Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne
Fascicule 2 - Témoignages du 3 février 2014
OTTAWA, le lundi 3 février 2014
Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 17 h 5, pour surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et à l'examen, entre autres choses, des mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne (sujet : Évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant).
La sénatrice Mobina S. B. Jaffer (présidente) occupe de fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Chers sénateurs, bienvenue à la quatrième séance de la 41e législature du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Notre comité a été chargé par le Sénat d'examiner les questions de droits de la personne au Canada et à l'étranger. Je m'appelle Mobina Jaffer et, en ma qualité de présidente du comité, je suis heureuse de vous souhaiter la bienvenue à la séance.
Avant de poursuivre, j'aimerais demander à mes collègues de se présenter, et je vais commencer par la sénatrice Andreychuk.
La sénatrice Andreychuk : Je suis la sénatrice Andreychuk, de la Saskatchewan.
La sénatrice Martin : Sénatrice Yonah Martin, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice Unger : Sénatrice Betty Unger, de l'Alberta.
La sénatrice Seidman : Sénatrice Judith Seidman, de Montréal.
La sénatrice LeBreton : Sénatrice Marjory LeBreton, de l'Ontario.
Le sénateur Eggleton : Sénateur Art Eggleton, de Toronto.
La sénatrice Hubley : Sénatrice Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.
La présidente : Honorables sénateurs, lors de notre réunion du 2 décembre 2013, le comité a accepté d'assister à une séance d'information sur les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant, qu'on décrit comme des processus systémiques servant à évaluer les impacts potentiels de décisions sur les enfants et leurs droits, et à favoriser la cohérence des politiques.
On peut effectuer de telles évaluations pour analyser l'impact de politiques, de projets, de programmes ou de lois sur les enfants dans le but de choisir les options qui ont le moins d'impact négatif et le plus d'impact positif sur les enfants. Les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant favorisent la prise en compte des besoins des enfants dans le cadre de toute proposition pouvant les toucher, ce que les partisans des ERDE jugent particulièrement important puisque les enfants sont incapables de défendre leurs intérêts dans l'arène politique. Les ERDE obligent par ailleurs les pays à respecter les obligations qui leur échoient en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies.
Pour amorcer notre audience d'aujourd'hui, je souhaite la bienvenue à notre premier groupe d'experts composé de représentants d'UNICEF Canada, à savoir M. Marvin Bernstein, conseiller principal en matière de politiques, et Mme Lisa Wolff, directrice, Promotion des droits de l'enfant et éducation.
Je crois comprendre que vous avez prévu de faire une déclaration préliminaire. Les membres du comité auront, par la suite, quelques questions à vous poser.
Marvin Bernstein, conseiller principal en matière de politiques, UNICEF Canada : Merci. Lisa Wolff et moi sommes heureux d'être ici pour parler des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant, des ERDE. Nous estimons que cette discussion arrive à un moment particulièrement opportun, étant donné que 2014 marque le 25e anniversaire de l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Nous vous avons remis des copies de nos points de discussion. Je ne suis pas certain que nous serons en mesure de tous les couvrir, mais, au moins, vous aurez le document en votre possession, et il pourra vous servir de ressource documentaire ou de manuel de référence dans les années à venir.
Dans nos notes d'allocution, nous nous reportons aux documents offerts en ligne dans le site web d'UNICEF Canada. Ils découlent du symposium sur les méthodes d'ERDE, intitulé « Mettre l'enfance au cœur des politiques », qui a eu lieu à l'Université d'Ottawa, en mai 2013. Ils comprennent un document de travail, un rapport sommaire et toutes les présentations PowerPoint liées au symposium, que nous vous recommandons de consulter.
Nous nous sommes également efforcés de vous fournir les formulaires utilisés par le gouvernement du Nouveau- Brunswick, soit les versions anglaises et françaises de l'outil d'ERDE. Nous avons demandé à UNICEF Canada de faire traduire l'outil d'examen préalable et l'outil d'évaluation complète parce qu'il est important de passer du mode conceptuel à la pratique.
Maintenant que j'ai formulé mes observations préliminaires, je vais céder la parole à ma collègue, Lisa Wolff. Elle parlera d'un certain nombre d'aspects qui revêtent certes une grande importance d'un point de vue pratique et technique. Puis, vers la fin de l'exposé, je reprendrai la parole afin d'y contribuer.
Lisa Wolff, directrice, Promotion des droits de l'enfant et éducation, UNICEF Canada : Merci beaucoup et bonne soirée, mesdames et messieurs les sénateurs.
Comme Marvin l'a mentionné, il y a un peu moins d'un an, nous avons organisé un symposium sur les méthodes d'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant. C'était la première fois que des représentants du monde entier se réunissaient pour discuter de ce sujet précis lié aux droits de l'enfant. Nous avons organisé cet événement parce que nous entendions divers collègues au service d'UNICEF dans divers pays industrialisés parler du nouveau recours à des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant, et nous voulions vraiment savoir comment cette approche fonctionnait, comment elle améliorait les politiques et les autres décisions prises par les gouvernements qui touchent les enfants et, enfin, quels étaient certains des défis à relever à cet égard. Nous avons pensé que la meilleure façon de procéder consistait à convoquer les gens qui utilisent actuellement cette approche, c'est-à-dire divers représentants gouvernementaux ou défenseurs des droits de l'enfant qui avaient tendance à l'utiliser pour tenter d'influencer les gouvernements de l'extérieur. Nous avons convoqué des gens provenant de neuf différents pays et ayant acquis ces types d'expériences. Nous sommes très heureux qu'un certain nombre de décideurs provinciaux et fédéraux aient assisté au symposium afin d'en apprendre davantage à ce sujet.
Nous sommes également heureux de vous faire part de certaines des connaissances que nous avons acquises au cours des dernières années. Pendant cette période, nous avons également eu l'occasion de travailler très étroitement avec le gouvernement du Nouveau-Brunswick, dans le cadre de leur processus d'adoption officielle des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant. Le Nouveau-Brunswick est la première province du Canada où les décideurs sont maintenant tenus de penser explicitement aux enfants lorsqu'ils élaborent des projets de loi ou d'autres types de propositions de politiques qui doivent être présentés au cabinet. Les dirigeants du Nouveau-Brunswick ont leurs propres raisons de le faire. Nous pouvons réfléchir un peu à cela, car les motifs de chaque province ou territoire à cet égard différeront, tout comme les avantages qu'ils espèreront tirer de cette adoption.
Vous êtes sûrement conscients que divers types d'évaluations des répercussions sont déjà réalisées à l'échelle fédérale et dans diverses provinces, et que ces évaluations varient en fonction de l'administration responsable. Certaines administrations procèdent à des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée, d'autres, à des évaluations des incidences sur la santé. Les raisons pour lesquelles on prête explicitement attention à certains facteurs ou intérêts, et qu'on leur accorde la priorité par rapport à d'autres, ne sont pas toujours claires.
L'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant est un simple outil visant à nous faire réfléchir à l'incidence qu'une proposition pourrait avoir sur les enfants — un projet de loi, une politique proposée ou tout autre type de décisions prises par des gouvernements qui pourraient grandement toucher les enfants.
L'une des principales caractéristiques de l'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant est qu'elle se sert du cadre défini dans la Convention relative aux droits de l'enfant pour nous aider à comprendre ces répercussions et à réfléchir à la façon dont les enfants seront touchés. Cela est expliqué par le fait que la convention décrit les conditions requises pour avoir une enfance épanouissante. Elle établit ce dont les enfants ont besoin pour s'épanouir et être protégés. Ce sont également les conditions que les gouvernements se sont engagés à soutenir. Il est donc logique d'employer ce cadre pour comprendre la façon dont les enfants seront touchés et d'examiner l'interdépendance de leurs droits.
On se soucie de comprendre comment une proposition appuiera ces droits ou comment elle pourrait ne pas les soutenir adéquatement. L'évaluation vise à maximiser les avantages que les enfants tireront d'une proposition, en particulier lorsque les répercussions peuvent être plus indirectes que directes ou lorsque leurs intérêts peuvent ne pas avoir été complètement pris en considération.
Lorsque nous examinons les répercussions que les propositions peuvent avoir sur les enfants et que nous utilisons la convention comme cadre, nous pouvons nous demander si elles sont bien ciblées. Quels groupes d'enfants pourraient en tirer profit? Certains enfants en profiteront-ils plus que d'autres? Quelle est l'incidence de la répartition des avantages? Nous pouvons vérifier si les propositions pourraient avoir des effets néfastes sur les enfants. Ces effets peuvent-ils être évités ou atténués en modifiant la proposition? Si une proposition va de l'avant, et que nous savons qu'elle aura des effets négatifs sur les enfants, pouvons-nous prendre des mesures pour atténuer ces effets ou protéger les enfants?
Lorsque le processus est utilisé, nous constatons qu'il permet de réfléchir à ces questions de manière structurée. Habituellement, le concepteur de politiques franchit cinq ou six étapes de réflexion sur la façon dont un projet de loi ou une politique pourrait avoir une incidence sur les enfants, et selon l'administration pour laquelle il travaille, le processus peut être plus ou moins complexe.
Idéalement, les gouvernements entreprennent ce processus, qui facilite la conception de politiques. C'est lorsque les gouvernements prennent ce processus en charge que nous observons les effets et les avantages les plus remarquables, et c'est logique compte tenu du fait qu'ils ont le pouvoir d'élaborer des politiques et le devoir d'appuyer les droits de l'enfant.
Nous savons que les parlementaires partagent ce devoir. Dans certains pays, des défenseurs indépendants des droits de l'enfant, des commissaires à l'enfance et parfois des ONG utilisent ce genre d'évaluations comme moyen externe de répondre en aval à une proposition gouvernementale. Nous observons ce genre d'initiatives en Écosse et en Australie, où elles influencent les propositions des gouvernements avec plus ou moins de succès. Encore une fois, l'idéal serait que les gouvernements procèdent à ces évaluations avant qu'une mesure législative ou une décision qui pourrait avoir une incidence sur les enfants jouisse d'un l'appui complet.
Bien entendu, un autre aspect à prendre en considération est que, compte tenu des divers types d'évaluations déjà employées, nous savons que les enfants ne sont pas toujours un facteur dont on tient compte explicitement dans ces évaluations. Dans les évaluations des facteurs relatifs à la vie privée, par exemple, on ne reconnaît pas toujours qu'il pourrait être nécessaire de protéger les droits à la protection de la vie privée des enfants différemment des droits des adultes. Certes, les discussions que nous avons au sujet de la façon dont nous vivons dans le cyberespace de nos jours plaident en faveur de ces droits.
Il va de soi qu'avant de prendre des décisions les gouvernements doivent tenir compte de nombreux intérêts divergents et établir un équilibre entre eux, et votre comité le sait mieux que tout autre. Toutes les personnes ont des droits. Il faut prendre en considération les revendications en matière de droits de divers groupes de gens.
Il se peut qu'on vous demande pourquoi on met l'accent sur les enfants. En tant que membres d'un organisme au service de l'enfance, cette question nous prend toujours au dépourvu. Je ne vous apprends probablement rien de nouveau en vous disant que les enfants sont particulièrement et exceptionnellement vulnérables, et ce, d'une manière qui diffère de celle des adultes. Les enfants font partie d'un groupe dont les intérêts sont souvent négligés, en dépit du fait qu'ils représentent environ un quart de la population du Canada. Il y a de nombreuses raisons majeures pour lesquelles on devrait tenir explicitement compte des enfants au cours du processus d'élaboration des politiques, et pour lesquelles on devrait même leur accorder la priorité, comme c'est leur droit en vertu de la convention.
Nous constatons souvent que les enfants sont les plus vulnérables parmi les vulnérables. Les enfants ont de nombreux points faibles, liés à leur sexe, leurs déficiences et leur ethnicité, qui les rendent vulnérables en se chevauchant. Compte tenu de leur développement et de leur dépendance, les enfants peuvent être démesurément touchés par les privations, qui ont parfois des effets sur toute leur vie. S'ils étaient exposés à des conditions comme la pauvreté ou le manque de nourriture plus tard dans leur vie, cela n'aurait pas nécessairement les mêmes répercussions sur eux que s'ils avaient traversé ces difficultés pendant leur enfance. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les enfants sont un groupe qui mérite une considération explicite.
Depuis que le Canada a ratifié la convention, nous avons remarqué que le principe, selon lequel le gouvernement doit en priorité tenir compte de l'intérêt des enfants dans ses décisions, a été appliqué à d'autres domaines. Nous constatons certainement que le principe a été invoqué, du moins en partie, dans le domaine de l'aide sociale à l'enfance et, dans certains cas, dans la législation et les politiques en matière d'adoption, ainsi que dans des cas de divorce et de garde des enfants. Toutefois, ce projet est incomplet, et de nombreuses décisions sont prises sans tenir compte du tout de l'intérêt des enfants et sans nécessairement accorder la priorité à ce facteur. On aurait beaucoup de mal à trouver une décision gouvernementale importante qui ne touche pas les enfants dans une certaine mesure. Les répercussions peuvent être indirectes, mais les enfants sont touchés par un grand nombre de différents types de décisions gouvernementales.
Nous avons remarqué que l'utilisation des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant apportait un certain nombre d'avantages non seulement aux enfants, mais aussi aux décideurs. Parfois, on a simplement négligé de penser aux enfants en formulant une proposition et, par conséquent, il est assez facile de lui apporter des modifications pour protéger explicitement les enfants ou leur accorder des exemptions. Nous pouvons constater que l'utilisation d'un processus de ce genre aurait l'avantage de nous aider à tenir compte des générations futures dans nos politiques, comme la façon dont la citoyenneté passe des parents aux enfants.
Nous pouvons certainement voir qu'il sera bénéfique de prendre en considération différents groupes d'enfants et les répercussions sur chacun d'eux. Notre politique en matière d'avantages familiaux est conçue de manière à tenir compte de différents groupes d'enfants et des répercussions sur chacun d'eux. Le congé maternité profite-t-il aux enfants adoptés ainsi qu'aux enfants biologiques? Ce sont tous des exemples de décisions que le présent gouvernement a prises au cours des dernières années et des scénarios qui auraient pu bénéficier d'une évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant. Il peut être très avantageux d'avoir recours à un processus structuré pour réfléchir dès le début à certaines de ces questions, avant que les décisions fassent plus tard l'objet de critiques de la part des tribunaux ou du public. Voilà en partie ce qui motive les gouvernements que nous avons vus utiliser le processus. Il est certainement profitable de penser d'emblée à ces questions plutôt que de gérer des problèmes plus tard.
Pour conclure mes observations, je dirais que nous avons vu au Nouveau-Brunswick et à l'échelle internationale, par exemple, des gens utiliser les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant pour élaborer un remarquable éventail de différents types de lois et de propositions de politiques. Ils vont de politiques, comme la réforme des soins de santé offerts en Australie, à une loi sur les dons d'organes au pays de Galles. Une remarquable variété de politiques ont bénéficié de la façon explicite dont elles ont fait passer les intérêts des enfants en premier et penser à eux.
M. Bernstein : Je vais maintenant aborder certains des facteurs qui contribuent à une mise en œuvre réussie des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant. Certains des facteurs que nous avons répertoriés proviennent de la littérature, d'autres ont été tirés de témoignages apportés au cours du symposium sur les méthodes d'ERDE, qui a eu lieu à Ottawa, et d'autres encore sont des facteurs de réussite mentionnés par nos collègues du Nouveau-Brunswick, où, comme Mme Wolff l'a indiqué, l'ERDE est obligatoire depuis près d'un an. Avant d'aller au Nouveau-Brunswick pour donner des séances de formation à des représentants officiels du gouvernement, Mme Wolff et moi avons organisé quelques entrevues avec des informateurs clés qui travaillent dans des bureaux en Écosse, au pays de Galles et en Australie-Occidentale, afin de déterminer quelques-uns des indicateurs de succès et la façon dont ces évaluations pourraient être réalisées efficacement.
Parmi les facteurs de succès qui nous ont été communiqués, on retrouve le fait d'avoir un modèle — un outil pratique et facile à utiliser — et un mandat clair. Comment les limites de l'ERDE seront-elles définies? Quelle méthode sera utilisée? Qui sera chargé d'achever l'évaluation? Où est-elle envoyée? Qu'est-ce qu'on espère accomplir à l'aide de l'évaluation?
Un autre élément de succès consiste à intégrer dans les mesures législatives ou les directives en matière de politiques l'obligation d'effectuer des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant. Au Nouveau-Brunswick, une de leurs directives en matière de politiques stipule qu'une ERDE doit être réalisée chaque fois qu'une loi, une politique ou un règlement proposé sera envoyé au cabinet ou, autrement dit, au conseil exécutif. L'évaluation est obligatoire et doit accompagner le mémoire destiné au conseil exécutif. Lorsque l'obligation de procéder à une évaluation n'est pas stipulée, la décision d'en réaliser une est laissée à la discrétion du personnel responsable, et la volonté de le faire pourrait connaître des revirements. Je pense qu'il est très important d'essayer de soutenir l'engagement relatif à ce processus.
Un autre facteur de succès est lié à l'utilisation de l'ERDE comme un des outils que contient un coffre à outils. Nous savons que les divers droits prévus par la convention sont interdépendants, tout comme les mesures générales de mise en œuvre. Ce serait merveilleux, si l'ERDE pouvait être mise en œuvre pour veiller à ce que les politiques, les programmes et les mesures législatives soulèvent et appuient des droits mentionnés dans la convention. Dans la mesure où cette mise en œuvre peut être conjuguée à l'offre de bons cours de formation, à des budgets favorables aux enfants et à un mouvement visant à nommer à l'échelle nationale un commissaire à l'enfance, elle renforcera l'incidence des ERDE.
L'autre élément communiqué dans le cadre de quelques-unes de nos discussions avec nos informateurs clés a trait au leadership et à l'engagement, au fait d'avoir un champion pour faire avancer ce dossier à l'intérieur et à l'extérieur du gouvernement. Je reviendrai sur ce sujet dans le contexte de l'expérience du Nouveau-Brunswick.
Il est certes préférable de procéder à l'évaluation des répercussions dès le départ, alors que toutes les options sont encore possibles, plutôt de se dire qu'on le fera après avoir déterminé et circonscrit la gamme des options envisageables, ce qui ne permet pas vraiment les débats les plus constructifs.
Lorsqu'il s'agit d'inciter les fonctionnaires à assumer cette responsabilité, on nous a dit qu'il était bon de voir l'ERDE comme une mission pouvant permettre d'améliorer véritablement la qualité de vie des enfants et les politiques les concernant, plutôt que comme une simple tâche administrative qui s'ajoute à toutes les autres.
Dans le contexte de l'expérience du Nouveau-Brunswick, on a également vanté les mérites d'une collaboration accrue misant sur une relation de travail plus étroite entre le gouvernement et le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse, une instance indépendante, de telle sorte que tous soient sur la même longueur d'onde et comprennent mieux le cadre de protection des droits des enfants.
Qu'a-t-on pu constater au Canada jusqu'à maintenant? Je peux vous dire qu'à l'échelon municipal, une ville comme Edmonton a adopté une approche d'évaluation des répercussions sur les enfants dans l'élaboration de ses politiques et de ses programmes, le tout s'inscrivant dans son engagement à offrir un cadre propice à l'épanouissement des enfants.
Ailleurs au pays, nous avons eu des discussions exploratoires avec certains responsables des services de protection de l'enfance en Ontario dans le contexte d'un programme intitulé Intensifions nos efforts. L'Ontario a établi une série d'indicateurs permettant de jauger l'état de bien-être des enfants dans la perspective d'une éventuelle intégration à un processus d'évaluation des répercussions pour déterminer dans quelle mesure les droits que leur confère la convention sont respectés.
En Alberta, un cadre de politique sociale a été établi, une loi accordant la primauté aux droits des enfants a été adoptée mais pas encore promulguée, et une charte de l'enfance fondée sur un ensemble de principes est en cours d'élaboration. On envisage là également la possibilité d'inscrire le tout dans un cadre d'ERDE.
En Saskatchewan, nous avons aussi pu parler à certains intervenants en protection de l'enfance au sujet des principes adoptés pour placer les enfants et les jeunes au centre des priorités. Il faut maintenant se demander comment on va concrétiser ces principes au bénéfice des enfants. Le recours à l'ERDE pourrait être très bénéfique à cette fin.
Du côté du Nouveau-Brunswick, où nous avons sans doute pu noter le leadership le plus marqué en la matière, l'adoption d'une approche pangouvernementale fait partie des éléments clés qui ont contribué à la réussite. Plutôt que de s'interroger sur ce qui pourrait être fait par un ministère ou un autre, on s'est efforcé d'appliquer la méthodologie dans l'ensemble du gouvernement. Un autre facteur important a été la création d'un groupe de travail sur l'ERDE composé de responsables désignés dans huit ministères pour faire progresser l'initiative et servir de mentors à certains de leurs collègues.
Le Nouveau-Brunswick a en outre décidé de concevoir son propre outil pour l'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant. Dans un premier temps, l'outil permet simplement de déterminer s'il y a effectivement des impacts sur les enfants. Si c'est le cas, on cherche à savoir quels droits en vertu de la convention sont mis de l'avant par la proposition, lesquels elle risque de compromettre et quelles en sont les répercussions pour différents groupes d'enfants. Dans le processus d'élaboration d'une politique ou d'un projet de loi, il arrive souvent qu'on ait l'impression qu'une certaine orientation va profiter à tous les enfants, alors que ce n'est peut-être pas nécessairement le cas pour les enfants de la rue. La situation peut aussi être différente pour les enfants vivant en foyer d'accueil. Même chose pour les enfants autochtones. Il faut parfois prévoir des arrangements particuliers pour ces enfants-là. L'évaluation des répercussions ne porte pas nécessairement sur les enfants considérés individuellement, elle vise des groupes d'enfants. Lorsqu'il s'agit d'en arriver à un juste équilibre entre les différents droits prévus dans la convention, il faut se demander si l'on travaille dans le meilleur intérêt des enfants. Le Nouveau-Brunswick a adopté une approche très pragmatique à cette fin.
On y a également créé un formulaire électronique autonome qui fait le lien avec les sources et les ressources appropriées. On ne se limite donc pas au format papier.
Parmi les avantages que l'on nous a signalés, notons une meilleure compréhension de la convention et des droits de l'enfant au Nouveau-Brunswick. Les intérêts de différents groupes sont mieux pris en compte dans le processus d'élaboration des politiques. On procède à une analyse plus approfondie avant de rédiger un mémoire au conseil exécutif. On nous a indiqué au cours de la dernière année que certaines propositions de politiques ont été modifiées, voire retirées, à la suite d'une ERDE. Lorsque les membres de l'assemblée législative décident de faire valoir un certain point de vue, ils peuvent assurément miser sur l'assurance que les spécialistes ont bien cerné et analysé les enjeux. Comme je le soulignais, les fonctionnaires provinciaux comprennent désormais mieux le rôle du Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse du Nouveau-Brunswick.
J'aimerais simplement dire en guise de conclusion que les instances municipales et provinciales ne devraient pas être les seules à s'intéresser au processus d'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant; c'est aussi l'affaire du fédéral. Tous les gouvernements ont à cœur d'adopter des lois et des politiques qui vont améliorer le sort des enfants. Dans le cas du gouvernement fédéral et des deux chambres du Parlement, on en trouve des exemples forts éloquents dans les domaines du droit du divorce et de la garde des enfants, du droit pénal, du droit de l'immigration, des intérêts des Autochtones dans les réserves, des prestations fiscales pour l'enfant et la famille, et de la santé publique.
Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a agi comme un véritable chef de file en mettant en place ce processus obligatoire et ce nouvel outil. Selon les premières indications, la démarche semble produire de bons résultats pour les enfants. Nous encourageons donc le Sénat à explorer cette avenue pour voir si des mesures similaires pourraient être prises à l'échelon fédéral.
On a notamment fait valoir lors du symposium que nous avons un bureau qui se consacre aux évaluations des facteurs relatifs à la vie privée, alors que nous n'en avons pas pour les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant. Pourtant, il ne fait aucun doute que le sort de nos enfants devrait peser autant dans la balance que les considérations relatives à la vie privée lorsque vient le temps de mesurer les impacts des lois et des politiques.
Nous vous avons fourni l'outil en question à titre d'information. Nous savons que les comités parlementaires éprouvent parfois des difficultés à déterminer quelles mesures sont prises dans les différents ministères fédéraux pour s'assurer qu'un projet de loi respecte les conventions internationales sur les droits de la personne. En faisant abstraction du secret professionnel de l'avocat ou du cabinet, il serait important de savoir de quelle manière ces ministères s'y prennent. À notre avis, les outils utilisés à cette fin devraient être très semblables à ceux que nous vous avons soumis et poser à peu près les mêmes questions. Si ce n'est pas le cas, je pense que vous devriez chercher à savoir pourquoi.
Je vais m'arrêter ici en vous demandant si vous avez des questions, ou plutôt en laissant la parole à Mme Vandergrift.
La présidente : Nous allons passer aux questions, en commençant avec le sénateur Eggleton.
Le sénateur Eggleton : Si je comprends bien la position adoptée par le gouvernement fédéral...
La présidente : Désolée, sénateur, je me suis trompée. Nous allons d'abord écouter ce que Mme Vandergrift a à nous dire. Je vous prie de m'excuser.
Kathy Vandergrift, à titre personnel : Je vous remercie de m'avoir invitée à participer à cet important débat. J'ai consacré de nombreuses années à la défense des droits des enfants au Canada et à l'échelle mondiale. À ce titre, j'ai notamment travaillé à la sensibilisation du public, participé à différentes consultations gouvernementales, présenté des mémoires à ce comité et contribué à des initiatives de recherche comme le symposium sur l'ERDE dont nous avons été les hôtes de concert avec l'UNICEF.
J'ai récemment dirigé le travail de la Coalition canadienne pour les droits des enfants qui a mené à un examen exhaustif de la situation au Canada. Notre travail a abouti à ce rapport soumis par le Canada au comité des Nations Unies à la suite de notre troisième examen officiel. Outre ce rapport, nous vous avons fourni les conclusions du symposium sur l'ERDE que nous avons tenu conjointement, et je compte établir le parallèle avec les pratiques en usage au gouvernement fédéral pour vous aider à mieux comprendre en quoi l'ERDE pourrait faire une différence dans la vie des enfants canadiens.
Comme on l'a déjà indiqué, nous soulignons cette année le 25e anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant, qui a été mise en œuvre sous le parrainage du Canada et du premier ministre Mulroney à l'époque. Il y a eu depuis lors trois examens de la situation au Canada et on décèle encore des lacunes importantes dans la mise en œuvre.
Le rapport produit à l'issue du troisième examen a été présenté il y a environ un an et demi. Plus d'un an plus tard, soit à l'occasion de la Journée nationale de l'enfant de novembre 2013, nous avons indiqué au gouvernement qu'il devrait faire part de ses intentions quant aux recommandations formulées. Le gouvernement n'a pas répondu. La coalition a suggéré 10 mesures pour faciliter les choses. Aucun progrès à ce chapitre non plus.
De toute évidence, le système en place ne fonctionne pas. Les examens de la situation des droits de l'enfant sont essentiels, mais ils ne sont efficaces que dans la mesure où ils aboutissent à des améliorations concrètes pour les enfants canadiens. J'ai bien peur que malgré tout le travail accompli, nous n'ayons pas été à la hauteur encore une fois pour nos enfants.
Pourquoi une évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant? Quelle différence est-ce que cela peut faire? Je vais vous exposer six considérations stratégiques qui vont dans le sens d'une amélioration par rapport au système actuel.
Comme on l'a déjà indiqué, il s'agit d'une intervention précoce qui a valeur de prévention. Les gouvernements sont généralement sur leurs gardes lorsque nous procédons à des examens pour évaluer leurs résultats. Personne n'aime que l'on critique son travail. On pourrait atténuer les tensions en évaluant les répercussions dès le début du processus, avant même que les gouvernements aient pris leurs décisions stratégiques.
Deuxièmement, l'ERDE pourrait élever le niveau du débat au sujet des droits de l'enfant et des lois proposées. Je vais me servir d'un exemple pour illustrer le tout. Lors du débat sur le projet de loi C-10 qui modifiait le système de justice pénale pour les jeunes, la coalition et la plupart des organismes de défense des enfants au Canada ont fait valoir qu'on contrevenait à la convention. Le ministre de la Justice a indiqué que la convention était respectée, mais il n'y avait aucun moyen objectif de même songer à discuter des fondements de son affirmation. Par la suite, le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies a également signalé des violations en demandant au Canada d'apporter les correctifs nécessaires, mais le projet de loi était déjà adopté. Si l'on avait procédé à une ERDE assortie d'un rapport public, les sénateurs auraient été mieux informés et le débat aurait pu être plus ciblé et fructueux.
Troisièmement, l'évaluation précoce des répercussions peut permettre d'apporter des changements pour éviter des conséquences négatives. Encore là, utilisons un exemple. Le crédit d'impôt pour la condition physique visait à lutter contre l'obésité. Les recherches montrent maintenant que les familles à faible revenu ne peuvent pas en bénéficier alors même que l'obésité les touche davantage que les familles mieux nanties. Si l'on avait mené une ERDE, ce crédit aurait pu être conçu différemment pour éviter un impact discriminatoire de la sorte qui va à l'encontre des droits de l'enfant et des valeurs canadiennes. Le crédit aurait ainsi été mieux à même d'atteindre les objectifs visés.
L'ERDE peut par ailleurs permettre des économies en aidant à définir les options les plus rentables. Des tonnes de recherches ont été menées au Canada pour démontrer que des améliorations au chapitre des déterminants de la santé au cours de la petite enfance pourraient éviter des coûts considérables pour le système de santé grâce à une utilisation plus efficiente des ressources existantes. Une partie de ces travaux ont été réalisés par l'Agence de la santé publique du Canada, mais la recherche ne se traduit pas nécessairement par des politiques nouvelles. Nos homologues étrangers ont beaucoup d'admiration pour le travail de recherche qui s'effectue au Canada concernant les enfants. Lorsqu'ils nous rendent visite, ils se demandent toutefois comment il se fait que certains de nos enfants ne s'en tirent pas vraiment mieux que ceux de pays n'ayant pas accès à un aussi vaste bassin de connaissances. L'ERDE est un outil capable d'intégrer la recherche au processus d'élaboration des politiques en informant tous les intervenants, ce qui est primordial. Les dirigeants publics et politiques auraient ainsi une meilleure idée des impacts et des choix à faire, ce qui vous procurerait dans votre rôle de parlementaires une assise plus solide pour prendre des décisions éclairées. Au bout du compte, cela se traduirait par des économies.
Les rapports publics produits à l'issue d'une ERDE permettront d'accroître la transparence et d'assurer une meilleure reddition de comptes par les parlementaires à l'égard de la protection des droits de l'enfant, une de leurs obligations importantes.
Enfin, le fédéralisme pourrait aussi mieux s'en porter. Les processus d'ERDE pourraient contribuer à éviter que des enfants glissent entre les mailles du filet de l'appareil fédéral, car ils seraient placés au cœur des préoccupations dans le cadre d'une approche globale faisant intervenir les deux ordres de gouvernement. Avec la perte de l'entente sur l'union sociale en 2014, le Canada sera privé d'un outil important qui permettait de savoir comment les ressources des deux gouvernements étaient utilisées pour aider les jeunes. L'ERDE pourrait être un autre outil qui aiderait à combler le fossé fédéral-provincial dans le dossier du mieux-être des enfants.
Je vais maintenant essayer de prendre les devants en répondant à quelques-unes des préoccupations que vous pourriez avoir. Il faut d'abord reconnaître que cet instrument, aussi utile puisse-t-il être, ne peut suffire à lui seul et doit s'inscrire dans un coffre à outils complet. Il demeure difficile de sensibiliser les gens à la question des droits de l'enfant, mais nous savons que l'ERDE peut aussi contribuer à cet élément essentiel à la réussite.
Pourquoi mettre ainsi l'accent sur les enfants? Du point de vue stratégique, permettez-moi de vous rappeler le thème principal qui ressort unanimement de notre rapport de suivi. Compte tenu du vieillissement de la population, le Canada n'a pas les moyens de continuer à permettre que les enfants soient si nombreux à ne pas s'épanouir pleinement en raison de circonstances que l'on aurait pu modifier. Il est dans l'intérêt de tous les Canadiens que nous prenions les moyens pour que chaque enfant puisse se développer et atteindre son plein potentiel, ce qu'on cherche justement à faire en veillant au respect des droits de l'enfant.
On nous demande souvent si cela ne va pas simplement ajouter une couche de bureaucratie. Je crois que l'ERDE va favoriser une meilleure utilisation des systèmes en place en reliant tous les éléments à l'intérieur du cadre de la convention. Il ne s'agit pas d'ajouter des étapes au processus gouvernemental; l'objectif est d'améliorer nos modes de gouvernance au bénéfice des enfants.
J'aurais trois modes d'action possible à suggérer à votre comité. Vous pourriez d'abord et avant tout procéder à une étude plus approfondie de l'ERDE et songer à en recommander l'utilisation au gouvernement dans son processus d'élaboration des politiques pour toutes les questions touchant les enfants. Le processus officiel comporte déjà deux dispositions en faveur du respect des droits de la personne, mais il s'agit d'exigences minimales qui ne produisent pas vraiment de bons résultats, comme en témoignent les exemples que je vous ai donnés. L'adoption de l'ERDE améliorerait considérablement les choses. Si cela permet un plus grand respect de l'ensemble des droits, c'est assurément bénéfique.
La première option consisterait donc à mandater pour ce faire le groupe de travail interministériel sur les droits des enfants dont les capacités seraient renforcées en conséquence. Dans bien des cas, les ministères à l'origine des propositions stratégiques pourraient en mener l'évaluation, pour autant que les autres intervenants soient intégrés au processus. S'il s'agit du ministère de la Justice, nos expériences passées nous indiquent que des modalités d'application claires et une diffusion publique sont essentielles.
La deuxième option serait pour le comité d'avoir recours à l'ERDE pour un projet de loi touchant les enfants dont vous êtes saisis. Cela pourrait prendre la forme d'un projet pilote témoignant d'une avenue possible pour les législateurs qui prennent au sérieux leur devoir de protection des droits de l'enfant.
Troisième option, vous pourriez procéder à une ERDE pour analyser les enjeux concernant les enfants à votre ordre du jour. Je pense notamment à votre étude sur la cyberintimidation. Vous pourriez ainsi faire œuvre de pionniers en établissant une pratique exemplaire qui pourrait être reprise un peu partout dans l'appareil gouvernemental.
Je vous remercie.
La présidente : Merci beaucoup. Nous passons maintenant aux questions.
Le sénateur Eggleton : Si j'interprète correctement la position du gouvernement fédéral, toutes les fois qu'un projet de loi est rédigé — et mes collègues me corrigeront si j'ai tort —, l'ensemble des traités, conventions et autres accords ratifiés par le Canada sont pris en compte, ce qui inclut la Convention relative aux droits de l'enfant. Qu'en pensez- vous?
Mme Vandergrift : Le processus utilisé pour ce faire est très rudimentaire. C'est presque une simple formalité à remplir. On ne procède pas à une évaluation approfondie et, d'après ce que nous avons pu constater, on se contente généralement de déterminer s'il y a eu violation grave de la convention. On ne cherche pas à savoir en quoi et dans quelle mesure les actions proposées contribuent à satisfaire aux différentes dispositions de la convention. Cela n'a rien à voir avec une ERDE, et notre rapport démontre clairement que l'on ne procède pas à un examen exhaustif.
C'est d'ailleurs ce que nous avons pu observer avec le projet de loi C-10. Nous avons soumis après coup une demande d'accès à l'information pour obtenir le document d'analyse et on nous a répondu qu'un tel document n'existait pas. On fait donc vraiment le minimum, mais comme ces deux dispositions existent bel et bien, on pourrait préconiser une amélioration du processus, et c'est là qu'interviendrait l'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant.
Le sénateur Eggleton : J'aimerais bien obtenir une copie de ce rapport, car je n'étais pas membre du comité lorsque vous l'avez présenté.
Mme Vandergrift : Certainement.
Le sénateur Eggleton : Est-ce que les gens de l'UNICEF souhaitent répondre à la même question?
Mme Wolff : Oui, je vais simplement renchérir sur ce que vient de dire Mme Vandergrift. D'après ce que nous avons pu constater au sein d'autres gouvernements, y compris celui du Nouveau-Brunswick mais également à l'étranger — tant au niveau des états fédéraux que par ailleurs —, pour les groupes d'élaboration des politiques où l'on bénéficie d'un tel outil aux fins de l'évaluation des propositions, le ministère de la Justice est en quelque sorte une étape obligatoire qui procure un éclairage et des conseils importants, mais si on parle d'un projet de loi sur la santé ou de prestations de revenu qui sont proposées, ce sont les spécialistes de l'élaboration des politiques qui doivent se demander notamment en quoi les enfants sont touchés et lesquels cela concerne. Encore là, il ne s'agit pas simplement de compenser les répercussions négatives par des effets positifs ou de se limiter à déterminer si nous contrevenons aux droits. Il faut plutôt chercher à savoir si tout est mis en œuvre pour améliorer le sort des enfants. C'est la nuance qu'il faut apporter.
Le sénateur Eggleton : Ce n'est pas une tâche que l'on doit nécessairement confier à une entité spécialement établie à cette fin. Le Nouveau-Brunswick a créé un groupe de travail; on pourrait affecter du personnel additionnel ou désigner un commissaire à l'enfance ou un défenseur des enfants, autant d'entités distinctes. Êtes-vous en train de nous dire que l'on pourrait combiner ce processus avec d'autres, comme les évaluations environnementales par exemple?
Mme Wolff : Oui. Au Nouveau-Brunswick, le groupe de travail a été créé à titre provisoire, uniquement pour décider de la forme que prendrait le processus, mais le tout relève désormais des instances stratégiques. Chose intéressante, plus les spécialistes de l'élaboration des politiques se servent de cet outil, plus ils en viennent tout naturellement à penser à la situation des enfants. Cela vient à faire partie de la façon de faire les choses, et tout devient beaucoup plus facile. C'est là que l'outil prend tout son sens.
Le sénateur Eggleton : Vous nous présentez le Nouveau-Brunswick comme un modèle. Vous avez aussi mentionné Edmonton au niveau municipal, mais pourrait-on croire que d'autres gouvernements accomplissent un travail aussi efficace à ce chapitre en utilisant simplement une méthode ou un modèle différent? Pensez-vous que cela est possible?
M. Bernstein : On entend parfois parler d'évaluations des impacts sur les enfants relativement à une proposition de politique ou à un projet de loi. Il va de soi que les ministères responsables de l'enfance, comme le ministère des Services à l'enfance et à la jeunesse de l'Ontario, vont se pencher sur les répercussions de leurs actions sur les enfants. C'est différent d'une évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant qui consiste à considérer chacun des droits prévus dans la convention en cherchant à déterminer comment il pourrait être touché, favorablement ou non, directement ou indirectement, par la proposition à l'étude.
Au Nouveau-Brunswick, c'est vraiment un processus distinct. Les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant sont menées séparément de celles portant sur les effets sexospécifiques ou les facteurs liés à la vie privée. On peut ainsi mettre davantage en évidence les éléments permettant de déterminer si les mesures proposées vont aller dans le meilleur intérêt des enfants.
À l'échelle fédérale, d'après ce que je comprends, il s'agit essentiellement de demander aux fonctionnaires de vérifier si l'orientation d'un projet de loi est conforme aux dispositions de protection des droits de la personne, un critère d'évaluation très inférieur à une analyse droit par droit afin de déterminer quelles en sont les répercussions sur différents groupes d'enfants. C'est un type d'analyse beaucoup plus détaillé et poussé.
Mme Vandergrift : J'ajouterais seulement que la Colombie-Britannique a adopté un cadre général pour tous les ministères, qui se fonde sur la convention et qu'elle utilise davantage le modèle de l'assurance de la qualité dans ses ministères. Encore une fois, selon ce modèle, les vérifications ont tendance à se faire après coup, donc nous croyons que les ERDE réalisées en amont comporteraient leur lot d'avantages.
La sénatrice Seidman : Je peux peut-être poursuivre dans la foulée des questions que le sénateur Eggleton vous a posées. Vous avez mentionné l'outil du Nouveau-Brunswick, mais j'aimerais que vous nous parliez un peu plus de l'élaboration du modèle des ERDE et de leur utilisation; par exemple, s'est-il inspiré de modèles internationaux? Vous avez mentionné que d'autres pays en faisaient.
M. Bernstein : Les Néo-Brunswickois ont examiné les modèles internationaux de l'Écosse et de l'Australie- Occidentale. D'après les conversations qu'ils ont eues avec les hauts fonctionnaires de ces États, ils ont déterminé qu'il serait préférable d'élaborer leur propre outil. Ils voulaient quelque chose de simple, de pragmatique. C'est pourquoi la première partie du formulaire ressemble à une évaluation des répercussions sur l'enfant. Est-ce que le projet va avoir des répercussions sur les enfants d'une manière ou d'une autre? Dans l'affirmative, il faut remplir la seconde partie.
D'après ce qu'ils nous ont dit, les hauts fonctionnaires avaient l'impression que l'analyse droit par droit de la convention prendrait beaucoup plus de temps, à la première étape et encore une fois à l'étape de l'évaluation complète. Ils avaient l'impression que la plupart des politiques et des projets de loi auraient des répercussions sur les enfants directement ou indirectement et que par conséquent, c'était un seuil très bas.
Ils se sont dit aussi que plutôt que d'utiliser toutes sortes d'outils et de ressources extrinsèques, ils pourraient créer un formulaire électronique à remplir de façon autonome. Ils pourraient faire référence à la convention. On y trouve donc la liste de tous ses articles, qui sont résumés et regroupés. On trouve aussi en référence des observations générales du Comité des droits de l'enfant, ainsi que des indicateurs de bien-être utilisés au Nouveau-Brunswick. Ils ont donc adapté un outil aux besoins de la province, sur la base d'un consensus sur les engagements que les gens étaient prêts à prendre. Ce processus semble avoir été très productif et a mis à contribution tous les organes du gouvernement.
La sénatrice Seidman : Existe-t-il des données sur l'incidence des ERDE? Autrement dit, existe-t-il des preuves tangibles qu'elles ont l'effet souhaité, qu'elles génèrent vraiment des changements dans les lois ou les politiques?
M. Bernstein : Toute l'information dont nous disposons est de nature purement descriptive pour l'instant, mais il y a une évaluation en cours. Lorsque le bureau indépendant du Défenseur des enfants et de la jeunesse, en partenariat avec le Bureau du Conseil exécutif du Nouveau-Brunswick a déterminé qu'ils avaient besoin d'experts-conseils techniques en formation et en conception de programme, ils ont fait appel à UNICEF Canada.
Pour l'évaluation et la recherche, ils ont fait appel à l'Université de Moncton. Les données demandées n'ont pas encore été produites, mais d'après nos discussions avec le responsable du Bureau du Conseil exécutif, qui était le champion du gouvernement pour les ERDE, elles ont une incidence. Elles changent l'élaboration des politiques. Elles donnent lieu à des modifications et à des suppressions.
Un exemple nous a été donné. Il y a eu tout un débat pour déterminer si les services à la petite enfance devraient relever du ministère du Développement social ou du ministère de l'Éducation. Grâce à cette évaluation, ils ont déterminé qu'ils devraient relever du ministère de l'Éducation.
Il y a d'autres exemples. Les résultats des ERDE ne sont pas rendus publics, ils demeurent donc confidentiels. Ils essaient d'en résumer un peu les conclusions, mais ils ne divulguent pas tous les détails des ERDE pour l'instant.
Mme Vandergrift : Lors de la conférence à laquelle nous avons participé, nous avons entendu parler d'une évaluation de 22 ERDE réalisées au Royaume-Uni, qui montrait que les ERDE avaient généré des modifications aux lois. Il est encore un peu trop tôt pour déterminer quelles en sont les incidences concrètes sur la vie des enfants. Une évaluation a été réalisée au Royaume-Uni, mais c'est encore une toute nouvelle façon de procéder. Il va y avoir de plus en plus d'évaluations de l'effet des ERDE avec le temps.
La sénatrice Seidman : Oui, parce qu'il faut toujours se demander si elles valent l'investissement, bien sûr. Une étude réalisée en Irlande a montré qu'il fallait mobiliser des ressources importantes pour mener ces évaluations. Il est donc extrêmement important de prouver qu'elles valent la peine d'être menées.
Cela me porte à vous demander si vous avez une idée de ce que coûte une ERDE. Combien de temps faut-il pour réaliser une évaluation? Quels sont les coûts supplémentaires qu'elle représente?
Mme Wolff : Je connais bien l'étude qui a été menée en Irlande. Encore une fois, dans le but d'être plus pragmatiques qu'idéalistes, je crois qu'ils se sont penchés sur une démarche qui tend plutôt vers l'idéalisme. L'auteur de cette étude a participé à notre symposium, et nous en avons discuté.
Je répète que dans bien des cas, l'analyse elle-même n'est pas rendue publique, si bien qu'il est difficile pour les chercheurs et les universitaires de l'évaluer. On n'obtient que des rapports gouvernementaux ici et là dans lesquels les gens se demandent s'il vaut la peine de réaliser des ERDE. Il y a deux façons de voir l'évaluation. Est-ce qu'elle influence vraiment l'élaboration des politiques? Et quelle en est l'incidence sur les jeunes? Je crois que personne encore n'en a vraiment étudié l'impact ultime. Il y a des analyses qui se font au pays de Galles, où l'on utilise ce type d'évaluation depuis quelques années, et nous sommes prêts à reconnaître qu'elles influencent la réflexion politique. Au Nouveau-Brunswick, on ne s'en sert que depuis un an. Vous en avez entendu parler ici et là, et on vous a dit que le coût de ces évaluations au Nouveau-Brunswick était minime. Le gouvernement n'a pas adopté de budget supplémentaire pour la conception de cet outil ou sa diffusion. Ce modèle de pragmatisme est admirable, il vaut la peine d'être reconnu partout dans le monde.
La réflexion progressive au sujet des répercussions sur les enfants se ressemble beaucoup d'un endroit à l'autre. Le Nouveau-Brunswick a retenu les meilleures idées et les a adaptées à son contexte assez efficacement, de manière à pouvoir les appliquer assez rapidement. Nous en tirons une leçon remarquable. Quand on est pragmatique, il est toujours utile de réaliser des analyses, mais il n'est pas nécessaire d'atteindre l'idéal qui était recherché en Irlande.
La sénatrice Andreychuk : Si ces évaluations sont réalisées au Nouveau-Brunswick et qu'elles ne sont pas rendues publiques, comment pouvons-nous savoir s'il s'agit d'un outil utile et du meilleur outil possible pour les enfants? Je ne comprends pas. En quoi les renseignements qu'elles contiennent sont-ils si délicats? Il peut être délicat d'étudier les enfants, mais pourquoi tant de confidentialité au sujet des modalités?
Mme Wolff : Il y aurait probablement une certaine volonté de rendre ces analyses publiques éventuellement. Mais pour commencer, les responsables de l'élaboration des politiques doivent apprendre à utiliser cet outil et n'ont pas nécessairement envie de se faire critiquer sur l'utilisation d'outils d'analyse qu'ils commencent à peine à maîtriser.
Idéalement, le processus devrait être transparent. Il serait probablement utile aussi d'aller chercher l'appui des groupes touchés par une proposition pour voir comment les intérêts ont été analysés. Ainsi, même quand la décision finale ne nous plaît pas, on pourrait savoir ce qui a été pris en considération, ce qui fournirait une meilleure base de discussion. Au Nouveau-Brunswick, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement, et ses dirigeants sont très enclins à en discuter avec leurs homologues des autres provinces. C'est anecdotique, mais cela signifie que les politiques auxquelles l'ERDE s'applique subissent son influence.
Au pays de Galles, il y a des rapports publics sur la façon dont ces évaluations s'appliquent aux politiques, mais l'analyse elle-même n'est pas transparente pour autant, bien que ce serait souhaitable.
Mme Vandergrift : Au Nouveau-Brunswick, la démarche relève du Cabinet. Je pense que nous savons bien qu'à l'échelle fédérale, quand une mesure relève du Cabinet, elle est généralement tenue confidentielle. Nous demandons souvent de l'information. Nous avons demandé aux fonctionnaires du ministère de la Justice du Canada de nous dire quel genre d'évaluations il réalise, mais cela ne les rend pas publiques pour autant. Nous nous attendions à ce que ces évaluations ne soient pas jugées aussi délicates, mais elles ne sont pas rendues publiques non plus. Cela fait partie du processus.
Dans les pays où ces évaluations relèvent des bureaux de défense des enfants, elles ont plus souvent tendance à être publiques. Elles comportent un volet éducatif, comme certaines mesures gouvernementales qu'on trouve ailleurs. Les bureaux de défense des enfants font souvent des ERDE publiques.
M. Berstein : Si je peux me permettre une autre observation, le Comité des droits de l'enfant de l'ONU a publié des déclarations sur les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant dans l'Observation générale no 5 sur les mesures d'application générale et l'Observation générale no 14 sur l'intérêt supérieur de l'enfant. Le comité encourage vivement les pays à réaliser des évaluations transparentes et à les rendre publiques, ce qui pourrait susciter des débats très sains.
Quand les parlementaires examinent un projet de loi, une évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant leur est fournie en annexe. Lorsque les gens viennent témoigner devant les comités parlementaires, ils peuvent réagir aux ERDE. Une solution intermédiaire consisterait à fournir un résumé de l'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant afin qu'on puisse au moins cerner les principaux éléments de réflexion qui ont mené à une conclusion.
Il y avait là divergence d'opinions entre le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse, qui favorisait une plus grande transparence, et le Bureau du Conseil exécutif, qui appuyait l'orientation retenue. Ils n'entrevoyaient pas la possibilité de rendre ces évaluations plus transparentes à court terme. Leurs représentants nous ont dit qu'ils ne se sentaient pas prêts à faire le saut tout de suite.
La sénatrice Seidman : Je suppose, madame la sénatrice Andreychuk, que cette question revient à mon observation selon laquelle nous aurions une occasion en or d'évaluer les répercussions tangibles de ce genre d'outil.
C'est vraiment dommage qu'on n'ait pas de données concrètes à cet égard, mais ils ne seront pas prêts à nous en fournir pour l'instant. J'y verrais pourtant là une occasion énorme.
M. Berstein : N'oubliez pas que l'étude réalisée avec l'Université de Moncton sur ces évaluations se poursuit, même si les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant en tant que telles ne sont pas rendues publiques pour l'instant.
La sénatrice Hubley : Je vous remercie de votre exposé de ce matin.
Vous avez mentionné à maintes reprises les différents ordres de gouvernement : municipal, provincial et fédéral. Je me demande si l'on pourrait inclure les conseils dans ce modèle de gouvernance, c'est-à-dire les organes de gouvernance des peuples autochtones.
Savez-vous de source sûre s'il y a des chefs et des conseils qui ont examiné le modèle des ERDE et qui ont décidé de les intégrer à leur structure de gouvernance eux aussi, qu'il s'agisse du modèle du Nouveau-Brunswick ou d'autres modèles au pays? Je pense qu'il y en a un autre à Edmonton.
M. Berstein : Pas pour l'instant. Il faut garder en tête que ce genre d'évaluation peut être très utile pour analyser les différentes répercussions d'une mesure sur différents groupes d'enfants.
Si l'on veut évaluer les répercussions d'une mesure sur les enfants autochtones, il faut examiner les articles de la convention, comme l'article 2, qui porte sur le droit à la non-discrimination, et l'article 30, qui protège le droit au respect de la culture, du patrimoine et des traditions indigènes. Il y a aussi l'Observation générale no 11, qui porte sur les droits des enfants autochtones. Toutes ces considérations pourraient mener les législateurs à changer d'orientation ou à accepter des mesures mieux adaptées aux enfants autochtones.
Pour avoir passé du temps dans l'Ouest canadien, je trouve cette conversation extrêmement importante pour susciter l'engagement des leaders autochtones de ces groupes. Ce sont des discussions nécessaires, mais qui n'ont pas encore eu lieu à ce niveau.
La sénatrice Martin : Je vous remercie infiniment de votre exposé. Je l'ai écouté attentivement, et comme vous le dites, il ne s'agit que d'un outil. La métaphore s'applique ici. Nous nous penchons sur des outils utilisés dans certains contextes, et ce qui est utilisé dans l'un ne s'applique pas nécessairement dans l'autre.
Vous nous avez parlé de son utilisation par le gouvernement du Nouveau-Brunswick, et je vois très bien comment il pourrait s'appliquer à l'échelle provinciale au ministère du Développement de l'enfance et de la famille de la Colombie- Britannique, par exemple, où les politiques et les programmes sont très axés sur les familles et les enfants directement touchés.
Je serais curieuse de savoir si cet outil pourrait être d'une quelconque efficacité pour le gouvernement fédéral à l'échelle nationale. Reprenons l'exemple du crédit d'impôt pour la condition physique que nous a donné Mme Vandergrift. Vous avez dit que si on avait utilisé ce modèle, le crédit accordé aurait été différent ou meilleur. L'objectif du crédit d'impôt pour la condition physique était de pousser les jeunes à faire plus d'activité physique. Nous nous inquiétons du taux d'obésité. Pour atteindre cet objectif, je pense que le crédit d'impôt pour la condition physique est un incitatif qui a porté fruit. Je serais curieuse de savoir en quoi l'utilisation de cet outil l'aurait rendu différent ou plus efficace.
Mme Vandergrift : Les recherches nous montrent que cette mesure ne rapporte rien aux familles à faible revenu. Les familles à faible revenu ont elles aussi besoin d'aide pour inscrire leurs enfants à des activités sportives et réduire le taux d'obésité. Si on y avait pensé plus tôt, nous aurions peut-être pu ajouter un volet au programme pour qu'il s'applique à un plus large éventail de familles.
Au sujet de votre question sur le gouvernement fédéral, par exemple, nous savons que les changements apportés à la citoyenneté peuvent toucher les enfants. Certains changements législatifs ont été apportés à la suite des questions que nous avons soulevées sur les droits de l'enfant. Il serait bien que ce genre de considération soit pris en compte dès le départ. L'immigration et les affaires autochtones sont du ressort du gouvernement fédéral et ont des répercussions énormes sur les enfants, qu'importe la province où ils vivent.
Je pense aussi que les ERDE pourraient nous aider beaucoup lorsqu'il y a chevauchement de compétences entre le fédéral et le provincial. L'un des plus grands enjeux nommés dans ce rapport est le sort des enfants qui échappent aux services de protection de la jeunesse. Nous savons qu'un fort pourcentage d'entre eux aboutissent dans le système de justice pénale et que les deux systèmes sont reliés. Encore là, si nous adoptions une perspective plus globale, si nous évaluions les répercussions sur les droits de l'enfant, nous pourrions peut-être prévenir certaines dérives.
La sénatrice Martin : Dans un État comparable au nôtre par sa taille, sa complexité et sa diversité, les États-Unis, nous avez-vous dit que le gouvernement fédéral utilisait un outil du genre?
Mme Vandergrift : Non.
La sénatrice Martin : Avez-vous des exemples à nous donner?
Mme Vandergrift : Il y a beaucoup de zones urbaines aux États-Unis.
La sénatrice Martin : Je cherche à savoir s'il y a un État comparable au nôtre qui utilise ce genre de modèle efficacement.
Mme Vandergrift : Le Royaume-Uni.
Mme Wolff : La Suède et la Belgique ont probablement été parmi les premiers pays à l'adopter. Ils l'appliquent à tous les domaines stratégiques à l'échelle nationale. Ils l'appliquent à la planification des transports et à la prise de décisions financières. Est-ce qu'une compression budgétaire va toucher les enfants de manière disproportionnée? Devraient-ils être les tout derniers à subir des compressions? Ils utilisent ce modèle en finance. Aux États-Unis, nous savons seulement que l'un des États les plus pauvres est le Tennessee et qu'on utilise ce genre d'évaluation dans la ville de Memphis pour évaluer les politiques. Dans beaucoup d'autres pays, on les utilise à toute sorte de niveaux nationaux et sous-nationaux.
La sénatrice Martin : Je pense que c'est un outil qui peut être efficace aux échelles municipales et provinciales, et vous avez cité en exemple le Nouveau-Brunswick. J'aimerais d'ailleurs vous faire part d'une réflexion. C'est un élément essentiel : on voulait profiter de l'efficacité de cet outil dans certains contextes, mais pas nécessairement dans un contexte plus vaste. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de vos réponses.
La sénatrice LeBreton : Je vous remercie beaucoup de comparaître ici aujourd'hui. Le sénateur Eggleton a raison. Lorsqu'une question est soumise au Cabinet, il y a toutes sortes de conventions et de chartes qui s'appliquent. Il faut toujours veiller à respecter la Charte.
Sur le plan pratico-pratique, nous avons une population de 36 millions de personnes réparties sur un vaste territoire. Elle se compose en grande partie de personnes qui ont choisi de venir vivre au Canada, des personnes de différentes races et de différentes appartenances culturelles et religieuses. Nous avons une population autochtone importante. La plupart des régimes de santé et de bien-être ou d'éducation qu'on trouve au pays relèvent des gouvernements provinciaux. Vous nous donnez l'exemple du Nouveau-Brunswick, qui suit un modèle semblable à celui du gouvernement fédéral par son conseil exécutif, qui se compare au Cabinet du gouvernement fédéral.
Par où commencer dans les faits et que fait-on de la protection des renseignements personnels et des droits des parents, des personnes ou des communautés culturelles qui pourraient avoir l'impression de subir les effets négatifs des mesures que vous proposez? Du simple point de vue pratique, je pense qu'il existe de bons outils et de bons modèles, comme vous l'avez mentionné, parce que vous en avez nommé quelques-uns, mais je ne vois pas beaucoup de preuves que nous tenons compte de la réalité structurelle pratique de notre pays, où il y a un gouvernement fédéral, ainsi que des gouvernements autochtones, provinciaux et territoriaux et des administrations municipales.
Si l'on tient compte de tout cela, on se rend compte que la pente est très abrupte. Avez-vous des modèles à nous proposer qui permettraient à tous de partir d'une réflexion commune, à tout le moins?
Mme Wolff : Il est toujours bon d'avoir des exemples. Je ne voudrais pas mettre l'accent sur les lois dont les défenseurs des enfants ont dit après-coup qu'elles ne respectaient pas les droits de l'enfant ou qu'elles avaient des répercussions négatives sur les enfants.
Je trouve qu'il y a eu un débat intéressant à un comité de la Chambre des communes au sujet des prestations de maternité lorsque la famille adopte un enfant. En ce moment, les règles sont différentes pour les enfants adoptés et pour les enfants biologiques. Ils n'ont pas droit au même niveau de prestations, malgré les arguments qui ont été présentés devant le comité selon lesquels ces enfants ont tout autant besoin de socialiser et de créer un lien d'attachement avec leur famille et qu'ils ont souvent des besoins spéciaux dans leur cheminement scolaire ou autre en raison de toutes les difficultés qu'ils ont vécues. Le débat portait surtout sur la mère et non sur l'enfant. On disait qu'une mère biologique ayant vécu un accouchement biologique avait plus besoin d'un congé que l'autre. Le débat ne mettait pas l'accent sur l'enfant, sur ces deux groupes d'enfants, biologiques et adoptés, qui ont des besoins différents, mais très importants. Certains ont dit qu'il ne fallait pas les traiter différemment, faire de la discrimination, comme on pourrait le dire, mais nous concentrer davantage sur l'enfant et ses besoins plutôt que sur les besoins de la mère pour établir les prestations de maternité. C'était une merveilleuse occasion. Si l'on avait procédé à une évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant, notre conversation sur la structure de ce genre de programme aurait été toute autre. C'est une occasion ratée. Cela aurait été l'occasion rêvée de penser aux enfants et à leurs besoins en premier, sous l'angle de diverses dispositions législatives, dont celles sur les droits des enfants adoptés et le principe de non- discrimination. On ne peut pas traiter différents groupes d'enfants différemment si cela a des répercussions négatives sur certains groupes plutôt que d'autres.
La sénatrice LeBreton : Je présume qu'on se demande qui a raison à cet égard. Mettez-vous la priorité sur une série d'initiatives fédérales, ou plutôt sur les services et les programmes provinciaux dont la plupart ont des répercussions directes sur les familles et les enfants, ou encore sur les municipalités qui offrent des services directs aux enfants et aux familles? C'est vraiment ce qui est au cœur de la question. À mon avis, c'est le cœur du problème. La diversité du Canada est si grande, qu'il s'agisse des opinions, des différentes cultures ou des religions, que je ne sais pas comment on peut appliquer un ensemble d'outils et de modèles sans porter atteinte aux droits à la vie privée des enfants, bien que tout ce que nous faisons devrait profiter à nos enfants, mais il y a aussi les coutumes des groupes communautaires, les parents; comment résoudre la quadrature du cercle?
Mme Vandergrift : Je ne pense pas qu'il faut que ce ne soit qu'un seul ordre d'administration, et si l'on craint que ce soit trop, on peut commencer par des mesures législatives ou des initiatives politiques, peut-être une.
À titre d'exemple, lorsque l'utilisation des pistolets Taser a fait l'objet de débats en comité parlementaire, nous avons attiré l'attention des parlementaires sur la question suivante : examinez-vous les répercussions différentielles sur les moins de 18 ans? Les répercussions de leur utilisation sur des adolescents sont très différentes. On n'avait pas soulevé la question. Les parlementaires se sont penchés sur la question par la suite. Les répercussions de l'utilisation de ces pistolets sur des jeunes sont très différentes.
On examine donc la question sous cet angle. Si c'est intégré dans le processus d'élaboration des politiques, alors on examinera les choses sous cet angle. Une bonne façon de commencer consisterait peut-être à en choisir une partie, à bien faire les choses et à montrer les avantages.
Je ne crois pas qu'il doit s'agir d'un ordre d'administration en particulier. Tous les gens qui travaillent avec des enfants vous diront que ce sont souvent les liens entre les programmes fédéraux et provinciaux qui fonctionnent ou qui créent des problèmes pour les enfants.
M. Bernstein : Je crois que si tous les ordres d'administration faisaient ce travail, comme Mme Vandergrift le dit, nous en sortirions tous gagnants, et ce sont les enfants qui en bénéficieraient le plus.
De plus, il y aurait ainsi un bon mécanisme de coordination et de communication pour les pratiques exemplaires et on saurait quels outils semblent efficaces, quels volets sont les mieux examinés.
Par exemple, nous avons des mesures législatives sur la cyberintimidation. Les provinces vont dans différentes directions et leurs mesures ne sont pas axées sur les mêmes aspects. Certaines reposent sur des choix en matière d'éducation. Dans d'autres cas, comme en Nouvelle-Écosse, on envisage de prendre des sanctions contre les parents qui savent ou qui devraient savoir que leurs enfants se livrent à la cyberintimidation.
Comme votre comité sénatorial l'a indiqué dans son rapport La cyberintimidation, ça blesse!, parfois, en essayant de protéger les enfants contre la cyberintimidation, le danger et la discrimination aux termes des articles 19 et 2, nous pouvons adopter des politiques qui ont de mauvaises répercussions sur d'autres enfants qui sont peut-être spectateurs ou intimidateurs, les suspendre ou les expulser de l'école, et ne pas respecter leur droit à l'éducation.
Le processus des ERDE permet de déterminer où se situent différents groupes d'enfants dans la question de politique. Quel est le juste équilibre? Essayons de mesurer les effets qui produiront les meilleurs résultats pour tous ces enfants.
Ce qui se passe en grande partie, compte tenu du cadre constitutionnel de notre pays, c'est qu'il y a cette fragmentation entre les ordres fédéral, provincial et municipal. Il faut une meilleure harmonisation. Si différents ordres d'administration effectuent des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant, communiquent leurs connaissances et s'appuient sur ce que font les autres, ce sera plus avantageux pour tous les enfants.
La sénatrice LeBreton : Dans le cadre de votre recherche, menez-vous un grand nombre de consultations publiques, ou vous appuyez-vous davantage sur les spécialistes du domaine? Consultez-vous la population en général, tenez-vous des rencontres publiques dans différentes collectivités au pays, ou vous en remettez-vous surtout aux spécialistes du milieu universitaire?
Mme Wolff : Concernant justement l'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant, nous avons tenu un symposium réunissant 150 participants, je crois, soit des représentants de gouvernements, des ONG et des chercheurs, pour en discuter, car, encore une fois, tout comme vous, nous avions beaucoup de questions et nous voulions permettre à un certain nombre de différents groupes d'intérêt de discuter des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant.
Quant à savoir à qui il incombe de s'en charger, à notre avis, tous les ordres d'administration ont le devoir de respecter les droits des enfants et d'en établir. Ce sont eux qui doivent les élaborer et y recourir, et s'ils sont également responsables des politiques, alors ils doivent déterminer ce qui fonctionnera pour eux dans leur réflexion sur les répercussions sur les enfants.
Il est important que ce soit simplement un ensemble de questions sur les répercussions que la proposition aura sur les enfants, peu importe de quelle proposition il s'agit. C'est une façon de réfléchir aux questions fondamentales d'une façon structurée, et non par hasard ou grâce à la bonne volonté d'un parlementaire qui soulève une question en comité ou en Chambre. C'est une façon structurée de se soucier des enfants.
Le sénateur Eggleton : Après ma dernière question, monsieur Bernstein, vous avez parlé de l'Ontario et du ministère responsable des services à l'enfance qui font les évaluations des répercussions, mais vous avez fait la distinction entre cela et ce qui se passe au Nouveau-Brunswick sur la base de la question des droits; je comprends cela.
Toutefois, mis à part l'approche du principe des droits, à votre avis, quelle est la différence entre ce que fait l'Ontario et ce que vous aimeriez voir se concrétiser par les ERDE ou ce que le Nouveau-Brunswick prévoit faire?
M. Bernstein : Je pense qu'il est important de mentionner que je n'ai pas vu le modèle d'évaluation des répercussions sur les droits de l'enfant de la province de l'Ontario, mais lorsque nous avons discuté avec des hauts représentants du gouvernement, on a reconnu qu'il s'agissait d'une forme d'évaluation des répercussions sur les enfants, mais pas vraiment d'évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant.
Je vais vous donner un autre exemple. J'ai été défenseur des enfants en Saskatchewan pendant cinq ans, et je posais souvent des questions aux représentants du gouvernement pour essayer de découvrir dans quelle mesure la politique, le programme ou la mesure qu'on proposait allait contribuer à défendre l'intérêt supérieur des enfants. On se retrouve parfois dans une impasse. Eh bien, évidemment, nous croyons que ce sera bon pour les enfants, qu'on obtiendra de meilleurs résultats, et qu'il y aura des répercussions positives, mais parce que nous n'avions pas de cadre commun, nous ne pouvions pas analyser ce que signifie vraiment « l'intérêt supérieur » compte tenu des différents droits sur lesquels une proposition peut avoir des répercussions. Parfois, cela provoquait une impasse.
S'ils travaillent à partir du même cadre que moi, en tant que défenseur des enfants et des jeunes indépendant, les choses prennent une nouvelle direction. On peut alors comprendre — et dire, « vous savez ce que les jeunes qui viennent à mon bureau me disent sur la question et le type de politique? ». « Ils devraient avoir une certaine influence, car ce sont eux qui vivent les répercussions. »
La discussion est alors complètement différente lorsqu'on analyse ce que signifie concrètement « intérêt supérieur » en ce qui a trait à ce que suscitera la proposition. Il y a une très nette différence entre les évaluations des répercussions sur l'enfant et les évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant.
Le sénateur Eggleton : J'ignorais que vous étiez le défenseur des enfants en Saskatchewan. C'est formidable. Combien de provinces ou territoires ont des défenseurs des enfants?
M. Bernstein : Il y en a dans toutes les provinces, excepté à l'Île-du-Prince-Édouard. Le Yukon compte un défenseur des enfants et des jeunes indépendant, et le Nunavut vient de se doter de mesures législatives. L'autre jour, j'étais à l'aéroport d'Ottawa, et dans le Globe, il y avait un appel de candidatures pour le poste de représentant des enfants et des jeunes au Nunavut.
Le seul territoire et la seule province qui ne comptent pas de défenseur des enfants et des jeunes indépendant, ce sont les Territoires du Nord-Ouest et l'Île-du-Prince-Édouard.
Mme Vandergrift : Il est important de ne pas oublier que leurs mandats varient.
Le sénateur Eggleton : D'accord, mais que disent-ils au sujet des ERDE? Connaissons-nous leur point de vue à cet égard?
M. Bernstein : Il y a également un réseau, soit le Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes, qui permet aux défenseurs des enfants et des jeunes des provinces et des territoires de se réunir régulièrement et de tenir des conférences. Des discussions très constructives ont eu lieu. Pour ce qui est de la suite des choses, j'ai discuté avec bon nombre de défenseurs qui appuient la mise en application des évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant.
La présidente : Pour revenir sur ce qu'a dit le sénateur Eggleton, moi et plusieurs membres du comité travaillons constamment pour qu'il y ait un commissaire national à l'enfance. Je sais que dans votre rapport de 2011, Des principes à la réalisation, vous avez recommandé la création d'un poste de commissaire ou défenseur national à l'enfance pour régler les questions des droits de l'enfant relevant de la compétence fédérale.
Si nous avions un commissaire national à l'enfance, en quoi cela favoriserait-il l'application de l'ERDE, s'il y a lieu?
Mme Wolff : Pour ce qui est d'un cadre de gouvernance pour les enfants — divers mécanismes qui nous permettent de réfléchir aux répercussions que nous décisions ont sur les enfants —, un défenseur indépendant joue un certain rôle, et l'un des plus grands avantages, c'est probablement, encore une fois, que l'on connaît davantage les conséquences que différentes décisions peuvent avoir sur les enfants.
Toutefois, cela se passe parfois après qu'une proposition a été présentée, durant les discussions. Vous voyez, dans certains territoires ou provinces, on tente d'obtenir ce type de conseils — il y a un bureau qui ne fait que tenir compte des droits des enfants. Le bureau a une idée globale et des connaissances sur les enfants et il est plus à l'écoute que bien des ministères qui n'ont pas ce type de latitude. C'est un bureau qui fait des enfants sa priorité qui doit communiquer des connaissances sur les enfants aux différents ministères et aux groupes d'élaboration de politiques. Ils sont à l'écoute, surtout au début, et ils consultent le défenseur indépendant, comme nous pouvons l'observer ailleurs, comme en Angleterre, où l'on semble favoriser la consultation entre, d'une part, le gouvernement, lorsqu'il crée une politique importante qui peut avoir des répercussions sur les enfants et, d'autre part, le commissaire à l'enfance, de sorte qu'on évite un débat public et les critiques après coup. Il s'agit d'un système complémentaire.
Encore une fois, pour en revenir aux évaluations des répercussions sur les droits de l'enfant, je dirais que c'est quelque chose que le gouvernement devrait avoir, en plus des devoirs en matière de politique et de droits des enfants. Cela devrait être fait dès le départ, de façon beaucoup plus constructive et préventive que de laisser un commissaire à l'enfance régler les problèmes plus tard.
M. Bernstein : L'Australie a un cadre constitutionnel similaire à celui du Canada. Elle a des commissaires à l'enfance depuis bon nombre d'années, mais elle n'avait pas de commissaire national. On en a nommé un récemment dans ce pays.
Sur le plan des intérêts, du bien-être et des droits des enfants de tout le pays, lorsque j'étais défenseur provincial, j'avais souvent l'impression que les droits des enfants et leurs intérêts tombaient dans les mailles du système, car je n'avais pas d'homologue fédéral à Ottawa, surtout pour l'examen des intérêts et des droits des enfants autochtones, qui traversait les compétences provinciales. Des enfants touchés par des questions d'immigration craignaient d'être détenus. Des jeunes avaient des démêlés avec le système de justice pénale pour les adolescents. Comment aller au fond des choses au-delà des frontières de sa province?
Cela permettrait à un commissaire national à l'enfance de travailler en étroite collaboration avec les défenseurs à l'enfance et à la jeunesse des provinces et des territoires. Je me demandais souvent ceci : s'il est maintenant courant que les enfants puissent bénéficier des services d'un défenseur dans une province et un territoire, pourquoi ne pourraient-ils pas profiter des services d'un défenseur fédéral, surtout pour les questions qui relèvent du gouvernement fédéral? Un commissaire national à l'enfance pourrait parler en leur nom, leur donner un moyen de parler des répercussions que les questions fédérales ont sur eux et, pour les enfants qui ne sont pas capables de se défendre, recommander les voies à suivre qui permettraient de respecter leurs droits de façon plus efficace.
La présidente : Monsieur Bernstein, madame Vandergrift et madame Wolff, je vous remercie de votre présence. Vous nous avez aidés à mieux comprendre la question. Vous êtes toujours tellement obligeants, vous répondez à nos demandes, et vous aidez le comité dans ses travaux. Je vous remercie au nom des membres du comité.
Merci beaucoup. Le comité s'ajourne jusqu'à la semaine prochaine.
(La séance est levée.)