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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 3 - Témoignages du 15 novembre 2011


OTTAWA, le mardi 15 novembre 2011

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 h 30, dans le cadre de son étude sur les nouveaux enjeux qui sont ceux du secteur canadien du transport aérien.

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

[Traduction]

Nous poursuivons ce matin notre étude sur le secteur canadien du transport aérien. Nous accueillons M. Lloyd McCoomb, président et chef de la direction de l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto, et M. Toby Lennox, vice- président, Affaires générales et Communication d'entreprise.

Monsieur McCoomb, je vous cède la parole. Après votre déclaration, nous passerons à la période des questions.

Lloyd McCoomb, président et chef de la direction, Autorité aéroportuaire du Grand Toronto : Comme le président l'a indiqué, je m'appelle Lloyd McCoomb. Je suis président et chef de la direction de l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto, la GTAA, qui est responsable de l'exploitation de l'aéroport international Pearson de Toronto. Je suis accompagné aujourd'hui de Toby Lennox, vice-président, Affaires générales et Communication d'entreprise. Nous nous réjouissons tous les deux d'être ici.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de m'entretenir avec les membres du comité au sujet de la situation actuelle de l'industrie de l'aviation au Canada. D'ailleurs, à cause du poste que j'occupe, je crois être en mesure d'examiner les enjeux à cet égard. Comme vous le savez peut-être, je prendrai bientôt ma retraite et quitterai mon poste de président et chef de la direction après une carrière de 30 ans dans l'aviation. Or, plus important encore pour les besoins de cet exposé, sachez qu'au cours de ma carrière, j'ai travaillé dans le domaine de l'aviation tant pour le gouvernement que pour le secteur privé.

Dans les années 1980, j'ai travaillé à la mise en place de la capacité de prévision au sein de Transports Canada. De 1994 à 1996, j'ai été directeur général de l'aéroport international Pearson de Toronto, toujours pour Transports Canada. En 1996, après la cession de cet aéroport par le gouvernement à la GTAA, j'ai été à la tête du programme de conception et de réaménagement de l'aéroport, avant de devenir le chef de la direction il y a cinq ans environ. Je suis convaincu que vous me poserez des questions précises à cet égard.

D'entrée de jeu, je tiens à mentionner que la cession des aéroports du Canada s'est révélée un succès que l'on doit souligner. Grâce au transfert des aéroports, le Canada est maintenant fort de l'une des meilleures infrastructures aéroportuaires au monde. À l'heure actuelle, nous disposons d'installations qui permettront de répondre à la demande en matière de trafic au Canada pour les années à venir, ce qui est bénéfique tant aux compagnies aériennes qu'aux passagers. De nos jours, l'éventail d'installations et de commodités offertes aux passagers dépasse de loin l'infrastructure insuffisante d'il y a 15 ans.

La cession s'est certes révélée avantageuse, mais j'aimerais mettre l'accent ce matin sur les aspects de la politique aérienne les plus susceptibles de faciliter l'atteinte des objectifs stratégiques et économiques du gouvernement du Canada et des régions que nous desservons. À l'époque actuelle, nous avons besoin que le gouvernement prenne des décisions stratégiques éclairées en reconnaissant les distinctions entre les aéroports du pays, plus particulièrement le rôle et la fonction propres à chacun d'eux. Selon moi, il est nécessaire que les représentants de l'industrie et du gouvernement travaillent de concert à l'élaboration d'un nouveau cadre stratégique.

D'abord quelques mots à propos de Toronto Pearson. Il est, de loin, le plus grand du pays. En 2010, nous avons accueilli quelque 20 millions de passagers, chiffre qui devrait passer à 33,5 millions d'ici la fin de l'année. C'est près de deux fois plus que l'aéroport de Vancouver, notre principal concurrent et le deuxième aéroport du Canada.

Nous gérons environ le tiers du trafic aérien au pays et près de la moitié des services de fret. Je vous donne quelques statistiques : chaque jour, plus de 85 000 personnes empruntent nos installations; nous sommes en fait le quatrième point d'entrée en importance vers l'Amérique du Nord. Par conséquent, notre aéroport revêt une importance considérable pour l'activité économique.

Quelque 38 000 personnes travaillent dans les installations de Toronto Pearson. En outre, l'emploi de 185 000 personnes dépend directement des activités de l'aéroport. Nous générons des millions de dollars en recettes fiscales. Plus important encore, la renommée de Toronto Pearson au pays et à l'étranger attire des entreprises et des sièges sociaux à Toronto, en plus d'accroître la portée mondiale des milieux torontois des affaires, des sciences et des arts.

Notre aéroport est en outre un point d'entrée important au Canada pour des millions de voyageurs. Ce sont des touristes, des gens d'affaires et des immigrants qui atterrissent d'abord à Toronto, puis se dispersent d'un océan à l'autre. Grâce à sa taille, à son emplacement et, surtout, à ses installations, Toronto Pearson joue un rôle qu'aucun autre aéroport ne peut égaler au pays.

J'ai été témoin de l'évolution de Toronto Pearson et de celle des politiques gouvernementales qui ont aiguillé l'aéroport et qui se sont transformées au même rythme. Avant la privatisation et l'entrée en vigueur de la Politique nationale des aéroports, le gouvernement avait réussi à mettre sur pied un système aéroportuaire national qui desservait l'ensemble du pays, et je suis très fier d'avoir joué un rôle à cet égard. Malheureusement, les dépenses liées à l'exploitation et à l'expansion de ce système se révélaient exorbitantes. De plus, la surveillance des activités aéroportuaires par le milieu politique empêchait les aéroports de tirer profit des occasions commerciales qui se présentaient sur le plan local.

On doit au système actuel nombre d'avantages pour le Canada et la population du pays. Entre autres choses, les aéroports doivent administrer leurs activités dans le meilleur intérêt de leur région et jouer le rôle de moteur économique au sein de leur collectivité.

Je sais que certains ont indiqué à votre comité qu'ils estiment que les aéroports ne sont pas tenus de rendre des comptes et qu'il faut modifier à l'avantage de certains groupes le modèle choisi pour la gestion de leurs activités. Or, pour plusieurs raisons, je lance un avertissement contre ce genre d'argumentation.

À titre de chef de la direction de Toronto Pearson, je suis tenu de rendre des comptes à cinq groupes différents. Premièrement, je dois répondre quotidiennement aux besoins de ceux et celles qui utilisent l'aéroport : les passagers ou les « invités », comme nous les appelons. Nous nous efforçons sans cesse de combler les besoins de nos invités et de surpasser leurs attentes.

Deuxièmement, je suis tenu de rendre des comptes aux compagnies aériennes qui mènent des activités à l'aéroport. Près de 70 compagnies aériennes ont choisi de s'établir à notre aéroport. Je dois tous les jours satisfaire leurs besoins et veiller à ce que leurs activités se déroulent sans heurts.

Troisièmement, je rends aussi des comptes aux gens directement touchés par les activités de l'aéroport, c'est-à-dire ceux et celles qui vivent dans les collectivités avoisinantes et doivent composer avec le bruit, les émissions gazeuses et la congestion routière notamment.

Quatrièmement, je me dois particulièrement de rendre des comptes aux entreprises dont le fonctionnement dépend de l'accès offert par l'aéroport et des emplois qu'il crée. Il s'agit des hôtels, du secteur touristique de Toronto et des entreprises comme RIM par exemple, qui offrent leurs produits sur les marchés internationaux et dont les employés voyagent partout dans le monde. Je songe surtout au secteur financier de Toronto.

Cinquièmement et finalement, je suis tenu de rendre des comptes aux différents ordres de gouvernement qui, légitimement, s'attendent à ce que je gère l'aéroport de manière sûre, sécuritaire et judicieuse.

Pour les besoins de tous ces groupes, nous avons mis en place un éventail de mécanismes qui nous permettent de susciter des idées, de recevoir des commentaires et de rendre compte de nos activités : comités consultatifs, rencontres individuelles, publications et campagnes de sensibilisation. Si vous le souhaitez, je vous donnerai davantage de détails pendant la période de questions.

Il convient de souligner que l'autorité portuaire n'a pas à favoriser les intérêts d'un groupe particulier au détriment de ceux d'un autre. Mon travail consiste à établir un équilibre entre les intérêts de tous les groupes auprès desquels je suis tenu de rendre des comptes, et ce, de manière responsable.

J'ai déjà mentionné brièvement le deuxième avantage de notre système actuel. Il s'agit de notre infrastructure d'aviation. En clair, la Politique nationale des aéroports a entraîné la création de l'une des meilleures infrastructures d'aviation au monde. Chaque jour, les compagnies aériennes et les passagers profitent de nos installations modernes et efficaces. Notre infrastructure permet non seulement de répondre à la demande actuelle, mais elle saura également satisfaire aux exigences des voyageurs pour bien des années à venir.

D'ailleurs, je ne suis pas le seul de cet avis. Récemment, le Forum économique mondial a fait savoir que l'infrastructure d'aviation canadienne est la meilleure au monde. Du reste, je vous conseille d'observer les collectivités de nos voisins du Sud aux prises avec des installations aéroportuaires désuètes et combles qui ne suffisent pas à la demande. Le fait que la stratégie actuelle du Conseil international des aéroports consiste à adopter notre modèle en dit beaucoup sur ce dernier.

Certains disent que les aéroports canadiens sont disproportionnés et que nous nous sommes concentrés sur l'esthétique des bâtiments plutôt que sur leur commodité. J'ai passé la plus grande partie de ma carrière à travailler à l'amélioration des aéroports de ce pays, et je peux assurer aux membres du comité que ce n'est pas le cas.

Étant donné leur nature même, les aéroports — notamment les nôtres — sont vastes et complexes, en plus de comprendre des éléments d'infrastructure coûteux qui doivent être construits, puis entretenus. Aujourd'hui, il est nécessaire que toutes les décisions relatives à l'aménagement soient prises non seulement en fonction de la demande actuelle, mais également en vue du trafic à venir.

Toronto Pearson en est un exemple concret. En ne prenant en considération que le trafic de 2004, année où nous avons inauguré notre nouveau terminal, nos censeurs avaient certes des raisons de protester. Or, lorsqu'on tient compte du trafic que nous gérons à présent et de la demande prévue pour les années à venir, il est clair que nous avons pris la bonne décision.

Lorsqu'on évalue le système actuel du point de vue des finances, on constate qu'il occasionne de nombreux avantages. Il s'agit là de mon troisième argument en faveur du système en place. L'infrastructure de Toronto Pearson a été mise sur pied au moyen d'instruments financiers novateurs provenant du secteur privé, et non par l'octroi de fonds publics. En effet, nous nous sommes dotés d'un vaste programme d'immobilisations, lequel a été accueilli très favorablement par les investisseurs. Il est d'autant plus important de souligner que le modèle financier actuel prévoit le réinvestissement des gains générés par les activités de l'aéroport dans l'aménagement de ce dernier. Ainsi, ce ne sont pas les actionnaires ni des entreprises de gestion étrangères qui s'accaparent toutes les recettes de l'aéroport. Ceux qui utilisent l'aéroport et y investissent des fonds sont également ceux qui en retirent des avantages.

Notre feuille de route à cet égard est d'ailleurs fort éloquente. Depuis cinq ans, nous réduisons chaque année les redevances d'atterrissage imposées aux compagnies aériennes. Nous avons déployé de grands efforts pour accroître notre compétitivité. En 2009, nous avons eu l'honneur de recevoir le prix de l'aéroport s'étant le plus amélioré, prix décerné par l'Association du transport aérien international. Cette reconnaissance de la part de nos compagnies aériennes clientes sur la scène internationale confirme à mes yeux que nous sommes bel et bien sur la bonne voie. Après tout, pour une organisation, aucun éloge n'a plus de grâce que celui provenant de la clientèle.

Ainsi, nous disposons d'un système moderne, efficace et adapté à un éventail plus large d'intervenants, un système qui possède les éléments propices à sa croissance. Les aéroports d'aujourd'hui sont en mesure de générer leurs propres recettes, de planifier eux-mêmes leur aménagement et de tirer le meilleur parti possible des occasions commerciales qui se présentent afin de répondre à la demande en services d'aviation.

J'ai analysé le passé et le présent de l'industrie de l'aviation au Canada. S'agit-il d'une histoire exemplaire? Pas tout à fait. Il est vrai que nous disposons d'un système coûteux. Contrairement aux États-Unis, le Canada a recours à un système de financement par l'usager, lequel ne comprend aucune subvention du gouvernement destinée à couvrir les coûts des immobilisations et de fonctionnement. De plus, nous devons payer un loyer au gouvernement, en plus d'assumer les autres dépenses. Du point de vue des dépenses, la structure actuelle en place nuit à la capacité des aéroports canadiens de livrer efficacement concurrence aux aéroports des États-Unis pour ce qui est du trafic.

En ce qui concerne le loyer que nous payons au gouvernement, je suis d'avis — et je ne parle pas au nom de mes homologues canadiens — que la population canadienne a droit à un juste revenu pour les terres transférées ainsi que pour les fonds investis par le gouvernement avant la cession. Cependant, je m'oppose fermement à ce que l'on oblige également les autorités aéroportuaires à verser des sommes en rapport avec des investissements qu'elles ont faits elles- mêmes après la cession. Autrement dit, il serait déraisonnable pour le public canadien de s'attendre à quelque chose en retour d'un investissement qu'il refuse de faire.

J'estime, en outre, qu'il est malheureux que le Canada ne dispose d'aucune stratégie sur la façon de maximiser son excellente infrastructure d'aviation. On a proposé aux aéroports, sans vraiment en avoir discuté avec elles au préalable, une approche uniforme qui ne reflète en rien le véritable apport que chacune peut offrir à sa région, à sa province et au pays.

Dans une perspective d'avenir, je conseille fortement aux membres du comité et du Sénat de se pencher sur une stratégie nationale pour l'industrie de l'aviation qui tiendrait compte de l'importance de l'aviation pour l'économie du pays et qui permettrait d'en retirer le maximum, en plus de dicter la voie à suivre pour les années à venir.

Je suis conscient que le secteur privé a un rôle important à jouer dans l'élaboration d'une telle stratégie. Dans la foulée de la privatisation des aéroports et du système de navigation aérienne civile au milieu des années 1990, le secteur privé a rapidement gagné une expertise dans l'aménagement et l'exploitation des aéroports, de même que dans le fonctionnement de l'industrie de l'aviation. Je suis moi-même passé du secteur public au secteur privé. Il nous faut tirer le maximum de l'expérience de ceux qui gèrent l'industrie, ainsi que de l'expertise des membres du gouvernement qui surveillent cette dernière et qui comprennent les objectifs de politique générale. Les aéroports sont prêts et disposés à travailler de concert avec le gouvernement à cet égard.

Cette stratégie nationale permettra d'établir une distinction claire entre les types d'aéroports en fonction de leur taille et de leur rôle. De plus, s'il advenait que des subventions gouvernementales soient versées aux fins de la réduction des dépenses, ce soutien devrait alors être octroyé selon les besoins et les fonctions propres à chaque aéroport.

Le conseil d'administration de Toronto Pearson a élaboré une nouvelle orientation stratégique. Notre objectif est de faire de notre aéroport la principale porte d'entrée aérienne de l'Amérique du Nord. Nous nous attendons à ce que peu d'aéroports — sinon, un seul — se démarquent des autres et deviennent des plaques tournantes ou les premières portes d'entrée en importance en Amérique du Nord. Il s'agit d'une occasion à notre portée et nous voulons la saisir. Les membres de mon conseil d'administration sont d'avis que notre stratégie est la meilleure afin de réaliser le mandat de la GTAA d'être un moteur pour le développement économique de notre collectivité.

Une porte d'entrée aérienne, c'est un aéroport qui dessert un grand nombre de destinations au Canada, aux États- Unis et ailleurs à l'étranger. En plus d'offrir des vols pour les résidents de la ville où elle est située, de même que les services de fret, une porte d'entrée aérienne accueille un trafic de correspondance provenant de partout dans le monde et permet aux passagers de voyager vers une myriade de destinations. Une telle porte d'entrée se distingue des aéroports régionaux et locaux non seulement par le nombre de destinations qu'elle dessert, mais également par le nombre de passagers et d'avions de fret qu'elle accueille. Ces aéroports sont de véritables plaques tournantes pour le commerce et, en conséquence, ils sont essentiels à l'infrastructure commerciale de notre pays.

Nous croyons être en mesure de réaliser notre vision en accordant encore plus d'attention qu'auparavant au service à la clientèle, à la commercialisation, à l'excellence des opérations et à la réduction constante des dépenses.

Qui tirera parti de l'atteinte de notre objectif? Notre région bénéficiera d'un nombre d'emplois accru, d'une augmentation du développement économique et d'une ouverture sur le monde. Nos compagnies aériennes bénéficieront de l'excellence incomparable de nos opérations et de redevances réduites. Nos passagers se verront offrir de meilleures installations et commodités, ce qui les encouragera à utiliser fréquemment Toronto Pearson. Plus important encore, à titre de sénateurs, vous saurez certainement reconnaître qu'en faisant de Toronto Pearson un élément central du monde de l'aviation, on place du coup le Canada au cœur de la scène économique.

Seuls, nous ne pouvons atteindre cet objectif. Nous avons cerné quatre secteurs pour lesquels nous requérons le soutien du gouvernement. En bref, nous avons besoin que des améliorations soient apportées au chapitre de la sécurité afin que nous disposions d'excellentes installations sécuritaires, tout en offrant un service de grande qualité à nos passagers.

Nous avons également besoin que des améliorations soient apportées aux procédures douanières et de l'immigration, afin que les passagers puissent utiliser notre aéroport et y recevoir un service rapide. Nous devons être en mesure de maintenir la capacité de nos aéroports grâce à des politiques qui, tout en demeurant sensées, permettent de répondre aux nouveaux besoins sur le plan du trafic — je pense particulièrement aux voyageurs provenant de l'Orient — en ce qui touche les passagers qui demandent des vols à des moments inhabituels. Somme toute, ces améliorations se doivent d'être durables et raisonnables.

En conclusion, bien que je ne doute pas qu'il puisse être pertinent de tenir des discussions au sujet de modèles de gouvernance pour les aéroports, de telles discussions ne permettraient toutefois pas de faciliter l'atteinte des objectifs stratégiques et économiques du pays dans son ensemble. Elles n'attireront pas davantage de passagers dans mon aéroport, ni davantage d'aéronefs sur mes pistes. Ce sont plutôt des politiques mieux coordonnées de même qu'une affectation pertinente des dépenses et des recettes qui permettront l'essor de la compétitivité des aéroports et de l'industrie de l'aviation du Canada.

Le président : Comme vous le savez peut-être, par l'entremise de vos collaborateurs, nous avions accepté l'invitation à visiter votre aéroport, mais le comité doit toujours donner la priorité aux projets de loi. Nous devons examiner des modifications proposées à la Loi sur la sécurité ferroviaire, mais il s'agit là d'un simple contretemps. Nous prévoyons toujours visiter votre aéroport. Nous ignorons si vous serez toujours en poste à ce moment, mais nous voulons profiter de l'occasion pour reconnaître que vous jouez un rôle important dans ce dossier.

M. McCoomb : Merci beaucoup. Rien ne se compare à une visite des installations, avec moi ou mon successeur, pour se faire une idée de la situation et comprendre à quel point c'est important. Vous êtes les bienvenus quand vous le voudrez. Nous sommes heureux de voir que la visite figure toujours au programme.

Le président : Nous vous remercions pour l'invitation et, oui, la visite est toujours prévue au programme.

Permettez-moi de vous présenter mes collègues : le sénateur Zimmer, du Manitoba; le sénateur Martin, de Vancouver; le sénateur Verner, de Québec; le sénateur Boisvenu, de Sherbrooke; le sénateur Eaton, de Toronto; le sénateur Greene, d'Halifax; et le sénateur MacDonald, du Cap-Breton.

Le sénateur Eaton : Monsieur McCoomb, j'utilise l'aéroport Pearson deux fois par semaine et je dois dire que c'est très agréable. Toutes mes félicitations. J'ai réalisé à quel point c'était agréable après avoir passé une semaine en France et y avoir utilisé deux fois l'aéroport Charles de Gaulle; c'était absolument épouvantable. Mais ça, c'est un autre sujet.

Je me soucie beaucoup de la gouvernance des aéroports. Je crois que c'est parce que de nombreux témoins représentant les groupes auprès desquels vous devez rendre des comptes sont venus nous dire qu'ils ne voulaient pas participer à la gouvernance, tout en se plaignant de la situation. Vous n'êtes pas d'avis qu'une collaboration plus étroite serait avantageuse. Vous avez dit que vous deviez être attentif à ces cinq groupes et que vous deviez leur rendre des comptes. Je parle ici des compagnies aériennes — qui se plaignent que les pistes d'atterrissage à l'aéroport Pearson sont terribles, qu'elles ne sont pas utiles et qu'elles ralentissent la circulation —, des services de sécurité, de l'ACSTA, des services douaniers et des services de l'immigration qui sont, bien entendu, isolés. Vous ne croyez pas qu'il serait avantageux que ces cinq groupes soient représentés à votre conseil?

M. McCoomb : À ma connaissance, ils le sont. Je suis ébahi de vous entendre dire qu'ils ne le sont pas.

Le sénateur Eaton : Ils ne siègent pas à votre conseil d'administration.

M. McCoomb : Permettez-moi de préciser ma pensée. Prenons, par exemple, les transporteurs aériens, un des groupes qui se plaignent beaucoup. M. Ron Dennis siégeait au conseil d'administration original de l'aéroport Pearson. Il vient de prendre sa retraite à titre de chef des opérations d'Air Canada. Sharon Moss a représenté la partie syndicale et a été active au sein des syndicats d'Air Canada. Ils ne sont plus actifs chez nous, mais aujourd'hui, nous avons Marilynne Day-Linton qui occupe la présidence de notre conseil d'administration. Elle était une des têtes dirigeantes du secteur financier de Wardair. Nous avons également eu Terry Nord, l'ancien président de DHL. Patrick Brigham a récemment pris sa retraite de notre conseil. Il est maintenant à la tête d'un exploitant de vols d'affrètement. Ces groupes ont été représentés.

Le sénateur Eaton : Oui, mais ils ne siègent plus à votre conseil.

M. McCoomb : Comme je l'ai dit, Marilynne Day-Linton siège actuellement au conseil.

Le sénateur Eaton : Elle n'y était pas auparavant?

M. McCoomb : Non. Comme je l'ai déjà souligné, le problème, c'est que je dois établir un équilibre pour ce qui est des intérêts de tous ces groupes.

Le sénateur Eaton : D'accord, mais que se passerait-il si les cinq groupes étaient représentés?

M. McCoomb : C'est un secteur très concurrentiel, croyez-moi. Si les représentants de ces groupes sont encore actifs dans leur milieu et que vous vous imaginez qu'ils seront objectifs au conseil, vous vous trompez. Lorsque les gens ne sont plus actifs dans leur secteur, ils ont encore à cœur les connaissances et les intérêts de leur secteur, mais ils ne sont pas tenus d'y être fidèles.

De plus, le conseil est très, très discipliné, et le comité de la gouvernance, présidé par Poonam Puri, doyenne associée de la faculté de droit d'Osgoode, est très soucieux de l'équilibre dont je parlais plus tôt. Ce comité utilise une matrice — je serai heureux de vous informer davantage à ce sujet — qui permet à des environnementalistes de siéger à notre conseil. Les membres doivent provenir de tous les domaines qui sont touchés par les activités de l'aéroport : le droit, l'ingénierie, la planification, et je crois que ces représentants font de l'excellent travail pour défendre de manière objective les intérêts de ces groupes.

Le sénateur Eaton : Je ne suis pas d'accord avec vous. Les conseils d'administration de certaines grandes entreprises comptent parmi leurs membres des gens qui sont encore actifs dans leur secteur. Nous devons convenir que nous ne sommes pas d'accord sur ce point. Je crois simplement qu'il est plus facile pour vous que les gens qui siègent à votre conseil n'aient pas d'autres priorités.

M. McCoomb : Vous avez raison. Une personne qui favorise la compagnie aérienne A au détriment de la compagnie aérienne B ne siégera pas à notre conseil.

Le sénateur Eaton : Nous devrons convenir d'être en désaccord sur ce point. Ma prochaine question est plus concrète. L'an dernier, l'aéroport de Londres a dû interrompre ses activités en raison de la neige. Je ne crois pas que cela se produirait dans votre aéroport — vous avez beaucoup trop d'expérience et êtes trop bien organisés pour cela —, mais il y a des situations que personne ne peut prévoir. Avez-vous un plan en place si, par exemple, deux jours avant Noël les avions ne pouvaient pas décoller de l'aéroport Pearson et que vous aviez 80 000 voyageurs coincés dans vos installations? S'il devait y avoir un autre attentat comme celui du 11 septembre — on ne le souhaite pas — et que les gens étaient coincés dans votre aéroport, avez-vous un plan d'urgence pour répondre à cette situation?

M. McCoomb : C'est déjà arrivé. Je suis passé par là. Il y a deux hivers, pendant la période des Fêtes, il y a eu un attentat suicide aux États-Unis. Des milliers de voyageurs se sont retrouvés coincés dans notre aéroport.

Donc, je peux vous assurer que nous avons établi des plans d'urgence. Cette semaine, nous avons mené une simulation d'exercice sur maquette. Au mois de mai, nous ferons un exercice d'envergure avec les ambulances et des pseudo-victimes. Nous sommes prêts à réagir à toutes les situations courantes susceptibles de survenir. Le problème, ce sont les imprévus, comme celui que vous venez de mentionner. Nous formons nos cadres afin qu'ils puissent y réagir. En fait, nous travaillons à trois éléments importants, et celui-ci en est un. Je suis heureux que vous l'ayez soulevé. Nous soumettons nos employés à des exercices d'adaptation. Ils sont confrontés à des situations imprévues et ils doivent trouver des solutions. Pour ce faire, ils doivent faire preuve de discipline. Cette situation aux États-Unis est un très bon exemple de la façon dont le personnel de l'aéroport a calmé tout le monde et proposé diverses solutions.

La deuxième chose à laquelle nous travaillons avec les cadres, et à leur tour, ils font de même avec leur personnel, c'est le leadership informel. Nous ne contrôlons pas tous les aspects de l'aéroport. Par exemple, nous n'avons aucun contrôle sur la sécurité. Nous ne disons pas à l'ACSTA ce qu'elle doit faire. Nous n'avons aucun contrôle sur les douanes, sur l'immigration ou sur la police. Ce que nous encourageons dans nos formations, c'est le leadership informel; c'est une chose à laquelle nous travaillons avec nos cadres et sur laquelle nous les formons. D'ailleurs, le héros américain est le meilleur exemple de quelqu'un qui fait preuve de leadership informel.

Le sénateur Eaton : Vous voulez parler de Rudy Giuliani, à New York?

M. McCoomb : Non, de Martin Luther King. Il n'a jamais été élu, mais il a réalisé qu'il y avait un problème et a accompli de grandes choses pour le régler. C'est cette technique que nous enseignons à nos cadres.

La troisième chose que nous enseignons à nos cadres, c'est que tous les éléments de l'aéroport sont interreliés. C'est un système. Par exemple, dans le but de régler un problème de sécurité, nous avons décidé d'annuler les bagages à main afin d'accélérer le processus. Malheureusement, cette décision a fait totalement dérailler le système de bagages. Nous devons comprendre cette interconnexion et l'aéroport est prêt à être au centre de celle-ci afin de régler le tout

Le sénateur Eaton : Lorsque les voyageurs sont coincés dans un aéroport, ils veulent avoir accès à suffisamment de nourriture, à des salles de bain fonctionnelles et à un abri. Ces besoins essentiels sont votre responsabilité, n'est-ce pas?

M. McCoomb : Absolument. Nous avons des matelas en mousse et des bouteilles d'eau potable, et les voyageurs peuvent demander de l'aide auprès de notre personnel. C'est essentiel pour nos clients. C'est dans ces moments que l'on peut vraiment leur montrer à quel point ils sont importants pour nous et que l'on se soucie de leur bien-être.

Le sénateur Zimmer : Pardonnez-moi mon retard, monsieur le président.

Habituellement, ma question porte sur les redevances d'atterrissage et les droits environnementaux. Mais, vous êtes dans une position très difficile. Les gens vous blâment pour ces redevances et ces droits, parce que c'est vous qui les percevez. Mais vous ne gardez pas cet argent, n'est-ce pas?

M. McCoomb : L'argent nécessaire à l'exploitation de l'aéroport provient de plusieurs sources, dont les redevances d'atterrissage. Nous percevons ces redevances et utilisons l'argent pour payer les coûts d'exploitation. Il y a aussi les frais d'améliorations aéroportuaires que nous facturons directement aux passagers. Cet argent sert à rembourser notre dette. La troisième source de revenus provient de ce que l'on appelle les frais non aéronautiques : le stationnement et les 128 magasins et restaurants que nous exploitons dans l'aéroport. Nous percevons cet argent et l'utilisons pour payer les factures. Si les revenus sont insuffisants, l'année suivante nous augmentons les redevances d'atterrissage. Si nous avons un surplus, l'année suivante nous les réduisons.

Tout l'argent que nous avons est réinvesti. Nous devons premièrement payer nos coûts. Ensuite, nous mettons de côté un montant raisonnable pour les imprévus, comme le ferait n'importe quelle entreprise prudente. Finalement, nous remettons tous les surplus aux compagnies aériennes par l'entremise d'une réduction des redevances d'atterrissage, en ayant toujours à l'esprit que nos actionnaires, ce sont les voyageurs. C'est une façon de les récompenser.

Le sénateur Zimmer : Je vais prendre une autre tangente. Que peut faire le gouvernement fédéral pour aider la GTAA? À quoi servira cet argent et quelle portion ira à des projets particuliers?

M. McCoomb : Mes homologues n'aimeront certainement pas ma réponse, car plusieurs sont d'avis que l'on ne devrait pas payer de loyer. Je leur ai déjà dit que c'était un peu exagéré. Il est injuste d'imposer des frais à nos clients pour compenser les investissements que nous devons faire dans nos installations, et cela va à l'encontre de notre modèle de gestion. Par exemple, nous sommes le plus gros aéroport au pays. Notre loyer est censé être de 12 p. 100, mais, en réalité, il s'élève à 14 p. 100, car nous devons payer un loyer sur le loyer.

Par exemple, j'ai investi 65 millions de dollars dans le contrôle du glycol. Encore une fois, j'ai la responsabilité envers mes voisins de faire en sorte que l'aéroport n'ait aucune incidence physique sur eux, et nous devons donc protéger Etobicoke Creek. Nous avons dépensé 65 millions de dollars pour contrôler les produits chimiques que nous utilisons pour déglacer les aéronefs durant l'hiver. N'importe quelle autre entreprise qui ferait un tel investissement obtiendrait un crédit d'impôt ou recevrait des félicitations. Pour ma part, je dois verser 14 p. 100 au gouvernement, ce qui fausse notre modèle d'affaires. Je crois qu'il est tout à fait juste et raisonnable que le public obtienne un rendement sur l'investissement qu'il a fait par le passé ou une compensation pour le terrain qu'on nous a donné, mais je crois aussi que cette mesure n'est pas raisonnable et qu'elle fausse nos pratiques d'affaires. On ne m'encourage pas à investir dans l'environnement, alors qu'on devrait le faire — du moins le gouvernement ne devrait pas me décourager en ce sens. J'aimerais vraiment que le gouvernement revoit le modèle de loyer pour mettre fin aux versements que l'aéroport a dû effectuer.

La situation est particulièrement difficile à Toronto. En effet, tous les autres aéroports se sont fait donner leurs actifs et ont ensuite commencé leurs activités. À Toronto, on nous a donné les deux tiers de nos actifs. Le terminal 3 a déjà été confié à une entreprise du secteur privé. Mon patron de l'époque a dû racheter ces installations pour assurer un fonctionnement rationnel de l'aéroport. Nous payons pour un investissement que le gouvernement du Canada a choisi de ne pas faire et qui a été confié à quelqu'un d'autre. C'est pour cette raison que nous ne sommes pas concurrentiels et que nous ne sont pas capables, par exemple, de faire obstacle à Buffalo aussi efficacement que nous le pourrions.

Je vous demande d'être équitables. Je ne vous demande pas de cesser de collecter un loyer, mais de cesser de le faire d'une manière qui n'est pas logique et qui fausse notre modèle d'affaires.

Le sénateur Zimmer : Merci.

Le président : Avant de donner la parole au sénateur Martin, pourriez-vous reparler du loyer que vous payez sur le loyer?

M. McCoomb : Oui. Plusieurs parmi vous sont originaires de localités dotées de petits aéroports. Il est juste que les petits aéroports paient un loyer inférieur au mien. Il y a des économies d'échelle à Toronto. Toronto peut le faire parce que l'aéroport est plus gros, mais les coûts supplémentaires y sont nombreux également, et je ferai des commentaires à ce sujet si cette question vous intéresse. Toutefois, dans le cas de Toronto, je dois payer 12 p. 100 du loyer au gouvernement. Où vais-je obtenir cet argent? Je vais demander aux compagnies aériennes qui, à leur tour, vont demander aux voyageurs. Les voyageurs doivent avancer l'argent. Je demande 12 p. 100 aux compagnies aériennes. Il s'agit d'un revenu, mais je dois payer un loyer sur le revenu. Je dois payer un loyer sur les 12 p. 100. Comprenez-vous ce que je dis? Ce sont elles qui payent. Cette formule maladroite de calcul du loyer repose sur le revenu et je dois payer sur le revenu lui-même. Lorsque vous faites le calcul total, vous arrivez à 14 p. 100. J'espère que vous avez bien suivi la logique.

Le sénateur Martin : La semaine dernière, j'ai visité l'aéroport de Vancouver.

M. McCoomb : C'est un bel endroit, soit dit en passant.

Le sénateur Martin : Oui. Je passe beaucoup de temps à Toronto également. Certaines choses sont ressorties qui, à mon avis, étaient utiles à notre étude. Je voulais vous poser les mêmes questions au sujet de votre vision stratégique et de la vision globale pour l'aéroport. À Vancouver, j'ai été très impressionnée par le thème de la côte Ouest, qui guide toutes les décisions prises. Il s'agit d'un plan de 50 ans, qui prévoit une réduction de 30 p. 100 de la consommation d'énergie; l'empreinte est réduite. Toutes ces mesures entraînent des économies qui compensent ensuite les coûts qui peuvent se répercuter sur la facture des clients. Il y a aussi la diversification des sources de revenu à l'intérieur de l'aéroport.

Je sais que Toronto est un important pôle d'échanges. Comme le disait le sénateur Eaton, nous passons tous du temps à cet endroit. Je suis impressionnée par la diversité qu'on y trouve, mais pourriez-vous nous parler de la vision et de ce qui guide cette vision à long terme, ainsi que de la diversification des sources de revenu et des choses que vous faites pour faciliter le fonctionnement de l'aéroport?

M. McCoomb : Certainement. Je félicite Larry Berg et l'aéroport de Vancouver pour leur travail magnifique. Je suis un peu jaloux du thème retenu. Je suis jaloux également du thème de Calgary, de Québec et de Montréal.

Un des défis qui se posent à Toronto — et nous avons réfléchi à cette question précise —, c'est qu'il faudrait un sentiment de présence ou d'appartenance à l'égard de l'aéroport. Nous avons fait appel à la même entreprise de Vancouver, et à Stanis Smith, pour nous aider à ce chapitre. Nous nous penchons actuellement sur cette question, à savoir ce qu'il faut faire de plus pour créer un sentiment d'appartenance. Je suis fier de Toronto. C'est une ville extraordinairement diversifiée. C'est le monde entier dans une ville. Vous marchez dans la rue et vous êtes fasciné par cet endroit. Nous devons saisir cela et nous y travaillons.

J'en arrive à ce que vous dites au sujet de la création de revenu, parce que cet élément peut faire partie de toute l'expérience. Nous considérons nos passagers de différentes façons. En fait, nous les classons en cinq groupes différents. Si je devais vous faire passer le test, vous feriez probablement partie des « voyageurs à cravate ». Comme vous l'avez dit, la plupart d'entre vous prennent souvent l'avion. Vous devez passer par les aéroports et vous les connaissez bien. Vous voulez vous acquitter rapidement des formalités, utiliser le salon d'attente et avoir un endroit calme pour travailler. Vous formez un groupe dont nous devons nous occuper. Il y a aussi les voyageurs qui recherchent des expériences; ce sont les gens qui aiment flâner dans les boutiques, qui voyagent peut-être seulement une ou deux fois par année. Il y a également les voyageurs placides; ce sont les jeunes avec des écouteurs dans les oreilles, qui dorment sur les bancs tout le temps. Ils ne dépensent aucun argent à l'aéroport. Ils voyagent avec un sac à dos.

Il faut comprendre qu'un aéroport comme celui de Toronto, qui est immense, doit répondre à des besoins très variés. Certains demandent pourquoi on ne fait pas telle ou telle chose. La réponse, c'est que nous essayons de plaire à tout le monde et les besoins sont nombreux.

À Toronto, depuis mon entrée en fonction, nous avons créé un service commercial. J'ai engagé Pamela Griffith- Jones comme chef du développement commercial. Elle travaillait auparavant pour Canadian Tire et avait une solide expérience de la vente au détail. Nous faisons cet exercice thématique pour créer un sentiment d'appartenance. Les gens ne doivent pas appréhender d'aller à l'aéroport. On peut en faire une expérience plaisante. On peut le faire d'une manière positive et générer des revenus en dehors de l'activité aéronautique. Ces revenus contribuent à compenser les redevances d'atterrissage, et les voyageurs paient moins si nous obtenons davantage des boutiques et des restaurants, et cetera.

Je le répète, je crois que l'aéroport de Vancouver est exemplaire et a fait du bon travail. À sa propre façon, il réussit à s'afficher comme une porte d'entrée de la côte Ouest et il a fait un excellent boulot.

Le sénateur Martin : Mon autre question porte sur l'innovation faite à l'aéroport. On a mentionné entre autres les formalités douanières informatisées, une technologie mise à l'essai à Vancouver. Est-ce qu'elle sera utilisée ou l'est-elle présentement? Je ne suis pas allée au terminal international.

M. McCoomb : Nous voyons ici un excellent exemple de coopération entre le gouvernement et le secteur privé. L'équipe de Larry a proposé une brillante idée : vous présentez votre passeport à une machine, qui le lit et fait tout ce que l'agent des douanes ferait, si bien que lorsque vous arrivez devant l'agent, tout est fait. Vous réduisez ainsi le temps d'intervention de l'agent, et l'aéroport en retire des avantages puisqu'il n'a pas à consacrer autant d'espace à cette tâche. Les passagers en retirent des avantages parce que les formalités sont plus rapides. Les services des douanes et de l'immigration en retirent des avantages parce que leurs effectifs sont utilisés plus efficacement. C'est une situation gagnante pour tout le monde.

Je dois dire sans ambages que les gens chargés de la protection de la frontière canadienne ont été superbes. Vous devriez vous servir de personnes comme Luc Portelance et Cathy Monroe pour montrer ce que sont des bureaucrates modernes qui comprennent parfaitement qu'ils ont une mission. Nous comprenons leur mission. Il s'agit de protéger leur pays. Toutefois, on peut le faire avec un véritable sens du service et, que Dieu les bénisse, ils ont apporté un soutien extraordinaire à Larry. Nous allons suivre cet exemple. Nous travaillons maintenant avec Montréal pour répandre cette mentalité partout au pays. Voilà une excellente idée et un exemple parfait de la façon dont la collaboration entre le gouvernement et le secteur privé peut produire des choses étonnantes dans l'intérêt de tous.

Le sénateur Martin : Il y a là une excellente possibilité pour le tourisme, et je suis certaine que vous avez eu de bonnes discussions à ce sujet avec vos intervenants. Je me demande ce que le gouvernement fédéral peut faire pour rassembler ces morceaux afin que nous puissions tirer parti du potentiel touristique, que ce soit en créant ce sentiment d'appartenance, puisque c'est la première impression du Canada qu'ont les visiteurs. Alors, quelles lacunes avez-vous cernées que pourrait combler précisément le gouvernement fédéral?

M. McCoomb : Cette idée de première et dernière impression est très vraie. La première impression que les gens ont du Canada, c'est l'aéroport de Toronto ou l'aéroport de Vancouver — ensemble, nous accueillons probablement les deux tiers de tous les voyageurs —, et c'est aussi la dernière impression qu'ils auront. Nous voulons donc qu'elle soit positive.

Si vous prenez un vol international et passez par Toronto, lorsque vous descendez de l'avion et que vous arrivez dans le grand hall d'accueil, regardez à votre droite. Il y a là un vrai squelette de dinosaure qui fait la promotion du Musée royal de l'Ontario. Je crois que Calgary fait une excellente promotion de ses attractions. À l'heure actuelle, nous sommes en train de mettre sur pied une boutique de musée à l'aéroport qui nous permettra non seulement de générer des revenus, mais aussi de promouvoir les musées de Toronto. La boutique ouvrira ses portes très bientôt. Nous pouvons faire toutes sortes de choses en partenariat. Je vais maintenant demander à mon collègue, M. Lennox, de parler des questions frontalières.

Toby Lennox, vice-président, Affaires générales et Communication d'entreprise, Autorité aéroportuaire du Grand Toronto : Merci de votre temps.

L'une des choses que peut faire le gouvernement du Canada, c'est de promouvoir davantage l'efficacité des modalités frontalières.

Madame le sénateur, vous avez parlé d'automatisation. Les progrès technologiques offrent d'énormes possibilités pour accélérer le traitement des voyageurs. En ce qui a trait au tourisme, en faisant la promotion du rôle des aéroports points d'accès, on accroît les arrivées au Canada et les départs du Canada, et ce, dans l'intérêt de tout le monde. Par exemple, si vous faites la correspondance Beijing-Toronto et Toronto-Sao Paulo, vous augmentez le trafic sur ces routes, ce qui signifie également que Toronto et le Canada deviennent davantage des destinations.

Un de nos collègues est allé en Chine avec la Commission canadienne du tourisme, et nous avons rencontré le ministre du Tourisme de Terre-Neuve. Il a dit cette chose intéressante : « Je sais que je ne vais pas accueillir un grand nombre de visiteurs chinois, mais si Toronto n'est pas un aéroport point d'accès, je n'en accueillerai aucun, parce que les gens ne feront pas une correspondance à New York ou à Chicago pour se rendre à Terre-Neuve. »

C'est là le rôle d'un aéroport point d'accès, et il s'agit de promouvoir ce point d'accès en accommodant les passagers et en assurant leur sécurité. Nous ferons tout ce que nous pourrons, ce qui revient à ce que M. McCoomb disait : adopter un thème, créer un endroit accueillant, donner ce sentiment d'espace, faire de Toronto l'endroit où les gens veulent transiter. Si Toronto devient un aéroport point d'accès, l'accès à toutes les régions du Canada augmentera. Je m'inquiète que, d'un point de vue touristique, nous ne reconnaissions pas cette occasion unique qui se présente à nous.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci beaucoup de votre présence et bienvenue au comité. J'ai très peu de connaissances dans le transport; je suis un « rookie » sur ce comité. Mon intervention ira dans la même direction que celle du sénateur Martin, soit la vision de l'industrie aéroportuaire au Canada.

Corrigez-moi si je me trompe, mais il y a des liens importants dans le développement des aéroports les uns avec les autres; les aéroports forment un réseau. J'aimerais connaître la vision que vous avez de Montréal. Montréal a vécu des épisodes très difficiles ces dernières années. Pensons seulement au débat entre Mirabel et Montréal qui a eu des effets très négatifs. Plusieurs personnes remettent en question la décision politique d'avoir construit Mirabel, décision qui a eu beaucoup d'impacts sur l'environnement social, comme l'extradition des producteurs agricoles.

J'aimerais que vous me donniez votre perception de la compétition ou de la concurrence qu'il y a eue entre Montréal et Toronto dans le développement parallèle des deux aéroports. Souvent, la vision qu'on a de Montréal, c'est que Montréal a souffert du développement de Toronto, qui a été un peu la raison de la stagnation de Montréal. J'aimerais connaître votre perception à ce sujet.

[Traduction]

M. McCoomb : À mon avis, il ne fait aucun doute que Montréal a souffert de la division des deux aéroports. On avait décidé alors de diriger le trafic international à un aéroport, et les vols frontaliers et intérieurs à un autre, et le trafic en correspondance était difficile.

À Toronto, les plans étaient les mêmes. Les terrains de Pickering ont été acquis, sauf que les plans n'ont pas été poursuivis. Les terrains ont été retenus. On a payé le même prix social. C'est encore là. La prise de décisions à l'aéroport de Pearson a stagné pendant longtemps, puis à la fin des années 1980, on a enfin décidé de retenir les terrains de Pickering et de redévelopper l'aéroport Pearson au maximum. Toutefois, c'était une installation unifiée et les correspondances étaient beaucoup plus faciles qu'à Montréal. Je dois dire, au grand mérite de Jim Cherry, que, lorsqu'il est entré en fonction à Montréal, il a pris la difficile décision de regrouper les activités et a réussi de façon extraordinaire à régler les problèmes d'installation de Dorval pour intégrer correctement les vols frontaliers. Les choses fonctionnent très bien maintenant. En fait, au grand mérite de Jim — et nous sommes des concurrents —, j'ai une croissance de 5 p. 100, et lui, de 6 p. 100. Tant mieux pour lui. Je ferai de mon mieux pour me rattraper. L'aéroport de Montréal fonctionne maintenant très bien. C'est fantastique que Montréal ait gardé Mirabel comme carte maîtresse. À un moment donné, il se pourrait très bien qu'en raison des incidences physiques que les aéroports ont sur les collectivités environnantes, une décision difficile soit prise, peut-être dans 20 ou 30 ans, pour repenser l'expérience de Mirabel. Nous sommes d'ailleurs convaincus que nous aurons peut-être à envisager l'option Pickering à un moment donné. Dans le contexte de la mondialisation, les aéroports sont devenus, au cours des 20 dernières années, des instruments particuliers de mesure économique.

[Français]

M. Lennox : Vous parlez de la compétition entre les aéroports. Ce qu'il est très important de savoir, c'est que notre compétition n'est pas nécessairement Montréal, mais c'est plutôt les autres portes d'entrée nord-américaines telles que Chicago, New York et Miami. Voilà ce qu'il est important de savoir.

[Traduction]

Il faut reconnaître que la concurrence ne vient pas nécessairement de Montréal, de Winnipeg, de Timmins ou de Sudbury.

Ce que nous essayons de faire, et ce qui sera le plus avantageux pour les Canadiens, c'est d'être capables d'agir et de faire obstacle à la concurrence qui viendra de New York et de Chicago.

À titre d'exemple, j'ai pris un avion en partance de la Nouvelle-Orléans dimanche dernier. Les gens devant moi faisaient le vol Nouvelle-Orléans-Toronto, Toronto-Francfort, Francfort-Naples. Ils n'étaient pas conscients d'avoir choisi de transiter par Toronto. C'était tout simplement plus facile pour eux de prendre cette correspondance. Ils n'allaient pas passer par Miami parce que leur correspondance n'était pas possible. New York était trop compliqué pour eux. Si c'est ce que nous cherchons, et M. McCoomb a dit comment la politique nationale des aéroports nous avait donné l'avantage de l'infrastructure, si bien que nous avons maintenant cette infrastructure fantastique... Rappelez-vous que les Américains ne peuvent pas poursuivre les investissements qu'ils ont faits, alors que ces investissements ont déjà été réalisés au Canada. Le temps est maintenant arrivé de tirer profit des politiques qui ont été mises en place ainsi que de nos capacités. Nous avons besoin d'une politique gouvernementale à cette fin, mais nous croyons qu'un énorme potentiel attend d'être exploité.

[Français]

Donc, la compétition entre les aéroports au Canada dépend du rôle que chaque aéroport joue dans sa région ou sa communauté.

[Traduction]

Le sénateur Eaton : Monsieur Lennox, vous avez parlé de ces personnes qui prenaient toutes ces correspondances. Est-ce que les gens hésitent à se soumettre aux procédures d'immigration américaines, même en transit, à cause des exigences en matière de sécurité qu'imposent les États-Unis? Est-ce difficile de passer par Miami ou par New York tandis que le Canada est un endroit de transit plus accueillant?

M. Lennox : Tout à fait. Il y a aussi d'autres facteurs auxquels vous n'avez peut-être pas songé. Le temps de vol entre l'Asie et l'Amérique du Sud est plus court en passant par Toronto que par tout autre aéroport en Amérique du Nord. Les compagnies aériennes veulent les temps de vol et d'opération les plus courts, et c'est ce qu'offre Toronto. Bien sûr, les complications supplémentaires que les Américains ont choisi d'imposer rendent les autres aéroports attrayants.

Je dirais que les Américains ont le plein pouvoir et le droit de traiter leurs frontières comme bon leur semble. À notre avis, cela nous ouvre des portes. Nous sommes déjà la première destination internationale pour des villes américaines qui pourraient vous surprendre. Par exemple, nous sommes la première destination internationale à partir de Houston, qui offre des correspondances.

Soit dit en passant, Air Canada, dont il faut reconnaître les mérites, offre un excellent service en comparaison à ce que vous recevez aux États-Unis. Il s'agit d'une excellente compagnie aérienne, et nous devons faire tout ce que nous pouvons pour l'appuyer.

Toutefois, je crois que vous avez raison, madame le sénateur. Examinons ces possibilités. Tirons parti de ces possibilités et des entretiens que nous avons avec l'ASFC et Transports Canada. Ils ont été très utiles à cet égard.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Vous avez dit qu'au fond, la compétition n'est pas tellement entre les aéroports canadiens, mais surtout avec les aéroports américains.

Comment voyez-vous ce rôle de partenariat ou de complémentarité entre les aéroports canadiens pour affronter cette compétitivité avec les aéroports américains? Est-ce que le gouvernement fédéral, dans ce cadre, aurait un rôle à jouer? Ma question est peut-être très large.

[Traduction]

M. McCoomb : Non, elle n'est pas trop large. Il y a une concurrence plus immédiate à l'heure actuelle, et je parle certainement au nom de mon collègue Jim Cherry, de Montréal, qui doit faire face à deux concurrents, Burlington et Plattsburg, qui se trouvent tout juste à côté et dont l'un s'annonce comme le « deuxième aéroport de Montréal ».

Vous vous apprêtez peut-être à le faire, mais j'avais prévu que vous poseriez des questions sur ce que représente Buffalo pour nous, ce que représente Plattsburg pour M. Cherry, ou Bellingham pour Vancouver.

Dans mon cas, l'attrait de l'aéroport de Buffalo et la concurrence qu'il nous livre sont fortement liés à la présence de transporteurs américains à faibles coûts. Cela n'a rien à voir avec l'aéroport de Buffalo. Comprenez-moi bien : mon ami Bill dirige de belles installations à Buffalo. C'est un excellent aéroport. Toutefois, les gens de Toronto ne vont pas là pour l'aéroport comme tel. Ils y vont à cause de JetBlue, Southwest et AirTran, à cause de l'excellent service et des prix offerts à Buffalo, des prix si bas qu'il vaut la peine de conduire jusque-là, de traverser la frontière, et cetera.

Pour que nous soyons plus concurrentiels, mon service de marketing et moi avons fait des démarches auprès des transporteurs américains à faibles coûts et nous leur avons demandé ce qui se passait, pourquoi ils ne venaient pas à Toronto. Ils m'ont répondu que leur proposition de valeur repose non pas sur une concurrence directe avec Air Canada, United Airlines ou American Airlines, les transporteurs traditionnels, mais plutôt sur le fait de stimuler le trafic. Ils cherchent à embarquer dans leurs avions des gens qui, autrement, ne voyageraient pas ou qui prendraient leur voiture. Ils proposent donc, pour 95 $, des vols Buffalo-Floride, ou peu importe l'endroit, ou encore de vous amener à New York pour la fin de semaine. Ils stimulent leur trafic.

Ils ont dit qu'en raison de la situation fiscale — et je sais que vous avez déjà entendu tout cela, parce que j'ai lu les témoignages qui vous ont été présentés ad nauseam sur la structure fiscale et les plaintes qu'elle suscite —, après calcul fait, il faudrait qu'ils abandonnent leur proposition de valeur s'ils venaient à Toronto. Je leur ai dit — et nous leur présentons de belles analyses de rentabilité, toutes dans des reliures, pour appuyer nos arguments — qu'ils vont faire de l'argent en dépit de la situation fiscale. À leur grand mérite, ils s'en tiennent à leurs affaires. Ce sont des entreprises disciplinées. Leur proposition de valeur est le pivot de leur stratégie d'affaires, comme c'est aussi notre cas. Je suis même allé rencontrer les représentants d'une compagnie aérienne — que je ne nommerai pas — dans le sud des États- Unis. Nous sommes arrivés si près d'une entente que j'allais dîner avec les employés que l'entreprise allait affecter à Toronto. Ils sont venus à Toronto avec des rubans à mesurer pour vérifier les salles dans lesquelles ils allaient aménager, mais, à la dernière minute, ils ont décidé de ne pas venir, en soutenant que ce serait trop coûteux. Toutefois, cette expérience m'a montré qu'il en faudrait peut-être peu pour que nous puissions être plus compétitifs sur ce plan.

Encore une fois, que peut faire le gouvernement? Je proposerais, dans le cadre de l'examen de la politique, qu'on se demande si tous ces frais sont dans le meilleur intérêt de tous. Si c'est le cas, soit, mais il semble bien qu'ils nous empêchent de ramener dans nos collectivités ce trafic, toutes les chambres d'hôtel, les emplois, les taxis et toutes les choses connexes. Je vous ai dit qu'environ 138 000 personnes à Toronto peuvent établir un lien entre leur emploi et l'aéroport, en tout ou en partie, et qu'il faut garder cette richesse dans la région de Toronto.

En même temps, je suis conscient que c'est un milieu compétitif. Je me suis vanté en disant que Toronto recevait le trafic de Houston à destination de la France. C'est un milieu compétitif; c'est ce que c'est.

Vous m'avez demandé, je crois, ce que j'aimerais voir. Je le répète, j'aimerais tout particulièrement qu'on se demande s'il est juste et raisonnable d'imposer ce loyer en fonction d'un investissement que le secteur public n'a pas fait.

Le président : La réponse du témoin n'était pas une thèse, mais elle a grugé votre temps, monsieur le sénateur. Je vais donner la parole au sénateur Greene.

M. McCoomb : Ma thèse de doctorat faisait deux volumes. Vous avez eu de la chance ici.

Le sénateur Greene : J'ai une question courte et précise. Lorsque vous fixez ou réduisez des frais ou que vous songez à d'autres, comme des frais liés à l'environnement, devez-vous demander l'approbation de quelqu'un?

M. McCoomb : Nous avons un comité consultatif qui réunit les compagnies aériennes et qui est chargé d'examiner tous les tarifs et les frais. Elles peuvent s'opposer et faire appliquer une période de répit de neuf mois à un an. Au bout du compte, c'est à l'aéroport de prendre les décisions, d'en subir les conséquences ou de récolter les bénéfices. C'est un milieu compétitif. Vous abusez des tarifs et des frais à vos propres risques.

M. Lennox : Ce qui complique l'établissement des frais, c'est que nous vendons nos obligations sur le marché de la dette publique, et nous sommes donc un émetteur assujetti aux lois sur les valeurs mobilières. Notre cotation et, par conséquent, notre dette et les intérêts que nous payons sont constamment évalués par des agences de notation. La cotation de nos obligations repose d'abord et avant tout sur l'autonomie que nous avons concernant l'établissement des tarifs. Cela signifie que c'est très important pour nos investisseurs, qui nous accordent alors un très bas taux d'intérêt. Nous avons réussi à obtenir du financement alors que d'autres échouent. Il n'y a pas de mécanisme de réglementation. Vous pouvez suivre une voie ou l'autre. Vous pouvez discuter longuement, mais la question qui revient, c'est que les détenteurs de nos obligations, de qui dépend notre dette, aiment le système qui est en place. Par conséquent, nous contractons une dette à un taux très avantageux. Au plus creux de la crise de liquidité de 2008-2009, nous étions toujours en mesure d'obtenir de l'argent à un taux favorable.

M. McCoomb : Personne ne s'est opposé à notre barème de frais, puisque nous avons réduit nos frais au cours des cinq dernières années. Durant une année particulière, cette réduction a été de près de 10 p. 100. Comme vous pouvez le comprendre, nous n'avons pas connu ce problème. J'espère que nous ne le connaîtrons jamais.

Le sénateur MacDonald : Bonjour, messieurs. J'ai quelques questions à vous poser. Premièrement, vous avez parlé des loyers. Je remarque qu'en 2010, il y a eu une diminution de 20,3 millions de dollars par rapport à 2009, en raison d'un changement dans la formule. Je crois qu'il est juste de dire que l'aéroport de Toronto est le joyau des aéroports du pays. Tous ces aéroports ont besoin d'un certain volume pour générer un revenu. Le revenu est proportionnel au volume, et vous êtes de loin l'aéroport le plus achalandé. Avec cette réduction de loyer en 2010, vous avez enregistré un revenu de 1,12 milliard de dollars et des dépenses de 1,115 milliard de dollars. Or, malgré un revenu de plus de 1 milliard de dollars et une réduction de loyer de 20 millions de dollars, vous avez tout de même affiché un déficit de fonctionnement de 3,8 millions de dollars. Les déficits de fonctionnement sont-ils courants? Ou est-ce l'exception? Pourquoi y aurait-il un déficit cette année?

M. McCoomb : Je le répète, nous sommes un organisme sans capital-actions, sans but lucratif et, comme j'aime le souligner, sans but déficitaire non plus. Avec tout le respect que je vous dois, quand une corporation de plus de 1,2 milliard de dollars s'en tire dans les 3 millions de dollars, c'est un assez bon bilan.

Le sénateur MacDonald : Je comprends cela, mais 1,1 milliard de dollars, c'est encore beaucoup d'argent. J'aimerais simplement savoir combien de fois...

M. McCoomb : Si vous avez sous-estimé vos frais, vous pouvez les ajuster durant les années subséquentes si vous le voulez. Vous pouvez obtenir un surplus et l'affecter à la réduction des frais au cours des années suivantes. Il faut considérer la dette dans une approche comptable globale et comprendre que c'est un peu comme une hypothèque, que nous choisissons de rembourser de différentes manières au fil du temps.

Le sénateur MacDonald : Y a-t-il eu des circonstances atténuantes cette année?

M. McCoomb : Pas que je sache. Soit dit en passant, la gestion de Toronto est passée des mains du gouvernement à celles du secteur privé et, du même coup, notre fin d'année est passée d'avril à décembre, ce qui a de quoi réjouir. L'horreur pour un gestionnaire d'aéroport, c'était de travailler dans le secteur public, où les trois premiers mois sont des mois d'hiver. En effet, l'hiver est un jeu de hasard. Tout dépend du volume de neige que nous aurons, du mauvais temps qui s'abattra. C'est incroyablement coûteux. Ces épisodes de neige, pour nous, représentent des millions de dollars. C'était fantastique lorsque le 31 décembre est devenu notre fin d'année; en effet, mon exercice commence maintenant l'hiver et je sais quelle est ma situation pour le reste de l'année et si je dois essayer ou non d'équilibrer les livres en réduisant les dépenses au cours des neuf prochains mois.

À ma connaissance, nous avons eu des hivers raisonnables. Nous avons généralement 12 épisodes importants. Aucun événement particulier qui se serait produit au cours des dernières années ne me vient à l'esprit.

M. Lennox : Je crois que ce dont vous parlez — et nous devons être prudents ici —, c'est la façon dont nous devons présenter nos comptes selon les principes généralement reconnus en matière de protection des renseignements personnels. Par conséquent, en raison des effets combinés de l'amortissement et de l'appréciation, nous commencerons à voir une perte comptable dans nos livres. Comme nous sommes une corporation à but non lucratif et que nous facturons les transporteurs aériens selon les liquidités — revenu entrant, revenu sortant —, vous voyez l'effet de l'amortissement et de la dépréciation. Je suis avocat spécialisé en recouvrement, et non pas comptable, alors je m'aventure dans des eaux profondes, mais vous verrez que les autorités aéroportuaires ont des pertes parce qu'il s'agit d'organismes à but non lucratif qui ont aussi un amortissement et une dépréciation.

M. McCoomb : Nous n'allons pas entrer dans des questions de comptabilité, parce que mon directeur financier serait furieux contre moi et me rappellerait que j'ai la responsabilité fiduciaire de me taire à propos de ces choses, lorsqu'on doit être un prêteur équitable pour tous. Je répète que nous sommes une corporation sans capital-actions et sans but lucratif. Les sommes excédentaires vont dans les surplus, servent à réduire la dette ou à consentir des réductions de tarif équitables aux compagnies aériennes. Nous essayons, chaque année, de répartir également l'argent dans ces trois secteurs, à long terme.

Le sénateur MacDonald : Je ne voulais pas vous critiquer. Je voulais plutôt souligner les circonstances dans lesquelles se trouvent tous les aéroports. Vous êtes en tête du peloton, mais ce n'est pas le cas pour la plupart des aéroports.

M. McCoomb : C'est exact. Soit dit en passant, la situation devient extrêmement difficile pour les petits aéroports. J'ai une certaine latitude. J'ai 1 100 employés. Cela s'applique à de nombreux autres aspects de la politique gouvernementale. Au nom de mes collègues des plus petits aéroports qui rendent des services inestimables, je dois dire que si vous prenez quelque chose comme les systèmes de gestion de la sécurité, c'est une idée fantastique. Je peux vous parler des choses extraordinaires que nous faisons avec cela. J'ai le personnel pour le faire. J'ai les moyens de le faire. Toutefois, pour les petits aéroports, c'est un défi sans cesse croissant lorsque le personnel devient de moins en moins nombreux. Vous avez tout à fait raison; c'est plus difficile, à certains égards, de diriger un petit aéroport que l'aéroport Pearson.

Le sénateur MacDonald : Proposeriez-vous des changements au système tel qu'il est à l'heure actuelle?

M. McCoomb : Je ne veux pas parler au nom des petits aéroports, mais l'ancien système de transport comporte des avantages également. J'en ai fait partie pendant de nombreuses années. Nous avions notamment un groupe technique à Ottawa qui offrait un soutien technique aux petits aéroports. Nous pouvions amener les gens à cet endroit et les former. Nous mettions quelqu'un à Tuktoyaktuk, puis nous l'affections à Yellowknife, ensuite à Charlottetown, à Saskatoon, et cetera. Les gens avançaient dans leur carrière et étaient formés. Encore une fois, je ne veux pas parler au nom des petits aéroports, mais ce genre de soutien pour des activités semblables, que les petits aéroports ont encore plus de mal à effectuer en raison de leur taille, serait probablement bien accueilli. C'est un bon point.

M. Lennox : Lorsqu'il y a eu l'incident du terroriste aux sous-vêtements, il y a un certain temps, je me suis entretenu avec notre collègue Bill Restall, le président du Conseil des aéroports du Canada. Il dirige l'aéroport de Saskatoon, qui est merveilleux. L'une des choses que nous devons reconnaître, c'est qu'il faut différencier les aéroports en fonction de leur taille et de leur rôle. Il m'a expliqué que les 25 ou 30 personnes qui travaillent à l'aéroport collaborent très étroitement avec l'ACSTA. Ces gens connaissent tout le monde. Les avantages qu'ils ont sont différents de ceux qu'offre un grand aéroport. Lorsque des décisions sont prises, de façon uniforme partout au pays, il y a un effet de distorsion. Mon collègue a l'avantage de pouvoir intervenir dans une situation d'urgence d'une manière bien différente par rapport à nous, simplement en raison de la taille de l'aéroport.

Encore une fois, cela revient à dire que Pearson et Saskatoon ne sont pas pareils, mais Saskatoon et Prince-Albert ne sont pas pareils non plus. Sydney n'est pas comme Halifax. Il faut faire attention à la façon dont nous définissons ces choses, mais je soupçonne que vous serez en mesure de tirer profit de votre taille à certains endroits et de compenser certains problèmes.

Le président : Merci beaucoup, monsieur McCoomb. Monsieur Lennox, j'aimerais vous remercier pour votre exposé.

J'aimerais rappeler aux gens qui nous écoutent et aux honorables sénateurs que, demain soir, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications entreprendra son étude du projet de loi S-4, Loi améliorant la sécurité ferroviaire.

[Français]

Nous commencerons cette étude en recevant l'honorable Denis Lebel, ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités. Il sera accompagné de deux hauts fonctionnaires de Transports Canada.

[Traduction]

Veuillez noter que la séance débutera à 18 h 30, puisque le ministre sera parmi nous pendant une demi-heure.

(La séance est levée.)


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