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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule 9 - Témoignages - Séance du soir


GANDER, Terre-Neuve-et-Labrador, le mardi 27 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 19 h 7, pour poursuivre son étude sur la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada.

Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.

Le président : Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue ce soir à notre réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je suis Fabian Manning, sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et président du comité.

Avant de laisser la parole à nos témoins, j'invite les membres du comité à se présenter pour la dernière fois aujourd'hui.

Le sénateur Munson : Bonsoir; sénateur Jim Munson, de l'Ontario.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Sénatrice Lovelace, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Poirier : Sénatrice Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur McInnis : Sénateur Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Raine : Sénatrice Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Wells : Sénateur David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le président : Merci, chers collègues.

Le comité poursuit son étude sur la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada. Ce soir, nous sommes heureux d'accueillir M. Shayne McDonald, avocat et directeur de Justice de la Première Nation de Miawpukek, et Clyde Collier, conseiller en gestion de l'aquaculture, chez Collier Aqua Service Ltd.

Messieurs, je ne sais pas si vous étiez ici plus tôt aujourd'hui. Je pense que M. Collier l'était. Le processus est donc que nous vous donnerons l'occasion de nous faire part de vos observations préliminaires, de vous présenter, et de nous parler de votre intérêt pour l'aquaculture. Ensuite, nous passerons aux questions des sénateurs et nous aurons l'occasion de discuter. Je n'aime pas parler d'un débat parce que c'est davantage une discussion que nous avons autour de la table. Qui veut prendre la parole en premier?

Clyde Collier, conseiller en gestion de l'aquaculture, Collier Aqua Service Ltd. : Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais commencer.

Le président : Très bien, allez-y.

M. Collier : Je suis un conseiller en aquaculture. Mon principal client pour l'instant est Gray Aqua Group Limited, une entreprise qui a son siège administratif pour Terre-Neuve à Conne River, dans la réserve. Mon travail pour l'entreprise consiste à donner des conseils en matière de gestion relativement à sa pisciculture de saumon.

J'ai obtenu mon diplôme en biologie de l'Université Memorial. Pendant les cinq premières années de ma vie, j'ai travaillé en tant qu'observateur des activités de pêche des pays étrangers. Au cours des 28 dernières années, j'ai œuvré dans le domaine de l'aquaculture.

Je suis aussi un membre de la Première Nation de Miawpukek, du côté maternel. Pour ce qui est de mon côté paternel, il ne laisse aucun doute. Donc, du point de vue des Premières Nations pour ce qui est de l'aquaculture, j'aimerais vous dresser un bref historique des activités de la bande dans le domaine de l'aquaculture ces dernières années.

De toute évidence, l'aquaculture est une entreprise rurale à Terre-Neuve et elle se déroule essentiellement à la porte de Conne River. Elle représente une occasion extraordinaire d'apporter la richesse et des avantages sociaux à la collectivité et la bande a essayé à toutes les occasions de faire partie de l'industrie. Malgré cela, sa participation actuelle est encore nettement inférieure à ce qu'elle devrait être.

Au début, les Premières Nations à Conne River ont essayé de participer directement aux activités. Elles avaient leurs propres entreprises qui faisaient l'élevage de la truite, mais elles se sont heurtées aux mêmes difficultés liées à l'élevage des poissons que tout le monde à l'époque. Il leur a fallu apprendre au sujet des maladies et de la gestion des maladies grâce à la vaccination du poisson. Le problème a fini par se régler, mais pas avant d'avoir causé beaucoup de dommages au plan économique à l'entreprise, sans oublier qu'il était à l'époque difficile d'avoir des stocks appropriés pour l'élevage. Ce problème aussi a fini par se régler à la fin des années 1990. Cependant, à force d'essayer d'élever le mauvais poisson, il y a eu des répercussions négatives pour l'entreprise.

Il y a eu d'autres difficultés. L'entreprise faisait œuvre de pionnière et elle a dû apprendre à créer un environnement très particulier à Terre-Neuve pour composer avec la glace et ce genre de choses — la glace côtière et non pas arctique.

Aux environs de l'an 2000, le poisson d'élevage était destiné au marché japonais et l'économie japonaise est entrée en pleine récession.

L'entreprise a survécu à cette année-là. L'année suivante, en 2001, les avions se sont lancés dans les tours à New York et le marché s'est effondré une fois de plus. Donc, deux années de suite, l'entreprise a essayé de vendre à des prix inférieurs à ceux du marché. La situation était devenue intenable; il fallait en sortir. Elle a donc vendu son intérêt dans la pisciculture aux environs de 2001.

Jusqu'au début de 2000, certains membres de la bande ont continué à travailler dans diverses piscicultures ici et là, mais la bande n'a pas participé activement à l'aquaculture. Puis, vers 2009, Gray Aqua Group a saisi une occasion de mettre sur pied une exploitation à Terre-Neuve. L'administration, l'entretien, la construction, la transformation, tout se faisait dans la réserve; quant aux ressources humaines, elles provenaient de la réserve, de l'extérieur de la réserve et des membres de la bande.

Gray, plus particulièrement, voit bien l'avantage de travailler avec une population stable. Tim Gray, le président de Gray Aqua Group, s'est marié avec Michelle, une Maliseet, et leurs six enfants sont membres de la Première Nation de Woodstock.

La promesse selon laquelle il s'agissait d'un point tournant dans la participation de la bande de Conne River à l'aquaculture qui se développait à quelques pas n'a pas été à la hauteur des attentes très élevées. Très tôt, il y a eu des difficultés au niveau du programme de formation mis sur pied pour préparer les membres de la Première Nation de Miawpukek à travailler à la ferme piscicole. La seule expérience d'un grand nombre de stagiaires avait trait aux programmes sociaux de la bande et aux projets de création d'emplois. Ils n'étaient tout simplement pas prêts à l'intensité du travail en pisciculture et le maintien en poste de ces gens a été un problème pour l'entreprise.

En 2011, la Première Nation de Miawpukek et Gray, dans le cadre d'une coentreprise, ont essayé de mettre sur pied une usine de transformation dans la réserve et le projet a dû être abandonné lorsque la question des terres de la réserve est devenue un problème. Au cours de l'élaboration du plan d'affaires, il est devenu évident que les terres de la réserve ne pouvaient pas servir au projet. Dans leur hâte d'avoir un endroit pour implanter leur projet, Gray s'est dissociée de la coentreprise et a construit une usine de transformation à Hermitage à la place, et ce qui aurait été une ancre économique, peu importe le propriétaire, n'était désormais pas de la réserve.

Donc, au cours des deux dernières années, l'AIS a frappé durement Gray. Il a beaucoup été question aujourd'hui du nombre de cas d'AIS à Terre-Neuve. Tous ces cas sont recensés par compagnie et site, mais en réalité il n'y a eu que deux éclosions d'AIS de certaines souches. Il y avait une souche à Butter Cove, puis une autre à Pot Harbour. Celle de Pot Harbour s'est ensuite propagée à Goblin Bay, à Pass My Can et à Sugarloaf. C'était la même éclosion qui ne faisait que se propager. On dit qu'il y en avait cinq; en réalité, il n'y a eu qu'une éclosion qui n'a fait que se propager. Quoi qu'il en soit, Gray a beaucoup souffert de cette éclosion.

Autre chose dont il a été question aujourd'hui, ce sont les niveaux d'indemnisation et le fait que les fermes piscicoles font leurs frais grâce à cela. Ce n'est pas le cas. Elles sont indemnisées, mais pour Gray, cela l'a obligée à demander la protection de la loi sur les faillites. Tout l'automne dernier, Gray a été sous la protection de la loi sur les faillites. L'entreprise a réussi à sortir du régime de protection de la loi sur les faillites au début de l'hiver et elle a trouvé de nouveaux bailleurs de fonds de façon à pouvoir poursuivre.

Essentiellement, ce qui s'est passé, c'est que la maladie et le montant d'indemnisation que l'entreprise a reçu ont effrayé la banque avec laquelle ils faisaient affaire. La banque a dit qu'elle voulait se retirer et c'est ce qu'elle a fait. Elle était prête à se retirer quoi qu'il en soit, et c'est précisément ce qu'elle a fait. Le fait que la banque se retire a été suffisant pour permettre à Gray de survivre et de trouver quelqu'un d'autre pour financer la ferme piscicole. Cela aussi a eu une incidence sur les relations entre Gray et la bande. Le régime de la protection de la loi sur les faillites a fait en sorte que les créances de la bande avec Gray ont été annulées par le tribunal de sorte que la bande n'a reçu qu'une partie de l'argent qui lui était dû. Elle devait recevoir quelque chose comme 6 p. 100 seulement, et vous attendez toujours?

Shayne McDonald, avocat et directeur de justice, Première Nation de Miawpukek : Oui.

M. Collier : Depuis, grâce à l'obtention d'un nouveau financement et en prévision de l'approche que Terre-Neuve s'apprête à adopter pour gérer l'AIS avec ces régions de gestion par baie individuelle, Gray oblige ou amène les fermes piscicoles à aller plus loin. Elles sont situées plus loin le long de la côte et elles s'éloignent davantage l'une de l'autre. Les régimes d'élevage sont plus réglementés. Les élevages s'éloignent de la réserve, mais beaucoup de membres de la réserve ne veulent pas s'éloigner autant de la collectivité. Une fois de plus, cela provoque un problème de rétention du personnel. Voilà en quelques mots l'historique de la situation, mais j'ai d'autres précisions à vous donner.

Depuis l'effondrement des prix en 2000 et 2001, le marché n'a cessé de se redresser. Les prix sont très solides. Cela fait 10 ans et la bande envisage maintenant une participation plus directe à l'aquaculture.

Je voulais vraiment dresser pour vous cet historique désolant, car dans tout cela il y a plusieurs problèmes fondamentaux dont il faut tenir compte. L'un des principaux problèmes est la façon dont la bande se finance elle-même et ses activités de pisciculture. Elle dépend totalement de l'argent provenant de son transfert social, alors que son investissement initial et le transfert social sont destinés à d'autres choses. Cet argent est destiné au logement, aux affaires municipales, aux écoles, à la santé, toutes ces choses. La bande n'a pas vraiment les moyens de faire ce premier investissement, et ne possède pas les fonds nécessaires pour démarrer une pisciculture. Les fermes piscicoles demandent beaucoup de capitaux. Il faut beaucoup d'argent.

À cet effet, la bande ou l'administration à Conne River, la collectivité est l'une des collectivités autochtones les mieux administrées au Canada. Elle est une bande de premier plan, mais malheureusement cet investissement en aquaculture qui remonte à 2000 et l'effondrement des prix du marché pendant ces deux années l'ont mise au pied du mur. Cela l'a presque mise en tutelle. Pour le chef et le conseil, je suppose qu'ils sont vraiment au courant des déficits propres au piège dans lequel ils se trouvent en ce qui concerne l'emploi dans la réserve. J'essaie maintenant d'aborder le problème du maintien en poste que Gray a eu et des répercussions qu'ont eues les projets de création d'emplois et le fait d'être obligé de créer de l'emploi social.

La réserve ne dispose comme tel d'aucune ressource naturelle. Ce sont de petits lopins de terre et c'est précisément pour cette raison que la réserve existe. Nous ne les avons pas mis dans des réserves parce qu'il s'agissait de bons endroits pour le développement économique. Donc, pour le chef et le conseil, le dilemme est de savoir comment maintenir cette collectivité sans ressources naturelles et le sentiment de ses membres d'être pénalisés s'ils travaillent hors de la réserve.

Si des membres de la bande décident d'accepter un emploi hors de la réserve, ils perdront tous les gains fiscaux. S'ils travaillent dans la réserve, ils ne paient pas d'impôt fédéral sur le revenu ni d'impôt provincial sur le revenu, mais s'ils sortent de la réserve, ils en paieront. Il n'est donc pas intéressant pour eux de travailler hors de la réserve. De plus, en raison de la culture très unique de la collectivité, les gens ne veulent pas s'éloigner.

Sur la côte sud, la seule collectivité dont la population augmente est celle Conne River, dans la réserve. Le chef et le conseil ont donc pris les travaux d'entretien et ils le répartiront essentiellement entre ceux qui ont besoin d'obtenir l'assurance-emploi pour l'année, ce qui a créé un régime de travail et des attentes qui peuvent être très problématiques.

De plus, ce système épuise les ressources pécuniaires de la bande. Chaque année, la bande atteint la limite du transfert social et n'a aucune capacité d'en obtenir davantage en tant que collectivité en croissance. Elle a donc le dos au mur. Elle ne peut pas continuer ainsi.

Parlons maintenant de la terre. Vous ne pouvez pas faire affaire n'importe où au Canada si vous ne pouvez pas miser sur la terre. Si vous ne pouvez pas construire un immeuble et vous en servir comme sûreté auprès d'une banque, il n'y a rien à faire et c'est un problème de taille.

Si les bandes doivent participer, elles doivent pouvoir d'une façon ou d'une autre se servir de leurs terres. Je ne sais pas comment le faire. Je n'en ai aucune idée, mais il faudrait peut-être que le ministère des Affaires indiennes se porte garant de quelques-uns de ces prêts de sorte que s'il y a un dérapage, les terres fédérales continuent d'être protégées.

En guise de conclusion, je tiens à dire qu'il faut donner aux Premières Nations toutes les possibilités de réussir en affaires et les chefs et les conseils doivent disposer des outils pour répondre aux besoins de leurs collectivités respectives. Je ne parle pas uniquement de l'aquaculture, mais de toutes formes d'entreprises. Le fait d'essayer d'administrer une réserve très pauvre en ressources avec un transfert fédéral n'est pas point propice aux affaires. Le transfert social doit servir à l'administration au quotidien de la collectivité et il faudrait même l'augmenter pour que les membres de la réserve aient une parité sociale avec le reste des Canadiens et ne soient pas rabaissés par le petit montant qu'on leur donne.

Le sous-financement mine aussi la santé sociale fondamentale de la collectivité et a de nombreuses implications sociales négatives. Il faut mettre en place un instrument d'investissement pour que les Premières Nations disposent des fonds d'investissement nécessaires afin de participer à l'activité économique au lieu d'être forcées à puiser dans des transferts sociaux déjà sous-financés. Il faut trouver un mécanisme pour éliminer le moyen de dissuasion qu'est le travail hors de la réserve. Il permettrait aux membres des Premières Nations de maintenir leur exonération d'impôt lorsqu'ils travaillent hors de la réserve ou pour des entités hors de la réserve. Il en coûterait probablement moins cher au Canada de ne pas recourir aux incitatifs actuels à l'égard de l'assurance-emploi et du bien-être et cela constituerait un incitatif additionnel pour les réserves d'investir hors de la réserve, là où il pourrait y avoir des ressources pour une activité économique. Les membres des Premières Nations doivent avoir la parité avec les autres Canadiens et la capacité d'avoir une hypothèque et de permettre l'aménagement des biens-fonds sans préjudice de la part des banques; c'est nécessaire.

Voilà pour mon mémoire écrit, mais j'ai pensé à d'autres éléments aujourd'hui et si vous me le permettez, j'aimerais les mentionner. Cela vous convient-il, s'il me reste du temps?

Le président : Vous respectez le temps imparti; allez-y.

M. Collier : Il a été question aujourd'hui des oméga-3 et du saumon, et je pense que c'est vous qui avez posé la question. Gray a fait beaucoup de travail à l'égard des oméga-3 et son saumon. Elle a utilisé des ingrédients à base d'algues dans ses aliments pour animaux afin d'augmenter la teneur en oméga-3. Habituellement, un saumon sauvage de l'Atlantique contient environ 300 mg d'oméga-3 par tranche de 100 grammes de chair, essentiellement une portion. Habituellement, le poisson de pisciculture en aurait environ 2 000 mg et en utilisant les algues dans l'alimentation, elle a été en mesure d'augmenter les niveaux d'oméga-3 jusqu'à environ 4 000, donc près de deux fois ce que vous auriez dans le poisson sauvage. De plus, elle a collaboré avec le Marine Institute à cet égard; nous cherchons donc à trouver des méthodes d'extraire ces huiles des restes de sorte que nous ajoutons essentiellement un autre produit.

Si vous prenez la valeur des oméga-3 dans ce produit résiduaire, vous doublez pratiquement la valeur du saumon. Vous avez donc à poser une question très importante quant aux fermes piscicoles au Canada. Vous devez vraiment vous concentrer sur cet aspect; il est très important.

Il a aussi été question d'emplacement. Je ne sais pas ce qui se passe dans les autres provinces, mais ici, à Terre- Neuve, avec les directives du MPO et de la LAD, nous ne pouvons pas créer une ferme piscicole dans moins de 30 m d'eau. Ce n'est pas à cette profondeur que se trouvent les homards. Les homards sont dans des eaux beaucoup moins profondes, contrairement aux fermes piscicoles.

Il y a eu une question au sujet du COSEPAC et de l'aquaculture. J'ai lu ce rapport du COSEPAC. Il traite des répercussions de l'aquaculture sur les rivières le long de la côte sud. Il indique que l'on ne connaît pas les effets de l'aquaculture. Il ne dit pas qu'il y a des effets; il dit qu'on ne les connaît pas.

Il y a eu une discussion au sujet des cours d'eau qui sont touchés le long de la côte sud. Ils vont de la rivière Paradise, à la baie Placentia, jusqu'à la rivière Grey, complètement à l'ouest, y compris la rivière Conne et la rivière Little. Pratiquement toutes ces rivières dans ce système suivent le même taux de montaison, indépendamment de la présence de l'aquaculture. Les niveaux des montaisons dans la rivière Conne avaient beaucoup fléchi pour atteindre les niveaux que nous constatons aujourd'hui bien avant qu'il y ait de l'aquaculture dans la région. Depuis l'arrivée de l'aquaculture dans la région, les montaisons se sont en réalité améliorées.

Il a aussi été question du fait qu'il n'y avait aucun rapport scientifique du MPO pour la région. Il y a un barrage sur la rivière Conne qui est géré à plein temps par la bande et le MPO. En 2006, Brian Dempson a publié un rapport scientifique qui traite des montaisons du saumon de l'Atlantique sur la totalité du territoire de Terre-Neuve, dont la rivière Conne et d'autres secteurs. L'une de ses conclusions au sujet de la rivière Conne est que l'on n'a pas observé de répercussions de l'aquaculture. Cela ne veut pas dire qu'il n'y en avait pas, tout simplement qu'on ne les avait pas observées.

On a laissé entendre que les fermes de saumon sont situées à l'embouchure de la rivière Conne. Gray a quelques- unes des fermes salmonicoles les plus près de la rivière Conne. La plus rapprochée serait celle de Butter Cove. Elle se trouverait à près de 30 km de l'embouchure de la rivière Conne. Il y a beaucoup d'établissements de pisciculture qui sont plus près, mais pas de fermes salmonicoles. Il n'y a aucune ferme salmonicole à proximité de la rivière Conne. Cela ne veut pas dire que les poissons qui sortent de ces rivières ne passent pas près de fermes piscicoles; ils doivent passer près de ces fermes pour se rendre à l'océan.

Compte tenu du moratoire, la plupart des biens immobiliers disponibles dans l'eau à Terre-Neuve dont on pourrait se servir pour l'élevage du poisson sont déjà dotés de permis ou font partie d'un système de délivrance de permis. Si l'on demandait aujourd'hui de ne plus délivrer de permis, cela n'aurait aucune incidence sur les entreprises et sur leurs possibilités d'expansion ou non. Les permis ont déjà été délivrés de sorte que — peu importe, c'est impossible.

Il a aussi été question de la transformation et du mouvement des entreprises; cette discussion avait d'une certaine façon trait à la productivité comme faisant partie de Gray ou peu importe. Nous venons de conclure une entente avec Cooke Aquaculture et nous allons ensemble faire la transformation à Hermitage; cela a davantage trait à la politique de la région et aux tractations des entreprises et des fermes pour de l'espace et pour une capacité de transformation plus près de leurs fermes. C'est uniquement pour cette raison que Cooke a quitté Harbour Breton et que Northern Harvest et le Barry Group ont commencé à faire la transformation à Harbour Breton.

Pour ce qui est des pourvoiries sur la côte sud, dans la région précise où l'on fait l'élevage du poisson, il y a deux pourvoiries. Je possède une de ces entreprises et Shayne a l'autre. Mes clients viennent tous de l'industrie aquacole de sorte que sans l'industrie aquacole je n'aurais pas de clients pour mon entreprise.

Voilà, j'ai terminé.

Le président : Excellente façon de terminer.

Monsieur McDonald.

M. McDonald : Tout d'abord, je tiens à remercier le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Ensuite, j'aimerais vous transmettre les regrets du chef Mi'sel Joe, à qui l'invitation avait été lancée au départ. Malheureusement, son horaire ne lui permet pas d'être ici et de vous présenter un exposé.

Je m'appelle Shayne McDonald et je suis le directeur de justice et des affaires juridiques de la Première Nation de Miawpukek. À l'instar de Clyde, je suis un membre de la Première Nation de Miawpukek. J'ai grandi à Conne River et j'y ai fait mes études secondaires. J'ai poursuivi mes études à l'Université Memorial. Après l'obtention de mon baccalauréat ès arts de l'Université Memorial, j'ai fait des études en droit à l'UBC, où j'ai obtenu mon diplôme en 1993. J'ai été admis au Barreau en 1994 et je suis le directeur de Justice et affaires juridiques de la bande depuis ce temps.

Je vais compléter le résumé de Clyde ou l'historique de la participation de la bande dans le domaine de l'aquaculture et parler des perspectives économiques que nous voyons aujourd'hui dans l'aquaculture. Ensuite, je vais parler des questions environnementales qui sont propres à l'industrie et je terminerai par un commentaire sur les possibilités d'une réglementation fédérale sur l'aquaculture.

Pour ce qui est de la Première Nation de Miawpukek ou de ma collectivité, voici quelques renseignements de base. La collectivité est située à Conne River, sur les berges d'une rivière du même nom. On ne sait pas trop à quand remonte l'émergence de Conne River en tant que collectivité, mais je suppose que les historiens s'entendent pour dire que cela remonte aux années 1800 en tant qu'établissement permanent; auparavant, il s'agissait d'un établissement saisonnier et l'économie traditionnelle de la collectivité reposait essentiellement sur la chasse et le piégeage.

Les chefs de ménage ont fait diviser l'intérieur en terrains familiaux de chasse et de piégeage dans lesquels il y avait une abondance de chasse commerciale et de piégeage des animaux à fourrure, sans oublier les guides des sportifs vers l'intérieur. Notre économie était passablement la même que celle des collectivités côtières, seul l'intérêt était différent. Dans les collectivités côtières, il y avait la pêche saisonnière dans le cadre de laquelle le poisson était amené au marché pour rembourser une ligne de crédit des marchands, et ce, sur une base saisonnière. Notre économie est passablement la même.

Après la Confédération, aux environs de 1960, le commerce de la fourrure s'est totalement effondré, de même que notre économie traditionnelle. Jusqu'à la fin des années 1970, notre collectivité était essentiellement pauvre et commençait à s'éroder sur le plan de l'identité culturelle, de l'inactivité et de sa forte dépendance au bien-être social. À Terre-Neuve-et-Labrador, contrairement au reste du Canada, lorsque la province s'est jointe à la Confédération, la responsabilité concernant les peuples autochtones n'a pas été totalement assumée par le gouvernement fédéral. Donc, dans les années 1970, dans le cadre de l'identité et du mouvement autochtone pancanadien, notre collectivité a préconisé la reconnaissance accordée à des groupes dans d'autres parties du Canada et, en 1984, nous avons réussi à obtenir la reconnaissance du statut. Nous avons donc été assujettis à la Loi sur les Indiens un peu sur le tard, mais le fait d'y être assujettis nous a donné des programmes communautaires pour l'éducation, les études postsecondaires et l'infrastructure qui ont fait une différence dans la prospérité de la collectivité.

En gérant bien ces programmes, nous avons créé des débouchés dans la collectivité et nous avons permis à la génération plus jeune, dont je faisais partie dans les années 1980, à être formée et instruite et à ajouter au renforcement des capacités et à la croissance de l'entreprise. À compter de ce moment, la bande a déterminé, à mesure qu'elle développait la gouvernance et la capacité, qu'il fallait développer une économie.

Nous avons connu des succès et des échecs. Nous avons aménagé des pourvoiries qui ont fourni avec succès des services aux chasseurs américains de gros gibier. Nous avons développé la pêche commerciale à la fin des années 1990, et elle a connu relativement de succès, bien qu'elle ait aussi ses hauts et ses bas qui sont propres à l'industrie de la pêche commerciale et de toutes les autres petites entreprises de la collectivité.

Comme l'a indiqué Clyde, la bande est bien administrée. Pour ce qui est de nos revenus, il s'agit d'une combinaison du financement par subventions provenant des Affaires autochtones et de Santé Canada. Ces programmes sont bien administrés; la bande est très transparente et rend des comptes. De plus, nous tirons de l'autofinancement de nos unités commerciales.

Cependant, la bande ne dispose pas de ressources importantes ni d'une grande industrie qui peut lui permettre de devenir indépendante, de briser le cercle de la dépendance des subventions fédérales. Il s'agit d'un défi constant et de quelque chose que nous, dans le cadre de notre planification stratégique, visons à atteindre tous les ans.

À la fin des années 1980, dans les années 1990, nous avons identifié l'aquaculture et nous avons occupé ce champ de deux façons particulières. Premièrement, nous avons eu notre entreprise aquacole à part entière où nous faisions l'élevage de la truite; elle appartenait totalement à la Première Nation de Miawpukek. Deuxièmement, nous avons investi dans SCB Fisheries qui, à l'époque, formait le plus important éleveur de poissons à nageoires de Terre-Neuve- et-Labrador et nous en sommes devenus l'actionnaire majoritaire. Nous avons pu le faire grâce à la saine gestion de notre argent que nous avons utilisé pour acheter les actions.

Donc, pendant une brève période de l'histoire de Terre-Neuve, nous étions probablement l'un des plus importants promoteurs d'aquaculture grâce à nos actions dans SCB Fisheries et l'entreprise nous appartenait à 100 p. 100. Mais comme l'a indiqué Clyde, l'industrie faisait œuvre de pionnière à cette époque et elle connaissait des bas et des hauts. Je suppose que la saturation du marché par le poisson chilien a fait en sorte que le stock que nous avions à l'époque ne valait passablement pas la valeur qu'il avait sur papier.

Malheureusement, nous avions financé cette croissance par des programmes destinés à la collectivité pour les écoles, les travaux publics, le logement. Ce fut une grave erreur. Mais à l'époque, même si nous avions ce poisson dans l'eau et même si nous pensions le mettre en marché à ce prix, nous avions oublié de nous demander ce qui se passerait si ce n'était pas le cas. Toute la programmation de notre collectivité serait compromise.

Comme l'a dit Clyde, le coup a été terrible lorsque le marché s'est effondré. Nous avons donc fait deux choses : nous nous sommes départis de l'aquaculture, de nos actifs; ensuite, nous n'avons pas demandé la tutelle du ministère des Affaires indiennes et du Nord, comme il s'appelait à l'époque. Nous lui avons dit que nous avions un problème, que nous étions dans une situation difficile, mais que nous avions un plan pour nous en sortir et que nous ne voulions pas d'une tutelle.

Ce côté de la collectivité qui a pris des mesures radicales, le personnel administratif qui a été mis en disponibilité, qui travaillait à longueur d'année, mais n'était rémunéré que de façon saisonnière. Des sacrifices ont été faits dans bien des domaines. Les programmes ont été resserrés et sont devenus très efficaces et nous avons fait un emprunt de cinq ans pour rembourser les millions de dollars que nous avions en dettes. En moins de trois ans, nous avons brûlé les documents du prêt pour cette dette et nous avons décidé que plus jamais nous nous retrouverions dans une telle situation. Cela amène une question concernant les capitaux nécessaires pour l'aquaculture, dont je parlerai un peu plus tard.

Après ce fiasco, la bande a décidé de ne plus être propriétaire d'une entreprise d'aquaculture, mais nous avons reconnu en même temps que l'aquaculture continuait de prospérer dans la région de la côte des baies et continuait à être un important moteur économique. Donc, nous avons changé notre stratégie. Nous sommes passés d'éleveurs dans le domaine de l'aquaculture à créateurs d'un milieu au sein de la Première Nation de Miawpukek qui amène les entreprises aquacoles à se positionner et à faire des affaires, qu'il s'agisse d'acheter de notre magasin de matériaux de construction, d'utiliser nos ressources humaines dont un grand nombre sont des techniciens formés en aquaculture ou des pêcheurs commerciaux, ou d'utiliser nos navires de pêche pour remorquer les cages ou les aliments. Nous nous sommes dit que nous pourrions profiter des produits dérivés grâce à l'emploi et à d'autres perspectives qui ne comportaient pas le même risque.

De 2001 à nos jours, à mesure que l'industrie de l'aquaculture prenait de l'ampleur, nous avons tiré parti de ces possibilités dérivées, mais la réalité est que ces avantages n'ont pas été à la hauteur de ce que nous avions prévu. Plusieurs raisons expliquent cette situation. Quelques-unes des possibilités, les plus importantes, ont quand même besoin d'un important investissement en capitaux, mais plus particulièrement les entreprises aquacoles ont tendance à être intégrées verticalement, ce qui veut dire qu'elles s'occupent des besoins de leur industrie. Elles ont leurs propres plongeurs et elles tirent leurs propres cages de sorte que les débouchés dérivés n'ont pas été à la hauteur de ce que nous avions prévu. Lorsque nous nous sommes rendu compte que les entreprises aquacoles adoptaient un modèle intégré verticalement, nous avons reconnu qu'elles essayaient de reproduire l'intégration verticale d'Irving Oil.

Il y a environ deux ans, nous nous sommes dit que si nous n'obtenions pas les retombées des possibilités dérivées que nous avions prévues, nous avons peut-être perdu 10 ans pour nous lancer dans l'aquaculture — le vieil adage « une personne sous-estimée ». Nous nous sommes dit que nous devrions peut-être nous ouvrir les yeux un peu plus. Maintenant que l'aquaculture a atteint sa pleine commercialisation, il y a peut-être une possibilité de redevenir des éleveurs de poissons.

Nous avons donc réalisé une étude de faisabilité et élaboré un plan d'affaires pour une exploitation de pisciculture, ce que nous avons terminé l'an dernier. Les perspectives d'y revenir et de connaître du succès sont favorables de même que pour créer des revenus et de l'emploi pour les membres de la bande, mais cette étude nous dit qu'il faudra aussi un investissement majeur. Comme l'a indiqué Clyde, les revenus de la collectivité se fondent sur les fonds provenant des programmes et des arrangements d'unités commerciales. Le revenu que nous tirons de la pêche commerciale a la possibilité d'avoir suffisamment de fonds pour réinvestir dans l'aquaculture, et nous reconnaissons la nécessité de diversifier notre pêche. L'aquaculture est peut-être un moyen de diversification. Par contre, en même temps, le montant total des capitaux nécessaires pour se lancer dans le secteur des pêches, comme l'indique notre plan d'affaires, demeure un obstacle important. À cette fin, nous collaborons avec divers organismes mandatés d'aider les collectivités autochtones au niveau du développement économique, notamment Entreprise autochtone Canada, le Groupe de développement Ulnooweg, et les discussions jusqu'à maintenant se poursuivent.

Comme je l'ai mentionné dans mes observations liminaires, nous avons collaboré et participé en 2001 à un plan d'action national pour le développement de l'aquaculture autochtone dans le cadre de réunions provinciales qui se sont déroulées à Terre-Neuve et qui étaient menées par le Groupe de développement Ulnooweg au nom de Pêches et Océans Canada. Ces discussions se sont déroulées dans tout le Canada atlantique et, d'après ce que je peux comprendre, dans l'Ouest canadien. On cherchait à connaître l'intérêt de la collectivité autochtone et l'incidence potentielle de l'aquaculture. Nous y avons donc participé et on se disait à l'époque que ces consultations et discussions mèneraient peut-être à un programme fédéral qui serait conçu précisément pour aider les Premières Nations à se lancer dans l'aquaculture.

Le MPO avait un programme à l'époque qui s'appelait le Programme d'innovation en aquaculture et d'accès au marché, ou PIAAM, dont le but était de regrouper les investissements du secteur privé qui amélioreraient la compétitivité de l'aquaculture au Canada par l'innovation. Nous avons donc pensé que cette discussion et ces consultations mèneraient à un programme d'études autochtones en ce sens, mais malheureusement cela ne s'est pas concrétisé. De plus, le PIAAM, auquel nous aurions probablement été admissibles, a été aboli par le gouvernement fédéral.

Il a été remplacé par un programme intitulé Initiative d'aquaculture autochtone au Canada. Ce programme a vu le jour il y a environ un an. Il est financé par le gouvernement fédéral par l'entremise du MPO, je pense, et il offre un soutien sous la forme d'expertise en matière technique et d'aide au niveau du plan d'affaires. Les responsables de ce programme nous ont aidés pour notre plan d'affaires, ce qui nous a été très utile, mais le programme n'a pas les fonds ni les ressources pour aider au niveau de la capitalisation.

Je suppose que notre message, pour ce qui est des possibilités relatives à l'aquaculture et ses répercussions positives sur une collectivité autochtone, est que pour certaines collectivités autochtones, la nôtre notamment, qui se trouvent directement au cœur de la région aquacole de Terre-Neuve, c'est-à-dire la côte des baies, l'aquaculture a le potentiel d'être un important moteur économique de notre collectivité. Par le passé, notre expérience a varié. Nous avons vu les avantages de l'aquaculture, de l'emploi pour les membres de la bande, de la participation. Nous avons aussi vu les côtés négatifs lorsque les marchés s'effondrent ou que les fermes piscicoles deviennent insolvables et ce que cela pourrait signifier pour vos investissements dans ces entreprises.

Quoi qu'il en soit, au moment où l'industrie continue de progresser, la production augmente et le système de gestion par baie entre en vigueur, nous continuons de penser que l'avenir est prometteur. Nous allons poursuivre nos recherches, aller de l'avant avec notre plan d'affaires et chercher des façons de financer cette possibilité. Notre message est que si le gouvernement fédéral, par ses divers programmes actuels et futurs, peut créer un programme précis pour venir en aide directement aux collectivités autochtones, il serait très bénéfique pour les collectivités ainsi que pour le Canada et Terre-Neuve si cela se produisait.

Le dernier point dont je veux parler est celui de l'environnement. Au cours des dernières années, la vive opposition à l'aquaculture à cause de ce qui arrive à l'environnement a augmenté quelque peu. Conne River a été l'un des groupes les plus actifs à ce niveau. Parfois, on a l'impression que la bande ou la Première Nation est opposée à l'aquaculture, ce qui n'est pas le cas. Nous appuyons une aquaculture respectueuse de l'environnement et durable. Malheureusement, nous voyons de plus en plus de débris marins dans la région de la côte des baies, ce qui a une incidence sur d'autres groupes, les plaisanciers entre autres. Des plages autrefois immaculées sont maintenant jonchées de débris provenant de l'aquaculture, de sacs de nourriture pour animaux, de morceaux de cage et de câbles. Les plaisanciers frappent des morceaux de cages flottantes. Notre opposition réside dans le fait que nous indiquons à l'association de l'industrie que c'est ce qui se passe.

Non seulement avons-nous exprimé notre opposition de vive voix, nous avons aussi joint nos ressources à la parole. Tous les ans, nous participons à un nettoyage des plages, activité qui n'est pas à sens unique. Nous avons des techniciens du domaine de la mer qui sont présents dans la baie et qui ont consacré beaucoup de temps à ramener les débris provenant de l'aquaculture. Nous documentons tout et nous le faisons savoir à l'association.

Parmi les autres préoccupations, mentionnons les déchets de poisson, la maladie et les saumons d'élevage qui s'échappent dans la nature.

Sur ce dernier point, nous sommes particulièrement inquiets étant donné que dans d'autres endroits au Canada, comme en Colombie-Britannique et au Nouveau-Brunswick, et ailleurs dans le monde, des documents indiquent que des saumons d'élevage fraient dans les rivières. Dans notre secteur, la rivière Conne et la rivière Little, à proximité de notre collectivité, les montaisons de saumons dans ces rivières sont très importantes pour notre collectivité du point de vue rituel, social et alimentaire, et c'est probablement pour cette raison que nous nous y sommes établis. À ce titre, même si d'une part l'industrie peut dire qu'il n'existe aucune donnée empirique indiquant que l'aquaculture a eu une incidence sur votre saumon, nous savons par contre que les montaisons ont fléchi au fil des années, à mesure que la production aquicole augmentait. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il y a un lien.

Nous savons aussi que des poissons s'évadent. En 2013, nous avons trouvé dans la rivière Little, la rivière Conne et la rivière Garnish des saumons qui s'étaient échappés des fermes piscicoles. Notre crainte est qu'ils fraient ou se croisent avec le saumon sauvage, et je pense qu'il a été documenté ailleurs dans le monde que le saumon hybride peut être moins susceptible de survivre dans la nature, ce qui pourrait être nuisible pour nos rivières en ce sens que les montaisons sont déjà faibles et que les rivières répondent à peine à nos besoins en matière d'alevinage.

Par la présentation de ces problèmes de nature environnementale, nous ne voulons pas faire valoir que l'aquaculture ne devrait pas exister à cause de ces problèmes. Nous disons que le secteur de l'aquaculture et d'autres intervenants, comme la province, comme le gouvernement fédéral et comme la Première Nation, doivent collaborer et faire plus de recherche et développement pour déterminer l'incidence précise de ces poissons qui s'échappent et chercher à s'attaquer aux autres problèmes de nature environnementale.

À cette fin, en 2014, nous collaborons avec la Direction des sciences du MPO à une étude de télémétrie qui permettrait de suivre les déplacements des saumons qui se sont évadés dans la rivière, qui suivrait leurs déplacements et leur interaction de façon à ce que nous puissions mieux comprendre leur incidence sur le saumon sauvage. Nous sommes en mesure de participer avec le MPO grâce au financement que nous avons reçu par l'entremise du PAGRAO, qui reçoit ses fonds du MPO. Des ressources fournies par d'autres intervenants qui pourraient poursuivre ce genre de travail nous permettront de mieux en comprendre l'incidence et d'atténuer toutes les menaces potentielles.

En terminant, je tiens à parler de l'essentiel du mandat du comité sénatorial tel que je le comprends, c'est-à-dire la recherche d'un règlement fédéral concernant l'aquaculture. Notre Première Nation a suivi la situation en Colombie- Britannique dans l'affaire Morton c. Colombie-Britannique. Nous avons la conviction qu'une loi fédérale pancanadienne est vraiment justifiée, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, nous pensons que le ministère des Pêches et des Océans, agissant en vertu d'une loi précise, peut ajouter des ressources et des capacités pour faire en sorte que la réglementation soit musclée et appliquée efficacement. Deuxièmement, nous pensons qu'une loi pancanadienne vaut mieux que des lois disparates qui s'appliquent dans la région du Pacifique, mais non dans le Canada atlantique.

Ceci conclut mon exposé.

Le président : Je tiens à vous remercier tous les deux. Vous avez abordé de nombreux points et je suis convaincu que vous avez répondu à quelques-unes des questions de nos sénateurs, mais ils en ont d'autres à vous poser. Sur ce, je donne la parole au sénateur Wells.

Le sénateur Wells : Merci, monsieur Collier, et merci, monsieur McDonald. Vous avez effectivement abordé de nombreux points. Je regarde ma première question et elle semble tellement peu importante compte tenu de ce que vous avez dit.

Pour ma gouverne, parce que je ne sais pas comment cela fonctionne dans la Première Nation de Miawpukek, lorsque vous parlez de « travailler hors de la réserve » et de ne pas avoir les avantages d'être dans la réserve, est-ce que cela inclut vivre dans la réserve et travailler à Harbour Breton? Pourriez-vous éclairer ma lanterne?

M. McDonald : Clyde disait que le fait d'avoir une exonération de l'impôt sur le revenu est de toute évidence un avantage important. Les personnes qui vivent dans une réserve ont eu droit à cet avantage tout au long de leur vie professionnelle. Ils ont tendance à vouloir perpétuer cette exonération d'impôt. Par contre, les lignes directrices de l'Agence du revenu du Canada, de même que les causes entendues par les tribunaux qui donnent une orientation, indiquent qu'il doit y avoir un lien important avec la réserve pour qu'une personne ait droit à une exonération d'impôt.

Habituellement, il y a trois facteurs de rattachement : vivre dans la réserve, travailler dans la réserve et avoir un employeur dans la réserve. Pour avoir droit à une exonération d'impôt, une personne doit remplir au moins deux de ces conditions. Donc, si la personne vit à Conne River et travaille à Harbour Breton, mais que la compagnie qui l'emploie pour travailler à Harbour Breton est située dans la réserve, elle aurait droit à l'exonération d'impôt. Si elle vit à Harbour Breton, a le statut d'Indien inscrit, mais travaille à Conne River et est payée par une entreprise aquacole établie à Conne River, elle répondrait à deux des trois facteurs de rattachement.

Parmi nos membres, et de plus en plus au sein de la génération plus jeune, nous constatons qu'il y a plus d'une affinité à travailler ailleurs, mais, à défaut d'un meilleur terme, nos membres cherchent les « gros sous ». Ils s'en vont à Voisey Bay, à Muskrat Falls et en Alberta. Ils suivent une formation de mécanicien de chantier, de métallurgiste, d'opérateur de machinerie lourde de sorte que l'exonération d'impôt ne constitue pas un facteur important pour eux en raison du salaire qu'ils gagnent.

Le sénateur Wells : D'accord.

M. McDonald : Mais pour les techniciens, les journaliers ou les plongeurs dans le secteur de l'aquaculture, vous gagnez 12 ou 15 $ de l'heure et l'exonération d'impôt est un facteur important que vous aimeriez conserver tout en travaillant à Terre-Neuve.

Le sénateur Wells : Y en a-t-il beaucoup à Conne River et dans la bande de Miawpukek qui ont droit à cette exemption et qui travaillent dans l'industrie aquacole, parce que de toute évidence, il n'y a pas d'industrie aquacole à Conne River.

M. McDonald : Il y en a beaucoup qui peuvent. Si l'on prend Gray Aquaculture, c'est probablement le meilleur exemple parce que l'entreprise était physiquement située à Conne River, même si ses activités amenaient les travailleurs dans les baies Hermitage et d'Espoir, hors de la réserve. Du fait que les membres vivaient à Conne River, travaillaient pour Gray Aquaculture hors de la réserve, dans la région des baies, ils avaient droit à l'exonération d'impôt.

Le sénateur Wells : D'accord, je comprends. Je ne le savais pas. C'est bon à savoir et c'est intéressant parce que cela se rattache aux perspectives d'emploi pour les membres de votre bande.

Aujourd'hui, nous avons entendu les témoignages du maire LeRoux et du maire Drake de St. Alban et de Harbour Breton. Ils ont parlé des accords de collaboration conclus entre les nombreuses collectivités de la région. Faites-vous partie également de ce groupe, ou vous considérez-vous comme la bande de Conne River, distincte du reste?

M. McDonald : Non, je pense que notre collectivité fait partie du regroupement et d'un PE récent visant à travailler de concert pour ce qui est des initiatives et de la prospérité de la région. Nous en faisons partie et nous sommes probablement l'un des éléments moteurs, et c'est nouveau.

Dans les années 1980 et au début des années 1990, nous étions très isolationnistes. Vous savez, nous nous disions « Nous allons faire en sorte que cela se produise et cela concernera notre autonomie. » Au même titre que personne n'est une île, aucune communauté n'est une île. Nous nous sommes vite rendu compte que le fait de travailler en tant que région — des partenariats avec d'autres entreprises, des coentreprises, la collaboration — apporte de meilleurs avantages et une meilleure chance de réussite.

Le sénateur Wells : Bien sûr. Si vous vous isolez, vous le faites à vos propres risques.

M. McDonald : Oui. Comme le disait le sénateur McInnis dans nos discussions informelles avant le début des audiences, une Première Nation sœur du Canada atlantique, la Première Nation de Membertou, avec laquelle nous entretenons des rapports étroits, est probablement devenue un modèle de rôle au Canada atlantique pour ce qui est du succès qu'il peut y avoir à établir des partenariats et à développer votre économie par une expansion à l'extérieur des limites de la réserve, et nous songeons à faire la même chose.

Le sénateur Wells : Monsieur McDonald, vous avez dit quelques mots au sujet des programmes sociaux de la bande et vous avez dit que vous avez utilisé l'argent de ces programmes pour investir dans des occasions d'affaires. Je ne sais pas si ce sont les mots exacts que vous avez utilisés, mais je pense que c'est ce que vous vouliez dire ou que c'est ce que j'ai du moins cru comprendre.

M. McDonald : Je devrais préciser que cela ne s'est pas passé exactement de cette façon parce que nos subventions d'Affaires autochtones Canada nous accordent beaucoup de souplesse. Nous pouvons dépenser l'excédent en fonction des besoins cernés par la collectivité, mais nous n'avons pas dit « Eh bien, nous allons prendre les fonds réservés à l'éducation et les investir dans l'aquaculture. » Par contre, en finançant l'aquaculture à l'étape de la croissance, nous avons utilisé la trésorerie de la bande dans notre institution financière.

Le sénateur Wells : Vous avez géré l'argent en fonction du risque; je comprends.

Quand des gens d'affaires investissent, ils prennent l'argent quelque part pour l'utiliser dans l'entreprise en question. Y a-t-il une réticence au sein de la bande à agir de la sorte?

M. McDonald : Dans le cas de l'aquaculture, compte tenu de ce que nous avons vécu, il y a effectivement une réticence. Si l'on fait exception des revenus de la bande réservés à des programmes et des services, dans le cas des revenus propres de la bande provenant de la pêche commerciale et des pourvoiries, la bande a indiqué qu'elle était prête à consacrer une partie de ses revenus à l'aquaculture, mais pas dans la mesure qui est probablement nécessaire pour faire de l'aquaculture une réalité.

Le sénateur Wells : Vous devez en effet constater le succès de l'aquaculture tout autour de vous et les occasions que d'autres collectivités et entreprises saisissent et dont elles tirent profit pour financer les programmes sociaux ou peu importe. Existe-t-il un conflit à l'interne à cet égard?

M. McDonald : Il y a des discussions et un dialogue. Je dirais qu'il s'agit d'un conflit interne, mais qui n'est pas malsain. Le conflit en tant que tel n'est pas une mauvaise chose; il y a des discussions et un dialogue. Par contre, je pense que la collectivité est à l'étape où elle veut se lancer dans l'aquaculture, elle veut le faire de la bonne façon, elle est prête à investir ses propres revenus, mais le degré d'investissement, compte tenu de nos ressources et du niveau de risque que nous sommes prêts à prendre, est probablement pas tout à fait ce qu'il faut pour se lancer avec succès dans l'aquaculture.

Le sénateur Wells : D'accord, merci beaucoup.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Bienvenue.

M. Collier a mentionné que vous aviez un programme avec l'entreprise Gray ou que vous aviez commencé à faire de l'aquaculture avec Gray.

M. Collier : Oui.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Avez-vous essayé d'établir un partenariat ou avez-vous établi un partenariat avec d'autres entreprises aquacoles?

M. Collier : Nous en avons déjà un avec Cooke Aquaculture et notre usine de transformation à Hermitage. Nous avons un partenariat avec Cooke à cet endroit. Également, d'après ce que je comprends, le siège social est à Woodstock, au Nouveau-Brunswick, nous avons aussi une importante écloserie à cet endroit. Avec Cooke, nous y produisons du saumoneau.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Avez-vous accès aux subventions gouvernementales, les mêmes subventions que pour les non-Autochtones?

M. Collier : Oui, nous avons accès aux mêmes subventions que les promoteurs non autochtones de l'aquaculture, mais ces subventions sont rares. La plupart des programmes consistent en des garanties de prêts pour accéder à des fonds d'institutions financières. Les subventions dont il est question sont propres aux collectivités autochtones, comme Entreprise autochtone Canada ou le Fonds pour la création de possibilités économiques administré par AADNC. Ils ont un plafond quant au financement qu'ils peuvent nous donner, qui est probablement beaucoup trop faible dans le cas de la capitalisation nécessaire en aquaculture. Ces programmes sont donc sous-financés à cet égard.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Vous avez répondu à l'une des questions que je voulais poser. Vous avez accès à des programmes en aquaculture pour les jeunes au sein de votre Première Nation.

M. McDonald : C'est une bonne remarque. Un des avantages ou des aspects positifs de notre collectivité qui serait intéressant et qui, je pense, l'a été pour Gray Aquaculture et d'autres entreprises, c'est que grâce à notre programme de formation — qui est financé en deux volets, le premier par Affaires autochtones Canada, et le second par Service Canada, l'entente liée à la SFCEA —, nous pouvons nous mobiliser assez rapidement et donner une formation précise pour répondre aux besoins des industries. Nous entretenons un rapport avec les divers établissements de formation en vertu duquel ils peuvent facilement se mobiliser pour la formation communautaire et nous y avons eu recours par le passé.

La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci.

Le sénateur McInnis : Combien de membres compte la bande de Miawpukek?

M. Collier : Dans la réserve, nous sommes environ 900. Le nombre total de membres se situe aux environs de 2 000, 2 100. Les membres qui vivent hors de la réserve sont répartis dans d'autres régions de Terre-Neuve, comme St. Alban, dans la région des baies, St. John's et partout au Canada et ailleurs dans le monde. En ce qui concerne la collectivité principale de Conne River, la population dans la réserve est d'environ 900 membres.

Le sénateur McInnis : Le transfert qui provient du gouvernement se fonderait sur la population réelle dans la réserve.

M. Collier : C'est exact.

Le sénateur McInnis : J'ai plusieurs questions. Premièrement, en raison de la rivière Conne et de la diminution du saumon sauvage, avez-vous pensé à l'effet des pluies acides? Les pluies acides ont eu une véritable incidence sur de nombreuses rivières, à tel point que dans ma ville nous avons — et je pense que c'est la seule ville en Amérique — un dispositif pour épandre de la chaux. Il s'agit d'une grosse tour qui disperse de la chaux dans ces tributaires. Nous avons réussi à abaisser le pH à 5,2. Les gens devraient songer à un mécanisme semblable. Je n'essaie pas d'éliminer l'incidence de l'aquaculture, mais je vous dis qu'il y a beaucoup de rivières qui ont été touchées par les pluies acides, vous devriez y songer.

Membertou a connu énormément de succès et Eskasoni est sur la bonne voie. Le Millbrook Power Centre, lorsque vous passez sur la route 102, vous voyez ce qui s'y passe. Il a fallu qu'ils trouvent les fonds quelque part. Votre problème est-il attribuable au fait qu'il ne s'agit pas d'une grande bande et, ensuite, est-ce en raison de votre bilan?

M. McDonald : Non, pas du tout. Pour ce qui est de notre bilan commercial, même si l'aquaculture nous a fait du tort parce que nous avons dû élaborer un plan de redressement, d'autres unités commerciales ont été bien administrées, notamment notre pourvoirie, le garage de machinerie lourde, le garage automobile, les matériaux de construction, l'emplacement de la Première Nation de Miawpukek — certains d'entre vous sont allés récemment à la côte des baies. Il s'agit d'une route qui se termine en cul-de-sac et qui longe la côte, panoramique et pittoresque, mais si nous étions le long de la route Transcanadienne ou à un endroit plus central ou encore dans un centre de services plus important, il y aurait beaucoup plus de possibilités grâce à l'emplacement.

Nous avons un secteur du tourisme et nous exploitons un ancien parc provincial. Nous offrons des excursions en bateau. La côte des baies essaie continuellement d'augmenter l'affluence touristique, mais la route se termine en cul-de- sac, il n'y a pas de boucle. Nous n'avons pas un parc national comme à St. Anthony. L'emplacement joue donc un rôle important.

Jusqu'à tout récemment, Terre-Neuve était une province « démunie ». On nous dit que la traduction de baie d'Espoir en anglais est « Bay of Hope », mais nous sommes essentiellement une région « démunie » au sein d'une province « démunie ». L'aquaculture est devenue l'une de principaux débouchés, l'exploitation forestière a diminué et la pêche commerciale est cyclique. Je pense donc que l'emplacement a joué un rôle important.

Nous avons accès aux programmes qui ont permis à Millbrook d'instaurer le mégacentre ou qui ont permis à Membertou d'établir ses casinos et son hôtel, Entreprise autochtone Canada, AADNC. Par contre, nous n'avons pas accès aux fonds découlant de l'arrêt Marshall. Il s'agit d'une combinaison de facteurs. Nous n'avons pas accès au plein montant que les autres réserves ont eu, notre emplacement n'est pas idéal et nous sommes limités aux ressources et possibilités de notre région.

Le sénateur McInnis : En Colombie-Britannique, on nous a dit que certaines bandes avaient des baux. Elles ont beaucoup d'emplois indirects. Nous avons fait une sortie. Un Autochtone pilotait le bateau de son père. Ils utilisaient trois bateaux différents pour transporter les gens. Ils ont beaucoup d'emplois indirects.

Vous parlez d'intégration verticale, c'est une chose, mais quel rapport et quelles consultations avez-vous avec les gens de l'industrie qui font qu'ils ne peuvent pas créer un partenariat avec vous pour vous donner un coup de pouce?

M. McDonald : Pour ce qui est de partenaires éventuels venant de l'extérieur de la collectivité, nous avons un programme de développement économique qui a pour mandat d'identifier des partenaires éventuels. Gray est l'un des partenaires avec lesquels nous avons discuté par l'entremise de Clyde dans notre département de développement économique, et l'entreprise s'est établie à Conne River. La situation n'a pas été facile pour l'entreprise au cours des 12 derniers mois, mais nous espérons qu'à mesure que sa situation se stabilisera, les avantages pour la collectivité en feront autant.

Pour ce qui est des baux commerciaux, c'est une bonne remarque. Nous avons cerné comme possibilité la location à bail de terres. Clyde a dit qu'il y a quelques années, Gray Aqua voulait construire une usine de transformation dans la réserve, en partenariat avec la Première Nation de Miawpukek. Comme il s'agit de terres fédérales, le financement que Gray Aqua avait en place ne pouvait pas être utilisé si l'usine se trouvait dans la réserve parce que l'institution financière ne pouvait pas prendre le terrain en nantissement. Il s'agissait donc d'un obstacle de taille.

En désignant les terres, les réserves de la Colombie-Britannique ont fait preuve de beaucoup d'innovation pour surmonter cet obstacle par le truchement de la Loi sur les Indiens. En effet, la Loi sur les Indiens prévoit un processus en vertu duquel vous pouvez désigner les terres, puis vous pouvez offrir un bail pluriannuel pouvant aller jusqu'à 99 ans afin que le promoteur puisse donner un nantissement à son institution financière. Nous avons donc entrepris un processus de désignation des terres. Il faut deux ans pour nous permettre de fournir un bail foncier commercial.

De plus, le gouvernement fédéral a adopté la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations qui permet aux collectivités indiennes, aux collectivités des Premières Nations, de recourir aux articles de la Loi sur les Indiens qui se rapportent à l'administration foncière et d'établir leur propre code de gestion des terres. En vertu de ce code, vous pouvez élaborer des dispositions pour conclure des baux pluriannuels pouvant aller jusqu'à 99 ans de façon à ce que les promoteurs et les intérêts commerciaux externes puissent prendre un nantissement.

En 2013, deux bandes ont été admises en vertu de la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations au Canada atlantique. Chaque année, le gouvernement fédéral n'accepte que quelques bandes qui présentent un bon bilan de gestion en vertu de ce programme et c'est notre bande et celle de Membertou qui ont été acceptées au Canada atlantique. Le travail se poursuit donc dans la collectivité pour l'obtention de notre code en vertu de la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations qui nous dégagerait de l'application de la Loi sur les Indiens et nous donnerait plus de souplesse pour faire quelques-unes des choses dont Clyde a parlé. C'est exactement le modèle qui a été utilisé en Colombie-Britannique.

Le sénateur McInnis : Finalement, ai-je bien indiqué que globalement, à part le nettoyage que vous devez faire, vous êtes favorables à l'aquaculture qui est maintenant implantée à Terre-Neuve.

M. McDonald : Comment pourrais-je dire? Nous sommes favorables à l'aquaculture. Dans sa forme actuelle, nous avons des préoccupations en ce qui concerne les débris marins, la sécurité des cages par rapport à d'autres groupes d'utilisateurs, les évasions de saumons, la nourriture pour les poissons et les abats dans l'environnement. Nous sommes déterminés à collaborer avec l'industrie pour que ces enjeux soient réglés.

L'industrie nous indique qu'elle veut travailler avec nous, mais il reste à voir si à l'avenir nous obtiendrons ou non la société de développement afin que nous puissions continuer à dire que nous appuyons l'aquaculture. Il peut fort bien arriver un moment où la bande constate qu'il ne s'agit que de vœux pieux et que les questions environnementales font en sorte que nous ne l'appuyons pas. Par contre, en ce moment, la collectivité appuie une aquaculture durable et respectueuse de l'environnement.

Le sénateur McInnis : Je vous souhaite bonne chance. On dirait que vous avez reçu un dur coup. Vous donnez aussi l'impression d'être très honorable. Je vous souhaite donc la meilleure des chances.

M. McDonald : Merci.

La sénatrice Poirier : Merci de votre exposé.

Cet après-midi, nous avons accueilli deux maires de collectivités différentes qui ont fait un exposé. Ils ont parlé du développement économique dans leurs collectivités grâce à l'activité aquacole. Cependant, cette activité ne venait pas d'eux; des entreprises bâtissaient cette économie. Aidez-moi à comprendre. Est-ce que c'est la Première Nation, la bande, qui veut se lancer dans l'aquaculture, ou avez-vous des personnes dans votre collectivité qui sont dans le secteur aquacole?

M. McDonald : Il y a probablement deux volets, mais le plus important promoteur ou la plus importante entité qui a le mandat d'examiner les avantages de l'aquaculture est la Première Nation elle-même, c'est-à-dire l'instance dirigeante, le chef et le conseil, par son département de développement économique et sa société de développement économique. La Première Nation a une société de développement de même qu'une entreprise de pêche commerciale, Netukulimk Fisheries. Donc, la bande est considérée comme le plus important promoteur qui offre les meilleures perspectives de se lancer dans l'aquaculture.

Quelques membres de la bande ont mis sur pied des entreprises qui ont connu plus ou moins de succès, notamment en ce qui concerne la plongée et, plus récemment, un membre de la bande qui est en train de créer son propre garage commercial et atelier de réparation marine.

La sénatrice Poirier : La raison pour laquelle je pose cette question est que je sais, d'après les notes que j'ai, qu'en avril de cette année vous avez reçu une subvention de près de 46 000 $ de la Fondation pour la conservation du saumon atlantique afin de participer à un programme de surveillance des évasions de poissons d'élevage. Vous avez parlé du programme d'évasion il y a quelques instants. J'essayais juste de comprendre votre implication parce que c'est vous qui avez obtenu la subvention. Avec cette subvention, est-ce que vous vous servez de l'argent pour payer une entreprise qui fait cela, qui surveille le programme, ou est-ce vous, en tant que conseil de bande, qui surveillez le programme? Comment cela fonctionne-t-il?

M. McDonald : Eh bien, cela se fait dans un contexte de grande collaboration avec la Direction des sciences du ministère des Pêches et des Océans. Nous avons des techniciens sur la rivière Conne et la rivière Little, les deux rivières à proximité de la collectivité, qui sont très importantes d'un point de vue social et rituel. Ces techniciens surveillent la rivière. Lorsqu'ils aperçoivent un saumon qui pourrait ressembler à un poisson qui s'est évadé d'une ferme aquacole — il y a des signes physiques extérieurs. Par contre, le MPO adopte l'approche selon laquelle un saumon dans une rivière est un saumon dans une rivière, considéré comme un saumon sauvage, et il n'est déterminé qu'il s'agit d'un saumon qui s'est évadé qu'une fois qu'un processus est entrepris pour l'identifier. Les scientifiques du ministère prélèvent un échantillon d'écailles et ils examinent, à l'aide d'un microscope, les lignes dans les écailles. Je ne suis pas tout à fait au courant de ce processus. Donc, nous avons des techniciens dans la rivière qui prélèveront les échantillons, consigneront la date, l'heure, le jour, les coordonnées GPS, et qui fourniront ces données au MPO qui représentera sur une carte l'emplacement des saumons qui se sont évadés. Ce financement est donc accordé à la bande et celle-ci engage ses techniciens en ressources naturelles pour qu'ils fassent ce travail.

Un autre programme de nature semblable est celui en vertu duquel nous allons orchestrer une évasion. Nous allons collaborer avec l'industrie pour laisser s'évader des saumons d'élevage auxquels on aura fixé des radio-émetteurs. À compter de ce moment-là, dans les rivières, nous allons surveiller leurs déplacements. Nous pourrons ainsi savoir où vont les saumons.

Le financement nous vient du PAGRAO, le Programme autochtone de gestion de ressources aquatiques et océaniques, un programme du MPO. Notre Première Nation et la Première Nation mi'kmaq des Qalipu sur la côte Ouest font partie d'une association du PAGRAO. Le financement provenant de ce programme nous permet d'acheter les radio-émetteurs et l'équipement de télémétrie qui nous permet de collaborer avec la Direction des sciences du MPO. Donc, en effet, nous avons deux projets en cours cette année.

Pour ce qui est de certaines des préoccupations environnementales, le nettoyage des plages et essayer de déterminer l'incidence sur les évadés dans les rivières, je dirais que notre Première Nation est probablement l'un des intervenants les plus proactifs. À ce jour, nous n'avons reçu aucun investissement ni aucune contribution directement de l'industrie aquacole, quoiqu'elle demeure coopérative et permet de laisser son saumon s'échapper et de partager les données avec nous.

La sénatrice Poirier : Est-ce que le signalement d'une évasion d'une ferme aquacole est une exigence de permis à Terre-Neuve-et-Labrador?

M. McDonald : Oui, et Clyde peut mieux vous en parler que moi.

M. Collier : Oui. Je pense que le seuil a été fixé à 100 poissons, mais la dernière conversation que j'ai eue avec le MPO est que même l'absence d'évasion est une raison de signaler. Si une ferme se rend compte qu'il y a une brèche dans le filet, elle doit le signaler. On supposerait alors que des poissons se sont évadés même si l'on n'a pas remarqué en réalité qu'un seul poisson s'était évadé.

La sénatrice Poirier : Très bien, en tant que bande, en tant que Première Nation, vous n'êtes pas un titulaire de permis, n'est-ce pas?

M. McDonald : Un permis de quoi?

La sénatrice Poirier : Aquaculture.

M. McDonald : À ce moment-ci, nous ne sommes pas une ferme aquacole titulaire d'un permis, non.

La sénatrice Poirier : Très bien. Merci.

La sénatrice Raine : La réunion est très intéressante et je suis vraiment désolée des épreuves que vous avez dû traverser.

Monsieur Collier, est-ce que le Gray Aqua Group survit et poursuit ses activités?

M. Collier : Oui, il a échappé à la faillite.

La sénatrice Raine : Demeurez-vous à Conne River?

M. Collier : Oui.

La sénatrice Raine : Donc le pire est derrière vous et vous allez de l'avant.

M. Collier : Merci mon Dieu.

La sénatrice Raine : Je vois dans nos notes que vous et la Première Nation collaborez à un projet de recherche sur les possibilités de reproduction entre les saumons sauvages et les saumons d'élevage à Terre-Neuve-et-Labrador. Pourriez- vous décrire brièvement le projet?

M. Collier : Il s'agit du projet hybride. Je pense que Shayne a parlé de poisson d'élevage et de poisson sauvage. Il y a eu une étude en Écosse, je pense, qui a indiqué que s'ils se croisent, les hybrides ne survivent pas aussi bien.

Je vais donner des précisions relativement à ce dont le sénateur McInnis a parlé un peu plus tôt, les effets du pH. Nous présentions une demande pour un emplacement à Salmonier Pond, et elle a été refusée par crainte d'interaction entre nos saumoneaux et les saumoneaux sauvages. Cela m'a irrité. J'ai donc parlé à des responsables du MPO au sujet d'études possibles parce que j'ai déjà eu une expérience avec le saumon de la rivière Saint-Jean. Nous avions essayé qu'il féconde les œufs pour survivre. Nous n'avons pas réussi.

Nous avons lu un article venant de la Nouvelle-Écosse au sujet de l'ajout de chaux vive dans l'eau. Nous avons donc dispersé de la chaux dans l'eau afin de relever le pH à un niveau qui permet aux œufs de survivre, et cela a fonctionné.

Dans mes discussions avec le MPO, j'ai émis une théorie : si un saumon d'élevage originaire du Nouveau-Brunswick essayait de frayer, il ne se serait pas adapté correctement aux eaux de Terre-Neuve et n'aurait pas été en mesure de frayer dans les eaux de Terre-Neuve à cause du faible taux de pH.

Le MPO a accepté le projet. Le ministère a un programme, le PCRDA. Donc, ensemble, Gray, la bande et le MPO, nous avons commencé à chercher ces poissons croisés et essayé de déterminer s'ils pouvaient survivre — et j'avais tort.

La sénatrice Raine : Ils ont survécu.

M. Collier : Oh, oui.

La sénatrice Raine : Le projet se poursuit-il encore ou est-il terminé?

M. Collier : Cette partie est terminée, mais ils ont d'autres plans. Je ne peux pas en parler directement car je n'ai rien lu à ce sujet, mais le projet original est terminé.

La sénatrice Raine : Merci.

Vous avez également dit que le taux de montaison du saumon sur la rivière Conne était moins élevé avant le début de l'aquaculture.

M. McDonald : Je sais, une anomalie pendant un ou deux ans.

La sénatrice Raine : Est-ce que ce serait en raison de la construction du barrage?

M. Collier : C'est possible, il se passait beaucoup de choses autour de Conne River à l'époque qui pourraient vraisemblablement avoir eu une incidence.

À la fin des années 1970, en aménagement forestier, on utilisait un produit chimique appelé fénitrothion. Lorsque ce produit se dégrade dans l'environnement, les produits chimiques décomposés se comportent comme des œstrogènes. Ils peuvent donc avoir la capacité de féminiser les poissons. Cela pourrait vraisemblablement avoir eu une incidence.

Ensuite, vers 1985, il y a eu un important feu de forêt qui s'est rendu aux berges de la rivière Conne et près de l'aire de frai. S'il n'y a pas de forêt près des aires de frai, il peut y avoir des crues soudaines. Il se peut que des crues soudaines près des aires de frai aient provoqué certains des problèmes de la fin des années 1970. Nous ne le savons pas exactement parce que personne ne faisait de surveillance.

L'autre chose qui s'est produite dans cette région près du cours supérieur de la rivière Conne, l'anse Pond, on a construit des chalets. Les motoneiges circulent autour de l'anse et l'une des zones de passage est directement au-dessus de la frayère. Lorsqu'ils se développent, les saumons franchissent une étape très sensible, immédiatement avant ce que l'on appelle « la formation des yeux », et ils peuvent très facilement mourir du choc. Cela se produit lorsque les gens traversent la frayère en motoneige, en plein milieu de cette période délicate, de sorte que cela aussi pourrait avoir eu une incidence.

M. McDonald : La question est de savoir ce qui a influé sur les montaisons dans la rivière Conne et qui a fait diminuer les montaisons alors qu'ailleurs à Terre-Neuve, les montaisons ont augmenté? En fin de compte, il n'y a eu aucune preuve empirique en faveur d'une cause précise. Il y a beaucoup de conjectures quant à savoir quels pourraient être les facteurs en cause.

Certaines études que la bande a réalisées avec le MPO ont indiqué que les saumoneaux quittent la rivière. La rivière produit donc de jeunes saumons, mais ils ne reviennent pas. Je pense que Brian Dempson a indiqué qu'il se passait quelque chose du côté de la survie en mer, soit les changements climatiques, soit l'acidité, Saint-Pierre et Miquelon les attrape avant que nous ayons la chance de le faire. Personne ne le sait pour l'instant.

Notre inquiétude est que les rivières à saumon sont dans un état très précaire en raison des faibles montaisons, elles satisfont à peine aux besoins en géniteurs. S'il est possible que l'aquaculture ait une incidence négative ou si elle a déjà une incidence négative, à notre avis il vaut la peine de mener une enquête, de faire d'autres travaux de recherche et de développement et qu'il y ait une collaboration entre tous les intervenants pour déterminer toutes les répercussions possibles pour l'avenir.

La sénatrice Raine : Vous êtes dans une position tout à fait unique là où vous vous trouvez pour travailler à cette recherche. Je suis très encouragée par le fait que vous, la bande, et Gray soyez toutes deux intéressées au projet.

Une dernière question. Lorsque vous disiez qu'il nous fallait pouvoir identifier les saumons évadés, je me demandais s'il possible de couper une nageoire de façon à ce qu'ils puissent être différenciés?

M. Collier : Vous n'avez pas besoin de la couper. Quiconque connaît les saumons peut dire immédiatement s'il s'agit d'un saumon sauvage ou d'élevage.

La sénatrice Raine : Comment?

M. Collier : Toutes les nageoires d'un poisson d'élevage seront érodées; les érosions se verront immédiatement.

La sénatrice Raine : Érodées?

M. Collier : Érodées.

M. McDonald : Population dense.

M. Collier : Leur population est dense de sorte que les poissons se touchent continuellement et que leurs nageoires s'en trouvent raccourcies. Dans le cas du saumon sauvage, ses nageoires seront complètement intactes.

La sénatrice Raine : Les gens recherchent donc cette caractéristique quand ils cherchent des évadés.

M. Collier : Oui. S'ils trouvent un poisson aux nageoires érodées, le MPO dira que le poisson sauvage avait peut-être aussi des nageoires érodées. Nous devons donc vérifier. Ils vont prélever un échantillon d'écailles.

Le poisson sauvage prend environ cinq ans pour passer d'œuf à saumoneau et aller à la mer. Il est donc beaucoup plus vieux. Les écailles vont se superposer, tout comme l'écorce d'un arbre.

La sénatrice Raine : Un poisson de cette taille est donc...

M. Collier : Il n'a que trois ans, c'est facile de le dire d'après les écailles.

Le sénateur McInnis : C'est différent, l'intérieur. Si vous regardez de près, elles n'ont pas la couleur, le pigment; elles ne l'ont que plus tard.

M. Collier : Mais il y a d'autres façons de le savoir, par exemple si vous l'éventrez.

Tous les poissons d'élevage sont vaccinés et le vaccin qu'ils utilisent est une émulsification à base d'huile. Il se produit une réaction dans l'estomac de sorte qu'il se forme des tissus conjonctifs et aussi des taches de mélamine dans l'intestin. Quiconque sait ce qu'il faut rechercher le verra immédiatement.

La sénatrice Raine : C'est fascinant.

M. McDonald : Je préférerais déterminer la classification d'un saumon comme étant d'élevage ou sauvage plutôt que d'exercer mes capacités culinaires, dans le respect de la réglementation, bien entendu.

Le président : Très intéressant.

Sénateur Munson, vous avez le dernier mot.

Le sénateur Munson : Merci, monsieur le président, de me donner cette occasion.

Ce n'est pas facile d'être un évadé sans nageoire dans l'océan.

Je consultais Wikipédia et j'apprends qu'il y a 862 habitants dans la réserve, comme vous avez dit, près de 900; et qu'il y en a 2006 qui vivent hors de la réserve. Je vous écoute; vous êtes littéralement au bout du chemin et cela a dû être dévastateur pour vous.

Parfois, les gens ne se préoccupent pas tellement de ce que signifie la législation sur la Colline du Parlement et nous posons ces questions. J'ai donc écrit ma question pour être certain de bien la poser. Quel avantage ou protection votre collectivité recevrait-elle précisément d'une loi fédérale sur l'aquaculture? Autrement dit, prendriez-vous la chance une autre fois de vous lancer dans l'élevage du poisson si une telle mesure était en place? Si vous pouvez être précis, qu'y aurait-il de concret pour votre collectivité qui serait attribuable à cette loi et qui améliorerait la situation?

M. McDonald : Je pense que la législation fédérale sur l'aquaculture apporterait plusieurs facteurs à la bande qui lui faciliteraient la tâche de se lancer dans l'aquaculture.

Il ne fait aucun doute que la bande sera consultée quant au libellé exact et quant à ce que représente la loi sur le plan des répercussions possibles pour la bande. Si et quand une telle loi est adoptée, nous indiquerions les préoccupations que nous avons au sujet de l'environnement, probablement la nécessité d'une loi précise concernant les débris marins; exiger que les fermes aquacoles étiquettent leurs pièces d'équipement de sorte que lorsqu'elles se brisent et partent à la dérive, une ferme puisse être tenue redevable parce qu'il s'agit de sa cage. En ce moment, Transports Canada exige que les cages soient marquées lorsqu'elles sont installées pour le grossissement, mais si une ferme s'installe près d'une collectivité et que les cages sont prisonnières de la glace pendant l'hiver, Transports Canada ne considère pas qu'il s'agit d'un site de grossissement. Nous avons eu des incidents où des motoneigistes se sont cassé les jambes et brisé les côtes. Il existe un vide législatif qui fait que les entreprises ne sont pas tenues par la loi d'utiliser de meilleurs marquages. Certaines entreprises, comme Gray Aquaculture, sont allées beaucoup plus loin et ont mis beaucoup de marques; d'autres entreprises s'en sont tenues au minimum; et d'autres encore n'ont rien fait parce qu'il n'y a pas une législation rigoureuse qui les oblige à le faire. Nous avons une multitude d'aspects préoccupants auxquels la législation pourrait répondre.

L'autre chose est que notre relation avec le gouvernement fédéral est unique compte tenu de la situation des peuples autochtones au sein de la Constitution canadienne et des obligations fiduciaires du gouvernement fédéral. Le MPO, pour ce qui est de la Loi sur les pêches et de ses activités en vertu de cette loi, nous consulte abondamment et cherche notre apport, tandis qu'en vertu du régime provincial, ce n'est pas le cas. À moins que nous ne fassions des démarches précises au sujet de nos préoccupations ou si nous étions un exploitant d'une ferme aquacole munie d'un permis, nous aurions un plus grand apport et une plus grande implication; nous estimons qu'en vertu d'une loi fédérale, la consultation et la protection des intérêts de la bande seraient davantage mises en valeur compte tenu de la position unique du gouvernement fédéral en ce qui concerne les collectivités autochtones et les peuples autochtones.

Je pense qu'en vertu de ce régime nous serions plus à l'aise de nous lancer dans l'aquaculture et nous serions plus à l'aise, même si nous ne nous lançons pas dans l'aquaculture, sachant que la question environnementale serait davantage prise en compte et qu'elle le serait d'une façon qui peut être appliquée, et qui peut être appliquée avec vigueur.

Le président : Je tiens à remercier nos invités. La discussion a été très intéressante. J'écoutais vos remarques et la remarque selon laquelle « aucune communauté n'est une île » est très importante pour nous tous. Le fait d'entendre parler de la coopération des villes dans la région de la côte des baies servira d'exemple pour nous tous. Je vous souhaite la meilleure des chances dans vos entreprises à cet égard.

Chers collègues, ceci conclut notre journée. Merci de votre patience et de votre intérêt. J'ai bien hâte à la poursuite de notre voyage à Halifax demain.

Je remercie toutes les personnes qui nous ont aidés tout au long de la journée, les personnes qui nous entourent, les responsables du son et nos interprètes. Ce matin, j'ai dit aux interprètes que maintenant qu'ils étaient à Terre-Neuve, ils allaient devoir travailler pour leur argent ici parce que ce sera délicat à l'occasion, mais je pense qu'ils s'en sont très bien sortis.

Le sénateur Wells : Je serai le premier à reconnaître que j'ai eu quelques hésitations et que je les ai reprises ailleurs.

Le président : Vous les avez reprises ailleurs, c'est certain.

Merci beaucoup.

(La séance est levée.)


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