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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 6 - Témoignages du 6 mai 2014


OTTAWA, le mardi 6 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 h 31, pour étudier la teneur des éléments des sections 15, 16 et 28 de la partie 6, du projet de loi C-31, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.

SUJET : Partie 6 — Section 15 — Coopération en matière de réglementation

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, aujourd'hui nous débutons notre étude sur le projet de loi C-31, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.

Il a été demandé au comité d'effectuer une pré-étude des sections 15, 16 et 28.

Durant la première partie de cette réunion, nous examinerons la section 15, qui abroge les lois suivantes : la Loi sur la sécurité automobile, la Loi sur la sécurité ferroviaire, la Loi sur le transport des marchandises dangereuses et la Loi sur la salubrité des aliments.

[Traduction]

Notre premier groupe de témoins vient de Transports Canada. Nous accueillons Donald Roussel, directeur général, Sécurité maritime; Kash Ram, directeur général, Sécurité routière et règlements véhicules automobiles; et Michel Leclerc, directeur, Coordination des affaires réglementaires.

J'invite les témoins à prendre la parole.

Donald Roussel, directeur général, Sécurité maritime, Transports Canada : Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les sénateurs.

[Français]

Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui pour discuter de trois lois que Transports Canada propose de modifier selon la Loi d'exécution du budget.

[Traduction]

Comme vous l'avez mentionné, M. Kash Ram, directeur général, Sécurité routière et règlements véhicules automobiles, m'accompagne. Nous accompagnent également Mme Kim Benjamin, directrice, Programme de la sécurité routière; et M. Michel Leclerc, directeur, Coordination des affaires réglementaires.

[Français]

Ces propositions de modifications découlent des engagements pris dans le cadre du Conseil de coopération en matière de réglementation en décembre 2011. Parmi les 29 initiatives originales proposées par le conseil et déterminées en fonction d'un plan d'action conjoint Canada-États-Unis, 11 avaient pour thème le domaine des transports. Pour finaliser la mise en œuvre des plans d'action visant la sécurité des véhicules automobiles, le transport des marchandises dangereuses et la sécurité ferroviaire, il fallait apporter des modifications législatives.

[Traduction]

Comme le savent les membres du comité, l'objectif à long terme du Conseil de coopération en matière de réglementation est de créer des mécanismes systémiques qui éliminent les obstacles réglementaires entre le Canada et les États-Unis.

[Français]

Les incohérences en matière de réglementation coûtent de l'argent, peu importe le côté de la frontière où on se trouve, car la nécessité de se conformer à deux régimes réglementaires représente une perte d'efficience pour des économies aussi intégrées que celles du Canada et des États-Unis. Les normes sont souvent identiques, mais sont exprimées comme s'il s'agissait de critères différents, et les coûts de fabrication et de distribution sont refilés aux consommateurs.

[Traduction]

La synchronisation de l'élaboration et de la mise en œuvre de politiques de nos processus réglementaires respectifs donnera lieu à des cadres réglementaires mutuellement avantageux et bénéfiques et favorisera la croissance économique, la création d'emplois et assurera des avantages pour les consommateurs et les entreprises.

Consultés à l'automne 2013, les intervenants canadiens et américains se sont dits extrêmement favorables à l'initiative visant à créer le Conseil de coopération en matière de réglementation. Ils étaient particulièrement favorables aux efforts visant à institutionnaliser la coopération et à éliminer les obstacles à une harmonisation rapide dès qu'il y avait consensus généralisé.

Les présentes modifications législatives sont donc proposées. Tout d'abord, la Loi sur la sécurité automobile :

[Français]

Le programme canadien de la sécurité automobile repose sur la Loi sur la sécurité automobile, ses règlements et ses normes connexes. Cette réglementation régit à elle seule la fabrication et l'importation de véhicules automobiles, de nouveaux pneus et de dispositifs conçus pour protéger les enfants et les personnes handicapées à bord d'un véhicule.

Les modifications projetées à la Loi sur la sécurité automobile soutiennent directement deux éléments du plan de travail du Conseil de coopération en matière de réglementation, sans parler des objectifs globaux de l'initiative. Ces modifications ont pour objectif d'éliminer les obstacles et d'aligner les régimes réglementaires en matière de sécurité automobile, dans la mesure du possible, entre le Canada et les États-Unis.

Elles ont également pour but d'alléger le fardeau administratif et d'accroître l'efficacité, tout en rehaussant la sécurité des Canadiens.

[Traduction]

Ces modifications se divisent en quatre catégories : adoption de mesures réglementaires; importation; sécurité, qui traite du respect des normes et de la lutte contre les infractions; et cueillette d'informations.

Pour ce qui est de la modification des dispositions portant sur l'adoption de mesures réglementaires, elle facilitera l'harmonisation continue avec les normes de sécurité des États-Unis et d'autres normes internationales dans les instances que le gouvernement du Canada juge appropriées. Ces modifications permettront au régime sur la sécurité automobile du Canada de demeurer à jour en matière de nouvelles technologies, et ce de façon plus efficace.

Les modifications aux dispositions sur l'importation permettront l'importation de véhicules et de matériel dans les cas où il est jugé que les normes des États-Unis en matière de sécurité sont conformes aux exigences du Canada. Elles permettront de supprimer également d'autres freins à l'importation, tout en continuant d'assurer la sécurité du public.

[Français]

Les modifications apportées aux dispositions de conformité et de mise en application de la loi et de ses règlements permettront d'harmoniser étroitement les régimes canadiens et américains, tout en continuant à mieux protéger et servir les Canadiens.

[Traduction]

L'amélioration de la capacité de Transports Canada d'obtenir et de distribuer de l'information concernant la sécurité automobile permettra de continuer à informer les Canadiens sur les questions liées à la sécurité automobile et donnera au gouvernement le pouvoir d'adopter des politiques et des décisions réglementaires plus avisées.

[Français]

Les modifications projetées à la Loi sur la sécurité automobile assureront la sécurité des véhicules vendus aux Canadiens d'une manière qui tienne compte de la nature intégrée du marché automobile nord-américain. Elles réduiront, le cas échéant, le fardeau de l'industrie en ce qui a trait à la conformité et respecteront les attentes du public à l'égard des régimes similaires de surveillance de la sécurité.

Passons maintenant à la Loi sur la sécurité ferroviaire et à la Loi sur le transport des marchandises dangereuses de 1992.

Les modifications relatives à la Loi sur la sécurité ferroviaire et à la Loi de 1992 sur le transport des marchandises dangereuses sont identiques et visent à moderniser des dispositions législatives qui remontent au début des années 1980, soit avant l'adoption par le gouvernement canadien de la toute première politique de réglementation fédérale en 1986.

[Traduction]

Les membres du comité savent que la version actuelle de la politique de 1986, la Directive du Cabinet sur la gestion de la réglementation, continue d'exiger qu'un avis quant aux règlements projetés soit donné dans la partie I de la Gazette du Canada avant leur adoption, même dans les cas où la loi habilitante est muette à ce sujet. À la lumière de cette information, il est logique d'appliquer les mêmes normes de la directive du Cabinet que celles qui s'appliquent à la plupart des autres règlements fédéraux en ce qui concerne la publication préalable.

Merci. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

[Français]

Le président : Pas de commentaires supplémentaires de la part de vos collègues?

[Traduction]

J'en ai une au sujet des audiences du Congrès aux États-Unis à propos de GM. De quelle façon est-ce que les autorités américaines chargées de la sécurité des véhicules et les autorités canadiennes à Transports Canada s'échangeraient l'information?

Kash Ram, directeur général, Sécurité routière et règlements véhicules automobiles, Transports Canada : Pour ce qui est des relations entre les autorités américaines et Transports Canada, elles sont excellentes, en particulier pour ce qui est des questions et des préoccupations soulevées par le grand public des deux côtés de la frontière. Nous accumulons cette information et nous nous l'échangeons afin de déterminer les tendances et les possibles défauts cachés reliés à la sécurité dans les véhicules.

Cela nous permet d'engager le dialogue avec les compagnies respectives, et vous avez mentionné GM. Il faut savoir qu'il y a GM US et GM Canada. Nous réglementons GM Canada. Nous avons engagé des discussions avec les dirigeants de GM Canada et nous leur avons fourni les renseignements découlant des questions soulevées par le grand public canadien, ce qui a également éclairé leurs points de vue.

Pour ce qui est du Congrès américain, il examine les mesures prises par GM. Je devrais signaler que GM Canada, étant une filiale en propriété exclusive de GM USA, dépend presque totalement des décisions prises au siège social aux États-Unis. Nous avons donc reçu le rappel au sujet des défauts des commutateurs d'allumage en même temps dans les deux pays, au même titre que toutes les autres entités de GM dans le monde. Il n'y a donc aucune différence dans le choix du moment concernant ces rappels.

Le président : Merci. Les sénateurs poseront maintenant leurs questions.

Le sénateur Eggleton : Est-ce que la mise en œuvre de ces modifications concernant les véhicules automobiles se fait de la même façon au Canada et aux États-Unis, et la facilitons-nous de la même façon qu'eux?

M. Ram : C'est semblable en ce sens qu'il y a une loi. Aux États-Unis, c'est le Motor Vehicle Act; ici, nous avons la Loi sur la sécurité automobile. Notre loi est calquée sur la leur. La nôtre remonte à 1971 et la leur, à 1965. En 1971, il a été décidé qu'il serait bénéfique de suivre l'expérience des États-Unis.

Au cours des décennies qui ont suivi, les deux pays ont adopté de nombreux règlements afin de permettre l'établissement de normes obligatoires en matière de sécurité. Vous constaterez que nos normes sont plus ou moins semblables à celles des États-Unis et, dans une certaine mesure, aux normes européennes aussi. Dans certains domaines, les États-Unis ont adopté des normes que nous n'avons pas jugé bon de mettre en application au Canada, et vice versa. Il existe des normes au Canada que les États-Unis n'ont pas pour améliorer la sécurité des véhicules automobiles.

Le sénateur Eggleton : Mais il n'y a aucun avantage ou désavantage d'un côté comme de l'autre de la frontière pour ce qui est du régime réglementaire. N'est-ce pas la raison d'être du Conseil de coopération en matière de réglementation, c'est-à-dire qu'il s'agit d'un marché traité de façon juste et équitable des deux côtés de la frontière? Seriez-vous d'accord?

M. Ram : C'est l'intention. En amont, pour ce qui est des règlements, nous voulons éliminer les tracasseries administratives et harmoniser les règlements le plus possible avec les règlements américains lorsqu'il est logique de le faire de façon à ce qu'il soit plus facile pour l'industrie canadienne et les constructeurs de fabriquer les mêmes véhicules respectant les deux normes des deux pays. Cela réduit les tracasseries administratives, d'autant plus que le secteur de l'automobile est un grand employeur au Canada. C'est la partie en amont.

La partie en aval est représentée par les exigences en matière d'exécution de la loi et de conformité qui obligent effectivement l'industrie à rendre des comptes. Dans ce cas-ci, nous avons adopté quelques-uns des outils que possèdent les États-Unis et nous les insérons dans nos lois comme ils vous sont présentés afin de protéger le consommateur.

Il s'agit d'une approche équilibrée — tant la partie en amont que la partie en aval, si vous voulez.

Le sénateur Eggleton : En ce qui concerne la Loi sur la sécurité ferroviaire, vous ne pensez pas qu'il soit nécessaire d'éliminer l'exigence de la loi qui consiste à publier au préalable les ordonnances et les règlements projetés en vertu de ces lois. En fait, vous emboîtez le pas à ce qui se fait dans d'autres cas. Le ministre a effectivement — il s'agit d'un aspect très sensible, de toute évidence, surtout dernièrement — des pouvoirs d'urgence; des ordonnances d'urgence peuvent être prises.

Compte tenu de cela, pourquoi est-il vraiment nécessaire de faire ceci, si ce n'est que pour dire que vous emboîtez le pas à tout le monde?

Michel Leclerc, directeur, Coordination des affaires réglementaires, Transports Canada : Ce qui survient avec ces dispositions — et il en est de même pour la Loi sur le transport des marchandises dangereuses et la Loi sur la sécurité ferroviaire —, c'est que ces dispositions ont en réalité été intégrées à la loi bien avant que la politique de réglementation fédérale ne soit mise en œuvre pour la première fois en 1986. Elle visait ce qui constituait alors une lacune, mais aujourd'hui, en vertu de la Directive du Cabinet sur la gestion de la réglementation, il doit y avoir publication préalable. Nous estimons qu'il n'est pas tellement logique de procéder à une publication préalable lorsque, dans le cadre du CCR, les intervenants de chaque côté de la frontière — les organes de réglementation au Canada et aux États-Unis — se sont entendus pour signifier un avis.

Évidemment, la décision de procéder à une publication préalable reviendrait au Cabinet de sorte que, au bout du compte, même s'il y avait consensus, le Cabinet pourrait ordonner une publication préalable. De fait, notre ministre pourrait aussi le recommander.

Le problème...

Le sénateur Eggleton : Pourquoi la retirer alors?

M. Leclerc : Cela le rend obligatoire et élargit le processus réglementaire alors que tout le monde s'entend pour ce qui est de l'approche. Voilà ce que les gens veulent éviter : pour harmoniser les systèmes réglementaires...

Le sénateur Eggleton : Il s'agirait donc d'une modification plus mineure; il y a des règlements contrairement à certains enjeux plus controversés.

M. Leclerc : Elle est très mineure. C'est ce que nous appelons une modernisation de la loi plutôt qu'une dérogation importante à la pratique fédérale actuelle.

Le sénateur Plett : Je lis dans nos notes que les inspecteurs de Transports Canada seraient exemptés d'avoir à témoigner dans un procès en matière civile. Est-ce que Transports Canada est à l'heure actuelle obligé de témoigner dans les procès en matière civile? Si c'est le cas, pourquoi voulons-nous enlever cette disposition? Et s'il ne l'est pas, pourquoi en parlons-nous?

M. Ram : De façon générale, lorsqu'il n'y a aucun avantage sur le plan de la politique publique ni aucun enjeu lié à la sécurité, nous nous conformons à une demande de témoigner dans des procès en matière civile opposant deux parties. Les demandeurs ont tendance à être plus véhéments et à demander l'aide de Transports Canada en tant que ressource technique gratuite. C'est pour nous une complication en ce sens que nous devons y consacrer beaucoup de temps et de ressources.

En indiquant clairement dans la loi que ce serait à la demande du ministre que nous témoignons, nous croyons que cela donnerait à réfléchir aux parties à un litige qui demandent notre aide et les amènerait peut-être à retirer leur demande.

Dans certaines situations, il est justifié que nous ayons à témoigner, comme lorsqu'il y va de l'intérêt public et lorsqu'il s'agit d'un enjeu de sûreté générale, par opposition à ce que nous constatons plus souvent, c'est-à-dire que des gens prétendent que la collision est attribuable à une mauvaise utilisation ou à un comportement et que l'autre partie dit : « Non, c'est la faute du véhicule ». C'est dans de telles situations que nous espérons dissuader les gens de recourir de façon abusive aux employés de Transports Canada comme des témoins gratuits.

Le sénateur Plett : Si je comprends bien, vous pourriez choisir; vous n'êtes pas tenus de témoigner, mais vous pourriez le faire. Qui prend cette décision? De toute évidence, si j'intente un procès, il serait pour moi extrêmement important, selon toute vraisemblance, que vous témoigniez; par contre, si je suis poursuivi, je préférerais probablement que vous ne témoigniez pas. Donc, qui prend la décision?

M. Ram : Le ministère le fait; nous essayons dans toute la mesure du possible de nous conformer. Je peux peut-être poser la question à notre avocate.

Le sénateur Plett : S'il vous plaît. M. Ram a dit que le ministère déciderait dans le cadre d'une poursuite en matière civile si Transports Canada devait témoigner, et il a dit que c'est une décision prise à l'interne. Qui prend la décision et pourquoi feriez-vous une distinction entre témoigner et ne pas témoigner? Il pourrait y avoir des cas où vous devriez à mon avis, et l'entreprise que je poursuis, GM, dit : « Eh bien, il n'est pas souhaitable que Transports Canada témoigne. »

Linda Wilson, avocate, Services juridiques, Transports Canada : Tout d'abord, s'il y a assignation à comparaître, ce qu'un juge ordonne, cette disposition ne s'appliquerait pas. L'assignation aurait préséance.

S'il n'y a pas assignation, le ministère prend une décision stratégique de permettre à un inspecteur de témoigner. Le règlement qui sous-tend cette disposition vise à limiter le recours à des témoins experts gratuits parce qu'il y a par ailleurs de nombreux experts qui peuvent offrir le même témoignage. Ce que je comprends, c'est que le ministère n'estimait pas que les fonctionnaires devraient être appelés à témoigner gratuitement à titre d'experts dans des affaires civiles opposant deux particuliers.

S'il s'agit d'une poursuite judiciaire, c'est autre chose. Mais si une entité en poursuit une autre, il existe peut-être d'autres façons d'obtenir les mêmes renseignements. L'existence de ces autres façons éclairerait en partie la décision de faire témoigner l'inspecteur. S'il s'agit d'un aspect pour lequel l'inspecteur possède des connaissances particulières et si la politique publique justifie ce témoignage, je suppose que la décision pencherait davantage en faveur d'un témoignage. S'il s'agit d'un aspect très générique et si c'est tout simplement une façon pour une partie à un litige de réduire ses coûts, il est alors moins de l'intérêt de la politique gouvernementale que l'inspecteur témoigne. S'il y a assignation, l'inspecteur doit alors y aller.

Le sénateur Plett : Ces renseignements sont très importants et beaucoup plus précis que ce à quoi je m'attendais.

Le président : Monsieur Leclerc, monsieur Roussel, monsieur Ram, madame Wilson, merci d'être venus.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, nous poursuivons notre étude sur le projet de loi C-31, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures. Le comité a reçu le mandat d'effectuer une pré-étude des sections 15, 16 et 28.

Durant la deuxième partie de cette réunion, nous examinerons la section 28 qui édicte la loi visant le nouveau pont pour le Saint-Laurent et qui vise la construction et l'exploitation d'un nouveau pont à Montréal pour remplacer le pont Champlain et le pont de l'île des Sœurs.

[Traduction]

Les témoins suivants viennent également de Transports Canada : Thao Pham, sous-ministre adjointe, Ponts fédéraux de Montréal; et Isabelle Jacques, avocate générale et directrice associée.

[Français]

Thao Pham, sous-ministre adjointe, Ponts fédéraux de Montréal, Transports Canada : Merci beaucoup, monsieur le président. Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs.

[Traduction]

Ce matin, j'aimerais que vous nous donniez un aperçu de la nouvelle Loi visant le nouveau pont pour le Saint- Laurent.

D'après un rapport d'expert en ingénierie produit en 2010, l'actuel pont Champlain à Montréal a atteint la fin de sa vie utile. Suivant les recommandations d'une étude de préfaisabilité réalisée en 2011, le gouvernement du Canada a annoncé qu'il remplacera le pont Champlain.

En décembre 2013, le gouvernement du Canada a annoncé que la construction du nouveau pont pour le Saint- Laurent sera accélérée et que le pont entrera en service en 2018.

Le gouvernement du Canada a annoncé que le pont sera construit dans le cadre d'un partenariat public-privé. Une analyse de rentabilité a été préparée et elle a établi que l'approche du partenariat public-privé optimisera l'utilisation des ressources financières des contribuables, d'une part, mais qu'elle fera aussi en sorte que le projet est réalisé dans les délais et dans les limites du budget imparti.

Compte tenu du calendrier accéléré, le nouveau pont pour le Saint-Laurent fera en sorte que les autorisations nécessaires à la mise en œuvre de tous les aspects de la construction du nouveau pont sont en place.

[Français]

Le projet de loi visant le nouveau pont pour le Saint-Laurent donnera le plus de certitude possible pour éviter des délais additionnels, qu'il s'agisse de différentes interprétations légales ou, potentiellement, de primes par rapport aux promoteurs intéressés à soumissionner pour le projet.

[Traduction]

Les principales dispositions législatives de ces lois sont les suivantes : tout d'abord, la nouvelle Loi sur les ponts qui est proposée désignera le ministre nommé par le gouverneur en conseil qui sera chargé de l'administration de la loi. Essentiellement, le ministre nommé par le gouverneur en conseil est le chargé de projet.

La loi proposée pour le nouveau pont déclarera aussi que le pont pour le Saint-Laurent est à l'avantage général du Canada, en faisant ainsi une structure fédérale.

Étant donné que le nouveau pont pour le Saint-Laurent est un pont interprovincial et qu'il est le seul pont au Canada appartenant au gouvernement fédéral qui soit situé dans une province, les travaux liés à ce projet seront considérés de nature provinciale. Par conséquent, cette disposition est incluse afin de s'assurer que le pont relève de la compétence et du contrôle du gouvernement du Canada, par opposition à la province, qui exercerait par ailleurs le contrôle sur les travaux de nature provinciale.

La loi autorisera le ministre responsable à conclure une entente relativement au pont ou aux travaux connexes en vue de la construction du pont. Par exemple, le ministre sera habilité à signer des ententes avec le gouvernement du Québec et aussi avec des municipalités du Québec sur des aspects comme l'échange de renseignements et le déplacement de services publics. Ces ententes ne font pas partie de l'accord qui serait signé par le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux Canada en ce qui concerne l'accord PPP avec le partenaire privé.

La Loi visant le nouveau pont pour le Saint-Laurent proposée donnera au ministre responsable le pouvoir de prendre des règlements afin d'établir et de percevoir des péages.

En ce qui concerne le contrat avec le partenaire PPP en tant qu'exploitant, la loi donnera au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux le pouvoir de conclure une telle entente. Par conséquent, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux est l'autorité contractante.

De plus, la loi proposée donnera au gouverneur en conseil le pouvoir d'exempter le projet de certains permis, licences ou autorisations du gouvernement fédéral s'il est déterminé qu'il est dans l'intérêt public de le faire. Évidemment, l'intention est que le gouvernement fédéral obtienne tous les permis et autorisations nécessaires, mais s'il est jugé dans l'intérêt public de le faire et si, pour des raisons de sécurité et de sûreté, nous voulons accélérer les travaux, alors il y a cette disposition.

Finalement, la loi proposée exempte le projet de l'application de deux lois actuelles, la Loi sur les ponts et la Loi sur les frais d'utilisation.

En ce qui concerne la Loi sur les ponts, étant donné que l'accord PPP comportera des dispositions très précises au sujet des attentes liées aux inspections de sécurité et à la mise en service du pont, la Loi sur les ponts ne s'appliquera pas afin d'éviter, une fois de plus, tout chevauchement ou confusion possible au niveau de l'interprétation.

Pour ce qui est de la Loi sur les frais d'utilisation, étant donné la nature précise du projet, les péages seront fixés par règlement, encore une fois pour éviter tout dédoublement au niveau de l'interprétation des lois actuelles par rapport à la loi spéciale concernant le projet.

Voilà, monsieur le président, un aperçu de la loi spéciale, et je suis prête à répondre aux questions.

Le sénateur Plett : Vous avez répondu à certaines de mes questions à la fin de votre exposé; je vous en remercie. Mes questions étaient liées au partenariat public-privé.

Le PPP, par souci de précision, est fédéral, provincial et privé; est-ce exact?

Mme Pham : Non, il s'agira d'un accord signé par le gouvernement fédéral avec le secteur privé.

Le sénateur Plett : Le secteur privé paiera donc pour la construction du pont, et le gouvernement fédéral ne participera pas au financement du pont.

Mme Pham : C'est exact. Dans le cadre de l'analyse de rentabilité qui a été préparée et présentée, la décision consistait à aller de l'avant avec la conception, la construction, l'exploitation et le financement. Par conséquent, oui, le secteur privé, le soumissionnaire retenu, assurera le financement, puis le gouvernement fédéral conclura un marché avec le partenaire privé et, par conséquent, effectuera des paiements à diverses étapes, par exemple, pendant la durée de l'accord.

Le sénateur Plett : Donc, en ce qui concerne les péages qui sont fixés, est-ce que le gouvernement fédéral participera au moins aux négociations à cet effet?

Mme Pham : Le gouvernement fédéral réglementera les péages, comme je l'ai indiqué, par la prise de règlements. Par conséquent, il n'y a pas de négociations comme telles au sujet du partenaire privé, parce que la décision relève du gouvernement fédéral.

[Français]

La sénatrice Verner : Je voudrais simplement améliorer ma compréhension du dossier. En novembre dernier, on avait discuté ici du projet de loi C-4 qui concernait la gestion et le financement des ponts fédéraux, à l'exclusion de ceux qui sont situés au Québec.

Compte tenu du débat qui avait déjà cours concernant le nouveau Pont Champlain, j'avais demandé à vos collègues si le gouvernement fédéral disposait déjà des pouvoirs législatifs et réglementaires nécessaires pour établir et percevoir un droit de péage par l'entremise de partenaires privés.

Il y a eu quelques références un peu vagues, mais vos collègues s'étaient engagés à nous fournir cette réponse par écrit. Mon personnel a vérifié avec le greffier du comité, et on n'a rien reçu jusqu'à ce jour. Est-ce que cela veut dire que vous ne disposez pas présentement des pouvoirs nécessaires pour imposer un droit de péage sur le nouveau pont? Est-ce que ma compréhension est juste?

Mme Pham : Par rapport à votre première question, je vais faire le suivi auprès du ministère et vous revenir avec une réponse ou au moins avec un suivi. Par rapport à la deuxième question, l'autorité pour le ministre d'imposer un péage sur le nouveau pont pour le Saint-Laurent constitue l'une des dispositions proposées dans le projet de loi que vous étudiez.

La sénatrice Verner : Donc, il ne l'avait pas auparavant. Le projet de loi que nous étudions vient corriger cela?

Mme Pham : Il lui donne cette autorité, en effet.

Le sénateur Demers : Au sujet du péage, le ministre Lebel a été très précis et très clair sur le fait qu'il y aura un pont à péage. Il y a deux niveaux : l'administration provinciale et l'administration fédérale. L'administration provinciale ne veut pas de péage. Même M. le maire Denis Coderre a dit qu'il n'était pas question de péage.

Mais finalement, ce sont les contribuables qui vont éventuellement payer ce pont à des prix exorbitants. Est-ce que cela va alourdir leur fardeau fiscal? Comment voyez-vous cela? Ce n'est pas seulement une questions d'entêtement; c'est pour permettre éventuellement aux contribuables de ne pas être obligés de payer le pont pendant 20 ou 30 ans.

Mme Pham : Comme cela a été annoncé publiquement, on estime que le coût du projet de construction du nouveau pont pourrait varier entre 3 et 5 milliards de dollars et que le péage contribuera à payer une partie du coût de construction et de maintien du pont. Il y aura également une contribution fédérale à la construction et à l'opération du projet.

Je pense que c'est la réponse que je peux offrir, c'est-à-dire qu'il y a une contribution du gouvernement fédéral, mais que, évidemment, les revenus de péage vont contribuer à payer les coûts de construction.

Le sénateur Demers : À un moment donné, qui va trancher et dire que oui, il faut payer trois dollars? Il faut s'assurer que ça ne coûtera pas une fortune aux gens qui prennent le pont. À certains moments, on entend oui, et à d'autres, non. J'aimerais savoir quand viendra le moment précis de prendre la décision. Qui prend la décision finale?

Mme Pham : Étant donné qu'il a toujours été annoncé qu'il y aura un péage sur le pont, le ministère est en train d'évaluer le taux de péage autour de la grande région de Montréal, par exemple sur l'autoroute 25 et l'autoroute 30.

Nous étudions également les projections et la modélisation quant au nombre de véhicules qui circuleront sur le nouveau pont. Les taux qui seront alors proposés feront l'objet de la réglementation demandée dans le cadre du projet de loi. Nous passerons ensuite au processus de consultation au sujet du taux. C'est de cette façon que ce sera fait.

Le sénateur Demers : Alors, pour ceux qui se battent encore pour empêcher l'imposition d'un péage, c'est donc perdu d'avance? Il y en a encore qui se battent et qui disent ne pas vouloir que soit imposé un péage pour le pont. On entend ça régulièrement.

Mme Pham : Le projet de loi donne l'autorité au ministre de construire le pont et d'établir des péages par voie de réglementation.

Le sénateur Demers : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Eggleton : Qui sera propriétaire du pont?

Mme Pham : Il appartiendra au gouvernement fédéral.

Le sénateur Eggleton : Et le secteur privé assume la majorité sinon la totalité des coûts?

Mme Pham : Cela fera partie des propositions que nous recevrons des soumissionnaires. Par conséquent, ils devront présenter des scénarios de financement. Au bout du compte, le gouvernement fédéral sera le propriétaire du pont et il paiera le partenaire privé en fonction de l'entente conclue pour la construction, mais aussi pour l'entretien et l'exploitation pendant 30 ans.

Le sénateur Eggleton : C'est ici qu'interviennent les péages. Ils permettront au secteur privé de récupérer son investissement?

Mme Pham : Les péages seront perçus par le partenaire privé, puis remis au gouvernement fédéral. Par conséquent, les revenus des péages appartiendront au gouvernement fédéral. Grâce à ces revenus et aussi à la contribution fédérale, le gouvernement fédéral effectuera sur une période de 30 ans plusieurs paiements au partenaire privé pour la construction et l'exploitation du pont.

Le sénateur Eggleton : Ce pont est totalement dans la province de Québec. Quelle est la participation du gouvernement provincial?

Mme Pham : Comme vous le savez probablement, il en est beaucoup question dans les médias, mais pour l'instant, bien entendu, ce pont appartient au gouvernement fédéral. Compte tenu de la sûreté et de la sécurité des usagers, le gouvernement fédéral ira de l'avant et construira le nouveau pont.

Le sénateur Eggleton : À ce moment-ci, il n'y a donc aucune participation financière de la part du gouvernement provincial.

Mme Pham : Non.

Le sénateur Eggleton : Qu'est-ce qui justifie que le gouvernement fédéral construise ce pont?

Mme Pham : Comme vous le savez, le pont Champlain est dans un état critique et il y a...

Le sénateur Eggleton : Non, je le sais. Qu'est-ce qui justifie que le gouvernement fédéral paie pour faire construire un pont qui est totalement dans une province? Le fait-il dans une autre province?

Mme Pham : Non, il s'agit d'une situation unique en vertu de laquelle le gouvernement fédéral est le propriétaire d'un pont dans une province. Cependant, étant donné que nous devons remplacer le pont Champlain pour des raisons de sécurité, nous devons procéder à la construction.

Le sénateur Eggleton : Alors, qu'est-ce qui justifie le pont Champlain pour commencer? Qu'est-ce qui justifie que le gouvernement fédéral construise un pont dans une province?

Mme Pham : Pour des raisons, historiques, par exemple...

Le sénateur Eggleton : Quelles sont les raisons historiques?

Mme Pham : La construction de la voie maritime, celle du pont Jacques-Cartier et une partie du pont Mercier. Tout était donc relié à la construction de la voie maritime.

Le sénateur Eggleton : Mais le fait-il dans une autre province?

Mme Pham : Non.

Le sénateur Eggleton : Merci.

Le sénateur MacDonald : Suite à ce que le sénateur Eggleton a dit, je préciserais que cela a été fait pour le pont de la Confédération à l'Île-du-Prince-Édouard. C'est ce à quoi ma question fait référence. Dans les années 1980, je travaillais au ministère des Travaux publics lorsque nous avons fait construire le pont menant à l'Île-du-Prince-Édouard. Question de curiosité, a-t-on utilisé ce modèle ou s'en est-on inspiré pour construire le nouveau pont pour le Saint- Laurent?

Mme Pham : Je pense que le premier élément à clarifier est que le pont de la Confédération est un pont interprovincial.

Le sénateur MacDonald : Oui, en effet. Ce que je veux dire, c'est qu'il ne s'agit pas d'un pont international.

Isabelle Jacques, avocate générale et directrice associée, Transports Canada : Oui, il relève de la compétence fédérale.

Mme Pham : Pour ce qui est de savoir si l'on s'est inspiré du modèle utilisé pour le pont de la Confédération, je devrai vous revenir pour vous dire ce que nous avons appris de ce projet.

Le sénateur Eggleton : C'était totalement dans la province.

Le sénateur MacDonald : Exact, je m'en rends compte. Je connais la géographie du pays.

Question de curiosité, pourquoi a-t-on prévu des dispositions pour confier la supervision de la construction du pont à un ministre autre que le ministre des Travaux publics? J'aimerais en connaître la raison ainsi que, éventuellement, le ministère qui a été choisi et pourquoi.

Mme Pham : Dans la loi proposée, nous clarifions les pouvoirs de chacun des ministres respectifs. Nous voulons nous assurer qu'il ne fait aucun doute que le chargé de projet est le ministre qui sera nommé par le gouverneur en conseil, tandis que le ministre des Travaux publics sera chargé de tous les aspects contractuels qui y sont reliés. Voilà la raison pour la clarification des pouvoirs.

Le sénateur Housakos : Ma question est d'ordre technique. Je viens de Montréal. De toute évidence, le pont Champlain est d'une importance cruciale pour notre ville. C'est le pont le plus achalandé au pays. Il est essentiel pour le développement économique de la ville et de la région.

Vous pouvez peut-être répondre à une de mes préoccupations. Nous avons deux ponts majeurs dans la région de Montréal. Nous avons le pont Jacques-Cartier, et nous avons le pont Champlain. Le pont Jacques-Cartier a été construit bien des décennies avant le pont Champlain, et il est toujours solide. Les experts semblent croire qu'il le sera encore pendant 100 ans. Nous avons consacré beaucoup moins d'argent à l'entretien du pont Jacques-Cartier qu'à celui du pont Champlain. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il en est ainsi? Pourquoi est-ce qu'un pont que nous avons construit il y a à peine 50 ou 60 ans s'effondre, et pourquoi est-ce qu'un pont que nous avons construit il y a plus de 100 ans est solide comme du roc?

Mme Pham : Plusieurs études ont été réalisées au cours des dernières années. Une partie de la réponse à votre question tient à la conception du pont, d'une part, mais aussi aux matériaux utilisés. Lorsque l'on a construit le pont Champlain, en 1962 sauf erreur, on n'était pas censé utiliser beaucoup de sel de déglaçage. Je pense que cela a de toute évidence accéléré la détérioration. La réponse simple à votre question, sénateur, est la conception conjuguée aux matériaux utilisés.

Le sénateur Housakos : Pour remplacer le pont, je suppose que des mesures doivent être prises pour s'assurer que l'efficacité à long terme du nouveau pont sera prise en considération, ce qui n'a pas été le cas bien évidemment en 1962.

Mme Pham : Dans le cas du nouveau pont pour le Saint-Laurent, nous parlons d'une durée de vie de 125 ans. Partout dans le monde, grâce à la technologie et aux matériaux dont nous disposons, nous pouvons nous attendre à une durée de vie des ponts de 100 ans. Cependant, pour celui-ci, nous voulons vraiment que ce soit plus et nous visons la meilleure conception et la meilleure construction. Nous visons donc une durée de vie de 125 ans.

Le sénateur Housakos : Je m'excuse d'être arrivé en retard et peut-être que ma prochaine question a déjà été posée, mais il me semble que nous avons annoncé à plusieurs reprises la construction d'un nouveau pont. D'après ce que j'ai lu dans les médias, nous avons dépensé ces dernières années et nous dépenserons au cours des prochaines des centaines de millions de dollars pour assurer l'entretien essentiel du pont actuel afin de le tenir à flot, si je peux m'exprimer ainsi. Pourquoi le retard? D'après ce que j'ai lu dans différents journaux, il me semble que nous aurons dépensé près d'un demi-milliard de dollars au cours des dernières années et des deux prochaines uniquement pour l'entretien et le maintien en service du pont. Pourquoi attendre aussi longtemps avant de commencer à construire le nouveau pont?

Mme Pham : En ce qui concerne le nouveau pont, il a été annoncé dès décembre 2013 que le calendrier serait accéléré. Au départ, le nouveau pont devait entrer en service en 2021, mais compte tenu de la situation du pont Champlain, nous avons cherché avec nos experts, nos ingénieurs, des façons d'accélérer le calendrier afin que le pont soit mis en service en 2018.

Le projet progresse selon les plans et un processus d'approvisionnement est en cours. Comme vous pouvez l'imaginer, il s'agit de l'un des plus importants projets d'infrastructure en Amérique du Nord à l'heure actuelle. Nous avons donc lancé un processus d'approvisionnement.

Nous avons adopté une approche à deux volets. Le premier est une demande de qualification. Ce travail est en cours. Il se terminera le 7 mai, c'est-à-dire demain. Tous les répondants feront parvenir leurs propositions, puis nous choisirons les trois meilleures et nous passerons à l'étape suivante, en juillet, c'est-à-dire une demande de propositions. Aucun doute possible, nous allons de l'avant avec la construction du nouveau pont.

Pour ce qui est du pont Champlain, il est l'un des plus achalandés, y compris le pont Jacques-Cartier. Par conséquent, il doit rester en service. Tous les travaux d'entretien et d'inspection, tout ce qui peut être fait, tout cela se fait en ce moment pour s'assurer que le pont est sécuritaire et reste en service jusqu'à l'ouverture du nouveau pont.

Le sénateur Housakos : Ma dernière question porte sur le processus d'appel d'offres lui-même. Y a-t-il des dispositions pour s'assurer qu'un avantage sera accordé aux consortiums canadiens ou aux soumissionnaires canadiens pour effectuer les travaux? Y a-t-il des compagnies en ce moment au Canada qui peuvent construire ce pont ou miserons-nous uniquement sur des soumissionnaires internationaux?

Mme Pham : Étant donné que nous ne construisons pas un pont de cette envergure très souvent et que nous voulons avoir le pont le plus durable possible, nous avons décidé d'ouvrir le processus à l'échelle internationale, ce qui comprend les entreprises canadiennes. Nous voulons avoir les meilleurs entrepreneurs, les meilleurs bâtisseurs de ponts au monde. Le 31 mars, nous avons organisé une séance d'information à l'intention de tous les bâtisseurs canadiens et internationaux de ponts et d'autoroutes. Quelque 400 participants sont venus, dont des entreprises canadiennes.

Au cours de cette séance, nous avons aussi organisé une journée de l'industrie dans le cadre de laquelle tous les grands consortiums, les grands bâtisseurs, ont pu tenir une réunion d'affaires avec des petites et moyennes entreprises locales, régionales et provinciales de façon à ce qu'elles puissent également faire partie du processus. C'est ainsi que nous pouvons promouvoir le savoir-faire provincial et canadien.

Le sénateur Plett : Encore une fois, vous avez peut-être déjà répondu en partie à ma prochaine question. Si c'est le cas, je m'en excuse.

Le pont Champlain restera ouvert pendant la construction du nouveau pont. Où construit-on le nouveau pont? L'a- t-on indiqué pendant mon absence? Le construit-on juste à côté, de sorte qu'il n'y aura qu'une déviation? Le construit- on au même endroit?

Mme Pham : Il sera construit au nord du pont Champlain, donc tout juste à côté. Comme vous pouvez l'imaginer, à la sortie du pont, il y a l'autoroute 10 qui vient des Cantons de l'Est et l'autoroute 15. Le nouveau pont sera immédiatement à côté du pont Champlain, du côté nord, donc du côté du pont Victoria, car nous voulons pouvoir faire les raccordements avec l'autoroute 10 et l'autoroute 15.

Je devrais également mentionner que nous parlons beaucoup du pont, mais ce projet est en réalité un corridor. En construisant le nouveau pont, nous élargirons aussi l'autoroute 15 et effectuerons des travaux d'entretien pour l'autoroute Bonaventure. Nous parlons d'une infrastructure d'environ huit kilomètres. Le pont en est le principal élément, mais nous parlons aussi du corridor. Il sera juste à côté.

Le sénateur Plett : Merci de ces données.

J'ai œuvré toute ma vie dans la construction, mais, de toute évidence, rien de cette ampleur. J'étais en Chine — j'y suis allé à quelques reprises ces dernières années — et j'ai emprunté la jetée qui mène à probablement l'un des plus importants ports à conteneurs au monde, à Shanghai. Ils ont construit une route sur l'océan. Je crois qu'elle mesure 32 kilomètres, et elle a été construite en un an et demi. Je ne pense pas que le Canada ait la réputation de pouvoir construire aussi rapidement.

À l'origine, le plan prévoyait une ouverture en 2021, et maintenant nous disons que ce sera en 2018. C'est assez facile à faire sur un morceau de papier, mais qu'avez-vous fait pour accélérer ce projet de trois ans, projet qui est l'un des plus importants à être entrepris depuis bien longtemps? Soudainement, nous disons que nous allons l'abréger de trois ans. Je ne veux pas gâcher la fête, mais j'ai l'impression qu'en 2018, nous dirons que le projet accuse un retard de trois ans.

Mme Pham : Bien entendu, ce n'est pas une option. Je peux vous assurer que depuis que nous avons annoncé qu'il s'agirait d'un partenariat public-privé, nous avons respecté toutes les échéances. Nous avons une équipe dévouée composée de spécialistes de Transports Canada, de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, de Justice Canada et de PPP Canada. Nous avons réuni une équipe interministérielle pour ce projet.

Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec nos experts-conseils, la firme d'ingénierie Arup. Son savoir-faire a fait une énorme différence qui nous a permis d'avancer à ce rythme. Jusqu'à maintenant, nous avons respecté toutes les échéances et il n'y a aucune marge pour un dérapage. L'équipe interministérielle et nos experts-conseils travaillent très fort, comme vous pouvez l'imaginer, et ce 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Nous avons accès aux ingénieurs les plus expérimentés au monde en nos experts-conseils de sorte que les personnes qui construisent des ponts à Hong Kong, par exemple, et ailleurs dans le monde contribuent à cet exercice et ce projet.

Le sénateur Plett : Bien entendu, je tiens à vous encourager et j'espère que c'est ce qui se produira.

Le sénateur Housakos a posé une question au sujet des entreprises canadiennes qui participent au projet. Vous avez dit que l'expert-conseil était Arup?

Mme Pham : C'est exact.

Le sénateur Plett : D'où vient-il?

Mme Pham : Il s'agit d'une firme internationale, qui est par contre très présente au Canada. Elle a des bureaux à Toronto et à Montréal. Selon les dernières données que j'ai consultées, je pense qu'elle a réuni quelque 100 personnes de ses propres ressources humaines qui travaillent un peu partout dans le monde, y compris des experts établis au Canada, pour contribuer au projet.

Le sénateur Plett : Merci.

Le sénateur MacDonald : Une fois la construction du nouveau pont terminée, ai-je raison de supposer qu'il y a un échéancier pour mettre fin à la circulation sur le pont Champlain? Peut-on raisonnablement supposer aussi que le seul avenir du pont Champlain est qu'il sera démoli?

Mme Pham : Une fois le nouveau pont en service, la circulation sera déviée vers le nouveau pont, puis le pont Champlain sera fermé et démoli. Il s'agira d'un autre projet que nous entreprendrons à ce moment-là, mais nous ne garderons pas le pont Champlain puisqu'il ne sera plus en service.

Le sénateur MacDonald : Une fois le nouveau pont terminé, le pont Champlain deviendra un actif fédéral non utilisé. Je suppose que sa démolition sera aussi très dispendieuse. Qui en assumera le financement? Est-ce que les fonds proviendront alors des revenus tirés du nouveau pont?

Mme Pham : Comme vous le savez, le pont Champlain relève actuellement de la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain. Il y a énormément de matériaux et de béton dans le pont actuel. La démolition est également une occasion de vendre les matériaux actuellement dans le pont, mais cette discussion doit être entreprise avec la société.

Le sénateur MacDonald : Avons-nous une idée de ce qu'il en coûtera pour démolir le pont?

Mme Pham : Je ne dispose pas de cette information, mais si le comité le désire, j'essaierai de l'obtenir.

Le président : Nous vous en serions reconnaissants.

Le sénateur MacDonald : Quoi qu'il en soit, on a retenu la formule de l'utilisateur payeur, et je trouve que c'est excellent.

Le sénateur Housakos : Ma dernière question du second tour porte sur le volet du financement du processus d'appel d'offres. Il s'agit de toute évidence de l'un des plus importants projets de travaux publics du pays qui coûtera des milliards et des milliards de dollars. Le financement du projet constitue un élément très important. Je ne connais pas beaucoup d'institutions canadiennes qui ont les ressources nécessaires pour se lancer seules dans un projet de cette ampleur.

Avez-vous réalisé suffisamment d'études stratégiques pour nous donner l'assurance que les bénéficiaires nets du projet ne seront pas uniquement des institutions financières externes et internationales? Je crois qu'Arup est une entreprise d'ingénierie espagnole qui œuvre à l'échelle internationale et que ses institutions de même que les institutions chinoises et les institutions américaines sont les chefs de file lorsqu'il s'agit de projets internationaux de plusieurs milliards de dollars.

En fin de compte, c'est le gouvernement canadien qui est le garant de ce projet qui attire de nombreuses entreprises de partout dans le monde. Qu'avons-nous fait pour nous assurer qu'il y aura un volet canadien important dans le financement du projet?

Mme Pham : Le volet du financement du projet est très important pour ce qui est de la façon dont nous allons évaluer les soumissionnaires retenus. Comme vous pouvez l'imaginer, nous ne pensons pas qu'une entreprise seule sera en mesure de réunir tout le savoir-faire et tout le financement pour ce projet. Il y a des consortiums, notamment des partenaires financiers, qui discutent en ce moment de la présentation d'une proposition qui comprendra la meilleure capacité qui soit sur le plan du financement, dont des institutions canadiennes, mais aussi pour la construction de ponts et d'autoroutes. Ce travail est en cours en ce moment.

Le sénateur Housakos : Faisons-nous quelque chose de spécial pour nous assurer que le projet intéressera des institutions canadiennes et qu'elles auront un avantage par rapport aux institutions financières internationales?

Mme Pham : Nous n'avons pas de critères qui avantageraient les entreprises ou les institutions canadiennes parce que, dans le cadre du PPP, nous voulons vraiment que ce projet soit le mieux construit et le plus rentable pour les Canadiens. Cependant, étant donné la portée et l'ampleur du projet, il y aura des avantages économiques pour des entreprises canadiennes — nous en avons la certitude — à de nombreux égards, soit dans le secteur de la construction, soit dans le secteur financier.

Le président : J'ai quelques questions et peut-être un commentaire concernant ce que le sénateur Plett a dit à propos de votre optimisme pour 2018. Je faisais partie du comité il y a huit ans lorsque nous avons commencé à parler de la construction du pont Ambassador — et je pense qu'il est ouvert cette semaine. Mais comme vous le savez, c'est encore dans les journaux ce matin parce que nous ne nous sommes pas entendus avec les Américains sur la façon de le construire. En fait, ils nous demandent de payer pour leurs propres services de douanes de sorte que c'est une bonne aubaine pour eux.

Tout l'argent est avancé par le gouvernement fédéral, et le pont n'est pas plus près d'être construit aujourd'hui qu'il l'était au moment où je suis devenu membre du comité, et encore moins comme président. J'étais le président du comité lorsque le ministre des Transports Cannon a comparu devant nous et nous a promis le pont Ambassador avant de quitter.

Je suis donc un peu comme le sénateur Plett en ce sens que je suis un peu pessimiste quant à votre objectif, mais je vous souhaite tout le succès possible.

J'ai deux questions, l'une portant sur l'incidence sur les autres ponts; je veux parler du fait qu'il y aura des péages — il semble que la loi proposée ne laissera aucun doute à ce sujet. J'ai lu dans le journal ce matin que l'on dévierait la circulation automobile vers les autres ponts qui enjambent le Saint-Laurent et que, selon le montant des péages, cela aura une incidence sur le nombre de personnes qui utiliseront les autres ponts. Deux des trois autres ponts nous appartiennent et les péages auront une incidence sur l'utilisation de ces ponts. Le coût ne sera pas payé par les péages; il sera assumé par le gouvernement fédéral qui est propriétaire du pont Jacques-Cartier. À cet égard, je n'ai pas connaissance d'une réponse selon laquelle on prend en considération les sommes qui seront consacrées par le gouvernement fédéral aux autres ponts.

Ma deuxième question n'a pas été posée ce matin, mais elle a fait l'objet d'intenses négociations, à ce qu'on me dit, avec le gouvernement du Québec : le tramway. Le gouvernement du Québec veut des capacités de transport en commun sur ce pont, et il veut avoir la possibilité qu'un tramway puisse traverser le pont de la Rive-Sud à la Rive- Nord. Avez-vous des renseignements à ce sujet?

Mme Pham : Oui, nous travaillons étroitement avec les représentants du Québec à un projet de train léger. Le pont comptera trois corridors : un vers Montréal, un autre de Montréal vers la Rive-Sud, et le corridor central sera réservé au transport en commun.

Dans nos discussions avec les représentants du Québec en ce moment, on nous a demandé qu'un corridor soit aménagé pour un train léger. Nous avons donc travaillé très étroitement avec eux parce que nous voulons planifier cet aspect dès le départ, comme vous pouvez l'imaginer. Ce travail est en cours.

Le président : Y a-t-il des discussions avec vos collègues de l'organisation du pont de Detroit afin de déterminer si vous pouvez améliorer leur processus? Selon ce processus, cela devait se dérouler un peu plus rapidement que ce qui avait été promis. Étant donné qu'il est toujours préférable de tirer parti des leçons apprises que d'essayer d'apprendre par soi-même, y a-t-il des discussions avec ces représentants sur la façon pour vous d'améliorer le processus afin que nous n'ayons pas le même problème?

Mme Pham : Certainement. Je dirais qu'étant donné que nous avons accéléré le calendrier du nouveau pont pour le Saint-Laurent — et le processus d'approvisionnement est en cours —, il a été lancé officiellement de sorte que nous ne pouvons plus faire marche arrière. Ce que nous faisons au sujet du nouveau pont pour le Saint-Laurent est également suivi de très près par nos collègues du passage international de la rivière Detroit parce qu'ils seront également appelés à suivre le même processus.

Le président : Sénateur Eggleton, il y avait un autre pont — un pont de la ville de Québec — qui appartenait déjà au gouvernement fédéral. Cependant, les tribunaux sont saisis de ce dossier parce qu'il a été transféré au CN, à la province et à la municipalité de sorte que les administrations se poursuivent l'une l'autre. Ce n'est donc pas un précédent que nous soyons les propriétaires de ce pont. C'est probablement une coïncidence qu'ils se trouvaient tous au Québec et ils ont probablement tous été construits au terme d'une campagne.

Merci d'être venue, madame Pham.

[Français]

Demain nous traiterons de la section 16 qui touche les services d'itinérance dans les télécommunications mobiles. Nous entendrons des représentants du CRTC et d'Industrie Canada.

[Traduction]

J'aimerais que les membres du comité de direction restent; nous tiendrons une brève réunion après quoi nous lèverons la séance.

(La séance se poursuit à huis clos.)


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