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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 6 - Témoignages du 7 mai 2014


OTTAWA, le mercredi 7 mai 2014

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 45, pour poursuivre son étude de la teneur des éléments des sections 15, 16 et 28 de la partie 6 du projet de loi C-31, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.

SUJET : Partie 6 — Section 16 — Loi sur les télécommunications.

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare la séance du Comité permanent des transports et des communications ouverte.

Ce soir, nous continuons notre étude du projet de loi C-31, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 11 février 2014 et mettant en œuvre d'autres mesures.

On a demandé au comité de faire une étude préliminaire des sections 15, 16 et 28. Nous examinons maintenant la section 16, qui modifie la Loi sur les télécommunications, afin de fixer un plafond à la somme qu'une entreprise canadienne peut exiger d'une autre entreprise canadienne pour certains services d'itinérance, ou « roaming fees ».

[Traduction]

Nos premiers témoins, représentant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, sont Chris Seidl, directeur exécutif des télécommunications, et Alastair Stewart, conseiller juridique principal.

Je vous invite, messieurs, à présenter votre exposé.

[Français]

Chris Seidl, directeur exécutif, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) : C'est avec plaisir que nous nous présentons devant vous alors que vous faites l'étude de la section 16 du projet de loi C-31. Ce document législatif propose d'apporter des modifications à la Loi sur les télécommunications, y compris une disposition visant à plafonner les tarifs des services d'itinérance que les entreprises canadiennes de services sans fil imposent à d'autres entreprises canadiennes de services sans fil.

Permettez-moi de commencer en relatant certains faits au sujet du secteur canadien du sans fil. Ce secteur, qui compte 28 millions d'abonnés, a connu une forte croissance ces dernières années et joue un rôle essentiel dans l'économie canadienne. En 2012, les entreprises de services sans fil ont déclaré des revenus totaux de plus de 20 milliards de dollars, qui représentent 46 p. 100 de l'ensemble des revenus des télécommunications, qui se sont établis à 43,9 milliards de dollars. D'après l'Association canadienne des télécommunications sans fil, plus de 280 000 personnes travaillent au Canada grâce à l'industrie du sans fil.

[Traduction]

De même, les téléphones intelligents n'ont jamais été aussi populaires. Les Canadiens sont de plus en plus nombreux à utiliser principalement ces appareils pour parler, texter, naviguer dans Internet, télécharger des données et regarder des vidéos et des émissions de télévision. De 2011 à 2012, le pourcentage de Canadiens qui possédaient un téléphone intelligent est passé de 38 p. 100 à 51 p. 100.

Actuellement, 99 p. 100 de la population dispose d'un accès aux réseaux sans fil qui soutiennent les téléphones intelligents, les tablettes et autres appareils qui permettent d'accéder aux données d'Internet. Par ailleurs, les entreprises procèdent à des investissements importants dans les réseaux de la prochaine génération, que l'on appelle les réseaux de technologie d'évolution à long terme ou réseaux LTE. Le pourcentage de Canadiens qui peuvent accéder à ces réseaux plus rapides est passé de 45 p. 100 en 2011 à 72 p. 100 en 2012. Une telle atteinte est impressionnante lorsque l'on songe aux défis que représente la taille de la géographie du Canada.

Nous sommes présentement à collecter l'information pour l'année 2013. Les données mises à jour feront partie de notre publication annuelle, le Rapport de surveillance des communications.

Lorsque nous examinons le rendement global du secteur du sans fil, il importe de nous rappeler qu'il existe un marché de détail et un marché de gros. Sans surprise, le marché de détail représente les services que les entreprises offrent aux consommateurs canadiens. L'an dernier, le CRTC a mis de l'avant un code sur les services sans fil qui contribue à un marché de détail plus dynamique. Grâce au code, les Canadiens peuvent faire des choix éclairés quant aux services et aux entreprises qui répondent le mieux à leurs besoins. Un des éléments du code permet aux Canadiens d'annuler sans frais leurs contrats après deux ans ou plus tôt. Le code offre également aux abonnés de services sans fil des protections supplémentaires, notamment un plafond sur les frais des services d'itinérance au pays et à l'étranger.

De son côté, le marché du gros porte sur des ententes entre entreprises. En 2012, les revenus générés par ces accords, y compris les services d'itinérance, s'élevaient à 800 millions de dollars. Au Canada, plusieurs entreprises de services sans fil possèdent leurs propres réseaux afin de servir leurs clients dans des zones géographiques précises. Cependant, elles doivent se tourner vers les réseaux d'autres entreprises lorsque leurs clients se déplacent à l'extérieur de leur zone de couverture. Voilà ce qu'on appelle l'itinérance. En vertu des ententes sur les services d'itinérance, les différentes entreprises de services sans fil mettent leurs propres réseaux à la disposition de l'une et de l'autre entreprise. Cela fait en sorte que les Canadiens peuvent continuer d'utiliser leurs cellulaires et autres appareils mobiles lorsqu'ils sont en déplacement.

Le CRTC veut s'assurer qu'il existe un niveau de concurrence durable au sein du secteur du sans-fil aujourd'hui et pour les années à venir. Récemment, nous avons publié un ambitieux plan triennal qui nous guidera jusqu'en 2017, nous y avons déterminé différentes actions pour atteindre ce but. Aussi, j'aimerais vous présenter une mise à jour au sujet des consultations publiques que nous avons amorcées récemment sur le secteur du sans-fil, ainsi que les projets que nous avons prévus pour les prochains mois.

En 2013, le CRTC a mené un exercice de collecte de données sur les tarifs et les modalités entourant les ententes sur les services d'itinérance au Canada. Selon les renseignements que nous avons obtenus, nous avons appris que certaines entreprises de services sans fil facturent ou comptent facturer à de plus petits concurrents des tarifs de gros pour les services d'itinérance supérieurs à ceux qui sont facturés aux entreprises américaines. En décembre 2013, nous avons amorcé une consultation publique afin de déterminer si ces arrangements plaçaient injustement certaines entreprises dans une situation défavorable. À l'heure actuelle, nous sommes à examiner les commentaires que nous ont transmis le secteur du sans-fil, le public et autres parties intéressées. Nous prévoyons rendre une décision au cours des prochains mois.

Plus tôt cette année, le CRTC a amorcé une deuxième consultation publique sur le secteur du sans-fil au Canada. Cette consultation a une plus grande portée que celle dont je viens de vous parler, puisqu'elle vise à examiner si le marché du sans-fil mobile est suffisamment concurrentiel. En particulier, nous nous penchons sur les services de gros, dont les services d'itinérance, que les entreprises des services sans fil obtiennent des autres entreprises de services sans fil.

[Français]

Le CRTC a sollicité des observations sur trois questions. D'abord, quel est l'état de la concurrence dans le marché en ce qui concerne les services sans fil de gros? Deuxièmement, quelle est l'incidence du marché du sans fil de gros sur les services que reçoivent les consommateurs canadiens et sur les prix qu'ils paient? Enfin, a-t-on besoin d'établir une plus grande surveillance réglementaire pour le marché du sans fil de gros?

La date limite pour soumettre une première série d'observations a été fixée au 15 mai. Nous étudierons les présentations au moment de préparer l'audience publique qui se tiendra dans la région de la capitale nationale à la fin de septembre.

[Traduction]

Avec ces actions, le CRTC veut s'assurer que le caractère concurrentiel du secteur du sans-fil soit durable et procure des avantages aux Canadiens. Parmi ceux-ci, soulignons l'accès à des réseaux de grande qualité et à des services novateurs à des prix raisonnables.

Le projet de loi C-31 propose de plafonner les tarifs pour les services sans fil d'itinérance au Canada, dans l'attente des consultations du CRTC dont je viens de parler. Le projet de loi C-31 établit la formule qui servirait à calculer le tarif de gros maximal pour les services de téléphonie, de données et de messagerie texte au pays qu'une entreprise de services sans fil peut facturer à une autre au Canada. Advenant que le Parlement adopte le projet de loi, le CRTC sera chargé de mettre en œuvre les modifications proposées.

C'est avec plaisir que nous répondrons maintenant à vos questions. Cela dit, le CRTC mène actuellement plusieurs instances, monsieur le président, et j'espère que les membres du comité comprendront que, selon la question, nous devrons nécessairement limiter nos réponses, et ce, pour préserver l'intégrité de ces instances.

Merci.

Le président : Je vous comprends, monsieur.

Le sénateur Mercer : Merci, messieurs, de votre présence ici. Je trouve troublant le fait que vous ayez appris, dans le cadre de votre exercice de collecte de données en 2013, que certaines entreprises de services sans fil nationales facturent ou comptent facturer à de plus petits concurrents des tarifs de gros pour les services d'itinérance supérieurs à ceux qui sont facturés aux entreprises américaines.

Ce genre de prix d'éviction n'est pas rare dans l'industrie du transport aérien, les grosses sociétés poussant à la ruine des petites sociétés. Notre gouvernement et d'autres gouvernements ont consacré beaucoup de temps à veiller à ce que le spectre soit élargi et à ce qu'il y ait une concurrence. Y a-t-il présentement des règles qui permettraient de régler ce problème?

M. Seidl : Le CRTC s'est abstenu ou a cessé de réglementer les tarifs dans l'industrie du sans-fil vers le milieu des années 1990. Nous avons cependant conservé certains pouvoirs dans le cadre de cette abstention. En particulier, nous maintenons le pouvoir de faire enquête dans tout cas de discrimination injuste ou de préférence injustifiée. Nous avons entrepris une instance en décembre 2013 afin d'examiner ces cas particuliers. À l'heure actuelle, aucun règlement ne régit les tarifs de gros que les entreprises de sans-fil peuvent facturer à d'autres entreprises.

Le sénateur Mercer : Vous procédez à l'étude, publiez vos constatations, et on espère que les pressions exercées par le public entraîneront certains changements?

M. Seidl : Comme je l'ai mentionné, nous avons deux instances en cours. La première porte sur la question précise de la discrimination injuste. À l'issue de cette instance, nous pourrions arriver à une constatation et, si un problème existe, introduire une certaine forme de règle pour contrôler les tarifs, au besoin. La deuxième instance est de portée beaucoup plus large, car nous étudions le marché du sans-fil de gros dans son ensemble, y compris les services d'itinérance et d'autres services. Dans le cadre de cette instance, nous pourrions, si nous le jugeons approprié, réappliquer certains des pouvoirs que nous avons, allant même jusqu'à réglementer de nouveau les tarifs de gros.

Le sénateur Mercer : Dans la catégorie des autres services, étudiez-vous l'accessibilité par les petites entreprises aux réseaux de tours établis que les autres entreprises pourraient avoir à l'échelle du pays?

M. Seidl : Notre instance touche tous les services de gros dans le marché du sans-fil, y compris les tours. Cela fait partie de la portée de la seconde instance. Nous avons aussi demandé à recevoir toute suggestion d'autres services que nous pourrions examiner.

Le sénateur Mercer : Radio-Canada a abandonné un certain nombre de tours il y a quelques années quand la société est passée de l'analogique au numérique. J'ignore si ces tours sont utilisées pour les services téléphoniques ou pas. Le savez-vous?

M. Seidl : Nous ne disposons pas encore des constatations concernant ce dossier en particulier. Celles-ci seront produites vers la fin mai cette année. Nous procédons à la collecte de données sur les tours qu'utilisent actuellement les particuliers à ce stade. Je n'ai pas les détails avec moi ici.

Le président : Vous pourriez peut-être les transmettre au greffier, une fois qu'ils seront publiés?

M. Seidl : Si cette information sera publiée. Une grande partie des renseignements est confidentielle.

Le président : Si elle est publiée. Merci.

La sénatrice Batters : Je vous remercie de votre présence ce soir. J'ai une ou deux petites questions. Pouvez-vous me dire quelles économies annuelles devraient résulter pour les consommateurs du changement proposé? À mon avis, c'est un changement bienvenu et bien des consommateurs constateront la différence. Avez-vous une estimation de l'économie annuelle qui sera réalisée?

M. Seidl : Nous ne disposons pas de chiffres précis en ce qui a trait aux économies éventuelles. Comme je l'ai mentionné, le marché du gros au Canada en 2012 s'élevait à 800 millions de dollars, y compris tous les services de gros, et notamment ceux des entreprises internationales et des usagers itinérants étrangers qui viennent au Canada. En réalité, s'il y avait une réduction des frais facturés par une entreprise de services sans fil à une autre entreprise de services sans fil, c'est à cette entreprise de services sans fil de déterminer ce qu'elle fait de ces économies, le cas échéant. Elle pourrait les transmettre aux consommateurs. Elle pourrait offrir des services novateurs aux consommateurs. Elle pourrait réduire les coûts et utiliser ces fonds pour l'élargissement de ces réseaux. Les choix qu'un fournisseur de services pourrait offrir sont multiples.

La sénatrice Batters : J'étais récemment aux États-Unis pour assister au mariage de ma sœur. Quand nous avons atterri aux États-Unis, j'ai reçu un message texte qui m'a frappée de terreur : « Bienvenue aux États-Unis. Vous êtes maintenant en itinérance hors du réseau de SaskTel. » Je suis de la Saskatchewan. Les tarifs de services d'itinérance vont jusqu'à 1,50 $ la minute, 10 $ par mégaoctet et 20 cents par message texte. Les tarifs sont inférieurs lorsqu'on utilise des forfaits de voyage et autres services du genre. En juin, SaskTel imposera une limite à tous les frais de transmission de données pour aider les gens à gérer leur usage. D'ici là, tous les frais de transmission de données s'appliquent. En ce qui concerne les limites appliquées à la transmission de données en juin, est-ce le résultat d'une initiative du CRTC, ou une initiative de SaskTel seulement?

M. Seidl : Dans le cadre du code sur les services sans fil que j'ai mentionné plus tôt, nous avons imposé une limite aux frais des services d'itinérance au pays et à l'étranger. Cette limite s'établit à 100 $. L'entreprise de télécommunications n'est pas autorisée à facturer à l'utilisateur plus que ce montant au cours d'un mois donné à un moment donné, et elle est aussi supposée avertir le consommateur quand celui-ci a atteint cette limite.

La sénatrice Batters : Cela éviterait certaines des histoires d'horreur qu'on entend au sujet de factures de téléphone comportant 8 000 $ de frais d'itinérance.

Le sénateur Mercer : Quand j'atteins la limite et que l'entreprise m'en informe, puis-je quand même utiliser le service, ou dois-je payer un supplément?

M. Seidl : À ce stade, vous avez un choix. Si vous voulez continuer et aller au-delà de la limite de 100 $, vous pouvez communiquer avec votre fournisseur de services cellulaires ou aller à un site web et accepter de poursuivre. Vous devez donner un consentement exprès signifiant que vous voulez poursuivre au-delà de ce montant.

Le sénateur Mercer : Il n'y a aucun avantage; on est simplement informé quand on atteint ce niveau.

M. Seidl : L'entreprise ne pourra pas vous facturer davantage à moins que vous n'ayez donné votre consentement exprès.

Le sénateur Eggleton : Quels mécanismes garantissent que les économies découlant de ce changement seront transmises aux consommateurs?

M. Seidl : Le conseil s'efforce vraiment d'instaurer suffisamment de concurrence pour qu'il y ait un marché au détail dynamique. Nous examinons les conditions de l'offre et de la demande potentielles et les obstacles à l'accès à ces marchés. Lorsque des problèmes de concurrence entrent en jeu, nous tentons d'éliminer les éléments qui en sont la cause et de laisser les forces du marché déterminer le prix approprié pour les consommateurs.

Si cela constitue pour certains fournisseurs un obstacle pour ce qui est d'offrir de meilleures solutions aux consommateurs, on peut donc s'attendre à ce qu'ils soient en mesure de soutenir la concurrence et d'offrir de meilleures solutions, mais rien ne le garantit.

Le sénateur Eggleton : Pas de garantie, sauf que le gouvernement va l'intégrer dans ce projet de loi. Il veut voir rapidement des résultats. Il reporte les considérations à long terme le temps que vous complétiez votre étude, mais je crois qu'il recherche ici certains résultats rapides, à court terme, pour les consommateurs. Je crois comprendre que c'est l'objectif recherché avec ce projet de loi. Il ne semble pas que vous puissiez l'atteindre.

M. Seidl : Si les changements à la loi entraînent une réduction du prix pour ces entreprises de services sans fil, elles bénéficieront alors d'économies.

Le sénateur Eggleton : Comment peut-on savoir qu'elles transmettront ces économies?

M. Seidl : Cela revient aux entreprises de services sans fil, mais si le marché est concurrentiel, elles devront s'efforcer de soutenir la concurrence.

Le sénateur Eggleton : Je me demande s'il est suffisamment concurrentiel. Merci.

La sénatrice Merchant : Merci et bienvenue. Ma question est semblable aux précédentes. Y a-t-il des pénalités imposées aux entreprises? Si un consommateur présente une plainte, y aura-t-il un genre d'ombudsman auquel le consommateur pourrait faire appel et adresser sa plainte? Comment proposez-vous de vous assurer que les consommateurs ont un moyen par lequel déposer leurs plaintes?

M. Seidl : Il y a le commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunications, et les consommateurs peuvent donc soulever leurs problèmes auprès du bureau du CPRST. Cet organisme traite un assez grand nombre de plaintes portant sur les services sans fil. C'est probablement le domaine qui connaît la plus grande croissance pour cet organisme. Il tente de rectifier la situation auprès du fournisseur et du consommateur.

Comme je l'ai mentionné, la loi porte sur le marché du gros, et cela vise le marché du détail. Je le répète, il est question des entreprises de services sans fil et des ententes qu'elles ont entre elles. À ce niveau, il n'est pas question directement du marché du détail.

La sénatrice Merchant : Comment informez-vous les consommateurs? S'il y a un point de réception des plaintes quelque part, comment nous en informez-vous? Y a-t-il un numéro?

M. Seidl : Nous exigeons des fournisseurs eux-mêmes qu'ils annoncent l'existence du CPRST à leurs consommateurs. L'information se trouve aussi dans notre site web. Le CPRST diffuse de l'information dans les collectivités afin de faire en sorte que les consommateurs sachent qu'ils peuvent s'adresser à cet organisme s'ils n'obtiennent pas une réponse satisfaisante du fournisseur de services.

Le président : S'il n'y a pas d'autres questions, j'aimerais remercier les témoins.

J'aimerais dire au comité que nous avons un léger problème, car les témoins suivants assistent à une réunion dans une autre salle de comité. Je demanderais au greffier de voir s'ils peuvent venir ici. Sinon, nous devrons attendre que l'autre comité finisse. Nous pouvons travailler au rapport en attendant.

Nous allons libérer les témoins. Monsieur Stewart et monsieur Seidl, merci.

Nous avons un autre problème à régler.

Nous poursuivrons à huis clos. Êtes-vous d'accord?

Des voix : D'accord

(La séance se poursuit à huis clos.)

[Français]

(La séance publique reprend.)

Le président : Honorables sénateurs, nous reprenons la séance et continuons l'étude de la section 16 du projet de loi C-31 qui modifie la Loi sur les télécommunications afin de fixer un plafond à la somme qu'une entreprise canadienne peut exiger d'une autre entreprise canadienne pour certains aspects des services d'itinérance.

[Traduction]

Nos témoins du deuxième groupe d'experts viennent d'Industrie Canada. J'aimerais les remercier. Ils sont normalement des membres du personnel de soutien dans l'autre salle, et ils font un effort pour nous rendre service; par conséquent, nous tenterons de tenir compte de leurs besoins et de ne pas les retenir ici si les choses sont urgentes de l'autre côté.

Nous avons Pamela Miller, directrice générale, Politique des télécommunications, à Industrie Canada, et Christopher Johnstone, directeur principal, Politiques d'encadrement industriel, dans le même ministère.

J'invite les témoins à présenter leur exposé.

[Français]

Pamela Miller, directrice générale, Politique des télécommunications, Industrie Canada : Bonsoir, c'est avec plaisir que nous sommes ici aujourd'hui pour expliquer l'article 16, qui concerne les tarifs des services d'itinérance sans fil, et pour répondre à vos questions.

[Traduction]

Tout d'abord, j'aimerais expliquer ce qu'on entend par tarifs des services d'itinérance dans la présente modification. Cette modification vise les tarifs des services d'itinérance de gros, c'est-à-dire les tarifs facturés d'une entreprise à une autre pour l'utilisation de leurs réseaux respectifs. Pour que leurs clients puissent avoir accès à leurs services hors de leur réseau, les entreprises de services sans fil doivent conclure des ententes de services d'itinérance avec d'autres fournisseurs de services sans fil. Cette question est particulièrement importante pour les nouveaux concurrents qui font leur arrivée sur le marché.

Cet article modifierait la Loi sur les télécommunications afin d'interdire aux entreprises de télécommunications canadiennes de facturer à leurs concurrents canadiens des tarifs d'itinérance plus élevés que les tarifs qu'ils facturent à leurs propres clients.

Industrie Canada oblige les fournisseurs de services à offrir des services d'itinérance à d'autres fournisseurs, mais le ministère ne réglemente pas le prix de cet accès.

Nous comprenons que les tarifs d'itinérance facturés par les principales entreprises de services sans fil au Canada à d'autres fournisseurs à l'échelle nationale sont considérablement supérieurs aux tarifs facturés à leurs propres clients — c'est-à-dire que leurs prix de gros sont plus élevés que leurs prix au détail.

Ces tarifs élevés des services d'itinérance sans fil ont un effet négatif sur la concurrence, puisque les nouveaux fournisseurs sur le marché doivent eux-mêmes acquitter ces coûts, ou les transférer à leurs clients.

Dans la présentation des délibérations actuelles du CRTC, le Bureau de la concurrence a indiqué que les titulaires disposent d'un pouvoir sur le marché de détail, et que par conséquent, ils sont incités à s'assurer que les nouveaux fournisseurs ne sont pas des concurrents entièrement efficaces.

Les présentes modifications définissent les services d'itinérance sans fil qui seraient assujettis à une limite : services téléphoniques sans fil, services de messagerie texte et services de données. De plus, les modifications comprennent une formule pour le calcul de la limite, en fonction du tarif moyen au détail d'un fournisseur pour un service donné.

En ce qui concerne la façon dont cette mesure est liée aux processus de réglementation du CRTC, le CRTC sera responsable de la mise en application de la limite pour les services d'itinérance. Le CRTC a lancé deux procédures pour examiner les services d'itinérance sans fil de gros, et le gouvernement a indiqué que cette mesure sera en place jusqu'à ce que le CRTC ait pris une décision au sujet des tarifs des services d'itinérance.

Les modifications prévoient qu'un tarif d'itinérance de gros établi par le CRTC aurait la priorité sur le tarif prévu par la loi.

En résumé, ces modifications prévoient une limite des tarifs facturés d'une compagnie à l'autre pour les services d'itinérance sur leurs réseaux respectifs. L'imposition d'une limite pour les tarifs d'itinérance à l'échelle nationale aura pour effet d'aider les consommateurs canadiens à profiter d'une concurrence accrue dans le marché des services sans fil.

Cela résume brièvement la proposition. Nous répondrons avec plaisir aux questions. Merci.

Le sénateur Eggleton : Quels mécanismes permettraient de s'assurer que les économies seront transmises aux consommateurs? Si je comprends bien, c'est là l'objectif de cet exercice. Si le CRTC envisage la perspective à long terme, le gouvernement, lui, veut voir des résultats rapides. Comment cela peut-il être assuré? Quelquefois, ces entreprises ne transmettent pas les économies aux consommateurs.

Christopher Johnstone, directeur principal, Politiques d'encadrement industriel, Industrie Canada : La modification vise les tarifs de gros. Elle ne vise pas les tarifs de détail. Ceci étant dit, les nouvelles entreprises sur le marché tentent, de toute évidence, d'être aussi concurrentielles que possible.

À l'heure actuelle, les tarifs de gros étant à ce niveau, elles doivent soit absorber le coût, ce qui est manifestement difficile pour les petites entreprises, soit transférer ces coûts à leurs clients; ce sont les seules options qu'ont les nouvelles petites entreprises sur le marché à l'heure actuelle.

Le sénateur Eggleton : Ainsi donc, ce sont seulement les nouvelles petites entreprises qui auront des économies à transférer à leurs clients, et non pas les grosses entreprises, n'est-ce pas?

M. Johnstone : Cela ne se limite pas à une taille ou un type précis d'entreprise. La mesure concerne toutes les entreprises, mais celles qui pourront en bénéficier le mieux seront, de toute évidence, les nouvelles entreprises sur le marché.

En décembre, quand le gouvernement a annoncé cette mesure, nous avons noté que les tarifs de services d'itinérance que les plus grosses entreprises de services sans fil au Canada facturent aux autres fournisseurs de services du pays peuvent être jusqu'à 10 fois plus élevés que ceux qu'elles facturent à leurs propres clients.

Le sénateur Eggleton : Par conséquent, si vous êtes client de l'une de ces grosses entreprises, il est possible que vous ne bénéficiiez d'aucune économie.

M. Johnstone : Il y a des zones dans le pays où les grosses entreprises comptent sur les frais d'itinérance prélevés auprès d'autres entreprises.

Pour ce qui est des services d'itinérance à l'intérieur du pays, cependant, les grosses entreprises ne facturent généralement pas ces services à leurs clients. En général, leurs forfaits couvrent l'ensemble du pays.

Le sénateur Eggleton : Alors toute la question des économies possibles pour les consommateurs est mise sur la table, mais elle pourrait ne pas se concrétiser pour un grand nombre de personnes.

M. Johnstone : La loi met l'accent sur le problème des tarifs de gros à l'intérieur du pays, des tarifs qui peuvent être 10 fois plus élevés que ceux que ces entreprises facturent à leurs propres clients. Là encore, c'est un problème qui a été soulevé à maintes reprises, surtout par les nouvelles entreprises sur le marché. C'est un facteur qui limite leur capacité d'être concurrentielles.

Le sénateur Mercer : Je vous remercie de votre présence. En 2013, le CRTC a mené un exercice de collecte de données à l'issue duquel il a appris que certaines entreprises de services sans fil facturent ou comptent facturer à de plus petits concurrents des tarifs de gros pour les services d'itinérance supérieurs à ceux qu'elles facturent aux entreprises américaines.

Il me semble que c'est là une pratique de prix d'éviction conçue pour un objectif précis, c'est-à-dire expulser les petites entreprises du marché, car personne ne peut survivre à ce niveau de prix établis.

Je suis surpris, en fait, que le Bureau de la concurrence ne puisse pas intervenir dans cette question de prix d'éviction, surtout quand cela touche un spectre que le gouvernement lui-même a établi. Le gouvernement a consacré beaucoup de temps, il faut le dire, à tenter d'encourager la venue de nouveaux acteurs dans l'industrie, mais il n'a prévu aucune protection pour eux contre l'établissement de prix d'éviction et ces frais de services d'itinérance de gros exorbitants et scandaleux.

Mme Miller : Le Bureau de la concurrence a présenté un mémoire dans le cadre de l'instance du CRTC. Il a en effet constaté que les grosses entreprises de services sans fil du Canada sont encouragées à appliquer des tarifs de services d'itinérance élevés pour s'assurer que les nouveaux venus ne soient pas et ne deviennent pas des concurrents efficaces. Par conséquent, les nouvelles entreprises sont plutôt limitées dans leur capacité d'offrir des produits attrayants sur le marché.

Le CRTC a présenté un certain nombre d'autres observations lors d'un exposé approfondi le 29 janvier 2014 dans le cadre de l'instance en cours. Je sais que vous venez tout juste d'entendre nos collègues du CRTC avant nous, et j'attire de nouveau votre attention sur l'exposé exhaustif présenté par le CRTC.

Le sénateur Mercer : Vous avez aussi parlé des tarifs de services d'itinérance que les grosses entreprises se facturent entre elles. Comme vous le savez, si vous avez un téléphone relié au réseau d'une entreprise donné et que vous vous trouvez dans une autre région du pays, il est possible que vous ne puissiez pas obtenir le service directement de votre entreprise et que vous finissiez donc par être en itinérance sur le réseau d'un autre fournisseur, ou encore que vous n'ayez pas de service du tout.

Les trois principales entreprises se facturent-elles ces tarifs exorbitants les unes aux autres, ou est-ce simplement ce qu'elles font pour les petites entreprises?

M. Johnstone : Les tarifs pratiqués entre les entreprises de télécommunications sont négociés entre ces entreprises et font partie d'accords confidentiels. Là encore, j'attire votre attention sur la déclaration faite en décembre voulant que les tarifs facturés par les plus grosses entreprises de services sans fil aux autres fournisseurs du pays puissent être jusqu'à 10 fois plus élevés.

Le sénateur Mercer : Vous venez de dire que ces accords entre les trois grosses entreprises sont confidentiels, mais nous savons qu'elles facturent aux petites entreprises des tarifs 10 fois plus élevés. Nous devons bien savoir quels sont les tarifs, sinon nous ne saurions pas qu'ils sont 10 fois plus élevés. On ne peut arriver à un résultat si on ne dispose pas des chiffres.

M. Johnstone : Le CRTC a demandé toutes ces données dans le cadre de l'instance qui se déroule actuellement.

Le président : C'est une question que j'ai déjà posée. Si ces chiffres peuvent être publiés, ils nous seront communiqués aussitôt que possible.

Le sénateur Mercer : Le public canadien et les personnes qui assistent à cette séance ce soir seront choqués et furieux d'apprendre que les entreprises sont autorisées à facturer des tarifs 10 fois plus élevés que celui qu'elles se facturent mutuellement et ce, dans le seul but de tenter d'expulser les petites entreprises du secteur.

Le président : J'aimerais remercier les deux témoins de nous avoir rendu le service de venir témoigner. Je sais qu'on vous demande à l'autre séance.

Si les sénateurs sont d'accord, nous lèverons la séance maintenant. La semaine prochaine, nous recevrons mardi matin le Centre pour la défense de l'intérêt public, et mercredi, l'Association des fabricants de pièces d'automobile.

Merci, monsieur Johnstone et madame Miller, de votre exposé et de votre présence, et j'espère que votre prochaine réunion sera tout aussi plaisante.

(La séance est levée.)


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