Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 5 - Témoignages du 26 mars 2014
OTTAWA, le mercredi 26 mars 2014
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 56, pour étudier le projet de loi C-9, Loi concernant l'élection et le mandat des chefs et des conseillers de certaines premières nations et la composition de leurs conseils respectifs, dont il est saisi.
Le sénateur Dennis Glen Patterson (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonsoir. Bienvenue à tous les sénateurs et aux membres du public qui assistent à cette réunion du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, que ce soit ici dans la salle, sur CPAC ou sur le Web.
Je suis Dennis Patterson, du Nunavut, et j'ai l'honneur d'être le président de ce comité. Notre comité a pour mandat d'examiner en général les lois et questions relatives aux peuples autochtones du Canada.
Ce soir, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-9, Loi concernant l'élection et le mandat des chefs et des conseillers de certaines premières nations et la composition de leurs conseils respectifs. Nous entendrons deux témoins, M. John Paul du Secrétariat du Congrès des chefs des Premières Nations de l'Atlantique, et le chef Ron Evans de la Nation crie de Norway House.
Avant d'entendre leurs témoignages, j'aimerais demander aux membres du comité de se présenter.
Le sénateur Moore : Bonsoir. Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Dyck : Lillian Dyck, de la Saskatchewan, et vice-présidente du comité.
Le sénateur Ngo : Sénateur Ngo, de l'Ontario.
Le sénateur Meredith : Sénateur Don Meredith, de l'Ontario.
Le sénateur Oh : Sénateur Oh, de l'Ontario.
Le sénateur Wallace : John Wallace, Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Beyak : Sénatrice Beyak, de l'Ontario. Bienvenue.
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.
Le président : Je sais que les membres du comité se joignent à moi pour souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je crois que le chef Ron Evans a déjà comparu devant ce comité. Bienvenue de nouveau. C'est avec plaisir que nous écouterons vos exposés, qui seront suivis par des questions des sénateurs. Nous avons prévu environ une heure pour cette séance. Comment souhaitez-vous procéder, messieurs?
John G. Paul, directeur exécutif, Secrétariat du Congrès des chefs des Premières Nations de l'Atlantique : Je viens de l'Est, là d'où vient toute la neige, je passerai donc en premier.
Le président : Allez-y, monsieur.
M. Paul : Bonsoir, honorables sénateurs. Je viens ce soir vous parler au nom de nos membres chefs au sujet de notre appui au projet de loi C-9. Nous représentons les chefs de 37 Premières Nations sur nos territoires traditionnels du Canada, dans la région de l'Atlantique et du Québec. Notre organisme a pour mandat de trouver, d'analyser et de mettre au point d'autres possibilités de politiques fédérales touchant les collectivités micmaques, malécites, innues et de Pescomody dans toute la région de l'Atlantique, au Québec et dans certaines parties du Maine aux États-Unis.
Comme je l'ai mentionné, nos chefs appuient le projet de loi C-9 sous sa forme actuelle. Nous estimons qu'il tient compte des recommandations clés présentées dans une résolution que nos membres ont adoptée en janvier 2011 et dans laquelle nous demandions au ministre des Affaires autochtones et Développement du Nord Canada de rédiger une ébauche de loi qui présenterait une démarche de rechange solide par comparaison au système électoral de la Loi sur les Indiens. Nous avons décidé d'appuyer la réforme électorale, car, entre autres, la région Atlantique du Canada compte, avec 75 p. 100, le pourcentage le plus élevé de Premières Nations qui tiennent encore leurs élections selon le régime électoral de la Loi sur les Indiens. À notre avis, si nous pouvions établir un meilleur régime électoral, la majorité de nos Premières Nations en bénéficieraient immédiatement.
Nous avons commencé à nous intéresser à la réforme électorale en octobre 2008, quand nos membres ont adopté une résolution demandant au ministre de porter à quatre ans le mandat actuel de deux ans prescrit par la Loi sur les Indiens. Au fur et à mesure que nous débattions cette modification, tant entre nous qu'avec les représentants officiels du ministère, nous nous sommes rendu compte que le régime électoral de la Loi sur les Indiens comportait d'autres faiblesses fondamentales qu'il fallait régler. Comme le ministère était disposé à appuyer d'autres discussions à ce sujet, cela a constitué l'occasion de développer davantage la réforme envisagée.
À l'heure actuelle, environ 40 p. 100 des Premières Nations du Canada tiennent leurs élections selon le régime électoral de la Loi sur les Indiens. Les dispositions de ce régime sont désuètes et problématiques. Cela nous a été dit non seulement par les membres de nos propres collectivités, mais aussi par les groupes de Premières Nations d'autres régions du pays. Plus particulièrement, voici où se situent les problèmes : la Loi sur les Indiens dispose que les conseillers d'une bande occupent leur poste pendant deux ans. La courte durée du mandat fait en sorte que les collectivités des Premières Nations sont constamment dans un climat d'élections, ce qui nuit à la stabilité politique des conseils de bande ainsi qu'aux efforts déployés par ceux-ci pour élaborer et mettre en œuvre un développement économique à long terme pour leur collectivité. De plus, une faiblesse au niveau du processus de mise en candidature peut faire augmenter excessivement le nombre de candidats, quelquefois plus de 100 pour une élection, et le scrutin par la poste peut donner lieu à des abus. Le mécanisme d'appel auprès du ministre est paternaliste, compliqué et souvent trop long pour produire des résultats, une décision finale sur un appel pouvant, en moyenne, prendre de 12 à 18 mois dans un mandat électoral de 24 mois. Par ailleurs, la Loi sur les Indiens ne définissant pas des infractions et les peines connexes, des activités douteuses, comme la vente et l'achat de votes, peuvent être pratiquées impunément.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, notre organisme s'est fortement intéressé à la recherche de moyens de stabiliser et d'améliorer la gouvernance des Premières Nations par le truchement d'un régime électoral plus moderne. Avec l'appui d'AADNC, le congrès a entrepris d'étudier la question de l'élection des conseils de bande. Après avoir entendu des dirigeants des Premières Nations, des techniciens en gouvernance et des membres des collectivités dans notre région, nous avons produit nos recommandations.
Je vais vous décrire sommairement comment nous en sommes venus à ces recommandations. Nous avons chargé un groupe de travail technique régional de mener des recherches et de présenter les options. Nous avons publié des articles dans un journal des Premières Nations à grande diffusion appelé le Mi'kmaq Maliseet Nations News, qui est diffusé dans toutes nos collectivités, et nous avons créé une page Facebook, invitant par ces deux moyens les membres des Premières Nations dans toute la région à partager leurs points de vue et à répondre à un sondage en ligne. Nous avons également tenu des groupes de discussion auprès de jeunes, de femmes et de fonctionnaires électoraux. Le groupe de travail a ensuite présenté sa recherche, les options et toute la rétroaction au groupe technique et, bien sûr, à tous les chefs et conseils membres de notre organisme. Les recommandations que nous avons présentées au ministre sont fondées sur les discussions et la rétroaction que nous avons reçue.
Le projet de loi C-9 fait état de nos recommandations. Le congrès a recommandé la préparation de nouvelles mesures législatives électorales « d'adhésion » pour les Premières Nations et d'autres recommandations pour leur contenu. Dans l'ensemble, ces recommandations sont prises en compte dans le projet de loi C-9. Ce projet de loi contient certaines des règles du régime électoral de la Loi sur les Indiens, avec un certain nombre de différences très importantes. Il s'agit, notamment, des éléments suivants : une durée de mandat de quatre ans, contrairement aux deux ans que prévoit actuellement le régime électoral de la Loi sur les Indiens; des qualifications définies pour les candidats au poste de chef et des règles claires concernant le processus de mise en candidature; une définition claire des infractions et des peines, décourageant les activités douteuses dans le cadre des élections, surtout celles concernant le scrutin par la poste; enfin, le ministre ne participe pas aux appels concernant les élections.
Bien que le congrès n'ait pas recommandé un nouveau régime électoral prévoyant un même jour d'élection pour les Premières Nations, il semble que la disposition du projet de loi prévoyant que six Premières Nations au moins fassent correspondre la durée de leur mandat suscite de plus en plus d'intérêt dans nos collectivités pour ce qui est de la tentative de coordination du processus électoral.
Je vais aborder maintenant certains des éléments du projet de loi C-9 qui ont été commentés et débattus par le passé. Tout d'abord, il y a la question des nouvelles mesures d'adhésion par résolution du conseil de bande.
Notre organisme a recommandé que les Premières Nations puissent, individuellement, choisir d'adhérer par le truchement d'une résolution du conseil de bande. Nous avons débattu longuement pour savoir s'il serait préférable que le mécanisme d'adhésion se fasse par référendum dans la collectivité. Nous avons conclu que, bien que ce soit là un moyen efficace de déterminer la volonté de la collectivité, il n'est tout simplement pas rentable de la consulter de cette manière pour toutes les questions. De plus, nous avons constaté à plus d'une reprise que les électeurs des Premières Nations ont tendance à favoriser le statu quo. Par conséquent, le recours à un référendum coûteux en temps et en ressources pour choisir un nouveau régime électoral constituerait, en pratique, un immense obstacle empêchant les Premières Nations de se prévaloir des avantages du mandat de quatre ans, qui est notre but. Même si un référendum n'est pas obligatoire, les chefs intéressés nous ont dit qu'ils ne prendraient pas ce genre de décision sans d'abord communiquer d'une façon quelconque avec les membres de leur collectivité au sujet de la question des élections.
Nous avons aussi recommandé que les nouvelles mesures législatives prévoient des mandats de quatre ans, les rendant comparables à la plupart des autres gouvernements au Canada. En exigeant des élections tous les deux ans, la Loi sur les Indiens a créé des conditions d'instabilité et a encouragé des divisions dans de nombreuses collectivités des Premières Nations. Le mandat de deux ans est trop court pour susciter une stabilité politique et économique permettant aux gouvernements des Premières Nations de prévoir et de mettre en œuvre des initiatives à long terme et de bâtir une fondation solide pour le développement de la collectivité avant d'avoir à faire face à une autre élection.
Le mandat de deux ans est particulièrement difficile pour les personnes élues à un conseil de bande pour la première fois. Les nouveaux chefs et conseillers ont besoin de temps pour apprendre quels sont leurs responsabilités et les divers projets qui exigent leur attention. Les projets de développement ou initiatives au niveau communautaire sont souvent menacés par le cycle électoral de deux ans et par l'instabilité causée par un roulement élevé des représentants élus.
En ce qui concerne les appels en matière d'élections au conseil de bande, au titre de la Loi sur les Indiens, les appels sont reçus, étudiés et jugés par le ministre et le ministère. Les statistiques qui nous ont été fournies par le ministère indiquent que 30 p 100 de toutes les élections au titre de la Loi sur les Indiens ont fait l'objet d'un appel, ce qui représente à peu près 40 élections par année. En général, on ne compte chaque année pas plus de cinq appels ayant pour résultat l'annulation d'une élection, dont un très petit nombre se produit dans la région de l'Atlantique. Ces chiffres démontrent un problème fondamental dans la façon dont les appels sont actuellement gérés. Dans près de 90 p. 100 des appels interjetés, l'allégation d'actes répréhensibles est soit non fondée, soit jugée n'avoir eu aucune influence sur le résultat de l'élection.
Le problème se situe au niveau du nombre élevé de mois qui s'écoulent avant que l'on en arrive à ces conclusions. Tant qu'un appel en matière d'élections est en suspens, il est très difficile pour un conseil de bande dont l'élection est remise en question de gouverner efficacement, d'élaborer des plans à long terme, de prendre des décisions clés ou de lancer des projets pour la collectivité.
À notre avis, le problème découle du fait qu'il est trop simple pour des membres de la collectivité dont les motifs peuvent être douteux d'entreprendre le processus d'appel, et nous pensons aussi que le rôle du ministre dans l'enquête et la décision concernant les appels en matière d'élections est paternaliste et constitue une intervention inopportune dans les affaires internes des Premières Nations.
Nous avons besoin d'un système d'appel plus rigoureux qui n'attribue aucun rôle au ministre, mais qui fasse en sorte que les allégations frivoles ou non fondées ne se soldent pas par un long processus qui nuit à la capacité d'une Première Nation à se gouverner.
Le congrès avait initialement recommandé que le rôle du ministre et de son ministère dans les appels en matière d'élections soit éliminé en faveur de l'établissement d'un nouveau tribunal indépendant. Cependant, nous ne sommes pas contre les dispositions du projet de loi C-9 en ce qui concerne les appels en matière d'élections. Les tribunaux tranchent en matière d'appels, imposent des peines et annulent les résultats des élections municipales, provinciales et fédérales, et ils peuvent donc assumer ce rôle également pour les élections des Premières Nations.
En conclusion, le mémoire sur le projet de loi C-9 au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones est fondé sur notre analyse de la façon dont le projet de loi C-9 tient compte des recommandations clés que nous avons faites en tant qu'organisme quand nous avons invité les membres des Premières Nations à participer à la question importante de la réforme électorale.
Nous avons réclamé la conception et la mise en œuvre du projet de loi sur les élections au sein des Premières Nations et le règlement connexe qui fourniraient aux Premières Nations décidant d'adhérer au nouveau régime électoral un système efficace et moderne de gestion des élections. Comme en témoignent les recommandations, les gouvernements des Premières Nations du Canada sont intéressés à avoir des élections libres et justes qui appuient des gouvernements stables efficaces et responsables ainsi que les droits de leurs membres particuliers.
Je vous remercie de nous fournir cette occasion de présenter les raisons pour lesquelles nous appuyons ce projet de loi, et nous vous demandons de l'appuyer également en faisant en sorte qu'il devienne une loi le plus rapidement possible. Nous sommes fortement d'avis que les Premières Nations au Canada doivent disposer d'autres modalités pour régler ces questions de gouvernance importantes et pressantes auxquelles nos collectivités sont actuellement confrontées.
À mon avis, ce projet de loi est probablement un des documents législatifs les plus importants dont est saisi le présent Parlement. J'estime que le régime électoral est fondamentalement important dans nos collectivités et que le fait de fournir aux collectivités la possibilité de mettre fin au régime électoral de la Loi sur les Indiens est d'une importance cruciale pour notre avenir. Je souhaite que cet avenir soit ouvert et prospère pour toutes nos collectivités, et une telle loi y contribuera grandement.
Merci beaucoup. Wela'lioq.
Le président : Merci beaucoup. Il est évident que votre organisme a tenu un rôle important dans l'élaboration de cette loi. Le contexte que vous nous avez décrit est très utile.
Monsieur Evans, vous avez vous aussi participé à l'élaboration de ce document législatif, ce qui nous permet d'entendre ce soir deux témoins qui connaissent bien ce projet de loi. Allez-y, monsieur.
Ronald Evans, chef, Nation crie de Norway House : Merci, monsieur le président. Honorables sénateurs, et chers spectateurs, je suis très heureux d'avoir été invité ici une fois de plus à témoigner devant le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et de parler de ce projet de loi important, le projet de loi C-9.
En tant qu'ancien grand chef de l'Assemblée des chefs du Manitoba et chef actuel de la Nation crie de Norway House, je suis heureux d'appuyer le projet de loi C-9, le projet de loi sur les élections au sein des Premières Nations.
Bien que ce projet de loi ne touche pas directement ma collectivité de la Nation crie de Norway House, étant donné que nous avons adopté en 1998 un code électoral coutumier, ce projet de loi est important pour les 37 Premières Nations au Manitoba et les 240 Premières Nations dans l'ensemble du Canada dont les élections sont régies par la Loi sur les Indiens.
Ce projet de loi est le fruit d'une grande volonté et de nombreuses années de travail acharné. Le projet de loi C-9 modifiera la façon dont les Premières Nations sont gouvernées, créera de la stabilité, renforcera l'autonomie et permettra aux Premières Nations d'avancer.
Je remercie le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada ainsi que le personnel ministériel de leur engagement à appuyer cette initiative si importante, et j'espère que chacun de vous, en tant que nos représentants au Sénat, verra à quel point il est urgent et important d'appuyer ce projet de loi qui avait fait initialement l'objet d'un débat au Sénat quand il a été déposé par l'ancien ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord, l'honorable John Duncan, en 2011, en tant que projet de loi S-6. J'ai eu à l'époque l'occasion de témoigner devant le Comité sénatorial permanent et d'exprimer mon appui à cet effort important.
Le projet de loi a été approuvé par le Sénat et est allé à la Chambre des communes où, après une première lecture, il est mort au Feuilleton à la suite de la prorogation du Parlement. En octobre 2013, le projet de loi a été déposé de nouveau en tant que projet de loi C-9, et j'ai témoigné devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes en novembre 2013, et j'ai répondu aux questions des membres qui n'en avaient pas bien compris des dispositions.
Je suis ici aujourd'hui pour réitérer mon appui au projet de loi C-9 et pour répondre à toute question que vous pourriez avoir. Je remercie également le Secrétariat du Congrès des chefs des Premières Nations de l'Atlantique pour son rôle de partenaire dans le cadre du processus de participation nationale en 2010. Lorsque j'étais grand chef de l'Assemblée des chefs du Manitoba, nous avons collaboré afin de communiquer avec les Premières Nations du Canada et faire connaître le travail novateur de nos organisations respectives en vue d'améliorer le système électoral des Premières Nations dont les élections sont gouvernées par les dispositions de la Loi sur les Indiens. Je remercie le Congrès des chefs de l'Atlantique de son appui continu et de sa détermination à faire en sorte que ce projet devienne loi.
La Loi sur les élections au sein des Premières Nations prévoit des dispositions constructives visant à renforcer le processus électoral et l'autonomie des Premières Nations, prévoyant ainsi des mandats plus longs, qui passeront de deux à quatre ans, ainsi qu'une journée commune réservée aux élections, pendant laquelle toutes les Premières Nations qui observeront la Loi sur les élections au sein des Premières Nations iront aux urnes le même jour. Ce type d'élections générales crée un processus de mise en candidature plus solide et transparent, prévoit des pénalités justes et bien fondées en cas d'infraction et, surtout, un processus indépendant encadré par la Loi sur les élections au sein des Premières Nations.
Le régime électoral actuel prévu par la Loi sur les Indiens ne fonctionne pas. Ses lacunes sont bien connues et la loi crée de l'instabilité pour nos collectivités et leurs économies. La loi a empêché les Premières Nations d'avancer dans des projets importants comme le développement économique, ainsi que dans des projets d'infrastructure qui sont d'un intérêt vital pour ces mêmes collectivités au chapitre du bien-être et de la qualité de vie.
Notre recherche et notre expérience ont révélé que les chefs et les membres de conseil fraîchement élus ont peu de temps pour maîtriser leurs responsabilités, tisser les relations nécessaires et concevoir ou mener à bien les projets importants avant qu'une autre élection ne doive être tenue.
Chaque mois la composition d'un ou de plusieurs conseils de bande change dans chaque province à cause des élections. Les changements constants au sein des conseils de bande perturbent grandement les projets et les plans importants sur lesquels on travaille dans les collectivités. Cette instabilité politique fait que les Premières Nations sont moins attrayantes aux yeux des intervenants internes et externes pour ce qui est des investissements et du développement économique à long terme.
Notons également que l'idée novatrice d'un mandat de quatre ans qui constitue l'un des piliers de l'initiative d'une journée commune pour la tenue des élections n'est pas un concept nouveau. Cette idée a été articulée pour la première fois par les chefs du Manitoba Indian Brotherhood en 1971, dans le livre Wahbung : Our Tomorrows, ouvrage qui inspire nos chefs depuis sa parution et qui touche directement la question de notre durabilité et de notre autonomie.
Wahbung est un document de visionnaire créé par les tribus autochtones du Manitoba afin d'exprimer la position et les politiques qui permettront d'établir des rapports honorables et satisfaisants entre le Canada et le peuple autochtone du Manitoba, et ce, de part et d'autre.
Les chefs d'aujourd'hui consultent Wahbung pour se guider dans leur travail et respecter les réalisations des chefs qui les ont précédés. En ce qui concerne la gouvernance, le document Wahbung précise que : « Les modalités des élections doivent être décidées par chaque collectivité [...]. On recommande que les mandats des chefs et des membres élus des conseils soient prolongés sur quatre ans. »
Le but ultime de toutes les Premières Nations est l'autonomie et l'indépendance. Il est essentiel d'établir un système électoral qui soit responsable, transparent et dirigé par les Premières Nations afin de créer de la stabilité et de la crédibilité au sein des gouvernements des Premières Nations. Ceci renforcera la gouvernance des Premières Nations au Canada. Toutes les Premières Nations profiteront de ces changements, qui amélioreront et en renforceront la gouvernance et leur permettront d'avancer d'une façon positive et progressive.
À ma connaissance, l'alinéa 3.1b) du projet de loi C-9 a fait l'objet de bien des discussions au sein du Sénat. Il y est dit que :
3.(1) Le ministre peut, par arrêté, ajouter le nom d'une première nation à l'annexe dans les cas suivants :
b) il est convaincu qu'un conflit prolongé lié à la direction de la première nation a sérieusement compromis la gouvernance de celle-ci; [...]
Aux fins du compte rendu, je voudrais réitérer ma position à l'endroit de cette disposition. Il est d'importance cruciale qu'un conflit prolongé lié à la direction ne perturbe pas l'administration courante d'une Première Nation. En tant que dirigeant, je sais ce que le fonctionnement d'une collectivité exige et ce que l'absence de direction peut faire pour compromettre l'administration d'une Première Nation.
Je sais aussi quelles sont les conséquences du processus d'appel pour la contestation d'une élection dans les collectivités dont le régime électoral est gouverné par la Loi sur les Indiens. Dans de nombreux cas, des collectivités ont vu s'écouler des mois, voire des années, avant qu'une décision ne soit rendue par un tribunal par suite d'un appel. Dans certains cas, le mandat entier du chef et du conseil, deux ans, s'est écoulé avant la décision, et le même chef et le même conseil ont été réélus.
En tant que sénateurs, il est important que vous compreniez les réalités en cause au niveau des collectivités. Lorsque la direction d'une Première nation est contestée ou fait l'objet d'un conflit prolongé, cela cause un malaise au sein des membres, ainsi que de la frustration et du chaos, car les décisions ne peuvent être prises. Dans bien des cas, la Première nation n'a pas le quorum lui permettant de prendre des décisions importantes qui ont des répercussions sur les finances de la collectivité, parce que les réunions du conseil ne peuvent se tenir sans un quorum, et des accords et RCB ne peuvent être conclus et signés.
Il ne faut pas bien longtemps avant qu'une Première nation n'atteigne les niveaux critiques d'instabilité financière, et nous savons qu'AADNC, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, a appliqué des politiques qui forcent de nombreuses nations à faire l'objet de gestion des manquements, et même de gestion par un séquestre- administrateur. Rien qu'au Manitoba, AADNC a déclaré que 19 Premières Nations font l'objet d'une gestion des manquements, autrefois appelés redressements, 18 Premières Nations font l'objet d'une cogestion et 7 collectivités sont sous gestion par un séquestre-administrateur. Une fois qu'une collectivité est mise sous gestion par un séquestre- administrateur, il lui est très difficile, voire impossible, de prendre ses propres décisions et de renverser cet état de gestion des manquements et d'intervention.
Par conséquent, je vous encourage fortement à continuer à appuyer le projet de loi C-9 en incluant l'alinéa 3.1b). Ce projet de loi vise à créer la stabilité et, s'il devait arriver qu'une collectivité ne soit pas en mesure de fonctionner de façon autonome ou fasse face à une direction qui n'est plus en mesure de servir les besoins de la collectivité, il est important que le ministre puisse intervenir pour veiller à ce que les priorités et les besoins de la collectivité soient soutenus et protégés.
En 2009, l'Assemblée des chefs du Manitoba, conformément à une résolution adoptée, a effectué des recherches sur les régimes électoraux des Premières Nations et a discuté de changements possibles avec les chefs, les techniciens et les Premières Nations du Manitoba. Il s'agit de l'initiative de réforme électorale prévoyant une journée d'élection commune. Dans le cadre de cette initiative, des séances ont été tenues avec les chefs et les membres des collectivités des 37 Premières Nations du Manitoba qui organisent leurs élections conformément aux dispositions de l'article 74 de la Loi sur les Indiens.
Les séances d'information ont été extrêmement utiles, informatives et précieuses, car nous avons recueilli des idées, des commentaires et des recommandations sur la façon d'améliorer le régime électoral pour les gouvernements des Premières Nations. On a tenu compte des observations recueillies dans le cadre de ces séances de participation communautaire lors de l'élaboration des recommandations présentées au ministre des Affaires indiennes et du Développement du Nord Canada à l'époque en vue d'améliorer le régime électoral des Premières Nations.
Les commentaires que nous avons recueillis des collectivités étaient en faveur d'une journée électorale commune pour les Premières Nations, d'un mandat de quatre années ainsi que d'un processus d'appel et de destitution, le tout étant prévu dans une nouvelle loi. Ces dispositions ne seraient pas obligatoires. Chaque Première nation aurait la possibilité de décider de se soumettre ou non à la Loi sur les élections au sein des Premières Nations.
Avec le soutien du personnel du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada, et en partenariat avec le Congrès des chefs de l'Atlantique, nous avons pu lancer un processus national de consultation en 2011, lorsque j'étais grand chef de l'Assemblée des chefs du Manitoba. Nous avons pu présenter aux Premières Nations des autres régions du Canada le travail novateur effectué par nos organismes respectifs afin d'améliorer le régime électoral des Premières Nations tel qu'il est conçu actuellement en vertu de la Loi sur les Indiens.
Dans le cadre de ce processus national de consultation, j'ai pu rencontrer les chefs des Premières Nations du Canada, afin de discuter avec eux de la façon dont on pourrait ensemble faire de cette idée une réalité. Ainsi, les chefs et les autres participants ont pu exprimer leurs recommandations et leurs observations en ce qui concerne l'amélioration du régime électoral des Premières Nations. Les membres et les chefs des Premières Nations ont décrit les défis associés aux lacunes de l'article 74 qui ont une incidence négative sur les Premières Nations et leurs collectivités.
Ces séances ont été couronnées de succès, car nous avons recueilli des commentaires positifs et favorables des chefs de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan et de l'Ontario. Le Congrès des chefs de l'Atlantique a consulté les provinces de l'Est et a recueilli les mêmes commentaires positifs et des recommandations semblables.
Nous avons utilisé les médias sociaux, les forums urbains et nos sites web respectifs afin de nous assurer que les particuliers partout au pays avaient la possibilité de participer et de soumettre des commentaires et des recommandations.
Une fois ces renseignements recueillis et remis au ministère, il a fallu ensuite collaborer avec celui-ci en vue de rédiger le texte dont vous êtes saisis, le projet de loi C-9.
Ce texte important, novateur et historique est le fruit d'un travail de nombreuses années. Un concept né dans les années 1970 s'approche enfin de sa réalisation grâce au travail acharné et à la volonté des chefs des Premières Nations du Manitoba, du Congrès des chefs de l'Atlantique, et de quatre ministres des Affaires autochtones et du Développement du Nord : l'honorable Jim Prentice, l'honorable Chuck Strahl et l'honorable John Duncan, ainsi que le ministre actuel, l'honorable Bernard Valcourt, et les employés concernés. Chacun d'entre eux mérite tous les honneurs et des remerciements pour leur appui et leur engagement continu et leurs efforts visant à ce que cette initiative se réalise un jour et devienne loi.
Encore une fois, j'aimerais exprimer mon soutien inébranlable à l'égard du projet de loi C-9. J'espère que pendant la session en cours, les députés à la Chambre des communes ainsi que les sénateurs comprendront l'importance de ce projet de loi, et y accorderont leur soutien afin de renforcer la gouvernance des Premières Nations et contribuer ainsi aux changements législatifs positifs et nécessaires que recherchent bon nombre des Premières Nations de notre pays.
Encore une fois, merci de m'avoir invité à participer aux délibérations de votre comité. Ekosani.
Le président : Merci, chef Evans. C'est un privilège que de vous avoir ici tous deux qui avez grandement participé à l'élaboration de ce projet de loi. Nous avons beaucoup apprécié vos exposés clairs.
Je commencerai par la question de la mobilisation et de la consultation. Vos deux organismes ont mené le processus de mobilisation. Le projet de loi que nous avons devant nous aujourd'hui est le même que celui de 2011 qui, comme nous le savons, est mort au Feuilleton à la première session.
Vous avez décrit le processus de mobilisation et la rétroaction que vous avez reçue dans tout le Canada, mais vous n'avez pas mentionné le Québec. Peut-on supposer que la mobilisation et la consultation ont été bien faites et que la consultation ne représente pas un problème, même si tout le monde n'est peut-être pas d'accord avec tous les détails du projet de loi?
M. Paul : Je ne pense pas que la consultation ait révélé des problèmes au sujet de ce projet de loi, car la plupart des éléments fondamentaux qui sont proposés viennent de nous, les Premières Nations, et particulièrement celles du Québec. Quatre collectivités qui font partie de notre organisme, le Congrès des chefs de l'Atlantique, sont du Québec. Leurs chefs ont eu l'occasion de présenter de l'information à l'Assemblée des chefs au Québec ainsi qu'au forum des chefs tenu au Québec. Essentiellement, ils s'en sont remis à nos chefs représentants pour ce qui est de parler de la question, et nous ont fourni une rétroaction, comme l'ont fait les autres régions du pays.
Les différents exposés que nous avons faits ont fait ressortir que c'est nous qui cherchons un changement. Notre peuple, nos collectivités et nos dirigeants recherchent le changement. Nous sommes à l'origine de cette initiative. Il ne s'agissait pas de quelqu'un d'autre nous disant ce que nous devrions faire.
Cet élément est au cœur de tout le travail que nous avons accompli en collaboration avec la Assembly of Manitoba Chiefs et le gouvernement, pour permettre autant de rétroaction, de consultation et de participation que possible. Le fait que le document soit passé deux fois par le processus législatif a contribué à cela et a amélioré les discussions au sujet du projet de loi. Depuis le début, divers groupes de partout au pays ont présenté des exposés aux comités tant à la Chambre des communes, dernièrement, qu'au Sénat, et ont exprimé leur point de vue.
J'aimerais revenir sur un élément important. Un de nos anciens chefs qui était coprésident du Congrès des chefs de l'Atlantique, feu le chef Noah Augustine de Metepenagiag, avait vu la nécessité de prolonger le mandat de deux ans à quatre ans et d'apporter des changements fondamentaux au régime électoral de sorte que nous ayons les outils nécessaires pour bien gouverner nos collectivités et en promouvoir la prospérité économique. Toutes les discussions et consultations que nous avons eues, et même les travaux du gouvernement, ont fait ressortir à quel point il est important de procéder à ce changement et combien celui-ci contribuera à améliorer la stabilité à long terme des collectivités.
C'est une chose très importante pour nous, qui a mis bien du temps à se concrétiser. Je disais à Ron plus tôt que nous serons ici jusqu'à ce que le travail soit accompli. Dans notre région, un certain nombre d'élections ont été tenues. Même au cours de cette période, nous avons vu trois ou quatre cycles électoraux se dérouler — et c'est la même chose au Manitoba — à cause du régime électoral de la Loi sur les Indiens. Nous essayons de créer pour les collectivités une formule spécifique qui les aidera à se gouverner et à améliorer leur avenir.
M. Evans : J'ai moi-même participé aux consultations dans 37 collectivités du Manitoba pour en rencontrer les membres, et non les dirigeants. Ce sont les dirigeants qui m'ont donné le mandat de le faire. À un bon nombre de ces événements, les dirigeants ont eu l'occasion, qu'ils aient participé à ces réunions ou choisi de ne pas le faire, de permettre à leurs membres de parler librement et ouvertement au sujet de leurs préoccupations concernant le prolongement du mandat de deux à quatre ans.
Bien que certaines préoccupations aient été soulevées, l'opinion a toujours été en faveur de cela à la fin des séances. Nous sommes ensuite allés dans les provinces de l'Ouest où j'ai rencontré les dirigeants. Je n'ai pas rencontré les membres, mais seulement les dirigeants qui ont ensuite appliqué leurs propres processus régionaux pour la consultation des membres. Au Manitoba, je l'ai fait moi-même pour démontrer à quel point ce travail est important et continue de l'être. D'où tout cela vient-il? Pas du gouvernement.
Tout d'abord, j'aimerais revenir un peu sur mes notes, là où je parle de Wahbung. En 1971, les dirigeants de l'époque envisageaient déjà de prolonger le mandat à quatre ans. Ils ont vu à quel point le mandat de deux ans était nuisible pour les Premières Nations. Après 1990, quand le Manitoba a conclu ce qui était à l'époque l'Initiative sur l'entente- cadre du Manitoba, je crois bien qu'un montant considérable d'argent a été consacré à ce processus pendant presque 10 ans. En l'absence de résultats, le gouvernement a décidé qu'il n'allait plus y consacrer de l'argent puisqu'il ne produisait pas de résultats.
À l'époque, Jim Prentice était ministre, et j'étais grand chef. J'ai dit au ministre que nous devions faire quelque chose au sujet de la gouvernance des collectivités parce que les structures actuelles ne fonctionnaient pas. Je lui ai demandé de nous permettre de le faire et de collaborer avec nous pour le lancement d'un processus, le processus même que nous avons entrepris. Et c'est ce que nous faisons aujourd'hui. C'est là son origine. Ce n'est pas le gouvernement qui nous l'a imposé. Le document n'est peut-être pas parfait — aucun document n'est parfait —, mais il nous faut commencer quelque part. Il n'est dit nulle part dans le document que nous ne pourrions pas apporter de modifications au besoin, par la suite. Voilà pourquoi j'espère vous convaincre d'appuyer le projet de loi.
Le président : C'est un historique impressionnant. Merci, chef Evans. Ce n'est pas souvent que nous entendons à ce comité que le gouvernement n'a pas imposé une initiative aux Premières Nations. C'est bon de l'entendre.
J'aimerais maintenant faire appel à la coprésidente.
La sénatrice Dyck : Merci de vos exposés, messieurs. Vous avez clairement déclaré votre position.
Chef Paul, vous dites que 37 Premières Nations sont membres du Congrès des chefs de l'Atlantique, et que 27 d'entre elles tiennent des élections au titre de la Loi sur les Indiens. Y en a-t-il qui tiennent des élections selon un code électoral coutumier?
M. Paul : Il y en a quelques-unes qui tiennent des élections selon un code électoral coutumier dans la région, oui.
La sénatrice Dyck : Quelques-unes seulement?
M. Paul : Oui.
La sénatrice Dyck : Chef Evans, avez-vous dit que Norway House tient des élections selon le code électoral coutumier?
M. Evans : Oui; nous avons un mandat de quatre ans. Nous l'avons adopté en 1998. Nous suivions à l'époque l'article 74 de la loi qui impose un mandat de deux ans, puis nous avons élaboré notre propre code électoral. Un certain nombre d'entre nous ont ce type de dispositions.
La sénatrice Dyck : Comme vous l'avez mentionné vous-même, certaines des préoccupations portent sur l'alinéa 3(1) b) et sur le pouvoir qu'a le ministre d'imposer le projet de loi C-9 à une Première Nation. Dans le cas des Premières Nations qui tiennent des élections au titre de la Loi sur les Indiens, je doute que quiconque voie cela comme un inconvénient, puisque vous passez à un bien meilleur système. Mais supposons, chef Evans, que vous ayez votre propre code électoral coutumier. Le ministre pourrait alors déclarer : « Vous avez un conflit prolongé lié à la direction depuis un moment déjà, et cela compromettait considérablement la capacité de gouverner. Par conséquent, je vous ordonne de procéder au titre du projet de loi C-9. » C'est ainsi que cette disposition s'appliquerait.
Êtes-vous d'accord que cela s'appliquerait aux Premières Nations qui tiennent leurs élections selon un code électoral coutumier?
M. Evans : Si je comprends bien, cela s'applique aux collectivités qui suivent l'article 74. À l'heure actuelle, nous avons notre propre code électoral.
La sénatrice Dyck : D'après le personnel ministériel, le ministère de la Justice et probablement le ministre précédent, cela inclurait les collectivités qui ont un code électoral coutumier.
M. Evans : Nous avons nommé notre code coutumier « Election Procedures Act ». C'est ce que nous suivons pour les élections. Rien n'est écrit, et donc tout dépend de la définition exacte. Il ne faudrait pas confondre.
La sénatrice Dyck : Nous croyons que cela s'applique aux deux.
M. Evans : Je ne vois pas ce que cela changerait, puisque nous avons déjà un mandat de quatre ans; en quoi cela serait-il différent?
La sénatrice Dyck : Si, pour une raison quelconque, vous aviez un conflit prolongé lié à la direction, et s'il était déterminé que celui-ci compromet la bonne gouvernance, le système décrit dans le présent projet de loi vous serait alors imposé par le ministre.
M. Evans : Je crois que c'est un mauvais exemple. Nous ne comparons pas les mêmes choses. Il s'agit de prendre un mandat de deux ans et de le prolonger à quatre ans. Si le ministre voulait imposer le projet de loi C-9 à notre collectivité, ce serait merveilleux.
La sénatrice Dyck : Ce serait merveilleux?
M. Evans : Oui, ce serait merveilleux si cela améliorait les choses, quoique je ne vois pas en quoi elles pourraient être meilleures.
Votre question ne tient pas debout.
La sénatrice Dyck : D'autres témoins ont déclaré leur opposition à ce que le ministre ait le pouvoir de s'ingérer dans ce qui semble être pour une Première Nation la capacité de concevoir son propre code électoral coutumier. Le ministre pourrait décider qu'il y a là quelque chose qui ne fonctionne pas, puis imposer les dispositions du projet de loi en vertu de l'alinéa 3(1)b). D'autres témoins ont déclaré que ce n'était pas la chose à faire, que c'était une augmentation des pouvoirs du ministre qui pourrait représenter une atteinte aux droits constitutionnels à l'autonomie des Premières Nations, que les Premières Nations n'auraient pas le choix et que c'était le ministre qui déciderait.
M. Evans : Le ministre a ce pouvoir au titre de l'article 74.
La sénatrice Dyck : Dans le cas des élections au titre de la Loi sur les Indiens. Cela conférerait au ministre la compétence législative.
M. Paul : Je crois que cela se résume à ce que la collectivité choisit. D'après nous, cela en fait partie, mais nous voyons l'importance de ce que nous essayons de faire. Les réformes que nous entreprenons ont priorité là-dessus, même en ce qui concerne ce que nous tentons de faire, en raison de la nature facultative de ce que nous faisons. La compétence du ministre est la compétence du ministre. Nous prenons en compte les changements pour nos collectivités. C'est l'objectif de ce projet de loi. Le ministre a déjà des pouvoirs que lui confère la Loi sur les Indiens, et donc le ministre ne m'inquiète pas. Cette disposition ne m'inquiète pas. Ce sont les changements au régime électoral qui m'inquiètent davantage.
M. Evans : J'aimerais ajouter que j'ai parlé de l'Initiative sur l'entente-cadre, ce que je crois bien avoir fait aussi à une autre séance. C'était la raison pour laquelle nous devions changer la façon dont les élections sont tenues au sein des Premières Nations. Cela faisait déjà 10 ans que l'Initiative était en cours et seul un nombre limité des personnes qui avaient lancé l'Initiative au départ était présent à sa conclusion; par conséquent, personne ne pouvait en parler ou la comprendre.
Si nous ne changeons pas la façon dont les choses se font maintenant, nous n'allons rien changer. Rien ne va changer pour les Premières Nations si nous ne commençons pas à entreprendre le changement. Celui-ci vient de nous. Nous voyons le problème. Nous sommes les dirigeants. Nous connaissons les défis. Nous tentons de les régler. C'est tout ce que nous essayons de faire.
Le sénateur Tannas : Si je comprends bien, suite à ce que la sénatrice Dyck disait, le ministre a le pouvoir, en cas d'impasse, de faire table rase et de retourner à la case départ, et ce pouvoir étant conféré à l'heure actuelle par la Loi sur les Indiens, l'élection serait alors tenue au titre de la Loi sur les Indiens. En supposant que dans l'une de vos collectivités vous fassiez face à une impasse et que le ministre intervienne, préféreriez-vous tenir une élection au titre de la Loi sur les Indiens ou au titre de ce projet de loi?
M. Paul : Je crois que la plupart des gens préféreraient que l'élection se tienne au titre de ce genre de loi, car elle couvre bien des choses que nos dirigeants et nos collectivités ont indiquées comme étant des problèmes à régler. Il s'agit de régler des problèmes. Nous cherchons à ce que les choses s'améliorent pour nos collectivités afin qu'elles puissent avoir une bonne administration et une stabilité à long terme, améliorant ainsi la vie de leurs membres.
La gouvernance et les élections sont deux questions fondamentales pour nos collectivités. Avec 100 p. 100 ou 90 p. 100 de participation aux élections, pensez-vous que les gens n'accordent pas de l'importance aux élections? Ils leur accordent une grande importance. Le caractère sérieux du choix de nos dirigeants est probablement une des choses les plus importantes enseignées à nos enfants qui apprennent qu'une fois adultes, ils doivent voter. C'est une chose que tous les membres de la collectivité considèrent fondamentale et importante. Lorsqu'on a son mot à dire dans le choix et la qualité des dirigeants et qu'on leur accorde suffisamment de temps pour faire leur travail, le travail se trouve à être accompli. C'est ce que nous voulons.
M. Evans : Une de nos collectivités fait face actuellement à un problème. Vous avez dû lire quelque chose à ce sujet. Un journaliste d'un des journaux au Manitoba a écrit...
Le président : Pouvez-vous nous décrire le problème, s'il vous plaît?
M. Evans : Eh bien, une des collectivités a décidé que personne ne peut se porter candidat au poste de chef à moins d'avoir au moins 50 ans, que personne ne peut se porter candidat au conseil à moins d'avoir au moins 40 ans, et que personne ne peut faire partie d'une union de fait, et toute une série d'autres règles, et le ministère ne peut absolument rien faire. L'élection aura lieu.
Ce genre de chose arrive et le journaliste écrit : « Pourquoi est-ce que personne ne fait rien à ce sujet? » Il dit : « Où sont les dirigeants des Premières Nations? Comment se fait-il qu'ils n'interviennent pas et n'aident pas la collectivité? Qu'adviendra-t-il de cette collectivité dont la direction est aussi instable? »
Voilà ce que nous tentons de faire, ce que nous essayons de mettre en œuvre. Si moi, en tant que chef de Norway House, déclare que le projet de loi C-9 est bon, et si le ministère souhaite nous imposer cette loi, je dirais oui. Si je le considère comme valable pour quelqu'un d'autre, il devrait être valable pour Norway House également.
La sénatrice Dyck : Je suis un peu perdue. Vous venez de dire, je crois, que le ministre a le pouvoir d'intervenir et d'ordonner une élection, et ce que vous venez de dire semble signifier que le ministre n'a pas ce pouvoir.
M. Evans : Jusqu'à ce qu'une élection se tienne effectivement et jusqu'à ce que quelque chose change au niveau des lois. Cela sera contesté légalement.
La sénatrice Dyck : Je croyais qu'au titre de l'article 74 de la Loi sur les Indiens, le ministre pouvait intervenir et dire : « Les choses vont mal. Vous devez tenir une nouvelle élection. »
M. Evans : Oui. Vous dites cela parce que le projet de loi C-9 lui confère ce pouvoir.
La sénatrice Dyck : Vous dites?
M. Evans : Dites-vous qu'au titre du projet de loi C-9 il le peut?
La sénatrice Dyck : Non, au titre de l'article 74 de la Loi sur les Indiens.
M. Evans : Apparemment, il ne peut pas.
La sénatrice Dyck : Alors, je ne comprends plus.
M. Evans : Je me fie à ce que j'ai lu dans l'article.
La sénatrice Dyck : Les articles dans les journaux ne sont pas fondés sur des faits.
Le président : Peut-être que je pourrais aider. Selon l'article 74 de la Loi sur les Indiens :
Lorsqu'il le juge utile à la bonne administration d'une bande, le ministre peut déclarer par arrêté qu'à compter d'un jour qu'il désigne le conseil d'une bande, comprenant un chef et des conseillers, sera constitué au moyen d'élections tenues selon la présente loi.
« Lorsqu'il le juge utile à la bonne administration d'une bande », c'est là l'élément déclencheur. J'espère que cela est utile.
La sénatrice Dyck : Dans ce cas, il le pourrait s'il le voulait.
Le président : Eh bien, je ne voudrais pas l'interpréter ainsi. Je ne dirais pas comment cette disposition devrait être interprétée. Apparemment, c'est un pouvoir plutôt large, sénatrice Dyck.
La sénatrice Dyck : Exactement.
Le président : Je ne sais pas comment cette disposition a effectivement été appliquée.
Poursuivons. Nous avons encore les sénateurs Meredith, Wallace et Moore. Je vous demanderais d'être brefs dans vos questions, s'il vous plaît.
Le sénateur Meredith : Monsieur le président, je me sens si confiant. Nous pourrions compléter notre travail, car nous avons entendu de merveilleux témoignages animés d'une passion habilitante pour votre peuple. J'ai noté ici : « Par le peuple, pour le peuple. » Ce projet de loi est pour votre peuple. Cela vous libère économiquement.
M. Paul : Oui.
Le sénateur Meredith : Parlez-moi un peu de l'autonomisation économique qui suivra l'adoption de cette loi. Quelles seront les retombées pour vos collectivités des Premières Nations?
Chef Evans, parlez-moi de la transition de votre régime électoral coutumier avec son mandat de deux ans aux nouvelles modalités, ainsi que des défis auxquels vos collectivités sont confrontées en ce qui concerne l'article 74.
M. Paul : En ce qui concerne l'autonomisation économique, notre plus gros problème consiste à trouver le financement, d'accéder au capital ou de tenter de négocier une affaire. Il faut généralement un à deux ans, selon l'ampleur du projet, pour passer du stade de l'idée au stade de la production.
Quand les intervenants changent en plein milieu du projet, l'interlocuteur avec qui on fait affaire peut persévérer dans le projet, courir le risque de traiter avec de nouvelles personnes ou abandonner le projet. Dans bien des cas, les intéressés abandonnent le projet, car ils perçoivent une instabilité à long terme. Un investisseur qui va fournir des ressources financières ou des prêts doit avoir un certain degré de certitude quant à la réduction des risques et à la stabilité au sein du groupe avec qui il fait affaire.
Le mandat de quatre ans et les dispositions de ce projet de loi aideront considérablement, car les investisseurs et les intervenants à l'extérieur de nos collectivités verront la valeur de ces règles et accorderont, je l'espère, davantage de crédibilité et de confiance à l'endroit des dirigeants de nos collectivités et des nombreux débouchés commerciaux qui s'offrent à eux.
Il est tout simplement impossible de produire un plan d'entreprise, de l'appliquer et d'obtenir un financement en 730 jours seulement, et de nombreuses occasions s'envolent alors. Le mandat de quatre ans ouvrira la porte à ces occasions, et contribuera à l'établissement de meilleures relations entre nos collectivités et le monde des affaires dans l'ensemble.
Le sénateur Meredith : Excellent. Merci.
M. Evans : Nous sommes passés du mandat de deux ans à quatre ans en 1996. J'ai été réélu il y a quelques jours, j'ai donc quatre autres années.
Le sénateur Meredith : Félicitations.
M. Evans : Ceci étant dit, la réalisation de projets prend du temps. À Norway House, nous avons bâti notre école. Entre notre première réunion et l'achèvement du projet, six ans se sont écoulés. Si la durée de mon mandat avait été de deux ans, et si je n'avais pas été réélu, le projet serait tombé à l'eau. Ce genre de processus prend six ans. Si je n'avais pas été réélu, je ne serais pas ici ce soir pour vous exposer l'historique de ce processus auquel j'ai eu l'honneur de participer.
Tout cela fait ressortir à quel point il est important de prolonger la durée des mandats, ce qui confère davantage de crédibilité. Lorsqu'une élection est tenue, le monde des affaires est à l'écoute du résultat. Ça ressemble aux élections américaines, pour lesquelles la campagne électorale s'enclenche un ou deux ans avant. Il en va de même pour notre gouvernement.
Le sénateur Meredith : Pouvez-vous nous dire s'il va y avoir un pipeline?
M. Evans : Cela dépend de la personne qui sera élue.
Le président : Nous nous écartons un peu du sujet.
Le sénateur Wallace : Messieurs, vous avez tous deux beaucoup investi de vous-même dans les changements qu'apporte le projet de loi C-9. Vous avez procédé à des consultations intenses dans vos régions et avez une bonne connaissance des points de vue dans vos régions. De plus, vous avez lancé le processus national de mobilisation en 2011, qui s'est étendu à l'ensemble du pays, au-delà de la région de l'Atlantique et du Manitoba. Vous dites que vous avez traité avec les chefs. Il n'y a pas eu de référendum au sein des membres du conseil, mais vous avez traité avec les chefs.
Comme pour toute autre chose dans la vie, obtenir un accord unanime est impossible, et dans le cas de ce projet de loi, il y a des opinions divergentes sur plusieurs aspects. Qu'en pensent, à votre avis, les 240 bandes du pays qui sont assujetties à la Loi sur les Indiens? Je crois que 64 d'entre elles sont au Manitoba et dans la région de l'Atlantique. Dans quelle mesure, d'après vous, les bandes appuient-elles les changements proposés dans le projet de loi C-9? Estimez-vous qu'il pourrait y avoir certaines opinions divergentes sur certains sujets, mais que, dans l'ensemble, toutes les bandes du pays l'appuient?
M. Paul : Je crois que dans l'ensemble du pays les 240 bandes appuient fortement le projet de loi, car il touche réellement la vision de l'avenir. Les collectivités cherchent toujours à améliorer leur situation. Je dirais que la majorité des 240 bandes considèrent ce projet de loi comme étant une option très acceptable. Elles pourraient se prévaloir d'autres options, l'autonomie et le code coutumier, mais celle-ci leur offre plusieurs choses qui les aideraient à établir un système. Un de mes amis est chef depuis 30 ans; il a donc vécu cela 15 fois, et ce n'est pas facile.
On peut réaliser de grandes réussites et de grands progrès dans sa collectivité, mais tout cela peut être détruit par n'importe qui. Avec les modalités du projet de loi C-9 qui leur sont offertes, les collectivités dans l'ensemble du pays qui sont actuellement soumises à la Loi sur les Indiens prendront ce projet de loi sérieusement en compte.
Dans notre région, je reçois presque toutes les deux semaines des appels de chefs qui me demandent quand cette loi sera adoptée. La question dominante est de savoir quand soumettre une RCB déclarant l'adoption du nouveau projet de loi? Ils savent que cela ne s'appliquera pas avant la prochaine élection. Je reçois des appels de presque toutes les bandes actuellement sous le régime de la Loi sur les Indiens me demandant quand cela se produira. Il est donc évident que l'intérêt à cet égard est grand. Je suis allé dans les régions parler avec les chefs dans le cadre d'une assemblée générale. Ceux avec qui j'ai bavardé au cours de la séance et après ont manifesté une opinion très positive, estimant que cela contribuera à une bonne administration, une bonne responsabilisation et une grande prospérité économique.
Si ce changement peut réaliser toutes ces bonnes choses, où est le problème? La plupart des gens avec qui j'ai parlé dans la collectivité estiment que nous sommes restés bloqués avec ce qui a été créé il y a quelques siècles et qu'il est temps pour nous de créer notre propre version de modalités qui pourraient fonctionner. C'est donc ce que nous avons fait. C'est une idée qui vient de nos régions, après consultation de nos collectivités et de nos chefs dans tout le pays dans un processus national de mobilisation, ce qui accorde de la crédibilité à ce dont nous parlons. Nous ne nous sommes pas présentés en tant que dirigeants. Nous parlions en tant que membres des collectivités cherchant à régler les problèmes de gouvernance. C'est dans cette perspective que nous avons fonctionné tout au long du processus.
Il sera très intéressant de voir quels seront les résultats, le nombre d'adhésions réelles et les résultats dans 5, 10 ou 15 ans. D'après ce que j'ai vu, je crois réellement que ce projet de loi aidera nos collectivités à avancer d'une façon positive dans l'avenir.
Le sénateur Wallace : C'est utile de l'entendre. Il semble donc qu'il y a un fort appui à cet égard au sein de toutes les Premières Nations du pays.
Le sénateur Moore : Chef Evans, vous avez mentionné que la Nation crie de Norway House a son propre code coutumier. Vous avez présentement un mandat de quatre ans. Y a-t-il, dans ce projet de loi, des dispositions que vous ne pourriez pas intégrer dans votre propre code? Y a-t-il quelque chose qui vous empêche d'apporter des changements à votre code, que ceux-ci correspondent ou non aux dispositions du projet de loi, dans la mesure où ils respectent la Charte canadienne des droits et libertés? Y a-t-il quelque chose qui vous empêche d'apporter des changements?
M. Evans : Non.
Le sénateur Moore : Des fonctionnaires du ministère nous ont dit que, depuis 1996, 75 Premières Nations ont adopté leur propre code coutumier, pour un total actuel de 343 qui ont leur propre code. Il semble que cela soit l'option préférée. Chef Paul, vous avez dit, je crois, qu'il y a maintenant 37 Premières Nations soumises à la loi dans la région de l'Atlantique.
M. Paul : Non, elles ne le sont pas. Je parlais simplement du nombre de collectivités par rapport aux 76 p. 100 d'entre elles qui sont soumises à la Loi sur les Indiens.
Le sénateur Moore : Je crois que 27 d'entre elles sont soumises à la loi.
M. Paul : À peu près.
Le sénateur Moore : Y en a-t-il parmi elles qui ont indiqué vouloir plutôt avoir leur propre code, quand vous faisiez votre tournée pour recueillir les opinions?
M. Paul : Je l'ai mentionné, et nous en avons parlé. En ce qui concerne les codes coutumiers, il faut remonter aux raisons pour lesquelles ceux-ci ont été établis il y a longtemps. C'était quand nous traitions de la question du statut de membre — les problèmes relatifs au projet de loi C-131 — il y a presque 10 ans, ainsi que le désir que peut avoir une collectivité de gérer ses membres ou non. Dans certains cas, c'est à partir de là que les codes coutumiers ont été élaborés. Les collectivités qui fonctionnent actuellement selon le code ont l'obligation de se mettre à jour et de respecter les normes de la Charte; elles ont l'obligation de réviser leur code en fonction de la Charte.
Il est considérablement coûteux de mettre constamment à jour son code pour respecter la loi et la Charte. C'est une proposition coûteuse pour une collectivité. Nous avons effectivement parlé du code coutumier à des collectivités qui n'ont pas un tel code et à d'autres qui en ont un. Elles aiment ce qu'elles ont. Certaines d'entre elles ont un cycle de cinq ans, d'autres de trois ans; cela varie. Certaines ont le vote hors réserve et d'autres choses du genre, mais l'opinion semble être qu'elles conserveront leur code actuel, mais appuient entièrement les 27 collectivités qui souhaitent adhérer au projet de loi C-9. Elles sont disposées à nous appuyer et à nous aider à le faire. Même après l'adhésion au projet de loi C-9, il est possible d'adopter à un moment donné un code coutumier. Rien ne l'empêche. Ce ne peut être qu'une amélioration. Et c'est ce que nous visons : améliorer le système. C'est essentiellement ce que nous tentons de faire.
Le sénateur Moore : Chef Evans, j'ai une dernière question. L'actuel grand chef de la Assembly of Manitoba Chiefs, Derek Nepinak, a exprimé sa vive opposition au projet de loi, déclarant que :
[...] le projet de loi ne donne pas suite aux recommandations formulées par l'AMC et il constitue un semblant de « tentative de la part du ministre d'étendre la compétence gouvernementale et son contrôle des processus électoraux des Premières Nations établis en vertu de la Loi sur les Indiens ou d'un code coutumier. »
Il poursuit en parlant du pouvoir du ministre d'assujettir les Premières Nations au projet de loi sans leur consentement, de l'absence de mécanismes d'appel pour les Premières Nations et du tirage au sort pour départager les votes en cas d'égalité des voix.
Cela semble contredire ce que vous dites. Quelle est aujourd'hui l'opinion de la Assembly of Manitoba Chiefs?
M. Evans : Quand j'ai entrepris le processus à titre de grand chef, c'était par voie de résolution et, comme je l'ai mentionné, les collectivités elles-mêmes l'appuyaient. Toute nouvelle position devrait être appuyée par une résolution, et je ne crois pas qu'il y en ait une.
Le sénateur Moore : Y en a-t-il une ou non?
M. Evans : Il n'y a pas de résolution indiquant le non-appui.
Le sénateur Moore : Ainsi donc, sa déclaration correspond à son opinion personnelle et ne constitue pas une résolution de la part de l'assemblée entière?
M. Evans : C'est exact.
Le sénateur Moore : Merci.
Le président : J'aimerais mentionner à ce sujet que le comité directeur avait décidé d'inviter le grand chef Nepinak à comparaître devant notre comité. Malheureusement, celui-ci n'a pas été en mesure de le faire en raison d'un conflit d'horaire, mais nous l'avons invité.
J'aimerais remercier chaleureusement les témoins. Vous nous avez présenté une description chronologique fort intéressante de ces questions. Je suis très étonné que le mandat de quatre ans n'a été réclamé qu'en 2008, et je vous félicite de votre patience compte tenu du fait que l'idée avait vu le jour en 1971. Vous demandez quand le projet de loi sera adopté. Je crois que la réponse relève de nous ici. Si vous le permettez, nous allons lever la séance maintenant pour donner au comité la possibilité de décider des sujets que nous aborderons à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)