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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 1 - Témoignages du 26 novembre 2013


OTTAWA, le mardi 26 novembre 2013

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujaujourd'hui, à 9 h 33, pour examiner les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières Nations, des Inuits et des Métis et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada et pour en faire rapport (sujet : le logement).

Le sénateur Dennis Glen Patterson (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour, mesdames et messieurs. Je souhaite la bienvenue à tous les honorables sénateurs et à tous les membres du public qui suivent la séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur la chaîne CPAC ou sur le Web. Je m'appelle Dennis Patterson, je viens du Nunavut, et je préside le comité. Nous avons pour mandat d'examiner les dispositions législatives et les questions relatives aux peuples autochtones du Canada dans leur ensemble. Pour bien comprendre les préoccupations des Autochtones, nous invitons régulièrement des témoins qui peuvent nous éclairer sur des sujets d'importance pour eux. Ces séances sont précieuses pour le comité, car elles l'aident à décider des études que le comité effectuera pour mieux servir les intérêts des Autochtones. Nos témoins d'aujourd'hui ont été invités pour nous brosser un tableau d'ensemble du financement de l'infrastructure dans les réserves, notamment le logement, les écoles et d'autres projets d'immobilisations.

Nous entendrons ce matin des responsables de deux ministères, soit le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord et la Société canadienne d'hypothèques et de logement qui, elle, n'est peut-être pas un ministère. Avant de donner la parole à nos témoins, j'aimerais demander à tous les membres du comité de bien vouloir se présenter.

La sénatrice Dyck : Lillian Dyck, de la Saskatchewan — la « nation des Rider ».

Le sénateur Moore : Wilfred Moore, sénateur libéral de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Raine : Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.

Le sénateur Meredith : Don Meredith, de Toronto, grand fan de nos Argos.

La sénatrice Beyak : Lynn Beyak, du nord-ouest de l'Ontario.

La sénatrice Champagne : Andrée Champagne, du Québec.

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

Le président : Merci. Mesdames et messieurs les membres du comité, accueillons M. Karl Carisse, directeur principal, Direction de l'innovation et de transformations politiques majeures, et Tara Hutchinson, analyste principale en matière de politiques, tous deux du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord du Canada. Se joignent à eux Debra Darke, vice-présidente, Activités régionales et aide au logement, et Jeannie Dempster, directrice, Division de la coordination des politiques stratégiques, qui, elles, représentent la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Je crois qu'il a été convenu que les témoins présenteront leurs énoncés et que nous passerons ensuite à l'étape des questions.

Nous vous remercions tous de nous rendre visite aujourd'hui pour nous faire part de votre expertise; il ne fait aucun doute que les membres auront des questions pour vous plus tard. Allez-y, je vous en prie, monsieur Carisse.

[Français]

Karl Carisse, directeur principal, Direction de l'innovation et de transformations politiques majeures, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, je tiens tout d'abord à vous remercier de l'occasion que vous me donnez de m'adresser à vous aujourd'hui pour parler du logement dans les communautés des Premières Nations.

L'accès des logements sécuritaires abordables est essentiel à l'amélioration de la situation économique et sociale des communautés des Premières Nations ainsi que pour assurer leur santé et leur développement durable.

[Traduction]

La construction et la gestion des logements dans les terres de réserve relèvent de la responsabilité des Premières Nations elles-mêmes, avec le soutien offert par le gouvernement du Canada sous forme de différents programmes et initiatives. Ce dernier prévoit un investissement annuel à l'appui des besoins des résidants dans les réserves par l'intermédiaire de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Le gouvernement fédéral investit actuellement environ 303 millions de dollars par année pour répondre aux besoins en logement dans les réserves : 146 millions de dollars par l'entremise des Affaires autochtones et 157 millions de dollars par l'entremise de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Le ministère des Affaires autochtones fournit des fonds aux collectivités pour une gamme de besoins en matière de logement, tandis que la Société canadienne d'hypothèques et de logement se concentre sur la prestation de programmes spécifiques de logements pour les Premières Nations.

Entre 2006-2007 et 2012-2013, donc, le gouvernement du Canada a injecté au total 2,3 milliards de dollars pour le logement dans les réserves afin d'aider les Premières Nations, dont 1,2 milliard provenait du budget d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Les rapports annuels transmis par les Premières Nations au ministère indiquent que les investissements du gouvernement et des Premières Nations elles-mêmes ont permis, en moyenne, la construction de plus de 1 750 logements et la rénovation de 3 100 autres chaque année.

En plus du financement annuel, le gouvernement du Canada a également investi des sommes considérables pour le logement dans les réserves, sous forme d'initiatives de financement ponctuel. Par exemple, pour remédier aux problèmes des logements surpeuplés et décrépits, un investissement de 400 millions de dollars a été consenti entre 2009- 2010 et 2010-2011 dans le cadre du Plan d'action économique du Canada.

Près de 500 collectivités des Premières Nations ont pu profiter des retombées de cet investissement. L'aide de 150 millions de dollars accordée par Affaires autochtones a suffi à elle seule à financer la construction ou la rénovation de plus de 4 400 logements.

En plus du financement des immobilisations, le gouvernement offre également du soutien à des résidants des Premières Nations au moyen du Programme d'aide au revenu. Grâce à ce programme, environ 125 millions de dollars sont fournis chaque année aux bénéficiaires admissibles des Premières Nations comme aide supplémentaire pour le loyer, les services publics et les autres frais de logement admissibles. Les montants à payer varient selon le loyer à payer, la taille de la famille et les montants maximaux assumés par le gouvernement provincial ou territorial.

Le gouvernement du Canada n'absorbe cependant pas à lui seul les coûts entiers rattachés au logement. Les Premières Nations et leurs résidants peuvent en effet obtenir du financement d'autres sources pour leurs besoins en logement; ils peuvent notamment présenter des demandes de remboursement de frais de logement ou obtenir des prêts et investissements consentis par le secteur privé, comme c'est le cas à l'extérieur des réserves.

Affaires autochtones offre son soutien dans le cadre de trois programmes phares, soit la Politique de 1996 sur le logement dans les réserves, le Programme de subventions au logement et le programme des Garanties d'emprunt ministérielles. La plupart des Premières Nations sont visées par la Politique de 1996 sur le logement d'Affaires autochtones, qui repose sur le principe du contrôle par les Premières Nations. Ces dernières reçoivent une allocation annuelle en immobilisations du ministère, calculée à l'aide d'une formule qui tient compte de la démographie et de l'éloignement. Les Premières Nations peuvent utiliser ces fonds pour répondre à différents besoins en logement, dont la construction, la rénovation, l'entretien, l'assurance, le renforcement des capacités, la réduction de la dette ainsi que la planification et la gestion de leur portefeuille de logements. De cette façon, les Premières Nations ont la latitude nécessaire pour faire des investissements ciblés, axés sur les besoins particuliers de la collectivité. Les Premières Nations désireuses de participer au programme de financement prévu par la politique ont reçu du financement supplémentaire pour mettre en place des politiques et un plan pluriannuel sur la question du logement.

Pour les Premières Nations qui ont choisi de ne pas participer au programme, dont celles de la Colombie- Britannique et quelques-unes de l'Ontario, le financement est injecté sous forme de subventions. Les Premières Nations envoient leur proposition à Affaires autochtones, et des subventions allant de 20 000 à 40 000 $ sont accordées selon les priorités. Elles sont investies dans des projets de construction ou de rénovation de logements.

[Français]

Le programme des garanties d'emplois ministériels est un autre moyen qu'utilise Affaires autochtones et Développement du Nord Canada pour répondre aux besoins de logement des Première Nations. Le fait que l'État des Premières Nations appartienne à la Couronne complique l'obtention de financements nécessaires à la construction et à l'achat de logements par les Premières Nations. En particulier, le paragraphe 89(1) de la Loi sur les Indiens interdit la saisie d'une propriété d'un Autochtone par un non autochtone. Ce qui ferme la porte à l'obtention d'un prêt hypothécaire conventionnel pour une propriété sur une terre de réserve. Pour remédier à ce problème, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada a instauré le Programme des Garanties d'emprunt ministérielles en 1966. Un outil qui procure aux créanciers une garantie subventionnée par le gouvernement sur les prêts hypothécaires sur réserve. La limite de la garantie pouvant être consentie par le ministère est fixée à 2,2 milliards de dollars dont 1,82 milliard a déjà été engagé. Près d'un tiers des habitations sous réserve ont été financées dans le cadre d'une garantie d'emprunt ministériel consenti par l'intermédiaire d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada.

[Traduction]

De nombreuses collectivités des Premières Nations construisent et rénovent leurs logements grâce aux programmes offerts par la Société canadienne d'hypothèques et de logement. La société offre entre autres un soutien important aux Premières Nations dans le cadre de son Programme de logement sans but lucratif dans les réserves, qui aide les Premières Nations lors des étapes de la construction, de l'achat et de la remise à neuf des logements, ainsi que dans l'administration de logements locatifs convenables et abordables dans les réserves. La SCHL offre également de l'aide financière aux Premières Nations pour la réparation de logements qui ne répondent plus aux normes au moyen de son Programme d'aide à la remise en état des logements, ainsi que de quelques autres programmes spécialisés et initiatives de renforcement des capacités des Autochtones.

En 2008, le gouvernement du Canada a investi 300 millions de dollars dans la création du Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations, qui vise à élargir la gamme des options de logement qui se présentent aux collectivités des Premières Nations. Supervisé par un conseil de fiduciaires, ce fonds est un instrument d'aide au crédit grâce auquel l'accès des Premières Nations au financement privé est grandement amélioré. De plus, du financement est disponible en vue de contribuer au développement des capacités. Jusqu'à maintenant, le fonds a permis d'accorder approximativement 50 prêts pour le développement des capacités des Premières Nations. Le nombre d'utilisateurs du fonds est toutefois inférieur aux prévisions pour de nombreuses raisons, parmi celles-ci, l'expertise financière exigée des Premières Nations, un intérêt inférieur aux prévisions pour les logements fondés sur le marché et les difficultés qu'ont éprouvées des membres des Premières Nations à obtenir un prêt hypothécaire résidentiel d'une institution financière. Affaires autochtones et Développement du Nord Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement réexaminent le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations afin de dégager des stratégies qui sauront mieux répondre aux besoins des Premières Nations.

Affaires autochtones continue de travailler en étroite collaboration avec des intervenants des Premières Nations et d'autres ministères, dans le but de savoir quels sont les véritables enjeux en matière de logement dans les réserves. Par exemple, Affaires autochtones siège au Comité national de liaison sur le logement des Autochtones avec l'Assemblée des Premières Nations, la Société canadienne d'hypothèques et de logement et Santé Canada. Ce comité fournit une tribune régulière pour échanger des informations sur les questions de logement des Premières Nations et favoriser de meilleurs résultats dans les réserves concernant le logement. Par exemple, les membres du comité s'emploient actuellement à établir et à clarifier les rôles et les responsabilités de toutes les parties visées par le logement des Premières Nations.

La capacité de construire et d'entretenir des logements est un défi de taille pour de nombreuses collectivités des Premières Nations. Le gouvernement du Canada reconnaît que certaines Premières Nations ont besoin de soutien pour renforcer leurs capacités afin de pouvoir construire, entretenir et gérer leurs logements efficacement. À cette fin, Affaires autochtones, Santé Canada, les responsables du Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations et la Société canadienne d'hypothèques et de logement offrent aux Premières Nations une gamme de programmes, d'outils et de renseignements sur le logement dans les réserves.

[Français]

Pour appuyer la gestion des projets de logement dans les réserves, les Premières Nations peuvent également décider de puiser à même les ressources et l'expertise d'associations et d'organismes de Premières Nations.

L'Association nationale des agents du bâtiment des Premières Nations en est un exemple. Des organismes à vocation technique, comme la First Nations Technical Services Adviserory Group en Alberta et l'Ontario First Nations Technical Services Corporation offrent aussi de la formation, de l'information et des outils de renforcement des capacités et d'amélioration des méthodes de gestion des portefeuilles d'infrastructures.

[Traduction]

On a souvent recours à l'accession à la propriété et au crédit accordé par le secteur privé pour répondre à la demande de logements dans les réserves. Le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations et la Société canadienne d'hypothèques et de logement offrent tous deux des programmes de soutien pour augmenter les possibilités d'accéder au marché du logement dans les réserves. Affaires autochtones accorde plutôt des garanties d'emprunt ministérielles pour aider les Premières Nations à obtenir des prêts pour faciliter l'accès à la propriété. Les prêteurs du secteur privé tels que la Banque de Montréal et la Banque royale du Canada offrent également des programmes de prêts d'accession à la propriété qui ne nécessitent pas de garanties d'emprunt ministérielles.

Les moisissures et l'humidité sont des dangers pour la santé et elles sont présentes dans les logements un peu partout au Canada, dont les habitations dans les réserves. Affaires autochtones siège avec l'Assemblée des Premières Nations, la Société canadienne d'hypothèques et de logement et Santé Canada au Comité des Premières Nations sur la qualité de l'air intérieur pour s'attaquer au problème des moisissures dans les réserves. Pour donner suite au rapport d'étape de juin 2011 du vérificateur général qui recommandait de s'attaquer au problème des moisissures dans les réserves, le gouvernement du Canada, de concert avec l'Assemblée des Premières Nations, a mis sur pied une stratégie nationale exhaustive. Cette stratégie préconise l'éducation sur les causes des moisissures tout en renforçant les capacités des occupants des Premières Nations, ainsi que leurs collectivités, institutions et fournisseurs de services techniques, dans le but de prévenir les problèmes ou d'y remédier.

La Société canadienne d'hypothèques et de logement met l'accent sur le transfert de l'information pour aider les Premières Nations à repérer et à corriger les problèmes de moisissures dans leurs logements. Elle organise à leur intention des ateliers, rédige des guides d'information et des études de cas et formule des conseils pratiques sur la prévention des moisissures ainsi que sur la remise en état et l'entretien des habitations, l'amélioration de la qualité de l'air intérieur et la construction de meilleurs logements. Santé Canada offre de la formation sur des inspections de santé publique et des séances d'information sur les effets éventuels des moisissures sur la santé, en plus de conseils sur la prévention des moisissures et la remise en état de logements dans les réserves.

Les Premières Nations peuvent utiliser le financement annuel qu'elles reçoivent d'Affaires autochtones pour remettre en état des logements contaminés par des moisissures. De plus, dans le cadre du Plan d'action économique du Canada, Affaires autochtones a investi plus de 22,5 millions de dollars entre 2009-2010 et 2010-2011 pour rénover 706 habitations atteintes de moisissures.

Certaines Premières Nations éprouvent des difficultés particulières à construire et à gérer leurs logements. Le gouvernement du Canada a à cœur de travailler en étroite collaboration avec elles pour répondre à leurs besoins en logement et mettre en place des solutions durables. On peut citer à titre d'exemple la Première Nation d'Attawapiskat, située dans le Nord de l'Ontario, où une crise du logement s'est déclarée en 2011. Depuis, Affaires autochtones a offert plus de 6,7 millions de dollars en financement à cette première Nation pour remédier à ses problèmes de logement, dont 3,3 millions de dollars pour l'achat de 22 nouvelles maisons modulaires, près de 500 000 $ pour la rénovation de 38 habitations, et du financement additionnel pour des réparations et des remises en état d'urgence. Cet argent servira à offrir un logement sécuritaire et chauffé aux familles de la collectivité qui vivent dans des tentes et des cabanes. De plus, la Première Nation a utilisé ces fonds pour installer les services publics sur 33 terrains de la collectivité.

En juillet cette année, la chef Spence a accepté l'offre de 2,2 millions d'Affaires autochtones pour financer des habitations à logements multiples durables. À la fin août, la chef Spence a avisé le ministère que la Première Nation avait constitué une nouvelle entité d'administration du logement et de nouveaux logements locatifs pour la collectivité. Affaires autochtones poursuit le travail avec la chef Spence et la Première Nation afin de mettre à exécution le plan de logement de la nouvelle administration, dont la construction de quatre maisons jumelées, financée à même les 2,2 millions de dollars injectés par le ministère. Le projet va bon train, et les logements devraient être prêts à l'automne 2014.

Depuis août 2012, Affaires autochtones siège également au groupe de travail sur la stratégie de logement d'Attawapiskat avec la Première Nation elle-même, des représentants du Conseil tribal de Mushkegowuk et de l'Ontario First Nations Technical Services Corporation pour aider la Première Nation à mettre sur pied sa stratégie globale de logement communautaire. Les fonctionnaires du ministère travaillent aussi en étroite collaboration avec la Première Nation d'Attawapiskat et d'autres partenaires pour réparer le complexe de logements qui a été endommagé dans l'incendie survenu le 21 novembre. Le 23 novembre, 69 habitants de l'endroit ont été évacués à Kapuskasing.

La Première Nation et le ministère s'emploient à répondre aux besoins en éducation des enfants d'âge scolaire en attendant que le complexe puisse accueillir de nouveau les enfants en toute sécurité. Affaires autochtones continue d'appuyer la Première Nation et ses homologues provinciaux chargés de la gestion des urgences pendant que la collectivité se remet de cet incident.

[Français]

Malgré d'importants investissements d'Affaires autochtones et de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, nous sommes conscients que l'accès à des logements sains, sécuritaires et abordables est toujours un problème dans certaines communautés des Premières Nations.

Nous tenons à continuer à travailler de concert avec les Premières Nations et d'autres intervenants pour répondre aux besoins de logements et mettre en place des infrastructures durables pour répondre aux besoins actuels et planifier les développements à venir.

[Traduction]

Je suis heureux de m'entretenir avec vous aujourd'hui de cette importante question. Je cède maintenant la parole à ma collègue, Debra Darke, de la SCHL.

Debra Darke, vice-présidente, Activités régionales et aide au logement, Société canadienne d'hypothèques et de logement : Merci, monsieur le président, et merci, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis heureuse de représenter la Société canadienne d'hypothèques et de logement et de parler du rôle que nous jouons pour répondre aux besoins en matière de logement des Autochtones vivant dans les réserves et hors réserve. À titre d'organisme national responsable de l'habitation au Canada, la SCHL a pour mandat d'améliorer la qualité et le choix en matière de logement ainsi que l'accessibilité à la propriété pour tous les Canadiens. En plus de soutenir le système canadien de l'habitation axé sur le marché par l'entremise de nos activités dans les domaines de l'assurance prêt hypothécaire, de la titrisation et de l'analyse de marché, la SCHL collabore également avec des partenaires pour combler les lacunes observées dans le système, afin d'aider les Canadiens à se trouver des logements sûrs et abordables.

[Français]

En fait, un élément central du mandat de la SCHL consiste à soutenir le logement abordable pour les Canadiens à faible revenu, notamment les Autochtones. Le gouvernement du Canada, par l'entremise de la SCHL, investit chaque année environ deux milliards de dollars pour répondre aux besoins des Canadiens à faible revenu en matière de logements. Ces investissements sont fournis dans le cadre de divers programmes et initiatives en matière d'habitation dans les réserves comme à l'extérieur de celles-ci.

Dans les réserves, comme vous l'avez entendu aujourd'hui, la SCHL a collaboré étroitement avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada et avec les dirigeants et organismes des Premières Nations afin de fournir diverses formes d'aide permettant aux Premières Nations de répondre à leurs besoins en matière de logement.

Chaque année, par l'entremise de l'AADNC de la SCHL, le gouvernement fédéral investit environ 303 millions de dollars pour répondre aux besoins en matière de logement dans les réserves.

[Traduction]

La SCHL et AADNC centrent leurs efforts sur différents aspects du logement dans les réserves, mais les activités d'AADNC visent en grande partie la collectivité elle-même en fournissant du financement pour les travaux d'infrastructure liés à l'habitation et pour le développement du potentiel dans le but de régler les problèmes de gouvernance et les autres problèmes de ces collectivités. La SCHL, de son côté, met en œuvre des programmes de logements particuliers qui soutiennent la construction, la rénovation, la gestion permanente des logements sociaux et le développement des compétences propres au logement.

Les Premières Nations, quant à elles, sont responsables de la gouvernance du logement dans les réserves; elles doivent pour cela prendre et faire respecter des règlements en plus de respecter la réglementation concernant l'urbanisme, le zonage et la construction. Les Premières Nations sont également propriétaires et gestionnaires immobiliers de la plupart des habitations dans les réserves.

La part du financement fédéral annuel versé par la SCHL pour le logement dans les réserves s'élève à 157 millions de dollars. Ces fonds sont versés par l'entremise de deux programmes principaux. Le Programme de logements sans but lucratif dans les réserves — aussi connu sous le nom de programme de l'article 95 — aide les Premières Nations à construire, acheter, remettre en état et administrer des logements locatifs abordables, de taille et de qualité convenables, dans les collectivités des Premières Nations. Grâce à ce programme, la SCHL fournit une subvention pour aider les Premières Nations à financer et à exploiter des ensembles de logements locatifs, et ce, sur une période de 15 à 25 ans. Les logements appuyés par le Programme de l'article 95, ainsi que par les programmes d'aide à la rénovation dont je vous parlerai brièvement, appartiennent à la Première Nation, qui en assure aussi la gestion, l'exploitation et l'entretien, et qui doit déterminer qui obtiendra le logement, les loyers à payer, et cetera.

La SCHL offre des prêts directs pouvant atteindre 100 p. 100 du coût d'immobilisations admissible total de l'ensemble. Ces prêts sont assurés en vertu de la Loi nationale sur l'habitation et sont garantis par le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord du Canada. D'autres institutions financières peuvent aussi accorder des prêts aux Premières Nations pour des ensembles de logements.

Un accord d'exploitation de l'ensemble signé par la SCHL et la Première Nation précise les modalités en vertu desquelles l'ensemble doit être exploité pour que la Première Nation puisse continuer à bénéficier de la subvention. L'accord est en vigueur à partir de la date d'achèvement de l'ensemble jusqu'à l'échéance du prêt. Le nombre de logements pouvant être produits chaque année en vertu du Programme de l'article 95 est déterminé principalement par les taux d'intérêt courants et prévus, de même que par les coûts de construction et l'importance de la mise de fonds versée par la Première Nation. En 2012-2013, le Programme de l'article 95 a permis d'appuyer la construction de 469 logements sans but lucratif neufs et d'offrir des subventions à quelque 29 300 ménages vivant dans les réserves.

Grâce à ce programme, par exemple, la Première Nation Birch Narrows, dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan, a construit trois maisons modestes de trois chambres avec l'aide financière de la SCHL. La Première Nation a obtenu un prêt de 375 000 $ et elle a versé une mise de fonds de 54 000 $ pour achever l'ensemble. Les trois maisons ont été construites sur un lotissement qui compte maintenant 34 maisons.

Le deuxième programme principal — le Programme d'aide à la remise en état des logements dans les réserves — permet de fournir de l'aide financière pour réparer des logements délabrés et les rendre conformes aux normes minimales de santé et de sécurité et pour améliorer des logements de façon à les rendre accessibles aux personnes handicapées. En 2012-2013, ce programme a soutenu la réparation de 1 144 maisons existantes dans les réserves. L'aide est fournie aux ménages à faible revenu vivant dans des maisons qui ne disposent pas des installations essentielles, qui ont besoin de réparations importantes pour corriger des défaillances majeures touchant les installations électriques, de plomberie, de chauffage ou de sécurité incendie, ou encore qui sont surpeuplées.

Les Premières Nations peuvent également recevoir un soutien dans le cadre du Programme d'amélioration des maisons d'hébergement de la SCHL. Ce programme offre de l'aide financière pour réparer les maisons d'hébergement existantes destinées aux victimes de violence familiale et pour acheter ou construire, au besoin, des maisons d'hébergement ou des logements de deuxième étape. De 2008 à 2012, le gouvernement du Canada a versé presque cinq millions de dollars en fonds fédéraux pour les maisons d'hébergement destinées aux victimes de violence familiale dans les collectivités des Premières Nations.

La SCHL consacre une part des fonds destinés au logement dans les réserves au développement du potentiel. La SCHL collabore avec AADNC et les collectivités des Premières Nations du Canada pour faciliter la formation et offrir des ressources afin d'aider les Premières Nations à atteindre leurs objectifs en ce qui touche au logement et à acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour concevoir, construire, inspecter, gérer et entretenir les habitations dans les réserves. Environ 90 p. 100 de l'aide de la SCHL affectée aux programmes et aux services dans les réserves passe par des organismes autochtones ou des organismes des Premières Nations.

La SCHL aide les Premières Nations à repérer les problèmes de gestion du portefeuille de logements qu'elle finance et elle offre à ces collectivités des activités de développement du potentiel pour les aider à régler leurs problèmes. À titre d'exemple, les états financiers et la gestion financière sont des domaines où les Premières Nations éprouvent certaines difficultés dans la gestion de leur portefeuille de logements sans but lucratif. La SCHL a animé des webinaires pour expliquer ses attentes aux gestionnaires immobiliers et aux gestionnaires financiers des bandes et pour les renseigner sur les rapports financiers à présenter lorsqu'ils participent aux programmes de la SCHL.

De même, des séances d'information ont été organisées, lors du congrès national de l'Association des agents financiers autochtones du Canada, dans le but d'expliquer les exigences de la SCHL liées aux programmes de logements sans but lucratif.

L'engagement pris par la SCHL à l'égard du développement du potentiel est également mis en évidence dans la Stratégie nationale de lutte contre les moisissures, dont M. Carisse a déjà parlé. La stratégie décrit les activités devant être réalisées par les trois partenaires fédéraux dans le but d'aider les Premières Nations à régler les problèmes de moisissures dans leurs logements. L'objectif principal de la SCHL est de s'assurer que les Premières Nations disposent de l'information dont elles ont besoin pour repérer les problèmes de moisissures et les régler. C'est dans cet esprit que nous avons élaboré un éventail de produits d'information destinés aux collectivités et aux ménages des Premières Nations, notamment des guides et des études de cas ainsi que des séances d'information sur les moisissures dans les logements. Fait à souligner, la SCHL est en train de mettre au point une application qui pourra être utilisée sur les appareils mobiles afin d'aider les Premières Nations à faire la collecte de données sur les moisissures dans les collectivités. L'Assemblée des Premières Nations envisage d'utiliser cet outil, avec la collaboration d'autres organismes des Premières Nations, pour déterminer l'ampleur du problème de moisissures dans les collectivités des Premières Nations.

L'Initiative de stages en habitations pour les jeunes des Premières Nations et les jeunes Inuits de la SCHL, offerte grâce à des fonds provenant de la Stratégie emploi jeunesse du gouvernement fédéral, est un autre effort visant le développement du potentiel. Cette initiative s'adresse aux jeunes des Premières Nations et aux jeunes Inuits âgés de 15 à 30 ans qui viennent de quitter l'école ou qui sont sans emploi; elle leur offre l'occasion d'acquérir de l'expérience de travail et une formation pratique dans le secteur de l'habitation. Les organismes de parrainage autorisés reçoivent une aide financière couvrant le salaire des jeunes qui travaillent à des projets liés au logement. Chaque année, cette initiative vient en aide à des jeunes dans 75 à 85 collectivités de partout au pays.

En plus de fournir de l'aide directe pour le logement, la SCHL encourage aussi la mise en place de solutions faisant intervenir le marché pour le logement dans les réserves. Par exemple, la SCHL offre des options d'assurance prêt pour aider les membres des Premières Nations vivant dans les réserves à acheter, à construire ou à rénover des logements. Comme les terres dans les réserves ne peuvent être hypothéquées, la SCHL assure les prêts pour les logements lorsqu'une garantie d'emprunt ministérielle est obtenue d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada.

Le gouvernement fédéral encourage aussi la construction de logements du marché dans les réserves, sans le recours aux garanties d'emprunt ministérielles, par l'entremise du Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations. Ce fonds est une fiducie indépendante qui a été créée par le gouvernement du Canada en 2008 afin d'offrir aux peuples des Premières Nations un meilleur accès aux prêts à l'habitation dans les réserves ou sur les terres visées par le règlement.

Le fonds constitue un mécanisme d'amélioration des modalités de crédit pour les Premières Nations admissibles sous la forme d'un filet de sécurité partiel applicable à la garantie relative aux prêts à l'habitation fournie aux institutions financières. La Première Nation utilise ensuite ce filet pour négocier une entente avec un ou des prêteurs agréés afin que ses membres puissent présenter une demande de financement directement au prêteur. La Première Nation doit garantir les prêts à l'habitation de ses membres.

Si un emprunteur manque à ses obligations à l'endroit d'un prêt admissible, le prêteur peut chercher à obtenir une indemnité auprès de la Première Nation. Si la Première Nation n'est pas en mesure d'honorer ses obligations à titre de garante du prêt, le prêteur peut alors faire appel au fonds pour obtenir une indemnité jusqu'à concurrence du montant au titre de l'amélioration des modalités de crédit que l'institution a accumulé relativement aux prêts consentis par la collectivité. Le fonds a également établi un Programme de développement du potentiel afin d'aider les Premières Nations admissibles à développer leurs capacités jusqu'au point où elles pourraient devenir admissibles aux mécanismes d'amélioration des modalités du crédit.

Ce sont tous des exemples d'initiatives et d'investissements permanents concernant le logement dans les réserves. Mais je m'en voudrais de passer sous silence l'investissement important qu'a prévu le gouvernement fédéral pour le logement dans les réserves en vertu du Plan d'action économique du Canada de 2009, et le rôle qu'a joué la SCHL dans la distribution de ces fonds.

Comme le comité s'en souviendra, la phase de stimulation du Plan d'action économique du Canada comprenait un investissement ponctuel de 400 millions de dollars sur deux ans pour soutenir la construction et la rénovation de logements dans les réserves. De cette somme, 250 millions de dollars ont été versés par la SCHL, dont la moitié a été utilisée pour créer de nouveaux logements dans les réserves et l'autre, pour rénover les logements sociaux existant dans les réserves. Les 150 millions de dollars restants ont été distribués par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada pour des projets dans son domaine de responsabilité.

Au total, ce financement fourni dans le cadre du Plan d'action du Canada a permis de soutenir plus de 3 200 projets dans près de 500 collectivités des Premières Nations partout au pays. Par exemple, la Première Nation Batchewana, près de Sault Ste. Marie, en Ontario, a utilisé les 800 000 $ obtenus en vertu du Plan d'action économique pour rénover 32 logements dans les réserves, afin de les rendre conformes aux codes, de régler les problèmes liés à la santé et à la sécurité et d'améliorer leur efficacité énergétique.

Un montant de 200 millions de dollars a aussi été versé sur deux ans dans le cadre du Plan d'action économique du Canada pour le logement dans le Nord pour permettre la construction ou la rénovation de logements sociaux dans les trois territoires. Ces fonds ont été distribués par les territoires grâce à des modifications aux ententes existantes et ils ont servi à appuyer 210 ensembles de logements dans le Nord. J'en parle parce qu'il est important de souligner que la SCHL offre aussi du soutien en matière de logement aux Autochtones qui vivent à l'extérieur et des réserves. En fait, nous dépensons quelque 123 millions de dollars pour combler les besoins en matière de logement des ménages autochtones vivant hors des réserves.

Les ménages autochtones qui vivent à l'extérieur des réserves ont également accès à des logements abordables financés en vertu d'un éventail d'autres programmes, dont la plupart sont administrés par les provinces et les territoires. Par exemple, au terme du Cadre de référence pour l'Investissement dans le logement abordable, le gouvernement du Canada verse aussi plus de 238 millions de dollars par année pour soutenir de nouveaux engagements financiers destinés à améliorer les conditions de vie des Canadiens dans le besoin. Les provinces et les territoires investissent les mêmes montants que le fédéral et se chargent de concevoir, de mettre en œuvre et d'administrer les programmes. L'Investissement dans le logement abordable reconnaît que les besoins en matière de logement sont différents d'une région à l'autre du pays, et que les provinces et les territoires sont les mieux placés pour comprendre ses besoins — et les priorités qui s'y rattachent — et y donner suite. C'est pourquoi ils ont la souplesse de concevoir les programmes pour répondre aux besoins de groupes particuliers — notamment les Autochtones. Ainsi, l'Ontario et la Colombie-Britannique utilisent des fonds issus de l'initiative pour accroître l'offre de logements et améliorer la qualité des logements existants au moyen de programmes de logements pour les Autochtones.

Le renouvellement de l'Investissement dans le logement abordable jusqu'en mars 2019 a été prévu dans le budget de 2013. Cela représente un investissement fédéral total de plus de 1,25 milliard de dollars sur cinq ans — des fonds qui seront encore une fois égalés par les provinces et les territoires. Le gouvernement collabore actuellement avec les provinces et les territoires afin de confirmer les détails de la mise en œuvre de cet investissement.

Un investissement fédéral de 100 millions de dollars sur deux ans pour construire de nouveaux logements abordables au Nunavut a également été annoncé dans le budget de 2013. Pour fournir des logements abordables, ce territoire doit faire face à des défis particuliers, comme son climat, sa géographie et la dispersion de sa population. Ces fonds sont accordés par le gouvernement du territoire par le biais de l'accord sur l'investissement dans les logements abordables conclu avec le gouvernement du Canada

En plus de ces investissements fédéraux, les fournisseurs de logements pour les Autochtones à l'extérieur des réserves ont aussi accès au Centre du logement abordable de la SCHL, qui travaille avec des organismes des secteurs public, privé et sans but lucratif dans le but de trouver des solutions pour le logement abordable qui ne requièrent pas d'aide continue de la part du fédéral. La SCHL appuie également Habitat pour l'humanité dans les efforts que déploie l'organisme pour rendre son modèle d'accession à la propriété accessible à un plus grand nombre d'Autochtones. La société est d'ailleurs le principal partenaire du Programme de logements visant les Autochtones d'Habitat pour l'humanité, un programme qu'elle a en fait mis sur pied. Près de 60 maisons ont été construites jusqu'ici grâce à ce programme.

[Français]

En résumé, le gouvernement fédéral contribue à trouver diverses solutions pour le logement abordable pour les Autochtones vivant à l'intérieur des réserves et hors des réserves. La SCHL joue un rôle important dans la mise en œuvre de ces investissements et nous continuons de collaborer avec nos partenaires, notamment AADNC et les communautés et organismes autochtones, pour atteindre les meilleurs résultats possibles en matière de logement.

[Traduction]

Je vous remercie encore une fois de m'avoir invitée à m'adresser à vous aujourd'hui et à prononcer cette déclaration d'ouverture. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup. J'aimerais ouvrir la discussion par une question d'ordre général destinée à M. Carisse. Je vous remercie de l'information que vous nous avez fournie ce matin, qui est axée sur le logement. Toutefois, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, le comité examine à cette étape-ci la question plus large des besoins en infrastructures dans les réserves, y compris les immobilisations requises comme les écoles. Je remarque que vous êtes directeur principal de la Direction générale des infrastructures communautaires.

La direction générale où vous travaillez s'occupe-t-elle également des besoins en infrastructures autres que le logement dans les réserves? Je me demande si le comité ne pourrait pas profiter un jour d'un exposé sur les autres besoins en infrastructures, comme les écoles, aussi instructif que celui que vous venez de nous donner sur le logement, et si vous ne pourriez pas mentionner également d'autres catégories d'infrastructures.

M. Carisse : Certainement. Dans le secteur où nous intervenons, les infrastructures communautaires, nous avons un grand programme, le Programme d'immobilisations et d'entretien. Le logement entre précisément dans ce programme. Les autres catégories sont les immobilisations des infrastructures publiques que le ministère aide en fait à financer. Il y a les installations scolaires, les routes et les ponts, les systèmes d'aqueduc et d'égout. J'ai déjà comparu devant le comité pour parler de ce qui est devenu une loi, la Loi concernant la salubrité de l'eau potable sur les terres des Premières Nations. Il y a la connectivité, la bande large, les bandes d'atterrissages — tout ce qui peut composer une infrastructure publique dans une collectivité des Premières Nations vivant sur une réserve ou en dehors.

Pour ce qui est du financement de ce programme, nous avons été chanceux et très privilégiés au cours des dernières années, car nous avons profité de fonds supplémentaires consentis dans le Plan d'action économique ou le Plan d'action pour l'approvisionnement en eau potable et le traitement des eaux usées des Premières Nations.

Le programme est financé à hauteur d'environ un milliard de dollars par année; cette somme étant répartie entre les diverses catégories de financement, les diverses immobilisations — le logement, l'eau et les écoles. Ce sont là les trois grandes catégories d'immobilisations. Pour l'eau, par exemple, le ministère fournit environ 200 millions de dollars par année dans son budget de services votés. Une somme provenant du Plan d'action pour la gestion de l'eau potable dans les collectivités des Premières Nations s'ajoute à ce financement, qui porte le tout à environ 330 millions de dollars répartis sur deux ans, auxquels s'ajoutent 165 millions de dollars par année. Cet argent est affecté à l'infrastructure majeure — de nouvelles constructions — au fonctionnement et à l'entretien ainsi qu'à des réparations de moindre envergure — que nous appelons les dépenses en capital secondaires.

Je serai très heureux de revenir vous parler de l'infrastructure ou de répondre à vos questions maintenant si vous le voulez, mais je vous ai donné la ventilation du programme en lui-même. Environ 400 millions de ce milliard de dollars sont affectés au fonctionnement et à l'entretien des installations. Les grands projets absorbent environ 320 millions de dollars et quelque 280 millions de dollars environ sont affectés aux dépenses en capital secondaires. Le logement entre dans cette catégorie. Comme je l'ai dit plus tôt, le montant varie, mais environ 150 millions de dollars sont consacrés au logement chaque année.

Il importe de se rappeler que ce sont là les contributions aux infrastructures dans les collectivités. L'infrastructure est la propriété du chef et du conseil de bande et le logement relève d'eux. Nous fournissons une aide financière ou autre.

L'aide est accordée à différents degrés. Par exemple, le ministère assume la totalité des coûts de construction et des coûts de fonctionnement et d'entretien des écoles.

Dans le cas de l'eau, le ministère assume 100 p. 100 des coûts des immobilisations importantes et 80 p. 100 des coûts de fonctionnement et d'entretien. Il s'attend à ce que la collectivité assume 20 p. 100 des coûts, que ce soit au moyen de frais d'utilisation ou de revenus autonomes. Le financement diminue progressivement selon les diverses catégories d'immobilisations, dont le logement.

Le président : Eh bien voilà qui est très instructif, monsieur Carisse. Je crois pouvoir dire sans me tromper que, sans porter préjudice à votre excellent exposé sur le logement et bien que nous nous concentrions ce matin sur cette question, le comité aimerait vous inviter de nouveau avec vos collègues pour nous brosser un portrait plus large de la situation. Je vous remercie de votre exposé.

Je cède la parole à notre vice-présidente, la sénatrice Dyck, qui posera la prochaine question.

La sénatrice Dyck : Je vous remercie de vos exposés de ce matin. Vous nous avez donné beaucoup d'informations, mais cela aurait été bien pratique d'avoir ces informations sous forme de tableau. Je ne sais pas si nous pourrions vous demander de nous transmettre des tableaux plus tard. C'est plus facile de comprendre l'information lorsqu'on la voit dans un tableau. Je vous remercie pour cela.

Naturellement, lorsque nous parlons de l'argent dépensé, tout le monde veut savoir si l'argent a été dépensé sagement. Combien de maisons sont-elles construites dans les réserves actuellement? Avons-nous accès à ce genre d'information? Combien y a-t-il de maisons? Combien de maisons faut-il encore construire et combien de maisons ont- elles besoin de travaux de rénovation? Vous y avez peut-être fait allusion, ou peut-être pas.

Mon autre question est la suivante : étant donné que les travaux de rénovation semblent compter pour beaucoup, savons-nous si cette situation est attribuable au fait qu'un pourcentage important des maisons situées dans les réserves ont pu être construites sans que les normes en vigueur ne soient respectées ou si un autre facteur entre en ligne de compte?

Ce sont là les premières questions.

M. Carisse : Alors voilà : pour ce qui est du nombre de maisons dans les réserves et de toute l'infrastructure publique, nous avons un programme au ministère appelé Système intégré de gestion des immobilisations. Ce sont les collectivités elles-mêmes qui font rapport sur leurs installations, mais les chiffres que nous avons nous indiquent qu'il y a environ 100 000 habitations réparties dans 633 collectivités. Il y a déjà beaucoup d'habitations dans les réserves. Nous savons toutefois qu'il en faut encore plus.

Les chiffres varient selon la source. Selon l'Assemblée des Premières Nations, il faudrait environ 80 000 habitations de plus. Selon l'information transmise par les Premières Nations, il en faudrait beaucoup moins — 35 000 ou 40 000. Peu importe, le logement fait défaut. Nous devons établir les besoins et nous collaborons actuellement avec les Premières Nations pour tenter de trouver différentes façons de corriger la situation, que ce soit par la construction de nouveaux logements ou par la réhabilitation et la rénovation des logements existants. Voilà ce à quoi sert en partie le financement de nos deux organismes. Nous accordons également une aide financière pour les maisons d'hébergement aux collectivités qui en ont sur leur territoire.

En ce qui concerne les normes, les accords de financement conclus précisent que les logements doivent être construits conformément aux normes des codes de construction. Cette responsabilité incombe aux chefs et aux conseils. Tout le monde a intérêt à ce que les normes soient suivies. Est-ce toujours le cas? Vous l'avez vu dans les médias : il arrive que les normes en matière de construction ne soient pas respectées, comme cela était le cas il y a quelques années pour l'eau et la réglementation concernant l'eau. Aucune réglementation n'existait dans les réserves. Les codes de construction ne sont pas exécutoires dans les réserves. Là encore, la même situation a cours concernant les terres visées par le paragraphe 91(24) et les codes de construction. Ces codes sont établis par le Conseil national de recherche et par la CSA. Il y a le code du bâtiment, le code de l'électricité, le code de l'énergie et le code de la plomberie. Tous ces codes sont établis au niveau national, mais ce sont les provinces qui établissent les lois et les règlements pour les faire respecter. Or, ces codes ne sont pas exécutoires dans les collectivités des Premières Nations.

Il y a donc une lacune dans l'application des codes, mais, là encore, les collectivités ont intérêt à suivre les codes pour que les habitations respectent les normes d'incendie et les normes de construction. Si les codes sont respectés, il y a moins de problèmes de moisissures, moins de problèmes d'incendie, et cetera. Nous nous attendons donc à ce que les Premières Nations appliquent les codes au moment de la construction ou de la rénovation de leurs logements.

La sénatrice Dyck : Au sujet des codes de construction, vous avez dit, je crois, qu'il incombe au chef et au conseil de veiller à ce que les codes soient respectés, mais le chef et le conseil ont-ils la formation ou l'expertise qu'il faut pour cela?

M. Carisse : Vous soulevez un point très important. Nous savons que certaines collectivités, tout particulièrement les petites, éprouvent des difficultés à cet égard. Je vais laisser Mme Darke parler de certaines initiatives de renforcement des capacités mises en œuvre par la SCHL.

Les fonds accordés par le ministère aux collectivités peuvent servir au renforcement des capacités et à la formation et permettre ainsi à un gestionnaire des logements ou à un technicien dans la collectivité d'obtenir une formation. Les Premières Nations ont également des organismes qui viennent en aide aux collectivités, comme l'Association nationale des agents de bâtiment des Premières Nations. Il y a notamment des organismes techniques en Alberta, le Technical Services Advisory Group et l'Ontario First Nations Technical Services Corporation. On pourrait réaliser des économies d'échelle en créant des centres de gestion pour une bonne partie des infrastructures. Comme pour n'importe quelle autre infrastructure, il est difficile de trouver dans une collectivité donnée — une collectivité moyenne compte environ 500 personnes — l'expertise nécessaire pour s'occuper de l'eau, des écoles, du logement, et cetera. Je crois donc qu'il vaudrait la peine d'examiner la possibilité de créer des centres de gestion des immobilisations. Il existe déjà certains organismes de ce genre qui aident des collectivités à cet égard.

La sénatrice Dick : Une toute petite question pour terminer. Y a-t-il un effort concerté pour le logement, comme cela est le cas pour l'eau, pour laquelle les Premières Nations disposent d'un programme de formation donné par des responsables qui se déplacent partout dans une région afin de former les gens sur la façon de tester l'eau dans les différentes réserves? Y a-t-il un programme du même genre pour le logement?

M. Carisse : Non. Nous avons examiné cette question par le passé. Nous n'en sommes pas encore rendus à déterminer comment nous pourrions étendre ce programme. Comme je l'ai dit plus tôt, l'une des façons pour le ministère de bien travailler avec les Premières Nations, les conseils tribaux et d'autres groupes est, je crois, de confier la prestation de ce service à des associations techniques.

Nous examinons actuellement la possibilité d'étendre cette façon de procéder aux écoles. Est-il possible d'en faire autant pour le logement? À mon sens, la mise en place de centres de gestion serait une bonne chose. Certaines collectivités sont tout à fait capables de gérer elles-mêmes leurs infrastructures. Cela est le cas, notamment, des collectivités un peu plus urbaines; toutefois, pour les autres collectivités plus petites et plus éloignées, la mise en place de centres de gestion pourrait réellement aider.

Le président : Madame Darke, je crois que vous vouliez ajouter quelque chose.

Mme Darke : Oui. Je pourrais répondre à certaines questions et vous parler un peu de ce qui se fait dans les programmes de la SCHL.

Dans l'introduction de votre question sur la qualité des logements et l'application des codes de construction dans les réserves, vous nous avez demandé combien de logements avaient besoin de travaux de rénovation.

À la lumière du recensement de 2006, nous avons qu'environ 38 p. 100 des logements dans les réserves ont besoin de travaux de rénovation importants, comparativement à 7,5 p. 100 à l'extérieur des réserves. Nous savons donc qu'il y a un problème important concernant l'état physique des logements dans les réserves.

La SCHL examine régulièrement l'état physique des propriétés de son portefeuille de logements à but non lucratif. J'ai dit que nous avons conclu des accords d'exploitation de projets avec les Premières Nations. Nous examinons chaque année leurs états financiers vérifiés. Nous effectuons des visites cycliques ainsi que des examens cycliques de l'état physique des lieux. Nous savons ainsi que 53 p. 100 des logements que nous finançons sont dans un état satisfaisant ou dans un bon état, que 36 p. 100 sont dans un état passable et qu'environ 10 p. 100 sont dans un piètre état. Voilà donc une partie de l'information de base concernant l'état des logements.

Je pourrais vous parler un court instant des codes et ajouter simplement quelques remarques à celles de M. Carisse. Comme M. Carisse l'a dit, c'est la Première Nation qui a la compétence dans ce domaine. C'est donc à elle que revient la responsabilité de faire respecter les codes sur la réserve. Elle agit un peu comme une municipalité, en fait. À la SCHL, nous exigerons dans l'accord d'exploitation conclu avec la Première Nation et tout accord de prêt que les logements financés par nous satisfassent aux codes du bâtiment et aux normes. Chaque fois que nous avançons des fonds pendant la construction, nous exigeons de la Première Nation qu'elle nous fournisse une déclaration attestant fondamentalement que la construction effectuée respecte les codes.

Comme vous l'avez souligné, dans la plupart des cas, il est peu probable que le chef ou le conseil aient nécessairement l'expertise technique pour garantir que les codes sont respectés. Ils sont néanmoins, dans une certaine mesure, les détenteurs du pouvoir de signature officiel dans la Première Nation. La SCHL s'attend à ce qu'ils obtiennent les conseils d'experts avant de signer ces déclarations.

M. Carisse a parlé de la façon dont certaines Premières Nations ont acquis cette expertise technique. Il arrive que les Premières Nations les plus développées aient cette expertise dans leur collectivité. Certaines s'appuient pour cela sur un conseil tribal. Il y a, un peu partout au pays, divers organismes de services techniques qui possèdent cette expertise et qui la fournissent aux Premières Nations. Les Premières Nations peuvent également embaucher des inspecteurs du secteur privé. Nous avons vu pas mal toutes ces façons de procéder.

M. Carisse a également parlé un peu de quelques-unes des initiatives de renforcement des capacités, ou de développement du potentiel, auxquelles la SCHL participe. Au fil des ans, nous avons travaillé très étroitement avec l'Association nationale des agents de bâtiment des Premières Nations. Cette association fournit des services de formation et d'accréditation pour les inspecteurs des Premières Nations. Nous donnons également des ateliers et des séances d'information sur les divers aspects de l'état d'un bâtiment, y compris les aspects très techniques concernant les codes de construction. Nous donnons également une formation moins technique aux occupants pour qu'ils puissent comprendre comment entretenir et garder leur maison en bon état. Nous avons donc toute une gamme d'initiatives, dont des programmes de formation sur la planification de l'entretien et la planification des travaux de réparation des immobilisations.

La sénatrice Dyck : Merci pour cette information supplémentaire.

Le président : Monsieur le sénateur Meredith, avez-vous quelque chose à ajouter?

Le sénateur Meredith : Oui. Ma question s'adresse tout d'abord à M. Carisse et elle concerne la disparité observée dans les chiffres. Vous avez dit que les Premières Nations ont parlé d'une pénurie de 85 000 logements. Vous affirmez, pour votre part, qu'il manque environ de 20 000 à 35 000 logements. En quoi cet écart de 50 000 à 65 000 logements peut-il influer sur les familles, tout spécialement les jeunes familles et les jeunes?

Madame Darke, mon autre question concerne le respect du code du bâtiment. Le ministère des Affaires autochtones et la SCHL ont-ils envisagé auparavant de collaborer pour fournir les services d'un véritable inspecteur? Avant de dégager des fonds, vous exigez une déclaration pour vous assurer que les maisons sont construites en conformité avec le code, mais il n'y a pas de véritable vérification. Avez-vous collaboré de quelque façon avec le ministère pour déterminer s'il est possible d'embaucher un inspecteur qui se rendrait sur les lieux et ferait les vérifications requises? Nous voyons une corrélation entre les problèmes de moisissures dans les maisons mal construites et le fait qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une inspection en bonne et due forme. Je parle de quelqu'un qui a une certaine expérience dans la construction ici. Nous ne permettons pas que ce genre de choses survienne dans nos villes — à Ottawa ou ailleurs dans la grande région de Toronto, d'où je viens. Il y a des inspecteurs qui vérifient les travaux et qui s'assurent que certaines de ces exigences sont satisfaites. Pourquoi votre ministère et la SCHL ne collaborent-ils pas pour veiller à ce que ces exigences soient respectées? Plusieurs questions se posent, ici, parce que je veux que les choses soient bien faites. Si nous allons dépenser 2,3 milliards de dollars — 1,8 milliard ont déjà été dépensés et des fonds supplémentaires seront consentis pour Attawapiskat —, il est important que nous construisions ces maisons correctement de façon à ne pas mettre en péril la vie des gens qui y habitent. De toute évidence, il doit avoir une façon d'intervenir à ce sujet.

C'était ma première série de questions, monsieur le président.

Le président : Deux questions, dont l'une porte sur les besoins. Monsieur Carisse, la question est pour vous.

M. Carisse : Oui. Je veux bien fournir les tableaux pour les chiffres, comme cela a été demandé plus tôt. Ainsi, les choses seront un peu plus claires pour tout le monde. En ce qui concerne les chiffres de 85 000 ou de 35 000, je considère qu'ils signifient que les besoins sont très grands, et que nous pouvons tous nous accorder à dire que le nombre réel se situe quelque part entre les deux.

La situation a-t-elle une incidence sur les jeunes? Manifestement, elle se répercute sur les jeunes et les familles dans les collectivités, dans les réserves ou à l'extérieur. Il manque des logements sociaux à Toronto et à Ottawa. Comment pouvons-nous nous y prendre pour répondre aux besoins le mieux possible?

Nous examinons le financement fourni pour le Programme d'immobilisations et d'entretien — qui s'élève à un milliard de dollars, comme je l'ai mentionné plus tôt. Il n'y a pas 36 000 façons de répartir cet argent. Devons-nous nous concentrer uniquement sur le logement? Nous ne le pouvons pas. Nous devons nous occuper de l'eau, du logement, des écoles, des routes, des ponts, des liaisons entre les collectivités et nous devons nous assurer que les routes sont entretenues correctement. Il y a tant à faire. Nous faisons du mieux que nous pouvons, avec les fonds que nous avons.

En ce qui concerne le logement tout particulièrement, le gouvernement ne finance pas le coût des habitations à hauteur de 100 p. 100. Nous nous attendons à ce que les collectivités contribuent un peu également. En conséquence, qu'il s'agisse de revenus autonomes que les Premières Nations peuvent obtenir le cas échéant, de l'allocation de logement, de logements locatifs, de négociation d'hypothèques auprès du secteur privé ou des possibilités offertes par le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations, les besoins sont énormes. Nous essayons d'y répondre du mieux que nous pouvons.

Nous examinons aussi différentes façons de financer l'infrastructure. Par exemple, dans le cas de l'eau, nous examinons la possibilité de conclure un partenariat public-privé important avec l'Atlantic Policy Congress pour les 33 collectivités de la région de l'Atlantique ainsi qu'un partenariat public-privé dans le Nord du Manitoba pour la construction d'écoles dans quatre collectivités. Les partenariats public-privé ne sont pas une panacée —, ils peuvent donner de bons résultats ou des résultats décevants. Ils donnent de bons résultats dans certains cas. Ce dont nous avons besoin, et c'est un cliché, ce sont plus d'outils dans le coffre à outils que nous amenons avec nous lorsque nous nous rendons dans ces collectivités.

Pendant longtemps, nous avons essayé de fournir des maisons unifamiliales avec une certaine façade. Toutefois, compte tenu des besoins actuels, nous devons étendre notre formule et voir ce qui existe à l'extérieur des réserves et à l'intérieur. Les collectivités ont besoin de complexes d'habitation, de maisons unifamiliales et, dans certains cas, de maisons pour les personnes âgées. Nous essayons de construire ces habitations.

Pour ce qui est de répondre aux besoins existants, je conviens tout à fait que nous devons résolument faire plus pour le logement et travailler pour cela avec les collectivités. Par exemple, il y a au Québec un établissement financier autochtone avec lequel nous travaillons. Il s'agit de la Société d'épargne des Autochtones du Canada, appelé la SEDAC, je crois. Nous avons aidé des Autochtones à recueillir un cautionnement de cinq millions de dollars qu'ils ont utilisé pour construire des habitations sans avoir eu à recourir à des garanties de prêts ministérielles. Cette initiative a été réalisée dans la collectivité de Wendake, près de Québec, et nous essayons maintenant d'étendre la formule à d'autres collectivités un peu partout au Canada.

Nous sommes en train d'examiner un projet en PPP qui a été réalisé à Vancouver pour la construction de logements sociaux à l'extérieur de la réserve; nous cherchons à déterminer quelles occasions peuvent se présenter qui nous permettraient d'aider à la réalisation d'un autre projet et quels sont les outils que nous pourrions fournir aux collectivités. Tout comme les Premières Nations, nous voulons voir ce chiffre diminuer. Nous voulons nous attaquer à ce problème, mais nous devons utiliser les outils que nous avons, et peut-être quelques nouveaux outils, pour étirer le financement le plus possible.

Le président : Merci. Je crois que vous pointez dans la direction dans laquelle le comité voudra finalement s'orienter, soit des façons créatives de répondre à des besoins énormes.

La deuxième question s'adressait à vous deux : il s'agit de l'inspection. Je crois que le comité va entendre le représentant de l'organisme qui intervient dans ce domaine. Pouvez-vous répondre à la préoccupation du sénateur Meredith?

Mme Darke : Je pourrais peut-être commencer, et M. Carisse pourra ensuite ajouter son grain de sel.

La SCHL exige que les Premières Nations embauchent un inspecteur ou utilisent les services d'un expert qui a les qualifications nécessaires pour mener l'inspection. Il ne s'agit pas simplement de demander à quelqu'un d'inspecter les logements et d'informer la Première Nation et le conseil que les exigences du code ont été satisfaites. Il y a des exigences particulières à respecter, des qualifications précises à avoir. Vous avez dit que c'était comme une municipalité. C'est absolument cela; et c'est la même chose à l'intérieur des réserves et à l'extérieur. Pour pouvoir garantir que le code a été respecté, un inspecteur doit avoir certaines qualifications. Nous nous attendons donc à ce qu'une Première Nation qui déclare que le code a été respecté le fasse sur la base de l'avis reçu d'un inspecteur qualifié.

Les coûts liés aux inspections sont remboursables, car nous comprenons que la Première Nation devra peut-être acheter ces services; ces coûts sont donc assurément remboursables.

C'est un secteur d'activité que la SCHL et Affaires autochtones et Développement du Nord Canada estiment tous deux réellement important. Selon nous, il faut réellement fournir une certaine formation; il faut également une meilleure compréhension des qualifications requises, par exemple, dans le cas des inspecteurs. La SCHL s'emploie actuellement à mettre en œuvre certains changements dans son processus de façon que lorsqu'une Première Nation l'assure, ou affirme dans sa déclaration, que le code a été respecté, elle lui fournisse également les renseignements attestant que la personne qui a effectué l'inspection possède les qualifications nécessaires.

Voilà donc certaines mesures que nous prenons. La SCHL travaille très étroitement avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. C'est un sujet dont nous discutons et dont nous continuerons de discuter. Nous pourrions probablement faire plus et devrions faire plus pour le développement du potentiel et la formation; la SCHL collaborera assurément avec AADNC à cet égard.

J'aimerais simplement terminer mon intervention en précisant que, parce que les Premières Nations fonctionnent comme des municipalités et qu'elles ont la compétence dans ce domaine, nous essayons de travailler très étroitement avec elles et de faire valoir qu'il faut disposer de l'expertise requise, mais nous ne pouvons pas aller aussi loin que le gouvernement fédéral dans nos vérifications, si je peux m'exprimer ainsi, parce que ce sont les Premières Nations qui possèdent, exploitent et développent les logements et qui exercent la compétence dans ce domaine.

Le sénateur Meredith : Si je peux, monsieur le président, j'aimerais poser une petite question : en ce qui concerne le respect du code, il y a ceux qui produisent les déclarations, mais qui, fondamentalement, procède à une certaine vérification de ces déclarations? Les maisons que l'on construit actuellement présentent encore des problèmes. Il ne s'agit pas d'affirmer haut et fort que les déclarations produites ne sont pas entièrement de bonne foi, mais il faut quand même un système quelconque de freins et de contrepoids pour obliger ces personnes à satisfaire à une norme plus élevée. Quelle sorte d'organisme indépendant faudrait-il? C'est ce à quoi je veux en venir : cette vérification nécessite la collaboration d'Affaires autochtones et de la SCHL. Il arrive que des problèmes graves surviennent dans ces maisons, des problèmes qui mettent la santé de leurs occupants en danger, peu de temps après que des déclarations censées avoir été faites de bonne foi ont été fournies et qu'on a affirmé que les travaux avaient été faits correctement. Voilà où je veux en venir : je crois qu'il faut absolument mettre en place certaines vérifications de plus, sans que le gouvernement fédéral procède à une véritable inspection. Il faut une certaine forme de collaboration, sans quoi les problèmes persisteront, les nouvelles constructions ne satisferont pas aux normes et la santé ainsi que la vie de ces gens seront encore mises en danger.

Mme Darke : J'ai parlé de deux vérifications pour ce qui est, j'imagine, des programmes de la SCHL. Nous exigerons notamment une certification par un inspecteur qualifié. Ensuite, comme je l'ai dit plus tôt, nous procédons régulièrement à des inspections, au cours desquelles nous examinons l'état physique des lieux, pour les projets que nous finançons. Nous procédons par échantillonnage; ces inspections sont réparties dans le temps. Lorsque nous repérons des problèmes pour un logement donné, nous en parlons avec la Première Nation et nous l'aidons à trouver la meilleure façon de corriger la situation.

Le sénateur Sibbeston : Cela m'intéresse de savoir comment les maisons sont construites pour les Premières Nations. Je sais que certaines collectivités s'organisent bien, qu'elles construisent elles-mêmes leurs maisons, qu'elles ont les compétences et les gens de métier ainsi que les entrepreneurs nécessaires pour faire le travail. Les collectivités les moins bien organisées, ou les collectivités à problèmes, un peu comme celle d'Attawapiskat, ont besoin de maisons modulaires et de maisons mobiles. Fondamentalement, tout est fourni aux habitants de l'endroit. Les gens dans ces collectivités n'ont peut-être pas les compétences et la formation nécessaires et il n'y a pas de possibilités pour eux d'obtenir de la formation et du travail. Pourriez-vous nous dire quelque chose à ce sujet? Est-ce vrai que c'est la situation pour beaucoup de collectivités autochtones? Le logement est un tel problème parce qu'elles ne savent pas construire les maisons?

Je remarque que le gouvernement, dans le cas d'Attawapiskat, a versé 3,3 millions de dollars pour la construction ou l'achat de 22 maisons modulaires. Cela représente 150 000 $ par maison. Je sais qu'on n'achète pas un château avec 150 000 $, car il y a les coûts du transport, de l'assemblage et du branchement des maisons aux services publics, et cetera. Alors, si certaines collectivités sont mal logées, est-ce parce qu'elles sont moins bien organisées, qu'elles habitent peut- être dans des régions éloignées, que leurs membres n'ont tout simplement pas les compétences requises et qu'elles doivent fondamentalement tout faire venir de l'extérieur?

Mme Darke : Je ne peux vraiment parler que des maisons financées par la SCHL. Comme je l'ai dit dans mon exposé, environ 469 maisons ont été construites, en 2012-2013, par exemple, dans le cadre du Programme de logement sans but lucratif (article 95). La SCHL finance principalement de nouvelles constructions, et non pas le genre de maisons modulaires aménagées à Attawapiskat dont vous avez parlé.

Les Premières Nations fonctionnent de différentes façons pour construire leurs maisons. Les Premières Nations plus développées disposent de leur propre entreprise de construction et vont construire elles-mêmes leurs maisons. Les autres vont probablement embaucher quelqu'un pour démarrer le projet et s'occuper des contrats. Ces collectivités font souvent embaucher d'autres organismes autochtones.

Nous avons des cas intéressants où des Premières Nations développées qui ont leurs propres entreprises de construction embauchent des membres d'autres collectivités autochtones. Un cas vraiment intéressant, à mon avis, est celui de la Première Nation de Fort McKay, en Alberta, qui embauche des jeunes de la Tribu des Blood, une tribu du Sud de l'Alberta, pour leur enseigner des métiers de la construction et pour les faire travailler à la construction de maisons dans leur collectivité. Les modes de fonctionnement sont très variés, vous avez absolument raison, et ils dépendent un peu du niveau de développement de la Première Nation. En ce qui concerne nos programmes, les collectivités qui n'ont pas l'expertise l'achètent à l'extérieur et, là encore, les coûts associés à la construction peuvent être remboursés dans le cadre du programme de l'article 95.

M. Carisse : Je pourrais également donner l'exemple des Mohawks de la baie de Quinte. Nous collaborons activement avec eux pour former des membres de leur collectivité et les faire travailler comme charpentiers, électriciens, et cetera.

En ce qui concerne la tribu des Blood — et on parle ici des maisons préfabriquées ou modulaires — il faut se demander quels sont les besoins, comment y répondre de façon durable et comment intervenir rapidement. Pour les maisons préfabriquées, par exemple, la tribu des Blood dispose de sa propre entreprise de construction. Il s'agit d'une initiative de développement économique mise en œuvre en Alberta qui fonctionne magnifiquement bien. Ces gens construisent des maisons qui satisfont aux normes et qui sont prêtes à être livrées. On ne trouve pas de ces maisons seulement dans les réserves. Je viens d'une petite collectivité — c'est plus grand maintenant — Orléans, située à l'est d'ici. On compte des maisons préfabriquées dans beaucoup de secteurs de la vieille partie de la ville. Si elles sont construites dans les règles de l'art, les maisons préfabriquées sont de bonnes maisons, mais elles doivent, naturellement, être bien entretenues. Il arrive parfois qu'il faut fournir un logement de toute urgence aux membres d'une collectivité, un logement qui ne pourra pas servir à long terme. C'est à ce moment-là qu'on peut recourir aux maisons modulaires, et cetera. Toutefois, différentes possibilités se présentent pour le logement de longue durée. Il n'est pas nécessaire de partir de zéro. Il faut examiner les possibilités et, par la même occasion, les avantages qu'elles présentent pour la collectivité ainsi que la façon de fournir la formation requise dans cette collectivité.

C'est la même chose lorsque nous réalisons de grands projets d'infrastructures. Quelle que soit la soumission, nous recherchons des entreprises qui utilisent les services existants dans leur collectivité ou qui donnent de la formation en charpenterie ou en électricité aux gens de la place.

Le sénateur Sibbeston : Le ministère offre-t-il de la formation sur les techniques de construction de maisons? Je sais par expérience que le logement compte pour beaucoup dans la vie des gens qui habitent dans le Nord. Nous avons mené un processus complet pour former les gens sur la façon de construire eux-mêmes leurs maisons. Au cours des 40 dernières années, les collectivités du Nord ont acquis les compétences requises en charpenterie et en électricité pour construire et entretenir elles-mêmes leurs maisons. Voilà les progrès qui ont été réalisés, mais le gouvernement a consacré beaucoup d'argent à la formation des gens pour les amener à ce niveau.

Votre ministère offre-t-il de la formation à ces collectivités pour leur apprendre à construire un jour de bonnes maisons et des maisons saines?

M. Carisse : Nous n'avons pas de programme particulier de formation sur la construction de logements à notre ministère. Toutefois, le financement que nous offrons peut servir à la formation. Comme je l'ai déjà dit, nous aidons à financer les organismes des Premières Nations qui donnent de la formation ou qui aident les collectivités à renforcer leurs capacités. RHDCC exécute des programmes pour favoriser ce renforcement des capacités et la formation dans ce domaine. J'aimerais mieux que Mme Darke parle elle-même des programmes que son organisme offre pour le renforcement des capacités.

Mme Darke : La SCHL n'a pas véritablement de programme de formation particulier sur la construction de maisons pour les Autochtones. Je crois comprendre que EDSC a certains programmes de formation pour les Autochtones, mais je ne les connais pas très bien. Ce ministère a peut-être quelque chose de pertinent.

J'aimerais dire que, même si nous n'avons pas véritablement de programme de cette nature, comme je l'ai dit, nous offrons une certaine aide pour le développement du potentiel ou le renforcement des capacités; la SCHL a aussi réalisé certains projets de recherche. Au cours des dernières années notamment, nous avons construit quatre maisons de démonstration dans le Nord. Je crois que deux de ces maisons se trouvent au Yukon; nous avons réalisé les projets avec la collaboration de la province et des Premières Nations — une à Arviat et l'autre à Inuvik — quatre en tout. Ces maisons sont toutes très novatrices en raison de leur durabilité et de leur conception écologique. Elles sont toutes précisément adaptées aux particularités du Nord. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec d'autres organismes pour la conception et la construction de ces maisons et pour exercer, par la suite, un suivi sur leur rendement énergétique. Là encore, même s'il ne s'agissait pas précisément de formation, je dois dire que les collectivités visées ont certainement appris de cette expérience.

J'ai parlé dans mon exposé de stages financés par la Stratégie emploi jeunesse. Là non plus, il ne s'agit pas d'un programme destiné précisément à fournir une formation en bonne et due forme sur la construction de maisons. Néanmoins, cette formation serait admissible à du financement. Un jeune pourrait donc être embauché pour travailler sur des chantiers de construction résidentielle et obtenir une formation dans ce contexte.

Le président : Madame Darke, pourriez-vous me donner plus de détails sur les projets pilotes que vous avez mentionnés? Pourriez-vous fournir cette information au comité, s'il vous plaît? Vous avez parlé de maisons de démonstration.

Mme Darke : Oui.

Le président : Pas maintenant, mais après la réunion, ce serait très bien.

Mme Darke : Certainement. Des comptes rendus et de courtes descriptions ont été rédigés au sujet de ces maisons de démonstration, et nous serons heureux de les faire suivre au comité.

Le président : Adressez-les à la greffière, s'il vous plaît, merci beaucoup.

Le sénateur Tannas : Merci de venir nous rencontrer aujourd'hui.

J'ai deux ou trois questions pour Mme Darke. Tout d'abord, vous avez parlé de votre portefeuille. Pouvez-vous me dire combien de logements compte le portefeuille de la SCHL?

Vous pourriez peut-être répondre à ma question en différenciant deux segments de votre portefeuille. Un de ces segments serait, si vous voulez, les prêts consentis aux bandes. Vous en avez parlé, à savoir que la bande est l'emprunteur. Vous financez ces logements. S'agit-il véritablement de prêts? Sont-ils véritablement remboursés? Qui signe le chèque à la fin? Quelqu'un vous remet-il un chèque à la fin? Qui rembourse le prêt? Vous pourriez peut-être nous parler des taux de défaut de remboursement, ce genre de choses, concernant ces prêts particuliers.

Le président : Devrions-nous nous arrêter ici? Pouvez-vous répondre, madame Darke, s'il vous plaît?

Mme Darke : Merci.

Le président : Non pas que je veuille vous enlever la parole, monsieur le sénateur.

Mme Darke : J'ai l'impression que d'autres questions s'en viennent, mais permettez-moi de répondre à celles-ci.

Pour ce qui est du nombre de logements compris dans notre portefeuille, celui-ci s'établit à 29 300 logements financés par la SCHL. Je ne suis pas certaine de bien comprendre lorsque vous me demandez de différencier les différentes parties du portefeuille, mais permettez-moi de m'y prendre autrement pour essayer de bien vous faire comprendre notre mode de fonctionnement.

Je n'ai pas en tête la proportion de ces 29 300 logements qui ont fait l'objet d'un prêt contracté directement auprès de la SCHL, mais cette proportion est très élevée. Dans la plupart des cas, la SCHL fournit un prêt direct à la Première Nation ainsi qu'une subvention continue qui s'échelonne sur une période d'à peu près 25 ans. C'est la Première Nation qui est propriétaire du projet.

Qui signe le chèque? Un responsable de la Première Nation signe le chèque destiné à la SCHL pour le prêt consenti. Quelqu'un s'assure-t-il que le prêt est remboursé? Oui, tout à fait. Nous gérons nos opérations de prêts comme n'importe quel autre organisme le ferait. La différence entre nous et un prêteur du secteur privé tient, j'imagine, à ce que nous gérons nos opérations de prêts de façon à faire simplement nos frais. Voilà pourquoi nous sommes en mesure d'offrir des taux d'intérêt peu élevés aux Premières Nations.

Les Premières Nations remboursent assurément leurs prêts; nous avons d'ailleurs en place une garantie ministérielle de prêt; donc, si un compte est en souffrance, la SCHL collabore avec la Première Nation et Affaires autochtones et Développement du Nord pour trouver une façon de corriger la situation et de remettre le projet sur ses rails. S'il devait y avoir défaut de paiement, la SCHL consulterait Affaires autochtones et Développement du Nord. Si nous devions rappeler le prêt, nous utiliserions, fondamentalement, la garantie ministérielle de prêts. Nous serions payés, et Affaires autochtones et Développement du Nord s'occuperait de se faire rembourser. Le ministère s'adresserait à la Première Nation pour cela.

Les arriérés sont très rares. Je n'ai pas de chiffres exacts devant moi, mais la dernière fois que j'ai regardé ces données, la proportion d'arriérés s'élevait à environ 1 p. 100. Les Premières Nations suivent de près le remboursement de leurs prêts, et elles les remboursent absolument.

Le sénateur Tannas : Bravo. J'ai une question de plus. Il y a également les prêts consentis au moyen du Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations. Pouvez-vous nous dire, sur les quelque 30 000 logements environ que vous financez, combien le sont au moyen de ce fonds, d'un autre fonds ou d'un autre programme au moyen duquel vous prêtez de l'argent à ces gens?

Mme Darke : J'aimerais d'abord apporter une précision : le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations est un fonds distinct. C'est une fiducie. Il ne relève donc pas de la SCHL ni d'Affaires autochtones et Développement du Nord. Les administrateurs du fonds sont nommés par les ministres responsables de la SCHL et d'AADNC, mais c'est un fonds distinct. En vertu de l'acte constitutif de la fiducie, le ministre responsable de la SCHL est chargé d'assurer une certaine surveillance de haut niveau. Voilà donc quelques précisions sur le fonds en question.

Les prêts consentis au moyen de ce fonds sont fournis par un prêteur approuvé du secteur privé. La Première Nation qui demande un prêt est évaluée par les responsables du fonds qui déterminent si cette première Nation se qualifie pour la bonification de crédit. La Première Nation doit satisfaire à un certain nombre de critères pour que sa demande soit approuvée, les responsables du fonds déterminent ensuite une valeur pour la garantie de bonification du crédit.

Les membres de la Première Nation sur la réserve s'adressent ensuite à un prêteur approuvé — la Banque Royale ou la Banque de Montréal. Soit dit en passant, les prêteurs doivent également être approuvés par les responsables du fonds. Un accord est conclu entre le prêteur et la Première Nation, et un autre, entre la Première Nation et les responsables du fonds

Si une personne n'effectue pas ses paiements de remboursement, le prêteur s'adresse d'abord à la Première Nation, qui paiera à sa place. Si la Première Nation ne rembourse pas elle-même, ce sont les responsables du fonds qui interviennent. Des maximums, et cetera, sont établis.

Pour vous donner une idée, le nombre de prêts en cours — consentis à des personnes approuvées par les responsables du fonds — s'élève à environ 52 en tout. Environ 61 millions de dollars de prêts sont garantis actuellement au moyen du fonds.

Le sénateur Tannas : Avez-vous dit 52 prêts et 60 millions de dollars garantis? Ce sont des maisons chères.

Mme Darke : Non, non. Il ne s'agit pas de garanties pour ces prêts. On compte 53 Premières Nations dont la bonification du crédit a été approuvée. Au fil des ans, leurs membres se présenteront à la banque dans le but d'obtenir un prêt pour construire, rénover ou acheter une maison. La Première Nation aura une garantie de bonification de crédit et, avec le temps, ses membres pourront obtenir des prêts en s'appuyant sur cette garantie.

Le sénateur Tannas : Nous ne savons donc pas combien de gens sont en fait propriétaires de leurs logements. Nous savons qu'il y a 62 grandes entités, mais nous ne savons pas combien de gens vivent réellement dans les maisons.

Mme Darke : C'est bien cela. Nous savons que des garanties de bonification de crédit ont été approuvées pour 53 Premières Nations en tout et nous savons que des prêts — il y en a 52 en tout — ont été accordés jusqu'à maintenant à des membres de certaines de ces Premières Nations.

Le sénateur Tannas : Merci.

Mme Darke : Cela vous éclaire-t-il?

Le sénateur Tannas : Oui, merci.

Le sénateur Moore : Je suis nouveau, alors j'essaie de bien comprendre ce qui se passe. Certaines de mes questions vous paraîtront peut-être naïves, mais je veux comprendre les principes de base.

Selon l'information fournie par la Bibliothèque du Parlement, l'Assemblée des Premières Nations estimait, en 2011, qu'il manque environ 85 000 logements dans les réserves. Monsieur Carisse, votre ministère a jugé, au cours de la même période, qu'il manque entre 20 000 et 35 000 logements. Il y a une variation de 75 p. 100 dans cette fourchette. Je ne comprends pas qu'il y ait une telle variation dans les chiffres de votre propre ministère ni un tel écart entre vos chiffres et ceux de l'Assemblée des Premières Nations. Pouvez-vous m'expliquer cela, s'il vous plaît?

M. Carisse : L'écart est important. Je ne peux expliquer celui qui nous sépare de l'APN. Il faudra vous adresser à un membre de cette organisation pour cela. Je sais toutefois que les chiffres de 20 000 à 35 000 auxquels nous arrivons à notre ministère ont été établis à la suite d'une évaluation des besoins en logements. À quel niveau situons-nous la pénurie de logements? Comme je l'ai déjà dit, cela peut être n'importe où entre les deux valeurs. Ce peut être le chiffre le plus élevé ou le moins élevé. Pour ma part, même s'il manque 35 000 logements, c'est toujours un nombre élevé et nous devons nous occuper du problème.

Les chiffres sont toujours très difficiles à établir pour l'infrastructure. Nous avons vécu une situation semblable lorsque nous avons procédé à une évaluation nationale des besoins pour la gestion de l'eau un peu partout au pays. Les besoins s'élevaient à des milliards de dollars. Il faut dire en toute justice qu'il ne s'agit pas d'investissements d'un million ou de quelques centaines de millions de dollars pour les aqueducs et les égouts, mais de milliards de dollars.

Là encore, pour ce qui est du logement, nous faisons face à un problème important qui nécessite la concertation de la famille fédérale ou des différents ministères ainsi que celle des Premières Nations et de leurs organisations. Nous pouvons examiner la chose d'un peu plus près, mais c'est de là que proviennent les chiffres.

Le sénateur Moore : Votre ministère n'est-il pas censé avoir les chiffres exacts? N'est-ce pas vous qui prenez les décisions en bout de ligne? Comme vous êtes responsables du financement et de la surveillance, ne devriez-vous pas détenir les chiffres les plus exacts?

M. Carisse : Nous avons des chiffres fournis par les Premières Nations. Il y a une évaluation. Dans nos systèmes d'immobilisations, les Premières Nations fournissent les chiffres sur leurs besoins, et nous les additionnons pour obtenir un nombre total.

Le sénateur Moore : Vous additionnez les chiffres? Que voulez-vous dire? Les Premières Nations parlent de 85 000 logements manquants, vous parlez de 20 000 à 35 000. Sur quoi vous fondez-vous pour arriver à ces chiffres? Je ne comprends pas. Je ne comprends vraiment pas. Cet écart dans les chiffres n'a pas commencé l'an dernier. Cela fait des siècles que nous traitons avec les Premières Nations. Comment se fait-il que nous ne connaissions pas encore clairement leurs besoins?

M. Carisse : J'imagine que les besoins sont élevés. Je ne peux pas en dire plus au sujet des chiffres. Ce sont les chiffres que nous avons pour l'instant. J'aimerais beaucoup vous dire que nous avons des chiffres plus précis, mais nous devrions pour cela nous rendre dans chacune des collectivités pour évaluer la situation. Le ministère estime que les Premières Nations se gouvernent elles-mêmes, qu'elles connaissent leurs besoins et nous en font rapport. Nous devons travailler actuellement à partir de deux évaluations qui donnent des chiffres différents. Nous pouvons continuer de travailler à la lumière de ces chiffres pour en arriver à connaître les besoins exacts. Personnellement, j'occuperais plutôt son temps à essayer de répondre aux besoins sans égard au nombre total.

Le sénateur Moore : Voilà qui est très noble, mais, à mon avis, il faut toujours s'appuyer sur un chiffre. C'est à partir de cela que vous pouvez faire de grands progrès. Je ne comprends pas pourquoi vous ne vous rendez pas dans toutes les collectivités des Premières Nations du pays pour consulter les chefs de façon à obtenir des chiffres fiables à partir desquels nous pourrions planifier et budgéter de façon précise. Je ne comprends tout simplement pas cela.

Le président : Monsieur le sénateur Moore, je pourrais peut-être vous informer que nous avons invité les responsables de l'APN qui s'occupent d'évaluer les besoins en logement et que nous nous attendons à ce qu'ils comparaissent devant nous. On me dit également que l'évaluation des besoins en logements effectuée par le ministère en août 2011 est disponible et publique. Nous pourrions la distribuer aux membres du comité.

Le sénateur Moore : Cette information figure également dans un rapport déposé à la Chambre des communes lors des discussions prébudgétaires en 2011. Nous pouvons consulter le mémoire établi à cet effet par la Bibliothèque du Parlement.

Madame Darke, vous avez mentionné le conseil des fiduciaires lorsque vous avez répondu à la question du sénateur Tannas au sujet de ce fonds. Ce conseil compte-t-il des membres des Premières Nations?

Mme Darke : Oui. Il y a des représentants des Premières Nations au nombre des fiduciaires, absolument. Je n'ai pas en tête le nombre exact, mais je sais de façon certaine que le président du conseil est un membre des Premières Nations, ainsi que le vice-président.

Le sénateur Moore : Auriez-vous l'obligeance d'envoyer la liste des membres du conseil des fiduciaires à la greffière?

Mme Darke : Certainement.

Le sénateur Moore : Le sénateur Meredith a posé des questions très intéressantes sur le code de construction et la conformité des logements à ce code. Madame Darke, vous avez dit, je crois, que vous vous rendez compte maintenant que vous devez prendre des mesures pour vous assurer que le code est respecté.

Depuis combien de temps la SCHL finance-t-elle des logements dans les réserves, étant donné que nous venons de nous rendre compte seulement aujourd'hui, en 2013, qu'il faudrait insister sur le respect du code de construction? Comment se fait-il que nous venions tout juste de nous rendre compte qu'il faut agir et que nous avons peut-être laissé passer des choses qui font que les logements sont contaminés par des moisissures et impropres à l'habitation? Comment se fait-il que nous venions tout juste de nous rendre compte de cela?

Mme Darke : Je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point. La SCHL ne vient pas tout juste de se rendre compte que les codes ne sont pas respectés. Nous exigeons depuis le début que les logements construits avec notre financement satisfassent aux exigences des codes. Nous exigeons que les Premières Nations présentent une déclaration attestant que les codes sont respectés. En fait, nous avons pour politique, et cela n'est pas nouveau, d'exiger que les Premières Nations signent ces déclarations à la lumière d'un avis émis par des professionnels qualifiés. Rien de cela n'est nouveau. Cette exigence a toujours été en vigueur.

La seule chose qui est nouvelle, c'est que nous exigerons maintenant des documents officiels à l'appui de ces déclarations. Lorsque nous examinons l'état des logements que nous avons financés au fil des ans, nous constatons que seulement 10 p. 100 de ces logements sont dans un mauvais état. Je dirais que le respect du code a toujours été un volet important de notre programme, et ce, depuis le début. Nous avons collaboré avec les Premières Nations pour qu'elles comprennent bien nos exigences et pour fournir la formation et le renforcement des capacités nécessaires. Nous travaillons depuis des années avec des organismes comme l'Association nationale des agents de bâtiment des Premières Nations.

Comme je l'ai dit, nous procédons à des examens cycliques de l'état des logements et nous constatons qu'en général, les logements sont d'assez bonne qualité. Nous avons mis en place dernièrement des freins et contrepoids, si je peux m'exprimer ainsi.

Le sénateur Moore : Vous avez dit dans votre déclaration préliminaire qu'un sondage effectué en 2006, soit il y a sept ans, a révélé que 10 p. 100 des logements étaient en mauvais état. Vous avez également déclaré que 36 p. 100 étaient dans un état passable, ce qui veut dire que ces logements nécessitent des travaux. Vous vous retrouvez donc avec 46 p. 100 des logements qui ont besoin de certains travaux. N'est-ce pas vrai?

Mme Darke : Je dois préciser certaines choses.

Le sénateur Moore : Avez-vous des chiffres plus récents que ceux de 2006?

Mme Darke : Je vais vous dire d'où viennent ces chiffres. Les chiffres de 2006 remontent au recensement et ils s'appliquent à tous les logements en place dans les réserves, mais ces logements ne sont pas tous financés par la SCHL. Ce pourcentage provient du recensement de 2006, et je crois que c'est l'information la plus récente à ce sujet.

Les autres chiffres dont je vous ai parlé, soit que 53 p. 100 sont dans un bon état et 36 p. 100, dans un état passable, concernent précisément les 29 300 logements financés par la SCHL.

Le sénateur Moore : Oui, je comprends cela.

Mme Darke : M. Carisse a dit, je crois, qu'on compte maintenant environ 108 000 habitations dans les réserves. Celles qui sont financées par la SCHL ne représentent qu'une partie de toutes ces habitations.

Le sénateur Moore : Pourrais-je poser encore une petite question pour terminer, monsieur le président?

Le président : Oui.

Le sénateur Moore : Madame Darke, la question s'adresse à vous également. Vous avez déclaré dans votre exposé que le gouvernement, par l'entremise de la SCHL, fournit, chaque année, deux milliards de dollars pour répondre aux besoins en logement des Canadiens à faible revenu. S'agit-il de tous les Canadiens à faible revenu? Parlez-vous seulement des personnes qui vivent à l'intérieur ou à l'extérieur des réserves?

Mme Darke : Je pourrais peut-être apporter certaines précisions. La somme de deux milliards de dollars s'applique à tout le financement que la SCHL fournit pour le logement en une année. Cela concerne donc les gens à l'intérieur et à l'extérieur des réserves.

Le sénateur Moore : Lorsque vous parlez des gens qui vivent à l'extérieur des réserves, vous parlez des Autochtones et des non-Autochtones?

Mme Darke : C'est bien cela.

Le sénateur Moore : Tous les Canadiens.

Mme Darke : Oui.

Le sénateur Wallace : Le président a commencé la séance en déclarant que nous vous avons invités à venir ici aujourd'hui pour nous donner une information générale de façon que nous soyons mieux outillés pour décider des points sur lesquels nous devrons concentrer notre attention pour avancer dans ce dossier. Je dois dire que l'information que vous nous donnez aujourd'hui est très utile et nous vous remercions pour cela.

Monsieur Carisse, comme vous l'avez dit, il semble vraiment y avoir une pénurie de logements dans les réserves. J'imagine que le manque de financement compte pour beaucoup, mais je me demande s'il n'y a pas des facteurs importants qui contribuent à cette pénurie, pouvez-vous nous dire quelque chose à ce sujet? Y a-t-il des obstacles non financiers sur lesquels nous pourrions nous concentrer pour faire avancer les choses lorsque nous aurons terminé notre travail?

M. Carisse : Bonne question. Nous vous avons parlé de certains de ces obstacles concernant les capacités présentes dans les collectivités et les outils dont ces collectivités ont besoin s'il est plus facile pour elles, même si le financement est disponible, d'utiliser certains outils pour contracter un prêt auprès d'un fonds privé ou d'un fonds pour les logements du marché pour répondre à certains de leurs besoins.

La plupart du temps, nous finançons l'infrastructure, non pas seulement le logement, selon la méthode de comptabilité de caisse. Ainsi, pour une école de 10 millions de dollars, nous comptons de six mois à un an pour la conception et les 10 années suivantes pour la construction. L'emprunteur doit rembourser la somme au cours des deux années suivantes, à raison de 5 millions de dollars par année et c'est terminé. C'est une façon assez sensée de procéder. Si nous pouvions rembourser nos hypothèques à l'intérieur de deux, ans, cela serait à notre avantage, toutefois, nous n'étirerions pas vraiment ces dollars autant que nous le pourrions.

Dans la situation qui nous occupe, tout particulièrement les logements situés dans les réserves, il faut comprendre que la terre est toujours assujettie au paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 et que le paragraphe 89(1) de la Loi sur les Indiens interdit la saisie des biens. S'ils n'ont pas ces outils, les membres des Premières Nations qui veulent construire leurs propres maisons, ce qui contribue à régler le problème de logement, ont de la difficulté à obtenir une hypothèque personnelle.

Toute collectivité, qu'elle soit éloignée, rurale ou urbaine, doit avoir, selon son emplacement, un certain nombre de logements sociaux, de logements du marché et de logements locatifs. Certaines collectivités pourraient réellement tirer avantage de cela; il y a des gens dans ces collectivités qui, je crois, voudraient réellement contracter eux-mêmes une hypothèque pour construire leurs propres maisons, mais qui ne le peuvent pas, à cause de la situation concernant les terres et cela est, à mon avis, un problème. Il y a vraiment un problème à ce niveau et des initiatives ont été avancées ou proposées dernièrement qui pourraient, à mon avis, aider à corriger la situation.

Je pense également à la discussion que nous avons eue au sujet des codes. Le respect des codes relatifs aux infrastructures et au bâtiment est inclus dans les accords de financement. Depuis un certain nombre d'années, la SCHL exige dans ses programmes que les logements soient construits en conformité avec les codes, mais, comme nous l'avons vu il y a un certain nombre d'années pour l'eau, et le vérificateur général nous avait alors dit de corriger la situation, il y avait une lacune au niveau de la réglementation concernant l'eau et les eaux usées. Nous avons les mêmes problèmes actuellement avec la réglementation des codes de construction. La réglementation dans ce domaine n'est pas stable.

Là encore, la question de la terre fait problème et je pense que le recours par les Premières Nations à certains outils pour financer la construction de leurs maisons pourrait beaucoup aider, parce que je ne crois pas que le gouvernement puisse fournir les milliards de dollars de plus qu'il faut pour répondre rapidement aux besoins.

Le sénateur Wallace : Oui. Je me posais simplement la question. Lorsque nous sommes aux prises avec des problèmes particuliers, il nous arrive tous de nous réveiller en pleine nuit et de nous rendre compte subitement qu'il y en a un plus grave que les autres et qu'en réglant ce problème, on pourrait sortir de l'impasse. Je me demandais simplement s'il n'y avait pas quelque chose comme ça. Je sais que vous avez un certain nombre de programmes, un certain nombre de dossiers auxquels vous devez tous apporter des améliorations, mais j'accepte ce que vous nous avez dit, à moins qu'il y ait quelque chose d'autre, quelque chose d'important, de fondamental sur lequel nous devrions nous pencher. Nous pouvons nous en tenir à votre réponse, si c'est ce que vous souhaitez.

M. Carisse : Je crois que nous avons soulevé les points les plus importants.

Le sénateur Wallace : Très bien. J'aimerais poser une autre question, si je peux. Vous avez dit que, pour régler les problèmes qui surviennent dans les réserves, les problèmes de logement, et cetera, il faut un partenariat entre le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que les chefs et les conseils des Premières Nations. Y aurait-il des problèmes dans la gestion de ces partenariats qui empêchent de répondre aux besoins des Autochtones?

M. Carisse : Cela arrive parfois. Je pense que les choses commencent à s'améliorer et, tout spécialement, dans le cas de nos rapports avec les gouvernements provinciaux et l'industrie, mais pas pour le logement à proprement parler. Il y a notamment un projet que nous avons réalisé dans le Nord de l'Ontario, avec la Nation des Nishnawbe Aski. Là-bas, 26 collectivités se sont regroupées pour mener à bien un projet de bande large dans le but d'avoir la fibre optique. Je crois que le projet s'est élevé à près de 90 millions de dollars. Il a donné lieu à un formidable partenariat entre la province, Bell Alliance et l'industrie et entre les Premières Nations; divers ministères provinciaux et fédéraux ont contribué au financement pour faire démarrer le projet et le mener à bonne fin. Il aurait été impossible pour un groupe donné de mener à bien une telle aventure. La méthode peut assurément être appliquée à d'autres éléments de l'infrastructure. Comment pouvons-nous collaborer le mieux possible entre ministères et avec les provinces? On ne sait jamais. Il peut y avoir certaines façons de travailler avec l'industrie. Comme je l'ai dit plus tôt, c'est Deloitte qui a travaillé au projet de logements en PPP à Vancouver. Alors, il y a peut-être des gens intéressés à faire la même chose pour les logements dans les réserves.

Le sénateur Wallace : J'imagine que certains de ces partenariats sont couronnés de succès et que ce n'est pas vraiment le cas pour d'autres. Ce n'était pas vraiment le but de la question.

Je me demande comment fonctionne, de façon générale, le partenariat entre les trois parties. Les trois parties travaillent-elles ensemble efficacement? Je me rends bien compte que chaque projet est unique, en fait. Y a-t-il des rivalités ou des chasses gardées qui empêchent les projets d'avancer? Devrions-nous nous pencher sur les rapports de travail qui ont cours dans ces partenariats? Voilà ma question.

M. Carisse : Il est certain que cela ne pourrait pas nuire. Il est toujours utile de bien connaître les rôles et les responsabilités de chacun, que ce soit pour le logement, l'eau, les écoles ou l'infrastructure, parce que, lorsque cela n'est pas le cas, la confusion s'installe et les gens se retrouvent mal informés. Toutefois, la méthode adoptée pour régler une situation au Québec peut différer de celle qui convient pour l'Alberta. Quelqu'un pourrait dire : « Et pourquoi donc? » Il y a de bonnes raisons pour cela, selon les organisations en cause. Tout le monde s'arrache le même dollar. Si nous réalisons un projet à un endroit, et un autre ailleurs en même temps, c'est bien de commencer quelque part et de faire des essais. J'ai parlé des PPP ou de ce que nous avons fait avec la Société d'épargne des Autochtones du Canada — appelons cela un projet pilote, à défaut d'un meilleur mot; pour reproduire un projet ailleurs, il faut le commencer quelque part, et je crois qu'il y a des possibilités. Nous sommes sur le point de faire les choses vraiment différemment, ce qui est bien, et nous pourrons donc répondre aux besoins non seulement pour le logement, mais aussi pour les autres éléments de l'infrastructure de ces collectivités.

La sénatrice Greene Raine : Merci beaucoup. Je suis très contente de ce que vous nous dites aujourd'hui. Un des avantages qu'il y a à poser ses questions en dernier, c'est qu'on a déjà obtenu réponse à la plupart de ses questions; toutefois, j'aimerais avoir quelques précisions, si vous n'y voyez pas d'objection, monsieur Carisse. Vous avez dit que pour les Premières Nations qui n'ont pas adhéré à la politique sur le logement de 1996, et cela est le cas pour les Premières Nations de la Colombie-Britannique et certaines Premières Nations de l'Ontario, le financement est accordé sous forme de subventions. Pourriez-vous nous éclairer un peu là-dessus? Pourquoi ces collectivités n'ont-elles pas adhéré à la politique? Nous avons maintenant deux systèmes, un dans lequel les Premières Nations exercent pratiquement le contrôle, et l'autre, qui consiste en une subvention du ministère.

M. Carisse : C'est vrai. La politique qui a été mise en place en 1996 a donné beaucoup plus de marge de manœuvre et de contrôle aux Premières Nations, étant donné que ce sont le chef et le conseil qui reçoivent le financement et qui décident de ce qu'ils vont en faire. La situation dépend fondamentalement de la taille des collectivités en cause. La Colombie britannique compte 200 collectivités des Premières Nations dont la grande majorité sont de très petite taille; on ne pouvait pas fournir un financement fondé sur une répartition préétablie pour des collectivités de 35 ou 40 personnes, il n'y avait tout simplement pas la population pour cela. Avec l'argent qu'elles auraient reçu, les petites collectivités n'auraient pas pu faire grand-chose, alors il a donc été décidé collectivement de ne faire qu'une seule proposition de projet pour la Colombie britannique. Cela a beaucoup facilité les choses pour ces collectivités qui ont ainsi eu accès à une caisse plus large pour le financement, même si, naturellement, le financement n'est pas annuel, mais quand on a accès à une caisse comme celle-là, on peut réellement faire quelque chose, alors que quelques milliers de dollars ne permettent pas d'accomplir grand-chose. Alors, grosso modo, c'est pourquoi elles ont décidé de s'en tenir au mode de la subvention, comme cela se faisait par le passé.

La sénatrice Greene Raine : Merci beaucoup. Je me suis toujours demandé pourquoi les maisons construites dans les réserves, qui sont, j'imagine, conçues par la SCHL ou par quelqu'un, sont toutes semblables et pourquoi elles sont toutes plutôt déprimantes. Qui conçoit ces maisons? Sont-elles conçues par les gens qui les habitent? Utilise-t-on le même modèle partout au pays ou tient-on compte du climat? J'aimerais bien avoir des précisions sur ce qui s'est fait par le passé et sur ce qui est prévu pour l'avenir. Pouvons-nous faire en sorte que les gens qui vivent dans ces collectivités soient réellement fiers de leurs logements?

Mme Darke : Je peux vous parler des programmes financés par la SCHL. La SCHL ne dessine pas les plans des maisons. Les maisons sont conçues, construites et gérées par les Premières Nations elles-mêmes. Nous n'avons pas de plan standard. Nous n'avons aucune exigence pour la conception des maisons.

M. Carisse : Je pourrais peut-être ajouter quelque chose pour mon ministère, le terme n'est pas bien juste, mais beaucoup de gens l'utilise dans les collectivités : on parle des maisons d'AINC, et ces maisons remontent aux années 1960 et plus. Il faudrait que je remonte un peu en arrière pour voir d'où vient le plan, mais c'était pas mal le même plan qui était utilisé partout. Nous procédons autrement maintenant. Depuis l'adoption de la politque en 1996, il appartient au chef et au conseil de décider des plans et d'arrêter leur choix sur des complexes résidentiels ou d'autres logements de taille différente de façon que les gens puissent faire construire les habitations qui répondent à leurs besoins.

Naturellement, ce sont là des exemples et telle n'est pas la situation partout, mais si vous allez à Wendake ou à Westbank, vous remarquerez que les maisons ne sont pas toutes pareilles. Il y a vraiment de belles maisons là-bas, qu'il serait bien agréable de voir dans les autres collectivités.

Ce sera différent, naturellement, dans certaines collectivités rurales éloignées qui ne profitent pas du même développement économique que celui des réserves plus urbaines, mais, même là, les gens ne peuvent pas tous avoir le même type de maison. Les célibataires n'ont pas besoin d'une maison comprenant trois chambres, comme cela peut être le cas pour une famille. Les logements ne peuvent pas tous être les mêmes dans une collectivité, cela va sans dire — comme on le voit à l'extérieur des réserves — et il en va de même pour les modes de financement, qu'il s'agisse du logement social, du logement locatif ou du logement du marché. Voilà ce qu'il devrait en être au final.

Tara Hutchinson, analyste principale en matière de politiques, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada : Si vous le permettez, j'aimerais ajouter une chose : nous avons reçu 150 millions de dollars dans le cadre du Plan d'action économique du Canada. Les immeubles d'habitation à logements multiples constituent une des catégories de financement importantes que nous avons, car les Premières Nations cherchent beaucoup à répondre aux besoins des personnes âgées et des gens qui s'installent pour la première fois dans leur propre logement. Nous avons donc pu avec ce financement construire des immeubles d'habitation à logements multiples un peu partout au pays. Je crois que ce type d'habitation va continuer de gagner en popularité.

La sénatrice Greene Raine : Les maisons modulaires, les maisons mobiles et les maisons transportables sont également des types d'habitation extrêmement utiles. Y a-t-il dans les collectivités des Premières Nations des parcs de maisons mobiles où les gens peuvent installer un motorisé ou une maison mobile qu'ils peuvent ensuite déplacer s'ils trouvent un emploi dans le Nord et ramener au parc pour l'hiver? Fait-on ce genre de planification à l'heure actuelle dans les collectivités des Premières Nations?

Mme Jeannie Dempster, qui travaille à la Division de la coordination des politiques stratégiques, pourrait peut-être nous informer là-dessus. Votre organisme participe-t-il à des projets de ce genre?

Jeannie Dempster, directrice, Division de la coordination des politiques stratégiques, Société canadienne d'hypothèques et de logement : Nous n'avons pas de politique particulière pour le genre d'habitation dont vous venez de parler; toutefois, l'idée est intéressante; nous pourrions la soumettre à notre organisation et examiner s'il est possible de la mettre en pratique.

Dans le Nord, par exemple, la conception des logements doit tenir compte des rigueurs du climat, de la durabilité de l'habitation et des produits utilisés pour sa construction ainsi que des coûts du transport — c'est-à-dire qu'il faut essayer de réduire les coûts, mais dans un souci de durabilité. La SCHL a des chercheurs qui s'occupent précisément du Nord et des conditions climatiques des régions rurales éloignées. Différents projets de recherche ont assurément été réalisés et certains sont toujours en cours. Nous avons des experts en systèmes de chauffage, et cetera.

Je ne crois pas que cela répond réellement à la dernière partie de votre question, mais pour ce qui est d'une politique concernant la conception des logements, je dirais, comme l'a fait Debra Darke plus tôt, que la SCHL a adopté des modèles intéressants de logements durables à l'appui de collectivités durables. Nous avons d'ailleurs rendus publics des travaux de recherche sur le sujet.

La sénatrice Greene Raine : Nous aimerions bien, je crois, que des représentants de l'industrie des logements préfabriqués et des maisons mobiles viennent nous parler de ce qui se fait actuellement dans ce domaine. Je crois comprendre que toutes les formules d'habitation sont envisageables.

Le président : Auriez-vous l'amabilité de faire parvenir à notre greffière les documents et les exemples pratiques dont vous disposez?

Nous en sommes à notre deuxième série de questions et j'ai deux personnes sur ma liste : les sénateurs Moore et Meredith.

Le sénateur Moore : J'ai une question au sujet de la situation qui a cours à Attawapiskat dont le sénateur Sibbeston a parlé plus tôt. Selon ce qu'ont dit les médias hier, les gens vivaient dans des maisons mobiles interreliées, et l'incendie a été causé par des chandelles utilisées par les occupants pour s'éclairer après une panne d'électricité provoquée par des tempêtes.

Monsieur Carisse, j'imagine que c'est votre ministère qui a fourni les maisons mobiles dans lesquelles ces gens habitaient. Avez-vous également fourni des génératrices pour parer aux pannes causées par les tempêtes? Étant donné qu'il y a beaucoup de tempêtes sous ces latitudes en ce temps-ci de l'année jusqu'au printemps, fournissez-vous des génératrices pour que les gens puissent s'éclairer et se chauffer en cas de panne d'électricité?

M. Carisse : Le complexe de maisons mobiles a été fourni par De Beers.

Le sénateur Moore : Par qui?

M. Carisse : Les mines De Beers. Les maisons mobiles étaient destinées aux gens qui travaillaient pour la compagnie. Nous avions fourni une aide et remis les maisons en état. Les maisons mobiles nécessitaient certains travaux de rénovation; comme vous l'avez vu dans les médias, il y avait une crise du logement à Attawapiskat. Nous avons cherché à loger certaines personnes dans ces maisons. L'incendie est survenu. Selon ce que nous savons, c'est une chandelle qui a allumé l'incendie dans l'aile ouest. Une odeur de fumée demeure dans l'aire commune, au centre. Le complexe est en forme de U et il y a un peu de fumée du côté est. Les travaux de nettoyage sont en cours. On veut que les gens réintègrent ces maisons le plus vite possible. Est-ce une solution permanente? Certainement pas, mais la collectivité utilise ces maisons pour l'instant.

Le sénateur Moore : Et qu'en est-il des génératrices?

M. Carisse : En ce qui concerne les génératrices, je ne connais pas au juste les détails de la panne, si c'est seulement la ligne qui alimentait le complexe qui a fait défaut, ou si la panne était généralisée. Je vous fournirai l'information à ce sujet.

Pour ce qui est de l'électricité, nous essayons le plus possible de brancher les collectivités au réseau. Comme vous le savez, les pannes surviennent de temps à autre. Certaines collectivités ont des génératrices au diésel qui sont reliées par des fils à l'infrastructure; ces génératrices peuvent donc tomber en panne également.

Le sénateur Moore : Pourriez-vous vérifier cela et nous faire savoir si on a fourni des génératrices convenables lorsque ces logements ont été mis en place?

M. Carisse : Certainement. Je vous fournirai cette information.

Le président : Merci, monsieur Carisse.

Le sénateur Meredith : Le sénateur Wallace a pour ainsi dire posé ma question avant que je sorte de la salle. Je voulais savoir quelles sont les difficultés rencontrées, je reviens toujours aux dirigeants, les chefs et les conseils, et à leur volonté sincère de collaborer avec Affaires autochtones pour faire installer rapidement des maisons, étant donné les pénuries observées dans les réserves.

Quelle collaboration offrent-ils? De quelle façon notre comité peut-il encourager les chefs à collaborer pour que nous puissions écrire dans notre rapport : « Voici certaines choses que nous avons découvertes concernant la collaboration de ces gens »? Comment pouvons-nous faire cela rapidement?

Mon autre question s'adresse à Mme Darke et concerne la mise à profit des nouvelles technologies pour lutter contre l'apparition de moisissures qui causent des problèmes de santé. A-t-on discuté des matériaux de construction utilisés? A-t-on, par exemple, envisagé l'utilisation de matériaux ininflammables ou de l'acier inoxydable au lieu du bois pour éviter l'apparition de moisissures, et cetera? Avez-vous eu des discussions en ce sens?

Nous savons que des problèmes se préparent pour l'avenir. Nous savons qu'il y a des problèmes dans les maisons construites actuellement. Cherche-t-on à trouver les meilleures pratiques pour la construction future des maisons de façon à prolonger la durée de vie de ces maisons et à éviter de devoir constamment les rénover?

Le président : La réponse pourrait-elle être plus courte que la question?

M. Carisse : Pour ce qui est du sérieux des dirigeants, je sais que des représentants des Premières Nations ou de leurs organisations ont comparu devant vous pour parler de divers sujets, comme l'eau et l'éducation. Lors des visites que j'ai effectuées dans ces collectivités, j'ai constaté, pour ma part, que le logement a probablement toujours été le plus gros problème. Il y a beaucoup de problèmes à régler, mais les dirigeants ont toujours parlé du problème du logement. Je crois qu'ils veulent sérieusement régler le problème. Je crois que les dirigeants des Premières Nations aimeraient disposer de certains outils pour cela.

Je crois que les Premières Nations devraient utiliser davantage certains outils, comme les logements locatifs, qui sont à leur disposition. Contrairement à ce qui se passe à l'extérieur des réserves, peu de collectivités disposent de logements locatifs adéquats, même si le ministère leur fournit des allocations pour le logement. Ce sont le chef et le conseil — qui forment le gouvernement de chaque Première Nation — qui décident des priorités, mais pour ce qui est de savoir si les allocations de logement sont utilisées pour le logement, si des logements locatifs sont offerts et si les gens paient leur loyer, je crois que c'est une question de mentalité.

En effet, les propriétaires doivent se sentir véritablement propriétaires de leurs maisons et en retirer une fierté; il ne s'agit pas simplement de maisons données par le chef et le conseil, c'est leurs maisons à eux. Les propriétaires doivent apprendre à être fiers de leurs maisons. Je crois qu'ils verraient ainsi l'entretien de leurs maisons d'un tout autre œil, et il en serait de même pour les chefs et les conseils. Des représentants vous parleront des droits pour le logement fondés sur les traités — cela arrivera certainement. Je ne vais pas ouvrir la boîte de Pandore. Je vais laisser les responsables du ministère de la Justice s'occuper de cela. C'est un problème qui se présente, mais je crois qu'il est illusoire de s'attendre à ce que le gouvernement règle la pénurie de 35 000 ou de 85 000 logements en raison d'un droit consenti dans les traités parce qu'il n'a tout simplement pas les moyens financiers de le faire. Si nous arrivons à mettre cette idée de côté, nous devrons travailler avec les collectivités pour les amener à changer de mentalité. De même, si on pousse la logique un peu plus loin, on constate que le logement à l'extérieur des réserves est un facteur de développement économique, alors qu'à l'intérieur des réserves, le logement est un facteur de coût. C'est donc complètement différent. Si on peut renverser la situation pour que le logement devienne un facteur de développement économique, si on peut amener les gens à se comporter véritablement en propriétaires de leurs maisons et que cela incite d'autres à lancer leur propre entreprise et en tirent profit, je crois qu'on pourra commencer à voir un grand changement dans ces collectivités. C'est comme la cible d'un jeu de fléchettes : le logement est au centre. Si on améliore le logement, tout le reste commence à mieux fonctionner. C'est le problème du logement qu'il faut régler. Nous faisons beaucoup de bonnes choses, mais, pour corriger véritablement le problème, il faut absolument la collaboration des dirigeants des Premières Nations.

Mme Darke : Je vais répondre le plus rapidement que je peux. Au sujet des moisissures, la SCHL travaille actuellement à un document d'information sur la conception et la construction des logements pour aider les Premières Nations à éviter ce problème dans les maisons qu'elles construisent. Le transfert d'informations est l'une des principales activités que nous menons dans ce secteur et, comme je l'ai déjà dit, cela dotera les Premières Nations de conseils utiles pour la conception de leurs habitations. Le document portera notamment sur les matériaux à utiliser, les systèmes de chauffage et de climatisation ainsi que la technologie propre à une maison.

Nous réalisons également des études de cas sur les pratiques exemplaires. Nous avons une trousse d'information sur les moisissures qui aident les gens à repérer la présence de moisissures dans une maison, à régler ou à éviter le problème. La SCHL dispose d'une série de produits dans ce domaine.

Le président : Merci. La sénatrice Dyck a une très courte question, avant de clore notre séance.

La sénatrice Dyck : Le plafond de 2. p. 100 appliqué au financement fédéral en 1996 vaut-il pour le financement du logement dans les réserves? A-t-il été levé pour le logement?

M. Carisse : Le plafond s'applique à notre budget de services votés, ce qui inclut le logement. Je vais vérifier cela, mais je crois que le plafond s'applique à l'ensemble de nos services votés, ce qui comprendrait le logement.

Le président : Merci beaucoup à chacun de vous. La séance est levée.

(La séance est levée.)


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