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LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 2 - Témoignages du 13 février 2014


OTTAWA, le jeudi 13 février 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-217, Loi modifiant le Code criminel (méfaits à l'égard des monuments commémoratifs de guerre), se réunit aujourd'hui, à 10 h 31, pour en étudier la teneur.

Le sénateur George Baker (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Bonjour, je souhaite la bienvenue à mes chers collègues, à nos invités et au public qui écoute aujourd'hui les délibérations du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Je m'appelle George Baker, et je suis le vice-président du comité, en remplacement du président, le sénateur Bob Runciman.

Nous nous réunissons aujourd'hui pour étudier le projet de loi C-217, Loi modifiant le Code criminel (méfaits à l'égard des monuments commémoratifs de guerre). S'il est adopté, le projet de loi érigera en infraction tout méfait commis à l'égard d'un monument commémoratif de guerre ou d'un cénotaphe.

Le projet de loi a été déposé à la Chambre des communes pour la première fois à la dernière session, soit le 15 juin 2011, mais n'a pas pu être adopté avant la prorogation. Il a été rétabli au début de la session actuelle, puis renvoyé au comité le 4 février 2014. Nous sommes donc à la deuxième séance d'étude du projet de loi C-217.

Je tiens à rappeler aux auditeurs que les séances du comité sont ouvertes au public et qu'elles sont diffusées sur le site web du Parlement, sen.parl.gc.ca. Vous trouverez plus de détails sur les témoins en consultant le site web sous la rubrique « Comités du Sénat ».

Dans notre premier groupe d'experts, nous accueillons les représentants de la Légion royale canadienne : le président national Gordon Moore, et le directeur des cérémonies nationales Steven Clark. Nous recevons aussi le brigadier-général à la retraite David Kettle, secrétaire général de l'Agence canadienne de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth.

Nous allons commencer ce matin par la déclaration liminaire de M. Moore.

Gordon Moore, président national, Légion royale canadienne : Honorable président et membres du comité, merci d'avoir invité la Légion royale canadienne à comparaître devant vous pour commenter le projet de loi C-217, Loi modifiant le Code criminel (méfaits à l'égard des monuments commémoratifs de guerre).

En tant que gardienne du souvenir au Canada, la Légion royale canadienne travaille à préserver le souvenir des 117 000 Canadiens et Canadiennes qui sont tombés alors qu'ils étaient au service de l'armée canadienne. Dans chaque collectivité des quatre coins du pays, des milliers de légionnaires et de citoyens se réunissent devant les monuments commémoratifs de guerres ou les cénotaphes pour de nombreuses cérémonies, comme le jour du Souvenir et d'autres anniversaires et événements spéciaux en cours d'année.

La commémoration est un témoignage de gratitude, une réflexion sur les répercussions qu'auront sur les générations futures nos actions antérieures lors de guerres, de missions, de conflits et en temps de paix. Nous nous rappelons les moments de triomphe, les moments tragiques, les moments d'émoi et ceux de désespoir.

C'est cette compréhension et cette gratitude qui nous permettent de nous rappeler et d'honorer nos anciens combattants, de ne jamais oublier les hauts faits des disparus et de perpétuer leur mémoire. C'est pour cette raison que la Légion royale canadienne appuie le principe du projet de loi C-217.

Tout au long de son histoire, la Légion a maintenu un rôle de premier plan dans la création et la conservation des monuments érigés à la mémoire des valeureuses contributions de nos anciens combattants. En travaillant de concert avec d'autres organisations d'anciens combattants et avec le gouvernement du Canada, la Légion s'est engagée à préserver la mémoire de nos héros disparus.

Ces activités et projets commémoratifs ainsi que d'autres, menés par la Légion royale canadienne, ont été bien accueillis par les Canadiens et Canadiennes qui n'ont jamais hésité à témoigner de leur appui en reconnaissant leur dette envers ceux et celles qui ont fait tant de sacrifices. Or, c'est par le souvenir que nous nous acquittons de cette dette.

Nous sommes d'avis que les monuments commémoratifs et les célébrations aux cénotaphes constituent une importante facette de tout programme commémoratif. Ils renforcent le sentiment d'unité nationale, permettent de souligner les vies perdues et constituent un rappel visuel de notre engagement à ne jamais oublier. Ils permettent aux Canadiens et Canadiennes de toutes les localités de partager notre histoire collective de sacrifices et d'engagement.

Des citoyens de partout au pays protègent ardemment leurs monuments et cénotaphes, et tout acte de profanation soulève indignation et colère au sein des localités touchées. Nous sommes d'avis qu'il faut que ceux qui s'adonnent à de tels gestes soient tenus responsables de leurs actes et, à cet égard, l'objectif du projet de loi C-217 verra à assurer cette responsabilisation.

Nous demeurons toutefois inquiets quant au manque de formes alternatives de punition dans le projet de loi C-217. En effet, nous sommes d'avis qu'il faudrait songer à des alternatives qui tiennent compte de la gravité et des circonstances entourant chaque incident. Par exemple, on devrait envisager pour ceux qui commettent ces délits la possibilité de travaux communautaires en soutien aux vétérans, en particulier si ce sont de jeunes contrevenants.

Nous croyons que les jeunes qui commettent de tels gestes pourraient mieux comprendre la portée de leurs actes s'ils étaient tenus de travailler auprès d'anciens combattants de leur communauté. Ils seraient alors en mesure d'apprécier davantage les sacrifices consentis par les vétérans et ceux qui sont morts. Cette option pourrait avoir une incidence durable et favorable sur ceux et celles qui commettent de tels gestes. Une amende ou une peine d'emprisonnement n'aurait pas nécessairement la même incidence et pourrait dans quelques situations s'avérer indûment sévère.

La jeunesse canadienne est importante pour la Légion, et nous continuons à miser sur l'éducation des jeunes et à leur rappeler la raison d'être du souvenir. C'est primordial et nous mettons tout en œuvre pour sensibiliser davantage tous les Canadiens et les générations qui suivront. La Légion a toujours considéré ses programmes d'éducation et de sports à l'intention des jeunes comme faisant partie intégrante de sa mission.

Depuis plus de 50 ans, la Légion réalise un important programme du souvenir destiné aux jeunes — concours littéraires, de poésie et d'affiches. On demande à des étudiants, de la maternelle jusqu'à la douzième année, de nous démontrer ce que le souvenir signifie pour eux, par l'entremise de leurs productions littéraires et artistiques. C'est là un programme qui s'est avéré un très grand succès avec une participation annuelle d'au-delà de 100 000 étudiants, et qui répond à un aspect extrêmement important de l'énoncé de mission de la Légion — promouvoir le souvenir — tout en veillant à ce que notre jeunesse comprenne bien les sacrifices qui ont été consentis à la défense de nos libertés.

Les gagnants les plus âgés à notre concours sont invités à participer à la cérémonie nationale du jour du Souvenir en y déposant une couronne au nom de la jeunesse du Canada. La participation des ligues de cadets dans nos programmes jeunesse est également fort précieuse dans notre travail visant à perpétuer et à célébrer le souvenir.

Le but du projet de loi C-217 est louable en soi, mais il devrait être modifié pour offrir la possibilité de formes alternatives de punition et de responsabilisation pour ces délits. Notre jeunesse constitue notre avenir. Il importe que les jeunes puissent comprendre non seulement la gravité de leurs gestes, mais aussi les sacrifices consentis par nos vétérans. D'autres options, telles que le travail communautaire auprès de vétérans, permettraient cette compréhension.

J'aimerais en terminant vous remercier à nouveau pour l'occasion qui nous a été offerte de s'adresser à ce comité. Nous répondrons volontiers à vos questions.

Nous nous souviendrons d'eux.

Le vice-président : Merci, monsieur Moore. Si j'ai bien compris, vous nous avez présenté l'exposé de la Légion royale canadienne.

Nous allons maintenant entendre une présentation au nom de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth. Monsieur Kettle.

Brigadier-général (à la retraite) David Kettle, secrétaire général, Agence canadienne, Commission des sépultures de guerre du Commonwealth : Honorables sénateurs, mesdames et messieurs, je vais m'en tenir à mes notes aujourd'hui, puisqu'en tant qu'ancien ministre presbytérien à la retraite, il me faut en général une demi-heure pour m'éclaircir la voix.

Je m'appelle David Kettle et je suis secrétaire général de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth, Agence canadienne, dont les bureaux se trouvent ici, à Ottawa.

La commission a été établie par la Charte royale le 21 mai 1917, sous le nom de Commission de l'Empire pour les tombes de guerre. Elle a été renommée la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth en 1960.

La commission est une organisation internationale financée par les six gouvernements qui en sont membres : l'Australie, le Canada, l'Inde, la Nouvelle-Zélande, l'Afrique du Sud et le Royaume-Uni. Terre-Neuve en faisait également partie jusqu'à la signature de la Confédération en 1949.

Notre mandat principal consiste à commémorer les personnes décédées en service pendant la Première et la Seconde Guerre mondiales. Nous nous occupons des tombes et des monuments commémoratifs de presque 1,7 million d'hommes et de femmes du Commonwealth morts en service dans plus de 150 pays du monde.

La commission s'acquitte de son mandat international depuis ses bureaux centraux situés à Maidenhead, au Royaume-Uni, et son réseau de huit bureaux et agences régionaux. Ses coûts sont assumés par les gouvernements membres de la commission, proportionnellement au nombre de tombes de guerre qu'ils possèdent, selon une formule de financement qui, soit dit en passant, nous a été proposée par le premier ministre canadien Sir Robert Borden, une formule qui demeure inchangée à ce jour.

Le Royaume-Uni nous fournit la plus grande partie de notre budget; il nous finance à hauteur d'environ 78 p. 100; le Canada vient au second rang, avec 10 p. 100. En tout, la commission gère un budget de 120 millions de dollars canadiens, et la contribution du Canada pour 2014-2015 sera de 11 millions de dollars canadiens.

L'Agence canadienne de la commission a été établie en avril 1921 par l'ancienne Commission de l'Empire pour les tombes de guerre, afin de rappeler la mémoire des hommes et des femmes morts pendant les années de guerre désignées, qui ont été inhumés en Amérique du Nord ou en Sibérie.

Les morts de guerre en Amérique ne sont pas morts sur les champs de bataille. Ils ont péri des suites d'accidents d'entraînement, de maladies comme la grippe espagnole ou encore de blessures subies sur les champs de bataille, mais seulement après leur retour au pays, puisqu'il ne faut pas oublier qu'ils doivent être morts pendant les années de guerre désignées. La particularité, bien sûr, c'est que les morts de guerre n'ont pas eu l'occasion de devenir des anciens combattants; les anciens combattants ont survécu à la guerre.

Aujourd'hui, l'Agence canadienne a la responsabilité de s'acquitter de ses fonctions découlant de la charte dans les Amériques, y compris dans les Caraïbes. Le territoire qu'elle couvre équivaut à la taille de l'Asie, environ. Elle s'occupe de 20 400 sépultures de guerre réparties entre 3 400 cimetières, ainsi que de 10 monuments commémoratifs.

Au Canada, nous sommes responsables des sépultures de guerre de plus de 14 000 personnes dans presque 3 000 cimetières, de même que de monuments commémoratifs rappelant la mémoire de plus de 4 000 personnes n'ayant pas de tombe connue ou dont la tombe n'a pu être préservée pour une raison ou une autre.

L'Agence canadienne a pour objectifs d'évaluer l'état structurel des pierres tombales et des monuments commémoratifs et de veiller à leur bon entretien par le recours à des entrepreneurs privés. L'agence s'efforce également d'améliorer les lots de sépulture de guerre là où les conditions le permettent, comme dans les cimetières de la commission à l'étranger. Le cimetière de Brookside, à Winnipeg, en est un exemple.

L'Agence canadienne accepte également du travail contractuel dépassant la portée des tâches prévues dans sa charte pour le compte d'Anciens Combattants Canada. Elle s'occupe ainsi de quelque 250 000 tombes d'anciens combattants. Nous participons à un programme visant à dresser l'inventaire de toutes les pierres tombales des anciens combattants enterrés au Canada et à les entretenir aux frais du Canada.

La commission est une organisation internationale qui doit faire attention à ce que son travail ne soit pas perçu comme une ingérence dans les affaires nationales ou les intérêts nationaux de ses six États membres. Autrement dit, nous faisons confiance au processus démocratique du Commonwealth.

Mon rôle aujourd'hui est de vous présenter les faits sur les sépultures de guerre et les moments commémoratifs du Commonwealth et dans une certaine mesure, sur les sépultures des anciens combattants, sans prendre position sur les mérites de la loi nationale. Je voudrais néanmoins souligner les difficultés auxquelles la commission est confrontée partout dans le monde pour ce qui est du vandalisme. Monsieur le président, j'ai même quelques photos que j'aimerais faire circuler, si vous êtes d'accord.

Ainsi, les attaques sur nos sites sont courantes, bien qu'il s'agisse en majorité d'incidents sporadiques et peu fréquents. Lorsque les dommages commis sur nos sites en zones de guerre ou dans des endroits où la sécurité est instable sont excessifs, nous travaillons avec le pays hôte pour trouver des solutions.

J'ai en main mon document d'information hebdomadaire sur la sécurité, dans lequel je vois dans quel pays le vandalisme pose problème, et je peux vous dire que l'Amérique du Nord et l'Amérique du Sud ne figurent jamais sur cette liste. En fait, vous voyez ici tout mon dossier sur le vandalisme. Comme vous pouvez le constater, il ne se compare en rien à l'annuaire de Toronto.

Toute position législative destinée à protéger les tombes et les monuments commémoratifs, dont ceux qui sont sous notre responsabilité, est la bienvenue. La commission ne réclamerait pas activement la mise en place de telles mesures. Cependant, il arrive que des tribunaux ordonnent à des contrevenants de verser une indemnité à la commission pour les coûts de nettoyage ou de réparation des dommages causés. C'est arrivé au Royaume-Uni, en France et ailleurs. Je tiens toutefois à souligner clairement que nous ne sommes pas là pour influencer les tribunaux dans leurs décisions nationales. Lorsque les tribunaux rendent des décisions en notre faveur, nous sommes heureux. Dans le cas contraire, nous persévérons et poursuivrons notre travail de façon imperturbable, dans la dignité.

Cela vient clore mon allocution, qui vous sera sûrement utile. Au nom de la commission, nous sommes heureux d'avoir été invités à contribuer à cette discussion devant cette auguste assemblée.

Le vice-président : Merci, monsieur Kettle.

Nous allons passer immédiatement aux questions, à commencer par celles du président permanent du comité, le sénateur Runciman.

Le sénateur Runciman : Je ne suis pas si sûr d'en être le président permanent, monsieur le président, mais je vous remercie de votre appui.

Messieurs, je vous remercie d'être avec nous.

Je dois dire que je suis un peu surpris du point de vue de la Légion à ce sujet. J'ai ici la copie d'une lettre envoyée à Jack Harris, député, par votre prédécesseure, je suppose, Patricia Varga. Au troisième paragraphe, elle écrit : « Nos membres sont très favorables à la reconnaissance de la gravité... », puis elle exprime quelques réserves sur les peines qu'il conviendrait d'imposer.

Je tiens à souligner que je suis un membre régulier de la Légion depuis une trentaine d'années. Comment la Légion peut-elle tirer pareille conclusion? Vous dites « nos membres », mais je ne me rappelle pas avoir eu à donner mon opinion à ce sujet. Je me rappelle de conversations que j'ai eues avec différents membres de ma propre direction, la Légion 96, et ils appuient vivement l'objectif visé par M. Tilson avec ce projet de loi.

Je serais curieux de savoir comment procède la Légion pour prendre ainsi une position au nom de tous ses membres.

M. Moore : Nous avons discuté de la question avec nos présidents nationaux. Ils appuient ma position sur cette question.

Lorsqu'un mineur de 14 ou 15 ans endommage un cénotaphe ou une pierre tombale parce qu'il se trouvait avec un groupe de jeunes qui ne savaient pas vraiment ce qu'ils faisaient puisqu'ils ne comprenaient pas les conséquences de leurs actes à long terme, nous croyons qu'il faudrait éduquer ces jeunes plutôt que de les envoyer dans un centre jeunesse ou d'appliquer la décision du juge, quelle qu'elle soit, puis qu'ils soient pris avec un casier judiciaire pour avoir commis des gestes irréfléchis et stupides. Dans la plupart des cas, l'expérience des dernières années nous montre que les juges d'un peu partout au pays se contentent de leur taper sur les doigts.

Cependant, lorsqu'un adulte de plus de 19 ans fait exactement la même chose et utilise l'alcool comme excuse, je ne l'accepte pas. Je pense qu'en tant qu'adulte, la personne doit avoir assez de jugement pour savoir respecter un cénotaphe ou un monument commémoratif. Si ce n'est pas le cas, qu'elle en subisse les conséquences juridiques. Toutefois, lorsque des jeunes sont en cause, je pense qu'il y aurait lieu de les éduquer de manière plus positive.

Le sénateur Runciman : Au nom de la Légion, vous ne voyez pas de problèmes aux conséquences de cette loi sur les adultes?

M. Moore : Pas du tout. Je veux simplement prévoir une autre option pour nos jeunes.

Le sénateur Runciman : D'après ce que je comprends — et nous allons vérifier —, ce projet de loi ne s'applique pas aux jeunes. C'est la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents qui s'applique dans leur cas. Je pense que cela répond aux réserves exprimées par la Légion ici aujourd'hui.

Il y a toutes sortes de possibilités de travaux communautaires. Je suis certain que vous êtes au courant du fait qu'un juge peut imposer ce genre de services après l'amende, par exemple.

L'article 717 du Code criminel prévoit d'autres mesures que la Couronne peut appliquer. Tout n'est pas tranché au couteau, même pour les adultes. Les juges peuvent évaluer la gravité de la situation, les circonstances en l'espèce, et il y a des solutions de rechange. Je voulais simplement vous en assurer.

Bien sûr, lorsque nous parlons de peines minimales obligatoires, nous sommes dans un contexte de récidive. Je doute fort qu'il y ait beaucoup de membres des directions que je connais, ou dans la société en général, qui auraient beaucoup de sympathie pour la personne qui commet une seconde infraction de profanation d'un monument commémoratif rappelant la mémoire de gens qui ont sacrifié leur vie pour le pays dans lequel nous vivons aujourd'hui. Vous non plus. N'êtes-vous pas d'accord?

M. Moore : Je suis d'accord avec vous.

Le sénateur Joyal : J'aimerais commencer par vous souhaiter la bienvenue et vous remercier de votre contribution.

Ma première question d'adresse à vous, monsieur Moore. Dans le cadre de vos activités, jusqu'à quel point mettez-vous l'accent sur votre programme d'éducation de la jeunesse? D'après ce que je comprends, le phénomène du vandalisme des monuments commémoratifs de guerre implique beaucoup de jeunes qui, bien sûr, ne sont pas conscients de leur importance, du sacrifice qu'ils rappellent, ni même de l'importance de la contribution canadienne à la guerre.

Quelle importance accordez-vous à l'éducation des jeunes et comment vous associez-vous au système d'éducation pour accroître la sensibilisation à l'importance de préserver les monuments commémoratifs de la guerre et des sacrifices consentis.

M. Moore : Nous utilisons les programmes de la Légion royale canadienne pour rejoindre les jeunes dans les écoles. Nous demandons à nos anciens combattants d'aller s'exprimer dans les écoles pendant la période du souvenir et à d'autres moments de l'année. Nous réussissons ainsi à transmettre notre message aux jeunes qui sont là, prêts à entendre les raisons pour lesquelles les moments commémoratifs sont si importants et pourquoi il est si important de les respecter.

Le sénateur Joyal : Selon les statistiques que nous avons vues hier, il semble qu'il y ait des périodes de l'année où les gens sont plus enclins à commettre des méfaits. Comment cela se fait-il? Pouvez-vous nous l'expliquer?

M. Moore : Pourquoi ils agissent ainsi?

Le sénateur Joyal : Oui. Qu'est-ce qui provoque ce genre de réaction chez les gens à certaines périodes de l'année? La semaine du jour du Souvenir semble être la période de l'année où les gens savent qu'ils doivent faire quelque chose, le vandalisme que nous voulons réprimer en général dans la population.

Steven Clark, directeur des cérémonies nationales, Légion royale canadienne : Je ne peux pas vous dire ce qui se passe dans la tête de la personne qui commet l'infraction, mais les gens sont toujours plus sensibles aux monuments commémoratifs et à l'importance du souvenir pendant la période qui entoure le jour du Souvenir. Si la personne qui commet l'infraction souhaite s'attirer de la publicité, c'est le moment idéal.

Ce genre de chose ne devrait jamais arriver, mais dans la réalité, les incidents surviennent surtout autour de la période du souvenir, ce qui pourrait les expliquer. Ces gestes attirent l'attention des médias, de différents groupes un peu partout au pays.

Bgén Kettle : Je note aussi que la semaine du Souvenir est proche de l'Halloween, une période où les gens semblent plus susceptibles de se laisser emporter, parfois jusqu'au vandalisme.

Le sénateur Joyal : Monsieur Kettle, je vous remercie de ces chiffres. Ils nous manquaient hier. Vous avez la responsabilité de presque 3 000 cimetières au Canada, si j'ai bien compris?

Bgén Kettle : Il y a des victimes de la guerre dans ces cimetières, mais nous ne sommes pas responsables des cimetières eux-mêmes. Dans les Amériques, il n'y a qu'un cimetière de guerre du Commonwealth dont nous nous occupons. Les autres cimetières sont publics ou privés, et nous nous occupons des sépultures sur place.

Le sénateur Joyal : Je vois que vous êtes également au courant de vos activités en France et en Grande-Bretagne. Ce phénomène est-il plus prononcé au Canada qu'en France et en Grande-Bretagne, où il y a également des sépultures de guerre?

Bgén Kettle : Non. Il y a généralement plus de vandalisme dans les États instables, où l'insécurité est telle que les gens peuvent cibler les sépultures de guerre du Commonwealth, qu'ils voient comme un signe d'impérialisme, quelque chose du genre. Par conséquent, ils vandalisent nos tombes. Ce sont vraiment des événements sporadiques en France, en Europe continentale et au Royaume-Uni, mais ils sont beaucoup plus fréquents en Égypte, en Lybie, en Syrie, en Israël, à Gaza, au Liban, en Algérie, au Yémen, au Soudan et en Tunisie.

Le sénateur Joyal : On peut comprendre qu'il y a là-bas une instabilité politique et démographique et des conflits régionaux qui montent les gens les uns contre les autres.

Est-il vrai qu'en France et au Royaume-Uni, il n'y a pas de loi ciblée qui porte sur l'enjeu que nous étudions aujourd'hui?

Bgén Kettle : Je ne suis pas un expert du domaine. Les tribunaux interviennent, mais il n'y a pas nécessairement de loi particulière.

Le sénateur Joyal : Même s'il y a dans ces deux pays un plus grand nombre de cimetières et de monuments commémoratifs de la guerre qu'au Canada, pour des raisons évidentes?

Bgén Kettle : Exact. Je vous répète toutefois que je ne suis pas un expert en la matière.

Le sénateur Joyal : Vous signalez une problématique, comme vous l'avez dit.

Bgén Kettle : Je suis un presbytérien; j'aime attirer l'attention sur les choses. Je peux vous envoyer ce petit bout de papier que j'agite. C'est en fait une liste d'épicerie.

Le sénateur Joyal : Si vous pouviez nous faire parvenir des chiffres pour nous aider à saisir l'ampleur du phénomène, comme le nombre d'occurrences des incidents, cela nous serait utile.

Bgén Kettle : Je peux sûrement vérifier en communiquant avec nos bureaux centraux, mais je n'ai pas de chiffre à vous donner pour le moment.

Le sénateur Joyal : Pourriez-vous nous les faire parvenir?

Bgén Kettle : Je vais me faire un devoir de vérifier l'information que je peux trouver à nos bureaux centraux, monsieur.

Le vice-président : Avant de donner la parole à notre prochain témoin, j'aimerais revenir à une chose que M. Moore a dite au début de son exposé. Il a donné l'exemple d'un jeune de 15 ans. Lorsqu'il a dit que les peines pourraient être indûment punitives dans certaines circonstances, je crois qu'il faisait allusion au fait bien connu que le paragraphe 64(1) de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents permet au procureur général de réclamer une peine adulte pour un jeune. Nous allons creuser la question avec les avocats dans quelques minutes, mais il convient de nous demander ce qui va arriver si un jeune de 15 ans ne peut pas payer une amende de 1 000 $. Dans ce contexte, je crois que votre affirmation est juste.

Nous allons maintenant inviter le représentant de la police à ce comité à prendre la parole : le célèbre sénateur Dagenais.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je comprends que les monuments commémoratifs représentent un symbole particulier; vous l'avez très bien expliqué. Je pense que les personnes qui posent des gestes de profanation envers ces monuments savent très bien et connaissent bien le but de leur geste. Ils sont capables de différencier un monument commémoratif d'un monument ordinaire. Je considère que c'est un manque de respect. On parle du projet de loi, de réhabilitation, d'éducation, d'adolescents qui ne comprennent pas; si à 17 ans vous avez besoin d'être éduqué, c'est parce que vous avez un certain retard. Il me semble que vous devriez comprendre la différence entre le bien et le mal.

Aux États-Unis, il existe une loi fédérale qui punit ce genre de geste. En Europe, il n'y en a pas.

Ceci étant dit, avant d'appliquer une loi et de sanctionner — je crois que le projet de loi n'est pas si musclé que cela, soit dit en passant, c'est peut-être mon vieux passé de policier qui m'influence, j'ai arrêté beaucoup de jeunes qui ne comprenaient pas, des incompris —, ne pourrait-on pas penser à prendre des dispositions pour protéger ces monuments en avisant la police locale, par exemple, en demandant une surveillance accrue. Je sais que des services sont offerts à la Légion, mais a-t-on pensé à la prévention dans ce dossier?

[Traduction]

Bgén Kettle : Comme je l'ai déjà mentionné, nous sommes une organisation internationale et nous faisons confiance au processus démocratique pour que les autorités prennent des mesures adéquates compte tenu de la situation.

M. Clark : Si je peux ajouter autre chose, nous prenons déjà des mesures. Il est arrivé un incident malheureux sur les lieux de notre bureau national il y a quelques années, où un monument commémoratif des personnes tombées au combat a été vandalisé, malheureusement. L'endroit était mal éclairé. Nous avons donc pris des mesures, après l'incident, pour veiller à ce que ne soit plus un facteur. Il est dorénavant bien éclairé. Ce n'est plus un endroit caché, donc si quelqu'un veut vandaliser ce monument intentionnellement, il sera très visible pour les passants.

Nous avons reconnu qu'il s'agissait d'un problème, et c'était une chose que nous pouvions faire pour éviter que ce genre d'incident se reproduise à l'avenir. C'est une mesure que nous avons prise.

[Français]

Le sénateur Rivest : Tout d'abord, monsieur Moore, je tiens à vous dire que je partage votre point de vue en ce qui concerne les sentences communautaires, entre autres, pour les jeunes qui agissent ainsi pour des raisons liées à leur âge plutôt que par pure malice.

Il y a deux ou trois ans, en compagnie d'une délégation parlementaire, j'ai visité un cimetière en Normandie. Comme dans beaucoup de pays occidentaux — incluant le Canada, je suppose, vous me direz ce que vous en pensez —, il y a émergence des groupes d'extrême droite fascistes et nazistes qui s'en prennent aux monuments commémoratifs des anciens combattants pour des raisons que l'on connaît. D'ailleurs, la veille de ma visite en Normandie, les monuments commémoratifs de tous les soldats qui portaient des noms à consonance juive avaient été vandalisés.

La loi que l'on s'apprête à adopter, et dont le principe semble rallier tout le monde, ne devrait-elle pas inclure les crimes de nature haineuse — sanctionnés par ailleurs par le Code criminel — lorsqu'il s'agit vraiment et manifestement de groupes d'extrême droite nazistes ou fascistes?

[Traduction]

M. Clark : Je suis plutôt d'accord que s'il s'agit réellement de crimes attribuables à des tensions entre deux groupes ethniques, d'autres sanctions ou projets de loi pourraient être envisagés pour combattre ce genre d'infraction. L'intention n'était pas simplement d'endommager de plein gré un monument, mais plutôt d'endommager de plein gré un monument qui commémore un certain groupe de la société. Je pense que cela va au-delà de ce qui est prévu ici.

Le sénateur McIntyre : Messieurs, je vous remercie de vos exposés. Comme vous le savez, nous avons ce qui est prévu dans le projet de loi C-217 et d'autres formes de sanctions.

Monsieur Moore, monsieur Clark, j'ai cru comprendre que vous appuyez l'idée de prévoir des sanctions autres que celles énoncées dans le projet de loi C-217. En général, est-ce que les membres des autres filiales de la Légion sont du même avis que vous?

M. Moore : La majorité des filiales appuie notre position à l'égard des autres formes de sanctions. Je vais vous donner un bon exemple provenant de ma filiale locale.

Il y a environ 10 ans, notre cénotaphe a sérieusement été endommagé. Il ne restait plus rien des deux bras et de l'arme du soldat qui se trouve en haut du monument. Nous avons offert une récompense de 10 000 $ pour trouver les coupables. Il aura fallu attendre environ trois ans et demi, quatre ans. Au moment du crime, les trois jeunes impliqués avaient 10 et 12 ans. Comme le brigadier-général l'a mentionné tout à l'heure, le crime a été commis à l'Halloween. Ils ont finalement reconnu eux-mêmes leur culpabilité.

Notre ancien président de filiale s'est adressé aux tribunaux avec les membres des familles concernées, et il a demandé au juge de leur permettre de contribuer financièrement à la réparation du cénotaphe et d'autoriser les trois jeunes à participer à certaines activités de la filiale prévues pendant l'année. Le juge a accepté.

Bien entendu, le reste des étudiants de l'école concernée et de l'école secondaire ont compris le message : il y a un prix à payer pour ce genre de méfaits, et les contrevenants pourraient avoir un casier judiciaire et subir beaucoup d'autres conséquences. Ce qu'il faut retenir, c'est que nous avons pu aider les familles et les trois jeunes en nous assurant de les sensibiliser.

Le sénateur McIntyre : Brigadier-général Kettle, je sais que vous n'aviez pas l'intention de partager votre point de vue sur le projet de loi C-217, que nous étudions présentement, mais avez-vous eu l'occasion de l'examiner ou de le lire?

Bgén Kettle : Oui.

Le sénateur McIntyre : Et vous ne voulez pas formuler de commentaires à ce sujet?

Bgén Kettle : Pas par rapport à votre question.

Ce que je ne veux pas que le comité relègue aux oubliettes, c'est qu'en Amérique, les préjugés jouent un rôle considérable dans la profanation des sépultures de guerre. Les contrevenants sont surtout des enfants malavisés, des personnes intoxiquées et ainsi de suite.

Je vous ai montré certaines photos. Ce genre d'images est beaucoup mieux pour faire les manchettes que la pierre tombale renversée d'un vétéran ou une sépulture de guerre. Je pense qu'il est important de mettre les choses en perspective et de ne pas oublier le contexte.

Le sénateur McIntyre : Seriez-vous favorable à des sanctions autres que celles prévues dans le projet de loi C-217, qui propose une amende minimale obligatoire pour une première infraction et une peine de prison obligatoire pour les récidivistes?

Bgén Kettle : Je vous donnerais mon opinion si vous me posiez la question dans un autre contexte, mais pas ici.

Le sénateur Plett : Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.

Monsieur Moore, je suis heureux de vous revoir. Nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises lorsque je siégeais au Sous-comité des anciens combattants, et je suis ravi que vous soyez parmi nous.

À ce stade-ci, je crois que vous avez également répondu à mes questions. Avec tout le respect que je dois au président, car, contrairement à lui, je ne suis pas avocat, j'aimerais faire une observation à propos d'un point qu'il a soulevé.

Je trouve qu'il est un peu tiré par les cheveux de penser qu'un jeune de 15 ans accusé de méfait puisse être jugé comme un adulte. Je pense que ce pourrait être possible s'il s'agissait d'un meurtre ou d'un crime un peu plus grave. Je doute que même lui puisse trouver beaucoup de cas où un jeune de 14 ou 15 ans s'est retrouvé devant un tribunal pour adultes après avoir commis ce genre de crime. Nous pourrions éventuellement revenir là-dessus.

Je tiens seulement à m'assurer, monsieur Moore — et je pense que vous l'avez mentionné — que le seul problème concerne les cas où des enfants ou des jeunes sont impliqués. J'irai plus loin en disant que j'ai vu les photos. Certaines sont extrêmement choquantes et montrent des croix gammées peintes sur des monuments. Je suppose que vous convenez qu'une personne ivre qui urine sur quelque chose le fait peut-être sous l'impulsion du moment. Même le fait de casser un objet pourrait tomber dans cette catégorie. Par contre, pulvériser de la peinture sur un monument est un acte passablement délibéré. Il faut se rendre dans une quincaillerie, acheter de la peinture en aérosol et se rendre sur place pour commettre le crime. Cela demande une certaine réflexion et un peu plus d'efforts.

Je sais que monsieur Kettle hésite à donner son opinion, mais je l'encourage à nous dire quel genre de peine serait raisonnable selon lui dans un cas comme celui-ci. Monsieur Moore, je crois que vous avez affirmé, et vous voudrez peut-être le répéter à mon intention, que, dans un cas comme celui-ci, si l'acte était commis par un délinquant à jeun de 20 ou 25 ans, vous seriez favorable à une peine minimale obligatoire, surtout pour les récidivistes.

M. Moore : Je ne m'y opposerais certainement pas. J'ai également été très choqué par ces photos. Lorsqu'un crime aussi grave se produit, la personne impliquée devrait subir toutes les conséquences que peut prévoir la loi. Je suis tout à fait d'accord avec vous à cet égard.

Par contre, si un jeune commet une erreur en renversant un cénotaphe ou une pierre tombale ou en faisant quelque chose d'aussi stupide que d'uriner sur un cénotaphe, une des meilleures choses qu'un juge pourrait faire selon moi est de demander au jeune en question de se tenir debout devant le cénotaphe tous les vendredis avec un grand panneau sur lequel est écrit : « Je suis celui qui a uriné sur le cénotaphe. » L'ensemble des citoyens pourrait alors le critiquer pour ce qu'il a fait. On pourrait ainsi s'assurer qu'il a vraiment appris sa leçon. Mais je ne suis pas juge.

Le sénateur Plett : Je vous remercie de vos commentaires. Hier, le sénateur Runciman a demandé à une témoin si elle pensait que l'humiliation était une bonne sanction. Vous semblez croire que c'en est une, tout comme moi.

Monsieur Kettle, aimeriez-vous donner votre point de vue?

Bgén Kettle : Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on ne peut pas punir la stupidité. Par contre, on peut punir l'immaturité et les raisonnements déviants. Pour quelle raison certains individus commettent-ils ces actes? Ils veulent de l'attention. Plus on leur en donne, plus ils sont heureux. Les poursuites en justice leur donnent une autre tribune. On ne pourra pas prévenir ces actes au moyen de lois ou de sanctions. C'est mon opinion.

Le sénateur Plett : Vous ne voulez sûrement pas suggérer, monsieur Kettle, que quelqu'un peut agir ainsi en se disant : « Je veux comparaître devant un juge et payer une amende de 1 000 $ ou passer 30 jours en prison ». Je conviens qu'ils veulent de l'attention, mais, bon sang, vous ne voulez sûrement pas laisser entendre qu'ils en veulent au point d'être prêts à aller en prison.

Bgén Kettle : Pendant qu'ils commettent le crime, peut-être.

La sénatrice Batters : Monsieur Kettle, à mon avis, ils ne veulent probablement pas d'attention dans une tribune publique, mais plutôt de manière anonyme, lorsque personne ne sait qui est le coupable, mais qu'ils ont communiqué leur ridicule message raciste. Au moment où ils commettent le crime, je ne pense pas qu'ils aient l'intention de se retrouver devant les tribunaux et de subir les conséquences de leur acte aux yeux de tous.

J'aimerais tous vous remercier d'être ici. Je vous suis très reconnaissante du travail que vous faites au nom des vétérans du Canada. Si ma mémoire est bonne, j'étais en cinquième année lorsque j'ai gagné un de vos concours locaux de poésie dans ma ville de Regina. Je ne me suis pas rendue au concours national et je n'ai pas eu l'honneur de déposer une couronne de fleurs ou rien dans le genre, mais votre travail est bénéfique pour les jeunes canadiens.

Je me demandais si vous étiez le moindrement préoccupés par la sévérité de l'amende prévue dans ce cas-ci. Certaines provinces au Canada ont des programmes d'option-amende pour permettre aux contrevenants de faire des travaux communautaires s'ils ne peuvent pas payer une somme importante. Le saviez-vous?

M. Moore : Je ne connais pas les lois des diverses provinces ni la façon dont elles traitent la question. Tant mieux si elles ont ce genre de programmes. Je suis persuadé que le projet de loi C-217 attirera davantage d'attention là-dessus partout au pays.

La sénatrice Batters : Très bien, merci beaucoup. Je vous suis reconnaissante d'être venu témoigner aujourd'hui.

Le sénateur Day : Messieurs, merci d'être ici. Je suis une sorte d'intrus au sein du comité, mais j'ai eu l'occasion de lire le projet de loi et d'entendre le débat en deuxième lecture.

J'aimerais d'abord obtenir une précision, monsieur Kettle. Vous avez parlé de l'Agence canadienne et de ceux qui pourraient avoir succombé à des blessures de guerre non pas sur le champ de bataille, mais pendant la période concernée. Je suppose maintenant que, pour l'ensemble des Amériques, l'Agence canadienne s'occupe de ce groupe restreint et des autres militaires qui pourraient être morts au combat. Il n'y a évidemment pas de champ de bataille en Amérique que vous ne gardez pas à l'œil.

Bgén Kettle : Nous nous occupons des sépultures de ceux qui sont morts au combat en Amérique du Nord et en Amérique du Sud pendant la période visée de la Première et de la Seconde Guerres mondiales.

Notre agence entretient également des sépultures de vétérans ici au Canada, qui représentent environ 50 p. 100 de celles dont nous sommes responsables.

Le sénateur Day : Est-ce que le financement pour les sépultures du Commonwealth — et vous avez indiqué que le gouvernement fédéral donne sa part de 10 p. 100 — est remis au Royaume-Uni avant d'être transféré à l'agence?

Bgén Kettle : Oui.

Le sénateur Day : Recevez-vous également un financement direct du ministère des Anciens Combattants pour le travail que vous faites à cet égard?

Bgén Kettle : La réponse aux deux questions est « oui ». Le financement est remis au Royaume-Uni, et je reçois une partie de l'argent pour m'occuper des sépultures de guerre du Commonwealth en Amérique du Nord et en Amérique du Sud. Le reste sert à entretenir les sépultures du Commonwealth canadiennes ailleurs dans le monde.

Anciens Combattants Canada me donne un certain montant d'argent pour entretenir des sépultures de vétérans ici au Canada.

Le sénateur Day : Vous avez mis à notre disposition le document de votre séance d'information hebdomadaire sur la sécurité. Savez-vous si d'autres pays du Commonwealth ont essayé de prendre des mesures législatives similaires à celles prévues dans le projet de loi C-217?

Bgén Kettle : Je ne sais pas, mais lorsque je vais réunir l'information qu'on m'a demandée, je vais en profiter pour poser la question à l'administration centrale et communiquer la réponse à votre comité.

Le sénateur Day : Merci.

Compte tenu du dossier que vous avez retenu sur le nombre très peu élevé de cas de vandalisme ainsi que votre hésitation à donner votre opinion à ce sujet, j'en déduis que vous pensez que le projet de loi n'est pas nécessaire.

Bgén Kettle : Non, ce n'est pas du tout ce que j'en déduirais.

Le sénateur Day : Eh bien, vous avez maintenant l'occasion de dire ce que vous en pensez.

Bgén Kettle : Vous devriez en déduire que je représente un organisme international et que j'ai donc peu de marge de manœuvre pour exprimer mes opinions. Vous ne voulez pas savoir ce que pense Dave Kettle; il vous a déjà donné un point de vue et vous ne l'avez pas partagé. Dans la mesure où la Commission est concernée, nous ne nous mêlons pas de questions politiques.

Le sénateur Day : Permettez-moi de m'adresser à M. Moore. Je suis heureux de vous voir, de même que M. Clark.

Le sénateur Plett et moi avons tous les deux siégé au Comité des anciens combattants, et nous sommes au courant de l'excellent travail accompli par la Légion royale canadienne d'un bout à l'autre du pays. Ce que vous avez accompli vous donne certainement le droit de parler au nom des jeunes du Canada.

À l'âge de 18 ans, j'ai eu la chance — et M. Clark est au courant — de participer à l'Université du Nouveau-Brunswick à un camp de leadership en athlétisme, qui était parrainé par la Légion royale canadienne. Vous avez également fait la promotion du curling. Ces activités s'adressent aux jeunes de 18 à 23 ans. Je crois donc que vos commentaires sont pertinents.

Avez-vous pensé à la façon dont ces autres formes de sanctions seraient appliquées? Dans le cas d'une personne qui devrait tenter de restaurer partiellement un cénotaphe, la Légion royale canadienne aurait-elle les ressources nécessaires pour s'assurer que le travail est vraiment accompli, ou laisseriez-vous le solliciteur général ou le ministère de la Justice s'en occuper?

M. Moore : Cette décision reviendrait au juge saisi du dossier. Par exemple, s'il déclare que le jeune doit remettre en état le Monument commémoratif de guerre du Canada, le travail devra être supervisé par un ou deux vétérans ou membres de la Légion royale canadienne, ainsi que par les responsables du monument, pour s'assurer que le jeune s'acquitte réellement de la tâche.

Nous avons des ressources partout au pays, et si un juge nous le demande, aucune filiale locale n'hésiterait à s'assurer que le jeune en question fait ce que le juge lui a ordonné de faire.

Le sénateur Day : Merci.

La sénatrice Frum : Monsieur Kettle, vous avez dit très clairement que vous ne voulez pas être entraîné dans un débat politique, et je suis désolée de notre insistance, mais j'aimerais tirer une chose au clair à propos de vos commentaires concernant les croix gammées peintes sur les sépultures. Je pense pouvoir en déduire que vous ne pensez pas que ce projet de loi aura un effet dissuasif étant donné que vous croyez que les gens déterminés à faire ce genre de choses continueront de les faire pour les mêmes raisons. Cela dit, les peines minimales obligatoires visent à avoir un effet dissuasif et elles permettent d'infliger des sanctions appropriées. Je suppose que vous ne pensez pas qu'elles auraient un effet dissuasif, mais ne pensez-vous pas...

Bgén Kettle : Seulement dans les cas extrêmes, oui.

La sénatrice Frum : Il y a un autre aspect, c'est de s'assurer qu'il y a une punition appropriée.

Bgén Kettle : Bien sûr.

La sénatrice Frum : Vous pensez donc qu'à cet égard, le projet de loi est approprié.

Bgén Kettle : On pourrait en discuter en prenant un café.

Le vice-président : Vous pouvez toujours essayer.

La sénatrice Frum : D'autres commentaires sur l'aspect dissuasif par rapport à la punition appropriée? Monsieur Moore ou monsieur Clark?

Vous n'étiez pas sûr, je crois, de l'aspect dissuasif des peines minimales obligatoires, à supposer qu'il y en ait un. Vous n'êtes pas obligé de commenter.

M. Clark : Je dirais que cela dépend beaucoup de la personne. Nous parlons beaucoup des jeunes, mais l'accent n'est pas uniquement placé sur eux.

Si un jeune — pour parler des jeunes en premier — endommage un monument commémoratif de guerre, ce sont ses parents qui paieront l'amende, et pas lui. Il n'apprendra rien de l'incident, sinon que quelqu'un d'autre s'en charge et il continuera.

Par contre, s'il reçoit une autre forme de punition, qui permet de l'éduquer et de le sensibiliser, cela aura plus de portée. Dans certains cas, une amende peut avoir un effet dissuasif, mais d'autres formes de punition pourraient avoir plus de portée.

La sénatrice Frum : On part ici de l'hypothèse, qui est peut-être tout à fait juste, que ce genre de crimes est commis par des jeunes.

Avez-vous des idées ou des informations précises à ce sujet? Dans les cas qui ont fait l'objet de poursuites, monsieur Kettle, s'agissait-il uniquement de jeunes? C'est l'idée qu'on s'en fait, mais je ne suis pas sûr que l'inscription de croix gammées soit un crime propre aux jeunes.

Bgén Kettle : Non, on peut faire cela à tout âge et pour toutes sortes de raisons, toutes aussi irrationnelles les unes que les autres.

M. Clark : Malheureusement, la bêtise n'a pas d'âge. Ces actes pourraient être commis par des gens qui ne sont pas concernés par la Loi sur les jeunes contrevenants. Malgré leur âge, ils peuvent encore faire des bêtises et doivent en prendre la responsabilité. Bien que nous ayons beaucoup parlé des jeunes, ce ne sont pas uniquement eux qui pourraient être concernés par le débat d'aujourd'hui.

Le sénateur Runciman : J'ai un bref commentaire à adresser au président. Quand il s'agit de questions d'importance nationale, la Légion pourrait penser avoir recours aux technologies modernes. Puisque tout le monde a une adresse de messagerie, les membres pourraient donner leur avis à la section locale avant qu'on ne soumette une recommandation au Commandement. De cette façon, chacun pourrait mettre son grain de sel, si je puis m'exprimer ainsi.

J'aimerais revenir sur le thème de l'éducation dont parlait le sénateur Joyal, surtout si l'on songe que les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale sont en train de disparaître rapidement. Est-ce que la Légion royale canadienne a jeté un coup d'œil sur le programme des divers territoires et provinces pour voir s'il est possible de les améliorer et de faire en sorte que les générations futures puissent connaître les sacrifices qui ont été faits pour eux et la signification de ces sacrifices pour nous tous?

Ces dernières années, j'ai vu pas mal d'enfants de ma communauté participer au jour de l'Armistice, mais je crois qu'il s'agissait là d'une initiative de l'enseignant ou peut-être de la commission scolaire. Je me demande si, dans le système scolaire des provinces, on se soucie vraiment d'inviter des légionnaires à parler à des jeunes du niveau élémentaire, et peut-être du secondaire. Je sais que cela arrive mais, à ce que je sache, cette initiative ne fait pas partie du programme, du moins au niveau national.

Avez-vous travaillé sur ce dossier? Sinon, envisagez-vous de le faire?

M. Moore : Nous avons examiné la question dans tout le pays. En Ontario par exemple, j'ai été président provincial de 2005 à 2007. De concert avec le président de l'éducation des jeunes, nous avons essayé de parler au ministre de l'Éducation d'alors, pour qu'il intègre dans les programmes scolaires l'histoire de la Première Guerre mondiale, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée. Il a répondu que cette décision était laissée aux commissions scolaires. En fait, il s'en lavait les mains.

On s'en est occupé dans tout le pays pendant des années. En fin de compte, les commissions scolaires établissent leur programme pour l'année suivante le 1er juin de l'année en cours, du moins en Ontario. Je ne suis pas sûr de ce qui se fait dans les autres provinces, mais ici, le programme pour 2015 aura été fixé en juin.

De toute façon, lorsque vous vous adressez aux commissions scolaires, on vous répond : « Non, c'est au directeur de chaque école de s'en occuper. » Chaque fois qu'on essaie de parler à un éducateur, on essuie une fin de non-recevoir, surtout en Ontario, mais je suppose aussi à l'île du Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse ou ailleurs.

Nous faisons de notre mieux avec ce que nous avons, et nous prêchons la bonne parole. La seule période de l'année où je sais que la plupart des écoles du pays invitent la Légion royale canadienne, c'est aux alentours du jour du Souvenir. C'est pendant cette période-là que les anciens combattants peuvent parler aux enfants, non seulement dans les écoles, mais aussi chez les Guides et les scouts. Je sais que dans ma communauté, d'autres groupes — par exemple et de façon générale les Lions — invitent les anciens combattants à prendre la parole pendant cette période-là.

Le sénateur Runciman : Je vais vous donner un petit conseil de politicien. Il va y avoir une élection en Ontario. Puisque vous avez des sections locales dans toute la province, vous devriez demander aux partis de parler de ce sujet dans leur plateforme électorale. C'est une approche comme une autre.

Bgén Kettle : N'oubliez pas qu'entre 2014 et 2018, nous allons célébrer le centième anniversaire de la Première Guerre mondiale et le 75e anniversaire de la Seconde. C'est l'occasion idéale de s'adresser aux jeunes par divers moyens.

Il y a longtemps, lorsque j'étais aumônier, la Légion emmenait de grands groupes de jeunes en Europe pour prendre part aux cérémonies de commémoration. Pour tous ces jeunes, c'était une merveilleuse épiphanie du fier héritage que nous avons au Canada pendant ces deux guerres mondiales. C'est par de telles initiatives que l'on peut changer les choses.

Lorsqu'on arrive à convaincre un jeune de l'importance de ces deux périodes dans l'histoire canadienne et des immenses sacrifices que nous avons faits en tant que Canadiens sur les champs de bataille d'Europe et d'ailleurs, on fait du même coup comprendre l'importance de ces tombes où sont enterrés les anciens combattants.

Le sénateur Joyal : Dans cette même veine, avez-vous planifié des activités de commémoration pour cette année, qui marque le centième anniversaire de la Première Guerre mondiale? C'est l'occasion d'attirer l'attention du public et d'ouvrir les esprits de la jeune génération sur ces sujets, surtout celui de la Première Guerre mondiale.

Je participe d'ailleurs à l'organisation d'un colloque conjoint entre des parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat français et des députés et des sénateurs du Parlement du Canada. Il se déroulera à l'Assemblée nationale et au palais du Sénat en France et aura pour thème les points de vue réciproques que nous avons de la Première Guerre mondiale, de l'armée et de ses aspects économiques et sociaux.

J'ai pensé que c'était le moment idéal pour publier un livre et le mettre en ligne, parce que ce sera diffusé sur Internet, et cetera. C'est une année spéciale.

Participez-vous à des initiatives qui visent à faire connaître aux Canadiens les sacrifices et la signification de cette guerre?

M. Moore : Oui. Nous sommes en voie d'élaborer un programme. Nous avons aussi demandé l'avis de 10 présidents provinciaux de partout au pays. Ils viendront ici en fin de semaine prochaine pour assister au Conseil exécutif national et nous consacrerons probablement deux ou trois heures à ce sujet précis.

Nous avons déjà conçu une épinglette qui sera présentée lors du Conseil exécutif national de la fin de semaine prochaine. De plus, des membres de notre personnel préparent un programme de relations public que les responsables des filiales pourront utiliser lorsqu'ils contacteront les médias, qu'il s'agisse de journaux, de stations de télévision ou de radio; donc, ils seront prêts. Nous demandons aussi à chacune des filiales du pays de nous présenter des suggestions. Plus tôt, le sénateur Runciman a mentionné que nous avons un service de courriels partout au pays. Malheureusement, le service de courriel n'est pas offert dans toutes les filiales de la Légion royale canadienne.

Nous avons 1 468 filiales, et seulement 730 sont dotées d'un service de courriel sur place. C'est une chose que nous essayons de régler depuis mon arrivée en poste en juin 2012. Dans le cas présent, l'important, c'est que la sensibilisation et la communication passent des filiales jusqu'à moi, car j'estime que les jeunes, nos filiales de l'ensemble du pays et nos anciens combattants sont en haut, et je suis en bas. C'est à moi qu'ils s'adressent.

M. Clark : Permettez-moi d'ajouter quelque chose aux propos du président Moore. La Légion reconnaîtra certainement le centenaire. Nous ne le célébrerons pas.

Le sénateur Joyal : Évidemment. Je n'ai pas parlé de célébration; j'ai parlé de commémoration.

Monsieur Kettle, la Commission des sépultures de guerre a-t-elle prévu une initiative spéciale, des activités spéciales, un accent particulier sur la restauration de monuments ou sur l'amélioration de l'entretien des monuments cette année?

Bgén Kettle : Au Canada, nous travaillons en collaboration avec Anciens Combattants Canada, et le gouvernement canadien a un programme de commémoration pour la période de 2014 à 2018. À l'étranger, la commission a une organisation énorme et beaucoup d'événements sont prévus pour cette même période. Les Canadiens et la Légion participeront à certains de ces événements.

À Ottawa, notre très petite organisation compte neuf personnes, qui sont toutes des mines de renseignements. Ces gens ne travaillent pas au sein de la commission dans le but d'avoir un gros salaire. Ils y travaillent parce qu'ils accordent de l'importance à la commémoration; ils y sont appelés. Notre calendrier d'allocutions est bien garni. Nous adorons prononcer des discours, informer le public au sujet de la commission et aussi sur la contribution du Canada au cours des deux guerres mondiales. Nous sommes toujours ouverts aux nouvelles invitations et notre seul souhait serait que nous soyons plus nombreux pour le faire.

Le vice-président : Messieurs Moore, Clark et Kettle, nous tenons à vous remercier de vos excellents exposés.

Nous passons au deuxième groupe d'experts. Permettez-moi de vous présenter M. Leo Russomanno, qui représente la Criminal Lawyers' Association, et M. Graeme Hamilton, qui représente le Conseil canadien des avocats de la défense.

M. Russomanno, nous commencerons par entendre votre déclaration préliminaire.

Leo Russomanno, représentant, Criminal Lawyers' Association : Très bien; je suis premier sur la liste.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. Je suis déjà venu témoigner plusieurs fois. Venir ici et discuter avec les parlementaires est toujours un plaisir. Le dialogue est un aspect très important du processus qui unit les avocats et les parlementaires. Je vous fais donc la même invitation qu'à chacune de mes visites au comité : si vous souhaitez un jour visiter le palais de justice d'Ottawa pour voir notre système de justice à l'œuvre, je vous accueillerai avec plaisir. C'est une invitation sérieuse; je ne le dis pas simplement par politesse. Je travaille tout près, au bout de la rue. Je serais heureux de vous fournir mes coordonnées.

Aujourd'hui, nous parlons manifestement d'une très grave infraction criminelle, un méfait précis lié aux monuments commémoratifs de guerre. Je suis d'accord avec tous ceux qui sont ici et je peux certainement parler au nom de tous les acteurs du système de justice pénale — qu'ils soient procureurs de la Couronne, juges ou avocats de la défense —, qui conviendraient que vandaliser ou profaner un monument commémoratif de guerre est un méfait particulièrement haineux qui n'est pas, comme on l'a indiqué hier, comparable à l'acte de vandaliser une boîte aux lettres, qui est une forme de méfait complètement différente.

Voilà le point de départ : personne au sein du système de justice pénale ne croit que vandaliser une boîte aux lettres est la même chose que de vandaliser un monument commémoratif de guerre.

Au nom de la Criminal Lawyers' Association, je vous présente les trois problèmes que j'ai relevés par rapport à cette mesure législative.

Le premier, c'est qu'il s'agit essentiellement d'une solution à la recherche d'un problème. Le Code criminel comporte déjà d'excellentes mesures pour traiter de ce méfait grave.

J'aimerais vous renvoyer à l'article 718 du Code criminel, qui traite des principes et de l'objectif du prononcé des peines. Il y a l'objectif de dénonciation, qui consiste à envoyer au nom des Canadiens un message selon lequel ce comportement précis doit faire l'objet de sanctions supplémentaires ou doit être puni plus sévèrement. Les juges qui prononcent les peines sont tenus de prendre la dénonciation en compte lorsqu'ils se prononcent sur une infraction criminelle.

L'article 718 du code mentionne aussi que la sentence devrait être proportionnelle à la gravité de l'infraction et adaptée à la situation du délinquant. Voilà la règle fondamentale du prononcé des peines, si vous voulez : la gravité de l'infraction et la situation du délinquant. Il est donc plutôt évident, et nous en conviendrons tous, que la profanation d'un monument commémoratif de guerre est un méfait, une infraction plus grave. En réalité, c'est lié au caractère sacré du lieu dont il est question. Voilà l'objectif de la mesure législative, à mon avis. Quant à l'esprit du projet de loi, personne ne remet en question la nécessité de régler le problème de la profanation des monuments commémoratifs de guerre.

Un autre aspect important, c'est que l'article 718 du code traite aussi de la nécessité pour un juge de prendre en compte les circonstances aggravantes ou atténuantes. Le Parlement a déjà prévu, au sous-alinéa 718.2a)(i) que les infractions motivées par des préjugés ou la haine fondée sur la race, la religion et le sexe sont des facteurs particulièrement aggravants dont il faut tenir compte dans le prononcé de la peine.

Le commentaire formulé plus tôt par la sénatrice Frum au sujet de la profanation prenant la forme d'une croix gammée ou d'autres symboles haineux seraient précisément visés par cet article du Code criminel. Le caractère sacré des biens en cause est une variable qui doit être prise en compte dans le prononcé de la peine.

Je devrais donc parler de l'un des principaux problèmes que je constate par rapport à cette mesure législative : rien ne semble indiquer que le système de justice pénale ait tout faux. J'ai écouté attentivement les témoignages qui ont été faits hier et aujourd'hui et il ne semble y avoir aucun élément qui indique que les juges qui prononcent les peines n'ont pas les outils nécessaires, ne tiennent pas adéquatement compte du principe de dénonciation et laissent les délinquants s'en sortir aisément, pour ainsi dire.

Je crois que c'est ce que fait ressortir un examen approfondi de la mesure législative. Quelles preuves nous portent à croire que le système de justice pénale est dans l'erreur? Le Code criminel contient tous les éléments dont les juges doivent tenir compte. Or, à ma connaissance, rien n'indique une quelconque déficience du système de justice pénale.

Cela nous amène au deuxième problème du projet de loi, selon mon interprétation, et il nous mène en terrain glissant si nous choisissons d'établir la liste de tous les autres biens ayant un caractère sacré pour lesquels on devrait imposer des sanctions plus sévères. Par exemple, dans un exposé ou pendant les délibérations, quelqu'un a parlé du monument en l'honneur de Terry Fox ou du monument de la rue Gilmour, ici à Ottawa, dédié à la mémoire des victimes de la tuerie de l'École Polytechnique, qui sont d'autres monuments qui jouent un rôle sacré dans notre société. On a cherché à savoir si l'on devrait ou non déterminer qu'une sanction plus sévère devrait aussi être imposée dans le cas de ces autres monuments ou si cela se rapporte manifestement — ce que je crois — à un facteur aggravant déjà prévu dans le Code criminel.

Se lancer ainsi en terrain glissant a pour conséquence possible, si ce n'est pas déjà le cas, d'alourdir le Code criminel. C'est déjà un livre assez imposant. Nous ne voulons pas qu'il devienne plus lourd, pas seulement pour des raisons d'ordre pratique; cela tient simplement du fait que les infractions qu'on y inclut contribuent à accroître sa lourdeur. On indique aussi aux acteurs du système de justice pénale qu'ils ne livrent pas la marchandise, si vous voulez. Comme je l'ai dit, rien ne semble prouver que ce soit le cas.

Le troisième problème, à mon avis, c'est l'outil brutal que représente le droit pénal. Je crois que M. Hamilton abordera la question des peines minimales obligatoires, un sujet dont j'ai parlé lors de ma dernière comparution au comité au sujet de ce projet de loi.

Je m'en tiendrai au commentaire suivant : on reconnaît que dans la grande majorité des cas, les gens qui commettent ce genre de méfait méritent d'avoir un casier judiciaire. Il peut y avoir une différence entre 99.99 p. 100 et 100 p. 100 des délinquants, comme c'est le cas lorsqu'il y a une peine minimale obligatoire.

Dans notre système de justice pénale, beaucoup de délinquants souffrent de troubles de santé mentale graves, par exemple. Je dirais que notre système de justice pénale n'est pas dans l'erreur. Respectueusement, je vous soumets que le fait d'obliger les juges à imposer, dans tous les cas sans exception, une peine qui mène à un casier judiciaire alors qu'il existe d'autres mesures n'est pas seulement inapproprié, mais qu'il est dangereux de dire que tout délinquant devrait recevoir une peine minimale.

Comme je l'ai indiqué, notre système de justice pénale ne fait pas fausse route, actuellement. Toutefois, je demanderais au comité de penser au cas particulier sur 100 ou sur 1 000 d'une personne qui a un trouble de santé mentale grave, par exemple, dont le degré de culpabilité pourrait être moindre et qui ne mérite peut-être pas d'avoir un casier judiciaire pour le reste de ses jours. Notre système de justice pénale doit avoir la souplesse nécessaire pour traiter des cas très rares où l'on pourrait imposer une période de probation assortie de conditions et de mesures de réadaptation, mais sans l'élément punitif supplémentaire qui consiste à obliger cette personne à se retrouver avec un casier judiciaire à vie. Voilà un facteur important sur lequel le comité devra se pencher, à mon avis.

Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Russomanno. Quant à l'invitation que vous nous lancez lorsque vous comparaissez, qui est d'aller au tribunal pour y observer le déroulement des procédures, sachez que nous avons accès au site web de Westlaw Carswell et que nous lisons les décisions. Vous avez gagné 17 décisions au cours des 10 derniers mois. Vous êtes un avocat très actif et vous connaissez beaucoup de succès; vous êtes un excellent avocat. Nous lisons toutes les décisions relatives aux affaires auxquelles vous avez pris part en tant qu'avocat.

Nous invitons maintenant M. Graeme Hamilton à prendre la parole. Je remarque qu'il est diplômé de la faculté de droit de Harvard et qu'il est aussi un avocat plaidant.

Graeme Hamilton, représentant, Conseil canadien des avocats de la défense : Merci, monsieur le président. Je suis ici aujourd'hui en tant que représentant du Conseil canadien des avocats de la défense. Le CCAD a été fondé en novembre 1992 afin d'agir à titre de porte-parole et d'offrir une perspective nationale sur les questions de droit pénal.

Depuis sa fondation, le CCAD est intervenu dans d'importantes affaires dont ont été saisis les tribunaux du pays. Le gouvernement fédéral a invité le CCAD à participer à des consultations sur d'importantes mesures législatives liées au droit pénal et les médias s'adressent souvent à lui pour obtenir des commentaires sur les enjeux d'actualité. Nos représentants ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et devant le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile, de la Chambre des communes.

Actuellement, le Conseil compte des représentants des 10 provinces et des 3 territoires.

Je vais axer ma brève déclaration préliminaire sur l'aspect du projet de loi qui porte sur la peine minimale obligatoire qui, je le crains, pourrait être contre-productive.

Après examen des débats à la Chambre et des délibérations du Comité permanent de la justice portant sur l'étude du projet de loi C-217, on semble s'entendre pour dire que la profanation des monuments commémoratifs de guerre est en hausse et que l'objectif de cette mesure législative, qui est de dénoncer et d'empêcher ce genre d'activité criminelle, est salutaire. En visant particulièrement les méfaits à l'égard de cette catégorie de biens, le Parlement transmet aux juges, aux procureurs de la Couronne, aux avocats de la défense et aux Canadiens un message clair selon lequel la profanation des monuments commémoratifs de guerre est une infraction plus grave que tout autre méfait, ce qui sera dénoncé en conséquence par le prononcé de peines plus sévères.

Toutefois, selon les cas récents que M. Tilson et d'autres ont cités en exemple lorsque la question a été abordée à la Chambre, le délinquant type serait un adolescent ou un jeune adulte de sexe masculin ayant consommé de l'alcool ou des drogues ou démontrant une indifférence à l'égard des sacrifices que nos anciens combattants ont faits pour nous, ou une combinaison de tous ces facteurs. La réadaptation occupera une place importante dans le prononcé de la sentence d'un tel délinquant. Même sans la peine minimale obligatoire que l'on propose, le juge qui prononce la peine aura la lourde tâche de déterminer une peine qui est proportionnelle à la gravité de l'infraction, d'une part, et qui favorise aussi la réadaptation du délinquant, d'autre part.

La peine minimale obligatoire rend cette tâche d'autant plus difficile. Bien que la peine minimale proposée ne soit pas exagérément sévère, elle retire au juge la possibilité d'accorder, comme M. Russomanno l'a indiqué, une absolution sous conditions, qui est une option très utile lorsque le tribunal considère que des travaux communautaires ou un dédommagement seraient adéquats, mais qu'il se préoccupe aussi de l'incidence d'une déclaration de culpabilité ou d'un casier judiciaire sur les perspectives d'emploi à long terme du délinquant.

Un autre problème lié à la peine minimale obligatoire proposée, c'est qu'elle n'est pas rationnellement liée à l'objectif de la mesure législative. Il est peu probable qu'une amende suscite le développement du sens des responsabilités chez le délinquant, contrairement à l'effet de 200 heures de travail communautaire pour les anciens combattants. De plus, le fait que le délinquant se retrouve avec un casier judiciaire ne fera qu'accroître sa marginalisation et il sera peut-être plus susceptible d'adopter les mêmes comportements antisociaux à l'avenir.

En fin de compte, je m'attends à ce qu'il y ait très peu de condamnations en vertu de cette nouvelle. Dans le cadre des rencontres préalables au procès, les parties conviendront de la contourner. La Couronne se satisfera d'un plaidoyer de méfait simple, de façon à permettre le prononcé d'une peine à la fois proportionnelle à l'infraction et adaptée aux mesures de réadaptation dont le délinquant a besoin. Cette voie de contournement entraînera des retards — en raison de la nécessité de tenir des rencontres préalables au procès, plus coûteuses —, des coûts supplémentaires et la réduction de la transparence dans le système de justice.

Merci.

Le sénateur Runciman : Messieurs, je vous remercie de votre comparution.

Vous avez avancé l'hypothèse qu'il y aurait très peu de condamnations si le projet de loi était adopté. Nous n'avons peut-être pas de données statistiques pour corroborer cette affirmation — et vous avez émis une hypothèse —, mais je pense que les peines ont été dans la plupart des cas assez légères, d'après les données de M. Tilson. Je crois que c'est notamment ce qui l'a motivé à présenter le projet de loi. On parle peut-être de six d'une façon, puis de six d'une autre façon, mais puisque nous n'avons pas de chiffres précis, nous ne savons vraiment pas ce qui se passe au pays avec ce genre de crime.

J'aimerais parler des peines minimales obligatoires, sur lesquelles vos deux organisations ont exprimé des inquiétudes.

Monsieur Russomanno, votre principale préoccupation à l'égard du projet de loi porte d'ailleurs sur ces peines minimales obligatoires. Je crois que c'est ce que j'ai lu dans votre mémoire. Or, ce sont les récidivistes qui écopent d'une peine minimale obligatoire, ceux qui profanent pour une deuxième ou une troisième fois un monument dressé à la mémoire de nos compatriotes morts à la guerre; et vous me dites que vous et d'autres vous inquiétez réellement de sanctionner ce genre d'individu d'une peine minimale obligatoire sévère?

M. Russomanno : D'après mon interprétation du projet de loi, la première infraction est punie au minimum d'une amende de 1000 $; c'est bel et bien une peine minimale obligatoire. Ce qui m'inquiète à ce chapitre, c'est qu'une telle peine exclut toute possibilité d'absolution.

Je crois comprendre que la peine imposée pour une deuxième ou une troisième infraction est pratiquement calquée sur les dispositions régissant la conduite en état d'ébriété, à l'exception de l'interdiction de conduire, bien entendu. Voilà ce qui m'inquiète.

Aussi, j'aurais du mal à même imaginer une cour pénale ne pas condamner un individu à l'emprisonnement pour une deuxième ou une troisième infraction. Si l'individu est devant les tribunaux pour avoir délibérément profané un monument commémoratif de guerre pour une deuxième ou une troisième fois, il est inconcevable que celui-ci n'écope pas au moins de cette peine. C'est donc vraiment une question de redondance, à mon humble avis.

Le sénateur Runciman : Je n'ai pas vérifié moi-même, mais on m'a dit que vous aviez qualifié ces gestes « d'odieux » lorsque vous avez comparu devant le comité de la Chambre, ce qui me semble juste.

M. Russomanno : C'est exact.

Le sénateur Runciman : J'ai pris la peine de vérifier cet adjectif dans le dictionnaire, et la définition inclut les qualificatifs « méprisable, détestable, répréhensible et ignoble ».

Vous avez naturellement droit à votre point de vue, mais il semble que vous ne voyez aucun mal à ce que le Parlement envoie un message de condamnation, pour autant qu'il n'y ait aucune conséquence. Voilà comment j'interprète votre position.

M. Russomanno : Je ne suis pas d'accord, car la question se résume plutôt à pouvoir dans une minorité de cas éviter un casier judiciaire au prévenu. Ce n'est pas l'unique forme que nous choisissons pour punir les gens. Ce que j'ai dit au comité de la Chambre l'an dernier, c'est qu'il arrive très souvent que l'absolution soit accompagnée d'une période de probation, comme c'est le cas lors d'une condamnation avec sursis. Une probation est souvent bien plus répressive qu'une amende. Des mesures à caractère fort punitif peuvent y être assorties.

Dans l'exercice de mes fonctions, j'ai des clients qui préféreraient souvent écoper d'une amende plutôt que d'une période de probation, car celle-ci peut durer jusqu'à trois ans et être assortie de toutes sortes de conditions.

Le sénateur Runciman : Monsieur Hamilton, vous avez encore parlé de jeunes, et de jeunes contrevenants. Ce qu'on nous a dit jusqu'à maintenant, c'est que le projet de loi ne s'appliquerait pas à eux. Je me demande donc pourquoi vous y avez consacré une partie de votre exposé.

M. Hamilton : Je n'ai pas de données à l'appui, mais lorsque M. Tilson a présenté son projet de loi devant la Chambre pour la première fois, il a parlé de certains dossiers impliquant principalement des jeunes. Il ne s'agissait pas nécessairement de jeunes de moins de 18 ans, mais les contrevenants étaient soit des mineurs, soit de jeunes adultes, des individus soumis aux dispositions sur la détermination de la peine du Code criminel, mais qui sont âgés de 18 à 26 ans, disons. Lors de la détermination de la peine d'un jeune adulte contrevenant, si je puis m'exprimer ainsi sans brouiller les cartes, les tribunaux disent que la réadaptation du délinquant est un des éléments déterminants, surtout pour une première infraction.

En supposant que l'individu condamné est bel et bien un jeune adulte, la cour sera d'une part réticente à dénoncer l'infraction. Avec le projet de loi, le Parlement indique clairement que ce type de méfait doit être dénoncé, mais d'un autre côté, les tribunaux essaient de concilier le tout avec le besoin de réadapter ce genre de délinquant.

Le sénateur Runciman : Je veux simplement clarifier les choses. Vous parlez d'un jeune adulte contrevenant, mais pas d'un jeune contrevenant, n'est-ce pas?

M. Hamilton : Oui, c'est exact.

Le sénateur Joyal : J'aimerais revenir sur un point soulevé hier soir lors du témoignage de la représentante de la Société John Howard. Avez-vous eu la chance d'en prendre connaissance?

M. Russomanno : Oui.

Le sénateur Joyal : Mme Latimer a soulevé la question de l'éventuelle contestation des peines minimales obligatoires proposées dans le projet de loi C-217. Elle a parlé de la récente affaire R. c. Cloud du 3 février dernier; j'ignore si vous connaissez le dossier. C'est une décision de la Chambre criminelle et pénale de la Cour du Québec au sujet de l'Autochtone Richard Jason Cloud. Mme Latimer l'a mentionnée dans le cadre de l'interprétation des critères de la Cour suprême permettant d'évaluer les répercussions ou la légalité d'une peine minimale obligatoire. Êtes-vous au courant de cette affaire?

M. Russomanno : Je n'ai pas lu la décision, non.

Le sénateur Joyal : Avez-vous des commentaires sur ce qu'a dit Mme Latimer, à savoir que les peines minimales obligatoires proposées dans le projet de loi C-217 pourraient donner lieu à une contestation fondée sur la Charte?

M. Russomanno : Il y a un jugement assez récent de la Cour d'appel de l'Ontario que je connais très bien sur la contestation de peines minimales obligatoires pour les armes à feu. C'est l'affaire R. c. Nur, qui est basée sur le critère de la Charte relatif aux peines cruelles et inusitées. Le seuil à franchir est souvent assez élevé, et le critère applicable est celui de la disproportion exagérée.

En présence d'une contestation fondée sur l'article 12 de la Charte, le tribunal doit vérifier si la peine est disproportionnellement exagérée pour un délinquant hypothétique ayant certaines caractéristiques hypothétiques.

Je considère que c'est une possibilité, mais l'affaire Nur est justement une des deux décisions de l'histoire juridique canadienne où une peine a pu être contestée en vertu de l'article 12 de la Charte. Je dirais donc qu'il est assez difficile de contester une peine en invoquant le critère de peine cruelle et inusitée de la Charte.

J'aurais besoin d'étudier davantage la question pour déterminer si l'impossibilité d'accorder l'absolution conditionnelle peut être disproportionnellement exagérée. Il était question d'une peine minimale obligatoire de trois ans d'emprisonnement dans l'affaire Nur, et d'une peine de sept ans dans l'arrêt antérieur de la Cour suprême du Canada.

M. Hamilton : Je conviens qu'il est fort peu probable qu'une contestation des peines minimales obligatoires fondée sur la Charte réussisse dans ce cas particulier.

Le sénateur Joyal : Dans l'affaire Richard Cloud, dont Mme Latimer nous a parlé, le juge Patrick Healy a réitéré le principe de la proportionnalité et de l'individualisation de l'affaire qui, selon la Cour suprême, sont les deux éléments qu'un juge doit mettre en balance pour déterminer si une amende respecte le critère de la Cour suprême.

Il me semble que dans le cas d'une amende comme celle proposée dans le projet de loi C-217, tout dépend de la proportionnalité et des circonstances entourant l'infraction, surtout si l'individu avait les facultés affaiblies, a des problèmes de santé mentale ou pourrait présenter d'autres facteurs dont le tribunal tiendra compte.

Même s'il ne s'agit pas d'une « peine cruelle et inusitée », il se pourrait qu'on doive aussi tenir compte du principe de la proportionnalité et des circonstances entourant l'affaire, qui pourraient donner lieu à des contestations si le juge n'a aucune raison d'imposer une amende.

M. Russomanno : Je ne suis pas nécessairement d'accord. La proportionnalité est un des principes fondamentaux de la détermination de la peine qu'on retrouve à l'article 718 du Code criminel, et je crois qu'elle fait aussi partie des principes de justice fondamentale à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. D'autres infractions criminelles sont peut-être punies d'une amende minimale, comme la conduite avec capacités affaiblies, mais on peut raisonnablement présumer que ceux qui les commettent ont probablement les moyens de payer 1 000 $. S'ils peuvent conduire une voiture, ils ont théoriquement les moyens de payer une amende de 1 000 $.

La Criminal Lawyers' Association se préoccupe particulièrement de l'incapacité de payer les amendes. En Ontario, par exemple, un individu ne peut pas réaliser de travaux plutôt que de payer une amende. Bien que la cour ait dit dans l'arrêt Wu que le Canada n'incarcère pas les débiteurs, le Code criminel permet d'arrêter une personne incapable de payer. Dans ce cas, un des deux critères suivants doit être rempli. D'une part, il faut démontrer que l'individu refuse délibérément de payer l'amende plutôt que de ne pas payer en raison de sa pauvreté, par exemple. D'autre part, il faut ordonner une confiscation civile par l'intermédiaire d'une agence de recouvrement. Il faut essayer de se faire payer par un de ces deux moyens. Le délinquant ne peut être arrêté que si aucune de ces solutions ne fonctionne.

Le contrevenant passera probablement quelque temps en prison avant d'être traîné devant les tribunaux et de pouvoir plaider son incapacité de payer l'amende pour des raisons de pauvreté, entre autres. À ce moment, il devra bien entendu retenir les services d'un avocat ou se défendre lui-même, dans quel cas il aura probablement accès à un avocat bénévole. Il devra passer plusieurs jours sous garde avant de plaider son incapacité de payer en raison de sa pauvreté.

Il semble y avoir des difficultés concernant certains individus incapables de payer une amende, ce qui peut entraîner des résultats non souhaitables, si je puis m'exprimer ainsi.

Le sénateur Joyal : Comment interprétez-vous le paragraphe 4.11 que nous ajoutons à l'article 430 du Code criminel, qui porte sur les méfaits en général, et qui comprend le paragraphe 4.1 sur le méfait à l'endroit des biens de culte religieux? Que pensez-vous du chevauchement des deux paragraphes? Selon vous, sur quelle base la Couronne pourrait-elle choisir de porter des accusations en vertu du paragraphe proposé plutôt que du paragraphe 4.1?

M. Hamilton : Si vous me permettez de répondre, sénateur, M. Cotler avait parlé du chevauchement entre la disposition proposée et d'autres dispositions existantes lorsque la Chambre a été saisie du projet de loi.

Si j'étais procureur, il serait probablement plus facile d'obtenir une condamnation en invoquant le paragraphe 4.11, car il se base uniquement sur les conséquences alors que le paragraphe 4.1 nécessite en plus la preuve que l'acte était motivé par la haine. Tout ce que la Couronne doit démontrer, c'est qu'il s'agissait effectivement d'un monument commémoratif de guerre quelconque correspondant à la définition de la disposition.

Il y a bel et bien un chevauchement, et peut-être une incohérence aussi du fait qu'une infraction axée sur les conséquences soit punie d'une peine minimale obligatoire, mais pas une infraction motivée par la haine.

En pratique, si j'étais procureur et qu'une infraction semblait s'appliquer à la fois aux paragraphes 4.1 et 4.11, je choisirais le deuxième puisqu'il me permettrait peut-être d'obtenir une condamnation plus facilement.

Le sénateur Joyal : Autrement dit, nous allons atténuer l'effet du paragraphe 4.1 en ajoutant le paragraphe 4.11 proposé dans le projet de loi C-217, qui ne nécessite aucune preuve d'intention criminelle. Par exemple, le simple fait de jeter une pierre à un monument commémoratif de guerre rend l'individu responsable de l'infraction en vertu de la nouvelle disposition, alors que le premier paragraphe nécessite une preuve d'intention criminelle, ce qui peut être très difficile à trouver dans certains cas.

Prenons l'exemple d'un slogan politique peint sur un monument commémoratif. Le slogan peut dévoiler l'intention, mais il est difficile de déterminer l'intention criminelle d'un individu qui n'a fait que jeter une pierre sur un monument.

Dans ce cas, ajouter le paragraphe proposé 4.11 me semble affaiblir la protection assurée par le paragraphe 4.1, car l'individu peut s'en tirer avec une amende de 1 000 $ plutôt qu'une peine bien plus sévère en vertu du premier paragraphe. Comme vous l'avez dit, il pourrait s'agir d'une probation de trois ans, ce qui est bien plus pénible que d'émettre un chèque pour un individu sans le sou.

M. Russomanno : Oui, et comme vous l'avez dit, le paragraphe 4.1 nécessite une intention criminelle bien plus évidente que la disposition proposée.

Le vice-président : Aussi, monsieur Russomanno, il faut se demander si le méfait en soi est une infraction de moindre importance que celle que le comité est en train d'adopter.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités. Depuis que l'on étudie ce projet de loi, on parle d'éduquer les récidivistes qui peuvent parfois être jeunes. On parle de formation. Vous avez parlé de santé mentale. On parle évidemment de la pauvreté, parce qu'on dit que les gens n'étant peut-être pas capables de payer l'amende, ils devraient faire de la prison. Ce sont de beaux discours, mais il faudrait parler de la responsabilisation de ces gens.

Je sais que ce sera difficile de faire appliquer le projet de loi. Pendant une trentaine d'années, j'ai vu des gens passer devant des cours de justice, représentés par des avocats de la défense qui faisaient un très bon travail. Cependant, les mêmes individus se retrouvaient à répétition à la cour.

Ne pensez-vous pas que le projet de loi s'harmonise avec le geste posé, c'est-à-dire la profanation d'un symbole? Parce que les gens comprennent qu'un monument commémoratif n'est pas un monument ordinaire.

J'aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

M. Hamilton : Je pense que le projet de loi réalise un objectif louable en faisant comprendre que ce genre de comportement doit être dénoncé. Même sans les peines minimales obligatoires — et c'est sur quoi j'insiste aujourd'hui —, les tribunaux comprennent que ce genre de méfait est bien plus grave. Même sans la disposition, les tribunaux pourront en faire une circonstance aggravante et, comme vous dites, tenir le délinquant responsable. Ils peuvent dénoncer ces gestes et fixer une peine adéquate pour que le délinquant rende compte de ses actes.

Je ne suis pas criminologue, mais je me demande si la disposition portant sur la peine permettrait réellement d'atteindre l'objectif voulu, c'est-à-dire favoriser la responsabilisation. Comme l'a soulevé un témoin du groupe précédent, si ce n'est pas nécessairement un adolescent, mais plutôt un jeune adulte qui est accusé, est-ce qu'il paiera lui-même son amende ou si ses parents s'en acquitteront pour le tirer d'affaire? Dans ma déclaration, j'ai donné l'exemple d'une absolution conditionnelle assortie de 200 heures de travaux communautaires, dont du bénévolat auprès d'anciens combattants, le nettoyage de monuments ou autre chose du genre, qui permettrait davantage de renforcer le sens de la responsabilité.

M. Russomanno : En ce qui a trait à la responsabilité et aux récidivistes, effectivement, il y a des avocats de la défense qui représentent ces personnes et qui mettent en évidence toutes les circonstances atténuantes du cas en particulier et les facteurs personnels liés au délinquant dans le but de demander la peine la moins sévère possible. En revanche, dans notre système accusatoire, nous avons des procureurs de la Couronne très compétents qui, dans tous les cas, vont mentionner au juge qui prononce la peine que la personne est un récidiviste, et le juge en tiendra compte.

En vertu de notre loi sur l'adéquation de la peine, il y a ce qu'on appelle le « principe de la gradation des peines ». Si une personne comparaît devant le tribunal pour une deuxième infraction, la peine requise doit forcément être plus sévère que celle qui a été imposée précédemment car, de toute évidence, la personne n'a pas compris le message. C'est ce qui est considéré comme la dissuasion individuelle. On doit aussi dissuader la société en général de ne pas adopter ce type de comportement.

J'estime que le système judiciaire dispose déjà des outils nécessaires pour s'occuper efficacement des récidivistes. Un délinquant qui commet un méfait à l'égard de monuments commémoratifs de guerre sera puni plus sévèrement la deuxième fois et encore plus la troisième fois.

J'ai dit plus tôt qu'on s'engageait sur une pente glissante. Permettez-moi de vous donner un exemple. Dans le cas qui nous occupe, le Parlement va demander précisément aux juges de prendre ce facteur en considération, mais sachez qu'il existe d'autres infractions criminelles pour lesquelles le Code n'est pas aussi précis, mais les juges en tiennent quand même compte. Dans les cas de vols, de vols qualifiés ou de voies de fait, si la victime est une personne vulnérable, par exemple, une veuve âgée par opposition à une jeune personne, le juge prendra en considération la vulnérabilité de la victime au moment de prononcer la peine. Il n'est pas nécessaire d'inscrire dans le Code criminel que s'il s'agit d'une vieille dame, il faut être plus sévère. C'est déjà une circonstance aggravante dont le tribunal tient compte.

Il serait peut-être plus utile d'insister auprès des juges sur le caractère sacré du bien vandalisé plutôt que de dire : « Dans le cas d'un monument commémoratif de guerre, la peine doit être celle-ci. » Aux termes de cette disposition, le juge pourrait considérer le caractère sacré du monument en question comme un facteur aggravant. C'est une suggestion.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je suis d'accord avec vous, monsieur Russomanno. Il s'agit du principe de l'escalier, et si nous voyons que la marche est faible, nous pouvons la renforcer ou la remplacer.

[Traduction]

Le sénateur McIntyre : Messieurs, je vous remercie pour votre exposé.

Regardons la réalité en face. Supposons que le projet de loi C-217 est adopté et qu'il prévoit une peine minimale obligatoire, c'est-à-dire une amende pour la première infraction et une peine d'emprisonnement pour la seconde infraction, et que vous êtes un avocat de la défense qui représentez non pas un adolescent, mais un adulte qui a contrevenu à la loi, au sens du projet de loi C-217, quels arguments ferez-vous valoir devant le tribunal au moment de l'audience de détermination de la peine? Comment allez-vous aborder cela? Allez-vous inviter le juge à examiner la définition d'une « infraction de méfait » dans le Code criminel plutôt qu'un « méfait à l'égard de monuments commémoratifs de guerre »? Comment allez-vous procéder?

M. Russomanno : Juste pour être certain, parlez-vous d'une audience de détermination de la peine ou d'un procès?

Le sénateur McIntyre : D'une audience de détermination de la peine.

Le vice-président : Comme facteur atténuant.

Le sénateur McIntyre : Le projet de loi C-217 est adopté. Vous représentez un jeune contrevenant.

M. Russomanno : Oui.

Le sénateur McIntyre : Qu'allez-vous dire au juge qui prononce la peine, sachant que le projet de loi C-217 imposerait une amende minimale à un délinquant primaire ou une peine d'emprisonnement minimal à un récidiviste?

M. Russomanno : L'amende est le seuil minimal, alors évidemment, nous devons partir de là. Je dois admettre que la profanation d'un monument commémoratif de guerre est un facteur aggravant comparativement à un autre type de méfait, comme on l'a dit hier, à l'égard d'une boîte aux lettres, par exemple. Vous ne pouvez pas dire qu'il ne s'agit pas d'un facteur aggravant, car on parle ici d'un monument commémoratif de guerre. Les circonstances de l'infraction sont un facteur aggravant en soi.

Comme le prévoit l'article 718, nous devons examiner la situation du contrevenant; je dois donc savoir à quel type de délinquant j'ai affaire. Il y a toutes sortes de délinquants qui se retrouvent devant les tribunaux.

Pour ce qui est des facteurs atténuants, je ne mentionnerais certainement pas qu'il s'agissait d'un monument commémoratif de guerre. Cela serait plutôt considéré comme un facteur aggravant.

M. Hamilton : Veuillez m'excuser; je ne répondrai pas à votre question directement. Mon travail commencerait avant l'audience de détermination de la peine. Je ferais valoir mes arguments dès l'audience avant procès au cours de laquelle j'essaierais de convaincre la Couronne d'intenter des poursuites pour simple méfait, que je qualifie d'infraction moindre et incluse.

Le sénateur McIntyre : Intenteriez-vous une poursuite par voie sommaire plutôt que par voie de mise en accusation?

M. Hamilton : Oui, par voie sommaire, en supposant que ce jeune délinquant n'a pas de casier judiciaire et que cela pourrait lui éviter d'en avoir un. Selon moi, l'exécution de travaux communautaires serait la peine la mieux adaptée à la situation et la plus susceptible de favoriser chez les délinquants le sens de la responsabilité et la prise de conscience du tort causé.

Je mettrais tout en œuvre pour éviter à mon client d'avoir un casier judiciaire, car un casier peut avoir des conséquences très dramatiques pour un jeune contrevenant, et ce, bien au-delà de la peine imposée. Cela l'empêcherait évidemment de pratiquer le droit. Aujourd'hui, que ce soit dans n'importe quel domaine, un grand nombre d'employeurs éliminent d'emblée les candidats qui ont un casier judiciaire ou des condamnations au criminel. C'est ce que j'essaierais d'éviter.

Je préférerais que la personne se voie imposer une peine plus lourde, à court terme, pour ce qui est du nombre d'heures de travaux communautaires à exécuter, mais que cela ne nuise pas à son avenir.

Le sénateur McIntyre : Comme l'a mentionné M. Russomanno, si votre client était aux prises avec des troubles de santé mentale, vous demanderiez au tribunal de procéder à une évaluation psychiatrique.

M. Russomanno : Ou je le ferais de mon côté avant l'audience. Comme M. Hamilton l'a dit, il y a beaucoup de travail qui se fait au préalable.

Le sénateur McIntyre : Et le délinquant pourrait être déclaré inapte à subir son procès ou apte à le subir; certains sont jugés non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux.

M. Russomanno : C'est un critère très difficile à satisfaire. Il y a énormément d'individus qui ont des problèmes de santé mentale et qui se retrouvent quand même derrière les barreaux.

Le sénateur McIntyre : Mais vous avez d'abord besoin d'une évaluation psychiatrique, c'est certain.

Le vice-président : Monsieur Russomanno, vous avez une grande expérience de la comparution devant la Commission d'examen des cas de non-responsabilité criminelle. Vous venez tout juste d'être contre-interrogé par celui qui détient le record quant au plus long mandat en tant que président de la Commission d'examen des cas de NRC du Canada. Il a été président de cette commission pendant 25 ans. Par conséquent, j'espère que vous deux serez ici lorsque nous examinerons les amendements au projet de loi.

Le sénateur McIntyre : Je ne suis pas un expert.

Le vice-président : Vingt-cinq ans à la présidence d'une commission; on ne peut y parvenir à moins d'avoir été juge.

Sénatrice Batters.

La sénatrice Batters : Merci beaucoup de vous être joints à nous aujourd'hui.

Ma première question concerne le « programme de solutions de rechange à l'amende », dont vous avez brièvement parlé, qui est en place dans un certain nombre de provinces canadiennes et qui permet à des délinquants d'exécuter des travaux communautaires lorsqu'ils ne sont pas en mesure de payer une amende. Malheureusement, ce programme n'est pas offert en Ontario, alors je me demandais si l'une de vos organisations avait exercé des pressions auprès du gouvernement provincial libéral de l'Ontario pour qu'il adopte ce type de programme en vue d'aider vos clients.

M. Russomanno : Je sais que certains membres de notre organisation — Michael Spratt, un de mes collègues qui était censé témoigner devant le comité aujourd'hui, mais qui a dû se présenter devant le tribunal ce matin, s'intéresse particulièrement à cette question. Je ne sais pas si c'est à titre de représentant de la Criminal Lawyers' Association, mais je vais me renseigner là-dessus.

M. Hamilton : Je ne crois pas que le CCAD a exercé des pressions à cet égard.

La sénatrice Batters : Lorsque le sénateur Joyal vous a demandé plus tôt de faire la distinction entre la motivation et la mens rea, je me demande s'il n'y a pas eu un peu de confusion ici. Je suis avocate moi aussi, et je me demande si on n'est pas un peu mêlé. Le méfait est une infraction qui exige la mens rea, et aux termes de l'article précédent en vigueur du Code criminel, il faut établir si la personne est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur le sexe, par exemple, ou autre chose. Êtes-vous d'accord?

M. Hamilton : Oui. J'ai rapidement regardé les autres dispositions portant sur les méfaits hier soir, car, si le projet de loi est adopté tel quel, je pense qu'il faudra aussi se demander s'il y a lieu de prouver que la personne visée avait l'intention d'endommager le bien comme le prévoit la disposition.

En général, d'après ce que j'ai vu, le méfait est une infraction d'intention générale, et il n'est pas nécessaire de prouver que l'individu savait qu'il s'agissait d'un titre testamentaire dont la valeur dépassait 5 000 $; la perpétration du méfait est suffisante et c'est simplement une conséquence.

Selon moi, pour ce qui est de la mens rea de cette infraction, il suffirait de dire que la personne avait l'intention de commettre un méfait tel qu'il est défini. Ensuite, compte tenu du paragraphe 4.1, bien entendu, il faut également prouver, comme vous dites, le motif, et il y a une différence entre le motif et l'intention.

La sénatrice Batters : Je ne me souviens plus lequel d'entre vous a dit que lorsque ce sont les parents qui paient l'amende infligée à leur enfant, il n'y a pas vraiment de conséquences pour le délinquant. Je ne suis pas d'accord, car, dans bien des cas, si les parents doivent payer 1 000 $ pour leur enfant, ils imposeront des conditions. En fait, si j'avais commis un tel acte à l'âge de 19 ans et que mes parents avaient dû payer 1 000 $, je n'ose pas imaginer ce qui me serait arrivé.

Le sénateur Plett : Je suis parmi les rares personnes ici à ne pas être avocat ou à ne pas travailler dans le milieu de l'application de la loi.

Comme vous le savez, notre gouvernement croit que les tribunaux n'ont peut-être pas bien joué leur rôle, et c'est pourquoi nous sommes en faveur des peines minimales, pas seulement dans ce cas-ci, mais dans beaucoup d'autres. Malgré le respect que je vous dois, je ne crois pas que les tribunaux s'y sont toujours pris de la bonne façon pour traiter ces dossiers.

Vous avez tous deux indiqué que l'imposition d'une peine minimale de 1 000 $ empêcherait en quelque sorte un juge d'infliger une peine plus sévère telle qu'une période de probation de trois ans. Maintenant, j'ai lu le projet de loi également, et je ne vois pas ce qui pourrait empêcher un juge d'imposer une amende de 1 000 $ et une période de probation de trois ans; cela serait toujours possible, tout comme l'exécution de 200 heures de travaux communautaires.

Je suis d'accord avec la sénatrice Batters. Si mes parents avaient payé 1 000 $ pour moi, ils m'auraient certainement imposé des conséquences, et si je n'avais pas exécuté de travaux communautaires, j'aurais travaillé ailleurs.

J'ai posé la question à M. Tilson hier. Malheureusement, il ne m'a pas non plus donné la réponse que je voulais entendre. La Bibliothèque du Parlement a recensé une trentaine de cas différents d'individus qui ont profané et vandalisé des monuments commémoratifs de guerre, et très peu d'entre eux étaient accompagnés d'une peine. Est-ce parce qu'on n'a pas imposé de peine? Quoi qu'il en soit, si vous pensez que les tribunaux ont bien joué leur rôle, avez-vous des statistiques qui nous prouvent que c'est bien le cas? Et oublions les jeunes dans tout cela, puisque le projet de loi ne s'applique pas à eux. Il vise les adultes. Je suis curieux de savoir si vous avez des statistiques à nous fournir.

M. Russomanno : Pour ce qui est des méfaits à l'égard des monuments commémoratifs de guerre, je n'ai pas de statistiques et je ne crois pas qu'il en existe. Mais cela revient à ce que vous disiez au début. Je ne doute pas de la sincérité du gouvernement qui croit que les tribunaux ne s'y prennent pas de la bonne façon, mais sachez qu'il y a une énorme différence entre une croyance et une connaissance réelle fondée sur des faits. C'est là où le bât blesse.

Je travaille tous les jours devant les tribunaux criminels d'Ottawa, et même dans les autres cas de méfait simple, de voies de fait ou de vol qualifié, je n'ai pas du tout observé de problème de laxisme à l'égard des récidivistes. Selon mon expérience, je ne crois pas qu'on soit trop indulgent ni qu'on leur impose des peines trop légères.

Pour ce qui est des monuments commémoratifs de guerre en particulier, je n'ai pas entendu parler de cas où on a imposé des peines légères, et je n'ai pas non plus de statistiques là-dessus. D'ailleurs, je ne crois pas qu'il en existe.

Quant à la période de probation de trois ans, je ne disais pas qu'il serait impossible, compte tenu de ce nouveau projet de loi, d'imposer une période de probation de trois ans. J'ai tout simplement dit que le casier judiciaire n'est pas la seule façon d'exiger des comptes de la part des contrevenants. En se gardant cette option, du moins pour les délinquants pour qui une absolution conditionnelle est adéquate et à qui on peut éviter d'avoir un casier judiciaire, on peut les amener à réfléchir à leurs actes et à les responsabiliser en leur imposant une période de probation sans nuire à leurs possibilités d'emploi, parce qu'on sait qu'il est difficile d'obtenir un emploi avec un casier judiciaire.

C'est là où je voulais en venir.

M. Hamilton : Si vous me le permettez, j'aimerais revenir brièvement sur ce dernier point. Je pense que vous avez entièrement raison; il serait possible d'imposer une période de probation y compris un certain nombre d'heures de travaux communautaires. Je pense toutefois que cela sera moins probable avec l'imposition d'une peine minimale obligatoire parce que, comme M. Russomanno l'a indiqué, le juge tiendra compte du fait que l'individu s'est vu infliger une amende. Il est également conscient des conséquences de la possession d'un casier judiciaire. S'il s'agit d'une première infraction, le juge estimera que la peine est déjà suffisante et, par conséquent, il aura moins tendance à proposer des travaux communautaires.

Je pourrais me tromper. La jurisprudence pourrait se développer de façon différente, c'est-à-dire que les tribunaux pourraient décider — et c'est de cette façon que la loi évolue — que l'imposition d'une amende est une peine appropriée en plus des services communautaires; cela crée un précédent qui devient la peine habituelle pour ce type d'infraction. Mais à mon avis, dans ce cas, c'est moins probable, en raison des conséquences entraînées par la peine minimale obligatoire auxquelles la personne devra faire face.

Le sénateur Plett : Les avocats me disent toujours que l'une des premières choses qu'ils apprennent dans un tribunal, c'est de ne pas poser une question pour laquelle ils ne connaissent pas déjà la réponse. Mais je ne suis pas avocat, et je ne suis donc pas assujetti à ce principe. Je ne connais pas la réponse à ma question, mais je sais que vous pourrez y répondre.

Présumons qu'un individu pauvre a commis un méfait une fois et qu'il n'a pas les moyens de payer l'amende et qu'il demande grâce au procureur de la Couronne. L'avocat de la défense soutient que c'est la première fois que son client commet cette infraction et qu'il ne le fera plus jamais. Son client répète la même chose. Le procureur les croit. Plutôt que la décision revienne au juge, le procureur ne serait-il pas en mesure d'atténuer l'accusation, afin que son client n'ait pas à comparaître devant un juge qui sera forcé de lui imposer une amende de 1 000 $?

M. Hamilton : C'est exactement le point que j'essayais de faire valoir dans mon exposé. Je crois que c'est exactement ce qui se produirait dans ce cas particulier. Avec l'imposition de la peine minimale, le pouvoir discrétionnaire est transféré du juge au procureur qui, en tant qu'administrateur de la justice et représentant quasi judiciaire, décide que dans ce cas en particulier, étant donné les circonstances personnelles de l'accusé, il n'est pas dans l'intérêt public d'obtenir une condamnation en vertu du paragraphe (4.11).

Toutefois, le coût pour le système est, tout d'abord, un manque de transparence, car quels sont les faits qui seront présentés devant le juge chargé de déterminer la peine? Si le projet de loi finit par être étudié après les faits et qu'il n'y a pas beaucoup de condamnations aux termes de la loi, les gens pourraient se demander pourquoi.

De plus, il faudrait une étape supplémentaire au cours de laquelle un avocat — ou M. Russomanno ou moi-même — pourrait intervenir pour expliquer au procureur que cette personne n'a pas les moyens de payer. S'il s'agissait d'une simple accusation de méfait, cela ne serait pas nécessaire, car il n'y a pas cette peine minimale obligatoire en vertu de laquelle on demande à un procureur d'exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas lancer de poursuites liées à l'accusation, mais de faire autre chose.

Le sénateur Plett : Sauf pour la transparence, cela pourrait être une bonne chose. L'affaire ne se rendrait pas devant un juge et ne ferait pas perdre de temps aux tribunaux; les procédures se dérouleraient dans un bureau comme celui-ci. L'affaire serait réglée. La personne serait libérée et cela ne prendrait pas le temps des tribunaux.

Plus tôt, nous avons regardé quelques photos. L'intention du projet de loi n'est pas de pénaliser une personne qui, pendant qu'elle était soûle, a commis une erreur. Hier, on nous a dit qu'une personne pouvait dormir près d'un monument de guerre et ensuite avoir besoin de se soulager et que cela l'excuserait d'une certaine façon. Je ne suis pas d'accord avec cela, mais néanmoins, ces actes ont été commis en état d'ébriété. Par contre, les photos que nous avons vues montraient une intention évidente. Un individu est allé dans une quincaillerie, a acheté de la peinture en aérosol et est revenu sur les lieux pour peindre des croix gammées sur les monuments. Cela révèle une intention.

J'imagine que je n'ai pas vraiment de question, mais ce que j'essaie de faire valoir, c'est que la personne soit pauvre ou qu'elle dispose de 1 000 $, elle est quand même saine d'esprit.

Vous avez parlé d'équilibre mental et nous avons parlé de déficience, et il pourrait donc y avoir des circonstances atténuantes dans ce cas. Toutefois, être pauvre ne constitue pas une circonstance atténuante. En effet, vous avez possiblement plus de temps pour penser à cela si vous êtes pauvre et que vous n'avez pas les moyens de payer, et vous devriez vous assurer de ne pas avoir à le faire.

Vous pouvez répondre si vous voulez.

M. Russomanno : Je répondrais simplement que dans le scénario que vous avez présenté et qui concerne une personne qui prend le temps de se rendre à la quincaillerie et d'écrire un message haineux ou de dessiner une image haineuse sur un mémorial de guerre, cette personne n'obtiendrait certainement pas une peine légère dans un tribunal pénal, même si c'était sa première infraction. Je crois que le système accusatoire fonctionne dans ce cas. Nous avons des procureurs de la Couronne très compétents qui demandent des peines sévères dans ces cas et qui font valoir au juge qu'il s'agit de circonstances aggravantes, car l'individu a vraiment pris le temps de planifier son méfait. Il a posé un geste particulièrement haineux — et ce type de méfait est déjà visé par le sous-alinéa 718.2a)(ii) du Code criminel, qui indique au juge de considérer qu'il s'agit d'une circonstance aggravante lorsqu'une action est faite avec un but haineux —, et l'individu sera sévèrement puni. Il n'y a pas d'insuffisance dans le Code criminel à cet égard.

Le sénateur Plett : Nous voyons tout le temps des gens qui ont commis des agressions sexuelles contre des enfants, par exemple des individus qui ont 27 chefs d'accusations de voies de fait et qui reçoivent des peines vraiment très légères. Je suis désolé, mais je me permets respectueusement d'être en désaccord avec l'affirmation que les choses se dérouleraient ainsi.

Le sénateur Day : Messieurs, merci beaucoup de vos commentaires, ils ont été très utiles. J'aimerais, à l'aide d'une brève question, clarifier la notion de dédommagement.

Maintenant, les juges ont le pouvoir, en vertu du paragraphe 718 ou d'une autre source, de rendre une ordonnance de dédommagement en plus d'une autre ordonnance. En vertu du projet de loi, un juge peut-il demander à ce que cette amende minimale de 1 000 $ soit utilisée en dédommagement?

M. Hamilton : Je ne crois pas, sénateur Day. Je crois qu'il faudrait une ordonnance de dédommagement distincte en plus de cette amende. Si la personne est pauvre, comme nous l'avons dit, il est moins probable, s'il y a une amende minimale et une suramende compensatoire à payer, que le juge impose en plus une ordonnance de dédommagement en tant que condition à la probation.

M. Russomanno : Je suis absolument d'accord avec cela. Il y a des options dans le cadre desquelles on peut rendre une ordonnance de dédommagement en plus de l'amende, mais en ce qui concerne l'amende elle-même, d'après ce que je comprends, elle ne sert pas au dédommagement.

Le sénateur Day : Qu'arrive-t-il aux 1 000 $ si une amende est imposée, c'est-à-dire l'amende minimale de 1 000 $?

M. Hamilton : L'argent est remis au ministre des Finances de l'Ontario et j'ai oublié à qui d'autre.

Le président : À la province.

La sénatrice Frum : Je suis l'autre personne qui n'est pas avocate dans la salle. Permettez-moi de vous poser une question de mon point de vue, en lien avec votre réponse à la question du sénateur Plett qui, je pense, était très convaincante, c'est-à-dire que dans le cas qu'il a cité, les accusations portées seraient graves.

Est-il possible qu'il soit utile et éducatif d'avoir ce type de disposition dans le Code criminel pour que la police les persuade de la nécessité de porter des accusations? Peut-être que la raison pour laquelle il n'y a pas de statistiques, c'est parce que lorsque vient le temps de porter des accusations, on juge que les infractions ne valent pas la peine qu'on le fasse, et il s'agit vraiment plus d'une directive au niveau de la police.

M. Hamilton : Madame la Sénatrice, si je peux me permettre de répondre, le projet de loi peut certainement avoir un objectif éducatif. Je crois que vous avez raison lorsque vous dites que si ce projet de loi est mis en œuvre et que ce type de méfait est plus grave, cela pourrait pousser les agents de police à exercer leur pouvoir discrétionnaire et porter des accusations dans des cas où ils ne le feraient peut-être pas autrement, par exemple dans le cas d'une incartade. Cela peut certainement remplir un objectif éducatif.

Le sénateur Runciman : Monsieur Hamilton, dans votre exposé, vous avez mentionné, en réponse au sénateur Plett, le pouvoir discrétionnaire de la Couronne avant le procès à l'égard de la façon dont elle peut s'occuper d'un accusé, notamment en tenant compte de ses circonstances particulières.

Je suis curieux. Je ne connais certainement pas la fréquence à laquelle c'est utilisé, mais une autre solution offerte à la Couronne est l'article 717, c'est-à-dire la disposition sur les mesures de rechange. Selon vous, quel rôle cet article jouera-t-il dans la nouvelle loi si le projet de loi est adopté?

M. Hamilton : Bien honnêtement, je n'ai pas beaucoup d'expérience avec l'article 717. Je ne l'ai pas vu être utilisé très souvent, et je ne sais donc pas si cela changerait dans le cadre de la nouvelle loi. Peut-être s'il y a plus de projets de loi avec des peines minimales obligatoires...

Le sénateur Runciman : Cela aurait pour résultat de ne pas engendrer de casier judiciaire. C'est le but.

M. Hamilton : D'accord.

M. Russomanno : Oui, d'après ce que je comprends, il s'agit d'une sorte de diversion où la personne doit confesser avoir commis l'infraction criminelle et ensuite elle ne serait pas déclarée coupable. Nous voyons cela très souvent avec d'autres types d'infraction, par exemple les voies de fait dans le cas de délinquants qui en sont à leur première infraction, et il faut suivre les étapes nécessaires dès le début. Cela revient vraiment au point que faisait valoir M. Hamilton sur le fait que cela concerne le pouvoir discrétionnaire du procureur plutôt que celui des tribunaux.

Le sénateur Runciman : C'est exact.

M. Russomanno : Il reviendrait donc au procureur en question de présenter cette mesure au délinquant.

Le sénateur Runciman : Le point que je tentais de faire valoir, c'est que dans ces cas, avant et après le procès, il y a des options qui visent à éliminer la possibilité d'un casier judiciaire, selon les circonstances de la personne et si les tribunaux et la Couronne en tiennent compte.

M. Russomanno : Oui.

Le sénateur Joyal : Avez-vous déjà participé à une procédure visant un méfait au sens de l'article 430?

M. Russomanno : Oui, à de nombreuses reprises.

Le sénateur Joyal : Quelle a été votre évaluation de la décision prise par les tribunaux? Le sénateur Plett n'arrête pas de répéter que les tribunaux sont trop indulgents, pas assez sévères, trop insouciants, et cetera. Quelle est votre évaluation de la décision des tribunaux en lien avec l'expérience que vous avez eue concernant l'article 430?

M. Russomanno : Dans les affaires que j'ai perdues, je dirais que le tribunal avait tort.

Non, c'est une blague.

En ce qui concerne la détermination de la peine, je me suis davantage occupé de méfaits liés à des boîtes aux lettres que de méfaits liés à des monuments de guerre. J'ai participé à une affaire dans laquelle un individu avait été accusé de méfait sur un site très similaire à un monument de guerre, mais pas sur un monument de guerre comme tel. Au bout du compte, les accusations ont été retirées, car il n'existait pas une probabilité raisonnable de condamnation. C'était la décision de la Couronne, et je crois que dans ce cas-là, c'était une décision appropriée.

En ce qui concerne la détermination de la peine, d'après mon expérience, les méfaits sont habituellement traités de la même façon que les autres infractions. Il pourrait y avoir des infractions de violence contre une autre personne pour lesquelles la sévérité de la peine est déterminée par l'infraction de voies de fait, une infraction plus grave qu'un méfait, par exemple.

Selon mon expérience dans le système de justice pénale, nous ne sommes pas aux prises avec des juges qui ne sont pas assez sévères à l'égard des crimes commis. Je dirais plutôt que c'est le contraire. Nous avons des juges qui tiennent vraiment compte des circonstances liées aux délinquants et aux infractions.

Il est malheureux qu'il semble exister un fossé dans ce cas-ci. Je pense respectueusement que le Parlement et le gouvernement exercent leurs activités dans un vacuum factuel, et que le message est reçu par les participants du système de justice pénale. Le message qu'on leur envoie, c'est qu'on ne croit pas qu'ils ont les compétences nécessaires pour faire leur travail de façon appropriée, et je ne crois pas qu'il s'agit d'un message qui devrait être envoyé aux participants du système de justice pénale sans qu'il soit fondé sur des faits et des preuves.

Le sénateur Joyal : Avez-vous eu une expérience semblable, monsieur Hamilton?

M. Hamilton : Les méfaits sont l'une de ces infractions qui s'appliquent à un large éventail de situations. En effet, de nombreux types différents d'inconduite peuvent être visés par cette infraction. Je me fais probablement l'écho de M. Russomanno. Si je pensais que le juge s'était trompé, c'était probablement parce qu'il n'avait pas accepté la peine que j'avais proposée.

En ce qui concerne cette infraction particulière comparativement à certaines autres infractions, par exemple la conduite avec capacités affaiblies, on s'efforce souvent de déterminer une peine personnalisée. Je dirais que dans ma pratique, le délinquant qui commet des méfaits est habituellement plus jeune, mâle et correspond à l'archétype auquel je faisais référence plus tôt. Dans ces cas particuliers, les juges qui déterminent la peine s'efforcent souvent de déterminer une peine qui inculquera un sens des responsabilités. Ils pourraient rendre, par exemple, une ordonnance de dédommagement ou de services communautaires. Ce serait tous des éléments d'une peine sur mesure, ce qui, à mon avis, est parfaitement approprié.

M. Russomanno : Si vous me le permettez, j'aimerais vous raconter une anecdote. Mon collègue a représenté un client qui avait des problèmes de santé mentale graves et qui avait été accusé de vol de dons pour l'achat de coquelicots pour le jour du Souvenir. Il a volé les pièces de monnaie de la boîte dans laquelle les gens font leurs dons pour les anciens combattants. Il avait de graves problèmes de santé mentale. Au bout du compte, il a plaidé coupable et a reçu une peine d'emprisonnement.

Il avait un casier judiciaire, ce qui signifie que dans son cas, il n'y avait aucune possibilité d'absolution conditionnelle. Il a été condamné à une courte peine d'emprisonnement de 30 ou 60 jours, avec une probation assortie d'une condition selon laquelle il devait écrire une composition sur l'importance des services rendus par nos anciens combattants.

Malheureusement, il était analphabète, et il n'a donc pas pu terminer la lettre à temps et a demandé s'il pouvait obtenir l'aide d'un agent de probation pour y arriver. Pendant tout ce temps, il prenait des médicaments, car il avait de très gros problèmes de dépression. Au bout du compte, l'affaire s'est terminée le jour précédant son retour devant les tribunaux. Il s'est suicidé, et cette peine n'a jamais été rectifiée ou complétée.

Cela n'est que pour vous donner un exemple des types de personnes qui souffrent de graves problèmes de santé mentale, mais aussi pour démontrer que nos juges chargés de déterminer la peine portent une attention particulière à ces problèmes.

Que nous soyons agents de police, avocats de la défense, procureurs de la Couronne, juges ou membres du public, nous considérons tous que ces sites sont sacrés et nous respectons tous les contributions de nos anciens combattants et des militaires, et nous savons qu'il s'agit de contributions très spéciales dont nous profitons tous. Je ne crois pas qu'il y ait un manque de respect au sein du système de justice pénale envers ces contributions.

Le vice-président : Merci, honorables sénateurs.

J'aimerais également remercier les témoins de leurs excellents exposés. Je suis sûr que nous vous reverrons très bientôt.

(La séance est levée.)


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