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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule 16 - Témoignages du 28 mai 2013


OTTAWA, le mardi 28 mai 2013

Le Comité sénatorial permanent des pêches et océans se réunit aujourd'hui, à 18 h 30, pour étudier la réglementation de l'aquaculture au Canada et les perspectives d'avenir de l'industrie.

Le sénateur Fabian Manning (président) préside la réunion.

[Traduction]

Le président : Je crois que nous devrons attendre certains sénateurs qui seront un peu un retard. Comme nous le savons bien, nous traînons de la patte au Sénat.

J'ai le plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et océans. Mon nom est Fabian Manning. Je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et je préside ce comité.

Avant toute chose, je désire présenter de nouveau des excuses aux représentants du ministère. Nous vous avons fait venir le 7 mai, ce qui ne semble pas si loin, et nous avons terminé tard en soirée pour des raisons hors de notre contrôle. Merci encore de votre patience. J'ouvre maintenant la réunion et nous tenterons de la terminer avant 19 h 30. Je demanderai aux sénateurs de se limiter à une seule question et une seule question complémentaire. Si nous avons le temps de poser une deuxième série de questions, nous le ferons. Nous pouvons aussi faire revenir les témoins à un autre moment si c'est nécessaire.

Notre comité a entendu des représentants du ministère des Pêches et Océans le 7 mai dans le cadre de son étude sur la réglementation de l'aquaculture au Canada et les perspectives d'avenir de l'industrie. Encore une fois, nous n'avons pas eu le temps de poser des questions ce soir-là et nous sommes donc très heureux d'accueillir de nouveau les représentants ce soir.

Je vous demanderai de vous présenter, question de procédure. Si vous désirez formuler des commentaires, faites-le je vous en prie. Sinon, nous passerons directement aux questions. Il n'en tient qu'à vous.

Guy Beaupré, directeur général, Direction générale de la gestion de l'aquaculture, Politiques relatives aux programmes, Pêches et Océans Canada : Je suis directeur général de la Direction générale de la gestion de l'aquaculture de Pêches et Océans Canada.

Eric Gilbert, directeur exécutif, Opérations aquacoles, Écosystèmes et gestion de l'aquaculture, Pêches et des Océans Canada : Je suis directeur exécutif de la Direction de la gestion des opérations de l'aquaculture.

Jay Parsons, directeur, Stratégies et régulation des sciences, Secteur des sciences des écosystèmes et des océans, Pêches et Océans Canada : Je suis directeur de la Division des sciences de l'aquaculture du secteur des écosystèmes et sciences des océans de Pêches et Océans Canada.

Le président : Si vous n'avez pas d'objection, nous passerons directement aux questions. Nous avons reçu votre exposé et tous les sénateurs ont eu l'occasion d'en prendre connaissance. Je répète que chacun posera une question et aura droit à une question complémentaire, puis attendra un second tour de table si nécessaire.

Le sénateur McInnis : J'ai une foule de questions et je ne pourrai manifestement pas les poser toutes ce soir. Je conviens que nous avons peu de temps et je ne poserai qu'une question, mais il est important pour moi d'avoir les réponses du MPO à mes autres questions. Je me demande si je ne devrais pas vous les poser par écrit, puis faire parvenir copie à tous les membres. J'aimerais faire la lumière sur un certain nombre de questions avant que nous nous lancions dans cette étude.

Permettez-moi de poser une question très brève.

Le président : Pouvons-nous avoir une réponse de M. Beaupré?

M. Beaupré : Oui, nous serons heureux de répondre à ces questions.

Le sénateur McInnis : J'ai lu votre document au complet la semaine dernière et c'est dans une large mesure un document de marketing en faveur de l'aquaculture. Bien sûr, Pêches et Océans Canada semble promouvoir l'aquaculture. D'un autre côté, vous l'habilitez, sous certains angles, dans notre pays. Vous trouvez-vous d'une certaine façon en conflit d'intérêts?

M. Beaupré : Merci de votre question. Comme vous le savez, nous sommes l'organisme de réglementation, principalement en Colombie-Britannique et à l'Île-du-Prince-Édouard, pas nécessairement dans les autres provinces. Nous nous voyons comme organisme de réglementation au même titre que nous réglementons les pêches.

Notre exposé présentait essentiellement des faits visant à donner une bonne idée de ce qu'est l'aquaculture dans les diverses provinces du Canada, quels sont ses principaux produits et marchés et quels sont les enjeux clés auxquels nous sommes couramment confrontés. Il ne s'agit pas tant d'une opération de marketing que de présenter des faits et de vous fournir des renseignements utiles sur les enjeux de l'aquaculture.

Le sénateur McInnis : Y voyez-vous un conflit d'intérêts?

M. Beaupré : Non.

Le sénateur McInnis : Qui a le dernier mot pour accorder un permis? Les gouvernements provinciaux, du moins la plupart d'entre eux, viennent voir votre ministère parce que vous êtes concerné, tout comme Transports Canada. La province peut cependant dire : « Non, nous ne délivrons pas le permis. » Selon la constitution, la décision lui revient car il s'agit d'un genre d'élevage apparenté à l'agriculture. Elle a le dernier mot, n'est-ce pas?

M. Beaupré : Oui, et nous collaborons avec les provinces et les autres ministères sur les divers enjeux. Par exemple, s'il s'agit d'un nouveau site d'aquaculture, nous procédons à des évaluations sous plusieurs angles pour établir si le site convient, dans l'optique de protéger les habitats et les espèces de poissons voisins du site. Nous collaborons avec d'autres ministères du gouvernement fédéral et nous fournissons des conseils au gouvernement provincial pour l'aider à prendre sa décision. Tout dépend de la question, mais nous collaborons en permanence avec des gouvernements provinciaux.

Le sénateur McInnis : Ils vous font des reproches. Le saviez-vous?

M. Beaupré : C'est très possible.

Le sénateur Wells : Le mandat du ministère concerne-t-il la réglementation en ce qui a trait à l'aquaculture? Avez- vous d'autres responsabilités relativement à l'aquaculture, telle que la promotion générale de l'industrie ou autre chose, ou votre mandat concerne-t-il seulement la réglementation?

M. Beaupré : Je dirais que le mandat concerne la réglementation, mais il met en jeu la science et un certain nombre d'autres activités telles que l'application de la loi en Colombie-Britannique, par exemple. Il est très axé sur la réglementation de l'industrie.

Le sénateur Wells : Comme question complémentaire, le règlement est-il prescriptif ou orienté vers des objectifs? Prescrivez-vous dans le règlement ce qui doit se faire ou vise-t-il des objectifs? Dites-vous aux éventuels exploitants aquacoles ce qu'est l'objectif et vous assurent-ils qu'ils le poursuivent, ou êtes-vous prescriptifs?

M. Beaupré : Nous imposons des conditions pour l'obtention des permis en Colombie-Britannique. Les conditions associées aux permis font en sorte que les activités aquacoles se déroulent de manière à minimiser ou à atténuer l'incidence sur les habitats. Différentes facettes de la production sont aussi régies par les conditions de permis, de manière à atténuer l'activité elle-même et ses effets éventuels.

Le sénateur Wells : Vous faites une distinction entre la Colombie-Britannique et la côte de l'Atlantique. Pouvez-vous me dire pourquoi?

M. Beaupré : C'est principalement parce que nous sommes l'organisme de réglementation en Colombie-Britannique, alors qu'ailleurs ce sont les provinces qui sont le principal organisme de réglementation et nous collaborons donc avec elles.

La sénatrice Poirier : J'ai une question et je pourrai demander un complément d'information selon la réponse qu'on me donnera. En ce qui a trait à l'emplacement des parcs en filet, existe-t-il une loi réglementant l'endroit où on peut les installer, de manière à ne pas modifier le paysage?

M. Beaupré : Je ne crois pas qu'il y ait de loi allant précisément dans ce sens, mais pour ouvrir un nouveau site en Colombie-Britannique ou dans d'autres provinces, il faut mener à bien beaucoup d'activités liées aux caractéristiques de l'environnement choisi. Par exemple, l'endroit choisi pourrait-il nuire à la navigation si le courant est fort, ou est-il trop près de rivières à saumons, ce qui est un autre critère. Il y a plusieurs facteurs dont la province ou le gouvernement fédéral tient compte dans sa décision relativement à un site en particulier. Bien sûr, on mène aussi des consultations auprès des Premières Nations et des groupes autochtones, selon l'endroit choisi pour le site.

La sénatrice Poirier : Comme complément d'information, tient-on compte du tourisme riverain lorsqu'on donne l'aval à une demande d'installation aquacole, qu'il s'agisse d'ostréiculture ou d'autre chose? Savons-nous quelle est l'incidence de certaines activités d'aquaculture dans une zone de tourisme riverain? Connaissons-nous l'effet que cela produit ou avons-nous des données sur ce que seraient les conséquences sur l'industrie touristique?

M. Beaupré : Dans le cas de l'industrie touristique, j'imagine qu'il s'agit d'un critère que nous étudierions. Nous n'avons pas ciblé le tourisme en particulier, mais pour ce qui est des conséquences nous disposons de modèles des effets éventuels sur différents aspects de l'environnement. En ce qui concerne le tourisme, c'est un des facteurs qui seraient soulevés pendant les consultations auxquelles nous procéderions. S'il y a des inquiétudes au sein des collectivités, elles seraient exprimées dans le cadre des consultations préalables à l'ouverture du site.

La sénatrice Poirier : Au Canada atlantique, ce serait la réglementation provinciale ou la réglementation fédérale qui s'appliquerait?

M. Beaupré : Cela serait la réglementation provinciale.

[Français]

Le sénateur Maltais : Bienvenue, messieurs. Je veux vous féliciter pour votre travail. Dans le rapport du ministre de Pêches et Océans, il y a des normes très strictes sur la salubrité et sur la traçabilité qui sont très importantes pour les Canadiens qui consomment le poisson.

Là où je m'interroge, et vous devez sûrement en entendre parler, c'est l'importation à rabais de produits, qui viennent de l'Asie, par exemple, sur lesquels on n'a pas de contrôle. Le prix de ces produits entrent en concurrence avec les vôtres, parce qu'il est normal qu'avec toutes les mesures que vous devez prendre, que vos prix soient un peu plus élevés. En fait, on peut presque dire que les étrangers font du dumping au Canada, présentement.

Comment voyez-vous cela du point de vue de la concurrence?

M. Beaupré : Je n'ai pas vraiment de réponse là-dessus. C'est une question de dumping, ce n'est pas une question que le ministère des Pêches et des Océans va considérer. D'autres ministères vont s'occuper de cette question en particulier.

En ce qui concerne les espèces importées, elles doivent être inspectées au niveau de la salubrité. Pas tellement au niveau compétitif, mais au niveau des impacts possibles sur les autres espèces au Canada ou sur des questions de santé pour les consommateurs.

Le sénateur Maltais : Au niveau de la traçabilité par exemple, en ce qui concerne les produits importés, est-ce qu'on peut remonter jusqu'à leur nourriture comme on peut le faire ici au Canada?

M. Beaupré : Je pense qu'on peut le faire pour la plupart des produits. Je ne sais pas si M. Gilbert a des commentaires à ajouter à ce sujet.

M. Gilbert : C'est une très bonne question, mais c'est une question très complexe. Vous aviez raison dans votre introduction de dire qu'en tant que ministère, on n'a pas un gros rôle à jouer à ce niveau. Vous avez également raison lorsque vous dites qu'on en entend parler. C'est une question d'être équitable pour notre industrie canadienne versus les importations.

Il y a deux choses que je voudrais rajouter à ce que M. Beaupré a dit. La première c'est qu'on a un programme de salubrité pour les produits marins, qui est appliqué avec force et nous ouvre des marchés à l'extérieur, parce qu'on a des ententes de réciprocité avec la communauté européenne, les Américains et avec d'autres. Ces ententes font en sorte que ce qu'on envoie sur leur marché correspond à leur demande et ce qu'ils nous envoient correspond à nos demandes. Ce n'est pas le cas avec l'ensemble des pays.

Le deuxième point que je veux faire c'est que là où il y a des ententes de commerce qui entrent en ligne de compte, d'une certaine manière, jusqu'à preuve du contraire, tant que les produits n'ont pas créé de problèmes, ils sont d'une certaine manière tolérés à cause de l'aspect commercial de la chose et non pas de la santé publique.

Le sénateur Robichaud : J'aimerais enchaîner sur la question du sénateur Maltais. Qui réglemente la nourriture utilisée dans l'aquaculture? Et si on la réglemente, est-ce qu'on la compare avec ce qui est donné ailleurs?

M. Gilbert : Pour ce qui est des mollusques, il n'y a pas de nourriture, ce sont des animaux filtrant. Donc dans le cas des élevages de poissons, tant terrestres que marins, on fournit de la moulée aux poissons. L'Agence canadienne d'inspection des aliments est l'agence responsable. Ils ont des réglementations, ils ont une loi sur les moulées, sur la nourriture pour les animaux, autant terrestres que marins. C'est très réglementé, très strict.

Au centre de l'aspect réglementaire, il y a des préoccupations qui sont reliées à la santé humaine, mais il y a même des préoccupations qui sont intégrées à la réglementation qui touchent la santé des animaux comme tels. On ne peut donc pas nourrir de n'importe quelle façon les poissons au Canada.

Est-ce que cela répond à votre question?

Le sénateur Robichaud : Oui, merci. Il faudrait donc questionner cette agence à savoir si on compare ce qui est fait ici avec ce qui est fait ailleurs.

M. Gilbert : Je vous inviterais à leur poser la question. Je peux avoir une opinion personnelle là-dessus, mais j'aime autant la garder pour moi-même.

[Traduction]

La sénatrice Raine : Je crois avoir mentionné la semaine dernière que j'aimerais que l'information qu'on nous a communiquée soit ventilée par espèce car les totaux ne sont pas très utiles.

Je regarde aussi le tableau 5 de notre document, où vous répartissez les diverses espèces par province. Je serais intéressée à savoir quelles espèces sont des espèces propres à nos habitats et quelles sont celles qui ont été introduites. Je présume par exemple que la moule de Méditerranée, le pétoncle japonais et la palourde japonaise ne sont pas des espèces indigènes de la Colombie-Britannique et qu'elles ont donc été importées. L'élevage se fait-il dans une zone confinée ou les palourdes peuvent-elles essaimer et s'acclimater aux eaux de la Colombie-Britannique? Il serait intéressant de le savoir. Le tilapia, je crois, est un poisson asiatique. Nous l'élevons maintenant dans nos eaux. Quelles conséquences aura l'introduction de ces espèces dans nos eaux?

M. Parsons : Cela dépend de l'espèce dont on parle. La plupart des espèces que vous avez mentionnées sont des mollusques dont la culture se fait sur la côte Ouest. Bien que certains d'entre eux puissent avoir été introduits voilà assez longtemps, la plupart ont déjà des colonies sauvages naturalisées sur la côte. L'élevage de certaines autres espèces, le saumon atlantique par exemple, se fait sur la côte Ouest mais il n'existe pas de population naturalisée de saumons atlantiques sur la côte Ouest. Le tilapia est un autre exemple d'espèce élevée au Canada. Il s'agit d'un poisson d'eau douce et les quelques exploitations qui en font l'élevage ont toutes des installations terrestres. Il y donc confinement et ils sont élevé dans des cuves.

La sénatrice Raine : Certaines espèces de poissons sont-elles mieux adaptées à la pisciculture que d'autres? D'après ce que j'ai compris, beaucoup d'espèces de saumons réagissent mal aux parcs. Ils s'agressent mutuellement, par exemple. Les saumons atlantiques sont plus dociles.

Comment les sélectionne-t-on? Comment cela fonctionne-t-il? De quelle manière les intègre-t-on à notre industrie aquacole?

M. Gilbert : C'est un très long processus. Dans le cas du saumon atlantique par exemple, il a fallu des décennies pour maîtriser le cycle de production et on a dû procéder à une sélection génétique afin d'améliorer l'exploitation courante. Ce processus s'applique à toutes les espèces.

Je dirais que, en général, il est plus facile de faire l'élevage de poissons indigènes dans leur propre environnement que de choisir une espèce exotique, c'est plus simple. Il y a des exceptions. Cependant, si on regarde ce qui se fait au Canada, je dirais, même si je n'ai jamais fait le calcul, que la très grande majorité des poissons d'élevage sont des poissons indigènes.

La réglementation des espèces exotiques, si je peux ajouter des renseignements complémentaires, est très stricte dans notre pays. Il existe un code national pour l'introduction et les transferts, sous la forme d'un PE signé par les provinces et le gouvernement fédéral, le MPO en l'occurrence, qui règlemente la circulation des poissons et notamment l'importation d'espèces exotiques au Canada. On effectue une évaluation des risques dans chaque cas. Nous étudions les risques écologiques de la dispersion de l'espèce, l'impact génétique sur les espèces locales, et nous nous préoccupons de la santé des poissons et de l'apparition d'une nouvelle maladie qui pourrait sévir à la suite de l'introduction. Il n'y a pas beaucoup d'exemples d'introductions ayant mal tourné, si je puis dire. La réglementation du MPO, de l'ACIA et des provinces est efficace.

M. Beaupré : Un des éléments de votre question portait sur la manière dont l'industrie en vient à choisir une espèce plutôt qu'une autre. Dans le cas du saumon, le saumon atlantique est plus facile à élever dans des parcs en filet que le saumon du Pacifique, et c'est une des raisons pour lesquelles on retrouve le saumon atlantique en aquaculture.

Le sénateur Robichaud : C'est aussi qu'il a meilleur goût.

M. Parsons : Si vous voulez, je peux m'étendre sur le sujet. Manifestement, on prend en compte de nombreux facteurs dans le choix d'une espèce candidate pour en faire éventuellement l'aquaculture. Des questions d'ordre biologique doivent être posées pour ce qui est de l'élevage de poissons ou de mollusques en contexte d'aquaculture. Il nous faut comprendre la biologie du poisson afin de pouvoir favoriser le frai et élever les juvéniles pour les engraisser. Il nous faut savoir quel régime leur convient afin de les engraisser dans un délai qui demeure rentable.

La dimension économique constitue un autre facteur à prendre en compte pour choisir une espèce candidate. Pouvons-nous élever ce poisson en utilisant une technologie déjà répandue? Le coût de son alimentation et de la main- d'œuvre nécessaire permettra-t-il une rentabilité? Bien sûr, du point de vue de l'industrie, c'est le marché qui a le dernier mot quant à l'avenir de l'espèce candidate. Beaucoup de facteurs entrent en jeu pour établir si une espèce sera biologiquement et économiquement viable en aquaculture.

La sénatrice Raine : Le MPO effectue-t-il ce travail initial ou est-ce l'industrie qui s'en charge? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Parsons : Le paysage a beaucoup changé au cours des 5 à 30 dernières années. Je dirais qu'il y a eu au cours de cette période un effort collectif de la part de l'industrie, qui s'est intéressée à l'élevage d'espèces candidates. Par le passé, le MPO a participé à la diffusion de recherches sur le développement de plusieurs espèces et les milieux universitaires ont participé à ces recherches. Cela a duré un certain nombre d'années.

Plus récemment, comme M. Beaupré l'a déclaré en réponse à une question antérieure, le rôle actuel du ministère porte davantage sur les questions de réglementation liées à l'industrie que sur les enjeux de croissance liés à la production des espèces, nouvelles ou existantes.

Le sénateur McInnis : Vous saurez que, dans la province de Nouvelle-Écosse, l'élevage de saumons dans des parcs en filet ouverts est très controversé. Il me semble, comme à beaucoup de gens dans la province, que l'aquaculture a encore beaucoup de chemin à faire. Le pou du poisson et son traitement posent des difficultés, tout comme la surveillance de la densité des populations maintenues dans les parcs en filet, alors nous sommes encore loin du compte. Certaines autorités au Canada ont établi des normes et une réglementation sur la densité des stocks de poissons à nageoires, et d'autres pas. Nous avons le problème des poissons d'élevage échappés qui peuvent se reproduire avec les saumons sauvages, ce qui me porte à dire que nous sommes encore loin du but. Certains exploitants mettent leurs parcs en jachère ou effectuent une rotation et d'autres pas. Les difficultés sont nombreuses.

En lisant votre document, je n'ai pas vu beaucoup de participation du public : l'Ecology Action Centre, le Conseil canadien du homard et un certain nombre d'autres organismes. J'ai vu des expressions comme « socialement viable » et le mot « social » est revenu. J'ai vu « ONG non gouvernementaux ». Je n'ai pas su lesquels car on ne les nommait pas. J'ai lu le rapport de la Commission Cohen et ce qu'on y disait à propos de l'élevage des saumons et, lorsque je considère l'état de l'aquaculture, je me dis qu'il y a une foule de questions sans réponse.

Seriez-vous d'accord pour dire que, afin d'aborder ce domaine, beaucoup de recherches sont nécessaires? Par exemple, la Nouvelle-Écosse a mis un frein à l'élevage de saumons dans les parcs en filet ouverts. On a mis sur pied un comité élargi pour élaborer une réglementation. Je remarque avec intérêt qu'encore une fois le public n'y participe pas. Il n'y a jamais eu de discussion à propos des droits des propriétaires particuliers. Votre famille peut bien vivre dans la même maison surplombant une crique depuis plus de 100 ans. Sans s'annoncer et sans donner de préavis, les aquaculteurs arrivent avec leur bail couvrant 18 hectares et des moteurs tournant 24 heures par jour, 365 jours par année. Il me semble qu'il y a beaucoup de travail à faire et qu'on ne peut pas réussir sans la participation du public.

Je regarde la liste des participants et j'y vois les épiceries et Cooke Aquaculture, qui vient de recevoir une amende de 500 000 $ pour avoir déversé une substance interdite dans l'eau, mais je ne vois pas le public. C'est un problème pour l'avenir.

Comment pourrait-on améliorer l'état de l'aquaculture? Est-ce que je me trompe dans mon évaluation de la situation? Il me semble qu'il y a une foule de problèmes.

M. Beaupré : Sénateur, toutes les questions que vous soulevez et les faits que vous avancez sont réels. Il s'agit du contexte auquel nous sommes quotidiennement confrontés. Beaucoup de ces questions sont très difficiles à régler, principalement en raison du nombre de facteurs dont il faut tenir compte. Par exemple, l'aquaculture est une nouvelle industrie qui doit s'ajuster à l'industrie des pêches qui existe depuis longtemps. Ce n'est pas facile.

Nous entendons souvent que l'aquaculture, c'est bien, mais pas dans ma cour. Il y a des inquiétudes à ce propos, nous nous en rendons compte chaque jour. Le ministre reçoit constamment des lettres traitant de ces questions. En outre, les gens sont inquiets, pas seulement le public mais l'industrie aussi. L'industrie du homard nous communique des observations parce qu'elle s'inquiète des produits qu'on utiliserait pour traiter le pou du poisson, par exemple. Comment peut-on avancer et faire son métier d'aquaculteur en utilisant des produits autorisés parce qu'ils ont subi une évaluation environnementale? Il faut les utiliser conformément aux directives d'une étiquette apposée par l'ARLA, une agence fédérale. Je ne me rappelle plus à quoi correspond cet acronyme. Tout est bien réglementé, mais les inquiétudes persistent quant à l'utilisation de ces produits. Il y a les préoccupations que vous avez mentionnées, les interactions entre poissons sauvages et poissons d'élevage et le pou du poisson. Bien des gens sont inquiets sur les deux côtes, partout en fait.

C'est difficile à gérer. En même temps, en raison des nombreuses inquiétudes, beaucoup de renseignements qui ne sont pas tout à fait exacts circulent et il nous faut faire des mises au point à l'occasion.

Nous conservons des contacts étroits avec l'étranger, la Norvège par exemple ainsi que l'Écosse et le Chili. Ils font face aux mêmes problèmes et nous échangeons donc pour en apprendre davantage et nous assurer de tous aller dans la même direction. Si un problème a pu être réglé, nous pouvons en tirer avantage.

Nous essayons de faire avancer tous les morceaux simultanément, mais la tâche est très complexe.

La sénatrice Raine : Vous n'avez pas vraiment répondu à la question portant sur la valeur accordée aux vues des maisons établies depuis longtemps sur la côte, qui seront en quelque sorte détruites, je dirais. Ont-elles une valeur? Une compensation est-elle prévue?

[Français]

M. Gilbert : Si vous parlez de valeur monétaire, il n'y en a aucune; il n'y a aucune compensation. Par contre, ce qu'on doit dire pour ajouter un peu d'information à la réponse de Guy suite à la question du sénateur McInnis, c'est que, dans le cas de la Nouvelle-Écosse, l'allocation est une responsabilité purement provinciale. La province est responsable d'émettre des baux sur le fonds marin et la province délivre aussi les permis d'aquaculture.

Au ministère, on participe au processus en fournissant des avis scientifiques sur l'impact possible que ces installations peuvent avoir sur l'habitat du poisson et les pêches commerciales, en fonction de la Loi sur les pêches.

On participe toutefois au processus de A à Z et je sais fort bien que la province, dans le cadre de ses évaluations de sites et ses évaluations de demandes d'accès à des nouveaux sites, tient de nombreuses consultations publiques dans le cadre du processus, qui, souvent, s'échelonnent sur un an ou deux.

Dans ces cas, toutes les associations et le public sont invités à faire part de leurs vues sur un site donné. On l'a vu dernièrement dans le cas de St. Mary's Bay et d'autres.

Si vous me demandez si l'appui général du public sur un site donné est pris en considération comme il le devrait, je ne peux pas répondre à cette question. Je peux toutefois vous dire que le processus d'évaluation d'accès aux sites comprend des consultations publiques où tous ceux qui sont touchés de près ou de loin par la possibilité d'avoir un nouveau site aquacole sont invités à faire part de leur point de vue sur cette demande.

[Traduction]

Le sénateur McInnis : J'ai personnellement fait l'expérience du processus. Je n'ai aucun intérêt dans une entreprise aquacole, mais j'ai observé ce qui se passait. Le protocole est relâché dans le meilleur des cas et la participation du public est faible ou inexistante.

Vous avez parlé de Shoal Bay. Vous connaissez sûrement Sheet Harbour et le projet Douser, le seul en Amérique. C'est une leçon sur la façon de perdre la confiance du public car Shoal Bay a été refusé, mais le port voisin plus près de Douser est encore là. Vous comprenez le manque de confiance des gens à l'égard du système.

Je saisis la difficulté posée par les compétences car les provinces ont le droit d'accorder les baux, et je suis ébahi du fouillis que constituent nos règles et règlements. N'est-il pas temps d'établir une législation cohérente qui conviendrait aux provinces et au gouvernement fédéral et qui comprendrait des consultations auprès de la population? Il me semble que nous sommes plutôt désorganisés sur le plan législatif. Je ne cherche pas à imputer la faute ou à distribuer les blâmes, mais quelqu'un s'en est-il déjà rendu compte?

M. Beaupré : Cela fait bien sûr partie des nombreux facteurs avec lesquels il faut jongler pour trouver la meilleure façon de réglementer l'industrie. Le tableau est complexe, comme vous l'avez souligné, parce que les provinces sont l'organisme de réglementation dans certains domaines et nous le sommes dans d'autres. Nous gérons aux termes de la Loi sur les pêcheries, qui est une loi principalement axée sur la pêche des poissons sauvages. Il nous faut donc aborder certaines activités d'une autre façon parce qu'elles ne sont pas prévues dans la Loi sur les pêcheries comme telle.

Nous devons aussi composer avec une longue liste de règlements et d'organismes. Pour un observateur extérieur, c'est très complexe. Nous essayons dans la mesure du possible de clarifier et de simplifier ces règlements. C'est fastidieux. Nous abondons dans votre sens, le tableau est très complexe.

Le sénateur McInnis : Au terme de cette étude, j'espère que nous serons à même de vous aider d'une certaine façon grâce à nos recommandations. Je ne veux pas sous-estimer la complexité du tableau. La situation est difficile et les intervenants sont nombreux. En fin de compte, comme mon ami ici présent y a fait allusion, beaucoup de pays ont besoin de ces protéines. L'aquaculture est peut-être la seule façon d'y arriver, alors efforçons-nous de faire les choses convenablement.

La sénatrice Hubley : Selon l'Association aquacole du Canada, l'avenir de l'aquaculture dépend des recherches qui ouvriront la voie à des méthodes de production économiquement rentables tout en étant viables du point de vue de l'environnement. Pourriez-vous nous donner un aperçu de l'état des recherches en aquaculture menées au Canada? Veuillez aussi nous indiquer quelles sont les sources de financement des recherches qui ont lieu.

M. Parsons : Je peux donner un début de réponse à votre question. Nous devrons peut-être vous fournir de l'information complémentaire par la suite.

Nous sommes à mettre la dernière main à une publication que nous produisons tous les deux ans. Elle résume les recherches se poursuivant à travers le Canada. La publication doit sortir vendredi, et je serais plus qu'heureux d'en distribuer des exemplaires à tous les membres du comité. Elle vous donnera une idée de l'étendue des recherches et des projets de développement en cours non seulement au ministère, mais aussi dans les milieux universitaires et d'autres milieux.

Pêches et Océans Canada dirige deux grands programmes de recherches. Le premier est le Programme coopératif de recherche et développement en aquaculture. Ce programme a été financé en 2000 et il s'agit d'un programme en collaboration avec l'industrie. Ses cibles présentes sont des travaux visant à optimiser la santé des poissons et le rendement environnemental.

Il s'agit de projets coopératifs que nous menons avec l'industrie. Celle-ci fournit une partie du financement et les travaux sont effectués par des chercheurs du MPO.

En 2008, dans le cadre d'un programme d'aquaculture durable, le ministère a aussi reçu des fonds pour entreprendre des recherches dans ce que nous nommons le Programme de recherche sur la réglementation de l'aquaculture. Il s'agit aussi de recherches menées par le ministère et axées principalement sur le soutien à la gestion, aux décisions de gestion et à l'élaboration de politiques et de réglementation. Ce sont les deux principaux programmes du ministère.

À l'échelle fédérale, il existe un certain nombre d'autres programmes menés par Industrie Canada. Le CRSNG est un organisme finançant les universités et les milieux académiques canadiens. Il gère plusieurs programmes offrant un financement de recherche à des chercheurs universitaires du secteur de l'aquaculture. Il dirige aussi deux programmes coopératifs favorisant la collaboration entre l'industrie et les chercheurs universitaires ainsi que des programmes permettant l'établissement de réseaux de chercheurs. Par exemple, un réseau s'est constitué autour de l'aquaculture multitrophique intégrée et le CRSNG finance l'Université du Nouveau-Brunswick en tant qu'université responsable. Le réseau regroupe plusieurs universités et intervenants de l'industrie et le MPO y collabore aussi. Il existe divers programmes qui financent les recherches du milieu universitaire dans ce domaine.

Le Conseil national de recherches gère aussi le PARI, le Programme d'aide à la recherche industrielle. Il fournit des fonds à des projets techniques et l'industrie de l'aquaculture est aussi admissible à ce programme.

D'autres organismes de développement régional financent des projets de développement et l'industrie aquacole y est admissible dans certaines régions du pays.

Au niveau provincial, certaines provinces allouent des fonds à des projets de recherche. Par le passé, des fonds du Québec étaient disponibles pour les recherches en aquaculture par exemple, mais les sources sont plus limitées à l'échelle provinciale.

Voilà pour le survol. J'ai probablement oublié quelques programmes, mais cela vous donne une idée générale des fonds auxquels l'industrie peut avoir directement accès, ainsi que les milieux universitaires.

La sénatrice Hubley : Vous avez mentionné la coopération. Pouvez-vous aussi parler du fait que les propriétaires étrangers occupent une place importance dans le secteur de l'aquaculture au Canada? Le Canada tire-t-il profit des recherches ayant lieu dans les autres pays?

M. Parsons : Je croirais que oui, de façon générale. Les recherches entreprises et publiées entrent dans le domaine public et peuvent profiter à tous. Je présume que l'industrie et les chercheurs se prévalent de ces sources de renseignements et examinent les recherches publiées pour évaluer s'il leur est possible de les utiliser et de les appliquer au contexte canadien.

De façon limitée au sein du ministère, mais aussi dans les milieux universitaires, les chercheurs participent à un certain nombre de projets coopératifs internationaux qui les soutiennent dans l'exécution de recherches procurant des bénéfices mutuels à toutes les parties. Il s'agit d'une autre façon valable de collaborer par la recherche avec des partenaires internationaux et de tirer profit des recherches scientifiques menées ailleurs dans le monde.

La sénatrice Poirier : On indique à la page 3 des notes qu'on nous a fournies que la production aquacole au Canada est demeurée assez stable pendant cinq ans à la suite de la crête enregistrée en 2006. On indique ensuite qu'il y a eu en 2011 une baisse de valeur de 9 p. 100 par rapport à 2010. Pouvez-vous m'en donner la raison principale? Était-ce déterminé par le marché? N'y a-t-il pas un marché pour cette production? Était-ce une question de prix? Quelle peut être la raison d'une baisse de 9 p. 100?

M. Beaupré : Je ne vois pas de facteur en particulier pouvant l'expliquer, autre que le marché à ce moment. Peut-être que mes collègues peuvent vous donner une raison plus précise.

La sénatrice Poirier : Vous croyez que c'était déterminé par le marché, qu'il n'y avait pas de marché pour le produit?

[Français]

M. Gilbert : On peut vous revenir avec une information plus précise, mais les fluctuations de la valeur des produits aquacoles, la grosse majorité de notre production est du saumon; en termes de volume, c'est 70 p. 100 et en termes de valeur, c'est plus de 80 p. 100. Le prix du saumon a un cycle qui varie entre deux ou trois ans sur le marché. Il y a une fluctuation dans le prix; il y a une baisse et une remontée, une baisse et une remontée. On peut le voir un peu sur le graphique. Je parle du marché américain ici.

En 2011, si ma mémoire est bonne, il y avait un creux, mais on peut vous revenir avec une information plus précise pour justifier exactement cette baisse. Ici, c'est un agrégat de la côte Est et de la côte Ouest, et il peut y avoir des différences entre les deux côtes, selon le marché visé et le type de produit vendu.

La sénatrice Poirier : Y a-t-il eu des baisses dans les autres pays ou si c'est seulement au Canada?

M. Gilbert : C'est un marché où les prix sont assez internationaux, mais notre production est vendue très majoritairement sur le marché américain et ce ne sont pas tous les autres pays qui vendent ce genre de produit. La compétition sur le marché américain se fait surtout entre le Canada et le Chili. Par exemple, la Norvège et l'Écosse ne seraient pas affectées par une variation du prix sur le marché américain, mais seraient affectées sur une variation du prix de la communauté européenne, où la majorité de leurs produits sont destinés. Et les cycles ne concordent pas nécessairement.

C'est une bonne question. Vous savez, nous, on n'est pas dans la commercialisation des produits. La commercialisation des produits marins est toujours la responsabilité d'Agriculture Canada et il y aurait là certainement des experts qui pourraient répondre mieux que nous à cette question. Cependant, on pourrait vous revenir.

La sénatrice Poirier : La majorité des personnes qui sont employées par le secteur de l'aquaculture sont de 35 ans et moins. Pourquoi? Cette situation est-elle la même partout dans le monde?

M. Gilbert : Comme vous pouvez le voir au niveau des fonctionnaires, l'aquaculture étant un nouveau domaine, cela attire seulement des jeunes.

La sénatrice Poirier : Est-ce comparable avec l'âge moyen des autres pays aussi ou sont-ils plus avancés que nous?

M. Gilbert : À ma connaissance, la comparaison avec d'autres pays est difficile à faire, car cela dépend de quel pays on parle. Selon ce que je sais, je dirais oui. Il y a une multitude de raisons pour l'expliquer, mais la principale, c'est un peu la blague que je viens de faire, c'est que comme l'aquaculture est une nouvelle culture qui a commencé à se développer au pays dans les années 1980, elle a depuis toujours attiré des jeunes qui cherchent à travailler dans des nouveaux secteurs.

À une certaine époque, au Canada, beaucoup de jeunes ont suivi des formations spécifiques pour travailler en aquaculture. On a vu une croissance importante. La tendance est moins forte aujourd'hui, à cause un peu de la stagnation de l'industrie, il y a moins d'opportunité.

En général, chez les professionnels, chez des gens qui ont même une formation universitaire, comme c'est une nouvelle industrie, ce sont encore des jeunes qui occupent la majorité des postes.

La sénatrice Poirier : Avez-vous des données pour voir si, à l'extérieur du Canada, dans les autres pays, l'aquaculture a commencé avant les années 1980, s'ils sont plus avancés que nous?

M. Gilbert : Cela dépend de quelle espèce on parle. Je faisais référence ici surtout au saumon. Pour ce qui est du saumon, c'est la même chose partout. L'industrie du saumon s'est développée à peu près en même temps un peu partout dans le monde. Si vous pensez à des espèces comme les mollusques, par exemple les moules ou les huîtres, l'élevage des huîtres existe depuis belle lurette; cela se faisait au Canada il y a plusieurs décennies, c'est beaucoup plus vieux que l'élevage du saumon. Donc, cela dépend de l'espèce dont on parle.

J'avoue que la comparaison de la dynamique des emplois au niveau de l'âge entre les différents pays, ce n'est pas quelque chose sur quoi, à ma connaissance, on s'est déjà penché. Je peux vous dire, en revanche, que, il y a quelques années, l'Association canadienne de l'industrie aquacole avait commandé une étude spécifique sur la démographie de l'emploi dans le secteur aquacole canadien. Si ma mémoire est bonne, cela couvrait tous les secteurs, tant le saumon que d'autres.

Il y aurait peut-être là une information comparative avec d'autres pays. On peut essayer de vous retrouver cela, mais je suis certain que l'industrie aquacole se fera un plaisir de vous fournir plus d'informations à ce sujet.

La sénatrice Poirier : Merci.

Le sénateur Maltais : Avez-vous beaucoup d'élevages de tilapia?

M. Beaupré : En termes de volume, je n'ai pas les chiffres, mais c'est un élevage de poisson qui se fait pas mal de façon générale.

Le sénateur Maltais : Je sais qu'il y en a en Ontario et qu'ils produisent une très bonne qualité de poisson. Pour le consommateur, on sait ce que le poisson mange, en Ontario, car il est suivi. Le tilapia qui nous vient de l'autre bord, ce n'est pas marqué ce qu'il mange, et quand on le sait on n'en mange plus. Est-ce qu'il y a moyen d'identifier le poisson du Canada quelque part? Même s'il coûte un peu plus cher, je suis sûr que quand tout le monde va savoir ce que l'autre mange, vous allez avoir une surproduction de vos tilapias, car c'est un poisson de qualité. Par contre, il faut savoir comment il est nourri. Y a-t-il moyen d'identifier le poisson du Canada, d'avoir un branding quelque part?

M. Gilbert : À ma connaissance, la dernière fois que j'ai vu les statistiques, il y avait encore au Canada quelque chose comme quatre ou cinq entreprises qui produisaient du tilapia. C'est très peu et très marginal. Ce sont des petites entreprises, ce sont des élevages terrestres en bassin un peu similaire à ce que vous pouvez voir pour la truite, mais avec des conditions d'élevage un peu différentes — de l'eau plus chaude, et cetera. Vous avez raison, la production en terre canadienne est très bien suivie.

Pour répondre à votre question, bien sûr qu'il y aurait moyen de commercialiser un produit canadien sous la bannière canadienne, et je pense que l'association canadienne a toujours un projet en vigueur en ce sens. Maintenant, c'est une question de volume. Dans le cas du tilapia, comme la production est très petite, elle est vendue presque exclusivement localement. On le voit dans le cas de la truite au Québec, par exemple, lorsque c'est vendu localement, les gens qui l'achètent savent très bien d'où vient le poisson et n'ont pas besoin de voir un sigle québécois, canadien ou albertain sur le produit pour le savoir. Je pense qu'on en est à cette étape pour le tilapia.

Le sénateur Maltais : Les marchés de grande surface ne montrent pas la différence. En plus, le poisson étranger est vendu moins cher que le nôtre, car le nôtre, avec tous les règlements qu'il y a, c'est normal qu'il coûte plus cher. Par contre, le tilapia qui nous vient de l'extérieur, il coûte certainement moins cher, parce qu'il n'est pas bien surveillé comme le nôtre.

M. Gilbert : J'aimerais ajouter un point. Vous avez raison, mais pour expliquer ce fait, ce qu'il faut se rappeler c'est que, dans les grandes surfaces, dans 99,9 p. 100 des cas, le tilapia est importé. Et donc il n'y a pas de produit canadien à étiqueter.

Le sénateur Maltais : Très bonne réponse, merci.

M. Beaupré : Vous posez la question du branding. C'est quelque chose qu'on voit beaucoup en Europe. Si vous allez dans les comptoirs de poissons, dans les grandes épiceries en Europe, chaque poisson, chaque fruit de mer sera étiqueté. On verra « crevette de la mer du Nord », tel prix, « crevette du Vietnam », tel prix. Il sera même indiqué si c'est un poisson ou un fruit de mer d'aquaculture ou sauvage. On n'a pas encore cela au Canada. Mais au final, je pense que cela va venir. Vous le voyez par exemple dans d'autres pays; si vous achetez du poulet, vous verrez la photo du producteur avec son épouse. En fin de compte, dans le cas du poisson, cela va finir par arriver — la photo du pêcheur avec son tilapia! Mais c'est important pour le consommateur.

Le sénateur Maltais : Très important.

La sénatrice Poirier : Vous dites que ce n'est pas en place au Canada. Est-ce que ce n'est pas déjà en place pour le saumon, pour lequel on voit si c'est du saumon de l'Atlantique ou du saumon d'élevage? Il me semble qu'on peut le voir, dans les épiceries, c'est indiqué.

M. Beaupré : Cela indique par exemple si le saumon a été certifié par le Marine Stewardship Council; pour d'autres espèces aussi, on commence à le voir dans les épiceries, mais moins pour le poisson frais.

[Traduction]

Le président : Merci encore une fois à nos témoins de leur présence ce soir et de leur patience. Nous nous excusons encore pour notre retard.

Je désire simplement aviser les membres du comité que nous entendrons mardi soir prochain, à moins d'un imprévu, l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture. À bientôt.

(La séance est levée.)


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