Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 2 - Témoignages du 9 décembre 2013
OTTAWA, le lundi 9 décembre 2013
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour faire une étude sur les obligations de CBC/Radio-Canada en vertu de la Loi sur les langues officielles et de certains aspects particuliers de la Loi sur la radiodiffusion.
La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des langues officielles ouverte.
Je suis la sénatrice Claudette Tardif, de l'Alberta, et la présidente de ce comité. Je demanderais aux membres du comité de se présenter, en commençant par la vice-présidente, à ma gauche.
La sénatrice Champagne : Andrée Champagne, de la province de Québec.
La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Fortin-Duplessis : Suzanne Fortin-Duplessis, de Québec.
[Traduction]
La sénatrice Beyak : Bonsoir. Lynn Beyak, du nord-ouest de l'Ontario.
[Français]
Le sénateur Rivard : Michel Rivard, du Québec.
La sénatrice Charette-Poulin : Marie Poulin, du nord de l'Ontario.
La sénatrice Chaput : Maria Chaput, du Manitoba.
La présidente : Nous continuons notre étude ayant comme but principal d'examiner les obligations de CBC/Radio- Canada en vertu de la Loi sur les langues officielles et de certains aspects particuliers de la Loi sur la radiodiffusion.
Les audiences publiques du Comité sénatorial permanent des langues officielles tirent à leur fin. Elles ont débuté à l'automne 2011. Les témoignages se sont échelonnés sur environ deux ans, entrecoupés d'autres études et d'une prorogation du Parlement.
Parallèlement au travail du comité, le CRTC a mené ses propres audiences publiques portant sur le renouvellement des licences du radiodiffuseur public pour les prochaines années.
Aujourd'hui, le comité sénatorial reçoit des témoins de CBC/Radio-Canada pour obtenir leur point de vue au sujet de ses propres audiences publiques de même que sur la décision récente du CRTC. Je suis très heureuse de souhaiter la bienvenue à M. Louis Lalande, vice-président principal, Services français, et son équipe. Suite à leur présentation, les sénateurs auront des questions à poser. Je demanderais aux sénateurs de garder leurs questions brèves et pertinentes, parce qu'il y a beaucoup de matière, et le temps est quand même limité.
Je donne maintenant la parole à M. Lalande, qui nous présentera son équipe.
Louis Lalande, vice-président principal, Services français, CBC/Radio-Canada : Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, bonsoir. Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître de nouveau devant ce comité afin de répondre à vos questions. Je suis accompagné ce soir de Patricia Pleszczynska, qui est notre directrice générale des services régionaux et d'ICI Radio-Canada Première, notre chaîne de radio parlée, et de Michel Cormier, directeur général de l'information de Radio-Canada.
Dans l'univers des médias d'aujourd'hui, un des défis pour les Canadiens, particulièrement les francophones, est de retrouver des espaces où l'on propose du contenu original, riche et pertinent qui reflète leurs intérêts et qui raconte leur histoire, et ce, dans leur langue. Comme diffuseur public, notre responsabilité est donc immense envers les francophones. En milieu minoritaire, Radio-Canada est souvent le seul média offrant aux francophones une programmation dans leur langue. C'est un mandat que nous prenons très au sérieux. Je suis convaincu que nous avons la bonne stratégie en fonction des ressources disponibles pour remplir nos obligations.
[Traduction]
Avant de répondre à vos questions, j'ai cru qu'il serait utile de vous donner un rapide aperçu de tout ce qui a changé dans l'environnement de fonctionnement de CBC/Radio-Canada depuis notre dernière comparution devant le comité il y a 21 mois.
Lorsque nous avons témoigné ici en mars 2012, CBC/Radio-Canada s'apprêtait à révéler son plan visant à absorber une réduction de 115 millions de dollars de ses crédits parlementaires dans le cadre du PARD, soit le Plan d'action du gouvernement fédéral pour la réduction du déficit.
En outre, nous nous préparions à comparaître devant le CRTC pour défendre le FAPL, ou le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale. Il s'agit d'un fonds qui nous a beaucoup aidés à améliorer les services de télédiffusion, plus particulièrement pour les communautés francophones en situation minoritaire.
Et finalement, nous nous préparions aux audiences du CRTC pour le renouvellement de nos licences.
[Français]
Aujourd'hui, nous sommes à compléter la deuxième année du PARD. Le FAPL en est à sa dernière année d'existence et le CRTC a émis nos nouvelles conditions de licence en mai dernier. Tout cela avec en toile de fond le déploiement de la Stratégie 2015 : Partout, Pour tous, le plan quinquennal de CBC/Radio-Canada, dont un des trois grands axes prioritaires est de renforcer la présence régionale du diffuseur public.
La Stratégie 2015 nous a d'ailleurs été très utile pour faire face à tous ces défis parce qu'elle nous a guidés dans nos choix stratégiques. Elle nous assure que nous sommes toujours en mesure de réaliser notre mandat envers les Canadiens.
Devant la disparition du FAPL, par exemple, la décision facile aurait été de supprimer toutes les émissions régionales financées par le fonds. Dans le contexte de la Stratégie 2015, par ailleurs, nous avons plutôt choisi de poursuivre le déploiement et de préserver notre offre d'information régionale sept jours sur sept dans toutes nos stations. Nous avons donc absorbé une partie de la perte de financement dans d'autres secteurs de Radio-Canada.
Notre engagement envers la programmation régionale, notamment dans les communautés de langues officielles en milieu minoritaire, se reflète aussi dans nos nouvelles conditions de licence du CRTC. En télévision, par exemple, nos sept stations régionales desservant les communautés francophones en situation minoritaire vont offrir au moins cinq heures de programmation locale par semaine en moyenne sur une année. Toutes nos stations régionales vont aussi diffuser des nouvelles locales sept jours sur sept, chaque semaine, sauf les jours fériés.
Nos nouvelles conditions reflètent également les préoccupations exprimées par les divers représentants des communautés francophones devant le conseil lors des audiences de novembre 2012. Je tiens d'ailleurs à souligner que le CRTC, à l'occasion de ses audiences, a reçu plus de 8 000 interventions et a entendu plus d'une centaine de témoins, dont certains d'entre vous. Ainsi, une des conditions émises par le CRTC concerne CBEF à Windsor, où il nous est demandé de produire au moins 15 heures par semaine d'émissions locales de radio. De plus, Radio-Canada va tenir des consultations officielles avec les communautés francophones en situation minoritaire dans chacune des régions de l'Atlantique, de l'Ontario, de l'Ouest et du Nord.
[Traduction]
Quant au renouvellement de nos licences, le CRTC a également établi des conditions permettant à CBC de continuer à bien desservir la communauté anglophone du Québec. En plus des consultations officielles qui seront tenues auprès de cette communauté, CBC offrira aux anglophones du Québec 14 heures de programmation télévisuelle locale par semaine, dont une heure de programmation autre que des nouvelles.
Plusieurs conditions de licence définies par le CRTC suivaient de très près les propositions mises de l'avant par CBC/Radio-Canada. Nous avons fait ces propositions, parce que nous estimions qu'elles représentaient un équilibre entre notre volonté d'améliorer nos services pour ces communautés et le besoin de gérer nos ressources et d'autres services. Cela fait partie intégrante de notre planification et se traduit par des efforts réels en matière de programmation.
[Français]
Par exemple, nos bulletins de nouvelles radio pendant la journée, sur ICI Radio-Canada Première, sont produits dans chaque station au pays de façon à pouvoir bien refléter l'actualité locale, régionale et nationale selon les priorités propres à chaque région.
Toujours en radio, nous avons lancé cet automne une toute nouvelle émission nationale, L'heure du monde, dont un des mandats importants est de rendre compte de l'actualité partout au pays en s'appuyant sur les ressources journalistiques de nos stations régionales.
En télévision, le Téléjournal de 22 heures continue d'évoluer pour encore mieux rendre compte de l'actualité internationale et de la réalité canadienne. Cette évolution est portée par un vaste chantier touchant l'ensemble de notre approche en information, qui s'inscrit dans la stratégie de transformation et de repositionnement de Radio-Canada.
En terminant, j'aimerais vous parler de l'extraordinaire potentiel du numérique, que nous continuons d'exploiter pour enrichir notre offre aux communautés francophones en milieu minoritaire.
Notre approche régionale multiplateforme nous permet d'être présents sur le Web et en mobilité avec du contenu local et régional ayant une résonance pour les francophones de chaque région du pays. Cette approche connaît d'ailleurs un succès qui continue de croître, puisqu'aujourd'hui, de 30 à 40 p. 100 de la fréquentation de notre site web est attribuable au contenu régional.
Malgré les défis technologiques et financiers qui exercent une pression constante sur notre organisation, nous demeurons fermement engagés, à Radio-Canada, à remplir notre mandat envers les communautés de langues officielles en situation minoritaire.
Avec nos nouvelles licences, notre plan quinquennal et notre stratégie programmes, je suis convaincu que nous avons les outils nécessaires pour respecter nos obligations avec le succès attendu du diffuseur public.
Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
Le sénateur Fortin-Duplessis : Je vous souhaite la bienvenue devant notre comité. Ma question s'adresse à M. Louis Lalande.
Dans son dernier rapport annuel, le commissaire aux langues officielles mentionne que la Société Radio-Canada est l'institution fédérale ayant accumulé le plus grand nombre de plaintes quant à la mise en œuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Dans un premier temps, pouvez-vous nous renseigner sur les moyens que vous comptez prendre afin d'améliorer votre bilan et, dans un deuxième temps, croyez-vous qu'il serait possible de n'obtenir aucune plainte ou y a-t-il un niveau de plainte avec lequel vous seriez satisfaits ou à l'aise?
M. Lalande : Le premier point que j'aimerais clarifier concernant le dernier rapport du commissaire, c'est qu'il faut mettre le nombre de plaintes en perspective avec l'épisode de la réduction de la programmation de Windsor; la très vaste majorité des plaintes, je pense que c'était autour de 90 p. 100, étaient reliées à cet épisode de la réduction de la programmation à Windsor. Cela permet de calibrer les résultats un peu. Si on se compare aux autres organismes dans cette perspective, le nombre de plaintes que Radio-Canada reçoit est quand même assez minime comparativement à Air Canada avec qui on peut faire certaines comparaisons.
Ceci étant dit, cet épisode nous a par ailleurs portés à réfléchir sur les gestes que l'on pose. On a établi effectivement une série de mesures pour redéployer des services à Windsor et cela a été confirmé par la nouvelle condition de licence que le CRTC nous a imposée, soit de reprendre un niveau de 15 heures de programmation locale.
En ce qui concerne les autres plaintes, nous les suivons avec attention. Nous sommes toujours sensibles aux plaintes. Serait-il possible qu'un jour il n'y ait plus de plaintes? J'en douterais, parce que mon expérience avec les communautés francophones en milieu minoritaire fait en sorte qu'il y a toujours un risque. En milieu minoritaire, les gens se sentent toujours un peu à risque et, forcément, un diffuseur public comme Radio-Canada se retrouve un peu comme le paratonnerre de l'ensemble des craintes. Il m'apparaît donc très difficile d'atteindre un bilan neutre concernant les plaintes. C'est un défi de tous les jours, pour nous. C'est un défi que nous avons à cœur, que chacun des employés de Radio-Canada a à cœur. Je vous dirais que, depuis les dernières années, les employés et la direction de Radio-Canada ont fait une prise de conscience très importante pour s'assurer de bien refléter l'ensemble de ces communautés et de ces enjeux à travers nos programmations.
La sénatrice Poirier : Pouvez-vous me dire quel pourcentage des nouvelles du Téléjournal provient de Montréal et de Québec, comparativement au reste du Canada?
Michel Cormier, directeur général de l'information, Services français, CBC/Radio-Canada : Cela tombe bien, nous avons justement fait sortir les chiffres. Je suis heureux de vous rapporter qu'il y a une progression depuis un an. L'an dernier, nous en étions à 9,4 p. 100, alors que nous en sommes à 10,3 p. 100 présentement. Ce sont les chiffres pour les stations régionales de l'extérieur de Montréal. Lorsque nous incluons nos correspondants nationaux, notre pourcentage monte à 13,6 pour l'année 2012-2013. Il s'agit d'une progression importante.
Cependant, je crois que nous devons aller au-delà des chiffres; nous voulons augmenter notre présence, mais également la compréhension dans le reste du pays. Il ne s'agit pas seulement de refléter les régions. Nous avons une nouvelle stratégie qui s'appelle « raconter le pays » qui va au-delà du reflet régional. Cette stratégie comporte plusieurs éléments dont, premièrement, l'ajout de deux reporters nationaux à notre écurie de journalistes — un à Edmonton et un à Moncton. Vu les conditions financières actuelles, ce n'est pas une petite affaire que de créer des postes de journalistes nationaux. Nous y tenons parce que nous voulons nous assurer que l'on peut porter en région des sujets d'intérêt national. Toute la question de la gestion du pétrole, par exemple, de l'économie du pétrole, il est évident que la présence d'un reporter dans l'Ouest peut nous donner une perspective plus intéressante que de simplement faire la couverture du sujet à partir de Montréal ou d'Ottawa d'un point de vue politique.
On peut prendre l'exemple de la réforme de l'assurance-emploi qui a été très déchirante pour les populations de l'Atlantique. Nous avons fait des efforts notoires pour non seulement créer des reportages de là-bas, mais aussi de sortir nos émissions de Montréal pour aller voir ce qui se passe. Le printemps dernier, nous avons fait une émission spéciale de 24/60 à partir de Caraquet. Cette émission a eu un impact immense, parce qu'on analysait le sujet à partir de l'épicentre, si on veut, des contestations et des amendements à cette loi. Lors de cette émission spéciale de deux heures, nous étions en direct de six villes au pays : Fort McMurray, Calgary, Toronto, Montréal, Québec et Caraquet. Voilà le genre d'effort que nous faisons. Il nous est impossible de faire cela toutes les semaines, c'est certain, mais c'est le genre d'engagement que l'on prend. Nous voulons non seulement augmenter le volume de la couverture, mais aussi sa qualité.
La sénatrice Poirier : Pouvez-vous me dire à quelle fréquence vous faites des sondages auprès des communautés du Canada pour prendre le pouls de leur satisfaction?
Patricia Pleszczynska, directrice générale, Services régionaux et ICI Radio-Canada Première, CBC/Radio-Canada : Il ne s'agit pas de sondages, mais nous nous sommes entendus, suite au dépôt de nos conditions de licence, pour changer la forme des consultations avec les communautés à travers le pays. Nous avons déjà commencé. Nous avions testé le modèle dès le printemps dernier, avant même de recevoir nos conditions de licence de la part du CRTC.
La première consultation s'est tenue justement dans la région de Moncton à laquelle prenaient part, mon collègue Michel, naturellement Louis Lalande, vice-président des services français, Marie Côté aussi qui était sur place pour ARTV. Cela nous avait permis justement de rencontrer en deux temps — d'abord, en groupe un peu plus restreint autour d'une table — l'éditorial, les gens des différentes associations, que nous rencontrons d'ailleurs régulièrement parce que cela fait partie du travail de chaque directeur régional que d'entretenir des relations très étroites avec les associations, avec les organismes, avec les gens qui sont concernés et qui sont actifs dans le milieu.
Lors de cette rencontre, il y avait d'abord une table plus restreinte pour connaître les enjeux de ces gens qui s'étaient exprimés auparavant de façon plus individuelle. Par la suite, nous avons tenu une assemblée publique où les gens sont venus en assez grand nombre, incluant des gens du milieu de la production indépendante, qui sont naturellement toujours intéressés par le travail que fait Radio-Canada en région.
Cette première rencontre a eu lieu au printemps dernier; il y en a eu une deuxième cet automne à Windsor, justement, après l'implantation de notre nouvelle programmation dans la région de Windsor. Il y a eu la mise en place d'une émission du matin complète de trois heures diffusée de 6 heures à 9 heures; des bulletins intégrés à partir de la station à 9 heures, 10 heures, 11 heures et 13 heures.
Nous avons rencontré, encore là, en groupes un peu plus restreints, puis une assemblée publique à laquelle près de 300 personnes ont assisté. Toute la communauté active de Windsor s'est présentée et a fait part d'abord de la satisfaction d'avoir été entendue par le CRTC, de la satisfaction aussi d'avoir retrouvé une émission du matin et de son engagement à continuer d'être actif, mais aussi de travailler avec nous pour faciliter la mise en place de contenus qui sont d'intérêt pour ces auditoires et où on a un intérêt particulier pour la jeunesse, pour la relève, pour les jeunes que l'on veut garder au sein d'une communauté francophone.
La sénatrice Poirier : Si j'ai bien compris, le CRTC a imposé ce critère en renouvelant votre licence. Avant ce critère, il n'y avait pas de consultation ou il y en avait moins?
Mme Pleszczynska : Il y en avait déjà. D'ailleurs, nous avions proposé cette condition nous-mêmes pour témoigner de notre bonne volonté, pour mettre sur place un engagement spécifique, dont deux rencontres par année au minimum, en plus de l'assemblée publique annuelle qui se tient toujours dans une région ou une autre du pays. C'est sûr qu'il y avait des consultations au préalable, sauf qu'il n'était pas cédulé de façon officielle à chaque année qu'il y en ait deux, et dans certaines régions aux deux ans.
Par ailleurs, comme je vous mentionnais, chacun de nos directeurs régionaux rencontre de façon régulière la communauté. Je vous dirais qu'il n'y a pas un mois qui se passe sans qu'il y ait une rencontre avec une association par un directeur ou un chef dans une ou l'autre de nos régions, et nous en tenons compte. Nous gardons un bilan de ces rencontres justement pour nous assurer que les enjeux soulevés soient travaillés, soient regardés de près et que nos directeurs et nos chefs soient imputables de donner suite à ces interventions.
La sénatrice Charette-Poulin : Monsieur Lalande, je suis particulièrement honorée de vous accueillir. Dans l'histoire de l'entreprise, je crois qu'il n'y a jamais eu, au poste de vice-président responsable de tous les services français, une personne avec autant d'expérience dans les régions que vous. Je félicite Radio-Canada d'avoir bien choisi.
M. Lalande : Cela fait plaisir à entendre.
La sénatrice Charette-Poulin : Je dois vous dire que j'ai passé près de 25 ans à Radio-Canada, notamment comme vice-présidente de la programmation radio et télé régionale. J'ai quitté en 1992. Comme je le disais plus tôt à Mme Pleszczynska, l'environnement a changé et l'organisation a changé. Alors faites comme si je ne connaissais rien.
M. Lalande : D'accord.
La sénatrice Charette-Poulin : Vous avez dit plus tôt que 30 à 40 p. 100 de la fréquentation du site web de la Société Radio-Canada est attribuable au contenu régional. Ai-je bien compris?
M. Lalande : C'est bien cela.
La sénatrice Charette-Poulin : Est-ce que cela inclut le contenu régional dans toutes les provinces?
M. Lalande : Oui. Au départ, ceux qui ont suivi l'évolution du site web de Radio-Canada sauront que le contenu était plus réseau que régional. C'est vraiment depuis les quatre dernières années que l'on a développé une stratégie Web régionale. Or, ce n'était pas facile dans les conditions dans lesquelles on opérait. En plus d'assurer la continuité des services radio et télé, il fallait absolument offrir une voie Web. Je me rappelle de rencontres dans à peu près chacune des régions où les gens de la communauté demandaient ce qu'on allait faire pour s'assurer de ne pas perdre pied dans cet univers. On voyait que c'était important et c'était une opération assez délicate.
Je suis fier aujourd'hui de constater que, grâce à nos efforts, le contenu régional est là, mais la porte d'entrée se fait par les sites régionaux. C'est là, à mon avis, vraiment une grande réussite et on veut certainement continuer. Toutefois, c'est quelque chose d'assez unique.
Mme Pleszczynska : Si vous allez sur le site de Radio-Canada, il est géo-localisé. Donc, toute personne peut non seulement avoir en tout temps sa porte d'entrée régionale, mais même si sa porte régionale est Ottawa ou Toronto, elle peut choisir de voyager à travers les sites régionaux pour aller chercher l'information régionale. Nous avons mis des ressources additionnelles pour nous assurer que ces sites soient actifs et le reflet vivant, de 6 heures du matin à 19 heures le soir, pour que l'information soit toujours actualisée.
La sénatrice Charette-Poulin : Je trouve les résultats du site web intéressants. Cela donne crédibilité à la philosophie du regretté Pierre Juneau, qui fut président de l'entreprise pendant sept ans. Il nous disait toujours que plus l'entreprise va être enracinée comme un arbre dans les régions, avec une bonne programmation, avec des services qui reflètent la région et qui permet à la région d'être reflétée nationalement et internationalement, plus la Société Radio-Canada aura sa raison d'être au Canada. J'ai entendu M. Juneau répéter cela à maintes reprises. Et j'en suis convaincue, parce que, par exemple, en Ontario, l'enracinement d'un service radio, télé et Web dans sa région, dans sa langue, permet vraiment à une communauté, comme la communauté francophone et francophile en Ontario, de se multiplier et d'aller chercher d'autres membres de la communauté francophone.
J'aimerais mieux connaître quel est aujourd'hui l'organisation de Radio-Canada en Ontario. Par exemple, nous avons une station à Ottawa, mais qui dessert le côté Ontario et le côté Québec. Nous avons une station qui a un mandat assez particulier à Toronto, étant donné que c'est la capitale de l'Ontario. Nous avons à Sudbury, CBON. Combien y a-t-il de réémetteurs à Sudbury pour desservir le Nord de l'Ontario? Je ne me souviens plus.
Mme Pleszczynska : Je ne pourrais pas vous donner le chiffre, mais il y en a plusieurs.
La sénatrice Charette-Poulin : Je pense que c'est 35.
Mme Pleszczynska : Vous le sauriez, parce que vous étiez vous-même à Sudbury et les avez mis en place.
La sénatrice Charette-Poulin : Le site web n'affiche pas le nombre de réémetteurs de toutes les stations nationales. Ce nombre est très important car il démontre le potentiel d'écoute et de visionnement. Si ma mémoire est fidèle, le nombre s'élève à environ 35 dans le Nord de l'Ontario. Pour Windsor, je me demande combien on compte de réémetteurs environ? Le sud constitue quand même une assez grande région.
Mme Pleszczynska : On pourra vous fournir ces chiffres exacts.
La sénatrice Charette-Poulin : Quelle est l'organisation en ce moment?
M. Lalande : Avant de laisser ma collègue répondre, j'aimerais vous dire, entre le moment où vous avez quitté Radio-Canada et aujourd'hui, particulièrement en Ontario, il y a eu des mouvements assez importants. Vous vous rappelez certainement de la fermeture de la station de Toronto.
La sénatrice Charette-Poulin : La fermeture de Toronto?
M. Lalande : Oui, comme station de télévision. On a oublié cet épisode un peu triste où l'ensemble des services de l'Ontario était assumé par la station d'Ottawa. Nous avons, il y a sept ans, récupéré la licence et on a réouvert une station à Toronto.
La sénatrice Charette-Poulin : Il n'y avait plus de Téléjournal à Toronto?
M. Lalande : Il n'y avait plus de Téléjournal à Toronto. Les gens ont oublié ces épisodes difficiles que Radio-Canada a traversés.
Je constate que l'on a amélioré les services en réouvrant la station, en établissant une base solide de télévision à Toronto et en clarifiant le mandat d'Ottawa, celui-ci étant toujours un peu particulier. Ottawa s'occupe de son marché, qui est déjà compliqué car il dessert les villes d'Ottawa et de Gatineau. Le mandat n'est pas simple, mais il s'y concentre. On a clarifié aussi le plan de match radio et télé, ce qui permet d'avoir une meilleure approche.
Je vais laisser ma collègue vous donner de plus amples détails pour ce qui est de l'ensemble de l'Ontario.
Mme Pleszczynska : Comme le disait M. Lalande, nous avons effectivement reçu une nouvelle licence pour la diffusion de la télévision régionale à Toronto, il y a à peine trois ans, si je ne trompe pas.
Dans la région de l'Ontario, il y a deux directions : la première est la direction d'Ottawa-Gatineau, dont le directeur de la station, Marco Dubé, est ici même à Ottawa-Gatineau. La station d'Ottawa-Gatineau diffuse à la radio l'émission du matin, Le midi trente, une émission de retour à la maison, qui est maintenant de trois heures, de 15 heures à 18 heures, et quatre heures de programmation locale, le samedi matin.
Elle diffuse également un ancrage régional d'Espace Musique, le matin du lundi au vendredi, de 8 h 30 à midi. Finalement, elle a une base de programmation nationale dont l'émission Quelle histoire, qui est diffusée du lundi au jeudi, à 14 heures, une émission de télévision qui est tout à fait originale, le concept étant basé sur les archives de Radio-Canada, mais aussi sur le vécu des Canadiens d'un bout à l'autre du pays, dans le passé et le présent.
Cela fait partie des activités de la grande région Ottawa-Gatineau, et c'est naturellement un mandat qui est complexe parce que il est assis entre deux provinces. Un exemple est qu'il devra peut-être traiter, cette année, deux élections provinciales la même saison ou à une saison près. C'est donc une région complexe, très bilingue, où la relation avec CBC/Radio-Canada est aussi très proche.
À Toronto, il y a un autre directeur, Robert Renaud, qui était le directeur de CBC, ici à Ottawa, que nous avons recruté pour qu'il vienne se joindre à notre équipe francophone des services français à partir de Toronto. M. Renaud est responsable des stations de Toronto, de Sudbury et de Windsor.
La sénatrice Charette-Poulin : Vous voulez dire que Sudbury relève maintenant de Toronto?
Mme Pleszczynska : Non. Sudbury relève d'un directeur de l'Ontario.
La sénatrice Charette-Poulin : Mais c'est le modèle anglais que j'ai connu, ce qu'on appelait « the Ontario Region ».
Mme Pleszczynska : C'est-à-dire qu'à Sudbury, il y a un chef des services français...
La sénatrice Charette-Poulin : Oui, mais anciennement, la station radio CBON ainsi que les services de télé qu'il y avait à ce moment-là relevaient directement du réseau français. Alors, je m'aperçois que c'est un gros changement. Si maintenant le Nord de l'Ontario, où réside la plus grande population francophone de l'Ontario, après Ottawa, tout à coup se rapporte à Toronto...
Mme Pleszczynska : C'est-à-dire qu'elle ne se rapporte pas à Toronto, elle se rapporte à un directeur de l'Ontario, qui réside à Toronto, mais qui est un franco-ontarien, justement, de la région de Sudbury, qu'il connaît très bien et où il passe beaucoup de son temps comme gestionnaire.
La sénatrice Charette-Poulin : Je ne voudrais pas personnaliser la structure.
Mme Pleszczynska : Non, mais je vous explique qu'il y a un directeur pour l'Ontario qui s'occupe des trois stations. Ce directeur, tout comme le directeur d'Ottawa-Gatineau, relève de moi, et moi, dans mon rôle de directrice régionale des services régionaux, je suis responsable de toutes les régions, mais directement du travail des directeurs dans toutes nos régions, que ce soit dans l'Atlantique, au Québec, dans la région d'Ottawa-Gatineau, l'Ontario ou l'Ouest.
La sénatrice Charette-Poulin : Madame Pleszczynska, c'est un gros changement dans la structure administrative de Radio-Canada.
M. Lalande : Je vais vous remettre le tout en perspective. Il y a quatre ans, l'ensemble des services de l'Ontario était concentré à Ottawa. C'était aussi simple que cela. L'ensemble des services, donc il y avait moins de déploiements, moins d'organisation et ces gens relevaient d'une direction de la télévision. Maintenant, Mme Pleszczynska est à la table des services français, au conseil de la haute direction des services français, avec l'ensemble des directions régionales, qui sont effectivement celle de l'Ontario, celle de l'Ouest, celle de l'Acadie et celle du Québec.
Je peux vous affirmer que depuis ce moment, les gens de l'Ontario et ceux du Nord sentent vraiment qu'il y a un intérêt important de Radio-Canada dans son déploiement, dans sa présence. La quantité d'activités que nous avons faites dans le Nord de l'Ontario, en faisant des émissions, en allant rencontrer les différentes communautés, démontrent la pertinence de cette action. Sans compter l'ensemble des ressources de CBC qu'on peut activer pour s'assurer d'améliorer le service. Parce que vous savez que le service n'est pas facile à cause du territoire, et ce n'est jamais facile de concilier les intérêts du Nord, du Sud et du Centre de l'Ontario.
Donc là-dessus, je peux vous dire que quand je me déplace, les commentaires que l'on reçoit sont plutôt positifs.
La sénatrice Chaput : Ma question touche la variable que Radio-Canada utilise pour mesurer le potentiel de l'auditoire francophone. On nous dit que la variable que Radio-Canada utilise est la langue maternelle, c'est-à-dire la première langue apprise et encore comprise.
Je ne comprends pas pourquoi Radio-Canada utilise cette variable. Pourquoi est-ce que Radio-Canada met de côté un bassin important de Canadiens et Canadiennes à l'extérieur du Québec, qui sont capables de communiquer en français?
Pourquoi est-ce que l'auditoire, pour notre télévision francophone canadienne, n'inclut-elle pas tous les Canadiens qui parlent français?
Mme Pleszczynska : Bien sûr qu'il l'inclut. Bien que les chiffres officiels de Statistique Canada soient ceux basés sur certaines définitions, le fait qu'il y ait au-dessus de deux millions de personnes qui sont capables de comprendre le français n'est qu'un avantage pour notre service et n'est qu'un ajout au potentiel de personnes dont les histoires peuvent être intéressantes et peuvent être entendues en français à travers le pays.
Il est certain que nous utilisons cet avantage. Il n'est pas question de dire que notre service ne vise que les gens dont la langue française est la langue maternelle parlée à la maison. Nous utilisons naturellement les chiffres de Statistique Canada, comme je présume que c'est ce que tous les autres organismes font aussi, mais le fait qu'il y ait deux millions et plus de locuteurs francophones n'est pas quelque chose que nous évitons ou qui n'entre pas dans notre stratégie. Parce que naturellement, tous les locuteurs francophones peuvent se retrouver à l'antenne pour enrichir la discussion, pour rapporter leurs histoires pour, comme le disait M. Cormier, que l'on puisse raconter le pays en français et non seulement refléter les communautés elles-mêmes. C'est un avantage extraordinaire et cela ajoute à la richesse de notre programmation.
La sénatrice Chaput : Lorsque Radio-Canada a à répartir ses ressources, que ce soit dans le domaine financier ou humain, lequel de ces critères utilise-t-il pour la répartition des ressources? Est-ce qu'on prend en considération le francophone comme étant la première langue apprise et encore comprise ou prend-on en considération tous les Canadiens et Canadiennes qui sont capables de communiquer en français?
Parce qu'on le sait très bien, en affaires, quand on parle de nombres, ce sont les nombres qui justifient les moyens et l'argent qui est dépensé pour ces programmes. Quels critères utilisez-vous lorsque vous faites la répartition des ressources?
M. Lalande : Vous savez très bien que si on ne répartissait les ressources qu'en fonction du nombre de francophones, peu importe s'ils sont de langue maternelle ou pas, on n'arriverait pas aux chiffres qu'on a aujourd'hui.
Je pense donc que la répartition est faite en fonction du mandat qu'on a de desservir les populations qui sont souvent très petites avec des ressources importantes, à travers un pays qui est vaste et complexe.
Alors là-dessus, je peux vous rassurer que le partage est un partage qui va bien au-delà de quelques définitions d'un locuteur francophone.
La sénatrice Champagne : Comme vous pouvez l'imaginer, dans le cadre des travaux de ce comité — et j'en fais partie depuis l'automne 2005 —, nous avons eu des contacts avec à peu près toutes les communautés en situation minoritaire de notre grand pays.
Une chose en particulier m'a beaucoup dérangée. Il y a quelque temps, nous recevions des gens du Grand Nord canadien. Ils nous ont dit : la télévision et le satellite fonctionnent chez nous, mais on oublie cela. Donc, notre lien avec le reste du pays, c'est la radio; notre lien, c'est la CBC.
J'ai répondu en leur demandant : « Mais vous n'avez rien en français? »
Ils m'ont répondu : « Ah, oui, madame. Nous avons le vendredi soir, de 23 heures à minuit, où le réseau anglais de Radio-Canada nous donne une heure en français. »
On parle d'un certain nombre de francophones. Ce n'est pas Montréal en ville, mais il y en a quand même assez pour qu'il se forme une association qui vienne nous faire part de leurs regrets.
Se parle-t-on si peu entre la CBC et la SRC que tout ce qu'on donne à ces francophones du Grand Nord, c'est une demi-heure ou une heure en français le vendredi à 23 heures? Faites-vous, dans ce cas, votre travail dans le cadre des langues officielles du Canada?
M. Lalande : Nous allons vous décrire, dans un premier temps, la situation qui existe dans le Nord.
Mme Pleszczynska : Parlons d'abord de la population du Yukon. Cette population, bien qu'elle est petite, est probablement la population la plus grande en termes de francophones ou de parlants français qui demeure dans le Nord, sauf naturellement dans le Nord du Québec. Cette population est desservie, en radio et en télévision, par notre programmation de la Colombie-Britannique en provenance de Vancouver. Il y a donc un service. Nous avons une journaliste basée à Whitehorse et dont le travail est justement de témoigner non seulement de ce qui se passe dans cette région, mais de s'assurer que si quelque chose peut se rendre au réseau, que l'information puisse circuler.
On parlait des sites régionaux sur le site web de la Colombie-Britannique. Nous avons la distinction pour le Yukon. Le Yukon a aussi sa portion de site où l'information qui concerne cette population est spécifique.
Nous avons par ailleurs entrepris, il y a quelques mois, une conversation avec l'équipe de la CBC qui est responsable de la programmation pour le Nord. L'équipe de CBC North est responsable de la programmation pour le Nord en français et en anglais.
La sénatrice Champagne : Une heure par semaine, à 23 heures, pour les parents qui veulent que leurs enfants entendent du français à la radio, ce n'est pas un choix idéal.
Mme Pleszczynska : Je comprends. Cette émission est spécifique aux enjeux de certaines communautés. Cela ne veut pas dire que c'est la seule programmation qu'ils entendent en français. Ils peuvent recevoir de la programmation à partir d'Edmonton ou de la Saskatchewan ou de notre station à Vancouver.
J'allais vous expliquer que nous avons entrepris, il y a quelques mois, une discussion avec CBC North pour revoir le mandat de Boréal hebdo et le clarifier. Nous cherchons à clarifier si le rôle de cette émission est le reflet du Nord, le reflet des francophones du Nord ou le reflet de la vie autochtone du Nord. Il s'agit alors de bien clarifier le rôle de cette émission. Selon le mandat sur lequel nous allons nous entendre, il suffira de le diffuser à partir de nos stations régionales, pour que ces histoires et ces réalités soient entendues non seulement dans les communautés elles-mêmes, mais aussi dans d'autres stations, que ce soit à Edmonton, Val-d'Or, Rouyn, Sept-Îles et certaines de nos régions québécoises aussi où il y a des affinités dans les stations nordiques, dans nos communautés nordiques, entre les enjeux qui se passent d'une région à l'autre.
La sénatrice Champagne : Vous allez avoir de la difficulté à me convaincre que le mieux que SRC et CBC ont pu trouver pour donner du français aux gens du Grand Nord, c'est de 23 heures à minuit le vendredi soir. Comme le disait ma grand-mère, vous êtes mieux de vous lever de bonne heure le matin, car vous ne me convaincrez pas comme ça.
Mme Pleszczynska : On se méprend peut-être sur l'ampleur du service. Cette émission est spécifique aux enjeux du Nord. Cela ne veut pas dire que c'est le seul service en français que ces populations reçoivent. Elles reçoivent l'antenne de Radio-Canada diffusée sur CBC North par satellite. Ils reçoivent donc la programmation nationale de Radio- Canada par satellite dans ces communautés. Cette émission spécifique parle des enjeux du Nord spécifiquement. Elle est donc destinée à cet auditoire plutôt qu'un service qui inclut des émissions nationales; car ce service, ils le reçoivent.
La sénatrice Champagne : J'aurais une deuxième question. Elle s'adresse à M. Cormier. Je fais partie de ces gens qui se promènent un peu partout dans tout le Canada. Même assise chez moi, dans ma petite maison à Saint-Hyacinthe, je regarde les nouvelles.
J'aimerais comprendre pourquoi le bulletin de nouvelles, le Téléjournal, et celui de la CBC ou de Newsworld, c'est comme si on ne vivait pas dans le même pays. Ce n'est pas les mêmes nouvelles, c'est totalement autre chose.
Si je suis à l'étranger, si j'essaie d'aller sur mon ordinateur pour voir ce qui se passe chez nous, les nouvelles qu'on me donne au Téléjournal et à la CBC parleront-elles du même pays, d'après vous, monsieur Cormier?
M. Cormier : Elles parlent à deux auditoires différents. Pour les grosses histoires de portée nationale, ce qui sort du Parlement fédéral, ce sont les mêmes histoires.
Si vous regardez la CBC, il n'y a pas beaucoup de reportages sur le Québec, sur le fait francophone au pays.
La sénatrice Champagne : De l'autre côté, c'est le contraire. On n'a que des nouvelles sur le Québec.
M. Cormier : On est en train d'améliorer les scores. Je vous ai dit qu'on était rendus à 13,5 p. 100. Le score qu'on nous réclamait, c'était 15. C'était le chiffre un peu sur lequel les communautés s'engageaient aussi.
Nous avons aussi fait des efforts sur un autre plan. On fait une première édition du Téléjournal, animée par Céline Galipeau à 21 heures sur RDI, qui a le mandat de refléter davantage les régions. Le bulletin est plus long que l'édition nationale de 22 heures, qui se concentre beaucoup sur le national et l'international.
La sénatrice Champagne : Céline Galipeau nous a dit ouvertement à Winnipeg que, de toute façon, la francophonie au Manitoba, il fallait oublier cela. C'étaient les paroles de votre annonceure maison.
M. Cormier : Je vous dis ce que nous sommes en train de faire. Il y a un bulletin qui s'appelle Le National aussi, qui était diffusé en fin de soirée, qu'on a déplacé maintenant à l'heure du souper sur RDI, qui est un résumé des nouvelles de tout le pays. Il apporte beaucoup de reportages régionaux.
Il y a donc une offre qui est fort supérieure à ce qu'elle était il y a même un an. C'est le genre d'efforts que l'on fait. Il est évident que l'agenda de la CBC sera différent du nôtre. Sur la crise du maire Ford, évidemment, ils commençaient le bulletin avec parfois 15 minutes de nouvelles à ce sujet.
La sénatrice Champagne : On peut aller aux États-Unis et ils nous le donnent aussi.
M. Cormier : Oui, parce que l'auditoire principal est anglophone et on reflète aussi ces préoccupations.
Il est certain, par exemple, que depuis un an on couvre la commission Charbonneau. C'est le journalisme de Radio- Canada qui a mis à jour ce problème de corruption au Québec. Il serait donc difficile d'ignorer ce genre de problème.
Ce qu'on essaie de faire aussi, comme je le dis, c'est de porter en région des enjeux nationaux. On diffuse aussi sur RDI des spéciaux qui sont produits en région, que l'on rediffuse sur les ondes de RDI pour exposer tout le pays à ce genre de problématique. On sait que le gaz de schiste au Nouveau-Brunswick est un enjeu. Sénatrice Poirier, vous connaissez bien, dans votre région, ce que cela représente.
L'exploitation du gaz de schiste au Nouveau-Brunswick — madame Poirier, vous êtes au courant de la forte opposition à l'exploitation des gaz de schiste dans votre région —, a été énormément couverte à partir de cette problématique différente des autres provinces. À Moncton, nous avons produit récemment une émission spéciale d'une heure sur le gaz de schiste, qui a été rediffusée sur RDI. On a fait la même chose pour la question du pétrole dans le Bas-Saint-Laurent. Tous ces efforts ont été déployés, mais il est certain que si on ne mesure ce qu'on fait qu'à la lumière du Téléjournal de 22 heures — où environ 32 minutes de nouvelles sont diffusées incluant le reflet international, de plus en plus, et excluant la publicité —, c'est peut-être pas une mesure tout à fait représentative de tout ce qu'on produit sur les régions et tout ce qu'on reflète aussi.
La sénatrice Champagne : D'une chaîne à l'autre, dernièrement, beaucoup de temps d'antenne a été consacré aux ennuis de deux ou trois sénateurs qui se sont mis les pieds dans les plats. On en a parlé autant en français qu'en anglais. On ne parlait que de cela, à un point tel que nous avions l'impression d'être tous peints de la même couleur. Cela se passait autant au Téléjournal qu'à CBC/Radio-Canada.
M. Lalande : J'aimerais ajouter quelque chose : je crois qu'il faut regarder le travail et l'amélioration constatés depuis certainement la dernière année, et je dirais même depuis les deux dernières années. Encore la semaine dernière, une émission du Téléjournal a reflété de façon assez exemplaire les grands enjeux et la perspective du pays du point de vue international. L'information quotidienne, c'est quelque chose qu'il faut surveiller tous les jours. Les journées vont vite et les années passent vite. Je peux donc vous dire et vous assurer que, dans la dernière année, des mesures précises ont été prises. Les commentaires et les opinions reçues de différents groupes nous ont fait réfléchir et nous avons pris un certain nombre de mesures pour améliorer les choses, et particulièrement au Téléjournal. Je tenais à vous le rappeler, parce que cela se passe tous les jours.
La sénatrice Chaput : Pour faire suite aux questions de la sénatrice Champagne, monsieur Cormier, vous avez mentionné des « mesures de représentativité »; qu'est-ce que c'est, pour vous, des « mesures de représentativité »? J'ai l'impression que la signification que je donne à cette expression pourrait être différente de la vôtre.
M. Cormier : Je peux réitérer un petit peu la vision que nous avons pour la couverture nationale que nous sommes à mettre en place. Je vous rappelle que nous avons ajouté deux reporters nationaux dans l'Ouest afin d'améliorer la perspective de cette région; sur des enjeux comme la charte des valeurs québécoises, par exemple, sujet pour lequel nous avons consacré beaucoup de couvertures également, nous nous sommes assurés d'avoir une perspective beaucoup plus large que seulement celle des Québécois, nous sommes allés dans l'Ouest voir ce que les gens pensaient, en Ontario et à l'extérieur du pays aussi, pour voir comment des pays comme la France et la Grande-Bretagne traitent de tels enjeux. L'idée, c'est de tenter de situer les enjeux dans leur contexte et de voir comment les francophones de l'extérieur du Québec composent avec certaines réalités.
J'étais au Manitoba, cet automne. On sait qu'au collège Saint-Boniface, près de la moitié des étudiants sont des étrangers. L'une des stratégies de survie de la communauté francophone au Manitoba, c'est l'immigration. C'est tout un changement pour cette communauté et cela les éclaire beaucoup de connaître le débat qu'il y a au Québec aujourd'hui sur la question de l'intégration des immigrants. Dans ce sens, c'est la perspective qu'on essaie de donner.
Quand je dis « raconter le pays » et porter en région des enjeux qui sont d'importance nationale, c'est l'un des exemples de ce qu'on est en train de faire. On n'est peut-être pas rendu aussi loin qu'on le voudrait, mais c'est l'approche qu'on a développée et qui va continuer à se développer au cours des prochaines années.
La présidente : J'aimerais poser une question complémentaire à la première question de la sénatrice Champagne. C'est par rapport au signal radiophonique dans le Parc national de Jasper. Je viens d'Edmonton et je sais que le signal de Radio-Canada Edmonton ne rejoint pas les gens au Parc national de Jasper. Depuis de nombreuses années, les citoyens de ces régions demandent des services. Quelles mesures prendrez-vous pour régler ce problème?
M. Lalande : Je n'ai pas besoin de vous rappeler la géographie particulière du pays et ses enjeux et difficultés. La question de la disponibilité de nos services radio a été grandement améliorée en 1974, lorsque le gouvernement a octroyé un financement spécial à Radio-Canada pour augmenter le rayonnement dans les très petites communautés. À cette époque-là, le gouvernement a injecté 62 millions de dollars pour améliorer les émetteurs et les réémetteurs dans le parc, pour s'assurer que, dans les plus petites communautés, mais aussi dans des lieux géographiques extrêmement difficiles à rejoindre, entre autres les endroits montagneux, s'assurer qu'un service minimal soit offert. Bien sûr, cela fait déjà pas mal d'années et l'infrastructure a vieilli. On est pris avec une infrastructure qui a vieilli, qu'on doit remplacer et on doit faire face à des choix douloureux. Nous devons faire des choix au fur et à mesure de l'évolution des années et du budget en capital, mais ce sont des choix extrêmement douloureux et auxquels nous sommes confrontés chaque année.
Le choix d'offrir un service sur la bande FM — parce qu'on a encore des services offerts en bande AM dans de grandes villes qui desservent de larges populations francophones — est une tâche douloureuse. Jasper fait partie d'un certain nombre d'endroits où on souhaiterait pouvoir installer un émetteur, mais pour les raisons que j'explique, il y a régulièrement d'autres priorités qui viennent faire en sorte que cet émetteur ne peut pas leur être fourni vu la densité de la population à desservir et le coût. C'est une situation réelle et déplorable, mais elle existe.
Je rappelle que le financement spécial dont nous avons bénéficié à l'époque était quand même un investissement majeur de la part du gouvernement, mais 40 ans plus tard, il faut bien constater que l'on n'a pas les moyens d'entretenir ces émetteurs et on fait face à un problème et un défi beaucoup plus grands que ce qu'il a été. C'est un défi que l'on affronte étape par étape.
La présidente : Je sais qu'il y a d'autres sénateurs qui veulent poser des questions, cependant je prends une seconde pour vous mentionner que le signal radiophonique en anglais est là. Voilà une situation où les francophones ne reçoivent pas un service de qualité égale à celui des anglophones.
M. Lalande : C'est une réalité que dans certaines communautés, le service n'est pas égal. C'est une réalité. La loi spécifie d'ailleurs que le service doit être égal dans la mesure des moyens, dans la mesure du possible.
Le sénateur Rivard : Madame la présidente, vous ne me croirez peut-être pas, mais vous venez de poser exactement la question que j'allais poser, et je vous explique pourquoi. Il y a quelques semaines, j'ai assisté au Congrès des instituteurs canadiens qui se tenait ici, à Ottawa. Mon voisin de table était un professeur de français langue seconde de Jasper. Il m'a raconté comment c'était difficile pour ses élèves d'améliorer leur français, car ils ne sont desservis ni par la télévision ni par la radio en français. J'ai toujours été convaincu que le mandat de Radio-Canada obligeait la diffusion soit de la radio soit de la télévision dans les deux langues partout au Canada.
Je ne parlerai pas du Yukon, de l'extrémité du pays, mais j'étais surpris de l'entendre dire qu'à Jasper, il ne pouvait entendre aucun mot de français via Radio-Canada. Vous confirmez que c'est bel et bien la situation?
M. Lalande : Oui, c'est bien le cas. Il y a quelques endroits au pays, mais ce sont de micro endroits. Comme je le dis, c'est un défi qui est réel.
Le sénateur Rivard : Cela m'amène à mon autre question : sur quels critères vous fondez-vous pour mesurer l'atteinte des objectifs de Radio-Canada en matière de langues officielles? Quels sont les critères pour nous dire que ce soir, vous avez atteint vos objectifs? Comment pouvez-vous nous dire que vous remplissez votre mandat? Est-ce que vous faites des sondages? De quelle façon pouvez-vous nous démontrer ce soir que vous atteignez vos objectifs?
M. Lalande : Premièrement, je vous dirais que la disponibilité à travers le pays du service radio ou télé est très large. Elle n'est pas à 100 p. 100, et il faut être franc; je ne pense pas que 100 p. 100 soit atteignable. On vise toujours à s'améliorer, c'est ce qu'on fait. On est quelque part entre 98 et 100 p. 100. Mais la portion du petit 2 p. 100 restant comprend des communautés de 150, 200 parlants français dans une région extrêmement difficile à rejoindre. Donc beaucoup d'efforts sont faits pour s'assurer de toujours garder et d'améliorer la situation.
Deuxièmement, la présence dans les régions au pays, la présence sur le terrain, avec l'ensemble des effectifs de Radio-Canada qui sont déployés partout au pays. Bien sûr, on ne peut pas être partout, mais nous sommes présents dans chaque province. Il y a des principes qui nous guident en disant qu'une station va être dans la capitale. Quand on est dans une province, on s'installe dans une capitale parce que même si la population francophone est peut-être plus élevée ailleurs que dans la capitale, on se dit qu'en étant dans la capitale, on peut plus rayonner et être près de l'ensemble des intérêts de cette population.
Troisièmement, je vous dirais la diversité et le contact que l'ensemble de ce personnel a dans ses intérêts, dans ses interventions, dans ses consultations. Parce que comme Mme Pleszczynska l'a dit, l'implication du personnel de Radio- Canada — et pas seulement de la direction — à travers les différents endroits où ils sont déployés fait en sorte qu'on a une sensibilité et un devoir de faire tout ce qui est possible dans la mesure de nos moyens, et vous savez que les moyens évoluent.
C'est pour cette raison que nous sommes très heureux d'avoir eu à passer à travers le renouvellement de nos licences. J'insiste sur une chose là-dessus : pour toutes sortes de raisons, Radio-Canada a été, pendant plusieurs années, sans avoir à retourner devant le CRTC. On est content : l'automne dernier, on a eu l'occasion de faire cet échange avec le CRTC qui a pris en considération l'ensemble des éléments et qui a aussi pris en considération l'ensemble des responsabilités. Il a entendu 8 000 interventions. Il faut saluer le temps que le CRTC a mis à écouter les gens et à prendre en considération l'ensemble de ces éléments pour s'assurer de clarifier le cadre dans lequel Radio-Canada devait opérer, et avec les résultats que l'on connaît, avec de nouvelles conditions de licence avec lesquelles on est tout à fait en accord.
Je peux juste vous assurer que s'il y a une chose qui nous tient à cœur, c'est bien sûr de respecter notre mandat, mais c'est aussi de s'assurer d'offrir des services adéquats à l'ensemble de la population.
Mme Pleszczynska : J'ajouterais peut-être que la preuve que notre mandat vis-à-vis les langues officielles nous tient à cœur, c'est qu'en regardant le nombre de stations à travers le pays, on s'aperçoit que 11 des 21 stations de radio et 7 des 13 centres de production de télévision sont en milieu minoritaire. Cela représente donc largement plus que la population francophone. Et comme le disait M. Lalande, ce n'est pas en fonction des populations, mais en fonction de la représentativité à travers le pays qu'on a installé nos stations et mis en place nos émissions.
Le sénateur Rivard : Le fait que Statistique Canada démontre qu'il y a une augmentation des francophones ou des personnes bilingues dans certaines régions dites éloignées peut influencer votre décision. En fait, est-ce que Statistique Canada fait partie des outils que vous avez pour établir votre réseau ou l'agrandir au besoin?
M. Lalande : Certainement. Les ressources fluctuent, il y a des ajustements à faire. M. Cormier parlait de l'ajout de deux correspondants nationaux. Je voudrais préciser qu'il y avait déjà des correspondants nationaux. On en a ajouté deux parce qu'on sentait qu'il y avait un besoin. Mais ce sont des gens qui ont le mandat spécifique de traiter d'intérêts nationaux, mais pas avec une perspective du Québec, mais bien avec une perspective de l'endroit où ils sont basés. Cela complète les autres correspondants que nous avons à Vancouver, à Toronto, en Acadie et en Ontario. Donc là-dessus, il y a une fluctuation; même si elle n'est pas toujours apparente, ce sont des données qui fluctuent chaque année en fonction des mouvements qui se font au sein de la société.
La présidente : Nous allons commencer un deuxième tour. Je vous demanderais d'être très brefs dans vos questions et dans vos réponses. Nous avons à peu près 15 minutes, et cinq sénateurs veulent poser des questions.
Le sénateur Fortin-Duplessis : Merci, madame la présidente. Vous avez touché un peu ce sujet dans votre présentation tout à l'heure. Je sais que vos licences ont été renouvelées récemment en 2013, et nous retrouvons, dans la décision du CRTC, des conditions concernant, entre autres, la consultation avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Pouvez-vous nous dire si vous avez adapté votre stratégie de 2015 Partout, Pour tous en tenant compte de ces nouvelles conditions imposées par le CRTC ou bien vous avez préparé votre stratégie avant d'avoir la décision du CRTC?
M. Lalande : Avant la décision du CRTC, comme Mme Pleszczynska l'a mentionné, on avait différents mécanismes de consultation. Je peux vous dire qu'on est en consultation à peu près continue par l'entremise de nos directions régionales, mais aussi par l'entremise des rencontres que nous faisons régulièrement à travers le pays, soit des rencontres plus privées avec des groupes plus petits, ou avec des assemblées plus larges.
Donc ces mécanismes existaient et bien sûr, quand le développement de la Stratégie 2015 s'est fait, on s'est beaucoup alimenté de ces rencontres. Ce qui change c'est qu'avec nos nouvelles licences, nous avons une obligation de codifier de façon un peu plus claire ces rencontres et on va la mettre en place. C'est d'ailleurs une des suggestions que nous avions faites au CRTC parce qu'on voyait bien qu'il y avait quelque chose qui clochait dans l'ensemble des mécanismes. Cela ne semblait pas être satisfaisant, on ne semblait pas se comprendre. On s'est dit qu'on était pour proposer un nouveau mécanisme et voir comment on pouvait le faire vivre. C'est ce qu'on a commencé à faire.
On va poursuivre ce dialogue constant qui est notre meilleure source, je dirais, pour s'assurer que les intérêts soient bien captés et bien reflétés dans l'évolution du mandat de Radio-Canada.
Mme Pleszczynska : Nous sommes d'ailleurs régulièrement en conversation, au-delà des rencontres régionales, avec les associations, que ce soit la FCFA, la FCCF ou les associations provinciales. Nous avons régulièrement des rencontres, soit au téléphone ou en personne. Nous faisons des représentations lorsqu'il y a une assemblée générale de ces institutions. Nous sommes régulièrement en contact avec les associations et avec les populations, soit en groupes plus restreints ou en assemblée générale.
Le sénateur Fortin-Duplessis : J'aurais une petite question par rapport à la déclaration que vous avez faite à la page 4.
C'est la dernière phrase du premier paragraphe qui dit ceci :
Nous avons donc absorbé une partie de la perte de financement dans d'autres secteurs de Radio-Canada.
Est-ce que cela veut dire que l'argent que vous avez pensé donner à la radio soit francophone ou anglophone en milieu minoritaire a nui à votre programmation régionale, notamment dans des communautés de langue officielle en milieu minoritaire? Cela se reflète-t-il aussi dans vos conditions de licence du CRTC?
M. Lalande : Premièrement, cela n'a certainement pas nui à la programmation régionale, cela l'a renforcée. C'est cela qui a permis de maintenir la programmation de nouvelles sept jours sur sept dans chaque station. C'est quelque chose qui n'existait pas avant. Il y a un déplacement de fonds qui ne provient pas du budget régional, mais d'autres endroits de Radio-Canada. Il y a eu un déplacement assez important. On parle de plusieurs millions de dollars pour s'assurer de maintenir ce service.
Le sénateur Fortin-Duplessis : Je croyais que c'était le contraire, que vous aviez pris de ces fonds pour pallier des pertes ailleurs. C'est le contraire.
M. Lalande : Ce n'est pas tout le monde qui a applaudi à l'intérieur de l'entreprise. Quand on fait des gestes comme ceux-là, forcément, des tensions se produisent. Pour nous, il était important d'affirmer ce volet de la Stratégie 2015, et de le maintenir quelles que soient les difficultés qu'on rencontrait. Et vous savez combien on en a rencontré avec la perte du FAPL et le Plan de réduction du déficit.
La sénatrice Charette-Poulin : J'ai deux questions. Madame Pleszczynska, si j'ai bien compris, vous avez dit qu'il y avait 21 stations de radio francophones au Canada?
Mme Pleszczynska : C'est cela.
La sénatrice Charette-Poulin : Quelles sont-elles en partant de l'Est? On va commencer par l'Est puisque M. Cormier vient de cette région.
Mme Pleszczynska : L'Île-du-Prince-Édouard, Halifax, Moncton, Matane avec un bureau à Gaspé, Rimouski, Sept- Îles, Québec, Saguenay, Trois-Rivières, Estrie, Montréal, Rouyn, Ottawa-Gatineau, Toronto, Sudbury, Windsor, Winnipeg, Regina, Edmonton et Vancouver.
La sénatrice Charette-Poulin : Je vous pose une question à titre de responsable de ICI Radio-Canada Première. Combien d'heures par semaine, diffusées nationalement, sont produites par les stations régionales?
Mme Pleszczynska : Sur la première chaîne, nous avons cinq heures de programmation nationale produites à partir de Québec. L'émission Bien dans son assiette diffusée du lundi au jeudi et une heure le samedi en reprise. C'est cette émission qui est produite à l'extérieur de Montréal pour le moment.
La sénatrice Charette-Poulin : C'est seulement cinq heures par semaine avec 21 stations régionales?
Mme Pleszczynska : Le rôle premier des stations régionales n'est pas seulement de produire une émission du matin — dans la plupart des cas, c'est une émission du matin et une émission de l'après-midi, mais pas partout. Dans certaines stations, c'est uniquement une émission du matin, et dans une station au Québec, c'est seulement une émission complète de l'après-midi avec une heure le matin —, mais de produire des bulletins de nouvelles, du contenu d'information qui puisse alimenter nos radiojournaux nationaux, qui puisse fournir du contenu à nos émissions nationales, mais elles ne sont pas elles-mêmes des centres de production, parce que ce sont de petites stations avec des ressources qui sont vraiment dédiées à la programmation de service, de proximité locale.
Seulement trois stations ont suffisamment d'ampleur pour être vraiment des centres de production. Il s'agit de Moncton, Québec et Ottawa. Dans le cas de Québec et d'Ottawa, il y a de la production radio et télévision qui se fait pour l'ensemble du réseau.
La sénatrice Poirier : Je veux revenir à la consultation pour quelques minutes. Quand vous allez dans une région pour faire des consultations, comme que vous l'avez fait à Moncton dernièrement, les gens que vous rencontrez sont-ils invités par vous ou par un avis public? De quelle manière cela se fait-il?
Mme Pleszczynska : On va en parler en ondes, naturellement, mais on va lancer une invitation au public. Normalement, il y a aussi des avis publiés dans les journaux locaux, parce qu'on veut s'assurer que les gens soient au courant.
La sénatrice Poirier : Ce ne sont pas seulement des organisations francophones comme SANB — la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick—ou autres?
Mme Pleszczynska : Pas du tout.
La sénatrice Poirier : Pouvez-vous me parler de la consultation de Moncton? Quels étaient les commentaires négatifs ou positifs qui sont ressortis de la consultation? Quelles étaient les craintes?
Mme Pleszczynska : Certaines des craintes étaient en lien avec la production indépendante. Certains de nos producteurs voulaient savoir de quelle façon Radio-Canada pourrait continuer de maintenir un investissement dans ses productions. Justement, on était dans un contexte où on venait d'avoir la réponse du CRTC concernant la FAPL. Bien entendu, on a dû laisser tomber des avantages du fonds dédié aux régions et donc il y avait moins de productions indépendantes qu'on pouvait faire en région. Les producteurs étaient inquiets. On a eu une conversation très intéressante avec eux. Ils ont mieux compris le rôle d'ARTV aussi comme diffuseur culturel et du potentiel de contenu pour ARTV. Cela a été un des enjeux discutés.
Il y a eu aussi une discussion sur le rôle de Radio-Canada en Acadie quant aux enjeux acadiens. Est-ce que Radio- Canada en Acadie a un rôle de protection des institutions ou de journalisme à jouer? Cette discussion a été animée et intéressante.
La sénatrice Poirier : Merci beaucoup.
La sénatrice Chaput : Peut-être que ma question ne nécessite même pas de réponse, mais c'est quelque chose que je veux partager avec vous.
Vous dites que vous êtes indépendants en matière de programmation et que vous n'êtes pas assujettis à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Nous savons tous que, présentement, le commissaire aux langues officielles dit une chose, que vous dites autre chose et que cela sera tranché devant la cour.
Encore une fois, je ne comprends pas. Voici pourquoi : quand vous lisez le vocabulaire de la partie VII, il parle de mesures positives qui ne sont pas définies. Alors vous auriez, si vous voulez, seulement à reconnaître que vous avez une responsabilité. Vous auriez le droit de développer vos propres mesures positives d'après ce que les communautés ont demandé et qu'elles demandent par l'entremise des consultations. À quoi est-ce que cela nuirait à votre indépendance puisque vous auriez le choix de développer vos propres mesures positives à l'intérieur de la partie VII? On ne vous dit pas quoi faire. On vous dit tout simplement de faire quelque chose et que c'est à vous de choisir ce qui pourrait être fait.
Je vous demanderais de relire attentivement la partie VII et les mesures positives et peut-être de la considérer sous un autre angle, parce que c'est très important pour nous.
M. Lalande : C'est noté.
La sénatrice Champagne : Madame Pleszczynska, je voudrais revenir sur une chose dont vous parliez tout à l'heure. Vous parliez avec beaucoup de fierté d'une nouvelle émission qui s'appelle Quelle histoire!, qui prend ses racines dans les archives de Radio-Canada.
Mme Pleszczynska : Oui.
La sénatrice Champagne : Je vais vous sortir mon dada habituel et vous dire à quel point j'ai été triste et déçue, au moment de la diffusion de toutes les émissions qui visaient à célébrer les anniversaires de Radio-Canada, qu'on n'ait pas vu, nulle part dans tout ce qui s'est fait à Radio-Canada, les Grands Ballets canadiens, avec Mme Chiriaeff, L'heure du concert, Le mariage de Figaro, qui avait gagné un prix Emmy aux États-Unis. Il n'y en a pas eu une. Tout ce qui faisait notre fierté. Il n'y a pas eu cinq minutes dans toutes les émissions particulières pour l'anniversaire.
Je l'ai dit quand je me suis présentée à Radio-Canada. Personne ne m'a prouvé que j'avais tort, parce que j'ai tout revu les CD qui ont été présentés à Radio-Canada. Ni à la radio ni à la télévision. Concernant vos archives en classique, heureusement, je sais que vous en avez gardé quelques-unes parce que Mme Côté a eu la gentillesse de me faire parvenir quelques petits bijoux qui ont rendu notre vie beaucoup plus heureuse.
Cependant, comment avez-vous pu faire toutes ces émissions d'anniversaire sans diffuser de musique classique? Je ne comprends pas. C'était la force de Radio-Canada. Que ce soit L'heure du concert, le jeudi soir, que ce soit les grands théâtres, que ce soit Mme Chiriaeff et ses ballets. Rien, je ne retiens rien. C'est triste. Je pense à tous ces gens que nous ne reverrons plus, et vous aviez la possibilité de nous les faire revoir une fois. Je sais que c'est mon dada, j'y reviens. Notre collègue, le sénateur De Bané, avait le sien, ça c'est le mien. Je trouve cela horrible, et je me permets de vous le dire en grand public.
Mme Pleszczynska : C'est noté, merci.
La présidente : Au nom des membres du comité, je tiens à vous remercier, monsieur Lalande, madame Pleszczynska, monsieur Cormier, d'être venus témoigner devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles.
Je vous demanderais, monsieur Lalande, d'envoyer au comité l'information telle que demandée par la sénatrice Charette-Poulin. Ce serait fort apprécié. Et je vous prie de continuer vos efforts pour vous assurer que la Société Radio-Canada rencontre, et même dépasse, ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles.
(La séance est suspendue.)
(La séance reprend.)
La présidente : Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) est un organisme public indépendant qui réglemente et supervise les systèmes canadiens de la radiodiffusion et des télécommunications. Le rôle du CRTC consiste à superviser l'ensemble des joueurs de l'industrie de la radiodiffusion, incluant CBC/Radio- Canada, et à voir au respect des objectifs inscrits dans la Loi sur la radiodiffusion.
L'objectif de la réunion d'aujourd'hui est d'identifier les éléments des licences imposées au radiodiffuseur public, qui aideront la société à mieux respecter ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles et de la Loi sur la radiodiffusion. À ce titre, nous recevons les témoins du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. Permettez-moi de vous présenter M. Scott Hutton. Suite à sa présentation, les sénateurs auront des questions à poser.
Monsieur Hutton, je vous cède donc la parole et je vous demande de présenter votre équipe.
Scott Hutton, directeur exécutif de la radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes : Honorables sénateurs, bonsoir. J'aimerais vous présenter mes collègues du conseil. M'accompagnant aujourd'hui est la gestionnaire principale des politiques et de la programmation de langue française, Mme Renée Gauthier, et l'analyste principal des politiques, radiodiffusion, M. Guillaume Castonguay.
Le CRTC a comparu devant ce comité l'an dernier. C'est un plaisir de le faire à nouveau afin de vous parler des obligations de CBC/Radio-Canada au titre de la Loi sur les langues officielles et de certains aspects de la Loi sur la radiodiffusion.
En mai dernier, nous avons renouvelé, pour une durée de cinq ans, les licences des services de télévision et de radio de langue française et anglaise de CBC/Radio-Canada. Au moment d'annoncer cette décision, notre président, Jean- Pierre Blais, a indiqué que celle-ci permettrait aux Canadiens de continuer à recevoir les services de qualité auxquels ils s'attendent de leur radiodiffuseur public national. Il a ajouté que dans l'univers médiatique en constante évolution, CBC/Radio-Canada continuera de jouer un rôle clé pour la vitalité de la culture canadienne de langue français et anglaise partout au pays.
J'aimerais amorcer cette présentation en partageant avec vous certains détails de notre décision et en expliquant comment les conditions que nous avons imposées aideront à renforcer le rôle de CBC/Radio-Canada comme service pancanadien qui reflète et sert les besoins des Canadiens dans les deux langues officielles, contribue à la vie culturelle du Canada et joue un rôle précieux dans la vie des enfants.
Afin de nous assurer que CBC/Radio-Canada puisse atteindre ces objectifs, nous avons fixé des seuils minimaux pour les types d'émissions qui sont essentiels aux fins de la mission du radiodiffuseur, les émissions dramatiques, les comédies et les documentaires, entre autres. En particulier, nous avons précisé une cible de sept heures et de neuf heures par semaine pour Radio-Canada et CBC respectivement pour ces émissions d'intérêt national. Nous avons aussi fixé un seuil de 15 heures par semaine pour les émissions pour enfant.
[Traduction]
Comme vous le savez, la Loi sur la radiodiffusion établit certains objectifs pour le système de radiodiffusion canadien et, plus particulièrement, pour les attentes visant CBC/Radio-Canada. La loi indique clairement que CBC/ Radio-Canada « devrait offrir des services de radio et de télévision qui comportent une très large programmation qui renseigne, éclaire et divertit ».
En outre, la loi établit trois critères que doit respecter CBC/Radio-Canada relativement aux langues officielles. Le radiodiffuseur public national doit prévoir des services en anglais et en français qui reflètent les circonstances et les besoins particuliers des communautés de langue officielle et des minorités linguistiques; offrir des services de qualité équivalente dans les deux langues; et présenter un reflet du Canada et de ses régions à ses auditoires nationaux et régionaux, tout en répondant aux besoins particuliers de ces régions.
Lors de nos consultations publiques, nous avons reçu plus de 8 000 observations du public, dont bon nombre ont été transmises dans le cadre de nos consultations en ligne. De nombreux Canadiens ont profité de l'occasion pour nous parler de l'importance du rôle joué par le radiodiffuseur public national relativement à la promotion et au maintien de notre identité nationale.
Nous avons également tenu des audiences publiques de deux semaines à Gatineau. En fait, certains membres du comité, comme les sénatrices Maria Chaput et Andrée Champagne ainsi que l'ancien sénateur Pierre De Bané, ont comparu devant les commissaires pour présenter leurs observations et leurs idées sur l'importance de CBC/Radio- Canada pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire, ou les CLOSM.
De nombreux témoins à ces audiences ont parlé du rôle de CBC/Radio-Canada dans l'appui des CLOSM au Canada. Plus particulièrement, 13 groupes et organismes représentant les CLOSM ont parlé de l'importance de CBC/ Radio-Canada dans la promotion de la vitalité des cultures canadiennes de langue française et de langue anglaise dans l'ensemble du pays.
De telles considérations sont entrées en ligne de compte dans notre décision visant à imposer des conditions de licence — c'est-à-dire des objectifs de rendement précis, plutôt que des attentes générales — que le radiodiffuseur doit respecter. Ces conditions permettront de faire en sorte que CBC/Radio-Canada continue de respecter ses obligations législatives, de répondre aux besoins particuliers des CLOSM et de présenter un horaire de diffusion équilibré et diversifié.
[Français]
Permettez-moi de vous faire part des détails entourant certaines de ces conditions. Pour les stations de télévision conventionnelle, nous avons exigé que CBC/Radio-Canada diffuse des émissions conçues dans les CLOSM et qui reflètent leurs besoins; s'assure que les bulletins de nouvelles et les émissions d'information accordent une place au CLOSM; diffuse à toutes les semaines certaines quantités d'émissions produites dans les CLOSM, y compris les bulletins de nouvelles dans chacune de ses stations.
Pour les stations de télévision spécialisée, nous avons maintenu la distribution obligatoire au service de base numérique des deux services d'information en continu dans les marchés de CLOSM. Nous avons aussi donné instruction à CBC/Radio-Canada de produire des émissions à RDI qui reflètent les préoccupations des principales régions de langue française au Canada et de réserver une partie du budget d'ARTV pour l'achat d'émissions créées par des producteurs indépendants à l'extérieur du Québec.
Pour les services de radio, nous avons demandé à CBC/Radio-Canada de s'assurer que les nouvelles nationales et les émissions d'information de ses réseaux reflètent les CLOSM. De même, nous avons imposé des conditions de licence sévères exigeant que CBEF Windsor, la station locale de la Première Chaîne dans ce marché, diffuse 15 heures d'émission locale francophone par semaine.
Vous vous rappellerez peut-être qu'en 2009, CBC/Radio-Canada a réduit considérablement le contenu de la programmation locale de CBEF. La réaction du public à cette décision ne s'est pas fait attendre. Les auditeurs de la CLOSM de cette région se sont plaints et ont même formé une coalition afin de sauver les émissions francophones de CBEF.
En 2010, le Commissariat aux langues officielles a porté l'affaire en Cour fédérale, alléguant que CBC/Radio- Canada avait contrevenu à ses obligations au titre de la Loi sur les langues officielles, car la société n'avait pas tenu de consultation avec la CLOSM du sud-ouest de l'Ontario et qu'elle avait échoué à évaluer correctement les conséquences de sa décision. Au cours de notre audience sur le renouvellement des licences, les membres de la Coalition pour sauver CBEF nous ont fait part de l'importance de la programmation locale de langue française pour leurs communautés. Ils nous ont dit que, compte tenu de leur proximité avec les États-Unis, ils arrivaient mal à préserver leur identité canadienne, à plus forte raison leur identité francophone en situation minoritaire. Ils nous ont mentionné également que Windsor compte l'un des plus haut taux d'assimilation au Canada côté francophone. C'est avec ces préoccupations en tête que nous avons imposé des conditions de licence sévères pour CBEF Windsor.
[Traduction]
J'ai décrit quelques-unes des conditions de licence très précises que nous avons imposées à CBC/Radio-Canada dans notre décision sur le renouvellement. Il y en a d'autres, de nature plus administrative, qu'il vaut aussi la peine de mentionner. Par exemple, nous avons demandé à CBC/Radio-Canada de tenir des consultations officielles avec les CLOSM dans chaque région du pays, au moins tous les deux ans; de faire rapport au CRTC au sujet des mesures prises par la société pour répondre aux besoins de ces communautés; de fournir au CRTC des données sur le degré de satisfaction des CLOSM quant à la manière dont CBC/Radio-Canada sert leurs intérêts et répond à leurs besoins; et de présenter un rapport annuel au CRTC sur toutes les émissions qui sont produites dans les CLOSM ou qui visent à servir leurs intérêts spéciaux.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, les conditions de licence que le CRTC a imposées à CBC/Radio-Canada sont des mesures positives destinées à faire en sorte que le diffuseur public national continue d'atteindre ses objectifs aux termes de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les langues officielles et qu'il continue d'enrichir la vie des Canadiens dans les CLOSM partout au pays et de protéger leurs identités culturelles distinctes.
Comme le stipule la Loi sur la radiodiffusion, nous avons consulté CBC/Radio-Canada au sujet de ces conditions de licence avant de les publier. Une telle consultation permet à CBC/Radio-Canada de discuter de toute condition qu'elle juge trop exigeante.
[Français]
De façon notable, les conditions que nous avons imposées ont reçu l'appui de groupes des CLOSM, telle la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA). À la suite de notre décision, la fédération a publié un communiqué et félicité le CRTC pour l'imposition de conditions de licence visant à faire en sorte que CBC/Radio-Canada renforce ses consultations avec les CLOSM du Canada et pose des gestes qui tiennent compte de leurs conseils.
De même, je tiens à ajouter que plusieurs groupes des CLOSM prennent part actuellement à notre conversation sur l'avenir du système de télévision. En octobre, nous avons lancé « Parlons télé : une conversation avec les Canadiens » pour donner aux Canadiens l'occasion de nous dire comment ils regardent la télévision, ce qu'ils regardent et s'ils sont suffisamment informés pour faire des choix au regard de la programmation et de trouver des solutions s'ils ne sont pas satisfaits. Nous avons aussi invité les Canadiens à organiser leurs propres activités, que nous appelons des conférences- éclairs. Quelques CLOSM ont déjà tenu ces activités fort dynamiques et d'autres ont prévu faire de même.
Je suis content de mentionner que les gens des CLOSM participent avec enthousiasme aux instances du CRTC, comme celle-ci. Le travail que réalise le groupe de discussion CRTC—CLOSM, que nous avons créé en 2007, en est grandement responsable. Le groupe est un lieu de communication et de collaboration entre le CRTC et les 27 communautés de langue officielle en situation minoritaire faisant partie du groupe. De même, c'est une tribune importante qui permet au CRTC de définir les moyens d'optimiser la participation de ces communautés à ses processus publics et de tenir compte de leur situation au moment de procéder à des analyses et de tenir ses discussions.
Au début de la nouvelle année, nous publierons un rapport qui fera état des propos entendus au cours de la première phase de notre conversation. Je suis convaincu que les membres de ce comité seront intéressés à connaître ce que pensent les Canadiens de leur système de radiodiffusion, de la télévision en particulier, et de la façon dont celle-ci évoluera afin de répondre aux besoins actuels et à venir.
[Traduction]
Au cours de la dernière année, le CRTC a pris d'autres décisions qui soulignent le rôle du système de radiodiffusion en vue de promouvoir la dualité linguistique. Par exemple, en août, nous avons accordé la distribution obligatoire à Nouveau TV5, une chaîne spécialisée de langue française qui diffusera deux signaux différents. L'un de ces signaux, TV5 UNIS, se concentrera sur la francophonie canadienne, surtout les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Dans notre décision, nous avons indiqué que TV5 UNIS contribuera de façon importante aux objectifs de la Loi sur la radiodiffusion.
Notre décision a également permis la diffusion d'ARTV sur les marchés anglophones. Il s'agit d'une chaîne spécialisée de langue française axée sur les arts et gérée par CBC/Radio-Canada. Tous les distributeurs doivent offrir ARTV, mais les Canadiens demeurent libres de s'y abonner.
[Français]
Pour conclure, le CRTC croit passionnément en l'importance de la dualité linguistique et au besoin de protéger les droits des minorités linguistiques. De plus, nous sommes fiers de contribuer à appuyer les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les langues officielles, et de protéger les intérêts des CLOSM du Canada.
Voilà donc quelques-unes de nos décisions récentes et, de manière plus particulière, un aperçu des conditions de licence que le CRTC a imposées à CBC/Radio-Canada. Nous avons pour objectif de nous assurer que le radiodiffuseur public national ne cesse d'offrir aux Canadiens des émissions de grande qualité dans la langue officielle de leur choix, peu importe l'endroit où ils vivent au pays, et de faire en sorte qu'il continue de respecter ses obligations au titre de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les langues officielles.
C'est avec plaisir que mes collègues et moi-même répondrons à vos questions.
La présidente : Merci, monsieur Hutton. Nous allons passer aux questions. La première question sera posée par la sénatrice Fortin-Duplessis.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Bienvenue à tous les trois, c'est un plaisir de vous entendre.
Le CRTC a renouvelé les licences de la Société Radio-Canada en mai dernier. Cet exercice de renouvellement des licences n'avait pas été fait depuis 13 ans, alors qu'en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, les licences ne peuvent être valides que pour un maximum de sept ans.
Pouvez-vous nous expliquer pour quelles raisons il y a eu une disparité entre le nombre d'années qui s'est écoulées depuis le précédent exercice de renouvellement des licences et la durée permise des licences selon la loi? Votre décision du CRTC date du 28 mai 2013, et c'est au paragraphe 368.
M. Hutton : Vous avez bien raison, les licences qu'accorde le CRTC peuvent être valides jusqu'à sept ans. Dans le cas précis de Radio-Canada, l'étude du renouvellement des licences a été reportée à quelques occasions. Le CRTC, naturellement, dispose de cette opportunité de renouveler, ce que nous appelons de façon administrative, les licences. C'est l'opportunité que nous avions saisie.
Pourquoi nous l'avons saisie? Il y a eu diverses circonstances. Il y a certaines options, dont la révision en profondeur des politiques en matière de télévision. Au CRTC, les licences sont accordées pour sept ans, mais nous accordons aussi de l'importance au développement d'une politique sur laquelle ces licences sont basées. Au moment du renouvellement, il y avait beaucoup de questions sur le futur de la télévision, plusieurs difficultés, alors nous avons remis l'étude de la licence de CBC/Radio-Canada à un peu plus tard.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Donc c'est vous qui avez décidé d'attendre?
M. Hutton : Effectivement.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Ce n'est pas Radio-Canada qui n'a pas présenté une demande de renouvellement.
M. Hutton : D'aucune façon.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Quelles sont les sanctions qui peuvent être imposées à Radio-Canada si elle ne respecte pas ses conditions?
M. Hutton : Des sanctions peuvent être imposées à l'ensemble des titulaires de licence, que ce soit Radio-Canada, un titulaire communautaire ou un titulaire privé. Cela varie. Habituellement, lorsque nous soulevons une problématique avec une entreprise, nous procédons à une évaluation, plus souvent qu'autrement au moment du renouvellement de la licence. Nous avons des discussions et nous comparons les conditions et les attentes de l'entreprise avec sa performance.
Nous possédons divers outils dans notre coffre à outils réglementaires. Naturellement, une discussion formelle dans le cadre d'un renouvellement sert à motiver les gens à rencontrer leurs objectifs. Nous pouvons aussi procéder à une plus grande vérification des éléments fautifs. Nous pouvons aussi resserrer les conditions de licence; on peut partir d'une attente à une condition de licence à une condition de licence plus sérieuse. C'est un peu un effet d'escalade. Lorsque nous nous rendons à la fin de l'escalade, nous pouvons enregistrer nos décisions auprès de la Cour fédérale d'appel. Nous pouvons aussi fixer des périodes de licence plus courtes qui peuvent aller jusqu'au non-renouvellement des licences, ce qui arrive très rarement.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Selon vous, est-ce que Radio-Canada respecte ses conditions pour garder sa licence?
M. Hutton : Je crois que oui. Quant à l'approche que nous avons adoptée pour le renouvellement présent — que nous venons de publier en mai —, si on la compare à celle adoptée lors des discussions en 2000, il y avait plusieurs éléments pour lesquels nous avons émis certaines attentes. La télévision évolue, les besoins des Canadiens évoluent et on procède au renouvellement.
Dans le cas présent, nous avons changé un peu notre optique. Nous avons élevé les attentes en conditions de licence. Bien que nous ayons émis des attentes et qu'elles aient généralement rempli leurs objectifs, il y avait quand même certains endroits un peu plus faibles. Après avoir consulté les Canadiens, dont les 8 000 personnes qui sont intervenues, et suite aux nombreuses présentations lors des audiences, nous avons décidé de nous concentrer et d'être un peu plus sérieux avec certaines des conditions. Nous avons donc eu une évolution dans le processus.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Depuis que vous avez octroyé la licence, en fin mai 2013, avez-vous reçu des plaintes concernant Radio-Canada?
M. Hutton : Je n'ai pas le registre des plaintes avec moi. Bien que nous ayons émis notre décision en mai, la période de licence débutait le 1er septembre 2013. Il y a de cela environ trois mois.
Nous avons souvent des interventions concernant Radio-Canada, car c'est notre diffuseur national. Je suis certain que nous en avons chez nous qui sont en processus de règlement depuis cette période. Nous pourrons faire suivre les détails des diverses plaintes que nous avons reçues.
La présidente : Si vous pourriez nous envoyer cette information, monsieur Hutton, ce serait fort apprécié.
La sénatrice Poirier : Une partie de ma question fut répondue. Elle fut posée par ma collègue et elle concernait les sanctions à savoir si Radio-Canada ne respectait pas ses conditions.
Ma prochaine question est la suivante : quand vous avez renouvelé la licence à Radio-Canada, vous avez ajouté des conditions, croyiez-vous que Radio-Canada ne rencontrait pas ses obligations en vertu de la Loi de la radiodiffusion?
M. Hutton : Au conseil, nous prenons très au sérieux nos obligations en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et étant partie inscrite et responsable de mettre en place des mesures positives selon la section 41 et la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Nous avons certes entendu, lors de nos consultations, une insatisfaction de la part des communautés. Nous avons entendu diverses insatisfactions de la part de Canadiens et de Canadiennes de toutes les régions. Ces insatisfactions variaient entre la recherche d'une programmation en général sur l'ensemble des deux réseaux qui était plus équilibrée; non seulement du populaire, mais il faudra faire quelque chose de plus large. Nous avons entendu parler d'insatisfactions émanant du sénateur De Bané, qui a certainement soulevé et travaillé avec acharnement à faire comprendre le message que nous avons même reconnu et inscrit comme sujet à l'audience pour discussion sur la représentation régionale des nouvelles à Radio-Canada, comme à la CBC, et en particulier le reflet des CLOSM. Ce sont des choses que nous avons entendues.
Bien que les attentes ne précisaient peut-être pas, lors du dernier développement, certains objectifs précis, les Canadiens et Canadiennes nous ont dit certaines choses, et nous avons tenté de les écouter et tenté, par les mesures mises en place, de les adresser. Alors c'est de tenter de pousser CBC/Radio-Canada à aller plus loin que le chemin qu'ils avaient parcouru ces dernières années.
La sénatrice Poirier : Il est mentionné dans votre présentation que 8 000 personnes ont partagé des commentaires à travers le Canada, soit lors des audiences ou par le biais de consultations en ligne. Ces 8 000 personnes, pouvez-vous nous dire d'où elles viennent? En pourcentages, combien viennent de l'Est, du Québec, de l'Ouest, du Nord? D'où viennent ces 8 000 personnes?
M. Hutton : Les consultations en ligne ont été assez larges. Les gens sont venus de tous les coins du pays et nous ont dit toutes sortes de choses. Certaines choses étaient positives à l'égard de CBC/Radio-Canada, d'autres disaient qu'ils n'allaient pas assez loin pour remplir leur mandat.
La sénatrice Poirier : Je parle de pourcentages.
M. Hutton : J'y arrive. Je n'ai pas les pourcentages.
La sénatrice Poirier : Des personnes qui ont participé, ces 8 000 venaient d'où?
M. Hutton : Quand nous avons conçu l'avis de renouvellement, nous avons eu un message clair des régions à l'extérieur de Montréal et de la grande région métropolitaine de Toronto, une insatisfaction concernant les services disponibles en région. Ce fut un des grands messages qui est ressorti des consultations.
Je n'ai pas avec moi la ventilation de chacune des régions. Je dois vous dire qu'il risque d'être assez difficile de la produire à ce moment-ci.
La sénatrice Poirier : Vous ne pourriez pas nous donner de pourcentage?
M. Hutton : Je ne pourrais pas vous le donner. Le message clair venait des régions, de l'extérieur des grands centres, pour la représentativité de leur propre région au réseau. Nous avons reçu aussi un message clair des CLOSM nous disant qu'il y avait un bon lot d'insatisfaction quant aux services dans leur cas.
La sénatrice Poirier : Dans le cadre de la licence qui fut renouvelée à CBC/Radio-Canada, faites-vous un suivi ou doivent-ils faire rapport? Auparavant, c'était aux deux ans, si je me souviens bien?
M. Hutton : Nous avons demandé diverses choses. Naturellement, ils ont des conditions de licence que nous vérifiions à tous les ans. Ils nous fournissent un rapport concernant l'objectif de certaines d'entre elles.
Nous les avons aussi mandatés, comme l'a indiqué M. Lalande, de mener des consultations régionales dans chacune des grandes régions du Canada à tous les deux ans. On s'imagine que cela s'étalera sur une certaine période. Nous demandons aussi, dans le rapport annuel, de faire état de ce qu'ils ont entendu et des mesures qu'ils ont prises pour tenter de régler ou de remplir les manques qui leur sont soulevés.
La sénatrice Champagne : Dans votre présentation, monsieur Hutton, vous disiez : « Afin de nous assurer que CBC/ Radio-Canada puisse atteindre ses objectifs, nous avons fixé des seuils minimaux pour les types d'émissions qui sont essentielles aux fins de la mission du radiodiffuseur. » Vous parliez d'émissions dramatiques, de comédies et de documentaires.
Vous m'avez entendue tout à l'heure. J'aimerais que les émissions à couleur culturelle fassent aussi partie des choses essentielles. Aujourd'hui, les jeunes qui terminent leurs études, que ce soit au conservatoire ou dans les universités, un peu partout, n'ont pas d'endroit pour se faire connaître. Autrefois, à Radio-Canada, il y avait toutes sortes d'émissions pour les jeunes. Il y avait Banc d'essai et toutes sortes de choses où le jeune pouvait aller jouer de son instrument ou chanter et il était entendu partout au Canada. Souvent, un coup de fil venait et on disait : « On vous a entendu, voulez- vous venir donner un concert à un tel endroit? » Or, il n'y en plus. Non seulement, ils ne nous font plus jouer les choses d'antan, mais il n'y a plus d'émission actuellement pour aider les jeunes qui ont fait je ne sais pas combien d'années dans les conservatoires, que ce soit celui du Québec à Montréal ou à Québec, que ce soit McGill ou l'Université de Montréal. Les jeunes n'ont pas d'endroit pour se faire connaître. Cela fait partie, à mon humble avis, de la mission de Radio-Canada.
D'autre part, j'aimerais vous féliciter et vous remercier de cette distribution obligatoire que vous avez bien voulu accorder à TV5. TV5 UNIS va faire un peu ce que je souhaiterais que Radio-Canada fasse. Il va le faire pour les jeunes réalisateurs, les jeunes auteurs et les jeunes comédiens. Ces gens pourront, étant donnée qu'il y aura des bureaux partout au Canada, aller porter un scénario à TV5 UNIS et dire : voudriez-vous nous aider à produire telle chose? Nous sommes ici, au Manitoba, ou là. Et TV5 UNIS se sont organisés, ou le seront prochainement, pour faire cela.
Je pense que c'est une idée extraordinaire que le CRTC a eue de bien vouloir accorder cette deuxième chaîne, et qu'elle soit, comme on dit en bon français, « a must carry » autrement dit qu'elle soit de distribution obligatoire. Cela va beaucoup aider, à mon humble avis, les jeunes réalisateurs, les jeunes caméramans, les jeunes comédiens, les jeunes auteurs; ils vont avoir une porte de plus avec TV5 Unis. Si Radio-Canada faisait cela pour les autres, c'est ce que je disais tout à l'heure, je me suis répétée, j'ai dit la même chose, mais de deux façons différentes. Merci pour TV5 Unis; essayez de faire quelque chose pour Radio-Canada, pour leur serrer la vis un peu, pour qu'ils s'occupent des jeunes, car ils ne s'en occupent pas.
M. Hutton : Merci pour vos remerciements. Nous avons peut-être moins capté, je dois l'admettre, dans le cadre que vous mentionniez, de la captation et de la promotion des jeunes. Dans la décision de renouvellement, en particulier avec le renouvellement d'ARTV et la distribution semi obligatoire, nous avons aussi mis en place des conditions visant à aller chercher à l'extérieur du Québec, aller dans les CLOSM et aller chercher de la programmation à cet effet.
Nous avons aussi, dans le cadre du renouvellement de la chaîne SRC conventionnelle, inclus, dans ce que nous appelons des émissions d'intérêt national, des émissions un peu plus particulières, plus difficiles et peut-être plus absentes à une certaine époque, les émissions musicales et de variété s'y afférant. C'est un peu un pas dans la bonne direction; mais on note votre commentaire concernant les jeunes.
La sénatrice Champagne : Il y en a de toutes les sortes. Il n'y en a plus en classique.
M. Hutton : Les émissions de variété, c'est plutôt relié à la présentation de la chanson; c'est ce qui semblait manquer et qui avait été soulevé dans le dossier public, alors nous l'avons inclus.
La sénatrice Champagne : Il n'y a plus d'opéra, plus de grands concerts, il n'y a plus rien.
M. Hutton : C'est nouvellement inscrit comme émission d'intérêt national à partir du 1er septembre.
La sénatrice Champagne : Ah, monsieur, merci!
La sénatrice Charette-Poulin : Monsieur Hutton, vous faites mon éducation. C'est la première fois que j'entends l'acronyme CLOSM et cela m'a pris à peu près 10 minutes à comprendre que quand vous dites CLOSM, cela veut dire les Communautés de langue officielle en situation minoritaire. Cela m'inquiète un peu que notre auditoire se demande ce que c'est que CLOSM . Je me le suis demandé — je m'excuse, mais moi je viens de Sudbury, so!
M. Hutton : Désolé, cela fait partie de notre langue usuelle, au CRTC, on aurait dû le détailler un peu plus.
La sénatrice Charette-Poulin : C'est le péché mignon des gens d'Ottawa.
M. Hutton : Effectivement.
La sénatrice Charette-Poulin : Vous étiez assis dans la galerie quand nous avons eu l'honneur d'accueillir comme témoins trois représentants de la Société Radio-Canada.
Vous avez entendu la directrice générale des services régionaux, responsable aussi de ICI Radio-Canada Première, dire que dans toutes les émissions nationales diffusées à Radio-Canada, cinq heures par semaine proviennent de l'extérieur de Montréal.
J'écoutais quand vous nous avez rappelé les trois grandes responsabilités de la Société Radio-Canada. La troisième était, je reprends votre citation :
Présenter un reflet du Canada et de ses régions à ses auditoires nationaux et régionaux, tout en servant les besoins particuliers de ces régions.
Le service des besoins particuliers, pour moi, cela veut dire la programmation régionale. Mais si je reviens à la première partie de la phrase, c'est le reflet des régions à l'auditoire national.
Est-ce que vous pensez que la Société Radio-Canada atteint son objectif avec cinq heures par semaine qui ne sont pas produites à Montréal?
M. Hutton : Vous avez bien raison. Dans le cadre dans lequel nous révisons les licences et les conditions afférentes de CBC/Radio-Canada, il y a le mandat national, il y a aussi un mandat local, le mandat CLOSM, et aussi la capacité de se refléter d'une région à l'autre.
Nous avons prévu, je dois dire, des attentes selon lesquelles cette portion de représentativité devrait augmenter à travers tous les services de CBC/Radio-Canada. En particulier, nous avons aussi, dans le cadre des deux réseaux de télévision, prévu des conditions de licence pour s'assurer qu'il y ait justement une représentativité dans les genres, mais aussi dans les régions pour tenter de pallier un peu ce qui existait déjà.
La sénatrice Charette-Poulin : Donc il n'y a pas de conditions précises, voire mathématiques?
M. Hutton : Il n'y a pas de conditions précises ou mathématiques. C'est un peu une condition d'ordre plus général qui encourageait une augmentation, en bout de ligne, parce que c'est quelque chose qui nous semblait manquer. La façon dont nous allons le gérer, c'est justement par l'entremise des conversations qu'ils vont avoir que les citoyens dans les régions, dans les CLOSM, qui vont nous rapporter ce qui se passe là-bas aussi. C'est de cette façon-là qu'on espère qu'il va y avoir une progression dans le domaine.
J'ai écouté M. Lalande aussi. Je dois vous dire que tout n'est pas noir dans leur cas. Nous avons imposé des conditions de licence et des attentes à l'entreprise, mais comme M. Lalande l'a dit, naturellement il y a eu des périodes de difficulté financière pour l'entreprise, il y a eu du questionnement, et cela continue toujours, mais on a constaté aujourd'hui, lors de leur présentation devant vous, tout comme à nos audiences, qu'il y avait une progression et une meilleure compréhension des enjeux du côté régional et du côté des CLOSM, pour s'assurer justement qu'il y ait un meilleur service dans ce domaine-là. Il y a quand même un encouragement et plusieurs des conditions et attentes ont même été proposées par l'entreprise. M. Lalande l'avait mentionné et je ne voulais pas vous laisser avec l'impression que le message n'avait pas commencé à rentrer au sein de la société.
La sénatrice Chaput : Je crois, monsieur Hutton, que vous avez dû remarquer que, quand on vient des communautés de langue officielle en situation minoritaire, on est plutôt sévère à l'égard de la Société Radio-Canada et de ses obligations. Vous comprenez, j'en suis sûre, que lorsqu'on est un francophone qui vit dans une province majoritairement anglophone, chaque service en français compte et contribue à notre épanouissement. La perte, si minime soit-elle, d'un service est une catastrophe. Donc nous apprécions les conditions que le CRTC a imposées à Radio-Canada lors du renouvellement de ses licences.
Maintenant il faut être juste aussi dans tout cela. Il faut dire que Radio-Canada a subi des réductions de son financement annuel. Il faut dire que des enveloppes qui contribuaient à nous aider ont été éliminées. Il y en avait une pour la programmation locale; elle n'existe plus. Donc Radio-Canada ne pourra plus avoir de revenus de cette enveloppe-là pour la programmation locale. Il y en avait une, m'a-t-on dit, pour du capital, qui a été éliminée. Et si elle avait existé, peut-être que cela aurait pu résoudre le problème du Parc national de Jasper. Il y a les activités sportives. Je ne comprends pas trop ce qui a été négocié avec Rogers, mais si Radio-Canada perd des revenus d'activités sportives, de soirées de hockey, cela va encore entraîner une autre baisse de revenus.
Lorsque vous allez évaluer les activités de la Société Radio-Canada par rapport aux conditions obligatoires qui lui ont été imposées, comment allez-vous évaluer les résultats? Est-ce que vous prenez en considération les pertes de revenus? Comment faites-vous pour qu'il y ait quand même une égalité et une justice des deux côtés?
M. Hutton : Lorsque nous avons procédé au renouvellement, nous avons pris en considérations les incertitudes dont vous faites mention ainsi que les coupes qui avaient déjà été annoncées et auxquelles ils devaient faire face. Le conseil a pris une approche particulière dans ce cas parce qu'il existait effectivement beaucoup de risques, le financement était incertain, dans le marché publicitaire, entre autres, où on doit rejoindre des auditoires pour recevoir les revenus y afférent. Vous avez mentionné le hockey qui était pour CBC, le pendant anglophone de la société, une source de revenus assez significative. Vous avez mentionné d'autres sujets.
On a eu de bonnes discussions avec les gens de CBC/Radio-Canada, et on a posé justement les questions à savoir quelles étaient les incertitudes, et nous avons fait des évaluations. Et l'approche que nous avons choisi de prendre était de mettre en place des conditions, et on a choisi le mot « minimum » pour faire le point particulier. C'est que dans plusieurs instances, il y avait peut-être des manques à leurs objectifs. Dans le cas de Windsor, nous avons augmenté l'offre existante parce qu'elle était insatisfaisante.
Dans plusieurs autres endroits où il y avait des risques de perte de service, nous avons choisi de mettre en place ces conditions minimales pour nous assurer que l'offre de service ne baisse pas en deçà de ces minimums.
Naturellement, les minimums ont été mis en place en considération des divers risques de perte de revenus et de changements dans le marché sur la période de licence qui est de cinq ans. On s'attend donc à ce que les conditions qui sont là soient au moins atteintes et, si tout va bien, surpassées.
Le sénateur Rivard : Monsieur le directeur général, j'ai demandé à Radio-Canada, plus tôt, comment ils faisaient pour s'autoévaluer afin de savoir s'ils remplissaient leur mandat de respect des langues officielles. On sait que cela relève du CRTC.
Au-delà du nombre et de la qualité des plaintes reçues, quels sont les autres critères d'évaluation pour savoir s'ils respectent effectivement les langues officielles?
M. Hutton : Nous-mêmes, au CRTC, avons ce que nous appelons le Groupe de travail CRTC-CLOSM. C'est un groupe de travail présidé par Mme Gauthier qui rejoint une bonne assiette, 27 groupes de chacune des régions de toutes les provinces et de tous les territoires du pays. Nous avons des discussions deux fois par année. Nous avons aussi des contacts un peu plus réguliers, ce qui garde d'ailleurs Mme Gauthier assez occupée.
Indépendamment de ce qui se passe chez Radio-Canada, nous nous sommes mis au fait des besoins et des difficultés auprès des CLOSM.
On a demandé à Radio-Canada, dans le cadre du renouvellement de la licence, de consulter. On a tous nos chiffres et nos conditions de licence que nous vérifions au CRTC, et ils nous font rapport de ce qui est mesurable et calculable. Mais ce qu'on va rechercher, et ce que vous cherchez, c'est moins le côté cartésien et plus savoir ce qui se passe sur le terrain, et on s'attend à ce que l'entreprise mène des consultations, et, comme c'est indiqué dans la décision, on s'attend à ce qu'ils nous rapportent ce qui a été dit et qu'ils nous rapportent ce qu'ils ont fait à chaque année pour pallier les besoins des CLOSM.
La présidente : La sénatrice Chaput a fait référence au contexte budgétaire dans lequel la société est plongée. Et le CRTC a accordé à la société un accès temporaire à des revenus publicitaires à la radio pour lui permettre de faire face aux diverses pressions financières.
Plusieurs organismes représentant les communautés de langue officielle en situation minoritaire, les CLOSM, ont réagi négativement à la suite de cette annonce.
Que répondez-vous aux inquiétudes qu'ont les communautés face à cette nouvelle initiative de la part de Radio- Canada?
M. Hutton : Je dois dire qu'il n'y a pas que les CLOSM qui ont des inquiétudes; plusieurs Canadiens et Canadiennes de toutes les régions, et même des grands centres urbains, ont les mêmes inquiétudes.
Nous avons pris la décision, effectivement, de mettre certaines balises. C'est pour une période de trois ans. C'était quand même une question assez sérieuse de réintroduire la publicité dans le service Espace Musique/CBC Radio 2.
Nous avons aussi mis en place des mesures pour limiter. Parce que ce que nous avons compris des consultations, c'est qu'il y avait diverses inquiétudes, des concurrents dans le marché publicitaire avaient des inquiétudes concernant leurs propres services. Il y avait des stations de radio communautaire qui avaient peut-être aussi des inquiétudes quant à leurs revenus. Mais l'ensemble des Canadiens avaient beaucoup d'inquiétudes à divers niveaux, quant au son et à l'approche non commerciale, l'approche différente des autres radios, l'approche de radio publique, que cette composante soit maintenue. Il y avait aussi des inquiétudes quant au fait que la course aux revenus mènerait à une réduction de services ou à un changement du service particulier.
Nous avons tenté, pour pallier ces inquiétudes, de mettre en place une limite. C'est seulement quatre minutes à l'heure, tandis qu'une radio commerciale n'a aucune limite, cela varie plus dans les 12 à 16 minutes à l'heure. Naturellement, ce sont deux services à vocation musicale, mais nous avons aussi limité les interruptions durant les périodes à deux fois l'heure afin de limiter les interruptions en période de musique.
Nous avons aussi, pour les deux services, mis en place des obligations quant au genre de musique, à la variété et au nombre de pièces musicales que chacune d'entre elles doit mettre en ondes.
Tous ces efforts sont faits afin de tenter de maintenir le son, si je peux dire, ou l'approche publique plutôt que commerciale, tout en permettant d'aller chercher des revenus. On a parlé tantôt des défis, des difficultés ou des incertitudes financières et des risques à venir — en ce qui concerne le hockey, par exemple. On doit tenter essentiellement de maintenir et de ne pas sabrer davantage dans les services.
C'était un peu, disons, le meilleur des pires scénarios, c'était une décision de mettre en place la publicité avec certaines balises afin de s'assurer que les sommes amassées avec les budgets en radio soient maintenues durant cette période. C'est un nombre de balises qu'on a mises en place pour tenter d'aborder les inquiétudes, mais la principale inquiétude, c'était la pérennité et le maintien de la qualité du service CBC Radio 2 et Espace Musique.
La sénatrice Chaput : Avez-vous étudié l'impact sur les radios communautaires? Ils ont une inquiétude parce qu'ils ont tellement peu de revenus et ils vont perdre des revenus de publicité.
M. Hutton : Nous avons naturellement fait des évaluations financières pour évaluer combien de revenus, possiblement, Radio-Canada pourrait aller chercher par l'entremise de ses efforts.
Nous avons aussi évalué quel genre d'annonceurs seraient à Radio-Canada versus chez les radios commerciales ou les radiodiffuseurs communautaires.
Nous avons aussi mis en place des éléments de support aux radios communautaires, puisque votre question relève plus particulièrement de leur cas. Nous avons un fonds qui permet aux radiodiffuseurs d'y avoir un certain accès afin de maintenir leurs services et de s'assurer une certaine permanence et qualité. Alors, avec l'ensemble des évaluations et des mesures que nous avions déjà en place, nous avions confiance qu'il n'allait pas y avoir d'impact substantiel sur les radios commerciales et, naturellement, sur les radios communautaires.
La sénatrice Charette-Poulin : J'ai été surprise d'entendre le vice-président principal des services français, Louis Lalande, identifier seulement trois stations régionales ayant la capacité de produire des émissions nationales : Québec, Moncton et Ottawa.
Je me souviens, dans les années 1970 et dans les années 1980, d'avoir entendu à la radio nationale des émissions produites à Sudbury, Winnipeg, Vancouver et Matane. Est-ce que le CRTC a l'autorité et les moyens — je vais utiliser votre langage — d'encourager la Société Radio-Canada à ne pas reléguer en arrière-plan les plus petites stations de Radio-Canada?
M. Hutton : Pour répondre à la question concernant l'autorité, certes, nous l'avons. Plusieurs mesures ont été mises en place dans le renouvellement pour ne pas reléguer, je dirais, moins les stations, l'ensemble du service aux régions et l'ensemble des services aux communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous avons bel et bien l'autorité.
Je dois dire que nous ne faisons pas, si je peux dire, des inspections pour savoir quels services sont en place dans quelles régions. On regarde plus les résultats qui sont mis en ondes, donc des minimums de productions locales, des conditions de licence qui demandent à ce qu'il y ait un éventail de services qui représente l'éventail des régions et des CLOSM. C'est notre façon d'opérer, mais nous avons bel et bien l'autorité de le faire.
La sénatrice Charette-Poulin : Ma question ne touche pas seulement les communautés en situation minoritaire. Je me souviens d'excellentes émissions produites à la station de Chicoutimi. C'est pour cela que j'ai parlé de Matane. Si la responsabilité de la Société Radio-Canada est de vraiment présenter un reflet du Canada et de ses régions à ses auditoires nationaux, il y a un intérêt valable de faire connaître des régions, comme celle du nord du Saguenay, qui est très différente de celle du bas du fleuve, par exemple.
M. Hutton : Nous avons mis en place diverses conditions et attentes concernant le maintien de certains niveaux de programmation locale. Par exemple, on s'attend à ce que les services soient maintenus dans ces régions. Au minimum, il y aura une présence. Tout débute avec cette présence.
La sénatrice Charette-Poulin : Merci.
La sénatrice Chaput : J'aurais une brève question. Pourquoi n'aviez-vous pas imposé la distribution obligatoire à ARTV?
M. Hutton : La demande placée devant nous venait de la Société Radio-Canada et c'était pour une distribution ou une offre obligatoire. Alors s'il y a une distribution obligatoire, c'est que tous les Canadiens doivent s'y abonner. C'est une obligation que tous les Canadiens s'y abonnent et paient les frais d'abonnement afférents. Dans le cas devant nous, c'était une demande de la part de ARTV qui était moindre que celle-là, qui était de s'assurer qu'elle soit disponible à tous les Canadiens qui choisissent de s'y abonner. C'est à cette demande que nous avons répondu dans l'affirmative.
La sénatrice Chaput : Je comprends, mais à titre d'exemple, si je prends ma situation au Manitoba, nous avons ARTV, mais on paie pour pouvoir l'écouter, alors qu'une distribution obligatoire aurait fait partie d'un forfait, n'est-ce pas? Ou je ne comprends pas bien.
M. Hutton : Très peu de services n'ont pas de frais. Ils ont tous, ce qu'on appelle, un tarif d'abonnement en gros. Naturellement, ces tarifs, pour l'ensemble, sont négociés entre les câblodistributeurs et les diffuseurs en question. ARTV, quand vous vous y abonnez chez vous, vous payez un tarif pour votre ensemble de services au distributeur, et le distributeur, lui, paie son fournisseur, qui est ARTV dans ce cas-ci. Il existe divers moyens de s'abonner à un service. Naturellement, un service peut être inclus dans un tarif de base. Certains services sont mandatés aux tarifs de base. Leurs services sont à distribution obligatoires, les 91H, comme, par exemple, RDI dans votre localité. ARTV ne l'est pas, mais le service, s'il est à la base, on demanderait à tout le monde dans la communauté de s'abonner. À la base, ARTV, est un service facultatif, c'est-à-dire qu'on n'oblige pas tous les gens à s'y abonner. C'est la distinction. Quand on s'abonne, on paie plutôt que de demander à l'ensemble de la population de s'abonner et de payer. C'est un peu la distinction.
La sénatrice Chaput : On ne demande pas à la majorité de payer pour ARTV, mais la minorité, si elle veut l'écouter, elle doit payer. Si je peux l'expliquer ainsi.
M. Hutton : C'est cela, mais toute personne, qu'elle soit en situation majoritaire ou minoritaire, le concept de base avec ARTV, c'est un service de niche plus particulier. Ce qu'on voulait faire avec notre décision, et ce qui était la demande de Radio-Canada, était de donner l'occasion à tout le monde qui voulait s'y abonner, d'avoir accès à ce service culturel qui reflète les artistes, qu'ils soient canadiens ou autres, mais qui reflète aussi l'ensemble du pays, et qu'on ait l'option de le choisir.
Le sénateur Fortin-Duplessis : Je vais faire un commentaire : je n'ai pas l'habitude de faire beaucoup de commentaires partisans, mais là, c'est trop. Quand une société qui dépend du gouvernement ne rend jamais de comptes pour les dépenses qu'elle effectue, et il n'y a pas moyen de savoir comment le 1,2 milliard qui lui est attribué est dépensé.
Je vais vous donner un petit exemple. Lors des Jeux olympiques de Vancouver, tout coulait à flot, mais on n'a jamais été capable de savoir combien d'argent avait été dépensé. C'est peut-être dans toutes ces dépenses et à cause de tout cela que le bât blesse. Il y aurait peut-être un grand ménage à faire à Radio-Canada. On s'apercevrait peut-être qu'il y a suffisamment d'argent pour les anglophones ou les francophones en milieux minoritaire.
M. Hutton : C'est noté. Pour les comprendre, nous avons quand même fait plusieurs comparaisons. Plusieurs des commentaires, lors des audiences, visaient à une plus grande transparence. Nous avons, effectivement, comme d'autres mesures administratives, mis en place une plus grande transparence quant à leurs divers services et une plus grande compréhension. On avait aussi négocié avec eux avant même les audiences.
Dans leur rapport annuel, ils nous rapportent plus d'informations sur une base annuelle avec leur rapport financier auprès du CRTC que nous mettons au dossier public et qui est disponible un peu à tout le monde. Cela ne va pas dans le détail, je dois l'admettre, pour des émissions particulières, mais plus par rapport à des types d'émissions, dont l'ensemble du sport. C'est peut-être à un niveau plus élevé que vous cherchez, je l'admets.
La présidente : Honorables sénateurs, il n'y a plus de questions. Je n'ai qu'à remercier nos invités, M. Hutton, Mme Gauthier et M. Castonguay. Il est évident que vous avez écouté les nombreux intervenants qui ont comparu devant vous lors des audiences publiques que vous avez tenues. Il est aussi évident que vous avez entendu les insatisfactions exprimées par les Canadiens et les Canadiennes par rapport à certains aspects du radiodiffuseur CBC/Radio-Canada.
Nous vous remercions d'avoir imposé des conditions de licence qui soient plus exigeantes.
J'ai été contente de voir que dans votre conclusion vous avez indiqué que vous êtes passionné et que vous croyez passionnément en l'importance de la dualité linguistique et au besoin de protéger les droits des minorités linguistiques.
Nous souhaitons que vous poursuiviez cette passion avec vigueur et que vos décisions reflètent cette passion. Au nom du comité, je vous remercie d'avoir comparu ce soir.
(La séance est levée.)