Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 10 - Témoignages du 23 février 2015
OTTAWA, le lundi 23 février 2015
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour poursuivre son étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde dans un contexte de dualité ou de pluralité linguistique.
La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des langues officielles ouverte. Je suis Claudette Tardif, sénatrice de l'Alberta et présidente de ce comité. Je demanderais aux sénateurs de se présenter en commençant à ma gauche.
Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, du Québec.
Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Chaput : Maria Chaput, du Manitoba.
La présidente : Au cours de cette 41e législature, les membres de ce comité examinent les politiques linguistiques et l'apprentissage d'une langue seconde dans un contexte de dualité ou de pluralité linguistique.
Le but de cette étude est d'examiner les politiques existantes, les défis et les bonnes pratiques qui favorisent l'apprentissage d'une deuxième langue dans les pays où il y a deux ou plusieurs langues officielles. Le comité, dans le cadre de son étude, examine à la fois la perspective canadienne et la perspective internationale.
Nos premiers témoins proviennent de l'Institut des langues officielles et du bilinguisme de l'Université d'Ottawa. Ce soir, nous avons le plaisir d'accueillir M. Richard Clément, directeur et doyen associé, et M. Hilaire Lemoine, cadre en résidence. J'inviterais MM. Clément et Lemoine à faire leurs présentations; les sénateurs poseront ensuite des questions.
Monsieur Clément, la parole est à vous.
Richard Clément, directeur et doyen associé, Institut des langues officielles et du bilinguisme, Université d'Ottawa : Honorables sénateurs et sénatrices, je vous remercie d'avoir invité l'Institut des langues officielles et du bilinguisme (ILOB) de l'Université d'Ottawa à contribuer à votre étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde dans un contexte de dualité ou de pluralité linguistique.
Je suis Richard Clément, directeur de l'ILOB, et je suis accompagné de M. Hilaire Lemoine, cadre en résidence à l'Université d'Ottawa. Ma présentation traitera de trois points en particulier. D'abord, je ferai une courte introduction de l'Institut des langues officielles et du bilinguisme, de sa mission et de ses responsabilités; ensuite, je passerai en revue avec vous les activités que l'ILOB mène en matière de développement des politiques linguistiques et d'apprentissage des langues secondes. Nous pensons en effet que ces caractéristiques et activités de l'ILOB pourraient servir de gabarit à une orientation nationale.
Enfin, je terminerai en vous proposant un certain nombre de pistes qui, selon moi, pourraient dynamiser l'action du gouvernement en matière de promotion et d'apprentissage des langues officielles.
[Traduction]
Créé en 2007, l'Institut des langues officielles et du bilinguisme s'est donné comme mission de promouvoir l'excellence et l'innovation en matière de bilinguisme et d'acquisition des langues.
L'ILOB est actif dans quatre domaines : l'enseignement des langues secondes et la formation des maîtres; la recherche dans les domaines de la pédagogie, du bilinguisme, de l'évaluation et de l'aménagement linguistique; la mesure et l'évaluation des compétences en langue; le développement et la promotion de produits et services au Canada et à l'international.
L'enseignement des langues secondes et la formation des maîtres : l'ILOB offre les cours crédités en langues secondes à la population étudiante de l'université, et est responsable du Régime d'immersion en français qui compte plus de 1 600 étudiants inscrits cette année, toutes années confondues. L'ILOB est coresponsable, avec la faculté d'éducation, des programmes en didactique des langues secondes, dont on a souligné le 20e anniversaire en 2013.
[Français]
Depuis 2008, l'ILOB est l'hôte d'une université d'été pour les enseignants de français langue seconde. Il s'agit d'un programme intensif de développement professionnel pour les enseignants canadiens de français de base, de français intensif, de français enrichi et d'immersion en français. En septembre 2014, l'ILOB a lancé sa maîtrise en études du bilinguisme, la première de ce genre en Amérique.
L'ILOB est fier de son centre de recherches appelé le Centre canadien d'études et de recherche en bilinguisme et aménagement linguistique, qu'on connaît sous le sigle de CCERBAL. Ce centre regroupe des chercheurs de haut niveau et d'envergure internationale qui œuvrent dans les domaines suivants : l'apprentissage et l'enseignement des langues et l'évaluation linguistique; le bilinguisme au plan personnel et au plan sociétal; les politiques linguistiques, l'aménagement linguistique et la politique des langues. Le CCERBAL se veut un pôle national et international pour la recherche et l'élaboration de politiques publiques en matière de bilinguisme et de dualité linguistique.
Depuis 2008, cinq colloques d'envergure internationale ont été organisés. Aussi, le CCERBAL organise des symposiums d'une journée, soit à l'université même ou soit dans le cadre de conférences internationales, tels le Congrès Langues sans frontières de l'Association canadienne des professeurs de langue seconde, en 2013, et le Congrès mondial des langues vivantes qui aura lieu dans quelques semaines à Niagara Falls.
[Traduction]
La mesure et l'évaluation : Le secteur Mesure et évaluation de l'ILOB est à l'avant-garde de la création, de l'application et de l'administration d'instruments de mesure et d'évaluation des compétences linguistiques. Ces activités comprennent, entre autres, l'élaboration, l'administration et la mise à jour de tests de compétences linguistiques en français et anglais langues secondes pour la communauté universitaire de l'Université d'Ottawa et les clients externes; l'élaboration et l'administration du CanTEST et du TESTCan, des instruments de classement et de mesure des compétences linguistiques pour l'admission universitaire et l'accréditation professionnelle.
Depuis 2008, le secteur Mesure et évaluation fournit les services d'évaluation linguistique à la Société canadienne des postes pour mesurer les habiletés langagières orales des employés actuels et futurs. Plus de 700 tests sont traités chaque année dans nos centres d'appels.
[Français]
En 2012, l'ILOB est devenu une institution désignée par le Centre international d'études pédagogiques de Paris pour l'administration des tests internationaux officiels de maîtrise de la langue française, soit le DELF (Diplôme d'études en langue française) et le DALF (Diplôme approfondi de langue française).
L'ILOB dispose également d'un bureau de développement et de promotion. Ce secteur vise à faire rayonner son expertise dans les domaines déjà mentionnés. Il agit également à titre de courtier pour le compte d'institutions et de chercheurs canadiens dans le domaine de la mise en marché de produits et services canadiens et du partage de meilleures pratiques en matière de langues officielles et de bilinguisme.
C'est dans ce contexte qu'un protocole de coopération et de liaison existe entre le Centre européen pour les langues vivantes (CELV) du Conseil de l'Europe et l'Université d'Ottawa, par l'entremise de l'ILOB. Il s'agit d'assurer des contacts plus étroits entre le CELV et les chercheurs canadiens et de faire de l'ILOB le point de contact du CELV. Depuis 2008, près de 20 chercheurs et experts canadiens ont été associés aux travaux du CELV, ce qui contribue au développement et à l'amélioration des méthodes d'apprentissage des langues secondes et à la formation des enseignants au Canada.
À titre de membre de l'Organisation universitaire interaméricaine, l'ILOB préside, au nom de l'Université d'Ottawa, le Réseau interaméricain de formation en langues, dont le mandat est de stimuler l'apprentissage des langues dans les Amériques.
[Traduction]
Depuis 2010, l'ILOB est partenaire principal d'un projet d'aménagement linguistique financé par Affaires étrangères, Commerce et Développement Canada, pour appuyer le gouvernement du Sri Lanka à mettre en œuvre sa politique sur les langues officielles dans un contexte post-conflit.
En mai 2015, l'ILOB sera l'hôte de la deuxième Conférence de l'Association internationale des commissaires linguistiques intitulée « Protéger les droits — promouvoir le plurilinguisme linguistique ». Cette conférence, sous la présidence du Commissaire aux langues officielles du Canada, M. Graham Fraser, réunira des représentants de six pays, deux provinces et trois territoires canadiens, pour discuter de thématiques d'intérêt commun.
[Français]
Passons aux recommandations. De par sa mission, l'ILOB est constamment à la recherche d'initiatives qui pourraient influencer positivement l'apprentissage des langues secondes au Canada. C'est dans ce contexte que nous aimerions vous faire part de quelques recommandations que nous soumettons à votre attention et à celle du gouvernement canadien.
Premièrement, le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux et territoriaux devraient convenir conjointement d'une cible à atteindre pour le niveau de bilinguisme chez les jeunes diplômés du système scolaire. Cette cible doit être réaliste et, pour être atteinte, elle devra donner lieu à une révision des programmes d'études en langues secondes inspirée d'une adaptation canadienne du Cadre européen commun de référence (CECR) pour l'enseignement des langues. Un test canadien standardisé de compétences linguistiques devrait également être développé en collaboration avec les provinces et territoires et mis en application dans chacune des juridictions. Le Conseil des ministres de l'éducation du Canada (CMEC) s'est déjà prononcé en faveur de l'application d'un tel cadre pour améliorer les programmes de langues secondes au Canada.
[Traduction]
Deuxièmement, le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux auraient intérêt à créer des incitatifs pour encourager les diplômés du secondaire qui ont une certaine compétence en français langue seconde à poursuivre des études postsecondaires en français. À titre d'exemple, les universités devraient être encouragées à offrir des programmes d'études en langues secondes selon le modèle du Régime d'immersion de l'Université d'Ottawa. Dans l'intervalle, des bourses de mobilité pourraient être offertes à des étudiants des programmes d'immersion inscrits dans des universités anglophones et qui voudraient poursuivre leurs études ou une partie de leurs études en français dans un établissement francophone ou bilingue.
[Français]
Troisièmement, l'apprentissage des deux langues officielles devrait être offert gratuitement, en tout temps, partout au pays, et à tous les Canadiens qui désirent apprendre l'autre langue. Des programmes d'autoapprentissage pourraient être développés et/ou adaptés au contexte canadien et mis en ligne sur Internet. L'apprenant pourrait aussi avoir accès à des moniteurs de langue, sous forme d'une ligne d'aide offerte dans chacune des provinces et régions par des institutions d'enseignement désignées, publiques et privées. Des tests de compétences linguistiques seraient disponibles en ligne.
En dernier lieu, le domaine de recherche en langues officielles au Canada doit créer une relève et intéresser les jeunes chercheurs à ce secteur. L'ILOB envisage d'offrir un programme d'été de formation en recherche, dirigé par une équipe d'éminents chercheurs canadiens. Un tel programme pourrait s'inscrire dans les priorités de formation et de recherche du Conseil de recherches en sciences humaines.
Je vous remercie de votre attention, et je serai heureux de répondre à vos questions.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur Clément. Monsieur Lemoine, avez-vous des commentaires? Vous pourrez aider à répondre aux questions?
Hilaire Lemoine, cadre en résidence, Institut de langues officielles et du bilinguisme, Université d'Ottawa : Oui, bien sûr.
La présidente : Merci bien. Nous passons maintenant à la période des questions. La première question sera posée par le sénateur McIntyre, suivi du sénateur Maltais.
Le sénateur McIntyre : Merci d'être présents, ici, aujourd'hui. Monsieur Clément, je note que vous avez travaillé sur la question du bilinguisme en milieux minoritaires et sur l'adaptation du Cadre européen commun de référence pour les langues dans le contexte canadien. Monsieur Lemoine, en repassant votre curriculum vitae, je constate que, décidément, vous possédez une bonne connaissance de la participation du gouvernement fédéral aux diverses initiatives en faveur de l'éducation à travers le Canada et en Europe. Vous êtes donc, tous les deux, bien placés pour répondre à mes deux questions.
Tout d'abord, depuis que ce comité sénatorial poursuit son étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde, nous avons entendu plusieurs témoins aborder toute une gamme de sujets. Aujourd'hui, effectivement, nous sommes heureux d'entendre votre point de vue, c'est-à-dire le point de vue des instituts de recherche.
Depuis une quarantaine d'années, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux appuient conjointement l'apprentissage des deux langues. Comme vous le savez, en vertu de la Constitution, les provinces et les territoires sont responsables de l'éducation. Chacun a mis sur pied différents modèles d'enseignement qui visent à favoriser l'apprentissage de la langue seconde.
Ma question est la suivante : y a-t-il des provinces ou des territoires qui performent mieux que d'autres aujourd'hui? Y a-t-il des provinces ou des territoire où les défis sont plus nombreux?
M. Clément : C'est une bonne question. Vous savez, l'un des problèmes qu'on a constatés — et cela ressort des interactions avec le CMEC — c'est l'absence de standardisation dans la façon dont on évalue les connaissances des étudiants.
Il ne suffit pas de répondre que les choses vont mieux au Manitoba et en Ontario. Il est difficile de répondre à cette question en l'absence de points de comparaison. Ce sont des programmes qui sont habituellement très différents les uns des autres et, comme je l'ai dit, on n'a pas d'instruments standardisés.
Si on parle de toute la question de l'apprentissage du français par la majorité anglophone à l'extérieur du Québec, les provinces les plus proches du Québec, comme l'Ontario et le Nouveau-Brunswick, n'ont pas de difficulté à trouver de bons professeurs. Il y a une abondance de bons professeurs. Toutefois, plus on s'éloigne du Québec, moins on risque d'en trouver. Il y a une pénurie de bons professeurs, de professeurs formés de façon adéquate, strictement au niveau du nombre aussi. C'est probablement le premier défi.
L'autre défi est évidemment celui de la motivation des étudiants à apprendre l'autre langue. Lorsqu'on a des milieux plutôt homogènes au point de vue linguistique, ce type de motivation n'émerge pas de façon évidente, à moins que les enfants soient dans des milieux qui appuient et qui valorisent de façon fondamentale l'apprentissage des autres langues. Remarquez bien que c'est entièrement possible, mais moins probable de se produire dans un contexte où il n'y a pas d'utilisation immédiate de l'autre langue.
M. Lemoine : Un autre défi qui se pose est celui de la continuité pour l'élève qui étudie le français langue seconde, par exemple, au niveau secondaire. Pour les gens qui ne voient pas la possibilité de poursuivre au niveau postsecondaire et d'utiliser au moins la langue seconde au niveau postsecondaire, on se rend compte bien souvent qu'il est difficile de les retenir dans ces programmes de langue seconde après la dixième année.
Là où on retrouve peu de programmes en français au niveau postsecondaire, il n'y a pas beaucoup d'incitatifs pour les jeunes de continuer à travailler en français langue seconde, en onzième et douzième années, au risque, souvent, à ce qu'ils disent, d'affecter leurs notes scolaires. C'est pourquoi le niveau postsecondaire est si important si on veut maintenir une certaine assiduité, une certaine continuité chez les étudiants au niveau secondaire.
Le sénateur McIntyre : Maintenant, je remarque qu'en Europe, plusieurs pays ont mis en place des systèmes d'éducation pour promouvoir l'apprentissage d'une langue seconde. Je pense ici au Cadre européen commun de référence pour les langues, mieux connu sous le nom Erasmus.
Est-ce que certains pays performent mieux que d'autres en matière d'enseignement des langues? Pensez-vous que nos établissements postsecondaires canadiens devraient adopter le cadre européen comme outil pour établir les niveaux de compétence en langue?
M. Clément : La question de comparaison des pays revient encore et il est difficile d'y répondre, en raison, justement, de l'absence de tests standardisés. Néanmoins, l'adoption par la communauté européenne du cadre commun a fait en sorte que tous ces pays se sont donné certains barèmes, certains standards comparables d'un endroit à l'autre. J'ai parlé du DELF-DALF. C'est un test qui a été bâti sur le modèle du cadre européen, avec les idées du cadre européen, mais qui est adapté à la France principalement. D'autres DELF-DALF ont été développés. Ils ne se nomment pas DELF- DALF. Il y en a certainement en italien, en polonais, et ainsi de suite. Ceux-ci sont moins bien connus.
Encore une fois, je répondrai à la question à savoir quels sont les endroits où les langues secondes sont les mieux apprises ainsi. Ce sont dans des milieux susceptibles de fournir aux étudiants un contact direct ou une utilité particulière pour la langue. Il doit aussi y avoir des attitudes positives à l'égard de la langue et du peuple qui parle cette langue. Il faut aussi des occasions de contact et un sentiment que cette langue puisse être utilisée pour penser et pour transmettre de l'information.
Je ne répondrai pas franchement à votre question de comparaison entre les pays. C'est une chose que les Européens font difficilement eux-mêmes. Dans la mesure de nos contacts avec le CELV à Graz, ils ne font pas ce genre de comparaisons. Ils vont plutôt coopérer en vue du développement de matériel pédagogique commun sous le cadre européen. L'idée d'implanter le cadre européen chez nous est présente depuis plusieurs années maintenant. Au départ, il y avait une certaine réticence à importer un outil européen, mais à la suite des études de notre collègue Larry Vandergrift, il semble qu'il soit tout à fait possible d'adapter le cadre européen à la situation canadienne.
Le cadre européen a des qualités qui nous permettraient de développer des instruments pédagogiques qui sont beaucoup plus modernes que la façon dont on utiliser la pédagogie pour les langues à ce moment-ci. C'est un cadre qui a été bien pensé pendant des dizaines d'années et dans lequel on a intégré beaucoup d'idées nouvelles par rapport à nos attentes envers les étudiants. Est-ce qu'on leur impose des critères? Pas nécessairement. Est-ce que, par exemple, avec le cadre européen vient ce qu'on appelle le portfolio de langues? C'est-à-dire le rapport que l'étudiant a avec sa capacité d'utiliser une ou plusieurs langues à des niveaux différents.
Par exemple, on a essayé de laisser tomber l'idée qu'une personne est seulement bilingue ou trilingue si elle peut parler toutes les langues parfaitement, puisque ce n'est pas le cas. C'est ce qu'on essaie d'implanter dans la tête des jeunes. Ils peuvent être à un certain niveau dans une langue et à un autre niveau dans une autre langue, mais ce n'est pas grave, pourvu qu'ils continuent. Ainsi, il y a un effet motivationnel par l'approche du cadre européen qui fait qu'il serait logique de l'utiliser au Canada.
Cela permettrait aussi éventuellement de standardiser des tests qui nous permettraient le genre de comparaison que vous me demandez de faire.
Le sénateur McIntyre : Merci. Monsieur Lemoine, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Lemoine : Oui. J'ajouterais que, si l'Europe a décidé de se lancer il y a déjà peut-être 20 ans dans l'établissement d'un cadre commun, c'est pour les mêmes raisons ou les mêmes défis que ceux du Canada, qui a 13 ministères de l'Éducation, et 13 façons d'enseigner une langue seconde; avec des curriculums qui sont pour certains bons, certains moins bons, mais qui ne sont pas nécessairement standardisés d'une province à l'autre, et c'est un peu ce que le CMEC a constaté. Quand le CMEC a vu l'étude qui avait été préparée par le Dr Vandergrift qui traitait essentiellement de l'applicabilité du cadre européen dans un contexte canadien, il y a eu consensus autour de la table pour dire que, effectivement, c'est un instrument fort intéressant pour le Canada. Cependant, en même temps, le CMEC n'a pas l'autorité de dicter aux gouvernements provinciaux, aux ministères de l'Éducation de l'utiliser ou non, et la position a été la suivante : « C'est un bon outil. C'est un outil intéressant, à vous de décider si vous voulez le mettre en œuvre ou non. »
Alors, c'est ce qui fait que le défi au Canada, comme c'était le cas en Europe, est qu'il n'y a pas de ministère de l'Éducation, par exemple, au niveau national qui soit en mesure d'imposer un tel cadre. Je ne suis pas en train de dire qu'il nous faut un ministère de l'Éducation national. Ce que je dis, c'est que cela crée une difficulté lorsque vient de temps de mettre sur place une série de programmes de langues secondes qui varient souvent d'une province à l'autre. Par exemple, un étudiant de septième année qui quitte l'Alberta pour aller en Nouvelle-Écosse et qui veut poursuivre ses cours de langue seconde va s'apercevoir que ce n'est pas nécessairement le même curriculum, que le niveau atteint après une septième année en Alberta n'est pas nécessairement celui qui est attendu en Nouvelle-Écosse. Cela rend la mobilité un peu plus difficile.
Le cadre en Europe a établi une espèce de standard par rapport au niveau de compétence qui devrait être atteint à la fin de chaque année scolaire. Théoriquement, cela semble simple, mais en pratique, c'est extrêmement compliqué à mettre en place, étant donné la situation que l'on connaît au Canada.
Le sénateur Maltais : Messieurs, merci d'être présents aujourd'hui et merci beaucoup de votre expertise.
Dans un premier temps, j'aimerais vous féliciter pour le cours de la maîtrise sur le bilinguisme. Vous êtes vraiment les seuls à le faire. Vous parliez tout à l'heure du Parlement européen. J'y étais il y a trois semaines et, bien sûr, nous avons parlé de l'Université d'Ottawa qui est l'une des meilleures dans ce domaine.
Le Conseil de l'Europe, sur le plan linguistique, est un fiasco. Il faut y être allé à quelques reprises pour s'apercevoir qu'on ne peut pas s'entendre sur une langue commune. Il y a huit ou neuf traductions. Les Français parlent anglais et les Anglais parlent l'italien. C'est très compliqué. Savez-vous que j'étais le seul à faire des interventions en français? J'étais à Strasbourg, en France. C'est pour vous dire qu'ils ont un grave problème également.
Vous savez, pour être pratico-pratique, on va descendre un peu d'un étage de votre université pour aller dans la rue. Pour apprendre une autre langue que notre langue maternelle, il faut avoir un intérêt. C'est comme faire des profits avec une piastre; il faut que ça rapporte de l'intérêt. On sait qu'il est difficile d'apprendre une autre langue, il faut donc avoir un intérêt.
Quels sont les intérêts des francophones hors Québec au Canada? Quel serait l'intérêt motivateur d'un jeune à apprendre une autre langue que le français si sa langue maternelle est l'anglais? Une solution existe et elle provient de l'Espagne. En Espagne, il y a quatre langues : l'espagnol (castillan), le catalan, le basque et le galicien. Il n'y a pas de ministère national de l'Éducation, c'est un ministère délégué aux provinces composantes. L'industrie dicte que pour travailler, il faut parler l'espagnol. Là, les jeunes ont un intérêt. Le résident de l'île de Majorque qui va à Cadix ou Cordoue pour suivre un cours de mécanicien pour les moteurs de bateaux de pêche doit parler espagnol. Il y a là un intérêt. A-t-on fait une recherche au Canada pour savoir quel serait l'intérêt d'un jeune anglophone de l'Alberta de parler français?
Dans une émission diffusée la semaine dernière sur la nouvelle chaîne de télévision Unis, qui regroupe des émissions francophones de toutes les provinces canadiennes, j'ai appris que le forgeron en chef du Stampede est francophone et originaire de l'Ontario. Son problème était de trouver quelqu'un avec qui parler français. Il avait envie de conserver son français, parce que c'est un francophone. Il se posait la même question que je vous pose : quels sont les intérêts des jeunes Albertains d'apprendre le français?
M. Clément : Vous me posez la question?
Le sénateur Maltais : Oui.
M. Clément : Cette question est intéressante. En fait, mon domaine de recherche en tant que professeur est la motivation. Dès mes premières années d'études de doctorat en 1973, mon directeur de thèse avait reçu un octroi, énorme pour l'époque, de 75 000 $ par année du secrétariat d'État afin de mener une étude nationale sur la motivation des jeunes à apprendre le français langue seconde.
Évidemment, la première réponse qui est donnée, c'est la motivation instrumentale, c'est-à-dire : « Qu'est-ce que je vais faire avec cela », soit des raisons très pragmatiques. Évidemment, ces raisons pragmatiques s'émoussent dans un milieu où la langue n'a pas d'usage pragmatique. Nous avons trouvé que ce qui distinguait les étudiants qui réussissaient en français de ceux qui ne réussissaient pas — et il y avait quand même un intérêt énorme pour les programmes d'immersion qui étaient en train d'émerger —, c'était les étudiants qui avaient développé des attitudes très positives à l'égard de la francophonie en général, des francophones, de leur façon de vivre et ainsi de suite. Ce sont des étudiants qui venaient habituellement de familles où ce genre d'intérêt pour les langues existait déjà et nourrissait leur intérêt pour l'apprentissage du français comme langue seconde. Ces recherches n'ont pas été démenties, mais avec le temps, on a changé un peu notre façon de parler et, avec le développement de nouveaux modèles sur le plan de la motivation, on s'est mis à parler de trois choses qui me semblent importantes.
En fait, ces trois aspects sont probablement les motivations fondamentales à agir dans n'importe quel milieu. La première motivation a trait à la compétence et au sentiment de compétence. Il faut satisfaire le sentiment de compétence des gens. Le fait d'apprendre une autre langue, une langue qui peut permettre de lire, de regarder, d'écouter, d'interagir dans une autre langue contribue au sentiment de compétence de l'individu. Cela affecte la façon dont il se sent et sa définition de lui-même.
L'autre aspect est la question de l'autonomie. Vous voulez promouvoir l'autonomie des jeunes? Le fait de pouvoir utiliser une autre langue signifie qu'on n'est plus à la merci de quelqu'un qui soit obligé de traduire pour nous. Il y a beaucoup d'autres façons d'augmenter l'autonomie des gens, mais la langue en est une.
La troisième motivation fondamentale qui doit être satisfaite pour que les individus se développent est la question d'affiliation et d'appartenance. Encore là, l'apprentissage d'une langue contribue à ce sentiment d'appartenance.
Je m'excuse pour le cours.
Le sénateur Maltais : Non, c'était très bien. Je vais maintenant m'adresser à M. Lemoine de façon très brève.
Depuis les années 1970 jusqu'à maintenant, pourrait-on dire qu'il y a eu, à un moment donné, un « high » et que maintenant, on n'est peut-être pas sur le neutre, mais pas loin? Les jeunes, au Canada, se sentent-ils plus universels que canadiens?
Je m'explique. Compte tenu de tous les traités de libre-échange qui sont conclus et de tous les regroupements de pays qui forment des communautés, telle l'Union européenne — on constate ce phénomène aussi en Asie-Pacifique ou en Amérique du Sud, où les pays ont tendance à se regrouper pour former de grandes communautés —, nos jeunes Canadiens se considèrent-ils davantage en fonction d'une ouverture internationale qu'en fonction d'une culture nationale?
M. Lemoine : Je dirais que oui. Aujourd'hui, quand je pense à ma fille, je crois qu'elle se sent comme la plupart des jeunes de son âge sortis de l'université, un peu comme une personne du monde, c'est-à-dire une personne qui aime et est capable de dire que le Canada, c'est beau, qu'on a un beau grand pays, mais qu'il y a autre chose dans l'univers. Il est sûr que dans un tel contexte, l'élément de la langue devient important, qu'on veuille aller en Espagne, en Allemagne, au Maroc, en Arabie saoudite ou ailleurs. Effectivement, il y a cette nouvelle culture chez les jeunes.
J'aimerais toutefois ajouter un commentaire. Il ne faut pas négliger ce qui suit : même si on a remarqué depuis les dernières années une espèce de plafonnement, comme vous le dites, dans le taux de bilinguisme des Canadiens, qu'il s'agisse d'une proportion de 17 ou 18 p. 100 de gens qui s'identifient comme étant bilingues aujourd'hui, alors qu'il y a 25 ou 30 ans, il s'agissait d'une proportion de 15 p. 100, on ne parle pas d'une forte augmentation. Je continue à dire que ce sentiment d'appartenance et ce sentiment de motivation, par rapport à une langue, commencent à l'école. On a remarqué, et les études le démontrent, qu'un élève qui ne se sent pas performer dans l'apprentissage d'une langue seconde, comme en français langue seconde, n'est pas très motivé pour continuer à l'apprendre à l'école.
Comment se fait-il qu'un élève ne se sente pas performer? Ce n'est pas parce qu'un élève est moins intelligent qu'un autre; je pense que l'on n'a pas investi assez de temps et d'énergie dans nos programmes scolaires et dans nos programmes d'enseignement des langues secondes à l'école. On n'a pas investi suffisamment dans la formation des maîtres. Il n'est pas facile de trouver des professeurs de langue seconde, français langue seconde, à l'extérieur de certains endroits plus près du Québec et où il y a une population francophone un peu plus nombreuse. Il n'est pas facile de trouver des professeurs qui pourront inculquer cette motivation et cet intérêt pour la langue. Il faut les trouver et les former, ces professeurs.
Aussi, dans plusieurs régions, on utilise encore des méthodes d'apprentissage basées sur la grammaire, sur ce qu'on faisait il y a 20 ou 25 ans. Ce n'est pas ce que les jeunes veulent apprendre. C'est important la grammaire, mais ils veulent apprendre à parler et à communiquer. Cela explique un peu aussi pourquoi l'immersion est si populaire, mais l'immersion, c'est 300 000 étudiants sur 5 millions; ce n'est pas ainsi qu'on va nécessairement augmenter le taux de bilinguisme. Je m'inquiète donc beaucoup plus des 4 700 000 autres, finalement, qui sont dans des programmes assez inégaux d'une province à l'autre, d'une division scolaire à l'autre et d'une école à l'autre, parce que l'enseignant n'a peut-être pas les qualifications qu'il devrait avoir. Il n'y a pas là de magie; on n'apprend pas une langue en se levant le matin.
Le sénateur Maltais : Cela prend de la motivation.
En terminant, ne croyez-vous pas, messieurs Clément et Lemoine, que l'apprentissage d'une seconde langue doit provenir d'abord du noyau familial, peu importe la langue, qu'il s'agisse du français ou de l'anglais?
Ne croyez-vous pas qu'il faut que la volonté soit bien exprimée dans le foyer de la part des parents? Est-ce encore vrai que le noyau familial est le petit flambeau qui peut faire rayonner le bilinguisme au Canada?
M. Clément : Je n'ai aucune hésitation à vous répondre que oui, c'est exact. Les enfants reconnaissent très rapidement ce qui fait partie de leur propre groupe ou ce qui n'en fait pas partie. La socialisation de l'enfant en bas âge est extrêmement importante dans l'ouverture à ce qu'est un étranger, dans l'ouverture à l'autre, et il est absolument essentiel que cela se passe très jeune.
M. Lemoine : D'où l'importance de commencer en très bas âge la formation linguistique à l'école. On a un petit problème avec les enfants qui deviennent adolescents et qui entrent au niveau secondaire. Les parents ont de moins en moins de poigne sur ces jeunes, et il faudra trouver pour ces jeunes des motivations qui ne sont peut-être pas celles qui émanent du milieu familial ou des parents.
Le sénateur Maltais : Je suis sûr que la sénatrice Chaput pourra vous indiquer cette motivation. Merci, c'était fort intéressant.
La sénatrice Chaput : Merci, cher collègue, de votre confiance. Certaines de mes questions ont déjà été abordées, mais j'aimerais obtenir des compléments d'information.
Vous avez parlé du cadre européen qui pourrait, si le Canada le voulait, devenir un modèle qui pourrait être utilisé au Canada et qui pourrait être cohérent : un cadre ou une politique pancanadienne. On sait très bien que l'éducation est de compétence provinciale, alors, pour ce faire, il faudrait que les provinces et les territoires le veuillent. N'est-ce pas?
Comment pourrait-on motiver les provinces et les territoires à s'y intéresser afin que l'on puisse se doter, à un moment donné, d'une politique pancanadienne ou d'un cadre qui réglerait la difficulté de ne pouvoir comparer les programmes d'éducation d'une province à l'autre, parce les standards sont différents? Comment pourrait-on motiver les provinces et les territoires en ce qui concerne cette problématique?
M. Clément : Nos interactions se sont jusqu'à présent limitées au personnel du Conseil des ministres de l'Éducation. Ce qu'on a cherché à faire — et je n'ai pas de réponse définitive pour vous —, c'est de leur dire que l'évidence est là; si ce cadre est adopté et qu'il y a adoption générale du cadre, la qualité de la pédagogie sera améliorée et il sera possible, à ce moment-là, de standardiser l'enseignement des langues à travers le Canada, ce qui donnerait toutes sortes d'avantages en matière de mobilité par la suite. Il me semble que l'argument de la mobilité devrait intéresser les ministres de l'Éducation. Il s'agirait aussi de pouvoir dépendre de méthodes pédagogiques plus diversifiées et plus élaborées, justement parce que les 10 provinces et les territoires travailleraient ensemble.
Est-ce un effort mieux orienté qu'il ne l'a été jusqu'à présent? Je crois qu'il faudrait essayer de vendre ces deux idées. C'est ce qui me vient à l'esprit pour le moment.
La sénatrice Chaput : À votre connaissance, y a-t-il eu des discussions entre les provinces et les territoires à ce sujet jusqu'à maintenant?
M. Clément : Je crois que non.
La sénatrice Chaput : Monsieur Lemoine, voulez-vous prendre la parole?
M. Lemoine : Il n'y a pas eu beaucoup de discussions entre les provinces, sauf dans le cadre du CMEC, lorsque les membres du comité se sont penchés sur le cadre et son applicabilité au Canada.
Par ailleurs, je crois qu'il faut rester optimiste, car dans un certain nombre de provinces, les curriculums sont présentement révisés selon les principes du cadre. La Colombie-Britannique l'a fait; l'Ontario est en train de le faire dans plusieurs régions; et la Nouvelle-Écosse également. J'ai donc l'impression que cela va finalement avoir un effet d'entraînement.
Le problème est lié au fait que le travail n'avance pas nécessairement en concertation, parce que le système d'éducation ne fonctionne pas de cette manière au Canada. Il faudrait donc une espèce de leadership — j'allais dire dirigiste, mais ce n'est pas un bon terme — un peu plus facilitateur.
Il est difficile d'assigner cette fonction au Conseil des ministres de l'Éducation, car il s'agit d'un secrétariat sans aucune autorité. Je crois donc que tout le monde est heureux dans ce contexte. Toujours est-il que les provinces qui connaissent un certain succès avec le cadre auront sûrement un effet d'entraînement. Je sais que certains conseils scolaires de l'Alberta ont revu leurs programmes scolaires; le conseil scolaire d'Edmonton, par exemple. Ils ne l'utilisent pas uniquement pour l'enseignement du français, mais également avec d'autres langues.
Le cadre n'est pas un outil normatif. C'est un cadre qui décrit ce qui pourrait se retrouver dans un curriculum scolaire, par exemple, qui décrit des niveaux de compétence — que veut dire un B1 ou un B2, par exemple — afin que les définitions soient les mêmes partout. Si je suis B2 en espagnol, c'est parce que je suis capable de dire telle chose, je suis capable de fonctionner dans tel contexte. C'est ce qui nous manque présentement.
La sénatrice Chaput : Quelle recommandation aimeriez-vous que le comité fasse par rapport à ce cadre?
M. Clément : Je ne sais pas dans quelle mesure. Vous me poussez à la limite de ma connaissance de l'influence politique.
La sénatrice Chaput : Quelle recommandation pourrions-nous présenter afin d'améliorer l'apprentissage d'une langue seconde au Canada?
M. Clément : Que le gouvernement fédéral prenne le leadership dans l'organisation, sous forme de conférences, sous forme d'une organisation quelconque, dans le but d'amener les provinces à développer une stratégie commune d'apprentissage et d'enseignement des langues.
La sénatrice Chaput : Merci. Quant à vous, monsieur Lemoine?
M. Lemoine : J'ajouterais qu'il faut rattacher cela à un objectif de bilinguisme. C'est l'une des recommandations que M. Clément a mentionnées plus tôt. Il faut établir un consensus entre les provinces et le gouvernement canadien. Le gouvernement canadien contribue énormément sur le plan financier pour établir un objectif de bilinguisme. Quelle cible voulons-nous atteindre d'ici 2020 en ce qui concerne le bilinguisme chez les jeunes Canadiens? Il faudrait s'entendre sur un objectif de bilinguisme et être sérieux par rapport à cela. Il va falloir prendre des mesures, parce que cela n'arrivera pas tout seul.
Le cadre pourrait nous aider à instaurer une espèce d'incitatif afin d'atteindre cet objectif. Il faut le rattacher à une stratégie et non penser que le cadre doit devenir chose commune partout. À titre d'exemple, on pourrait décider que 40 p. 100 des étudiants qui sortent du secondaire doivent avoir une connaissance suffisamment élevée en anglais ou en français langue seconde.
Si on se donne cet objectif, il faudra y travailler pour l'atteindre. Les provinces le font dans d'autres domaines. Elles veulent obtenir de bons résultats avec les tests du PISA, par exemple. Pour arriver à bien réussir ces tests, les programmes de mathématique, de sciences et d'autres matières ont été grandement modifiés. Les langues, c'est aussi important.
La sénatrice Poirier : La majorité de mes questions ont été posées par les sénateurs qui m'ont précédée, et j'ai bien apprécié vos réponses. En réponse à une question du sénateur McIntyre, vous nous avez parlé de défis tels que celui de maintenir l'intérêt des jeunes envers les études lorsqu'ils sont en 10e ou 11e année. Vous nous avez également entretenus sur les défis auxquels font face les provinces en raison des méthodes d'enseignement qui sont différentes et du manque de professeurs qualifiés à certains endroits. Au moment où je m'interrogeais sur les solutions qui pourraient être apportées, la sénatrice Chaput a posé la question.
J'ai compris que, d'après vous, il reviendrait au gouvernement fédéral de créer une base pour diriger une discussion avec les provinces afin de régler les différents problèmes. Ai-je bien compris?
M. Clément : Je ne sais pas si le mot « diriger » serait approprié, mais le gouvernement fédéral intervient déjà dans la question de l'apprentissage et de l'enseignement des langues par l'entremise du CMEC. Certains programmes passent par les provinces. Cela me semble une extension naturelle du rôle du gouvernement fédéral, puisqu'il a fourni des millions de dollars par année pour l'enseignement des langues, et sous deux volets, soit l'enseignement des langues secondes, mais aussi en ce qui concerne la protection des langues minoritaires au Québec et à l'extérieur du Québec. Il me semble donc que le gouvernement fédéral est déjà très présent sur la scène linguistique, alors pourquoi ne pas continuer? Pourquoi ne pas améliorer les choses?
La sénatrice Poirier : Je viens du Nouveau-Brunswick, une province officiellement bilingue. Je n'ai pas de statistiques à ce sujet, mais une grande majorité de francophones sont bilingues au Nouveau-Brunswick alors que, du côté des anglophones, il semble y avoir moins d'intérêt à être bilingue. Avez-vous constaté la même situation dans d'autres provinces?
M. Clément : Oui, tout à fait. Il semble que les recherches faites par mon collègue Rodrigue Landry, de l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, à Moncton, démontrent que la motivation et la connaissance de l'autre langue sont très liées au pourcentage des parlants de cette langue dans la population. En outre, au fur et à mesure que vous vous éloignez du Québec, quand vous tombez dans des milieux où le français est très peu représenté, par exemple, il y a presque une relation linéaire entre le nombre de francophones et l'intérêt pour l'apprentissage du français. C'est ce que l'on a appelé le déterminisme des nombres, la tyrannie des nombres. Plusieurs recherches se sont penchées sur des solutions pour renverser cette question de vitalité ethnolinguistique qui n'existe pas. Y a-t-il moyen de faire quelque chose?
Évidemment, la question de l'éducation en bas âge est extrêmement importante, ainsi que la façon dont l'école présente l'apprentissage des langues et la façon dont cette représentation permet aux étudiants de combler leurs besoins fondamentaux en matière de motivation et du développement de soi.
La sénatrice Poirier : Merci.
La présidente : Sénateur Maltais, vous aviez une deuxième question?
Le sénateur Maltais : Monsieur Lemoine, vous avez fait une suggestion avec laquelle M. Clément semblait d'accord.
Si on veut dépasser le taux d'inflation du bilinguisme un jour, il faudra faire quelque chose. Comme vous l'avez dit, le gouvernement investit des sommes fort importantes dans ce dossier depuis plusieurs années.
Il serait peut-être temps — et je laisse cela à votre réflexion — de faire des états généraux du bilinguisme au Canada. Il ne faudrait pas que ce soit confié au gouvernement, parce que, dans ce cas, cela donnerait lieu à une chicane perpétuelle. Il faudrait que ce soit fait à l'extérieur du gouvernement, mais sous son commandement et, bien sûr, celui des provinces qui devront absolument y participer. Comme M. Lemoine l'a dit, il faudrait entrevoir l'avenir sur une période de 10 ou 20 ans, se fixer dans le temps pour voir où nous en serons à ce moment-là pour nos enfants et nos petits-enfants.
Pensez-vous que ce serait une bonne chose?
M. Clément : C'est une coïncidence, mais mercredi, on va faire le lancement d'un livre sur les 50 ans de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Cette occasion m'a donné l'occasion de revoir l'impact que cette commission a eu. C'est probablement l'ouvrage le plus important sur le bilinguisme au Canada, et cela n'a jamais été répété. Son influence a été extraordinaire, non seulement sur la Loi sur les langues officielles, mais pour la création du poste de commissaire aux langues officielles, pour les modifications qui ont été faites à la Constitution et à la Charte des droits et libertés, et à une série de lois provinciales qui ont pratiquement un statut constitutionnel au chapitre des langues. Donc, il y a cette filiation.
Je me suis dit qu'on ne peut évidemment pas réinventer la Commission royale d'enquête, mais est-ce qu'une formule de ce type pourrait faire avancer les choses? C'est peut-être semblable à l'idée que vous proposez.
La présidente : Monsieur Lemoine, avez-vous un commentaire à ajouter?
M. Lemoine : Je suis entièrement d'accord avec cela. Il est peut-être temps qu'on s'arrête et qu'on se pose ces questions. On se les pose ici, mais on n'a pas les réponses. On a des idées de réponse, mais il serait intéressant de les poser dans un contexte un peu plus large avec de bonnes personnes autour de la table qui proviendrait de partout au pays. Je suis d'accord avec vous, ce ne sont pas les gouvernements qui devraient nécessairement être les premiers acteurs, mais il faut qu'ils participent.
Pour revenir à votre commentaire, sénatrice Poirier, on ne peut pas discuter d'éducation. Malgré tout le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, et malgré toute la bonne volonté et les fonds qu'il verse aux provinces pour l'enseignement des langues, il faut que cela se fasse avec les gouvernements provinciaux, puisque ce sont eux qui contrôlent l'éducation. Un gouvernement ne peut pas arriver et imposer cela, mais il peut certainement rendre la chose plus facile et alléchante, justement, grâce à ce leadership qui le porte normalement, et à un pouvoir de dépenser qui n'est pas négligeable. Tout le monde réagit bien lorsque cela ne coûte pas trop cher dans sa propre juridiction.
La présidente : Si vous le permettez, j'aimerais aussi avoir vos commentaires sur le fait que le français n'est pas obligatoire dans les écoles, dans plusieurs provinces et territoires canadiens. Quel rôle cet aspect joue-t-il dans la question de la motivation, et quel message cela envoie-t-il à nos jeunes?
M. Clément : C'est une arme à deux tranchants. Vous exigez que l'apprentissage des deux langues soit obligatoire, et lorsqu'une chose est rendue obligatoire, les enfants perdent leur motivation intrinsèque à l'égard de l'activité. Ils le feront tout de même, mais dès qu'ils auront la chance de ne plus le faire, ils ne le feront plus. Ce sont malheureusement les résultats de travaux qui ont été faits sur ces questions.
J'aurais plutôt tendance à aborder la question en transformant l'approche pédagogique à l'apprentissage des langues. On pense que les enfants sont motivés de façon tout à fait pragmatique. Je pense que les enfants se développent; ce sont des êtres qui se développent et qui vont développer une personnalité, ils vont développer leurs capacités de connaître, ainsi de suite. Ce phénomène est tout à fait naturel. C'est quelque chose qui arrive naturellement avec la maturation des enfants.
Alors, il faut voir ce qui les fait tiquer et essayer d'introduire les langues comme faisant partie du bagage qu'ils vont aller chercher à l'école comme quelque chose de naturel et de satisfaisant. C'est ainsi que je le ferais plutôt que de le rendre obligatoire.
Il est aussi vrai de dire qu'un peu de pression fait qu'une motivation qu'on qualifierait d'« extrinsèque », donc complètement imposée de l'extérieur, est peut-être la source d'une motivation intrinsèque au moment où l'enfant intègre l'activité à sa propre personnalité.
Je vais donc vous donner une réponse qui est un peu mixte. Je pense qu'il faut travailler sur la possibilité que l'apprentissage des langues remplisse des besoins personnels chez les enfants — c'est extrêmement important —, et avec un peu de pression pour leur permettre de commencer à goûter à cette chose.
La présidente : Souvent, les gens me disent, en Alberta, que pour eux, le français est une option. Ils suivent un cours deux fois semaine et, souvent, il est annulé, parce qu'il y a d'autres activités qui s'inscrivent à l'horaire. Ce n'est pas comme les cours de mathématiques ou de géographie qui sont obligatoires. On peut se passer des cours de français, parce que l'école ne les palce pas dans un cadre où on valorise nécessairement l'enseignement de la langue.
M. Clément : Exactement. Il y a beaucoup de problèmes avec le français de base, l'approche de l'enseignement des langues en utilisant le français de base, car il n'y a pas de suivi. La pédagogie de l'immersion est de beaucoup supérieure.
La présidente : Merci de nous avons fait part de vos commentaires. Monsieur Lemoine, vous avez quelque chose à ajouter?
M. Lemoine : J'aimerais en profiter pour revenir sur votre question, sénatrice Tardif. Vous avez raison quand vous dites que de rendre le cours de français ou d'anglais langue seconde facultatif au niveau scolaire donne un message qui n'est pas nécessairement positif pour les gens.
J'aurais tendance à ajouter qu'il serait intéressant de le rendre obligatoire, que cela passerait sûrement un bon message. Cependant, si on le rend obligatoire, et par le fait même, qu'on n'a pas amélioré la qualité de nos enseignants, ou que l'on n'a pas des enseignants suffisamment diplômés pour l'offrir, ou encore que nos programmes scolaires ne sont pas améliorés, je ne suis pas certain qu'on se rende service.
Le rendre obligatoire serait formidable, mais je pense que, demain matin, on ne pourrait pas fournir ce service partout où on devrait le fournir, comme on fournit les services en mathématiques, en histoire, en sciences ou dans les autres matières.
La présidente : Merci beaucoup. Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'avoir partagé votre expertise et votre expérience avec nous. Ce fut un réel plaisir de vous entendre. Je vous remercie d'avoir été généreux de votre temps.
Nous prendrons une pause de quelques minutes pour nous préparer à recevoir notre prochain témoin.
(La séance est suspendue.)
——————————
(La séance reprend.)
La présidente : Honorables sénateurs, la séance est reprise. Cette partie de notre réunion abordera la question de la jeunesse. Notre témoin est M. Justin Morrow, fondateur et président de Canadian Youth for French. M. Morrow était parmi nous en mars 2013 dans le cadre de notre étude sur la Société Radio-Canada. Vous commencez à être un habitué, monsieur Morrow, bienvenue.
Je vous invite à faire votre présentation, et ensuite les sénateurs vous poseront des questions.
[Traduction]
Justin Morrow, fondateur et président, Canadian Youth for French : Honorables sénateurs, merci d'avoir invité Canadian Youth for French à témoigner dans le cadre de votre étude des meilleures pratiques en matière de politique linguistique et d'apprentissage d'une langue seconde.
En tant qu'organisme national à but non lucratif qui vise à faire apprécier davantage le fait français et à augmenter le nombre de Canadiens bilingues au Canada anglais, Canadian Youth for French considère que cette étude et, plus précisément, les recommandations qui en découleront seront d'une grande importance pour les générations futures de Canadiens qui souhaiteront tirer avantage du bilinguisme canadien, surtout au moment où la majorité arrive à un carrefour quant à son approche concernant les langues officielles.
Je reviendrai à la question du carrefour, mais il faut d'abord parler de notre objectif en matière d'apprentissage d'une langue seconde au sein de la majorité. Pourquoi investissons-nous dans l'apprentissage d'une langue seconde? Voilà la question qui devrait être posée à toutes les personnes qui témoignent au comité. Vous devriez obliger chaque intervenant à répondre en une seule phrase.
[Français]
Il est certain que chaque entité ou individu qui témoignera devant vous aura ses propres intérêts, mais on doit s'assurer que tous sont conscients de la raison principale pour laquelle nous investissons dans l'apprentissage d'une langue seconde et, évidemment, qu'ils connaissent le rôle qu'ils jouent dans l'ensemble.
Une fois que vous vous serez assuré qu'ils sont conscients de la raison principale, demandez-leur s'il y a des lacunes dans cet ensemble, et qui est responsable pour le bilinguisme du Canada anglais. À Canadian Youth for French, nous croyons que le Canada investit dans l'apprentissage des langues secondes afin de renforcer son économie au moyen d'une population plus diverse et bilingue. Quand je parle de l'économie, je parle non seulement de l'économie au niveau municipal, provincial et national, mais aussi de l'économie culturelle, communautaire, artistique, et j'en passe.
[Traduction]
Idéalement, notre rôle consiste à appuyer les jeunes après le secondaire en nous assurant qu'ils savent où se diriger pour acquérir, maintenir ou améliorer des compétences linguistiques en français au niveau postsecondaire. Malheureusement, nous avons constaté qu'il reste beaucoup de sensibilisation et divers changements à apporter avant de pouvoir appuyer adéquatement notre public cible. Nous travaillons en ce sens depuis la fondation de notre organisme, en 2009.
[Français]
Tantôt, j'ai mentionné que nous arrivions à un carrefour. Plus précisément, les programmes de Patrimoine canadien doivent changer. Je vous explique pourquoi. Premièrement, en 2006, grâce à une étude du Bureau du commissaire aux langues officielles, plus de 80 p. 100 des jeunes Canadiens de 18 à 34 ans étaient en faveur du bilinguisme, un pourcentage qui a sûrement augmenté au fil des années.
Pourquoi est-ce qu'on se concentre toujours sur la promotion de la dualité linguistique, si plus de 80 p. 100 de la population est déjà en faveur?
[Traduction]
Essayons-nous d'obtenir un taux d'approbation de 100 p. 100?
[Français]
Deuxièmement, notre recherche informelle nous apprend que seulement 0,25 p. 100 des jeunes Canadiens anglais sont issus des programmes d'immersion et utilisent le français de façon régulière trois à cinq ans après le secondaire.
[Traduction]
Pourquoi la majorité des discussions sur l'apprentissage de la langue seconde sont-elles toujours centrées sur le thème de l'immersion alors que seulement 0,25 p. 100 de la population y a pleinement accès? Notez que je ne dis pas que ce n'est pas important. Les programmes d'immersion sont formidables, et nous en avons besoin, mais il existe d'autres façons, complémentaires, d'atteindre notre objectif.
L'approche préconisée dans le cadre des programmes de Patrimoine canadien et d'autres investissements en matière d'apprentissage de la langue seconde doit être modifiée; il faut passer d'une approche axée sur la promotion de la dualité linguistique et sur l'orientation des jeunes vers des programmes d'enseignement en français à des investissements qui correspondent aux besoins des jeunes et à l'adoption d'une approche plus équilibrée axée sur l'offre et la demande. En fin de compte, nous devons nous assurer que ces investissements mènent à l'atteinte de notre objectif principal, soit le renforcement de notre économie à l'aide d'une population plus dynamique et bilingue.
Outre la suggestion et la recommandation mentionnées précédemment, divers autres aspects devraient être étudiés. Le premier est la recherche, qui devrait porter sur deux éléments. J'ai indiqué que notre recherche informelle a démontré que seulement 0,25 p. 100 des jeunes Canadiens anglais sont issus des programmes d'immersion et utilisent le français de façon régulière trois à cinq ans après le secondaire.
[Français]
Malheureusement, il n'existe aucune étude pour confirmer ces données. En fait, cela fait des années que je demande aux gens combien de jeunes continuent à utiliser le français après le secondaire, et on me dit qu'il est simplement trop difficile d'obtenir les statistiques.
[Traduction]
À mon avis, la difficulté d'obtenir ces statistiques importe peu. Lorsque des centaines de millions de dollars en fonds publics sont investis annuellement dans des programmes d'apprentissage de la langue seconde, il faut trouver des façons de s'assurer que les contribuables en ont pour leur argent.
[Français]
Deuxièmement, il nous faut des recherches qui démontrent qu'il est possible d'apprendre le français plus tard dans la vie. Personnellement, j'ai commencé à apprendre le français à l'âge de 23 ans, et je pense que je ne me débrouille pas si mal. Il y a beaucoup d'exemples de jeunes qui ont appris le français plus tard dans la vie, mais tout ce qu'on entend, c'est qu'il faut commencer quand on est jeune
[Traduction]
Le plus tôt sera le mieux, et avec raison. Voilà pourquoi la majorité du financement est consacré au système d'éducation. Je n'essaierai pas de contredire les faits. Beaucoup de recherches ont démontré qu'il est beaucoup plus facile d'apprendre une langue seconde lorsqu'on est jeune, mais certaines personnes ne sont tout simplement pas prêtes à le faire à ce moment-là, pour toutes sortes de raisons liées au développement. Il nous faut des recherches qui démontrent qu'il est possible d'apprendre une deuxième langue plus tard dans la vie.
[Français]
S'il fallait faire la promotion de la dualité linguistique, ce serait une campagne pour dire qu'il n'est jamais trop tard pour apprendre une deuxième langue.
[Traduction]
Le deuxième est la demande au niveau postsecondaire.
[Français]
Au Québec, la plupart des recruteurs viseront plutôt l'international que l'extérieur de la province. Je peux vous raconter une anecdote qui appuiera cette affirmation.
[Traduction]
Les décideurs des établissements du Canada anglais considèrent que la demande de la population étudiante n'est pas suffisante pour justifier l'offre de cours en français.
[Français]
Bref, la demande pour les cours en français au niveau postsecondaire est inconnue. Il faut trouver un moyen de la quantifier.
[Traduction]
Je recommande de lancer un projet pilote dans au moins quatre établissements postsecondaires, qui offriraient tous, au cours de la première année, un cours facultatif intitulé « Le français, comment s'en servir au Canada anglais ».
[Français]
Ce cours solliciterait l'intérêt des jeunes de tous les programmes et démontrerait à l'administration qu'il y a une demande pour que davantage de cours soient offerts en français.
[Traduction]
Lorsque les établissements postsecondaires auront commencé à fournir un flot constant de diplômés bilingues, il faudra établir des liens avec Emploi et Développement social Canada pour veiller à ce que ces diplômés conservent leurs compétences en français et en fassent profiter leurs employeurs éventuels.
[Français]
D'abord, il faudrait soutenir des programmes d'échanges en emploi dans le secteur privé, un peu comme on le fait avec le programme Odyssey, mais qui s'adresserait aux gens sur marché du travail et pas seulement aux jeunes à la recherche d'un stage pendant leurs études. Si vous voulez en obtenir un exemple parfait, vous n'avez qu'à me le demander, et je vous en fournirai un.
[Traduction]
Une autre option serait que les ministères appuient les employés qui veulent mieux servir leurs clients en français ou travailler davantage en français. Il faut offrir aux employeurs qui souhaitent accroître la capacité bilingue au sein de leur organisme des mesures semblables à celles qui sont offertes dans le cadre du programme Jeunesse Canada au travail.
En résumé, Canadian Youth for French recommande que : des modifications soient apportées au financement gouvernemental en matière d'apprentissage de la langue seconde; le gouvernement consulte les chercheurs pour déterminer comment fournir de meilleurs renseignements aux décideurs; le gouvernement appuie financièrement les établissements postsecondaires qui souhaitent offrir un cours de première année facultatif sur l'utilisation du français au Canada anglais; enfin, qu'Emploi et Développement social Canada offre des mesures incitatives aux employeurs et aux employés qui souhaitent acquérir, améliorer ou maintenir une capacité bilingue. Si vous appuyez ces recommandations, je suis certain qu'un jour, de mon vivant, nous habiterons dans un Canada majoritairement bilingue.
Merci.
La présidente : Merci, monsieur Morrow.
[Français]
La première question sera posée par le sénateur McIntyre, suivi de la sénatrice Chaput.
Le sénateur McIntyre : Merci, Justin, de votre présentation. Vous parlez très bien le français.
Je constate que votre organisme, Canadian Youth For French, est présent sur Internet et sur les médias sociaux. Vous y exposez les multiples avantages du bilinguisme, tant sur le plan social, économique que cognitif. Je comprends également que votre organisme a mis sur pied le site Discover Zone, un peu à l'image des sites de rencontre. Je constate également que vous avez effectué une tournée dans les écoles secondaires afin d'établir un premier contact avec les jeunes anglophones qui pourraient être interpellés par les attraits de l'apprentissage du français.
Êtes-vous satisfait des initiatives qui ont été prises par votre organisme afin de promouvoir l'apprentissage d'une langue seconde? Ressentez-vous un certain intérêt de la part des jeunes anglophones du Canada pour l'apprentissage d'une langue seconde?
[Traduction]
M. Morrow : En réponse à votre première question, quant à savoir si je suis heureux de ce que notre organisme a réussi à accomplir, je dirais que nous sommes satisfaits, dans l'ensemble, mais que beaucoup de choses ou beaucoup de pièces du casse-tête sont manquantes. Le volet « Discover zone » qui figure sur notre site web n'est pas actif actuellement. Le projet est en suspens, car les coûts de démarrage sont trop élevés pour nous permettre d'entreprendre un tel projet à ce moment-ci, étant donné notre taille. Pour mener à bien ce projet, nous devrons avoir beaucoup plus de fonds, diversifier nos sources de financement et faire preuve de créativité. Nous avons donc mis ce projet en suspens jusqu'à ce que nous ayons trouvé les fonds requis et que notre organisme soit structurellement solide.
Le volet « Discover zone » découle de nos autres programmes, de présentations dans les écoles. C'est ce que nous faisions auparavant, c'est ce modèle que nous avions adopté avant la création de « Discover zone », et c'était formidable. L'intérêt démontré par les jeunes était extraordinaire, comme l'était celui démontré par tous ceux qui ont vu la présentation. Nous voulions intervenir auprès des élèves du secondaire de deuxième cycle — les élèves de 11e et 12e année —, et la majorité des enseignants voulait que nous le fassions auprès des élèves de 9e et 10e année. Les enseignants considéraient qu'il était préférable d'intervenir auprès des plus jeunes, mais notre modèle d'affaires ne correspondait pas à cette vision. Comme les disparités entre nos objectifs et les objectifs des enseignants étaient trop importantes, nous avons abandonné ce modèle.
Nos visites dans les écoles nous ont permis de découvrir qu'il y avait un intérêt pour des choses comme le volet « Discover zone », un service de mentorat, et cela a mené à la création du volet, qui sera un outil exceptionnel si nous parvenons à le mettre en œuvre.
Le sénateur McIntyre : Votre organisme compte-t-il beaucoup de membres?
[Français]
M. Morrow : Non. On n'a pas offert l'adhésion au grand public. Ce sont seulement les membres du conseil d'administration. Il fallait établir, au sein de l'organisation, une administration et une certaine fondation avant de chercher des membres. C'est ce que nous sommes en train de faire.
[Traduction]
Le sénateur McIntyre : Pour revenir à la question que je vous ai posée plus tôt, lorsque vous discutez avec de jeunes anglophones, constatez-vous un intérêt pour l'apprentissage d'une langue seconde, pour l'apprentissage du français?
M. Morrow : Oui.
Le sénateur McIntyre : Il y a un intérêt?
M. Morrow : Un énorme intérêt.
Le sénateur McIntyre : N'importe où au Canada?
M. Morrow : N'importe où, dans l'ensemble du pays. La statistique du Bureau du commissaire aux langues officielles que j'ai citée fait état de 80 p. 100, et je suis certain que cela a augmenté depuis. La demande existe. Quel que soit l'endroit au pays, si vous interrogez les jeunes sur ce qu'ils pensent du français, ils vous répondront qu'ils auraient aimé l'apprendre au secondaire et qu'ils souhaiteraient pouvoir le faire maintenant. Or, ils ne savent pas que les occasions de l'apprendre sont nombreuses. Les jeunes Canadiens veulent apprendre le français ou aimeraient en avoir l'occasion, et ce, dans une proportion d'au moins 80 p. 100. Le problème, c'est qu'ils pensent que ce n'est pas possible; voilà la lacune. Ils veulent l'apprendre, mais ils pensent que ce n'est pas possible.
Le sénateur McIntyre : Votre organisme regroupe des jeunes de 18 à 35 ans?
M. Morrow : Oui.
[Français]
La sénatrice Chaput : Justin, il y a tout de même quelques années que je t'ai rencontré. Il ne fait aucun doute, tu es convaincu de l'importance d'apprendre une deuxième langue. Tu l'as fait par toi-même, un peu plus tard dans ta vie. Tu travailles maintenant très fort, et la plupart du temps de façon bénévole, à chercher ceux qui pensent comme toi et qui aimeraient apprendre une deuxième langue, n'est-ce pas?
M. Morrow : Oui.
La sénatrice Chaput : Depuis la fondation de votre association, en 2009, j'ai lu que vous aviez environ 22 membres au Canada.
M. Morrow : Oui.
La sénatrice Chaput : Si je me rappelle bien, il y a des membres de la Colombie-Britannique?
M. Morrow : Oui.
La sénatrice Chaput : Les autres sont dispersés ailleurs au Canada?
M. Morrow : Un peu, oui.
La sénatrice Chaput : En avez-vous au Québec?
M. Morrow : Oui.
La sénatrice Chaput : Oui?
M. Morrow : Comme je le disais, nous n'avons pas offert officiellement notre membership au grand public.
La sénatrice Chaput : Je comprends.
M. Morrow : Nous avons mis cette information sur le site web et les gens peuvent s'inscrire automatiquement. Nous n'avons pas partagé d'information avec eux ni rassemblé ces jeunes. Nos membres actifs sont ceux qui sont sur le conseil d'administration. On en compte un dans presque chaque province.
La sénatrice Chaput : Vous dites qu'il y a un grand intérêt de la part des anglophones, si je puis dire, d'apprendre une deuxième langue ou d'apprendre le français. Vous avez constaté cela par l'entremise de vos conservations avec des gens autour de vous, par vos visites dans les écoles? Comment avez-vous découvert ce fait? Est-ce dans le cadre d'une rencontre? Comment pouvez-vous nous dire que, oui, il y a un très grand intérêt à l'égard de l'apprentissage du français?
[Traduction]
M. Morrow : Simplement par des conversations avec les gens que j'ai rencontrés. Comme vous l'avez indiqué, les visites ont donné des résultats incroyables. J'ai eu beaucoup de commentaires au fil de mes voyages et de mes conversations avec les gens, et ce, pas seulement lorsqu'ils savaient qui je suis et ce que je fais dans la vie. Cela pouvait être n'importe où, des personnes rencontrées au restaurant, dans la rue, dans un magasin. Lorsque les gens nous entendent parler français, ils nous envient. Je n'ai jamais entendu de commentaires négatifs de la part des gens que j'ai rencontrés.
[Français]
La sénatrice Chaput : À part les points que vous avez suggérés, si vous aviez une recommandation à faire à ce comité pour qu'il y ait de meilleures pratiques d'apprentissage d'une langue seconde, quelle serait-elle? Vous êtes un jeune homme qui y croit vraiment et qui veut, et vous avez appris la deuxième langue par vous-même. Que pourriez-vous recommander au comité?
[Traduction]
M. Morrow : Pourriez-vous répéter? Vous voulez savoir ce que je recommanderais au comité?
La sénatrice Chaput : Pour favoriser davantage l'apprentissage d'une langue seconde.
M. Morrow : En plus de ce que j'ai déjà mentionné?
La sénatrice Chaput : Oui; ou s'il y a un élément qui vient en tête de liste, vous pouvez le répéter. Quelle est la priorité? Par quoi commencez-vous?
M. Morrow : Je pense qu'il faut commencer par la recherche. J'en ai parlé d'entrée de jeu parce que nous n'avons pas de statistiques. Actuellement, les décideurs prennent des décisions en fonction de renseignements incomplets. Ils n'ont pas tous les renseignements disponibles.
La sénatrice Chaput : Quelles questions devrait-on poser dans le cadre de ces recherches? Quel genre de questions poseriez-vous? Que voulez-vous savoir?
M. Morrow : Nous devons savoir combien d'élèves poursuivent des études postsecondaires, et à quel endroit. C'est important. Actuellement, grâce aux recherches et à toutes les activités qui sont entreprises, nous pouvons calculer combien d'élèves passent de la première à la quatrième année, de la cinquième à la huitième année et de la neuvième à la douzième année. Nous avons les chiffres; nous pouvons le quantifier. Nous pouvons savoir ce qui a été fait et tenté, et calculer les augmentations; nous pouvons savoir ce qui a donné de moins bons résultats, mais que l'on peut toujours utiliser. Toutes les recherches concluent qu'il faut commencer à un jeune âge et essayer de faire passer les jeunes dans le système, que c'est en commençant tôt qu'on leur permet de progresser. Or, il n'existe aucune statistique sur ce qui se passe après le secondaire. Personne ne sait ce qui arrive à ces jeunes. Personne ne sait ce qu'ils recherchent, ce qu'ils veulent ou ce dont ils ont besoin. Voilà par quoi nous devons commencer.
Nous ne savons pas ce qu'ils veulent faire et où ils veulent aller. Comment quantifier cela? Comment savoir combien d'élèves poursuivent leurs études en français. Une fois que nous aurons ce barème et que nous saurons combien il y a d'élèves, alors nous pourrons commencer à mettre à l'essai différentes méthodes de recherche ou différents moyens d'accroître ce chiffre après les études secondaires. Tant que nous n'aurons pas trouvé une façon de calculer ce nombre, nous continuerons d'avancer à tâtons. La recherche est très importante.
[Français]
La sénatrice Poirier : Merci d'être parmi nous. C'est agréable de vous entendre, les jeunes sont tellement importants. La jeunesse est l'avenir du pays, c'est certain.
[Traduction]
Vous avez parlé de la recherche et de l'éducation. Vous avez des membres partout au Canada. Travaillez-vous en étroite collaboration avec eux ou les rencontrez-vous? L'éducation relève des provinces, même l'éducation postsecondaire et collégiale. Les provinces reçoivent des paiements de transfert du gouvernement fédéral, mais ce sont elles qui ont la responsabilité de ce champ de compétence.
Travaillez-vous de près avec les provinces? Est-ce que vous rencontrez des représentants provinciaux? Est-ce que les provinces savent quel type de recherche vous souhaitez? Est-ce qu'elles font cette recherche? Savons-nous si elles font en sorte d'obtenir les données? Je présume qu'elles savent combien de personnes sont inscrites dans des établissements francophones postsecondaires. Je présume que les ministères de l'Éducation des provinces savent combien d'élèves du secondaire fréquentent un établissement francophone ou anglophone, qu'il s'agisse d'une université ou d'un collège communautaire, et quels cours ils suivent. Il doit bien y avoir des statistiques à cet égard.
M. Morrow : Non, nous n'avons pas obtenu grand-chose des provinces. Nous n'avons pas beaucoup cherché à obtenir des données provinciales. Nous nous concentrons davantage sur les statistiques nationales, car nous nous occupons d'autres domaines que l'éducation. Nous ne nous penchons pas sur les études secondaires, parce qu'il y a suffisamment de données à cet égard. Ce qui nous intéresse, ce sont les études postsecondaires, universitaires ou collégiales, et le marché du travail ainsi que les communications dans le quotidien et dans les médias par exemple. Nous n'avons pas réellement communiqué avec les provinces.
Je sais par contre qu'elles nous connaissent et qu'elles savent ce que nous faisons. Nous avons discuté avec des représentants du Conseil des ministres de l'Éducation à quelques reprises lors de rencontres privées. Cet organisme nous connaît et il sait ce que nous essayons de faire. Toutefois, il ne possède pas de statistiques. Nous l'avons interrogé, mais il n'a pas été en mesure de nous donner l'information. Aucun des organismes avec lesquels nous travaillons ne peut nous fournir l'information.
La sénatrice Poirier : Même Statistique Canada?
M. Morrow : Pas les données précises que nous voulons.
La sénatrice Poirier : Au Nouveau-Brunswick, qui est une province bilingue, j'ai déjà été députée et ministre. La province savait combien de personnes étaient bilingues il y a de nombreuses années par rapport à maintenant et quelle était la tendance. C'est pourquoi je vous ai posé la question. Puisque vous n'avez pas pu obtenir de données, avez-vous communiqué avec les provinces pour essayer d'obtenir un peu d'information?
M. Morrow : Non, nous n'avons pas vraiment fait en sorte d'obtenir ces statistiques. Nous travaillons plutôt avec nos partenaires, qui ont beaucoup travaillé avec les provinces. C'est difficile pour nous en tant que petit organisme récent de travailler avec le gouvernement fédéral, 10 gouvernements provinciaux et 3 gouvernements territoriaux. Nous avons utilisé efficacement nos ressources en nous concentrant sur le gouvernement fédéral et en tirant parti de nos partenariats avec d'autres organisations qui ont beaucoup travaillé avec les provinces.
La sénatrice Poirier : Si vous possédiez ces statistiques, en quoi vous seraient-elles utiles? De quelle façon cela vous aiderait-il?
M. Morrow : Cela nous aiderait grandement parce qu'en ce moment le budget réservé à des organismes comme le nôtre est limité. Ce budget n'augmente pas et, avant notre existence, tout cet argent était réparti. Nous avons essayé de mettre davantage l'accent sur l'éducation postsecondaire, mais il y a beaucoup de recherches, de chercheurs et de lobbyistes. Les institutions qui ont été créées et le système lui-même sont axés sur l'éducation primaire et secondaire. L'éducation postsecondaire et notre groupe démographique ont été laissés de côté. Il est difficile pour nous d'exercer des pressions au nom de notre groupe démographique sans ces statistiques. Nous avons besoin de statistiques, d'information, de recherches pour appuyer nos efforts et montrer que nous accomplissons un très bon travail.
Il y a aussi un énorme potentiel que nous devons exploiter, alors nous devons consacrer davantage de nos ressources financières ou humaines au développement de ce potentiel pour que nous puissions commencer à changer les choses.
La sénatrice Poirier : Puisque les provinces sont responsables de l'éducation, même de l'éducation postsecondaire, qui, selon vous, devrait faire la recherche afin d'obtenir ces statistiques, si ce ne sont pas les provinces?
M. Morrow : La recherche peut se faire par bien des gens. Je pense que lorsque j'ai présenté mon premier exposé, il y avait des représentants du ministère du Patrimoine canadien et des chercheurs d'universités de partout au pays. Ils étaient tous réunis dans le cadre d'une table ronde en 2010. Des chercheurs de partout présentaient leurs études. Ces gens-là pourraient mener les recherches.
La sénatrice Poirier : Pensez-vous qu'ils seraient davantage en mesure de le faire que les ministères provinciaux de l'Éducation?
M. Morrow : Je pense qu'ils seraient davantage en mesure de coordonner les recherches. Plutôt que chaque province mène ses propres recherches, il y aurait une entité centrale pour coordonner les recherches pour assurer l'uniformité et la consultation entre les chercheurs.
La sénatrice Poirier : Je vous remercie beaucoup.
[Français]
La présidente : Monsieur Morrow, vous avez indiqué que vous aviez appris le français à l'âge de 23 ans, je crois.
M. Morrow : Oui.
La présidente : Le dernier groupe de témoins a beaucoup parlé de la motivation comme étant un facteur important de l'apprentissage d'une deuxième langue. Je vous félicite d'en avoir pris l'initiative. Quel a été le facteur motivant pour vous, pour l'apprentissage du français?
M. Morrow : Le français a tellement changé ma vie personnelle ...
[Traduction]
... à tellement d'égards que c'est incroyable. Je pourrais vous raconter tellement d'histoires.
La présidente : Vous n'avez pas à nous parler de votre vie privée. Est-ce un programme d'échanges ou un professeur en particulier qui vous a motivé?
M. Morrow : Au départ, c'est beaucoup plus simple que cela. J'ai été recruté par l'équipe de football de l'Université Laval. Avant que je commence à apprendre le français, j'avais abandonné les cours de français en neuvième année, car j'avais obtenu la note de 59 p. 100. J'étais comme bien d'autres jeunes Canadiens anglophones, le français ne m'intéressait pas. Il y avait d'autres choses beaucoup plus importantes. C'est au football et dans les autres sports que j'excellais à l'école.
Ma carrière au football m'a amené de la capitale de la rhubarbe de l'Ontario à l'Université de la Colombie- Britannique, à Vancouver, puis à l'Université d'Ottawa. Les choses ne se sont pas bien passées dans ces deux universités, alors l'Université Laval, à Québec, est venue me chercher pour faire partie de son équipe de football à la condition que j'apprenne le français et que je suive mes cours en administration en français. C'est ce qui m'a motivé.
Je n'avais pas pris mes études universitaires au sérieux jusqu'à ce moment-là, alors il est devenu très important pour moi de réussir mes études. Je devais d'abord apprendre le français. Je ne voulais pas rater cette occasion qui m'était offerte, d'autant plus que l'Université Laval m'offrait toutes les ressources et le soutien nécessaires. Je ne voulais pas rater cette occasion, alors j'ai travaillé très fort pour devenir bilingue et réussir.
J'ai échoué ma première année d'université, mais ensuite j'ai reçu le prix d'athlète par excellence pancanadien alors que j'étudiais à Laval en administration dans ma langue seconde. C'est un cheminement incroyable pour moi.
Cela m'a motivé, mais ma première motivation était le football. Mettre sur pied cet organisme et faire ma part à mon tour montrent bien comment ma vie a radicalement changé pour le mieux grâce à l'apprentissage du français.
La présidente : Je vous remercie de nous avoir raconté cette histoire. Elle démontre comment on peut passer d'une motivation très pragmatique à une motivation très intrinsèque.
Le sénateur McIntyre : J'aimerais parler de la zone découverte que votre organisme a créée. D'après ce que je comprends, elle offre aux jeunes une sélection d'expériences canadiennes-françaises qui correspondent à leurs critères de recherche. Est-ce que la zone découverte répertorie des forums, des emplois et des activités communautaires qui s'inscrivent dans un contexte de découverte linguistique?
M. Morrow : Oui, tout est lié à la découverte linguistique. Comme je l'ai mentionné, cette plateforme n'est pas disponible en ce moment, mais nous essayons de trouver un moyen de la remettre en ligne. Dans les documents promotionnels que nous avons créés, nous la présentons comme un guichet unique pour tout ce qui est lié au français.
On peut choisir entre cinq volets différents, qu'il s'agisse de l'éducation, de l'emploi, d'expériences de courte durée ou de ressources indépendantes. Une fois que ce choix est fait, il faut répondre à d'autres questions qui permettent de mieux définir ce que vous recherchez. Si vous choisissez l'éducation, vous devez dire si vous voulez faire des études universitaires ou collégiales. Vous devez préciser où vous voulez poursuivre ces études, dans quel programme vous voulez vous inscrire et quel est votre niveau de compétence en français. Parmi toutes les possibilités qui existent au pays, la zone découverte vous présentera celles qui correspondent le mieux à vos besoins et à vos intérêts.
Si vous choisissez l'emploi, le processus est semblable. Dans ce cas, la recherche s'effectue dans une banque d'emplois et les employeurs peuvent également faire des recherches pour trouver des employés. Pour les autres choix, c'est également similaire.
[Français]
Le sénateur McIntyre : Cette année, le Canada célèbre le 50e anniversaire de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Plusieurs initiatives ont déjà été mises sur pied afin d'assurer la croissance du nombre de Canadiens qui sont bilingues.
Votre organisme tient-il à faire une différence à ce chapitre? Avez-vous programmé des événements afin de marquer cet événement important?
[Traduction]
M. Morrow : Malheureusement, nous n'avons pas été en mesure de participer à beaucoup d'activités. Nous travaillons actuellement sur la structure interne de l'organisation. Ce travail est plus long que nous le pensions, alors nous n'avons rien prévu pour l'instant.
Le sénateur McIntyre : D'accord, je vous remercie.
[Français]
La présidente : Merci, monsieur Morrow, de votre participation à cette étude. Vos commentaires et suggestions sont très importants et pertinentes pour notre étude.
S'il n'y a pas d'autres questions de la part des sénateurs, je déclare la séance levée.
(La séance est levée.)