Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 4 - Témoignages du 30 janvier 2014
OTTAWA, le jeudi 30 janvier 2014
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 10 h 30, pour étudier la capacité des particuliers à se prévaloir d'un régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI), notamment la représentation par un avocat et la capacité des particuliers à conclure un contrat.
Le sénateur Irving Gerstein (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour et bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Aujourd'hui, le comité tient sa cinquième réunion dans le cadre de son étude sur les régimes enregistrés d'épargne-invalidité, ou REEI, notamment la représentation par un avocat et la capacité des particuliers à conclure un contrat.
Comme vous le savez, le comité a entrepris son étude le 4 décembre 2013 et il a entendu à ce jour le ministre d'État (Finances), des fonctionnaires du ministère des Finances, divers groupes qui travaillent auprès des Canadiens handicapés et des représentants d'institutions financières.
Aujourd'hui, le comité entendra le témoignage des représentants de deux sociétés de planification financière au sujet des REEI. Il s'agit de Placements Mackenzie qui a son siège à Toronto, d'après ce que j'ai cru comprendre, et Assante Capital Management Ltd., située à Burlington, en Ontario. Soyez les bienvenus. Merci de comparaître par vidéoconférence.
Nous commencerons par Mme Carol Bezaire, qui est vice-présidente, Planification fiscale et successorale chez Placements Mackenzie. Vous pourriez présenter la personne qui vous accompagne. Après votre exposé, nous entendrons M. Trevor Marsh, qui est conseiller financier chez Assante Capital Management Ltd.
Carol Bezaire, vice-présidente, Planification fiscale et successorale, Placements Mackenzie : Ma collègue Sophie Dagneau est directrice des Services opérationnels chez Mackenzie. Sophie et moi sommes heureuses et honorées de participer à la discussion aujourd'hui.
La société financière Mackenzie a été fondée en 1967. Elle offre des services consultatifs et connexes en matière d'investissements par l'intermédiaire de multiples canaux de distribution axés sur les conseils financiers. Nos services de conseils en placements visent les fonds communs de placement, les caisses en gestion commune, ainsi que les comptes distincts ou séparés pour des investissements faits par des particuliers et des institutions.
Sophie et son équipe supervisent les aspects techniques du régime enregistré d'épargne-invalidité. Mon rôle, en tant que vice-présidente à la planification fiscale et successorale chez Placements Mackenzie, consiste notamment à m'occuper de la formation et de la planification en matière fiscale et patrimoniale, ainsi que de la formation et de l'encadrement en matière de gestion de la pratique à l'intention de conseillers financiers indépendants qui vendent des fonds Mackenzie. Je suis également gestionnaire de produit pour le régime enregistré d'épargne-invalidité. Le REEI est un excellent instrument d'épargne qui permet aux Canadiens handicapés et à leur famille d'épargner pour l'avenir d'une personne admissible au régime.
Lorsque le REEI a été créé, en 2008, je voulais qu'il fasse partie des services que Mackenzie et ses associés offraient aux conseillers financiers indépendants. En se fondant sur les commentaires des clients de nos conseillers, Mackenzie et le Groupe Investors se sont lancés dans le REEI en novembre 2011 — après que de grandes banques eurent participé au projet depuis ses débuts.
Les conseillers financiers qui traitent avec les familles et les aident dans la gestion et la planification financières étaient impatients d'offrir aussi le REEI et de comprendre la valeur de ce régime. J'ai le plaisir de vous annoncer qu'en deux ans, nous avons ouvert plus de 6 000 comptes.
Le défi à relever pour attirer des clients admissibles au REEI a toujours été de composer avec la complexité du programme, les restrictions originales et, bien sûr — ce dont nous sommes venus parler aujourd'hui —, la représentation juridique et la capacité d'un bénéficiaire de passer un contrat. Compte tenu des questions touchant les personnes handicapées qui ont été soulevées dans nos discussions avec les conseillers, les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu quant à savoir qui peut être titulaire ne sont pas très précises pour certaines personnes admissibles à ce régime.
Selon le handicap dont elles souffrent, certaines personnes sont potentiellement considérées comme étant « aptes à conclure un contrat », mais malheureusement, la responsabilité financière n'existe pas. Par exemple, une personne souffrant de schizophrénie, de bipolarité ou d'une certaine forme d'autisme peut être apte à conclure un contrat, mais elle ne devrait pas avoir la responsabilité de prendre des décisions concernant la gestion de fonds ou de placements à long terme.
Même si nous avons pu permettre à un proche ou à un parent admissible d'être cotitulaire avec son enfant adulte, il reste que les paiements faits au titre du REEI peuvent aller au bénéficiaire en tout temps, ce qui va peut-être à l'encontre du but du régime en question — et peut aussi forcer, d'ailleurs, le remboursement de toutes les subventions ou de tous les bons d'épargne-invalidité reçus.
La modification destinée à permettre à un « membre de la famille admissible » d'être titulaire d'un REEI pour le compte d'un bénéficiaire sans être nécessairement mandataire a été bien accueillie par les conseillers et leurs clients. Cela permet à une plus grande variété de personnes de profiter du programme.
J'aimerais toutefois que l'on précise davantage ce que l'on entend par « membre de la famille admissible » et « apte à conclure un contrat ». Admettons qu'un adulte admissible au régime ait un parent, considéré comme un membre de la famille admissible selon la définition actuelle. La seule façon pour quelqu'un, comme un frère ou une sœur, d'être titulaire en cas de décès du parent est de devenir une « personne admissible » à son tour; cela suppose qu'il faut faire la preuve que l'adulte admissible au régime n'est pas apte à conclure un contrat ou que le frère ou la sœur de cette personne a l'autorisation, en vertu de la loi, d'agir au nom du bénéficiaire.
Cela peut donner lieu à un risque d'effondrement du REEI pour le bénéficiaire en attendant qu'on ait réglé les questions juridiques. Permettre à un frère ou à une sœur d'avoir le statut de titulaire à la place d'un parent pourrait non seulement avoir pour effet de réduire le risque qui pèse sur le REEI, mais aussi d'alléger les inquiétudes des familles.
Comme l'ont expliqué d'autres témoins, il n'est pas très facile d'obtenir une ordonnance judiciaire de tutelle financière, même dans les provinces et les territoires qui ont simplifié leurs procédures. Par exemple, le fiduciaire d'un groupe de personnes en intégration communautaire et admissibles à un REEI — qui ne sont normalement pas en contact avec un membre de la famille admissible — doit s'occuper de tout pour elles, y compris des décisions financières. Permettre à un organisme, comme un établissement communautaire, de gérer des REEI pour le compte de leurs bénéficiaires serait une autre façon d'élargir la notion de membre de la famille admissible qui peut être explorée.
Une option serait de permettre aux personnes admissibles de désigner quelqu'un qui les aiderait à prendre des décisions. Je suis certaine que d'autres intervenants vous ont parlé de cette solution, comme l'Association canadienne pour l'intégration communautaire.
Monsieur le président, Placements Mackenzie et le Groupe Investors sont très favorables au REEI, car il faut offrir des solutions aux nombreuses familles canadiennes qui doivent composer avec l'incertitude et les pressions financières associées à un handicap.
Mme Dagneau et moi sommes heureuses d'avoir l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui et nous sommes maintenant prêtes à répondre à toutes vos questions.
Le président : Merci beaucoup, madame Bezaire. Monsieur Marsh, avez-vous une déclaration préliminaire?
Trevor Marsh, conseiller financier, Assante Capital Management Ltd. : Oui. Merci, et bonjour à tous. Je m'appelle Trevor Marsh. J'ai eu une longue carrière de comptable agréé et je suis conseiller financier depuis 25 ans. Je travaille actuellement à titre de conseiller financier pour la société Assante Capital Management Ltd., à sa succursale de St. Catharines, en Ontario. Assante Capital Management Ltd. est l'une des plus importantes sociétés de gestion de patrimoine au pays; elle compte plus de 900 conseillers professionnels qui gèrent plus de 26 milliards de dollars d'actifs au nom de leurs clients. J'exploite aussi une petite entreprise de préparation de déclarations de revenus. C'est à la fois à titre de conseiller financier et de spécialiste en déclarations de revenus que je présenterai aujourd'hui mes commentaires sur le REEI. Mon point de vue sur les REEI sera surtout fondé sur mes observations concrètes et sur mon expérience avec les gens.
Je constate les problèmes suivants par rapport au programme de REEI. En tant que planificateur financier, je reconnais que c'est l'un des régimes d'épargne qui offrent le meilleur rendement et qui procurent aux personnes handicapées le soutien financier dont ils ont tant besoin plus tard dans la vie. Ceux qui ont ouvert un compte sont très heureux de l'augmentation rapide de la valeur du compte grâce aux subventions et aux bons reçus dans le cadre du programme. Cependant, en discutant avec des personnes handicapées de plus de 40 ans, je déduis que le délai prescrit pour tirer avantage du régime rend le régime peu attrayant pour eux.
Le deuxième problème, c'est que les gens connaissent peu le programme, à mon avis. Cela peut découler d'une certaine ignorance des gens quant à leur admissibilité au REEI. Dans la plupart des cas, le spécialiste en déclarations de revenus, qui connaît peut-être le statut fiscal de personne handicapée du particulier, ne communique pas l'information sur l'admissibilité au REEI ou ignore peut-être l'existence du programme. En outre, l'absence de communication entre le spécialiste en déclarations de revenus et le conseiller financier est chose fréquente. Selon mon expérience, parmi mes clients admissibles au crédit d'impôt pour personnes handicapées, aucun ne savait qu'il pouvait ouvrir un REEI. En fait, la plupart n'étaient même pas au courant de l'existence du régime.
Une solution serait que le programme soit connu dès le début, lorsque le médecin prépare le formulaire de crédit d'impôt pour personnes handicapées pour le client. Aussi, lorsque le client reçoit la lettre d'approbation de l'Agence du revenu du Canada, elle pourrait être accompagnée d'informations sur le programme des REEI.
Une autre difficulté que nous avons relevée concerne la résolution des problèmes, comme une anomalie liée à l'identification du client lors du traitement de la demande : le numéro d'assurance sociale, par exemple. Dans la plupart des cas, quand un parent ouvre un REEI au nom d'un enfant handicapé, on observe que parfois, les informations sur le numéro d'assurance sociale dans les dossiers de RHDCC ne correspondent pas toujours aux informations de la déclaration de revenus du particulier. Dans d'autres cas, le numéro d'assurance sociale est exact, mais un nom mal orthographié ou l'absence d'une initiale entraîne le rejet de la demande par RHDCC.
Ce genre de problème découle généralement du fait que le particulier ne présente pas sa carte d'assurance sociale. Cependant, le véritable problème survient lorsque nous, les conseillers financiers, tentons de résoudre le problème, mais que nous ne pouvons pas obtenir des informations de RHDCC en raison des lois sur la protection des renseignements personnels et la confidentialité. Dans cette situation, le client doit contacter RHDCC pour résoudre le problème. Or, il est possible qu'il n'ait pas la capacité de le faire ou ne sache pas comment s'y prendre. Cela retarde le traitement de la demande et nous avons remarqué un mécontentement chez ceux qui pouvaient ouvrir un REEI.
Une des solutions serait d'avoir quelque chose de semblable à la disposition de l'Agence du revenu du Canada qui permet au conseiller de représenter le client. Un mécanisme semblable qui nous permettrait de représenter nos clients auprès de RHDCC pourrait être mis en place.
En terminant, nous appuyons fortement le programme des REEI, car c'est un excellent programme pour les particuliers. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Monsieur Marsh, merci de votre exposé.
La sénatrice Hervieux-Payette : Bonjour. Ma première question s'adresse aux représentantes de Placements Mackenzie. Vous avez parlé de 6 000 comptes. De quel genre d'incapacité parle-t-on? S'agit-il d'incapacité mentale ou physique? Hier, on nous a indiqué qu'en ce qui a trait à l'incapacité mentale, les problèmes d'ordre administratif sont très fréquents. Du côté des aveugles, seulement 30 p. 100 connaissent le programme ou y ont accès, ce qui signifie que 70 p. 100 ne le connaissent pas ou n'y ont pas accès.
Parmi vos 6 000 comptes, en général, quelle est la composition de votre clientèle?
Mme Bezaire : Je vous remercie de la question. Parmi les 6 000 comptes, nous observons une prévalence des parents d'enfants autistiques ou atteints du syndrome de Down. Je pense que le problème le plus important auquel nous serons confrontés surviendra lorsque ces enfants atteindront l'âge de la majorité. Les parents devront alors régler la question de la représentation juridique. Actuellement, les comptes sont ouverts alors que les enfants sont en bas âge.
En raison du transfert des REER et des FRR, nous constatons une augmentation du nombre de comptes ouverts pour des personnes paraplégiques ou schizophrènes. Ces gens procèdent au transfert des REER et des FRR dans une plus grande proportion et se soucient peu de la subvention et du bon. La tendance la plus marquée est liée à l'autisme.
La sénatrice Hervieux-Payette : Êtes-vous d'accord avec M. Marsh pour dire que les titulaires des régimes ne bénéficient d'aucun soutien? Qui devrait fournir cette aide? Il est question de parents qui n'ont peut-être pas, sur le plan financier, les connaissances requises pour administrer le régime. De plus, il y a divers acteurs. Hier, des témoins ont mentionné que les banques n'étaient pas d'une grande aide pour ce qui est des comptes bancaires et des choses du genre. À votre avis, convient-il de mettre en place un guichet unique où les gens pourront satisfaire à toutes les exigences liées à la création et au suivi du régime, à l'exception de la question de la représentation après le décès des parents, qui est un enjeu en soi? Dans mon cas, c'est une question d'ordre civil : qui représentera qui? Pensez-vous qu'il faut un guichet unique pour l'accès au programme? Qui devrait être chargé d'accorder l'accès aux parents et de leur expliquer — et non aux enfants — comment gérer ce régime?
Mme Bezaire : Je suis désolée; la question s'adresse-t-elle à M. Marsh, ou à moi?
La sénatrice Hervieux-Payette : À vous.
Mme Bezaire : Chez Placements Mackenzie, nous faisons appel à des conseillers financiers. Nous traitons avec des conseillers qui connaissent la famille et la plupart des enjeux auxquels elle est confrontée. C'est à cette étape qu'interviennent les activités liées au REEI : il faut en parler, le présenter et s'assurer qu'on y investit.
La sénatrice Hervieux-Payette : Quels sont vos frais administratifs associés à ces régimes?
Mme Bezaire : L'ensemble du volet administratif a été confié à CitiFinancial. Nous avons un contrat avec cette société, mais je ne peux vous donner de chiffre précis parce que je ne le connais pas. Je sais cependant que nous payons des frais pour chaque compte.
Sophie Dagneau, directrice, Opérations, Placements Mackenzie : Oui, et aussi pour chaque transaction.
La sénatrice Hervieux-Payette : Pourriez-vous demander ces chiffres? Je pense que c'est un facteur important. Le comité a réalisé maintes études sur les frais d'administration des fonds communs de placement. Ils étaient plutôt élevés. Voilà pourquoi je vous ai posé cette question.
La sénatrice Ringuette : Ce n'est pas la même chose. Vous avez posé une question sur leurs coûts de fonctionnement.
La sénatrice Hervieux-Payette : Non, non.
La sénatrice Ringuette : Ce n'est pas lié aux frais qu'ils exigent pour le compte.
La sénatrice Hervieux-Payette : Non, non. Ils font appel à un conseiller. C'est ce que j'ai compris. Placements Mackenzie n'administre pas le régime. C'est un autre groupe qui s'en charge. Il y a maintenant trois parties qui participent. En fin de compte, quels sont les coûts pour le client — la personne handicapée — pour l'ensemble du processus?
Mme Bezaire : Les coûts pour la personne handicapée sont tout simplement identiques aux frais d'administration des fonds communs de placement payés par toute autre personne. Il n'y a pas de frais supplémentaires pour la gestion du compte. Ces coûts sont assumés par Placements Mackenzie et le Groupe Investors.
La sénatrice Hervieux-Payette : Très bien.
Mme Bezaire : Nous recevons des frais de gestion, comme pour toute autre personne. Ce sont les mêmes frais que pour n'importe qui d'autre.
La sénatrice Hervieux-Payette : Quels sont ces frais?
Mme Bezaire : Ils varient de 1,5 à 2 p. 100 de la valeur du compte. Dans le marché, ce sont les mêmes frais que pour tous les autres fonds.
La sénatrice Hervieux-Payette : Ma question s'adresse à M. Marsh. Habituellement, lorsque mon comptable prépare ma déclaration de revenus, je signe un formulaire afin qu'il puisse communiquer des renseignements aux gens de l'ARC. Premièrement, je ne me fais pas déranger, et deuxièmement, mon comptable peut répondre à leurs questions au sujet de ma déclaration.
Une question m'est venue à l'esprit lorsque vous avez parlé de représenter le client. Même si vous êtes comptable, vous n'êtes pas autorisé à communiquer avec l'ARC ou RHDCC au nom du client pour obtenir des renseignements de ces deux organisations.
M. Marsh : C'est exact. En tant que spécialiste en déclarations de revenus, je peux demander au client de m'autoriser à le représenter auprès de l'Agence du revenu du Canada. J'ai cette possibilité. Cependant, je ne peux pas représenter mon client auprès de RHDCC. En cas d'erreur dans le formulaire de demande, nous ne pouvons même pas savoir de quelle erreur il s'agit.
Je me trouve dans une position unique, car je représente certains clients pour la déclaration de revenus et les conseils financiers. La plupart des conseillers ne préparent pas la déclaration de revenus de leur client et ils sont désavantagés, puisqu'ils ne peuvent communiquer ni avec l'ARC, ni avec RHDCC. Dans ce cas, le conseiller compte sur le client pour appeler ces organisations afin de faire la lumière sur le problème.
La sénatrice Hervieux-Payette : Serait-ce une bonne solution si le comité recommandait, dans son rapport, que le conseiller financier qualifié ainsi que le comptable puissent représenter le client avec l'autorisation nécessaire? Il pourrait y avoir un formulaire semblable à celui que nous donnons à notre comptable pour notre déclaration de revenus. Vous pourriez être autorisé par le titulaire du compte à divulguer les renseignements. Vous pourriez alors fournir tous les services à la famille de l'enfant ou à la personne. Serait-ce une bonne façon de faire?
M. Marsh : Oui, ce serait formidable.
La sénatrice Hervieux-Payette : Nous avons une autre solution.
Vous avez parlé des médecins. D'après mon expérience — et je présente mes excuses aux médecins qui ont de bonnes habitudes financières —, ils ne savent pas nécessairement bien gérer leurs propres finances. Je pense donc que ce sont les personnes financièrement responsables de ce secteur qui devraient s'en occuper. Je fais des blagues à ce sujet avec mon médecin — je lui donne sans doute des conseils.
Vous avez dit avoir 900 conseillers. Êtes-vous en contact avec toutes ces personnes? En avez-vous discuté? Cela fait-il partie du programme de vos discussions à Assante Capital Management Ltd., afin que tout le monde aille dans le même sens?
M. Marsh : Je ne sais pas. Nous sommes essentiellement des conseillers indépendants. À ma connaissance, il n'y a aucune grande discussion sur les questions liées au régime enregistré d'épargne-invalidité. Malheureusement, je ne saurais vous dire si d'autres conseillers connaissent des problèmes semblables.
La sénatrice Hervieux-Payette : Ma dernière question est la suivante. Vous dites que c'est un régime très lucratif, mais vous prenez la décision finale pour l'investissement. Vous ne donnez pas le contrat à une autre firme; vous gérez ces fonds.
M. Marsh : En tant que conseiller, je suggère et je recommande des investissements dans le REEI. Assante a des comptes de nom de client. Nous faisons appel à la Banque de Montréal, qui a été le premier établissement bancaire à permettre aux conseillers indépendants d'offrir ce produit. Assante ne gère pas du tout cela à l'interne. Tout est fait par BMO Guardian.
La sénatrice Hervieux-Payette : Y a-t-il des frais ou est-ce inclus dans le coût total lorsqu'on ouvre le compte? Imposez-vous des frais?
M. Marsh : Non. Les frais sont les mêmes que ceux mentionnés par les représentants de Mackenzie, selon l'investissement dans le REEI. S'il s'agit d'un fonds commun de placement, il y a des frais de 1,5 à 2 p. 100. Si c'est un CPG, il n'y a aucun coût pour le client, s'il veut conserver le placement ainsi. Je n'ai pas de frais additionnels lorsque j'ouvre un compte pour un client.
La sénatrice Hervieux-Payette : Je me réjouis que nous ayons autant de bénévoles. Merci.
Le sénateur Black : Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. J'ai trouvé vos exposés extrêmement constructifs et utiles. Je vous en remercie. J'ai trois questions à vous poser, si vous le permettez. Pourriez-vous, chacun votre tour, nous résumer ce qui, selon vous, constitue des obstacles à l'ouverture de ces comptes?
Mme Bezaire : Je vais parler la première, puisque j'aime bien parler.
Selon nous, le premier obstacle est la base de connaissances des personnes ayant un handicap qui veulent être reconnues comme « personnes handicapées ». C'est lorsqu'une personne demande le crédit d'impôt pour personnes handicapées pour la première fois. Nous tentons de l'aider à comprendre ou d'aider son conseiller à lui expliquer comment cela fonctionne.
Le deuxième grand obstacle, c'est l'incertitude liée à l'accès aux fonds pour ceux qui en ont besoin avant 60 ans. Par exemple, nous avons une cliente à qui j'ai suggéré de ne pas ouvrir de REEI parce qu'elle est atteinte de fibrose kystique et que son espérance de vie ne dépasse probablement pas 35 ans. Un REEE serait préférable pour elle. Le troisième obstacle est celui de la représentation juridique.
Le sénateur Black : Monsieur Marsh, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Marsh : J'appuie l'ensemble des propos qu'a tenus Carol. J'ajouterais seulement un commentaire concernant, comme je l'ai mentionné plus tôt, la gestion du traitement des demandes, en particulier s'il y a des problèmes liés à l'identification. Pour revenir à la question des connaissances des personnes qui veulent présenter une demande, dans la plupart des cas, elles ne connaissent pas ce programme.
Le sénateur Black : C'est très utile.
Monsieur Marsh, vous avez fait un commentaire intéressant durant votre exposé. Vous avez dit avoir vécu une certaine frustration à l'égard de certains de vos clients relativement à l'échéancier des retraits. Que vouliez-vous dire? Et que suggéreriez-vous?
M. Marsh : J'ai constaté que les gens de 40 ans et plus participent au régime durant les 20 ans, jusqu'à l'âge de 60 ans, et ils doivent attendre d'avoir 70 ans pour retirer des fonds. Ils se rendent compte que c'est un âge avancé pour avoir accès à ces fonds et profiter de toutes les subventions.
Le sénateur Black : Je ne veux pas parler à votre place, mais ne diriez-vous pas que la période de 10 ans devrait être réduite?
M. Marsh : Elle pourrait être réduite, ou il pourrait aussi y avoir un critère lié à l'âge. À un certain âge, ils pourraient retirer des fonds et devancer les retraits.
Le sénateur Black : Merci beaucoup. C'est également très instructif.
Vous avez tous parlé du fait que vos clients ne connaissent pas ce programme. Supposons que le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux vous demandent de concevoir un programme qui permettrait de faire connaître ce programme au public cible. Que feriez-vous?
Mme Bezaire : Si nous devions le concevoir, je ferais probablement appel aux professionnels de la santé, afin qu'ils connaissent ce programme. Je m'arrangerais pour que les professionnels qui s'occupent de ces personnes soient bien au fait de son fonctionnement. J'ai présenté de nombreux exposés aux travailleurs sociaux qui s'occupent de personnes handicapées. Je me suis aussi rendue dans des collectivités et des centres Community Living. Il nous faut atteindre les gens qui ont une influence sur les personnes handicapées.
Le sénateur Black : C'est très constructif.
M. Marsh : Peut-être que sur le formulaire du crédit d'impôt pour personnes handicapées que la personne fait signer à son médecin, on pourrait indiquer la prestation supplémentaire qu'elle pourrait obtenir, de façon à ce que le médecin puisse en informer son patient. Je ne sais pas ce que les médecins en penseraient ou pour quelle raison ils le feraient, mais il faut espérer qu'ils le feraient.
Le spécialiste des déclarations de revenus connaît davantage le REEI. Dans les logiciels d'impôt, il y a parfois des messages instantanés qui apparaissent lors de la préparation d'une déclaration. Par exemple, si une personne demande le crédit d'impôt pour personnes handicapées, un message instantané pourrait apparaître et demander : « Avez-vous pensé à ouvrir un compte REEI? »
Le sénateur Black : Ce sont toutes de bonnes idées. Je vous remercie tous sincèrement de votre engagement à cet égard.
La sénatrice Ringuette : Merci de vos observations. Selon votre expérience, quelle serait la cotisation annuelle moyenne de vos clients au régime?
Mme Bezaire : Chez Placements Mackenzie, dans la plupart des cas, nous informons chaque année les gens du maximum en report des droits pour les personnes qui n'ont pas déjà ouvert un REEI. Le montant serait de 3 500 $ cette année, ce qui le porterait à un maximum de 10 500 $. Nous fonctionnons de cette façon.
Actuellement, la contribution moyenne au régime est d'environ 12 000 $.
La sénatrice Ringuette : Par année?
Mme Bezaire : Oui, par année. Je pense que c'est supérieur à la moyenne tout simplement parce que nous incluons dans cette moyenne les transactions forfaitaires faites par les parents et les grands-parents qui veulent épargner pour l'avenir, indépendamment des subventions et des bons. Ils veulent mettre de l'argent de côté pour l'avenir d'un enfant ou d'un petit-enfant touché.
La sénatrice Ringuette : Combien une contribution de 12 000 $ par année générerait-elle en subventions gouvernementales dans le portefeuille?
Mme Bezaire : S'ils y sont admissibles, pour les premiers 1 500 $ cotisés, ils obtiendraient le montant total, soit 3 500 $. Ils ne recevraient pas de subvention ni de bon au-delà de ce montant.
La sénatrice Ringuette : Quel est le rendement moyen d'un fonds commun de placement?
Mme Bezaire : Dans le compte?
La sénatrice Ringuette : Oui.
Mme Bezaire : Cela dépend du fonds commun de placement ou du portefeuille, car certaines personnes ont plus d'un fonds, selon le montant d'argent. M. Marsh saurait mieux vous parler des rendements des fonds communs de placement. Les revenus varient selon le fonds commun de placement, mais ils correspondent tous au marché. La plupart des fonds sont équilibrés; ils sont donc assez conservateurs et ils croissent et s'accumulent dans ce compte. Je ne peux vous donner de pourcentage, mais peut-être que M. Marsh le pourrait.
M. Marsh : Je peux vous en parler de façon générale. Tout dépend du profil de risque que le titulaire du REEI choisit pour son investissement. Les fonds communs de placement équilibrés, composés d'obligations et d'actions, pourraient donner en moyenne entre 5 et 8 p. 100 à long terme. Ces dernières années, ils ont donné d'assez bons résultats en raison de l'augmentation dans les marchés, mais cela dépend uniquement de la composition du portefeuille. Par exemple, avec un CPG, le maximum que l'on pourrait obtenir, c'est 2 ou 3 p. 100. Avec un investissement à risque élevé, on peut obtenir beaucoup plus. Tout dépend des objectifs d'investissement du particulier et, évidemment, des fonds et investissements choisis pour le régime.
La sénatrice Ringuette : Vous diriez en moyenne environ 5 p. 100, avec de la chance et un bon conseiller.
M. Marsh : Je dirais que le minimum serait probablement 5 p. 100, ces dernières années. Ce serait sans doute davantage aux alentours de 8 p. 100, ou même plus, dans un fonds bien équilibré. C'est difficile à dire, car chaque compte est unique.
La sénatrice Ringuette : C'est peut-être une question difficile, mais ce n'est pas mon intention. Je veux simplement qu'elle soit objective en ce qui concerne l'objectif du programme, qui est d'aider les personnes handicapées dans l'avenir. En ce qui a trait au rendement moyen des fonds communs de placement, les investisseurs prudents chercheront probablement à obtenir un rendement moyen de 5 p. 100, ce qui comprend les 3 500 $ du gouvernement fédéral. Les frais administratifs, comme vous l'avez indiqué, sont de 1,5 à 2 p. 100 de ce rendement. Je crois même que certains frais liés aux fonds communs de placement sont plus élevés que 2 p. 100. On nous a donné ce genre d'information dans d'autres dossiers.
Les frais représentent près de la moitié du rendement annuel sur le capital investi.
M. Marsh : J'aimerais simplement préciser que le rendement est de 5 p. 100, après le paiement des frais liés au fonds commun de placement. Ce que le client reçoit après avoir payé tous les frais, c'est 5 p. 100.
La sénatrice Ringuette : Quels seraient les frais moyens pour votre programme moyen? Si l'on parle de 2 p. 100 — vous avez parlé tout à l'heure d'un investissement moyen de 12 000 $ par année, ce qui est très élevé; on doit avoir un revenu très élevé pour pouvoir placer 12 000 $ par année dans un tel programme. On ajoute ensuite les 3 500 $. Nous en sommes donc à environ 15 000 $ par année, à 2 p. 100, en moyenne.
Mme Bezaire : Les 2 p. 100 sont pris en moyenne... eh bien, les 2 p. 100 sont prélevés de l'ensemble du fonds, et tous les investisseurs...
La sénatrice Ringuette : C'est donc davantage.
Mme Bezaire : Non. C'est environ 1,5 à 2 p. 100, mais c'est ensuite calculé au prorata selon le montant que détient chaque personne. Ce qu'il en coûte pour que le gestionnaire de portefeuille gère les investissements et le portefeuille d'actions ou les titres sous-jacents dans le fonds commun de placement — c'est ce que les clients paient, plutôt que de conserver un CPG d'un certain montant dont les frais sont moins élevés, mais qui génère un rendement inférieur. Ils paient donc pour les conseils — ni plus ni moins que les autres personnes qui achètent un fonds commun de placement.
La sénatrice Ringuette : À mon sens, c'est encore plus draconien, car les 2 p. 100 ne sont pas seulement prélevés sur la cotisation annuelle, mais sur la valeur cumulative du capital, en plus des intérêts tirés du fonds. C'est beaucoup d'argent.
Mme Bezaire : Encore une fois, cela varie selon le fonds. S'il s'agit d'un fonds qui ne bouge pas très souvent et si le gestionnaire de portefeuille ne fait pas beaucoup de transactions, les frais seront peu élevés. C'est ce que beaucoup de gens ayant un REEI choisissent : des fonds équilibrés ou conservateurs. Si c'est un fonds actif, il en coûtera davantage en raison des frais d'exécution.
La sénatrice Ringuette : D'un côté, les contribuables et le gouvernement, par ce programme, essaient de créer un fonds pour aider les personnes handicapées à s'assurer un revenu décent ou meilleur dans l'avenir. J'ai ouvert une boîte de Pandore en ce qui a trait aux frais qui sont imposés en ce sens que ces personnes n'obtiennent aucun avantage par rapport à tout autre portefeuille de fonds communs. Peut-être qu'au bout du compte, c'est l'un des obstacles au programme. Pour un conseiller financier ou une société de fonds communs de placement, rien ne le distingue vraiment des autres.
Mme Bezaire : Il n'y a pas de frais pour le compte lui-même, mais pour ce que l'on choisit d'y inclure. Si les cotisations moyennes sont plus élevées, c'est simplement parce que ces familles reçoivent l'aide d'un conseiller financier.
Les gens peuvent bien entendu recourir aux banques ou se servir du REEI offert par Placements Mackenzie. Ce que je tiens à souligner, c'est que les personnes handicapées ont autant de choix que n'importe qui d'autre. C'est le problème fondamental des REEI, mais je comprends très bien ce que vous soulevez à propos des frais.
La sénatrice Nancy Ruth : Monsieur Marsh, vous avez fait état d'un certain nombre de frustrations, mais je voulais m'enquérir des clients qui souhaitent retirer leur argent plus tôt ou qui — comme l'a indiqué la représentante de Mackenzie — n'ont pas adhéré à des régimes parce qu'ils souffrent de fibrose kystique. Dans l'optique d'une réduction possible de la durée prescrite, procèderiez-vous selon la maladie ou simplement en fonction des années?
Il se peut qu'une personne paraplégique ait une affection pulmonaire, des troubles cardiaques et toute une série de problèmes de santé autres, et que l'âge de 55 ans, voire de 50 ans, puisse être raisonnable, attendu que toutes ces maladies compliquent tellement sa vie professionnelle. Avez-vous envisagé jusqu'à quel âge il serait possible de réduire le seuil à partir duquel les participants pourraient commencer à retirer?
M. Marsh : Je n'ai pas encore établi d'âge précis à ce sujet. Toutefois, vous soulignez à juste titre que selon la gravité du handicap, l'âge ne devrait pas être le seul critère limitant ou sanctionnant le retrait anticipé de fonds; le type de handicap ou l'espérance de vie du participant pourraient aussi jouer un rôle plus important quant au retrait de fonds d'un REEI.
Si leur espérance de vie est de moins de cinq ans, je crois que leur médecin peut soumettre quelque chose qui permettra de libérer les fonds plus tôt. Je ne connais pas les détails de cet arrangement, mais je sais qu'il existe.
La sénatrice Nancy Ruth : Aux femmes de chez Mackenzie, j'ai été intéressée par votre idée de recourir à un organisme comme Community Living après le décès des parents —ou de permettre le transfert à un frère, une sœur ou quelqu'un d'autre.
Quelle sorte de structure juridique un groupe comme Community Living devrait-il avoir pour devenir fiduciaire ou mandataire? Leur en avez-vous parlé?
Mme Bezaire : Moi, si. Habituellement — c'est du moins le cas en Ontario —, lorsque des particuliers vivent en intégration communautaire, l'organisme responsable est nommé fiduciaire. La province leur reconnaît ce titre.
Alors, j'estime que le recours à des fiduciaires répondrait dans une large mesure aux besoins de tout le monde. Ils peuvent prendre soin des prestations que leur verse le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Ils peuvent voir à leurs besoins au quotidien. Je crois qu'un REEI pourrait aussi faire partie de ce qui leur serait confié, et la plupart des provinces ont un mécanisme comparable avec Community Living.
La sénatrice Nancy Ruth : Aidez-moi à m'y retrouver. N'y a-t-il pas un organisme national qui regroupe les organismes « Community Living » provinciaux?
Mme Bezaire : Oui, l'organisme Community Living intervient à la fois sur le front provincial et à l'échelle du pays. Il s'agit donc d'un organisme national, mais sa supervision relève des gouvernements provinciaux.
La sénatrice Nancy Ruth : Lorsque vous dites qu'ils ont les compétences financières pour s'occuper des programmes financiers provinciaux, faites-vous allusion aux organismes Community Living provinciaux ou aux résidences individuelles?
Mme Bezaire : Aux organismes Community Living provinciaux.
La sénatrice Nancy Ruth : De cette agence?
Mme Bezaire : Oui.
La sénatrice Nancy Ruth : Ce n'est pas une agence, mais une organisation non gouvernementale. C'est un organisme bénévole, ou du moins, dirigé par un conseil composé de bénévoles.
Mme Bezaire : C'est exact.
Mme Dagneau : Si je puis faire un commentaire concernant la dernière question, qui cherchait à cerner les critères que l'on retiendrait pour établir l'âge à partir duquel les fonds seraient accessibles si cela devait être modifié et, plus précisément, à savoir si ces critères tiendraient compte de l'état de santé de la personne. J'estime qu'il s'agirait plutôt d'une décision globale ou d'une réduction de l'âge. Les produits associés aux REEI sont tellement complexes qu'il pourrait être décourageant de tenter d'expliquer de quoi toutes ces règles retournent ou d'offrir de le faire. Je crois qu'une réduction globale de l'âge serait probablement la solution la plus avantageuse.
La sénatrice Nancy Ruth : Si Community Living devient fiduciaire pour ces personnes et responsable des fonds, est-ce que Placements Mackenzie envisage la création d'un fonds commun de placement spécial pour tous ceux que auront recours à cet organisme? Est-ce l'organisme qui vendra les unités ou vous qui vendrez les unités pour l'organisme? Pensez-vous que les choses vont rester telles qu'elles sont et que vous garderez vos propres vendeurs?
Mme Bezaire : Placements Mackenzie a recours à des conseillers financiers, comme M. Marsh. Nos fonds seront vendus par l'intermédiaire d'un conseiller financier qui traitera avec l'organisme d'intégration communautaire.
La sénatrice Nancy Ruth : Ma dernière question à vous deux : vous n'avez rien dit sur la profession juridique susceptible d'aider à vendre ces produits. J'ai l'impression qu'un grand nombre de personnes évoluant dans le domaine des successions pourraient se servir de ces produits. Avez-vous déjà discuté de cela avec cette aile du barreau?
Mme Bezaire : Oui. La plupart des avocats qui s'occupent de succession à qui j'ai parlé sont enthousiastes. Ils se servent du REEI parce qu'ils administrent des fiducies de pension et d'autres fonds mis de côté pour des personnes handicapées, et qu'ils veulent être en mesure de mieux les aider à prévoir. Ils ont donc adopté les REEI dans une assez large mesure, au fur et à mesure qu'ils en comprennent mieux les tenants et aboutissants.
La sénatrice Nancy Ruth : Est-ce que toutes les banques et toutes les institutions financières comme la vôtre font les mêmes représentations auprès des différents barreaux? Comment s'effectue le travail de vente?
Mme Bezaire : J'aime bien le terme « représentations ». Nous travaillons avec des conseillers financiers. Les avocats en succession sont « un centre d'influence ». En effet, si vous avez un client comme M. Marsh, vous devez connaître des avocats qui sont capables d'aider leurs clients à préparer leurs testaments et leurs procurations, et de créer des fiducies. Cela devient une relation en soi, un échange qui va dans les deux sens. Alors, c'est ce que nous faisons quand on nous demande d'aller parler à un cabinet d'avocats en compagnie d'un conseiller financier, nous discutons des REEI.
Le sénateur Black : J'ai une question supplémentaire qui est liée à une excellente question que ma collègue a posée tout à l'heure. Êtes-vous en train de nous dire que les fiduciaires provinciaux de chaque province pourraient jouer le rôle de fiduciaires auprès des clients qui n'ont personne pour veiller sur leurs intérêts? Vous croyez que nous pouvons envisager cette possibilité?
Mme Bezaire : Oui, et l'organisme Community Living l'a aussi demandé.
Le sénateur Black : Formidable! Je voulais que cela figure au compte-rendu. Merci.
Le président : Merci d'avoir apporté cette clarification.
Le sénateur Massicotte : J'ai une question un peu technique. Comme vous le savez, il arrive que l'espérance de vie de ces personnes soit inférieure à la moyenne, et il a été suggéré que l'âge de 70 ans était peut-être un peu tard pour commencer à bénéficier du régime. Je crois que quelqu'un a souligné qu'une personne pouvant produire un certificat médical stipulant que son espérance de vie est de moins de cinq ans avait la possibilité d'accéder plus tôt à son argent.
Or, ne pourrait-on pas aussi envisager le scénario suivant : si votre espérance de vie est inférieure à 70 ans, vous pouvez arrêter de cotiser et, 10 ans plus tard, vous pouvez commencer à retirer vos fonds? N'est-ce pas le cas?
Mme Dagneau : Oui, c'est le cas du régime d'épargne-invalidité déterminé, qui offre cette disposition de cinq ans à laquelle vous faites allusion. Sauf qu'il n'est pas permis de cotiser durant cette période. Alors, l'inclusion d'une telle disposition aux termes du régime s'accompagne de certaines restrictions.
Le sénateur Massicotte : Mais il faut tenir compte de la raison d'être du régime d'épargne, c'est-à-dire la retraite. Je comprends que c'est bien compliqué à expliquer, mais nous voulons nous assurer que des tierces parties ne viendront pas spolier ces personnes de leurs économies. Si vous croyez que vous ne serez plus des nôtres dans cinq ou sept ans, il peut paraître étrange de continuer à cotiser au régime, puisque l'objectif est d'utiliser cet argent un jour ou l'autre. Ce sont là des motivations contradictoires.
Mme Dagneau : Cette contribution au régime pourrait venir d'un autre parent ou d'un grand-parent, de sorte qu'elle pourrait être cautionnée par le bénéficiaire.
Le sénateur Massicotte : Très juste.
Le président : C'est ce qui met fin à cette première série de questions. Il y a une autre personne qui veut poser une question dans la deuxième série.
La sénatrice Ringuette : Ma question s'adresse à M. Marsh, car elle fait référence à l'expérience qu'il a eue lorsqu'il a soumis sa déclaration de revenus. En ce qui concerne, par exemple, le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, nous avons entendu hier que les prestations mensuelles plafonnaient actuellement à environ 700 $. Ce programme comporte-t-il un mécanisme pour que le montant des prestations versées soit réduit en fonction des montants retirés d'un REEI? Ma question est-elle claire?
M. Marsh : Oui. Je pense que le REEI n'a aucune incidence sur ce programme, du moins, pas durant sa portion épargne. Je devrai vérifier, mais je ne pense pas que cela ait une incidence durant la portion retrait non plus. Peut-être que Mme Bezaire de Placements Mackenzie peut nous en dire plus long à ce sujet.
Mme Bezaire : Oui. Aux termes du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, les revenus et les actifs sont exemptés.
La sénatrice Ringuette : À l'heure actuelle, les revenus qu'une personne handicapée tirerait d'un REEI n'auraient aucune incidence sur le revenu qu'elle pourrait tirer du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, n'est-ce pas?
Mme Bezaire : C'est exact.
Le président : Merci de cette précision, sénatrice Ringuette.
La sénatrice Hervieux-Payette : Je suis curieuse. Lorsque nous avons fait notre étude sur les RÉR, nous avons constaté que cette mesure fiscale ne profitait qu'à un nombre limité de Canadiens.
Avec ce programme, lorsqu'il est question des enfants et des adultes, je pense que ceux qui en profiteront représentent 0,01 p. 100 de l'ensemble de la population canadienne. Mais parmi ceux qui en profiteront, quel portrait fait-on des enfants handicapés et de leurs parents qui épargnent cet argent? Les adultes le font-ils eux-mêmes? Diriez-vous que c'est moitié-moitié, ou que ce sont davantage les parents ou les grands-parents qui préparent l'avenir des enfants? Ou croyez-vous que ce sont les parents eux-mêmes qui tentent de se servir et de profiter de cet avantage?
Mme Bezaire : Selon mon expérience, ce sont les parents et les grands-parents qui cotisent au régime pour quelqu'un d'autre. Il y a moins de personnes handicapées qui cotisent à des régimes d'épargne-retraite. Je connais ces deux avocats qui sont aveugles au sens de la loi. Ils ont des RÉR et ils ont ouvert un compte dans un REEI, car ils estiment que c'est une autre façon d'épargner.
Mais la plupart des familles utilisent les REEI pour leurs enfants ou leurs petits-enfants.
La sénatrice Hervieux-Payette : Monsieur Marsh, avez-vous quelque idée que ce soit au sujet de ceux qui subissent...
M. Marsh : Je suis d'accord. Dans la majorité des cas, c'est le parent qui ouvre un compte pour son enfant.
La sénatrice Hervieux-Payette : Je crois qu'il est important de le savoir.
Le président : Merci, madame Bezaire, madame Dagneau et monsieur Marsh. Vous avez contribué de brillante façon à nos délibérations. Nous pouvons maintenant entreprendre l'élaboration du rapport. Au nom de tous les membres du Comité sénatorial des banques et du commerce, je vous remercie sincèrement d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
(La séance est levée.)