Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 41 - Témoignages du 29 mai 2013 (séance du soir)
OTTAWA, le mercredi 29 mai 2013
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 18 h 46, en séance publique, pour la teneur du projet de loi C-60, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 21 mars 2013 et mettant en œuvre d'autres mesures, déposé à la Chambre des communes le 29 avril 2013.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs et sénatrices, ce soir nous poursuivons notre étude de la teneur du projet de loi C-60, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 21 mars 2013 et mettant en œuvre d'autres mesures.
[Traduction]
Honorables sénateurs, nous entamons notre septième réunion au sujet du projet de loi C-60. Cet après-midi, nous avons achevé notre étude des divers articles en compagnie des fonctionnaires. Nous avons fait au moins une lecture du projet de loi en entier et nous allons passer aux témoins extérieurs au gouvernement qui s'intéressent à cette mesure ou qui pourraient être touchés par les dispositions proposées.
Nous accueillons Laura Eggertson, présidente du Conseil d'adoption du Canada. Elle va nous parler de la partie 1, article 9, qui porte sur le crédit d'impôt pour frais d'adoption, que vous trouverez à la page 4 du projet de loi. Comme nous avons tous un exemplaire du projet de loi, nous pourrons le consulter au besoin.
Nous accueillons également Neil Pierce, président de la division de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest de la Société canadienne de la sclérose en plaques. Il est également vice-président national, relations avec le gouvernement et participation des bénévoles. Il nous parlera de la partie 1, article 10, qui porte sur le crédit pour premier don de bienfaisance, qui se trouve également à la page 4 du projet de loi. Nous entendrons donc à deux exposés sur deux sujets qui se trouvent à la page 4.
Nous accueillerons enfin Rob Cunningham, analyste principal de la politique, Société canadienne du cancer. Ses déclarations porteront sur la partie 2, articles 53 à 61 traitant des mesures relatives aux taxes de vente et d'accise et aux droits d'accise. Ces articles se trouvent à la page 41 à 43 du projet de loi.
Je demanderais à chacun de nos invités de faire une brève déclaration préliminaire après quoi nous passerons au débat, aux questions et réponses. Commençons par Mme Eggertson.
Laura Eggertson, présidente, Conseil d'adoption du Canada : Merci beaucoup sénateur Day et mesdames et messieurs, de m'avoir invitée à vous adresser la parole aujourd'hui.
Comme vous l'avez entendu, je m'appelle Laura Eggertson. Je suis présidente à titre bénévole du Conseil d'adoption du Canada, qui est une organisation nationale à but non lucratif. Je me présente devant vous aujourd'hui en qualité de personne adoptée et de parent adoptif. J'ai adopté deux fillettes, l'une de huit ans et l'autre de neuf ans, qui avaient été placées en foyer d'accueil.
Nous espérons que les changements que le gouvernement fédéral a apportés au crédit d'impôt pour adoption dans ce budget et que vous examinez ici aujourd'hui aideront davantage de familles qui songent à adopter un enfant.
Tel qu'il est dit dans le document du budget, il y a environ 30 000 jeunes et enfants dans des foyers d'accueil partout au Canada qui sont disponibles — c'est-à-dire légalement libres — pour adoption, mais qui n'ont pas de famille permanente. Bon nombre d'entre eux sont Autochtones, car les enfants autochtones sont surreprésentés dans le système des foyers d'accueil. La triste réalité, c'est que seuls quelque 2 000 jeunes et enfants en foyers d'accueil sont adoptés chaque année. Environ un millier d'enfants sont adoptés à titre privé, en plus des 2 000 provenant des foyers d'accueil, et environ 2 000 autres sont adoptés à l'étranger.
Notre pays doit insister davantage sur le fait de trouver des familles permanentes pour ces jeunes et ces enfants. Ces changements au crédit d'impôt prolongent la période pendant laquelle les familles adoptives peuvent déduire des dépenses liées à une adoption. Ces dépenses peuvent comprendre le coût d'une étude à domicile ou d'une formation parentale préalable à l'adoption que les parents dans de nombreuses provinces et territoires sont tenus de suivre avant qu'un enfant ou un jeune leur soit confié.
En Alberta, par exemple, les familles peuvent dépenser 12 000 $ par an pour adopter un enfant à titre privé. Auparavant, les familles pouvaient déduire uniquement les dépenses pour l'année où elles se produisaient, même si c'était plusieurs années avant l'adoption de l'enfant. Par conséquent, très peu de parents étaient en mesure de profiter pleinement des avantages du crédit d'impôt, qui est un crédit non remboursable de 15 p. 100 de la somme de dépenses admissibles, jusqu'à concurrence de 11 669 $.
La différence avec ce changement, c'est que les familles pourront désormais déduire toutes les dépenses pendant l'année où elles adopteront l'enfant, quelle que soit l'année où les dépenses ont eu lieu. En autant qu'elles soient inscrites auprès d'une province ou d'une agence pour adopter un enfant, elles pourront déduire les dépenses, même si elles doivent attendre deux ou trois ans avant d'accueillir l'enfant.
Vous vous demandez peut-être s'il s'agit-là d'un changement important. Pour nous, c'est important, non seulement à cause de la manière dont il amortira les dépenses liées à l'adoption, mais encore en raison du message qu'il transmet. Il transmet le message que notre gouvernement fédéral se soucie des enfants et des adolescents canadiens qui n'ont pas de famille permanente.
Ces jeunes aboutissent dans des foyers d'accueil sans que ce soit de leur faute. Nous les accueillons sans leur consentement, mais pour leur protection. Nous les éloignons de leurs proches, qu'ils aiment. Nous pouvons les séparer de leurs frères et sœurs. Ensuite, nous les faisons passer d'un foyer à l'autre, souvent pendant le reste de leur vie. Traumatisés et inconsolables, ils passent leur vie à essayer de s'adapter à chaque nouveau foyer et nouvelle famille. Ils se demandent combien ça va durer dans chaque famille. La plupart du temps, ça ne dure pas.
Les jeunes quittent leur foyer d'accueil à l'âge de 16, 18 ou 21 ans, selon la province, c'est-à-dire quand nous les considérons assez âgés pour se débrouiller tout seuls, sans des familles permanentes pour les soutenir ou célébrer les étapes caractéristiques de la vie. Je songe par exemple à la question qu'un jeune diplômé en foyer d'accueil m'a récemment posée : « Qui viendra à ma cérémonie de remise des diplômes? »
En tant que parents nous savons tous que les enfants ont besoin de notre soutien longtemps après leur 18e anniversaire. Ils pourraient même avoir davantage besoin de nous dans ces années post-adolescence alors qu'ils luttent pour pouvoir fréquenter le collège ou l'université, trouver un emploi et commencer leur propre famille, particulièrement dans la conjoncture économique actuelle. Sans une famille permanente, de nombreux jeunes qui n'ont plus l'âge d'être en foyer d'accueil finissent par devenir des sans-abri. Ils peuvent être poursuivis par la justice. Ils vivent de l'aide sociale, deviennent des parents adolescents et pourraient voir leurs propres enfants placés à leur tour dans des foyers d'accueil. Le cycle se poursuit.
Au Conseil d'adoption du Canada, nous estimons qu'il faut changer le système de sorte qu'il soit plus facile pour les Canadiens d'adopter des enfants et des jeunes de n'importe quel âge, ou de créer d'autres liens permanents au moyen de familles d'accueil, un régime de tutelle ou la garde coutumière. Un jeune homme de 17 ans nous a récemment dit qu'il cherchait encore une famille adoptive. « Tout ce que je veux, c'est des parents pour me border au lit », nous a-t-il dit.
Ces changements au crédit d'impôt pour adoption sont un premier pas. Nous estimons que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle important sur le plan du leadership. Nous nous réjouissons à l'idée de poursuivre nos travaux avec le gouvernement dans les mois et les années à venir afin de trouver davantage de moyens d'encourager l'adoption et la permanence.
Je demanderais au comité d'appuyer ces changements. Je répondrai volontiers à toute question que vous voudrez poser sur ces mesures et d'autres encore que le gouvernement fédéral peut adopter. Merci.
Le président : Merci beaucoup.
Neil Pierce, président, Division l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest, Société canadienne de la sclérose en plaques : Merci beaucoup de votre invitation à me prononcer sur notre crédit pour premier don de bienfaisance.
Au nom de la Société canadienne de la sclérose en plaques, je me propose de commencer par vous parler un peu de notre mission qui consiste à nous ériger en chef de file pour trouver le moyen de guérir la sclérose en plaques et à permettre aux gens qui en sont atteints d'améliorer leur qualité de vie. Les personnes qui vivent avec la sclérose en plaques au Canada sont notre priorité numéro un et elles sont au cœur même de tout ce que nous faisons sur le plan du financement des recherches et de la prestation des services d'un bout à l'autre du pays.
Nous appuyons les mesures du projet de loi C-60 qui contribuent à mieux outiller le secteur canadien de la bienfaisance dans l'aide qu'il apporte aux familles et aux personnes qui vivent avec cette maladie et ce handicap.
Nous sommes encouragés de constater que le projet de loi C-60 reconnaît l'importance et la nécessité de favoriser et de promouvoir une culture de don au Canada. Depuis 1990, le pourcentage de contribuables cherchant à déduire des dons a baissé de 29,5 à 23 p. 100 en 2011. Au cours de la même période, le nombre de déclarants a augmenté d'environ un tiers, mais le nombre de déclarants cherchant à déduire des dons a augmenté d'à peine 3 p. 100. L'enquête canadienne sur le don, le bénévolat et la participation a permis de constater que la majorité des Canadiens donneraient davantage s'il y avait de meilleurs incitatifs fiscaux en place.
L'inclusion de ce nouveau super crédit temporaire pour un premier don de bienfaisance encouragera tous les jeunes Canadiens à faire des dons. L'occasion est toute désignée pour nous de cultiver une nouvelle génération de donateurs et d'inculquer la philanthropie aux jeunes. Le fait d'encourager de nouveaux donateurs aura, en plus, l'avantage de stimuler l'augmentation du nombre de bénévoles qui collaborent avec le secteur de la bienfaisance partout au pays. Tout comme nous constatons un déclin dans le nombre de donateurs, nous voyons un déclin dans le nombre de bénévoles.
Par ailleurs, pour renforcer la capacité dans le secteur de la bienfaisance, nous reconnaissons l'importance d'envisager de futures mesures fiscales, dont le crédit d'impôt supplémentaire, qui incite les donateurs existants à donner davantage. Il s'agit de familles de travailleurs de la classe moyenne, car habituellement ce sont les gens qui ont le plus d'argent qui font davantage de dons, mais le crédit d'impôt supplémentaire proposé permettra à davantage de Canadiens d'investir et de soutenir le secteur de la bienfaisance.
Le crédit supplémentaire pour les dons de bienfaisance augmenterait de 10 p. 100 le crédit fédéral pour dons de bienfaisance, pour tout nouveau don d'une valeur supérieure à celle des dons antérieurs. Cette mesure incitative permettra aux Canadiens d'étirer leur don encore davantage. Les recherches montrent que plus de la moitié des donateurs auraient tendance à donner davantage s'il y avait de meilleurs incitatifs fiscaux. Il faudrait également accorder la priorité à cette proposition dans la préparation des budgets futurs. Ce serait un complément tout désigné au super crédit d'impôt introduit cette année.
Pour la Société canadienne de la sclérose en plaques, ces mesures fiscales revêtent une importance critique, car nous comptons sur le revenu émanant des donateurs pour satisfaire la demande croissante de services liés à la sclérose en plaques et pour financer les 10 millions de dollars que nous versons à la recherche chaque année, cela pour trouver un remède. Pour illustrer la situation, 96 p. 100 de notre argent provient de nos propres collectes de fonds. Il s'agit de sommes allant de 20 à 100 $, que nous obtenons au moyen d'événements spéciaux pour la plupart, et nous comptons quelque 200 000 donateurs. Or, bon nombre de nos donateurs sont en train de prendre de l'âge, comme moi-même, et je crois qu'il y a moyen d'atteindre leurs enfants, leurs familles, leurs amis. Ce sont des gens qui nous soutiennent. Cette mesure est absolument essentielle pour nous aider à soutenir notre capacité de pouvoir faire encore davantage pour aider les Canadiens partout au pays.
J'aimerais saisir cette occasion au nom de la société pour vous remercier de votre invitation et je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Pierce. Monsieur Cunningham?
Rob Cunningham, analyste principal des politiques, Société canadienne du cancer : Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs. Je suis analyste principal de la politique auprès de la Société canadienne du cancer.
[Français]
Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de venir témoigner devant votre comité aujourd'hui.
[Traduction]
Permettez-moi, d'entrée de jeu, de souligner l'important travail que le Sénat a fait depuis tant d'années pour le contrôle du tabagisme. Par exemple, des projets de loi du Sénat dont la Loi sur la protection des jeunes contre le tabac, coparrainée par les sénateurs Nolin et Kenny sous la forme des projets de loi S-13 en 1998, S-20 en 2000 et S-15 en 2001, ont été approuvés à chaque présentation devant le Sénat. Ces projets de loi ont contribué à l'annonce, en avril 2001, de la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme. Parmi d'autres exemples, en 2006 le Sénat a adopté une motion exigeant que tous les lieux de travail réglementés par le fédéral soient exempts de fumée. Pour y arriver, la mesure a été suivie par le renforcement des modifications au Règlement sur la santé des non-fumeurs.
Aujourd'hui, mon témoignage portera sur l'augmentation de la taxe sur le tabac prévue dans les articles 53 à 61 du projet de loi C-60. Cette hausse vient contrer une échappatoire et s'applique uniquement à la catégorie de produits du tabac décrite comme tabac fabriqué, plus particulièrement le tabac à rouler. Nous appuyons cette hausse et nous recommandons que tous les sénateurs appuient la mesure.
Du point de vue de la santé, le tabagisme demeure une des principales causes évitable de maladie et de décès au Canada, puisqu'il tue chaque année 37 000 Canadiens souffrant de cancer, de maladies cardiovasculaires, d'AVC, d'emphysème et autres. L'immense majorité des nouveaux fumeurs sont des mineurs. Des taxes plus élevées sur le tabac jouent un rôle essentiel pour réduire l'usage du tabac, particulièrement chez les jeunes, car ils ont moins d'argent à dépenser. Un grand nombre d'études confirment exactement ce à quoi on peut s'attendre, c'est-à-dire qu'à mesure que les taxes et les prix du tabac augmentent, la consommation de tabac baisse.
Le projet de loi C-60 cible une vielle échappatoire qui a permis que le tabac à rouler soit imposé à un taux nettement inférieur à celui des cigarettes. Il fut un temps où il fallait un gramme de tabac à rouler pour faire une cigarette. L'industrie du tabac a modifié ses procédés de fabrication de sorte qu'il faut moins de tabac par cigarette. À présent, au lieu d'un gramme, il suffit d'un demi-gramme ou moins pour rouler une cigarette. La démarche des cigarettiers exploite la structure d'imposition fondée sur le poids et, à toutes fins utiles, elle revient à réduire de moitié la taxe sur le tabac à rouler. Je peux vous citer quelques exemples.
Cette étiquette de la marque Export A dit qu'il faut uniquement 0,47 gramme pour rouler sa propre cigarette. Il affirme qu'on peut rouler 100 p. 100 de plus de cigarettes — on peut obtenir deux fois plus de cigarettes qu'auparavant parce que le tabac est gonflé de sorte qu'il en faut moins. Cette autre compagnie utilise le même principe — 100 p. 100 de plus de cigarettes qu'avant. Il vous faut moins d'un demi-gramme. Ce projet de loi permet à la structure fiscale de contrer ce que les fabricants sont en train de faire pour exploiter cette échappatoire.
Cette exploitation de l'échappatoire a mené à une réduction des prix, ce qui n'incite pas les gens à cesser de fumer, pour ne pas dire que ça les incite à augmenter leur consommation de cigarettes quotidienne, car c'est moins cher. Tout ça se fait au détriment de la santé publique et explique pourquoi nous appuyons les mesures prévues dans le projet de loi C-60 qui visent à fermer cette échappatoire. Le chiffre d'affaires pour le tabac à rouler varie d'une province à l'autre, passant de seulement 1 p. 100 du marché en Ontario à 13 p. 100 ou plus du marché dans cinq provinces. Ainsi, ce changement dans la taxe sur le tabac sera particulièrement bénéfique dans certaines provinces.
Une comparaison entre les jeunes de diverses régions du Canada révèle une donnée surprenante, soit qu'ils sont nombreux à rouler leurs cigarettes. Les données du sondage sur le tabagisme chez les jeunes au Canada de 2009 nous apprenaient que, parmi ceux qui fumaient au secondaire, 62 p. 100 des garçons et 38 p. 100 des filles avaient roulé leurs cigarettes dans les 30 jours précédents.
Il importe de signaler que cette augmentation de la taxe sur le tabac dans le projet de loi C-60 s'appliquera à d'autres formes de tabac en vrac, dont la chique, le tabac à priser et le tabac pour narguilé, en plus du tabac à rouler. Ces catégories de produits sont beaucoup plus prisées par les jeunes à cause des saveurs ajoutées, de même que par les jeunes adultes par opposition aux 25 ans et plus, ce qui nous incite encore plus à soutenir le projet de loi C-60 qui aura une incidence sur la consommation de tabac chez les jeunes.
Voici un exemple, du tabac pour narguilé qu'on appelle aussi hookah. De nombreux parents ne savent pas ce que c'est. Nous avons ici des échantillons parfumés à l'orange, à la cerise et à la banane. On fume ce tabac, qui ne cesse de gagner en popularité les adolescents et les jeunes Canadiens, dans un narguilé. C'est préoccupant, car cela crée une dépendance. Nous avons d'autres exemples de tabac au goût de menthe, de citron et de cerise. Ce projet de loi modifiera aussi cet état de chose.
Je conclurai en disant que tout le monde sortira gagnant de la mesure visant la taxe sur le tabac dans le projet de loi C-60. En plus des bienfaits sur la santé publique, les recettes publiques augmenteront de 75 millions de dollars par an. Une fois de plus, nous exhortons tous les sénateurs à appuyer cette mesure. Merci. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Vous ne pensez pas que l'augmentation réduira la consommation et que par conséquent, l'augmentation de 75 millions de dollars de recettes publiques que vous prévoyez risque d'être un peu optimiste?
M. Cunningham : Quand les fonctionnaires de Finances Canada ont fait cette prévision, ils ont fait entrer en ligne de compte une diminution dans l'usage.
La sénatrice Eaton : À combien revient une adoption?
Mme Eggertson : Cela dépend de la manière dont vous adoptez l'enfant. Si vous l'adoptez en passant par le système public, quasiment rien. De nombreux parents optent pour des adoptions privées à la suite d'une étude à domicile. Cela peut coûter 1 500 ou 2 000 $.
La sénatrice Eaton : Qu'est-ce qu'une étude à domicile?
Mme Eggertson : Un travailleur social vient vérifier si le foyer est approprié pour l'enfant. Toutes les provinces et tous les territoires exigent une étude à domicile avant que quelqu'un puisse adopter un enfant, que ce soit à l'intérieur du pays ou à l'étranger.
La sénatrice Eaton : Vous embauchez des gens agréés.
Mme Eggertson : Il s'agit de travailleurs sociaux. Il peut y avoir un coût pour l'étude à domicile. On peut également choisir de suivre ce qu'on appelle une formation préalable à l'adoption, ce qui veut dire une série de cours sur la manière d'être parent adoptif. Cela peut être fait à titre privé. Beaucoup de familles paient pour ces services d'abord pour qu'ils soient prêts pour l'adoption avant même de s'adresser à la société d'aide à l'enfance, par exemple. Il faut faire tout cela également s'il s'agit d'une adoption à l'international ou à titre privé. Il peut y avoir toute une série de coûts.
La sénatrice Eaton : Et pour les enfants placés? Est-ce qu'il y a un coût à cela également?
Mme Eggertson : Quand j'ai adopté mes enfants, ça ne coûtait rien. J'ai décidé de me déplacer parce que mes enfants ne se trouvaient pas ici à Ottawa. À part cela, je n'ai rien eu à payer pour l'étude à domicile. Si je devais m'y prendre aujourd'hui, je pourrais choisir de dépenser l'argent pour obtenir une étude à domicile privée ou la formation préalable, car cela me permettrait d'être prête à l'adoption beaucoup plus rapidement. Quand on adopte un enfant à titre privé, il y a des frais juridiques, et des frais de conseillers dans certaines provinces, dont l'Alberta. Ces frais peuvent atteindre 12 000 $, comme je disais.
La sénatrice Eaton : Pouvez-vous me dire, grosso modo, ce qu'il en coûte d'adopter deux enfants placés aujourd'hui, sans avoir à vous déplacer?
Mme Eggertson : Sans avoir à me déplacer, cela pourrait ne coûter rien du tout.
La sénatrice Eaton : Il vous faudrait une étude à domicile.
Mme Eggertson : Je serais passée par le système public et, dans ce cas, il m'aurait fallu attendre assez longtemps. Quelqu'un qui paierait pour les deux premières étapes, soit l'étude à domicile et la formation, pourrait devoir payer 4 000 ou 5 000 $.
La sénatrice Eaton : Vraiment?
Mme Eggertson : Oui.
La sénatrice Eaton : Je comprends pourquoi cela pourrait dissuader beaucoup de gens.
Mme Eggertson : C'est possible.
La sénatrice Eaton : Y a-t-il aussi les dépenses après l'adoption qu'un parent naturel doit normalement assumer?
Mme Eggertson : Oui, c'est une très bonne question. Une grande partie des dépenses ou du soutien post-adoption n'est pas couvert. Par exemple, si vous adoptez un enfant du réseau des foyers d'accueil, il y a de bonnes chances pour que celui-ci soit déjà passé par de nombreux foyers et qu'il ait vécu des traumatismes. Il pourrait y avoir des questions de mauvais traitement et de négligence, alors les familles pourraient devoir compter sur des coûts liés à la consultation d'un psychologue, l'encadrement et le besoin de répit.
J'essaie de penser à tous les aspects. Il y a assez de dépenses post-adoption qui ne sont pas couvertes, surtout si vous n'avez pas une assurance santé privée. Certaines provinces ont des ententes de subvention pour encourager les familles à adopter et font entrer en ligne de compte une partie de ce coût, mais cela ne se fait que de manière un peu aléatoire. Même en Ontario, ce qui est couvert au titre de ces dépenses varie énormément d'une société de l'aide à l'enfance à l'autre.
La sénatrice Eaton : N'y a-t-il pas une norme pancanadienne?
Mme Eggertson : Non, il n'y en a pas.
La sénatrice Eaton : Aimeriez-vous voir une telle norme?
Mme Eggertson : Nous serions absolument ravis de voir une telle norme partout au Canada.
La sénatrice Callbeck : À combien revient une adoption internationale?
Mme Eggertson : Les adoptions internationales varient beaucoup, d'un pays à l'autre, mais elles peuvent facilement coûter jusqu'à 30 000 ou 40 000 $ pour une famille.
La sénatrice Callbeck : Le montant maximum du crédit d'impôt est de 16 000 $, n'est-ce pas?
Mme Eggertson : Le montant maximum est d'environ à 11 669 $, donc vous ne récupérez que 15 p. 100. Après avoir soumis les chiffres des dépenses que vous avez engagées, le maximum que vous puissiez récupérer s'élève, je crois, à environ 1 700 $.
La sénatrice Callbeck : Vous avez indiqué que nous devions faciliter les choses pour les adoptions. Quelle autre suggestion feriez-vous au gouvernement fédéral, mis à part le fait d'augmenter ce crédit d'impôt?
Mme Eggertson : Que c'est gentil de me poser cette question! En fait, nous avons un certain nombre de suggestions. Nous avons comparu devant le Comité HUMA de la Chambre des Communes, l'an dernier. Nous avons rédigé un rapport — une étude sur l'adoption — et nous y avons formulé un certain nombre de recommandations. À l'heure actuelle, il est plus difficile d'adopter dans une autre province qu'à l'étranger. Il est très difficile de convaincre les provinces d'accepter des parents résidant ailleurs, même s'ils conviennent tout à fait. Il existe un seul service national de répertoire avec photos pour les enfants, au Canada. Il s'agit du service que nous gérons au Conseil d'adoption du Canada. Nous ne recevons aucun soutien financier pour cela, sauf de l'Alberta. Il s'agit d'une énorme ressource qui pourrait aider à jumeler aussi bien des partenaires que des enfants. Toutefois, nous avons besoin d'un meilleur protocole d'entente entre les provinces pour faciliter les activités d'adoptions interprovinciales.
Nous manquons de statistiques. Le chiffre que j'ai cité, à savoir 30 000 jeunes qui sont légalement libres d'être adoptés, date de 2004. Depuis lors, personne au gouvernement fédéral n'a recueilli de statistiques. Nous ne savons pas combien d'enfants sont placés, à travers le Canada. Nous ne savons pas non plus combien atteignent la majorité et sortent du système, chaque année. Nous ne savons combien d'entre eux sont Autochtones. Nous ne savons pas à quel âge ils se font adopter.
Il y a d'énormes lacunes que le gouvernement fédéral devrait combler, selon nous, en nous communiquant ces chiffres, de manière à ce que nous puissions évaluer nos progrès, d'une année à l'autre. Nous ne pouvons rien changer si nous ne savons pas où nous en sommes.
Il y a toutes sortes de choses. S'il y a un domaine dans lequel nous aimerions que le gouvernement fédéral investisse, c'est le soutien post-adoption; et il y a aussi une campagne de sensibilisation publique nationale. La plupart des Canadiens ne savent pas que des enfants attendent d'être adoptés ni comment faire pour se renseigner, ou bien ils sont mal informés. À notre avis, c'est là un autre rôle que le gouvernement fédéral pourrait jouer.
Enfin, il faudrait modifier la loi sur l'assurance-emploi pour que les parents qui adoptent puissent bénéficier du même nombre de semaines de congé que les personnes qui donnent naissance.
La sénatrice Callbeck : En réalité, vous souhaitez que le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership en matière de sensibilisation, qu'il aplanisse les obstacles entre les provinces, qu'il recueille des statistiques et qu'il modifie l'assurance-emploi.
Mme Eggertson : Nous en serions enchantés. C'est la toute première fois que le gouvernement fédéral se trempe ne serait-ce qu'un orteil là-dedans. Il a créé le crédit d'impôt pour frais l'adoption et il essaie maintenant de l'élargir un peu pour aider les gens, sur la scène nationale — et ça, c'est important. Toutefois, nous aimerions beaucoup que ce soit le début d'une série de mesures mises en œuvre par le gouvernement fédéral.
La sénatrice Callbeck : Espérons que ce sera le cas.
Monsieur Pierce, vous avez parlé d'un super crédit et je crois certainement qu'il s'agit d'un excellent progrès. Vous avez déclaré que les études indiquaient que les Canadiens donneraient davantage s'ils bénéficiaient de meilleurs crédits d'impôt. Vous avez parlé de 10 p. 100 de plus. Quelle somme cela représenterait-il au final?
M. Pierce : Je n'ai pas de montant exact. Il s'agit d'une recommandation d'Imagine Canada et je ne sais pas exactement à quoi cela équivaudrait.
La sénatrice Callbeck : Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce crédit d'impôt élargi dont vous avez parlé?
M. Pierce : Au Canada, la majorité des dons sont faits par des Canadiens bien nantis. Nous avons l'occasion, ici, d'encourager un plus grand nombre de familles de travailleurs à donner davantage. Cet élargissement permettrait simplement d'accroître l'avantage fiscal accordé aux familles canadiennes, qu'elles soient riches ou à revenu moyen, pour pouvoir les inciter à donner davantage.
La sénatrice Callbeck : Plus on donne, mieux c'est.
M. Pierce : Effectivement.
La sénatrice Callbeck : Monsieur Cunningham, vous avez montré un paquet aromatisé à la cerise... il s'agit de tabac, n'est-ce pas?
M. Cunningham : Oui, effectivement.
La sénatrice Callbeck : Étant donné les nouvelles augmentations prévues dans le projet de loi C-60, en quoi cela va-t- il en affecter le prix? Combien ça coûte à l'heure actuelle et combien ça coûtera avec les nouvelles taxes?
M. Cunningham : Les prix varient, selon les produits, mais si vous prenez 100 grammes, ce sera environ 5 $ de plus. Ainsi, la part de la taxe fédérale imposée sur 100 grammes passera de 5,78 $ à 10,62 $. À titre d'exemple, il s'agit ici de 105 grammes et donc cela augmenterait d'environ 5 $.
La sénatrice Callbeck : De combien de grammes d'agit-il?
M. Cunningham : Cela n'est pas bien étiqueté. Veuillez m'en excuser, mais je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.
La sénatrice Callbeck : Merci.
Le sénateur Black : Je tiens à vous remercier tous les trois, pour ce que vous faites et surtout M. Pierce et Mme Eggertson. Je vous rends hommage, à vous et à vos organisations, pour votre bénévolat, car nous ne pourrions pas avoir la même qualité de vie s'il n'y avait pas des gens comme vous, prêts à se retrousser les manches et à faire cette contribution. J'aimerais vous remercier, tous les deux, pour le travail que vous faites, car c'est très important. Je voulais que vous le sachiez. Je ne sais pas s'il y a beaucoup de gens qui vous remercient, mais on devrait vous remercier pour ce que vous faites, car c'est très important pour le Canada.
J'ai une question rapide à vous poser, monsieur Pierce. En ce qui concerne ce crédit d'impôt, avez-vous fait un calcul rapide des fonds supplémentaires que vous pensez retirer, grâce à lui?
M. Pierce : Nous n'avons pas vraiment fait de calcul, à strictement parler. Néanmoins, pour les Canadiens qui sont atteints de sclérose en plaques, ce sont leurs familles, leurs voisins et leurs collègues qui nous soutiennent. Si nous avons 200 000 donateurs — et je ne dirais pas qu'il s'agit de jeunes donateurs canadiens — je dirais que nous pourrions nettement accroître nos revenus. J'ose espérer que nous pourrions augmenter les fonds recueillis avec 10 000 à 15 000 donateurs supplémentaires. Cela nécessitera beaucoup de sensibilisation et de promotion. Je crois que c'est un excellent départ.
La sénatrice Hervieux-Payette : Je commencerai avec la sclérose en plaques, car c'est un domaine où je suis très active et que je m'y connais un peu sur la question. Il s'agit également d'un enjeu dont on a beaucoup parlé sur la Colline, qui a fait l'objet d'un projet de loi spécial, ce qui explique peut-être le fait qu'on y soit plus sensibilisé.
Si vous recueillez plus d'argent, c'est pour offrir plus de services aux personnes qui souffrent de SP ou bien c'est pour investir davantage dans la recherche? Quelle est la part de l'argent qui est allouée aux services et celle qui est allouée à la recherche?
M. Pierce : Nous avons une politique de dépenses équilibrée. Elle contient des lignes directrices sur les sommes que nous dépensons pour les services et celles que nous consacrons à la recherche. Nous essayons de dépenser 50 p. 100 de notre produit net sur nos services et les 50 p. 100 restants sur la recherche. Nous espérons augmenter les montants consacrés aux services et à la recherche afin d'assurer l'accès à nos services, peu importe où les personnes se trouvent.
Nous ne recevons pas de financement du gouvernement sous la forme de subvention de base pour nos services. Il nous faut recueillir des fonds et absorber tous les frais généraux, en espérant avoir des recettes suffisantes pour payer les factures, fournir les services et honorer nos engagements en matière de recherche. Ces grands projets de recherche portent sur plusieurs années et ils nécessitent donc des engagements pluriannuels.
La sénatrice Hervieux-Payette : Êtes-vous en train de dire que c'est pour l'ensemble du pays?
M. Pierce : Oui, pour tout le pays.
La sénatrice Hervieux-Payette : Les services et la recherche devraient également être financés par le gouvernement. Les sommes amassées grâce aux dons effectués par des personnes souffrant de cette maladie, sont-elles comparables à celles de votre voisin, en termes de dons par habitant? Nous n'allons pas comparer les montants d'argent, mais avez- vous l'impression que, par habitant, que vous recevez suffisamment d'argent pour offrir vos services et faire vos activités de recherche?
M. Pierce : En ce qui concerne les services, je dirais que nous ne rejoignons pas tous les Canadiens. Nous faisons probablement un bon travail, mais nous pourrions faire beaucoup mieux.
Quant à la recherche, les gouvernements provinciaux y contribuent. Le gouvernement fédéral aussi, mais je crois que nous pourrions tous faire davantage — et j'inclus ici les deux paliers de gouvernement, ainsi que nos partenaires du secteur à but non lucratif, à savoir la Société de la SP. Je crois que nous avons la possibilité de faire beaucoup plus. De nombreux progrès et de belles percées nous attendent et je crois donc que nous devons en faire plus.
La sénatrice Hervieux-Payette : Je ne sais pas si mes collègues le savent, mais il s'agit d'une maladie qui atteint surtout les femmes — deux tiers de femmes et un tiers d'hommes. Bien entendu, les organismes de femmes appuient beaucoup cette cause. Les femmes d'affaires organisent des campagnes de financement tous les ans pour la sclérose en plaques, et plusieurs organismes de femmes recueillent des fonds au Québec.
Est-ce différent, d'une province à l'autre? Vous voulez attirer les jeunes. Je me demande quels sont les mécanismes qui nous permettraient d'attirer les jeunes et de les pousser à donner davantage aux organismes comme le vôtre. Vous devez avoir un moyen par lequel les gens peuvent vous envoyer leurs dons, même s'il s'agit de petites sommes d'argent.
M. Pierce : Il ne fait pas de doute que nous devons diversifier nos sources de revenus et qu'il s'agit vraiment d'une maladie qui affecte surtout les femmes. Nous rejoignons les gens en passant par nos réseaux pour solliciter l'appui des femmes d'affaires de partout au pays. Cette possibilité de rejoindre les jeunes Canadiens, les jeunes femmes et les jeunes hommes, nous permettra d'intensifier nos efforts.
Nous avons des organismes de base qui comptent probablement parmi les plus robustes auxquels j'ai eu la chance d'être associé. Nous comptons des milliers de bénévoles. Le temps de ces bénévoles vaut également de l'argent, car sans tout ce temps, nous ne pourrions pas fournir beaucoup de services. Plus vous avez de bénévoles, plus vous pouvez faire de choses. Ce sont des gens qui pourront contribuer encore plus.
Nous espérons attirer plus de jeunes bénévoles et les sensibiliser à la cause des organismes de bienfaisance. Ceux qui nous appuient et qui appuient probablement d'autres causes sont proches des causes pour lesquelles ils militent. Ce sont ces gens que nous voulons rejoindre.
La sénatrice Hervieux-Payette : Monsieur Cunningham, pensez-vous que l'argent qui sera probablement récolté ici pourrait être consacré à faire plus de sensibilisation auprès des jeunes? Je crois que c'est un domaine où nous n'en avons pas fait suffisamment. Il ne s'agit pas seulement d'une photo sur les paquets de cigarettes; il s'agit aussi, à mon avis, de publicités télévisées. Il faut s'assurer qu'ils soient au courant et il faut, bien évidemment, utiliser les médias qu'ils consultent, comme Facebook et autres. J'ai l'impression que c'est quelque chose qui prend de l'ampleur chez les jeunes et non pas quelque chose qui diminue. J'imagine que je n'ai pas envie que cela aille à la Défense nationale; je veux donner cela aux jeunes pour qu'ils réduisent leur consommation.
M. Cunningham : Nous avons certainement besoin d'une stratégie complète pour réduire le tabagisme. Les taxes en sont un volet, tandis que les mesures législatives et les programmes éducatifs en sont d'autres. Les règlements pour les messages d'avertissement sur les paquets sont excellents, mais, d'après des études et d'après notre expérience, nous savons que des campagnes de communications soutenues font une différence. Il faut les maintenir, bien les financer et bien les concevoir. Elles ont des effets sur les jeunes et sur les jeunes adultes. Il existe de nouveaux médias, aujourd'hui, et cela nous donne donc l'occasion d'en faire plus et nous sommes tout à fait en faveur de cela.
Le sénateur L. Smith : Madame Eggertson, quelles mesures prenez-vous avec le gouvernement pour susciter plus de soutien? À l'heure actuelle, que recevez-vous? Recevez-vous un financement du gouvernement?
Mme Eggertson : Nous ne recevons actuellement rien des gouvernements, sauf de celui de l'Alberta qui nous donne 10 000 $ par an pour que nous affichions certains de ses enfants sur la liste avec photos que nous mettons sur notre site web.
Le sénateur L. Smith : D'où provient le reste du financement?
Mme Eggertson : Le reste de notre financement provient des cotisations de nos membres et d'un très fervent défenseur chez Jockey International, le fabricant de sous-vêtements Jockey, une société américaine qui est très intéressée par l'adoption et qui nous donne de l'argent pour cela. Nous avons également une campagne de financement nationale, intitulée AdoptWalk, et qui a lieu à Ottawa, en septembre, ainsi que quelques autres petites contributions.
Le sénateur L. Smith : À combien s'élève votre budget annuel?
Mme Eggertson : À environ 96 000 $, je crois.
Le sénateur L. Smith : Faire parvenir le message à travers notre grand pays, avec 96 000 $, c'est plutôt difficile, n'est- ce pas?
Mme Eggertson : Oui, effectivement. Nous sommes toujours au bord du précipice, à nous demander si nous allons pouvoir rester ouverts, car nous sommes également la principale source d'information pour les Canadiens qui veulent adopter, pour les parents biologiques et pour tous ceux et celles qui s'intéressent à l'adoption. Nous jouons également le rôle de centre d'échange de renseignements, car nous répondons au téléphone et aiguillons les gens vers les ressources appropriées.
Le sénateur L. Smith : De quel genre de personnel disposez-vous pour vous aider?
Mme Eggertson : Nous avons un directeur exécutif et un conseil.
Le sénateur L. Smith : Avez-vous beaucoup de bénévoles?
Mme Eggertson : Oui.
Le sénateur L. Smith : Vous avez mentionné certaines des choses pour lesquelles vous aimeriez l'appui du gouvernement. Vous avez indiqué qu'il est difficile d'adopter d'une province à une autre. Aimeriez-vous notamment que le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership avec les provinces? Comment devraient-ils s'organiser ensemble?
Mme Eggertson : Nous aimerions qu'ils organisent une rencontre des premiers ministres sur la question de l'aide à l'enfance et, plus spécialement, sur l'adoption. Nous aimerions amener des gens à la table et les faire travailler ensemble sur un protocole d'entente qui faciliterait la tâche à ceux qui veulent adopter dans d'autres provinces. Par exemple, on pourrait dire que si vous n'arrivez pas à placer vos enfants dans votre propre province, dans un certain délai — disons six mois — vous pourriez élargir le cercle et inclure les parents de l'extérieur de cette province. Nous pensons que les choses devraient être plus faciles pour que les enfants ne se retrouvent pas dans une situation incertaine toute leur vie, jusqu'à ce qu'ils vieillissent et sortent du système.
Le sénateur L. Smith : Quelle est votre deuxième demande?
Mme Eggertson : La question de l'assurance-emploi est importante pour nous. Nous pensons que cela aiderait, car les parents qui adoptent font face à d'énormes problèmes d'attachement et de liens affectifs, surtout lorsqu'ils adoptent des enfants plus âgés. Nous aimerions voir 15 semaines de plus pour les parents adoptifs et cela pourrait s'appeler un « congé d'adoption ». Nous ne sommes pas en train d'essayer de retirer quoi que ce soit aux parents biologiques et nous tenons à le souligner, car nous ne cherchons aucunement à dresser certains types de parents contre d'autres. C'est ainsi que certains ont présenté la chose et ce n'est pas ce qui nous intéresse, mais nous aimerions qu'on reconnaisse le fait que nous avons besoin de 15 semaines de plus.
Le président : Avez-vous dit 15 semaines de plus?
Mme Eggertson : Les parents adoptifs obtiennent actuellement 35 semaines de congé parental et non pas les 50 semaines dont disposent les parents biologiques, ce que les tribunaux ont accordé en fonction des coûts physiques réels de l'accouchement.
Troisièmement, nous avons besoin d'une campagne de sensibilisation publique nationale que le gouvernement fédéral aiderait à financer et dans laquelle il travaillerait à nos côtés pour sensibiliser les Canadiens à nos besoins.
Quatrièmement, il y a la question du soutien post-adoption et de la formation pour les travailleurs sociaux de la province pour qu'ils œuvrent avec les familles, de manière à ce que, lorsqu'elles adoptent des enfants qui proviennent notamment de familles d'accueil, qui sont plus âgés ou qui sont en fratrie, elles aient le soutien dont elles ont besoin pour maintenir ces familles.
Le sénateur L. Smith : Vous avez indiqué que vous vouliez plus de données du gouvernement fédéral.
Mme Eggertson : Nous n'avons personne qui recueille des renseignements. Nous essayons actuellement de pousser les provinces à nous communiquer ces renseignements et il est assez difficile pour nous de nous les procurer. Il serait très utile de savoir comment s'en sortent les provinces et comment nous nous en sortons, à l'échelle nationale, pour planifier le placement permanent de nos enfants.
Le sénateur L. Smith : Est-ce que ces cinq recommandations que vous venez de me donner sont classées par ordre de priorité?
Mme Eggertson : La question de la collecte des données est probablement la plus importante, car nous avons besoin de faire le point sur la situation. Il ne s'agit pas d'une liste rigide.
Le sénateur L. Smith : Où en êtes-vous dans les efforts que vous déployez pour positionner votre groupe?
Mme Eggertson : Nous accepterions volontiers l'aide du Sénat.
Le sénateur L. Smith : Êtes-vous au point mort ou bien s'agit-il des idées que vous avez? Vous en parlez, mais vous avez du mal à vous faire un auditoire.
Mme Eggertson : Nous avons du mal à percer, mais les choses progressent dans la bonne direction. Nous avons récemment rencontré des défenseurs des enfants et des jeunes de partout dans la province qui s'intéressent beaucoup à cela, car ils sont responsables des enfants placés.
Personnellement, je trouve qu'il est facile de se sentir découragé lorsqu'aucune de nos personnalités publiques ne parle de ces enjeux. Vous auriez du mal à trouver des premiers ministres provinciaux ou des dirigeants politiques qui en parlent en public. Certains le font, et nous avons certains champions, je crois. Jeff Watson est un député qui en a parlé beaucoup, mais c'est rare.
Le sénateur L. Smith : Conviendrait-il de vous tourner vers l'Alberta qui vous verse des fonds, contrairement aux autres provinces?
Mme Eggertson : L'Alberta et le Nouveau-Brunswick sont des chefs de file et l'Ontario est en train de s'améliorer. Ce sont les trois provinces qui, selon moi, ont fait d'excellents progrès. Cela ne revient pas à dire que les autres ne font rien, mais il faudrait que ce dossier soit davantage prioritaire. Il va falloir en parler davantage, nous allons devoir ouvrir la discussion.
Le cas des enfants autochtones soulève une question très délicate sur le plan politique. Mes deux filles sont autochtones. J'estime que nous devons lancer ce genre de conversation, parce qu'il n'est plus acceptable de laisser des enfants en foyer d'accueil jusqu'à l'âge adulte au prétexte qu'on ne veut pas régler la délicate question de leur placement et qu'il n'y a pas assez de parents adoptifs.
Le sénateur L. Smith : Trente-trois mille enfants pourraient être adoptés. Deux mille sont adoptés au Canada chaque année et deux mille autres sont adoptés par des Canadiens hors du pays. Sur ces 33 000, quel est le pourcentage d'enfants autochtones?
Mme Eggertson : Il est très faible.
Le sénateur L. Smith : Comme vous l'avez dit, vous comptez 33 000 enfants.
Mme Eggertson : Nous en avons environ 33 000 dont l'adoption ne ferait l'objet d'aucune entrave légale.
Le sénateur L. Smith : Et quelle proportion serait des Autochtones?
Mme Eggertson : Nous ne le savons pas. C'est une donnée que nous aimerions avoir, mais je n'ai pas ce renseignement. Nous pensons que beaucoup pourraient être légalement adoptés, mais ils ne sont pas placés.
Le sénateur L. Smith : Combien d'aspects ciblez-vous dans vos publicités? Le tabac est-il le principal centre d'intérêt de la Société canadienne du cancer?
M. Cunningham : Nous intervenons sur toute la gamme des problèmes, de la prévention aux soins palliatifs. S'agissant d'éducation, nous sensibilisons les populations, nous faisons du dépistage, du tannage en intérieur, nous insistons sur les modes de vie sains ainsi que sur les bonnes habitudes alimentaires et l'exercice. Ce projet de loi renferme certaines dispositions relatives aux taxes sur le tabac et c'est pour cela que nous avons fait porter notre témoignage d'aujourd'hui sur ce volet. Trente-trois pour cent des décès attribuables au cancer sont en fait attribuables au tabac. C'est la première cause de décès évitable liée au cancer. Voilà pourquoi c'est important pour nous.
Le sénateur L. Smith : Y a-t-il d'autres facteurs, outre le tabac, sur lesquels il conviendrait que vous vous concentriez? J'essaie de situer la place qu'occupe la lutte contre le tabac dans votre programme d'action global que vous cherchez à promouvoir et pour lequel vous voulez avoir davantage d'appui. Le tabac est-il le tueur numéro un?
M. Cunningham : C'est la première cause de décès attribuables au cancer, mais nous intervenons sur toute une gamme de problèmes. Dans le cas des cancéreux, nous cherchons à augmenter les taux de survie. La recherche est très importante à cet égard, tout comme l'accès aux traitements. Nos différents programmes concernent surtout les cancéreux.
Le sénateur L. Smith : De quel budget disposez-vous?
M. Cunningham : Nous sommes le plus important organisme de bienfaisance bénévole au Canada. Notre budget annuel dépasse les 200 millions de dollars à l'échelle du pays.
Le sénateur L. Smith : Vous êtes donc une grande organisation.
M. Cunningham : Oui.
Le sénateur L. Smith : Monsieur Pierce, pouvez-vous nous donner une idée de votre budget annuel?
M. Pierce : Notre budget national annuel varie d'une année à l'autre, mais nous faisons rentrer entre 55 et 60 millions de dollars par an. La plus grande partie, c'est-à-dire peut-être 95 p. 100, à coups de dons de 20 à 100 $.
Le sénateur L. Smith : Si je vous comprends bien, vous dites que le nombre absolu de donateurs a diminué, mais que le pourcentage a augmenté d'environ 3 p. 100. C'est exact?
M. Pierce : Oui.
Le sénateur L. Smith : L'endettement des particuliers et des ménages au Canada entrave-t-il la collecte de fonds?
M. Pierce : Bien sûr. On voit la répercussion du déclin de l'économie sur les dons. Comme l'économie reprend du mieux, nous sommes plus optimistes.
Le sénateur L. Smith : Est-ce le principal problème auquel vous êtes confrontés ou assiste-t-on à des changements sur le plan démographique à cause du vieillissement de la population?
M. Pierce : Je dirai que nous avons affaire à des facteurs multiples. Il y a l'économie et il y a aussi le vieillissement de la population.
Le sénateur L. Smith : Et les différences culturelles? Nous avons appris qu'il se produit un nouveau phénomène au Québec où les francophones et les anglophones donnent depuis très longtemps, mais où, au sein de certaines communautés culturelles, on constate que les choses ont changé, que les habitudes sont différentes. La dimension culturelle des néo-immigrants intervient-elle aussi dans l'équation?
M. Pierce : Si la maladie touche le membre d'une famille d'immigrants, nous pouvons compter encore plus sur leur appui. C'est plutôt chez les jeunes Canadiens qu'il faut instiller le sens de la philanthropie. À cet égard, on peut parler de dimension culturelle.
Le sénateur L. Smith : Quand on entend parler de la difficulté qu'ont les jeunes Canadiens à trouver un emploi de nos jours et à rembourser des dettes importantes, à cause des cartes de crédit et des marges de crédit, je me demande si le fond du problème ne vient pas de là, si ce n'est pas ça la grande difficulté. Comment contourner ce problème?
M. Pierce : C'est vrai que c'est un problème. Beaucoup de jeunes font du bénévolat. Ce sont leurs premiers pas dans le monde de la philanthropie et si on aide davantage de jeunes à faire du bénévolat, à inscrire ce genre d'expérience dans leur curriculum vitae, nous les aiderons à décrocher un emploi plus tôt.
Le sénateur L. Smith : Comment faites-vous concurrence à ceux qui comptent sur des dons pour lutter contre le cancer? Je ne veux pas être mesquin, mais vous êtes sur un marché concurrentiel.
M. Pierce : En fait, nous ne nous livrons pas concurrence. Chacune de nos causes est suffisamment importante pour nous permettre de compter sur un bassin d'appuis. Songez au nombre de Canadiennes et de Canadiens qui sont atteints de sclérose en plaques; avant, on parlait de 55 000 à 75 000 et, à en croire de nouvelles études, mais rien n'est encore confirmé, ils seraient beaucoup plus nombreux.
Le sénateur L. Smith : Avez-vous une idée du nombre de donatrices, si cette maladie est surtout présente chez la femme?
M. Pierce : La majorité des dons que nous percevons sont faits par des familles, donc par des couples.
La sénatrice Hervieux-Payette : Certaines facultés accordent maintenant des crédits à l'admission à ceux qui acceptent de faire du travail bénévole, surtout en médecine. Ça marche très bien. Ainsi, les étudiants sont admis pas uniquement en fonction de leurs notes.
M. Pierce : C'est comme ça que j'ai eu mon premier emploi. Naturellement, mes deux filles ont vu leur père faire du bénévolat pour le secteur sans but lucratif, quand elles étaient jeunes, et elles en font elles-mêmes depuis la sixième année. Ça leur a permis d'obtenir des bourses universitaires. Ça permet aux jeunes de décrocher un emploi.
Le sénateur Wells : Monsieur Cunningham, je sais, d'expérience, que les entreprises parviennent sans mal à modifier leurs pratiques pour s'adapter à de nouvelles règles et vous en avez un exemple parfait dans ce cas-ci. Nous appliquons une mesure fiscale qu'elles retournent à leur avantage, en tant qu'outil promotionnel, pour augmenter leur chiffre d'affaires et stimuler la consommation de leurs produits. Pensez-vous que, dans l'avenir, les cigarettiers adopteront certaines mesures en fonction des propositions législatives dont nous sommes saisis?
M. Cunningham : Vos craintes sont justifiées, surtout dans le cas de l'industrie du tabac qui est connue pour exploiter toutes les échappatoires et les transformer à son avantage sur le plan des pratiques de commercialisation, de codes volontaires ou pour cibler les enfants. Les enjeux financiers sont énormes. Cela nous rappelle que les Canadiens et les législateurs que nous sommes doivent veiller à réagir rapidement. Si les géants du tabac devaient exploiter davantage cet écart, avec des pratiques manufacturières différentes, il faudrait absolument que le gouvernement puisse réagir rapidement en modifiant de nouveau le régime fiscal.
Le sénateur Wells : Madame Eggertson, pouvez-vous nous parler des 30 000 enfants offerts ou admissibles à l'adoption — je ne sais pas ce qu'il convient de dire. Quel est le lien entre l'âge des enfants et les taux d'adoption? Je ne veux pas employer cette expression, mais c'est la seule à laquelle je pense : y a-t-il un âge où le taux d'adoption baisse et où les chances d'être adopté sont moindres?
Mme Eggertson : À six ans, on considère que vous êtes déjà pas mal âgé pour être adopté. C'est la réalité. La plupart des enfants en foyer ont six ans et plus. C'est assez facile de faire adopter un nourrisson, même s'il a des problèmes de santé. Quand on y pense un peu, six ans ce n'est pourtant pas si vieux que ça. J'étais plutôt hors norme quand j'ai adopté une enfant de huit ans et l'autre de neuf ans. Une poignée d'enfants seulement de plus de 10 ans ont été adoptés en Ontario. Je vous parle des enfants de 10 ans, parce que l'Ontario a récemment adopté la toute première subvention provinciale pour l'adoption d'enfants de plus de 10 ans, et très peu d'entre eux ont été adoptés.
Le sénateur Wells : J'allais justement vous poser cette question. Étant donné cet âge où les chances d'adoption sont moindres, et comme nous parlons de budget, devrait-on suggérer des stimulants fiscaux? Je déteste ramener ça à une question de gros sous, mais l'argent parle.
Mme Eggertson : Nous avons réfléchi à deux ou trois choses en nous inspirant de ce qui se fait aux États-Unis où il existe un crédit d'impôt au titre des besoins spéciaux liés à l'adoption, les « besoins spéciaux » étant définis de façon plutôt large. La définition peut englober les enfants plus vieux issus du réseau des foyers d'accueil. Comme c'est un crédit d'impôt remboursable, il n'est pas nécessaire de soumettre toutes ses dépenses et l'on obtient tout de suite le maximum. Ce serait un excellent incitatif pour les familles.
J'insiste, encore une fois, sur le fait que les gens n'adoptent pas ces enfants pour faire de l'argent. Tous les parents savent qu'adopter est un formidable engagement sur toute une vie. La majorité des familles d'adoption ne sont pas fortunées et elles appartiennent à la classe moyenne. Les gens ne feront pas ça pour l'argent, mais le crédit d'impôt permettrait de compenser les frais de counseling et les autres dépenses. Les frais de préceptorat représentent beaucoup pour les parents, car les enfants adoptés ont besoin d'une aide soutenue afin de rattraper leur retard scolaire. Sans compter qu'ils peuvent avoir des difficultés d'apprentissage.
Un crédit d'impôt remboursable, un crédit d'impôt au titre des besoins spéciaux liés à l'adoption s'avérerait très utile, tout comme le crédit d'impôt après l'adoption. Certains États américains offrent aux familles un crédit d'impôt reconductible d'année en année, si elles ont adopté un enfant en foyer d'accueil. Cela peut représenter simplement 1 000 ou 2 000 $ par an, mais ça finit par s'accumuler et compenser quelque peu les dépenses.
Le sénateur Wells : Je précise, pour la transcription, que je suis choqué de voir à quel point votre budget est limité et de constater le travail énorme que vous devez accomplir. Il y a lieu de vous féliciter.
Mme Eggertson : Merci.
Le sénateur McInnis : Vous avez répondu à beaucoup de mes questions.
Monsieur Cunningham, au sujet des prix du tabac, je me rappelle que le prix maximum possible a été testé. Les gouvernements veulent toujours remplir leurs coffres et ils n'hésitent pas à taxer les produits, surtout celui-ci. Cependant, un problème s'est posé parce que ce produit a été écoulé sur le marché noir et ici, ça a pris des proportions énormes il y a quelques années. Je ne sais pas combien on paie pour un paquet de cigarettes de nos jours, peut-être 20 $.
M. Cunningham : Ça varie d'une province à l'autre et aussi en fonction du nombre de cigarettes.
Le sénateur McInnis : Ce que je veux dire, c'est que 37 000 Canadiens meurent du cancer à cause du tabac et que les gouvernements voudraient éliminer ce fléau parce qu'il revient cher au système de santé. Le gros problème — et je ne sais pas quel prix maximum a été établi —, c'est qu'il y a un énorme marché noir. La criminalité s'en est mêlée, avec des semi-remorques pleines de cigarettes de contrebande qui franchissent la frontière. Pouvez-vous nous parler de ce phénomène? Nous nous trouvons dans un horrible dilemme.
M. Cunningham : Vous avez raison. Il est essentiel d'appliquer des mesures efficaces de lutte contre la contrebande. La bonne nouvelle, c'est que même l'industrie du tabac reconnaît que la contrebande a chuté de moitié entre 2008 et 2010, grâce à certaines dispositions comme l'emplacement des postes frontières à proximité de Cornwall et le resserrement de la législation provinciale. Des mesures fédérales ont aussi contribué. Et puis, le projet de loi S-16, qui est en cours d'étude au Comité sénatorial permanent de la justice et des affaires constitutionnelles, renferme d'autres mesures qui ne pourront qu'aider.
Permettez-moi de souligner une chose. J'ai fourni ce document à la greffière, mais je ne sais pas s'il a été distribué.
Le président : Pas encore, mais il le sera. Il faut d'abord le faire traduire. Poursuivez.
M. Cunningham : Ce graphique montre les taxes comparables que les provinces et les territoires imposent sur les produits du tabac. C'est en Ontario et au Québec que le problème de la contrebande est le plus grave, mais ce sont aussi les deux provinces où les taxes sur le tabac sont les plus faibles, ce qui est intéressant. Dans l'Ouest du Canada, où il y a peu de contrebande — ce que reconnaît l'industrie du tabac — les taxes sur le tabac sont élevées. Si la contrebande est pire en Ontario et au Québec, ce n'est pas à cause des prix et des taxes élevés, ni parce que les taxes y sont nettement inférieures à celles appliquées dans l'Ouest du Canada et dans certaines provinces de l'Atlantique, mais c'est bien à cause de la proximité de manufactures illégales et des sources d'approvisionnement. Ce n'est pas le cas dans l'Ouest du Canada. Là-bas, les taxes plus élevées n'ont pas donné lieu, à une augmentation de la contrebande. Les mesures adoptées par les provinces de l'Ouest le démontrent, mais ce que vous dites est important. Nous devons veiller à adopter des moyens efficaces de lutte contre la contrebande. Nous avons fait des recommandations à ce propos et les gouvernements pourraient faire davantage.
Le sénateur McInnis : Comme quoi?
M. Cunningham : Par exemple, ils pourraient s'attaquer au problème des manufactures illégales. Ce qu'il faut faire, surtout, c'est de bloquer l'entrée des matières premières, c'est-à-dire les feuilles de tabac et le papier à cigarette. Sans ces matières premières, les manufactures ne peuvent plus fabriquer des cigarettes. C'est le genre de mesures que les autorités américaines ont appliquées avec un certain succès dans le cas de quelques manufactures illégales du côté américain d'Akwesasne, tout à côté de la frontière canadienne. L'approvisionnement des manufactures illégales en matières premières a été bloqué pour entraver leur viabilité et les contraindre à obtenir des licences de production. C'est un exemple éclatant.
Par ailleurs, le gouvernement du Canada devrait collaborer plus étroitement avec le gouvernement américain afin de faire fermer les manufactures illégales du côté américain d'Akwesasne, non loin de la frontière canadienne. Il est essentiel de cibler les sources — nous savons ce qu'elles sont et où elles sont — si l'on veut faire des progrès.
Le président : Monsieur Cunningham, M. Pierce nous a dit être d'accord avec le principe d'une super déduction pour les primo-donateurs. Vous obtenez beaucoup d'argent sous forme de dons. Estimez-vous que les dons vous sont ou vous seront utiles?
M. Cunningham : Nous comptons sur les dons des Canadiens. Nous sommes d'accord avec tout ce qui peut faciliter et encourager l'afflux de dons additionnels. Je ne pourrai pas autant entrer dans le détail que M. Pierce au sujet de cet aspect particulier du projet de loi, mais nous accueillerons toute l'aide qui nous sera apportée sur ce plan.
Le président : Vous ne savez pas du tout si ça pourrait avoir un effet marqué sur vos opérations?
M. Cunningham : Nous n'avons fait aucune prévision quant à d'éventuels dons additionnels qui pourraient nous être faits.
Le président : Merci de ce que vous avez dit au sujet des sénateurs Kenny et Nolin. Vous serez heureux d'apprendre qu'ils continuent de siéger au Sénat du Canada et qu'ils font du bon travail pour les Canadiens. J'entends souvent des remarques positives au sujet de leur travail à propos de la loi contre le tabagisme, il y a 15 ans.
Madame Eggertson, pourriez-vous m'aider à formuler l'amendement? À la façon dont je le lis, les gens disposeraient d'une certaine période pour additionner leurs dépenses relatives à l'adoption qu'ils déduiraient ensuite, à hauteur de 15 p. 100 du total. D'après ce que j'ai cru comprendre, cette période est donc prolongée.
Mme Eggertson : C'est exact.
Le président : Mais rien dans la loi ne changera en arrière-plan.
Mme Eggertson : C'est exact.
Le président : Nous avons déjà parlé, ici, du fait que les dispositions envisagées partent du moment où une demande d'inscription est faite. Cela veut-il dire que si mon épouse et moi voulons adopter un enfant, nous devons nous inscrire si nous n'avons trouvé personne?
Mme Eggertson : Cela concerne principalement ceux qui passent par le système public d'adoption au Canada. Si c'est ce que vous voulez faire, vous devez vous adresser au ministère responsable, comme le ministère de l'Enfance et de la Jeunesse dans certaines provinces, qui est responsable de l'adoption. Vous vous présentez, vous vous inscrivez et le processus est amorcé.
En Ontario, vous devriez vous adresser à la Société d'aide à l'enfance. Vous vous inscririez en disant que vous voulez adopter un enfant. On examinerait alors votre demande. Le processus se déclencherait à ce moment-là, à moins que vous ne passiez par un avocat pour lancer le processus d'adoption devant les tribunaux, s'il s'agit d'une adoption privée. C'est à ce moment-là que commence la période durant laquelle vous aurez droit à réclamer des dépenses.
Le président : Et à l'international?
Mme Eggertson : Les choses ne changeront probablement pas beaucoup à l'international. Les frais sont nettement plus élevés et les gens peuvent totaliser leurs dépenses pour profiter du crédit fiscal. Je le rappelle, le maximum est de 15 p. 100 du total, jusqu'à hauteur de 11 669 $ cette année. Si vous avez dépensé 30 000 $ pour l'adoption, il y a déjà une grande partie de cette somme que vous pourrez récupérer l'année où vous conclurez les procédures d'adoption. Il n'était pas possible de profiter de cette disposition avant, parce que les sommes engagées pour une adoption au Canada étaient nettement moindres.
Le président : Voilà qui m'aide un peu à comprendre la situation. Donc, tout commence à la date où l'on s'inscrit, après quoi il faut franchir toutes les étapes imposées aux foyers.
Mme Eggertson : C'est ça, il y a une étude de la famille.
Le président : Tout ça intervient après?
Mme Eggertson : Oui. Vous êtes invité à une formation et il peut falloir attendre deux ou trois ans avant d'accueillir l'enfant.
Le président : Madame Eggertson, monsieur Pierce et monsieur Cunningham, merci beaucoup de vous être déplacés. Vos témoignages ont été très utiles et nous apprécions beaucoup le travail que vous faites pour les Canadiens.
(La séance se poursuit à huis clos.)