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RIDR - Comité permanent

Droits de la personne

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 18 - Témoignages du 4 juin 2015


OTTAWA, le jeudi 4 juin 2015

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 8 h 1, pour étudier les questions de discrimination dans les pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale, étudier la mesure dans laquelle les objectifs pour atteindre l'équité en matière d'emploi pour les groupes minoritaires sont réalisés et examiner l'évolution du marché du travail pour les groupes des minorités visibles dans le secteur privé.

La sénatrice Mobina S. B. Jaffer (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue à la 33e réunion du Comité sénatorial permanent des droits de la personne de cette 41e législature.

[Français]

Le Sénat a confié à notre comité le mandat d'examiner les questions liées aux droits de la personne au Canada et à l'étranger.

Je m'appelle Mobina Jaffer, et je suis présidente de ce comité.

[Traduction]

Avant de continuer, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue à tous, et je demanderais aux membres de se présenter, en commençant par la vice-présidente.

La sénatrice Ataullahjan : Sénatrice Salma Ataullahjan, de l'Ontario.

La sénatrice Nancy Ruth : Nancy Ruth, de l'Ontario.

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, de l'Ontario.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de l'Ontario.

La présidente : En 2004, le Comité des droits de la personne a commencé à examiner les pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale et la mesure dans laquelle les objectifs pour atteindre l'équité en matière d'emploi sont réalisés. En 2007, le comité a étudié plus en profondeur les pratiques d'embauche et de promotion de la fonction publique fédérale et a publié un rapport intitulé L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale : nous n'y sommes pas encore.

En 2010, le comité a publié un deuxième rapport intitulé Refléter le nouveau visage du Canada : l'équité en emploi dans la fonction publique.

Le 10 décembre 2013, le comité a achevé son troisième rapport intitulé L'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale : vigilance et égalité vont de pair, qui renfermait les deux recommandations suivantes : que le gouvernement fédéral appuie une surveillance et une évaluation accrues afin d'aider à atteindre l'objectif d'équité en matière d'emploi au sein de la fonction publique fédérale et que le gouvernement fédéral en fasse davantage pour promouvoir la défense des droits des employés et la participation des employés aux dossiers touchant l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale.

Le président du Conseil du Trésor, l'honorable Tony Clement, et la présidente de la Commission de la fonction publique du Canada, Mme Anne-Marie Robinson, ont donné suite aux recommandations du comité dans des mémoires écrits. Nous avons invité des fonctionnaires des deux ministères à comparaître devant le comité aujourd'hui. Nous entendrons également le témoignage de représentants de l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

Nous allons commencer avec l'Alliance de la Fonction publique du Canada, qui est représentée par deux témoins aujourd'hui : Mme Baldwin et Mme Lamba. Nous vous souhaitons la bienvenue. Vous nous appuyez toujours beaucoup dans le travail que nous faisons. Nous voulons que vous nous disiez si nous avons atteint nos objectifs.

Jeannie Baldwin, vice-présidente exécutive régionale de l'AFPC (région de l'Atlantique), Alliance de la Fonction publique du Canada : Bonjour. Merci de nous avoir invitées à comparaître devant le comité.

Ce que nous pensons du rapport annuel de 2013-2014 sur l'équité en matière d'emploi du Conseil du Trésor, c'est qu'il renferme trop peu d'information et pas suffisamment de données et d'analyses essentielles. Mis à part les six tableaux du rapport, il contient très peu d'information.

En 2013, le comité a recommandé que le Conseil du Trésor inclue des données précises concernant l'équité en matière d'emploi dans les rapports annuels futurs. Nous n'avons pas vu ces renseignements, et vous pourrez poser des questions aux représentants lorsqu'ils comparaîtront.

D'après les quelques tableaux qui figurent dans le rapport annuel, nous constatons une tendance inquiétante. Les données montrent que les personnes handicapées quittent la fonction publique cinq fois plus rapidement qu'elles sont embauchées. Or, le taux de représentation des personnes handicapées dans la fonction publique n'était que légèrement inférieur à l'année précédente. On a constaté une tendance semblable l'année d'avant, où les personnes handicapées quittaient la fonction publique sept fois plus rapidement qu'elles étaient embauchées.

Nous devons nous demander pourquoi le taux de représentation général reste le même s'il y a autant de personnes handicapées qui quittent la fonction publique. Que se passe-t-il dans la fonction publique qui force ces travailleurs à partir?

Nous n'avons pas de réponses, mais ce n'est pas faute de poser la question. Le Conseil du Trésor ne semble pas s'inquiéter de cette tendance, tant que le taux global de représentation reste stable. Nous lui avons demandé à maintes reprises des données plus détaillées et une analyse de l'incidence du plan pour la réduction du déficit sur les groupes visés par l'équité en matière d'emploi, mais cela semble mission impossible.

Ailleurs dans le rapport, on constate que les femmes demeurent sous-représentées dans 11 des 23 ministères les plus importants. Les travailleurs racialisés sont sous-représentés dans 9 ministères sur 23. Le rapport montre que les quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi affichent un taux de représentation supérieur à leur taux de disponibilité au sein de la population active, selon les données du recensement de 2006, qui datent déjà beaucoup.

Les données de 2011 seront bientôt publiées, mais les chercheurs ont constaté que les parents monoparentaux, les ménages d'une seule personne et les locataires affichaient un taux de réponse inférieur aux autres groupes. Il en va de même pour les personnes vivant dans les secteurs de recensement les plus pauvres. Nous savons que les taux de pauvreté sont plus élevés parmi les groupes visés par l'équité en matière d'emploi que les autres et que le revenu y est plus bas en général. Il y a donc lieu de se demander si le recensement sera vraiment représentatif des groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Encore une fois, nous déplorons l'absence d'analyse en profondeur dans le rapport annuel. Le Conseil du Trésor prétend qu'il ne disposait pas des ressources nécessaires pour effectuer cette analyse. En raison des compressions qu'il a subies, le Conseil du Trésor n'a plus de personnel spécialisé ni de service exclusivement responsable de l'équité en matière d'emploi. L'équité en matière d'emploi n'est plus une priorité.

Il y a une source d'information précieuse sur les groupes visés par l'équité en matière d'emploi. Il s'agit du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Dans le sondage de 2014, on constate que les fonctionnaires handicapés affichent des taux de réponses négatives aux questions du sondage beaucoup plus élevés que les autres groupes. Ces questions portent sur toutes sortes de sujets, comme l'équipement professionnel, la formation et le matériel nécessaire pour assurer la protection de la santé et de la sécurité au travail et les signes de reconnaissance tangibles pour le travail réalisé.

Les fonctionnaires handicapés étaient plus susceptibles que les autres d'avoir de la difficulté à se faire accepter à titre de membre égal de l'équipe ou d'être choisis dans le cadre d'un concours. Ils étaient en revanche deux fois plus susceptibles d'avoir subi du harcèlement au travail au cours des deux dernières années.

Ce sondage donne constamment des taux de réponses négatives plus élevés parmi les travailleurs autochtones également.

Les membres de minorités visibles subissent davantage de discrimination. Les femmes affichent des taux de harcèlement et de discrimination fondés sur le sexe et le statut familial un peu plus élevés que les hommes.

Tous les groupes visés par l'équité en matière d'emploi ont exprimé une crainte supérieure de représailles s'ils déposaient un grief ou une plainte officielle. Il y a un climat de peur au travail.

Cela nous amène à vous parler des Comités des champions et des présidents de l'équité en matière d'emploi. Nous croyons que l'employeur utilise ces comités pour se soustraire à son obligation, aux termes de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, de consulter les agents négociateurs et de collaborer avec eux. Nous savons que les fonctionnaires ont très peur de déposer des plaintes officielles, par crainte de représailles. Les fonctionnaires hésitent également à signaler des problèmes à la haute direction, particulièrement en ce climat politique de réduction du déficit et de la taille de l'État.

Il y aurait lieu de demander au Conseil du Trésor comment ces comités procèdent pour rejoindre les fonctionnaires ordinaires et examiner leurs problèmes en toute sécurité et confidentialité. Nous savons que les agents négociateurs n'ont pas été invités à faire partie de ces comités ou du processus.

Pour terminer, un mot sur le manque de consultation. Le Conseil du Trésor a délégué ses responsabilités liées à l'équité en matière d'emploi aux sous-ministres. Nos représentants syndicaux nous disent que la question n'est pas abordée de la même manière dans tous les ministères. L'information fournie est minime, et il y a très peu de collaboration ou de consultation, s'il y en a.

Nous avons demandé à être consultés par le Comité mixte sur l'équité en matière d'emploi du Conseil national mixte sur les recommandations que vous avez formulées dans le dernier rapport du comité sénatorial, mais le Conseil du Trésor ne s'est pas engagé à consulter nos agents négociateurs de façon significative.

Je vous remercie de bien vouloir prendre connaissance de nos observations. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

La présidente : Merci beaucoup. Avant de donner la parole à quelqu'un d'autre, j'ai une question à poser. Outre les rapports annuels, avez-vous accès à l'information dont vous avez besoin sur les mesures que prend le gouvernement pour assurer l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale? Pouvez-vous nous expliquer cela?

Seema Lamba, agente des droits de la personne de l'AFPC, Alliance de la Fonction publique du Canada : Il y a différents niveaux. Au niveau national, nous recevons de l'information par le Comité mixte sur l'équité en matière d'emploi du CNM. Je vais être honnête, cependant : ce comité a déjà été très utile, il y avait de la collaboration et des consultations sur les enjeux que nous observions et il y avait des progrès, mais ce n'est plus le cas. Aujourd'hui, c'est plutôt de la communication d'information, et il nous arrive même d'apprendre des choses après coup.

Je vais vous donner un exemple concret. Avant, le Conseil du Trésor envoyait à l'avance une copie de son rapport annuel aux agents négociateurs pour qu'ils puissent l'examiner. Nous n'en sommes plus avisés à l'avance. Nous apprenons après coup qu'il a été déposé. Les choses ont changé.

Bref, non, je dirais que nous ne recevons pas toute l'information dont nous aurions besoin pour être pleinement consultés et collaborer aux discussions sur l'équité en matière d'emploi.

La présidente : J'ai beaucoup d'autres questions, mais je vais commencer par donner la parole aux membres du comité.

La sénatrice Eaton : Je m'interroge, parce qu'il semble s'agir d'un milieu de travail épouvantable, d'où vient le problème? Vient-il des ressources humaines et de la façon dont on embauche les gens? Est-ce la direction qui aurait besoin de rééducation? Par où commenceriez-vous? Si vous deviez, toutes les deux, essayer de régler le problème, que feriez-vous pour commencer? Que recommanderiez-vous?

Mme Lamba : L'équité en matière d'emploi comporte deux volets, le volet qualitatif et le volet quantitatif. Le volet quantitatif consiste à embaucher des gens et à leur offrir du perfectionnement professionnel.

La sénatrice Eaton : Je suppose que tout dépend des personnes qui se présentent aux concours.

Mme Lamba : C'est vrai. Il y a le recrutement et la rétention. Il doit y avoir quelque chose au stade de l'embauche. Le comité de sélection doit en tenir compte.

D'après ce que nous constatons, le Conseil du Trésor prétend qu'il n'y a plus de lacunes ou qu'il y en a très peu en général. Il y a toujours des lacunes au niveau exécutif. Il faut donc analyser nos méthodes d'embauche, nous demander où nous recrutons nos candidats.

Je poserais des questions sur les personnes handicapées, le problème du recrutement de personnes handicapées. Compte tenu de notre taux de rétention, comme le taux de représentation reste à peu près le même, il ne semble pas y avoir de lacune. C'est donc une partie du problème, et il y a aussi un manque d'éducation. La volonté doit venir d'en haut. Je pense que la direction doit vraiment adhérer au concept de l'équité en matière d'emploi, puis l'intégrer dans tout ce qu'elle fait, dont la planification des ressources humaines. Il faut aussi sensibiliser le personnel à la question, parce que certains fonctionnaires hésitent à s'identifier parce qu'ils croient aux mythes associés à l'équité en matière d'emploi. On s'imagine qu'une personne n'a été embauchée que parce que c'est un poste désigné, que l'embauche n'est pas fondée sur le mérite. Il y a beaucoup de mythes.

La sénatrice Eaton : Il y a donc des postes désignés pour les personnes handicapées ou les personnes non blanches? Est-ce ce que vous voulez dire par postes désignés?

Mme Lamba : S'il y a une lacune, on fixe des cibles de recrutement. Ce n'est pas obligatoire, mais on se donne pour objectif de recruter des candidats de certains groupes pour rendre l'effectif plus représentatif. Il y a donc parfois du recrutement ciblé, si c'est ce que vous voulez dire.

La sénatrice Eaton : Je suppose que je vous demande s'il y a de l'action positive, pour ainsi dire. S'il y a moins de femmes que d'hommes embauchés, est-ce que je continue de chercher une femme quand j'essaie de combler un poste?

Mme Lamba : Il y a une différence entre l'action positive et l'équité en matière d'emploi. L'action positive consiste à établir un seuil chiffré obligatoire. L'équité en matière d'emploi se traduit par des cibles. On y aspire. On prévoit recruter des gens dans un groupe donné. Où se trouvent les femmes, on essaie de les recruter, mais ce n'est pas obligatoire. C'est un idéal.

La sénatrice Eaton : C'est un idéal

Mme Lamba : Oui.

La sénatrice Eaton : Nous parlons de rééducation. Que recommanderiez-vous d'autre?

Mme Lamba : Nous recommandons depuis toujours qu'il y ait un mécanisme de reddition de comptes, qui commencerait par la personne responsable de l'embauche, jusqu'au plus haut niveau hiérarchique, puis qu'il y ait un cadre de responsabilité pour déterminer si ces personnes atteignent ou non les cibles. Les gens du Conseil du Trésor vont vous dire que c'est inclus dans leur Cadre de responsabilisation de gestion — le CRG, je ne suis pas sûre du terme —, mais c'est bien caché.

Il y a une liste de vérification. Pour un haut gestionnaire, il y a 10 choses à faire. L'équité en matière d'emploi peut en faire partie, mais elle n'aura pas nécessairement d'incidence pour déterminer si le haut gestionnaire atteint ses objectifs. Il faut accroître la transparence et la responsabilité des gestionnaires pour qu'ils en rendent compte. Nous ne savons pas quels gestionnaires font bien leur travail et lesquels ne le font pas. C'est un élément important de l'équation.

On nous dit qu'il y a un mécanisme de responsabilisation, mais il n'est pas vraiment transparent. Nous ne savons pas ce qui se passe quand un gestionnaire n'atteint pas ses objectifs. Comment peut-on parler de responsabilisation alors?

La sénatrice Eaton : Je pense que ce qui me dérange le plus, c'est l'atmosphère dans laquelle vous travaillez plutôt que le nombre de personnes embauchées dans chaque groupe.

Fait-on fausse route en établissant des cibles sur le nombre de femmes ou de personnes handicapées qui doivent être embauchées? Pourquoi procédons-nous ainsi? Comment peut-on savoir si les personnes qui seraient qualifiées pour l'emploi se portent candidates?

Autrement dit, si un gestionnaire doit choisir entre deux personnes et qu'il y en a une qui a un handicap, mais qu'elle n'est pas aussi bien qualifiée que l'autre, qui choisira-t-il?

Mme Lamba : C'est une bonne question, c'est justement l'un des mythes de l'équité en matière d'emploi. Il ne s'agit pas d'embaucher une personne moins qualifiée. Que ce soit clair : l'embauche se fonde sur le mérite. L'équité en matière d'emploi se fonde sur le mérite.

Elle lève les obstacles auxquels les groupes désignés sont confrontés, les obstacles de longue date comme les obstacles actuels, afin de leur permettre de profiter de règles équitables pour obtenir un emploi. Je pense à tous les biais qui interviennent pendant le processus de sélection. On se rend compte que, oh! telle personne a un handicap; elle est qualifiée pour l'emploi, mais la perception est telle, parfois, qu'on s'imagine qu'elle est moins compétente. Les stéréotypes entourant les personnes handicapées entrent en jeu, sur leur productivité, ce qu'elles peuvent faire ou non. Cette attitude peut se manifester de manière consciente ou inconsciente.

Il ne faut pas l'oublier. L'équité en matière d'emploi ne vise pas à donner des emplois à des personnes non qualifiées. Il s'agit d'offrir à des personnes qualifiées des conditions équitables puisqu'elles n'auraient peut-être pas les mêmes chances autrement. Nous l'observons depuis longtemps, les études montrent systématiquement qu'il y a un certain nombre de personnes faisant partie d'un groupe désigné dans la population active, mais qu'elles ne sont pas représentées dans le milieu de travail. Est-ce plus clair?

La sénatrice Eaton : Oui, beaucoup. Merci.

La sénatrice Ataullahjan : Je regarde mes notes de la dernière réunion, qui a eu lieu le 22 avril 2013. On dirait que rien n'a changé. On entend toujours les mêmes choses sur l'auto-identification. Selon les chiffres que j'ai, 4,9 p. 100 des personnes embauchées étaient autochtones, 5,7 p. 100 étaient handicapées et 12,1 p. 100 faisaient partie d'une minorité. Ces chiffres sont-ils restés les mêmes? Y a-t-il une tendance à la hausse?

Y a-t-il un plafond de verre qui existe pour les personnes de ces quatre groupes? Y en a-t-il qui accèdent à des postes de cadres?

Mme Lamba : Selon le rapport annuel, les taux de représentation sont restés à peu près les mêmes. En fait, il y a une cible, qui correspond au taux de disponibilité sur le marché du travail, et le Conseil du Trésor affirme que nous l'atteignons.

Il y a des lacunes au niveau des cadres supérieurs. Vous devrez demander aux représentants du Conseil du Trésor comment ils établissent leurs calculs. Il n'y a pas de justification à cet égard dans son rapport. Il est simplement écrit : « Nous avons atteint les cibles. » Ce serait une bonne question à leur poser.

Il est vraiment difficile de creuser davantage pour comprendre les enjeux quand on n'a qu'une photo superficielle. Nous avons remarqué, dans les tableaux par ministère, que les femmes sont sous-représentées dans certains ministères et que certains des autres groupes désignés sont sous-représentés dans certains ministères. Qu'est-ce qui se passe? Certains de ces ministères sont assez gros.

Il y a aussi des groupes dont les membres sont cantonnés, si l'on veut, dans certains types d'emploi. Il y a plus d'Autochtones qui travaillent aux Affaires autochtones, par exemple. Il y a peut-être plus de personnes racialisées dans les statistiques. Les chiffres et le taux général peuvent être trompeurs, parce qu'il peut en fait y avoir un grave problème de sous-représentation ailleurs.

Bref, je dirais qu'il y en a toujours un, mais que c'est difficile à cerner, parce que nous n'avons pas cette information dans le rapport annuel.

En 2009-2010, le Conseil du Trésor avait fait ce type d'analyse. Il proposait ensuite des solutions pour remédier à la situation : « Voici quelques stratégies et voici ce que nous faisons. » Il donnait de l'information détaillée sur chaque groupe désigné de l'équité en matière d'emploi. Quelle est la situation des personnes handicapées? Quels sont les problèmes dans ce groupe?

Ce n'est plus le cas, mais c'est le genre de questions que vous pourriez poser aux représentants du Conseil du Trésor pour creuser la question.

Le sénateur Eggleton : Vous avez mentionné qu'il y avait un climat de peur au travail. Pouvez-vous nous donner des exemples? C'est une affirmation très lourde de sens. Je vous prie de préciser davantage votre pensée.

Mme Lamba : Bien sûr. Le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux comportait des questions sur le harcèlement et la discrimination. Il demandait aux gens comment ils géraient les questions de harcèlement. L'une des questions portait justement sur la peur de représailles pour avoir déposé un grief ou une plainte en matière de droit de la personne pour cause de harcèlement ou de discrimination, et les répondants ont exprimé de la peur dans une proportion inquiétante.

J'ai ici une statistique sur les personnes handicapées : 55 p. 100 des personnes handicapées ayant répondu à cette question ont dit avoir peur de subir des représailles si elles déposaient une plainte relative aux droits de la personne, par comparaison avec 45 p. 100 des autres personnes. C'est assez élevé. C'est probablement l'un des taux les plus hauts, mais ils étaient assez hauts dans les autres groupes aussi.

Il y a donc un thème récurrent ici, les gens ont peur d'en parler lorsqu'ils sont témoins d'atteintes aux droits de la personne.

Mme Baldwin : Je suis la représentante élue de la région de l'Atlantique, et j'ajouterais que certains de nos membres ont probablement besoin de matériel spécialisé pour faire leur travail en raison de leur handicap. Certains ont toutefois peur de le demander compte tenu de toutes les compressions qui s'exercent au gouvernement fédéral. Ils se disent que cela va coûter de l'argent au ministère et qu'ils pourraient être les premiers à se faire mettre à pied. C'est le genre de choses qui se passe.

De même, comme vous le savez, il y a deux ans, le gouvernement a adopté un outil de mesure du rendement. Le ministre du Conseil du Trésor a dit vouloir se débarrasser du bois mort au sein de l'organisation. Les gens se demandent ce que cela signifie. Les compressions effectuées par ce gouvernement ne se comparent pas à celles que nous avons connues vers la moitié des années 1990, si vous vous en rappelez. Le processus mis en place à l'époque était très bien.

Cette fois-ci, le processus n'est pas transparent ni uniforme. Les gens ont peur de perdre leur emploi. C'est vrai. C'est pourquoi il y en a qui n'osent pas porter plainte.

Le sénateur Eggleton : J'étais le président du Conseil du Trésor en 1994.

Mme Baldwin : Vous avez fait de l'excellent travail.

Le sénateur Eggleton : Merci. Au sujet de la catégorie dont vous venez de parler, des 55 p. 100 des personnes handicapées, les autres groupes disent-ils la même chose?

Mme Lamba : J'étais justement en train de vérifier. Dans le sommaire qu'on trouve sur le site web du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, parmi les raisons pour ne pas avoir déposé de grief ou porté plainte officiellement, la crainte de représailles est évoquée par 45 p. 100 des répondants au total. Donc la raison pour ne pas déposer de grief ou de plainte officielle pour discrimination, par exemple, serait la peur des représailles dans 44 p. 100 des cas, toutes catégories confondues.

Habituellement, ces chiffres sont plus élevés dans les quatre groupes désignés que dans la population générale. Est-ce que cela vous aide?

Le sénateur Eggleton : Oui, mais comme vous le dites, les compressions jouent également.

Le processus de consultation de l'AFPC et des autres groupes d'employés a changé, n'est-ce pas? Vous affirmez ne pas être consultés.

Mme Baldwin : Il a changé. Il n'y a pas de consultation.

Le sénateur Eggleton : Quand ce changement s'est-il passé et quelle en est l'ampleur?

Mme Lamba : Est-ce que je peux vous donner un exemple concret?

Le sénateur Eggleton : Bien sûr.

Mme Lamba : Le Comité mixte sur l'équité en matière d'emploi s'occupe des volets quantitatif et qualitatif. Avant, nous étions consultés sur les politiques, par exemple, pour assurer le respect de la politique sur le harcèlement. Nous consultions nos membres, puis nous faisions des recommandations de fond, qui étaient prises en compte.

Dans les derniers exercices de révision des politiques, quand le Conseil du Trésor a décidé de revoir beaucoup de politiques en bloc, nous avons trouvé très difficile d'avoir notre mot à dire et que nos recommandations soient prises en compte. Par exemple, nous avons demandé que la politique sur l'équité en matière d'emploi demeure une politique à part, parce qu'il y a une loi à cet égard, que c'est important et que ce devrait être une priorité. Le Conseil du Trésor l'a réduite à quatre à six phrases, dans une politique qui porte sur toutes sortes de choses. Cela change vraiment la donne.

On nous donne souvent de l'information. Nous pouvons parfois y réagir. Nos observations peuvent ou non être prises en compte dans le produit final. En fait, depuis deux ans, nous ne savons même pas où sont rendues ces politiques.

Le sénateur Eggleton : Vous avez mentionné deux groupes qui sont toujours sous-représentés. Vous avez dit que les femmes étaient sous-représentées dans 11 ministères sur 23 et que les minorités visibles l'étaient dans 9 ministères sur 23. Vous n'avez pas mentionné les autres groupes. N'y a-t-il sous-représentation que dans ces deux groupes cibles de l'EE?

Mme Lamba : Il y a une certaine sous-représentation dans certains groupes, mais ce n'est pas aussi frappant, donc nous voulons mettre l'accent sur ces deux groupes.

La sénatrice Andreychuk : Nous avons réalisé quelques études, et la question qui se posait à l'époque consistait à déterminer si nous voulions procéder par cible ou autrement. La méthode choisie a été de cibler quatre groupes. Êtes-vous toujours en faveur de cette approche pour la fonction publique?

Mme Baldwin : Oui.

Mme Lamba : Je veux dire que nous croyons toujours à la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Nous la jugeons nécessaire. Elle mériterait des améliorations sur le plan de l'application et des mécanismes de reddition de comptes, mais nous appuyons toujours vivement cette loi, que nous jugeons nécessaire.

La sénatrice Andreychuk : C'est l'un des débats qui nous avait animés il y a quelque temps.

Quelques-unes de vos observations, questions et réponses me laissent un peu perplexe. Où avez-vous trouvé vos données?

Mme Lamba : Nous analysons le rapport annuel du Conseil du Trésor, tout limité soit-il. Nous examinons aussi le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Nous menons également des consultations et des discussions internes sur la question.

La sénatrice Andreychuk : Vous disiez que les employés craignent de subir des représailles s'ils formulent une plainte officielle. Quand vient le temps de faire une démarche semblable, est-ce que les pressions viennent toujours de la direction ou arrive-t-il que les pairs aient un rôle à jouer? C'est une question très complexe. Les employés craignent-ils les représailles de ceux qui les évaluent, qui peuvent leur refuser une promotion ou prendre d'autres mesures à leur encontre, ou est-ce que la pression exercée par les pairs peut aussi avoir une influence?

Mme Lamba : Je ne sais pas trop quoi vous répondre, car je ne me suis pas penchée sur cette question bien précise. Je sais toutefois que dans le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, on peut indiquer si le harcèlement ou la discrimination provient d'un superviseur ou d'un gestionnaire. C'est le cas la plupart du temps. Il y a également une case pour les collègues. Je peux vérifier et vous répondre ultérieurement. Je dirais que c'est sans doute une combinaison des deux facteurs, car il y a aussi une pression exercée par les collègues en faveur d'un bon rendement.

Je pourrais toutefois vous en dire davantage au sujet de la situation des personnes handicapées à cet égard. Une des questions du sondage portait sur la façon dont on gère les cas de rendement insatisfaisant en milieu de travail, et 47 p. 100 des personnes handicapées ont répondu que c'était inadéquat. Il y a donc également un problème au niveau de la gestion, mais je ne connais pas les chiffres exacts. Je pourrais vous les fournir par écrit.

La sénatrice Andreychuk : Certainement, cela pourrait nous être utile.

Un autre aspect que nous avons examiné longuement est celui de la nécessité de bien comprendre son groupe cible si l'on veut éliminer quelques-unes des inégalités constatées. Pour recruter des gens d'un certain groupe, il faut aller là où ils se trouvent, et bon nombre d'entre eux ne sont pas à Ottawa. Les différents groupes ciblés, comme les nouveaux immigrants, ne vivent pas nécessairement à proximité des emplois qui sont offerts. On nous a indiqué que l'on allait considérer le recours à la presse ethnique pour annoncer ces emplois, de préférence à des médias comme le Globe and Mail.

Est-ce que cela s'est concrétisé ou est-ce que nous suivons encore l'ancien modèle?

Mme Lamba : Il faudrait poser la question à la Commission de la fonction publique.

La sénatrice Andreychuk : Votre analyse n'a pas permis de dégager des réponses à cette question?

Mme Lamba : Non, je n'ai pas d'information à ce sujet.

La sénatrice Andreychuk : Qu'en est-il de ce que vous faites au sein de votre propre organisation?

Mme Lamba : Où devrions-nous aller pour notre recrutement? Je dirais que cela dépend du groupe cible. Les obstacles peuvent différer d'une communauté à l'autre, notamment chez les Autochtones. Il suffit parfois d'aller recruter dans les universités, mais cela ne fonctionne pas nécessairement pour certains groupes visés. Il faut trouver le moyen d'avoir accès à ces gens, de susciter leur intérêt. Nous savons qu'ils peuvent se heurter à certains obstacles, notamment du point de vue de l'éducation. Il faut procéder à une analyse systématique de la situation de chaque groupe.

Dans le cas des minorités visibles, la presse ethnique serait certes, comme vous le suggérez, un bon outil de recrutement.

La sénatrice Andreychuk : Effectuez-vous vous-même ce travail d'analyse ou vous fiez-vous uniquement à l'information que vous obtenez de la Commission de la fonction publique et du Conseil du Trésor?

Mme Lamba : Quant aux endroits où il faut recruter?

La sénatrice Andreychuk : Je parle de l'analyse des groupes cibles, des moyens à prendre pour se rapprocher davantage des objectifs et de toutes les mesures de la sorte. Procédez-vous à vos propres analyses ou utilisez-vous directement l'information provenant de la Commission de la fonction publique ou du Conseil du Trésor? Autrement dit, effectuez-vous vous-mêmes des recherches indépendantes au moyen de questionnaires ou de sondages? Ce serait une bonne chose à savoir.

Mme Lamba : Nous recueillons ces renseignements dans le cadre du travail que nous effectuons, mais je ne pense pas que nous procédions à une analyse du genre de celle à laquelle vous pensez. Je pourrais également vous fournir de plus amples précisions à ce sujet si la chose vous intéresse.

La sénatrice Andreychuk : Très bien. Les gens de la Commission de la fonction publique nous ont indiqué que la question des employés contractuels a soulevé certaines critiques. Les possibilités d'avancement au sein de la fonction publique sont réduites en raison de ces employés contractuels. Il peut ainsi être difficile pour un membre des groupes cibles de faire sa place à partir de l'extérieur lorsqu'il est en concurrence pour un poste avec quelqu'un qui a déjà acquis une partie des compétences requises dans le cadre d'un contrat de travail obtenu grâce à un ami d'un ami. Il était question d'un effort concerté pour tenter de venir à bout de ce problème. Avez-vous effectué des analyses à ce sujet?

Mme Lamba : Nous sommes conscients du problème. Ce sont des questions qui devraient être adressées à la Commission de la fonction publique. Il a été déterminé que l'on se servait de ces contrats pour contourner les exigences relatives à l'équité en matière d'emploi. Des gens occupent un poste à titre d'employé temporaire ou contractuel avant de le postuler et de l'obtenir, mais c'est davantage une question de relations que d'équité à proprement parler. Nous sommes au fait du problème, mais ce serait vraiment une bonne idée de demander aux gens de la Commission de la fonction publique ce qu'ils ont fait pour y remédier.

La sénatrice Andreychuk : Votre organisation ne l'a pas fait? Vous ne vous êtes pas penchés sur la question?

Mme Lamba : Nous avons déterminé que c'était problématique.

La sénatrice Nancy Ruth : Je tiens à préciser aux fins du compte rendu que ces cibles d'embauche dont nous parlons sont liées au profil démographique de la population. S'il y a 7 p. 100 de personnes handicapées au sein de la population canadienne, il faut que ces personnes représentent 7 p. 100 des effectifs de la fonction publique fédérale.

J'aimerais également rectifier le tir relativement à une mauvaise interprétation du principe d'action positive. Ce n'est pas une question de chiffres; cela désigne seulement des mesures visant un meilleur équilibre. Il n'y a pas de quotas à proprement parler au Canada. C'est un phénomène américain.

Pour ce qui est de l'augmentation des cas de harcèlement sexuel, je ne suis plus trop sûre de ce que vous avez dit à ce sujet, mais est-ce une question de signalement ou y a-t-il effectivement une hausse?

Mme Baldwin : Oui.

La sénatrice Nancy Ruth : Je ne sais pas si j'ai vraiment une question, mais j'aimerais en savoir plus long. Je peux comprendre que certains craignent de perdre leur emploi quand on sait que les compressions vont atteindre 10 p. 100 de l'effectif. Pouvez-vous nous en dire plus long à ce sujet?

Mme Baldwin : Nous avons noté une augmentation des cas de maladie mentale en milieu de travail. C'est un phénomène prévalent qui s'accompagne de nombreux préjugés. Il y a parfois harcèlement en raison de ces problèmes de santé mentale. Nous avons aussi noté le facteur des responsabilités familiales, car nous devons tous nous occuper de nos proches, que nous soyons parents seuls ou simplement à la recherche d'un service de garde. Nous constatons qu'il peut y avoir du harcèlement à cet égard également.

Plus récemment, on note une recrudescence de cas attribuables aux effectifs réduits. L'accent est entièrement mis sur la productivité et tout est surveillé; nos membres craignent de dénoncer la situation ou même de porter plainte. Je peux vous donner un exemple. Je me rends dans certains de nos bureaux pour discuter avec nos membres. Comme j'ai un proche aux prises avec des problèmes de santé mentale, je peux leur en parler librement. Il est important de dissiper les préjugés associés à ce phénomène.

Vous seriez surprise du nombre d'employés qui s'adressent à moi après coup pour me raconter leur histoire, me dire comment ils ont vécu un épisode maniaque au travail, de quelle manière leur employeur a réagi et comment ils se sont retrouvés tout à coup en congé de maladie. Vous croyez peut-être que cela n'arrive pas, mais c'est bel et bien le cas. Il se produit de bien tristes choses dans nos milieux de travail actuellement.

La sénatrice Nancy Ruth : Comment ces employés se retrouvent-ils en congé de maladie? S'agit-il d'un congé forcé ou est-ce le fruit d'une entente mutuelle?

Mme Baldwin : Ils ne sont pas en congé de maladie au départ. À titre d'exemple, une personne bipolaire peut se présenter au travail en étant sous médication. Il y a maintenant beaucoup de pression en milieu de travail pour que l'on en fasse davantage avec moins. La personne en question peut sombrer tout à coup dans une phase maniaque. Il arrive que l'employeur ne considère que le travail qui a été effectué sans même se rendre compte que la personne a vécu un épisode maniaque. Inévitablement, cette personne se retrouve en congé de maladie avant de reprendre le travail pour replonger dans le même cycle sans fin.

Madame Lamba peut vous donner de plus amples détails sur les formes de harcèlement relevées au moyen du sondage.

Mme Lamba : Je crois que vous en avez fait le tour.

La sénatrice Nancy Ruth : Merci.

La présidente : Comme vous le savez, notre comité se penche depuis un bon moment déjà sur la question de l'embauche et des pratiques en usage au sein de la fonction publique. Au départ, il y avait des représentants des différents groupes, dont les minorités visibles et les Autochtones, mais le tout a été démantelé au profit d'un processus misant sur des champions.

J'aimerais que vous nous expliquiez le système des champions. Je suis très déçue que nous n'ayons jamais pu recevoir un de ces champions. Ils sont réticents à nous parler, même en privé, ou à comparaître devant nous pour nous dire comment ils travaillent, quels sont leurs moyens d'action par rapport au groupe dont ils défendent la cause, qu'il s'agisse des femmes, des minorités visibles, des Autochtones ou des personnes handicapées. Vous avez abordé la question, mais j'aimerais que vous nous en disiez plus long.

Mme Lamba : Vous avez raison. Dans le modèle précédent, il y avait trois groupes, soit tous ceux visés par l'équité en matière d'emploi à l'exception des femmes. Le travail se faisait à partir de la base; il suffisait de s'auto-identifier comme membre d'un groupe pour pouvoir participer aux réunions et s'exprimer. Les représentants du groupe transmettaient ensuite le tout à la haute direction, et des discussions étaient entreprises.

Les choses ne se passent plus de cette manière. Les champions sont des cadres supérieurs qui établissent leurs propres comités qui sont composés, je présume, en majorité de gestionnaires. C'est donc une approche qui part vraiment du sommet.

Nous ne sommes pas vraiment au courant, car nous n'avons pas de rôle direct à jouer. En outre, nos membres ne sont pas nécessairement au fait de l'existence de ces champions ou du travail qu'ils accomplissent. Comme nous l'avons indiqué, ils auraient plutôt peur de s'adresser à eux pour leur faire part des questions qui les préoccupent.

Nous ignorons totalement si des engagements ou d'autres arrangements ont été pris parce que l'information n'est pas nécessairement communiquée, même au Comité national mixte de l'équité en emploi dont nous faisons partie. C'était tout au moins le cas jusqu'à tout récemment alors que nous avons fait valoir que ce groupe était en train de faire le travail que nous étions censés accomplir au sein du comité en tant qu'agents négociateurs. Nous nous demandions si on n'essayait pas de faire notre travail à notre place sans que nous ayons notre mot à dire.

Il y a beaucoup de confusion. Il serait sans doute intéressant de chercher à savoir quels sont les résultats obtenus par ces champions. Quels genres d'engagements ont-ils pris et comment sollicitent-ils la contribution du simple travailleur comme le faisaient les groupes qui les ont précédés?

La présidente : Comme notre étude de ces questions ne date pas d'hier, nous bénéficions d'une certaine continuité qui nous permet de savoir à quoi nous en tenir. Les groupes qui nous visitaient avant l'arrivée des champions étaient bel et bien, comme vous l'indiquiez, constitués à partir de la base.

Il est possible que je fasse erreur, mais j'avais l'impression que ces groupes n'avaient pas de comptes à rendre à un sous-ministre; ils n'étaient redevables qu'envers leurs membres, à savoir par exemple, les personnes handicapées ou les Autochtones qu'ils représentaient. Leurs patrons, au sens large, c'étaient ces gens dont ils défendaient les intérêts.

Si je ne m'abuse, les champions relèvent maintenant du sous-ministre et n'ont pas de comptes à rendre au groupe qu'ils représentent. Est-ce bien le cas?

Mme Lamba : Oui, vous avez raison. Dans ces autres groupes, il y avait des élections pour désigner un représentant. C'était le cas notamment pour le Conseil national des minorités visibles.

La présidente : Si le champion est un cadre supérieur qui doit rendre des comptes uniquement au sous-ministre, ses allégeances ne sont pas les mêmes que s'il représentait le groupe. Ai-je raison de présumer une telle chose?

Mme Lamba : Nous sommes du même avis. C'est ce qui nous préoccupe.

La présidente : Nous n'arrivons pas à obtenir que les champions comparaissent devant nous. Auparavant, nous pouvions facilement communiquer avec les différents groupes et comprendre les défis auxquels ils étaient confrontés. Il est maintenant plus difficile — vous faites exception, et je ne veux surtout pas sous-estimer votre importance — d'entendre le point de vue de ceux qui sont directement concernés. C'était mieux avec les groupes distincts.

Dans son plus récent rapport, le Conseil du Trésor a indiqué que les femmes ne souhaitaient pas avoir de champion. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?

Mme Lamba : Je trouve cela plutôt intéressant, car dans notre rôle d'agents négociateurs, nous comptons un grand nombre de femmes au sein de notre syndicat. Nous nous sommes dit que s'il devait y avoir des champions, il faudrait qu'il y en ait un pour les femmes également. Je ne comprends vraiment pas que l'on puisse affirmer que les femmes n'ont pas fait le nécessaire à ce chapitre.

Il va toutefois de soi qu'au sein de notre syndicat, nous avons jugé approprié de traiter des questions particulières touchant les femmes.

La présidente : Je trouve très préoccupants les problèmes de santé mentale que vous soulevez. Je crois que vous avez bien indiqué, madame Baldwin, que ces problèmes ne résultent pas du travail. Ils existent déjà et ils sont tout simplement exacerbés. Est-ce bien cela? Y a-t-il de l'aide offerte au sein des ministères avant que les gens ne se retrouvent en congé de maladie?

Mme Baldwin : Je pourrais vous dire deux ou trois choses à ce sujet. Nos membres exercent beaucoup de pression pour que nous en fassions une de nos priorités. Il y a plusieurs années, lors de négociations collectives avec le Conseil du Trésor, nous avons pu nous entendre au sujet d'un programme conjoint de formation. Cette fois-ci, grâce aux pressions exercées par nos membres, nous avons pu désigner des premiers répondants en santé mentale. Nous avons ainsi des syndiqués qui peuvent intervenir en milieu de travail lorsque survient un problème de santé mentale.

Cela fait partie des mesures dont nous avons pu constater l'efficacité pour soulager une partie des problèmes ressentis. Les dernières négociations nous ont également permis de mettre sur pied un groupe de travail qui a produit un document sur la santé mentale. Nous espérons maintenant que ces recommandations seront prises en compte de façon prioritaire.

Comme vous le savez, la prévalence des problèmes de santé mentale est en forte croissance actuellement en milieu de travail. Les gens veulent travailler; ils ne souhaitent pas se retrouver en congé d'invalidité. Ils tiennent à occuper un emploi significatif.

À l'AFPC, nous sommes aux premières lignes des efforts déployés en matière de santé mentale, notamment pour éliminer les préjugés qui y sont associés. J'ai toutefois bien peur que nous ayons encore beaucoup de pain sur la planche.

La présidente : Il y a aussi la question de la disponibilité de la main-d'œuvre qui me préoccupe vivement. Il y a une chose qui m'agace depuis longtemps déjà. Nous devons encore nous en remettre aux données de 2006, ce qui fausse complètement la réalité. Nous sommes en 2015, et nous utilisons les statistiques de 2006 sur la disponibilité de la main-d'œuvre. Je trouve cela irritant, car cela ne nous donne pas un portrait fidèle de la situation actuelle au Canada.

J'ai une question pour vous. Nous savons que les statistiques actuelles sur l'emploi pour les quatre groupes désignés dans la fonction publique fédérale ne sont pas fiables, surtout en ce qui concerne les taux de nomination, les taux de représentation, les taux de promotion à des postes de cadre, les taux de maintien en poste et d'attrition ainsi que le taux d'abandon pendant le processus de demande. Selon vous, les données et la méthodologie employées pour établir ces statistiques soulèvent-elles des préoccupations?

Pour la gouverne des gens qui nous regardent, j'aurais dû préciser dès le début de la séance que les groupes visés sont les femmes, les personnes handicapées, les Autochtones et les minorités visibles.

Pouvez-vous nous en dire plus long?

Mme Lamba : Est-ce que vous voulez savoir à quel moment les nouvelles données du recensement seront disponibles et en quoi cela peut nous préoccuper?

La présidente : Nous devons encore nous fier sur des données désuètes. Les gens du Conseil du Trésor peuvent bien venir nous dire qu'ils ont satisfait à toutes les exigences, mais cela reste inquiétant du fait que cette affirmation est fondée sur les données de 2006.

Mme Lamba : C'est problématique, et je crois que Mme Baldwin l'a mentionné dans son exposé. Il est effectivement regrettable que les données utilisées datent de 2006, soit d'il y a neuf ans.

La présidente : Le Canada a évolué pendant ces neuf années.

Mme Lamba : Tout à fait. Nous nous posons également des questions concernant les prochaines données de recensement qui seront disponibles, car nous ne sommes pas persuadés qu'elles seront un reflet fidèle de nos besoins au chapitre de l'équité en matière d'emploi. Le formulaire détaillé de recensement était très utile pour l'équité en emploi, car il permettait un suivi des taux de disponibilité de la main-d'œuvre. Aux préoccupations que nous avions déjà à cet effet, viennent s'ajouter celles découlant d'une étude révélant que les citoyens à faible revenu, lesquels sont surreprésentés au sein des groupes visés par l'équité en emploi, n'ont pas participé au recensement. Nous ne savons donc pas dans quelle mesure cette faible participation va fausser les taux de disponibilité de la main-d'œuvre pour les groupes en question.

C'est une préoccupation importante.

La présidente : Est-ce que les chiffres sont meilleurs pour ce qui est des femmes occupant des postes de cadre?

Y a-t-il plus de femmes à ce niveau?

Mme Lamba : Selon le Conseil du Trésor, il semblerait y avoir une certaine amélioration, mais nous ne disposons pas des données indiquant où ces femmes se situent au sein des ministères, ce qui permettrait de mieux cerner le problème. Cela fait partie des lacunes que nous déplorons relativement aux données fournies par le Conseil du Trésor. Pour pouvoir bien évaluer la situation des femmes, nous avons besoin d'informations plus précises que de simples proportions.

La présidente : Si je comprends bien, ce sont des données que vous obteniez auparavant, mais que l'on ne vous fournit plus.

Mme Lamba : Oui, c'est plus difficile.

Le sénateur Eggleton : J'ai une question au sujet de vos statistiques suivant lesquelles les personnes handicapées seraient cinq fois plus nombreuses à quitter la fonction publique qu'à y être embauchées alors même que les chiffres sur leur représentation globale n'indiquent qu'un léger écart. D'où vous viennent ces données?

Mme Lamba : Cela viendrait du rapport annuel du Conseil du Trésor. Je vais essayer d'être plus précise. Par exemple, le rapport annuel indique 238 embauches et 1 348 départs. C'est cinq fois plus. C'est de là que vient notre calcul.

Le sénateur Eggleton : Quel est le résultat net indiqué en termes de représentation pour la même année?

Mme Lamba : Le taux précis pour les personnes handicapées est de 5,7 p. 100.

Le sénateur Eggleton : De 5,7 p. 100?

Mme Lamba : Oui. Il y a certes un phénomène quelconque qui se produit. Est-ce que les gens attendent d'être dans la fonction publique pour s'auto-identifier à titre de personne handicapée? Est-ce qu'ils développent un handicap? Il doit sûrement se passer quelque chose, car le taux de représentation ne baisse pas vraiment alors que tous ces gens quittent la fonction publique. Pourquoi s'en vont-ils? Ce sont là quelques-unes des questions qu'il convient de se poser.

Puis-je me permettre d'ajouter quelque chose dans le même ordre d'idées?

Nous avons maintes fois demandé des renseignements au sujet de l'impact de l'exercice de réaménagement des effectifs afin de pouvoir déterminer si c'était l'un des facteurs en cause. Nous avons pu faire un certain travail préliminaire, car nous n'avons pas vraiment de chiffres concrets. Je vais vous donner un exemple de ce que nous avons pu constater.

Nous avons obtenu certains renseignements de la Commission de la fonction publique, car le Conseil du Trésor ne nous a encore une fois rien donné. Les informations fournies par la commission portent sur les gens qui ont dû se soumettre au mécanisme de gestion des priorités dans le cadre du processus de réaménagement des effectifs. Nous avons ainsi pu constater en date du 1er mai 2015 que 19 p. 100 des employés bénéficiaires d'une priorité active qui avaient perdu leur emploi faisaient partie des minorités visibles. C'est donc essentiellement un sur cinq. Cette proportion était de 4,7 p. 100 pour les personnes handicapées, 4,7 p. 100 également pour les Autochtones, et 43,6 p. 100 pour les femmes. Il y a assurément quelque chose de particulier qui se passe avec les minorités visibles.

En préparant ma comparution devant vous, j'ai aussi examiné différents autres chiffres. Au 1er octobre 2014, soit la période de pointe pour les mises à pied, 21 p. 100 des employés de cette catégorie étaient membres d'une minorité visible, 7,7 p. 100 vivaient avec une incapacité, 6 p. 100 étaient Autochtones et 53 p. 100 étaient des femmes. Les minorités visibles accusaient donc les taux les plus élevés pour ce processus, tant pour les mises à pied que pour l'une des catégories de priorité, mais pas pour ce qui est de la garantie d'offre d'emploi.

Il y a sans contredit quelque chose qui se trame, mais nous n'arrivons pas à obtenir les détails voulus pour aller plus loin. Je ne crois pas que ce soit impossible, parce qu'au moment de la réduction des effectifs dans les années 1990, le Conseil du Trésor s'était engagé, avec la participation des agents de négociation, d'examiner ce qui s'était produit et qui avait été touché. Ils ont conclu qu'il y avait eu des répercussions indésirables, mais ils savaient pourquoi. C'est peut-être là une partie du problème; nous ne savons rien.

La sénatrice Ataullahjan : La dernière fois, on nous a dit que certaines personnes craignaient d'indiquer leur appartenance à un groupe minoritaire. Chaque fois qu'un employé a une promotion ou qu'il est muté ailleurs, on lui demande de faire cette déclaration. Certains employés refusent de le faire. Est-ce encore vrai?

Mme Lamba : Je crois que c'est encore vrai parce que les mythes entourant l'équité en matière d'emploi persistent toujours. Il y a deux volets à cela. D'un côté, il y a des répercussions si les gens pensent que quelqu'un a obtenu un poste en raison de son appartenance à un groupe visé par l'équité en matière d'emploi. Les gens l'ont déjà vécu et ils ne veulent pas revivre l'expérience, alors ils préfèrent s'abstenir. Il y a cette idée que leur nomination n'était pas fondée sur le mérite ou les compétences, mais plutôt sur l'appartenance à un groupe visé par l'équité en matière d'emploi.

Cette crainte subsiste. Des gens nous disent encore que c'est pour cette raison qu'ils préfèrent ne pas déclarer leur appartenance à un groupe visé par l'équité en matière d'emploi; ils veulent que ce soit clair que leur nomination était méritée. Cela n'a pas changé.

La présidente : J'ai réfléchi à ce que vous avez dit, et je suis très inquiète pour les personnes handicapées. Ce qui me préoccupe, c'est que lorsque nous avons entrepris notre étude, on nous a dit que les pourcentages ne renvoyaient pas à l'embauche de personnes handicapées, mais à des employés qui ont subi un handicap après leur embauche. Ils sont comptabilisés dans le groupe des personnes handicapées.

Maintenant, vous nous dites que ces personnes restent en poste moins longtemps. Est-ce qu'on en embauche d'autres? Que se passe-t-il? Si j'ai bien compris, ce n'est pas que la fonction publique fédérale déploie des efforts particuliers pour embaucher des personnes handicapées, mais plutôt qu'on comptabilise les employés qui ont subi un handicap après leur embauche; ces employés viennent faire gonfler le nombre de personnes handicapées dans la fonction publique. Cela m'inquiète quand vous dites qu'ils sont plus nombreux à partir. Que se passe-t-il?

Mme Lamba : Nous ne le savons pas. Ce sont des questions que nous nous posons également.

Le taux d'embauche est de 3,3 p. 100. Le taux de départ, parmi tous les départs, est de 8,9 p. 100; c'est donc encore plus élevé. On les embauche à des salaires inférieurs à leur taux de disponibilité sur le marché du travail, et je pense que la Commission de la fonction publique reconnaît ce fait, mais vous allez devoir lui poser la question. Il s'agit de savoir ce qui se passe dans le milieu de travail.

Je vais vous donner un autre exemple, car nous avons vécu cela avec le réaménagement des effectifs. Une de nos membres était visée par le processus et elle a reçu une lettre lui indiquant qu'elle devait participer à un concours, la sélection aux fins de maintien en poste et de mise en disponibilité; elle n'a pas eu le poste. Le cas est allé en arbitrage, et l'arbitre a déterminé que la nomination avait été discriminatoire. Ses références n'étaient pas excellentes, mais elles n'avaient pas tenu compte de son handicap et des mesures d'adaptation dont elle bénéficiait. On n'avait pas tenu compte de ces facteurs et c'est pourquoi les références n'étaient pas très positives et que cette personne n'avait pas eu l'emploi.

Ce n'est là qu'un exemple des choses que l'on voit, mais des personnes handicapées nous ont dit qu'elles avaient le sentiment d'être ciblées. Cela reste des informations anecdotiques. Nous ne sommes pas en mesure de dire assurément si c'est fondé ou non, mais le sentiment demeure le même.

La présidente : C'est très inquiétant. Votre aide nous est toujours précieuse. Je sais que vous avez beaucoup de pain sur la planche, alors merci de nous accorder de votre temps. C'était particulièrement difficile cette fois-ci en raison de tout ce qui se passe, et vous avez dû en plus témoigner devant la Chambre des communes.

Nous vous sommes reconnaissants de vous être libérées et nous avons hâte de pouvoir travailler avec vous de nouveau.

Nous sommes très heureux de recevoir les représentants du Conseil du Trésor comme prochains témoins. Je tiens à préciser qu'ils ont demandé à venir nous voir, et cela fait un moment qu'ils attendent pour nous parler. Le comité accueille donc Daniel Watson, Mary Anne Stevens, Christine Donoghue et Jacqueline Bogden.

J'ai demandé à M. Watson de prendre son temps pour nous présenter sa déclaration préliminaire, car cela fait un moment que nous n'avons pas eu de nouvelles du Conseil du Trésor, et nous aimerions bien savoir ce qui s'y passe. Je ne sais pas si vous avez entendu ce qu'ont dit les témoins précédents, mais nous sommes préoccupés par le sort des personnes handicapées. Si vous pouviez aborder la question dans votre déclaration... Aussi, que font les champions? C'est un dossier qui m'inquiète beaucoup.

[Français]

Daniel Watson, dirigeant principal des ressources humaines, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : C'est un grand plaisir et un honneur pour moi d'être parmi vous ce matin. Je vous remercie de votre invitation.

Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Mary Anne Stevens, directrice, Politique et législation (Valeurs et éthique), Bureau du dirigeant principal des ressources humaines.

[Traduction]

C'est un plaisir pour moi d'être ici pour parler de l'équité en matière d'emploi et des initiatives en cours visant à faire en sorte que la fonction publique reflète la diversité du Canada. Je suis heureux de constater que nos efforts sont récompensés. Je crois l'avoir dit lors de notre dernier passage, mais nous sommes convaincus que les talents, les compétences et les aptitudes que recherchent les Canadiens pour la fonction publique se trouvent dans l'ensemble de la population canadienne. C'est un principe de base qui marque le point de départ de nos démarches, et nous croyons qu'en suivant ce principe, nous arriverons à bon port.

Notre plus récent rapport annuel, celui de l'exercice 2013-2014, indique que les quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi sont entièrement représentés au sein de l'administration publique centrale par rapport à leur disponibilité au sein de la population active. Plus précisément, nous constatons que la représentation des Autochtones a augmenté légèrement, étant passée de 5 à 5,1 p. 100. Évidemment, avec le rapport de la Commission de vérité et réconciliation et ce qui se passe dans la région de la capitale nationale cette semaine, c'est une chose dont on prend tous particulièrement note.

Selon le rapport, la représentation des membres des groupes de minorités visibles a atteint 13,2 p. 100, soit une hausse par rapport à 12,6 p. 100, ce qui dépasse leur disponibilité au sein de la population active pour la deuxième année consécutive. De plus, la représentation des personnes handicapées et des femmes continue de dépasser leur disponibilité au sein de la population active.

Pour nous, il n'importe pas seulement de veiller à représenter tous les groupes visés par l'équité en matière d'emploi dans l'ensemble de la population. Nous vérifions également leur représentation verticale à différents niveaux de la hiérarchie de la fonction publique fédérale. Nous sommes heureux d'annoncer que, selon le rapport, les taux de représentation dans l'effectif de la direction continuent d'être supérieurs à la disponibilité au sein de la population active pour trois des quatre groupes visés.

Vous l'avez dit, madame la présidente, la situation est plus problématique pour les personnes handicapées. Il est aussi plus difficile d'assurer une représentation adéquate des Autochtones au sein de la direction. Nous sommes au courant de ces difficultés, et nous tâchons de les faire reconnaître.

Notre succès s'appuie en grande partie sur l'engagement ferme des administrateurs généraux, qui sont responsables de l'atteinte de l'excellence dans tous les aspects de la gestion des personnes et qui ont fait des questions liées à l'équité en matière d'emploi et à la diversité des priorités au sein de leurs organisations.

En fait, c'est un des buts premiers que nous espérions atteindre en passant à la nouvelle structure de gouvernance en 2011; c'est-à-dire de veiller à ce que dans les ministères, on ait ces discussions avec les cadres supérieurs chargés de façonner leur organisation à l'image de la fonction publique que nous souhaitons bâtir au Canada.

[Français]

En ce qui concerne mon bureau, qui fait partie du Secrétariat du Conseil du Trésor, nous continuons à jouer un rôle habilitant en aidant les institutions fédérales à atteindre leur cible quant à l'équité en matière d'emploi. Nous le faisons, par exemple, en leur fournissant chaque année des tableaux ministériels détaillés sur l'analyse de l'effectif visé par l'équité en matière d'emploi et en préparant un rapport annuel, celui dont je viens de parler.

Nous continuons également d'établir, chaque année, des attentes pour ce qui est de la gestion des personnes au moyen de l'exercice d'évaluation du Cadre de responsabilisation de gestion, lequel inclut les indicateurs d'équité en matière d'emploi.

[Traduction]

Ce sont peut-être les outils de gestion les mieux connus parmi tous ceux dont nous disposons pour examiner la fonction publique et son rendement. Un des nombreux facteurs que nous étudions en ce qui concerne la gestion des personnes, c'est la façon dont les sous-ministres s'acquittent de leurs propres responsabilités en tâchant de façonner leurs organisations respectives de manière à bien représenter la population canadienne. C'est un élément fondamental à prendre en compte, et ce sont les données que nous étudions pour chacun des ministères et pour chacun des quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi.

Bref, nous représentons l'employeur et relevons du Bureau du dirigeant principal des ressources humaines pour ce qui est de la promotion et de la surveillance de l'équité en matière d'emploi dans l'administration publique centrale.

Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues de la Commission de la fonction publique du Canada dans bien des dossiers, mais notre rôle contraste avec le sien, car celle-ci est responsable du recrutement et de la dotation, comme vous l'entendrez plus tard aujourd'hui.

Parfois, même au sein de l'administration publique centrale, on fait mal la distinction entre nos deux mandats.

Bien que nos mandats diffèrent, nous travaillons en étroite collaboration. Par exemple, nous partageons une méthodologie commune pour la collecte des données et la production de rapports. C'est un changement apporté il y a quelques années pour faire en sorte que notre analyse des données issues des ministères soit la même, de façon à ce que les rapports ne laissent pas transparaître des méthodologies, des définitions ou des approches différentes.

Au cours de la dernière année, mon bureau, la Commission de la fonction publique et le bureau de la condition des personnes handicapées d'Emploi et Développement social Canada avons également collaboré avec des universités et des collèges pour discuter avec des étudiants handicapés de l'importance de l'expérience de travail préalable à l'obtention d'un grade.

Ces activités ont permis de faire connaître les programmes d'emploi du gouvernement du Canada pour les étudiants, comme le Programme fédéral d'expérience de travail étudiant. Nous voulons que les travailleurs, peu importe le stade où ils se situent, envisagent la fonction publique comme choix de carrière. Nous croyons que c'est particulièrement important que les nouveaux diplômés voient la fonction publique du Canada comme un endroit où ils pourront aider à bâtir le pays qu'ils souhaitent avoir.

[Français]

Mon bureau continue aussi de collaborer étroitement avec le Comité mixte sur l'équité en matière d'emploi du Conseil national mixte, qui constitue une excellente tribune permettant aux représentants de la fonction publique et aux agents négociateurs de tenir des consultations sur les questions liées à l'équité en matière d'emploi et de collaborer à cet égard.

Mentionnons, entre autres, les consultations sur le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2014 qui, une fois de plus, a mis en évidence des résultats positifs dans les domaines de l'équité et de la diversité.

[Traduction]

Nous sommes très fiers des résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux et du taux de réponse des employés. Comparativement aux sondages menés un peu partout dans le monde, le nôtre a obtenu un taux de réponse de loin supérieur. Plus de 70 p. 100 de tous les fonctionnaires fédéraux ont répondu au sondage. Ailleurs dans le monde, ce genre de sondage suscite un taux de réponse de moins de 50 p. 100, pour se situer souvent autour de 30 ou de 40 p. 100. Lorsque nous avons consulté des entités du secteur privé, elles nous ont répondu que dans leur réalité, cela s'avère satisfaisant quand une initiative récolte un taux de participation de 40 p. 100.

Cet exercice met en lumière des renseignements très intéressants, même s'ils sont parfois moins agréables. Quoi qu'il en soit, nous avons délibérément posé des questions qui nous permettraient non seulement de connaître nos points forts, mais aussi nos points faibles.

Par exemple, d'après le sondage, 73 p. 100 des employés estimaient que chaque membre de leur unité de travail était accepté à titre d'égal au sein de l'équipe. En outre, 79 p. 100 des employés ont indiqué que leur organisation met en œuvre des activités et des pratiques qui favorisent un milieu de travail diversifié. Nous avons ajouté ces deux nouvelles questions au sondage de 2014, afin d'obtenir des détails importants à propos de nos organisations et des fonctionnaires. Cela témoigne encore une fois du sérieux dont nous faisons preuve pour remédier aux problèmes qui persistent.

Le sondage a aussi révélé que 78 p. 100 des employés trouvaient que leur organisation respectait les différences individuelles, une réponse plus positive qu'en 2011, alors que ce pourcentage s'établissait à 72 p. 100.

Pour terminer, j'aimerais remercier le comité de m'avoir invité à discuter de ces importants gains que nous avons réalisés pour faire en sorte que les Canadiens soient servis par une fonction publique représentative de la société d'aujourd'hui.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Watson.

Nous avons déjà discuté publiquement vous et moi du fait que vous fondez vos analyses sur des données qui sont loin d'être récentes. Vous utilisez les données de 2006 sur la disponibilité de la main-d'œuvre. Nous sommes en 2015. Vous n'êtes pas à blâmer. Vous n'avez pas les informations à jour, mais je crois qu'il suffit de jeter un œil à nos villes aujourd'hui pour comprendre que les taux de disponibilité au sein de la population active ont changé en neuf ans. Je crains fort que nous n'atteignions pas vraiment les cibles établies, mais ce sont les seules données auxquelles vous ayez accès.

Je veux m'assurer que les gens à l'écoute comprennent bien que vous vous référez aux statistiques de 2006. Nous cédons maintenant la parole à Mme Donoghue, de la Commission de la fonction publique du Canada.

Christine Donoghue, présidente intérimaire, Commission de la fonction publique du Canada : Merci, madame la présidente. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui en compagnie de Jacqueline Bogden, vice-présidente, Direction générale de la vérification et des services de données.

Nous vous remercions de nous permettre de vous présenter une mise à jour de l'information fournie l'été dernier à votre comité au sujet de votre rapport de décembre 2013 sur l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique fédérale.

[Français]

La Commission de la fonction publique est responsable de promouvoir et de protéger les nominations fondées sur le mérite et libres de toute influence politique, en plus de protéger l'impartialité de la fonction publique, de concert avec les autres intervenants, soit nos collègues du Conseil du Trésor et les administrateurs généraux des ministères.

La commission administre aussi divers programmes au nom des ministères et organismes fédéraux afin de recruter des Canadiennes et des Canadiens qualifiés, partout au pays.

La commission rend compte de ses activités au Parlement, et du rendement en dotation des 80 organismes fédéraux assujettis à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, dont le préambule souligne justement la valeur de la fonction représentative de la diversité canadienne.

Madame la présidente, mes commentaires ce matin mettront l'accent sur les données liées au recrutement, sur les activités de liaison externe, sur l'évaluation des mesures d'adaptation, ainsi que sur le recours aux innovations technologiques afin de faciliter l'accès aux emplois dans la fonction publique. Je discuterai aussi de certaines des recherches qui sont en cours à la commission.

[Traduction]

Notre rapport annuel fournit de l'information sur le recrutement dans les quatre groupes désignés aux termes de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, à savoir les Autochtones; les membres des minorités visibles; les personnes handicapées et les femmes.

Comme l'indiquait mon collègue, nous avons constaté en 2013-2014 que le pourcentage des demandes d'emploi soumises par les membres des minorités visibles et les Autochtones demeurait plus élevé que leur taux de disponibilité dans la population active suivant les données de 2006, tel que l'indiquait madame la présidente. Le nombre de nominations dans la fonction publique dépassait le taux de disponibilité dans la population active, d'après les chiffres à notre disposition, pour trois des groupes visés par les mesures d'équité en emploi : les femmes, les membres des minorités visibles et les Autochtones. C'est pourquoi nous surveillons attentivement les données pour le quatrième groupe, à savoir les personnes handicapées, dont le taux de candidature et le taux de nomination continuent d'être inférieurs au taux de disponibilité dans la population active, comme le soulignait également M. Watson.

Si cette tendance devait se maintenir, cela pourrait avoir des conséquences à long terme sur la représentation des personnes handicapées dans l'effectif de la fonction publique fédérale.

La Commission de la fonction publique doit aussi cerner et éliminer les obstacles en matière de recrutement et de dotation, en plus d'élaborer des lignes directrices et des pratiques qui encouragent la mise en place d'une fonction publique plus représentative. C'est pourquoi nous avons besoin de mieux comprendre les difficultés que rencontrent les personnes handicapées dans le cadre du processus d'embauche en général et des activités de recrutement en particulier.

Au cours des 18 derniers mois, la commission a mené plusieurs activités de liaison externe auprès des étudiants handicapés, comme M. Watson vous l'indiquait plus tôt, en collaboration avec divers autres ministères et organismes fédéraux, dont le Secrétariat du Conseil du Trésor, Emploi et Développement social Canada, et Services partagés Canada. Nous en avons profité pour discuter avec ces étudiants des possibilités d'emploi dans la fonction publique et répondre à leurs questions et préoccupations au sujet du processus d'embauche. Nous voulions ainsi que les gestionnaires soient mieux au fait des éléments qui préoccupent les personnes handicapées et des aménagements qui peuvent se révéler nécessaires pour les intégrer à la fonction publique fédérale.

La première activité de liaison a été menée au Centre Paul Menton pour les étudiants handicapés de l'Université Carleton. D'autres activités similaires ont eu lieu ensuite à l'Université d'Ottawa, à l'Université Dalhousie et au Collège Algonquin. Nous prévoyons mener d'autres activités de liaison pour sensibiliser les étudiants handicapés aux possibilités d'emploi dans la fonction publique afin de les inciter à postuler en plus grand nombre les emplois annoncés.

[Français]

Nous avons aussi mené des activités de liaison au sujet des mesures d'adaptation en matière d'évaluation, afin de nous assurer que les gestionnaires d'embauche et les spécialistes en ressources humaines puissent évaluer adéquatement les candidats handicapés et leur donner une chance égale de démontrer leurs qualifications sans qu'ils soient limités ou injustement restreints en raison de leur handicap. Nous avons présenté des séminaires dans plus de 36 organisations différentes, et nous avons récemment produit un webinaire pour diffuser plus largement nos activités de liaison.

Nous disposons de conseillers spécialistes au Centre de psychologie du personnel afin de fournir des avis et des conseils au sujet des mesures d'adaptation pour l'évaluation des personnes handicapées. Ces mesures d'adaptation peuvent varier, depuis la production d'examens en braille ou en gros caractères, jusqu'à l'utilisation d'aides technologiques, telles qu'un lecteur d'écran spécialisé.

En 2013-2014, les gestionnaires d'embauche ont soumis à la commission plus de 1 600 demandes de mesures d'adaptation aux fins d'évaluation. Malgré une hausse de 22 p. 100 par rapport à l'année précédente, nous avons constaté que le nombre de demandes de mesures d'adaptation est demeuré relativement stable en proportion au nombre total d'activités de dotation et d'embauche. Nous sommes persuadés que les innovations technologiques nous permettront de supprimer plusieurs obstacles afin d'offrir aux personnes handicapées un meilleur accès aux emplois dans la fonction publique.

[Traduction]

Nous avons considérablement accru l'utilisation des examens en ligne. Les postulants peuvent maintenant passer un examen à l'endroit de leur choix, peu importe où ils habitent au pays. De plus, les personnes handicapées peuvent utiliser leurs propres aides technologiques pour passer les examens à domicile.

Nous travaillons aussi à simplifier et à normaliser nos examens, afin d'utiliser une langue plus claire et simple ainsi que des formats d'examen qui supprimeront bien des obstacles, par exemple pour le balayage et la détection optiques. Ces nouveaux formats permettront à un plus grand nombre de candidats d'accéder à nos examens sans avoir besoin de mesures d'adaptation, puisqu'ils utilisent leurs propres outils technologiques ou des tests adaptatifs. Nous pouvons continuer d'examiner de nouvelles solutions pour améliorer l'expérience des utilisateurs et faciliter l'accès aux possibilités d'emploi dans la fonction publique.

Comme on l'a déjà mentionné, la commission mène aussi des activités de recherche à partir de ses statistiques sur les activités d'embauche et de dotation à la fonction publique fédérale.

J'ajouterai, madame la présidente, que nous mettons présentement à jour deux études pour examiner de près comment l'appartenance aux groupes visés par l'équité en emploi peut influencer les chances d'avancement de ces groupes et leur perception du processus de dotation. Nous achevons en ce moment la mise à jour de ces deux études.

Nous examinons aussi les différences entre les chances d'avancement des membres des quatre groupes visés par l'équité en emploi, par comparaison aux possibilités d'avancement des personnes qui ne se définissent pas comme Autochtones, membres d'une minorité visible, ou personnes handicapées.

Enfin, nous avons entrepris une étude qui nous aidera à mieux comprendre les problèmes concernant la candidature et les nominations des personnes handicapées. Cette étude appliquera différentes méthodes d'analyse pour étudier le nombre de demandes d'emploi et les taux de nomination des personnes handicapées, et les divers facteurs qui peuvent influencer ces taux. Nous prévoyons utiliser les conclusions de ces études pour mieux cibler les domaines qui devraient faire l'objet d'interventions spéciales et nous communiquerons les résultats de ces travaux aux intervenants, y compris les champions de l'équité en matière d'emploi et aux présidents, et certainement aux représentants syndicaux.

Madame la présidente, la Commission de la fonction publique s'est engagée à travailler en étroite collaboration avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et tous les intervenants pour que la fonction publique fédérale continue de refléter la diversité croissante de la population canadienne.

Merci. Je serai ravie de répondre à vos questions.

La présidente : Madame Donoghue, je vous remercie de votre exposé. Vous avez parlé de certains des sujets dont nous avons discuté tout à l'heure.

Pourriez-vous nous parler également d'une question précise concernant les personnes handicapées? En étudiant ce volet, nous avons cru comprendre que souvent, vos chiffres portaient sur les fonctionnaires qui sont devenus handicapés au cours de leur carrière plutôt que sur le recrutement des personnes handicapées. Je suis ravie de constater que la situation a changé. C'est une bonne nouvelle.

On nous a dit plus tôt que de plus en plus de personnes handicapées quittent leur emploi, qu'elles sont cinq fois plus nombreuses à le faire maintenant qu'auparavant. Pourriez-vous nous parler de cette situation?

Je suis ravie que vous fassiez du recrutement dans les universités, mais ceux d'entre nous qui proviennent de l'extérieur d'Ottawa sont toujours inquiets. C'est un bon début, mais le recrutement est très centré sur Ottawa, et je vous encourage à regarder ailleurs également. J'aimerais que vous répondiez tout d'abord à ces questions.

Mme Donoghue : Merci, madame la présidente. Vous avez raison de dire qu'une grande partie des chiffres portent sur les fonctionnaires qui sont devenus handicapés au cours de leur carrière. C'est pourquoi, à la suite de discussions que nous avons eues, nous nous sommes concentrés sur le recrutement.

Pour parvenir à recruter des personnes handicapées, nous devons mieux connaître leurs attentes, savoir ce qu'elles considèrent comme des obstacles et essayer de nous assurer que nous fournissons la meilleure formation et les meilleurs renseignements possible aux gestionnaires d'embauche, de sorte qu'il y ait convergence de vues entre les personnes handicapées et les responsables de l'embauche.

Les discussions que nous avons eues avec bien des gens dans différentes universités — en fait, nous prévoyons agir ailleurs que dans la région d'Ottawa — et les impressions qu'ont les étudiants handicapés nous indiquent que bon nombre d'entre eux ne connaissaient pas les mesures d'adaptation qui existent dans la fonction publique fédérale. C'est ce qui nous a amenés à travailler avec notre centre de psychologie pour trouver des moyens de mieux faire connaître les différents types de mesures que nous pouvons prendre pour aider les personnes handicapées.

Quittent-elles la fonction publique au cours de leur carrière? Oui, et cela nous inquiète également. Nous essayons de déterminer si les raisons sont personnelles ou si une situation s'est produite dans la fonction publique et a fait en sorte qu'elles ne veulent plus y continuer leur carrière. Nous travaillons à cet égard.

Le concept de maintien en poste s'inscrit dans les politiques et le travail du Conseil du Trésor. Comme l'a indiqué mon collègue, nous collaborons étroitement pour comparer l'information que nous avons. Qu'il s'agisse du processus des programmes que nous administrons au nom du gouvernement ou de l'information fournie au conseil pour qu'il soit en mesure de revoir ses politiques et d'en créer de nouvelles, nous essayons de faire en sorte que nous ayons les renseignements qu'il faut pour prendre les meilleures décisions.

Il y a de nombreux mythes. Nous devons les déboulonner et mieux faire connaître les possibilités qu'offre notre secteur.

La sénatrice Ataullahjan : Je vous remercie de vos exposés. Y a-t-il des initiatives de lutte contre la discrimination dans la fonction publique fédérale?

Mme Donoghue : Des initiatives de lutte contre la discrimination?

La sénatrice Ataullahjan : Oui, dans la fonction publique.

Mme Donoghue : La notion de discrimination n'est pas acceptée dans la fonction publique; ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas. Nous en sommes très conscients, et en fait, certains résultats du sondage révèlent qu'il existe des problèmes.

Je sais que cette question préoccupe beaucoup bon nombre d'administrateurs généraux, et souvent, c'est le ciblage au sein des ministères et la responsabilité des administrateurs généraux qui permettent la mise en place de meilleures mesures.

Quand nous faisons du recrutement dans la fonction publique, pour éliminer la discrimination, nous avons la notion de préférence, comme nous l'appelons — ce que nous permettent les dispositions. Certains Canadiens estiment qu'il s'agit de discrimination positive, attendu qu'un employeur peut essentiellement dire que dans le cas d'un certain emploi, il ciblera une personne faisant partie du groupe visé par l'équité en matière d'emploi.

Il est donc à espérer que lorsque nous cherchons à nous assurer que nous avons une bonne représentation et une bonne diversité dans notre système, la préférence accordée à des candidats qui font partie de l'un des groupes visés par l'équité en matière d'emploi s'applique. Nous avons des données à cet égard. Je ne les ai pas en ce moment, mais nous pourrions les fournir au comité. Nous avons le nombre de processus dans le cadre desquels les préférences à cet égard ont été appliquées. Nous avons bon espoir que dans le cadre de ce processus, la discrimination sera rejetée, de même que démystifiée.

La sénatrice Ataullahjan : On nous a dit que les femmes sont en retard par rapport aux hommes pour ce qui est du nombre de personnes qui occupent un poste de direction; elles sont également regroupées dans certaines catégories d'emplois ou certains services. Est-ce toujours le cas? Qu'en est-il des femmes qui font partie d'une minorité visible?

M. Watson : Je vous remercie de la question. En fait, le nombre de femmes dépasse la disponibilité au sein de la population active pour les postes de direction.

Je n'ai pas les données de chacun des ministères avec moi. Comme on peut s'y attendre, les personnes ne sont pas réparties en nombre égal dans chaque ministère. C'est variable, mais pour presque la moitié des effectifs du groupe de la direction, il y a une très forte répartition dans la fonction publique.

Si vous me le permettez, madame la présidente, je serais ravi de répondre à la question sur les initiatives qui a été posée précédemment.

En ce qui concerne la discrimination, tout d'abord, lorsque nous établissons nos attentes et dans certains cas, celles du Parlement, la Loi canadienne sur les droits de la personne joue évidemment un rôle fondamental. Notre Code de valeurs et d'éthique et la façon dont nous nous traitons entre nous jouent un rôle fondamental. Les compétences clés en leadership qui servent à l'évaluation des dirigeants au sein de la fonction publique — voire jusqu'au moment de la résiliation du contrat de travail s'il y a manquement à cet égard — sont à la base de l'établissement de nos attentes concernant le respect avec lequel nous traitons les gens. Les conventions collectives prévoient également qu'il ne peut y avoir de discrimination. Voilà ce qui correspond à nos attentes.

Au-delà de cela toutefois, si nous devons prendre des moyens pour faire appliquer ces choses, il y a d'abord notre Système de gestion informelle des conflits qui, s'il s'agit d'un problème de moindre importance que des gens veulent essayer de résoudre par ce moyen, peut être intégré dans le cadre qui existe déjà dans les ministères, et le régime existe dans presque tous les ministères et organismes.

Il est possible ensuite de faire une plainte se rapportant à la Loi canadienne sur les droits de la personne qui finira peut-être devant le Tribunal canadien des droits de la personne. Il y a la procédure de griefs dans le cadre de Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, et certaines dispositions pourraient peut-être même s'appliquer au Code canadien du travail.

Cela étant dit, l'aspect le plus important, c'est le leadership dont font preuve tous les individus, les personnes ayant autorité dans la fonction publique. De plus, il nous faut énoncer très clairement nos attentes, nos valeurs, et il ne s'agit pas seulement de nous exprimer sur les choses positives que nous voulons que les gens accomplissent, mais d'agir s'ils se rendent compte de situations où il y a eu transgression.

La présidente : Monsieur Watson, j'ai cru comprendre que vous avez de très bonnes politiques, et je vous en félicite, et des mesures en place. Comment sensibilisez-vous les gens pour que ces politiques soient appliquées? Quelle formation offrez-vous, et comment encouragez-vous cela?

Un peu plus tôt, la sénatrice Eaton a parlé de l'environnement de travail et on nous a dit que les conditions étaient difficiles en ce moment. Il en est de même partout, et je ne suis pas en train de vous critiquer. Quand il y a une récession, la situation est toujours difficile. Je comprends que vous avez établi les politiques et que vous surveillez la suite, mais qu'en est-il de la sensibilisation et de la formation?

M. Watson : C'est une excellente question, madame la présidente.

Permettez-moi de dire que cela commence dans le cadre du processus d'orientation, au moment où une personne entre dans la fonction publique. Nous en parlons tout de suite. De plus, l'École de la fonction publique du Canada est un excellent partenaire à cet égard dans l'élaboration des cours qu'elle offre à l'étape de l'orientation. C'est un volet qui a été intégré à nos mesures et à nos communications, mais l'école offre en fait une série d'autres cours pour aborder ces questions et faire en sorte que les gestionnaires et les dirigeants et d'autres personnes non seulement connaissent leurs droits et leurs responsabilités en tant qu'employés, mais aussi qu'ils sachent ce qu'ils doivent faire dans les rôles qu'ils assument tout au long de leur carrière.

Nous avons également une politique sur la prévention du harcèlement qui s'applique à tous les membres de la fonction publique. Il y a de la formation à ce chapitre, encore une fois, pour les gens qui assument les responsabilités qui s'inscrivent dans cette politique. Il y a également l'initiative sur le respect en milieu de travail.

Ce sont des choses que nous regroupons. Je reviens au Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Cette fois-ci, nous avons ajouté des questions qui portent sur la discrimination et le harcèlement perçus. Les questions ne se résument pas qu'à la suivante : estimiez-vous que c'est ce dont il s'agissait? On posait ensuite la question suivante : avez-vous porté plainte? De plus, et c'est très important, il y avait ensuite la question suivante : si ce n'est pas le cas, pourquoi?

D'après l'examen que nous avons vu, je dirais que notre collecte de renseignements sur ces enjeux est plus riche que celle de n'importe quel autre employeur du pays. Chaque fois que l'on effectue ce type de recherche, on découvre les mesures qu'il faut prendre, car on n'avait peut-être pas compris exactement à quel point elles étaient importantes auparavant. Nous explorerons ces données, et dans le rapport sur la fonction publique qu'elle a rendu public récemment, la greffière du conseil a signalé l'importance d'examiner ces questions, et c'est ce que nous ferons.

La présidente : J'aimerais en savoir plus sur les cours destinés aux gestionnaires, aux sous-ministres. Sont-ils obligatoires, quelle est leur durée et à quelle fréquence sont-ils donnés?

M. Watson : La séance d'orientation est obligatoire. De la formation est offerte aux nouveaux gestionnaires et aux nouveaux cadres supérieurs également. Nous avons des programmes de perfectionnement en leadership qui ne sont pas obligatoires pour tous, mais que bien des futurs dirigeants suivent. Certaines formations sont obligatoires et d'autres peuvent être choisies en fonction des tâches et du cheminement de carrière d'une personne.

La présidente : Des cours sont-ils offerts aux sous-ministres?

M. Watson : L'École de la fonction publique du Canada administre une vaste gamme d'activités d'apprentissage pour les sous-ministres. Elles couvrent un large éventail de sujets. Les enjeux liés au harcèlement et à la santé mentale, qui sont parfois reliés, sont des sujets couverts dans des cours offerts par l'École de la fonction publique du Canada, et un très grand nombre de sous-ministres y participent.

La présidente : Y a-t-il des cours sur l'équité en matière d'emploi?

M. Watson : Nous tenons des séances sur l'équité en matière d'emploi auxquelles participent des sous-ministres ainsi que des sous-ministres adjoints.

La sénatrice Nancy Ruth : Les membres de l'AFPC ont dit qu'ils constatent que les femmes sont toujours sous-représentées dans 11 des plus importants ministères sur 23, et que les travailleurs racialisés sont sous-représentés dans 9 de ces mêmes 23 ministères. Pouvez-vous nous donner votre point de vue à cet égard?

M. Watson : Oui. Encore une fois, je n'ai pas les données de chaque ministère. Il y a un certain déséquilibre entre les différents ministères. La situation a tendance à changer de temps à autre. Certains ont toujours eu des façons de l'évaluer qui diffèrent en quelque sorte.

La sénatrice Nancy Ruth : Pouvez-vous donner des exemples? Parlez-vous de Travaux publics? De quel ministère parlez-vous?

M. Watson : Je n'ai pas de liste par ministère présentement. Je serai ravi de vous faire parvenir l'information, mais je ne l'ai pas entre les mains aujourd'hui; j'en suis désolé.

La sénatrice Nancy Ruth : Voici certaines de mes questions : semble-t-il nécessaire de changer la situation? Si c'est le cas, quelles mesures prenez-vous en ce sens?

M. Watson : Quand je parle du cadre de responsabilisation de gestion et des examens que nous effectuons, il s'agit entre autres à déterminer où en sont les sous-ministres de chaque ministère relativement à l'embauche au titre de l'équité en matière d'emploi. C'est l'un des aspects que nous examinons.

Il se trouve que ma collègue a les chiffres pour chacun des ministères.

Cela varie. Dans certains cas, on parle d'une proportion très élevée et dans d'autres, d'une proportion moindre. Nous nous intéressons à certaines des questions que ma collègue de la Commission de la fonction publique a mentionnées — le nombre de demandes d'emploi et les raisons pour lesquelles les gens choisissent de postuler ou non dans différents ministères.

Évidemment, nous commençons avec les résultats, de sorte que chaque année, nous nous penchons sur chaque ministère pour voir les résultats. Comme vous le mentionnez, il y a un déséquilibre entre les ministères.

La sénatrice Nancy Ruth : En tant que femme, si je travaillais comme gestionnaire dans un ministère et que je cherchais des possibilités de changer de ministère, je ne serais pas tentée par celui de la Défense nationale actuellement.

M. Watson : C'est un très bon ministère.

La sénatrice Nancy Ruth : Pas nécessairement pour les femmes, à ce que l'on nous dit. Quelles sont vos obligations à cet égard? Mon autre question est la suivante : y a-t-il des conséquences pour les sous-ministres qui n'atteignent pas leurs prétendues cibles? Que faites-vous? Comment les y forcez-vous?

M. Watson : Cela serait noté dans le cadre de responsabilité de gestion.

La sénatrice Nancy Ruth : En prendre note, ce n'est pas très utile. Que faites-vous pour les obliger?

M. Watson : Encore une fois, on s'attend à ce que tous les sous-ministres atteignent les objectifs liés à la disponibilité au sein de la population active et que leur effectif soit le reflet de la population canadienne.

On s'attend à ce que chaque sous-ministre prenne les mesures nécessaires pour trouver des cadres et des employés autochtones au sein du personnel non cadre, ainsi que des personnes handicapées, des femmes et des membres des minorités visibles.

Dans l'ensemble, ils remplissent cette attente non seulement en ce qui a trait à leur effectif, mais aussi, pour la plupart, pour les postes-cadres. Mais, comme vous le soulignez, il existe des différences entre les ministères. Toutefois, dans l'ensemble, nous atteignons les objectifs liés à la disponibilité au sein de la population active et reflétons ce que l'on retrouve dans la population canadienne.

La sénatrice Nancy Ruth : Que se passe-t-il s'ils ne prennent pas ces mesures?

M. Watson : S'ils ne prennent pas les mesures nécessaires pour avoir un effectif représentatif et s'ils ne répondent pas aux attentes, cela sera noté dans leur évaluation de rendement et dans les rapports publiés.

Le sénateur Eggleton : Monsieur Watson, nous avons accueilli plus tôt des représentantes de l'Alliance de la Fonction publique du Canada. Elles nous ont tracé un portrait très différent. Selon elles, il existe un climat de peur dans les milieux de travail. Elles ont signalé, notamment, que tous les groupes visés par l'équité en matière d'emploi ont signalé un taux élevé de crainte de représailles. Vous avez adopté diverses politiques, mais si les gens craignent des représailles, de perdre leur emploi ou autre forme de représailles, cela aura un impact sur leur décision de déposer ou non un grief ou une plainte officielle.

Selon elles, 55 p. 100 des personnes handicapées — vous avez parlé du sondage et des résultats positifs de celui-ci — craignent des représailles. Quelle est votre opinion sur le sujet? Cela me paraît peu éloquent comme statistique.

M. Watson : Je vais ventiler quelque peu ce chiffre. Il s'agit du pourcentage de participants qui ont d'abord répondu oui à la question qui leur demandait s'ils avaient été victimes de harcèlement ou de discrimination, selon le cas. Un sous-ensemble de ces participants a répondu à la question : « Pourquoi n'avez-vous pas porté plainte? »

Peu importe, le chiffre est trop élevé. Peu importe le nombre de personnes qui s'inquiètent du harcèlement, c'est trop. Mais il s'agit ici d'un pourcentage de la population ayant répondu oui à la question sur le harcèlement. Il y a ensuite le sous-ensemble de participants qui ont répondu ne pas avoir porté plainte. Puis, il y a un autre sous-ensemble de participants qui craignent des représailles.

Je n'essaie pas de minimiser la crainte de représailles, mais ce que j'essaie de dire, c'est qu'il n'est pas question ici de 55 p. 100 de la population sondée.

Le sénateur Eggleton : Vous dites que 55 p. 100 des gens disent avoir été victimes d'une forme de harcèlement.

M. Watson : Et n'ont pas porté plainte.

Le sénateur Eggleton : D'accord. Avez-vous d'autres chiffres qui permettraient de mettre tout cela en contexte?

M. Watson : D'abord, le fait que les fonctionnaires craignent des représailles est très préoccupant. C'est un problème. C'est si problématique, que la greffière l'a souligné dans son rapport. Elle a dit que les fonctionnaires et les cadres doivent se pencher activement sur cette question.

C'est la première fois que nous posons ces questions. À notre connaissance, aucun autre employeur au pays n'a obtenu ce genre de données. Nous avons cherché à obtenir ces informations pour plusieurs raisons, notamment parce que, selon nous, poser une question sur la discrimination ou le harcèlement sans aller plus loin ne nous apprend rien.

Je tiens à préciser une chose au sujet des données que nous avons recueillies. Il est faux de dire que le harcèlement vient de l'extérieur, des citoyens qui traversent la frontière ou qui vont chercher leur passeport. Les participants aux sondages ont plutôt pointé du doigt leurs collègues fonctionnaires, notamment ceux qui sont en position d'autorité. C'est ce que disent les chiffres.

Le sénateur Eggleton : Qu'allez-vous faire? Vous dites qu'il y a un sous-ensemble à ce 55 p. 100 et que c'est trop — et je suis d'accord avec vous. Qu'allez-vous faire pour calmer cette crainte?

M. Watson : Nous ferons plusieurs choses. Pour revenir à une question posée précédemment, nous discuterons avec les sous-ministres de leur responsabilité relativement à ces questions et travaillerons avec eux à cet égard.

Certaines organisations ont déjà commencé à mener ce que nous appelons des « entrevues à des paliers inférieurs », c'est-à-dire que le dirigeant s'entretient avec des gens qui travaillent deux ou trois paliers sous son subalterne afin de voir quels sont les problèmes. Il est possible de ventiler les données de façon à cibler avec une certaine précision où l'on retrouve les plus hauts taux de préoccupation. On peut examiner la situation par niveau et sous-groupes au sein de ministère et charger les sous-ministres adjoints responsables de définir quels sont les problèmes et de les résoudre.

On peut savoir où sont les problèmes les plus courants et le signaler au sous-ministre qui demandera à son équipe de la direction de s'attaquer à ces problèmes. Tout cela découle de la recommandation de la greffière.

Le sénateur Eggleton : Qu'en est-il de la consultation avec les représentants des employés? L'Alliance de la Fonction publique du Canada dit qu'elle reçoit peu d'information et que lorsqu'elle reçoit de l'information, elle la reçoit en retard et l'information est minimale. Elle dit aussi qu'elle n'a pas suffisamment de temps pour la traiter. Ce qu'on lui dit, en quelque sorte, c'est : « Voici la décision. Un point, c'est tout. »

À mon avis, ce n'est pas une bonne façon de collaborer avec les représentants des employés.

M. Watson : Vous avez raison, mais vous ne serez pas surpris si je vous dis que je ne suis pas d'accord avec elle. Nous avons collaboré étroitement avec les représentants des employés dans plusieurs dossiers et nous sommes conscients qu'ils peuvent avoir un point de vue différent du nôtre.

Cela dit, nous collaborons étroitement dans le cadre de plusieurs comités. Nous avons eu des consultations avec les agents négociateurs sur différentes politiques. Mais, il ne faut pas oublier que cette question touche tous les fonctionnaires. Selon le sondage, si un fonctionnaire sur cinq dit avoir été victime de harcèlement et si un fonctionnaire sur douze dit avoir fait l'objet de discrimination, cela devrait tous nous inquiéter. Nos talents et nos compétences joueront un rôle important dans la résolution de ce problème.

La sénatrice Ataullahjan : Informez-vous les employés qu'ils peuvent faire valoir leurs droits sans craindre pour leur emploi?

M. Watson : Absolument. Pour être bien clair, toute forme de représailles est absolument inacceptable. Tous les cadres et dirigeants de la fonction publique doivent s'assurer que tous ceux qui relèvent d'eux, notamment ceux qui occupent un poste de direction ou de gestion, le comprennent bien.

À la lumière des résultats du sondage, nous redoublerons d'efforts à cet égard. Je le répète, ces résultats sont préoccupants pour tous ceux qui occupent un poste de direction à la fonction publique.

La sénatrice Eaton : Les syndicats sont-ils particulièrement arrogants ces temps-ci? Sont-ils en négociation ou sur le point d'amorcer les négociations? Selon les témoins de ce matin, la fonction publique est devenue une vraie fosse aux serpents. Quelle est votre opinion à cet égard?

Aussi, la sénatrice Andreychuk a posé une question intéressante. J'imagine que la plupart des tâches quotidiennes au ministère sont réalisées par des employés syndiqués, n'est-ce pas? Donc, s'il y a des problèmes de harcèlement, de la crainte ou des gens qui ne se désignent pas eux-mêmes, le syndicat ne devrait-il pas faire partie du processus?

Elles ont également beaucoup parlé de la santé mentale. Selon elles, on demande aux employés de maintenir un rythme si élevé qu'ils s'épuisent et développent des problèmes de santé mentale et il y a des préjugés concernant les maladies mentales. Pourriez-vous également partager votre opinion sur cet aspect?

M. Watson : Absolument.

Un des résultats les plus impressionnants du sondage auprès de la fonction publique — sans vouloir diminuer l'importance des autres données —, c'est que, si je ne m'abuse, 93 p. 100 des fonctionnaires disent être disposés à fournir un effort supplémentaire pour terminer le travail. Si je ne m'abuse, 79 p. 100 des 141 000 participants ont dit qu'ils étaient fiers d'être fonctionnaires.

La sénatrice Eaton : Est-ce que vous leur inspirez la crainte de Dieu?

M. Watson : Je ne crois pas que la crainte soit un bon moyen d'inspirer la fierté ou que ce soit la crainte qui pousse les gens à être fiers.

Dans quelques semaines, nous célébrerons la Semaine nationale de la fonction publique. Au cours de cette semaine, nous remettrons le Prix d'excellence de la fonction publique. S'ils consultent la liste des récipiendaires publiée en ligne depuis plusieurs années, les fonctionnaires — je dirais même tous les citoyens canadiens — constateront que jour après jour, les fonctionnaires font un travail extraordinaire qui a un impact sur presque tous les aspects de la vie des citoyens canadiens. Les fonctionnaires retirent beaucoup de fierté de leur travail et accomplissent leur tâche dans des environnements souvent très difficiles en raison de la nature de leur travail. Ils font un travail incomparable à l'échelle du pays comparativement à d'autres institutions. Ils touchent à plus de choses que quiconque. Aucune autre organisation canadienne n'a autant de portée que nous dans certaines régions du monde.

Ils disposent d'un ensemble de compétences. Nous avons retrouvé une des épaves de l'expédition Franklin au fond de l'océan et avons épaulé les membres de la Station spatiale internationale, notamment.

De façon générale, les fonctionnaires sont très fiers de leurs contributions, mais il s'agit d'un travail très difficile, car à un certain moment, tous les dossiers les plus difficiles au pays sont traités, dans une certaine mesure, par la fonction publique. Ce n'est pas un travail facile.

Est-ce un environnement difficile? Certainement, en raison de la nature du travail et de l'environnement unique. Les fonctionnaires sont autant dans la mire du public que les institutions publiques.

Je suis conscient qu'il y a des questions importantes à aborder, mais je suis encouragé par la fierté des gens à faire leur travail et leur volonté à fournir un effort supplémentaire. Nous ne pouvons pas ignorer et nous n'ignorerons pas tout ce que nous avons appris concernant le harcèlement et la discrimination. Mais je crois que la fierté des fonctionnaires dans l'accomplissement de leurs tâches quotidiennes et les résultats du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux montrent que tout n'est pas difficile, comme certains le disent.

La sénatrice Eaton : Comment sont vos relations quotidiennes avec l'AFPC? Sont-elles plutôt cordiales ou conflictuelles?

M. Watson : L'Alliance est un partenaire très important. Sur certains dossiers, nous sommes en désaccord, mais sur d'autres, nous collaborons étroitement, peu importe la situation qui nous entoure.

La sénatrice Eaton : Vous n'avez pas répondu à ma question. Vos relations sont-elles cordiales ou conflictuelles?

M. Watson : Par exemple, sur la question de la santé mentale, nous collaborons très étroitement avec l'alliance et entretenons une excellente relation. Sur d'autres dossiers, la relation est plus tendue.

La présidente : Monsieur Watson, je dois vous arrêter, car il reste de nombreux intervenants.

La sénatrice Andreychuk : Le groupe de témoins précédent nous a parlé du harcèlement et de la discrimination. La question du harcèlement est maintenant un sujet de discussion sur la Colline parlementaire et dans d'autres milieux de travail.

Avez-vous effectué une analyse quelconque pour voir si les résultats du sondage correspondent à ce que l'on retrouve dans la société dans ce dossier? Sur le plan statistique, figurez-vous en haut ou en bas de l'échelle sur la question du harcèlement?

M. Watson : C'est très difficile à dire, car presque personne n'a recueilli le genre de données que nous avons recueillies. Aucun autre employeur n'a demandé aux employés qui se sont dit victimes de harcèlement pourquoi ils n'avaient pas déposé de plainte officielle. Nous ne pouvons donc pas comparer nos statistiques avec d'autres.

Cela dit, de façon générale, il est clair que la société est plus sensible à la question du harcèlement et que les gens sont plus disposés à signaler les cas de harcèlement. Je crois que les médias sociaux ont beaucoup aidé à cet égard; il s'agit parfois d'un environnement sécuritaire où les gens peuvent partager leur histoire. Le fait de savoir que d'autres vivent la même situation les pousse à agir.

Cela dit, la fonction publique fédérale n'a pas eu à se fier à ce médium. Chaque organisation dispose d'une structure robuste, y compris les syndicats, où les gens peuvent présenter des griefs s'ils croient que leurs droits ont été violés en vertu de leur convention collective ou d'une loi. La situation a évolué, mais les gens savent qu'ils peuvent porter plainte et qu'il existe des normes d'acceptabilité.

La sénatrice Andreychuk : Le comité a souligné le rôle important que peuvent jouer les sous-ministres et leurs équivalents, car selon les commentaires recueillis dans le cadre de nos séances, si la direction ne reconnaît pas la situation, il est impossible de mettre en place une culture d'équité à l'égard des groupes cibles ou de tout autre situation de travail.

Le comité a proposé que cette responsabilité soit liée au rendement. Est-ce le cas? Vous dites que l'on tient compte de ces éléments, mais est-ce maintenant une catégorie qui fait l'objet d'une évaluation, c'est-à-dire que si le problème n'est pas réglé et que le ministère éprouve des difficultés, il y aura un impact sur la rémunération des membres de la direction?

M. Watson : Je peux vous parler des contributions qui sont apportées. Au bout du compte, ce n'est pas à moi que revient cette responsabilité. En tant que sous-ministre, ce n'est pas moi qui prends les décisions définitives sur la gestion du rendement de mes collègues, mais j'y joue un rôle important en formulant des commentaires. Ces commentaires portent, notamment, sur la gestion des ressources humaines, un des principaux éléments de notre discussion. La gestion du personnel est un des éléments centraux de nos compétences clés en leadership et nous évaluons le rendement des gestionnaires à cet égard.

La sénatrice Nancy Ruth : Je souhaite vous poser une question sur les personnes handicapées. Le gouvernement a annoncé sa politique voulant plus ou moins que les anciens combattants handicapés soient prioritaires au recrutement. Y a-t-il eu une incidence sur le nombre de personnes handicapées recrutées?

L'AFPC a indiqué que les travailleurs handicapés sont plus sujets, par rapport aux travailleurs non handicapés, à connaître une expérience négative pour ce qui est d'être acceptés à titre de membres à part entière d'une équipe ou d'être retenus pour un poste. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Watson : Je vais d'abord répondre à votre première question. Je dirais que les chiffres qui indiquent un taux de départ cinq fois plus élevé ne constituent pas un moyen de comparaison méthodologique exact. Si l'on prend une année où il y a eu le moins d'embauche jamais enregistrée et où il y a eu le plus de départs, c'est clair qu'il y aura un déséquilibre pour tout le monde. En fait, on ne voulait pas dire qu'il y avait deux fois plus de départs que d'employés recrutés. Je ne dis pas que ce ne soit pas un sujet qui mérite d'être examiné, mais la situation n'est pas aussi grave que celle qui a été décrite.

Nous sommes préoccupés, parce que le Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux a indiqué, par une marge évidente, que les personnes handicapées affichaient le taux d'insatisfaction le plus élevé, et nous en prenons bonne note. Là encore, nous disposons de ces résultats depuis quelques mois seulement, et nous réfléchissons aux façons de réagir. Nous en avons pris bonne note cependant, en remarquant qu'il s'agit d'une différence de taille par rapport aux autres groupes au sein de la fonction publique.

Lorsque je reviendrai l'année prochaine, si vous voulez bien nous inviter, je me ferai un plaisir de vous parler des mesures prises sur ce front.

Mme Donoghue : En ce qui concerne la première partie de votre question qui portait sur les anciens combattants, toutes nos données nous indiquent que nous avons connu énormément de succès relativement au recrutement des anciens combattants à la fonction publique. Nous avons suivi leurs carrières : leur réussite et leur progression au sein de la fonction publique sont évidentes.

Dans le cadre de l'examen des dépenses et des départs, nous avons remarqué que ces chiffres étaient à la baisse en raison des autres priorités qui l'emportaient sur celle des anciens combattants. Une nouvelle loi entrera en vigueur très bientôt pour corriger la situation. Ainsi, les anciens combattants bénéficieront de la priorité la plus élevée dans le système, afin que nous puissions légalement continuer à recruter les vétérans libérés pour raisons médicales.

Quant à la réglementation, dans le cas des personnes ayant été libérées pour des raisons médicales qui ne sont pas liées au service, une préférence sera ajoutée, afin que ces vétérans puissent jouir d'un accès prioritaire aux emplois annoncés, s'ils sont qualifiés.

C'est donc dans ce contexte que nous affirmons notre espoir et notre confiance d'être en mesure de continuer à recruter les anciens combattants pour raisons médicales, ainsi que certains anciens combattants handicapés.

La présidente : Je vous remercie pour vos déclarations et les réponses fournies à nos questions. Comme vous pouvez le constater, les sénateurs ont encore bien des questions à vous poser. La prochaine fois, il va falloir vous inviter plus tôt. Merci beaucoup d'avoir pris le temps de comparaître.

Chers collègues, nous poursuivons notre réunion. Finissons-en avec le budget. À notre dernière réunion, j'étais si pressée que je n'ai pas obtenu l'autorisation nécessaire du comité pour le budget.

Vous avez le budget devant vous. On y prévoit 1 000 $ pour un graphiste qui travaillera sur notre rapport sur la convention de La Haye. Quelqu'un doit le proposer.

La sénatrice Ataullahjan : Je le propose.

La présidente : Le budget vous convient-il?

Des voix : Oui.

La présidente : Merci beaucoup.

(La séance est levée.)


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