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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule 9 - Témoignages - Séance du matin


GANDER, Terre-Neuve-et-Labrador, le mardi 27 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 7 h 53, afin de mener son étude sur la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada; et d'étudier un projet d'ordre du jour.

Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.

Le président : Nous avons discuté du budget lié au voyage que nous nous proposons d'effectuer en septembre en Écosse et en Norvège. Quelqu'un a-t-il une question à poser avant que la motion ne soit proposée? Nous devrions peut- être d'abord la proposer. Quelqu'un veut-il proposer une motion en ce qui concerne le budget?

Le sénateur Wells : J'en fais la proposition.

Le président : Y a-t-il des questions concernant le budget lié au voyage proposé? Est-ce que les dates prévues — du 21 au 27 septembre — et le budget de 162 488 $ conviennent à tous les membres? Un exposé sera présenté sous peu au comité.

Qui est en faveur de la motion? Qui s'y oppose?

La motion est adoptée.

En outre, quelques représentants de médias ont demandé la permission de filmer une partie de notre débat d'aujourd'hui. Comme je vous l'ai indiqué plus tôt, je leur ai fait savoir que j'accéderais à leur requête à la condition qu'ils se fassent discrets et que les membres autorisent leur présence. Quelqu'un peut-il proposer une motion à ce sujet?

Le sénateur Wells : J'en fais la proposition.

Le président : Qui est en faveur de la motion? Qui s'y oppose?

La motion est adoptée.

Je vais suspendre la séance quelques instants de manière à ce que nous puissions nous préparer à entendre les exposés de notre premier groupe de témoins.

(La séance est suspendue.)

——————

(La séance reprend.)

Le président : Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue à la présente séance du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je m'appelle Fabian Manning, sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et président du comité. Avant de céder la parole aux témoins, j'aimerais inviter les membres du comité à se présenter eux-mêmes, en commençant par le sénateur qui se trouve à ma droite.

Le sénateur Munson : Je suis le sénateur Jim Munson, de l'Ontario.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Sénatrice Sandra Lovelace Nicholas, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Poirier : Sénatrice Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur McInnis : Sénateur Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Raine : Sénatrice Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Wells : David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le président : Je vous remercie, mesdames et messieurs.

Le comité poursuit son étude spéciale sur la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada. Il est heureux de commencer sa journée à Gander en accueillant l'honorable Keith Hutchings, ministre des Pêches et de l'Aquaculture de Terre-Neuve-et-Labrador; M. Brian Meaney, sous-ministre adjoint au ministère de l'Aquaculture; et le Dr Darryl Whelan, directeur de la section provinciale de la médecine vétérinaire aquatique. Au nom des membres du comité, je vous remercie d'être ici aujourd'hui.

Nous avons passé la journée d'hier à St. Alban's, à Pool's Cove, et à Harbour Breton, où nous avons pu observer l'activité générée par le secteur de l'aquaculture de notre province. À coup sûr, nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire ce matin.

Je crois comprendre que le ministre Hutchings a des observations préliminaires à nous présenter. Nous entendrons ensuite M. Meaney et le Dr Whelan, puis nous donnerons aux sénateurs l'occasion de poser quelques questions.

Monsieur Hutchings, nous sommes heureux de vous revoir. Nous avons eu l'occasion de vous accueillir à Ottawa il y a deux ou trois semaines. Je suis ravi d'être ici, chez moi, à Terre-Neuve-et-Labrador. Vous avez la parole, monsieur.

L'honorable Keith Hutchings, député de Ferryland à la Chambre d'assemblée, ministre des Pêches et de l'Aquaculture, gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador : Merci, sénateur. Je suis assurément heureux de me présenter devant le comité permanent. À coup sûr, je souhaite la bienvenue à ceux qui ne sont pas d'ici, et j'espère que vous avez apprécié les quelques jours que vous venez de passer dans notre merveilleuse province.

Comme le sénateur Manning l'a indiqué, je suis accompagné ce matin de M. Brian Meaney, sous-ministre adjoint de l'Aquaculture, et du Dr Daryl Whelan, directeur de la Section de la santé aquatique et chef vétérinaire aquatique. Nous sommes ici aujourd'hui pour vous fournir de l'information concernant l'industrie aquicole de notre province, plus particulièrement l'activité économique qui en découle et la croissance qu'elle a connue au cours des dernières années. Nous vous parlerons également des efforts que déploie le gouvernement provincial afin de faire la promotion de l'aquaculture durable, notamment sa collaboration avec les membres de l'industrie en vue de la mise en place de pratiques exemplaires en matière de gouvernance.

Je commencerai mon exposé d'aujourd'hui par une description générale de la situation de l'industrie au chapitre de l'emploi et de l'activité économique, et je dirai certainement quelques mots à propos des mesures que le gouvernement provincial a prises en partenariat avec l'industrie pour favoriser la croissance. M. Meaney et le Dr Whelan vous parleront ensuite de notre stratégie en matière de bonne gouvernance, de nos initiatives liées aux poissons et à l'aquaculture durable, et des attentes que l'industrie nourrit pour l'avenir.

Comme vous l'avez probablement constaté hier, l'aquaculture est devenue au cours des dernières années un puissant catalyseur de notre économie provinciale, et elle a permis de créer des emplois intéressants dans une kyrielle de nos régions rurales. Bon nombre d'entre elles avaient été dévastées il y a quelques années par la fermeture de la pêche au poisson de fond. Le gouvernement provincial a compris que l'aquaculture pouvait être profitable sur le plan économique pour ces régions, et c'est pourquoi, depuis 2006, nous avons fait des investissements de plus de 25 millions de dollars visant à soutenir la croissance et le développement de l'industrie aquicole. Ces investissements ont donné lieu à des investissements privés d'une valeur d'environ 400 millions de dollars, et tout cela s'est traduit par des gains économiques considérables pour une multitude de collectivités. Depuis 2006, le nombre de sites d'aquiculture des poissons a doublé dans la province, la production de moules a atteint des sommets sans précédent et la valeur de la production au sein de l'industrie s'est élevée à 197 millions de dollars en 2013, un record.

Cette croissance a été favorisée principalement par deux programmes du gouvernement provincial, à savoir le Programme d'investissement de capitaux en aquaculture et le Programme de garantie de prêt de fonds de roulement en aquaculture. Le premier de ces programmes vise à faciliter et à accroître l'accès des exploitants d'entreprises aquicoles à du financement, et les entreprises qui sont en mesure d'établir qu'elles sont solides à tous les égards — que ce soit dans le domaine technique, dans le secteur du marketing ou sur le plan de la compétence de leurs gestionnaires — peuvent y participer. Dans le cadre de ce programme, nous investissons un certain montant — un minimum de 250 000 $ s'il s'agit d'une entreprise d'aquiculture des poissons, et de 100 000 $ s'il s'agit d'activités conchylicoles — en vue d'aider les entreprises à renforcer leurs capacités, pour autant qu'elles sont en mesure de doubler ces fonds par un apport d'un montant équivalent du secteur privé.

La diapo 2 indique que la production et la valeur générée par les activités aquicoles dans la province ont augmenté de façon constante. À coup sûr, cette augmentation est attribuable à la collaboration étroite du gouvernement et de l'industrie.

La diapo 3 porte sur l'activité économique générée par le secteur aquicole à Terre-Neuve-et-Labrador. À l'heure actuelle, l'industrie emploie plus de 1 000 personnes, généralement dans les régions rurales de la province. Plus précisément, quelque 467 personnes sont employées directement par des écloseries.

En 2012, 268 personnes travaillaient dans des usines de traitement dotées d'une licence les autorisant à ne traiter que des produits aquicoles. En outre, 932 personnes travaillaient dans des usines de traitement dotées de licences visant de multiples espèces. Dans ces usines, on transforme non seulement des produits de l'aquaculture, mais également des produits de la pêche sauvage. Dans certains cas, le quart, voire le tiers des activités de production de ces usines sont liées à l'activité aquicole.

De surcroît, il est tout aussi important de souligner que, comme toute industrie, le secteur aquicole crée, comme vous pouvez l'imaginer, un nombre considérable d'emplois indirects dans le domaine des services. À coup sûr, il soutient les PME. Les entreprises qui fournissent du matériel, des services de transport et d'emballage, des filets de pêche, des moteurs, des services de réparation et bien d'autres choses ont toutes vu leurs activités prendre de l'ampleur grâce à l'industrie aquicole.

À titre d'exemple, je pourrais mentionner Newfoundland Styro Inc., entreprise de Bishop Falls spécialisée dans les produits d'emballage, Fab Tech Industries, qui fabrique des bateaux et du matériel, et Newfoundland Aqua Service, entreprise de St. Alban's qui fabrique des filets et des cages.

La mytiliculture et la salmoniculture représentent la majeure partie de l'activité aquicole de la province et, comme vous le constaterez, ces deux secteurs de l'industrie ont obtenu des résultats impressionnants.

Comme le montre la diapo 4, 2013 a été une année record pour la salmoniculture dans notre province. Plus de 22 000 tonnes métriques de saumons ont été élevées pour le marché, ce qui représente une augmentation de 32 p. 100 par rapport à l'année précédente. La valeur totale de la production s'est élevée à environ 180 millions de dollars.

Comme l'indique la diapo 5, l'activité économique générée par l'aquaculture a été une véritable bénédiction pour les collectivités de la côte sud de l'île, que vous avez visitée hier, si j'ai bien compris. Je tiens assurément à souligner que la région de Coast of Bays compte six entreprises aquicoles, lesquelles exploitent 87 sites licenciés, en plus d'écloseries situées à St. Alban's, à Stephenville et à Daniel's Harbour.

La diapo 6 porte sur l'industrie mytilicole, qui a établi en 2012 un record de production qu'elle a plus ou moins égalé en 2013 en élevant plus de 4 300 tonnes métriques de moules. Cette production, qui était assurément attribuable à une reprise du marché mondial, était d'une valeur d'environ 15 millions de dollars, ce qui représentait une augmentation de 7 p. 100 par rapport à 2012.

La diapo 7 montre que cette valeur découle de la vente de produits frais sur les marchés nord-américains et de produits emballés sous vide sur les marchés européen et asiatique. Un petit noyau de 8 ou 10 éleveurs sont responsables de la majeure partie de cette production, et on a pu constater qu'ils avaient procédé à un certain regroupement de leurs activités de grossissement.

Les producteurs des secteurs de l'aquaculture des poissons et des crustacés et mollusques de la province observent consciencieusement les règles de sécurité qui ont été mises en place afin d'assurer que les produits qu'ils envoient sur les marchés sont de qualité supérieure et qu'ils sont le fruit d'une aquaculture durable. Cela a donné lieu à quelques réalisations notables. Il convient de souligner que les moules de notre province sont récemment devenues les premières en Amérique du Nord à se voir attribuer une certification au titre de la Norme canadienne sur l'aquaculture biologique, laquelle fournit aux consommateurs la garantie que les produits de la mer qu'ils consomment sont des produits biologiques élevés d'une manière respectueuse de l'environnement.

De plus, en 2013, le gouvernement provincial et l'industrie salmonicole ont mis la dernière main à un régime de gestion des baies qui permettra de déterminer les meilleurs lieux où établir de nouveaux sites aquicoles, de prescrire des pratiques exemplaires et de fixer des périodes de mise en jachère.

Le gouvernement provincial a grandement appuyé les efforts qu'a faits l'industrie afin d'adopter des pratiques exemplaires nationales et internationales, comme le montre, entre autres, notre investissement de 9 millions de dollars dans le Centre pour la santé et le développement de l'aquaculture, qui est situé à St. Alban's et que vous avez visité, si je ne m'abuse.

Notre position de chef de file dans le domaine de la gouvernance sectorielle a été reconnue en 2010. Cette année-là, le Centre des sciences en santé aquatique du Collège de médecine vétérinaire de l'Atlantique, situé à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard, a mené une étude qui a révélé que Terre-Neuve possédait le programme de biosécurité aquicole le plus exhaustif de toutes les administrations canadiennes examinées.

Je vais maintenant céder la parole à M. Meaney et au Dr Whelan, qui vous en diront davantage à propos de la gouvernance.

Brian Meaney, sous-ministre adjoint, ministère des Pêches et de l'Aquaculture de Terre-Neuve-et-Labrador : Bonjour.

Au Canada, la gouvernance de l'aquaculture est une créature à deux têtes, dans la mesure où il s'agit d'une responsabilité que se partagent le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. En ce qui concerne Terre- Neuve, je vous dirai que, en 1986, elle a été l'une des premières provinces du pays à adopter une loi sur l'aquaculture. Cette initiative était fondée sur une démarche coopérative tenant compte du fait que la Constitution prévoit un partage des responsabilités en matière d'aquaculture entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et visant la mise en place d'un système méthodique de développement et de dispositions réglementaires harmonieuses.

Notre loi sur l'aquaculture est entrée en vigueur en 1986, et par sa nature même, elle a été considérée comme une mesure encourageant la réglementation de l'industrie aquicole de Terre-Neuve-et-Labrador. La loi a été mise en œuvre afin d'assurer un développement ordonné et d'encourager la réglementation, mais également pour faire en sorte que des dispositions réglementaires et un cadre stratégique optimaux soient mis en place pour favoriser le développement de l'aquaculture.

Pour faciliter la collaboration avec nos homologues fédéraux, en 1986, nous avons conclu avec eux un protocole d'entente énonçant la nature de chaque échelon de gouvernement et ses responsabilités sur le plan du développement de notre aquaculture provinciale. Ce protocole d'entente s'est révélé être le pilier du processus que nous avons mis en œuvre afin de réglementer et de soutenir l'industrie.

La loi a été examinée et modifiée à deux occasions, la plus récente ayant eu lieu en 2012. À ce moment-là, on a procédé à un examen complet de la loi et de son règlement d'application. Il en a découlé le pouvoir juridique lié à la gestion provinciale de l'industrie aquicole et du développement méthodique, des droits de propriété, une réduction du nombre de différends entre utilisateurs et des mesures contribuant aux activités décisionnelles coopératives fondées sur l'aquaculture.

Nous croyons fermement que la réglementation de l'aquaculture doit s'assortir de l'élaboration d'une démarche stratégique en matière de développement aquicole. En 1990, en collaboration avec l'industrie et les intervenants de la province, nous avons mis en œuvre la première stratégie aquicole provinciale. À la suite d'un examen, en 2000, nous avons instauré une nouvelle stratégie qui a été mise à jour en 2005.

À l'automne 2013, notre ministre a annoncé qu'il était temps de procéder à un nouvel examen de la stratégie aquicole, et nous avons donc entrepris des consultations auprès de tous les intervenants, à savoir les membres de l'industrie et les organismes fédéraux et provinciaux, afin d'établir un plan d'action pour les 10 prochaines années.

Par suite de ces consultations, nous avons publié un document intitulé What We Heard. Il peut être consulté sur notre site web, et nous en fournirons des copies aux membres du comité. Il présente un résumé des points de vue et des souhaits que tous les intervenants et tous les citoyens que nous avons consultés ont formulés en ce qui concerne l'aquaculture dans notre province. Il en découlera une nouvelle stratégie en matière d'aquaculture, qui sera dévoilée en 2014. Une fois de plus, le maintien d'une industrie aquicole durable constituera notre point de mire, et son développement dans les régions rurales et côtières de Terre-Neuve sera au centre de nos préoccupations.

Nous croyons que l'instauration d'un processus axé sur la bonne gouvernance doit s'accompagner de la création d'un guichet unique. Les entreprises aquicoles du Canada se trouvent dans une situation tout à fait particulière dans la mesure où l'obtention d'un permis d'aquaculture peut exiger des démarches auprès de 30 ou 35 ministères ou organismes fédéraux, provinciaux et municipaux.

Afin de simplifier ce processus et de mobiliser l'ensemble des producteurs aquicoles, des collectivités et des organismes concernés, notre ministère des Pêches et de l'Aquaculture offre un service de guichet unique grâce auquel les producteurs peuvent accéder à toute l'information dont ils ont besoin plutôt que d'avoir à remplir 20 ou 30 demandes dans le cadre de divers processus en vue d'obtenir un permis d'aquaculture dans notre province. L'ensemble des ministères, organismes et intervenants de la province en profitent. Nous leur faisons des suggestions, nous leur proposons un processus décisionnel et nous travaillons en étroite collaboration avec eux.

Le processus de gestion de l'aquaculture relève non seulement de la Loi sur l'aquaculture, mais également d'un certain nombre de politiques. Nous avons mis en œuvre un cadre stratégique connexe qui s'appuie sur les plans de gestion des espèces. Nous avons mis en place des plans de gestion à l'intention de l'industrie salmonicole et du secteur mytilicole. Ces plans permettent à l'industrie de cerner ses responsabilités, les responsabilités des gouvernements fédéral et provinciaux et le mode de développement qui contribuera à sa croissance future.

Un certain nombre d'initiatives ponctuelles ont été menées en parallèle. Le ministre a mentionné plus tôt les accords que nous avons conclus relativement à la gestion de l'industrie de la salmoniculture en vue d'optimiser la santé des poissons et de déterminer les meilleurs sites d'exploitation. Par exemple, le code de confinement pour la culture des salmonidés de Terre-Neuve-et-Labrador, reconnu à l'échelle internationale, assure l'entretien des sites d'élevage de l'industrie salmonicole et fait en sorte que les poissons restent le plus possible confinés dans leurs cages.

L'un des traits distinctifs de notre modèle de gouvernance tient à l'adoption d'une démarche axée sur la collaboration entre tous les échelons de gouvernement et les membres de l'industrie en vue de la mise en œuvre concrète et progressive de politiques en matière d'aquaculture visant la saine gestion de l'industrie.

En outre, nous effectuons des inspections de conformité dans les installations d'aquaculture situées sur tout notre territoire et nous appliquons la réglementation connexe. Les sites d'aquaculture marine sont inspectés chaque année. Nous effectuons deux fois par année les inspections prévues par le code de confinement. Nous travaillons en collaboration avec nos collègues fédéraux, par exemple Transports Canada, dans le cadre d'inspections de conformité prévues par la Loi sur la protection des eaux navigables. De surcroît, nous effectuons tout au long de l'année — en règle générale, selon un cycle de 40 à 45 jours — des vérifications relatives à la santé des poissons et à la biosécurité.

En matière de gestion environnementale, nous collaborons avec le gouvernement fédéral, notamment en vue de protéger l'habitat des poissons. Le MPO est évidemment responsable de l'habitat des poissons, mais nous travaillons en étroite collaboration avec lui dans le cadre d'évaluations benthiques préalables à la délivrance de permis et d'activités de surveillance menées durant la période de jachère. Comme le ministre l'a mentionné, il y a une période de mise en jachère, de sorte que, après la mise en place d'un site, nous effectuons un suivi pour nous assurer qu'il conserve des conditions saines.

Les dispositions réglementaires touchant les activités aquicoles que le gouvernement fédéral va instaurer soutiendront cette nouvelle initiative en permettant d'indiquer au public que nos méthodes et nos régimes de gestion sont les meilleurs qui soient.

Cela dit, comme le ministre l'a indiqué, l'objectif consiste à créer des occasions d'expansion et à relever quelques-uns des défis qui nous attendent. Par exemple, dans la région de Coast of Bays, nous n'avons pratiquement pas exploité les sites disponibles dont l'utilisation pourrait contribuer à l'expansion de l'industrie salmonicole dans l'avenir. En outre, les baies situées à l'ouest, vers la région de Burgeo, représentent une véritable occasion, de même que Placentia Bay, à l'est. Il sera possible, au fil du temps, de doubler la production, mais ce sont l'industrie et le marché qui devront être les éléments moteurs de cette croissance.

Comme le ministre l'a mentionné, nous avons créé deux écloseries à la fine pointe de la technologie — il s'agit probablement des deux écloseries les plus modernes de l'hémisphère occidental. L'une est située à Stephenville, et l'autre, que vous avez visitée hier, je crois —, à St. Alban's. Il s'agit là de quelques types de possibilités qui ont été créées, et nous travaillons en étroite collaboration avec l'industrie pour aller de l'avant.

Le secteur de l'approvisionnement et des services revêt lui aussi une importance cruciale, dans la mesure où l'industrie est fortement tributaire de lui. Je crois que vous entendrez plus tard aujourd'hui des exposés à ce sujet. Ce secteur crée lui aussi de l'activité économique et des occasions qui contribuent à la prospérité économique de la province. Il soutient l'assiette fiscale des collectivités locales et a des retombées dans les régions, mais là encore, il fournit à l'industrie une expertise de pointe qui lui permet de progresser.

Nous collaborons étroitement avec l'industrie au chapitre du développement des infrastructures. Si je ne m'abuse, vous avez visité quelques-uns de nos quais où des mesures ont été prises pour assurer la biosécurité des poissons et des sous-produits de poisson à l'intérieur et à l'extérieur des sites d'élevages. La santé des poissons est au centre de nos préoccupations. Nous travaillons sur un stock de géniteurs.

Nous avons établi une bonne relation de travail avec le gouvernement fédéral afin d'étudier l'interaction entre les saumons sauvages et les saumons d'élevage. Nous avons également mené avec nos partenaires fédéraux un examen des stocks de saumons de la côte sud, et l'équipe du Dr Whelan a contribué à cette initiative en se penchant plus particulièrement sur la santé des poissons. Nous collaborons de près avec les intervenants, et nous contribuons réellement à la collecte de données scientifiques. À nos yeux, c'est ce qui doit caractériser une bonne gestion réglementaire de ces décisions.

Au cours des dernières années, l'industrie mytilicole a connu une véritable renaissance. Il s'agit d'un secteur en croissance, et chaque moule produite est envoyée sur le marché. Comme cette industrie doit prendre de l'expansion, nous collaborons avec elle dans le cadre d'un programme de gestion environnementale et d'un programme de surveillance qui lui permettront d'examiner les nouvelles occasions qui s'offrent à elle, particulièrement dans les régions de Notre Dame Bay et de Green Bay. Je crois savoir que vous allez visiter demain quelques-unes de nos installations mytilicoles situées dans la région de Notre Dame Bay.

Par le truchement du Programme sur les techniques et les nouvelles occasions de pêche, le ministère collabore avec l'industrie afin d'acquérir les nouvelles technologies mises au point partout dans le monde en vue de produire du poisson de meilleure qualité, de créer des nouvelles occasions, de réduire les coûts liés à la main-d'œuvre et d'accroître la mécanisation. Comme nous l'avons souligné, la certification est un élément clé du soutien que nous offrons à l'industrie. La norme canadienne sur les moules biologiques, de même que les pratiques exemplaires et les processus de certification mis en place au sein de l'industrie salmonicole, sont des exemples de ce que nous faisons à ce chapitre.

En outre, nous avons des responsabilités à assumer pour ce qui est de la commercialisation des produits de la mer. Les occasions de commercialisation et les possibilités de valorisation de nos produits sont de plus en plus nombreuses. Nos producteurs accèdent à de nouveaux marchés et en visent d'autres non seulement aux États-Unis, mais également en Asie. De plus, grâce à la réduction imminente des tarifs découlant de l'AECG, de nouvelles occasions s'offriront à eux en Europe.

Il y a des difficultés dans tous les secteurs. Nous travaillons en étroite collaboration avec notre industrie. Les différends entre utilisateurs des ressources côtières revêtent une importance cruciale, mais je tiens à souligner que l'industrie a fait un travail exceptionnel afin de cerner les problèmes et les interactions possibles avec les autres personnes qui occupent la zone côtière. De façon générale, les conflits sont très rares. Les gouvernements et les autres utilisateurs des ressources de l'industrie aquicole ont établi une certaine relation de confiance. Cela permet de réduire le nombre de conflits et de prendre des mesures permettant de les prévenir, notamment dans le cadre du processus de délivrance de permis.

Cela met fin à mon bref survol de la gouvernance du secteur aquicole. Je pourrai répondre ultérieurement à vos questions, mais pour l'instant, je céderai la parole au Dr Whelan, qui abordera des questions liées à la santé des animaux aquatiques.

Dr Daryl Whelan, directeur, Section de la santé aquatique, chef vétérinaire aquatique, ministère des Pêches et de l'Aquaculture de Terre-Neuve-et-Labrador : Mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole. J'ai récemment eu la possibilité de discuter avec quelques-uns d'entre vous, et cela a été instructif.

En ce qui concerne la santé des animaux aquatiques, je pense que vous ne serez guère surpris d'apprendre que les considérations d'ordre sanitaire représentent toujours un élément important de l'élevage d'animaux à des fins alimentaires, car cela permet d'assurer la durabilité et le rendement des activités d'élevage, de même que le bien-être des animaux. Nous devons prendre soin des animaux que nous élevons — il s'agit d'une obligation que nous devons tous assumer.

De manière à ce que nous puissions bien nous occuper des animaux terrestres ou aquatiques que nous élevons, nous avons véritablement besoin de l'expertise de professionnels de la santé. Comme vous vous en doutez, à Terre-Neuve, ces professionnels sont formés par une section de la santé des animaux aquatiques. Le gouvernement avait anticipé qu'il s'agirait d'un élément clé de la croissance, de la durabilité et du rendement de l'industrie, de même que d'une obligation et d'une responsabilité pour l'industrie et le gouvernement.

Ainsi, on a créé cette section, dont je suis actuellement le directeur. Je parlerai de quelques-unes des choses que nous faisons, bien que j'aie eu l'occasion d'en parler il y a un jour ou deux. Je serai heureux de répondre ultérieurement à vos questions à ce sujet.

La section fournit des services de vulgarisation concernant la santé des animaux aquatiques, et notre clientèle est très vaste : elle comprend des intervenants des gouvernements provinciaux et fédéral, des membres de l'industrie aquatique en tant que tels, des universitaires — que l'on informe des stocks existants —, des pêcheurs, Pêches et Océans Canada et Environnement Canada. C'est nous qui dispensons quelques-uns de ces services à ces clients. Cela nous donne l'occasion d'examiner ce qui se trouve dans les milieux marin et d'eau douce, et de nous informer sur ce dont disposent les animaux pour y vivre et y survivre.

Je constate que les problèmes auxquels nous sommes confrontés touchent tant les poissons sauvages que les poissons d'élevage, car les pathogènes et les autres problèmes de santé dont nous discutons existent depuis belle lurette et continueront d'être présents pendant longtemps.

Le ministère des Pêches et de l'Aquaculture a besoin d'un solide programme relatif à la santé des animaux aquatiques, et il dispose de plusieurs programmes qui y contribuent. Par exemple, nous avons un programme de surveillance active et passive. Nous visitons les sites d'élevage tous les 30 à 45 jours. Nous disposons d'une ligne d'assistance. Si un éleveur nous indique que ses poissons ne semblent pas bien se porter à tel ou tel endroit, nous pouvons nous rendre sur les lieux afin d'examiner la situation et de tenter de trouver une solution.

Nous avons également mis en place un programme exhaustif de vérification de la biosécurité. Dans le cadre de ce programme, nous visitons des quais et des installations terrestres et aquatiques, nous transférons des animaux d'un lieu à l'autre de la province ou à l'extérieur de la province et nous effectuons des vérifications et des examens pour nous assurer que le degré de biosécurité est le plus élevé qui soit. Nous disposons d'un très solide programme de diagnostics en laboratoire. Nous exploitons trois laboratoires dont il sera question dans une diapo ultérieure.

Nous menons des recherches appliquées pour le compte de l'industrie et du public pour nous assurer d'être en mesure de régler quelques-uns des problèmes existants et d'améliorer un peu les choses pour éviter qu'ils ne se reproduisent. Voilà en quoi consiste notre façon d'aborder les choses.

L'une des très importantes responsabilités que nous assumons tient à l'introduction et au transfert de poissons. Il incombe au gouvernement fédéral, au gouvernement provincial et à l'industrie de s'assurer que les activités liées à l'introduction et au transfert de poissons de même qu'à leurs déplacements soient menées de la meilleure façon possible.

Je crois que le fait de tenir compte du contexte dans lequel les choses se produisent est une bonne chose. Si les membres de l'industrie et les gouvernements provincial et fédéral renonçaient à leurs responsabilités relatives à la santé des animaux, je pense que cela aurait des répercussions négatives sur les ressources socioéconomiques des diverses régions. Aucune mesure d'atténuation des maladies ne serait prise. Nous savons que les animaux qui évoluent en mer ou en eau douce sont touchés par tout ce qui se trouve dans leur milieu. Si nous ne prenions aucune mesure d'atténuation, nous perdrions le contrôle. Les maladies prendraient de l'ampleur et pourraient se transmettre d'un stock à l'autre. Le fait de renoncer à ces responsabilités est une position intenable pour les gouvernements fédéral et provincial et les membres de l'industrie.

Cela créerait des problèmes de morbidité. Cela nuirait au rendement. Les maladies se répandraient au sein de chaque région et d'un pays à l'autre, ce qui donnerait lieu à des mesures de restriction des importations et des exportations dont les conséquences se feraient ressentir à l'échelle nationale. Il faudrait procéder à un abattage, alors qu'on aurait pu prendre des mesures d'atténuation afin de maîtriser la situation. Là encore, comme je l'ai dit, cela aurait des répercussions socioéconomiques sur les diverses collectivités, les provinces et le pays lui-même. Si j'insiste là-dessus, c'est pour que l'on comprenne que la santé des poissons est un pilier fondamental de l'industrie, comme la santé des animaux l'est pour le secteur de l'élevage d'animaux terrestres.

Je suis très fier de notre personnel affecté à la santé des animaux aquatiques, et je pense que le gouvernement l'est aussi. Nous disposons d'un effectif composé de personnes provenant de divers horizons ayant mené de longues études. Ils ont reçu une formation extrêmement poussée. Ce sont des titulaires de diplômes d'études supérieures, des vétérinaires et des épidémiologistes. Il s'agit d'experts en biosécurité, de spécialistes de la vérification, de techniciens en santé animale et de techniciens de laboratoire. Ils forment un groupe très diversifié, mais très mobile. Ce sont des gens polyvalents qui ont reçu une formation multidisciplinaire. Nous comptons énormément sur eux, et nous sommes très fiers d'eux.

En ce qui concerne nos installations, je vous dirai que nos activités sont réparties sur trois sites en fonction de leur nature. Nous disposons d'un laboratoire humide à St. John's où sont pris en charge quelques-uns des besoins des universités, du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial.

Nous avons concentré dans nos installations de Grand Falls nos activités liées aux programmes de surveillance sentinelle de certains mollusques et crustacés comme la moule bleue et l'huître.

Le Centre pour la santé et le développement de l'aquaculture de St. Alban's constitue notre joyau. Quelques-uns d'entre vous ont eu la possibilité de le visiter. Comme je l'ai dit précédemment, il s'agit d'une merveilleuse installation. Je pense que, au fil du temps, il portera ses fruits et acquerra une réputation internationale. Je crois qu'on vous en parlera un peu plus longuement plus tard.

Il s'agit d'un laboratoire multidisciplinaire de pointe. En fait, le centre compte neuf laboratoires différents où l'on tente de détecter des problèmes liés à la santé des poissons et de comprendre les problèmes environnementaux qui pourraient survenir. À cette fin, nous utilisons plusieurs technologies dont nous disposons. Nous voulons connaître, par exemple, les répercussions qu'aurait un déversement de pétrole ou une autre catastrophe écologique sur les animaux marins.

Nous nous attendons à ce que ces installations se voient accorder une certification. À l'heure actuelle, elles sont accréditées par l'Agence d'inspection des aliments du Canada, et nous avons entrepris le processus relatif à la norme ISO-17025 s'appliquant aux laboratoires. En outre, nous continuons de collaborer avec le Conseil canadien de protection des animaux. Comme je l'ai indiqué, une visite virtuelle a été menée le 25 mai.

J'ai dit qu'il s'agissait d'initiatives liées à la santé et à la biosécurité, mais en fait, ces deux termes renvoient pour nous à une seule et même réalité — rien ne les distingue vraiment puisque la santé et la biosécurité se nourrissent l'une l'autre. Un autre élément que nous prenons en considération pour les animaux eux-mêmes tient à la sélection des sites en eau marine ou en eau douce où ils seront élevés. Nous tentons de déterminer ce que nous pouvons faire pour optimiser leur milieu, accroître au maximum leur rendement et réduire au minimum les effets que leur environnement peut avoir sur leur santé.

Le choix des sites est un élément très important de la croissance. Nous tentons de placer les poissons loin de tout vecteur de maladie connu. Nous tentons de les éloigner de tous les autres animaux sauvages. Nous tentons d'éviter les régions qui peuvent être touchées par un problème.

Le milieu marin comporte des bactériophages. Nous savons que certains d'entre eux sont présents depuis très longtemps — depuis 900 ou 1 000 ans. Nous tentons d'atténuer les problèmes auxquels peuvent être confrontés les animaux que nous élevons.

Nous participons à plusieurs initiatives découlant de la politique de mise en jachère. Il faut qu'il y ait une rotation des sites. Il faut qu'un site soit utilisé pendant une certaine période, et que, par la suite, il demeure inutilisé un certain temps. Ce principe de l'industrie agricole est appliqué en aquaculture. Il s'agit d'un principe très judicieux — il est mis en pratique depuis des siècles, et il a du bon sens.

Nous disposons de sites propres à des espèces particulières et nous séparons les animaux selon les classes d'âge parce que nous voulons éviter que des animaux novices se trouvent en présence d'animaux adultes ou d'autres types d'animaux. Nous voulons nous assurer qu'ils sont protégés.

Nous disposons de plusieurs stratégies relatives à la santé des poissons. Nous utilisons notamment des certificats de santé aux fins des transferts entre les provinces de l'Atlantique. Nous collaborons énormément avec elles. Nous déployons de très grands efforts afin d'harmoniser nos activités, et nous savons ce qui est transféré d'une province à l'autre. Cette initiative a été importante pour nous.

Nous avons mis en place des protocoles de désinfection et de nettoyage qui doivent être observés en diverses circonstances. Bien souvent, les gens nous disent que l'on semble faire bien des choses et traiter cela comme s'il s'agissait d'une situation très critique. Ce n'est pas tout à fait exact. Ce que l'on tente de faire, c'est de réduire au minimum les effets négatifs sur les animaux que l'on élève. Les éleveurs ont l'obligation de les traiter du mieux qu'ils le peuvent, et il s'agit non pas de savoir si l'on doit en faire davantage pour le saumon sauvage que pour le poisson d'élevage, mais de prendre toutes les mesures possibles pour protéger le poisson.

Comme M. Meany l'a mentionné tout à l'heure, nous travaillons aussi sur l'établissement de zones de gestion des baies, qui est donc une entreprise vraiment cruciale. Nous établissons les zones en fonction de la recherche scientifique, et le processus est très axé sur les données probantes. Nous faisons appel à des épidémiologistes, à des océanographes et à l'industrie en tant que telle. Il y a beaucoup de spécialistes qui participent à l'établissement de zones distinctes. On procède à cette délimitation de zones parce que, même s'il semble s'agir d'un milieu ouvert, il y a de nombreuses choses différentes qu'on peut faire pour créer cette espèce de séparation.

Une autre chose importante pour nous, ce sont les infrastructures biosécurisées, par exemple des quais propres, des quais à partir desquels certaines choses sont extraites définitivement, ce qui réduit l'incidence de tous les effets possibles. Il y a entre autres un programme concernant cette infrastructure de quai auquel le gouvernement provincial participe activement en fournissant diverses choses pour les quais, mais aussi pour le traitement des eaux usées. Il est tout à fait crucial que nous comprenions le fait que, si on prend une grande quantité d'animaux dans le milieu marin, qu'il s'agisse d'animaux sauvages ou d'élevage, et qu'on les envoie à une usine de transformation sans qu'il y ait vraiment d'initiative visant à éliminer le risque ou les possibilités de propagation, alors je pense que cela peut entraîner des problèmes. Le gouvernement l'a constaté, et il s'est doté d'un très bon programme de traitement des eaux usées qui a permis de régler ce problème.

L'accès thérapeutique est un accès très important, et je pense qu'on ne saurait trop insister sur le fait que, lorsqu'on a des animaux, il faut les élever. Je n'envisage pas les choses différemment, qu'il s'agisse d'animaux terrestres ou aquatiques ou encore d'humains. Peu importe ce qu'on fait dans le monde, il y a toujours un risque pour la santé. Si on ne peut l'éliminer dans le cas des humains, si on ne peut guérir toutes les maladies et régler tous les problèmes de santé, comment pourrait-on le faire dans le cas des animaux terrestres ou aquatiques?

Ce qui compte, c'est de tout mettre en place pour gérer la situation de façon à empêcher les mouvements et la propagation, qu'il s'agisse d'animaux terrestres ou aquatiques ou d'humains. Pour faire cela, il a toujours été crucial de disposer d'un accès thérapeutique. Il faut posséder cette boîte à outils pour pouvoir gérer ces choses, mais, en même temps, on applique des stratégies non thérapeutiques et des stratégies de gestion. Nous faisons le même genre de choses, nous, les humains, des choses comme utiliser un désinfectant pour se laver les mains. Nous parlons de cela dans le cas du poisson. Il n'y a pas de différence. L'accès thérapeutique est nécessaire et fait partie intégrante du processus. Nous constatons vraiment qu'il y a très peu d'outils offerts à l'industrie de l'aquaculture en tant que telle.

En ce qui concerne les agents thérapeutiques accessibles, ceux-ci sont réglementés par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada et par la Direction des médicaments vétérinaires. C'est fonction de la compétence fédérale applicable, mais il y a très peu d'agents thérapeutiques accessibles. Si un seul agent thérapeutique est utilisé, cela entraîne un accroissement de la tolérance et de la résistance, et ce n'est pas la bonne façon de procéder. Je profiterais de l'occasion pour examiner cette question en profondeur.

À l'heure actuelle, il y a des initiatives de collaboration, et on essaie d'amener Santé Canada à coordonner la participation de la Direction des médicaments vétérinaires et de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. Pour le MPO et Environnement Canada, nous avons vraiment besoin d'un processus d'approbation simplifié, quelque chose de très bien prescrit, de très bien défini, de sorte que nous puissions créer un environnement stable dans lequel les entreprises qui veulent participer connaîtront les normes, les critères et pourront les appliquer de façon efficace. La disponibilité est là, mais, en même temps, nous savons que ce serait une utilisation judicieuse, que ce serait durable, que ce serait vérifié et que tout passerait par le processus réglementaire.

On parle beaucoup du pou du poisson. Il faut se rappeler qu'il s'agit évidemment d'un crustacé sauvage qui existe. On le retrouve dans tous les océans sur bien des espèces de poissons. Il y a divers types de poux du poisson, mais ces poux affectent les poissons sauvages et d'élevage. On essaie donc de situer les cages d'élevage marin loin des rivières à saumons où on sait qu'il y en aura de grandes quantités, puisqu'on essaie de réduire l'incidence de la présence de poissons sauvages sur ses stocks de poissons d'élevage. Les sites en question sont surveillés par le ministère des Pêches et de l'Aquaculture et par divers gestionnaires désignés de chacune des entreprises présentes dans le milieu marin.

Les élevages de saumons disposent en réalité de plans de gestion de la santé des poissons abordant le risque lié au pou du poisson. Cette question a déjà été posée. L'idée, c'est vraiment d'assurer une surveillance. Une chose que vous devez savoir, c'est que les stocks de poissons ne sont pas tous traités. On n'utilise pas de facteurs de croissance. On n'utilise pas d'hormones. Je peux affirmer catégoriquement qu'il n'y a pas de traitement prophylactique aux antibiotiques. Les vétérinaires vérifient s'il y a un problème, et, avec les gens de l'industrie, décident de la meilleure méthode à utiliser, qu'il s'agisse d'un agent thérapeutique ou non, ainsi que de la stratégie à suivre. C'est ainsi que le processus se déroule. C'est un processus très important. Il nous est utile.

L'accès à des traitements pour la lutte contre le pou du poisson est en réalité un problème mondial. Un peu partout dans le monde, il y a des administrations qui sont aux prises avec celui-ci, et il y a toujours de nouveaux travaux qui sont faits, sur les agents thérapeutiques comme sur l'aspect non thérapeutique. Les programmes de lutte antiparasitaire intégrée sont vraiment à l'avant-plan maintenant. Voilà qui ne devrait pas vous étonner. C'est quelque chose que nous voyons constamment dans les élevages terrestres. Ce sont les mêmes programmes exactement qu'on met en œuvre, et on fait la même chose dans le domaine de l'aquaculture.

L'anémie infectieuse du saumon est un virus dont on parle aussi assez souvent dans les actualités. L'organisme responsable des maladies déclarables comme le virus de l'anémie infectieuse du saumon est l'Agence canadienne d'inspection des aliments. C'est un problème très grave, mais qu'il est possible de gérer, et que d'autres pays ont connu et surmonté. Les initiatives relatives à la biosécurité, la surveillance, le dépistage précoce et par la suite le dépeuplement sont les moyens utilisés à l'échelle internationale, et des cas d'anémie infectieuse du saumon ont été signalés partout dans le monde.

Pour cette maladie, une chose qu'il est important de se rappeler, c'est qu'il faut vraiment un degré important de collaboration lorsque l'existence du problème est constatée. Pour moi, en tant que vétérinaire, ce n'est pas vraiment différent des autres problèmes de santé à traiter. Qu'il s'agisse des choses qui se passent sur terre, dans le cas des animaux sauvages et d'élevage ou même des humains, cette collaboration est nécessaire pour régler les problèmes. Je suis heureux de pouvoir vous dire qu'il y a une excellente collaboration à ce chapitre entre l'ACIA, les producteurs et le ministère des Pêches et des Océans.

Il y a certains enjeux clés. Nous avons besoin d'un accès à certains des laboratoires de référence pour établir qu'il y a bel et bien un problème dans le cas des maladies contagieuses. Essayer de respecter les définitions de cas, essayer d'accélérer le processus et essayer de maximiser et d'optimiser la santé des poissons et de tendre vers cette réalité est vraiment un défi. Je pense qu'il va être relevé avec le temps et que le comité sénatorial peut en fait jouer un rôle en en parlant.

Les stratégies des provinces et des producteurs accélèrent la gestion du virus de l'anémie infectieuse du saumon. Nous effectuons beaucoup de surveillance de l'extérieur, auprès des producteurs en tant que tels; il s'ensuit une biosécurité accrue dans différentes régions. Cela entre en jeu, et l'interaction avec le rôle du gouvernement fédéral est une chose à laquelle nous travaillons constamment.

Nous menons des travaux de recherche appliquée sur le virus de l'anémie infectieuse du saumon. Nous estimons que cela est très important. L'une des erreurs que nous voyons, c'est que, dans les initiatives visant à régler le problème de l'anémie infectieuse du saumon, on ne réfléchit pas dans certains cas à ce qu'on fait pour l'avenir, à la façon de gérer la chose, à ce qu'on fait pour améliorer les initiatives ou aux choses qu'on peut faire. C'est un problème très important à régler, et je pense que la province et l'industrie ont vraiment commencé à s'y attaquer. Des choses comme l'accroissement de la biosécurité, les mesures de dépeuplement qu'on prend, le contrôle de la mortalité, toutes ces choses sont des mesures différentes qu'il faut prendre, parce qu'il n'y a pas de traitement pour l'anémie infectieuse du saumon.

Nous avons besoin de plus d'infrastructure. Il y a toujours des besoins en infrastructure. Il faut des usines de transformation approuvées pour manipuler les animaux de cette manière, des quais, des installations de nettoyage et de désinfection, toutes les infrastructures dont nous parlons, le personnel et l'équipement.

Au sujet de la mise en silos, du compostage, de l'équarrissage, de toutes ces pratiques qu'on applique aux cas d'animaux morts, ce sont là des choses avec lesquelles nous travaillons constamment. Parmi les initiatives permanentes auxquelles nous prenons part à la division et qui ont reçu beaucoup de soutien de la part du gouvernement, on compte des choses comme une base de données sur la santé, un système de soutien décisionnel utilisé avec l'industrie, des systèmes de gestion des données de surveillance et des laboratoires, des essais cliniques appliqués en laboratoire et sur le terrain, les programmes de lutte antiparasitaire intégrée des provinces de l'Atlantique et notre surveillance ciblée de divers types de pathogènes présents dans le milieu marin ou dont nous avons entendu parler ailleurs.

Les zones de gestion des baies sont vraiment cruciales à ce chapitre, ainsi que pour les études épidémiologiques et sur la santé et pour les études épidémiologiques concernant le pou du poisson. Comme vous pouvez le constater, l'épidémiologie est vraiment une chose importante pour nous, car nous avons vu comment elle fonctionne pour la santé humaine, par exemple pendant l'épisode du SRAS. Certaines des meilleures réponses que nous avons obtenues ont été celles des épidémiologistes, certaines des choses qui nous ont montré ce que nous pouvions faire pour réduire les répercussions à l'avenir. Nous estimons que c'est très important, et nous avons encouragé cette discipline au sein de la division.

Nous souhaitons que soit conclu le protocole d'entente sur la santé des animaux aquatiques avec le gouvernement fédéral. Nous voulons adopter le Règlement sur les activités liées à l'aquaculture d'une manière très utile pour les provinces et pour l'industrie. Nous préconisons l'élaboration d'agents thérapeutiques approuvés et l'accès à ceux-ci pour l'industrie de l'aquaculture. Il s'agit d'en faire un usage judicieux et responsable.

Nous avons des projets en cours à l'heure actuelle dans la province. Il y a des projets touchant le labre, dont des poissons nettoyeurs, et on envisage des possibilités non thérapeutiques. Nous faisons des travaux d'épidémiologie spatiale et de réseaux, d'océanographie, sur l'anémie infectieuse du saumon et sur la maladie rénale bactérienne, ainsi que diverses études sur les facteurs de risque. Nous entretenons beaucoup de liens de collaboration.

Nous avons des liens avec l'Université Memorial de Terre-Neuve-et-Labrador, et plus précisément avec le Marine Institute et le Ocean Sciences Centre, avec le Collège de médecine vétérinaire de l'Atlantique, avec le Centre for Aquatic Animal Health Sciences, avec Pêches et Océans Canada et avec l'association de l'industrie, la NAIA, ainsi que les producteurs en tant que tels.

Ce sont des organismes avec lesquels il est extraordinaire de collaborer. Le Collège de médecine vétérinaire de l'Atlantique est l'un des cinq collèges vétérinaires du Canada, mais il est très spécialisé dans la santé des animaux aquatiques. Il jouit d'une réputation mondiale. En Norvège et en Écosse, les gens savent immédiatement de quoi il s'agit lorsqu'il en est question. C'est une ressource incroyable pour les provinces de l'Atlantique et pour le Canada. Merci.

Le président : Merci, docteur Whelan.

Au nom du comité, je vous remercie de nous avoir accueillis même s'il était tard dimanche soir à vos installations de St. Alban's et aussi de l'excellent exposé que vous nous avez présenté à ce moment-là. C'était très instructif. C'est le sénateur Wells qui va lancer la période de questions ce matin.

Le sénateur Wells : Encore une fois, bienvenue au comité, et merci beaucoup de l'exposé que vous nous avez présenté dimanche soir, docteur Whelan.

Monsieur le ministre, vous avez parlé de deux ou trois programmes du gouvernement provincial. Je pense qu'il y a un programme de 250 000 $ et quelques autres initiatives. Je sais qu'il y a des programmes fédéraux par l'intermédiaire de l'APECA et de certains fonds d'infrastructure. Quel a été le rôle des programmes fédéraux dans l'expansion et le succès récents de l'aquaculture à Terre-Neuve-et-Labrador?

M. Hutchings : Vous parlez des programmes de financement?

Le sénateur Wells : Oui.

M. Hutchings : De notre point de vue, et, j'imagine, en envisageant l'expansion du secteur du point de vue de Terre- Neuve-et-Labrador, tout financement est crucial pour inciter les investisseurs à s'installer dans la province. Je pense que, dès le début, je veux dire dès le début de notre histoire, il y a eu plusieurs sites d'aquaculture à petite échelle. Je pense que nous voulions que des joueurs importants viennent stimuler ce secteur.

À ce chapitre, le financement a été crucial pour les attirer et pour fournir le soutien nécessaire. Le Dr Whelan a parlé de la biosécurité, du fait de fournir les quais et de toute l'infrastructure des sites qui, elle aussi, soutient l'industrie. Le financement est extrêmement important dans l'ensemble, et, grâce à notre programme de capitaux, nous avons été en mesure d'attirer ces joueurs-là aussi et de continuer de les soutenir.

Brian, vous pourriez probablement parler des autres aspects du financement provenant du gouvernement fédéral.

M. Meaney : Les programmes fédéraux accessibles pour les projets de grande envergure dans la province se limitent en réalité au programme de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, mais celui-ci a offert beaucoup, beaucoup de soutien. Une très forte proportion des dépenses de l'APECA à Terre-Neuve-et-Labrador ont été faites dans le secteur de l'aquaculture, mais il est important de faire remarquer que nous faisons affaire avec des entreprises internationales.

Le capital est mobile dans le domaine de l'aquaculture. Pour pouvoir susciter des investissements dans les régions rurales du Canada atlantique, il faut que les gouvernements s'assurent qu'ils offrent les meilleures possibilités et les meilleurs modèles d'affaires pour que les choses se fassent. Les programmes sont complémentaires. Nous collaborons avec nos homologues du gouvernement fédéral et avec les gens de l'industrie pour favoriser ces projets. Ils sont vraiment cruciaux.

Le sénateur Wells : Merci de votre réponse.

Ma prochaine question s'adresse d'abord au ministre Hutchings. À l'heure actuelle, il s'agit principalement de salmonidés et de moules. Votre ministère envisage-t-il autre chose à plus long terme? Envisageons-nous d'autres possibilités liées à d'autres mollusques ou crustacés ou à d'autres poissons de fond? Quels sont les projets et qu'envisageons-nous?

M. Hutchings : Je pense que la situation actuelle se résume au fait que nous venons de passer en revue notre stratégie provinciale globale. Nous l'avons examinée, et nous avons publié le document intitulé What We Heard, qui est probablement dans votre cartable. Nous avons examiné la situation relative aux salmonidés et aux moules à partir de ce point de vue. C'est là-dessus que nous nous sommes concentrés, et c'est assurément dans ces secteurs que nous avons été témoins d'une croissance. C'est là que nous en sommes pour l'instant.

Nous avons cerné un énorme potentiel de croissance dans ces deux secteurs, mais l'une des choses sur lesquelles nous voulons nous pencher à l'avenir, du point de vue de la biosécurité, c'est une infrastructure. À la lumière de ce que nous avons entendu, nous reconnaissons le besoin d'infrastructure supplémentaire. Nous voulons nous assurer que celle-ci est accessible avant que nous ne procédions à l'expansion. Nous voulons nous assurer que l'infrastructure existe.

Pour ce qui est des autres types et du travail d'exploration, nous recevons constamment des demandes de renseignements concernant les autres types d'aquaculture et autres choses de ce genre. Nous sommes assurément ouverts à l'idée, mais nous voulons nous assurer d'abord et avant tout que nous avons la structure nécessaire pour assurer la croissance de notre industrie et que nous disposons de l'infrastructure nécessaire pour permettre cette croissance.

Pour l'instant, nous n'envisageons certainement pas d'expansion vers l'extérieur dans l'immédiat. C'est quelque chose que nous envisagerions assurément à long terme, mais nous devons nous assurer que nous disposons de l'infrastructure et que tout est en place, la biosécurité dont nous avons besoin pour l'expansion.

Je ne sais pas si Brian ou le Dr Whelan voudraient dire quelque chose là-dessus.

M. Meaney : J'ai seulement une chose à dire rapidement. Nous avons envisagé diverses espèces par le passé. Nous avons fait des recherches sur le pétoncle, l'omble chevalier, l'oursin et le lompe. Il y a des éleveurs en ce moment qui, surtout dans le secteur des moules, travaillent dans celui des huîtres, et envisagent par exemple les possibilités d'ostréiculture dans la province. Il y a toujours la possibilité pour l'industrie d'envisager de nouvelles espèces, mais il est certain que ce serait les intervenants de l'industrie qui devraient respecter nos protocoles environnementaux et de biosécurité et être en mesure de le faire.

Le sénateur Wells : J'ai une question à poser, si vous me le permettez. La question sera brève, mais je ne peux pas vous garantir que la réponse le sera aussi.

Docteur Whelan, la section dans laquelle vous êtes actifs, l'industrie de l'aquaculture, est peut-être l'élément le plus crucial. Je veux dire... il faut encore que nous trouvions des entrepreneurs, que nous attirions des marchés et que nous structurions les marchés financiers et de capitaux.

Vous avez parlé de vos interactions avec l'ACIA et Santé Canada. Notre comité va probablement formuler des recommandations à l'intention d'entités fédérales. Avec quels autres ministères ou entités du gouvernement fédéral interagissez-vous, à part Santé Canada et l'ACIA, et quelles sont vos plus grandes frustrations dans ce processus? C'est un élément important, parmi les choses que nous devons savoir.

Dr Whelan : Il se peut que la réponse soit longue. Je pense que, pour être juste envers les entités auxquelles nous avons affaire... il y a celles dont nous avons parlé, Pêches et Océans surtout, au fond, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Santé Canada de façon secondaire, puisque, au bout du compte, tout ce qui est fait doit ne comporter aucune répercussion sur la santé humaine. C'est évident. C'est ce qui se passe. Nous interagissons aussi avec Environnement Canada de temps à autre. L'interaction peut être positive, ou pas vraiment positive parfois.

Pour ce qui est des entités fédérales, ce sont là les plus importantes, en réalité. À un moment donné, c'était tout, à partir de la Loi sur la protection des eaux navigables, qui relevait du MPO, de Transports Canada et ce genre de choses. Il y a des interactions à ce chapitre.

Le sénateur Wells : Docteur Whelan, je pensais précisément à la section avec laquelle vous traitez.

Dr Whelan : Oui, et c'est là où j'allais en venir. Cela semble étrange, mais toutes ces organisations ont en réalité une interaction avec le domaine de la santé des animaux aquatiques. Cela semble effectivement bizarre, mais il y a beaucoup d'entités fédérales qui jouent un rôle. Il y a beaucoup d'entités réglementaires qui interviennent, et je trouve que cela a une incidence sur la manière dont nous pouvons faire notre travail, parfois pour le mieux, et parfois non.

Pour ce qui est précisément des choses concernant l'Agence canadienne d'inspection des aliments, je pense que c'est elle qui a un rôle à jouer. C'est elle qui est responsable des maladies déclarables, alors, lorsque nous constatons l'existence d'une maladie déclarable, je pense que notre tâche, au gouvernement provincial, est de procéder au dépistage et à la surveillance et d'essayer d'optimiser la santé des animaux. Pour ce faire, nous avons besoin d'une bonne collaboration. Nous avons besoin d'un bon leadership de la part des entités responsables de ces choses. L'ACIA est responsable des maladies déclarables au Canada, qu'il s'agisse d'animaux terrestres ou aquatiques. Lorsqu'il y a des cas de maladies déclarables, nous voulons que les mesures optimales soient prises pour assurer la santé des poissons.

La chose la plus importante pour nous, c'est d'être rapides, d'être expéditifs, de façon à ce qu'il y ait soit dépeuplement soit gestion du problème. Je ne l'ai pas mentionné dans mon exposé, mais certains des problèmes précis sur lesquels nous travaillons tiennent aux définitions de cas pour l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Les gens de l'agence attendent pendant longtemps, parce qu'ils doivent avoir une définition de cas selon laquelle il ne fait aucun doute qu'il s'agit de l'étalon-or. Nous sommes assurément aux prises avec ce problème. Nous pouvons donc obtenir du financement et appliquer tous nos pouvoirs réglementaires pour le faire. C'est une très bonne chose, et c'est le rôle réglementaire qui existe. C'est de cette façon que le programme fédéral est exécuté à ce chapitre.

Dans certains cas, ce n'est pas la meilleure chose à faire pour assurer la santé des poissons. Nous voulons que la procédure soit expéditive. Si nous savons très rapidement ce que nous avons détecté et vérifié, nous aimerions que ce soit vraiment la même chose du côté fédéral, qu'on nous dise qu'on est d'accord sur ce qui se passe; pour faire au mieux, à ce moment-là, commençons à déployer des efforts en gérant par la transformation, par le dépeuplement, ou en faisant ce qui doit se faire, peu importe ce que c'est, dans ce domaine relativement aux maladies déclarables. Tout cela pour dire que ces questions ont été soulevées par le passé.

Les choses se font lentement à cet égard, mais elles progressent, et, si le comité peut faire quelque chose pour rendre la collaboration plus efficace et plus rapide, ce sera apprécié. Pêches et Océans Canada nous a fourni un bon soutien pendant tous ces événements, il nous a très bien soutenus en décrivant ce qui se passe dans le milieu naturel et quelles ont pu être les causes. Les représentants du ministère ont très bien joué leur rôle à ce chapitre, et leur rôle n'était pas un rôle principal.

En ce qui concerne le Règlement sur les maladies déclarables, le rôle du MPO consiste réellement à offrir à l'Agence canadienne d'inspection des aliments un soutien de laboratoire. La seule limite mineure que nous avons observée à cet égard est qu'il est très difficile de faire en sorte que ces laboratoires soient exploités en dehors des heures normales de travail. Nous cherchons à obtenir des interventions rapides, c'est-à-dire que nous voulons confirmer ce que la province et l'industrie ont déterminé. Nous voulons cette confirmation rapidement. À défaut de quoi, c'est une limite. Par conséquent, nous voulons que cette situation change.

De plus, un meilleur effort de collaboration est déployé relativement au Système de laboratoire national pour la santé des animaux aquatiques, le programme du SLNSAA. Il faudra établir partout au Canada des laboratoires accrédités qui respectent une certaine norme. Ils font l'objet d'une assurance de la qualité et d'un contrôle de la qualité. Ils soumettent tous leurs produits à des essais interlaboratoires. Nous aurons ainsi l'assurance que, à un certain moment peut-être, l'établissement de St. Alban's sera celui où on dira que nous pouvons affirmer que le résultat du dépistage de cette maladie déclarable est positif; prenons les mesures que nous devons prendre. Je pense précisément à celles-là.

À Environnement Canada, de nouvelles initiatives sont en cours. Le Règlement sur les activités liées à l'aquaculture — si vous le parcourez, vous vous en rendrez compte —, je le considère davantage comme des amendements que comme un règlement, mais il touche les articles 32, 35 et 36. Il permet la destruction de choses auxquelles nous n'avions jamais pensé auparavant. Si vous détruisiez un pou de poisson, ce serait contraire à un article de la Loi sur les pêches. Même si ces poux sont considérés comme un organisme nuisible et qu'il y en a des milliards, sa destruction aurait effectivement posé problème.

Si un agent thérapeutique entre dans l'eau, c'est un problème, puisque tout ce qu'on met dans l'environnement marin peut être considéré comme une substance délétère. Je ne veux pas en rire, mais, si on ajoute du sel dans l'océan, c'est considéré comme une substance délétère; si on ajoute de la saumure ou si on ajoute de l'eau chaude dans l'océan, ce serait considéré comme une substance délétère.

Par le passé, ce qui est arrivé, c'est qu'Environnement Canada avait la capacité de mettre en application la Loi sur les pêches et le règlement du MPO, et il pouvait le faire à tout moment si quiconque faisait une de ces choses. Il fallait que ce soit vraiment harmonisé pour que l'on puisse se débarrasser de ce genre de flous associés à la façon dont le règlement fonctionne. On est parvenu à un certain consensus à cet égard, et je pense que, bientôt, une fois qu'il aura traversé le processus de publication dans la Gazette du Canada, on pourra faire un usage judicieux de tous ces produits, que ce soit la saumure, l'eau salée ou un agent thérapeutique.

La seule chose qu'il reste à faire, selon moi, c'est vraiment de s'assurer, en collaboration avec Environnement Canada, que le Règlement sur l'immersion en mer ne l'emporte pas sur tout le bon travail qui a été effectué. On ne veut pas que, à un moment ou à un autre, alors que trois ou quatre organismes fédéraux, la province et l'industrie comprennent ce qui est disponible et ce qu'on peut faire en vertu du protocole prescrit, faire l'objet d'une intervention par un autre organisme fédéral qui dit que ce n'est pas bien. On pourrait émettre une directive prévoyant des amendes, des peines d'incarcération et ce genre de choses. C'est le genre d'ambiguïtés réglementaires que nous espérons voir changer.

Le sénateur Munson : Merci beaucoup de votre présence. Encore une fois, docteur, je vous remercie pour l'autre soir. C'était une excellente introduction au milieu de l'aquaculture de votre province.

Je vais poser deux questions en une. Monsieur Meaney, vous avez parlé de 35 organismes et d'un guichet unique. Si je voulais investir dans un centre de pisciculture ou d'aquaculture dans la province, par où est-ce que je commencerais? À qui est-ce que je m'adresserais? De combien d'argent est-ce que je disposerais? Comment puis-je entrer dans ce milieu s'il n'y a que quelques organismes qui exploitent les centres de pisciculture?

Il y a les aspects politiques en jeu, et il y a l'aspect investissement. Comment passe-t-on de 35 organismes à un guichet unique pour faciliter les choses? Quand vous parlez, comme le ministre l'a dit, des perspectives dans ce domaine, il semble y avoir beaucoup de poissons dans cette grande mare. C'est la première question.

Plus précisément, la question 2 concerne le volet des assurances. Il me semble que la pratique de ces activités comporte une grande part de risque, qu'il s'agisse de destruction par l'environnement ou de maladies.

Nous avons entendu l'exposé du Dr Harpreet Kochhar, qui est le vétérinaire en chef de l'ACIA. Il a laissé entendre que, comme le gouvernement fédéral dépense beaucoup d'argent pour indemniser les gens, l'assurance privée pourrait être la solution pour les gens. Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador appuierait-il ce genre d'approche, lui aussi?

Ce sont deux questions distinctes, mais je pense qu'elles sont interreliées.

M. Meaney : Avant de formuler mes commentaires, je voudrais seulement dire que je pense qu'il y aura d'autres témoins aujourd'hui qui ont fait ce genre d'investissement et que vous souhaiterez peut-être leur poser cette question.

L'aquaculture s'assortit d'un risque élevé. Tout système de production de poissons d'élevage est une entreprise à risque élevé. Il faut beaucoup de planification, beaucoup de connaissances et beaucoup de capital pour exercer cette activité. En ce qui concerne la façon dont vous investissez, notre rôle consiste en partie à faciliter la liaison avec l'industrie, à repérer les possibilités, à travailler avec l'industrie et à trouver des emplacements, des partenaires qui pourraient être disponibles dans notre province, et à travailler en collaboration selon un modèle d'entreprise solide et fiable qui fonctionnerait dans notre environnement particulier.

Nous avons eu beaucoup de chance pour ce qui est de faire affaire avec des entreprises dont les représentants sont présents ici. Ce sont des personnes très professionnelles, hautement qualifiées et qui connaissent extrêmement bien l'industrie. C'est sur ce fondement que vous devez investir. Tout bon plan d'affaires peut permettre d'obtenir des capitaux. Je pense que c'est probablement le cas, quelle que soit l'industrie dont il s'agit.

L'aquaculture, plus particulièrement, exige une expertise spécialisée, et un investisseur spécialisé doit travailler avec vous. Nous avons eu la chance d'avoir des entreprises canadiennes en particulier. Je pense qu'il est important de souligner que, en ce qui concerne les exploitations sur la côte Est, ce sont toutes des entreprises canadiennes. Ce sont des entreprises locales dont le siège social est situé dans le Canada atlantique et qui soutiennent les Canadiens de l'Atlantique, mais elles accèdent à des marchés de capitaux internationaux pour pouvoir faire ce qu'elles font.

Comme l'a indiqué le ministre, depuis un certain nombre d'années, nous avons constaté que notre investissement de 25 millions de dollars dans le Capital Equity Program a permis de recueillir plus de 400 millions de dollars de capitaux privés qui ont permis d'amener le secteur des salmonidés, par exemple, à ce qu'il est aujourd'hui. Ce sont des composantes essentielles.

Du point de vue du gouvernement, je crois que notre rôle consiste à fournir une feuille de route, à donner la capacité de suivre le programme du début à la fin et à fournir à tout le monde tous les renseignements dont il a besoin, d'un point de vue réglementaire, et qui lui permettront d'en tenir compte dans sa planification d'entreprise.

En plus des mesures de soutien qui ont été mentionnées plus tôt, comme notre Capital Equity Program ou le Programme de développement des entreprises de l'APECA, il s'agit d'établir un partenariat en ce qui a trait aux plans d'activités commerciales intelligentes et de pouvoir les voir se réaliser dans des collectivités côtières de partout au pays. C'est notre rôle de faciliter ces projets.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons pour directive d'encourager et de réglementer l'industrie. Nous prenons les deux aspects de cette responsabilité très au sérieux, et nous voulons que les plans d'entreprise soient solides. Des gens sont là pour travailler avec vous. Si vous avez l'investissement, je pense qu'il y a dans la salle des gens qui pourraient vouloir vous parler après la séance, aujourd'hui.

Pour répondre à votre deuxième question sur les assurances, les entreprises sont assurées. Habituellement, elles souscrivent des polices liées à des risques spécifiés qui s'appliquent à des initiatives précises ou à des problèmes particuliers. Je pense que ce serait une erreur de présumer qu'aucun régime d'assurance n'est offert. Il y a des assureurs privés qui fournissent une assurance protégeant l'aquaculture contre les risques spécifiés. Je pense que vos commentaires de l'ACIA concernent probablement les maladies déclarables et la capacité d'indemnisation en vertu de la Loi sur la santé des animaux qui est offerte à tous les éleveurs du Canada, terrestres ou aquatiques. Je pense qu'il s'agit d'une autre question. Les maladies déclarables sont celles qui sont uniques ou nouvelles au Canada et dont les assureurs ne tiendraient probablement pas compte, mais pour ce qui est des risques de tous les jours, les entreprises sont assurées.

Le sénateur Munson : Merci de cette réponse. Quand pensez-vous que le guichet unique verra le jour?

M. Meaney : Je pense qu'il existe déjà dans le cas du processus d'octroi des permis. Comme je l'ai dit, la clé du volet du guichet unique pour l'octroi des licences est que nous fournissions un guichet, une demande, un formulaire qui arrive dans un bureau plutôt que de tenter de faire le suivi de 15 à 35 entreprises individuelles. Ce système existe déjà dans notre province actuellement, et il fonctionne assez bien.

Le sénateur Munson : Docteur Whelan, êtes-vous convaincu qu'un nombre suffisant de protocoles de biosécurité sont en place pour réduire au minimum les menaces potentielles d'AIS?

Dr Whelan : Pourriez-vous répéter la dernière partie, s'il vous plaît?

Le sénateur Munson : Y a-t-il suffisamment de protocoles de biosécurité en place pour réduire au minimum la propagation des menaces potentielles d'AIS, d'anémie infectieuse du saumon?

Dr Whelan : Une chose dont il faut se rendre compte — et peut-être que je ne l'ai pas assez dit —, c'est que, lorsqu'il s'agit de maladies ou de problèmes de santé en général, toutes les mesures que vous prenez aident à réduire au minimum les éventualités, quelles qu'elles soient. C'est donc une question de gradient ou de degré. Des mesures de sécurité sont en place dans toutes les exploitations, je dirais, au Canada, et dans toutes les régions.

Les protocoles existent bel et bien. Il y a des normes internationales. Il y en a qui sont appliquées à l'échelle d'une province, à l'échelon de l'industrie. Elles existent bel et bien. Est-ce que tous les protocoles dont vous disposez vont prévenir parfaitement toute maladie ou tout problème de santé? Je répondrais catégoriquement que non, parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, si nous ne pouvons pas le faire en dépit des efforts que nous avons déployés pour assurer la santé humaine dans le monde entier et que nous ne pouvons empêcher personne de contracter une maladie ou d'avoir des problèmes de santé, il est certain que vous pouvez vous attendre à la même chose dans le cas de l'élevage terrestre ou aquatique. Il y aura des problèmes. En réalité, cela revient au degré et au niveau de perfectionnement des programmes de biosécurité.

Suis-je satisfait de ce dont nous disposons à Terre-Neuve? Je dirais : oui et non. Je dirais que nous nous efforcerons toujours d'en faire plus. Nous sommes heureux d'avoir eu recours à tous les moyens dont nous disposions, d'avoir vérifié les normes internationales, d'avoir visité diverses administrations à l'étranger et d'avoir intégré tout ce que nous pouvions intégrer dans nos protocoles à Terre-Neuve. L'industrie prend les choses à cœur. Nous prenons cela très au sérieux, et je dirais qu'il s'agit d'un processus évolutif.

Donc, suis-je heureux? Je dirais que je suis content, mais que nous nous efforçons toujours d'en faire plus et qu'il va toujours y avoir de nouvelles améliorations à apporter. Qu'il s'agisse d'avancées technologiques, de nouveaux types de nettoyage et de désinfection, de nouveaux types d'équipements, de nouveaux protocoles de gestion, de l'intégration de vaccins ou d'autre chose, c'est un processus évolutif. Je pense qu'on n'en viendra jamais au point où je serai heureux, mais c'est ainsi que cela devrait être. Nous devons nous efforcer d'en faire plus.

La sénatrice Poirier : Merci pour votre présence. Heureuse de vous revoir, monsieur le ministre.

Je voudrais seulement poser quelques questions et, s'il y a du temps pour un deuxième tour, j'en aurais en fait probablement plus que quelques-unes.

La première question que je voulais poser concernait le fait que vous avez établi votre loi et votre règlement sur l'aquaculture. Ils sont en vigueur depuis 1986 ou 1988. Je ne suis pas certaine de la date, mais à peu près à cette époque. Savez-vous ou pouvez-vous nous dire s'il y a d'autres provinces qui ont établi une loi semblable et quel est l'avantage de cette loi pour les fermes ou les personnes qui pratiquent l'aquaculture. Qu'est-ce qu'elle change dans leur vie?

M. Meaney : Il est certain que la plupart des provinces côtières ont une loi ou un règlement sur l'aquaculture. Il y a divers modèles partout au pays. En Colombie-Britannique, par exemple, le MPO est le principal organisme de réglementation, tout comme à l'Île-du-Prince-Édouard, notamment. La Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick possèdent tous deux une loi sur l'aquaculture. La province de Québec en a une aussi. L'Ontario utilise un ensemble de règlements différent, mais possède un règlement sur l'aquaculture.

Manifestement, d'un point de vue commercial, biologique, de même qu'économique et social, il est important d'avoir un ensemble de lignes directrices réglementaires indiquant à l'industrie comment exploiter ses entreprises dans les limites qui lui sont imposées. C'est un avantage pour notre public, de même que pour le secteur privé. Il est certain que c'est crucial du point de vue des aspects commerciaux.

Par exemple, si on se penche sur un article particulier de notre loi, j'ai mentionné la dualité de l'aquaculture au Canada. Les provinces sont tenues par la loi de légiférer l'aquaculture aux termes d'un article de la Constitution portant sur la propriété et les droits civils. Il s'agit d'une situation unique, où un mytiliculteur, un trutticulteur, ou salmoniculteur possède une propriété, un animal situé dans une voie navigable publique. Cette propriété, visée par la disposition sur les droits civils, est cruciale pour ce qui est de pouvoir utiliser ce poisson, par exemple, comme sûreté au titre de la Loi sur les banques du Canada. Des approches et des responsabilités très, très pratiques ont été établies en vertu de la loi, mais, encore une fois, évidemment, comme dans toute industrie, savons-nous quelles sont les limites? Comment exercez-vous vos activités dans le respect des limites de manière à vous assurer que, dans la totalité de votre régime réglementaire, la province est gérée de façon appropriée et durable d'un point de vue environnemental? La loi sur l'aquaculture fournit des directives, de l'information et un processus relativement à l'obtention de licences, de permis et d'approbations qui permettent de le faire, mais elle décrit aussi vos responsabilités et les pénalités qui vous seront infligées si vous n'exploitez pas votre entreprise de façon appropriée.

La sénatrice Poirier : Le MPO a-t-il participé d'une manière ou d'une autre à la rédaction de la loi pour savoir si elle comportait des similitudes avec celles d'une province ou d'une autre?

M. Meaney : Notre interaction avec le ministère de Pêches et des Océans est en grande partie axée, comme je l'ai indiqué plus tôt, sur le protocole d'entente que nous avons conclu avec le gouvernement fédéral en 1986. La plupart des provinces l'ont fait la même année, et les protocoles d'entente ont été mis à jour régulièrement.

Le protocole d'entente nous fournit des définitions et certains indicateurs qui nous disent : « Voici ce qu'est la responsabilité fédérale, et voici ce qu'est la responsabilité provinciale. » Je pense que, à l'échelon provincial, partout au pays, les lois comportent un élément très semblable, c'est-à-dire qu'elles définissent l'aquaculture et qu'elles expliquent comment obtenir une licence, quelles sont les responsabilités de la province, quelles sont les responsabilités des exploitants ainsi que les autres interactions entre les organismes, de même qu'avec le gouvernement provincial. Il y a un bon nombre de similitudes.

La sénatrice Poirier : Ma deuxième question est la suivante : à la huitième diapositive de votre diaporama, là où vous parlez des difficultés — et nous parlons des moules — la première que vous énoncez est l'interaction ou les conflits entre les utilisateurs côtiers et les pêcheurs et les propriétaires de chalet. Comme je viens d'une région côtière du Nouveau-Brunswick, j'en ai entendu parler précisément durant les années où j'étais aussi membre de l'Assemblée législative. Je suis certaine que les conflits ressemblent probablement à ceux dont nous entendions parler chez moi, qui touchaient l'industrie du tourisme, les taxes foncières pour les personnes vivant dans les régions côtières et diverses choses de ce genre. Pouvez-vous me décrire certaines des résolutions qui ont pu être adoptées afin de surmonter quelques-unes de ces difficultés?

Je suppose que la deuxième partie de la question est la suivante : je sais que nous avons parlé, dans une diapositive précédente, du nombre de possibilités d'emploi qui a augmenté grâce aux activités d'aquaculture dans votre province. Nous observons cette situation dans diverses provinces également. Il était question d'environ 800 à 1 000 emplois, ici, à Terre-Neuve. Une étude a-t-elle déjà été menée afin de déterminer s'il y a eu des pertes d'occasions dans le secteur du tourisme en raison de l'essor de l'aquaculture? Est-ce une chose sur laquelle on s'est penché? Nous avons entendu des rumeurs à ce sujet, et je me demandais si vous aviez des informations selon lesquelles ces rumeurs sont appuyées ou non par des faits.

M. Meaney : Je fais partie de l'industrie depuis 30 ans. Je dirais que, au début, quand l'industrie a vraiment commencé à prendre de l'expansion dans les collectivités côtières, il y avait une certaine méfiance à l'égard de ce que cela signifiait du point de vue de l'interaction, principalement avec les pêcheurs, à cette époque. L'une de nos caractéristiques distinctives, et l'une de nos politiques, c'est que, non, nous n'acceptons pas d'octroyer une licence qui déplacerait une activité de pêche traditionnelle. C'est ce processus que nous avons utilisé pour commencer et que nous utilisons encore aujourd'hui.

Notre processus d'octroi de licence comprend, par exemple, la consultation du syndicat des pêcheurs afin que les comités de pêche locaux soient au courant et que la collectivité locale soit au courant d'une activité qui est proposée. Les premiers temps, dans les années 1980 et au début des années 1990, je crois bien, nous avons eu beaucoup de discussions et certaines rencontres très animées avec des propriétaires de chalet, avec des pêcheurs, avec d'autres utilisateurs de ressources maritimes et avec des plaisanciers. Je pense que, au fil du temps, un certain degré de confiance s'est établi, et nous avons vu l'industrie prendre des mesures qui illustrent sa propre responsabilité ainsi que sa conscience et son respect des autres utilisateurs de ressources maritimes.

Je pense que, en réalité, c'est de cela qu'il est question. Certains mytiliculteurs, par exemple, fixent la largeur entre leurs rangées de moules précisément dans le but de permettre aux pêcheurs de homards de continuer de pêcher le homard à leurs lieux de pêche et aux alentours. Certaines entreprises mettent des attaches afin que les pêcheurs puissent fixer leurs filets à boette au printemps, quand ils veulent aller pêcher. C'est donc une approche collaborative.

Je pense bien honnêtement que l'autre enjeu majeur pour Terre-Neuve est le fait qu'un grand nombre des employés et des exploitants d'exploitations d'aquaculture proviennent du secteur de la pêche traditionnelle. Ils apportent aux entreprises les connaissances — des connaissances très précieuses — qu'ils ont tirées de leur travail dans les collectivités côtières et améliorent le fonctionnement des entreprises parce qu'elles ont des pêcheurs expérimentés qui connaissent les eaux, qui connaissent le vent, qui connaissent la glace et ce genre de choses. C'est un processus continuel.

Du point de vue du tourisme, plus particulièrement, je ne pense pas que nous ayons observé un grand nombre d'interactions — peut-être aucune. Je me souviens d'une préoccupation qui avait été soulevée au sujet d'un exploitant d'excursions en kayak du sud de la côte qui ne savait pas qu'il y avait une piscifacture de saumons dans le secteur. Une partie de notre processus de consultation consiste à discuter avec notre ministère du Tourisme ainsi qu'avec, par exemple, les responsables des ressources historiques. Ainsi, nous n'installerions pas une ferme à un endroit où se trouve une épave de navire.

On adopte une approche collaborative. En toute honnêteté, lorsque nous avons parcouru la province, nous avons observé très peu de conflits. Dans le cas des conflits qu'il y a eu, des résolutions très pratiques ont été appliquées à ce processus.

La sénatrice Poirier : À la diapositive 3, vous avez parlé de votre augmentation de 2013 : une augmentation de 32 p. 100. Pouvez-vous me dire si cette augmentation était due à l'ouverture d'un plus grand nombre de fermes ou à une augmentation du volume de saumons : quelle en était la raison? Pourquoi a-t-on observé un accroissement aussi intéressant sur une année donnée?

M. Meaney : Il s'agissait d'une augmentation de la production. Les fermes existantes produisaient en fait une plus grande quantité de saumons.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci, monsieur le président, et bienvenue. Ma question s'adresse au Dr Whelan. Premièrement, lequel des termes est politiquement correct : « poisson » ou « animal »?

Dr Whelan : Les deux sont corrects. Nous disons la « Division de la santé des animaux aquatiques » ou, dans un cas plus particulier, nous parlons de « poisson », et ce terme inclut les poissons à nageoire ainsi que les mollusques et crustacés, pour que ce soit clair.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Vous avez mentionné que vous soumettiez le poisson à des inspections si les exploitants leur trouvaient quelque chose d'anormal. Le faites-vous sur demande ou de façon aléatoire?

Dr Whelan : Je n'aime pas utiliser le mot « inspection », car il revêt une mauvaise connotation. Nous effectuons des visites. Nous en faisons qui sont planifiées afin d'assurer une surveillance active et passive. C'est un programme que nous lançons et qui fait deux choses. Nous nous rendons à chaque ferme, qu'elle soit située dans un environnement terrestre ou maritime. Nous le faisons tous les 30 à 45 jours. C'est notre but. C'est ce que nous faisons.

En ce qui concerne les mollusques et crustacés, nous effectuons des visites bisannuelles dans le cadre desquelles nous allons, selon une fréquence temporelle, vérifier les mollusques et crustacés deux fois par année. Nous avons fait agréer ce programme de surveillance par l'OIE, par l'entremise de l'un de ses membres clés responsables de la surveillance des mollusques et crustacés. C'est donc le modèle que nous suivons.

Lorsque nous nous rendons sur place, nous le faisons pour deux raisons. D'une part, nous le faisons pour des raisons de régularité. Cet aspect est essentiel à mes yeux, car il permet une détection plus rapide lorsqu'il y a un problème, afin de prendre des mesures d'atténuation avant que le problème prenne de l'ampleur, et je crois que cela s'est avéré très utile. D'autre part, nous menons réellement un programme de surveillance dans le cadre duquel on peut nous téléphoner. Nous pouvons recevoir un appel ou un vétérinaire peut recevoir un appel d'une personne qui voit un problème et aimerait que quelqu'un se rende sur place. Nous intervenons aussi dans ce cas. Pour chacun des sites, nous le faisons aux 30 à 45 jours et plus fréquemment s'il y a un problème qui se manifeste; nous faisons cela aussi.

Nous croyons que cela constitue un système robuste qui permet de régler rapidement les problèmes dès leur première apparition. Les vétérinaires entretiennent un lien de confiance avec leurs clients. Les clients n'hésitent pas du tout avant de dire « Je commence à voir quelque chose. Pourriez-vous venir jeter un coup d'œil, s'il vous plaît? » Cette relation est absolument cruciale.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Combien y a-t-il de piscicultures dans ce secteur?

Dr Whelan : C'est une question inhabituelle, car cela dépend du moment et de la fréquence. Combien de piscicultures existent et combien sont en activité sont deux choses différentes.

Lorsqu'une des administrations a dit au début qu'elle aimerait avoir un site de pisciculture, nous y avons pensé longtemps et avons tenu des délibérations. En réalité, c'est plus logique. De fait, on dit qu'il faut avoir plus de sites que moins. Pourquoi? C'est parce que l'utilisation d'un site a une durée. Ensuite, il faut le mettre en jachère et utiliser un autre endroit pour l'année suivante. C'est simplement une pratique agricole en vigueur depuis un millier d'années. Il y a beaucoup d'avantages à mettre un site en jachère.

C'est pourquoi il y a ces deux chiffres différents. Il y a le nombre de piscicultures qui existent, et il y a le nombre de piscicultures actives à un certain moment, ce qui varie d'une région à l'autre. Nous avons ici les chiffres sur la quantité de piscicultures existantes, mais si vous me posez cette question aujourd'hui, par opposition à il y a environ cinq semaines, lorsque les activités d'ensemencement étaient plus fréquentes, il y aurait eu plus de sites actifs.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci beaucoup.

Le sénateur McInnis : Merci d'être venus. Ici, à Terre-Neuve-et-Labrador, on dirait que vous êtes très progressistes et proactifs au chapitre de l'aquaculture. Ce n'est pas l'impression que nous avons de certaines des autres provinces du Canada atlantique. On pourrait presque croire que, à un certain point, lorsque vous avez conclu le PE avec le gouvernement fédéral, certains aspects semblaient presque relever de la compétence fédérale, et je parle de la santé animale. Lorsque nous avons accueilli des représentants de l'ACIA, ils ont dit que c'était eux qui s'occupaient de cela, et Santé Canada a affirmé la même chose. J'aimerais obtenir vos commentaires à ce sujet.

J'ai encore deux ou trois questions rapides à aborder en ce qui concerne votre loi. Je constate qu'elle prévoit une garantie financière ou autre pour la remise en état. Ce montant est-il versé à l'avance? Quels sont les détails? Comment fixe-t-on le montant?

La jachère est une chose. Par exemple, en Nouvelle-Écosse, une entreprise est arrivée sur place pour s'installer dans un secteur particulier. Elle a déclaré : « Nous sommes uniques. Nous mettons nos parcs en jachère. » Alors, dans votre loi, vous prévoyez la jachère et des processus pour atténuer la dégradation environnementale.

Combien de temps un site doit-il être laissé en jachère, et à quoi ressemble le processus? Est-ce simplement une période de repos? Faites-vous quelque chose de particulier? Votre loi prévoit aussi l'élimination des déchets de poisson. Comment procède-t-on et où envoie-t-on les déchets?

Voilà seulement quelques questions, et, si j'ai le temps, j'aimerais poser encore quelques autres questions. En particulier, j'aimerais avoir le temps de parler de la gestion des baies.

M. Meaney : En ce qui a trait à la relation entre le gouvernement et la santé des poissons, je crois que l'importante distinction à faire — et c'est la même chose pour la santé des animaux terrestres au Canada — c'est que, en général, le gouvernement fédéral a une responsabilité à l'égard du volet de la biosécurité nationale. Nous ne voulons pas voir l'apparition d'une nouvelle maladie de la pomme de terre à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous ne voulons pas voir une nouvelle maladie du bovin apparaître en Alberta. Le gouvernement fédéral a des mesures de protection et des protocoles internationaux pour s'assurer que les modalités de transmission de produits animaux et de la viande réduisent ce risque. C'est leur fonction principale. C'est la même chose pour le volet des animaux aquatiques. Il établit les règles de base régissant l'importation et l'exportation — c'est essentiellement une de ses grandes responsabilités —, mais il gère aussi le volet des maladies déclarables dont a parlé le Dr Whelan, comme l'anémie infectieuse du saumon.

Chaque province du pays a un rôle à jouer au chapitre de la santé des animaux terrestres et aquatiques lorsqu'il s'agit de gérer des enjeux sur place ou limités à une région concernant la santé animale dans nos collectivités et dans les baies qui délimitent nos provinces, des maladies liées à la production ou la gestion connexe pour optimiser le volet de la santé des poissons.

Il peut sembler y avoir un chevauchement, mais il y a une distinction claire sur le plan des rôles et des responsabilités. Nous gérons ces choses sur le site d'aquaculture dans le but d'optimiser la santé dans notre propre environnement et dans nos collectivités. Le gouvernement fédéral a pour responsabilité de s'assurer que la barrière législative liée aux inspections est en place pour empêcher toute nouvelle maladie d'entrer au Canada et que nous entretenons des relations avec d'autres partenaires commerciaux dans les pays qui nous entourent — avec lesquels nous partageons des frontières — pour veiller à ce que le volet de la santé soit optimal.

Le sénateur McInnis : Alors, le gouvernement fédéral ne vient pas ici faire des inspections. L'ACIA n'intervient absolument jamais.

Dr Whelan : J'imagine que, à première vue, il pourrait sembler y avoir chevauchement dans le dossier de la santé animale aquatique. C'est parce qu'on parle de différentes catégories de santé animale. Il y a les maladies déclarables et maladies à déclaration obligatoire qui sont gérées à l'échelle nationale et, à l'échelon local, par l'ACIA. En vérité, si la province et l'industrie n'interagissaient pas aussi à cet égard, on ne détecterait pas tout ce dont vous parlez.

Les maladies déclarables et à déclaration obligatoire ne surviennent pas chaque jour, bien que l'Agence canadienne d'inspection des aliments croie peut-être qu'il en est ainsi à l'heure actuelle. Ce n'est pas un événement courant que nous devons gérer tous les jours. Il s'agit d'une possibilité que le pays doit être prêt à gérer.

Ce qui est d'une plus grande importance, ce sont les maladies ou les agents pathogènes endémiques réguliers que l'on peut retrouver dans les eaux canadiennes. Ils ont toujours existé et continueront de le faire. C'est quelque chose qu'on retrouve dans un milieu d'eau douce ou un milieu marin. Ce sont ces choses qu'il faut gérer en priorité. La province et l'industrie jouent un rôle crucial à cet égard.

Le rôle fédéral, celui qui a trait aux maladies déclarables, a l'air d'être complètement distinct. Il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral assure la direction à ce chapitre, mais, sans la surveillance subséquente de la province et de l'industrie dans toute la région — une zone tampon, une zone de contrôle — il n'y a aucun effort véritablement coordonné qui mène à une bonne gestion. C'est un aspect du fonctionnement de la santé des animaux aquatiques. Ce sont tous ces paliers.

Ce n'est pas pour dire qu'il s'agit de la seule interaction, car nous travaillons aussi dans le domaine de la santé des poissons à titre de client du gouvernement fédéral. Nous faisons cela s'il y a une affection qui touche des poissons sauvages ou quelque chose du genre. Nous allons offrir ce service de santé et établir des diagnostics, puis nous rendons des comptes aux entités concernées.

L'autre chose qui arrive, c'est qu'il y a le Comité des introductions et des transferts du ministère des Pêches et des Océans, de sorte que, lorsqu'on transfère des animaux au sein de la province ou d'une province à l'autre, il est clairement indiqué sur papier que cette entité est responsable. On a maintenant établi certaines distinctions, et le volet de la santé est du ressort de l'ACIA. Les autres volets touchant l'habitat et la génétique sont en fait gérés par le MPO, mais ce qui n'était vraiment pas clair, c'est le rôle des agents pathogènes endémiques existant déjà qui n'intéresse pas vraiment l'ACIA. C'est maintenant le Comité des introductions et des transferts du MPO qui les gère, en collaboration avec la province et l'industrie, qui continueront à assurer cette surveillance. C'est ainsi que ces choses s'emboîtent, en quelque sorte. J'espère que mon explication vous est utile.

Pour ce qui est de votre question sur la jachère, nous avons exécuté beaucoup de travaux à cet égard au cours des années. C'est un enjeu important, car nous avons vu assez rapidement que la jachère était nécessaire. J'y crois fermement. En ma qualité de vétérinaire, je crois que cette pratique est très solide. Elle a été intégrée il y a très longtemps, mais elle nécessite la disponibilité de sites. On a besoin de pouvoir mettre des sites en jachère.

La durée variera d'une administration à l'autre. Si les gens jugent cela incohérent... Dans certaines régions, nous avons eu des jachères d'un an. Nous avons demandé que le site demeure en jachère. Pourquoi une autre administration n'en ferait-elle pas autant? Pourquoi tout le monde ne le fait-il pas pour un an? C'est parce que les conditions environnementales diffèrent d'une région à l'autre.

On regarde certaines eaux de Terre-Neuve, et on constate qu'elles ont une profondeur de 400 pieds. Toutes ces conditions sont réunies pour offrir un site optimal : une bonne production et un bon débit. C'est vraiment important, mais nous croyons aussi, pour toute une gamme d'autres raisons, que la jachère est un élément crucial à cet égard. Il faut qu'une quantité suffisante de sites soit disponible, alors, à Terre-Neuve, c'est une telle durée qui est établie.

Ce qui change, c'est que, maintenant, nous avons des ententes de gestion. Nous prenons désormais des décisions fondées sur des données probantes, alors nous avons de l'information scientifique valide sur le transport et les déplacements. Cela éclairera davantage la pratique de la jachère, qui pourra se fonder plus ou moins sur ces données. Ainsi, la décision relative à la jachère devient véritablement fondée sur des données scientifiques.

Le sénateur McInnis : Alors, la remise en état d'un site est-elle liée à la mise en jachère?

Dr Whelan : Pour moi, comme je suis vétérinaire, la raison première est la santé, mais, de toute évidence, un autre facteur tient au fait que la jachère permet d'entreprendre d'autres processus liés à la remise en état.

Le sénateur McInnis : La contribution financière remise, j'imagine, est un type de dépôt de sécurité. Le montant est-il payé à l'avance? Qui le détient?

M. Meaney : Nous sommes actuellement dans un processus de discussion avec l'industrie pour examiner les obligations financières. Ce que vous dites renvoie à l'article 4.2 de notre loi. Cette disposition prévoit le cas d'une pisciculture qui ferait faillite; il faudrait alors que le site soit remis physiquement en état.

Il existe un certain nombre de modèles. Nous avons tenu des discussions. Apparemment, l'industrie conserve un montant forfaitaire pour cette éventualité. Le recours à la disposition qui s'offre aux provinces, aux termes de la loi, c'est que, si vous n'aviez pas les fonds nécessaires, nous pourrions appliquer les mesures prévues par la loi et vous poursuivre en justice.

Je veux faire valoir deux choses. Premièrement, il y a eu très peu de cas dans la province où on a pu exiger qu'il y ait remise en état et, deuxièmement, nous avons une certaine expérience des coûts de l'opération. Ils sont assez raisonnables. Cela coûte moins de 100 000 $ pour un grand site. Nous sommes en train de travailler avec l'industrie. Elle a présenté une proposition sur la façon de donner une telle sûreté à l'échelle de l'industrie plutôt que pour chaque particulier.

Le sénateur McInnis : La gestion des baies dont vous avez parlé repose dans une large mesure sur la science et, selon moi, c'est quelque chose de très important et probablement de très utile. Cela ressemble-t-il au zonage? Il semble qu'on doive avoir au moins trois zones de gestion des baies pour installer une pisciculture. Pourriez-vous m'expliquer comment cela fonctionne? Et s'agit-il de zonage?

Dr Whelan : Chaque mot est associé à une définition précise, alors on a choisi la gestion des baies parce qu'elle constitue une approche régionalisée se rattachant à une zone particulière, celle des baies qui font l'objet de la gestion. Ce qui porte à confusion, c'est le mot « baie », car la structure géographique ne correspond pas nécessairement à une baie; une baie à Terre-Neuve est complètement différente d'une baie au Nouveau-Brunswick. Il serait possible d'installer toute une industrie aquicole dans certains fjords de Terre-Neuve. Ce qui porte à confusion, c'est le mot « baie »; il s'agit d'un secteur.

Quelle est la différence par rapport à une zone? Le terme zone est généralement utilisé à l'Organisation mondiale de la santé animale, à l'Office international des épizooties. Dans ce cas, c'est le terme « définition de zone » qui est utilisé, et ce concept est assorti de différentes mesures de contrôle et de différents paramètres. Il est davantage question de définir l'intervention en fonction de différentes éventualités.

Nous voyons les termes zones et de définition de zone en médecine terrestre. Dans des cas comme celui de la grippe aviaire, il y avait des zones : des zones de contrôle et des zones tampons. Nous pourrions établir un cadre semblable si vous faisiez l'objet d'une gestion pour une affection particulière. Je crois que les mots « gestion des baies » sont utilisés dans leur acception la plus précise. Des activités distinctes sont menées dans ce secteur. Si vous regardez un environnement marin ou un environnement d'eau douce, on a l'impression que tout circule librement. On ne croirait jamais pouvoir faire quelque chose dans ce secteur. Comment ce secteur pourrait-il être distinct d'un autre? On applique des règles strictement scientifiques, qui touchent des choses comme l'épidémiologie, pour examiner les facteurs de risque et des études. À l'aide de l'océanographie, on tente de comprendre les courants, alimentés par le vent, les strates océaniques et la façon dont les choses fonctionnent. On regarde l'influence des zones, lorsqu'on dit qu'une chose est une zone et qu'une autre est une zone côtière; alors, quelle est la différence?

À Terre-Neuve, nous avons constaté que le gouvernement provincial a fait un investissement énorme. On considérait que cela devait être fait, qu'il devrait y avoir des données probantes sans ambiguïté pour éclairer ces secteurs de gestion des baies. Il a été de l'ordre de 450 000 $ par année depuis les dernières années, ce qui nous a permis d'avoir notre propre navire, qui, en fait, est loué à la Marine Institute, un grand collaborateur à ce chapitre. Nous collaborons avec des océanographes, des vétérinaires, des responsables de la santé et des promoteurs, et nous utilisons un ensemble de sonars multifaisceaux. On rassemble tous ces éléments et on commence à cartographier la région le long du littoral et aux endroits où on envisage de l'aquaculture. Il faut comprendre le passage d'un segment à un autre.

S'il n'y a pas de passage, ce qui vous donne à penser que vous êtes en présence d'une zone, qu'il y a un élément que vous qualifieriez de « zonal »... J'envisagerais cela plutôt comme un secteur. Ce terme est plus précis, car il délimite l'endroit où se déroulent les activités. Dans ce cas, on parle d'une véritable séparation. Si une chose ne peut pas circuler ou ne pas bien circuler à partir de cette région pour aller vers une autre, vous avez créé une barrière de biosécurité même si, selon les apparences, il n'y en a pas. Toutes les mesures prises dans une région ou un secteur de gestion des baies affecteront le prochain secteur; il faut les contrôler, nettoyer et désinfecter à chaque occasion. Les pratiques d'ensemencement — le fait d'ensemencer, de retirer, de récolter et d'effectuer tout type de contrôle thérapeutique ou non thérapeutique — se répercutent à l'échelle du secteur. Cela permet de se rassurer en sachant qu'on fait des choses pour améliorer l'avenir.

Le sénateur McInnis : S'agit-il de zones vierges, normalement?

Dr Whelan : Je dirais que toutes les zones sont vierges.

Le sénateur McInnis : À Terre-Neuve.

Dr Whelan : Terre-Neuve n'est-elle pas vierge? Si vous aviez la chance de venir sur place, je crois que ce serait votre impression. Nous sommes une zone vierge. Je crois que c'est magnifique. Je crois que les conditions sont excellentes. Tout le monde ici adore sa collectivité. Dans n'importe quel environnement marin ou d'eau douce, il y a des agents pathogènes. Ils sont toujours là. Si vous voulez appeler cela une zone vierge... Moi, je le fais, car on retrouve des agents pathogènes dans les poissons sauvages. On détecte des choses qui existent. S'agit-il tout de même d'un environnement vierge? Assurément, mais il faut savoir que cela existe.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. L'un des avantages de parler en dernier, c'est que la plupart des questions que j'allais poser l'ont déjà été. Je vous remercie d'être venus, et j'ai deux ou trois très brèves questions.

Avez-vous déjà observé un conflit entre l'exploitation d'une pisciculture et les résidents de la berge qui ne veulent pas voir cela devant leur terrain? Et comment gérerait-on la situation? Les résidents ont-ils des droits par rapport à la vue dont ils jouissent, ou reconnaissez-vous cette réalité et y a-t-il un consensus général selon lequel c'est pour le bien de la collectivité?

M. Meaney : Le régime foncier de Terre-Neuve-et-Labrador repose sur le principe de propriété de la Couronne et de zone riveraine. L'aire de 33 pieds à partir de la laisse de marée haute appartient à la Couronne. Vous pouvez avoir un terrain qui donne sur l'océan, mais vous n'avez aucun droit de propriété directe ou de restriction sur cette aire de 33 pieds. Certes, nous menons des consultations. L'information est prise en compte lorsqu'il est question de permis d'aquaculture. Certaines préoccupations ont été exprimées, mais il s'agit de la zone côtière de Terre-Neuve-et- Labrador. Des navires de pêche, entre autres, passent sans cesse devant votre terrain au quotidien, et cela est considéré comme faisant partie de nos habitudes.

Cela dit, encore une fois, nous travaillons avec l'industrie. Si nous pouvons éviter de compromettre l'accès ou la vue d'un particulier, nous prenons certainement toutes les mesures pour le faire, mais, aux termes de la loi, non, les propriétaires de terres littorales n'ont aucune protection qui leur conférerait des droits exclusifs sur une vue ou un paysage, par exemple.

La sénatrice Raine : Dans votre demande de permis, n'y a-t-il pas une petite case qui demande « Vos voisins sont-ils d'accord? »

M. Meaney : Le processus de permis exige de l'entreprise qu'elle rencontre la collectivité et d'autres utilisateurs de la ressource. Si, par exemple, on construisait des chalets dans la région, il faudrait que l'entreprise démontre qu'elle a écarté les préoccupations, et nous assurerions un suivi des mesures prises en cas de préoccupations soulevées par des opposants.

La sénatrice Raine : Mon autre question est entièrement différente. Nous avons entendu parler d'une préoccupation liée au transport des poissons jusqu'au marché de façon rapide et efficiente, parce qu'il arrive que les camions ne puissent pas embarquer sur les traversiers. Dans vos plans d'agrandissement, prenez-vous cela en considération, l'accès par traversier au continent pour exporter le poisson?

M. Meaney : Nous reconnaissons très bien que l'accès au marché est la chose la plus importante. L'industrie, avec la collaboration de la province, a officiellement défini des priorités relatives à l'accès des fruits de mer frais et des produits de la mer vivants à des navires qui quittent la province. Nous continuons à faire valoir ces choses auprès de Marine Atlantique et soutenons l'industrie en l'aidant à cerner les occasions d'établir des priorités pour les fruits de mer frais et les produits de la mer vivants.

La sénatrice Raine : Ce processus est-il en place ou espère-t-on l'établir?

M. Meaney : On espère l'établir. L'actuel processus d'établissement des priorités de Marine Atlantique ne fait pas nécessairement des fruits de mer une marchandise prioritaire qui quitte la province. Il est vrai qu'il y a une distinction par rapport aux produits congelés, mais la principale préoccupation, pour nous et pour l'industrie, tient au fait que les produits frais et vivants — les homards, les moules et toute espèce de poissons fraîchement récoltés doivent pouvoir être mis sur le marché le plus rapidement possible pour soutenir la concurrence. La fraîcheur est un élément crucial sur le marché et elle dépend du temps de déplacement.

La sénatrice Raine : Qui est propriétaire de Marine Atlantique?

M. Meaney : Le gouvernement fédéral.

La sénatrice Raine : Coopère-t-il dans le cadre de cette demande?

M. Meaney : Nous avons tenu de nombreuses discussions, et l'industrie nous a avisés que le gouvernement n'était pas satisfait du processus actuel en ce qui a trait à l'établissement de priorités d'accès aux traversiers.

La sénatrice Raine : Il serait peut-être bien d'obtenir un petit document d'information sur cette question pour le comité. Merci beaucoup.

Le président : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs, et merci à nos témoins ce matin. Encore une fois, la discussion a été très intéressante et instructive et, certes, une excellente façon de démarrer nos audiences publiques ici aujourd'hui à Terre-Neuve.

Monsieur le ministre, si vous avez un mot de conclusion, nous allons terminer.

M. Hutchings : En premier lieu, je tiens à remercier le comité d'avoir écouté notre exposé. Certes, j'espère que nous avons su répondre à vos questions. Je tiens à remercier les membres du personnel, le Dr Whelan et M. Meaney.

J'espère assurément que vous avez pu mieux voir ce qui se passe à Terre-Neuve-et-Labrador au chapitre de l'industrie aquicole, de son évolution et, surtout, de la biosécurité et aussi lorsqu'il s'agit de s'assurer que l'exploitation est durable et que l'on conserve ces eaux vierges dont nous avons parlé. Je crois que, collectivement, nous avons fait du bon travail. Il y a des difficultés, mais nous connaissons une époque stimulante sur le plan de la croissance de l'industrie.

Merci d'être venus, et je vous souhaite assurément un agréable séjour dans notre province fantastique.

Le président : Nous avons le plaisir d'accueillir notre deuxième groupe de témoins ce matin. Je vous demanderais de bien vouloir vous présenter avant de commencer.

Cyr Couturier, président, Newfoundland Aquaculture Industry Association : Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Je m'appelle Cyr Couturier et je suis l'actuel président de la Newfoundland Aquaculture Industry Association.

Miranda Pryor, directrice exécutive, Newfoundland Aquaculture Industry Association : Bonjour. Je m'appelle Miranda Pryor. Je suis la directrice exécutive de la Newfoundland Aquaculture Industry Association.

Jennifer Caines, gestionnaire de projet, Northern Harvest Sea Farms NL Ltd. : Bonjour. Je m'appelle Jennifer Caines. Je suis gestionnaire de projet à Northern Harvest Sea Farms Newfoundland Limited.

Le président : Merci d'avoir pris le temps de venir ici ce matin, et je crois comprendre que vous avez une déclaration préliminaire. Je vais vous laisser la présenter, puis nos sénateurs auront des questions pour vous, j'en suis certain. Je tiens absolument à vous remercier au nom du comité de l'aide que vous nous avez fournie durant les derniers jours au chapitre de l'organisation et de notre visite de la côte sud. C'était inoubliable. La parole est à vous.

M. Couturier : Merci.

Ma notice biographique a été distribuée. Je suis biologiste de la vie aquatique. J'ai 35 ans d'expérience de l'aménagement de secteurs pour l'aquaculture à l'échelle du pays et particulièrement à Terre-Neuve. J'ai quelques brefs commentaires sur l'aquaculture à l'échelle mondiale ainsi que dans le contexte de Terre-Neuve. Ensuite, mes collègues ici qui représentent l'industrie parleront un peu plus de l'aquaculture des poissons à Terre-Neuve-et-Labrador.

Je perds la voix. J'imagine que c'est la conséquence d'avoir passé trop de temps sur l'autoroute de baie d'Espoir. Je ne le sais vraiment pas.

La population mondiale est à la hausse, bien sûr, et la Terre comptera plus de neuf milliards d'habitants d'ici 2050. Les Nations Unies ont reconnu que l'aquaculture est l'un des secteurs de production alimentaire qui croissent le plus rapidement au monde, et les fruits de mer en général sont actuellement la première source de protéine animale consommée par les humains à l'échelle mondiale. Trente millions de tonnes métriques supplémentaires seront nécessaires pour satisfaire à la demande mondiale si les niveaux de consommation se maintiennent. Ainsi, même si nous n'augmentons pas la production d'une source de fruits de mer, selon les niveaux de consommation actuels, nous aurons besoin d'encore 30 à 40 millions de tonnes métriques.

Les Nations Unies ont produit un rapport publié cette semaine sur l'état des pêches et de l'aquaculture mondiales. Elles ont reconnu que les fruits de mer d'élevage étaient un élément essentiel pour combler la lacune. À l'échelle mondiale, les fruits de mer d'élevage représentent 50 p. 100 des fruits de mer consommés par les humains. Environ la moitié des fruits de mer d'élevage à l'échelle mondiale consiste en des espèces de poissons, de l'alimentation pour animaux, dans une certaine mesure, et l'autre moitié, en des espèces s'alimentant en libre-service, comme les algues, en des mollusques s'alimentant par filtration et ce genre de choses. Plus de 50 millions de pêcheurs et de pisciculteurs dépendent des fruits de mer pour leur revenu, la production d'aliments, l'emploi et l'alimentation. Une portion beaucoup plus importante — environ 500 millions de personnes — dépend des fruits de mer pour s'alimenter.

Les fruits de mer — dont les fruits de mer d'élevage — laissent la plus modeste empreinte carbone comparativement à n'importe quel autre aliment produit par l'homme. À l'échelle mondiale, les humains utilisent presque 80 p. 100 des terres arables, et cette proportion inclut moins de 20 p. 100 des zones de production alimentaire mondiale. Ainsi, il est tout à fait opportun que les fruits de mer d'élevage continuent d'être une source d'approvisionnement alimentaire pour l'humanité.

Tous les fruits de mer sont une source incomparable d'éléments nutritifs sains et délicieux, dont des huiles essentielles, des minéraux, de la vitamine D et B12 et une variété d'autres minéraux essentiels dont ont besoin les êtres humains.

Au Canada, nous exploitons les océans depuis plus d'un siècle; en fait, avant la Confédération, on le faisait surtout à des fins de restauration et de pêche récréative. Actuellement, au chapitre des fruits de mer d'élevage, nous nous classons au 27e rang à l'échelle mondiale et, au chapitre des pêches, au 22e rang, je crois. Dans le secteur des pêches seulement, nous étions parmi les cinq ou six premiers dans les années 1980. Alors, nous perdons du terrain au chapitre des pêches, et il en est de même pour l'aquaculture. Notre contribution totale, bien qu'il s'agisse d'une industrie de 2 milliards de dollars au Canada, représente moins de 0,5 p. 100 de l'approvisionnement global. La valeur totale excède 2 milliards de dollars pour l'économie canadienne, et près de 30 p. 100 de la valeur de tous les fruits de mer canadiens provient de l'élevage. Une grande proportion est issue du saumon d'élevage.

Il y a une perte de production dans le domaine des mollusques et crustacés et du poisson causée par des obstacles réglementaires, dont beaucoup relèvent du gouvernement fédéral. Nous pouvons en parler si vous voulez, mais il y a certes un grand fossé. Le fossé s'élargit, par exemple, pour ce qui est du saumon malgré des augmentations récentes à Terre-Neuve-et-Labrador du point de vue du Canada. Notre part du marché mondial a diminué de plus de 40 p. 100 au cours des 10 dernières années. Et la comparaison ne se rattache qu'à la catégorie du saumon.

La production aquicole totale du Canada pour le poisson représente moins de 0,1 p. 100 par rapport à l'espace côtier disponible et, au total, occupe une superficie moindre que le parc Stanley à Vancouver. Cela vaut pour toutes les piscicultures de saumon à l'échelle des provinces. En comparaison, la superficie de l'aéroport et de l'aire de trafic à Vancouver est supérieure de beaucoup à celle des pêches productives dans le delta du Fraser. Voilà un autre exemple pour illustrer à quel point l'aquaculture prend peu de place au pays.

En ce qui a trait à la pisciculture à Terre-Neuve-et-Labrador, Terre-Neuve a le désir et la responsabilité de produire des fruits de mer sains de façon environnementalement durable pour alimenter la demande grandissante. La production de saumon a commencé de façon vigoureuse à Terre-Neuve il y a un peu plus de 10 ans — et Jennifer vous parlera des efforts connexes —, longtemps après les grands déclins de saumon naturel survenus ici et ailleurs.

Nous sommes actuellement la deuxième région productrice de saumon au Canada, après la Colombie-Britannique. À tout le moins, c'est ce que nous aimons croire. Nous n'avons pas encore vu les statistiques du Nouveau-Brunswick pour l'an dernier. Les conditions d'élevage du saumon sont différentes de celles des Maritimes ou de la Colombie- Britannique. Ici à Terre-Neuve, elles sont probablement semblables à celles de l'Écosse et de la Norvège, si on pense aux conditions sociales, environnementales et peut-être, dans une certaine mesure, économiques. L'Écosse et la Norvège sont deux chefs de file mondiaux dans la culture du saumon.

Le secteur a une valeur annuelle de plus de 200 millions de dollars pour l'économie de Terre-Neuve aujourd'hui, comme l'a mentionné le ministre ce matin, et il crée plus de 1 000 emplois à temps plein dans les régions rurales et encore d'autres emplois indirects. Selon le dernier recensement, les seules régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador qui affichaient un taux de migration à la baisse, ou même une augmentation de la population, durant le dernier recensement canadien, sont les régions d'aquaculture de notre province. C'est peut-être une coïncidence, mais c'est vrai.

Pour ce qui est de Terre-Neuve-et-Labrador, en conclusion — il y a un certain nombre de défis à relever lorsqu'il s'agit de maintenir ou d'augmenter les niveaux de production actuels dans l'industrie du poisson, y compris l'accès à l'infrastructure, à la large bande et au réseau cellulaire, les quais, les routes, le transport et les secteurs de service, pour ne nommer que ceux-là. Il y a des besoins constants qui sont difficiles à combler.

La capacité de Pêches et Océans d'entreprendre des travaux scientifiques pour le bien des pêches ou de l'aquaculture est gravement limitée, selon nous. À l'échelle nationale, il y a très peu de programmes ciblés pour l'un ou l'autre des secteurs de la recherche et développement en aquaculture. Il y en a quelques-uns à l'échelle locale, mais, à l'échelle nationale, il y en a très peu.

Nous allons trouver des solutions à ces problèmes, toutefois, car il y a tout simplement des possibilités fantastiques pour les Terre-Neuviens et Labradoriens. Le régime réglementaire fédéral est particulièrement inadéquat pour gérer la pisciculture. La Loi sur les pêches est une loi dépassée pour régir la chasse. C'est pour cette raison qu'elle a été conçue. Elle n'est pas faite pour régir les pêches ou la pisciculture moderne; surtout pas la pisciculture. Je ne crois pas même que le mot « aquaculture » figure dans la loi, à moins que ce soit dans un règlement particulier. De plus, les programmes d'appui à la législation fédérale sont appliqués différemment à Terre-Neuve par rapport à d'autres endroits au pays, et mes collègues vous en parleront davantage. Nous avons la LPN, la Loi sur la protection de la navigation, le Programme de contrôle de la salubrité des mollusques et l'ACIA. Nous avons entendu le Dr Whelan le dire : les ressources mises à contribution dans notre industrie sont utilisées différemment ici par rapport à d'autres régions du pays.

On a besoin de dispositions législatives nationales provenant du gouvernement fédéral pour mieux gérer l'aquaculture, la légitimiser et réglementer l'industrie de façon plus rigide que c'est le cas actuellement, avec l'ensemble disparate de lois et de règlements imposants, inefficaces dans certains cas et qui imposent un fardeau réglementaire inégalé pour ce secteur.

Je vais m'arrêter ici pour l'instant, sénateurs.

Le président : Merci.

Mme Pryor : Merci à tous. Je vous suis reconnaissante de me donner l'occasion de vous parler ce matin. J'ai une déclaration préliminaire aussi, mais, comme j'ai hâte de répondre à vos questions, je vais essayer de rester brève.

Je vais présenter une description générale de la NAIA. Il s'agit d'une association de l'industrie sans but lucratif fondée par ses membres. Nous avons des membres réguliers et des membres associés et, actuellement, nous comptons environ 80 membres à l'échelle de la province et du pays. Nous en avons qui viennent d'ailleurs au pays aussi. L'organisation est unique dans la mesure où il y a une association de l'industrie à Terre-Neuve-et-Labrador, et elle représente tous les secteurs. Elle représente les producteurs de mollusques et crustacés et de poissons, alors vous allez me revoir cet après-midi, à 13 heures — je crois — juste pour parler des enjeux qui touchent particulièrement les mollusques et crustacés.

L'organisation est gérée par un conseil d'administration bénévole. Nous lui sommes très reconnaissants du temps et des efforts investis. Il couvre tous les secteurs, et Cyr et Jennifer en sont des membres de longue date. Ils sont élus chaque année, dans le cadre de notre assemblée générale annuelle.

Nous avons deux bureaux dans la province. Il y a de nombreuses années, nous avons jugé qu'il était important d'avoir une présence à St. John's — de toute évidence, la capitale de la province — où nous pouvons rencontrer régulièrement les principaux organismes de réglementation, mais aussi être présents dans la région de St. Alban's, sur la côte sud de la province, dans la région de Coast of Bays, le cœur de la production piscicole dans la province.

Je vous demande pardon pour la qualité du diagramme ici. Je veux souligner que, à la page 2, il illustre la croissance à Terre-Neuve de 2003 à 2013.Nous obtenons ces chiffres chaque année du ministère des Pêches et de l'Aquaculture de la province. Le plus grand diagramme que vous pouvez voir ici illustre notre production piscicole qui a atteint, en 2013, environ 25 000 tonnes métriques. Il s'agit d'une augmentation par rapport à 2003, où la production était d'environ 20 000 tonnes métriques. La province a connu une croissance considérable en ces 10 années seulement.

Comme l'a mentionné Cyr, nous sommes aujourd'hui le deuxième producteur de poisson au Canada. Vous pourrez voir que, au chapitre de la valeur, cela représente environ 197 millions de dollars en ventes directes. Cela ne correspond qu'aux ventes de produits en 2013. Comme certains besoins cruciaux en matière d'infrastructure ont été comblés, nous estimons qu'un objectif de croissance réaliste serait de 40 000 tonnes métriques d'ici l'année 2020. C'est une cible que nous abordons avec prudence. Nous voulons croître de façon réfléchie. Nous ne voulons pas prendre de l'expansion trop rapidement, mais nous considérons que nous avons cerné plusieurs infrastructures cruciales. Si ces choses sont résolues, nous croyons vraiment pouvoir atteindre cette cible.

En ce qui concerne les principaux besoins en matière d'infrastructure, je ne crois pas que j'ai besoin de vous dire — à vous qui êtes ici depuis environ une journée — que les routes en sont un, mais, si on regarde cela du point de vue de la croissance de notre industrie, bien entendu, nous sommes situés sur la côte sud, et la seule façon d'accéder à cette région à l'heure actuelle est par route. Jennifer parlera probablement plus en profondeur de la quantité de camions de transport qui empruntent cette route au quotidien dans notre industrie. Les routes sont un élément crucial.

Pour ce qui est des quais, grâce aux investissements, plusieurs nouveaux quais ont été conçus dans la région, mais, encore une fois, compte tenu de l'étendue de la région, il faut absolument construire d'autres quais. Si nous voulons réellement mettre en œuvre la gestion des baies et nos protocoles de biosécurité, il faudra construire d'autres quais.

La gestion des déchets constitue un besoin crucial pour l'industrie à l'heure actuelle. Le nombre de fournisseurs et de solutions, particulièrement pour la gestion des matières organiques, est insuffisant. On a mis sur pied des plans de mesures d'urgence en cas d'incidents entraînant la mort; toutefois, les fournisseurs de solutions, pour la plupart des composteurs et des sites d'enfouissement, sont actuellement inadéquats ou tout simplement non disponibles. C'est important au chapitre du maintien de la biosécurité ainsi que de l'élimination adéquate des matières organiques de nos exploitations aquicoles.

D'autres besoins en infrastructure sont des fournisseurs généraux nécessaires pour l'aménagement de toute industrie, mais, dans la nôtre, les besoins se rattachent particulièrement à la plongée, à la logistique du transport, aux bateaux-viviers et à la réparation d'équipement. La croissance de l'industrie est impossible sans un plus grand nombre de fournisseurs de cette nature.

Quant à la large bande et à la couverture cellulaire, je vais probablement encore une fois laisser Jennifer parler des difficultés particulières que nous connaissons sur la côte sud, mais la gestion des sites, les communications et l'acquisition de données environnementales en temps réel sont importantes pour améliorer l'aquaculture, le rendement animal et la sécurité de nos travailleurs aquicoles aussi.

On a mentionné ce matin les difficultés liées au service de traversier de Marine Atlantique, mais on ne saurait trop insister sur le fait qu'il constitue le lien vers nos marchés. Tout ce que nous produisons dépend des services de traversier de Marine Atlantique vu les avantages que nous avons en matière de production de fruits de mer frais pour le marché nord-américain.

On a discuté de la gestion des baies. Il s'agit d'une étape très importante pour l'industrie. Le MPA, le MPO et l'industrie mènent des études océanographiques et des études épidémiologiques dans la région de Coast of Bays depuis cinq ans ou plus maintenant. Pour cette raison, nous n'avons pu signer des accords de gestion des baies avec la province au nom des entreprises que récemment. Une délimitation et une mise en œuvre complètes des secteurs de gestion des baies devraient être faisables maintenant et exigeront la surveillance du ministère des Pêches et des Océans et du MPA ainsi que l'application des accords d'exploitation en vigueur parmi les participants de l'industrie.

Sur le plan de la recherche et du développement, nous sommes une industrie lourdement ancrée dans la science et engagée à l'égard d'une amélioration constante. Nombre d'entre nous — et tous les représentants ici présents — provenons d'horizons scientifiques. La R-D continue est essentielle pour notre industrie. Je vais m'arrêter ici, car il y a une discussion avec un groupe de témoins distincts cet après-midi sur le même sujet. Certes, nous sommes engagés envers la R-D.

Au chapitre des ressources humaines, l'industrie aquacole de Terre-Neuve crée environ 1 000 emplois directs. Nous aimons appliquer un ratio de 1,5 pour les emplois indirects, mais, dans la majorité des cas, ces emplois sont au sein de collectivités rurales et côtières.

Une main-d'œuvre compétitive est bien formée et reste à l'affût des percées technologiques. Il y a une pénurie de main-d'œuvre qualifiée dans tous les secteurs de l'industrie à l'heure actuelle; dans le domaine de la transformation dans l'aquaculture et des secteurs de fourniture et de service. Les difficultés en matière de recrutement et de maintien en poste dans l'industrie freinent la croissance dans certains secteurs. Il y a un besoin constant de formation technique du personnel des aquacultures et des usines sur les méthodes les plus récentes d'élevage efficient et responsable sur le plan écologique.

Au cours des dernières années, nous avons beaucoup travaillé avec le Marine Institute, avec le plein appui des entreprises, à l'aide de financement de l'APECA et de nos ministères provinciaux pour former nombre des employés qui travaillent actuellement dans nos aquacultures. Nous envisageons d'offrir plus de formation en gestion cette année. Nous effectuons beaucoup de travail auprès des jeunes dans les écoles secondaires locales. Nous parlons d'aquaculture, et je crois que cela les informe sur les débouchés dans l'industrie. Nous les voyons aussi comme nos ressources humaines de l'avenir.

En ce qui concerne les exigences réglementaires et le renouvellement, l'aquaculture est une industrie moderne qui exige un cadre législatif moderne, à tout le moins pour assurer sa compétitivité. Sur le plan fédéral, comme l'a mentionné Cyr, l'industrie est gérée par un texte de loi dépassé intitulé Loi sur les pêches. Elle ne contient aucune mention de l'aquaculture et est uniquement conçue pour protéger les poissons sauvages. De nombreuses dispositions de la loi sont invoquées pour réglementer les activités aquacoles et ne se rattachent tout simplement pas à un contexte aquacole. L'industrie de Terre-Neuve milite en faveur d'une loi fédérale qui régirait l'industrie aquacole, une loi habilitante qui permet de prendre des règlements d'application pour régir le secteur sans qu'il y ait d'intérêts concurrentiels.

Nous offrons notre plein soutien à notre association nationale, l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, qui s'est adressée au comité, je crois. Cyr occupe actuellement le rôle de trésorier au conseil d'administration de l'AICA. Je siège aussi au conseil d'administration de l'AICA, et nous appuyons les efforts de Ruth Salmon à ce chapitre à Ottawa.

Quant à Transports Canada, pour nommer quelques difficultés particulières que nous éprouvons actuellement, la Loi sur la protection de la navigation fédérale, autrefois intitulée Loi sur la protection des eaux navigables, a récemment été modifiée et permet de délimiter clairement un site aux fins de la navigation. Il y a un grand besoin d'uniformité parmi les règlements provinciaux et fédéraux liés à la délimitation de sites à Terre-Neuve. Comparativement à d'autres administrations, les nôtres sont très différents, bien qu'ils soient inscrits dans une loi nationale. On a l'impression d'avoir des exigences excessives en matière de délimitation à Terre-Neuve, ce qui crée des préoccupations en matière de sécurité chez les aquaculteurs ainsi que les amateurs de navigation de plaisance. Les compressions de la main-d'œuvre de Transports Canada imposées par le gouvernement fédéral ont fait en sorte que Terre-Neuve a perdu son poste de gestionnaire régional il y a quelques années, poste qui a d'abord été transféré à Dartmouth, puis, récemment, à Moncton.

La collecte de données liées aux permis d'AMP — parce que nous en avons tous besoin sur les eaux navigables, maintenant — a été difficile pour le personnel local et est souvent reléguée aux Maritimes, où les communications sont encore plus difficiles. Cela a causé de la confusion parmi nos participants de l'industrie ainsi que des retards dans la délivrance des permis nécessaires.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments, qu'on a aussi mentionnée ce matin, dans le contexte du nouveau Programme national sur la santé d'animaux aquatiques, le PNSAA de l'ACIA, éprouve aussi des difficultés découlant de la loi actuelle, particulièrement en ce qui a trait aux incidents et à la détection de procédures de quarantaine ultérieures nécessaires en cas de maladie à déclaration obligatoire.

L'industrie continue de travailler avec l'ACIA. Nous avons une rencontre prévue très bientôt avec des représentants de Halifax pour parler de ces préoccupations, et nous profiterons évidemment du soutien démontré ce matin par nos vétérinaires provinciaux spécialistes de la santé des poissons.

Au chapitre des communications — aspect très important pour l'industrie et pour l'association —, je vais seulement mentionner que l'industrie piscicole continuera de promouvoir ses retombées sociales et économiques. Toutefois, le gouvernement doit aussi continuer à promouvoir le secteur en tant qu'activité économique viable et responsable pour notre région rurale.

Nous sommes très heureux d'avoir le soutien du gouvernement provincial ici, comme on l'a illustré ce matin, et nous recherchons la même chose auprès du gouvernement fédéral. Nous sommes résolus à travailler avec les intervenants et, à Terre-Neuve en particulier, nous avons un comité de travail conjoint formé par des représentants de pêcheurs par l'intermédiaire du FFAW sur la côte sud, par exemple. Nous essayons de nous réunir régulièrement pour discuter d'enjeux du point de vue des pêcheurs ainsi que du milieu aquicole. Nous nous attachons à l'industrie dans son ensemble. Nous ne discutons pas des renseignements d'une entreprise particulière, mais les représentants d'entreprise rencontrent par la suite les pêcheurs un à un pour aborder ces questions. Cela a très bien fonctionné et a certainement amélioré nos relations sur la côte sud.

Le gouvernement et l'industrie doivent collaborer en matière de communications liées à nos plans de croissance et à notre aménagement en temps réel, et la NAIA est résolue à le faire au nom de notre industrie à Terre-Neuve-et- Labrador.

Enfin, nous sommes résolus à produire des fruits de mer salubres, nourrissants et sains pour les consommateurs locaux et étrangers. Nous croyons en l'industrie. Nous croyons en ses avantages pour Terre-Neuve-et-Labrador. Nous croyons en ses avantages pour tout le Canada, si elle est correctement soutenue.

Merci de m'avoir écoutée ce matin.

Le président : Merci, madame Pryor.

Madame Caines.

Mme Caines : Bonjour à tous. Vous avez fait trois heures de route pour me voir hier, et je vous en suis assurément reconnaissante, alors j'ai fait trois heures de route ce matin pour vous voir. J'espère que tout le monde est bien réchauffé après hier. Je crois que la meilleure journée à passer sur l'eau était hier, alors nous avons bien fait de ne pas attendre jusqu'à aujourd'hui.

J'aimerais seulement répéter deux ou trois choses au sujet de Northern Harvest Sea Farms. Je sais que c'était difficile hier. Nous avons coupé le moteur du bateau, mais il était difficile, compte tenu du vent, de vous parler et de vous expliquer un peu plus ce que nous faisons.

En fait, au départ, j'étais biologiste et parasitologue, mais j'évolue dans l'industrie aquicole de Terre-Neuve depuis plus de 30 ans maintenant; tout d'abord, j'étais active dans le milieu des mollusques et crustacés, puis j'ai passé les 11 ou 12 dernières années dans le milieu de la recherche sur la morue et le saumon. Je suis actuellement directrice de Northern Harvest Sea Farms Newfoundland Limited, qui est un producteur entièrement intégré de saumon atlantique pour le marché du poisson dans le nord-est des États-Unis ou l'Est du Canada.

À vrai dire, on n'entend pas beaucoup parler de Northern Harvest Sea Farms. Parfois, c'est une bonne chose. En général, nous restons assez modestes, mais, en fait, en 2013, nous avons produit 16 000 tonnes métriques de saumon pour le marché. Cela nous classe de fait au troisième rang des producteurs canadiens. Tous nos produits sont certifiés par le programme des pratiques aquicoles exemplaires de la Global Aquaculture Alliance. De fait, nous sommes la première exploitation de l'Est du Canada à obtenir une certification de l'alliance pour les piscicultures de saumon, et nous sommes la première exploitation dans le monde à obtenir une certification à trois étoiles, en collaboration avec notre fournisseur d'aliments et nos transformateurs. Nous espérons que, lorsqu'on parachèvera les normes sur les écloseries, notre nouvelle écloserie de Stephenville obtiendra aussi une certification de quatre étoiles dans le cadre de ce programme.

Comme je l'ai dit, nous avons une nouvelle écloserie avec système de recirculation sur la côte ouest de l'île, et elle devrait approvisionner notre production sur la côte sud en saumoneaux. À tout moment — j'ignore si vous m'avez entendue hier —, nous avons probablement de 150 à 200 cages de poisson dans l'eau, réparties sur 12 sites.

Encore une fois, comme l'expliquait le Dr Whelan, il est difficile de vous donner un chiffre définitif à l'heure actuelle, alors qu'il y a tant de sites en activité et mis en jachère, des sites qui commencent et qui terminent la production à mesure qu'on pêche les poissons. Habituellement, nos sites sont très profonds — de 30 à 300 mètres —, et nous utilisons de grands filets. Nous exploitons plus de 20 sites en rotation, selon un cycle de production de 1,5 à 2,5 ans suivis d'une période de jachère. Habituellement, notre période de jachère était de un an à Terre-Neuve, et, comme vous pouvez le constater à la lumière de la loi dont discutait le ministère ce matin, Terre-Neuve a été proactive dans ce dossier. Parfois, il est bon de commencer la conception un peu plus tard, car on peut apprendre des erreurs des autres. Nous avons toujours appliqué une longue période de jachère, une seule classe d'âge par site et le genre de choses qui sont aujourd'hui considérées comme de bonnes pratiques. Terre-Neuve les applique depuis de nombreuses années.

À Northern Harvest, nous croyons en un modèle de densité d'ensemencement très faible, ce qui nous a donné un avantage, selon nous; nous alimentons le poisson avec des aliments certifiés par l'alliance et nous surveillons, comme vous l'avez vu hier, le processus d'alimentation à l'aide de caméras dans l'eau, de sorte que nous puissions observer à quel moment les poissons ont terminé de manger. Nous travaillons aux côtés de pêches de capture, où on prend du homard, du hareng, de la morue et d'autres poissons de fond.

Northern Harvest est actuellement propriétaire d'un bateau-vivier de 650 mètres cubes, de deux navires de 65 pieds, de 258 barges utilitaires en acier, de probablement 16 ou 17 palangriers — nous étions sur l'un d'eux hier — et de beaucoup d'autres barges et petites embarcations. Nous employons environ 130 personnes directement et nous impartissons la transformation, le nettoyage de filets et d'autres services.

Comme vous le savez, Terre-Neuve a récemment signé une entente de gestion des baies qui prévoit la coordination de l'ensemencement et de la mise en jachère de secteurs complets ainsi que l'utilisation d'infrastructures réservées à ces secteurs. Nous avons vu l'un des quais hier à Back Cove, qui a été affecté au débit entrant, où vos nouveaux poissons — vos saumoneaux — vont au large à partir de vos filets propres et de votre aire d'alimentation. Ensuite, à d'autres quais, à d'autres installations, il y a votre matériel pour débit sortant, les filets souillés, les poissons morts, les poissons pêchés et les choses qui reviennent de la pisciculture. En gardant ces deux choses séparées et en maintenant une cloison entre les activités d'entrée et de sortie, nous espérons assurer une protection ou une séparation tout en augmentant ou en améliorant la biosécurité et en réduisant le risque de transfert d'agents pathogènes, surtout, dans les dernières années, le virus de l'AIS ou anémie infectieuse du saumon.

Northern Harvest a été chanceuse. Nous n'avons pas eu d'incidents liés à l'AIS jusqu'à maintenant. Nous devrions toucher du bois. Nous espérons que le programme de gestion des baies que nous avons instauré nous aidera à maintenir cette situation.

Je crois que vous aurez constaté que les conditions de Terre-Neuve sont uniques. Notre eau de mer est froide — très froide, parfois — et claire. Les conditions semblent peut-être extrêmes ici, mais nous produisons bel et bien des saumons délicieux et nourrissants avec aisance. Après tout, le saumon sauvage de l'Atlantique passe naturellement ses hivers au milieu de l'Atlantique, qui n'est pas très réputé, surtout à l'ouest du Groenland — pour ses conditions tropicales.

Nous avons effectivement d'excellentes occasions pour produire du saumon de première qualité et agrandir notre industrie, qui a seulement commencé à croître il y a 10 à 12 ans. J'ignore si Northern Harvest deviendra un jour un énorme producteur ou si Terre-Neuve deviendra un jour un énorme producteur mondial, mais nous croyons que toute amélioration sur le plan de la durabilité est tout à fait compatible avec l'accroissement de la rentabilité, et nous ciblons ces deux choses.

Toutefois, nous ne sommes pas sans connaître d'autres difficultés, et nombre d'entre elles sont de source fédérale, et je suis certaine que vous mourez d'envie d'en entendre parler. Apparemment, tout le monde croit que j'aurais été capable de tout aborder, mais ce n'est pas le cas. Il y a tout simplement trop de choses. Peut-être que vous ne pourrez rien faire, mais, au moins, vous saurez comment ces choses compromettent notre capacité de maintenir notre industrie et d'améliorer notre compétitivité. Je crois qu'elles compromettent toutes les activités à Terre-Neuve, pas seulement celles de Northern Harvest.

En ce qui a trait au traversier de Marine Atlantique, la côte sud de Terre-Neuve est une source d'eau peu susceptible d'être contaminée par des polluants industriels ou une circulation maritime dense, mais nous vivons sur une île, ce qui veut dire que la seule façon de sortir ou d'entretenir des liens avec le continent est à l'aide du service de traversier de Marine Atlantique. C'est là que se trouvent nos principaux marchés, de toute évidence. Les traversées sont souvent retardées — habituellement, on en prévoit deux par jour — en raison des conditions météorologiques ou de problèmes mécaniques. À certains moments de l'année, nous nous attendons à ce que des chargements soient pris à Port-aux- Basques.

Il y a deux ans, je crois, nous avions neuf chargements de saumon immobilisés à Port-aux-Basques juste avant Noël à cause de la météo. C'est important. Ce n'est pas banal, parce que chaque jour que passe notre poisson de ce côté du golfe est un jour de moins sur le marché, ce qui signifie que la durée de conservation est réduite.

On risque de ne pas pouvoir embarquer ces chargements sur le prochain traversier, à cause des réservations prioritaires à faible coût, qui, à un moment, étaient en fait complètement gratuites. On accordait la priorité aux fruits de mer frais, car beaucoup d'espace était réservé à bord des traversiers. Ce n'est plus possible. Vous pouvez payer 500 $ pour une seule réservation prioritaire, et cela ne vous donne pas de garantie. C'est important. Personne ne peut contrôler la météo, mais il faut simplement s'assurer d'avoir les bons traversiers et la bonne infrastructure d'amarrage, car c'est la route Transcanadienne qui traverse le détroit de Cabot. J'imagine que certains seraient convaincus que nous n'avons pas les bons traversiers, que nos traversiers sont trop gros pour leurs ports d'attache. Certains de ces traversiers ne peuvent pas naviguer dans des vents supérieurs à 50 km. Mon Dieu, c'est essentiellement notre quotidien, si vous y pensez. Nos produits, en plus d'être périssables, exigent une révision à la baisse des prix sur le marché après tout retard important, et ça, ce n'est assurément pas un avantage concurrentiel.

Nous recevons aussi des marchandises — y compris de l'équipement et de la nourriture pour le poisson — dont le coût est non négligeable, tant sur le plan financier que sur celui des occasions manquées. Comme je vous l'ai dit hier, étant donné que notre industrie est saisonnière, nous disposons seulement d'un certain nombre de jours pour tirer parti de nos occasions d'élever du poisson, et nous essayons d'en profiter au maximum.

Pour ce qui est de l'impact de l'aquaculture sur les activités de Marine Atlantique, Northern Harvest a envoyé à elle seule par camion gros porteur 1 200 cargaisons de produits de la mer ou de saumon frais l'an dernier, en 2013. Au total, si l'on tient compte des 200 à 300 cargaisons de nourriture pour poisson ou d'équipement transportés vers la province, cela représente de 1 à 1,5 p. 100 des activités de fret commercial de Marine Atlantique. Je crois que, selon certaines statistiques, il y a eu plus de 100 000 réservations de bateaux commerciaux l'an dernier. À mon sens, 1,5 p. 100 dans une province de cette taille, c'est considérable. Si on ajoute à cela les autres éleveurs de saumon ainsi que le secteur des moules, je pense qu'on en arrive à un volume important.

À Transports Canada, sous le régime de la Loi sur la protection de la navigation qui a été mentionnée plus tôt — et je ne m'étendrai pas trop sur le sujet, même si elle m'empoisonne particulièrement l'existence —, il y a un manque d'uniformité dans l'interprétation de la réglementation. Nous avons la même loi pour tout le pays. Auparavant, c'était la Loi sur la protection des eaux navigables, mais on a changé son nom récemment pour la Loi sur la protection de la navigation. Les exigences en matière de commercialisation à Terre-Neuve sont déterminées par Transports Canada et éclairées, si je puis dire, par certains conseils locaux ou régionaux qui émanent de la province. En comparaison avec des pays comme la Norvège, l'Écosse ou le Chili, ou avec d'autres provinces canadiennes, comme la Colombie- Britannique, le Québec, la Nouvelle-Écosse où l'Île-du-Prince-Édouard... En 2011, par exemple, avant d'acheter notre propre bateau-vivier, nous devions louer un tel bateau de la Norvège. Dès qu'il est arrivé sur place pour livrer notre saumoneau, le capitaine du bateau — un Norvégien — s'est demandé ce qu'était tout cela : pourquoi y a-t-il plein de petits flotteurs jaunes à 60 mètres d'intervalle autour du site? Il était préoccupé par le danger que cela représentait pour la navigation. L'équipage et lui n'avaient jamais vu une telle chose en Norvège ni dans tout autre pays où ils avaient travaillé. Nous en avons donc enlevé quelques-uns temporairement afin qu'il puisse accéder en toute sécurité aux cages.

Seulement, voilà : Transports Canada a décidé d'inspecter nos sites au même moment. Par la suite, nous avons reçu une lettre disant qu'ils n'étaient pas conformes à ce qui avait été approuvé.

On ne peut pas gagner. Nous ne connaissons aucun autre pays du monde où il y a autant de marquage exigé à l'égard des sites aquacoles. Nous avons demandé qu'on réduise cela, mais le personnel terre-neuvien responsable de la protection des eaux navigables continue de l'exiger. Tout ce que nous demandons, c'est une interprétation uniforme de la loi fédérale.

De plus, la compagnie qui assure nos stocks — Sunderland Marine, un assureur de produits aquacoles à l'échelle mondiale — s'est dit préoccupée par les exigences excessives en matière de marquage à Terre-Neuve. Elle ne voit pas cela ailleurs.

J'ai d'ailleurs avec moi des documents fort alarmants. Ce matin, j'ai pensé au fait qu'une boîte de vitesses à 12 000 $ s'est brisée sur un de nos palangriers. Il est possible de la remplacer, mais si cela s'était produit pendant une tempête et qu'un de nos bateaux avait été perdu, nous aurions pu avoir de graves problèmes de personnel. Alors, n'en parlons pas.

La nouvelle Loi sur la protection de la navigation a pris effet en 2014 et remplaçait — comme je l'ai dit — la Loi sur la protection des eaux navigables, mais nous ne savons pas encore ce que cela signifiera pour les sites terre-neuviens. Il y a de l'incertitude à propos de la durée des approbations fournies pour les sites aquacoles. Par le passé, elles étaient valides durant cinq ans. Nos baux d'aquaculture s'étendent sur 50 ans. Nos permis provinciaux sont valides pour un an. Je vous jure, c'est un travail à temps plein que de s'acquitter des tracasseries réglementaires dans cette industrie.

Je suppose qu'en substance, la Loi sur la protection des eaux navigables ne peut pas vraiment nous dire quelles seront pour nous les conséquences de la nouvelle loi. Comme l'a mentionné Miranda, nous avons dû composer avec la perte du gestionnaire de la protection des eaux navigables dans la région de Terre-Neuve. Nous nous sommes ensuite retrouvés avec trois gestionnaires intérimaires du programme avant d'avoir enfin un gestionnaire permanent à Moncton. Je crois bien que nous pourrons ainsi en arriver à des résultats, car nos démarches ont quelque peu été mises en plan quand tous ces changements ont commencé.

J'ai presque terminé. Sur le plan des ressources humaines, compte tenu des changements démographiques, surtout dans les régions rurales, il est difficile de trouver des travailleurs qualifiés ou aptes à être formés. Nous avons d'excellents travailleurs, mais il est de plus en plus difficile d'en trouver d'autres, et il nous en faut davantage. Encore une fois, nous avons de plus en plus de mal à attirer des employés et à les maintenir en poste à cause de toute une série de facteurs, comme la santé, l'éducation, les services sociaux et autres ainsi que les infrastructures de base. Je vous le dis, au bout de la route 360, il n'y a vraiment pas grand-chose pour inciter les gens à venir s'installer dans cette région.

En outre, nous croyons savoir que le ministère des Transports continuera à resserrer les exigences concernant la preuve de compétence exigée pour le pilotage de navires et qu'il réduira ainsi la taille des navires devant être pilotés par un capitaine qui détient un certificat de qualification. J'attire votre attention sur ce fait tout simplement à cause de l'incidence de ce changement sur de petits exploitants ruraux comme nous et du besoin de tenir compte du calendrier relatif à la mise en œuvre de la nouvelle réglementation ainsi que des nouvelles exigences liées aux certificats de qualification des capitaines. Il est déjà de plus en plus difficile de les recruter et de mettre à niveau leur formation. Il nous est même arrivé de former quelqu'un pour l'obtention d'un brevet de capitaine de pêche de quatrième classe, afin qu'il puisse piloter des navires de 60 tonnes et plus, et de le perdre ensuite parce qu'il était ainsi devenu un candidat plus attrayant pour d'autres employeurs. Un tel employé, ce n'est pas facile à remplacer.

Sur le plan des communications, les lacunes au chapitre du service de téléphonie cellulaire, de la connexion à large bande et l'accès Internet représentent un obstacle à notre vitalité économique, à notre efficience et à la sécurité des employés. Vous avez remarqué hier que nous n'avions pas de service de téléphonie cellulaire. Nous avons bien des radios VHF, mais la réception n'est pas toujours bonne en raison de la topographie. Les baies aux allures de fjords de la côte septentrionale de Terre-Neuve compliquent les choses. Le site aquacole que vous avez visité hier n'était qu'à quelques minutes du rivage. Nous l'avons choisi pour votre visite parce que nous avions très peu de temps, mais il faut prévoir entre une heure et demie et deux heures de navigation pour se rendre à la plupart de nos sites aquacoles à partir du port, et on perd toute réception environ à mi-chemin. Il y a un seul fournisseur de services de téléphonie cellulaire dans la région, alors j'aimerais lui demander d'apporter des améliorations à son réseau. Il se l'est déjà fait demander. Non seulement la portée limitée du service de téléphonie cellulaire a une incidence sur nos communications commerciales et la sécurité du personnel, mais, en outre, les technologies de détection par système satellite que nous devons alors utiliser à cause de cette lacune rendent ces activités plus coûteuses et pas nécessairement plus sécuritaires.

En conclusion, sur le plan des répercussions, il y a bien d'autres aspects sur lesquels nous pourrions nous concentrer, mais je pense que nous devrions tous essayer de réduire notre empreinte sur cette terre. La population terrestre, qui se chiffre déjà à plusieurs milliards d'habitants, continuera de s'accroître, et la production alimentaire est essentielle à la survie de tous, y compris nous-mêmes. Nous avons la merveilleuse possibilité de transformer du poisson que, dans bien des cas, personne ne mange ni même ne désire manger, de faire une utilisation novatrice d'autres ingrédients, des nutriments de base provenant de diverses sources, et d'utiliser sagement nos ressources côtières pour obtenir de délicieux et nutritifs produits de la mer de qualité supérieure. Nous avons au Canada une formidable occasion d'élever nos propres poissons et fruits de mer tout en nous assurant que les générations futures pourront le faire aussi.

Je vous remercie.

Le président : Merci. Vous avez soulevé énormément de points ce matin, et je suis sûr que les sénateurs ont bien des questions à vous poser, mais je vais demander à mes collègues et à vous-même d'essayer de formuler des questions et des réponses les plus brèves possible, compte tenu du temps limité que nous avons. Comme je l'ai dit, vous avez soulevé bien des points qui nous préoccupent en tant que membres de ce comité. Je vais donc demander au sénateur Wells de poser la première série de questions.

Le sénateur Wells : Merci de comparaître ici aujourd'hui pour présenter votre exposé et répondre à nos questions. Votre témoignage est très enrichissant.

Comme vous l'avez dit, madame Pryor, nous avons discuté à un certain nombre d'occasions avec Ruth Salmon, de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture. L'un de ses principaux messages portait sur le concept et la faisabilité — ou la possibilité théorique et pratique — d'avoir une loi distincte sur l'aquaculture. Comme nous le savons, le Canada — et je crois que M. Couturier l'a dit — fournit tout au plus 0,5 p. 100 de l'approvisionnement mondial.

M. Couturier : En poissons et fruits de mer d'élevage.

Le sénateur Wells : En poissons et fruits de mer d'élevage, oui. C'est exact. Est-ce qu'une loi portant précisément sur l'aquaculture qui combinerait les exigences de Santé Canada, de l'ACIA, de Pêches et Océans Canada, de Transports Canada, d'Environnement Canada et des autres organismes de réglementation que je n'ai pas mentionnés permettrait d'accroître la production ou l'activité? Si oui, de quelle façon?

M. Couturier : Je ne pense pas qu'une telle loi l'emporterait sur d'autres lois fédérales, car elles ne vont évidemment pas changer, mais s'il y avait une loi qui légitimerait l'aquaculture en tant qu'activité d'élevage — et c'est bel et bien de l'élevage que nous faisons : les activités se déroulent dans des sites privés, et la gestion de la propriété privée est du ressort des provinces —, je pense que cette loi pourrait permettre de réduire certains chevauchements apparents entre les échelons fédéral et provincial et d'assainir l'administration fédérale. Elle devrait aborder la question du développement — comme certaines lois canadiennes sur l'agriculture —, car cet aspect est absent des lois fédérales qui régissent l'aquaculture. Elle devrait aussi simplifier le processus réglementaire afin qu'on n'ait pas nécessairement besoin d'être soumis à la surveillance de 15, 16 ou 17 organismes fédéraux et de se conformer aux exigences d'autant de lois. C'est la principale raison de se doter d'une telle loi.

Pour obtenir auprès du gouvernement fédéral un permis ou une licence d'exploitation d'un centre d'élevage de saumon — par exemple — et faire preuve de diligence raisonnable en tenant des consultations publiques et d'autres activités connexes, il peut en coûter jusqu'à un demi-million de dollars.

Les montants sont semblables pour les éleveurs, toutes proportions gardées. Les conchyliculteurs peuvent avoir à débourser de 50 000 $ à 100 000 $ avant même d'avoir mis quoi que ce soit dans l'eau. C'est une somme considérable, car le simple fait de devoir se plier aux diverses exigences législatives représente tout un fardeau et cause beaucoup de maux de tête. Les lois ne sont pas toujours harmonisées les unes avec les autres aux échelons provincial et fédéral, mais surtout à ce dernier échelon. Une certaine rationalisation s'impose pour que l'industrie devienne plus rentable et comprenne mieux ce qui est attendu d'elle. L'industrie ne veut pas enfreindre les règles. Elle veut respecter complètement toutes les lois, mais elles sont compliquées, et il y a beaucoup de tracasseries administratives, si je puis dire. Je pense qu'une loi fédérale pourrait permettre au gouvernement canadien d'améliorer, de légitimer et de mieux réglementer l'aquaculture.

Le sénateur Munson : Je croyais que le saumon était un poisson résilient, comme il arrive à survivre aux obstacles qui se dressent devant lui durant son périple en mer. C'est un des plus grands survivants de tous les temps, mais il semble que vous devez aussi affronter un lot d'obstacles équivalent, madame Pryor, compte tenu de la confusion et des retards dont vous avez parlé ici aujourd'hui. Pourriez-vous nous donner des exemples en ce qui a trait à l'obtention des permis? Qu'est-ce qui achoppe, et que devrait-il se passer sur ce plan?

Mme Pryor : Comme Cyr l'a dit, c'est une question de conformité. À l'heure actuelle, nous devons présenter une nouvelle demande de licence provinciale chaque année. Jennifer pourra probablement vous fournir plus de détails sur le processus.

Pour ce qui est de la confusion et des retards dont j'ai parlé relativement à Transports Canada, les inspecteurs de ce ministère visitent nos sites deux fois par année. Il y a aussi des inspecteurs provinciaux du ministère des Pêches et de l'Aquaculture qui s'y rendent. Dans le cadre de leur inspection, ils consultent les diagrammes du site qui ont été approuvés en vertu de la Loi sur la protection des eaux navigables et déclarent alors le site conforme ou non conforme. Tout ce qui pourrait être considéré comme un danger ou un manque de conformité minerait ensuite notre capacité d'obtenir pour le site une licence qui nous permettrait d'y faire quoi que ce soit, comme transférer le poisson là-bas ou en récolter le poisson.

La perte d'employés et le roulement des effectifs à Terre-Neuve ont créé beaucoup de luttes internes au sein des ministères et, à coup sûr, du personnel local. Certains bureaux locaux dont les employés sont partis à la retraite n'ont pas renouvelé leurs effectifs et ont fermé leurs portes. Quand nous communiquons avec nos homologues pour essayer d'obtenir des éclaircissements sur l'état d'avancement des demandes dans le système, on nous dit que nous avons l'approbation. Certes, la province nous aide avec son guichet unique d'examen des demandes, mais c'est possible seulement si nous avons obtenu les approbations nécessaires et que nous savons que nous les avons obtenues. Si nous avons obtenu des approbations de tous les organismes de réglementation sauf Transports Canada, notre demande ne sera pas approuvée. Le poisson ne peut pas attendre. Si nous avons des alevins qui doivent être envoyés à un centre de pisciculture, il y a un processus complexe à suivre pour préparer le site. Nous ne pouvons pas commencer ces travaux avant d'avoir obtenu notre licence, et la province ne nous la fournira évidemment pas avant que nous ayons obtenu le feu vert de Transports Canada, par exemple. Il y a eu certains retards. Il nous est arrivé de devoir attendre très longtemps avant qu'on nous donne la moindre indication de ce qu'il advient de nos demandes. Voilà donc d'où vient la confusion.

Le sénateur Munson : Pourquoi les licences sont-elles délivrées pour un an? Les gens travaillent dans toute sorte d'industries. Les plans sont soit quinquennaux, soit triennaux; c'est le minimum. D'où vient cette idée, et quelle est la logique sous-jacente?

Mme Caines : J'aimerais que vous posiez cette question au ministre des Pêches. Je crois savoir que les banques veulent des plans qui s'étendent sur plus d'un an, n'est-ce pas?

Le sénateur Munson : Pourriez-vous nous donner des précisions? Nous aurions dû poser cette question au ministre. Je ne me suis peut-être pas bien préparé, mais nous avons beaucoup d'information à assimiler ce matin. La question sera probablement posée au ministre par la suite, mais y a-t-il une raison de changer cela afin que le processus ait un peu plus de sens pour l'industrie aquacole?

Mme Caines : L'industrie a demandé à obtenir des licences pluriannuelles parce que c'est sensé. Notre poisson est élevé dans nos sites durant au moins un an et demi avant que nous commencions à le récolter. Même si les licences couvraient seulement un cycle de production, nous savons que notre poisson passera peut-être un maximum de trois ans dans le site. Chaque année, on présente ses statistiques de production, ses feuilles de rapprochement de stock et son argent et, quelques semaines ou quelques mois plus tard, on obtient une nouvelle licence. Pendant cette période, il se peut qu'on ne soit pas conforme. Tous les types de certification sont fondés sur la présentation de documents à l'appui. C'est une question de conformité. Ce sont des choses que nous n'aimons pas voir. Personne n'aime voir cela.

La situation s'améliore un peu, je dirais. En toute franchise, la nouvelle Loi sur la protection de la navigation vise à faciliter un peu les choses, mais nous ne savons pas encore quelles seront ses conséquences réelles pour nous ni si les exigences seront rationalisées, et nous n'arrivons toujours pas à obtenir des réponses.

Le sénateur Munson : Je suis davantage intéressé par cette question en cette journée de découverte. Essentiellement, aux yeux du comité, tout est lié. Bien des grandes choses ont été dites au sujet de ce qui se passe à Terre-Neuve-et- Labrador, qui est considérée comme une province nantie. Contrairement à elle, l'Ontario — d'où je viens — est une province démunie — je suis sérieux — quand il est question des paiements de péréquation, notamment. Cependant, cette province tire profit de l'industrie pétrolière et de l'argent qu'elle rapporte. Vous dites que la question des infrastructures n'est pas abordée à l'égard d'une foule d'aspects qui vont du transport des produits à partir de l'île jusqu'à leur commercialisation.

Comment fait-on pour s'attaquer à ces problèmes? Vous vous êtes plainte de la situation. Celle relative au service de traversier de Marine Atlantique est évidemment inacceptable, tout comme l'état de certaines routes que nous avons empruntées hier. La Transcanadienne était en bon état, mais l'autre route était un peu cahoteuse par endroits; c'est ainsi, que voulez-vous. Avez-vous le moindre espoir que l'argent recueilli par la province au moyen des taxes et des impôts, entre autres, sera réutilisé afin d'établir une approche équitable pour toutes les industries, et la vôtre en particulier?

Je suis perplexe. Il y a tellement d'enthousiasme à Harbour Breton et dans votre localité — celle de Poole's Cove —; pourtant, je ne sais pas comment vous pourrez prospérer à moins qu'il y ait une coordination adéquate. C'est peut-être seulement mon opinion personnelle.

Mme Caines : Et c'est à peu près tout ce que nous pouvons vous dire, car, si nous savions ce qu'il faut faire, je pense que nous aurions déjà commencé à le faire.

M. Couturier : Je crois que la province a réinvesti une partie de ses recettes fiscales tirées du pétrole et du gaz. Ce matin, le ministre a parlé de prêts. Ils sont remboursables, alors une partie de cet argent aurait été utilisée pour favoriser la croissance de l'industrie. D'ici les deux prochaines années, on va paver 30 km de la longue route que vous avez parcourue hier. On la pave petit à petit.

Nous ne dirions pas que de telles améliorations n'étaient pas prévues, mais nous les attendions depuis longtemps. En ce qui concerne les quais — que certains d'entre vous ont aussi eu l'occasion de visiter —, le gouvernement provincial a lui-même investi des millions de dollars pour se doter de quais biosécuritaires. C'est une composante d'infrastructure qui était requise et qui se fait encore attendre.

La route dont il est question est longue. Marine Atlantique représente un problème fédéral qui exige des négociations entre les gouvernements provincial et fédéral afin qu'on le règle pour le bien du marché.

Dans le budget provincial de cette année, on a fait une annonce importante concernant l'accès à large bande dans certaines régions de la province, et je crois que le budget fédéral prévoit aussi un programme national d'infrastructures. Nous espérons que notre région sera connectée d'ici deux ou trois ans. Nous ne savons pas si ce sera le cas. On verra bien, je suppose.

Les autres infrastructures qui n'ont pas été abordées directement — à moins que je me trompe — sont celles liées aux services et à la gestion des déchets. Dans cette province, que fait-on de ses déchets, même si on n'est qu'un simple citoyen? À l'heure actuelle, toutes les régions de la province sont en train d'être fusionnées en deux ou trois zones. Il est question de 200, 300 ou 400 collectivités; comment peut-on même se doter des infrastructures nécessaires à une telle fusion? On cherche actuellement une solution. La situation géographique est problématique, et c'est pourquoi ce genre d'infrastructures n'est pas en place. Il faudra surmonter cette difficulté pour assurer la croissance future, mais, comme je l'ai dit dans mon exposé, nous croyons que nous serons à la hauteur de ce défi. Notre industrie entreprendra certainement des démarches auprès des gouvernements fédéral et provincial pour s'assurer qu'ils pourront nous aider à répondre aux besoins en matière d'infrastructures.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. Nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous avez consacré lors de notre visite.

Les aquaculteurs doivent utiliser certains produits chimiques — des fongicides thérapeutiques, des agents anti- biosalissures, et cetera — dans le cadre de leurs activités courantes. Notre comité s'est fait dire que l'industrie aimerait avoir accès à un plus vaste éventail de produits. Comment l'utilisation de produits chimiques par l'industrie aquacole de Terre-Neuve-et-Labrador se compare-t-elle à celle de pays étrangers comme la Norvège et l'Écosse? Comment varie la disponibilité des fongicides thérapeutiques d'une province canadienne à une autre? Est-elle la même partout?

Je veux juste avoir un aperçu de la situation, si vous le voulez bien, de même que certains détails concernant l'utilisation des fongicides thérapeutiques.

M. Couturier : Je peux répondre en partie à certaines de vos questions, madame la sénatrice.

La disponibilité des fongicides thérapeutiques est semblable d'une province à une autre, car il s'agit dans tous les cas de fongicides enregistrés auprès du gouvernement canadien qui font l'objet d'un processus de sélection extrêmement rigoureux mené par Santé Canada — comme le Dr Whelan l'a dit plus tôt —, Environnement Canada et Pêches et Océans Canada en application de la Loi sur les pêches du Canada. Bien entendu, toute la réglementation provinciale doit être respectée. Avant d'obtenir toute licence ou tout permis d'utilisation de tels produits dans une installation aquacole, il faut se conformer à ces exigences. Nous devons parfois attendre 10 ans avant d'avoir l'autorisation d'utiliser un fongicide thérapeutique, car on doit mener toutes les études scientifiques nécessaires pour démontrer qu'il aura un faible impact environnemental quand il sera utilisé.

Pour ce qui est de l'accès, les fongicides thérapeutiques et les produits utilisés pour l'élevage du poisson et — au besoin — la gestion de leur santé sont essentiellement les mêmes dans toutes les provinces.

Vous avez aussi demandé comment l'utilisation de ces produits à Terre-Neuve se compare à ce qu'il en est à l'étranger, par exemple en Norvège. Je ne sais pas quelle quantité, entre autres, d'antibiotiques et de produits visant à éliminer le pou du poisson nous utilisons par tonne de poisson produit, si c'est ce que vous demandez. Nous en utilisons probablement moins qu'en Norvège dans certains cas, et certainement moins qu'au Chili. Nous utilisons de très petites quantités par tonne. Je n'ai pas les chiffres précis devant moi actuellement, mais c'est peut-être de l'ordre de 0,3 gramme par kilo pour l'élevage du saumon.

Moins de 3 p. 100 du saumon d'élevage absorbera des antibiotiques au cours de son cycle de vie. La plupart du temps, la santé du poisson est gérée grâce à l'utilisation de sites adéquats, à de faibles densités de poisson, à des techniques d'aquaculture adéquates et aussi, surtout, grâce à la vaccination, qui est un autre aspect important. Quand ils sont mis à l'eau, les poissons sont en santé et sont censés pouvoir résister à divers pathogènes locaux. Nous obtenons de bons résultats de cette façon au Canada. Il est difficile de comparer exactement notre situation avec celle de la Norvège, mais je dirais que nos résultats sont aussi bons que ceux de ce pays, sinon meilleurs.

La sénatrice Raine : Prévoit-on arrêter d'utiliser des agents antisalissures sur les filets?

M. Couturier : La pratique change aussi pas mal au Canada. À Terre-Neuve-et-Labrador, l'utilisation d'agents antisalissures sur les filets est limitée. Certains filets contiennent un composé de cuivre et sont utilisés depuis 30 ans. Cependant, grâce au nettoyage et au lavage réguliers des filets, le composé ne se retrouve pas dans l'environnement. Tous ces produits ont été approuvés par Santé Canada, Environnement Canada et d'autres intervenants aux fins d'utilisation dans un environnement marin. Bon nombre d'entreprises arrêtent actuellement d'utiliser des agents antisalissures tout simplement en raison des coûts de leur application sur les filets. Elles peuvent nettoyer les filets sur place.

Par exemple, en Écosse et en Norvège, peu d'entreprises utilisent des agents antisalissures parce qu'elles nettoient les filets directement sur place. Nous allons aussi dans cette direction à Terre-Neuve-et-Labrador. Près de la moitié de notre production se fera probablement ainsi à l'avenir. J'estime au juger que, dans peu de temps, il s'agira d'une pratique courante.

La sénatrice Raine : Est-ce très exigeant en main-d'œuvre?

M. Couturier : Les dispositifs de nettoyage des filets sont hautement mécanisés, mais c'est quand même exigeant en main-d'œuvre, en effet. Des robots peuvent faire le travail. Essentiellement, on utilise des nettoyeurs sous-marins qu'on peut diriger de la surface grâce à une caméra. On peut nettoyer la coque des navires pour éliminer les espèces envahissantes. Lorsque cette technique fonctionne, elle permet de faire plein de choses.

Lorsqu'il y a de grands vents et de forts courants, ce n'est peut-être pas aussi facile. Sinon, il faut utiliser des pulvérisateurs dans les cages, ce qui est très exigeant en main-d'œuvre. C'est l'autre élément dont il faut tenir compte. Si la technique exige plus de main-d'œuvre, les entreprises l'adopteront-elles?

Mme Caines : Je dirais qu'il faudra attendre encore longtemps avant l'élimination complète des filets traités. Je crois que nous essayons de réduire au minimum l'utilisation des agents. Si on regarde la quantité d'agents antisalissures utilisés par tonne de poisson, dans cette optique, plus on accroîtra notre productivité et le rendement de nos pêcheries, plus nous produirons de poissons comparativement à l'utilisation de ces produits. Je crois qu'il reste encore un peu de chemin à faire avant d'éliminer complètement le recours à ces traitements.

La sénatrice Raine : Merci.

La sénatrice Poirier : Merci de votre exposé. Il y a un certain temps, nous avons reçu le Dr Kochhar, vétérinaire en chef du Canada et directeur exécutif de la Direction de la santé des animaux, qui nous a mentionné que le secteur de l'aquaculture recevait plusieurs millions de dollars du gouvernement fédéral en contrepartie des coûts associés à l'ordonnance de destruction de poissons entre 2012 et 2014. Selon lui, cette façon de faire n'est pas durable à long terme. Il a recommandé à l'industrie d'envisager l'adoption d'un programme d'assurance privée semblable à celui mis au point pour le secteur des volailles canadien.

Est-ce quelque chose que vous avez envisagé ou étudié ou une possibilité à laquelle vous avez réfléchi?

Mme Pryor : Je vais essayer de répondre rapidement.

Oui, l'industrie y a réfléchi. Il existe actuellement des polices d'assurance. Jennifer me corrigera si j'ai tort, mais l'assurance-récolte en place est très coûteuse et exclut des événements comme l'éclosion d'une maladie à déclaration obligatoire. Comme le Dr Whelan l'a dit plus tôt, si l'ACIA vient dans un site aux prises avec l'AIS — c'est arrivé, ici, à Terre-Neuve — ou la NHI, sur la côte Ouest, s'il s'agit d'une maladie à déclaration obligatoire dont l'ACIA devient responsable, à ce moment-là, on pourrait obtenir une indemnisation pour les poissons. Cela ne relève pas de notre assurance, et, jusqu'à présent, nous n'avons pas pu obtenir une assurance qui couvre de telles pertes de production.

M. Couturier : Comme vous le savez peut-être, l'assurance-récolte pour ces types d'événements est offerte à tous les agriculteurs du Canada, tous les types d'éleveurs d'animaux, même les producteurs maraîchers. Il y a des modèles de gestion du risque d'entreprise. Nous discutons avec le gouvernement fédéral depuis au moins 20 ans de la mise en place de polices d'assurance de gestion du risque d'entreprise visant les récoltes communes entre les provinces et le secteur privé, le genre de modèle d'affaires dans le cadre duquel on pourrait mettre en commun le type de police d'assurance dont vous avez parlé.

Nous espérons que, si une loi sur l'aquaculture est adoptée, elle prévoira une police d'assurance pour ce genre d'événement et que les coûts seront assumés par l'industrie et par le gouvernement. Il serait censé d'agir ainsi, et on pourrait ainsi réduire au minimum l'exposition d'organisations comme l'ACIA.

Bien sûr, aucun agriculteur ne veut perdre sa récolte en raison d'une maladie non endémique. C'est une maladie à déclaration obligatoire, alors c'est évident que les agriculteurs espèrent ne jamais être touchés. C'est là en cas d'urgence, et la raison pour laquelle c'est prévu dans la Loi sur la santé des animaux, c'est de permettre au Canada de vraiment protéger ses activités commerciales; c'est une question de commerce.

Vous avez parlé aux représentants de l'ACIA; leur mandat concerne la santé des animaux et le commerce. C'est la raison pour laquelle le programme existe. Ce n'est pas différent des autres activités d'élevage au Canada.

Cela dit, oui, on a obtenu une certaine indemnisation ici, à Terre-Neuve-et-Labrador, et peut-être aussi en Nouvelle- Écosse au cours des dernières années en raison de l'éclosion de maladies à déclaration obligatoire. Essentiellement, c'est une exigence aux termes de la loi parce qu'il faut se débarrasser des animaux. Nous croyons que, si on réussit à améliorer la définition des cas, comme le Dr Whelan l'a mentionné, on pourrait retirer ces animaux de l'eau beaucoup plus rapidement, et les coûts d'indemnisation seraient bien moindres.

Il faudrait aussi savoir qu'une indemnisation a été versée. Comme le ministre l'a mentionné, notre industrie contribue à l'économie : au moins 400 millions de dollars en intrants du secteur privé et en contribution à l'économie de Terre-Neuve. Ce n'est pas rien. Au cours des années où le Canada a versé des indemnisations liées à l'éradication d'animaux aquatiques en raison de maladies, l'industrie a généré plus de 15 milliards de dollars dans l'économie canadienne. Lorsqu'on compare ces chiffres, force est d'admettre que c'est peu, mais, tout de même, je crois que l'industrie envisage de recourir à un modèle d'assurance à frais partagés.

La sénatrice Poirier : Ma dernière question concerne le fait que vous avez dit que vous aimeriez changer, améliorer ou peaufiner bien des choses aux échelons provincial ou fédéral. Le comité a commencé son étude en janvier, cette année, et nous espérons présenter un rapport et terminer notre travail vers juin 2015.

Quelle serait votre première recommandation en ce qui concerne la priorité du gouvernement fédéral que vous voudriez que nous exposions dans le rapport?

Le président : Qui veut répondre?

Mme Pryor : Je peux y répondre.

Je crois que la première priorité, du point de vue de l'industrie, serait de reconnaître que nous sommes une industrie légitime au Canada parce, selon moi, nous n'avons jamais été traités comme telle. On en revient à la loi sur l'aquaculture. C'est la raison pour laquelle nous demandons une telle loi. Vous savez, nous avons très souvent frappé à des portes au nom du secteur de l'aquaculture pour ensuite nous faire fermer la porte au nez parce qu'aucune loi fédérale ne reconnaît notre statut d'industrie. Nous faisons de grands progrès au sein du secteur industriel canadien et nous avons l'impression que nous pourrions en faire plus. Je crois que la première chose que je demanderais, c'est cette reconnaissance de l'industrie canadienne.

La sénatrice Poirier : Les autres témoins sont-ils d'accord?

M. Couturier : Du point de vue fédéral.

Mme Caines : Du point de vue fédéral, il serait important qu'on nous traite comme une industrie légitime et qu'on nous appuie, parfois, lorsqu'on essuie — il me répugne de le dire — des attaques venant d'autres intervenants de l'industrie. Je crois qu'obtenir cette légitimité grâce à un texte législatif approprié confirmerait notre statut d'industrie où le Canada peut réussir, où les choses vont bien et que l'on peut améliorer.

La première fois que je suis allée en Norvège, je suis descendue de l'avion et j'ai monté dans un autobus. J'ai tout de suite remarqué les publicités sur l'aquaculture, sur les produits piscicoles, les aliments aquacoles et tout le reste. Je me suis dit que c'était une industrie importante là-bas. Ce n'est pas le cas ici. Nous ne verrons peut-être jamais cela ici, mais ça m'a frappée : mon Dieu, c'est une culture qui assume vraiment ses choix. Je vous l'accorde, l'état y a consacré beaucoup d'argent et essuyé beaucoup d'attaques. Il a opté pour une approche totalement intégrée. Il était décidé à créer une industrie, l'aquaculture du saumon, et il a vraiment réussi! C'est ce qui m'a frappée, la légitimité de l'industrie. Nous devrions être fiers de ce que nous avons fait, et je refuse de ne pas être fière de ce que j'ai aidé à bâtir dans la province.

La sénatrice Poirier : Merci.

Le président : C'est une réponse très diplomate.

Le sénateur McInnis : Merci beaucoup.

Ce matin, nos témoins nous ont fait sentir comme si nous venions tout juste de terminer une bonne crème glacée. Tout allait si bien. En fait, je suis surpris de voir que vous avez des difficultés avec le gouvernement fédéral. Lorsqu'on examine le protocole d'entente qui a été établi, la loi provinciale en vertu de laquelle la province contrôle pas mal de choses au sujet de l'aquaculture, je suis un peu étonné de voir les difficultés que vous éprouvez et que je ne vais pas répéter ici. Y a-t-il des groupes organisés qui s'opposent à l'aquaculture à Terre-Neuve?

Mme Pryor : Oh, que oui. Je crois que c'est quelque chose de normal pour notre industrie. Lorsque l'industrie s'est mise en place, comme on peut le voir sur le graphique des 10 dernières années, pendant longtemps, des gens étaient préoccupés, mais on n'entendait pas beaucoup parler d'eux. Évidemment, en tant que secteur, et je suis certaine que nos collègues dans d'autres régions du pays vous le diront, à mesure que l'industrie croît, ses opposants deviennent plus nombreux et se regroupent.

Il y a très certainement des préoccupations soulevées à l'échelle locale par des groupes de la région. Nous les rencontrons lorsque nous le pouvons et lorsqu'ils le veulent bien. Nous essayons de dissiper leurs préoccupations, mais ce n'est pas le propre de Terre-Neuve. L'élevage du saumon soulève des préoccupations dont on entend parler en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick ou en Colombie-Britannique.

Mme Caines : Nous prenons note des préoccupations légitimes. C'est la seule chose que nous pouvons faire pour vraiment bâtir un secteur où il y a un climat de confiance et qui est digne de confiance. Le problème, c'est lorsque les préoccupations déraillent et que la rhétorique et les arguments ne sont plus fondés sur des données scientifiques. C'est là où je ne suis plus, mais il faut que les citoyens posent des questions pour que de nombreuses industries s'améliorent, et le secteur de l'aquaculture n'est pas différent des autres industries du secteur primaire. Nous prenons note d'un certain nombre de préoccupations. C'est la seule façon de s'améliorer. Je n'ai pas l'impression d'être acculée au pied du mur, pas à ce point-là, mais je crois que nous avons quand même un peu besoin d'entendre ces préoccupations.

Une des choses que j'ai mentionnées et qui me préoccupaient un peu, c'est la division responsable de la question de la destruction des habitats du MPO, et toutes les compressions dans le domaine scientifique et au détriment de la protection des habitats. En tant que citoyenne du pays et biologiste, je suis un peu préoccupée par ce genre de choses. Il y a eu suffisamment de compressions. En tant qu'industrie, nous acceptons une certaine part de plaintes. Elles nous aident à nous améliorer, mais les doléances doivent être raisonnables et fondées sur des données scientifiques.

Le sénateur McInnis : Qui siège à votre conseil? Des intervenants de l'industrie?

Mme Pryor : Oui, il y a des représentants de l'industrie et deux représentants plus généraux. Cyr, en fait, est un représentant du Marine Institute, et il y a un autre membre de notre conseil qui vient du Centre d'océanographie.

Le sénateur McInnis : Je veux partir de Terre-Neuve sur une bonne note. J'ai entendu parler de certaines de vos difficultés et de certains des défis auxquels vous êtes confrontés, mais je crois savoir que le cas de Terre-Neuve est un peu unique en son genre. Vous avez mentionné la profondeur des eaux où ces élevages sont situés et, évidemment, les courants marins. Vous maintenez des pratiques d'empoissonnement assez faibles. J'aimerais que vous nous disiez combien vous en mettez dans un enclos et que vous nous parliez de la séparation des intrants et des extrants et ce genre de choses. Diriez-vous que c'est comparable à ce qui se passe dans les autres provinces de l'Atlantique?

Mme Pryor : C'est comparable du point de vue des occasions, oui. Nous estimons, comme Jennifer l'a dit, que nous réussissons très bien à produire du poisson ici, et que nous pourrions accroître notre production. Mais, d'un point de vue géographique, non, simplement en raison de la structure de la côte sud, de l'absence de routes et des falaises. Il y a aussi le fait que nous essayons de mettre en place des zones de gestion de baie où nous n'avons pas de quai que nous pouvons désigner comme étant les quais pour les intrants et ceux pour les extrants. L'industrie examine de quelle façon nous pouvons les mettre en œuvre compte tenu de notre infrastructure et de nos besoins.

Nous sommes uniques de ce point de vue et uniques aussi du point de vue environnemental. Certains des défis que nous devons relever, comme les vents de la force d'un ouragan que nous essuyons sur la côte sud de Terre-Neuve, sont aussi présents dans la baie de Fundy ou à d'autres endroits en Nouvelle-Écosse. Je crois que nous avons appris en examinant ce que les autres provinces faisaient. Nous en tirons des leçons et essayons de voir de quelle façon nous pouvons mieux faire les choses ici.

Le sénateur McInnis : La production piscicole au Canada stagne depuis un certain nombre d'années. En fait, nous représentons moins de 1 p. 100 de la production mondiale. La Chine, par exemple, produit 62 p. 100 du poisson d'élevage. Je crois qu'il y a quelque chose d'unique ici, à Terre-Neuve, et je vous souhaite bonne chance.

Je voulais simplement formuler un commentaire au sujet du service à large bande. C'est seulement une suggestion. Vous devez être proactifs. Vous avez un grand défi à relever ici parce que le service ne sera pas rentable. Vous devez tirer profit de la proposition fédérale et vous devez inviter les exploitants à participer. Vous avez des façons de contribuer aux coûts d'immobilisation du service cellulaire.

Par exemple, j'ai entendu dire aujourd'hui qu'il y a habituellement des terres publiques le long des côtes. Vous pouvez utiliser ces terres comme une excellente contribution pour compenser les coûts d'immobilisation, et les entreprises accepteront. Nous l'avons fait en Nouvelle-Écosse.

Merci.

La sénatrice Lovelace Nicholas : C'est un plaisir de vous voir à nouveau aujourd'hui. Y a-t-il seulement un certain nombre de permis délivrés chaque année? Est-ce pour cette raison que vous avez autant de difficulté à renouveler votre permis?

Mme Caines : Le fait qu'il s'agisse de permis annuels met beaucoup de pression sur les ressources humaines au sein du ministère et auprès de tous les organismes responsables de la consultation qui participent au processus de renouvellement des permis d'aquaculture. Les terres publiques ne sont pas un enjeu. On parle d'un bail de 50 ans, mais, 50 ans, ça ne sert à rien sans un permis d'aquaculture valide.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Et pourquoi une demande serait-elle refusée? Donnez-moi une bonne raison. Est-ce qu'on refuse de délivrer des permis?

Mme Caines : En cas d'opposition totale ou pour certaines raisons physiques, des motifs liés à l'océanographie ou à la santé des poissons, il faut tenir compte de toutes ces choses. Il y a au moins 17 organismes différents responsables des consultations, y compris les responsables des ressources historiques et le gouvernement fédéral. Il peut donc y avoir beaucoup de raisons.

Habituellement, lorsque l'entreprise décide de présenter une demande, elle a fait ses devoirs, et elle a procédé aux vérifications générales. Elle a réalisé une évaluation et une analyse pour déterminer si le site est approprié, ce qui inclut des consultations publiques en cours de route. Avant même de présenter une demande, l'entreprise doit montrer qu'elle a fait preuve de diligence raisonnable en consultant les gens.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci.

M. Couturier : Ce que j'ai à dire concerne le processus de renouvellement annuel provincial, mais, lorsqu'on a changé la loi, il y a deux ans, en 2012, comme le ministre ou Brian Meaney l'ont mentionné, on a inclus des dispositions qui permettent la délivrance de permis pluriannuels. Le ministre peut le faire. Il n'est pas rendu là, alors nous exerçons des pressions. Le permis serait renouvelable chaque année, mais, essentiellement, il s'agirait d'une formalité. Il faudrait uniquement confirmer que nous avons respecté toutes les lois et toute la réglementation. Ce serait rapide.

On a aussi mis en place un système de renouvellement électronique. On le met actuellement à l'essai, et nous espérons que cela permettra de diminuer les coûts de main-d'œuvre. Nous ne savons pas. Les travaux sont encore en cours.

Le président : Merci, monsieur.

Précédemment, madame Caines, vous avez mentionné avoir des renseignements supplémentaires. Je ne sais pas exactement de quoi il était question, mais je veux simplement vous dire à vous tous que, s'il y a quoi que ce soit qui vous vient à l'esprit après la réunion et que cette information pourrait nous servir dans le cadre de notre étude, n'hésitez pas à l'envoyer au greffier, et il la distribuera aux sénateurs du comité. Encore une fois, merci.

Nous allons passer à notre prochain groupe de témoins. Nous avons le plaisir d'accueillir, ce matin, M. Robert Sweeney, président et gestionnaire principal de projet de Sweeney International Marine Corp and SIMCorp Marine Environmental Inc.; et M. Boyd Pack, de Newfoundland Aqua Services Ltd., de St. Alban's.

Nous avons visité St. Alban's hier, et nous sommes évidemment très heureux de vous accueillir ici ce matin.

Au nom des membres du comité, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui. Je crois savoir que M. Sweeney a une déclaration préliminaire, et que M. Pack a lui aussi une déclaration. Ensuite, nous passerons à la période de questions des sénateurs.

Monsieur Sweeney, la parole est à vous.

Robert Sweeney, président et gestionnaire principal de projet, Bureau principal, Sweeney International Marine Corp and SIMCorp Marine Environmental Inc. : Merci, et bonjour, mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs. Bienvenue à Terre-Neuve-et-Labrador.

Pour commencer, j'aimerais vous dire à quel point je vous suis reconnaissant de m'avoir invité à comparaître devant le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans pour parler de la réglementation, des défis actuels et des perspectives d'avenir de l'industrie de l'aquaculture au Canada. Ce matin, je vais me concentrer sur le secteur de la pisciculture en mer, plus précisément du saumon de l'Atlantique et de la truite arc-en-ciel, dans le Canada atlantique.

Je vais commencer par affirmer simplement que le principal défi qui limite la croissance du secteur de l'aquaculture dans le Canada atlantique est le cadre de réglementation que doivent respecter les pisciculteurs et les conchyliculteurs canadiens. Même si les provinces ont le mandat selon la loi de réglementer le secteur de l'aquaculture aussi bien que d'en assurer l'expansion, il n'y a aucune loi fédérale à l'appui du développement du secteur de l'aquaculture au Canada.

C'est bien connu que la Loi sur les pêches, qui remonte à 1868, a été adoptée pour assurer la gestion de la pêche de capture, des pêches récréatives et de la pêche vivrière au Canada par Pêches et Océans Canada, le MPO, dont le mandat est de conserver et de protéger les poissons et leur habitat. Si les Canadiens veulent tirer le plein potentiel de l'aquaculture dans nos eaux côtières, alors il faut vraiment que les législateurs fédéraux adoptent une loi fédérale sur l'aquaculture, de façon à enchâsser les droits et privilèges des pisciculteurs en matière d'aquaculture en milieu marin. Une telle loi habilitante fédérale permettrait d'équilibrer le mandat du MPO en matière de protection des poissons et de leur habitat.

Permettez-moi de me présenter. J'ai commencé à œuvrer dans le domaine de l'aquaculture dans le Canada atlantique il y a environ 30 ans en tant que fonctionnaire pour la province du Nouveau-Brunswick. En tant qu'agent de développement de l'aquaculture, je devais aider les entreprises à présenter des demandes de location et de permis en vue d'activités d'aquaculture tout en élaborant des lignes directrices, des politiques et des règlements pour régir le secteur de l'aquaculture. J'ai exercé ces fonctions pendant 14 ans au sein de la province.

Après ma carrière dans le secteur public, j'ai occupé des postes au sein de la haute direction de deux entreprises d'élevage de saumon indépendantes au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, où j'ai assuré la gestion des opérations et des occasions de croissance pour les propriétaires. En février 2002, j'ai réalisé un rêve que j'avais depuis longtemps, soit créer ma propre entreprise, et j'ai constitué en personne morale Sweeney International Marine Corp, dont le siège social est situé à St. Stephen, au Nouveau-Brunswick.

Même si nous travaillons sur la côte sud de Terre-Neuve pour procéder à des évaluations environnementales marines en vue de trouver de nouveaux sites d'aquaculture depuis 2004, ce n'est qu'en décembre 2008 que nous avons décidé que nous devions assurer une présence permanente dans la région de Coast of Bays. Nous avons donc fondé SIMCorp Marine Environmental Inc. et ouvert un bureau dans la collectivité de Harbour Breton. Partout dans le Canada atlantique, SIMCorp emploie un personnel professionnel hautement qualifié composé de biologistes dans le domaine de l'environnement marin et de techniciens en environnement. Nous avons aussi un laboratoire de sédiments benthiques situé dans les installations de l'Institut des biosciences marines du Conseil national de recherches à Halifax, en Nouvelle-Écosse.

SIMCorp est maintenant considéré comme l'un des principaux experts de l'évaluation environnementale en milieu marin, de la surveillance et de la gestion environnementale pour le secteur de la pisciculture dans le Canada atlantique. En ce moment, SIMCorp assure la surveillance environnementale indépendante requise par les organismes de réglementation pour environ 80 p. 100 des sites de pisciculture en mer au Nouveau-Brunswick, dans 95 p. 100 des sites en Nouvelle-Écosse, et 95 p. 100 des sites à Terre-Neuve-et-Labrador. Nos dossiers contiennent actuellement plus de 830 heures, soit 50 000 minutes de vidéo sous-marin du plancher océanique dans la région.

Lorsque nous disons que la pisciculture marine est une industrie durable sur le plan environnemental, nous nous appuyons sur une grande expérience en mer et sur ce que nous avons constaté et ce que nous avons pu mesurer dans le cadre de nos évaluations environnementales préliminaires et de nos activités de contrôle de la conformité. Nous avons eu la rare occasion de voir les régions de Greenfield avant la création d'un site d'aquaculture et de surveiller ces mêmes régions une fois la production enclenchée. J'aimerais ajouter que les programmes de contrôle de la conformité avec la réglementation sont réalisés aux termes de l'imminent Règlement sur les activités liées à l'aquaculture, le RAA, et qu'ils sont conçus pour avoir un biais à l'égard du contrôle de la biomasse maximale de façon à refléter le pire scénario envisageable.

Selon notre expérience, les pisciculteurs du Canada atlantique respectent ou dépassent habituellement les objectifs touchant la qualité environnementale établis par les organismes de réglementation. Le processus d'analyse de la durabilité et d'évaluation du risque commence par un exercice de cadrage lorsque nous envisageons des secteurs où l'on pourrait développer la pisciculture en milieu marin. L'analyse précède le dépôt des demandes en vue de l'établissement de nouveaux sites d'élevage de poisson et exige une collecte de données environnementales et sur les ressources pouvant durer d'un à sept ans.

On applique une matrice ou des paramètres très complexes pour évaluer chaque lieu envisagé aux fins du développement de l'aquaculture. Parmi les éléments fondamentaux essentiels pour assurer la durabilité environnementale à long terme, mentionnons, au minimum, l'isobathe, la profondeur des eaux, l'exposition aux vents et aux vagues, la température de l'eau, les courants océaniques, la qualité de l'eau et la proximité avec d'autres sites d'aquaculture et/ou producteurs. L'établissement de zones de gestion de baie est aussi crucial. Nous évaluons les prédateurs et les parasites, l'infrastructure à l'appui, les données sur les pêches locales, les habitats fragiles et les zones revêtant une importance écologique ainsi que la flore et la faune benthiques.

Toutes ces données ont été approuvées en fonction d'une matrice complexe d'évaluation du risque permettant de déterminer si, oui ou non, un producteur devrait même envisager de présenter une demande relativement à un nouveau site de pisciculture marine. Une fois qu'on décide d'aller de l'avant et de passer à la prochaine phase, soit la présentation d'une demande, on tient compte d'un ensemble de paramètres encore plus complexe, y compris les pratiques de gestion du site, la gestion de la santé des poissons, le cadre d'ingénierie du site, les protocoles de biosécurité, la gestion de l'alimentation des poissons et des déchets, pour ne nommer que ceux-là, en vue de procéder à une évaluation environnementale encore plus complète des demandes présentées au ministère provincial responsable du développement de l'aquaculture.

Avant les projets de loi C-38 et C-45, les demandes d'aquaculture étaient examinées aux termes de loi et dans le cadre de processus provinciaux et fédéraux parallèles. Cependant, ce n'est plus le cas. Le dédoublement des processus a depuis été éliminé dans la mesure où les EE sont maintenant coordonnées par les provinces aux termes de lois provinciales, même si le MPO participe au processus. Même si, rendus à cette étape du processus, les producteurs ont investi beaucoup pour assurer la durabilité environnementale et économique à long terme d'un éventuel site, les processus d'EE en tant que tels sont à la fois complexes et imprévisibles.

Ce qui rend le processus encore plus complexe, et c'est là tout le dilemme auquel est confronté le secteur de l'aquaculture dans le Canada atlantique, c'est que même si on a éliminé un des volets de traitement, le dédoublement des efforts, le mandat principal du MPO qui favorise la production de pêcheries peut parfois prendre le dessus sur toutes les questions de développement qui sont si importantes pour la création d'emplois et la durabilité de notre économie.

En conclusion, nous estimons que l'aquaculture dans nos zones côtières est une industrie durable sur le plan environnemental qu'il faut appuyer en créant une loi fédérale. Merci.

Le président : Merci, monsieur Sweeney.

Monsieur Pack.

Boyd Pack, propriétaire et président, Newfoundland Aqua Service Ltd. : Merci. Je viens tout juste d'arriver en ville, dimanche, et je dois m'excuser de ne pas avoir fourni mon petit mémoire à l'avance. Si vous voulez, je peux le distribuer maintenant.

Le président : Tout le monde a reçu une copie. Allez-y, monsieur Pack.

M. Pack : Tout d'abord, merci de l'occasion que vous m'offrez. C'est un plaisir de rencontrer des gens distingués comme vous, particulièrement Mme Greene. Je suis très heureux de vous rencontrer.

J'ai été initié à l'aquaculture à la fin des années 1970 à titre de bénévole de ce qui était, à l'époque, l'association locale de développement. Puis, au milieu des années 1980, j'ai été président d'un programme fédéral appelé le Programme de développement des collectivités, qui a évolué pour devenir, aujourd'hui, je crois, la SADC.

Je suis originaire de Bay d'Espoir. Tandis que, au milieu des années 1980, dans les autres collectivités axées sur la pêche, le niveau de vie était relativement bon et l'emploi, toutes proportions gardées, pas trop mal, à Bay d'Espoir, qui n'est pas une collectivité axée sur la pêche, nous faisions concurrence à Port-au-Port pour le taux de chômage le plus élevé de la province et un des plus élevés au Canada. À cette époque, j'étais enseignant à la commission scolaire. J'ai travaillé pendant 25 ans à titre d'enseignant, de directeur d'école, de coordonnateur de programme et de surintendant adjoint de la commission scolaire.

En 1993, deux ou trois amis et moi avons lancé une entreprise de formation appelée Aquatic Resources Incorporated en vue de former des employés pour l'industrie aquicole. En quatre ans, nous avons formé quelque 150 étudiants comme travailleurs de base sur les sites d'aquaculture. Certains étaient davantage scolarisés et sont devenus des techniciens, ce qui représentait une formation deux fois plus longue. Plus de 60 p. 100 de ces gens, ou 93 d'entre eux, travaillent toujours dans l'industrie, et certains ont obtenu des diplômes d'études supérieures en aquaculture et dans d'autres domaines. Nous sommes très heureux des résultats, là-bas. Nous avons également administré et supervisé des stages de travail en entreprise pour les étudiants universitaires qui effectuaient des recherches liées à leurs études supérieures en aquaculture.

En 1994, du point de vue personnel, les choses ont évolué très rapidement sur le plan professionnel, parce que les commissions scolaires de l'ensemble de la province ont toutes été regroupées. J'ai dû, à ce moment-là, choisir entre un retour à l'enseignement ou un déménagement dans la région de Grand Falls ou Gander, où serait situé le bureau de la nouvelle commission scolaire. J'étais très engagé à titre de bénévole, à ce moment-là, dans l'industrie aquicole. Je ne voulais pas déménager. Mes enfants ne voulaient pas déménager, ni mon épouse, donc, j'ai démissionné. Certains diraient que je suis complètement fou d'avoir pris cette décision, mais je l'ai fait. J'ai lancé une nouvelle entreprise, Newfoundland Aqua Service Ltd., en partenariat avec une entreprise du Nouveau-Brunswick. L'entreprise a été créée principalement pour fabriquer et entretenir les cages dont l'industrie aurait besoin.

En fait, à titre de bénévole, j'avais rencontré plusieurs gens d'affaires dans la région pour les inciter à s'intéresser à la fabrication de cages pour l'industrie. À vrai dire, je n'ai trouvé personne — ils étaient probablement plus intelligents que je l'étais — qui était prêt à prendre ce risque, qui aurait pu voir le potentiel d'une entreprise qui fournirait des produits à une industrie aquicole qui n'existait pas encore.

Lorsque vous lancez une entreprise comme la nôtre, ça ressemble beaucoup à l'histoire de l'œuf et de la poule. Comment pouvez-vous construire des installations en vue de nettoyer des filets alors que les filets ne sont pas encore fabriqués? Comment pouvez-vous bâtir une installation pour désinfecter, construire et réparer des cages alors que l'industrie n'existe pas encore? C'est un risque que nous avons pris. Nous ne pouvions trouver personne d'autre pour le faire, essentiellement, donc, nous l'avons fait nous-mêmes.

L'industrie, à l'époque, était petite. Vous êtes allés dans la région, et vous avez pu voir qu'il n'y a pas énormément d'entreprises de service, là-bas, actuellement. Croyez-moi, dans les années 1980 et 1990, il y en avait encore moins. Il était presque impossible d'obtenir des services d'entretien ou de l'équipement marin de quelque sorte que ce soit dans notre région.

Newfoundland Aqua Service est devenu, par la force des choses, un fournisseur de tout un éventail de services et de produits. Au fil du temps, nous avons touché à tout, de la construction des cages pour les poissons aux anneaux de plastique que vous avez vus là-bas, en passant par les filets qui sont posés sur ces anneaux. Nous avons touché à la fabrication et à la réparation de ces équipements, de même qu'à leur traitement avec un agent antisalissures.

Les travaux liés au plastique comportaient de la soudure. Donc, les gars que nous avons formés pour effectuer la soudure du plastique étaient également des soudeurs de métal, ou certains d'entre eux l'étaient. Nous nous sommes retrouvés avec quelques très bons soudeurs. Nous avons fini par construire non seulement des barges en plastique, certains flotteurs, et ce genre de choses, mais également des barges en acier et à réparer des bateaux en fibre de verre ainsi que des hors-bord. Nous stockions des aliments et les livrions, pour ne nommer que quelques exemples. Ce qui nous venait à l'esprit, nous essayions de le fournir à l'industrie, parce que, pour subsister, nous devions faire plus que simplement fabriquer des cages et des filets.

Le service que nous fournissons évolue constamment. À mesure que l'industrie progresse, différentes technologies voient le jour, différents produits sont utilisés, et c'est, en quelque sorte, une situation qui est en constante mutation, pour ainsi dire.

Notre principale priorité, en tant qu'entreprise de service, c'est de fournir des services et des produits à l'industrie ainsi que de le faire de façon à respecter l'environnement et la biosécurité. En d'autres termes, nous manipulons l'équipement et le matériel appartenant à tous les producteurs, et c'est pourquoi il nous incombe de nous assurer, si le producteur A est confronté à un problème de maladie, qu'il n'y a pas de contamination croisée de ses produits vers les produits des autres clients.

Ainsi, nous avons entrepris la construction d'une usine de 4 millions de dollars, à Milltown. Je pense que vous l'avez peut-être aperçue en passant. Ce que vous auriez vu aurait simplement été un très grand bâtiment et des tambours étranges, de gros tambours que nous utilisons pour nettoyer les filets. Vous auriez vu un grand terrain qui a été dessouché et préparé pour la construction. Il s'agit d'un projet en chantier à Milltown, et il sera terminé à la fin de l'automne. Nous avons acheté et installé trois machines à laver à tambour mécanique, qui sont très similaires, si vous voulez, aux machines à laver que vous utilisez à la maison, sauf qu'elles sont vraiment plus grosses.

Pour vous donner une idée des filets que nous mettons dans ces machines à laver, maintenant, ils sont utilisés dans l'eau et pèsent de 3 000 à peut-être 5 000 livres lorsqu'ils ont été nettoyés, réparés, traités de nouveau et préparés pour retourner à l'eau. Au cours des derniers jours — Jennifer sait tout sur le sujet —, on nous a rapporté des filets pour que nous les nettoyions qui pèsent plus de 30 000 livres. Cela vous donne une idée de la mesure dans laquelle ces filets peuvent être encrassés de varech, de moules, d'algues et de tout ce genre de choses intéressantes. Nous avons acheté et installé ces trois tambours mécaniques, et ils nous permettent de recueillir les déchets qui tombent des filets, tant solides que liquides.

C'est important, parce que les filets sont enduits d'un agent antisalissures ou d'un herbicide, comme, j'imagine, vous les appelleriez. Il s'agit essentiellement... La façon la plus facile pour moi de décrire ce produit, c'est que c'est de la peinture pour cuivre. Vous avez tous vu des navires et des bateaux de diverses tailles, et vous avez peut-être vu de la peinture rouge ou noire sur chacun d'eux. Ce sont, de façon générale, les deux couleurs les plus courantes. Il s'agit d'une peinture qui arrive à la ligne de flottaison sur le bateau. Il s'agit d'une peinture antisalissures conçue pour empêcher la propagation de l'encrassement biologique sur la coque des bateaux. Elle ressemble beaucoup à ce que l'on utilise pour empêcher la propagation de l'encrassement biologique sur les filets. C'est ce que nous utilisons.

Il est important du point de vue environnemental d'en faire le contrôle, parce qu'il y a des résidus de cuivre dans les déchets solides et du cuivre dissous dans l'eau avec laquelle nous lavons les filets. Ces déchets ne peuvent pas être jetés avant qu'on en retire le cuivre. Pour retirer le cuivre de l'eau, nous avons élaboré un système qui comprend une unité d'électrofloculation qui utilise de l'électricité à faible voltage pour retirer les métaux dissous de l'eau. Cet équipement nous permet de continuer de réutiliser l'eau pour le nettoyage. Le système retire et traite les composantes solides du flux de déchets avant qu'elles soient jetées dans un site d'enfouissement approuvé.

Nous nettoyons l'eau au moyen de l'unité d'électrofloculation, et les solides qui en ressortent contaminés par le cuivre doivent être traités à la chaux et analysés relativement à la lixiviabilité. Puis, nous les envoyons à un site d'enfouissement recouvert de bâches et de choses appropriées, de façon à protéger l'environnement.

Après que les filets ont été nettoyés, ils doivent être désinfectés. Puis, ils doivent être réparés, mis à l'essai, afin qu'on puisse s'assurer qu'ils sont suffisamment solides pour être réutilisés, et traités de nouveau au moyen d'un agent antisalissures en vue de leur installation. Une fois que c'est fait, les filets sont désinfectés et sortis de ce que nous appelons le côté sale de notre usine. Ils sont désinfectés, ils sont sortis de l'espace dédié à la désinfection, puis ils sont transportés à ce que nous appelons le côté propre de notre usine.

Actuellement, le côté propre est séparé du côté sale par une clôture. Bien sûr, les employés qui travaillent dans le côté sale ne peuvent pas aller dans le côté propre sans suivre le protocole de désinfection approprié et changer de vêtements, et cetera.

Ces filets doivent être séchés après avoir été traités. Pour les sécher, nous utilisons une technologie de séchage à basse température provenant de la Norvège. C'est un système unique, et nous l'avons mis sur pied en consultant une entreprise norvégienne et une entreprise canadienne, dont le siège est à Winnipeg. Pour déterminer comment nous mettrions sur pied notre usine, c'est que nous sommes allés examiner des sites en Europe, en Norvège, en Écosse, en Irlande, au Danemark, au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique. Nous ne sommes pas allés au Chili, mais deux des gros joueurs à Terre-Neuve œuvrent également au Chili, et nous avons obtenu de l'information de leur part.

Nous avons également reçu la visite de multinationales, des entreprises de services semblables à la nôtre. Elles sont toutes venues nous rendre visite. Nous nous sommes réunis et avons échangé de l'information avec elles également.

Le fait de participer à l'établissement et à la croissance de l'industrie dans notre région s'est révélé très gratifiant pour moi. Dans les années 1980 et 1990, il y avait un taux de chômage de 85 à 90 p. 100 dans la région de Bay d'Espoir.

L'emploi dans le domaine de l'aquaculture a contribué à améliorer de façon considérable le moral de la population dans les collectivités. Les avantages sur le plan économique pour les collectivités sont manifestes. Vous ne pourriez probablement pas le constater autant que les gens qui habitaient là-bas à l'époque et qui y retournent, aujourd'hui. C'est une observation que font couramment les gens qui y retournent pour des vacances. Ce sont des commentaires très positifs qu'ils font à l'égard de ce qui se passe dans la région.

Nous étions une collectivité mourante il y a 25 ou 30 ans. Cela ne fait absolument aucun doute. Tout Terre-Neuve l'était, j'imagine, mais je me souviens que, la première fois que je suis retourné à Bay d'Espoir pour enseigner dans notre école, il y avait un peu plus de 600 enfants. À l'école catholique, là-haut, à St. Alban's, il y avait plus de 1 200 élèves. Puis, il y en avait environ 350 à Conne River. Aujourd'hui, à Milltown et dans l'ensemble de Bay d'Espoir, y compris St. Alban's, il y a seulement environ 300 élèves. Dans la région, aujourd'hui, la dynamique est différente du point de vue de la population, mais, la bonne chose, c'est que nous voyons davantage de jeunes enfants dans la collectivité. Il y a beaucoup de jeunes qui travaillent dans l'industrie et qui contribuent à la collectivité.

L'industrie salmonicole à Terre-Neuve nous a apporté la prospérité et un avenir prometteur. Il ne fait aucun doute que cette industrie est durable, mais pour en assurer la croissance et la durabilité, nous devons avoir un appui sur le plan législatif, particulièrement pour l'industrie aquicole.

Un des problèmes, c'est que nous avons fait des démarches pendant quatre ans pour enfin obtenir tous les permis et les fonds nécessaires pour bâtir cette usine d'entretien de filets. En fait, il faut prévoir beaucoup de temps pour obtenir les permis requis afin d'effectuer les choses les plus simples. Nous communiquons avec des ministères dont nous ne savions même pas qu'ils étaient concernés. Nous savons que nous devons traiter avec le ministère de l'Environnement, tant fédéral que provincial. Nous savons que nous devons traiter avec le MPO et le MPA. C'est logique, mais, il y a un peu plus d'un an, j'étais assis dans mon bureau et j'ai reçu la visite d'une représentante du ministère fédéral de la Santé, d'un représentant du ministère provincial de l'Environnement et d'un représentant du ministère fédéral de l'Environnement. Ils sont entrés. Ils ont examiné le traitement à l'agent antisalissures que nous utilisons et ont dit : « Êtes-vous conscient que ce que vous utilisez est un herbicide ou un pesticide? » J'ai dit : « Oui, c'est pourquoi il est assujetti à une telle réglementation. » Ils ont dit : « Mais, saviez-vous que vos employés doivent avoir un permis pour utiliser un herbicide ou un pesticide? » J'ai dit : « D'accord, alors, comment devons-nous faire pour obtenir un permis pour nos employés qui sont affectés à cette tâche? » Le jeune homme a dit : « Nous n'en avons pas encore. Nous n'avons pas de projet de formation à l'égard des herbicides ou des pesticides. Lorsque nous en aurons un, nous communiquerons avec vous. » Il ne nous a pas encore rappelés, mais ce n'est qu'un simple exemple.

Je n'aime pas parler de l'aspect bureaucratique ou politique de la chose, même si je pourrais, parce que 99,9 p. 100 de ces gens sont pareils comme nous. Ils font vraiment tout ce qu'ils peuvent. Le problème, c'est, particulièrement en ce qui a trait à l'environnement — et je ne vais pas faire de distinction entre les échelons de ministères —, que c'est parfois plus facile pour ces gens de ne tout simplement pas toucher au dossier, parce que, une fois qu'ils l'ont signé, ils se sont engagés, et ils ont une peur bleue des conséquences.

Nous cherchions une façon de gérer l'eau et les déchets solides ainsi que de déterminer la façon adéquate de nous y prendre. Nous communiquons avec les divers ministères et leur demandons : « Que devrions-nous faire? » Ils disent : « Nous ne le savons pas. Nous ne sommes pas en mesure de vous dire comment faire ou quoi faire. Vous pouvez venir nous voir et nous dire ce que vous voulez faire, et nous vous dirons oui ou non. » C'est un fait. Et savez-vous quoi? Ils ont dit non à la plupart des choses. C'était toute une expérience que de faire le tour du milieu de l'aquaculture au fil des années et de voir à quel point il a évolué partout dans le monde.

Nous n'avons pas le monopole de la passivité et de la procrastination, non plus. Je ne veux pas donner l'impression que nous sommes loin derrière d'autres pays et d'autres États quant à la façon dont nous faisons les choses, mais ils sont confrontés à des problèmes semblables. C'est pourquoi je dis que je ne sais pas exactement comment on devrait s'y prendre. Si je le savais, j'aurais réglé la question il y a longtemps. Il doit y avoir un ministère qui se concentre sur l'aquaculture, parce que nous sommes toujours perçus comme le cousin pauvre, si vous voulez, de la pêche sauvage et/ ou de l'agriculture. Nous avons besoin d'une législation propre à l'aquaculture, de sorte que, si quelqu'un veut s'y intéresser et lancer une entreprise dans le domaine, il peut avoir des lignes directrices ainsi que certaines règles et certains règlements qui s'appliquent, plutôt que d'essayer de faire correspondre ce qu'il veut faire avec les règlements qui proviennent de quatre ou cinq directions.

Le président : C'est très intéressant. Vous y travaillez chaque jour, et nous aimons entendre des gens qui essaient de gagner leur vie dans l'industrie. Vos commentaires sont certainement les bienvenus.

Le sénateur Wells : Merci, monsieur Pack et monsieur Sweeney, d'avoir comparu et d'avoir présenté des exposés.

Monsieur Sweeney, les fournisseurs de l'industrie sont passablement les indicateurs du succès de cette industrie. C'est une façon d'évaluer si une industrie est en croissance ou en difficulté, ou la façon dont les fournisseurs de l'industrie s'en sortent. Quel a été l'élément déclencheur qui vous a amené à décider d'étendre vos activités à Terre- Neuve?

M. Sweeney : L'élément déclencheur, pour nous, a été de voir une occasion de croissance à Terre-Neuve. Lorsque nous avons commencé à travailler ici, nous travaillions à distance, à partir de notre bureau, au Nouveau-Brunswick, pour être honnête. Nous venions sur la côte sud pour deux semaines à la fois afin d'effectuer les premiers travaux de cadrage pour un client clé. Ce n'est que lorsque nous avons vu les véritables possibilités de croissance, ici, à Terre- Neuve, particulièrement sur la côte sud... C'est ce qui a été la révélation pour nous.

Nous avons décidé, à un certain moment, d'ouvrir un bureau, simplement pour réduire la charge de travail qui s'était accumulée à l'époque. Il y avait sept personnes qui travaillaient dans notre bureau, à Harbour Breton. Ce nombre a maintenant été réduit à quatre postes professionnels. Ce qui nous intéressait, c'était la possibilité de croissance. Comme elle se concrétisait, ce n'était plus une hypothèse. Elle faisait désormais partie de notre quotidien, c'est donc le moment où le vent a tourné pour nous.

Le sénateur Wells : À quand cela remonte-t-il?

M. Sweeney : C'était en 2008, ce qui fait donc six ans, maintenant. Nous travaillons sur la côte sud depuis près de 10 ans.

Le sénateur Wells : Fournissez-vous également la côte Nord de Terre-Neuve et d'autres exploitants aquicoles dans la province, ou simplement la côte sud?

M. Sweeney : Non, nous ne le faisons pas. Lorsqu'on examine la situation de l'aquaculture, à Terre-Neuve, on constate que la production de poissons se trouve sur la côte sud et, plus haut, dans la région de Green Bay. Sur la côte Nord, il y a des producteurs de mollusques et crustacés. Les producteurs de mollusques et crustacés, habituellement, n'ont pas des entreprises comme la nôtre. Par exemple, les ministères provinciaux ont fait une grande partie du travail, et les rapports de surveillance de la production de mollusques et crustacés montrent que l'impact sur l'environnement est faible. À ce jour, le secteur des mollusques et crustacés n'a pas énormément besoin d'entreprises comme la nôtre.

Le sénateur Wells : Monsieur Pack, lorsque vous avez quitté le domaine de l'enseignement, pensiez-vous que, un jour, vous embaucheriez des dizaines de gens et que vous dirigeriez, je suppose, une entreprise ayant un chiffre d'affaires élevé comme celle-là dans la région rurale de Terre-Neuve, où vous avez grandi?

M. Pack : Non, je ne pensais pas. Pour être honnête, je ne savais vraiment pas quelle allait en être l'issue. Je savais simplement, à l'époque, que quelque chose devait être fait dans la région. Je suis originaire de cette région. J'y ai grandi. La situation était désespérée dans les années 1980 et 1990 dans la région de Bay d'Espoir, plus particulièrement. Je m'y suis intéressé pour des motifs purement altruistes, à l'époque, croyez-le ou non. Ce n'est qu'après un certain temps qu'on se rend compte qu'il est préférable d'en tirer profit, sinon on a des ennuis. On apprend très vite une fois qu'on est lancé.

Je ne savais pas où cela me mènerait. Au cours de cette aventure, j'ai également contribué à l'engraissement du poisson. J'étais là lorsque nous avons fait des erreurs assez importantes. Ce n'était pas toujours notre faute, je dirais, mais j'ai travaillé, au tout début, au sein d'une entreprise appelée SCD Fisheries, qui était, en quelque sorte, une combinaison d'environ 60 ou 70 personnes qui avaient fait de petits investissements, et tout le monde espérait, d'une certaine façon, devenir riche avec l'aquaculture.

Le sénateur Wells : Puis-je vous demander combien d'employés vous avez, maintenant?

M. Pack : Aujourd'hui, je pense que nous employons 23 personnes directement et, avec la construction en cours, on compte 12 ou 13 personnes qui travaillent pour les deux entreprises de construction.

Le sénateur Wells : C'est bien. Vous méritez des félicitations — tous les deux, en fait.

Le sénateur Munson : Merci de nous faire part de vos commentaires ce matin. J'ai seulement deux questions. La première s'adresse à M. Sweeney.

Nous avons entendu parler plus tôt dans des témoignages, et vous nous l'avez dit aussi, qu'il y a un problème de gestion des déchets et un manque d'espace pour disposer des déchets. Vous avez parlé d'une évaluation environnementale plus détaillée concernant la gestion des déchets. C'était au sujet de la gestion des aliments et des protocoles de biosécurité. Pouvez-vous nous donner une idée, selon ce qui se passe au sein de votre entreprise, de façons de gérer encore plus efficacement les déchets? Il semble y avoir très peu de dépotoirs dans le secteur.

M. Sweeney : En réalité, s'occuper du flux des déchets ne fait pas partie de nos activités principales, mais nous avons collaboré avec M. Pack par le passé alors qu'il élaborait un plan d'affaires pour, essentiellement, demander une installation terrestre. Ce que nous constatons entre autres, au fil du temps, notamment pour la production en eau salée, c'est qu'une grande part de l'accumulation de matières organiques — pas seulement à Terre-Neuve mais dans toute la région de l'Atlantique — dérive du lavage sur place des filets. Ce que les producteurs se retrouvent à faire, quand ils constatent l'encrassement biologique des filets, c'est qu'ils nettoient les filets, puis la matière organique se retrouve sur les fonds marins. Depuis les 10 à 12 dernières années, on constate que de plus en plus de producteurs rapportent tous les filets souillés à terre. Le problème, à Terre-Neuve, c'est qu'il n'y avait pas d'installation à terre avant que M. Pack n'entreprenne ses activités.

Le service est en place depuis cinq ou six ans, mais, au départ, la difficulté était de mettre en œuvre la réglementation en tant que telle. On avait besoin d'une installation, mais la mise en œuvre de la réglementation a représenté, je crois, l'un de nos plus grands défis. Nous ne nous occupons pas nécessairement du flux des déchets, mais nous collaborons avec nos clients et avec une entreprise comme celle de M. Pack, ici présent, pour nous assurer du traitement adéquat du flux des déchets organiques.

Le sénateur Munson : Monsieur Pack, vous avez peut-être quelque chose à dire à ce sujet, mais je vais poser mon autre question, et vous pourrez répondre aux deux.

Nous assistons évidemment à un exode. Je suis originaire de la côte Nord du Nouveau-Brunswick, et, chaque jour, l'avion qui part de Bathurst pour aller en Alberta, en Saskatchewan et partout ailleurs est plein. La situation est la même à Terre-Neuve.

Vous avez parlé plus tôt des jeunes. Ils sont moins nombreux. Y a-t-il suffisamment de programmes, parmi tous les programmes qui existent au sein de votre entreprise, pour que les femmes et les hommes de métier compétents puissent travailler chez eux? Y a-t-il des incitatifs à rester sur place? Vous avez parlé d'une aquaculture durable, diversifiée et qui va de l'avant, ayant besoin d'une protection législative et d'un guichet unique, d'un point de service. Offre-t-on suffisamment d'avantages aux gens pour qu'ils restent ici et prennent part à cette industrie?

M. Pack : Notre plus gros problème pour ce qui est de maintenir en poste les travailleurs qualifiés, c'est la demande sur le marché du travail, dans notre cas en particulier, des opérateurs d'équipement, comme des opérateurs de camion- grue. Nous avons besoin d'un camion-grue. À l'heure actuelle, il est beaucoup plus facile de recruter un neurochirurgien qu'un opérateur de camion-grue à Terre-Neuve-et-Labrador. J'exagère un peu, mais c'est difficile. La réglementation exige qu'ils aient une formation, et ce que nous avons remarqué, entre autres, c'est que nous avons des gars plus âgés qui peuvent conduire un camion-grue. Il y a deux opérateurs de camion-grue formés dans l'industrie, tous deux plutôt jeunes, dans la trentaine et la quarantaine. Nous avons deux ou trois autres personnes qui peuvent manipuler un camion-grue encore mieux que ces deux gars, mais, bon Dieu, vous ne les verrez pas aller à l'école et suivre une formation. Ce n'est tout simplement pas dans leurs gènes. Je suppose qu'ils n'ont pas trouvé l'école très passionnante il y a 50 ans et qu'ils ne veulent tout simplement pas y retourner. On a donc surtout de la difficulté à retenir les gens et à concurrencer avec le Labrador, la péninsule d'Avalon et, bien sûr, l'Alberta.

Le sénateur Munson : Vous êtes un enseignant. Est-ce que le gouvernement provincial ou toute autre administration, ainsi que les écoles, offre aux membres de la génération actuelle des incitatifs afin qu'ils suivent les formations requises pour rester ici et obtenir un bon salaire? Existe-t-il des programmes? Est-ce que le gouvernement se préoccupe suffisamment de la situation?

M. Pack : Sur une note positive, ce que nous constatons — je ne peux parler qu'au nom de notre entreprise —, c'est qu'il y a des gens ici qui pourraient travailler à Fort Mac, au Labrador ou ailleurs au large des côtes, mais ils choisissent de rester parce qu'ils ont des enfants, ils ont une famille et ils ont une vie. Certains sont prêts à rester, mais vous ne pouvez pas vous attendre à convaincre les gens de rester pour des salaires de 12 $, 13 $ ou 14 $ l'heure. Le taux de salaire doit augmenter, et c'est l'un des enjeux auxquels l'industrie doit s'attaquer. Nous devons être concurrentiels par rapport aux autres secteurs. Avec le prix du poisson qui fluctue, ce qui importe, au bout du compte, c'est d'être concurrentiel et de réussir à faire de l'argent.

La sénatrice Poirier : Merci d'être ici. J'ai une question pour chacun d'entre vous.

Monsieur Sweeney, vous avez parlé plus particulièrement, au début de votre exposé, du secteur de la pisciculture en milieu marin, plus précisément de la culture du saumon de l'Atlantique et de la truite arc-en-ciel dans la région canadienne de l'Atlantique. Nous entendons parler des moules et des huîtres. Nous entendons beaucoup parler du saumon, mais nous n'entendons pas souvent parler de la truite arc-en-ciel. Je me demande simplement quel est le niveau ou le pourcentage du marché que représente la truite arc-en-ciel. Combien en produisons-nous, et y a-t-il de la demande pour ce produit?

M. Sweeney : Vous posez plusieurs questions.

Y a-t-il de la demande? Oui, il y en a. La truite arc-en-ciel est plutôt un produit de créneau, ce qui signifie que l'on n'a pas un volume de marché aussi important que pour le saumon de l'Atlantique. On fait effectivement l'élevage de la truite arc-en-ciel ici, sur la côte sud, de même qu'à certains endroits en Nouvelle-Écosse. Il s'agit surtout de plus petits producteurs que dans le cas des producteurs de saumon, essentiellement parce que c'est un marché à créneaux. Une fois que le marché est pris, il est très difficile de se tailler une place, pour ainsi dire.

On élève aussi un peu l'omble chevalier, mais à une très petite échelle. Je connais un seul site, je crois, dans le Canada atlantique, où l'on a produit récemment de l'omble chevalier dans le milieu marin. En comparaison, la truite arc-en-ciel ne représente pas une très grande part du marché, mais on compte tout de même quelques producteurs.

La sénatrice Poirier : Monsieur Pack, vous avez parlé de votre entreprise que vous avez bâtie, la Newfoundland Aqua Service Limited, et vous avez parlé d'un partenariat avec un fabricant de cages au Nouveau-Brunswick. Quand on pense à l'avenir de notre aquaculture et à tout ce que vous avez fait et tout ce que vous faites pour l'industrie, on ne peut que vous féliciter, puisque je suis sûre que vous avez mis sur pied un service qui n'était probablement pas offert pendant des années et que vous avez aidé l'industrie de l'aquaculture à évoluer pour se rendre là où elle est aujourd'hui.

À l'heure actuelle, vous êtes à Terre-Neuve et vous avez conclu un partenariat avec le Nouveau-Brunswick. J'aimerais savoir si votre entreprise approvisionne seulement la région de Terre-Neuve, ou si elle approvisionne tout le Canada atlantique.

Il va me permettre de poser une seule question, alors je vais devoir y intégrer deux ou trois autres questions.

Vous parlez des filets. À quelle fréquence doivent-ils être rapportés pour être nettoyés? Parlez-vous seulement des filets de l'aquaculture terre-neuvienne? Faut-il aussi laver les cages? Je me souviens que les gens avaient certaines préoccupations, il y a des années, à propos des cages flottantes pour les huîtres. Ils disaient : « Comment nettoie-t-on les fientes des oiseaux? Comment les nettoie-t-on? Doit-on s'en préoccuper? Est-ce que les fientes ont une incidence sur les poissons que nous élèverons? » Je me demande quelle est exactement l'étendue du territoire. Si ce n'est pas vous qui vous occupez du nettoyage, y a-t-il des services offerts dans les autres provinces qui font de l'aquaculture du même type?

M. Pack : Tout d'abord, pour ce qui est des filets, non, nous ne traitons pas ou ne nettoyons pas ce qui vient de l'extérieur de la province. C'est évidemment entre autres parce qu'il serait très coûteux de faire venir les filets ici puis de les renvoyer. En outre, nous n'aurions pas le droit de faire venir ici des filets sales du Nouveau-Brunswick, et vice- versa. Nous n'aurions pas le droit, pour de très bonnes raisons.

Pour ce qui est du temps que les filets passent au large, cela dépend. Je suis sûr que Jennifer et les autres éleveurs aimeraient les sortir tous les trois ou quatre mois s'ils le pouvaient. Ils restent généralement en place pour une saison. Donc, un filet à saumoneaux, par exemple, serait mis en place au printemps en même temps que les saumoneaux. Les mailles de ces filets sont plus petites. Il resterait en place jusqu'à la fin de l'automne ou jusqu'au printemps suivant. À ce moment-là, les poissons ont grossi et peuvent être placés dans un filet aux mailles plus larges. Je pense qu'on peut dire, sans risquer de se tromper, qu'un filet passe en moyenne un an dans l'eau. Cela varie. Si vous vous retrouvez avec une importante colonie de moules, vous serez peut-être obligé de sortir les filets plus tôt, mais, en moyenne, on peut parler de un an.

En ce qui concerne votre question au sujet des cages, non, nous ne nettoyons pas beaucoup les cages. Nous le faisons si nous devons en réparer une. Nous devons nettoyer la cage avant de pouvoir la remonter, par exemple, mais ce nettoyage se fait habituellement sur place. Les gens sur place vont gratter l'huile ou les fientes d'oiseaux, ou quoi que ce soit d'autre.

La sénatrice Poirier : Savez-vous si le nettoyage de filets et les autres services que vous offrez sont aussi offerts dans toutes les autres provinces? Y a-t-il là aussi des entreprises qui s'en occupent?

M. Pack : Oh oui, tout à fait. Nous avons échangé avec la plupart d'entre elles, et nous avons rencontré leurs responsables au fil des ans. C'est un très petit milieu.

La sénatrice Poirier : Merci beaucoup.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. Vos témoignages sont très intéressants.

De toute évidence, monsieur Pack, vous avez commencé au sein de l'industrie en mettant sur pied un service dont les gens avaient besoin, et vous avez en quelque sorte pris de l'avance sur les responsables de la réglementation, qui tentaient de comprendre comment réglementer vos activités. Vous avez donc probablement eu beaucoup de plaisir. Vous pourriez sûrement écrire un livre.

M. Pack : Oui, j'ai menacé de le faire.

La sénatrice Raine : Vous voudrez peut-être éviter de mentionner certains noms. Vous êtes certainement au courant qu'il existe des pratiques exemplaires à l'échelle mondiale pour l'industrie.

M. Pack : Oui.

La sénatrice Raine : Pensez-vous que ces pratiques exemplaires devraient faire partie des normes qui seront fixées? Est-ce ce que vous souhaitez? Pensez-vous que cela aiderait les bureaucrates à définir, en quelque sorte, ce qu'ils veulent que vous fassiez? Vous êtes allé les voir et vous avez dit : « Qu'est-ce que je fais? » Ils ont répondu : « Venez simplement nous voir et nous poser la question, et nous vous répondrons oui ou non ». Enfin, c'est complètement fou.

M. Pack : C'est un peu fou, c'est vrai, mais c'est comme ça. Pour répondre à votre question, nous avons bel et bien un code de pratiques — un très bon code de pratiques, si vous voulez mon avis. Au niveau provincial, la NAIA a un code de pratiques, mais celui-ci est fondé sur la réglementation dont nous disposons ou sur ce que nous savons de cette réglementation à l'heure actuelle.

Pour répondre à votre question, encore une fois, oui, je crois qu'il faudrait inclure à la mesure législative, ou quel que soit le nom qu'on lui donne, une section sur les pratiques exemplaires. Je me rends compte que, quand je dis cela, il y a peut-être des gens derrière moi ici qui sont prêts à me tirer dans le dos; je pense aux éleveurs — je ne sais pas quelles pourraient être les répercussions pour eux d'une telle section dans certains cas, mais je ne vois pas pourquoi on n'en prévoirait pas une.

La sénatrice Raine : Merci.

Le président : Sénateur McInnis, la dernière question vous revient.

Le sénateur McInnis : Merci beaucoup.

Vous avez mentionné la Loi sur l'aquaculture, et il en a été question aussi ce matin. À l'heure actuelle, nous disposons de la Loi sur les pêches à l'échelle du Canada, et chaque province possède une loi. Essentiellement, ces lois sont fondées sur la situation dans la province en ce qui concerne l'aquaculture, l'élevage et la mise en place des cages au fond de l'eau. Tout cela relève de la compétence des provinces en vertu de la Constitution.

Une décision récente de la Cour suprême en Colombie-Britannique soutient que l'aquaculture est une forme de pêche et relève donc du gouvernement fédéral. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Si nous décidons d'adopter une loi nationale, pensez-vous qu'elle devrait exister aux côtés de celles des provinces? En d'autres termes, devrait-on avoir une seule loi? À l'heure actuelle, nous avons tout un fouillis de lois à l'échelle du pays. Elles sont toutes différentes. Il me semble que, comme je l'ai déjà mentionné, nous devrions avoir une mesure semblable au Code criminel, ce qui éviterait que toutes les provinces aient leurs propres lois. Nous avons le Code criminel, et tout le monde s'en nourrit.

Pensez-vous qu'il s'agit peut-être de la voie que nous devrions suivre pour ce qui est d'une loi sur l'aquaculture au Canada?

M. Pack : Oui, il s'agit du guichet unique. Je sais que les gens sont fatigués d'entendre ce terme, mais si nous pouvions nous entendre sur une forme de mesure législative ou de réglementation qui inclurait tant les provinces que le gouvernement fédéral, cela simplifierait certainement l'octroi de licences et de permis, par exemple, c'est certain.

M. Sweeney : Sénateur, puis-je vous demander de m'accompagner à des conférences? C'est exactement ce que j'aimerais voir se réaliser. Nous avons l'occasion de travailler dans diverses provinces, dont l'Ontario et la Saskatchewan, par exemple. En Ontario, nous nous retrouvons à l'intérieur des terres, loin de la région de l'Atlantique, et il n'y a pas de loi sur l'aquaculture. L'Ontario ne dispose pas d'une loi provinciale sur l'aquaculture. Le traitement des demandes et l'administration des sites se font, pour ainsi dire, par le truchement du ministère des Ressources naturelles, en Ontario. Il n'y a pas de loi sur l'aquaculture pour l'Ontario.

La situation est la même en Saskatchewan. La Saskatchewan ne dispose pas d'une loi sur l'aquaculture. Là-bas, l'industrie est régie, je crois, par le ministère de l'Environnement et, pour certains aspects, par le secteur des ressources naturelles.

Si l'on observe la façon dont l'aquaculture est administrée dans la région de l'Atlantique, on constate pour ainsi dire un manque d'uniformité à l'échelle de la région. Par exemple, l'industrie de l'aquaculture n'est pas du tout administrée de la même façon au Nouveau-Brunswick qu'en Nouvelle-Écosse. Puis Terre-Neuve aussi fait les choses d'une autre façon, ce qui entraîne une certaine confusion pour les producteurs qui tentent de comprendre la réglementation.

En ce qui concerne le travail de notre entreprise sur le plan de la surveillance environnementale, j'ai déjà mentionné à de multiples occasions qu'il n'existe aucune uniformité en matière de surveillance environnementale, ni, par exemple, en ce qui concerne les seuils que ne doivent pas dépasser les répercussions, et ce, même dans la région de l'Atlantique. Tout cela peut entraîner beaucoup de confusion pour les producteurs, mais aussi pour les entreprises comme la nôtre, puisque nous collaborons avec les producteurs et avec les organismes de réglementation.

Notre entreprise emploie deux biologistes qui connaissent en détail et de façon spécialisée la réglementation de chaque province. Au sein de l'entreprise, je suis peut-être le seul qui franchit les frontières dans la région de l'Atlantique.

Bref, une loi nationale devrait et pourrait bel et bien entraîner une certaine harmonisation sur divers plans et permettre à l'industrie d'être reconnue comme un utilisateur légitime de la ressource maritime.

Le sénateur McInnis : L'Ontario et la Saskatchewan n'ont peut-être pas de loi, mais elles ont des protocoles à respecter. Je pense que, si nous voulons être efficaces... par exemple, dans les semaines à venir, la Nouvelle-Écosse produira un rapport à la suite de la tenue de la table ronde sur la nouvelle réglementation un peu partout dans la province. Je suis à peu près sûr que les responsables n'ont pas consulté les représentants du Nouveau-Brunswick, de Terre-Neuve ou de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous allons donc nous retrouver avec une toute nouvelle série de règlements et un nouveau protocole.

Il me semble que les provinces devraient collaborer avec le gouvernement fédéral. On ne devrait pas laisser le gouvernement fédéral procéder seul pour en arriver à une loi. Il faudrait agir tous ensemble; ce serait plus efficace.

M. Sweeney : Je suis d'accord. La Loi sur les pêches ou toute disposition législative fédérale l'emporte sur les mesures provinciales.

Le sénateur McInnis : Tout à fait.

M. Sweeney : Ces dernières années, il y a eu ces discussions concernant, par exemple, les projets de loi C-38 et C-45, et le règlement à venir, le RAA, et j'y ai vu, personnellement, une occasion d'engendrer une certaine uniformité. Je ne suis pas sûr qu'on en soit rendu là, et donc, oui, la Nouvelle-Écosse présentera probablement des mesures légèrement différentes. Elles auront certainement des choses en commun avec celles du Nouveau-Brunswick, mais je doute qu'il y ait eu des communications soutenues entre la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre- Neuve et la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur McInnis : Pourtant, les quatre provinces de l'Atlantique ont conclu un protocole d'entente pour assurer une uniformité.

M. Sweeney : Oui, les quatre provinces de l'Atlantique ont conclu un protocole d'entente; c'est très ironique.

Le sénateur McInnis : Merci, monsieur le président.

Le président : Merci, et merci à nos témoins. Nous avons eu une discussion très intéressante, surtout avec les gens qui travaillent sur le terrain, comme je l'ai dit plus tôt. Encore merci de nous avoir consacré du temps.

(La séance est levée.)


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