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RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 11 - Témoignages du 29 septembre 2014


OTTAWA, le lundi 29 septembre 2014

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, auquel a été renvoyé le projet de loi S-201, Loi sur la non- discrimination génétique, se réunit aujourd'hui, à 16 h 5 pour étudier le projet de loi.

La sénatrice Salma Ataullahjan (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Honorables sénateurs, bienvenue à la 18e séance du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, en cette deuxième session de la 41e législature du Parlement.

Le Sénat nous a donné le mandat d'examiner les questions liées aux droits de la personne au Canada et à l'étranger. Malheureusement, la présidente du comité, la sénatrice Mobina Jaffer, a un empêchement ce soir. Ce sera donc moi, Salma Ataullahjan, qui la remplacerai. En tant que vice-présidente du comité, j'ai l'honneur de vous accueillir à notre séance d'aujourd'hui. Avant d'aller plus loin, je demanderais à mes collègues de se présenter.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de Toronto.

Le sénateur Munson : Jim Munson. J'habite en Ontario, mais mon coeur est au Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Nancy Ruth : Nancy Ruth, de la belle ville de Toronto.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.

La vice-présidente : Nous entamons aujourd'hui nos audiences sur le projet de loi S-201, Loi sur la non- discrimination génétique, un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le sénateur James Cowan, leader de l'opposition au Sénat.

J'aimerais tout d'abord souhaiter la bienvenue au parrain du projet de loi, l'honorable sénateur James Cowan, et à sa conseillère politique, Barbara Kagedan. Je crois que vous avez une déclaration à faire avant de répondre aux questions du comité.

L'honorable James Cowan, parrain du projet de loi : Comme la présidente l'a indiqué, Barbara Kagedan, conseillère principale en politiques de mon bureau, est ici aujourd'hui. Je vais donc pouvoir répondre aux questions faciles et je lui laisserai le soin de répondre aux plus complexes. Elle a beaucoup travaillé sur ce projet et possède une grande expérience dans le domaine, ce qui devrait être utile à la discussion. Merci.

Chers collègues, je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour lancer cette première séance sur mon projet de loi, le projet de loi S-201, Loi sur la non-discrimination génétique. Le but du projet de loi est simple : actualiser notre législation, comme cela a été fait dans bon nombre d'autres nations occidentales, de façon à ce que les Canadiens puissent profiter des extraordinaires avancées réalisées dans le domaine du dépistage génétique sans craindre d'être victimes de discrimination; car en ce moment, ils n'ont pas cette chance. Permettez-moi de vous l'expliquer.

Les chercheurs ont identifié et continuent à identifier des gènes associés à des maladies précises, et chaque découverte offre de nouvelles possibilités de traitement, et dans certains cas, permet même de prévenir l'apparition de la maladie.

Au moment de rédiger mes notes l'autre jour, il y avait 20 000 tests pour dépister les gènes associés à près de 4 600 maladies. Barbara a vérifié les données sur le site web avant d'arriver aujourd'hui, et en quelques jours seulement, le nombre de tests disponibles avait grimpé à 23 185 pour 4 975 maladies.

En tout juste 17 mois, le nombre de tests génétiques a décuplé. Pour les Canadiens, les avantages peuvent s'avérer très concrets et d'une importance capitale. De plus en plus, sachant qu'une personne présente une prédisposition génétique à une maladie quelconque, il est possible de prendre des mesures pour réduire les risques d'apparition de la maladie.

L'attention du monde s'est tournée vers Angelina Jolie lorsqu'elle a raconté son histoire. Elle a découvert qu'elle était porteuse de la mutation du gène BRCA1. Les risques de développer un cancer du sein sont plus élevés de 87 p. 100 chez les femmes qui en sont porteuses. Forte de cette information, Mme Jolie a eu recours à la chirurgie préventive. Ses risques de développer un cancer du sein sont passés de 87 p. 100 à moins de 5 p. 100. Elle avait vu sa mère souffrir et mourir du cancer du sein. Après l'intervention, elle a déclaré dans le New York Times : « Je peux dire à mes enfants qu'ils n'ont plus à craindre que je meure du cancer du sein. »

Depuis que cette histoire est parue, le nombre de femmes dans le monde, y compris au Canada, voulant se renseigner au sujet du dépistage génétique a monté en flèche. Les chercheurs du Odette Cancer Centre, à l'Hôpital Sunnybrook de Toronto, ont décidé de quantifier « l'effet Angelina », comme on l'a surnommé. Ils ont découvert que le nombre de femmes référées au dépistage génétique avait grimpé de 90 p. 100 après la publication de l'histoire de Mme Jolie, et le nombre de femmes désignées comme porteuses des gènes BRCA avait fait un bond de 110 p. 100, passant de 29 à 61 patientes. Ce n'est là qu'un bref aperçu des répercussions constatées dans une seule clinique.

Différents tests génétiques permettent de dépister d'autres maladies, et les effets pour la santé sont tout aussi extraordinaires. Et les histoires dramatiques ne manquent pas non plus.

Mais à l'heure actuelle, avant de se soumettre à un dépistage génétique, les Canadiens doivent s'arrêter un moment et envisager la possibilité qu'ils seront peut-être victimes de discrimination si jamais ils découvrent qu'ils sont porteurs d'une mutation génétique associée à une maladie. Au Canada, contrairement à la majorité des pays occidentaux, aucune protection ne leur est offerte, pas plus au niveau fédéral que provincial. C'est ce qu'on veut corriger avec le projet de loi S-201.

En ce moment, rien n'empêche une compagnie d'assurance, un employeur ou un employeur potentiel d'exiger les résultats des tests génétiques auxquels une personne s'est soumise, puis d'utiliser ces résultats à son détriment.

Le mois dernier, la chaîne CBC Radio 2 a consacré une émission de sa tribune téléphonique appelée « Ontario Today » au dépistage génétique. On demandait aux Canadiens s'ils accepteraient de se soumettre à un test génétique, et sinon, pourquoi. J'ai eu le plaisir de participer à cette émission.

Un auditeur nous a expliqué qu'on lui avait diagnostiqué un trouble cardiaque en 1999, une cardiopathie hypertrophique. Il a accepté de se soumettre à un test génétique, pour apprendre qu'il était effectivement porteur d'un gène associé à cette maladie. Sa famille a également subi des tests génétiques. Sa mère, alors dans les 70 ans avancés, était porteuse du gène, mais n'avait jamais éprouvé de problèmes cardiaques. Même chose pour son frère, qui avait dans la fin quarantaine. Les tests effectués sur ses deux filles ont révélé que l'une d'elles était également porteuse. Il est possible qu'elle ne souffre jamais de la maladie, comme sa grand-mère et son oncle, mais parce que le dépistage a révélé qu'elle était porteuse, elle s'est retrouvée non assurable à l'âge de 19 ans. L'auditeur nous disait que sa fille ne pourrait jamais lancer sa propre entreprise; dans notre société, c'est une des nombreuses choses qui exigent de détenir une assurance vie. Ses choix de vie sont maintenant dictés par la discrimination génétique.

L'auditeur avait depuis subi une chirurgie à coeur ouvert et est semble-t-il guéri aujourd'hui. Le trouble a été corrigé, et selon ses médecins, il est très peu probable qu'il refasse surface. Mais il est, lui aussi, non assurable et il va le demeurer.

Chers collègues, c'est inacceptable. La fille de ce monsieur pourrait ne jamais développer la maladie, et si jamais elle la développait, peut-être qu'elle aussi pourrait être guérie grâce à la chirurgie. Aujourd'hui, elle regrette de s'être soumise au test, parce que les résultats l'empêchent de faire sa vie comme elle l'entend. Et ce n'est pas la maladie qui est en cause, mais bien la discrimination génétique dont elle est victime.

Et ce n'est pas un cas isolé. Une conseillère en génétique avait été invitée à participer à l'émission. Elle a dit à l'animatrice, Rita Celli, que c'était un scénario très commun et qu'elle et ses collègues en discutent régulièrement avec les patients. Elle nous a expliqué que certains patients décident alors de reporter le dépistage génétique — une décision qui a des répercussions sur le plan médical.

Chers collègues, bien des raisons personnelles peuvent pousser une personne à refuser de se soumettre à un dépistage génétique, y compris la simple raison « je ne veux pas le savoir ». Cependant, la discrimination génétique ne devrait pas être un facteur influant une telle décision. Aucun Canadien ne devrait avoir à choisir entre subir un test médical qui pourrait l'aider à mener une vie plus saine, et se passer du test pour être assurable ou pour trouver et garder un emploi. Des pays des quatre coins du monde ont adopté des lois empêchant une telle discrimination, et il est temps que le Canada fasse de même.

En effet, plusieurs pays envisagent de donner accès à certains tests génétiques à l'ensemble de leurs citoyens. C'est dire à quel point certains sont convaincus des bienfaits potentiels pour la santé. Un débat fait rage actuellement aux États-Unis concernant les avantages et les désavantages d'un programme universel de dépistage. Un débat semblable a aussi été engagé en Israël. Israël peut se permettre un tel débat, puisqu'il a adopté une loi sévère interdisant la discrimination génétique, et les contrevenants peuvent notamment écoper de sanctions pécuniaires et de peines d'emprisonnement.

Un programme universel de dépistage est-il souhaitable? Je ne le sais pas. Mais ce débat n'a vraiment pas sa place au Canada, car nous n'avons pas de protection claire et efficace contre la discrimination génétique. Il serait donc plus qu'irresponsable de mettre en place un programme de dépistage universel.

Pour remédier à la situation, je propose d'adopter le projet de loi S-201. Il se divise en trois parties : premièrement, il s'agit de mettre en œuvre une nouvelle loi sur la non-discrimination génétique; deuxièmement, il vient modifier le Code canadien du travail; et troisièmement, il modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne. J'aimerais faire le survol de chacune de ces parties avec vous.

À mon avis, la nouvelle loi sur la non-discrimination génétique est le point central du projet de loi. Elle prévoit que nul ne peut obliger une personne à subir un test génétique ou à communiquer les résultats d'un test génétique comme condition requise pour lui fournir des biens ou services; pour conclure ou maintenir un contrat ou une entente avec elle; pour offrir ou maintenir des modalités particulières d'un contrat ou d'une entente avec elle. De la même manière, nul ne peut refuser d'exercer ces activités à l'égard d'une personne au motif qu'elle a refusé de communiquer les résultats d'un test génétique.

La loi prévoit des exceptions pour les médecins et tout autre professionnel de la santé qui fournissent des soins médicaux à une personne; une autre exception permet aussi à une personne de participer à de la recherche médicale ou scientifique.

Quiconque contrevient aux dispositions de la loi commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité : par procédure sommaire, une amende maximale de 300 000 $ et un emprisonnement maximal de 12 mois ou l'une de ces peines; et par mise en accusation, une amende maximale de 1 million de dollars et un emprisonnement maximal de 5 ans, ou l'une de ces peines.

Dans son allocution à la Chambre sur le projet de loi, notre collègue, la sénatrice Frum, se demandait si ces sanctions n'étaient pas excessives. Je sais que cela peut sembler élevé, mais je précise qu'il s'agit de sanctions maximales qu'un tribunal ne pourrait appliquer que dans les cas qui le justifient. Ce projet de loi ne prévoit pas de sanctions minimales obligatoires.

Je note par ailleurs que la loi antipourriel du gouvernement, que le Sénat a adoptée en décembre 2010 et qui est entrée en vigueur cet été, prévoit des sanctions de l'ordre de 1 million de dollars pour un particulier, et de 10 millions de dollars pour une entreprise qui envoie des courriels indésirables. S'il est justifié d'appliquer de telles sanctions à l'envoi de courriels indésirables, j'estime qu'il serait illogique de prévoir des sanctions maximales beaucoup moins élevées lorsqu'il est question d'accéder indûment au code génétique d'une personne ou d'obliger quelqu'un à subir un test génétique.

La deuxième partie du projet de loi modifie le Code canadien du travail afin de protéger les employés et d'empêcher tout employeur ou employeur potentiel d'obliger une personne à subir un test génétique ou à divulguer les résultats d'un test génétique précédent. Faute de temps, je n'entrerai pas dans les détails pour ces dispositions, mais nous pourrons en discuter lors de la période de questions et réponses après ma déclaration.

La troisième et dernière partie du projet de loi modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne, afin d'ajouter « les caractéristiques génétiques » aux motifs de discrimination. Cet amendement a été proposé dans plusieurs des projets de loi qui ont été déposés devant la Chambre des communes au fil des ans. La nécessité d'interdire la discrimination génétique en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne remonte à loin. En effet, notre ancienne collègue, la sénatrice Sheila Finestone, a déjà soulevé la question en 1999. Elle a affirmé à la commission La Forest, qui procédait à une importante révision de la loi, que la discrimination génétique pourrait bien devenir le principal enjeu du nouveau millénaire en fait de droits de la personne.

C'est un résumé du projet de loi, mais avant de conclure, j'aimerais parler de l'industrie des assurances. Je sais qu'elle s'inquiète des répercussions possibles du projet de loi et des représentants de l'industrie vont témoigner devant le comité juste après moi. Ils sont assis derrière moi cet après-midi.

Alors qu'on commençait à travailler sur le projet de loi, j'ai demandé à rencontrer des représentants de l'industrie des assurances, et nous avons eu une très bonne discussion. Je suis sûr qu'ils vous feront part de leur point de vue encore cet après-midi.

En 2010, l'industrie a adopté une politique interdisant aux assureurs d'obliger un demandeur à subir un test génétique. Cependant, si le demandeur a déjà subi un test génétique et qu'il a accès aux résultats, ou que son médecin y a accès, l'assureur peut demander qu'on lui communique cette information.

L'industrie des assurances juge qu'il est tout aussi justifié d'utiliser les résultats des tests génétiques que les antécédents médicaux d'une personne. Je ne suis pas de cet avis. Le Commissariat à la protection de la vie privée — que vous entendrez également plus tard cette semaine — l'a très clairement exprimé dans un rapport de 2013, et je le cite : « Lorsqu'il est question de renseignements personnels, rien n'est plus « personnel » que l'ADN d'un individu. »

C'est aussi ce que croient les Canadiens. Il y a une dizaine d'années, le gouvernement fédéral a chargé Pollara et Earnscliffe de procéder à une enquête approfondie de l'opinion publique concernant l'information génétique et le dépistage génétique. Les chercheurs ont formé des groupes de discussion et — c'est une citation du rapport — « il est devenu évident que pour un grand nombre de personnes, les renseignements génétiques sont plus personnels et constituent un élément plus fondamental de l'identité » que d'autres renseignements sur la santé. La très grande majorité des Canadiens interrogés dans le cadre de cette enquête ont indiqué que les compagnies d'assurance ou les employeurs ne devraient pas avoir le droit d'accéder à leurs données génétiques personnelles. D'autres sondages effectués par la suite ont aussi confirmé cette crainte concernant l'accès aux données génétiques par les compagnies d'assurance et les employeurs.

C'est la distinction que vient faire le projet de loi S-201. Il interdit d'utiliser les résultats des tests génétiques et d'obliger quelqu'un à subir un test génétique, mais rien dans le projet de loi n'empêche un assureur de poser des questions sur l'état de santé actuel ou passé d'une personne, y compris si elle est traitée ou a été traitée pour une maladie ou un trouble en particulier.

Je suis certain que vous entendrez au cours de ces audiences que des études ont tenté de déterminer quelle incidence auraient les interdictions prévues par mon projet de loi sur l'industrie des assurances. Le Commissariat à la protection de la vie privée a commandé plusieurs études il y a quelques années. Une d'entre elles a été rédigée par un expert en questions actuarielles, une autre par deux économistes. Ces études ont toutes deux révélé qu'il n'y aurait pas d'effet important sur l'industrie de l'assurance ou sur le fonctionnement efficace des marchés de l'assurance. Toutefois, cet été, l'Institut canadien des actuaires a commandé sa propre étude, qui a mené à une conclusion très différente. Par ailleurs, nous pouvons observer ce qui s'est passé dans un grand nombre de pays d'Europe et d'ailleurs dans le monde, où de telles interdictions sont en vigueur depuis de nombreuses années et où l'industrie de l'assurance semble avoir survécu.

Je suis persuadé que nous aurons l'occasion de discuter de ceci avec l'industrie de l'assurance et l'Institut canadien des actuaires. J'espère également que nous pourrons en discuter avec un ou deux experts indépendants, qui m'ont déjà indiqué vouloir présenter leur point de vue au comité.

Ce projet de loi, comme toute mesure législative, vise à trouver un équilibre. Toutes les lois ont une incidence sur une personne ou une autre, sur un groupe ou un autre. Entre-temps, le fait de n'avoir aucune loi a une incidence sur de nombreux Canadiens. En tant que législateurs, notre tâche consiste à déterminer si le projet de loi S-201 représente une proposition raisonnable pour régler le problème très concret et très grave de la discrimination génétique — s'il établit un juste équilibre ou si des ajustements permettraient de l'améliorer.

Par exemple, on verra que le projet de loi, dans sa forme actuelle, propose une exception dans le cas de certains contrats d'assurance à valeur élevée. L'ajout de cette exception a pour but de répondre à ce que j'estime être la principale préoccupation de l'industrie des assurances, notamment l'éventualité qu'une personne décide d'acheter une police d'assurance à valeur élevée après avoir subi un test génétique qui lui révèle une prédisposition à une maladie particulière, sachant que l'assureur ne pourra pas découvrir le résultat du test génétique.

Pour tenter de résoudre ce problème, le projet de loi prévoit une exception à l'interdiction d'obliger une personne à communiquer les résultats d'un test génétique antérieur dans le cas d'une police d'assurance dont le montant est supérieur à 1 million de dollars ou qui prévoit le versement d'une prestation de 75 000 $ par année. Conformément à la répartition constitutionnelle des pouvoirs, cette exception s'appliquerait dans les provinces ayant adopté une mesure législative en ce sens.

Soyons clairs. Rien dans le projet de loi ne prévoit une exception à l'interdiction d'obliger une personne à subir un test génétique. Quiconque achète une police d'assurance à valeur élevée, mais n'a jamais subi de test génétique ne peut se voir demander ou être contraint de se soumettre à un test. La disposition s'appliquerait dans le seul but de permettre aux assureurs de demander une divulgation des résultats de tests antérieurs.

Je crois que l'industrie des assurances estime que le montant de 1 million de dollars prévu par le projet de loi est trop élevé, mais j'ai également parlé à des Canadiens qui affirment le contraire, étant donné le montant actuel des assurances que doivent payer les propriétaires d'entreprise ou les professionnels. D'autres m'ont dit que l'industrie des assurances n'a besoin d'aucune exception, car bien des pays interdisent l'utilisation des résultats de tests génétiques, sans exception, et leur industrie des assurances se porte très bien. Je suis sûr que nous pourrons en discuter, et j'attends impatiemment de pouvoir entamer une telle discussion.

En conclusion, permettez-moi de dire combien j'ai hâte de participer à votre étude sur le projet de loi S-201 et la discrimination génétique. Manifestement, il ne s'agit pas d'une question partisane. En fait, ces dernières années, chacun des trois principaux partis politiques a souligné la nécessité de se pencher sur la question de la discrimination génétique. Vous vous souviendrez d'ailleurs que le gouvernement, dans le dernier discours du Trône, a promis de s'en occuper.

Nous sommes donc tous d'accord sur l'importance de l'objectif. Maintenant, notre travail comme législateurs est de trouver la meilleure façon d'atteindre cet objectif.

Personne n'est doté de gènes parfaits. Il s'agit d'une question qui pourrait toucher tous les parlementaires et tous les Canadiens. Il me tarde d'entendre ce que les Canadiens ont à dire sur le sujet et sur le projet de loi, et c'est avec enthousiasme que j'envisage de travailler en collaboration pour atteindre notre objectif commun.

Merci beaucoup.

La vice-présidente : Merci, sénateur Cowan. Il y a plusieurs sénateurs qui veulent vous poser des questions.

Le sénateur Eggleton : Merci beaucoup, sénateur Cowan, de votre exposé et de cette initiative. C'est un sujet très à propos, et il va sans dire que ce dossier a attiré l'attention de beaucoup d'autres pays, dont certains ont déjà pris des mesures semblables.

J'aimerais vous poser trois questions. Premièrement, en ce qui concerne la peine, vous avez donné suite à une préoccupation soulevée par un autre sénateur, à savoir que le montant de la peine est probablement trop élevé, mais j'aimerais savoir sur quoi repose la peine et comment on en est arrivé à ce chiffre.

Le sénateur Cowan : Le montant de la peine ne repose sur aucun fondement scientifique. S'il s'agit d'un chiffre élevé, c'est tout simplement pour montrer à quel point je prends cette question au sérieux, et je pense que c'est le cas pour nous tous. Il faut que la peine ait un effet dissuasif important. C'est ce qui explique le montant.

Le sénateur Eggleton : Deuxièmement, les provinces ont, elles aussi, compétence en la matière. Comment le tout va- t-il s'imbriquer? Si vous aviez opté pour une modification du Code criminel, une telle disposition l'aurait emporté sur les mesures prises par les provinces, mais en l'occurrence, je ne comprends pas trop ce qui se passera. Les modifications apportées au Code canadien du travail s'appliqueraient aux secteurs réglementés par le gouvernement fédéral — comme les transports, les communications, et cetera —, mais pas aux secteurs de ressort provincial. En ce qui concerne la Loi sur les droits de la personne, là encore, on trouve des lois équivalentes à l'échelle provinciale.

J'essaie de comprendre comment le projet de loi touchera la majorité des Canadiens. Aura-t-il un effet uniquement sur ceux qui travaillent dans les secteurs réglementés par le gouvernement fédéral, ou ira-t-il plus loin? Jusqu'où s'étend sa portée? Dans quelle mesure faut-il compter sur la collaboration avec les provinces pour obtenir une loi exhaustive?

Le sénateur Cowan : Vous avez raison, sénateur. L'industrie des assurances relève de la réglementation provinciale aux termes des dispositions de la Constitution portant sur la propriété et les droits civils, mais il y a des cas où l'autorité fédérale interviendrait dans un domaine comme celui-ci, parce qu'une déclaration nationale s'avère importante. La population canadienne est très mobile et, si nous allons intervenir dans ce domaine, ou dans beaucoup d'autres domaines semblables, il est important que les gens aient la certitude que, peu importe où ils se déplacent au pays, ils n'auront pas à composer avec des situations différentes.

Par exemple, si ma province, la Nouvelle-Écosse, devait adopter une loi qui serait l'équivalent provincial du projet de loi, je pourrais me dire : « Très bien, je peux subir des tests génétiques, en toute sécurité, dans ma province d'origine. » Puis, un jour, je déménage en Ontario. Mais il se trouve que l'Ontario n'a pas adopté une telle loi — et supposons qu'aucune loi fédérale ne soit entrée en vigueur. Par conséquent, je pensais avoir subi un test en toute confiance dans ma propre province, mais en changeant de province et en allant travailler et vivre dans une autre région du pays où il n'y a pas de protection semblable, je risque d'être exposé à ce type de discrimination.

Il me paraissait donc logique d'essayer d'envoyer un message uniforme à l'échelle nationale. Il se peut fort bien que les provinces essaient d'adopter des lois complémentaires dans leur ressort. Je sais qu'un député à l'Assemblée législative de l'Ontario a présenté, à plusieurs reprises, un projet de loi semblable au mien. Son projet de loi n'a pas abouti à cause de diverses prorogations et élections en Ontario, mais il me semble approprié d'envoyer un message national. Je sais que les provinces sont au courant de cette initiative. Je n'ai pas recueilli leurs avis, mais je n'ai entendu aucun représentant ou législateur provincial me dire que je ne devrais pas intervenir dans leur champ de compétence. Ceux à qui j'ai parlé estiment qu'il s'agit d'une bonne initiative que nous devons protéger ici, mais il se peut fort bien que nous ayons besoin de quelques lois complémentaires à l'échelle provinciale parce que, comme vous l'avez souligné à juste titre, au Canada, l'industrie des assurances relève de la réglementation provinciale.

Le sénateur Eggleton : Je pense que vous soulevez là un bon point sur la nécessité d'établir une norme nationale, mais penchons-nous sur le fond du problème. L'industrie des assurances pourrait-elle, par exemple, faire fi de cette modification en affirmant que ce changement ne s'applique pas aux règlements ou à la loi concernant l'industrie des assurances dans les différentes provinces? Pourrait-elle contourner le projet de loi de cette façon si elle voulait le contester devant les tribunaux?

Le sénateur Cowan : Dans la section sur les infractions et les peines, il est question de condamnations par procédure sommaire et par mise en accusation; nous avons donc recours au pouvoir pénal. Je pense que cela s'impose dans certains cas. Je sais que le professeur Hogg, un expert reconnu en droit constitutionnel, a dit qu'il est approprié, dans certaines circonstances, que l'autorité fédérale intervienne dans la compétence provinciale par le recours au pouvoir pénal. M. Hogg considère la discrimination comme un de ces cas.

Le sénateur Eggleton : D'accord. Ma troisième et dernière question porte sur les deux définitions de tests génétiques : les tests prédictifs et les tests de diagnostic. Dans le cas d'un « test prédictif », la personne essaie de savoir, à un moment de sa vie, si elle risque de rencontrer un problème et ce que l'avenir lui réserve sur le plan génétique pour être en mesure de l'éviter. L'autre type de test est un test génétique effectué au moment du diagnostic d'un problème particulier qui s'est déjà manifesté.

Ces deux types de tests seront-ils inclus dans votre proposition? D'ailleurs, je remarque que dans certains pays, comme l'Autriche, la Belgique, la France, Israël, la Norvège et le Portugal, ces deux types de tests — les tests prédictifs et les tests de diagnostic — sont visés par les dispositions de non-discrimination. Envisagez-vous de faire la même chose ici, ou faites-vous une distinction?

Le sénateur Cowan : Non; mon projet de loi tient compte des deux. Mais je le répète : si un test de diagnostic permet de dépister une maladie et que la personne reçoit un traitement en conséquence, alors son employeur ou son assureur éventuel a le droit de l'interroger sur son état de santé et ses antécédents médicaux, comme c'est le cas actuellement lorsqu'on fait une demande d'assurance ou d'emploi. Mon projet de loi ferait tout simplement en sorte que l'employeur ou l'assureur ne puisse pas accéder aux données ou aux résultats des tests génétiques. Par contre, si on reçoit déjà un traitement pour un problème de santé, alors cette information pourra être divulguée et, comme cela se fait actuellement, l'assureur ou l'employeur pourra en tenir compte.

Le sénateur Eggleton : Merci beaucoup.

Le sénateur Munson : Vous avez dit, sénateur, qu'Israël a adopté une loi sévère. Le gouvernement d'Israël a-t-il décidé d'agir ainsi parce que les gens étaient en train de profiter du système?

Le sénateur Cowan : Pour vous dire franchement, je ne sais pas ce qui a déclenché l'intervention législative en Israël. Madame Kagedan, êtes-vous au courant?

Barbara Kagedan, conseillère principale en politiques, Bureau du leader de l'opposition au Sénat : Non, je ne saurais vous le dire.

Le sénateur Cowan : Je sais qu'Israël a décidé d'agir, mais j'en ignore la raison. Je peux certainement essayer de trouver la réponse et la faire parvenir au comité. Je ne connais pas le contexte législatif.

Le sénateur Munson : Je suis curieux de connaître la réponse, parce que dans les documents d'information, on apprend la situation en France, aux États-Unis, et cetera. Certains pays semblent avoir adopté des lois plus strictes, alors que d'autres semblent avoir pris des demi-mesures.

Aujourd'hui, nous avons l'occasion d'entendre votre témoignage et celui de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes et de l'Institut canadien des actuaires. Au début de votre exposé, vous avez donné quelques chiffres et vous avez dit que les gens ont commencé à manifester un intérêt grâce au cas d'Angelina Jolie. Vous avez aussi parlé d'une émission, sur les ondes de la CBC, qui invitait les gens à se prononcer sur la question. Allons-nous entendre des témoins qui ont connu des problèmes et qui ont fait face à cette question? Je suis membre suppléant du comité, mais en dehors de nos discussions ici, je n'ai entendu personne dire qu'il s'agit d'un problème grave dans le cadre d'une tribune publique. Il s'agit évidemment d'un sujet sérieux, mais comment percevez-vous la situation actuelle? Recevez-vous des appels de gens de partout au pays qui vous exhortent à soulever cette question et qui souhaitent venir parler de leur expérience, comme on l'a fait dans le cas d'autres dossiers sur les droits de la personne?

Le sénateur Cowan : Depuis que je m'occupe de ce dossier, seule l'industrie des assurances n'a pas exprimé un appui sans réserve à ce que j'ai essayé de viser dans le projet de loi, et vous aurez l'occasion d'entendre son témoignage plus tard cet après-midi.

J'ai été impressionné par le nombre de personnes qui m'ont appelé et qui m'ont écrit sur le sujet. J'ai moi-même consulté des gens, comme ceux qui œuvrent dans le domaine du dépistage génétique. D'ailleurs, lors de ma deuxième déclaration au Sénat, je pense avoir mentionné qu'après ma première allocution au Sénat, un membre du personnel m'avait appelé pour dire : « C'est exactement la situation dans laquelle je me trouve. J'aurais dû me soumettre à un test, mais j'ai peur qu'en cas de résultat positif, cela nuise à mon employabilité ou à mon assurabilité. »

Quant à savoir si ces craintes sont légitimes, sénateur Munson, je ne saurais vous le dire, mais je sais qu'elles sont sincères. J'ai parlé de l'émission sur la chaîne CBC et j'ai entendu les préoccupations, les craintes et les expériences des auditeurs qui ont appelé. Je ne peux pas les quantifier. Un certain nombre de témoins viendront témoigner devant vous, notamment le Dr Cohn de la fondation SickKids. Il est un expert dans le domaine et il pourra vous donner une idée de l'ampleur du phénomène et de l'expérience dont on lui a fait part.

Le sénateur Munson : Je voulais tout simplement savoir si nous disposons de preuves statistiques sur le nombre de gens qui ont essuyé un refus de la part d'une société d'assurance ou d'un employeur après avoir révélé qu'ils ont subi des tests génétiques. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de tels cas au Canada.

Le sénateur Cowan : Eh bien, nous avons proposé quelques témoins au comité. Je n'ai vu que les avis de convocation de la séance d'aujourd'hui et de celle de jeudi. Quant aux autres séances, je ne sais pas qui a été convoqué ou quand, mais chose certaine, nous savons qu'il y a des gens qui ont vécu une telle expérience. Ils sont venus me voir dans mon bureau et j'ai écouté ce qu'ils avaient à dire; si vous voulez les entendre, je serai heureux de communiquer avec eux et de leur demander de contacter le greffier du comité pour avoir l'occasion de témoigner. Certaines de leurs histoires sont remarquables.

Le sénateur Munson : Nous attachons manifestement beaucoup d'importance au projet de loi, comme vous l'avez dit dans votre déclaration préliminaire, mais les projets de loi sont ce qu'ils sont. Il faut, semble-t-il, beaucoup de temps avant d'adopter des projets de loi, même ceux d'initiative parlementaire, mais on finit par y arriver. Si le projet de loi n'est pas adopté et que le statu quo est maintenu, quelles en seront les conséquences pour les Canadiens, c'est-à-dire à quels risques seront-ils exposés en matière de discrimination génétique?

Le sénateur Cowan : Eh bien, je pense que vous devriez poser ces questions aux autres témoins. Je ne prétends pas être un expert en la matière, mais plus je m'intéresse à la question, plus je deviens convaincu que ce domaine nécessite une intervention législative. Je peux comprendre la position et le raisonnement de l'industrie des assurances, mais je comprends également les préoccupations très réelles des Canadiens. J'ai essayé d'établir, à mon sens, un équilibre raisonnable.

Il s'agit d'un problème que nous, législateurs, devons régler. Je pense que c'est une bonne cause à étudier au Sénat et, s'il y a lieu d'apporter des améliorations au projet de loi, alors je les appuie sans réserve. Comme je l'ai dit à la fin de mon exposé, chacun des principaux partis politiques fédéraux a promis, dans une plateforme électorale ou une autre, qu'il s'occuperait de cette question, et le gouvernement, dans son dernier discours du Trône, a répété le même message. Plusieurs projets de loi d'initiative parlementaire ont été présentés à la Chambre des communes, mais ils n'ont pas abouti en raison des règles de la Chambre des communes — j'allais dire « particularités », mais j'ignore si c'est le mot juste.

Un des avantages au Sénat, c'est que chacun de nous peut présenter ce genre de projets de loi. Selon moi, il s'agit d'un important débat d'intérêt public. Je crois sérieusement que nous devons faire quelque chose à cet égard, mais je ne tiens pas mordicus à chaque mot dans le projet de loi. Si des sénateurs ou des témoins peuvent faire des suggestions pour l'améliorer, cela me convient tout à fait.

La sénatrice Andreychuk : Merci, sénateur Cowan, de nous avoir saisis de cette question. Je pense qu'il s'agit d'un enjeu important sur lequel on doit se pencher, et c'est au Sénat que la discussion devrait avoir lieu.

Quand je me suis préparée pour cette audience et l'étude du projet de loi, il m'a semblé que votre projet de loi soulevait plus de questions qu'il n'apportait de réponses. Il me semble que nous voulons, d'un côté, avoir accès aux outils relatifs à l'ADN, mais d'un autre côté, nous craignons ces outils. Je ne suis pas certaine de vouloir connaître mon avenir. Je préférerais peut-être laisser les choses suivre leur cours.

La question de savoir comment régler tous les problèmes qui se posent est très intéressante. Il m'a presque semblé que nous devions avoir une discussion avant d'avoir un projet de loi. Je me suis demandé pourquoi vous n'aviez pas envisagé de demander à ce comité ou à un autre comité de se pencher sur la question de l'analyse de l'ADN, de ses conséquences juridiques et de ses effets sur le plan social, comme nous l'avons fait pour l'euthanasie. Il y a eu des discussions dans la collectivité, mais il n'y a pas eu de discussions définitives à ce sujet. Le rôle du Sénat était donc de creuser la question, d'établir les avantages et les inconvénients d'une mesure législative et de cerner les problèmes. L'un d'entre eux était évidemment les lacunes dans les soins palliatifs. Cette question risque maintenant de nous revenir, et je crois que le Sénat est bien préparé parce que nous avons effectué une étude exhaustive.

Je me méfie un peu du projet de loi, car nous devons en savoir davantage au sujet de l'analyse génétique, de ses conséquences et de l'utilisation qu'on en fait au Canada, à bon ou à mauvais escient, avant de déterminer quel doit être le contenu législatif du projet de loi.

Le sénateur Cowan : Je vous remercie de vos observations, sénatrice. J'avais pensé lancer une enquête ou effectuer une étude, mais j'ai estimé, sur la question très précise de la discrimination, qu'il était préférable de proposer au moins une intervention législative dont nous pourrions discuter et que nous pourrions améliorer, mais j'ai voulu que ce soit une approche plus centrée. Comme vous le dites, l'analyse génétique a de nombreuses conséquences, et vous et moi pourrions décider que nous ne voulons pas savoir. C'est tout à fait acceptable. C'est votre droit, c'est mon droit et ma décision, mais ce que je veux dire, c'est qu'en prenant cette décision, on ne devrait pas avoir à se soucier des conséquences possibles sur son assurabilité ou son employabilité. J'ai pensé que c'est dans ce contexte très précis que nous devrions intervenir sur le plan législatif.

Il existe toute une gamme d'enjeux associés à l'ADN et à son usage ou mauvais usage qui vont bien au-delà de la portée de cette mesure législative. J'ai toutefois estimé qu'il s'agit d'un réel besoin et d'un véritable problème qui nécessite, à mon avis, une intervention législative plutôt qu'une sorte de déclaration volontaire d'intention de la part de l'industrie des assurances ou d'une organisation d'employeurs, ou qu'une sorte de moratoire, comme à d'autres endroits. C'est beaucoup plus ciblé que cela. Si ce comité ou un autre comité se penchait sur des enjeux plus vastes ou d'autres enjeux, je pense que ce serait tout à fait approprié.

Selon moi, c'est un enjeu propice à une intervention législative. Plutôt que de simplement dire qu'il faudrait faire quelque chose à ce sujet, j'ai pensé présenter une proposition précise pouvant servir de base à des discussions. C'est ce que je me suis dit.

La sénatrice Andreychuk : Il y a seulement un aspect du projet de loi que je trouve un peu déroutant. Vous dites que si on subissait des tests dont les résultats pourraient comporter un élément négatif, cela dissuaderait les gens de subir une analyse d'ADN, car ils craindraient que les résultats nuisent à leur employabilité. Je crois que c'est votre hypothèse.

Je suis au courant de cas où, par exemple, quelqu'un pense être atteint d'arthrite ou de polyarthrite rhumatoïde. Il va consulter, passe des tests et obtient l'avis d'un médecin; il ne souffre peut-être pas d'arthrite maintenant, il en a les symptômes et il risque d'en être atteint, mais le médecin ne peut l'affirmer catégoriquement. Cela peut être utilisé pour les assurances. C'est utilisé pour l'assurance ici même, au Sénat.

En quoi est-ce différent d'une personne qui veut subir un test d'ADN? Comment différenciez-vous les deux? De la même façon, je pourrais penser avoir une autre maladie, consulter, puis craindre de subir les tests d'ADN parce que les résultats seront utilisés contre moi. Ce genre de problème existe actuellement en médecine dans des situations non liées aux données génétiques. Je ne sais pas comment vous les distinguez.

Le sénateur Cowan : Je parle uniquement des tests génétiques. Il existe toutes sortes d'autres tests que vous et moi pourrions subir parce que nous voulons avoir l'heure juste ou que nous ne nous sentons pas bien et que nous aimerions tirer les choses au clair. Ce ne sont pas les renseignements dont je parle ici. Je parle uniquement des tests génétiques.

La sénatrice Andreychuk : Je me demande pourquoi vous choisiriez ceux-là plutôt que d'autres, parce que cette crainte existe actuellement. Nous pouvons signaler au sénateur Munson des cas où l'on a refusé d'assurer certaines personnes parce qu'elles avaient subi le test. Dans les formulaires de demande, on dit : « avez-vous déjà été atteint ou a- t-on déjà présumé que vous étiez atteint », puis on énumère les maladies. Pourquoi croyons-nous que seuls les tests génétiques devraient être protégés contre la discrimination, alors que tous les autres ne le sont pas? Je ne comprends pas trop votre raisonnement.

Le sénateur Cowan : Je répondrai encore une fois, sénatrice Andreychuk, que je n'essaie pas de régler tous les problèmes. J'essaie d'en régler un seul. J'essaie de résoudre cette question. D'autres professionnels seraient beaucoup mieux placés que moi pour vous expliquer la différence entre ces deux types de tests.

Il peut y en avoir d'autres, mais l'exemple qu'on utilise est celui de la maladie de Huntington. Si on est porteur du gène de cette maladie, on la développe, d'après ce que je comprends. Mais il y a toutes sortes d'autres gènes dont on peut être porteur qui ne mèneront pas nécessairement à l'apparition de la maladie. Le cas de Mme Jolie en est un bon exemple. Après avoir su cela, elle a pu faire diminuer les risques; ils sont passés de 87 à 5 p. 100. Ce n'est certainement pas négligeable. Je vous demande instamment de poser ces questions à des professionnels.

Lorsqu'on modifie son style de vie, qu'on fait ou cesse de faire telle ou telle chose, on réduit les risques de développer la maladie en question. C'est nettement avantageux non seulement pour la personne, mais aussi pour la société et les contribuables. Si nous avons la possibilité de prévenir chez les gens l'apparition de maladies qui nécessiteront d'énormes ressources et qui les éloigneront du mode de vie qui leur plaît, alors nous devrions le faire. Nous devrions inciter les gens ou, du moins, ne pas les dissuader de subir ces tests. Les personnes qui choisissent de ne pas savoir en ont parfaitement le droit. On peut dire qu'on ne veut pas savoir parce que cela nous dérange ou qu'on ne veut pas inquiéter sa famille. Toutefois, si on dit qu'on aimerait savoir, mais qu'on ne veut pas subir les tests parce qu'ils vont nuire à son assurabilité ou à son employabilité, ou qu'on ne fera pas subir les tests à son enfant parce que cela pourrait nuire à son assurabilité ou à son employabilité future, alors je pense qu'il faut vraiment s'interroger. Comme je l'ai dit, je tente ici d'établir ce que je crois être un équilibre raisonnable.

La sénatrice Andreychuk : J'aimerais revenir sur un point. Si les tests d'ADN sont un outil utile, il devrait y avoir un débat public sur la question. Si c'est bon et si le gouvernement veut intervenir, alors le débat ne devrait-il pas porter sur l'accessibilité aux tests génétiques pour tous? Cet outil médical utile ne devrait pas être réservé uniquement à ceux qui en ont les moyens, mais être accessible à tous. La discrimination pourrait alors être abordée sous un angle plus large, au lieu de porter seulement sur les cas liés aux assurances, pour ceux qui en ont, car bien d'autres personnes n'en ont pas et essaient de trouver un autre emploi. Ne devraient-elles pas avoir accès à ces renseignements? Puisque c'est d'intérêt public, avant d'aborder les inconvénients, devrions-nous examiner les avantages?

Le sénateur Cowan : Je suis sûr qu'il y a des aspects négatifs à certains tests génétiques. Je ne défends pas chacun des 23 185 tests. Je ne les connais pas. D'autres personnes pourraient vous en parler. Je suis sûr qu'il y en a des bons et des moins bons. C'est un choix que vous et moi ferions si nous envisagions de subir un test en particulier. Il va sans dire que nous ne subirions pas le test si nous n'étions pas certains que c'est la bonne chose à faire. Tout ce que je dis, c'est que la décision ne devrait pas dépendre de ces deux éléments. Il devrait manifestement y avoir un débat sur cette question. Le nombre a explosé. Quel était le chiffre quand j'ai parlé pour la première fois de...

Mme Kagedan : Je pense que vous avez dit qu'une décennie auparavant, 100 tests étaient disponibles. En 10 ou 12 ans, ce chiffre est passé à 23 000.

Le sénateur Cowan : Oui. Et quand j'ai présenté ce projet de loi, en avril 2013, il y en avait 2 000. Il y en a maintenant 23 000. Vous avez tout à fait raison. Il y a de nombreux problèmes, et je crois que l'endroit tout indiqué pour en discuter serait un comité sénatorial. Je pense que nous avons un problème qui, à mon avis, nécessite une intervention législative; nous n'avons pas besoin de faire tout ce travail avant de décider de régler ce problème, dont nous reconnaissons tous l'existence.

La vice-présidente : Sénateur Cowan, j'ai une petite question à vous poser. À la troisième partie du projet de loi, on ajoute les caractéristiques génétiques aux motifs de distinction illicite en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Or, on ne définit pas le terme « caractéristiques génétiques ». À quoi s'applique ce terme? Sa portée pourrait- elle être trop vaste et chevaucher des domaines déjà visés par la Loi sur les droits de la personne?

Le sénateur Cowan : Je pourrais peut-être demander à Barbara de vous répondre.

Mme Kagedan : Je pourrais le faire, mais je pense que les personnes les mieux placées pour en parler seraient les représentants de la Commission canadienne des droits de la personne. Je sais qu'ils ont d'ailleurs publié une déclaration aujourd'hui sur cette question. Je ne sais pas si vous voulez en parler.

Le sénateur Cowan : C'est la Commission canadienne des droits de la personne. Est-ce qu'ils vont comparaître?

Mme Kagedan : Je l'espère. Je sais qu'ils figurent sur la liste des témoins, mais j'ignore si on a déjà fixé la date de leur comparution.

Le sénateur Cowan : Vont-ils comparaître?

La vice-présidente : Oui.

Le sénateur Cowan : Je ne veux pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit, mais ils ont notamment déclaré aujourd'hui que la commission se réjouit de tout projet de loi ou de toute initiative qui traite de la discrimination génétique. La commission appuie l'ajout du terme « caractéristiques génétiques » aux motifs de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Il conviendrait peut-être, madame la présidente, de leur demander pourquoi ils pensent qu'une modification est nécessaire pour cela. De toute évidence, ils le pensent parce que la loi actuelle ne le prévoit pas.

La vice-présidente : Merci, sénateur Cowan.

Je vais maintenant vous présenter nos prochains témoins.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : M. Frank Swedlove, président, qui se joindra à nous dans quelques instants, et M. Frank Zinatelli, vice- président et avocat général. Je souhaite aussi la bienvenue aux représentants de l'Institut canadien des actuaires : M. Bob Howard, président sortant, M. Jacques Y. Boudreau, président, Comité sur le dépistage génétique, et M. Michel Simard, directeur exécutif. Nous accueillons également Mme Karen Jensen, associée, Norton Rose Fulbright, de l'Association canadienne des avocats d'employeurs.

Je crois que vous avez des déclarations préliminaires à nous présenter et que vous répondrez ensuite aux questions des membres du comité. Puisque M. Swedlove n'est pas ici, nous allons commencer par l'Institut canadien des actuaires.

Michel Simard, directeur exécutif, Institut canadien des actuaires : Merci, madame la présidente.

[Français]

Honorables sénateurs, je me nomme Michel Simard et je suis directeur général de l'Institut canadien des actuaires, communément appelé l'« ICA ». Notre équipe, ce soir, est formée de M. Bob Howard, ancien président et actuaire titulaire de l'ICA, et de M. Jacques Boudreau, qui est également actuaire titulaire de l'ICA. Nous vous remercions de nous accueillir auprès de vous ce soir.

[Traduction]

Les actuaires sont les experts de la quantification et de la gestion des risques et des événements incertains pour les assureurs, les administrations publiques, les régimes de retraite et les programmes sociaux.

L'ICA est l'organisme national autoréglementé de la profession actuarielle. Son premier principe directeur consiste à faire passer l'intérêt public avant les besoins de la profession et de ses membres. C'est ce principe qui nous amène ici aujourd'hui. Nous sommes ici ce soir pour représenter les actuaires canadiens, et non pour nous prononcer pour l'industrie de l'assurance.

[Français]

Jacques Y. Boudreau, président, Comité sur le dépistage génétique, Institut canadien des actuaires : En juin, l'ICA a publié un énoncé sur le partage des résultats de tests génétiques entre les demandeurs et les assureurs. J'ai présidé les travaux du groupe de travail chargé de la rédaction de ce document. Nous avons retenu les services de Bob Howard pour quantifier les répercussions d'une mesure visant à interdire aux assureurs l'accès aux résultats de tests génétiques. Nous avons partagé nos travaux avec le commissaire à la protection de la vie privée et les commissaires aux droits de la personne.

À notre avis, une interdiction va à l'encontre de l'intérêt public. De plus, l'accès aux résultats des tests ne porte pas atteinte à la vie privée ni aux droits de la personne. Toutes les formes d'assurance protègent les consommateurs contre les pertes financières imputables à des événements incertains.

Les assurés sont regroupés dans des catégories de risques semblables. Chaque assuré verse des primes représentant sa part du coût des demandes de règlement dans sa catégorie. Les défis fondamentaux consistent à classer correctement les assurés dans un groupe et à calculer un juste prix pour eux. Les tests génétiques peuvent permettre de classer les assurés de façon plus exacte dans un groupe lorsqu'il est prouvé scientifiquement qu'il existe un lien entre certains gènes et la mortalité. Cependant, interdire l'accès aux résultats de tests entraînera un bouleversement des fondements du concept de l'assurance. Il se peut que les demandeurs sachent que leur probabilité de vivre longtemps diminue en raison d'un test génétique, mais il est interdit à un assureur de le savoir. Ces demandeurs ne seront pas alors classés dans la catégorie qui leur convient et le montant de leur prime sera incorrectement faible. Est-ce suffisant pour causer un problème grave? Le modèle proposé par mon collègue a répondu à cette question.

[Traduction]

Bob Howard, président sortant, Institut canadien des actuaires : Le modèle que j'ai mis au point simule le comportement d'achat de personnes dont les tests à l'égard de certains gènes ont donné des résultats positifs et de personnes qui n'ont pas participé aux tests. J'ai constaté que l'expérience de mortalité globale observée par les actuaires est susceptible de monter en flèche. Si une interdiction d'accès était imposée, les taux de primes de l'assurance temporaire des personnes âgées de 20 à 60 ans augmenteraient de 30 p. 100 pour les hommes et de 50 p. 100 pour les femmes. Certaines personnes n'achèteront pas autant d'assurance vie qu'elles en ont véritablement besoin, et d'autres ne s'en procureront pas. Il en découlera un impact négatif sur notre filet de sécurité sociale. En aidant quelques personnes, nous nuirons à la grande majorité.

L'ICA estime que l'interdiction du partage des résultats connus des tests génétiques est contraire à l'intérêt public.

Le projet de loi S-201 comporte de graves lacunes. La loi pourrait raisonnablement insister sur l'accès à l'assurance pour que nul n'en soit privé uniquement en raison d'un test génétique. Mais demander que les personnes qui ont reçu un résultat positif versent la même prime que celles qui ont obtenu un résultat négatif ou qui n'ont pas participé aux tests confère un avantage important et injuste aux personnes qui reçoivent un résultat positif.

Même si l'on admettait qu'un avantage doit être conféré, le seuil est bien trop élevé. S'il était fixé à 100 000 $ plutôt qu'à 1 million de dollars, le système d'assurance pourrait peut-être absorber le coût sans que cela ait de répercussion apparente sur le public. Mais le seuil doit être appliqué par personne assurée, pas simplement par police, et mon modèle suppose que ce changement est apporté.

Dans sa forme actuelle, le projet de loi permettrait à une personne d'acheter une police de 1 million de dollars auprès de 10 à 20 assureurs. L'impact sur le public serait alors bien plus élevé que les 30 p. 100 et 50 p. 100 que j'ai mentionnés.

Il est dans l'intérêt public de permettre aux sociétés d'assurance d'accéder aux résultats connus des tests génétiques. Les preuves scientifiques satisfont à l'exigence d'un lien rationnel, et l'impact d'une interdiction sur le public répond à l'exigence de contrainte excessive.

La vice-présidente : Je vous remercie beaucoup de vos exposés.

J'aimerais maintenant céder la parole à M. Swedlove ou à M. Zinatelli. Avez-vous préparé une déclaration?

Frank Swedlove, président, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : Je suis Frank Swedlove, président de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Je suis accompagné de Frank Zinatelli, vice-président et avocat général à l'ACCAP. Nous accompagnent également la Dre Judy Beamish, vice-présidente et première directrice médicale de la Financière Sun Life, ainsi que Mme Karen Cutler, vice-présidente et tarificatrice en chef de la Financière Manuvie. Elles seront à votre disposition pour répondre à vos questions concernant le processus de souscription.

[Français]

L'ACCAP représente des sociétés détenant 99 p. 100 des assurances vie et maladie en vigueur au Canada. L'industrie canadienne des assurances de personnes fournit des produits comme l'assurance vie individuelle et collective, l'assurance invalidité, l'assurance maladie complémentaire, les rentes individuelles et collectives et les régimes de retraite. L'industrie protège près de 28 millions de personnes au Canada et plus de 45 millions de personnes à l'étranger.

[Traduction]

L'industrie verse également des prestations de 76 milliards de dollars par année aux Canadiens, a investi 647 milliards de dollars dans l'économie du Canada et emploie près de 150 000 Canadiens.

Nous sommes heureux de comparaître devant le comité, dans le cadre de son examen du projet de loi S-201. Le projet de loi est bien intentionné, mais ses effets néfastes l'emportent de loin sur ses avantages, et nous ne pouvons donc pas appuyer son adoption.

Tout d'abord, permettez-moi de vous expliquer le principe fondamental de la sélection des risques en assurance. L'assurance est une convention de bonne foi selon laquelle les parties communiquent tous les renseignements qui sont pertinents au contrat afin que celui-ci soit conclu sur une base de « symétrie d'information ».

L'assuré est ainsi certain des prestations garanties et l'assureur peut, quant à lui, se faire une opinion précise du risque à assurer, de sorte que la prime reflète le niveau de risque assumé. Cela est juste pour l'ensemble des assurés. C'est sur le principe de « symétrie d'information », énoncé dans la loi sur les assurances de chaque province et territoire, que repose la sélection des risques en assurance.

Selon l'article 4 du projet de loi, nul ne pourrait obliger une personne à communiquer les résultats d'un test génétique comme condition à l'obtention d'une assurance. Cela va à l'encontre de ce principe clé qu'est la « symétrie d'information ». Pis encore, le non-respect de ce principe entraîne un phénomène appelé « antisélection ».

Il y a antisélection lorsqu'un proposant sait qu'il représente un risque élevé mais que l'assureur ne le sait pas. De ce fait, la personne est plus susceptible de bénéficier de l'assurance, et ce, à un prix inférieur à celui qu'elle devrait normalement payer. Cela l'amène à demander un montant d'assurance plus élevé. Ce n'est pas là une simple hypothèse : l'antisélection est un fait démontré par la recherche. L'antisélection conduit à une hausse généralisée du coût de l'assurance. Et les sommes en cause ne sont pas négligeables.

Dans un rapport de recherche récent, l'Institut canadien des actuaires conclut que si les assureurs n'avaient pas accès aux résultats de tests génétiques, cela aurait sur eux une incidence très marquée.

Les Canadiens sont influencés par le prix de l'assurance. Une hausse importante du coût pousserait probablement beaucoup d'entre eux, surtout les moins fortunés, à ne pas souscrire d'assurance vie ou maladie. Ces personnes seraient ainsi non protégées contre les aléas de la vie, comme un décès prématuré, des problèmes de santé graves ou une invalidité. Je dois toutefois dire que le filet de sécurité, en bout de ligne, c'est le gouvernement.

[Français]

Toutefois, en tant qu'industrie, nous sommes conscients des besoins des Canadiens qui peuvent être touchés par des résultats de tests génétiques défavorables. C'est pourquoi nous avons établi un code sectoriel, annoncé la semaine dernière, qui s'appliquera à tous nos membres. Nous en avons remis un exemplaire aux membres du comité.

[Traduction]

Le code de l'industrie exige que tous les membres respectent les principes qu'il prévoit. Premièrement, aucun Canadien ne se verra demander de subir un test génétique comme condition à l'obtention d'une assurance. Deuxièmement, il appuie la recherche médicale et ses bienfaits, et les assureurs ne demanderont pas à connaître les résultats d'un test génétique tant que le proposant ou son médecin n'a pas reçu ces résultats ou n'en a pas pris connaissance. Troisièmement, il veille à ce que les assureurs n'exigent pas les résultats d'un test génétique d'une personne autre que le proposant à l'assurance et à ce qu'ils ne cherchent pas à obtenir ces résultats de façon indépendante. Quatrièmement, quand un proposant informe l'assurance qu'il songe à se soumettre à un test génétique, l'assureur lui remettra un avis en langage clair l'informant des répercussions d'un tel test. Cinquièmement, il exige des assureurs qu'ils fournissent assistance aux proposants qui ne sont pas admissibles à l'assurance. Sixièmement, il exige des assureurs qu'ils restent au fait des progrès en génétique qui ont une incidence en assurance, et qu'ils tiennent compte des nouvelles connaissances dans leurs pratiques de sélection des risques. Septièmement, il exige des assureurs qu'ils aient en place un système de règlement des différends pour traiter les plaintes ayant trait aux décisions en matière de sélection des risques qui font intervenir des tests génétiques. Huitièmement, il exige des assureurs qu'ils attestent chaque année qu'ils se conforment à ces principes.

Nous tenons à ce que les Canadiens prennent des décisions éclairées en ce qui concerne les tests génétiques et à ce qu'ils sachent à quoi s'attendre lorsqu'ils demandent une assurance, tout en continuant de les aider à protéger leurs familles contre les imprévus.

D'autres aspects du projet de loi nous préoccupent. Nous aimerions attirer votre attention sur l'article 9, qui modifierait la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il s'appliquerait aux employeurs fédéraux et toucherait également notre industrie lorsqu'elle fournit des produits d'assurance aux employés fédéraux. Les modifications feraient des « caractéristiques génétiques » un motif de distinction illicite aux termes de la LCDP. L'expression « caractéristiques génétiques » est très problématique, car elle a une portée beaucoup plus large que les résultats de tests génétiques. En effet, l'expression pourrait englober les antécédents familiaux, limitant ainsi la capacité de notre industrie de se servir de ces antécédents dans l'évaluation du risque. Une telle modification aurait une incidence sur le fonctionnement même de l'assurance telle qu'on la connaît depuis que l'industrie a vu le jour.

Enfin, nous tenons à souligner qu'il n'est pas clair si le gouvernement fédéral a l'autorité de mettre en œuvre les dispositions du projet de loi S-201. Nous pensons qu'il s'agit là d'une question importante, et nous encourageons le comité à l'examiner.

[Français]

En conclusion, notre industrie apprécie grandement l'occasion qui lui est donnée de participer à l'examen du projet de loi S-201. Nous sommes à votre disposition pour répondre à toute question que vous pourriez avoir. Je vous remercie.

[Traduction]

Je vous remercie infiniment de votre attention.

La vice-présidente : Je vais maintenant céder la parole à Mme Karen Jensen, de l'Association canadienne des avocats d'employeurs.

Karen Jensen, associée, Norton Rose Fulbright, Association canadienne des avocats d'employeurs : Bonsoir. C'est un grand honneur d'être invitée à témoigner devant vous aujourd'hui sur un sujet aussi important. À titre d'information, je suis la vice-présidente du Comité des droits de la personne de l'Association canadienne des avocats d'employeurs, ou l'ACAE, comme on nous appelle. L'ACAE est une association d'avocats d'employeurs au Canada. Je suis également un ancien membre à temps plein du Tribunal canadien des droits de la personne, où j'ai agi à titre d'arbitre et de médiateur dans des litiges complexes en matière de droits de la personne. Je pratique le droit dans les domaines du travail et des droits de la personne depuis plus de 20 ans.

Permettez-moi tout d'abord de dire que l'ACAE considère cette question comme étant très importante. Les progrès que nous avons réalisés dans le secteur des tests et des traitements génétiques pour des maladies graves sont tout à fait époustouflants. De toute évidence, il est dans l'intérêt de tous de s'assurer que les gens sont en mesure de tirer pleinement parti de ces percées sans craindre de faire l'objet de discrimination en fonction de caractéristiques génétiques de la part d'employeurs ou d'employeurs éventuels.

Toutefois, les questions que pose l'ACAE comportent trois volets. Premièrement, compte tenu de l'état actuel du droit au Canada, le projet de loi S-201 est-il nécessaire? Deuxièmement, aura-t-il des effets négatifs inattendus? Enfin, le projet de loi résistera-t-il à un examen constitutionnel?

En ce qui concerne la première question, quant à savoir si le projet de loi S-201 est nécessaire, je pense qu'il est important de souligner qu'il ne semble pas y avoir de preuves pour l'instant de discrimination généralisée en matière d'emploi fondée sur les caractéristiques génétiques ou les exigences des employeurs de fournir les résultats des tests génétiques. Il ne semble tout simplement pas y avoir de preuve pour démontrer qu'il s'agit d'un problème très répandu, et je sais qu'une étude réalisée en Colombie-Britannique sur le sujet, que vous voudrez peut-être examiner, révèle que très peu de gens estiment qu'il y a un problème, mais qu'aucune plainte n'a été déposée jusqu'ici.

De plus, il convient de noter que chaque province et territoire au Canada protège de façon rigoureuse la vie privée et les droits de la personne des employés et des éventuels employés. Dans chaque province et territoire, ainsi qu'au niveau fédéral, les employeurs n'ont pas le droit de faire de discrimination à l'endroit d'employés ou de candidats pour un emploi en raison d'une invalidité.

Dans une décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2000, la cour a déclaré qu'une invalidité peut être réelle ou perçue. L'affaire en particulier mettait en cause les municipalités de Montréal et de Boisbriand où deux candidats à un poste ont dû se soumettre à des examens médicaux préalables à l'embauche pour des postes de jardinier- horticulteur et d'agent de police. Les examens médicaux ont révélé que les deux candidats présentaient des anomalies à la colonne vertébrale. Ils n'ont pas été embauchés, et ce, en dépit du fait que les anomalies étaient asymptomatiques et qu'ils ne savaient même pas qu'ils avaient ces anomalies avant de se soumettre à ces examens.

La Cour suprême du Canada a décrété qu'il s'agissait de discrimination fondée sur une invalidité, même si les candidats ne souffraient d'aucune limitation fonctionnelle et que leurs anomalies étaient totalement asymptomatiques. La cour a jugé que le droit à l'égalité et à la protection contre la discrimination partout au pays ne peut pas être atteint à moins de reconnaître que des actes discriminatoires peuvent être autant fondés sur une invalidité perçue que sur une invalidité réelle. La décision dans l'affaire mettant en cause la ville de Montréal sur l'invalidité perçue a été appliquée dans les tribunaux des droits de la personne partout au pays, en dépit du fait qu'elle était basée sur les lois relatives aux droits de la personne du Québec.

Par conséquent, une personne qui se voit refuser un emploi parce qu'un test génétique révèle la présence d'une anomalie, qui n'entraîne aucune limitation fonctionnelle pouvant nuire à la capacité du candidat d'exécuter le travail en toute sécurité, aurait tous les droits de se plaindre qu'elle a été victime de discrimination en fonction d'une invalidité perçue, en vertu des lois en matière des droits de la personne applicables.

Par ailleurs, la majorité des employeurs savent pertinemment qu'ils n'ont pas le droit d'exiger un examen médical préalable à l'emploi à moins que deux conditions soient réunies. Premièrement, la personne doit avoir reçu une offre d'emploi conditionnelle. Deuxièmement, l'examen médical doit se limiter à des tests pour évaluer des conditions qui empêcheraient le travailleur d'accomplir son travail en toute sécurité. Encore là, les employeurs n'ont pas le droit de demander le diagnostic. Ils peuvent seulement savoir si la personne est apte à satisfaire aux exigences de son poste de façon sécuritaire avec ou sans mesure d'adaptation.

Au Canada, si un examen révèle qu'une personne a une limitation fonctionnelle qui l'empêchera d'exercer ses fonctions, l'employeur ne peut pas refuser tout simplement de l'embaucher. Conformément à une décision rendue en 1999 par la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Meiorin, l'employeur doit adapter le travail de la personne en fonction de ses limitations à moins que ces mesures d'adaptation ne lui causent un préjudice injustifié. Autrement dit, une personne qui présente une caractéristique génétique entraînant une limitation d'ordre physique ou mental ne peut pas se voir refuser un emploi, à moins qu'il était impossible pour l'employeur de prendre des mesures d'adaptation pour des motifs financiers, de sécurité ou de santé.

La norme que les employeurs sont tenus de respecter pour justifier un refus d'employer ou de continuer à employer des personnes handicapées est très élevée. L'employeur serait en droit de refuser d'embaucher ou de continuer d'employer cette personne seulement si les mesures d'adaptation lui causeraient un préjudice injustifié.

Pour ceux qui occupent actuellement un emploi et qui craignent que leur employeur les traite de manière discriminatoire s'il était informé de leurs caractéristiques génétiques, les lois au Canada stipulent très clairement que les employeurs n'ont pas un droit inconditionnel à la divulgation complète de l'état de santé de l'employé. De façon générale, les données médicales peuvent être exigées seulement pour déterminer si un employé est apte au travail ou pour justifier une absence pour cause de maladie ou d'invalidité.

Là encore, tout comme les examens médicaux préalables à l'emploi, un employeur n'a pas le droit de connaître le diagnostic. Il peut seulement demander la durée prévue de l'invalidité, le pronostic de rétablissement et le type de restrictions pouvant avoir une incidence sur la capacité d'une personne de remplir les fonctions de son travail.

La Cour suprême du Canada a signalé que les employeurs ont un droit d'accès restreint aux données médicales des employés dans la décision Pâtes et Papier Irving qui a été rendue l'an dernier. Dans cette affaire, la cour a établi que des tests de dépistage de drogues et d'alcool aléatoires dans des postes à risque élevé en matière de sécurité ne sont pas autorisés à moins d'avoir des preuves tangibles d'abus fréquents de drogues et d'alcool. L'intrusion dans les renseignements médicaux personnels des employés n'était tout simplement pas justifiée sous prétexte qu'il faut assurer la sécurité.

Il y a également des mesures de protection légiférées sur la façon dont les données médicales peuvent être recueillies, utilisées et diffusées, dont la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, ou LPRPDE, et des lois provinciales sur la protection des renseignements personnels qui comprennent des dispositions spéciales portant sur l'utilisation de données médicales.

Dans une affaire récente visant la LPRPDE, la commissaire adjointe à la protection de la vie privée du Canada a examiné une plainte déposée par un ancien employé d'une entreprise de télécommunications. Dans cette cause, l'ancien employé soutenait que l'employeur recueillait inutilement des renseignements médicaux personnels. Pour faciliter l'administration de son programme d'invalidité à long terme, l'entreprise exigeait que ses employés remettent des formulaires de réclamation et des rapports médicaux au bureau des ressources humaines de l'employeur.

La commissaire adjointe à la protection de la vie privée a conclu que l'entreprise enfreignait les principes de la protection des renseignements personnels car la collecte de renseignements médicaux des employés n'était pas justifiée dans les circonstances. Le régime d'invalidité était administré par une compagnie d'assurance indépendante et les employés auraient dû être en mesure de faire parvenir leurs renseignements directement à l'assureur, sans devoir les divulguer à l'employeur.

Enfin, la partie III du Code canadien du travail interdit les renvois injustifiés. Dans la plupart des cas, cela englobe les licenciements fondés sur les résultats des tests génétiques, à moins qu'il y ait une raison légitime. Il faudrait que cette raison réponde aux exigences prévues dans la Loi canadienne sur les droits de la personne que je viens d'exposer, puisque cette loi s'applique à toutes les décisions prises en vertu du Code canadien du travail.

À la lumière de ce type d'analyses, l'ACAE estime que les lois actuelles canadiennes sont suffisantes pour assurer une protection contre les atteintes à la vie privée des employés, les renvois injustifiés et la discrimination en matière d'emploi fondée sur des caractéristiques génétiques.

De plus, l'ACAE s'inquiète que la présentation d'une mesure législative comme le projet de loi S-201 puisse avoir des répercussions négatives imprévues. L'interdiction stricte proposée dans le projet de loi contre les tests génétiques ou la discrimination fondée sur des caractéristiques génétiques comprend des sanctions pénales qui vont bien au-delà des peines envisagées pour d'autres types de discrimination fondée sur l'invalidité. Par conséquent, la discrimination génétique fera partie d'une catégorie spéciale au-dessus d'autres types de discrimination si ce projet de loi est adopté. Il établit une sorte d'hiérarchie des droits, ce que la Cour suprême du Canada a expressément rejeté.

Ce qui inquiète les employeurs également, c'est qu'on ne définit pas l'expression « caractéristiques génétiques ». L'expression est si générale qu'elle englobe toutes les caractéristiques humaines imaginables. C'est à se demander si des caractéristiques comme l'entêtement, l'insubordination, l'insolence qui étaient auparavant la responsabilité des gens pourraient être considérées comme étant des caractéristiques génétiques pour lesquelles on ne peut rien faire et à partir desquelles les employeurs n'ont pas le droit de prendre des décisions.

Nous avons eu des cas au Canada où des expressions étaient mal définies dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, notamment la « situation de famille », ce qui a donné lieu à plusieurs décennies de litiges coûteux aux résultats contradictoires jusqu'à ce qu'on clarifie enfin l'expression. Entre-temps, les employeurs ne savaient pas trop comment gérer les plaintes de discrimination en raison de l'expression mal ou non définie. Il est absolument essentiel que tout motif de discrimination interdit soit clairement défini ou compris. C'est nécessaire pour les employeurs. Des définitions vagues causeront de l'incertitude et donneront lieu à des litiges inutiles et interminables.

Enfin, les modifications apportées au Code canadien du travail incluent une interdiction générale sur le recours aux tests génétiques sans le consentement écrit de l'employé. Cela pourrait dépasser ce qui est réellement nécessaire pour assurer la protection des renseignements personnels et la liberté de choix. Actuellement, les employés peuvent refuser de passer des tests qui ne sont pas liés aux exigences du poste ou à la sécurité. De plus, si les tests révèlent que des mesures d'adaptation sont nécessaires, la personne ne peut être congédiée à moins que les mesures d'adaptation n'entraînent des contraintes excessives. Dans certaines circonstances, les tests génétiques pourraient être utiles pour fournir des mesures d'adaptation à l'employé et permettraient de s'assurer que la personne est en mesure de satisfaire aux exigences du poste en toute sécurité. Interdire aux employeurs de demander de tels tests pourrait être inutile.

Récemment, un arbitre a confirmé le droit d'un employeur de demander aux employés de passer une épreuve à l'effort pour les postes qui mettent rudement à l'épreuve la capacité cardiovasculaire des travailleurs. Le syndicat maintenait que demander une épreuve à l'effort était discriminatoire et que les employés ne devraient pas être tenus de subir le test, mais l'arbitre n'était pas de cet avis. Il a conclu que le test aidait à prévenir les arrêts cardiaques et les décès en milieu de travail. Il pourrait en être de même pour les tests génétiques, et les exigences de la LCDP empêcheraient les employeurs de demander ces tests s'ils ne sont pas justifiés.

Évidemment, notre dernière préoccupation, c'est que le projet de loi pourrait ne pas être valide sur le plan constitutionnel, car il semble empiéter sur les compétences provinciales prévues au paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867.

En conclusion, la question des tests génétiques et de la discrimination fondée sur les caractéristiques génétiques est un enjeu important qui suscite beaucoup d'intérêt dernièrement. Toutefois, si des modifications doivent être apportées à des mesures législatives complexes comme le Code canadien du travail et la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui ont une incidence majeure sur les relations de travail et les relations d'emploi au Canada, il faudrait d'abord consulter les parties intéressées. Je crois fermement qu'avant de présenter une mesure législative à cet égard, de plus amples discussions sont nécessaires. Nous devons faire attention de ne pas importer des restrictions juridiques et des régimes d'endroits comme les États-Unis, où l'accès aux soins de santé de base est intimement lié à l'emploi. Il n'en est pas ainsi au Canada.

En outre, il existe au Canada des protections juridiques qui pourraient éliminer la nécessité d'adopter une mesure législative de ce genre, qui pourrait être plus nuisible qu'autre chose.

Merci. Je suis heureuse de rester pour répondre à vos questions.

La vice-présidente : Merci beaucoup. Nous passons maintenant aux sénateurs qui souhaitent poser des questions.

Le sénateur Cowan : Vous ne serez pas surprise d'apprendre que j'ai plusieurs questions. Je vais poser certaines questions, et vous pourrez m'interrompre lorsque mon temps sera écoulé. Si je n'ai pas terminé, je pourrai poursuivre pendant le deuxième tour de questions. Cela vous convient?

La vice-présidente : Oui.

Le sénateur Cowan : Je ne veux pas priver mes collègues de l'occasion d'en faire autant.

Vous avez parlé des préoccupations voulant que cela entraîne une augmentation de 30 p. 100 des primes d'assurance vie temporaire chez les hommes et de 50 p. 100 chez les femmes. Je crois comprendre qu'en Grande-Bretagne, où on a mis en place un moratoire en 2001, selon une étude réalisée par le professeur Thomas, de l'Université du Kent — le comité a été informé qu'il pourrait nous aider dans notre étude à ce sujet —, entre 2001 et 2012, les primes d'assurance vie temporaire ont baissé de 25 p. 100, et les primes d'assurance contre les maladies graves ont baissé de 25 p. 100 entre 2004 et 2013.

Pourquoi l'inverse se produirait-il au Canada — une augmentation de 30 à 50 p. 100 —, alors que l'on a connu une baisse de 25 p. 100 en Grande-Bretagne?

M. Howard : Merci, sénateur Cowan. En fait, il existe plusieurs raisons qui expliquent pourquoi il pourrait en être ainsi.

Premièrement, lorsque le moratoire a été accepté au Royaume-Uni, le taux d'administration des tests était exceptionnellement bas. On ne peut avoir un effet sur les résultats globaux que si l'on soumet un très grand nombre de personnes à des tests. Même aujourd'hui, le taux d'administration des tests au Royaume-Uni est beaucoup plus bas qu'au Canada, et ce taux connaît une croissance exponentielle.

Comme vous l'avez vous-même indiqué, en 2001, bien peu de maladies faisaient l'objet de tests ou d'études scientifiques démontrant que le taux de mortalité pouvait être plus élevé. Actuellement, c'est très différent. Diverses études scientifiques démontrent que cela concerne beaucoup de gènes; mon modèle n'en compte que 13 qui, à eux seuls, pourraient avoir des effets importants.

Deuxièmement, au Royaume-Uni, il s'agit tout simplement d'une question de culture : les gens ont tendance à souscrire une assurance vie lorsqu'ils prennent une hypothèque. S'ils n'ont pas d'hypothèque, ils ne souscrivent pas une assurance vie et lorsqu'ils ont une hypothèque, le montant de l'assurance vie n'est pas beaucoup plus élevé que celui du prêt hypothécaire. Donc, il y aurait très peu de sélection adverse en fonction du montant. Cela signifie que les personnes qui ont un résultat positif ne contracteraient pas plus d'assurance que ceux qui ont un résultat négatif ou qui n'ont pas passé un test. Je ne pense pas que vous en viendrez à la conclusion que cela se produira au Canada. Ce serait plutôt le contraire : comme le projet de loi prévoit qu'il sera possible de contracter une assurance d'une valeur de 1 million de dollars, les personnes qui auront un résultat positif seront très susceptibles de le faire.

Il y a un autre aspect : au Royaume-Uni, il n'existe aucune disposition sur les règlements d'assurance-viatique. Tout le monde ne sait pas nécessairement ce que sont les règlements d'assurance-viatique.

Le sénateur Cowan : Que signifie le terme « viatique »?

M. Howard : Je ne le sais pas, mais je sais ce que sont les règlements d'assurance-viatique. Au Québec, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, certaines entreprises sont autorisées à acheter les polices d'assurance vie des particuliers. L'entreprise continue alors de payer la prime d'assurance et c'est elle qui encaisse la somme assurée.

Par exemple, sénateur Cowan, vous avez mentionné la cardiomyopathie hypertrophique. Si vous avez passé un test génétique pour démontrer que vous êtes atteint de cette maladie, le juste prix de votre police d'assurance vie serait probablement établi à environ 30 ¢ pour chaque dollar. Vous déciderez donc de souscrire une assurance vie de 1 million de dollars parce que vous avez passé ce test. La société d'assurance ne sait pas que vous avez passé ce test. Vous achetez une assurance vie d'une valeur de 1 million de dollars que vous vendez le lendemain à une société de règlement d'assurance-viatique pour 300 000 $. Le surlendemain, vous achetez une autre assurance vie de 1 million de dollars que vous vendez aussi pour 300 000 $.

Ce test génétique représente un avantage très important, car c'est ainsi que fonctionne le système. Cela n'existe pas au Royaume-Uni, mais au Canada, si.

Le sénateur Cowan : Dans les quatre provinces que vous avez mentionnées?

M. Howard : Oui, c'est exact.

Le sénateur Cowan : Et c'est illégal ailleurs?

M. Howard : Oui. L'autre raison pour laquelle on ne voit pas cela au Royaume-Uni, c'est qu'il subsiste une fluctuation statistique sur ces questions, étant donné que peu de personnes au sein de la population ont passé un test génétique dans le passé, de sorte qu'il serait très difficile de cerner le nombre de réclamations relatives au décès de personnes qui auraient eu un résultat positif et qui auraient par conséquent souscrit une assurance à un prix qui leur semblait injustement bas. Comme les entreprises ne recueillent pas ces informations, il leur est absolument impossible de mener de telles études.

Le sénateur Cowan : Permettez-moi de continuer avec vous, monsieur. Dans votre rapport, on laisse entendre que 75 p. 100 des gens qui ont un résultat positif souscriront une assurance vie et chercheront à obtenir le montant le plus élevé possible, soit 1 million de dollars ou plus. D'où vient ce 75 p. 100?

M. Howard : Manifestement, il n'y a pas d'études parce que ce n'est pas quelque chose que l'on voit actuellement. Nous n'avons pas encore d'interdiction; la situation n'existe donc pas réellement. Toutefois, je dirai au sénateur qu'il y a là un exercice de réflexion. J'ai récemment...

Le sénateur Cowan : Non, mais vous avez avancé le pourcentage de 75 p. 100. Excusez-moi. Pourquoi 75 p. 100 et non 80 p. 100, 40 p. 100 ou 60 p. 100?

M. Howard : Dans la première version du modèle, j'ai utilisé 100 p. 100, en fait.

Le sénateur Cowan : Très bien. Pourquoi?

M. Howard : Dans certaines circonstances, les gens décideront que cela ne vaut pas la peine. C'est possible, mais je pense que le nombre est relativement faible. La plupart des gens qui auront un résultat positif sauront — ne serait-ce qu'en raison de la publicité qu'en fera le Parlement du Canada — qu'ils ont maintenant un avantage qu'ils n'avaient pas auparavant, qu'ils peuvent souscrire une assurance à un prix considérablement plus bas que le risque auquel ils sont exposés. Les gens achètent des billets de loterie parce qu'ils pensent qu'ils peuvent gagner. Dans le cas présent, les probabilités sont en leur faveur, plutôt que contre eux.

Le sénateur Cowan : Il s'agit donc d'une loterie. Les gens disent qu'ils l'achètent parce qu'ils vont mourir. Nous parlons de tests génétiques. Nous ne parlons pas de l'exemple de la maladie de Huntington. Nous parlons d'un test qui vous indique que vous êtes porteur d'un gène qui vous rend plus ou moins susceptible de développer une maladie donnée à l'avenir.

M. Howard : Exactement.

Le sénateur Cowan : Vous avez indiqué que 75 p. 100 de ces gens souscriraient une police d'assurance vie. Combien de Canadiens contracteraient une assurance d'un million de dollars, quelles que soient les circonstances? Combien? Quel pourcentage de Canadiens?

M. Howard : Cela varie en fonction de l'âge. Il n'y en aurait probablement pas beaucoup dans votre groupe d'âge. Chez les gens dans la vingtaine, je dirais qu'il y en aurait beaucoup, bien au-delà de la moitié de la population. Or, si vous saviez que votre probabilité de mourir était cinq fois plus élevée que dans le reste de la population, je pense que vous trouveriez une façon d'obtenir l'argent. Je paierais certainement les primes si un membre de ma famille avait passé ce test. N'en feriez-vous pas autant?

Le sénateur Cowan : Prenons une autre situation. Plus tôt, la sénatrice Andreychuk et moi parlions d'une situation où nous aurions à choisir de passer un test ou non. Supposons que nous ayons tous les deux la même prédisposition pour une maladie quelconque. Je décide de passer le test, tandis qu'elle décide de ne pas le faire, pour ses propres raisons, fort valables. Je serais tenu de divulguer immédiatement les résultats du test. Par conséquent, soit je ne pourrais souscrire l'assurance, soit je paierais des primes plus élevées. De son côté, elle ne le saurait pas. Quant à moi, je pourrais prendre des mesures préventives — modifier mon mode de vie, par exemple —, mesures qui pourraient retarder ou prévenir l'apparition de la maladie, ce qui serait certainement une bonne chose du point de vue de la société. Par contre, elle ne changerait rien. En quoi est-ce une bonne politique publique? Ou encore, est-ce bon pour l'industrie de l'assurance?

M. Howard : Sénateur, et si votre résultat était négatif? Votre risque serait alors beaucoup plus faible. Même si vous aviez un antécédent familial de cette maladie, cela ne pourrait pas vous nuire parce que vous auriez un test négatif. Donc, en réalité, le test joue en votre faveur et non contre vous.

Le sénateur Cowan : Donc, nous revenons à la loterie.

M. Howard : En effet, mais ce serait aussi vrai si vous aviez n'importe quelle autre maladie qui vous rendrait non assurable. Vous ne savez pas que vous en êtes atteint, mais des symptômes pourraient apparaître demain. Dans l'industrie de l'assurance vie, c'est chose courante.

Les directeurs médicaux et les souscripteurs principaux des compagnies d'assurances qui sont ici sont probablement mieux placés que moi pour répondre à cette question; vous pourriez leur poser la question.

Le sénateur Cowan : Dans l'introduction de votre rapport, vous avez indiqué qu'il est possible que les gens évitent l'apparition de la maladie en passant des tests et en prenant des mesures préventives, comme subir une intervention chirurgicale, prendre des médicaments ou modifier leur mode de vie. Cela figure dans l'introduction, mais vous n'en faites plus mention dans le reste du rapport. Comment cette possibilité a-t-elle été prise en compte dans vos calculs?

M. Howard : Dans mon modèle, je suis parti du postulat qu'il y avait divers aspects à prendre en compte. J'ai commencé par un test positif. Parmi les personnes qui ont eu un résultat positif, certaines ne seront pas assurables, pour d'autres raisons. Elles ont peut-être déjà un problème de santé qui les empêche de souscrire une assurance. Elles pourraient donc être exclues pour cette raison. Cela pourrait être lié aux antécédents familiaux et la personne devrait payer des primes plus élevées en raison de ces antécédents. Cet aspect n'a pas été pris en compte.

Toutefois, les personnes qui franchissent ces deux obstacles sont assurables. Il existe une probabilité qui est intégrée au modèle. À terme, certaines de ces personnes développeront la maladie, et d'autres, non. Pour celles qui ne développent pas la maladie, j'ai supposé qu'elles auront un taux de mortalité comparable à celui de la population générale. Quant aux personnes qui développent la maladie, il y aura une augmentation du taux de mortalité. Cette augmentation ne sera pas immédiate, mais graduelle, au fil du temps. Leur taux de décès sera alors plus élevé que celui de la population générale. Ensuite, j'ai tenu compte du nombre de personnes déjà décédées. Voilà comment j'ai calculé l'incidence sur les statistiques de mortalité et, par conséquent, l'effet sur les taux de prime.

Le sénateur Cowan : Monsieur Swedlove, j'avais deux ou trois questions, mais je vais peut-être attendre au deuxième tour.

Le sénateur Eggleton : Plus tôt — lorsque le sénateur Cowan a fait son exposé —, j'ai parlé de deux sortes de tests génétiques : les tests prédictifs et les tests de diagnostic. Avez-vous une idée du pourcentage que représenterait chacun de ces deux types de tests? Actuellement, combien de personnes choisiraient de passer un test prédictif?

Dre Judy Beamish, vice-présidente et directrice médicale en chef, Financière Sun Life, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : Je suis interniste et cardiologue de formation. Pendant un certain nombre d'années, j'ai travaillé dans le domaine de la pratique clinique à temps plein ou partiel et je suis actuellement directrice médicale en chef à plein temps.

Outre les tests prédictifs et les tests de diagnostic, il existe divers genres de tests. Il y a aussi, par exemple, les tests de dépistage chez les nouveau-nés. Il existe aussi des tests liés à la paternité et les tests offerts aux gens qui veulent savoir s'ils sont porteurs d'une maladie qu'ils pourraient transmettre à leur descendance. Par exemple, si vous êtes porteur du gène de la maladie de Tay-Sachs, vous ne voudrez pas que votre partenaire soit aussi porteur parce que cela mettrait votre descendance à risque. Les gens ne courent aucun risque personnellement; le risque ne concerne que leur descendance.

Les gens choisissent de passer un test génétique pour une multitude de raisons. Je n'ai pas vu la répartition sur ces chiffres pour quelque pays que ce soit, mais je crois que cela varie constamment.

Le sénateur Eggleton : Je crois comprendre que le test prédictif est un test qu'une personne en bonne santé passe pour savoir ce que l'avenir lui réserve en raison de ses antécédents familiaux ou de son bagage génétique, tandis que dans le cas du test de diagnostic, la personne est malade et cherche à savoir s'il s'agit d'une maladie héréditaire. Je comprends que vous dites que cela varie.

Dre Beamish : Je crois que vous avez bien saisi le principe.

Le sénateur Eggleton : L'industrie a-t-elle des réserves au sujet de l'application de ce projet de loi relativement à l'un ou l'autre ou aux deux sortes de test?

Frank Zinatelli, vice-président et avocat général, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : Je pense que c'est M. Swedlove qui devrait répondre à cette question.

M. Swedlove : Oui. Je crois que l'industrie accepte mal l'idée que les deux parties ne disposent pas des mêmes renseignements, car cela peut donner lieu à des antisélections et à une augmentation des coûts pour l'ensemble de la population. C'est une préoccupation d'ordre plus général, sénateur.

Le sénateur Eggleton : Parlons de cette question de l'augmentation des coûts, car les actuaires l'ont chiffrée et ils ont annoncé que, pour la tranche des 20 à 60 ans, l'interdiction entraînerait des augmentations de 30 p. 100 chez les hommes et de 50 p. 100 chez les femmes. Comment peut-on arriver à ces résultats? Les tests de ce type, surtout les tests prédictifs, sont relativement nouveaux. Comment peut-on soudainement affirmer qu'il y aura d'importantes augmentations si cette information n'est plus disponible? Vous procédez sans depuis des siècles — du moins, depuis des décennies en ce qui concerne le Canada — et cela n'a jamais été un facteur déterminant. Cette information, et surtout les résultats prédictifs, n'était tout simplement pas là.

M. Swedlove : Eh bien, la chose se résume à cela : qu'est-ce que les deux parties savent au sujet de la personne à assurer? Bien sûr, il est vrai que les tests génétiques sont relativement nouveaux et que cette information n'était pas disponible auparavant, mais elle permet d'éliminer l'antisélection. C'est-à-dire que vous ne vous retrouvez pas dans une situation où les personnes contractent une assurance parce qu'ils savent que les probabilités de toucher cette assurance sont en leur faveur.

Je crois que le fait de ne tenir compte que du passé n'est pas particulièrement indicatif. Dans tous les cas, comme l'a souligné le sénateur dans ses observations, le test génétique est un domaine qui connaît une croissance remarquable. Il faut en fait s'attendre à ce que la multiplication de ces tests pour évaluer la santé des personnes ait une incidence sur les coûts et sur les risques de contracter des maladies.

Le sénateur Eggleton : J'en conviens, mais je ne comprends pas comment vous arrivez à chiffres. Ce que vous dites est très général, alors que les prédictions d'augmentation des coûts sont très précises.

Laissez-moi vous poser des questions au sujet de ce phénomène où des gens passent un test et contractent par la suite des assurances considérables. Un article du projet de loi du sénateur Cowan, l'article 6, permet la divulgation des résultats de tests génétiques déjà réalisés lorsque le montant du contrat d'assurance dépasse le million de dollars ou que le contrat prévoit le versement d'une prestation de plus de 75 000 $ par année. Cette disposition ne suffit-elle pas à éliminer ceux qui, soudainement, décident de se souscrire à beaucoup d'assurances?

M. Swedlove : Je crois que les calculs de l'Institut canadien des actuaires se fondaient sur une police d'assurance maximum de 1 million de dollars. Ce qui veut dire que les chiffres de l'institut tiennent compte de ce qui est écrit dans le projet de loi. En fait, le projet de loi indique 1 million de dollars par contrat et non de 1 million de dollars par personne, ce qui est encore plus sérieux que les chiffres...

Le sénateur Eggleton : Mais la disposition constitue une exemption qui vous permet d'obtenir cette information.

M. Swedlove : Lorsque le montant est de 1 million ou plus, oui.

Le sénateur Eggleton : Croyez-vous qu'il faudrait changer le montant? L'intention de cet article est d'éviter que les personnes passent ces tests et souscrivent à de multiples assurances en sachant qu'elles contracteront cette maladie tôt ou tard. Croyez-moi, il y a une bonne partie de la population qui ne peut pas souscrire à de multiples assurances.

Quoi qu'il en soit, cet article n'empêche-t-il pas une telle chose de se produire? Si vous croyez que les montants de 1 million de dollars et de 75 000 $ de prestations annuelles devraient être modifiés, quels chiffres proposeriez-vous?

M. Swedlove : Ce que nous croyons, c'est que les deux parties devraient disposer de renseignements équivalents, et que le montant de la prime soit ajusté aux risques réels. C'est la seule façon de rendre les choses équitables pour tout le monde.

Je le répète, le montant de 1 million de dollars tient compte des augmentations importantes qui ont été constatées, car ce sont ces montants que les actuaires ont utilisés pour faire leurs calculs.

Le sénateur Eggleton : D'accord. Vous ne me proposez aucune solution de rechange.

Un certain nombre de pays ont déjà fait quelque chose de semblable : l'Autriche, la Belgique, la France, Israël, la Norvège, la Pologne. Les États-Unis ont été mentionnés, mais ils ne sont peut-être pas allés aussi loin que ces autres pays, qui ont couvert à la fois les tests prédictifs et les tests de diagnostic génétique. Que savent ces pays? Pourquoi peuvent-ils le faire et pas nous?

M. Swedlove : Tous les marchés d'assurance sont différents. Je ne peux pas affirmer que ce qui se passerait ailleurs se passerait aussi ici, mais le marché qui ressemble le plus au nôtre est celui des États-Unis. Je vous ferai remarquer que la loi que les États-Unis adoptent en la matière exempte l'assurance vie, l'assurance contre les maladies graves et l'assurance invalidité de longue durée, qui sont vraisemblablement les types d'assurance dont nous discutons aujourd'hui. Selon nous et dans leur sagesse, ils ont soustrait ces types d'assurance à toute forme de loi. Si vous consentez à aller dans le même sens, nous serons de toute évidence disposés à appuyer le projet de loi.

L'un des derniers pays à s'être intéressé sérieusement à la question est l'Australie. L'Australie a décidé que le principe et le concept de la parité d'information et de la tarification fondée sur les risques propres à l'assuré potentiel devaient être préservés. L'Australie a par conséquent décidé de ne pas interdire le recours aux renseignements découlant de n'importe quel type de test génétique. Elle a plutôt opté pour une approche semblable au code que nous avons présenté la semaine dernière.

Le sénateur Eggleton : Vous avez beaucoup parlé de la parité en matière d'information. La parité d'information signifie que les résultats de tests génétiques que passe une personne — et que vous n'exigez pas, de toute manière —, que ces résultats, le cas échéant, doivent vous être communiqués. C'est bien cela?

M. Swedlove : Oui, monsieur.

Je dois toutefois préciser que l'information découlant des tests génétiques n'a pas d'incidence sur les polices existantes, comme, par exemple, une police à prime viagère.

Le sénateur Eggleton : C'est un élément important, en effet. L'information n'a pas d'incidence sur les polices en place au moment où le test a lieu.

M. Swedlove : C'est exact.

La sénatrice Nancy Ruth : M. Swedlove, j'aimerais vous poser des questions au sujet du nouveau code proposé par l'ensemble de l'industrie. Votre cinquième point indique que le code obligera les compagnies à venir en aide aux proposants qui ne sont pas admissibles à de l'assurance. Comment une compagnie d'assurance peut-elle faire cela?

M. Swedlove : Je vais demander à M. Zinatelli de vous en dire plus long à ce sujet.

M. Zinatelli : Merci, sénateur. L'objectif de cette disposition est de faire en sorte que les compagnies aident autant que faire se peut les personnes qui ont postulé une assurance, mais qui n'ont pu en obtenir une. La première chose à faire dans ces cas-là est de leur rappeler qu'il existe d'autres assureurs. Cet aspect est très important, car le marché de l'assurance vie et de l'assurance maladie est très compétitif. Si une première compagnie refuse de vous assurer, vous devriez en essayer une deuxième, puis une troisième et une quatrième, car elles n'ont pas toutes la même tolérance aux risques. De plus, certaines compagnies assurent surtout tel ou tel type de maladies avec lesquelles elles ont l'habitude, ce qui leur permet de mieux mesurer le risque et de mieux évaluer dans quelle mesure elles sont disposées à assurer les personnes d'états de santé divers.

Une autre façon d'aider les gens est de leur indiquer, par exemple, qu'il y a des produits garantis sur le marché. Vous pouvez vous procurer une bonne assurance grâce aux polices garanties qui existent. Bref, voilà deux façons d'aider le consommateur quand une compagnie donnée ne peut pas l'assurer.

La sénatrice Nancy Ruth : Au dernier point, on exige que les assureurs fassent rapport, qu'ils « attestent chaque année ». Il s'agit d'un mécanisme de déclaration volontaire. Eh bien, le Parlement est rompu aux mécanismes de déclaration volontaire, et j'avoue que je ne leur accorde pas beaucoup d'importance, tous autant qu'ils soient.

Je dois vous poser la question : quelles seront les sanctions pour les rapports mal informés? Comment allez-vous punir les assureurs qui ne jouent pas franc jeu?

M. Swedlove : Madame la sénatrice, la conformité au code est une obligation pour les assureurs membres de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, alors tous les membres ont convenu d'obéir au code et de faire cette auto-vérification.

La sénatrice Nancy Ruth : Qui évalue ces déclarations volontaires?

M. Swedlove : Les assureurs feront cette auto-évaluation, mais il ne fait aucun doute que les assureurs non conformes s'attireront d'énormes pressions pour les inciter à se conformer.

La sénatrice Nancy Ruth : Comment le saurez-vous?

M. Swedlove : Les gens nous le diront. Il existe de nombreux groupes d'intérêts pour veiller à ce que le code soit observé.

La sénatrice Nancy Ruth : Comment cela fonctionne-t-il dans votre industrie? S'agit-il d'une sorte de tribunal?

M. Swedlove : Oui. Nous ne sommes pas un organisme de réglementation, et nous nous fions à nos membres pour faire preuve de bonne volonté à ce chapitre. Mais nous comptons aussi sur la surveillance du public, et nous nous attendons à ce que les assureurs respectent leurs engagements.

La sénatrice Nancy Ruth : Peut-on présumer que les compagnies qui fausseront ces rapports seront celles qui tolèrent plus de risque?

M. Swedlove : Non, je ne le crois pas. Les compagnies d'assurance s'efforcent avant tout d'être des organisations viables. Nous avons des organismes de contrôle qui veillent à ce que ce soit le cas, et c'est là une partie importante de leur travail. Les risques que prennent les assureurs sont des risques calculés, mais, comme le faisait remarquer mon collègue, chaque compagnie interprète le risque à sa façon, et c'est pourquoi la tarification varie d'un assureur à l'autre.

La sénatrice Nancy Ruth : La première fois que j'ai examiné le projet de loi du sénateur Cowan, j'ai cru que la question se limitait à dire qui allait faire de l'argent. L'adoption du projet de loi allait-elle entraîner des pertes pour l'industrie ou des gains pour les particuliers? J'avoue que vos exemples m'ont surprise un peu. Je suis peut-être trop naïve et je crains peut-être les opérations pyramidales, mais disons que tout semblait pointer dans cette direction. Ce sont des choses qui arrivent, semble-t-il.

C'est encore strictement une question d'argent. Est-ce la responsabilité de la société envers les actionnaires des compagnies d'assurance d'absorber les conséquences de la peur de la maladie chez les individus, comme nous le faisons par le biais de nos impôts pour les systèmes de santé provinciaux, ou est-ce au particulier d'encaisser tous les coups? Selon moi, cette question est fondamentale. Comment répondez-vous à cela?

M. Swedlove : Selon moi, tout s'équilibre et il n'y a pas de gagnant. La question n'est pas de savoir si certains vont mieux s'en tirer que d'autres alors que tous les autres resteront au même point. Ce que l'Institut canadien des actuaires a montré — et qui est bien documenté ailleurs —, c'est qu'au final, les tests génétiques ne peuvent pas être pris en considération dans la tarification des polices, et que cela aura nécessairement des répercussions sur les primes, mais ailleurs. Il n'est pas ici question de quelques personnes qui tireront leur épingle du jeu alors que les gens de l'assurance devront encaisser les coups et tous les autres s'en sortiront indemnes.

Essentiellement, la tarification des assurances se fait en prenant le risque total associé à un groupe de personnes et en fixant les coûts qui lui sont associés. Selon moi, la question ne concerne pas les profits d'une compagnie d'assurance, la question est de savoir qui paie pour cette responsabilité; et nous affirmons que les coûts de cette responsabilité peuvent être élevés.

M. Howard : Je crois que vous allez constater que les compagnies d'assurances sont assez fortes et assez informées pour prendre soin d'elles-mêmes, mais je ne suis pas certain que l'on puisse en dire autant du public que l'on assure. Les coûts augmenteront. À moins que les primes n'augmentent, ce sont les assureurs qui devront payer, et ils ne le feront pas. Les primes des assurés augmenteront, et de façon très drastique, je le crains. Plus nous en apprendrons au sujet de la génétique, plus il y a de risque que les coûts d'assurer le public augmentent. Voilà où sont les coûts. Voilà pourquoi l'Institut canadien des actuaires s'inquiète des répercussions que cela aura sur les Canadiens ordinaires.

Le sénateur Munson : Un certain nombre de personnes ici présentes ont fait allusion au nouvel énoncé de position sur le code de l'industrie concernant les tests génétiques pour la sélection des risques en assurance. La section 5.9 de la nouvelle politique — soit la section où l'on parle des résultats de tests subis par un membre de la famille — indique que les « assureurs n'exigeront pas les résultats d'un test génétique d'une personne autre que le proposant à l'assurance ni ne chercheront à obtenir ces résultats de façon indépendante ».

Est-ce que c'est ce qui se produit à l'heure actuelle? Est-ce que les assureurs exigent la divulgation des résultats de tests génétiques de personnes qui ne leur ont même pas présenté de demande pour être assurées par eux?

M. Zinatelli : Certaines personnes nous ont rapporté de manière anecdotique que ce genre de choses se produisait, et nous avons aussi appris que l'Australie avait de fait ajouté une disposition à son code pour interdire ces pratiques. Nous avons cru bon d'indiquer sans équivoque que nous ne faisons pas cela. Nous voulions simplement dire clairement que les compagnies d'assurances recherchent l'information génétique de la personne à assurer, de la personne dont la vie va être assurée, et non celle des autres membres de sa famille. Dans un sens, c'était plus par souci de clarté, pour clore la question une fois pour toutes.

Le sénateur Munson : Pour clore la question? Je croyais que cela n'arrivait jamais dans ce pays.

M. Zinatelli : À ce que je sache, non. Comme je l'ai dit, cela nous a été rapporté de façon anecdotique, mais nous avons cru bon de le préciser dans le document, pour que ce soit clair.

Le sénateur Munson : Je suis certain que le sénateur Cowan a des questions plus complexes à ce sujet, mais j'essaye simplement de comprendre pourquoi il a été mentionné que le gouvernement israélien a une loi en la matière. Je n'ai pas eu d'éclaircissements sur les raisons qui ont poussé Israël à faire ce qu'ils ont fait et pourquoi d'autres pays ont semblé s'arrêter à mi-chemin. De toute évidence, certains pays estiment que cela ne fonctionne pas et qu'une loi doit être mise en place pour protéger le public. Savez-vous s'il y avait un problème particulier en Israël, une situation qui ne serait pas présente au Canada?

M. Zinatelli : Sénateur, nous n'avons pas cette information. Comme d'autres ont répondu, nous serons heureux d'examiner la chose, notamment en ce qui concerne le moment où la loi a été mise en place, car il y a eu une période au début des années 2000 où le génome humain a été cartographié pour la première et où cela a causé certains remous. Comme ont pu l'indiquer le sénateur Cowan, je crois, et d'autres, un certain nombre d'États européens ont voté certains règlements qui, avec le recul, n'auraient peut-être pas dû être adoptés si vite. Voilà une autre observation que j'ai entendue.

Le sénateur Munson : Ma troisième question porte sur un élément auquel Mme Jensen a fait allusion, je crois. Savons-nous si des gens au pays qui ont subi des tests génétiques se sont vu refuser des services d'une compagnie d'assurance ou un emploi? Cela s'est-il déjà produit au pays? Y a-t-il eu des centaines ou des milliers de personnes qui ont été victimes de discrimination ou qui disent l'avoir été, parce qu'ils avaient subi des tests génétiques et qu'ils s'étaient ensuite vu refuser des services d'une compagnie d'assurance ou un emploi?

Mme Jensen : Pas à ma connaissance; il n'y a aucune décision à cet effet. L'étude de l'Université de la Colombie- Britannique que j'ai examinée disait que 6,4 p 100 des répondants — et je suis désolée, mais je ne sais pas combien il y en avait au total — ont senti avoir été victimes de discrimination dans leur emploi. Il est difficile de savoir si cela signifie qu'il y a vraiment eu de la discrimination ou si les gens craignaient d'en être victimes. Je me suis notamment dit que les employés ne comprennent pas toujours qu'ils sont protégés en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, de leur convention collective et du droit du travail et de l'emploi et qu'ils peuvent porter plainte s'ils croient avoir été victimes de discrimination fondée sur des caractéristiques génétiques. Ils sont protégés s'ils croient avoir été victimes de discrimination. J'ai pratiqué dans ce domaine, et j'ai presque exclusivement pratiqué dans le domaine des droits de la personne sur les scènes fédérale et provinciale, et je n'ai jamais vu un tel cas.

Je tenais aussi à m'excuser d'avoir dit « projet de loi C ». J'ai commis un petit lapsus. Je ne voulais aucunement manquer de respect envers le Sénat.

Le sénateur Munson : Nous savons ce dont il est question ici.

M. Zinatelli : Puis-je faire un commentaire en ce qui concerne le domaine de l'assurance? Nous sommes évidemment au fait d'une récente étude par des professeurs de l'Université McGill qui ont passé en revue diverses publications universitaires sur la discrimination fondée sur des caractéristiques génétiques. Les universitaires n'ont trouvé aucune preuve d'une telle discrimination. L'étude a été faite il y a quelques années. Il s'agissait tout simplement d'une compilation de toutes les études qui ont été réalisées sur la question. Il y avait deux auteurs, dont Yann Joly. Je pourrais vous transmettre ce document.

Un autre élément peut être pertinent à votre question. Certaines provinces considèrent comme injuste ou comme une pratique trompeuse pour les compagnies d'assurance d'imposer des primes différentes aux personnes d'une même catégorie qui présentent le même degré de risque. Les compagnies d'assurance évaluent les risques, puis la loi les oblige à imposer une prime semblable aux personnes qui présentent le même degré de risque. Selon moi, cela vient peut-être donner un élément de réponse à votre question sur la discrimination injuste.

Le sénateur Cowan : Le sénateur Munson a posé l'une de mes questions, mais j'en ai une autre qui est liée à la discussion que j'ai eue avec M. Howard il y a quelques minutes. J'aimerais vous entendre, messieurs Swedlove et Zinatelli, à ce sujet.

Nous parlions des conséquences ou des grandes augmentations des primes que pourrait entraîner l'adoption d'une telle mesure législative. Je lui ai souligné que c'est exactement le contraire qui s'est produit en Grande-Bretagne. Il nous a expliqué pourquoi c'était le cas. Un tel régime législatif peut prendre diverses formes. On peut parler de tests diagnostiques ou de tests de prédisposition, ou les deux. Cela fait parfois partie des lignes directrices d'une industrie, mais il peut aussi y avoir des interdictions ou des moratoires. Divers mécanismes sont utilisés.

Connaissez-vous un marché du domaine de l'assurance dont les primes ont augmenté, comme en parlait M. Howard? Les effets indésirables dont il a fait mention se sont-ils fait sentir sur ce marché?

M. Swedlove : C'est difficile de faire des comparaisons à l'échelle internationale. Voici un exemple. En Europe continentale, les polices d'assurance de longue durée n'ont pas la cote. La majorité des produits vendus sont des polices d'assurance de courte durée, soit une assurance temporaire. Par définition, ou presque, cette situation ne se présenterait pas dans certains des pays que vous avez ciblés en Europe continentale, tout simplement parce que si un test génétique détermine que vous êtes plus susceptible de mourir prématurément dans 10 ou 15 ans vous ne pourrez pas contracter une police qui pourrait vous servir en ce sens.

Le sénateur Cowan : Une police d'assurance vie entière?

M. Swedlove : C'est exact. Si vous deviez contracter une assurance vie temporaire, vous devriez potentiellement le faire durant 10 ans et vous continueriez de payer votre police sans avoir de coûts connexes. L'industrie canadienne se concentre fortement sur les polices d'assurance vie entière et les polices d'assurance de longue durée. C'est le fondement de notre industrie depuis sa création. Par conséquent, je crois que les effets seraient considérablement plus grands.

De plus, comme M. Howard l'a souligné, je crois que nous ne connaissons tout simplement pas vraiment les conséquences et les résultats dans ces pays, parce que nous ne pouvons pas encore les voir. Il faut donc faire des conjectures pour en prédire les conséquences. Je crois comprendre que c'était le fondement du modèle de M. Howard.

Le sénateur Cowan : Vous faites évidemment des prévisions fondées sur les expériences passées. C'est ce que vous faites.

M. Swedlove : Ce sont des expériences passées que si nous connaissons les résultats des tests génétiques. S'il y a une interdiction dans ces pays, comment pouvons-nous en connaître les résultats?

Le sénateur Cowan : En ce qui concerne le marché de l'assurance vie entière des autres pays, quelles en ont été les répercussions?

M. Swedlove : Cela pourrait concerner une plus petite partie de l'Europe continentale. Nous avons déjà parlé de la situation au Royaume-Uni. En Australie, les compagnies offrent des polices d'assurance de longue durée, mais le pays a choisi de ne pas aller dans cette voie.

Nous devons nous pencher sur le marché de l'assurance individuelle qui existe. Nous pouvons établir ce qui s'est passé en Israël ou dans certains autres pays et essayer de voir la mesure dans laquelle leur expérience se rapproche de la nôtre, mais nous sommes d'avis que les répercussions seraient considérables en nous fondant sur de très solides données empiriques provenant de spécialistes en sélection des risques.

Le sénateur Cowan : L'expérience à laquelle vous faites allusion en Europe s'applique-t-elle également à Israël? Le marché de l'assurance là-bas est-il principalement axé sur les polices d'assurance vie temporaire plutôt que sur les polices d'assurance vie entière?

M. Swedlove : Sénateur, je ne suis pas au fait de la situation en Israël. Nous devrons examiner le tout.

Le sénateur Cowan : Monsieur Zinatelli, dans votre réponse à une question du sénateur Eggleton ou de la sénatrice Nancy Ruth, vous avez dit que certains pays ont peut-être mis la charrue devant les boeufs en adoptant des mesures réglementaires qu'ils regrettent maintenant. Ce n'est pas exactement ce que vous avez dit, mais c'en est l'essence.

Connaissez-vous des pays qui ont imposé une interdiction ou un moratoire ou qui ont adopté des mesures législatives et qui sont maintenant revenus sur leur décision?

M. Zinatelli : Pas à ma connaissance, sénateur. J'ai entendu ces commentaires de certains universitaires qui scrutent ces éléments, mais je ne connais aucun pays qui est revenu sur sa décision. Comme on peut le deviner, lorsqu'une interdiction est en place, c'est très difficile de revenir en arrière.

Le sénateur Cowan : N'y a-t-il pas de cas où un moratoire ou un code volontaire est entré dans la loi?

M. Zinatelli : En ce sens, le seul moratoire que j'ai mentionné aujourd'hui est celui du Royaume-Uni, et ce moratoire continue d'être renouvelé tous les cinq ans, si je ne m'abuse. Je ne connais pas d'autres cas où des moratoires ont été imposés ailleurs, sénateur.

La sénatrice Andreychuk : Par simple curiosité, j'aimerais vous poser une question, madame Jensen. J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit, parce que vous avez traité de nombreuses questions juridiques et que c'est mon champ d'intérêt. Vous parliez de discrimination, et il est évident que tous les droits de la personne sont égaux. Par conséquent, l'ADN est mis sur le même pied d'égalité que les handicaps, et vous vous penchez notamment sur la discrimination liée aux droits de la personne dans le domaine de l'emploi. Si vous avez étudié la question, l'ADN a-t-il été utilisé ailleurs que dans le domaine de l'emploi à des fins de discrimination, ou est-ce le seul domaine où nous commençons à y avoir recours?

Mme Jensen : À ma connaissance, oui. C'est le domaine dans lequel j'entrevois un certain potentiel à cet égard. La Loi fédérale sur les droits de la personne et toutes les lois en la matière s'appliquent aux biens et aux services, à la prise de mesures visant à satisfaire les besoins de tout individu, et cetera. Évidemment, les polices d'assurance sont des contrats ou des services. Des poursuites relatives à la discrimination fondée sur des caractéristiques génétiques seraient possibles, compte tenu de la protection contre la discrimination dans la prestation de services ou la formation de contrats. C'est à cet endroit que se situe une telle protection.

Je ne connais pas d'autres domaines dans lesquels les tests génétiques sont un obstacle à la prestation de tout autre service ou à la prise de mesures visant à satisfaire les besoins de tout individu, mais je comprends pourquoi cela touche le domaine de l'emploi, en particulier en ce qui a trait à des enjeux comme les dispositions relatives aux avantages sociaux.

Il importe également de souligner que la majorité des lois sur les droits de la personne prévoient des exceptions pour les employeurs, à savoir qu'ils ne peuvent être accusés de discrimination si l'employé n'est pas admissible à un régime d'avantages sociaux, par exemple, parce qu'il ne satisfait pas aux exigences en matière de santé. Il y a donc des mesures réglementaires relatives aux avantages sociaux en vertu de la LCDP qui prévoient des exceptions pour les fournisseurs d'assurance, à savoir qu'ils ne pourront pas être accusés de discrimination ou faire l'objet de plaintes en ce sens. Il faudra donc examiner plus attentivement de telles réformes pour déterminer la relation entre ces exceptions et les propositions de réforme.

La vice-présidente : Comme il ne semble pas y avoir d'autres questions, je vais lever la séance.

Merci aux sénateurs et aux témoins de leur présence ce soir.

(La séance est levée.)


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