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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule 15 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 25 novembre 2014

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 17 h 55, pour examiner la proposition faite au Parlement par Pêches et Océans Canada concernant la mise en place de frais d'utilisation et de normes de service pour les permis d'aquaculture en vertu du Règlement du Pacifique sur l'aquaculture du 25 septembre 2014, conformément à la Loi sur les frais d'utilisation de 2004, chapitre 6, alinéa 4(2).

Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je suis très heureux de vous accueillir tous à cette réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je m'appelle Fabian Manning. Je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et président de ce comité. Avant d'inviter nos témoins à s'exprimer, je demanderais aux membres du comité de se présenter.

Le sénateur Meredith : Sénateur Meredith, Ontario.

Le sénateur Tkachuk : Sénateur Tkachuk, Saskatchewan.

Le sénateur McInnis : Sénateur McInnis, Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Poirier : Le sénateur Poirier, Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Stewart-Olsen : Carolyn Stewart Olsen, Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Raine : Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le président : Merci, sénateurs. Un autre sénateur se joindra peut-être à nous plus tard.

Le comité entreprend son étude de la proposition faite au Parlement par Pêches et Océans Canada visant les frais d'utilisation et les normes de service pour les permis d'aquaculture en vertu du Règlement du Pacifique sur l'aquaculture. La proposition a été renvoyée au comité par le Sénat le mercredi 1er octobre 2014, conformément à l'article 12-8(2) du Règlement.

Nous sommes heureux d'accueillir les hauts fonctionnaires du ministère de Pêches et Océans Canada. Avant de commencer, je leur demanderais de se présenter.

Kevin Stringer, sous-ministre adjoint principal, Gestion des écosystèmes et des pêches, Pêches et Océans Canada : Merci beaucoup. Je m'appelle Kevin Stringer. Je suis sous-ministre adjoint du secteur des écosystèmes et de la gestion des pêches. J'ai préparé des remarques liminaires, mais auparavant je demanderais à mes collègues de se présenter à leur tour.

Jay Parsons, directeur, Sciences de l'aquaculture, Pêches et Océans Canada : Jay Parsons, directeur de la section de la recherche en aquaculture de la biotechnologie et de la santé des animaux aquatiques à Pêches et Océans.

Eric Gilbert, directeur général, Gestion de l'aquaculture, Pêches et Océans Canada : Eric Gilbert, directeur général de la gestion de l'aquaculture à Pêches et Océans, à Ottawa.

Alistair Struthers, directeur, Opération de l'aquaculture, Pêches et Océans Canada : Alistair Struthers, directeur, Opération de l'aquaculture, Direction générale de la gestion de l'aquaculture.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur qui vient d'entrer pourrait-il s'identifier?

Le sénateur Munson : Sénateur Jim Munson, je suis un sénateur de l'Ontario, mais mon cœur appartient au Nouveau-Brunswick. J'assisterai à 30 minutes de la réunion aujourd'hui.

Le président : Merci du préavis.

Au nom des membres du comité, je vous remercie de vous être déplacés. Je crois comprendre, monsieur Stringer, que vous avez de brèves remarques liminaires, après quoi nous passerons aux questions des sénateurs. Vous avez la parole.

M. Stringer : Merci beaucoup de l'invitation. C'est un plaisir pour nous que d'être ici afin de vous donner un peu de contexte et de répondre à toute question sur notre proposition de frais de permis d'aquaculture en Colombie- Britannique.

Je vous parlerai un peu du processus que nous avons suivi, de la façon par laquelle nous en sommes venus à cette proposition et je ferai quelques remarques complémentaires sur les frais mêmes, même si vous disposez déjà de cette information, et ensuite je parlerai des principes qui motivent ces frais.

[Français]

Comme vous le savez sans doute, d'après votre étude en cours, la demande mondiale de poisson et de fruits de mer ne cesse d'augmenter. Même si les pêches commerciales sauvages peuvent répondre en partie à cette demande croissante, la production d'aquaculture en sera néanmoins une source importante. Eu égard aux riches et vastes ressources aquatiques du Canada, nous avons le potentiel de répondre largement à la demande mondiale. Il s'agit là d'une occasion de revitaliser les collectivités côtières rurales et autochtones en créant des emplois importants.

[Traduction]

Nous voulons que cette croissance se fasse de façon soutenable dans le cadre d'un régime réglementaire moderne et robuste qui protégera l'environnement. Dans le cadre du programme de réforme réglementaire de ce ministère, cette proposition de frais de permis vise à rassurer les Canadiens que ceux qui ont accès à nos ressources naturelles à des fins lucratives paient des redevances appropriées et respectent un cadre réglementaire pertinent.

Le point de départ à ce qui m'amène devant vous aujourd'hui remonte à 2009, lorsque la Cour suprême de Colombie-Britannique statuait que la gestion de l'aquaculture de la Colombie-Britannique relevait de la juridiction fédérale et établissait que le gouvernement fédéral avait jusqu'à décembre 2010, soit il y a quatre ans, pour respecter cette nouvelle obligation et établir une nouvelle réglementation et des programmes d'exploitation de l'aquaculture en Colombie-Britannique. En réponse à cette décision, le gouvernement fédéral créait le Règlement du Pacifique sur l'aquaculture en vertu de la Loi sur les pêches. Ce règlement est entré en vigueur le 18 décembre 2010, au moment où le ministère des Pêches et des Océans devenait officiellement l'organisme de réglementation chargé de la gestion de l'aquaculture en Colombie-Britannique. Ce règlement donne notamment au ministre le pouvoir de délivrer des permis et d'en établir les conditions.

Pendant ce temps, le MPO s'est engagé à fixer aussi des frais pour les permis qui seraient justes, et simples à administrer et à comprendre. La mise en œuvre du processus lié à la Loi sur les frais d'utilisation rendait impossible la mise en œuvre de ces frais au même moment que l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation.

Une fois la réglementation entrée en vigueur à la fin de 2010, nous pouvions en 2011 commencer le travail sur les frais d'utilisation. Nous avons d'abord procédé à une analyse initiale interne, en examinant l'ancien régime de frais et les régimes d'autres administrations au Canada et à l'étranger, en plus de considérer divers modèles.

Au printemps 2012, le ministère a tenu une série de rencontres préliminaires avec les intervenants visés et les Premières Nations. Nous avons également demandé l'apport de tout élément qui aurait pu passer inaperçu et nous nous sommes assurés que toutes les préoccupations étaient entendues. Nous avons reçu une rétroaction utile dans le cadre de ces discussions, qui a une incidence directe sur l'approche que nous proposons et dont vous êtes saisis.

À l'automne 2013, le MPO a préparé un document de discussion et lancé une autre période de consultations publiques de 30 jours, comprenant une distribution massive de 591 trousses de documentation à tous les titulaires de permis en Colombie-Britannique et aux Premières Nations, comprenant des directives sur la façon de participer. Un avis d'intention en matière de consultation a également été publié dans la Gazette du Canada, partie I, pour que la période de commentaires de 30 jours soit véritablement ouverte à tous les Canadiens. Nous avons donc pu obtenir de la rétroaction et nous en avons eu beaucoup. Nous avions un site web dédié à la question qui fournissait le contexte, des documents de consultation, des liens à d'autres documents pertinents ainsi que des renseignements sur la manière d'intervenir.

[Français]

À la fin de la période des commentaires, le site web avait été visité 607 fois et nous avions reçu un total de 113 commentaires. Une majorité de 84 participants se disait en faveur des droits proposés. Parmi ceux qui étaient contre, 15 s'inquiétaient qu'ils soient trop faibles. Au ministère, nous avons répondu aux commentaires et nous avons encouragé les participants à poursuivre le dialogue.

Après cette étape, le processus de la Loi sur les frais d'utilisation impose une autre période de 30 jours au cours de laquelle les plaintes peuvent être formulées. Aucune plainte formelle n'a été reçue à l'égard des droits proposés, et il n'a pas été nécessaire d'instituer un comité consultatif indépendant à cet égard.

[Traduction]

À la suite de ce processus, nous avons analysé tous les renseignements reçus, élaboré une proposition que nous avons déposée au Parlement pour examen et qui, ensuite, a été renvoyée à votre comité.

À la suite de votre examen, nous analyserons toute recommandation de votre part et poursuivrons le processus réglementaire de modification.

J'aimerais souligner certains points dignes de mention au sujet des droits. Plusieurs principes de base ont guidé Pêches et Océans Canada dans leur établissement et nous les avons respectés. Je vous en citerai quelques-uns.

Nous avons donc été guidés par des principes et objectifs fondamentaux. Nous voulions une approche juste et équilibrée aux droits de permis, simples et faciles à comprendre pour tous les titulaires. Les droits devaient prendre en compte des questions pratiques comme les volumes de production autorisés, la taille des exploitations, les différences entre les poissons et les autres produits de la mer, et les particularités des exploitations en eau douce et terrestre. Les droits doivent tenir compte de la récupération des coûts et du privilège que représente l'accès à une ressource publique. Ils ne doivent pas avoir d'incidence sur la concurrence. Ils ne doivent pas non plus trop s'écarter des droits imposés antérieurement ou ailleurs au Canada et à l'étranger.

Ainsi, les droits proposés comprennent deux éléments : premièrement, des droits fixes, pour recouvrer partiellement les coûts administratifs; et, deuxièmement, des droits d'accès pour l'utilisation exclusive d'une ressource réglementée par le gouvernement fédéral. Les droits fixes s'appliqueraient à tous les détenteurs de permis. Cependant, dans le cas de la partie des droits relatifs aux ressources, les pisciculteurs paieraient en fonction du nombre maximal de poissons auxquels ils ont droit, mesuré en tonnes. Les conchyliculteurs paieraient des droits en fonction de la région qu'ils exploitent, mesurée en hectares. Étant donné que les exploitants en eau douce et les exploitations terrestres n'ont pas d'accès privilégié à une ressource réglementée par le gouvernement fédéral, ils ne paieraient que les droits fixes. En outre, les installations de mise en valeur ne couvriraient pas les droits de permis, car elles ne génèrent aucun avantage économique privé de l'utilisation d'une ressource publique.

En conclusion, j'ai deux choses à dire. Premièrement, en ce qui a trait aux frais payés par les détenteurs de permis ou les installations en Colombie-Britannique, ces derniers ne payent que les frais du permis. La province a conservé la responsabilité d'émettre des baux aquacoles sur les terres sous sa juridiction et de percevoir les droits qui y sont liés. Ces sommes totalisent environ 1.5 million de dollars par année, ce qui constitue une part substantielle du coût d'exploitation aquacole par comparaison au droit de permis proposé.

Deuxièmement, nous avons fait des consultations importantes. L'industrie en général a apporté son soutien à la mise en place des droits et s'est exprimée en ce sens pendant tout le processus de consultation. Elle nous a dit qu'elle aimerait que les permis soient émis pour une période de temps plus longue, au lieu d'être émis annuellement. Cela pourrait être des permis de trois ans, de six ans. On nous a donc demandé de modifier les règlements afin de permettre les paiements par versement. Il est actuellement possible d'émettre des permis pour une période de temps plus longue mais il faut payer le montant en un versement. Des versements annuels impliquent une petite modification dans le règlement. Nous pourrions envisager l'émission de permis d'aquaculture pluriannuels en Colombie-Britannique et le ministère y serait favorable.

Enfin, le processus relatif aux frais d'utilisation a été très complet. Il a été inclusif, long et a comporté des défis. Cependant, cela a été un processus très utile qui nous a permis d'élaborer un régime de frais qui, nous croyons, respectera les objectifs et les principes que nous voulons réaliser. Nous espérons que ce sera un processus simple, juste, facile à comprendre et à mettre en vigueur, et nous croyons que cela va fonctionner.

Nous serons heureux de répondre à vos questions, écouter vos points de vue, et nous avons hâte de lire votre rapport final.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Stringer. Vous nous avez certainement donné un résumé très détaillé du processus suivi jusqu'à présent. Je vais demander à la sénatrice Raine de commencer la période de questions.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup. C'est très utile de comprendre le contexte dans lequel le processus s'est déroulé, de voir jusqu'à quel point c'était long et complet. Cela nous rassure.

J'ai une question sur le mécanisme d'ajustement annuel de 2 p. 100. Je me demande pourquoi vous avez choisi un pourcentage fixe de 2 p. 100. Je siège au comité des peuples autochtones et j'ai constaté que le fait d'avoir imposé un seuil de 2 p. 100 cause toutes sortes de problèmes. Si l'inflation dépasse 2 p. 100, est-ce logique d'imposer un plafond de 2 p. 100? Ne devrait-on pas tenir compte de l'inflation plutôt que de fixer un pourcentage?

M. Stringer : S'agissant d'un montant qui peut changer, le défi que nous avons dû relever par rapport au processus d'établissement de la réglementation a été très complexe. La possibilité de revenir dans trois ou quatre ans et d'effectuer des modifications, d'ajuster le montant, représente un défi. Nous nous sommes rendu compte que nous avons besoin d'un mécanisme d'autoajustement.

Voilà une excellente question. Comment en arriver à un chiffre raisonnable? Le relie-t-on à l'inflation? On nous a dit que ce n'est pas ce qui se fait habituellement, de le lier à l'inflation, mais je pense que cela s'explique par l'inflation de ces dernières années avec une estimation raisonnable de ce qu'elle sera à l'avenir. Voilà l'explication générale, mais je vais demander à Eric ou Alistair d'en parler.

M. Gilbert : En fait, c'est une très bonne question car c'est l'une des quelques questions qui nous a donné du fil à retordre assez longtemps. Kevin a présenté une partie de la réponse.

L'autre partie, c'est que l'agence centrale nous a dit qu'une bonne façon de s'occuper de l'augmentation des frais est de regarder le taux d'inflation cible de la Banque du Canada. Comme vous le savez, la Banque du Canada essaie de mettre des mesures en place afin de maintenir le taux d'inflation à 2 p. 100, le niveau visé depuis longtemps et qui continuera de l'être au cours des prochaines années.

L'autre option aurait été d'utiliser l'indice des prix, ce qui n'est pas facile. Nous avons dit que l'un des principes qui guident notre travail pour en arriver à ces propositions que vous avez devant vous est de s'assurer que cela sera simple et facile à gérer. Notre réflexion nous a menés à ce pourcentage de 2 p. 100. Ce n'est pas parfait. Ce n'est pas le scénario idéal, mais c'était le mieux que l'on pouvait faire.

Ce n'est pas ce que l'on veut, mais si comme dans les années 1980, le Canada entrait dans une période où le taux d'inflation se maintenait à des niveaux très élevés, nous pourrions toujours demander à l'agence centrale de changer le règlement. Il n'est pas coulé dans le bronze. Le règlement pourrait être changé au besoin.

La sénatrice Raine : Que voulez-vous dire par « agence centrale »?

M. Gilbert : Le Conseil du Trésor.

La sénatrice Raine : Et vous dites que ce n'est pas ce qui se fait normalement?

M. Gilbert : L'utilisation de l'indice des prix. Il couvre l'inflation, pas de façon quotidienne, mais il est certainement publié une fois par année. Dans un règlement, c'est difficile de renvoyer à un indice que nous ne contrôlons pas.

Alistair, vouliez-vous ajouter quelque chose?

M. Struthers : Comme Eric l'a mentionné, c'est un concept qui nous a donné du fil à retordre. Deux pour cent, c'est le taux d'inflation cible de la Banque du Canada. Le taux d'inflation moyen au cours des 15 dernières années a été de 1,89 p. 100, alors nous en sommes près. Ce n'est pas parfait, mais c'est simple et facile à comprendre.

Comme Eric l'a mentionné pour l'indice des prix à la consommation, cela serait la façon la plus précise de l'ajuster chaque année. En théorie, c'est une idée que la plupart des gens comprennent. C'est lié à l'inflation. Cependant, la capacité réelle de calculer cet indice dépend du panier de biens utilisé et de la période de l'année. Il faudrait ensuite le publier sur le site web du MPO. Lors du processus de rédaction, des avocats nous ont dit que si le règlement comprend une formule qui fait que la personne qui paie les frais doit regarder à l'extérieur du règlement, cela pourrait poser problème du point de vue de la transparence.

Le sénateur Munson : Je sais que nous sommes ici pour vous parler de la Loi sur les frais d'utilisation, mais vous avez tellement travaillé sur l'industrie de l'aquaculture, et je pense que nous voulons tous une industrie de l'aquaculture en santé. Nous avons voyagé partout au pays et entendu des témoignages sur le fait qu'il y a trop de règlements et de ministères, et la plupart des acteurs du secteur aimeraient avoir une loi sur l'aquaculture.

Elle semble être immobile, comme gelée. Si on va en Écosse et en Norvège, on voit l'immensité de ce qui se fait là-bas et comment les produits sont vendus ici à partir d'autres pays, et on constate tout le potentiel du Canada.

Vous, vous êtes là depuis assez longtemps. Pourrais-je savoir où en est le processus bureaucratique pour cette industrie? Vous jouez un rôle fondamental dans ce domaine.

Dans le secteur des pêches, les représentants de l'industrie de l'aquaculture se disent éleveurs de poissons, par exemple. Ils sont plus à l'aise avec l'industrie agricole qu'avec celle des pêches. J'aimerais connaître votre point de vue sur la situation, car nous avons besoin d'entendre vos commentaires avant de publier le rapport.

Le président : Sénateur, comme vous l'avez dit, vous comprenez que nos témoins sont ici pour parler des frais d'utilisation. Si pour une quelconque raison vous ne voulez pas traiter ce sujet, nous pourrons en reparler une autre fois. Si vous le voulez, la porte est ouverte, mais nous sommes ici pour parler des frais d'utilisation.

Monsieur Stringer, je vous laisse décider.

M. Stringer : Merci. Je vais répondre brièvement. Je soulignerai que nous devons revenir ici la semaine prochaine pour parler du règlement sur les activités d'aquaculture, qui se rapproche du sujet plus général de la réglementation.

Un certain nombre d'entre nous avons passé la journée avec l'AICA, l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture. Elle a tenu son assemblée générale annuelle aujourd'hui à Ottawa, et j'étais présent avec Eric et deux autres collègues, et puis la direction scientifique a fait un exposé cette après-midi; alors nous collaborons étroitement avec cette industrie. Je vous répéterai ce que j'y ai dit au sujet de la situation. Ce sera une brève description.

Premièrement, 50 p. 100 des ressources halieutiques mondiales viennent maintenant de l'aquaculture, une énorme augmentation par rapport au passé. Le monde aura besoin des ressources halieutiques pour les protéines. Il y a des estimations officielles de l'ONU et de la FAO sur les besoins et sur les manques.

Mon travail en tant que gestionnaire des pêches est de s'assurer qu'il y en ait autant que possible qui vienne de la pêche sauvage. Je ne crois pas que quiconque au monde pense que nous pourrons doubler la pêche sauvage au cours des 30 prochaines années. Une partie importante des besoins seront comblés par l'aquaculture, et le Canada est très bien placé. Notre travail au MPO et au gouvernement du Canada est de s'assurer que cette croissance est favorisée par une réglementation solide et écologiquement responsable.

Les règlements dont nous parlerons la semaine prochaine, les règlements sur les activités d'aquaculture, font partie de cette stratégie. Je dirais que le Règlement du Pacifique sur l'aquaculture adopté en 2010 et dont nous discutons des frais aujourd'hui et que le comité examine, est un autre aspect de tout cela, mais il y en a d'autres aussi. Cela nous fera plaisir d'en parler.

C'est difficile, mais c'est notre objectif et nous discutons avec les industries.

Le président : Merci monsieur Stringer. Nous avons hâte que vous nous donniez plus de détails à ce sujet la semaine prochaine ou plus tard.

Avez-vous terminé, sénateur Munson?

Le sénateur Munson : Eh bien, je pense que oui.

Le président : Oui, c'est le cas.

Le sénateur Munson : Les frais d'utilisation ne seront pas aussi intéressants que le reste. Je comprends les frais d'utilisation, mais je reviendrai la semaine prochaine et nous pourrons parler de l'ensemble de la situation. Je crois, comme nous l'avons constaté, monsieur le président, qu'il y a des défis, mais il faudra apporter des changements.

Le président : Restez à l'écoute.

Le sénateur Meredith : Monsieur Stringer, merci pour votre exposé. Vous avez parlé de consultation. En tant qu'ancien membre du Comité des peuples autochtones, nous revenons toujours à l'obligation de consulter, aux droits issus de traités, et cetera. Vous avez parlé des possibilités de croissance de cette industrie, et nous constatons qu'il y a beaucoup de potentiel. Mon collègue a mentionné certains des voyages que nous avons faits et nous avons vu que le Canada était à la traîne. Je veux m'assurer que les peuples des Premières Nations du Canada participent vraiment à l'industrie de l'aquaculture.

Ma question pour vous concerne les consultations. Quelles étapes ont été suivies? Pourriez-vous confirmer aujourd'hui que vous avez complété ces étapes? Quels ont été les résultats par rapport aux engagements qu'ont pris les peuples des Premières Nations d'accepter ces frais?

Lorsque je vois la situation, je ne veux pas qu'on doive y revenir pour une autre ronde de discussions et découvrir qu'il y a de l'opposition. J'aimerais qu'il soit clair que nous avons fait tout ce qui est possible. Si cela ne vous dérange pas de m'expliquer le processus, et j'aurai ensuite une dernière question pour vous.

M. Stringer : Je vais commencer et ensuite je vais demander à Eric de poursuivre parce qu'il a participé à certaines des rencontres avec les Premières Nations.

J'ai parlé dans ma déclaration d'ouverture du long processus que nous avons suivi, en partie parce que nous pensions que c'était une bonne idée, et en partie parce que nous avons des responsabilités envers les Premières Nations, mais aussi parce que la Loi sur les frais d'utilisation relève d'un processus assez prescriptif qui exige ce genre de discussion.

Il y a eu trois ou quatre points d'entrée avec les Premières Nations. Premièrement, nous avons discuté avec le conseil des pêches des Premières Nations de la Colombie-Britannique des frais et de ce que nous faisions. Lorsque le document de discussion a été diffusé à l'automne 2013, les documents ont été envoyés à toutes les 203 Premières Nations de la Colombie-Britannique. Alors il y a eu au moins ces deux aspects.

Nous avons aussi constaté lors de nos communications avec le conseil des dirigeants des Premières Nations et le conseil des pêches des Premières Nations, qui appuie le conseil des dirigeants des Premières Nations en Colombie- Britannique, qu'il fallait parler de l'aquaculture, puisque nous discutons avec les Premières Nations de différents dossiers, y compris les frais d'utilisation. Le processus a été assez élaboré à cet égard.

Je vais demander à Eric si les Premières Nations nous ont dit des choses précises. Comme vous l'avez mentionné, l'aquaculture est un dossier important en Colombie-Britannique.

M. Gilbert : Très brièvement, vous avez bien décrit le processus. Il faut mentionner que nous avons envoyé une trousse de consultation à toutes les Premières Nations, qui comprenait une lettre expliquant le tout, un document de discussion présentant les options, et cetera. Nous avons invité les Premières Nations à nous transmettre des observations et des opinions précises afin que nous en tenions compte. En même temps, nous avons tenu des réunions pour expliquer ce dossier et avons entendu un examen à son sujet.

Je dois admettre toutefois que nous n'avons reçu aucun commentaire par écrit des Premières Nations à la suite de l'envoi postal. En dépit de cela, nous savons que dans certains cas, il n'est pas toujours facile pour les Premières Nations de participer à tous ces processus de consultation que nous leur proposons en tant que gouvernement, tant au niveau fédéral que provincial. Nous n'en avons absolument pas conclu qu'elles n'avaient rien à dire.

Après l'envoi postal, nous avons organisé une réunion. Pour résumer ce que nous avons entendu, en Colombie- Britannique, certaines Premières Nations s'opposent radicalement à l'aquaculture, et nous avons toute la gamme des points de vue. D'un autre côté, certaines Premières Nations pratiquent déjà l'aquaculture, et d'autres, même, présentent maintenant des demandes de permis d'aquaculture pour pouvoir vraiment prendre le contrôle du créneau, parfois dans le cadre d'une entreprise conjointe avec le secteur privé, parfois seules.

Le principal commentaire qui nous a été fait n'était pas tant qu'ils étaient contre l'imposition des droits en soi, mais ils ont demandé qu'on envisage des options qui nous permettraient de redistribuer les fonds recueillis pour répondre à certains de leurs besoins. Malheureusement, nous n'avons pas de mécanisme juridique qui nous permettrait de mettre les fonds de côté et de les réinvestir dans un programme propre aux Premières Nations.

Cela dit, nous avons d'autres programmes très utiles pour les collectivités des Premières Nations qui s'intéressent à l'aquaculture. Par exemple, tout récemment, nous avons conçu, en partenariat avec AADNC, ce que nous avons appelé l'Initiative d'aquaculture autochtone au Canada. Nous gérons ce programme avec des fonds qui émanent d'AADNC; cela représente quelque 4 millions de dollars sur une période de plus de trois ans. Ce programme vise à aider les Premières Nations qui veulent faire une analyse de rentabilisation et s'engager dans l'aquaculture à obtenir les outils à cette fin.

Certaines organisations des Premières Nations, comme le B.C. First Nations Fisheries Council, l'Aboriginal Aquaculture Association, qui se trouve aussi en Colombie-Britannique, ont reçu des fonds pour pouvoir embaucher des experts techniques qui peuvent aider certaines Premières Nations qui veulent se lancer dans le domaine de l'aquaculture.

Le sénateur Meredith : Ainsi, des trousses ont été envoyées à 203 Premières Nations et aucune n'a répondu, puis vous vous êtes réunis. Combien de ces Premières Nations se sont présentées à cette réunion, à votre souvenir?

M. Gilbert : Je vais demander à Alistair de confirmer, mais je me souviens d'une réunion à Nanaimo, qui avait été organisée par l'Aboriginal Aquaculture Association, où une trentaine de Premières Nations étaient représentées, mais cette association représente des Premières Nations qui sont déjà ou souhaitent entrer dans le secteur de l'aquaculture. Cela suscite beaucoup plus d'intérêt que les réunions que nous organisons, par exemple, avec le B.C. First Nations Fisheries Council où tous les points de vue nous ont été présentés, qu'ils soient pour ou contre l'aquaculture.

M. Struthers : La réunion dont parle Eric a en fait été la première que nous avons tenue sur les frais de permis, et la réponse que nous avons reçue des Premières Nations, c'est : « Eh bien, à quelle étape du processus est-ce que vous nous consultez? » Nous leur avons dit que c'était en fait le tout début du processus. Elles en ont été bien heureuses et ont dit que c'était bien la première fois qu'on sollicitait leur apport au tout début.

Il y avait entre 25 et 30 représentants de diverses Premières Nations côtières. Bien évidemment, ce sont celles qui ont un intérêt direct pour l'aquaculture.

Le sénateur Meredith : Donc, il y a eu 25 à 30 des 203 Premières Nations que vous aviez invitées. Et cela vous a permis d'affirmer que vous aviez suffisamment d'information pour aller de l'avant avec le processus. Est-ce que je vous ai bien compris, monsieur Stringer?

M. Gilbert : Une précision : nous avons fourni à toutes les Premières Nations tous les renseignements qui, d'après nous, pourraient leur être utiles pour examiner le dossier, examiner notre proposition et nous faire part de leurs points de vue. La réunion que nous avons organisée ensuite n'était pas pour clore le dossier. Lorsque j'ai dit que nous n'avons pas reçu d'observation écrite, je voulais dire que bien nous ayons fourni à toutes les Premières Nations ces renseignements — il y a eu le document de discussion, des liens vers les sites Web, un numéro de téléphone pour obtenir plus de détails — toutes des choses envoyées afin que les Premières Nations participent de façon adéquate et aient tout ce dont elles ont besoin pour nous répondre, nous n'avons pas reçu d'observation écrite. Ce n'est pas inhabituel dans le monde des consultations avec les Premières Nations.

Là où je veux en venir, c'est qu'après ça, nous ne nous sommes pas dit que tout allait bien, que nous avions consulté et que nous n'avions pas eu de réponse, et qu'on pouvait clore le dossier. Nous n'avons pas élaboré la proposition sur cette base. Nous avons tenu d'autres réunions afin de pouvoir communiquer l'initiative à ceux qui se présentaient.

Le sénateur Meredith : J'aimerais que ce processus soit clair afin qu'on n'ait pas besoin d'y revenir ou pour que le ministère ne se trouve pas devant des contestations. Je veux m'assurer qu'on dise que vous avez suivi ce processus et que vous avez essayé de discuter autant que possible afin d'obtenir leur consentement écrit et verbal pour ces frais.

Ma dernière question porte sur le fait que vous aviez dit qu'il y a eu 113 observations sur votre site web, dont 84 étaient en faveur. Vous avez dit que les autres étaient en faveur ou qu'il y avait des divergences en matière de...

M. Stringer : Je pense qu'il y en avait 15 qui faisaient part de préoccupations. Les 15 disaient en gros qu'ils pensaient que les frais étaient trop bas et que nous devrions percevoir un montant plus élevé.

Le sénateur Meredith : Ce n'était qu'une observation générale?

M. Stringer : Oui.

Le sénateur Meredith : Y avait-il une justification?

M. Stringer : Je ne sais pas si l'un d'entre vous connaît les détails?

M. Gilbert : Les commentaires principaux que nous avons reçus et qui se plaignaient du fait que les frais n'étaient pas suffisamment élevés provenaient d'organisations environnementales. Elles disaient principalement qu'on ne tenait pas compte des effets environnementaux sur le milieu marin de l'industrie dans le coût de l'utilisation de la ressource.

Nous avons répondu que les frais ne constituent pas le bon outil à utiliser pour tenir compte de ces facteurs externes. C'est le rôle de la réglementation en général, dans le cadre des permis et des conditions connexes, pour que les risques environnementaux soient le plus faible possible. Conséquemment, toutes les conditions que nous imposons à l'industrie ont des coûts. Les entreprises doivent prendre certaines mesures pour respecter ces conditions. Elles doivent élaborer un plan de gestion des pêches. Elles doivent surveiller leurs effets régulièrement et nous fournir ces renseignements, et cetera. Voilà où nous tenons compte des soi-disant facteurs externes dont parlent les groupes environnementaux, c'est dans la gestion globale de l'industrie.

Le sénateur McInnis : Je suis arrivé plus tôt et j'ai eu une merveilleuse rencontre privée avec le monsieur à l'autre bout de la table. C'était très utile. Je n'aurai pas besoin d'être ici la semaine prochaine.

Les frais d'utilisation, comme le sénateur Munson l'a si bien dit, sont des choses dont on ne parle pas beaucoup ici, mais je voulais vous poser la question suivante : quel genre de frais pour les permis et pour l'accès à l'océan y a-t-il dans le Canada atlantique, par exemple? Et quels seraient les revenus totaux que l'on pourrait obtenir de la Colombie- Britannique?

M. Stringer : Vous parlez de l'aquaculture?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Stringer : En aquaculture, ce sont les provinces qui fixent les frais, pas le gouvernement fédéral.

Le sénateur McInnis : Je ne le savais pas.

M. Stringer : Ils sont fixés par les provinces. Bien sûr, chaque province a un système différent. Pour la proposition devant vous concernant la Colombie-Britannique, nous avons essayé de faire en sorte qu'ils ne soient pas complètement différents de ce qui se fait ailleurs au pays, et nous pensons y avoir réussi. Les frais de permis proposés pour la Colombie-Britannique sont parmi les plus élevés au pays, mais pas beaucoup plus élevés, et pas beaucoup plus élevés que ceux qu'il y a en Norvège — en fait, ils sont moins élevés que ceux de la Norvège, de l'Écosse et du Chili, qui sont nos principaux « concurrents » — dans le monde.

Pendant que nous parlions, ces personnes ont trouvé les chiffres réels, alors quels sont-ils dans les autres provinces?

M. Gilbert : En moyenne, pour le poisson à nageoires en Colombie-Britannique, par exemple — et par « en moyenne », on veut dire une production annuelle d'environ 2 500 tonnes, les frais imposés à l'industrie sont 6 300 $ en moyenne. Au Nouveau-Brunswick, c'est un peu moins, c'est environ 3 500 $. À Terre-Neuve, c'est à peu près comme en Nouvelle-Écosse.

Comme Kevin vient de le dire, c'est un peu plus élevé en Colombie-Britannique, mais ce n'est pas plus élevé que c'était quand le gouvernement provincial percevait ces frais il y a quatre ans. Nous avons maintenu le même genre d'équilibre, si je puis dire.

Pour répondre à la deuxième partie de votre question, si nous percevions ces frais demain matin, nous obtiendrons au total environ 800 000 $, ce qui correspond en gros à ce que le gouvernement provincial percevait il y a quatre ans.

La sénatrice Raine : Vous venez de nous présenter des statistiques sur ce que font différentes provinces. Cela serait utile d'avoir un tableau par écrit non seulement des différentes provinces de l'Atlantique, mais aussi de la Norvège, de l'Écosse et du Chili, nos concurrents principaux. C'est bon que vous vous aligniez sur ce qui se faisait en Colombie- Britannique.

C'est tout ce que j'ai à demander. Merci.

M. Stringer : Nous serions ravis de vous le fournir. C'est peut-être déjà dans les documents que nous avons envoyés, mais nous allons faire en sorte de le souligner pour indiquer où ça se trouve.

Une chose qui était évidente, c'était de regarder les frais en Norvège. Mais la situation est tellement différente. Nous avons fait les comparaisons qu'il était possible de faire, et nous ferons en sorte de souligner tout ça dans vos documents.

Le président : Je n'ai peut-être pas entendu la réponse, mais à quelle date est-ce que les frais d'utilisation pour l'aquaculture pourraient être mis en œuvre?

M. Stringer : Cela fait partie du processus sur les frais d'utilisation. Une fois que le comité aura présenté ses recommandations, si on ne nous demande pas des changements importants ou de revoir les frais, on l'inclut dans la réglementation qui est envoyée au Conseil du Trésor. Une fois arrivé au Conseil du Trésor, cela dépend s'il faut passer par la partie 1 de la Gazette du Canada. Parce qu'il y a déjà eu de vastes consultations, si cette étape n'était pas nécessaire, on peut directement passer à la partie 2 de la Gazette du Canada. Mais le règlement doit maintenant être rédigé, suite au rapport du comité. Une fois terminé, on l'envoie au Conseil du Trésor et il peut être publié dans la Gazette du Canada et devenir loi.

Le président : Nous allons prendre quelques instants pour laisser nos témoins partir, et puis nous allons passer à huis clos pour s'occuper de ces questions.

(La séance se poursuit à huis clos.)


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