Aller au contenu
RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 11 - Témoignages du 2 octobre 2014


OTTAWA, le jeudi 2 octobre 2014

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, à qui a été renvoyé le projet de loi S-201, Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique, se réunit aujourd'hui, à 8 h 4 pour l'examiner.

La sénatrice Salma Ataullahjan (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Bonjour à tous.

Honorables sénateurs, le sénateur Tannas a présenté une déclaration écrite d'intérêt privé au sujet du projet de loi S- 201, Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique. Conformément à l'article 15-7 du Règlement, cette déclaration sera consignée au compte rendu de la réunion.

Je vous souhaite maintenant la bienvenue à la 19e réunion du Comité sénatorial permanent sur les droits de la personne qui a lieu pendant la deuxième session de la 41e législature. Nous avons le mandat du Sénat d'examiner les questions liées aux droits de la personne au Canada et à l'étranger.

Malheureusement, notre présidente, la sénatrice Jaffer, ne pouvait pas être ici aujourd'hui. À titre de vice-présidente du comité, c'est à moi que revient l'honneur de vous accueillir aujourd'hui. Je m'appelle Salma Ataullahjan, et je représente Toronto, en Ontario.

Avant de continuer, je vais demander à mes collègues de bien vouloir se présenter.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de Toronto.

Le sénateur Cowan : Jim Cowan, sénateur de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Greene Raine : Bonjour. Je suis Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Nancy Ruth : Nancy Ruth, de Toronto.

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, de Toronto.

La vice-présidente : Nous sommes réunis aujourd'hui pour commencer à entendre nos témoins sur le projet de loi S- 201, ou Loi sur la non-discrimination génétique, un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le sénateur James Cowan, leader de l'opposition au Sénat.

Pour commencer, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Carman Baggaley, conseiller stratégique principal des politiques, et Patricia Kosseim, avocate générale principale et directrice générale.

Je crois savoir que vous avez un bref exposé à nous faire et que vous pourrez ensuite répondre aux questions des sénateurs.

Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Commissariat à la protection de la vie privée du Canada. Merci beaucoup, madame la présidente et honorables sénateurs.

[Français]

Je vous remercie vivement de nous avoir invités ce matin à exprimer notre opinion concernant le projet de loi S-201, Loi sur la non-discrimination génétique.

J'aimerais remercier l'honorable sénateur Cowan d'avoir déposé ce projet de loi qui porte sur un sujet très important. La protection des renseignements génétiques a été l'une des priorités stratégiques du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada au cours des dernières années. À ce titre, nous avons publié, en juillet dernier, une Déclaration concernant l'utilisation des résultats des tests génétiques par les compagnies d'assurances de personnes.

Notre déclaration exhorte l'industrie des assurances de personnes à ce qui suit, et je cite :

[...] élargir la portée de son moratoire volontaire, qui exige présentement que ses membres s'abstiennent de demander aux proposants de subir des tests génétiques, pour également s'abstenir de demander accès aux résultats des tests génétiques déjà existants, et ce, jusqu'à ce que leur nécessité et leur efficacité puissent être clairement démontrées.

Revenons au projet de loi S-201. L'objectif global de ce projet de loi va dans le sens de notre déclaration. Il reconnaît que les tests génétiques révèlent des renseignements très sensibles qui méritent une protection particulière. Cependant, le projet de loi va beaucoup plus loin que notre déclaration.

Nous avons exhorté l'industrie de s'abstenir de demander accès aux résultats de tests génétiques existants de façon temporaire jusqu'à ce que leur nécessité et leur efficacité puissent être clairement démontrées. Le projet de loi S-201 créerait une interdiction ayant force de loi et d'une durée indéterminée.

Au sens du projet de loi, nul ne pourrait obliger une personne à subir un test génétique ou à en communiquer les résultats comme condition requise pour lui fournir des biens et services, ou pour conclure un contrat avec elle. Cette interdiction s'appliquerait à un large éventail d'organisations, notamment celles de l'industrie des assurances de personnes.

[Traduction]

Comme nous l'avons souligné dans notre déclaration, les individus peuvent subir des tests génétiques pour de nombreuses raisons. Il peut s'agir de raisons médicales valables bien établies dans un cadre clinique. Mais des gens utilisent aussi des tests pour la recherche, pour établir la paternité en vue d'une grossesse, pour en savoir plus sur leurs ancêtres ou simplement par curiosité.

L'industrie de l'assurance considère qu'elle doit avoir accès à tous les résultats des tests génétiques existants afin que les deux parties d'un contrat de bonne foi soient sur un pied d'égalité sur le plan des connaissances. Toutefois, dans la grande majorité des cas, la capacité à l'heure actuelle de prédire avec un degré de certitude raisonnable l'état de santé et l'espérance de vie d'une personne à partir de tests génétiques est relativement faible. En ce qui a trait aux maladies monogéniques rares pour lesquelles les résultats des tests génétiques pourraient s'avérer très probants, l'incidence financière de dispositions interdisant l'accès de l'industrie à ce petit sous-ensemble de cas fait actuellement l'objet d'un sain débat entre spécialistes en actuariat qualifiés.

Le projet de loi S-201 reconnaît les avantages sociaux prépondérants d'une protection du droit à la vie privée des proposants et de l'offre d'une couverture d'assurance à tous, sans égard au patrimoine génétique. En outre, nous sommes encouragés par le fait que le gouvernement s'est engagé dans le discours du Trône à empêcher les employeurs et les compagnies d'assurances de faire de la discrimination sur la base d'analyses génétiques.

J'accueille favorablement le débat public que ce projet de loi génère, mais si la loi n'est pas adoptée, le Commissariat exhortera l'industrie de l'assurance, les groupes de défense des patients, les gouvernements fédéral et provinciaux et les autres parties intéressées à unir leurs efforts afin de trouver une solution non législative contraignante, comme celle existant au Royaume-Uni par exemple, pour s'assurer que les renseignements génétiques sont protégés de façon adéquate et utilisés uniquement lorsque cela est approprié et nécessaire.

C'est ce qui conclut mon exposé et c'est maintenant avec plaisir que je répondrai à vos questions, honorables sénateurs.

Le sénateur Cowan : Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de votre intérêt et de votre participation dans ce dossier et de votre exposé ce matin.

Le commissariat défend l'idée qu'il y a une différence qualitative entre les renseignements sur l'ADN d'une personne et ceux contenus dans son dossier médical. Pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste cette différence et pourquoi vous faites cette distinction?

M. Therrien : Les renseignements que contient l'ADN d'une personne sont de nature très sensible et doivent être très bien protégés. Je vais demander à Mme Kosseim de vous expliquer la différence.

Patricia Kosseim, avocate générale principale et directrice générale, Commissariat à la protection de la vie privée du Canada : Le commissaire a indiqué les raisons de notre intérêt à l'égard des renseignements génétiques. Elles sont principalement liées à leur nature sensible.

Le sénateur Cowan : Avez-vous lu la déclaration que l'industrie de l'assurance a publiée la semaine dernière?

M. Therrien : Oui.

Le sénateur Cowan : Cela répond-il à vos inquiétudes?

M. Therrien : La déclaration et le code contiennent des éléments positifs, notamment pour ce qui est des renseignements qui seront fournis aux consommateurs. Toutefois, l'industrie est toujours d'avis qu'elle doit avoir accès à tous les renseignements génétiques pour qu'un contrat soit conclu de bonne foi entre les parties. Nous avons toujours des réserves sur ce point, car en ce moment, ce n'est pas un élément nécessaire ou efficace à notre avis. Le fait d'avoir un accès à tous les renseignements génétiques pose problème à notre avis du point de vue des principaux fondamentaux de la LPRPDE, la loi que nous appliquons.

Le sénateur Cowan : Ma prochaine question porte justement sur la loi. Pourriez-vous nous dire ce qui vous porte à croire que la loi actuelle n'est pas suffisante pour protéger les Canadiens dans ce domaine?

M. Therrien : Je ne crois pas que nous ayons dit que la LPRPDE n'offre pas une protection suffisante. Le projet de loi S-201 va certainement beaucoup plus loin que la LPRPDE. Ce que nous avons fait jusqu'à maintenant, c'est d'examiner les exigences de l'industrie au regard de la LPRPDE. Notre position est donc que pour respecter les principes fondamentaux de la LPRPDE, les organismes et les compagnies ne doivent recueillir que les renseignements raisonnables qui leur seront utiles à des fins légitimes. L'information en question ne doit donc être recueillie que dans ces circonstances.

C'est le cadre d'analyse que nous utilisons actuellement pour appliquer la loi. C'est en vertu de ce cadre d'analyse que nous recommandons à l'industrie de s'abstenir, en ce moment, compte tenu de l'état d'avancement des recherches, d'exiger des proposants les résultats des tests génétiques existants.

Le sénateur Cowan : Pourtant, l'industrie a clairement indiqué dans la déclaration rendue publique la semaine dernière que c'est ce qu'elle allait continuer à faire.

M. Therrien : En effet, et nous ne sommes pas d'accord avec cela.

Le sénateur Cowan : Ce que je veux dire, c'est que vous êtes d'accord avec l'idée que la déclaration publiée la semaine dernière par l'industrie ne répond pas à vos inquiétudes sur un des points clés.

M. Therrien : C'est exact, oui.

Le sénateur Eggleton : Il y a un débat sur la différence entre le test génétique prédictif et le test génétique diagnostique. L'adjectif prédictif veut dire que vous en êtes porteur, que cela fait partie de vous, et que la maladie pourrait se développer plus tard. Le terme diagnostique veut dire que la maladie s'est déclarée. Je présume que d'autres renseignements peuvent aussi être divulgués, en plus de la source possible de la maladie.

La question qui se pose est la suivante : Où devons-nous tirer la ligne ici, s'il y a lieu? Apparemment, certains pays ont inclus tant les tests prédictifs que diagnostiques dans leur loi. J'ai entendu dire que c'est le cas en Autriche, en Belgique, en France, en Israël, en Norvège et au Portugal. Ils ne font pas la distinction entre les deux tests.

L'industrie affirme que les primes vont augmenter considérablement si elle n'obtient pas ces renseignements. Elle est d'avis qu'elle doit l'obtenir. Je ne vois pas pourquoi, en particulier dans le cas des tests prédictifs, cela influerait sur les primes, car il n'y a pas encore beaucoup de ces tests à l'heure actuelle. On en est encore au début, à ce qu'il me semble, et ils sont peu nombreux. J'aimerais que vous nous parliez de la distinction entre tests diagnostiques et prédictifs, en particulier du point de vue des commentaires que nous a faits l'industrie à la dernière réunion.

M. Therrien : Si vous le permettez, je vais répondre à la question en termes généraux et demander ensuite à M. Baggaley de vous donner plus de détails.

Je vais vous parler de l'incidence sur la prime d'une police d'assurance qu'aurait le fait de permettre ou d'interdire l'utilisation des tests génétiques. Vous avez entendu le point de vue de l'industrie de l'assurance et celui aussi, je crois, de l'Institut canadien des actuaires. Ces organisations réputées sont d'avis qu'une interdiction aurait une incidence sur les primes, mais d'autres organisations sont d'avis contraire. C'est pourquoi j'ai mentionné dans mon exposé que la question fait l'objet d'un sain débat entre les spécialistes en actuariat à l'heure actuelle. Je tiens simplement à souligner qu'il n'y a pas consensus entre les spécialistes sur ce point.

Je vais demander à M. Baggaley de répondre à vos questions sur les différents types de test.

Carman Baggaley, conseiller stratégique principal des politiques, Commissariat à la protection de la vie privée du Canada : Vous avez mentionné que plusieurs pays ont interdit les tests prédictifs et diagnostiques, ou imposé un moratoire sur ces tests, et c'est exact.

Au Royaume-Uni, le moratoire ne s'applique qu'aux tests prédictifs. C'est ce qui explique en partie la différence dans les résultats que nous avons vus dans l'étude de l'ICA qui prévoyait des augmentations des primes très importantes. L'étude que nous avons commandée prévoyait une incidence très faible sur l'industrie.

Dans la plupart des cas, les gens demandent un test diagnostique parce qu'ils ont déjà des symptômes et le test ne vise qu'à confirmer, comme le nom l'indique, le diagnostic. Comme les assureurs ont accès au dossier médical de la personne lorsqu'elle souscrit une assurance, elle doit donner son consentement. On ne prétend pas que les assureurs ne devraient pas avoir accès au dossier médical ou aux antécédents familiaux. Dans la très grande majorité des cas, ils devraient pouvoir obtenir l'information dont ils ont besoin.

Ce qui nous préoccupe le plus ce n'est pas seulement qu'ils aient accès aux tests prédictifs, mais aussi à toute la gamme de tests qui en fait n'ont aucun rapport avec les risques. La position de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes ne dit pas clairement qu'il leur sera interdit de recueillir des renseignements sur vos ancêtres, ce qui n'a rien à voir avec les risques. Ce que nous demandons donc à l'industrie, c'est de préciser beaucoup plus clairement la nature des renseignements auxquels elle veut avoir accès.

Le sénateur Eggleton : L'industrie s'inquiète aussi du fait que les gens vont passer des tests de ce genre — je parle ici des tests prédictifs — et qu'ils n'en divulgueront pas les résultats et qu'ils prendront ensuite un grand nombre de polices d'assurance parce qu'ils sont à risque de développer une maladie. Ils vont prendre pour des milliers de dollars d'assurance. Le projet de loi prévoit toutefois une exemption pour les polices d'assurance de plus de 1 million de dollars ou qui pourrait donner lieu à une prestation de plus de 75 000 $ par année pour mettre un frein à ce genre de pratique. Avez-vous une opinion sur la question? Croyez-vous que c'est suffisant pour empêcher les gens d'abuser de la situation comme le craint l'industrie de l'assurance?

M. Therrien : Ici encore, les spécialistes ne s'entendent pas sur le comportement des individus avec ou sans interdiction. J'ai entendu ce point de vue lors de discussions avec des représentants de l'industrie. Selon eux, les gens vont souscrire de gros montants d'assurance lorsqu'ils sauront les résultats des tests. D'autres spécialistes dont nous avons sollicité l'avis sont d'avis que ce genre de comportement ne se produira pas. Encore une fois, les spécialistes ne s'entendent pas sur ce point.

Le sénateur Eggleton : Le projet de loi prévoit une exemption pour circonscrire ce genre de problème. Merci.

La sénatrice Eaton : Expliquez-moi quelque chose. Dans les tests d'ADN prédictifs, quelle influence exerce le style de vie sur l'ADN? Si je suis porteuse d'un marqueur, est-ce que mon style de vie y changera quelque chose? Pouvez-vous me donner un pourcentage?

M. Kosseim : Je vais tenter de répondre à votre question de l'une de deux façons et vous me direz si cela convient.

Nous ne savons pas si les résultats d'un test génétique auront une influence sur le style de vie. Ceux qui ont analysé la question sont sans doute mieux placés que moi pour vous dire quels seront les changements de comportement à ce moment. Certains baisseront peut-être les bras, tandis que d'autres changeront complètement leurs habitudes de vie pour tenter de renverser la vapeur.

Pour répondre à l'autre partie de votre question, le pourcentage d'influence que le style de vie peut avoir sur une maladie par rapport à l'ADN, je dirais que cela dépend précisément de la maladie. Le marqueur génétique est hautement déterminant dans certains cas, comme les maladies monogéniques.

La sénatrice Eaton : Peu importe ce que vous faites, elle vous attend au tournant, n'est-ce pas?

M. Kosseim : C'est exact. Les probabilités sont très élevées dans ce cas précis. Par contre, dans le cas de la grande majorité des maladies communes, le marqueur génétique est un facteur parmi une foule d'autres qui sont liés au style de vie ou à la santé, notamment à la nutrition. C'est donc sur ces maladies multifactorielles que le débat porte vraiment, car dans ce cas, les résultats du test génétique sont beaucoup moins pertinents, et certainement non nécessaires du point de vue des risques actuariels, car il y a tant d'autres éléments qui entrent en cause.

La sénatrice Eaton : C'est une question très complexe. De toute évidence, il n'y a pas vraiment de réponse.

N'y a-t-il vraiment que pour quelques maladies génétiques seulement que des tests précis ont été conçus?

M. Therrien : C'est ce que nous croyons, oui. Le nombre peut varier, encore une fois selon le point de vue des spécialistes, mais il y en a très peu, je dirais entre 6 et 12 environ.

La sénatrice Eaton : Auriez-vous la liste de ceux qui seraient précis?

M. Baggaley : Dans l'étude parrainée par l'Institut canadien des actuaires, il y a une liste. On en a recensé 13. On indique même des probabilités dans le tableau. Par exemple, on vous dit que si vous avez tel marqueur génétique, les probabilités que vous développiez la maladie sont en général de tel pourcentage. C'est une échelle mobile.

D'un côté, il y a l'exemple le plus frappant qu'on utilise habituellement, celui de la maladie de Huntington, car si un parent est porteur, les probabilités sont très élevées qu'il le transmette à ses descendants, et dans ce cas, il n'y a rien qu'une personne puisse changer dans son style de vie pour prévenir son apparition. C'est un cas extrême. À partir de là, l'échelle est mobile habituellement.

De l'autre côté, nous avons aussi les compagnies qui offrent des tests génétiques aux consommateurs et qui affirment qu'elles peuvent vous dire que vous avez 3 p. 100 plus de chances que la moyenne, par exemple, de développer une maladie, alors on est vraiment en présence d'une échelle mobile.

La sénatrice Eaton : Pourriez-vous nous faire parvenir la liste?

M. Therrien : Bien sûr.

La sénatrice Eaton : Merci.

La sénatrice Andreychuk : Vous parlez d'une échelle mobile, mais n'est-ce pas basé sur le fait que les tests d'ADN évoluent très rapidement? C'est encore un domaine relativement nouveau. Ensuite, cela dépend des recherches médicales. On en sait de plus en plus sur les maladies. Vous dites qu'il y en a entre six et 12 aujourd'hui, mais il se pourrait qu'il y en ait plus demain, ou qu'ils soient différents. Les découvertes liées à l'ADN se multiplient et cela va certainement se poursuivre de façon spectaculaire, je pense, et nous allons en savoir plus sur les causes probables de ces maladies. C'est un portrait de la situation à l'heure actuelle, n'est-ce pas?

M. Therrien : Vous avez entièrement raison, et c'est pourquoi nous sommes prudents dans notre déclaration, car nous sommes conscients que la science va évoluer. Nous disons qu'il nous semble inapproprié, en ce moment, que les assureurs recueillent des renseignements sur les résultats des tests, compte tenu de l'état d'avancement de la science à l'heure actuelle.

Au Royaume-Uni, par exemple, et dans d'autres pays où il n'y a pas d'interdiction, mais un moratoire, le moratoire fait observer ou implique que la science peut évoluer et qu'il y aura un examen périodique de la situation. Au Royaume-Uni, le système repose en partie sur un examen qui est effectué par un comité d'experts qui a l'aval du gouvernement et qui ne perd pas de vue que la science va évoluer et que les données qui ne sont pas très précises aujourd'hui pourraient l'être demain ou l'an prochain.

La sénatrice Raine : Cette étude est fascinante et vraiment nécessaire.

Je ne connais pas très bien les compagnies d'assurances et leur façon de fonctionner, et je ne sais pas s'il existe des lois qui les obligent à nous assurer et qui nous obligent à divulguer l'information. Il me semble que dans un contrat, il y a des responsabilités des deux côtés. Une personne qui souscrit une assurance et qui possède des renseignements qui ne font pas partie de son dossier médical ou de ses antécédents familiaux doit-elle divulguer ces renseignements?

M. Therrien : Je vais demander à mes collègues de vous donner plus de détails, mais l'information que nous avons de l'industrie de l'assurance, de l'association qui a témoigné devant vous, est un conseil aux compagnies d'assurances : « N'exigez pas un test génétique des proposants s'ils n'en ont pas déjà passé un ». Cela devrait donc pousser les compagnies d'assurances à agir d'une certaine façon, mais ce conseil ne s'applique pas aux résultats des tests existants. L'association laisse donc les compagnies libres, selon leur propre évaluation de la situation, d'exiger ou non les résultats des tests existants avant de fournir une assurance à une personne.

En ce moment, compte tenu des conseils donnés par l'association aux compagnies, il se pourrait que certaines compagnies exigent des proposants les résultats de tests génétiques qu'ils ont déjà passés pour être assurés.

La sénatrice Raine : Où vont-ils se procurer ces résultats?

M. Therrien : On parle de personnes qui ont passé un test génétique pour l'une ou l'autre des raisons que nous avons mentionnés, par simple curiosité, pour connaître leurs ancêtres, ou pour d'autres raisons. On parle ici de personnes qui ont passé un test, de leur propre chef, et non pas à la demande d'un assureur. Il se pourrait donc, suivant la loi actuelle, et suivant les conseils qu'elles ont reçus de leur association, que les compagnies d'assurances se disent : Nous n'exigerons pas un nouveau test, mais dites-nous si vous avez déjà subi un test génétique. Si c'est le cas, nous voulons connaître les résultats ». Dans ce cas, donc, la personne passe le test pour des raisons qui ne sont pas liées aux assurances. Toutefois, en vertu de la loi et de la politique actuelles, une compagnie d'assurances pourrait exiger d'un proposant qu'il lui fournisse les résultats des tests qu'il a déjà passés.

La sénatrice Raine : Je veux que cela soit clair ici. Si quelqu'un demande un test génétique, les résultats lui appartiennent.

M. Therrien : Oui.

La sénatrice Raine : Ils ne font pas partie du dossier médical, que les compagnies d'assurances peuvent consulter. Les résultats d'un test génétique sont du domaine privé. La compagnie qui a réalisé les tests n'a pas le droit de divulguer les résultats à quiconque, à moins d'avoir l'autorisation de la personne concernée, soit la personne qui a passé le test. Est- ce exact?

M. Therrien : La compagnie d'assurances pourrait demander au proposant potentiel : « Avez-vous déjà passé un test génétique? Si c'est le cas, nous voulons voir les résultats ». Dans ce cas, oui, on parle de résultats qui appartiennent à une personne, et à elle seule, et qui n'ont peut-être pas été transmis à une autre personne, y compris à un médecin. Toutefois, les résultats du test existent et une compagnie d'assurances pourrait demander à un proposant : « Avez-vous déjà passé un test génétique? Si c'est le cas, nous voulons voir les résultats ».

Rien n'empêche une compagnie d'assurances à l'heure actuelle d'exiger le résultat des tests, à défaut de quoi, elle peut refuser d'assurer un proposant potentiel.

La sénatrice Raine : Je présume que si la personne a passé un test génétique et que le pronostic était très bon, elle ne verrait pas d'inconvénients à communiquer le tout à la compagnie d'assurances.

M. Therrien : Probablement.

La sénatrice Raine : Toutefois, si le test génétique a révélé des risques à venir, soit une information que l'on n'aurait pas normalement, la personne pourrait alors refuser de communiquer l'information et la compagnie d'assurances pourrait refuser de l'assurer.

M. Therrien : C'est exact.

La sénatrice Raine : J'ai l'impression que c'est un peu comme acheter un billet de loterie. Si on connaît la réponse, on peut en acheter plus. On veut éviter que les gens abusent des compagnies d'assurances, si on veut, car une partie a en main des informations qui ont une incidence sur le produit acheté. Je pense que le nœud du problème consiste à trouver une solution juste pour les deux parties au contrat. C'est le dilemme.

M. Therrien : Je vais demander à mes collègues de vous donner plus de détails, mais, manifestement, on se place ici du point de vue de l'assureur qui dit qu'il devrait obtenir l'information que le proposant a en main. C'est l'argument de la bonne foi. Dans le cas de certaines maladies, les tests génétiques peuvent être très probants, mais à l'heure actuelle, compte tenu de l'évolution de la science, très peu le sont. Donc, dans la plupart des cas, la valeur probante des tests est très faible.

En ce moment, ce que l'industrie de l'assurance semble vouloir, c'est d'évaluer le tout elle-même, en ayant les résultats des tests génétiques dans tous les cas, que les résultats soient probants ou non. L'industrie veut évaluer elle- même la valeur probante des tests.

Ce que nous disons donc c'est comme il n'y a que très peu de tests dont les résultats sont probants à l'heure actuelle, les règles devraient être plus rigoureuses. L'industrie ne devrait exiger ces tests que dans un nombre de cas beaucoup plus restreints que ce qui semble avoir été annoncé dans leur politique la semaine dernière.

La sénatrice Raine : Merci beaucoup.

Le sénateur Cowan : Sénatrice Raine, pour poursuivre sur le sujet, c'est précisément la raison. C'est assurément parce que de nombreux tests ne donnent pas de résultats probants. Il y a, à une extrémité, le gène de Huntington, puis il y en a d'autres qui peuvent indiquer quelque chose. Il y a aussi ce que la personne peut faire pour changer son style de vie afin de réduire davantage les risques de développer une maladie. N'est-ce pas précisément pour cette raison que vous dites que la politique de l'industrie de l'assurance ne va pas assez loin pour protéger les renseignements personnels comme vous l'avez mentionné dans votre position? Est-ce précisément la raison?

M. Therrien : C'est exact.

La sénatrice Andreychuk : Dans le même ordre d'idées, on parle de l'utilisation des résultats des tests d'ADN, mais il y a une foule d'autres façons aujourd'hui de savoir si nous avons une affection préexistante. On passe un test qui n'a rien à voir avec les assurances et on apprend qu'on pourrait souffrir d'arthrite. Si on veut ensuite souscrire une assurance et qu'on nous pose des questions sur nos affections préexistantes, il faut répondre aux questions. Pourquoi n'êtes-vous pas préoccupés par l'utilisation des renseignements personnels dans ce cas comme vous l'êtes pour les tests d'ADN?

M. Therrien : C'est en raison de la nature très sensible des renseignements eux-mêmes.

Madame Kosseim, auriez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Kosseim : Essentiellement, il faut revenir à la première question. Si on veut que les connaissances soient les mêmes de part et d'autre pour avoir un contrat de bonne foi, il faut revenir à la question : « Que savez-vous? » Dans le cas des tests génétiques, les résultats sont souvent fournis dans un environnement clinique par un médecin ou un conseiller génétique.

Comme ces tests sont de plus en plus accessibles — et on peut même s'en procurer sur l'Internet comme nous l'avons vu ce matin, car 23andMe offre des tests génétiques pour 108 maladies au prix de 199 $ —, la question qui se pose est la suivante : quelle est la pertinence d'avoir ces renseignements personnels pour répondre aux besoins légitimes de l'industrie?

On revient toujours à cette première question. Nous voulons qu'il y ait un équilibre dans un contrat de bonne foi entre le droit à la protection des renseignements personnels et les besoins légitimes de l'industrie. Ce que nous demandons à l'industrie c'est de prouver que ces renseignements sont nécessaires et pertinents à des fins actuarielles.

Elle peut relever le défi et en faire la preuve pour certaines maladies dont les résultats sont très probants. Bien sûr, les gens pourront obtenir les résultats pour les 108 maladies sur Internet, mais il n'y a pas 108 maladies pour lesquelles l'information est nécessaire ou efficace à l'heure actuelle. Nous pressons l'industrie d'examiner plus rigoureusement les raisons pour lesquelles elle a besoin de ces renseignements et d'en faire la preuve. Si on le fait, on se rendra compte que le nombre de maladies pour lesquelles l'information est recevable et pertinente d'un point de vue actuariel sera bien moindre que 108.

La sénatrice Andreychuk : Cela ne répond pas à ma question. Je ne conteste pas pour le moment votre logique concernant les tests d'ADN. Toutefois, on peut se procurer d'autres types de test, pas des tests d'ADN, et aboutir au même résultat, c'est-à-dire apprendre qu'on a une maladie génétique ou une prédisposition. Dans ce cas, vous ne soulevez pas la question de la protection des renseignements personnels et du juste équilibre. Je me demande pourquoi cela pose problème pour les tests d'ADN alors que cela ne posait pas problème pour les autres tests médicaux requis à des fins d'assurance.

Mme Kosseim : Je vous remercie d'avoir reformulé votre question. On peut dire que dans la plupart des autres cas, les autres maladies sont diagnostiquées dans le cadre d'une relation médecin-patient et sont consignées dans le dossier médical du patient, où l'information et sa pertinence font partie de son bilan de santé général.

Ce qui nous préoccupe le plus dans le cas des tests génétiques, c'est qu'on peut se procurer les résultats de ces tests à l'extérieur du cadre médical bien établi de la relation médecin-patient, sans que l'information soit proprement mise en contexte par des professionnels. On peut se procurer ces tests directement sur Internet pour de multiples raisons, comme nous l'avons mentionné à plusieurs reprises.

On peut aussi les obtenir dans le cadre d'un programme de recherche, comme vous l'avez mentionné, et tout le monde est conscient de l'importance de la recherche pour faire avancer la science dans le domaine de la génétique précisément. Mais même lorsqu'il s'agit de recherche dans le domaine génétique, les résultats ne sont pas nécessairement probants et ne sont pas nécessairement inclus dans le dossier médical d'une personne, car les chercheurs eux-mêmes ne savent pas encore quelle est la validité ou l'utilité clinique de ces informations. Ils tentent encore de l'établir, et ces informations n'ont pas la même pertinence du point de vue médical et pourraient même ne jamais être incluses dans le dossier médical.

Pour en revenir à votre exemple au sujet de l'arthrite, tous les autres facteurs de risque lorsqu'ils sont mis en contexte dans le cadre de la relation médecin-patient sont équitables. C'est lorsque l'information n'est pas évaluée dans ce contexte qu'on se demande s'il est nécessaire et légitime de la recueillir.

La sénatrice Andreychuk : Si les tests d'ADN étaient faits dans un cadre médical, vous n'y verriez pas d'inconvénients. Vous n'êtes pas d'accord lorsque les tests d'ADN sont faits pour d'autres raisons.

Mme Kosseim : Comme mon collègue l'a mentionné, nous ne prenons pas position sur l'accès aux dossiers médicaux, ce qui est le cas à l'heure actuelle. Nous ne contestons pas l'accès aux dossiers médicaux.

La sénatrice Eaton : Monsieur Therrien, à titre de commissaire à la protection de la vie privée, vous surveillez l'utilisation qui est faite des renseignements sur la santé par les compagnies d'assurances. Avez-vous tous les pouvoirs qu'il vous faut pour pouvoir le faire?

M. Therrien : Notre déclaration avait pour but de prendre position sur la question en fonction du principe fondamental de la LPRPDE voulant que les organisations doivent recueillir uniquement les renseignements qui sont nécessaires et pertinents pour répondre à un besoin légitime.

Le commissaire dispose de pouvoirs lorsqu'une personne dépose une plainte à la suite d'un refus. Si un proposant est d'avis que les demandes de l'assureur ne respectent pas la LPRPDE, il peut porter plainte et nous examinerons sa plainte à la lumière du fruit de nos recherches et des informations que lui et l'assureur nous aurons fournies. J'ai le pouvoir d'examiner ce genre de question.

La sénatrice Eaton : Pourriez-vous forcer une compagnie d'assurances à l'assurer?

M. Therrien : Non, je ne peux pas le faire.

La sénatrice Raine : J'aimerais revenir sur le concept de contrat de bonne foi. Pour évaluer s'il faut accorder ou non une assurance, il faut comprendre ce qu'il faut savoir pour être de bonne foi. Si une personne cache de l'information à une compagnie d'assurances, qu'elle ne dit pas qu'elle est à risque d'une maladie au moment de souscrire une assurance, quelles sont les obligations à ce moment? Lorsque la personne tombe malade et que la compagnie d'assurances apprend qu'elle était au courant, est-ce que l'assurance devient nulle dans ce cas?

Je présume qu'il y a différentes catégories de divulgation selon les maladies. J'aimerais savoir ce qui rendrait une police d'assurance nulle dans le cas de la non-divulgation de renseignements génétiques.

Mme Kosseim : Je ne suis pas spécialiste du droit des assurances, mais je pense que vous avez soulevé la question la plus importante : si la personne n'a pas divulgué une information lorsqu'on lui a posé la question, le contrat risque d'être annulé.

Ce dont il est question ici c'est de savoir si une compagnie d'assurances peut même de façon temporaire, permanente ou autrement poser la question. Nous exhortons l'industrie de l'assurance à ne pas poser la question à l'heure actuelle, car si les compagnies ne posent pas la question, il n'y a pas obligation de divulguer. Nous prenons le problème en amont et demandons si la question doit même être posée au proposant. Nous disons que pour l'heure, elle ne devrait pas être posée, en toute équité.

La sénatrice Raine : À l'heure actuelle, rien n'empêche une compagnie d'assurances de demander à quelqu'un si un membre de sa famille souffre de la maladie de Huntingdon?

M. Therrien : Rien ne l'empêche, non.

La sénatrice Raine : Il y a un marqueur génétique, je présume.

Quelles sont les autres maladies génétiques probantes pour lesquelles on peut poser la question?

M. Therrien : Comme je l'ai mentionné, il y a une courte liste de 6 à 13 maladies, que nous pouvons vous fournir.

La sénatrice Raine : Je n'en ai pas besoin. Rien n'empêche une compagnie d'assurances de demander à un proposant si lui ou un membre de sa famille ont un marqueur génétique pour telle ou telle maladie? On limite la question aux maladies dont les marqueurs génétiques sont connus à l'heure actuelle.

M. Therrien : À l'heure actuelle, rien n'interdit à une compagnie d'assurances de poser ce type de question.

Ce que nous disons, c'est que tant que les tests ne pourront pas prédire avec plus de certitude si une maladie se concrétisera, la question ne doit pas être posée, et certainement pas dans ce cas. Et comme il existe très peu de maladies pour lesquelles les tests sont probants, nous ne croyons pas qu'il soit pertinent pour l'industrie de poser la question. Les spécialistes que nous avons consultés sont d'avis que cela n'aura pas une incidence importante sur les résultats financiers de l'industrie à l'heure actuelle. La situation pourrait changer toutefois. Il se pourrait en effet que le nombre de maladies pour lesquelles les tests sont probants augmente considérablement dans deux ou cinq ans, et il faudra alors réévaluer la situation à ce moment.

La sénatrice Raine : Il ne me semble pas juste qu'une partie seulement ait des informations qui pourraient avoir une incidence réelle ou potentielle sur les risques, si on veut, au moment de conclure le contrat. Si c'est le cas, l'autre partie en subira un préjudice et cela pourrait se répercuter sur les possibilités pour tous d'obtenir de l'assurance.

M. Therrien : C'est certainement concevable pour un petit nombre de maladies. Pour un petit nombre de maladies, les résultats des tests sont très probants, et dans ces quelques cas, on pourrait dire qu'il serait raisonnable pour une compagnie d'assurances de les demander.

Le fait est toutefois qu'un grand nombre de maladies existe et que pour la très grande majorité d'entre elles, à cette étape-ci dans l'évolution de la science, les tests génétiques ne permettent pas de déterminer si la maladie apparaîtra ou non. C'est dans ce contexte que nous disons que, de manière générale, même si les résultats d'un test génétique indiquent qu'une personne est plus à risque de souffrir d'une certaine maladie — une maladie autre que les 6 à 13 exceptions —, ces résultats ne sont pas probants.

La personne possède des informations, mais ces informations ne sont pas équivalentes à des connaissances concrètes que la maladie se matérialisera. Est-ce raisonnable? Est-ce que le fait de ne pas communiquer des renseignements qui ne sont pas probants équivaut à de la mauvaise foi? Pour nous, si le test n'est pas en mesure d'établir si la maladie apparaîtra ou non, ces renseignements ne devraient pas être divulgués et cela n'entache pas la bonne foi des proposants potentiels. Toutefois, dans le cas des quelques maladies pour lesquelles les tests sont probants, la situation pourrait être différente.

La sénatrice Raine : Le mot « probant » a-t-il été défini par la profession médicale ou par les assureurs? Est-ce que la loi définit en quoi consistent les conditions probantes?

M. Therrien : Je ne suis pas certain qu'il y ait une définition comme telle.

Mme Kosseim : C'est un terme relatif et cela s'exprime en pourcentage. Pour que les résultats soient « très probants », il faut qu'il y ait de 99 à 100 p. 100 de chances que la maladie apparaisse au cours de la vie d'une personne. La valeur probante s'exprime en pourcentage et peut être de 2 ou 3 p. 100 pour certaines maladies et aller jusqu'à 100 p. 100 pour d'autres.

Le sénateur Raine : Est-ce que les compagnies d'assurances pourraient dire par exemple qu'au-delà d'un certain pourcentage de probabilité, cela deviendrait désavantageux financièrement pour elles?

M. Therrien : La probabilité qu'un problème de santé révélé par le test se concrétise n'est pas coulée dans le béton. Cela peut dépendre d'autres facteurs.

La sénatrice Raine : C'est aux actuaires qu'il incombe de le déterminer.

M. Therrien : C'est en partie aux actuaires, mais c'est surtout une question médicale.

M. Baggaley : Je pense qu'il faut se demander si les états pathologiques semblables sont suffisamment répandus pour qu'il y ait des répercussions considérables pour l'industrie. On pourrait certes en débattre, mais cela dépend en fait de la façon dont la personne réagit lorsqu'elle obtient cette information dont sa compagnie d'assurances ne dispose pas.

Dans leur étude, les actuaires ont présumé que les gens allaient réagir d'une certaine manière. Lorsqu'on a voulu savoir pourquoi les Européens n'avaient pas réagi de cette façon malgré l'interdiction en vigueur depuis 20 ans sur ce continent, on a répondu que la situation était différente en Europe. Si les Canadiens devaient réagir de cette manière en ayant accès à cette information sans que les assureurs soient au courant, il faut se demander pourquoi les Européens ont réagi différemment. C'est le nœud du problème.

Le sénateur Cowan : Je crois que vous avez répondu à la plupart de mes questions en plus d'apporter des précisions en réponse à la sénatrice Raine. Le fait est qu'il n'y a rien dans ce projet de loi qui pourrait empêcher une compagnie d'assurances de s'enquérir des problèmes de santé existants d'un éventuel client — antécédents familiaux, cas de maladie cardiaque, maladie de Huntington ou cancer dans la famille. Les compagnies demandent déjà ces renseignements et aucune disposition de ce projet de loi ne va les empêcher de continuer à le faire. Nous ne parlons pas ici d'une maladie dont souffre actuellement un éventuel assuré. Il est plutôt question de la possibilité ou de la probabilité que cette personne soit un jour atteinte de cette maladie. Si la personne est déjà malade, qu'il s'agisse de l'arthrite, du cancer ou de la maladie de Huntington, il est bien évident qu'elle doit le déclarer. Ce n'est pas de cela dont il est question ici, n'est-ce pas?

M. Therrien : Vous avez raison.

Le sénateur Cowan : Il y a un moratoire en Grande-Bretagne, mais il y a une maladie qui en est exemptée. On peut en effet interroger les gens au sujet de la maladie de Huntington.

M. Therrien : C'est effectivement le cas en Grande-Bretagne.

Le sénateur Cowan : Il y a un régime réglementaire qui pourrait permettre aux compagnies d'assurances de demander à pouvoir s'enquérir au sujet d'une maladie X étant donné les progrès réalisés en sciences médicales. Les instances réglementaires pourraient alors convenir de ces progrès et accepter que l'on puisse poser des questions au sujet d'une maladie X ou Y en plus de celle de Huntington. Mais le fait est que, malgré ce moratoire en vigueur depuis 14 ans en Grande-Bretagne, les assureurs n'ont jamais ressenti le besoin d'exiger le droit de poser des questions au sujet d'autres maladies. Est-ce comme cela que vous voyez les choses également?

M. Therrien : Tout à fait.

Le sénateur Cowan : Il y aurait tout lieu de croire que si les compagnies d'assurances britanniques avaient été affectées d'une manière ou d'une autre, elles auraient pu dire : « Un instant. Nous savons que la valeur probante de ce test est maintenant suffisamment élevée pour qu'il soit ajouté à la liste avec la maladie de Huntington. » L'absence d'une telle requête est éloquente en soi, n'est-ce pas?

M. Therrien : On pourrait effectivement conclure que si le moratoire assorti d'une exception avait affecté la situation financière de l'industrie, on aurait demandé l'inclusion de tests pour d'autres maladies.

Le sénateur Cowan : Exactement, et on ne l'a pas fait.

M. Therrien : Ils ne l'ont pas demandé.

La vice-présidente : Merci beaucoup.

J'aimerais maintenant vous présenter nos deux prochains témoins. Nous accueillons la Dre Ivonne Bombard, scientifique au Li Ka Shing Knowledge Institute de l'Hôpital St. Michael, et professeure adjointe à l'Institute of Health Policy, Management and Evaluation, Université de Toronto; et le Dr Ronald Cohn, codirecteur du Centre de médecine génétique et chercheur principal à l'Hôpital pour enfants de Toronto, Département de pédiatrie et de génétique moléculaire, Université de Toronto.

Je crois que vous avez des déclarations préliminaires à nous faire, après quoi vous pourrez répondre aux questions des sénateurs.

Dr Ronald Cohn, codirecteur du Centre de médecine génétique, chercheur principal, Hôpital pour enfants de Toronto, Département de pédiatrie et de génétique moléculaire, Université de Toronto, à titre personnel : Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à vous parler de mon expérience personnelle et de celle de mes collègues. Je veux surtout vous remercier de prendre le temps de discuter de cette question très importante et très chère au clinicien que je suis. Je suis également chef de la Division de la génétique clinique à l'Hôpital pour enfants, ce qui va me permettre de vous entretenir des expériences que j'y ai vécues depuis mon retour des États-Unis. À mon grand étonnement, j'ai discuté de discrimination génétique avec des familles et des patients au cours de ces deux années plus souvent que pendant toutes mes années de pratique précédentes.

J'ai pensé vous parler brièvement de trois cas pour illustrer mon propos. J'ai notamment choisi ces exemples parce qu'ils traitent des tests prédictifs, une préoccupation déjà soulevée par le sénateur Eggleton, je crois, et d'autres enjeux dont j'aimerais discuter plus à fond.

Le premier cas est celui d'un patient qui avait besoin d'un test diagnostic. Je vous parlerai ensuite de notre expérience dans le cadre d'une étude en cours sur toute la question du séquençage génomique, laquelle devrait aboutir à mon avis à un test utilisable d'ici deux ans à cinq ans.

La distinction entre test prédictif et test diagnostic va ainsi s'estomper au cours des prochaines années. Nous devons pour l'instant traiter de ces deux possibilités.

Le premier cas est celui d'un de mes collègues, car je ne voulais pas vous parler uniquement de mes expériences personnelles. C'est une jeune fille dont le père souffre d'un problème génétique qui cause la cardiomyopathie, une maladie du muscle cardiaque. C'est grave à ce point que le père est présentement sur une liste d'attente pour une transplantation cardiaque.

La famille est venue à notre clinique parce que la fille voulait savoir si elle devait subir un test génétique. Nous avons alors discuté des enjeux liés à la discrimination génétique au Canada, et la famille en est venue à communiquer avec les assurances pour savoir si on croyait que la fillette devait subir un test génétique.

Voici ce qu'on leur a répondu : « Les chances sont de 50-50; si le test est négatif et indique que votre fille n'a pas le gène de cette maladie du muscle cardiaque, on pourra l'assurer. Vous devriez lui faire subir ce test. »

La famille est revenue à notre clinique plutôt désemparée, ne sachant pas trop quoi faire en raison de ce risque de 50 p. 100. En toute franchise, nous leur avons conseillé d'attendre pour le test et d'essayer d'abord de bien saisir toute l'information et l'ensemble des répercussions possibles du test pour leur fille. Ils n'ont pas encore décidé s'ils voulaient aller de l'avant.

J'aimerais souligner que le père en question a reçu son diagnostic sans savoir qu'il était porteur de ce gène. Il a simplement perdu conscience et s'est retrouvé à l'hôpital où on lui a fait subir un ultrason du cœur. On a alors découvert cette maladie grave du muscle cardiaque. Si nous pouvions savoir si cette fillette est porteuse du gène, nous pourrions sans doute la préparer ou même la traiter suffisamment bien pour tout au moins reporter pendant très longtemps la nécessité d'une transplantation. Je ne veux pas laisser entendre que c'est chose certaine, mais il y a sans doute suffisamment de traitements envisageables pour les gens aux prises avec ce problème pour que nous puissions retarder l'échéance aussi longtemps que possible. Vous risquez de m'entendre répéter la même chose d'ici la fin de la séance.

Le deuxième cas est celui d'une famille que j'ai reçue moi-même à ma clinique où nous avons discuté de la question des tests diagnostiques. Il s'agissait encore une fois d'une fillette de 12 ans qui présentaient toutes les caractéristiques de ce que nous appelons une maladie du tissu conjonctif. C'était une enfant très flexible qui avait perdu du tonus musculaire. Un ultrason avait révélé un léger épaississement de la principale artère sortant de son cœur. C'est un symptôme de deux maladies importantes. Il y a d'abord le syndrome de Marfan dont plusieurs d'entre vous avez sans doute déjà entendu parler. L'autre maladie est le syndrome de Loeys-Dietz, une forme plus rare de maladie du tissu conjonctif, à la fois très différente et plus virulente. Nous avons recommandé des tests génétiques pour ces deux maladies, car il était cliniquement impossible de savoir à laquelle des deux nous avions affaire. Nous avons dit aux parents qu'ils devraient eux-mêmes subir le test, car on soupçonnait que le père avait aussi un léger élargissement de l'artère sortant du cœur.

Le père a vite compris de quoi il en retournait. Il s'est dit que s'il passait le test et que s'il était positif, il ne pourrait plus contracter une assurance-vie et une assurance invalidité de longue durée. Nous avons donc eu une longue conversation à ce sujet. Encore aujourd'hui, six mois plus tard, la famille ne s'est toujours pas décidée à subir le test.

Quel est le problème exactement? Ce sont deux maladies qui peuvent être mortelles. Le syndrome de Marfan peut très bien être traité avec des médicaments, alors qu'il en va tout autrement du syndrome de Loeys-Dietz. Dans ce dernier cas, il est très souvent nécessaire de procéder sans tarder à une chirurgie de l'artère touchée pour prévenir une mort subite.

C'est une maladie beaucoup plus virulente que nous avons découverte il y a plusieurs années grâce à la génétique alors que nous croyions auparavant que tous ces patients qui mouraient subitement souffraient du syndrome de Marfan. Pour le clinicien, le traitement est très différent. Il m'est impossible de traiter l'enfant en question. En fait, je la revois fréquemment pour des échocardiogrammes afin de m'assurer que tout reste en place tant que la famille n'a pas décidé d'aller de l'avant pour que je puisse savoir à laquelle des deux maladies j'ai affaire. Cela représente donc des coûts qui pourraient être évités, non pas pour les compagnies d'assurances, mais bien pour le système de santé. Peut- être qu'il faudrait engager ces coûts de toute manière, mais on l'ignore. Je suis un peu coincé dans cette situation.

Mon dernier exemple vise à démontrer que nous avons déjà accès à la technologie permettant de séquencer tous les éléments de notre génome. De plus, cette technologie est tout aussi accessible du point de vue financier, car cela est même devenu moins coûteux que bon nombre des tests que nous effectuons par ailleurs.

Lorsque je suis arrivé à l'hôpital pour enfants, nous avons lancé une étude sur le séquençage complet du génome de tous les enfants hospitalisés, et pas uniquement de nos patients en génétique. Nous voulions simplement savoir ce que cela pourrait nous apprendre et comment nous pourrions utiliser cette information. Il n'y a plus de différence entre un test prédictif et un test diagnostique, car absolument tout est pris en considération. Ainsi, vous pouvez arrêter un diagnostic pour un patient qui a un problème de santé, mais vous pouvez découvrir en même temps bien d'autres choses, car tout est examiné. Vous faites des constatations secondaires qui sont généralement de nature prédictive.

Nous avons demandé à 330 patients et à leurs familles de participer à notre étude. Comprenez bien qu'il s'agissait dans tous les cas de familles avec des enfants très malades. Tous ces enfants avaient de nombreux problèmes de santé. Plus de 33 p. 100 de ces familles ont refusé de prendre part à notre étude sans frais parce qu'ils craignaient la discrimination génétique. Je dois vous dire que je trouve cette proportion très alarmante. Certaines de ces familles sont en quête d'un diagnostic depuis de nombreuses années et voilà que je leur offre l'occasion d'obtenir sans doute une réponse, mais il la rejette de crainte de discrimination génétique.

Je soulignerais en terminant qu'il est également possible de débattre, et j'espère que nous pourrons le faire, de questions comme les changements dans les habitudes de vie. Pour bon nombre des maladies génétiques auxquelles nous sommes confrontés, il n'existe toujours pas de remède miracle, et cela fait bien peur aux compagnies d'assurances. À la lumière des grands progrès réalisés dans le séquençage du génome à des fins diagnostiques, on peut dire qu'un tout nouveau secteur d'intervention s'ouvre à nous, ce qui me permettra, je vous le garantis, de traiter bon nombre des patients qui visiteront ma clinique d'ici cinq à dix ans. J'en suis convaincu. Vous pouvez demander à des experts à l'extérieur de Toronto et ils vous diront la même chose. Si je ne peux pas établir un diagnostic génétique pour ces enfants, je ne pourrai pas concevoir les thérapies adaptées pour traiter efficacement le problème principalement génétique qui affecte bon nombre d'entre eux.

Yvonne Bombard, PhD, scientifique, Li Ka Shing Knowledge Institute, Hôpital St. Michael, professeure adjointe, Institute of Health Policy, Management and Evaluation, Université Toronto, à titre personnel : Bonjour à tous et merci de me donner l'occasion de vous faire quelques observations concernant ce projet de loi attendu depuis longtemps.

Pour votre gouverne, disons que je fais de la recherche interdisciplinaire en génomique et en politiques avec spécialisation en discrimination génétique. Mon doctorat portait d'ailleurs sur ce dernier sujet et j'ai amorcé ma carrière de chercheure dans ce domaine.

Ce thème de recherche m'a été inspiré lorsque j'ai constaté à quel point il pouvait être difficile pour les personnes subissant des tests génétiques pour la maladie de Huntington de contracter une police d'assurance et de conserver leur emploi. J'ai d'abord été confrontée à cette problématique dans une clinique effectuant des tests prédictifs ou génétiques pour la maladie de Huntington. Le tout premier patient que j'ai rencontré avait subi un test génétique révélant une prédisposition à la maladie de Huntington. Il venait discuter avec un psychiatre des difficultés qu'il éprouvait au travail. Après que son supérieur eut appris l'existence de cette mutation génétique qui le prédisposait à contracter la maladie même s'il était toujours asymptomatique, les responsabilités qu'on lui confiait ont commencé à changer.

J'ai alors constaté avec stupeur que le psychiatre ne pouvait lui conseiller quoi que ce soit, car il n'existait pas de protections ou de recours possibles pour lui. C'est un moment qui a été déterminant à l'amorce de mes études supérieures. Je me rappelle m'être précipitée à la salle de bain de cette clinique pour demander tant à mon superviseur en Colombie-Britannique qu'à certains experts juridiques à Toronto à l'époque s'il existait des mesures de protection en place pour ce type de discrimination génétique. C'est ainsi que j'ai commencé à m'intéresser à la question. J'ai entrepris d'étudier la nature et l'ampleur de la discrimination génétique à l'échelle du Canada.

Avec des collègues de tout le pays, j'ai réalisé la première étude à ce jour à fournir des données nationales sur les expériences et les préoccupations associées à la discrimination génétique de manière à éclairer les discussions stratégiques comme celles que nous avons aujourd'hui.

L'étude nationale a pris la forme d'un sondage transversal envoyé par la poste. Le questionnaire utilisé a été établi à la lumière d'une série d'entretiens en profondeur que j'ai menés de par le pays. J'ai rencontré des familles dont les membres risquaient de contracter la maladie de Huntington, mais n'en présentaient aucun signe ou symptôme afin de mieux comprendre ce que signifiait pour eux la discrimination génétique, quelles étaient leurs perceptions à cet égard et comment cela se manifestait dans leur vie quotidienne. J'ai ainsi pu concevoir un questionnaire de sondage permettant de mesurer avec précision la nature et l'ampleur du phénomène ainsi que sa répartition à la grandeur du pays.

Au moyen de ce sondage, nous avons ciblé des patients asymptomatiques qui risquaient de contracter la maladie de Huntington du fait qu'un membre de leur famille en présentait les signes et les symptômes. Nous nous sommes concentrés sur les gens asymptomatiques de manière à bien cerner le problème de la discrimination génétique, c'est-à- dire du fait qu'une personne soit traitée différemment ou inéquitablement sur la base de renseignements génétiques, plutôt que de signes ou de symptômes de la maladie elle-même, ce qui pourrait rendre plus complexe ou moins claire l'étude scientifique de la discrimination génétique que nous souhaitions mener.

Nous avons stratifié notre échantillon afin de considérer, d'une part, les personnes qui avaient choisi de subir le test génétique pour la maladie de Huntington et, d'autre part, celles qui risquaient de contracter la maladie, mais avaient décidé de ne pas subir le test. Nous pouvions ainsi évaluer l'impact différentiel de la discrimination génétique selon qu'elle soit fondée sur les résultats d'un test génétique ou simplement sur les antécédents familiaux. Grâce à des collaborateurs dans sept cliniques de différentes régions du pays, nous avons pu recruter notre échantillon de patients qui participaient à des études d'observation en continu ou avaient subi un test génétique.

En interviewant ces familles de tout le pays, j'en suis arrivée à la conclusion que la discrimination génétique est multidimensionnelle. Selon les descriptions fournies et les expériences vécues par ces familles, c'est un problème qui ne se limite pas aux domaines de l'assurance et de l'emploi. Question d'être exhaustive, je vais faire un survol de ces manifestations possibles avant de mettre davantage l'accent sur l'assurance et l'emploi.

Dans le contexte familial, on a fait état d'une perturbation des comportements et des interactions qui serait reliée aux résultats des tests génétiques de certains membres de la famille. Par ailleurs, des répondants ont aussi indiqué qu'ils s'étaient vu refuser une assurance-vie, imposer une hausse de prime en raison de leur prédisposition génétique ou demander de subir un test génétique pour pouvoir contracter une police d'assurance.

Pour ce qui est de l'emploi, comme je l'ai indiqué en introduction, des participants ont dit faire l'objet d'une surveillance accrue après avoir divulgué les résultats de leurs tests génétiques ou parce que leur superviseur avait obtenu ces résultats. Certains se sont vu refuser une promotion en raison de ces résultats ou estiment avoir été obligés de prendre une retraite anticipée du fait qu'on avait appris les résultats de leurs tests génétiques.

Du côté social, certains ont parlé de rejet et d'évitement dans leurs relations interpersonnelles.

Pour ce qui est des soins de santé, des patients estiment avoir eu droit à des traitements différents et à du counseling très directif des professionnels de la santé en matière de planification des naissances, ce qu'ils estimaient attribuable aux résultats de leurs tests génétiques ainsi qu'au risque qu'ils contractent la maladie.

Du point de vue des politiques gouvernementales, on a noté des refus d'adoption et la difficulté d'obtenir la garde des enfants et le droit d'accès à ceux-ci.

La diapositive suivante illustre la répartition de ces problèmes de discrimination génétique au sein d'un échantillon représentatif de cette population à l'échelle nationale. Notre étude a été la première à révéler que la discrimination génétique est assez répandue comme en témoignent les 40 p. 100 de répondants qui ont indiqué avoir vécu au moins une expérience de la sorte. Pour mettre les choses en perspective, disons que les spécialistes en psychologie cognitive ou en effets indésirables des médicaments considèrent qu'un phénomène est courant dès qu'il atteint une proportion d'environ 10 p. 100. Avec son taux de prévalence de 40 p. 100, il ne fait donc aucun doute que la discrimination génétique doit être considérée comme répandue.

Lorsque nous avons cherché à déterminer dans quels contextes se manifestait surtout la discrimination, c'est le secteur de l'assurance qui s'est démarqué, suivi du milieu familial, du domaine social et de l'emploi. Il faut noter que les signalements étaient peu nombreux dans ce dernier cas.

La diapositive suivante fournit une image plus précise de la situation dans le domaine de l'assurance. Les cas de discrimination signalés visaient principalement l'obtention d'une assurance-vie et d'une assurance-invalidité et, dans une moindre mesure, d'une assurance hypothécaire.

Certaines questions du sondage permettaient aux participants de répondre librement, et j'ai repris quelques-uns de ces commentaires dans mon rapport. Par exemple :

J'ai été furieuse d'apprendre qu'on me refusait une assurance-vie en raison de mes prédispositions génétiques.

Cette Albertaine de 28 ans avait subi un test révélant une mutation génétique.

La diapositive suivante fournit des indications plus précises sur les résultats dans le contexte de l'emploi. Le nombre de cas de discrimination signalé a été moins nombreux, mais lorsqu'il y en avait c'était le plus souvent relativement à l'emploi actuel, plutôt que pour l'accès à un nouvel emploi. Voici un exemple des réponses données à une question ouverte :

J'ai révélé à mon employeur que mon test avait été positif. On m'a refusé une promotion surtout en raison des responsabilités que l'entreprise craignait devoir assumer.

Le test génétique avait révélé une mutation chez cet Ontarien de 38 ans à l'époque.

Rappelons que toutes ces personnes étaient asymptomatiques, comme l'ont confirmé des tests neurologiques, et que ces comportements découlaient de la connaissance des résultats de leurs tests génétiques.

À la lumière des réponses obtenues, nous avons essayé de déterminer comment les expériences de discrimination vécues pouvaient être reliées à la connaissance du résultat d'un test génétique. Nous avons constaté que les expériences de discrimination étaient plus fréquentes pour ceux chez qui on avait découvert la mutation génétique à l'origine de la maladie de Huntington. Nous avons ensuite voulu déterminer la cause de cette discrimination. Nous avons pour ce faire pu établir la distinction entre les expériences fondées sur les antécédents familiaux et celles découlant des résultats des tests génétiques. Les antécédents familiaux figuraient parmi les raisons principales invoquées pour la discrimination perçue ou signalée par notre échantillon, mais les résultats des tests génétiques, isolément ou en combinaison avec les antécédents familiaux, comptaient aussi pour beaucoup dans ce phénomène.

Enfin, si les expériences de discrimination ont été répandues dans une proportion de 40 p. 100 au sein de l'échantillon national utilisé, il faut noter que la crainte de discrimination génétique est encore plus courante. En effet, 86 p. 100 des personnes interrogées ont indiqué craindre la discrimination génétique, non seulement pour elles-mêmes, mais aussi pour leur famille, ce qui est l'essence même d'un problème génétique. Lorsque vous souffrez d'une maladie héréditaire, il va de soi que vos proches sont également à risque, ce qui fait que le danger qu'il y ait discrimination génétique touche également votre famille. Les répondants craignaient une telle discrimination dans le contexte de l'assurance, une situation qui se manifeste de plus en plus souvent aussi dans le domaine de l'emploi.

Nous parlons de ces expériences comme s'il s'agissait de phénomènes abstraits, mais elles ont un impact bien concret sur le bien-être psychologique et comportemental des personnes touchées. C'est un autre aspect que nous avons pu examiner de plus près dans le cadre de notre recherche. Nous avons ainsi constaté que la discrimination génétique est associée à des niveaux élevés de détresse psychologique, et que ces niveaux de détresse augmentent lorsque le nombre de situations où se manifeste la discrimination génétique s'accroît. La crainte de discrimination génétique pour soi- même ou ses proches est également à l'origine de niveaux de détresse élevés.

Le graphique de droite montre que le niveau de détresse ressenti est plus élevé lorsqu'on s'inquiète pour les membres de sa famille que lorsqu'on est préoccupé pour soi-même. C'est ainsi que se manifeste l'impact de la discrimination génétique. On ne se demande pas seulement ce qu'il adviendra de soi-même et de sa propre expérience, mais on s'interroge aussi sur ce que sa famille risque de vivre également. Cela peut expliquer aussi en partie pourquoi si peu de cas de discrimination sont signalés par la voie des recours juridiques possibles, car les gens ne veulent pas exposer leurs proches à des risques plus élevés de discrimination génétique. C'est une conséquence que les données recueillies nous révèlent indirectement.

En terminant, j'aimerais parler de la manière dont le comportement d'une personne peut être touché par un risque ou une expérience de discrimination. Des répondants nous ont parlé de différentes stratégies qu'ils utilisent pour gérer la discrimination génétique. Par crainte de discrimination, ils ont indiqué faire montre de discrétion et essayer de cacher le plus possible le fait qu'ils risquent de contracter la maladie de Huntington ou ont subi un test révélant la mutation, non seulement à des tierces parties comme les compagnies d'assurances ou les employeurs, mais même à leurs proches et à leurs enfants de telle sorte que, selon leur perception, ils soient à l'abri des risques de faire l'objet de discrimination génétique comme cela pourrait être le cas s'ils savaient qu'ils sont à risque, un comportement qui a bien sûr des répercussions importantes du point de vue médical, comme nous pourrions en discuter plus longuement.

Certains ont aussi indiqué qu'ils évitaient de changer d'emploi ou de réclamer de nouvelles conditions de travail simplement pour ne pas se retrouver dans l'obligation d'avoir à divulguer de nouveaux renseignements pour postuler un nouvel emploi ou obtenir une nouvelle police d'assurance.

D'autres ont dit vouloir contrer la possibilité de discrimination génétique en contractant une assurance-vie, par exemple, avant de recevoir un diagnostic ou de subir un test génétique, de manière à ne pas avoir à divulguer les résultats à ce sujet au moment de présenter leur demande. Certains ont raconté en long et en large devoir faire des pieds et des mains pour s'assurer que leurs résultats de test génétique ne figurent pas dans leur dossier médical dans différentes cliniques au Canada, en cas de déménagement, pas plus que dans le dossier de leur famille de telle sorte que les compagnies d'assurances qui réclameraient ces dossiers ne puissent établir un lien et découvrir ainsi qu'ils ont une prédisposition génétique accrue.

Pour ce qui est des expériences vécues, les gens ont beaucoup insisté sur le fait qu'ils ont dû minimiser l'importance du problème vu l'absence de recours possible. Ils ont dû s'esquiver, éviter la confrontation, accepter l'expérience de discrimination ou faire comme si de rien n'était. D'autres ont réagi à l'absence de mesures de protection connues ou disponibles en misant sur la confrontation. Certains ont ainsi contesté la personne ou l'institution coupable de discrimination, l'ont dénoncée, ont demandé les conseils d'un avocat ou ont tenté de réfuter les fondements mêmes de la discrimination.

Pour résumer brièvement mes observations d'aujourd'hui et les résultats de nos recherches, disons que les expériences de discrimination génétique sont chose courante pour les personnes atteintes de la maladie de Huntington au Canada. Elles sont surtout fréquentes dans le contexte de l'assurance-vie et de l'assurance-incapacité ainsi que dans le milieu familial et avec les amis. La crainte de discrimination génétique est répandue tant pour soi-même que pour ses proches, surtout dans le contexte de l'assurance.

Tant les expériences de discrimination génétique que la crainte d'en être victime entraînent des niveaux élevés de détresse psychologique. Comme je viens de l'indiquer, certains patients ont recours à des stratégies comportementales pour mitiger les risques de discrimination, ce qui peut être néfaste pour leur santé, comme je le soulignais avec mon exemple sur les dossiers médicaux. Les gens qui présentent cette mutation génétique sont exposés à des risques de discrimination plus élevés.

Il y a certains éléments à prendre en considération dans l'analyse de nos résultats. Les expériences de discrimination étaient signalées par les victimes elles-mêmes, sans qu'il y ait confirmation. On pourrait en outre considérer que notre échantillon était sélectionné du fait qu'il s'agissait de gens participant à des tests génétiques ou à une étude d'observation et, comme nous le savons maintenant, que la crainte de discrimination génétique amène certaines personnes à éviter de subir un test et de participer à de telles études. On pourrait donc présumer que le taux de prévalence que j'ai constaté dans mon étude ne reflète pas vraiment toute l'ampleur de la crainte de discrimination et des expériences vécues, car ceux qui ont le plus d'appréhension ne vont pas nécessairement se prêter volontiers à des tests génétiques ou à des études comme celle-ci parce qu'ils ne veulent pas être étiquetés et possiblement reliés à cette maladie ou à ce risque génétique.

Bien entendu, on ne pourrait peut-être pas inclure la maladie de Huntington dans un cadre général, parmi les troubles complexes, comme les cancers. Cependant, mes collaborateurs de l'étude australienne sur la discrimination génétique, qui ont utilisé le même sondage que moi, ont constaté que les expériences de discrimination signalées dans leur pays pour l'échantillon sur la maladie de Huntington étaient similaires à celles qui ont été signalées pour l'échantillon sur le cancer. On pourrait émettre l'hypothèse que si nous devions faire la recherche, ce qui est vraiment nécessaire, nous constaterions que les expériences de discrimination sont les mêmes dans le cas du cancer.

En terminant, voici des aspects à prendre en considération concernant le projet de loi. Il contribue de façon importante à l'équité génétique au Canada, de sorte qu'il apaiserait les craintes des gens qui hésitent à subir un test génétique pour savoir s'ils portent une mutation génétique — ce qui peut avoir des répercussions, comme l'a dit le Dr Cohn, sur les traitements et la prévention — et à participer aux recherches, ce qui aurait d'importantes conséquences sur les progrès de la science dans le domaine de la génétique.

Lorsque les sanctions établies dans le projet de loi seront mises en application, elles auront des effets sur les expériences de discrimination génétique.

Au fond, le projet de loi S-201 pourrait amener des décideurs provinciaux à adopter des lois complémentaires, ce qui permettrait de protéger les gens contre la discrimination génétique à l'échelle provinciale. On se prononcerait ainsi de façon importante au sujet de l'équité génétique au Canada.

Merci. Je répondrai à vos questions.

La vice-présidente : Je vous remercie de vos exposés. J'ai une liste de sénateurs qui souhaitent vous poser des questions.

La sénatrice Eaton : Docteur Cohn, vous avez parlé de médecine personnalisée. La génothérapie permet également le remplacement d'un gène muté par un gène fonctionnel. Est-ce exact? Le ferons-nous de plus en plus?

Dr. Cohn : Oui, en effet. Lorsque j'ai parlé des traitements personnalisés offerts, je parlais de la possibilité de cibler certaines mutations chez des patients pour des besoins de traitement maintenant. Une technologie a été développée au cours des deux dernières années et elle a révolutionné le domaine. Des milliers de scientifiques dans le monde essaient de travailler en ce sens. C'est exactement ce dont je parlais.

La sénatrice Eaton : C'est un domaine très complexe. Compte tenu des progrès de la médecine, il est de plus en plus compliqué pour une compagnie d'assurances de prédire ce qui arrivera à une personne, n'est-ce pas?

Dr. Cohn : Seulement d'une manière bénéfique. Ce sera compliqué, mais c'est positif, car la plupart du temps, si j'établis un diagnostic génétique, nous ne parlons pas de probabilité qu'une personne soit atteinte d'une maladie. J'aimerais en parler, car la question a été soulevée tout à l'heure. Je ne peux rien faire, et la plupart du temps, cela peut mener à une affection qui limite l'espérance de vie ou qui met la vie d'une personne en danger.

La sénatrice Eaton : Si vous faites une prédiction après l'examen du test d'ADN, on ne peut rien faire si c'est seulement prédictif?

Dr. Cohn : C'est différent. Je parle des aspects diagnostiques. Si j'établis le diagnostic d'un problème médical, très souvent, dans le cas des maladies rares dont nous parlons, il n'existe pas de traitement.

Ce qui est différent au sujet des tests prédictifs, c'est qu'on peut changer des habitudes de vie ou la gestion des soins médicaux pour empêcher des catastrophes de se produire. Ainsi, compte tenu de la discussion que j'ai eue avec la compagnie d'assurances, je pense que ce sera positif, car plus nous en savons, plus nous pouvons agir, du moins pour ce qui est des choses qui nous exposent à de grands risques. Nous pouvons apporter des changements pour éviter des catastrophes. C'est exact.

La sénatrice Eaton : Madame Bombard, vous représentez un hôpital que j'aime beaucoup, l'Hôpital St. Michael's, l'un des grands hôpitaux du Canada. Concernant l'aspect que vous prenez en considération, c'est-à-dire que le projet de loi S-201 pourrait amener des décideurs provinciaux à adopter des lois complémentaires, est-ce que des provinces canadiennes ont adopté des mesures législatives interdisant la communication de résultats de tests d'ADN d'une personne?

Mme Bombard : Je crois comprendre que plusieurs projets de loi d'initiative parlementaire ont été présentés, mais qu'à l'heure actuelle, aucune province n'a adopté de mesure de protection contre la discrimination génétique.

La sénatrice Eaton : Pourriez-vous nous dire quelles provinces ont présenté des projets de loi d'initiative parlementaire? Je crois que pour le moment, un projet de loi fédéral ne couvrirait qu'un très petit nombre de gens, n'est-ce pas?

Mme Bombard : C'est ce que je crois comprendre.

La sénatrice Eaton : Merci.

Le sénateur Cowan : Savez-vous que l'Assemblée législative de l'Ontario est saisie d'un projet de loi d'initiative parlementaire? Savez-vous si c'est le cas dans d'autres provinces?

Mme Bombard : On en a présenté un en Colombie-Britannique ou en Alberta. On a fait plusieurs tentatives en Ontario.

Le sénateur Cowan : C'est vrai.

Docteur Cohn, votre témoignage m'a frappé, comme cela a été le cas la première fois que je vous ai rencontré. En tant qu'adultes, nous décidons si nous voulons nous soumettre à des tests. Certains d'entre nous veulent le savoir, et d'autres non. Il s'agit d'une décision valable que nous devons tous prendre. Dans le cadre de votre pratique, vous travaillez auprès de familles qui prennent des décisions pour des enfants qui ne peuvent pas les prendre eux-mêmes. Cela rend encore plus complexe et plus stressant quelque chose qui, dans d'autres cas, constituerait une décision personnelle.

Dr. Cohn : C'est tout à fait exact. Je crois que cela rend la décision encore plus sérieuse, car j'entends des parents dire qu'ils préféreraient ne pas faire passer de test à leur enfant, puisque cela pourrait avoir des répercussions sur eux et que si c'est le cas et qu'ils ne peuvent pas souscrire une assurance-vie, comment peuvent-ils s'assurer que quelqu'un prendra soin de leur enfant? Dans ce cas, la décision est beaucoup plus complexe et sérieuse à de multiples niveaux qu'elle peut l'être lorsqu'il s'agit d'une seule personne.

Le sénateur Cowan : Sur le plan des politiques publiques, pouvez-vous revenir sur les effets de la valeur probante des tests? La fiabilité des tests génétiques varie selon chaque cas. Évidemment, on a la maladie de Huntington d'un côté, et d'autres maladies de l'autre. Dans le cadre de votre travail, en quoi est-ce utile pour la société canadienne que nous ayons de l'information sur notre bagage génétique? Qu'est-ce que cela donne? À votre avis, qu'est-ce qui en résulterait si les effets discriminatoires disparaissaient et qu'il ne s'agissait que de décider si l'on veut obtenir l'information ou non? Quelles en seraient les répercussions sur la société, selon vous? C'est une question très vaste.

Dr. Cohn : J'aimerais y répondre tout en intervenant sur une observation qui a été faite tout à l'heure : pour combien de maladies savons-nous quelque chose qui a des répercussions?

Le Collège américain de génétique médicale a présenté une recommandation selon laquelle si l'on procède à un séquençage du génome complet, il y a environ 56 maladies génétiques pour lesquelles on peut faire quelque chose et qu'il faut déclarer. C'est la règle aux États-Unis. Nous avons des règles un peu différentes dans chaque hôpital du Canada.

Il y a 56 maladies sur lesquelles on peut agir, mais il devrait y en avoir 58, car au cours des six derniers mois, on en a découvert deux autres.

En quoi est-ce utile? Je peux faire quelque chose pour améliorer ma qualité de vie. Dans certains cas, lorsqu'on parle de gènes qui influent sur le cancer du colon ou d'autres cancers, cela peut avoir des répercussions sur la survie d'une personne.

Je reviens à ce que j'ai dit. Ces maladies augmenteront de façon exponentielle au cours de la prochaine année et des deux à trois prochaines années. Leur nombre augmentera parce que plus nous en apprenons, plus nous en identifions.

Le nombre de maladies génétiques pour lesquelles il n'y a rien à faire demeurera très peu élevé. J'essaie de faire comprendre aux compagnies d'assurances qu'à long terme, elles économiseront beaucoup d'argent, car moins de gens périront subitement à l'âge de 40 ans à cause d'une maladie du cœur dont ils ne connaissaient pas l'existence ou auront le cancer du côlon à 50 ans. On ne s'attend pas à avoir le cancer du côlon et à mourir à cet âge. Il ne s'agit pas seulement de savoir, mais de pouvoir agir.

Le sénateur Cowan : Je vais prendre la sénatrice Andreychuk comme exemple. Supposons qu'elle et moi portons un gène et que nous pourrions développer une maladie. Je décide que je veux le savoir. Le gène est identifié et je prends les mesures dont vous parlez. Or, lorsque je demande une assurance, le montant des primes que je paie est plus élevé. Pour des raisons personnelles, la sénatrice Andreychuk décide qu'elle ne veut pas obtenir l'information. Ainsi, parce qu'elle ne se soumet pas au test, elle ne sait pas qu'elle est porteuse de la maladie et ne change pas ses habitudes de vie pour prévenir son apparition comme je l'ai fait. Toutefois, le montant de sa prime est moins élevé que le mien. Je ne vois pas quels sont les avantages sur le plan de la politique publique. Cela ne me semble pas raisonnable.

Dr Cohn : Tout ce que je peux vous dire, c'est que je suis tout à fait d'accord avec vous. Je ne sais pas ce que je pourrais ajouter.

Le sénateur Cowan : La sénatrice Eaton a dit que les répercussions des mesures fédérales seraient limitées ou — j'ai oublié le terme que vous avez utilisé.

La sénatrice Eaton : Elles ne couvriront qu'un petit nombre de gens si les provinces n'emboîtent pas le pas.

Le sénateur Cowan : Exactement. Ne convenez-vous pas que ce dont nous parlons concerne les assurances et que le projet de loi protégera également tous les Canadiens? Nous constaterons peut-être que des législateurs provinciaux veulent adopter des mesures complémentaires, mais les mesures fédérales s'appliqueraient de façon égale partout au pays, et c'est la raison pour laquelle j'ai choisi de le parrainer. Les modifications au Code du travail ne visent que les employés qui sont assujettis au Code canadien du travail. Êtes-vous d'accord avec moi?

Mme Bombard : Oui. Je vous remercie de la précision.

La sénatrice Andreychuk : Sénateur Cowan, je vous remercie de m'avoir prise comme exemple, mais puisque je suis très curieuse, c'est moi qui voudrais le savoir.

Je trouve que c'est fascinant, mais ce qui l'est encore plus au sujet de votre recherche, c'est le rythme auquel les choses évoluent. Vous avez parlé de 56 maladies, mais il y a deux ans, il n'y en avait pas autant. Ce domaine évolue constamment et nous ne savons pas vers quoi il se dirige. Vous explorez la question d'un point de vue médical, mais plus nous en savons sur nous-mêmes, il y a toujours des conséquences positives, négatives ou imprévues dans l'ensemble de nos mesures. Nous examinons le projet de loi, qui n'est qu'un élément.

Je suis encore un peu perplexe. Les compagnies d'assurances craignent que si elles donnent une police à une personne qui a une maladie pour laquelle il n'y a rien à faire, un certain scénario se présente. Si l'on a l'information, elles veulent l'obtenir. Elles ne demandent pas d'obtenir l'information, mais si elle existe, elles veulent l'avoir parce qu'on frappe à leur porte sans communiquer l'information si on ne la leur fournit pas. Cela concerne les maladies pour lesquelles on sait hors de tout doute qu'elles mèneront à un résultat négatif.

Toutefois, il y a tous les autres problèmes dont vous parlez qu'on peut diagnostiquer. Je ne crois pas que les compagnies d'assurances examinent ces cas maintenant. D'après les discussions que vous avez eues avec elles, savez- vous si c'est exact, docteur Cohn?

Dr Cohn : Non, car les conversations que j'ai avec les compagnies d'assurances portent sur des choses différentes. Elles examinent la question de façon globale. Elles ne font pas de distinction. Vous avez raison de dire que pour certaines de ces maladies, on ne peut rien faire, ce qui préoccupe les compagnies, évidemment.

Je pense que le projet de loi en tient compte de façon éloquente en fixant un plafond pour les gens qui savent qu'ils sont atteints d'une terrible maladie et qui veulent se procurer une police d'assurance de 1 million de dollars, car ils devraient communiquer toute l'information. C'est mon opinion personnelle. Je crois que c'est un très bon élément du projet de loi.

Lorsque je discute avec des compagnies d'assurances, elles ne font pas de distinction entre les deux. Elles parlent de toute l'information génétique, et non uniquement de celle qui mène à un résultat négatif.

La sénatrice Andreychuk : Dans le cadre de ces discussions, disent-elles qu'elles ne se soucient pas des prédispositions génétiques sur lesquelles vous dites pouvoir agir?

Dr. Cohn : On ne va jamais autant dans les détails. On s'arrête à l'information génétique disponible, car on est né avec cela. Les maladies multifactorielles se développent au fil du temps. La génétique joue un rôle, mais ce n'est pas quelque chose qu'on connaît. Si je prélevais des échantillons d'ADN d'une personne à sa naissance ou des années plus tard, cela ne changerait rien. Elles parlent du fait que c'est dans le code génétique, et que ce sont ses caractéristiques qu'il faut connaître. Je pense que c'est là où se situe le problème.

La sénatrice Andreychuk : Lorsque vous avez eu ces conversations, était-ce au nom d'une association?

Dr. Cohn : En fait, elles voulaient en parler à la conférence scientifique de Sick Kids, car elles savaient que le sénateur Cowan présentait le projet de loi et elles voulaient entamer une discussion, dont nous nous sommes grandement réjouis. Il est certain que la conversation était intéressante. Je pense que cela fonctionnera et que nous trouverons une solution seulement si nous discutons et si nous trouvons un compromis avantageux pour nous tous.

La sénatrice Andreychuk : Cela deviendra-t-il un dialogue continu?

Dr. Cohn : Non. À l'heure actuelle, j'attends qu'on m'appelle. Des gens m'ont dit qu'ils viendraient nous rencontrer pour discuter, ce qui n'est pas encore arrivé.

La sénatrice Andreychuk : Je crois comprendre que si l'on prédit qu'une personne qui a une prédisposition développera la maladie — qu'il n'y a pas de peut-être —, c'est ce qui préoccupe les compagnies d'assurances, et non qu'elle peut avoir toutes les autres maladies qui pourraient avoir des répercussions négatives. Par ailleurs, si une personne porte un gène, elle développera peut-être la maladie, et les connaissances scientifiques ne peuvent pas encore nous dire si elle la développera ou non. Dans le cas de la maladie de Huntington, nous savons que la personne la développera si elle porte le gène, et c'est le cas de quelques autres maladies également. J'ai entendu parler de six à 12 ou 13 d'entre elles. Pour toutes les autres, une personne peut porter un gène et développer la maladie et elle peut avoir une prédisposition par rapport à la moyenne des gens, mais il n'y a pas encore cette nature prédictive. C'est possible, et la liste peut s'allonger, mais les connaissances scientifiques ne permettent pas encore de le déterminer. Vous ne faites pas de distinction.

Dr. Cohn : Non, ce n'est pas vrai. Je n'ai pas dit que je ne faisais pas de distinction. Les compagnies d'assurances ne font pas la distinction. Elles parlent d'information génétique globale.

Ce qui est important, c'est qu'il y a un très petit nombre de maladies que nous connaissons qui peuvent apparaître plus tard et vraiment avoir un effet néfaste, c'est-à-dire qu'elles limitent la qualité de vie. Il y en a très peu, mais il y en a quelques-unes.

Je veux apporter une correction. Il y a maintenant 56 maladies génétiques pour lesquelles nous pouvons faire quelque chose. Allons-nous sauver les gens de la mort dans tous les cas? Non. Toutefois, les chances de pouvoir le faire sont plus grandes si nous avons le plus de renseignements possible. Si nous n'avons pas l'information, il est certain que cela se produira.

Il existe un troisième groupe de maladies, et c'est la raison pour laquelle nous menons des recherches. Si j'ai un risque accru de 15 p. 100 d'avoir la maladie d'Alzheimer, qu'est-ce que cela signifie? Vous avez absolument raison lorsque vous dites que nous ne le savons pas encore. Nous apprenons ces choses sur le tas et le temps nous fournira des réponses, mais nous en avons déjà beaucoup appris, et nos connaissances augmentent manifestement de façon exponentielle.

La sénatrice Andreychuk : Je suis préoccupée au sujet de la discrimination en général, madame Bombard. Vous avez abordé la question, et je vous en suis reconnaissante. Tous les Canadiens n'ont pas une assurance-vie. Parfois, ils ne peuvent pas payer les primes. Il arrive que des personnes aient une assurance-vie au travail, grâce aux avantages sociaux, mais souvent, ce n'est pas le cas. Ceux qui peuvent se permettre une assurance-vie forment une catégorie, mais de nombreux Canadiens n'ont pas d'assurance ou ne peuvent pas se le permettre.

Votre étude portait-elle sur les assurances ou sur la discrimination dans son ensemble? Je crains de me soumettre à un test et que quelqu'un ait accès à mon dossier, que ce soit un employeur, une association, et cetera, et qu'on utilise ces renseignements contre moi. Cela m'inquiète autant que l'utilisation qu'en feraient les sociétés d'assurances. À mon avis, les nouvelles découvertes sur l'ADN nous exposeront à ce type de situation.

Visiez-vous surtout l'assurance-vie, ou s'agissait-il d'une analyse plus étendue des problèmes de discrimination qui pourraient surgir?

Mme Bombard : Je vous remercie de demander des éclaircissements. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de répondre à cette question.

L'étude portait précisément sur la discrimination : on a décrit aux répondants du sondage de partout au pays 23 situations particulières pour lesquelles ils devaient déterminer s'ils avaient été victimes de discrimination. Je les ai regroupées en six catégories, notamment les assurances, l'emploi, et cetera. Dans la catégorie des assurances, il y avait plusieurs sous catégories pour indiquer s'il s'agissait d'une assurance-vie, d'une assurance-invalidité de longue durée, d'une assurance contre les maladies graves ou d'une assurance prêt hypothécaire. Une partie de mon exposé concernait l'examen plus approfondi de ces situations.

On a demandé aux répondants d'évaluer s'ils avaient été victimes de discrimination dans ces situations. Afin d'obtenir des résultats valides, nous leur avons fourni une définition de ce que nous entendions par discrimination, car nous savions ainsi que chaque répondant avait interprété la question et y avait répondu en comprenant le sens de ce mot. Une partie du sondage portait sur les expériences liées à la discrimination, et l'autre partie que j'ai présentée concernait les préoccupations liées à la discrimination dans ces 23 situations particulières qui étaient ensuite regroupées en catégories plus vastes.

J'aimerais également avoir l'occasion de parler de votre observation préliminaire. L'assurance-vie n'est pas un bien social. Il s'agit d'un contrat commercial pour ceux qui peuvent se le permettre, et on pourrait faire valoir qu'elle joue un rôle souhaitable. On pourrait également faire valoir qu'elle est devenue un bien de plus en plus nécessaire, c'est-à- dire qu'elle est non seulement un contrat commercial, mais qu'elle est également devenue une exigence pour participer de manière équitable dans notre société et obtenir, par exemple, une hypothèque ou ouvrir une petite entreprise, ou dans le cas d'un médecin-praticien ou d'un professionnel paramédical, pour obtenir une protection contre l'invalidité ou les maladies graves ou même pour la pratique médicale. L'assurance-vie, qui était autrefois un bien commercial, est de plus en plus requise pour participer de manière équitable dans notre société.

Pourtant, la situation financière actuelle d'une personne pourrait l'empêcher d'obtenir une grosse police d'assurance, mais l'accès à une police minimale pourrait permettre à une personne qui présente un risque lié à une maladie génétique, mais à qui l'on refuse l'accès à ce bien même si elle a les moyens de se le payer, de participer de manière équitable dans notre société.

La sénatrice Andreychuk : Merci.

Le vice-président : Le temps est presque écoulé, mais deux sénateurs aimeraient poser des questions. Veuillez être brefs.

Le sénateur Eggleton : Il semble qu'un test génétique soit une très bonne chose. Certaines personnes peuvent hésiter, mais vous dites que pour la grande majorité, vous pouvez intervenir en cas de problème, que ce soit par des traitements médicaux ou par des changements aux habitudes de vie, et que ces interventions pourraient augmenter la durée de vie ou réduire les coûts liés aux soins de santé. Il semble que pour la vaste majorité, ce sont de bonnes nouvelles. Le problème, c'est que les gens hésitent par crainte d'être victimes de discrimination.

Docteur Cohn, en ce qui concerne la question de la discrimination, vous avez dit que 33 p. 100 des gens auxquels vous avez eu affaire — c'est-à-dire le tiers — ont refusé de se soumettre au test, car ils craignaient d'être victimes de discrimination; nous parlons surtout des assurances, mais il y a également l'emploi. Il y a d'autres facteurs, comme vous l'avez mentionné, madame Bombard. En passant, vos contributions sont précieuses. Nous vous en remercions.

Madame Bombard, avez-vous également conclu que 33 p. 100 des gens craignaient les conséquences et refusaient donc le test, ou d'autres études sont-elles arrivées à des conclusions différentes?

Mme Bombard : Mes travaux ne portaient pas sur cette question. Toutefois, dans la documentation, les données démontrent uniformément un nombre plus élevé de refus de participer aux recherches et aux tests génétiques en raison de craintes liées à la discrimination. Je peux obtenir ces données, mais je ne veux pas risquer de me tromper en les citant de mémoire.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais obtenir plus d'information sur l'indicateur de crainte.

Dans votre graphique, vous montrez les différentes formes de discrimination. Nous parlons beaucoup des assurances, car c'est le gros problème. Qu'en est-il de l'emploi? Cet indicateur est-il à la hausse? Quels types d'histoires vous raconte-t-on à ce sujet? Certains employeurs demandent-ils à des personnes de se soumettre à des tests génétiques ou leur demandent-ils si elles se sont déjà soumises à ce type de tests et le cas échéant, de fournir les résultats? Ce scénario est-il de plus en plus répandu?

Mme Bombard : Dans le milieu de l'emploi, les sondages indiquent que les expériences liées à la discrimination se produisent lorsqu'une personne juge qu'elle a une responsabilité fiduciaire perçue de divulguer cette information.

Je me souviens que le PDG d'une entreprise m'a dit qu'à son avis, étant donné qu'il sait ce qui s'en vient et que son poste comprend beaucoup de responsabilités, dans quelques années, il aura la responsabilité fiduciaire de divulguer ce renseignement. Toutefois, c'est la minorité des cas.

Dans d'autres cas, les renseignements sont découverts. La façon dont ils le sont n'est pas nécessairement claire, mais comme certains détails l'indiquent ici, on force parfois ces personnes à prendre une retraite anticipée, on peut modifier leurs responsabilités au travail ou leur refuser une promotion et même les surveiller plus étroitement au travail.

C'est la nature des expériences vécues dans ces situations et ce sont celles qui ont été signalées, que ce soit pendant les entrevues ou dans le cadre du sondage.

Le sénateur Eggleton : Quel groupe d'âge devrait se soumettre à des tests génétiques ou quel groupe d'âge devrait-on encourager à le faire? À l'hôpital pour enfants, vous vous occupez des enfants. Devrait-on examiner un groupe d'âge en particulier?

Dr Cohn : Aucun groupe d'âge précis n'est recommandé. Cela dépend entièrement des symptômes cliniques, si de tels symptômes sont présents.

Il y a manifestement des chercheurs de renseignements — vous avez parlé de l'arrivée de 23andMe au Canada —, c'est-à-dire des gens comme vous et moi, en bonne santé, mais qui souhaitent obtenir certains renseignements génétiques à leur sujet. J'ai fait séquencer mon génome, car je voulais obtenir ces renseignements.

J'aimerais parler de la question de l'emploi, car j'ai dû décider dans trois cas. Je vais ajouter une autre situation où j'ai reçu le frère adulte d'un enfant qui souffrait d'une maladie génétique, et nous avons produit un diagnostic sommaire à son sujet, mais il a demandé à sa mère de ne pas lui divulguer ses résultats avant qu'il obtienne l'emploi, car on lui avait posé des questions au sujet de son frère. Il vivait dans une petite ville et l'employeur connaissait sa famille, et on lui avait posé des questions précises sur les maladies génétiques. Il ne voulait pas se soumettre à des tests et ne voulait pas entendre les résultats, afin de ne pas se retrouver dans une situation où il pourrait dire quelque chose de compromettant.

Le sénateur Eggleton : Je vous remercie tous les deux. Vous nous avez énormément aidés.

Dr Cohn : Merci de nous avoir invités.

La sénatrice Nancy Ruth : J'aimerais parler des risques et des coûts. Docteur Cohn, vous avez clairement dit que si ces personnes ne se soumettent pas à des tests, les coûts sont assumés par les contribuables par l'entremise du système de santé. Si elles se soumettent à ces tests et les sociétés d'assurances ont accès à ces renseignements, ces coûts ne devraient-ils pas être assumés par les actionnaires de la société d'assurances? Qui assumera les coûts? Quelqu'un devra payer pour le risque. Avez-vous des commentaires à cet égard?

Dr Cohn : J'aimerais préciser que ce commentaire concernait l'histoire d'un patient. Je crois que nous devons être très prudents et ne pas généraliser. Ce n'était pas du tout mon intention. Certaines maladies, comme celle dont j'ai parlé, me mèneront dans une certaine direction si je ne connais pas le diagnostic génétique exact. Dans ce cas-là, cela m'a amené à effectuer des tests plus fréquents, ce qui pourrait ou ne pourrait pas être nécessaire. Je ne connais pas la réponse à cette question, car je ne connais pas la solution dans ce cas. Cela pourrait également entraîner des coûts liés aux soins de santé.

Pour des raisons d'équité, je dois préciser qu'en général, il y a une certaine perception à l'échelle mondiale selon laquelle lorsqu'il s'agit du séquençage génomique, plus on en sait, plus on va pousser les examens et cela créera un fardeau pour le système de soins de santé. Un volet de notre étude cherche à prouver exactement le contraire.

Je crois que ce sera exactement le contraire, mais je veux veiller à ne pas être mal compris. Actuellement, il s'agit de cas individuels, et je ne veux pas généraliser.

La sénatrice Nancy Ruth : Mais quelqu'un devra payer. Il s'agit de savoir qui paiera.

Dr Cohn : Pas nécessairement. Ce n'est pas vrai. Permettez-moi de vous donner un exemple.

Un patient qui reçoit un diagnostic de cancer du côlon à l'âge de 50 ans en raison d'un problème génétique qu'il ignorait recevra ce diagnostic à un moment qui mènera à un grand nombre d'opérations, à la chimiothérapie, peut-être à la radiothérapie, et ces traitements engendreront des coûts élevés pour le système de soins de santé.

Si je sais à l'âge de 20 ans que cela se produira, j'éviterai le cancer et tous les coûts liés aux traitements. C'est pourquoi je vous dis que nos recherches prouveront que plus on en sait, plus on diminuera le fardeau des coûts dans le système de soins de santé. J'aimerais donc respectueusement manifester mon désaccord et répondre que ce n'est pas nécessairement ce qui va se produire.

La sénatrice Nancy Ruth : Je parle de ceux qui ne se soumettent pas aux tests.

Dr Cohn : Que voulez-vous dire?

La sénatrice Nancy Ruth : Pour utiliser votre exemple du cancer du côlon, si une personne ne se soumet pas aux tests et qu'elle ne sait pas qu'elle aura le cancer, et qu'elle doit recevoir tous ces traitements, le contribuable est donc responsable des coûts.

Dr Cohn : C'est exact.

La sénatrice Nancy Ruth : Quelqu'un, quelque part, doit payer. Est-ce l'actionnaire de la société d'assurances si la société n'avait pas accès à ces renseignements ou est-ce l'ensemble des contribuables?

Dr Cohn : Je m'excuse. C'est tout à fait exact.

La sénatrice Nancy Ruth : Il n'y a pas de problème. C'est un dilemme moral.

La vice-présidente : Merci, docteur Cohn et merci, madame Bombard, de vos témoignages éloquents. C'est ce qui termine cette réunion du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. J'aimerais également remercier les sénateurs.

(La séance est levée.)


Haut de page