause de la politique sociale sous-jacente à cette mesure législative. Nous sommes déçus de constater que le gouvernement a présenté un projet de loi qui porte atteinte aux droits civils d'une catégorie de Canadiens. Il y a eu une époque où une condamnation entraînait avec elle la perte complète des droits civils — la mort civile — et ce n'est qu'en 1906 qu'une loi a restauré au Québec les droits civils des condamnés.
Tout récemment encore, à l'époque où j'ai pratiqué, les droits civils des prisonniers ont été remis en question. Lorsque j'ai commencé à pratiquer le droit il y a 30 ans, les directeurs de prison croyaient à tort que les prisonniers devaient obtenir leur permission pour pouvoir se marier. Il n'y avait pas de loi qui le disait, mais le Service correctionnel du Canada pensait que les condamnés ne pouvaient se marier sans obtenir au préalable la permission de le faire. Depuis 1979, la Cour suprême a reconnu dans l'affaire Solosky, que les prisonniers avaient les mêmes droits civils que les autres Canadiens; ils peuvent faire tout ce que peuvent faire les Canadiens, sauf ce que les empêche de faire le fait d'être en prison. Par exemple, ils ne peuvent aller au cinéma le samedi soir, même s'il n'y a aucune loi qui le leur interdit; c'est une conséquence inévitable de la peine qui leur a été imposée.
La Cour suprême a reconnu, en 1979, que les prisonniers avaient les mêmes droits civils que les autres Canadiens. Le SCC a été obligé de le reconnaître également parce que la LSCMLC a introduit la décision de la Cour suprême dans la loi, de sorte qu'il est expressément déclaré que les prisonniers ont les mêmes droits que les autres.
Le projet de loi à l'étude a toutefois pour effet de saper les droits civils des prisonniers en modifiant la façon dont ils respectent leurs obligations civiles.
Certains diront que cette modification n'est pas si grave et que la mesure proposée n'a pas pour effet de nuire gravement aux prisonniers. Je dirais que l'on introduit une différence. Pour ce qui est des obligations civiles, la loi ne traitera pas les prisonniers fédéraux de la même façon que les autres Canadiens et c'est un pas dans la mauvaise direction.
Cela ne veut pas dire que, si le projet de loi est adopté, les prisonniers seront demain condamnés à la mort civile de nouveau, mais c'est un pas dans cette direction et c'est un pas qui n'a jamais été fait auparavant. Je trouve dangereux cet aspect du projet de loi et je pense que, s'il est adopté, il pourrait encourager les autorités à prendre d'autres initiatives qui auront pour effet de saper encore davantage les droits civils de cette catégorie de Canadiens.
Le deuxième motif basé sur la politique sociale et pour lequel mon organisation s'oppose au projet de loi est que nous estimons qu'il va à l'encontre de l'approche adoptée par le Service correctionnel du Canada qui vise à responsabiliser les prisonniers à l'égard de leurs obligations civiles. Le projet de loi C-10, qui n'a été adopté que récemment et qui reflète, je pense, la réflexion approfondie de criminologues et de législateurs, aborde cette question sous un autre angle. Le projet de loi C-10 incorpore, comme M. Head vous l'a expliqué, dans le plan correctionnel l'obligation de respecter les engagements civils et de satisfaire les créanciers. Si le prisonnier ne respecte pas le plan correctionnel, cela a des répercussions négatives pour lui. Ces répercussions peuvent se traduire par une réticence à transférer le prisonnier dans un établissement à niveau de sécurité moindre, et à recommander pour le prisonnier la mise en liberté, la semi-liberté, la libération conditionnelle totale, toutes sortes de privilèges, tous les privilèges administrés par le Service correctionnel du Canada et la Commission des libérations conditionnelles du Canada.
Le Service correctionnel a adopté comme approche de responsabiliser les prisonniers à l'égard de leur comportement. Le plan correctionnel vise à inciter fortement le prisonnier à adopter des attitudes sociales et un comportement responsable. Il n'oblige pas le prisonnier à prendre une décision particulière. Le but est d'amener le prisonnier à prendre lui-même une décision dans l'espoir qu'une fois libéré, il va continuer à adopter cette même attitude et à se comporter de cette façon. Le projet de loi à l'étude bloque cette approche qui est pourtant au cœur de la mission du Service correctionnel, à savoir essayer de réadapter les prisonniers.
La loi va prendre une décision pour le prisonnier sans que celui-ci le sache. La main invisible de la loi va transférer de l'argent de A à B. Comment les prisonniers vont-ils percevoir cette manœuvre? Ce n'est qu'une hypothèse de ma part, mais je pense qu'ils vont considérer que c'est une mesure injuste et arbitraire parce que cela se fait sans qu'ils le sachent, sans leur consentement, ni leur participation. Cela va tout à fait à l'opposé de l'approche du Service correctionnel, telle qu'elle se reflète dans le projet de loi que vous venez d'adopter.
On pourrait trouver d'autres raisons de s'opposer au projet de loi dans la Charte. Nous pensons que l'article 15 de la Charte permettra de contester fortement la constitutionnalité du projet de loi. Pour qu'une contestation fondée sur l'article 15 réussisse, il faudra que les tribunaux reconnaissent que les prisonniers constituent un groupe qui a le pouvoir de contester l'application de l'article 15 de la Charte. Jusqu'ici, la Cour suprême n'a pas rendu de jugement qui déclarait que les prisonniers constituaient un groupe régi par l'article 15. Il n'y a toutefois eu aucune décision majoritaire de la Cour suprême qui exclut cette possibilité. Il faudra poser cette question aux tribunaux. Je suis convaincu que cela se fera si le projet de loi est adopté. Je pense que vous vous engagez sur un terrain constitutionnel mouvant.
L'objection constitutionnelle la plus évidente découle de la séparation des pouvoirs et de l'article 92, un motif bien connu. Ce projet de loi empiète manifestement sur le territoire des provinces. Le projet de loi touche des aspects qui sont déjà couverts ou occupés par des lois provinciales et qui relèvent du pouvoir des assemblées provinciales.
L'objection suivante est que cette mesure est tout simplement inutile. Dans mon mémoire, j'analyse les mécanismes de recouvrement qui existent déjà au palier provincial. Vous lancez le Service correctionnel dans une aventure administrative qu'il est obligé d'accepter si vous la lui imposez, mais qui va, d'après moi, poser un défi énorme pour le Service correctionnel. Ce service est déjà surchargé par toutes les obligations qu'il doit respecter. C'est ce qu'indique clairement l'effondrement total du système de traitement des griefs. Le Service correctionnel n'est pas en mesure d'offrir des programmes adéquats comme l'exige la loi et cela montre qu'il éprouve beaucoup de difficultés à respecter ses obligations légales.
C'est là une aventure toute nouvelle et après avoir écouté l'exposé de M. Head, je constate aujourd'hui que le Service correctionnel est disposé à se lancer dans cette aventure. Je vois également qu'il s'est effectué beaucoup de travail pour définir les modalités de ce régime. Cela ne veut pas dire que cela sera facile ou que cela représente une bonne utilisation des ressources. Je pense que le service s'engage dans des eaux troubles.
Des préoccupations au sujet du respect de la vie privée ont également été soulevées. J'ai été heureux de l'entendre aujourd'hui.
Compte tenu des répercussions inquiétantes du projet de loi, j'estime qu'il faudrait qu'il y ait des raisons très importantes pour s'engager dans cette voie. Examinez les raisons qui ont été fournies au comité au cours de sa dernière séance par le parrain du projet de loi. M. Lauzon a demandé au comité de replacer cette mesure dans son contexte. Le prisonnier qui veut s'attaquer au système peut le faire en gênant l'administration de la prison. Si je ne me trompe, il faut répondre aux plaintes des prisonniers dans un délai de 60 jours. Cela exige qu'on y consacre des ressources humaines et financières importantes. C'est presque comme une loterie pour les prisonniers. Il leur arrive de gagner le gros lot. Ils obtiennent 300 ou 3 000 $, ce qui représente beaucoup d'argent lorsqu'on est en prison, et c'est quelque chose à faire pour passer le temps.
En réalité, comme le Service correctionnel pourra vous le confirmer, le système de traitement des griefs ne permet pas d'accorder des indemnités lorsqu'un prisonnier porte plainte. Les fonds peuvent uniquement servir à indemniser les cas de perte ou de destruction illégale de biens. De sorte que, lorsqu'un prisonnier reçoit 100 $, c'est parce que le personnel a détruit des biens personnels valant 100 $, ou a causé leur perte, de sorte qu'on ne peut pas dire que le prisonnier profite de quoi que ce soit. Il revient tout simplement à son point de départ. Je mentionnerai en passant que, lorsque le prisonnier obtient une réponse à sa plainte dans le délai auquel M. Lauzon a fait référence, c'est un petit miracle.
Quant aux affaires qui ne sont pas soumises au système de traitement des plaintes du Service correctionnel mais portées devant la Cour fédérale qui peut attribuer des dommages et intérêts, cela n'entre pas dans les possibilités qu'un prisonnier peut exploiter. Ce genre de poursuite est long et difficile, et le tribunal condamne le prisonnier aux dépens lorsqu'il intente une poursuite et perd sa cause. Ces dépens sont déduits chaque mois de la petite paie que reçoit le prisonnier pendant le temps nécessaire. Les prisonniers constatent rapidement, tout comme le font les Canadiens en liberté, qu'il est parfois dangereux d'intenter des poursuites.
Un autre exemple qui a été présenté à votre dernière séance pour démontrer la nécessité d'un système de saisie fédérale était le montant important des indemnités accordées par la CSST pour les accidents subis à l'intérieur du pénitencier. En réalité, la CSST ne s'occupe pas des accidents qui surviennent dans un pénitencier parce qu'elle n'a aucune compétence à l'égard des prisons fédérales. En outre, comme l'affirme le Service correctionnel, la loi ne considère pas que les activités de prisonniers constituent un travail rémunéré mais plutôt l'exécution de programmes.
Le président : Monsieur Fineberg, excusez-moi de vous interrompre, mais nous avons une limite de cinq minutes. Vous avez pris deux fois ce temps-là. Certains membres du comité aimeraient vous poser des questions. Pouvez-vous conclure rapidement?
M. Fineberg : J'allais dire que les prisonniers reçoivent des sommes dérisoires et qu'ils se plaignent de plus en plus de ne pas avoir les moyens de satisfaire leurs besoins fondamentaux. Ils ne vivent pas ce que M. Lauzon appelle la belle vie, et je veux que vous le sachiez.
Le président : Je vous remercie, monsieur.
La sénatrice Fraser : Monsieur Fineberg, bienvenue au comité. Vos commentaires au sujet du système des griefs et finalement, des affaires portées devant la Cour fédérale m'intéressent. Pouvez-vous me donner un chiffre approximatif du nombre de prisonniers qui intentent des poursuites devant la Cour fédérale?
M. Fineberg : Je ne peux pas vous le dire. Je peux vous dire qu'il y avait une époque où certains prisonniers fédéraux considéraient cela comme un passe-temps. Ils aimaient intenter des poursuites. Cela leur donnait la possibilité de faire entendre leur voix. Cela les plaçait sur un pied d'égalité avec le Service correctionnel et la Commission des libérations conditionnelles, mais les règles de pratique de la Cour fédérale ont changé de sorte que les prisonniers peuvent désormais être condamnés aux dépens, et qu'ils le sont parfois, et cela a mis un terme à ces poursuites. Cela a rapidement douché leur enthousiasme, parce que leur paie est très faible et ils essaient de l'étirer pour pouvoir acheter des croustilles, des barres de chocolat et du savon. Lorsqu'on déduit un certain pourcentage de leur paie, il ne leur reste plus rien. Ils sont obligés de mendier auprès d'autres prisonniers. Ils doivent faire de la contrebande pour vivre.
La sénatrice Fraser : Faire quoi?
M. Fineberg : De la contrebande, une activité illégale pour faire de l'argent en prison, juste pour pouvoir vivre. Les prisonniers hésitent beaucoup à se rendre devant la Cour fédérale. Ils ne le font pas pour rien. S'ils perdent, ils doivent payer pour leur poursuite.
Je pourrais également mentionner que, dans la plupart des provinces et territoires, les poursuites devant la Cour fédérale ne sont pas financées par l'aide juridique. Le plus souvent, lorsqu'un prisonnier veut saisir la Cour fédérale, il doit le faire tout seul. Cela est difficile, en particulier lorsqu'il est en prison, parce qu'il n'y a pas d'ordinateur, et qu'il n'a pas accès à la bibliothèque.
La sénatrice Fraser : Est-ce que les prisonniers s'adressent à d'autres tribunaux judiciaires ou administratifs?
M. Fineberg : Il arrive que les prisonniers s'adressent à la Cour supérieure de la province, en particulier pour un habeas corpus, parce que la Cour fédérale ne s'occupe pas de ce genre de demande, sauf pour les affaires militaires.
La sénatrice Fraser : Ce projet de loi traite des prisonniers qui obtiennent des indemnités.
M. Fineberg : Le Tribunal canadien des droits de la personne et la Cour fédérale seraient les organismes devant lesquels les plaintes des prisonniers risquent le plus de se retrouver.
La sénatrice Fraser : Combien d'entre eux s'adresseraient au Tribunal canadien des droits de la personne? Je ne vous demande pas de me fournir une analyse précise, mais une réponse fondée sur votre expérience personnelle. Cela se produit-il une fois par an, une fois par année ou une fois tous les 10 ans?
M. Fineberg : Non, nous avons une population carcérale importante. Je pense qu'il y a en permanence au moins un certain nombre d'affaires déposées devant le Tribunal canadien des droits de la personne quelque part au pays. Je dirais, d'après mon expérience, que sur 100 prisonniers, il y en a un qui va tenter de présenter un dossier au Tribunal canadien des droits de la personne.
La sénatrice Fraser : Ce tribunal peut-il lui accorder une somme importante?
M. Fineberg : Non.
La sénatrice Fraser : Je dirais que c'est l'organisme — le Service correctionnel ou un autre — qui devrait verser cet argent, ou est-ce que je me trompe?
M. Fineberg : Non, je disais simplement que les indemnités accordées sont faibles — en tout cas celles du Tribunal canadien des droits de la personne.
Le président : Quelles sont les provinces qui accordent encore l'aide juridique?
M. Fineberg : Au Québec, l'aide juridique est offerte pour les demandes de contrôle judiciaire présentées à la Cour fédérale. Elle ne couvre toutefois pas les demandes de dommages et intérêts. Au Québec, les services d'aide juridique estiment qu'ils ne sont pas là pour aider les gens à obtenir de l'argent; ils sont là pour défendre les personnes qui sont traduites devant les tribunaux et qui n'ont pas les moyens de se défendre elles-mêmes.
Au Québec, l'aide juridique ne s'occupe pas des poursuites civiles. En Ontario, cela est possible. L'Ontario est peut- être la seule province, d'après moi, dans laquelle les services d'aide juridique vont aider un prisonnier à demander des dommages et intérêts devant la Cour fédérale.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Lorsqu'on parle de droits, j'ai tendance à ne pas exclure les devoirs. On a dans la vie des droits et des devoirs. Vous dites que le détenu, le prisonnier a un statut civil. Mais est-ce que ce statut lui permet de se soustraire à ses responsabilités qui souvent sont de nature familiale.
M. Fineberg : Aucunement.
Le sénateur Dagenais : Mais vous semblez nous dire qu'il ne peut pas, compte tenu du peu d'argent qu'il a.
M. Fineberg : Le détenu a le même statut civil et les mêmes obligations civiles que tout autre Canadien. Il existe des mécanismes dans la province pour imposer et pour renforcer ces obligations auprès du détenu.
Le sénateur Dagenais : Le projet de loi comme tel oblige le détenu à respecter ses devoirs et c'est ce qu'on veut. On peut comprendre que les détenus ont des droits, mais il n'en reste pas moins que même s'ils sont en prison, ils ont des familles et des responsabilités et ils ne peuvent pas s'y soustraire. C'est un peu l'idée du projet de loi. Vous n'êtes pas d'accord avec cela évidemment, je peux le comprendre.
M. Fineberg : Ce n'est pas que je ne suis pas d'accord. Dans mon association, nous sommes des avocats, des officiers de la cour. Nous sommes de l'opinion que chaque personne doit respecter ses obligations et surtout envers la famille. Le détenu a les mêmes obligations que d'autres personnes. Il y a plus de mécanismes qui existent déjà et ils existent et ils sont là pour la famille d'un détenu, tout comme pour la famille d'une personne qui n'est pas détenue. On ne voit pas pourquoi on devrait instaurer un deuxième système qui est un peu plus direct et plus rigoureux envers les détenus qu'envers tous les autres citoyens.
Tout le monde devrait respecter ses obligations. Ce serait différent si M. Lauzon voulait présenter un projet de loi qui touche tout le monde : une autre façon de percevoir les montants qui sont dus à tous les Canadiens. Mais ce n'est pas ce qu'il fait parce qu'il sait qu'il n'a pas la juridiction. Cela découle de la responsabilité provinciale. Donc, il essaie plutôt de toucher les détenus. Moi je dis que vous n'avez pas le pouvoir. Vous créez un autre système qui cible une catégorie de Canadiens, qui crée un statut à part. C'est le problème et c'est dangereux, je vous le soumets.
Le sénateur Dagenais : C'est votre opinion, monsieur, merci beaucoup.
[Traduction]
La sénatrice Jaffer : Merci pour votre exposé.
Nous avons examiné dernièrement un certain nombre de projets de loi qui m'amènent à m'inquiéter pour les principes de détermination de la peine. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais j'estime que cela constitue une peine supplémentaire. Le juge a décidé quelle serait la peine imposée à cette personne; ses droits ont été supprimés, elle est incarcérée et maintenant, nous aggravons la peine. Je me demande vraiment si nous ne sommes pas en train d'abandonner les principes de détermination de la peine.
Pensez-vous que ce projet de loi impose une peine supplémentaire au détenu?
M. Fineberg : Le mot « peine » va peut-être amener certains membres du comité à rejeter votre position. Je parlerais plutôt de « mesure coercitive ». C'est une mesure coercitive supplémentaire qui est imposée au prisonnier, en association avec sa peine, et qui résulte de sa condamnation.
Je pense également que cela n'a rien à voir avec les principes habituels de détermination de la peine.
Je vais vous donner rapidement un exemple. J'ai un client qui est membre de la chambre de commerce. C'est un excellent citoyen; il est très actif dans son église, il s'occupe d'œuvres charitables et c'est un homme d'affaires. Il est devenu jaloux et il a essayé de mettre fin à une liaison qu'avait sa femme. Il s'est battu avec l'autre homme, celui-ci est tombé, s'est frappé la tête et il est mort.
Mon client, un homme d'affaires respectable, s'est vu imposer une peine de 12 ans d'emprisonnement pour homicide involontaire coupable. C'est bien. En plus de cette peine, le projet de loi déclare qu'il doit être maintenant traité différemment des autres Canadiens. Il ne devrait pas avoir les mêmes droits civils; il ne devrait pas être traité de la même façon par la loi lorsque cela concerne ses créanciers. Je ne comprends pas pourquoi cette personne ne devrait pas voir les mêmes droits civils, les mêmes possibilités et les mêmes droits que le reste d'entre nous pour la seule raison qu'il s'est lancé dans une bagarre qui a eu des conséquences désastreuses.
La sénatrice Jaffer : Vous avez parlé de la Charte des droits et libertés et de l'article 15. J'aimerais vous poser une question au sujet de la Charte, de l'alinéa 11h), qui garantit à tout inculpé le droit de ne pas être jugé ni puni de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement déclaré coupable et puni. C'est à cela que je pense lorsque je parle des principes de détermination de la peine.
Que va-t-il arriver à l'alinéa 11h)? Cette disposition touche-t-elle cet article?
M. Fineberg : Je ne le pense pas. Je crois que l'alinéa 11h) fait référence à une nouvelle mesure prise après l'imposition de la peine. Dans ce cas-ci, cela se produit au même moment que l'imposition de la peine. On invoque l'alinéa 11h) dans le cadre de la contestation constitutionnelle de l'abolition rétroactive de la procédure d'examen expéditif, parce que c'est une mesure qui a été prise après l'imposition de la peine dans certains cas, et qui a ensuite été appliquée rétroactivement à des personnes qui avaient déjà reçu leur peine.
Je ne pense pas que l'alinéa 11h) s'appliquera ici.
Le sénateur McIntyre : Merci, monsieur Fineberg, pour votre exposé. J'ai écouté attentivement vos arguments. Il est vrai que l'on pourrait inviter un tribunal judiciaire à examiner certains articles de la Charte des droits et libertés, comme l'article 15, comme vous l'avez mentionné, qui interdit les mesures discriminatoires fondées sur l'appartenance à un groupe défavorisé, et l'article 12 qui traîne des peines cruelles et inusitées. Croyez-vous que le tribunal pourrait écarter ces arguments en invoquant la clause nonobstant de l'article premier de la Charte?
Qu'en pensez-vous?
M. Fineberg : Pour qu'un argument fondé sur l'article premier permette de valider une mesure législative qui contreviendrait autrement à la Charte, il faut que cette mesure vise un objectif important. Dans ce cas-ci, je dirais pour ce motif que l'article 1 ne s'appliquerait pas. Cette mesure ne vise pas un objectif important parce que cet objectif est déjà pris en charge par les provinces. Si l'on veut vraiment chercher un objectif dans cette mesure, je dirais qu'elle est plutôt motivée par des raisons partisanes. Il me semble que c'est une attaque qui sera accueillie favorablement, je le suppose, par une bonne partie de la population, mais pas parce que c'est une mesure qui est nécessaire. Elle est superflue. Si elle est superflue, je ne pense pas que l'article 1 la protégerait.
Le sénateur McIntyre : Si l'on devait invoquer la Charte, le seul article que l'on pourrait invoquer serait, d'après vous, l'article 15.
M. Fineberg : Effectivement. Il serait très difficile d'invoquer l'article 12. Les tribunaux sont très réticents à examiner une loi par rapport à l'article 12. Je ne pense pas que cela s'appliquerait ici.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Monsieur Fineberg, bonjour et merci de votre mémoire. Un discours dans la population dérange de plus en plus, c'est celui de dire qu'un assassin a les mêmes droits qu'un honnête citoyen. Vous avez raison dans votre présentation lorsque que vous dites que les droits des criminels ont évolué de façon remarquée au cours des 30 dernières années, souvent au détriment de ceux des victimes.
Ce projet de loi, ainsi que plusieurs autres projets de loi qui ont été adoptés, comme la suramende, vise à inculquer au système carcéral, aux criminels, un niveau de responsabilité plus grand que ce que j'ai constaté dans ma visite des pénitenciers lorsqu'un criminel sur trois va participer à des mesures de réhabilitation, qu'on a un taux de réincarcération au Canada de près de 70 p. 100.
Souvent, il y a peu de volonté des criminels à se responsabiliser par rapport à des gestes graves qui ont été commis. En quoi ce type de responsabilisation, entre autres, un criminel qui aurait un montant d'argent important à cause d'une poursuite et qui ne paie pas sa pension alimentaire, qui ne s'occupe pas de ses enfants à la maison parce que l'État les ramasse avec l'aide sociale, en quoi les droits du criminel sont bafoués en adoptant des mesures qui le responsabilisent, même incarcéré? Comment interpréter cela comme une deuxième sentence ou une sursentence alors qu'on tente seulement de responsabiliser le criminel pour sa famille, alors qu'on sait qu'il ne le fait pas beaucoup pour sa victime?
M. Fineberg : C'est la responsabilisation dont je parle. Le service correctionnel essaie de responsabiliser les détenus, pas en les obligeant mais en les encourageant à prendre les bonnes décisions, à faire les bonnes choses pour les bonnes raisons. C'est justement l'objet du plan correctionnel. Cela ne serait plus possible. Le détenu ne pourrait plus prendre la bonne décision. La famille ne va jamais savoir que le détenu voulait respecter ses obligations à leur égard parce que la loi arrive et la loi transfère l'argent d'une main à l'autre main.
Le sénateur Boisvenu : Lorsqu'on voit le taux de réincarcération au-delà de 70 p. 100, pour vous, de responsabiliser les criminels dans le système actuellement est une réussite.
M. Fineberg : Il est évident que la réussite est partielle. Quant aux chiffres, il y a toutes sortes de chiffres. Comme vous le savez, on peut établir les chiffres selon le pourcentage des détenus qui reste à l'extérieur pendant une période de deux ans ou de cinq ou de dix ans. Il est possible d'arriver aux chiffres que vous voulez. Mais la réussite évidemment est partielle.
Cela ne veut pas dire que le service correctionnel devrait laisser tomber, abandonner l'effort de réhabiliter les détenus, d'inculquer une attitude responsable chez les détenus et se baser plutôt sur un mécanisme légal. Le mandat du service correctionnel est double, incarcérer la personne afin de protéger la société mais aussi afin de réhabiliter le détenu, de changer ses habitudes. C'est le but des tous les programmes de tout service correctionnel. Quand les détenus travaillent, bien qu'en droit, il ne s'agit pas d'un travail salarié, mais quand les détenus s'impliquent dans les travaux, c'est pour leur apprendre comment travailler une fois libérés. Quand les détenus rencontrent un psychologue, un criminologue, un agent de libération conditionnelle pour discuter de leur passé et de leur avenir, c'est pour leur inculquer une nouvelle compréhension, une nouvelle attitude de leur situation et de leurs obligations. C'est ce qu'ils font avec le plan correctionnel.
C'est ce que le projet de loi C-10 voulait faire. Avant l'adoption du projet de loi C-10, le détenu n'avait aucune obligation de respecter ses obligations civiles. Mais depuis ce temps, l'obligation est là. Si le détenu refuse d'en profiter, il va souffrir en conséquence, finalement il va comprendre. C'est ce que le service correctionnel souhaite.
[Traduction]
Le sénateur Wallace : Monsieur Fineberg, vous avez parlé de la politique sociale que reflète le projet de loi et vous avez dit que celui-ci fera en sorte que les prisonniers fédéraux ne seront pas traités de la même façon que les autres Canadiens. Autrement dit, l'argent qui leur serait versé à la suite d'une poursuite civile ou d'une décision d'un tribunal administratif ou judiciaire sera utilisé pour exécuter d'autres obligations, comme les ordonnances alimentaires pour le conjoint ou les enfants, les ordonnances de dédommagement, par exemple. Les sommes qui seraient autrement versées aux prisonniers serviront à exécuter des obligations et elles seront confisquées aux prisonniers. Vous dites que de cette façon, les prisonniers ne sont pas traités de la même façon que les autres Canadiens.
Ne pensez-vous pas que lorsque le gouvernement fédéral doit de l'argent à des Canadiens qui ne sont pas des prisonniers, par exemple, lorsque Revenu Canada (ARC) doit un remboursement, il est possible d'affecter ces sommes aux personnes envers lesquelles la personne qui devait recevoir l'argent a des obligations?
M. Fineberg : J'admets que le législateur peut mettre sur pied divers mécanismes pour réaffecter des fonds dans le but de respecter des créances civiles et que les prisonniers devraient être soumis à ces obligations tout comme les autres Canadiens. Dans l'exemple que vous citez, la personne qui devait recevoir l'argent du gouvernement fédéral pourrait être un prisonnier et cet argent lui serait confisqué comme vous le décrivez. Cela ne soulève aucun problème. Ce à quoi nous nous opposons, c'est à la création d'un régime particulier réservé à la population carcérale canadienne, comme si elle méritait d'être traitée différemment parce que ses membres ont fait l'objet d'une condamnation. Dans le cas des prisonniers, nous ne pouvons pas nous en remettre aux mécanismes habituels. Pour quelle raison? Parce que ce sont des condamnés.
Prenons comme exemple non pas une obligation alimentaire mais une créance civile ordinaire. Disons que je vous poursuis et que je gagne. Vous me devez cet argent. Si je veux l'obtenir, il faut que je prenne des mesures et vous ne voudrez peut-être pas me le verser immédiatement. Il sera peut-être plus pratique pour vous de me le verser dans six mois. Vous avez peut-être d'autres façons d'utiliser cet argent. La loi permet de prendre ce genre d'arrangement. Je peux prendre certaines mesures et vous pouvez prendre également certaines mesures. Un prisonnier devrait pouvoir prendre les mêmes mesures dans le cas d'une créance civile. Cela devrait être la même chose.
Le sénateur Wallace : Mais le résultat n'est-il pas identique, que ce soit aux termes du projet de loi C-350 ou dans l'exemple que je vous ai donné, dans lequel l'argent aurait dû être payé à une personne — qui n'est pas prisonnière — par Revenu Canada et qui est finalement attribué à quelqu'un d'autre à la suite d'un processus identique? Le résultat est identique. L'argent est confisqué au débiteur et il est versé aux créanciers dans le cas du projet de loi C-350 ou dans l'exemple que je vous ai donné au sujet des fonds que devait rembourser Revenu Canada. Le résultat est identique. Cela me donne à penser que vous soutenez en fait que ce mécanisme porte en vérité atteinte aux droits civils du prisonnier.
Il me semble que la conclusion est que cela vient du processus utilisé. Cette procédure vous préoccupe, même si elle entraîne le même résultat. L'argent qui aurait été versé à ce débiteur est affecté ailleurs en raison de certaines lois et de certaines exigences. Je ne vois pas où est la différence.
M. Fineberg : Dans certains cas, le résultat sera le même. Dans d'autres, il ne le sera pas. Si le voisin d'un prisonnier le poursuit dans une affaire de propriété et que le voisin obtient gain de cause, l'argent du prisonnier sera réaffecté, dès qu'il sera attribué par le Tribunal des droits de la personne. Ce qui ne serait pas le cas si le prisonnier vivait à l'extérieur d'une prison. Cela ne se passerait pas de la même façon. Le résultat sera parfois le même et quelquefois il ne le sera pas. Le résultat devrait toujours être le même et la procédure toujours la même.
Le genre de mécanisme que propose M. Lauzon n'est pas proposé pour les autres membres de la société.
Le sénateur Wallace : Eh bien, il ne peut être proposé aux autres membres de la société parce que ce ne sont pas des prisonniers. Ce qui est proposé au reste de la société, c'est que, lorsque le gouvernement fédéral vous doit de l'argent, vous constaterez peut-être que, selon la procédure légale, cet argent sera réaffecté à une autre personne que vous. Il pourrait être versé à votre conjointe, il pourrait être versé à titre d'aliments pour les enfants, et cela peut se produire même si la personne n'est pas un prisonnier. À mon avis, je pense que la conclusion est identique et que la différence porte uniquement sur le processus. Le résultat est le même.
M. Fineberg : Prenez un citoyen en liberté qui présente une affaire au Tribunal canadien des droits de la personne, qui obtient gain de cause, reçoit de l'argent mais a également une dette civile. Disons qu'il a été poursuivi avec succès et qu'il n'a pas encore payé son créancier. Cet argent n'est pas transféré à ce dernier parce que ce n'est pas un prisonnier.
Le sénateur Wallace : Je comprends votre argument.
Le président : Vous pouvez vous mettre d'accord pour ne pas être d'accord. Nous sommes au deuxième tour de questions et j'ai la sénatrice Fraser sur ma liste.
La sénatrice Fraser : Monsieur Fineberg, si j'ai bien compris, vous nous dites que le projet de loi de M. Lauzon est fondé sur une hypothèse erronée. Il nous a déclaré, à plusieurs reprises, si mon souvenir est bon, qu'il arrive fréquemment que des prisonniers reçoivent ce qui est, dans le contexte carcéral, des sommes importantes. Vous dites que cela n'est pas vrai.
M. Fineberg : Pas d'après mon expérience. Je ne prétends pas avoir ces chiffres.
La sénatrice Fraser : Le commissaire du Service correctionnel a déclaré qu'il y avait eu au total cinq affaires de ce genre en six ans, je crois, et que ces cinq affaires, d'après ce qu'ils ont appris, comprenaient des indemnités s'élevant au total à 100 000 $, ce qui représente 20 000 $ chacune. Dans un contexte carcéral, cela représente peut-être beaucoup d'argent, mais ce ne sont pas des sommes extravagantes. Comme vous le faites remarquer, ces sommes seraient de toute façon envoyées dans un compte d'épargne.
M. Fineberg : Si vous le permettez, cela est une remarque importante. Lorsqu'il y a des indemnités, celles-ci sont versées directement dans un compte d'épargnes. Le prisonnier est autorisé à transférer chaque année un montant total de 500 $ dans son compte de dépenses. Au cours d'une année, le prisonnier peut retirer 500 $ de son compte d'épargnes et utiliser cette somme pour ce qu'on appelle « la cantine ».
La sénatrice Fraser : Permettez-moi de me faire l'avocat du diable ici, où est le problème? Étant donné qu'il y a si peu de personnes, d'après les calculs du Service correctionnel, qui seront touchées, quel est le problème que pose un tel système? Disons que pour une raison ou une autre, un prisonnier reçoit une somme très importante. Cela pourrait être une poursuite qui a été entamée avant qu'il se retrouve en prison. Le jugement est rendu et lui attribue disons un demi- million de dollars. Je crois que je suis d'accord avec vous, mais j'aimerais vous entendre dire pourquoi il n'est pas approprié qu'une telle indemnité déclenche automatiquement l'application d'un système fondé sur le principe suivant : cette personne est en prison, elle ne peut utiliser de toute façon cet argent, mais il y a des gens qui ont un intérêt tout à fait légitime à faire valoir sur cet argent et nous avons un système qui permet de le leur attribuer.
Pourquoi ne devrions-nous pas adopter un tel système?
M. Fineberg : Parce qu'il n'y a pas de transfert automatique dans le cas d'un citoyen ordinaire, d'un citoyen en liberté. C'est la seule raison.
La sénatrice Fraser : Est-ce aussi simple?
M. Fineberg : Oui. Toutes les provinces ont des services d'exécution des ordonnances alimentaires. Lorsqu'un tribunal rend une ordonnance alimentaire, cette ordonnance comprend habituellement une disposition qui prévoit que les sommes visées seront utilisées pour l'entretien et l'exécution de l'ordonnance. Ces services s'en occupent pour la personne concernée. Il y a dans chaque province un mécanisme de ce genre, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de créer un autre mécanisme qui semble plus direct et plus arbitraire que dans les cas habituels.
La sénatrice Fraser : Merci.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Monsieur Fineberg, évidemment, vous avez parlé des législations de différentes provinces. Vous savez, à titre d'exemple, que si une personne est incarcérée par suite d'accusation de conduite en état d'ébriété, et que des gens ont été blessés, tués ou mutilés, même cette personne reçoit de la société d'assurance automobile une somme d'argent mensuelle, même si elle est incarcérée. Vous êtes d'accord que cet argent pourrait servir aux besoins de sa famille, j'imagine.
M. Fineberg : Oui, et il y a des règles pour cela.
Le sénateur Dagenais : Et vous pensez que ce projet de loi ne peut pas améliorer ces règles-là?
M. Fineberg : Pas à l'égard des détenus en tant que catégorie de personnes à part.
Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Fineberg.
[Traduction]
Le président : Merci, monsieur Fineberg, d'être venu ce soir et d'avoir exposé le point de vue de votre association au sujet du projet de loi C-350.
M. Fineberg : Merci de m'avoir donné cette possibilité.
Le président : Cela est très apprécié.
Avant de lever la séance, je vous rappelle que nous nous réunissons demain à 10 h 30 dans cette salle, et que nous poursuivons l'étude du projet de loi C-350. Nous allons entendre l'enquêteur correctionnel, un représentant de la société Elizabeth Fry et des représentants de diverses organisations de défense des victimes. La semaine prochaine, il est fort probable que nous allons prolonger nos séances de mercredi et de jeudi pour examiner le projet de loi sur la protection des témoins que nous venons de recevoir au Sénat. Le comité de direction a approuvé cet horaire, en cas de besoin : mercredi de 15 heures à 20 h 30, de sorte que ce sera un peu un marathon et jeudi de 10 h 30 à 15 heures. Nous siégerons pendant que le Sénat tient une séance. C'est une réelle possibilité.
La sénatrice Fraser : En cas de besoin.
Le président : En cas de besoin, j'insiste sur ce point. Vous insistez également dessus, parfait. Voilà qui termine cette séance. Je vous remercie.
(La séance est levée.)