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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 7 - Témoignages du 11 juin 2014


OTTAWA, le mercredi 11 juin 2014

Le Comité permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 45, dans le cadre de son étude sur les défis que doit relever la Société Radio-Canada en matière d'évolution du milieu de la radiodiffusion et des communications.

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ouverte.

[Traduction]

Aujourd'hui, nous revenons à notre étude sur les défis que doit relever la Société Radio-Canada en matière d'évolution du milieu de la radiodiffusion et des communications. Notre témoin du jour est M. Tony Manera. Il a été président et chef de la direction de Radio-Canada de 1993 à 1995. Après avoir quitté l'organisation, il a publié, en 1996, A Dream Betrayed : The Battle for the CBC.

J'invite M. Manera à présenter son exposé.

[Français]

Tony Manera, à titre personnel : Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci de m'avoir accordé cette occasion de partager avec vous certaines idées pertinentes à votre mandat. J'espère que mes propos sauront vous être utiles et intéressants.

[Traduction]

Étant donné que je comparais à titre personnel et non à titre de représentant d'une organisation, je vais vous parler un peu de moi.

Je suis Italien de naissance, mais Canadien par choix. J'ai fait toutes mes études universitaires aux États-Unis. J'y ai initialement travaillé comme ingénieur électronique, dans l'industrie de la défense américaine, puis comme professeur de génie et de mathématiques. Quand je suis revenu au Canada, j'ai poursuivi ma carrière d'éducateur en enseignant à Ryerson, à Toronto, puis dans divers collèges communautaires de l'Ontario et de la Colombie-Britannique.

J'ai été président de collèges communautaires pendant 13 ans, dont 6 en Ontario, et 7 en Colombie-Britannique, après quoi je suis entré à Radio-Canada, au début comme vice-président des ressources humaines.

L'année suivante, j'étais nommé vice-président principal, et plus tard, président et chef de la direction, comme l'a dit monsieur le président. Pendant une courte période, j'ai aussi été président du conseil d'administration.

En 50 ans, j'ai été le seul président de Radio-Canada à ne pas être venu de l'extérieur de l'organisation. Et je suis le seul immigrant à avoir été président de Radio-Canada. Je suis également le seul à avoir écrit un livre au sujet de la société et, comme le président l'a indiqué, je suis le seul à avoir travaillé à Radio-Canada pendant plus de 10 ans, et ce, à diverses fonctions. Je suis également le plus vieil ancien président vivant de Radio-Canada, mais je suis sûr que vous vous en êtes rendu compte par vous-mêmes.

Mon attachement profond pour Radio-Canada me vient de mon engagement profond envers le Canada, mon pays. J'ai vécu et travaillé pendant de nombreuses années au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique, et j'ai voyagé dans toutes les provinces, ainsi que dans le Nord.

Grâce aux expériences que j'ai vécues, je suis plus que jamais convaincu que le Canada a besoin d'une institution nationale comme Radio-Canada pour nous rassembler tous, car le Canada est vaste et d'une grande diversité.

L'un des facteurs qui m'ont convaincu de quitter le monde de l'enseignement pour entrer à Radio-Canada, c'est son mandat d'informer et d'éclairer les Canadiens, comme le prévoit la Loi sur la radiodiffusion. Pour moi, cela correspondait très bien à mon rôle d'éducateur.

[Français]

Ma présentation aujourd'hui, a été inspirée par une émission récemment diffusée par le Réseau de l'information, la chaîne de Radio-Canada lancée durant ma présidence; c'est moi qui ai obtenu la licence pour le Réseau de l'information. L'émission couvrait les événements historiques qui se déroulaient lorsque Brian Mulroney était le premier ministre du Canada.

[Traduction]

Le libre-échange, la TPS, la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud, le Traité sur les pluies acides signé avec les États-Unis, l'entrée du Canada au G7, l'échec des accords du lac Meech et de Charlottetown — il s'agit d'événements cruciaux qui se sont tous produits pendant ces années de turbulence. Et je me pose la question : combien de Canadiens qui vont voter pour la première fois aux prochaines élections connaissent ces événements?

Vous savez, très peu de diplômés du secondaire les connaissent, parce que l'histoire n'est pas obligatoire en 11e et en 12e année. Les nouveaux Canadiens arrivés depuis ne sauraient rien de ces événements non plus, et les immigrants représenteront la part la plus importante de la croissance de la population canadienne, au cours des 50 prochaines années, étant donné que nous ne faisons pas assez de bébés au Canada.

Il faut donc des moyens de veiller à ce que les gens qui voteront pour la première fois possèdent une certaine compréhension de l'histoire — de l'histoire récente du Canada —, parce que ces événements, comme le libre-échange et l'environnement, sont toujours d'actualité, sous différentes formes. Il est très important que ces gens aient une idée de l'histoire, et c'est là qu'entre en jeu la partie du mandat de Radio-Canada qui vise à informer et éclairer les Canadiens.

En réalité, à bien y penser, Radio-Canada est la seule institution fédérale dont le mandat peut être qualifié d'éducatif, et les provinces peuvent ne pas aimer cela, car l'éducation au Canada est de compétence provinciale, mais le fédéral, dans toute sa sagesse, a trouvé le moyen de contourner cela.

Une autre émission intéressante du réseau anglais de Radio-Canada m'a inspiré, et ce n'est pas dans la même catégorie, mais c'est plutôt dans le volet du divertissement. C'est une émission d'enquête policière appelée Murdoch Mysteries. Cette émission n'était même pas une émission de Radio-Canada, au début. Elle était diffusée par un réseau privé, et je me suis dit que la place de cette émission était au réseau anglais de Radio-Canada. J'imagine qu'à Radio-Canada, on a lu dans mes pensées, car la saison suivante, elle présentait l'émission.

C'est une émission divertissante, et vous apprenez des choses sur le travail de détective. Quelqu'un se fait tuer et le détective fait enquête. Je suis sûr que le sénateur White connaît tout cela. On découvre qu'au début du XXe siècle, il était tout à fait correct qu'un policier obtienne des aveux en tabassant le suspect.

Le sénateur White : C'était le bon vieux temps.

Le président : Je tiens à rappeler aux membres du comité que notre séance est télévisée.

M. Manera : C'est juste. Il était aussi impossible pour un catholique romain de dépasser le rang de détective. Pourquoi? Parce que Toronto était une ville protestante, et je suis sûr que le sénateur Eggleton en sait un peu sur ce sujet. Naturellement, je ne cherche pas à dire qu'il est vieux. Je suis sûr que les choses se sont nettement améliorées à Toronto, sous sa gouverne.

Le sénateur Eggleton : J'ai été le premier maire catholique romain, en 1980. Il en a fallu, du temps.

M. Manera : Vous voyez? Vous avez été un précurseur, monsieur le sénateur.

Monsieur le président, il ne s'agit là que de deux exemples de la façon dont Radio-Canada s'acquitte de son mandat d'informer, d'éclairer et de divertir. Nous savons qu'en vertu de la loi, la programmation de Radio-Canada doit être typiquement canadienne et doit contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales.

Cela m'amène au rôle déterminant d'édification de la nation que joue le réseau français de Radio-Canada en favorisant la langue et la culture françaises, et ce, non seulement au Québec, mais partout au Canada.

[Français]

Les Canadiens anglophones ne veulent pas être assimilés par la culture de nos voisins du Sud. En même temps, les Canadiens francophones ne veulent pas être assimilés par la culture anglophone. Radio-Canada est un instrument très efficace qui s'occupe de ces intérêts et de ces inquiétudes, et il me semble être une très bonne façon de promouvoir, indirectement, l'unité canadienne.

[Traduction]

Malgré cela, nous entendons encore des gens mettre en doute le soutien des contribuables à Radio-Canada.

Le Comité permanent du patrimoine canadien a entendu ce qu'en pense le public, et je suis sûr que la sénatrice Verner se souvient des audiences publiques de 2007. Des particuliers et des groupes de tous les volets de la société canadienne, la communauté culturelle, l'industrie du cinéma, divers établissements d'enseignement, des organismes gouvernementaux, des médias commerciaux, des associations francophones et autochtones — tout ce monde a été entendu. On y a nettement démontré la portée et la profondeur du soutien à Radio-Canada. Et le résultat? Eh bien, dans le rapport, dont le titre est CBC/Radio-Canada : Définir la spécificité dans un paysage médiatique en évolution, il n'y a rien de neuf. Tout cela a déjà été étudié. Le comité parlementaire a confirmé sans dissidence le rôle de Radio-Canada en tant qu'institution au cœur de la vie culturelle, politique, sociale et économique du Canada. Ce sont des mots importants, et les mots qui émanent du Parlement du Canada devraient — doivent — être considérés comme étant importants. Ils doivent avoir du poids.

Pour que Radio-Canada s'acquitte de son mandat, je pense que nous savons tous qu'elle a besoin d'un financement suffisant. Ce même comité parlementaire avait recommandé une formule correspondant à 40 $ par personne, par année. C'est ce qu'ils avaient recommandé : 40 $ par personne, par année. Quel est le financement en ce moment? C'est environ 29 $ par personne. Quel montant les démocraties de l'Ouest qui ont un diffuseur public lui accordent-elles? La moyenne est de 87 $, alors nous sommes bien loin de la moyenne.

Radio-Canada est plus efficace que jamais. Je peux vous le confirmer parce que j'admets qu'il y a 30 ans, quand Brian Mulroney a pris le pouvoir, les ressources n'étaient pas toujours utilisées efficacement à Radio-Canada. Je l'ai vu de mes propres yeux et je peux le confirmer. Mais les choses ont beaucoup changé.

Les compressions sont telles, depuis ce temps, qu'on en est à entailler le squelette. Les programmes de grande valeur sont moins nombreux. Le bassin de talents s'efface. Il y a davantage de reprises. Il y a davantage de publicité. Quand la publicité prend 20 p. 100 de votre horaire, comme en ce moment, il est impossible que cela n'ait aucune influence sur votre programmation. C'est inévitable.

Peu importe votre perspective, pensez à la radio sans publicité et vous verrez à quel point c'est distinctif. La télévision ressemble de plus en plus à ses homologues commerciaux et, entre autres facteurs, pour tirer des revenus de la publicité, vous devez avoir le genre de programmation qui rejoint un vaste public. Je serai ravi d'entrer dans les détails au moment approprié, monsieur le président.

Bien sûr, l'environnement change rapidement, et il est évident que la Société Radio-Canada de l'avenir ne ressemblera pas à celle d'aujourd'hui. Il faudra qu'elle évolue. Les changements technologiques sont incroyables. Je ne vous apprends rien, naturellement. À une autre époque, Radio-Canada, c'était la radio seulement; puis il y a eu la télé en noir et blanc, puis la télé en couleurs, et ainsi de suite. Elle a toujours évolué avec la technologie. Ce n'est rien d'étonnant. Le Parlement l'a reconnu. La Loi sur la radiodiffusion précise que le système de radiodiffusion canadien doit pouvoir aisément s'adapter aux progrès scientifiques et techniques, et cela va toujours être là.

Les nouveaux modèles d'affaires devront évoluer, et ce, pas juste pour Radio-Canada, mais pour tous les diffuseurs, car les gens vont vouloir avoir accès à la programmation à l'endroit, au moment et de la manière qui leur conviennent le mieux, et nous possédons la technologie qui permet cela. Nous sommes éblouis par la technologie. Nous avons tous les iPhone, les iPad et tout cela. En tant qu'ingénieur, j'adore la technologie. Je n'en ai jamais assez, mais vous savez, en dernière analyse, la technologie, ce n'est pas une fin en soi. Ce qui compte, c'est le contenu. Nous ne devrions donc pas être si entichés de technologie; ce n'est pas le but suprême. Ce n'est qu'une façon de joindre les gens et, à cette fin, vous devez offrir un contenu pertinent, de qualité et canadien. N'oublions pas cela : canadien.

Le président : Monsieur Manera, je suis désolé de vous interrompre. On vient de me dire que nous devrons aller voter à 20 heures. Nous pouvons poursuivre encore 25 minutes.

M. Manera : J'en ai encore pour à peu près cinq minutes.

Le président : Je vais demander aux sénateurs de poser leurs questions rapidement. J'ai cinq noms sur la liste, et je pense que chacun pourra avoir quelques minutes.

[Français]

M. Manera : La pierre angulaire d'un radiodiffuseur public est son service d'information et d'affaires publiques. Pour sauvegarder sa crédibilité, Radio-Canada doit fonctionner indépendamment du gouvernement du jour. Le système actuellement en place n'est pas adéquat pour assurer cette indépendance. Je tiens à souligner cela.

[Traduction]

Le système actuel ne permet pas de garantir l'indépendance de Radio-Canada. Des changements sont requis, tant sur le plan de la gouvernance que sur celui de la méthode de financement.

L'enjeu fondamental est maintenant de concilier l'indépendance nécessaire et la reddition de comptes, tout aussi nécessaire. Il faut les deux. On ne peut être indépendant sans rendre de comptes. Il faut rendre des comptes. Il y a bien des façons d'y arriver, mais ce que nous avons en ce moment ne convient pas. La reddition de comptes n'est pas adéquate non plus.

Ce que je suggère — et ce n'est vraiment qu'une suggestion à discuter, car il faudrait consulter d'autres personnes —, c'est d'examiner en profondeur le processus de reddition de comptes actuel et de recommencer à zéro.

Je suis d'avis que le rôle du CRTC pourrait être modifié de sorte qu'il puisse examiner ce que Radio-Canada fait sur le plan de son service au public, donner un avis sur son rendement et faire une recommandation au Parlement sur le niveau de financement que Radio-Canada devrait recevoir.

Je pense que le CRTC a l'expertise et les connaissances nécessaires, et qu'il est suffisamment indépendant du gouvernement pour avoir de la crédibilité. Ceci étant dit, il y a peut-être d'autres façons d'atteindre le même objectif. J'en fais tout simplement la suggestion.

Je fonde ma suggestion sur une opinion exprimée par le vérificateur général du Canada, en 2000, quand cette question a été abordée. Il n'a pas précisément dit qu'il fallait donner ce mandat au CRTC, mais il a recommandé qu'on fasse quelque chose qui ressemblerait à ce que je viens de vous dire. Nous sommes en 2014, et rien n'a été fait. C'est maintenant le temps d'agir.

Personnellement, je pense que si le financement de Radio-Canada ne peut atteindre 50 $ par personne, par année, elle ne peut faire son travail efficacement.

Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Je serai ravi de répondre à toutes vos questions.

Le sénateur Housakos : Merci de votre présence, monsieur Manera. Je vais dire quelques mots et poser quelques questions. Je vais tout dire d'un trait, puis je vous laisserai y répondre. Je vais commencer par revenir sur votre exposé.

Pour commencer, quand vous avez dit qu'il est essentiel de doubler le budget de fonctionnement de Radio-Canada pour qu'elle survive, j'espère que c'est faux. J'espère que Radio-Canada peut, en 2014, devenir nettement plus novatrice que cela, car je pense que les gouvernements de la dernière décennie, tant les conservateurs que les libéraux, ont démontré que ni le Parlement, ni le public ne veulent doubler le financement de Radio-Canada.

Ceci étant dit, j'aimerais parler de votre point de vue selon lequel le CRTC pourrait représenter un meilleur mécanisme que le Parlement concernant la reddition de comptes. Je pense qu'on se trompe si l'on croit que l'on confiera à un organisme de réglementation dont le rôle est d'attribuer des licences aux radiodiffuseurs à l'échelle du pays la responsabilité de gérer l'argent des contribuables et de rendre des comptes à cet effet. Je peux vous assurer que tant que le CRTC ne se portera pas candidat et qu'il ne se fera pas élire, les gens qui rendent des comptes aux contribuables sont ceux qui, tous les trois ou quatre ans, obtiennent un mandat des électeurs, et c'est le Parlement du Canada, collectivement, avec tous les députés élus, et bien sûr avec le Sénat qui est là pour faire un second examen objectif.

Le comité a constaté, ces derniers mois, à quel point il est difficile, sur le plan de la reddition de comptes, d'obtenir de Radio-Canada des réponses simples à des questions simples, dans le cadre de l'étude que nous faisons de bonne foi pour surmonter certaines des difficultés que Radio-Canada rencontre. Malgré cela, en plein milieu de notre étude, nous avons le président de CBC/Radio-Canada qui exige un débat public sur l'avenir de CBC/Radio-Canada, plutôt que de venir travailler avec nous au débat public que nous tenons pour en arriver à une solution, parce que c'est ce que nous faisons — chercher des solutions.

J'ai écouté votre point de vue très attentivement, et je suis stupéfait du nombre de fois où vous avez dit que le rôle de CBC/Radio-Canada est d'informer et d'éclairer. Je viens du monde des affaires, et mon travail, quand j'étais PDG d'une entreprise, c'était d'aller chercher le plus de clients possible pour mon entreprise et pour mon produit. Je peux vous assurer que parmi les premières choses que j'envisageais, au moment de concevoir une stratégie de vente, il n'y avait jamais « informer et éclairer » au début de ma liste de choses à faire comme vendeur. C'était toujours de concentrer l'attention, d'écouter, d'observer, de prendre des notes.

J'estime que CBC/Radio-Canada devrait se concentrer beaucoup plus sur la prestation de services que le public canadien veut vraiment, et je vous pose la question : comment allez-vous mesurer le succès, quand il s'agit d'informer et d'éclairer votre clientèle, alors qu'au fil des années, CBC/Radio-Canada connaît des baisses successives de plus en plus rapides de ses cotes d'écoute? Ses revenus publicitaires des dernières années ont diminué plus rapidement que le financement gouvernemental.

M. Manera : Monsieur le président, je ne suis pas ici pour m'engager dans un débat, mais je n'hésiterai pas à le faire lorsque la situation s'y prêtera. Ce n'est toutefois pas mon rôle aujourd'hui, car vous m'avez convoqué pour que je réponde à vos questions.

D'abord et avant tout, je ne trouve pas pertinente l'analogie avec le monde des affaires quant à l'utilisation des termes « renseigner et éclairer ». Ce n'est pas moi qui ai inclus ces termes dans la loi; c'est le Parlement. Dans ce contexte, je pense donc que c'est au Parlement qu'il incombe de veiller à ce que ces objectifs soient respectés. Ce n'est pas la SRC qui a décidé que son mandat consistait à informer et éclairer; c'est le Parlement du Canada qui l'a fait. Alors, si le Parlement décide à un moment donné que ce n'est plus le mandat qu'il souhaite confier à la SRC, il a le pouvoir de changer les choses.

Mais c'est ce qui est prévu actuellement, et j'estime que c'est tout à fait approprié. Je vous donnais tout à l'heure l'exemple d'une émission que je trouve très intéressante en raison des personnages pittoresques qui y évoluent, mais qui a aussi pour objectif d'informer et d'éclairer.

Il y a deux façons de mesurer un auditoire. L'une d'elles est la part de marché, l'autre est la couverture. La part de marché s'entend du pourcentage de l'auditoire qui syntonise une chaîne à un moment précis, et elle a diminué pour la SRC. Je ne crois pas que l'on puisse dissocier les compressions budgétaires de cette réduction de la part de marché, car si vous diffusez sans cesse les mêmes émissions, il est bien évident que vos cotes d'écoute vont chuter. On ne peut non plus dissocier cette baisse du fait qu'il y a maintenant quelque 500 chaînes de télé, alors qu'il n'y en avait auparavant que deux ou trois. Cela explique donc en partie le phénomène.

L'autre mesure, celle de la « couverture », consiste à déterminer combien de Canadiens ont recours aux services de CBC/Radio-Canada pendant une certaine période. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment eu de diminution à ce chapitre. Je crois qu'il y en a encore plus de 20 millions.

J'estime donc que c'est encore le pourcentage de la population qui est rejoint par la SRC. Je ne veux pas m'engager dans un débat avec vous, sénateur, parce que ce n'est pas mon rôle ici. Je ne vais pas non plus tenter d'expliquer les mesures prises par M. Lacroix ou par la SRC, car je ne suis plus là depuis 20 ans. Je m'exprime en tant que simple citoyen.

Lorsque je discute avec des amis et des collègues de toutes les couches de la société et de différentes allégeances politiques, ils me disent invariablement que la SRC pourrait mieux faire sous tel ou tel aspect, mais qu'elle répond tout de même à un besoin criant. Il est possible et même essentiel d'améliorer les choses, mais il n'en reste pas moins que la SRC joue un rôle vraiment fondamental dans nos efforts pour unifier ce pays si diversifié. Pour constater cette formidable diversité de notre population, il suffit d'aller de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique en passant par le Nord. Il y a les francophones, les anglophones, les Autochtones et les immigrants nouvellement arrivés; il est très difficile de faire un tout cohérent avec un pays semblable. Il faut autant que possible...

Le sénateur Housakos : J'aurais une question supplémentaire. Contrairement à la vaste majorité des partisans de la SRC qui ont comparu devant nous, il ressort jusqu'à maintenant de votre témoignage l'impression que tout se déroule à la perfection et que la seule chose dont on ait besoin, c'est d'un financement accru. Est-ce que d'après vous la SRC pourrait mieux faire à certains égards?

M. Manera : Oui.

Le sénateur Housakos : Et qu'est-ce qu'on pourrait améliorer exactement?

M. Manera : Je crois que la gouvernance de la SRC est déficiente.

Il y a au départ un problème du fait que le conseil d'administration n'a pas le pouvoir d'embaucher et de congédier le président. Comme vous avez pu vous-même le constater dans le secteur privé, lorsqu'un conseil d'administration ne peut pas embaucher et congédier le président, il n'a pas vraiment de contrôle sur ce qui se passe. Ce serait donc le premier élément à changer; il faudrait que le conseil puisse embaucher et congédier le président, ce qui n'est pas le cas actuellement. En fait, il est à peu près impossible de congédier le président de la SRC. N'allez surtout pas croire que je suis en train de laisser entendre que le président en poste devrait être congédié. Je ne parle pas ici des personnes en place, mais bien du système. Ce serait donc la première chose.

Si un conseil d'administration ne peut pas congédier le président, alors il lui est impossible de s'acquitter de ses responsabilités fiduciaires envers les actionnaires, soit envers la population canadienne dans le cas qui nous intéresse. C'est le premier changement à apporter.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais bien que nous parlions de financement, si vous le permettez.

Le sénateur Housakos a fait valoir que les gens n'ont aucune envie de voir le financement de la SRC augmenter considérablement comme vous le suggériez en proposant l'équivalent de 50 $ par habitant, et cela apparaît plutôt raisonnable considérant la situation ailleurs dans le monde et l'orientation établie dans le rapport précédent.

Si le financement supplémentaire n'est pas fourni directement par le gouvernement, quelles sont les autres options? À titre d'exemple, les Britanniques utilisent une formule de droits de licence de radiodiffusion. Il y a aussi un de nos témoins — je n'arrive pas à me souvenir de son nom — qui a suggéré que nous imposions une taxe spéciale aux sociétés de télécommunications qui réalisent des bénéfices énormes et versent des sommes colossales à leurs PDG. Peut-être devrions-nous établir une taxe spéciale de la sorte afin de constituer un fonds qui pourrait être utilisé tant pour la SRC que pour la production de contenu canadien d'une manière générale, l'Institut canadien du film ou peu importe.

Vous dites que la SRC devrait rendre des comptes tout en étant indépendante. Je crois que vous soutenez, et j'abonderais certes dans le même sens, que la SRC a besoin d'un financement stable à long terme et ne peut être soumise aux aléas du processus budgétaire année après année. Si l'on affranchissait ainsi la SRC du cycle budgétaire annuel, voyez-vous une autre formule de financement qui pourrait fonctionner?

M. Manera : Je pense que vous avez soulevé trois ou quatre possibilités distinctes qu'il y a lieu d'envisager. Comme c'est toujours le cas, chacune d'elles a ses avantages et ses inconvénients. Il y avait un régime de droits de licence en place au Canada jusqu'en 1952, mais le Parlement a décidé de l'abolir. C'est un concept qui n'est pas familier aux Canadiens alors que c'est le cas en Grande-Bretagne ou en Italie. Je ne suis pas certain de la situation en France, mais je sais que des droits de licence sont imposés en Grande-Bretagne et en Italie. Ce n'est pas la façon de faire habituelle pour les Canadiens, et je ne pense pas que la population verrait cela d'un bon œil. C'est pour cette raison que le Parlement a supprimé ces droits en 1952.

La contribution du secteur privé sous une forme ou une autre est également une possibilité à considérer. En effet, les diffuseurs privés bénéficient directement ou indirectement d'avantages ayant une valeur bien concrète, que ce soit via les subventions, le traitement fiscal préférentiel prévu à l'article 9 de la Loi de l'impôt sur le revenu ou la formule de substitution simultanée. C'est donc une autre option qui pourrait être prise en compte et devrait faire l'objet d'un examen plus approfondi par des gens possédant une plus grande expertise que la mienne.

Si l'on veut vraiment fournir à la SRC un financement adéquat et stable à long terme, il faut réunir des experts et leur confier le mandat d'étudier toutes ces options, et peut-être d'autres encore, pour en arriver à la formule qui offrira la stabilité recherchée.

Le sénateur Eggleton : J'ai une autre question qui touche l'aspect financier. Certains soutiennent que la SRC ne devrait diffuser aucune publicité. Selon d'autres intervenants pas très optimistes, cela ne sert pas à grand-chose de toute manière étant donné que l'on est sur le point de perdre les revenus découlant de la diffusion des matchs de hockey. Certains laissent même entendre que les revenus vont diminuer à ce point qu'ils ne permettront même plus d'éponger les coûts, et se demandent s'il vaut vraiment la peine de continuer à diffuser de la publicité. Qu'en pensez-vous?

M. Manera : C'est assez subjectif, mais je peux tout de même vous répondre en me basant sur mon expérience à la SRC. N'oubliez pas que j'y ai travaillé pendant 10 ans. Je pensais à ces questions en me couchant le soir et cela m'a valu bien des insomnies.

Selon moi — et certains ne seront pas d'accord —, on ne devrait pas vraiment dépasser quatre minutes de publicité par heure de télévision. Au-delà de ce seuil, j'estime que la stratégie de programmation devient trop souvent tributaire du besoin de générer des recettes. Le Parlement n'a pas créé la SRC pour en faire un diffuseur commercial. Si l'on avait voulu agir de la sorte, on aurait pu simplement laisser le plancher au secteur privé qui aurait été tout à fait dans son élément. La SRC a été créée pour offrir un service public. À l'heure actuelle, elle diffuse 12 minutes de publicité à l'heure, soit 20 p. 100 du temps d'antenne. Lorsque 20 p. 100 de votre temps d'antenne est consacré à la publicité, vous n'êtes plus un service public; vous avez dépassé les bornes. À mon avis, on devrait se limiter à quatre minutes.

Il y a des « puristes » qui préconisent une télévision exempte de toute publicité, car la publicité quelle qu'elle soit compromet le contenu d'intérêt public. Je ne suis pas de cet avis. Je pense qu'en se limitant à quatre minutes à l'heure, il est encore possible d'offrir un bon service public de radiodiffusion.

Le sénateur Plett : Je suis vraiment désolé que nous n'ayons pas plus de temps à notre disposition, car c'est un sujet sur lequel j'aimerais m'attarder bien davantage. Je vais donc essayer d'être bref.

Dans notre étude de ces questions à titre de parlementaires, j'estime que nous ne devons jamais perdre de vue les préférences des Canadiens. Je crois que les Canadiens veulent avoir accès aux émissions de télé et aux chaînes de radio qui les intéressent. Ils ne veulent pas avoir à payer pour des chaînes qu'ils ne souhaitent pas syntoniser.

Le sénateur Housakos a mentionné la faiblesse des cotes d'écoute de CBC/Radio-Canada. Au Québec, Radio-Canada est nez à nez avec deux autres chaînes, et tout va plutôt bien. Au Canada anglais par contre, CBC est loin derrière CTV et Global. Si nous maintenions notre soutien en doublant le financement comme cela est suggéré, je crois que les Canadiens réclameraient notre tête.

J'aimerais que vous me disiez ce que CBC a fait de plus que CTV pour informer les Canadiens au sujet du lac Meech, de Charlottetown, des détectives qui n'ont pas accès à une promotion à cause de leur religion ou de la violence policière? CBC n'a pas été la seule chaîne de radio ou de télé à aborder ces sujets. En quoi la couverture de CTV a-t-elle été différente? N'est-ce pas à nous qu'il incombe de nous informer nous-mêmes ou faut-il que nous nous en remettions entièrement à un diffuseur public à cette fin? C'est ma première question.

M. Manera : J'inviterais simplement le sénateur à considérer le contenu diffusé lorsqu'il compare les cotes d'écoute de CBC à celles de CTV et de Global. Si CTV et Global diffusent effectivement du contenu en provenance des deux pays, je vous dirais que c'est le contenu américain qui est nettement privilégié aux heures de grande écoute.

Le sénateur Plett : C'est ce que les gens veulent regarder.

M. Manera : Oui, j'en conviens. Personne ne prétend que les Canadiens ne devraient pas avoir le droit de regarder des émissions américaines. Toutefois, le Parlement, dans sa grande sagesse, a décidé il y a bien des années qu'il voulait un système de radiodiffusion canadien, car les Américains auraient été tout à fait ravis — et je suis persuadé qu'ils le seraient encore — de pouvoir diffuser leurs émissions au Canada avec de la publicité américaine, car ils n'avaient pas besoin de CTV ou de Global pour ce faire. CTV et Global existent uniquement grâce aux règles de diffusion simultanée qui leur permettent d'insérer leurs publicités dans les émissions américaines, lesquelles sont produites avec des budgets nettement plus considérables que ceux de CBC.

Dans une société libre comme la nôtre, personne ne contestera aux Canadiens le droit de regarder des émissions américaines. Il n'est nullement question de cela. Le Parlement — et ce n'était pas ma décision ni celle de CBC/Radio-Canada — a déterminé qu'il n'était pas suffisant que les Canadiens soient simplement exposés aux émissions américaines, et ce, malgré toute l'affection que nous avons pour nos voisins du Sud. N'oubliez pas que j'ai fait toutes mes études universitaires aux États-Unis. C'est dans ce pays que j'ai développé ma philosophie de vie, mais je suis revenu ici parce que j'aime le Canada. Le Parlement du Canada a dit : « Les Américains sont nos amis. Ce sont nos meilleurs voisins, mais nous voulons nous distinguer d'eux. Nous voulons diffuser une programmation qui reflète notre réalité à nous, et non celle des Américains. » Les Américains connaissent très bien le premier amendement. J'ai grandi à Montréal et j'aimais bien aller au cinéma. J'en étais venu à croire que c'était John Wayne qui avait gagné la Seconde Guerre mondiale parce qu'on ne présentait à Montréal que des films américains. Si l'on avait seulement CTV et Global, c'est le genre de réalité que l'on présenterait aux Canadiens. Comme si le Canada n'avait jamais participé à la Seconde Guerre mondiale.

Le sénateur Plett : Lorsque vous étiez jeune, monsieur, CTV et Global n'existaient pas. Vous regardiez des chaînes américaines en plus de CBC/Radio-Canada.

M. Manera : Non, j'allais au cinéma.

Le sénateur Plett : Vous soutenez que c'est le Parlement qui a pris ces décisions. Je ne suis pas d'accord. C'est le choix des Canadiens qui permet aux parlementaires d'être ici à Ottawa et de prendre ces décisions. Si leurs décisions sont mauvaises, ils en paient le prix lors de l'élection suivante. Alors, ce sont en fin de compte les Canadiens qui prennent la décision.

J'aurais une brève question en terminant. Vous dites qu'il serait acceptable de diffuser quatre minutes de publicité à l'heure, mais que 12 minutes c'est trop. Quelle est la proportion pour les autres chaînes de télévision?

M. Manera : Elle est beaucoup plus élevée.

Le sénateur Plett : Jusqu'où peut-on aller?

M. Manera : On peut aller jusqu'à 18. Dans certains cas, c'est même 100 p. 100 de publicité. Il y a des chaînes qui peuvent diffuser des publicités pendant une demi-heure complète.

Le sénateur Plett : Mais elles ont tout de même une cote d'écoute supérieure à celle de CBC. Je pense que les faits sont éloquents. Merci.

Le sénateur Mercer : Je ne sais pas où il prend ces idées-là. Quoi qu'il en soit, je ne veux pas lancer de polémique ce soir, car j'apprécie vraiment votre présence et je me réjouis de pouvoir bénéficier de votre expérience au sein de notre société d'État.

Lorsque vous étiez à la SRC, Internet était encore un phénomène relativement nouveau. Nous sommes maintenant en 2014 et il y a convergence entre les diffuseurs privés et des sociétés de télécommunications comme Rogers qui sont capables de diffuser du contenu au moyen de leurs propres services Internet et sans fil. CBC/Radio-Canada est un radiodiffuseur au sens conventionnel du terme. Est-ce que la SRC est maintenant désavantagée par rapport aux diffuseurs privés et comment devrait-elle selon vous réagir, si besoin est, à ce phénomène de la convergence?

M. Manera : J'aimerais pouvoir vous donner une réponse mieux étayée, mais comme je suis éloigné du contexte de la radiodiffusion depuis bon nombre d'années, je ne peux m'exprimer qu'en tant que simple citoyen, en m'appuyant toutefois sur ma connaissance de la technologie.

Tant pour la SRC que pour les autres diffuseurs, j'estime qu'Internet est à la fois source de défis et de perspectives nouvelles.

Si je ne m'abuse, le CRTC a déterminé qu'il ne pouvait pas réglementer Internet. Je crois que c'est à toutes fins utiles impossible. J'ai l'impression que la SRC s'emploie à explorer diverses possibilités d'utilisation d'Internet pour diffuser sa programmation. Où est-ce que tout cela va nous mener? Bien franchement, je crois que personne n'a la réponse à cette question. Je pense que les diffuseurs tant publics que privés en sont tous au stade des expériences avec différents modèles. Certains seront à la hauteur des promesses; d'autres pas. Seul l'avenir nous le dira.

La SRC est certes désavantagée du fait qu'elle n'est pas intégrée verticalement comme le sont les diffuseurs privés qui possèdent à la fois le contenu et les moyens de distribution, mais si le contenu offert est de grande qualité et correspond aux attentes des Canadiens, je crois que l'auditoire sera toujours au rendez-vous. Je veux simplement rappeler — et je réponds ici indirectement à la question du sénateur Plett — que c'est le Parlement du Canada qui a décidé qu'il voulait avoir un système national de radiodiffusion, ce qui comprend à la fois le secteur privé et le secteur public. Ce n'est pas uniquement l'affaire de CBC/Radio-Canada. Le Parlement a jugé qu'il était nécessaire d'avoir un système de radiodiffusion au Canada et si vous regardez la Loi sur la radiodiffusion, vous constaterez qu'on n'y parle pas uniquement de la SRC. Elle s'applique également aux diffuseurs privés. Toutes les composantes du système devraient travailler en collaboration pour offrir à l'ensemble des Canadiens ce qu'ils veulent vraiment. Comme elle reçoit des subventions gouvernementales, la SRC hérite, à juste titre, de responsabilités supplémentaires et d'un mandat plus particulier.

Je pense que nous vivons une période de pleine effervescence qui est marquée par bien des possibilités nouvelles, mais aussi beaucoup d'incertitude. Il faut être prêt à tenter toutes sortes d'expériences.

Le sénateur Mercer : J'aurais encore bien des questions, mais je sais que nous allons manquer de temps.

Le sénateur White : Merci de votre présence aujourd'hui, monsieur Manera. Je peux vous assurer que je ne manquerais pas de syntoniser CBC ce soir si vous deviez participer à une émission pour discuter de ces enjeux.

Je veux revenir au thème de la reddition de comptes que vous avez abordé tout à l'heure. Dans ce contexte, il y a aussi les concepts de transparence et d'ouverture qui me viennent à l'esprit. Je suis heureux que vous ayez soulevé la question. Lors de sa comparution devant nous, le président — et je ne vous demande pas de vous prononcer à son sujet ou de commenter ce qu'il a dit — a refusé de divulguer le salaire de différents cadres supérieurs de la SRC et même le montant de la prime qu'il a lui-même touchée, même si nous savons qu'il a reçu plus de 70 000 $ au départ après avoir congédié quelque 700 employés, pour en rembourser ensuite une portion de 30 000 $ à laquelle il n'avait pas droit.

Comment les Canadiens peuvent-ils faire confiance à des dirigeants qui agissent de cette façon? Je vous pose la question en votre qualité d'ancien président de deux collèges. Si vous aviez eu à mettre à pied 70 professeurs au Niagara Community College ou au Vancouver Community College, vous ne vous seriez pas octroyé une prime de 20 p. 100 pour l'année en question et vous n'en auriez pas accordé une de 50 p. 100 à certains de vos cadres supérieurs.

Du point de vue de la reddition de comptes, j'aurais tendance à croire que nous aurions obtenu une réponse différente de celle d'il y a quelques semaines si vous étiez encore à la tête de la SRC, mais je dois avouer qu'il devient difficile d'appuyer publiquement une organisation qui se comporte de cette manière. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Manera : Je ne peux pas répondre au nom de CBC/Radio-Canada. Je peux seulement vous dire que ma rémunération à titre de président était fixée par le conseil des ministres.

Le sénateur White : Et c'était connu du public?

M. Manera : Certainement.

Le sénateur White : Merci beaucoup pour cette réponse.

Le président : Merci beaucoup. Je rappelle à notre auditoire que nous avons poursuivi ce soir notre étude sur les défis que doit relever la Société Radio-Canada dans le contexte de l'évolution du milieu de la radiodiffusion et des communications.

Malheureusement, nous devons couper court à cette séance, car la sonnerie se fait entendre au Sénat pour nous rappeler nos devoirs démocratiques. Je tiens toutefois à remercier notre témoin, Tony Manera, d'avoir bien voulu comparaître devant nous ce soir.

(La séance est levée.)


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