Aller au contenu
ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de l'Énergie,
de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 14 - Témoignages du 27 octobre 2016


OTTAWA, le jeudi 27 octobre 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 1, pour étudier les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

Le sénateur Richard Neufeld (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue à la réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Je m'appelle Richard Neufeld, et je représente la province de la Colombie-Britannique au Sénat. Je suis le président du comité. Je tiens à souhaiter la bienvenue aux honorables sénateurs et à tous les membres du public qui sont parmi nous dans la salle ainsi qu'à tous les téléspectateurs un peu partout au pays qui nous regardent à la télévision. Je rappelle à ceux qui nous regardent que les audiences du comité sont ouvertes au public et sont aussi accessibles en webdiffusion sur le site web sen.parl.gc.ca. Vous trouverez de plus amples renseignements concernant le calendrier des témoins sur le site web, sous la rubrique des comités sénatoriaux.

Je vais maintenant demander aux sénateurs de se présenter. Je vais commencer par présenter mon collègue à ma droite, le vice-président, le sénateur Paul Massicotte, du Québec.

Le sénateur Lang : Sénateur Dan Lang, du Yukon.

Le sénateur MacDonald : Mike MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Omidvar : Sénatrice Omidvar, de l'Ontario.

Le sénatrice Seidman : Judith Seidman, du Québec.

Le président : Je tiens aussi à présenter nos employés, en commençant par notre greffière, Lynn Gordon, qui est au bout à ma gauche, notre greffier en formation, Maxime Fortin, et nos deux analystes de la Bibliothèque du Parlement, qui sont à ma droite, Sam Banks et Marc LeBlanc.

Nous en sommes à la 20e réunion concernant notre étude des effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, transition qui est requise pour atteindre les cibles annoncées par le gouvernement du Canada en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Durant la première partie de notre réunion, je suis heureux d'accueillir Mark Nantais, président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules. Bienvenue, Mark, à la réunion du comité, et merci d'être là. Nous avons hâte d'entendre votre exposé, puis nous passerons à une période de questions et réponses. La parole est à vous, monsieur.

Mark Nantais, président, Association canadienne des constructeurs de véhicules : Merci, monsieur le président, et bonjour, honorables sénateurs. En tant que président de l'ACCV, je suis heureux d'être ici pour représenter les entreprises membres de l'association, notamment, Fiat Chrysler Automobiles Canada, la compagnie Ford du Canada et General Motors du Canada. Ensemble, ces trois entreprises représentent environ 60 p. 100 de toute la production de véhicules au Canada et en tant que certaines des plus grandes entreprises multinationales de la planète, exportent des véhicules dans 100 pays à l'échelle du globe.

Le secteur de la construction automobile est un important moteur de l'économie canadienne. Il contribue de façon importante au PIB du secteur manufacturier au Canada, fournit environ 115 000 emplois directs et environ 500 000 emplois indirects, ici, partout au Canada. Il s'agit d'une industrie très intégrée au Canada et aux États-Unis, et les usines de fabrication des deux côtés de la frontière se livrent une rude concurrence pour obtenir des capitaux, des investissements et de nouveaux mandats de production. Plus précisément, le Midwest américain et les États américains du Sud sont les administrations qui nous livrent concurrence.

Je tiens à vous remercier de m'avoir invité et de me donner l'occasion de vous parler de ce que l'industrie automobile fait en tant que chef de file de la question environnementale pour assurer la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Par le fait même, j'aborderai les enjeux connexes ainsi que les questions de politique publique et de réglementation qui peuvent accroître ou miner la capacité de l'industrie et des consommateurs de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

De nouvelles et rapides percées technologiques, les changements de préférences des consommateurs et de nouveaux entrants dans le secteur automobile mondial inspirent la création de nouveaux produits et de nouveaux services et l'adoption de nouveaux modèles d'affaires qui participent à une vitesse sans précédent au perfectionnement des véhicules connectés et automatisés. Je mentionne ces technologies parce qu'elles ont le potentiel de permettre d'importantes améliorations en matière de sécurité routière et de permettre aussi d'autres réductions des émissions de gaz à effet de serre produites par le parc de véhicules.

De plus, l'industrie automobile constitue l'un des plus importants secteurs de technologies vertes du monde, investissant plus de 200 milliards de dollars dans des technologies d'efficacité énergétique et des technologies vertes, ce qui donnera lieu à une réduction sans précédent de 50 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre des nouveaux véhicules produits d'ici 2025. Environ 100 milliards de dollars sont investis dans la mise au point de véhicules électriques.

L'industrie automobile a un bilan remarquable en matière de fabrication écoénergétique et en matière de réduction de l'empreinte environnementale des nouveaux véhicules, de la conception jusqu'à la fin de vie. Du côté manufacturier, par exemple, l'intensité énergétique dans le secteur de la fabrication automobile a diminué de façon stable et importante depuis les années 1990. Autrement dit, le secteur automobile est devenu plus écoénergétique et produit moins d'émissions de gaz à effet de serre tout en possédant certaines des usines les plus productives et les plus primées en Amérique du Nord.

Grâce à l'efficacité énergétique de l'industrie et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la fabrication automobile compte maintenant pour moins de 1 p. 100 des émissions de GES industrielles en Ontario, où la plupart des activités ont lieu. Le secteur utilise des processus manufacturiers intelligents qui sont très efficients et produisent moins de la moitié des émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes par véhicule construit comparativement aux activités de fabrication automobile européennes.

À tous les niveaux de notre société, les gens prennent des décisions pour réduire leur empreinte carbonique au quotidien, y compris dans leur transport personnel. En réaction, le rythme des percées technologiques et des innovations au sein de l'industrie automobile augmente rapidement. Les technologies des véhicules changeront davantage au cours des cinq prochaines années qu'elles ne l'ont fait au cours des 100 dernières.

Les émissions de gaz à effet de serre du parc de véhicules routiers légers représentent une portion relativement petite des émissions canadiennes totales, soit 11 p. 100. On prévoit que ce pourcentage diminuera de façon stable à mesure que les nouveaux véhicules remplacent les plus vieux véhicules toujours sur la route. On pourrait même réduire encore plus les émissions de gaz à effet de serre si les vieux véhicules qui produisent plus d'émissions — et qui représentent environ le tiers du parc de véhicules routiers actuel — étaient retirés de la route de façon accélérée et remplacés par de nouveaux véhicules beaucoup plus économiques en carburant.

La réglementation très stricte sur les véhicules de passagers et les émissions des véhicules légers pour les modèles de 2017 à 2025 a été adoptée de façon harmonisée avec les États-Unis, créant ainsi une norme unique et efficiente à l'échelle de l'Amérique du Nord, y compris la Californie, ce qui sera bénéfique pour l'environnement et les consommateurs. Cette réglementation exige des fabricants qu'ils adoptent des modèles multitechnologiques et multicarburants pour assurer leur conformité, modèles dans le cadre desquels les véhicules électriques, les voitures hybrides rechargeables et les véhicules électriques à batterie deviendront de plus en plus présents durant cette période de déploiement technologique rapide.

Grâce à une exigence en matière d'amélioration année après année sans précédent de 3 à 5 p. 100, on prévoit que les modèles des véhicules légers de 2025 produiront 50 p. 100 moins de gaz à effet de serre comparativement aux véhicules de 2008. Si on fait les calculs à partir de l'année de modèle 2011, cela entraînera une réduction cumulative estimée de 266 millions de tonnes d'émissions d'équivalent de dioxyde de carbone du parc de véhicules légers à l'échelle nationale.

Certains organismes de réglementation et militants affirment que ces normes sont en quelque sorte un statu quo pour l'industrie. Je vous assure que ce n'est vraiment pas le cas étant donné les défis technologiques et les coûts connexes. Je ne connais aucun autre produit pour lequel la réglementation exige une aussi importante réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Je dois aussi préciser que les véhicules utilitaires lourds sont aussi visés par une réglementation stricte pour les modèles de 2014 à 2018 et, encore une fois, la réglementation sera encore plus stricte pour les données des modèles 2019 à 2027. La réglementation est en cours d'élaboration.

J'aimerais parler rapidement, mais de façon plus détaillée, de l'électrification des véhicules. Depuis 2011, 25 nouveaux véhicules électriques rechargeables ont été introduits dans le marché canadien, et ce, dans un nombre grandissant de segments de véhicule. En outre, il y aura 29 modèles en 2017, dont certains sont construits ici même, au Canada.

En plus des coûts, la technologie associée aux véhicules électriques à batterie présente de très importants défis techniques en ce qui concerne l'autonomie et la taille des véhicules, et il faut poursuivre les activités de développement avant que ces technologies soient acceptées et adoptées massivement par les consommateurs. Les véhicules électriques à batterie ont certaines limites dans les conditions météorologiques froides du Canada et en raison de l'infrastructure de recharge sous-développée, ce qui rend les consommateurs craintifs au sujet de leur achat.

Leurs sentiments et préoccupations, cependant, ne peuvent pas être ignorés. Par ailleurs, les véhicules hybrides rechargeables dans de telles conditions et circonstances fournissent en fait une option plus pratique, dans de nombreux cas, durant les premières étapes du développement du marché des véhicules électriques. Au bout du compte, les consommateurs doivent pouvoir faire un jugement de valeur fondé sur leurs besoins et choisir les véhicules qui affichent le meilleur rapport coût-rendement. On peut accroître l'adoption des véhicules électriques en mettant en place de façon proactive les politiques qui aident à accroître la demande des consommateurs à l'égard des véhicules électriques et à améliorer l'infrastructure de recharge dans les emplacements les plus efficaces et grâce à la sensibilisation publique. Dans un même ordre d'idées, les politiques qui offrent aux consommateurs des mesures incitatives à l'égard des véhicules électriques rechargeables ainsi que d'autres mesures rendant l'utilisation des véhicules électriques plus conviviale et moins coûteuse se sont révélées beaucoup plus utiles pour accroître les taux d'adoption par les consommateurs.

Nous proposons les recommandations et les mesures de collaboration suivantes qui permettraient de créer un partenariat avec le gouvernement : premièrement, la sensibilisation des consommateurs, comme je l'ai mentionné; deuxièmement, un soutien ciblé pour l'électrification du parc automobile des villes, des taxis, des véhicules de livraison, des services de partage de véhicules, et des parcs commerciaux et gouvernementaux; troisièmement, accroître le nombre de voies réservées aux véhicules à occupations multiples ou les voies rapides, l'accès, les bornes de chargement et les places de stationnement gratuits pour les véhicules électriques; quatrièmement, améliorer de façon prioritaire l'infrastructure de recharge de véhicules électriques en ville et en milieu de travail et améliorer les installations de recharge rapide le long des corridors à l'intérieur des villes; cinquièmement, maintenir les mesures incitatives intéressantes à l'intention des consommateurs, tant à l'échelon fédéral qu'à l'échelon provincial de façon à accélérer l'adoption, comme ce qui a été fait aux États-Unis, où il y a des mesures incitatives fédérales et au sein des États; sixièmement, envisager des possibilités de technologies écologiques, et je veux ici parler des activités de recherche, de développement et de mise à l'essai des batteries, des composantes des véhicules électriques, de l'infrastructure pour les véhicules électriques et les véhicules autonomes; et, enfin, comme je l'ai aussi mentionné, accélérer la mise au rancart des véhicules qui émettent beaucoup de gaz à effet de serre qui ont 12 ans et plus.

La construction automobile est aussi extrêmement exposée aux aléas du commerce et très sensible à toute augmentation des coûts imposés par les gouvernements provinciaux ou fédéral. C'est la raison pour laquelle un cadre pancanadien sur les changements climatiques est très important pour la compétitivité du secteur de la fabrication automobile du Canada et, au bout du compte, l'atteinte des objectifs économiques et environnementaux du Canada.

Nous avons besoin d'un cadre d'action national sur le climat qui assure la durabilité et la compétitivité à long terme de l'industrie automobile. C'est essentiel pour maintenir l'empreinte manufacturière actuelle du Canada et éviter la migration de nombreux milliers d'emplois — ce qu'on pourrait appeler une fuite carbonique — vers d'autres administrations, qui n'ont pas pris des engagements stratégiques similaires en matière de climat.

Au Canada, la concurrence au sein de l'industrie automobile a lieu dans un axe non pas est-ouest, mais nord-sud, entre le Canada et les États-Unis. Toutes les administrations canadiennes doivent continuer à soutenir la mise en œuvre nationale de règlements liés aux émissions de gaz à effet de serre pour aborder la question de la réduction des émissions du point de vue des gouvernements et des consommateurs.

Le fait d'ajouter une politique sous-nationale à ces règlements nationaux, qui sont harmonisés à l'échelle de l'Amérique du Nord, minera la capacité de l'industrie de déployer efficacement ces technologies, ce qui fera en sorte que les percées se feront, mais à un coût accru pour les consommateurs. Le maintien d'une approche réglementaire harmonisée qui permet de tirer parti des économies d'échelle nord-américaines fournit aux Canadiens un meilleur accès aux technologies automobiles de pointe et à leurs avantages environnementaux connexes, c'est-à-dire tant la réduction tant des émissions de gaz à effet de serre que des émissions liées au smog. Ces mesures sont conformes aux activités et objectifs du Conseil de coopération Canada-États-Unis en matière de réglementation et à la déclaration et au plan d'action des dirigeants du 29 juin 2016 dans le cadre du Partenariat sur le climat, l'énergie propre et l'environnement de l'Amérique du Nord.

Pour terminer, monsieur le président, l'ACCV souhaite toujours participer à des dialogues ouverts pour régler les problèmes que j'ai présentés ce matin, et nous aimerions assurément examiner toute option potentielle à l'avenir. Je serai heureux de répondre aux questions des honorables sénateurs. Merci.

Le président : Merci de nous avoir présenté cet exposé. Nous allons passer aux questions et commencer par le vice-président.

Le sénateur Massicotte : Vous nous avez présenté un bon exposé, très complet.

Permettez-moi un léger changement de sujet. Je vois dans vos documents à l'appui que vous avez calculé que les coûts actuels de la réglementation mise en place à l'égard de votre industrie... je souligne que la réglementation est très importante, parce que nous avons parlé du prix du carbone, mais la réglementation est une autre façon d'arriver à nos fins, mais c'est assurément plus dispendieux que de laisser libre cours aux forces du marché. Cependant, dans votre cas, vous avez calculé que la réglementation actuelle vous coûte de 243 à 291 $ la tonne. C'est le coût de l'imposition de la réglementation.

Lorsque vous nous voyez débattre, au pays, au sujet d'une taxe sur le carbone de 10 $, qui passera à 50 $ — et nous sommes tous d'accord pour dire que le principe du marché, c'est qu'il faut traiter tout le monde de la même façon et laisser le marché décider —, qu'avez-vous à dire relativement au fait que vous payez peut-être 275 $ la tonne? N'y a-t-il pas là une injustice d'une certaine façon? Nous prévoyons imposer une taxe sur le carbone supplémentaire sur l'essence, et vous semblez être visé un peu plus que les autres. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

M. Nantais : Je ne dirais pas qu'on nous vise nécessairement plus que les autres, mais je dois dire que nous sommes une industrie dont les produits sont très réglementés afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pas nécessairement directement, mais ces règlements, parce qu'ils sont aussi stricts, nous poussent et nous contraignent à adopter un modèle multitechnologique. Le coût de ces technologies est tel que, si on convertit le coût selon un équivalent en dioxyde de carbone, comme nous le disons, on arrive à environ 300 $ par tonne pour les véhicules électriques. C'est de nombreuses fois plus que les coûts normaux des options pour les crédits de gaz à effet de serre.

C'est un fait. Nous devons nous conformer à la réglementation et nous utiliserons ces diverses technologies pour y arriver. Mais nous voulons simplement mettre en lumière quels sont les coûts de la réglementation. Lorsqu'on présente ainsi les choses, et qu'on tient compte du coût de tout ce que nous mettons dans un véhicule afin de le commercialiser, nous subventionnons donc probablement déjà les coûts de ces véhicules à hauteur de 10 000 à 20 000 $ pour les véhicules hybrides rechargeables.

Selon nous, nous participons à l'atteinte des objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Je ne dirais pas que l'on est visé davantage, mais la réglementation est telle qu'il faut la comprendre. Les gens doivent comprendre que ce n'est pas le statu quo. L'industrie dépense, et ce ne sont pas nos estimations, soit dit en passant, c'est la National Highway Traffic Safety Administration américaine qui produit ces coûts ou ces estimations.

Voici où nous en sommes : nous allons faire ce que nous devons faire. Les véhicules électriques ne sont qu'un des moyens d'y arriver, mais nous allons continuer à améliorer de façon importante les moteurs à combustion internes et les groupes motopropulseurs grâce à l'allègement des véhicules et l'aérodynamique. Tout ça a un prix, et ces véhicules sont plus perfectionnés. Nous travaillons aussi avec nos collègues du secteur pétrolier, parce que nous allons avoir besoin de carburant adapté à ces technologies pour nos moteurs à combustion interne.

C'est une tâche importante et un grand défi. Il y a aussi des défis liés à l'utilisation des véhicules électriques, ici, au Canada, en raison des conditions météorologiques froides.

Le sénateur Massicotte : Il y a sept recommandations dans votre exposé, mais on m'a dit que le Conference Board du Canada a dit qu'il faut toujours parler des véhicules électriques. Cependant, ce qui sera beaucoup plus important pour atteindre les objectifs de 2030 du Canada, c'est l'application de règlements, si je peux m'exprimer ainsi, touchant l'efficience des véhicules existants au chapitre des émissions de dioxyde de carbone. Nous resserrons la vis et nous formulons des demandes plus élevées. C'est beaucoup plus important que l'électrification des véhicules du point de vue des résultats associés à la réduction des émissions de dioxyde de carbone.

L'autre chose que j'essaie de dire, c'est que vous parlez des vieilles voitures, celles qui ont 12 ans et plus... mais beaucoup de personnes disent que, si on peut retirer de la circulation tous les véhicules qui ont plus de cinq ans le plus rapidement possible, on contribuera encore plus aux objectifs en matière de réduction de GES qu'avec l'électrification. Qu'avez-vous à dire à ce sujet? Est-ce vrai?

M. Nantais : Nous avons opté pour les véhicules qui ont 12 ans et plus parce que c'était, grosso modo, une étape importante en ce qui concerne les émissions des véhicules. Que ce soit 5 ou 12 ans, il est évident que, si nous accélérons la mise au rancart de ces vieux véhicules, on obtient à la fois une réduction des émissions de gaz à effet de serre et une réduction des émissions liées au smog, ce qui améliore la qualité de l'air. Si je peux m'exprimer ainsi, on en obtient deux fois plus pour son argent.

Et en fait, on en obtient trois fois plus pour notre argent, parce que bon nombre de ces nouvelles technologies et de ces véhicules viennent avec certaines des meilleures technologies en matière de sécurité.

Le remplacement du parc automobile est évidemment une importante occasion de contribuer à l'atteinte de nos objectifs. Je suis d'accord avec vous là-dessus. Ma réponse est longue, mais je suis d'accord avec vous.

La sénatrice Seidman : J'allais approfondir la recommandation et vous parler d'électrification. Pour commencer, j'aimerais mettre l'accent sur la R-D en général, si vous le permettez. Vous avez donc présenté ces sept recommandations. Prenons la sixième, l'évaluation des occasions liées aux technologies vertes. Vous parlez de R-D et de mise à l'essai de certaines composantes électriques et de certains éléments d'infrastructure. Cependant, j'aimerais vous poser une question plus générale au sujet de la R-D aussi, et pas au sujet de l'électrification : quel est le rôle du Canada en matière d'innovation et de développement? Combien d'entreprises réalisent de telles activités au Canada, par exemple? Ou est-ce que, surtout, nous nous appuyons sur les activités de recherche et de développement réalisées aux États-Unis, au Japon ou dans d'autres pays?

M. Nantais : Oui et oui. Les entreprises que je représente, soit Fiat Chrysler, Ford et General Motors, comptent toutes des installations de recherche et d'ingénierie directement ici, au Canada. Vous entendez probablement souvent parler des véhicules connectés ou autonomes. Franchement, l'industrie automobile est en train de devenir le nouvel Internet des objets.

Puisque cette technologie évolue à un rythme effréné, il y a sûrement un rôle de recherche et de développement et d'ingénierie que peuvent jouer ces installations, ici même, au Canada. Il faut se pencher sur des choses comme l'intelligence artificielle, les logiciels et les matériaux légers, comme je l'ai mentionné. Ce sont tous des domaines où nous avons des capacités et une expertise au Canada, et les entreprises que je représente ont aussi créé des partenariats très précis avec les réseaux universitaires au Canada. Ces entreprises saisissent ces occasions, et il est évident que, au Canada, nous avons un rôle à jouer dans ce dossier.

La sénatrice Seidman : Ces travaux sont-ils intégrés d'une façon ou d'une autre? Y a-t-il une cohérence? Est-ce que les entreprises coopèrent et travaillent ensemble? Par exemple, nous avons entendu parler — et c'est aussi quelque chose que j'ai entendu de nombreux témoins dire dans le cadre des travaux d'un autre comité — du fait que, dans le domaine médical, les professionnels ont tendance à travailler en vase clos. Par conséquent, nous n'obtenons pas tous les résultats que nous pourrions obtenir. Est-ce la même chose dans l'industrie de l'automobile?

M. Nantais : Eh bien, il y a certaines activités de recherche et de développement en coopération durant le genre de période précompétitive. C'est à ce moment-là qu'on voit des partenariats, à la fois des entreprises qui travaillent ensemble, et, dans certains cas, aussi des entreprises qui créent des partenariats avec des universités.

Il est important de comprendre que, dans le secteur automobile, on ne se concentre pas beaucoup sur la recherche parce que ce genre de travail est réalisé, de façon générale, ailleurs, mais il y a tout de même un avantage au Canada. Cependant, c'est la commercialisation de cette technologie qui importe. Comment la commercialiser? Elle est là, la clé.

J'aimerais attirer votre attention sur le récent rapport sur l'innovation au Conseil du Partenariat pour le secteur canadien de l'automobile. Ce rapport donne une bonne description de ce que les entreprises et l'industrie font et là où il faut concentrer les activités de recherche, de développement et d'innovation au sein de l'industrie automobile au Canada. L'ACCV et ses compagnies membres en font partie, tout comme les syndicats, le gouvernement de l'Ontario, le gouvernement fédéral et le Québec. C'est un très bon rapport. Je recommande aux membres de votre comité d'y jeter un coup d'œil.

La sénatrice Seidman : Le passage à la commercialisation est crucial. Si vous deviez nous mentionner un ou deux obstacles, tirés de votre expérience, qui vous empêchent d'aller de l'avant à cet égard, quels seraient-ils?

M. Nantais : Il faut s'assurer que la réglementation peut vous être favorable, ce qui s'applique aussi dans le domaine de la recherche et du développement. Il faut s'assurer que ces règlements sont propices à ce qu'on fasse ce genre d'activité au Canada.

Ensuite, les crédits d'impôt pour les activités de RS et DE sont un autre domaine où des changements ont été apportés il y a un certain temps. Je ne suis pas convaincu que c'était les meilleurs changements à apporter parce que, franchement, dans le cas de l'industrie automobile, les résultats ne nous ont pas bien servis. C'est un autre dossier sur lequel il faudrait peut-être se pencher.

J'ai présenté un exposé au Comité de l'industrie de la Chambre des communes qui portait justement sur cela, et je serais heureux de vous fournir la présentation.

La sénatrice Seidman : Pouvez-vous nous la fournir rapidement maintenant ou allez-vous nous l'envoyer?

M. Nantais : Je viens de mentionner deux ou trois choses, par exemple.

La sénatrice Seidman : C'est parfait. Passons à l'électrification. Bon nombre de vos recommandations portent sur différents aspects de l'électrification. Dans ma ville, à Montréal, on a beaucoup mis l'accent sur l'électrification des véhicules. On a entendu dire à quel point il est beaucoup plus facile d'utiliser des véhicules électriques en ville que dans les zones plus rurales, où les gens doivent se déplacer sur de bien plus longues distances.

Dans le cadre des travaux d'électrification, est-ce que vous travaillez ici aussi avec vos homologues américains pour mettre au point la technologie nécessaire pour produire des véhicules qui seraient plus attirants pour les citadins et les gens qui demeurent dans des municipalités semi-rurales?

M. Nantais : Absolument. Votre question compte un certain nombre de facettes différentes. J'ai remarqué qu'il se passe beaucoup de choses au Québec dernièrement. De façon générale, les véhicules électriques, que ce soit les véhicules électriques à batterie principalement ou des véhicules électriques hybrides rechargeables, sont davantage adaptés au milieu urbain. C'est là où l'infrastructure est mise au point et c'est là qu'elle est déployée le plus efficacement.

Notre géographie est un enjeu incontournable. Si on regarde les statistiques actuelles, environ 65 p. 100 des ventes de véhicules électriques ont eu lieu, pour reprendre votre exemple du Québec, dans 15 centres urbains majeurs. C'est clairement un enjeu urbain.

Jusqu'à présent, les véhicules électriques ont tendance à être plus petits. C'est une situation qui change, et Fiat Chrysler conçoit actuellement une minifourgonnette hybride rechargeable à Windsor.

Les activités de recherche et de développement sur ces technologies sont réalisées à l'échelle mondiale. Ces entreprises font partie d'un réseau mondial, si vous voulez, qui réunit toute la chaîne de recherche et de développement et les chaînes d'approvisionnement à l'échelle internationale. Ces activités sont réalisées à l'échelle mondiale, et nous tentons toujours de trouver des façons de mettre au point un produit pour une plateforme mondiale qui pourrait être exportée dans tous les marchés.

C'est la raison pour laquelle il est important de conclure des accords commerciaux. C'est aussi la raison pour laquelle il est important de s'assurer d'avoir des normes communes. Toutes ces mesures sont des façons de réduire les coûts de mise en marché de ces véhicules en ce qui concerne les tests et les activités de validation. Nous sommes vraiment en voie de mettre au point ces véhicules à l'échelle mondiale.

Le sénateur Lang : J'aimerais poursuivre la série de questions que le sénateur Massicotte a commencée en ce qui concerne les coûts et la capacité éventuelle de compétitionner. Des règlements ont été adoptés, et il y a certaines cibles que vous devez respecter. De toute évidence, vous les respectez, et je crois que vos organisations et les entreprises devraient être félicitées pour les mesures qu'elles ont prises.

À la fin de votre déclaration, vous avez affirmé qu'ajouter des politiques sous-nationales à ces règlements nationaux, qui sont harmonisés à l'échelle de l'Amérique du Nord, minerait la capacité d'une industrie de déployer efficacement ces technologies et que le déploiement se ferait à un coût accru pour les consommateurs.

L'interprétation que je fais de cet énoncé, et j'aimerais le dire pour le compte rendu, c'est que, entre les administrations provinciales et fédérales, et peut-être, dans certains cas, municipales, aussi, on semble vouloir imposer une taxe sur le carbone en plus des règlements ou dans certaines provinces, une taxe sur le carbone ou des mesures de plafonnement et d'échange, et certains autres programmes qui auront pour effet d'accroître les coûts. Cela ferait-il en sorte que votre industrie sera moins en mesure de compétitionner avec nos voisins du Sud, que ce soit le Mexique ou les États-Unis? Dans l'affirmative, quel sera l'impact sur votre industrie?

M. Nantais : Sénateur, si vous me le permettez, je vais séparer la question en deux éléments. Le premier concerne le produit en tant que tel, et nous allons parler des normes sous-nationales.

Nous avons exercé beaucoup de pressions pour permettre une harmonisation des normes en matière d'émissions et de sécurité des véhicules à l'échelle de l'Amérique du Nord, principalement au Canada et aux États-Unis, parce que nous tirons parti du grand marché nord-américain. Les marchés sont intégrés. Nous avons les mêmes politiques publiques et la même géographie. Nous pouvons réduire les coûts en offrant ces véhicules sur le marché et, au bout du compte, rendre ces produits plus abordables pour les consommateurs. Cela signifie que les consommateurs bénéficient d'un meilleur accès, qui est plus grand et plus rapide que si une province décidait d'appliquer ses propres politiques et règlements en matière de véhicules.

Soit dit en passant, c'est la même chose pour les carburants. Si, comme certaines provinces ont essayé de le faire dans le passé, elles décidaient de le faire, l'effet serait négatif sur toute la ligne, parce qu'il y a tellement d'avantages, tant pour le gouvernement que pour l'industrie.

Si les gouvernements agissaient de la sorte au sein de chacune de leurs administrations, au niveau provincial, pour commencer, cela ne ferait aucune différence en ce qui a trait aux véhicules qui sont offerts sur le marché, parce que le marché n'est pas assez grand dans cette administration pour que l'on apporte les modifications à la conception des véhicules ou qu'on favorise de tels changements. Ça ne se produira pas. La taille du marché canadien est insuffisante pour entraîner des changements importants de la conception des véhicules. Il faut des marchés plus grands et plus globaux pour ce faire.

Il est important de garder le cap, et de rester fidèle à l'harmonisation des normes de sécurité et d'émissions pour les raisons que j'ai mentionnées. Évidemment, le Conseil de coopération en matière de réglementation a cherché des façons d'éliminer les différences de réglementation, et nous avons fait des progrès du côté des véhicules et de la sécurité. Je vais donner Environnement et changement climatique Canada comme exemple d'un ministère qui a vraiment assumé la question de l'harmonisation et qui a harmonisé parfaitement les normes d'émissions des véhicules légers et des véhicules utilitaires lourds, qui sont neutres sur le plan du combustible, soit dit en passant, afin que tous les véhicules, peu importe s'ils fonctionnent à essence ou au diesel, doivent respecter ces normes partout en Amérique du Nord. Un tel modèle donne de véritables avantages.

Le deuxième élément de votre question concerne le fait que le Canada adopte une taxe sur le carbone ou un programme de plafonnement et d'échange. Nous sommes confrontés aux deux actuellement et, dans notre industrie, du point de vue manufacturier, tout ce qui fait augmenter les coûts des affaires au Canada mine notre capacité de compétitionner, principalement avec les États du Midwest et du sud des États-Unis. Par exemple, en Ontario, le programme de plafonnement et d'échange entraînera une certaine augmentation des coûts, ce que n'ont pas et n'auront pas à assumer nos usines concurrentes dans ces États. Il n'y a pas là-bas de telles politiques ni de tels coûts connexes.

L'électricité est l'un des coûts visés par le système de plafonnement et d'échange, et nos usines de fabrication — et, ici, je parle non seulement des trois entreprises que je représente, mais des cinq fabricants qui produisent des véhicules en Ontario — devront payer des coûts d'électricité qui sont beaucoup plus élevés que ceux dans les administrations concurrentes. Dans notre cas, c'est de deux à trois fois plus. C'est un coût très important qui a pour effet d'augmenter les coûts de base pour faire des affaires en Ontario.

Puis, on ajoute possiblement une taxe sur le carbone. Effectivement, tout porte à croire que le gouvernement fédéral y réfléchit, et s'il y a des politiques équivalentes actuelles en vigueur, la politique au niveau provincial l'emportera, et la taxe supplémentaire sur le carbone ne s'appliquera pas.

Nos chaînes d'approvisionnement ratissent large, et depuis l'extraction des minéraux ou des minerais pour en faire de l'acier jusqu'à nos usines d'assemblage, il y aura de nouveaux coûts à chaque étape du processus. Puis, en plus, les coûts de transport s'ajouteront à la facture.

Ce qu'il est vraiment essentiel de comprendre, ici, c'est que notre industrie est très exposée aux échanges. En d'autres mots, nous exportons environ 97 p. 100 de ce que nous fabriquons ici, au Canada, mais notre intensité énergétique est faible. Comme je l'ai mentionné, nous représentons moins de 1 p. 100 des émissions de GES en Ontario, et, actuellement, le programme de plafonnement et d'échange ne le reconnaît pas suffisamment. Nous continuons de travailler en collaboration avec le gouvernement de l'Ontario pour trouver des façons de nous assurer que nous pourrons fonctionner sur un pied d'égalité, si je peux le dire ainsi, et que notre compétitivité n'est pas minée par ces coûts supplémentaires. Ce sera un défi difficile à relever.

Ce dont nous avons vraiment besoin actuellement, c'est de certitude en ce qui concerne la période après 2020, et nous n'en avons pas.

Le sénateur Lang : Je veux poursuivre sur la question des coûts prévus. Laissons tomber la taxe fédérale sur le carbone, mais parlons du système de plafonnement et d'échange. Quelle est la répercussion financière sur votre industrie que vous avez calculée jusqu'à présent?

M. Nantais : On ne le sait pas en fait. Nous avons certains chiffres confidentiels, et je vais bien sûr voir dans quelle mesure je peux vous les fournir.

Le sénateur Lang : Vous pouvez faire ça?

M. Nantais : Je vais me pencher sur la question.

Le sénateur Lang : Premièrement, selon moi, notre comité et le grand public devraient connaître les conséquences à long terme de ces programmes. Deuxièmement, cela dit, si nous poursuivons dans cette voie, envisagez-vous de possibles fermetures ou déménagements de diverses usines en raison des coûts engagés dans le cadre de ces divers programmes?

M. Nantais : Oui. À long terme, dans le cadre de nos cycles d'investissement, on prend aujourd'hui les décisions qui seront appliquées dans 10 ans. Par exemple, la première période de conformité dans le cadre du programme de plafonnement et d'échange ontarien se termine en 2020. Tout devrait aller pour la première période, mais sans assurance et sans connaître ce que sera le coût du carbone après cette période — et nous savons aussi que les taux d'électricité augmenteront probablement — composer avec tout cela sera un défi de taille.

On parle d'entreprises multinationales, et nous utilisons, par exemple, le gaz naturel pour faire deux choses. Premièrement, pour chauffer nos usines, ce qui est exigé par la loi, et, deuxièmement, pour exécuter nos activités de peinture à sec et nous assurer que la température de l'air dans nos ateliers de peinture est adéquate. Ce sont des coûts visés par le programme de plafonnement et d'échange que n'ont pas à assumer nos usines concurrentes au Texas, par exemple. Ils n'ont pas de saison froide là-bas et ils n'ont pas à veiller à ce que la température de l'air dans leurs ateliers de peinture soit adéquate.

Et il faut ajouter l'électricité à tout ça. Nous sommes de grands consommateurs d'électricité, et nous sommes ce qu'on appelle des utilisateurs constants. En d'autres mots, nous maximisons la consommation d'électricité des usines et essayons d'atteindre un taux d'utilisation supérieur à 90 p. 100. En ce qui a trait aux coûts de l'électricité, nous ne pouvons pas consommer durant les heures creuses, parce que nous avons trois quarts qui couvrent 24 heures et ce qu'on appelle le facteur de rajustement global, qui est très important, est tout simplement quelque chose avec lequel nous ne pouvons pas composer et auquel nous ne pouvons pas nous adapter.

Le sénateur Patterson : J'ai été très impressionné par votre exposé, et je crois comprendre que l'industrie génère 550 000 emplois partout au pays. C'est très important et très impressionnant.

J'ai jeté un coup d'œil à vos recommandations. Nous sommes bien sûr un comité du Parlement, et nous formulons des recommandations au gouvernement fédéral. Je me demande si nous devrions nous pencher sur la question de l'élimination des vieux véhicules, ceux qui émettent beaucoup de gaz à effet de serre. Vous avez recommandé qu'on le fasse, alors quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il assumer dans un tel processus?

M. Nantais : Le gouvernement fédéral pourrait, comme d'autres gouvernements l'ont déjà fait, fournir des mesures incitatives à la mise au rancart des vieux véhicules. Par exemple, actuellement, dans la province de la Colombie-Britannique, le gouvernement offre une mesure incitative lorsque les gens envoient leurs vieux véhicules à la ferraille. Ce qui est très intéressant dans le cadre de ce programme, c'est qu'il est maintenant jumelé au programme d'incitatif à l'achat de véhicules électriques de la province. Par conséquent, si une personne veut se débarrasser d'un vieux véhicule qui produit une grande quantité de gaz à effet de serre et d'émissions liées au smog, elle peut mettre son véhicule au rancart et bénéficier ainsi d'une mesure incitative parce que le véhicule part pour la ferraille et elle peut bénéficier de la mesure incitative pour l'achat de véhicules électriques, si elle passe directement d'un vieux véhicule conventionnel à un nouveau véhicule électrique. Cette mesure a vraiment fait augmenter les ventes de véhicules électriques en Colombie-Britannique.

Il y a un rôle à jouer. Nous avons fait ce genre de choses dans le passé et on a ainsi accéléré le rythme, tant du côté des gouvernements que des entreprises, soit dit en passant, et étant donné la grande quantité de ces vieux véhicules encore sur la route, c'est une réelle occasion, comme je l'ai dit, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les émissions liées au smog.

Le sénateur Patterson : Croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait faire quelque chose ou si c'est le travail des provinces? Vous avez parlé de ces politiques sous-nationales. Cherchiez-vous à nous avertir que nous devons essayer d'assurer une certaine uniformité?

M. Nantais : Ce que nous disons, c'est que nous voulons que le gouvernement continue de jouer son rôle en matière de réglementation des normes sur les véhicules, tant du côté des émissions que du côté de la sécurité, et qu'il devrait trouver des façons et des occasions de travailler en collaboration avec les provinces pour fournir des mesures incitatives, pas seulement pour mettre au rancart les vieux véhicules, mais pour fournir, assurément, dans le cas des véhicules hybrides rechargeables et des véhicules électriques à batterie, des mesures incitatives qui aideront les consommateurs à pouvoir se payer ces technologies plus perfectionnées, ce qui aura pour effet, au bout du compte, d'accroître les ventes de ces véhicules.

Les véhicules électriques comptent actuellement pour moins de 1 p. 100 des ventes. Dans l'État de la Californie, qui est de la partie depuis plus de 25 ans, c'est tout de même moins de 2 p. 100.

Les consommateurs voient bien que la technologie évolue et que les véhicules électriques s'améliorent, mais les consommateurs éprouvent encore certaines réticences à l'idée d'acheter de tels véhicules, et c'est peut-être en raison de là où ils vivent, au Canada, étant donné certaines des limites qu'ont ces véhicules dans des conditions météorologiques froides : les consommateurs peuvent s'inquiéter de l'autonomie, et ainsi de suite. Par conséquent, si on veut augmenter davantage les ventes, il faut mettre en place des mesures incitatives et il faudra que les gouvernements fédéral et provinciaux — et, au bout du compte, les municipalités ont un rôle à jour, selon moi, en ce qui a trait à l'infrastructure — travaillent en collaboration et cherchent des synergies et des occasions.

Le sénateur Patterson : Je m'éloigne peut-être un peu de notre sujet des coûts liés à l'écologisation, mais vous avez souligné à quel point le secteur de la fabrication des véhicules canadiens est exposé aux échanges, et je crois que la production des véhicules au Canada contribue à notre excédent commercial.

M. Nantais : Oui, absolument.

Le sénateur Patterson : C'est quelque chose de très important. Avez-vous quelques brefs commentaires à formuler sur les répercussions pour le secteur manufacturier de l'Accord de libre-échange avec l'Europe et du Partenariat transpacifique? Avez-vous participé aux négociations et espérez-vous que ces accords seront adoptés?

M. Nantais : La réponse courte, c'est oui, particulièrement l'Accord avec l'Union européenne. C'est quelque chose que nous soutenons beaucoup. Je crois savoir que, une minute avant 9 heures, nous procéderons à la ratification. C'était ce matin. Nous en sommes heureux. Nous appuyons cet accord.

L'AECG était différent, dans la mesure où il a été négocié et reconnu dans l'intégration de notre industrie, et c'est vraiment essentiel.

On reconnaît aussi le fait que, au bout du compte, les États-Unis se joindront à la partie : par conséquent, lorsqu'on parle de notre industrie intégrée, espérons qu'il y aura des dispositions permettant ce que nous appelons l'accumulation du contenu. Nous pourrions ainsi obtenir du contenu comme c'est le cas à l'échelle de l'Amérique du Nord, actuellement. C'est un très bon aspect de l'accord.

Pour ce qui est des autres accords de libre-échange, comme le PTP, par exemple, nous appuyons beaucoup tous les accords commerciaux, mais le PTP n'a pas livré la marchandise en ce qui concerne le secteur automobile. Tout dépendant de ce qui arrivera aux États-Unis, de ce que la nouvelle administration fera ou non, le gouvernement peut donner une certaine idée de ce qu'il est prêt à faire pour régler certains des problèmes qui, vraiment, au bout du compte, créent des disparités importantes dans les tableaux de réduction tarifaire du Canada et des États-Unis, ce qui nous désavantage.

La sénatrice Omidvar : Pardonnez-moi de poser une question qui a peut-être été posée tantôt et à laquelle vous avez peut-être déjà répondu. Je suis une nouvelle membre du comité et je remplace la sénatrice McCoy, mais, comme d'autres Canadiens, je comprends et j'apprécie le rôle que votre industrie joue dans le cadre de notre économie.

Ma question concerne les recommandations que vous faites au sujet des incitatifs, soit que le gouvernement fournisse davantage d'incitatifs aux consommateurs. Outre les incitatifs, j'aimerais avoir vos commentaires sur le comportement que le gouvernement fédéral pourrait adopter pour que les autres le suivent. Je parle de l'importante capacité au chapitre des approvisionnements et de l'établissement des normes que le gouvernement lui-même applique aux marchés. Savez-vous si le gouvernement du Canada respecte les normes qu'il envisage de proposer et s'il se sert de cet outil de l'approvisionnement pour poursuivre ses objectifs en matière d'énergie?

M. Nantais : Puisque le Canada a signé l'Accord de Paris sur les changements climatiques et qu'il l'a ratifié, il a envoyé à tous les ministères un signal concernant leurs objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Quand il s'agit d'acheter de nouveaux véhicules, pour ses parcs et tout cela, il se montre à notre avis très ouvert à l'idée d'acheter des véhicules qui réduisent de beaucoup les émissions de gaz à effet de serre, qu'il s'agisse de véhicules à combustion interne améliorés ou de véhicules électriques. Mais ils ont aussi des critères à respecter, toutefois. Nous sommes un vaste pays, et les véhicules circulent dans des environnements très différents. Ils doivent également s'assurer que ces véhicules respectent toutes les exigences en matière de sécurité et d'utilité.

À notre avis, le gouvernement fédéral est certainement prêt et disposé à le faire, et, il a commencé, grâce à des politiques en matière d'approvisionnement, à acheter des véhicules et d'autres équipements écoénergétiques qui l'aident à atteindre ses cibles. Pourrait-il en faire davantage? Oui.

Le président : Nous arrivons à la fin de la série de questions, mais j'en ai une ou deux. Nous allons ensuite commencer un second tour de questions plus rapides, en surveillant l'heure.

On nous a dit que la cible à respecter consiste à réduire, d'ici 2030, les émissions de 30 p. 100 par rapport aux niveaux de 2005. Est-ce que l'industrie automobile est prête à respecter les cibles énoncées? Après 2030, elles deviennent beaucoup plus sévères, mais nous n'allons parler que de l'échéance de 2030.

M. Nantais : La cible de 2030 est imposée à l'ensemble du pays, tout comme les cibles annuelles subséquentes. Nous sommes cependant convaincus que nous faisons une contribution importante à l'égard de cette cible. Comme je le disais, les véhicules légers, c'est-à-dire les automobiles et les camions légers, ne comptent que pour 11 p. 100 du nombre total de véhicules.

Les informations et les données les plus récentes d'Environnement Canada montrent que la réglementation que nous avons adoptée en matière d'émissions de gaz à effet de serre, par exemple, entre 2011 et 2014, a réussi à elle seule à réduire de 8,2 p. 100 les émissions des automobiles à passagers et de 7,8 p. 100 les émissions des camions légers. En fait, nous sommes à l'avant-garde du côté de la réglementation.

Nous pensons que ces réductions vont se poursuivre jusqu'en 2025 et au-delà grâce aux nouvelles technologies qui arrivent sur le marché.

Pour parler franchement, je ne crois pas que notre rôle soit de respecter cette cible spécifique de réduction de 30 p. 100 ou encore la cible qui a été définie pour l'ensemble du Canada, mais nous croyons que notre rôle consiste à contribuer à l'atteinte de cette cible par la façon dont nous concevons et construisons nos produits.

Le président : Je comprends. Je ne vous pointe pas du doigt, je demande à tous les témoins qui comparaissent devant nous s'ils sont en voie de respecter la cible de 30 p. 100 de réduction. Je comprends ce que vous dites, mais il faudrait alors que quelqu'un en fasse davantage, ailleurs. Je sais que c'est une façon plus simple de faire les choses, mais c'est une façon, en réalité, d'essayer de savoir si nous allons atteindre cette cible.

La cible est de 291 mégatonnes, au-delà des niveaux de 2005, et nous devrons avoir réduit les émissions d'autant d'ici 2030; j'ai souvent dit que si on éliminait complètement l'industrie pétrolière et gazière — et cela aurait des conséquences immenses pour vous —, si on éliminait complètement cette industrie, on ne respecterait même pas la cible des 291 mégatonnes.

M. Nantais : Comme je le disais plus tôt, cependant, si vous pensez à la période qui va de 2008 à 2025, ces véhicules et ces nouvelles technologies vont permettre une réduction de 226 mégatonnes. C'est assez proche, pour notre industrie.

Le président : D'accord. C'était la question que je voulais vous poser. Je suis peut-être un peu perdu, parce qu'il est tôt...

M. Nantais : C'est probablement de ma faute.

Le président : ..., mais vous êtes en train de dire que vous pourriez réduire les émissions de 266 mégatonnes d'ici 2025. C'est à la page 6. Donc, ma première question visait à savoir si vous êtes en voie de respecter la cible de 30 p. 100 de réduction. Vous avez dit ensuite que vous pourriez même aller au-delà. Quelle réponse est la bonne?

M. Nantais : En toute honnêteté, je ne pourrais pas dire si nous allons atteindre la cible de 30 p. 100 de réduction, mais cela équivaut à 290 millions de tonnes; c'est ce que vous avez dit, je crois. Dans notre industrie, nous visons 266. Cependant, en ce qui concerne les normes qui s'appliquent à ces véhicules, nous nous attendons à faire mieux que ce qui est exigé. Je pourrais dire les choses ainsi.

Le président : D'accord.

J'ai une autre question : Où fabriquez-vous vos produits? Où vous procurez-vous l'acier, l'aluminium, le verre, les plastiques, toutes ces choses dont vous avez besoin pour les fabriquer? Est-ce au Canada ou à l'étranger?

M. Nantais : C'est au Canada, mais nous nous procurons certaines choses à l'étranger. Nos usines fonctionnent selon le principe de la livraison juste-à-temps, et nos fournisseurs ont tendance à s'intéresser aux usines de montage qui font office de piliers. Oui, nous achetons de l'acier, du verre et de nombreuses composantes au Canada, pour nos véhicules. Toutefois, étant donné que nous sommes des entreprises internationales et que nous devons garder nos coûts le plus bas possible, nous avons également mis en place des chaînes d'approvisionnement mondiales. Il est évident qu'une partie de nos matériaux et de nos composantes viennent des États-Unis et d'ailleurs.

Ce qu'il est important de savoir, c'est que ces composantes doivent arriver juste à temps, ce qui fait que nous essayons dans la mesure du possible de nous les procurer au Canada ou près de la frontière du Canada.

Le président : Pourriez-vous trouver le pourcentage et le communiquer à la greffière? Je ne vous demande pas de le faire tout de suite, mais, sauriez-vous quel est le pourcentage des principaux produits que vous utilisez pour construire les véhicules qui sont faits au Canada par rapport à ceux qui sont importés?

M. Nantais : Il serait peut-être un peu difficile de le savoir. Il se peut que ce soit en partie des renseignements commerciaux de nature délicate. Nous sommes régis par l'ALENA. Selon cet accord, nous devons acheter en gros 62,5 p. 100 du contenu en Amérique du Nord, et c'est là un point important.

Le président : Vous devez donc acheter 62 p. 100 de vos matériaux en Amérique du Nord, et le reste, vous l'achetez ailleurs dans le monde?

M. Nantais : N'importe où.

Le président : D'accord.

M. Nantais : Grosso modo.

Le sénateur Mockler : Merci de cet exposé, qui était bien documenté; j'ai toutefois quelques questions sur l'harmonisation avec les États-Unis et, en particulier, sur la loi « Buy America ». Est-ce que cette loi a une incidence, actuellement, sur la recherche et le développement qui se font au Canada?

M. Nantais : Je ne crois pas. Dans le poste que j'occupe, je ne traite pas beaucoup d'information; mais non, je ne le crois pas, pas en ce qui concerne la recherche et le développement.

Le sénateur Mockler : Nous entendons dire qu'il se fait de la recherche dans le domaine des automobiles sans conducteur; est-ce que c'est une façon de réduire les émissions?

M. Nantais : Pourriez-vous répéter la question?

Le sénateur Mockler : Des automobiles sans conducteurs.

M. Nantais : Ah oui, les voitures autonomes

Le sénateur Mockler : Oui.

M. Nantais : C'est une époque formidable, pour l'industrie automobile. Qu'il s'agisse de la mise au point de voitures branchées, qui communiquent entre elles — on parle de communication de voiture à voiture, ou de communication V à V —, ou d'automobiles qui communiquent avec une infrastructure, c'est-à-dire avec les feux de circulation et tous les signaux; ces véhicules ont un rôle à jouer dans la réduction de la congestion routière et, au bout du compte, offrent même des avantages sur le plan de la sécurité.

Les voitures autonomes, les voitures sans conducteur, bien sûr, semblent à bien des égards être le nec plus ultra, et on est en train de les mettre au point. Nous savons comment les construire. Le coût demeure un problème, et l'infrastructure qui devra les soutenir présente encore des problèmes, et il y a d'autres aspects, comme la cybersécurité, auxquels il faut absolument voir; mais nous y voyons, à mesure que nous progressons.

Voilà le genre d'avancées et d'évolution, dans notre industrie, qui créent de nouveaux modèles d'affaires, et les entreprises qui seront présentes dans ce secteur, à l'avenir, sont en train de modifier leurs modèles d'affaires pour s'y adapter. Qu'il s'agisse de covoiturage ou de voitures autonomes, il est certain que les entreprises que je représente ont prévu d'être présentes dans ce secteur un jour.

Il pourrait y avoir un nouveau modèle d'affaires selon lequel une entreprise, même si ses ventes de véhicules resteraient importantes, tirerait profit de l'offre de nouveaux services, dans ce secteur, par exemple le covoiturage. Notre secteur est déjà en train de changer, dans tous les domaines.

Le sénateur Massicotte : Ce que nous voulons, c'est être certains que nous resterons concurrentiels et que nous n'imposons pas des règlements et des taxes qui n'existeront pas aux États-Unis. Est-ce que le coût de production d'un véhicule au Canada, aujourd'hui, est à peu près le même qu'aux États-Unis ou est-ce qu'il est très concurrentiel? Nous pourrions réduire le nombre de véhicules qui circulent sur nos routes, mais il arrive souvent qu'ils se retrouvent en Afrique, où ils continuent à rouler jusqu'à ce qu'ils tombent en morceaux; en tant que citoyens du monde, cela ne nous aide absolument pas, dans le dossier des GES. Pourriez-vous commenter ces deux aspects?

M. Nantais : Il est certain que, en ce qui concerne la concurrence avec les États-Unis et le coût de la construction d'un véhicule au Canada, le Canada est l'un des endroits du monde où il coûte le plus cher pour produire des véhicules. Comme je l'ai dit plus tôt, les nouveaux coûts que nous allons peut-être devoir assumer ne nous aideront certainement pas; mais il y a d'autres aspects positifs à faire des affaires ici, qu'il s'agisse de notre infrastructure, de notre main-d'œuvre spécialisée ou des conventions de travail améliorées; nous arrivons toujours à gérer la situation, et nous recherchons de nouveaux investissements.

En ce qui concerne les vieux véhicules qui ne peuvent plus circuler sur nos routes et qui sont vendus sur d'autres marchés, je ne suis pas certain que nous pourrions y mettre un terme, mais nous pouvons garder ces véhicules, les garder au Canada, et 90 p. 100 des nouveaux véhicules sont recyclés. Nous allons bientôt faire une annonce, avec l'industrie du recyclage des automobiles, pour dire que nous ajoutons de nouvelles normes visant à faire en sorte que les véhicules sont bien gérés, du point de vue de l'environnement.

Le sénateur Lang : J'aimerais revenir à la question des cibles, que vous dites atteindre et que vous allez atteindre, selon ce que vous avez dit en répondant à la question du sénateur Neufeld. Allez-vous être en mesure de relever vos cibles et de mieux atteindre les cibles, en Ontario, étant donné les programmes comme le programme de plafonnement et d'échange ou encore la taxe sur le carbone, ou pensez-vous que vous allez vous en tenir aux engagements que vous avez déjà pris au regard de la réglementation?

M. Nantais : En ce qui concerne le programme de plafonnement et d'échange de l'Ontario, nous avons tout à fait l'intention de travailler avec le gouvernement ontarien pour arriver là où nous voulons arriver. Depuis 1990, année après année, nous avons amélioré l'écoefficacité de nos installations, et la plus grande partie des mesures faciles à prendre ont été prises.

Nous devons maintenant nous concentrer sur ce que nous pouvons faire. De manière générale, il est possible de réaliser d'importantes réductions supplémentaires grâce à de nouveaux investissements dans les installations. Il faut donc de nouveaux investissements qui nous permettent de remplacer la totalité des anciennes technologies par de nouvelles technologies. Voilà ce qu'il faut faire.

Mais nous avons déjà accompli une bonne partie des travaux initiaux qu'il nous fallait faire pour en arriver là où nous en sommes, et c'est pourquoi nous sommes en dessous du 1 p. 100, mais les politiques qui soutiennent les nouveaux investissements fédéraux et provinciaux ne font pas que procurer des emplois et des avantages économiques : elles donnent également accès à de nouvelles technologies grâce auxquelles on peut faire d'autres améliorations bonnes pour l'environnement.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Nantais. C'était très intéressant. Si des documents supplémentaires sont demandés, je vous prierais de les faire parvenir à la greffière, qui s'assurera de nous les remettre.

Bienvenue à la deuxième partie de la séance du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivons notre étude sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

J'ai le plaisir d'accueillir M. Garth Whyte, président et directeur général de Fertilisants Canada, et M. Clyde Graham, vice-président principal.

Garth Whyte, président et directeur général, Fertilisants Canada : Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. C'est un plaisir d'être ici. Mon collègue s'appelle Clyde Graham; il est notre vice-président principal.

Nous avons présenté des exposés à bien des endroits, et l'ordre du jour a quand même énormément changé; nous nous excusons donc de ne pas vous avoir remis le texte de l'exposé que je vais vous présenter aujourd'hui. Nous vous avons remis notre rapport annuel, qui explique qui nous sommes, ce que nous faisons et les enjeux importants pour notre secteur. Le document a été traduit, et vous en avez aussi une copie.

Nous représentons un secteur dont les membres sont notamment des fabricants d'azote, de phosphate, de potasse et de soufre, qui vendent des engrains aux agriculteurs et aux propriétaires fonciers. Les engrais maintiennent la productivité du sol, une des ressources naturelles les plus précieuses du monde, qui assurent la culture d'environ 50 p. 100 des aliments. Pour nourrir la population mondiale, qui, selon les projections, devrait atteindre 9 milliards de personnes d'ici 2050, il nous faut augmenter le rendement des cultures de 70 p. 100.

Les engrais sont un élément essentiel, quand on veut intensifier la production et en assurer la durabilité, et il est important que nous nous assurions que l'économie agricole du Canada puisse relever cet important défi. La Saskatchewan est le plus grand producteur de potasse du monde, puisqu'elle produit 46 p. 100 de la potasse offerte sur le marché mondial. L'Alberta possède la plus importante concentration d'installations de production d'engrais azotés de l'Amérique du Nord, et cette production ajoute de la valeur au gaz naturel de la province. De plus, le siège social de la plus importante entreprise de production d'engrais du monde se trouve au Canada, et notre pays est en outre le plus important vendeur de produits agricoles du monde. Tous ces faits, de même que les contributions de nos membres, sont essentiels si l'on veut augmenter de façon durable la production agricole.

L'an dernier, le paysage de la réglementation sur les gaz à effet de serre a changé, et, pendant que le gouvernement élabore une stratégie pour lutter contre les changements climatiques, nous insistons pour qu'il collabore avec les principales industries, par exemple la nôtre. Nous demandons également aux membres du comité de réfléchir aux recommandations suivantes : premièrement, promouvoir des pratiques agricoles intelligentes face au climat afin d'assurer une production agricole durable. Ensuite, établir des cibles réalistes et par secteur pour la réduction des émissions. Enfin, créer un programme d'écoefficience que notre secteur aura les moyens de mettre en œuvre.

Nourrir le monde en adoptant des pratiques agricoles intelligentes face au climat, selon la définition des Nations Unies, est une priorité pour les membres de Fertilisants Canada. En raison des changements climatiques, il devient toujours plus urgent de relever le défi, c'est-à-dire de nourrir plus de gens malgré que les terres agricoles sont moins étendues, et cela menace la productivité et nous force à adapter plus rapidement les systèmes agricoles. La réduction des émissions ne peut pas se faire au détriment de la production alimentaire. Au contraire, les agriculteurs doivent viser un rendement plus élevé avec les mêmes intrants et les mêmes ressources. À l'occasion de la COP21, et la semaine prochaine, à la COP22, nous expliquerons comment notre secteur peut aider le gouvernement à atteindre ses cibles en matière de réduction des gaz à effet de serre à l'aide des ressources agricoles, à l'aide du programme 4R Nutrient Stewardship, ce qui signifie la bonne source de fertilisant à la bonne dose, au bon moment et au bon endroit.

Le programme 4R Nutrient Stewardship est une approche scientifique de la gestion des nutriments qui améliore la productivité agricole tout en réduisant les impacts sur l'environnement. Fertilisants Canada a consacré de grands efforts, sur plusieurs années, pour améliorer continuellement ce programme; notre organisme travaille de concert avec les gouvernements, les ONG, les universités et d'autres intervenants pour mettre en œuvre des programmes de recherche, élaborer des paramètres et en promouvoir l'adoption partout dans le monde. La recherche financée par le gouvernement du Canada, à laquelle notre secteur contribue à parts égales, confirme elle aussi les avantages des pratiques 4R Nutrient Stewardship.

La réduction des émissions est d'autant plus facile lorsque les agriculteurs sont mobilisés. Le Protocole de réduction des émissions d'oxyde nitreux, le PREON, qui s'appuie sur le programme 4R, permet d'obtenir des crédits monnayables. Le PREON a été élaboré au Canada et, avec l'aide du gouvernement et en supposant une adoption plus large, il fera du Canada un chef de file de l'agriculture intelligente face au climat. À l'heure actuelle, l'Alberta l'utilise avec son régime de réduction des émissions, et, s'il était adopté dans d'autres régions, il entraînerait une réduction importante des émissions de gaz à effet de serre, de l'ordre d'une ou de deux mégatonnes annuellement, pour l'ouest du Canada seulement.

Fertilisants Canada demande au comité de recommander que le PREON, à titre de protocole compensatoire visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole, soit mis en œuvre pour aider le Canada à respecter ses cibles.

Le comité devrait également savoir que des cibles de réduction inatteignables, pour des motifs économiques ou scientifiques, auront un effet négatif sur la compétitivité du secteur de la production d'engrais du Canada et qu'elles entraîneront une hausse du taux de fuites de carbone. Le secteur de la fabrication d'engrais azotés, en particulier, est un des plus grands consommateurs d'énergie du monde et un des plus exposés en matière de commerce. Notre secteur a collaboré avec les gouvernements fédéral et provinciaux pendant plus d'une décennie à un programme de contrôle de notre rendement, qui a permis de conclure que les installations canadiennes se retrouvent dans le quartile supérieur quant à l'écoefficience et aux émissions de gaz à effet de serre. Nous faisons partie de la tranche de 25 p. 100 supérieure, à l'échelle du monde. Il n'y a pas à l'heure actuelle de procédé commercial révolutionnaire qui pourrait remplacer les systèmes de production existants.

Des cibles de réduction trop élevées par rapport à ce qui est réalisable éroderont notre compétitivité mondiale et ne donneront aucun résultat concret quant à la réduction à l'échelle mondiale. Nous recommandons que les politiques du gouvernement soient fondées sur des données scientifiques, qu'elles soient réalistes et adaptées aux différents secteurs et qu'elles tiennent compte de manière équilibrée des objectifs environnementaux et de la réalité de notre industrie. Nous avons déjà consacré d'importants efforts à élaborer une norme de rendement réaliste et fondée sur des données scientifiques, dans le cadre d'une collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, et nous sommes favorables à son application à l'échelle du Canada.

Pour terminer, nous encourageons le gouvernement à mettre en place un programme d'écoefficience pour le secteur industriel. L'industrie des engrais soutient les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixées par le fonds fédéral-provincial assorti d'une enveloppe de deux milliards de dollars et d'un objectif sur deux ans. Toutefois, nous croyons qu'il existe une réelle possibilité d'en tirer encore plus d'avantages. Les secteurs qui consomment beaucoup d'énergie et sont de ce fait les plus exposés en matière de commerce doivent livrer concurrence à des industries étrangères qui ne sont pas assujetties aux mêmes cibles ni aux mêmes politiques en matière de changements climatiques, et nous courons donc un grand risque au chapitre de la diminution des investissements et des fuites de carbone.

Nous recommandons que le gouvernement établisse un programme d'efficacité énergétique et qu'il se dote des ressources nécessaires pour mener des études et des projets axés sur l'efficience afin de soutenir les secteurs grands consommateurs d'énergie, exposés en matière de commerce, qui essaient de tirer profit des occasions de réduire encore les émissions restantes tout en demeurant compétitifs.

Fertilisants Canada se dit prêt à travailler avec le gouvernement. Il est important de bien faire les choses.

Pour conclure, j'aimerais remercier le comité de nous avoir donné l'occasion de présenter nos points de vue. En résumé, nous recommandons de promouvoir des pratiques agricoles intelligentes face au climat pour assurer une production alimentaire durable, de fixer des cibles réalistes pour chacun des secteurs en matière de réduction des émissions et de créer un programme d'efficience énergétique pour l'industrie que l'industrie aura les moyens de mettre en œuvre.

Nous sommes heureux que le dialogue se poursuive; Clyde et moi-même serons heureux de répondre à vos questions. Merci, monsieur le président.

Le président : Merci, monsieur. Nous allons commencer par le sénateur Massicotte.

Le sénateur Massicotte : Merci, monsieur Whyte, de votre exposé. C'était très intéressant. Vous mettez beaucoup l'accent sur le dialogue et la discussion, de beaux mots, qui ont évidemment une grande importance, mais vous connaissez nos buts : une réduction de 30 p. 100 d'ici 2030, et tout cela. Je suis d'accord avec le dialogue et tout, mais donnez-nous une idée de votre contribution à ces objectifs. Autrement dit, si nous appliquons une moyenne à l'ensemble des industries, vous devez respecter un objectif de 30 p. 100. Allez-vous respecter cet objectif ou êtes-vous en train de dire qu'il faudrait que quelqu'un d'autre se charge de la plus grosse partie du travail parce que votre situation est particulière? Tout le monde fait valoir cet argument, franchement, alors, donnez-nous une idée de ce à quoi nous pouvons nous attendre de la part de votre secteur d'ici 2030.

M. Whyte : Au grand dam de mon collègue, je vais utiliser une analogie. Il y a environ deux mois, j'ai visité une ferme du sud de l'Ontario et, sur le plan environnemental, elle respecte la norme en tout. Cette famille fait tout correctement : travail sans labour, utilisation de couverture végétale, rotation des cultures et recyclage de l'équipement. C'est un modèle à suivre sur le plan environnemental. Mais si cette famille travaillait dans un secteur soumis aux objectifs, elle ne pourrait pas les respecter, car elle a fait ces changements environnementaux dans les années 1990. C'est ce sentiment que notre secteur éprouve. Notre secteur a apporté beaucoup de changements à la fin des années 1990. Pourquoi? Pas seulement par simple bonté d'âme, mais parce que le prix du carburant atteignait des sommets. Nous avons dû faire ces changements.

Maintenant, si nous devons en revenir à la norme de 2005, ou peu importe l'année de référence, nous ne serons pas capables de continuer à réduire les émissions de carbone produites par la fabrication d'engrais azotés. Nous ne serons pas capables de le faire parce qu'il s'agit de sciences. Voici comment nous procédons : nous retirons l'hydrogène du gaz naturel, et nous retirons l'azote de l'air, pour faire de l'ammoniac. Voilà comment on fabrique des engrais. C'est un programme scientifique.

Nous avons déjà fait beaucoup de tâches difficiles, mais personne ne le reconnaît. C'est pour cette raison que nous disons qu'il faudrait une stratégie adaptée aux différents secteurs, étant donné que, si nous n'atteignons pas nos cibles, c'est l'industrie alimentée au charbon de la Chine ou d'ailleurs qui prendra notre place, et les cibles mondiales devront être relevées.

Cela dit, nous avons collaboré très étroitement avec le milieu scientifique et tous les gouvernements, y compris celui de l'Alberta. Nous avons conclu avec cinq provinces un protocole d'entente sur ces pratiques 4R que nous avons élaborées et qui s'appliquent aux engrais; nous voulons nous assurer que les engrais sont récupérés par les cultures, qu'ils ne s'échappent pas dans l'atmosphère ou dans le sol. Cela peut avoir un impact important. Les Nations Unies et la FAO le reconnaissent. Si nous mettons ces pratiques en œuvre, elles auront un effet compensatoire important, et, oui, cela nous aidera à atteindre les cibles.

C'était une longue réponse, mais mon collègue, Clyde, se rendra à la COP22. Il intervient au nom du secteur des engrais, globalement. Il présentera une partie de ces cibles.

Le sénateur Massicotte : Étant donné cet argument, je ne sais pas si vous étiez présent lorsque le témoin précédent a exposé un argument fondamentalement semblable : « Nous avons fait tant de choses; nous devrions être exclus. » Si vous étiez le premier ministre du Canada et que vous aviez le choix, si tous les intervenants pensaient devoir être exclus parce qu'ils sont plus gentils ou plus forts que les autres, que feriez-vous? Comment feriez-vous pour atteindre votre but?

M. Whyte : Après tout ce qui s'est dit, de mon point de vue, c'est plutôt frustrant, parce que les choses se font en vase clos : « Pensons d'une part à l'environnement, par ailleurs aux politiques en matière d'agriculture, d'autre part aux politiques en matière de transport. » Personne n'envisage les choses sous l'angle holistique.

Selon notre secteur, une partie du but... les gens ont tendance à oublier qu'il y a des gens qui meurent de faim et que nous devons augmenter la production. Les engrais sont nécessaires. C'est un fait acquis, car c'est la seule manière de faire; dans le monde, les terres agricoles sont limitées. C'est un des dilemmes.

Par ailleurs, nous travaillons de très près avec le gouvernement, et nous allons réduire les cibles grâce à de nouvelles applications comme le PREON, qui permet de réduire les émissions d'oxyde nitreux, qui est 100 fois pire que le carbone, à raison d'une ou deux mégatonnes dans l'ouest du Canada seulement. Nous voulons travailler en étroite collaboration avec le gouvernement, pour que cela s'applique.

Les environnementalistes n'ont rien dit sur le sujet. Ils disent que c'est un problème lié à l'agriculture.

Nous ne pouvons donc pas nous contenter de fixer une cible, je crois que nous devons également penser à l'aspect de la compensation. Nous n'en parlons pas souvent. Même en Ontario, de mon point de vue, nous parlons beaucoup de la cible, et nous nous efforçons de la respecter — nous allons faire tout ce que nous pouvons —, mais nous ne parlons pas de l'aspect de la compensation, qui est tout aussi important. Je crois que nous pouvons y arriver.

Donc, si j'étais premier ministre, j'essaierais d'envisager la situation dans son ensemble plutôt que de m'attacher à une simple cible que nous allons repousser dans un an. Je devrais préciser que je me rends au travail à pied ou à vélo, et le problème, ce n'est pas que nous ne sommes pas d'accord avec cela; nous sommes tout à fait d'accord.

Le sénateur MacDonald : Dans votre exposé, vous avez dit que notre comité devait savoir que « des cibles de réduction inatteignables, pour des motifs économiques ou scientifiques, auront un effet négatif sur la compétitivité du secteur de la production d'engrais du Canada » et sur d'autres secteurs, évidemment. Vous savez quel accord le gouvernement a signé, à Paris. Vous savez qu'il a signé un document, à Kyoto, et qu'apparemment aucun gouvernement n'avait l'intention de respecter les cibles, qu'elles étaient inatteignables.

Que pensez-vous des cibles qui ont été fixées à Paris? Pensez-vous qu'elles sont honnêtement atteignables et qu'elles ne détruiront pas l'économie du Canada?

M. Whyte : Je vais passer le relais à Clyde, mais je crois sincèrement que vous devez fixer des cibles.

Le sénateur MacDonald : Est-ce que les cibles sont atteignables?

Clyde Graham, vice-président principal, Fertilisants Canada : Ce sont des cibles ambitieuses. Mais le changement climatique est un problème sérieux, et nous devons être ambitieux. Cependant, étant donné que nous fixons une cible pour l'ensemble du pays, nous, les Canadiens, allons devoir contribuer de diverses manières : les consommateurs, les propriétaires fonciers, les gestionnaires d'immeubles, les industriels et les agriculteurs vont tous devoir contribuer.

Mais il faudra que leurs contributions soient différentes. Vous ne pouvez pas fixer une cible de 30 p. 100 qui s'appliquera de la même façon à tout le monde. Les différents secteurs de l'économie et de la société vont devoir contribuer différemment.

Nous connaissons bien notre propre secteur. Je ne sais pas dans quelle mesure cette cible est atteignable, mais il est certain que nous sommes prêts à faire ce que nous pouvons pour aider.

Nous sommes liés par les procédés d'ingénierie, la science et la chimie des produits que nous fabriquons, ce qui veut dire que, réellement, il y a des limites strictes quant à ce que nous pouvons faire pour contribuer, du côté de l'industrie. Nous avons donc réfléchi : « Qu'est-ce que nous pourrions vraiment faire? » Nous pouvons aider nos clients, les agriculteurs du Canada et du monde entier, à utiliser les engrais de façon plus efficiente, de façon à augmenter le rendement des cultures avec le même volume d'engrais tout en réduisant les émissions des engrais azotés appliqués sur le sol.

Quand un engrais n'est pas appliqué de la façon appropriée, il peut se transformer en oxyde nitreux. L'oxyde nitreux, l'un des principaux gaz à effet de serre, est 300 fois plus puissant que le CO2 en tant que gaz à effet de serre. Les volumes de N2O libérés dans un champ, quand on épand des engrais, sont très petits, mais, étant donné que c'est un important gaz à effet de serre, nous cherchons à faire tout ce qu'il nous est possible de faire pour en réduire la quantité.

Notre stratégie consiste à faire ce que nous pouvons. Et cela sera très limité du côté de l'industrie. Nous voulons jouer un rôle de chef de file au Canada et dans le monde entier en ce qui concerne la réduction des émissions liées à l'application d'engrais azotés.

Le problème, comme on l'a dit, c'est que nous nous dirigeons vers une population de 9,6 milliards de personnes, sur la planète, en 2050. Il sera extrêmement difficile de produire suffisamment de nourriture pour tout le monde, pour que tout le monde ait non seulement de quoi manger, mais de quoi manger sainement, étant donné cette croissance de la population. Nous allons devoir utiliser des engrais, pour ce faire, mais nous voulons le faire le plus possible dans le souci de l'environnement et de la durabilité.

Le sénateur MacDonald : Vous avez parlé d'oxyde nitreux. Je ne suis pas un expert de la question. Vous avez dit qu'il était 300 fois plus puissant. Le CO2 est aussi un élément nutritif. Mais l'oxyde nitreux n'en est pas un, n'est-ce pas?

M. Graham : Non, le CO2 n'est pas un élément nutritif des végétaux.

Le sénateur MacDonald : Le dioxyde de carbone n'est pas un élément nutritif pour les végétaux?

M. Graham : Non.

Le sénateur MacDonald : Donc, l'atmosphère contient 78 parties par million de dioxyde de carbone. Si cette teneur tombait à 34 parties par million, toute vie végétale disparaîtrait de la Terre.

M. Graham : Le dioxyde de carbone est essentiel aux végétaux. C'est ce qu'ils respirent, mais ils ne l'absorbent pas par les racines.

Le sénateur MacDonald : Je comprends. Ce que je dis, c'est que le dioxyde de carbone et l'oxyde nitreux sont deux choses différentes.

M. Graham : Oui, absolument. Le dioxyde de carbone est essentiel à la vie sur la planète, tout comme l'oxygène. Absolument.

Le sénateur MacDonald : Je crois tout simplement que, quand nous parlons du carbone en général, nous oublions cet aspect.

Ma deuxième question concerne la taxe sur le carbone. Vous avez dit qu'elle devrait être fondée sur des données scientifiques, atteignable, et adaptée aux différents secteurs. En Nouvelle-Écosse, l'application de cette taxe sur le carbone nous pose un véritable problème. En ce qui a trait aux centrales au charbon et au contrôle des émissions, les gouvernements qui se sont succédé cette dernière décennie en Nouvelle-Écosse ont tous très bien réussi à faire cette transition, ou semblé faire cette transition.

Nous allons essentiellement être doublement taxés, maintenant. Nous sommes une des administrations les plus taxées du pays. Maintenant, nous serons doublement taxés.

J'aimerais connaître votre opinion sur le principe d'une taxe sur le carbone qui s'appliquerait de façon universelle. Je ne suis pas gêné de dire que je ne crois pas à cette taxe sur le carbone. Je crois que, sur le plan de l'économie, c'est une erreur. Je ne crois pas qu'elle donne quelque résultat que ce soit. J'ai l'impression qu'elle nous a d'une certaine façon été imposée. C'est un peu comme si, puisque tout le monde doit porter des chaussures, le gouvernement nous disait que tout le monde allait porter des chaussures de pointure 8. Je sais que nous avons tous besoin de chaussures. « Elles ne seront pas toutes confortables, mais vous devez tous porter des chaussures de pointure 8. »

Comment pouvons-nous arriver à faire en sorte que la taxe sur le carbone donne des résultats si elle n'est pas adaptée aux différents secteurs? Je crois qu'elle devrait l'être.

M. Graham : Nous ne sommes pas au courant des détails de la proposition du gouvernement fédéral. De la façon dont nous voyons les choses, il y a différentes approches, qui consistent en mesures incitatives ou en pénalités, pour encourager l'industrie à réduire les émissions. Il y a le programme de plafonnement et d'échange, les taxes sur le carbone, les cibles et la réglementation qui s'appliquent au secteur automobile, par exemple.

Mais nous ne savons pas de quelle manière le gouvernement fédéral prévoit réaliser les promesses qu'il a faites touchant la taxe sur le carbone. Tout ce que nous pouvons faire, c'est de chercher comment elle pourrait s'appliquer à notre secteur. Quand on pense à certains des travaux qu'ont faits les ministres de l'Environnement du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux, je crois qu'ils s'entendent pour dire qu'il faut un traitement spécial dans le cas des secteurs qui consomment beaucoup d'énergie et produisent beaucoup d'émissions, et qui sont exposés face au commerce. Nous pensons que c'est une notion importante qui devrait être appliquée dans tous les systèmes, qu'il s'agisse du plafonnement et des échanges ou d'une taxe sur le carbone, mais je crois qu'il existe d'autres facteurs clés, par exemple la façon dont le gouvernement va structurer les accords d'équivalence, en reconnaissant les stratégies des provinces, comme il a dit qu'il le ferait, et les détails seront critiques.

Le sénateur MacDonald : Je ne vous critique certainement pas de ne pas avoir de réponses quant à ce que le gouvernement fait, car je ne crois pas que le gouvernement ait les réponses, à parler franchement. Merci.

La sénatrice Fraser : Bonjour, messieurs. J'ai plusieurs questions que je vais amalgamer, car elles ont trait dans une certaine mesure à l'ignorance.

À la page 8, j'ai vu un certain nombre de choses qui m'ont intéressée. Vous dites que les installations de production du Canada figurent dans le quartile supérieur quant à l'efficience énergétique et aux émissions de gaz à effet de serre, et qu'il n'y a pour le moment aucune technologie révolutionnaire en préparation qui remplacerait les systèmes de production existants.

Premièrement, qu'est-ce qu'une technologie révolutionnaire? Cela ne veut rien dire pour moi.

M. Graham : C'est certain.

La sénatrice Fraser : Deuxièmement, si un changement de ce type était utile et souhaitable, pourquoi est-ce que l'industrie n'essaie pas de le mettre au point? Cela semble peut-être accusatoire; ce n'est pas mon intention. J'apprends.

Pourquoi nous en tenir au quartile supérieur? Nous sommes un géant, dans ce domaine. Pourquoi ne serions-nous pas dans la tranche supérieure de 10, voire de 5 p. 100? Globalement, ce secteur est très important, et nous ne sommes pas un pays pauvre.

M. Graham : En ce qui concerne la question du quartile, nous sommes très modestes. Nous dominons tous les pays au chapitre de l'efficience de nos installations de production d'engrais azotés, et nos installations de production de potasse figurent parmi les plus efficientes du monde. Il n'y a pas beaucoup d'autres producteurs de potasse dans le monde.

Le secteur de la potasse a investi autour de 8 milliards de dollars pour la remise à neuf et l'expansion, conformément aux technologies récentes, mais, malgré cela, nos industries ont investi pour désengorger des installations, elles ont fait d'autres investissements, mais cela n'a pas réussi à réduire de beaucoup les émissions de gaz à effet de serre.

Notre capacité à en faire davantage est extrêmement limitée. Dans ce quartile, nous sommes quand même dominants, en particulier étant donné l'âge de nos installations, qui datent de 1990 et d'avant. La différence entre une installation construite il y a 20 ans et une autre construite aujourd'hui n'est pas très marquée, en ce qui concerne l'efficience. C'est l'un des aspects. Ces installations durent pendant des dizaines d'années. Nous sommes sévèrement limités, quant à ce que nous pouvons faire.

En ce qui concerne les changements révolutionnaires, les procédés chimiques de base que nous appliquons datent d'il y a près de 100 ans; c'est le procédé Haber-Bosch. Ce sont les deux scientifiques qui l'ont mis au point, et ils ont chacun reçu le prix Nobel. Le type de changement révolutionnaire dont nous avons besoin, dans le domaine de la production d'engrais azotés, serait du calibre d'un prix Nobel. La Banque mondiale a dit qu'elle aimerait pouvoir décerner un prix à la personne qui inventerait un meilleur procédé de fabrication d'engrais azotés, mais le prix existe déjà; c'est le prix Nobel.

M. Whyte : C'est intéressant. Dans les années 1900, environ, les scientifiques se sont réunis et ont déclaré que nous nous dirigions vers une famine généralisée si nous ne trouvions pas une nouvelle technologie, n'utilisant pas le fumier et le lisier, étant donné qu'il y aurait une pénurie; nous connaîtrions une famine généralisée, dès le début du XXe siècle. Je m'excuse, c'était au XIXe siècle.

Il leur fallait trouver un procédé permettant de récupérer l'azote de l'atmosphère, étant donné que 70 p. 100 de l'atmosphère est composée d'azote. Pour faire cela, il faut chauffer à 1 500 degrés. Il faut du carburant pour atteindre cette chaleur, et le carburant est du gaz; ce n'est pas de l'énergie éolienne. Vous avez également besoin d'hydrogène. C'est un produit fondé sur la science. Il y a de l'azote partout, mais il en faut. Les végétaux en ont besoin pour croître.

Pour en revenir à la science, nous avons augmenté les engrais. Une étude menée en 1980 révèle que le rendement d'un champ de maïs avait été doublé, avec une augmentation de l'utilisation d'engrais de 5 p. 100. C'est énorme, sur le plan de l'environnement et quand on vise à nourrir le monde. C'est majeur, et le Canada est un chef de file au regard d'un produit utilisé dans le monde entier.

Bill Gates a dit : « J'adore les engrais. C'est un ingrédient magique; il nous aide à nourrir le monde. » Nous sommes un joueur de premier plan.

Comment pouvons-nous aider? Le transport est une partie de la solution. Comment pouvons-nous expédier 25 millions de tonnes d'engrais de la Saskatchewan jusqu'à 80 autres pays du monde? Nous devons utiliser le chemin de fer, et ensuite, des bateaux. L'opération prend trois jours, dans les ports. Dans le cas du blé et d'un grand nombre d'autres produits, elle peut prendre jusqu'à 12 jours.

Voilà ce que je voulais dire quand je parlais d'envisager les impacts environnementaux de manière holistique. Ce que nous faisons produit inévitablement des émissions de carbone, mais des changements ont été apportés partout ailleurs, et nous nous efforçons d'apporter des changements. Nous avons fait des essais avec des scientifiques de toute l'Amérique du Nord, nous avons réalisé des projets communs, avec le Canada, les États-Unis, et l'International Plant Nutrition Institute partout dans le monde. Nous avons découvert quelle était la meilleure façon d'épandre de l'engrais, selon la culture, la région ou le climat. Les engrais auront un impact environnemental moindre sur l'eau et sur l'air, et un rendement supérieur.

Nous voulons que le gouvernement de notre pays en fasse la promotion et le reconnaisse. Pour en revenir à la question du sénateur MacDonald, nous ne pouvons peut-être rien faire pour ce qui est des engrais azotés, mais nous pouvons faire quelque chose quant aux méthodes d'épandage des engrais. Ce n'est pas tout, nous pouvons devenir un modèle pour le monde entier.

Nous pouvons peut-être atteindre la cible fixée par le Canada quant à la réduction des émissions de carbone des installations de fabrication d'engrais azotés, qui représente 1 p. 100 du marché, mais nous pourrions ce faisant relever les cibles mondiales, étant donné que les clients vont se tourner vers les entreprises bas de gamme ou pire, car ils ont besoin d'engrais azotés et chercheront d'autres fournisseurs.

L'ironie de la chose, c'est qu'il est fort possible que nous atteignions les cibles fixées par l'Ontario ou l'Alberta en réduisant notre production, tout simplement, mais nous allons nuire à la cible mondiale, étant donné que les clients se tourneront vers la Chine, qui carbure au charbon, ou vers d'autres pays, car ils ont besoin d'engrais azotés. Il ne suffit pas de fixer une cible, c'est un peu plus compliqué que cela.

Le sénateur Lang : Le témoin précédent a dit que son secteur comprenait clairement ce qu'on attendait de lui, par secteur et par règlement, et savait ce qu'il était capable de faire. C'était de toute évidence conforme à ce qui se fait aux États-Unis.

Nous avons un nouveau gouvernement, depuis un an, et avant cela, nous avions un gouvernement qui s'était engagé à adopter des règlements secteur par secteur pour atteindre différentes cibles. Avant le changement de philosophie ou d'idéologie et, en pratique, avez-vous en tant que secteur, participé aux discussions avec le gouvernement fédéral, et avez-vous compris ce que l'on attendait que votre secteur fasse pour respecter les cibles fixées par le gouvernement précédent? Parce que, au bout du compte, les cibles ne sont pas différentes; ce sont les moyens de les atteindre qui changent. Pourriez-vous nous renseigner sur votre position, à ce moment-là?

M. Graham : Oui, nous avons eu de longues discussions avec le gouvernement fédéral afin d'établir, en gros, une référence par rapport à notre rendement et de définir des objectifs réalisables. Malheureusement, ces efforts n'ont pas abouti. Nous avions fait beaucoup de chemin, et je dirais que ça aurait été une entente importante, mais rien n'a été conclu avant les élections fédérales.

Le sénateur Lang : Un instant, vous avez dit qu'il y avait eu des ententes substantielles. Ces ententes allaient-elles vous permettre d'atteindre des cibles données en prenant, dans votre secteur, des mesures sans qu'une taxe sur les émissions carboniques ou qu'un système de plafonnement et d'échange de droits d'émissions carboniques ne vous soient imposés?

M. Graham : Je crois que le processus auquel nous avons pris part avait pour objectif de déterminer ce qui était réaliste pour notre industrie.

M. Whyte : Si je peux me permettre, j'ajouterais que ce processus s'est poursuivi avec les mêmes personnes dans le nouveau gouvernement. Les principes que nous vous présentons ici demeurent les mêmes, peu importe le gouvernement ou la région administrative. Il faut aussi dire que notre rendement est contrôlé par rapport à la valeur de référence. Je crois que nous avons une longueur d'avance sur les autres; cela fait plusieurs années que nous travaillons en gardant cette question à l'esprit : « Comment nous comparons-nous aux autres pays et aux autres usines? » Nous pouvons vous regarder en face et vous dire : « Oui, nous faisons partie du premier décile. » C'est pas mal. Idéalement, ce serait la même chose pour toutes nos industries, mais pour revenir à l'analogie de l'agricultrice, elle va peut-être être pénalisée, même si elle n'a aucune cible à atteindre, parce qu'elle a une longueur d'avance. Selon moi, c'est injuste.

Cela dit, relativement au PREON et à la technologie découlant du programme 4R, nous travaillons de concert et avons conclu des protocoles d'entente avec cinq différentes provinces et avec les diverses parties qui sont d'accord sur le fait que nous devons aller de l'avant et travailler ensemble. Nous travaillons également avec des groupes voués à la conservation et avec des collectivités agricoles. Nous essayons de réunir les gens et de trouver des façons de faire notre part afin d'aider l'environnement.

Le sénateur Lang : Avez-vous des prévisions par rapport au coût que votre industrie devra assumer une fois que le système de plafonnement et d'échange sera mis en œuvre en Ontario ou par rapport aux impacts de la taxe sur les émissions carboniques? Avez-vous estimé les coûts que votre industrie devra supporter si ou quand cela sera entré en vigueur, admettant que vous n'en êtes pas exempté?

M. Graham : Je crois que nous devrions attendre de voir l'ensemble des mesures qui seront élaborées et exécutées avant de spéculer sur les coûts.

Selon moi, une association commerciale peut difficilement déterminer cela, parce que chaque entreprise de l'association va adopter différentes stratégies afin d'être en conformité avec ce qui est demandé.

Le sénateur Lang : Il va y avoir des coûts supplémentaires, quand même.

M. Graham : Oui, toutes les possibilités que nous étudions seraient un fardeau de plus pour notre industrie. Nous allons faire de notre mieux pour réduire nos émissions, mais notre capacité est très limitée à cet égard. Advenant que nous ne puissions pas répondre aux obligations, il y a toujours d'autres façons d'être en conformité, par exemple grâce à un système de contreparties ou en contribuant à un fonds pour les technologies, comme celui de l'Alberta. Nous allons devoir nous conformer aux obligations ainsi.

Le sénateur Mockler : J'étudiais les statistiques que vous nous avez présentées, monsieur Whyte. Vous avez 12 000 employés, et un chiffre d'affaires de 12 milliards de dollars. Chaque employé vous rapporte un million de dollars en ventes. C'est plutôt bien, si on compare avec les industries mondiale et canadienne. C'est évident que vous êtes prospère.

Par rapport à ce que vous avez dit à propos de la façon dont nous abordons les émissions, je vais vous donner une statistique : les émissions carboniques annuelles du Canada sont d'environ 14 tonnes par habitant, ce qui est comparable à la Fédération de Russie et aux États-Unis. Il n'y a que des pays comme le Koweït et le Qatar qui nous dépassent de beaucoup. Voici les émissions annuelles d'autres pays : l'émission du Sri Lanka est de 0,7 tonne; en Roumanie, c'est 4 tonnes par habitant; en Hongrie, c'est 5 tonnes; au Royaume-Uni, 7 tonnes; et au Canada, 14 tonnes.

Quand même, vous avez touché un point sensible, et j'aimerais que vous nous en parliez davantage. Je suis d'accord avec ce que vous avez dit à propos du programme 4R. Je viens du Nouveau-Brunswick, j'ai étudié l'entente que vous avez conclue avec ma province et je crois que c'est remarquable. Mais quel pourcentage de la production mondiale d'engrais provient de régions alimentées par des centrales au charbon? Là-dessus, quelle est votre situation par rapport aux autres?

M. Graham : Il y a d'autres combustibles que le gaz naturel qui sont utilisés dans les pays émergents. En Chine, par exemple, je crois qu'on utilise des combustibles comme le naphte et le charbon. La Chine est probablement en train de convertir son industrie : les nouvelles centrales qui vont ouvrir là-bas seront, je crois, alimentées au gaz naturel.

M. Whyte : Mais il n'y a aucune centrale au charbon au Canada.

M. Graham : Il n'y en a aucune en Amérique du Nord.

M. Whyte : Pour revenir à votre commentaire, il faut régler cette affaire de 14 tonnes par habitant. Nous sommes d'accord là-dessus. C'est pour cela que nous voulons que des mesures propres soient appliquées à chaque secteur; nous avons mesuré les émissions carboniques par habitant dans notre région. Nous sommes un chef de file de l'industrie. Nous serions votre meilleur atout.

Le sénateur Mockler : Dans l'industrie canadienne.

M. Whyte : Oui, dans l'industrie canadienne. Je pense que tout est là. Ce que vous devez vous demander, c'est pourquoi vous pénaliseriez votre meilleur atout en l'envoyant ailleurs?

Ce qui me frappe, dans notre industrie, c'est que nous sommes harmonisés. J'ai travaillé dans beaucoup de différents secteurs, mais je n'en ai jamais vu un qui en est arrivé à un consensus sur ce qu'on peut faire et sur la façon dont on peut aider l'environnement dans le monde entier. Nous intervenons sur la scène mondiale. Nous exportons nos produits vers 80 pays d'un bout à l'autre du monde, et nous comptons, comme cela est mentionné dans notre rapport, certains leaders mondiaux dans l'industrie des engrais. Ce sont des entreprises ouvertes sur le monde et qui investissent dans le monde entier. Dans 10 ans, si elles ont 200 milliards de dollars à investir, c'est ailleurs qu'elles vont investir, et ce n'est pas parce que les entreprises ne se soucient pas de l'environnement. C'est parce qu'elles ont réalisé qu'elles ne peuvent pas travailler avec certains gouvernements, incapacité exacerbée par leurs craintes et leurs incertitudes.

Nous voulons que le monde sache que nous faisons partie de la solution. Nous faisons vraiment partie de la solution, et d'une façon importante. Nous travaillons en étroite collaboration avec l'Alberta et l'Ontario. C'est quand même un bon effort dans l'ensemble, n'est-ce pas?

Le sénateur Mockler : Si on veut être le plus efficace possible, quelles régions du Canada devrait-on faire participer à une étude sur les objectifs que vous visez?

M. Whyte : Si l'étude porte sur nos usines d'azote, il y en a essentiellement quatre : l'Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta.

Le sénateur Mockler : Parlons du Nouveau-Brunswick. Quel genre d'impact a eu la fermeture de l'usine de potasse de Sussex sur l'industrie?

M. Whyte : C'est plutôt drôle, car j'ai parlé avec le directeur général, et je devrais peut-être me taire...

Le sénateur Mockler : Si l'entreprise veut revenir au Nouveau-Brunswick, vous pouvez le dire.

M. Whyte : C'était l'une des choses les plus difficiles qu'il ait jamais faites. L'impact personnel sur lui n'a pas fait de vagues, mais lui et l'entreprise ont davantage été préoccupés par l'impact que cela a eu sur les gens. J'ai parlé à d'autres personnes, comme celles qui travaillent à l'aide au reclassement, et elles ont dit qu'elles n'avaient jamais vu cela fait si bien. Au lieu d'envoyer un courriel, il s'est rendu là-bas en personne pour y rencontrer chaque employé; il a offert de transférer 100 emplois en Saskatchewan. Tout s'est très bien passé, et les Néo-Brunswickois ont même essayé de réconforter les dirigeants lorsque l'usine a fermé.

Malgré tout, c'était très peu efficient. Les coûts pour l'exploitation de la potasse ont diminué — et c'est un produit très difficile à exploiter —, mais on garde la mine ouverte juste au cas où la demande pour le produit viendrait à rebondir. Je crois que je peux dire, au nom de nos membres, que c'était une décision difficile.

Le sénateur Patterson : Le gouvernement fédéral a annoncé qu'il avait l'intention de réglementer la production d'engrais chimique et d'engrais azotés en mai 2015 afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pourriez-vous nous parler de cette réglementation? Avez-vous été consulté, et avez-vous des commentaires à faire sur le sujet?

M. Graham : Ce règlement n'a jamais été présenté.

Le sénateur Patterson : Rien ne s'est passé?

M. Graham : Non. Le règlement n'a jamais été publié dans la Gazette du Canada.

Le sénateur Patterson : Avez-vous été consulté pendant l'élaboration de la réglementation?

M. Graham : Nous avons tenu des consultations exhaustives avec les gouvernements des provinces où nous menons nos activités. Nous avons un excellent esprit de collaboration et, effectivement, nous avons tenu, en toute honnêteté, des discussions très constructives pendant une dizaine d'années avec le ministère de l'Environnement du gouvernement fédéral ainsi qu'avec d'autres ministères fédéraux à propos de nos émissions industrielles.

Le sénateur Patterson : Pouvez-vous nous en dire un peu plus? Pourquoi n'a-t-on pas pris un règlement, et était-ce une bonne chose qu'on se soit abstenu? Pourquoi le règlement n'est-il pas entré en vigueur?

M. Graham : C'est une question que vous devriez poser au gouvernement précédent.

Ces questions ne sont pas simples. La réglementation a été élaborée sur une longue période. Les élections ont changé la donne.

Le sénateur Patterson : Qu'est-ce qui fait qu'on produit des émissions carboniques? Nous avons récemment visité des usines de pâte à papier, des alumineries et même des centrales électriques au charbon, et elles ont toutes été en mesure de réduire considérablement leurs émissions carboniques. Toutefois, vous dites que c'est très difficile. Pouvez-vous nous en dire un peu plus pour nous expliquer pourquoi vous n'avez pas mis en œuvre un changement progressif?

M. Graham : Si le comité me le permet, je vais vous raconter une brève anecdote.

Actuellement, 78 p. 100 de l'air que nous respirons est composé d'azote, dont la formule moléculaire est N2, soit deux atomes d'azote liés ensemble. C'est une liaison moléculaire très stable; elle ne réagit avec rien d'autre. Pour une centrale, c'est inutilisable.

Une minuscule quantité d'azote est libérée de façon continue, par exemple, par la foudre. De l'ammoniac est produit par ces nouvelles liaisons moléculaires. Nous respirons même de l'ammoniac présentement; il y en a dans l'atmosphère en minuscules quantités. Mais il s'agit vraiment d'ammoniac — formule moléculaire NH3 —, un atome d'azote et trois atomes d'hydrogène. Les centrales peuvent l'utiliser et le transformer en d'autres formes d'azote utilisables.

L'azote est l'une des principales sources de nutrition des végétaux dans le sol. Il y a l'azote, le phosphore et le potassium. L'engrais, c'est la nourriture des végétaux.

Il y a environ 100 ans, notre industrie a connu une révolution lorsque les scientifiques ont compris comment briser les liaisons afin de créer de l'ammoniac qui peut être utilisé comme engrais pour nourrir les récoltes. Pour créer de l'ammoniac, nous mélangeons de l'hydrogène avec le N2 dans l'air. La meilleure source d'hydrogène à notre disposition est le gaz naturel, le méthane. Nous utilisons de la chaleur intense et d'autres procédés pour extraire l'azote du gaz naturel et pour le combiner à l'azote dans l'air pour obtenir de l'ammoniac.

Certains agriculteurs utilisent l'ammoniac directement comme engrais, mais on peut aussi le convertir en d'autres produits comme l'urée et le nitrate d'ammonium.

Le sénateur Patterson : D'où viennent les émissions carboniques?

M. Graham : Le méthane, bien sûr, continent du carbone. Lorsqu'on décompose le méthane, on libère des émissions carboniques. C'est la même chose qui arrive lorsque vous brûlez du gaz naturel pour chauffer votre maison : cela produit des émissions carboniques. Lorsqu'on extrait l'hydrogène, au lieu de le brûler, on l'utiliser pour créer de l'ammoniac. C'est de là que proviennent les émissions carboniques.

Nous devons aussi utiliser du gaz naturel. Nous brûlons le gaz naturel pour générer la chaleur intense nécessaire pour produire la réaction chimique.

Les lois naturelles de la chimie sont particulièrement inflexibles; les quantités de gaz naturel et d'azote requises sont fixes. C'est pourquoi on dit que ces émissions sont liées à des procédés fixes.

Voilà donc la difficulté qui pèse sur nous, mais le fait que nous sommes en mesure de nourrir une population croissante et d'améliorer ce que les gens mangent grâce aux engrais créés par ce processus est une réussite mondiale. Malgré tout, il serait extrêmement difficile d'être plus efficient.

Le sénateur Patterson : Nous avons abordé un peu la question des coûts aujourd'hui, et j'imagine que c'est là-dessus que porte essentiellement leur étude. Vous nous avez parlé en partie des problèmes avec lesquels votre industrie doit composer.

Je sais que le prix de la potasse a baissé. Pouvez-vous nous donner une idée générale du prix des engrais dans le monde ainsi que de l'état de l'industrie, si on la compare aux marchés mondiaux des produits de base?

M. Graham : Bien sûr. Avant tout, ce que nous pouvons dire par rapport aux prix est extrêmement limité, parce que nous sommes une association d'entreprises concurrentes. De manière générale, toutefois, la relance économique s'est faite très lentement dans le monde. Dans certains pays comme la Chine et l'Inde, de grands consommateurs d'engrais, les économies remontent lentement, alors la demande pour des engrais n'a pas été aussi forte qu'elle l'a été dans le passé. Cela vaut également pour la potasse et l'azote, nos principaux produits d'exportation, ainsi que pour le phosphate.

Comme beaucoup d'autres secteurs de ressources naturelles, notre industrie est cyclique, mais nous avons bon espoir que la situation va s'améliorer avec le temps. En outre, dans les pays émergents, la tendance semble s'orienter vers l'amélioration des pratiques agricoles afin de mieux nourrir la population.

Actuellement, la demande d'engrais a sensiblement diminué, mais on s'attend à ce qu'elle augmente à moyen et à long terme.

M. Whyte : Si je peux ajouter quelque chose, je dirais que nos membres réfléchissent à long terme. Ils planifient non pas pour un ou deux ans, mais pour les 10 ou les 20 prochaines années. La situation a l'air très bonne à long terme. Actuellement, nous avons renforcé de beaucoup notre capacité mondiale de production d'azote. Notre industrie a besoin de beaucoup d'énergie et elle est dépendante du marché, parce que les gens construisent de nouvelles usines. La question est donc de savoir comment être concurrentiel.

Il ne faut pas se restreindre à l'Alberta ou à l'Ontario. Dans notre secteur, on doit penser aux marchés mondiaux et aux investissements à prendre. Il faut songer à investir des centaines de millions — des milliards — de dollars sur 40 ans. C'est une autre difficulté.

Donc, même si nous nous sommes fixé des objectifs de moins d'un an, d'autres décisions sont prises à long terme. Cela s'explique de plus en plus à cause de la démographie, de la croissance de la population. Si on veut que la classe moyenne prenne de l'expansion, il faut que les gens se nourrissent bien, ce qui suppose d'améliorer les pratiques de production alimentaire.

Le sénateur Patterson : On nous a dit qu'il existait d'autres matières premières pour la production d'engrais, comme le gaz de synthèse et le gaz naturel renouvelable. Avez-vous entrepris de la recherche dans cette direction?

M. Whyte : Je suis sûr qu'il y en a, mais ce sont des approches sélectives. Vous pouvez aller visiter ces usines. Ce sont de grosses usines, et oui, il y a de la R-D en cours, mais il n'y a rien de révolutionnaire.

Le président : J'ai deux ou trois questions à poser, puis nous aurons le temps pour la dernière question du deuxième tour.

Si on imposait une taxe sur les émissions carboniques de 50 $ la tonne à votre industrie, combien un agriculteur moyen devrait-il payer par hectare si on maintient la même production et tout le reste? Quel en serait l'impact pour l'agriculteur? L'agriculteur, puis le public en général devront assumer un coût, peu importe ce que l'agriculteur produit. Quel serait le coût pour l'agriculteur? Les coûts augmenteraient-ils de 10 p. 100 par acre, ou quelque chose du genre?

M. Graham : Tout d'abord, nous ne savons pas à quoi ressemblerait la proposition...

Le président : Non, disons que c'est 50 $ la tonne, que le gouvernement décide aujourd'hui que c'est 50 $ la tonne. Comment cela se traduirait-il par rapport aux coûts?

M. Whyte : La question serait plutôt de savoir quel est le taux de change, parce que les agriculteurs vont aller acheter leur engrais aux États-Unis. Ce n'est pas une blague. Si le gouvernement décidait aujourd'hui d'imposer une taxe de 50 $ la tonne, les agriculteurs vont aller chercher leur engrais sur d'autres marchés, et leurs dépenses vont augmenter. La situation est différente pour la potasse, mais en ce qui concerne l'azote, ce serait très difficile.

Le président : D'accord. En toute franchise, nous ne sommes pas ici pour détruire l'industrie agricole. Je suis sûr que nous en sommes tous conscients et que nous le comprenons. Mais si la taxe était vraiment de 50 $ la tonne, même si vous dites que les agriculteurs vont aller voir ailleurs, disons qu'on continue de produire cela ici à 50 $ la tonne, de combien les coûts pour les agriculteurs augmenteraient-ils? Je veux simplement avoir une idée de la situation, sans qu'on me dise « tout le monde va déguerpir » ou en entrant dans les détails. C'est 50 $ la tonne.

M. Graham : Vous parler du prix de nos produits n'est pas un sujet facile.

La façon dont la taxe est conçue est d'une importance capitale, mais je dirais, puisque notre industrie dépend beaucoup du marché, qu'il serait peu probable...

Le président : Je n'essaie pas de vous mettre sur la sellette, mais j'aimerais que vous continuiez de réfléchir à cette taxe de 50 $ la tonne après la séance. Je vous en serais reconnaissant. Je sais que votre industrie dépend du marché. Nous comprenons ce genre de choses, que les agriculteurs vont « aller voir ailleurs ». Mais si on vous imposait une taxe de 50 $ la tonne et qu'on continuait de produire de l'azote ici au Canada, quel impact cela aurait-il sur les coûts que doit assumer un agriculteur, c'est-à-dire sur ce qu'il paie maintenant, dans le vrai monde, aujourd'hui?

M. Whyte : Voyez-vous, nous vendons en bloc, ce qui veut dire que vous devriez aller voir les gens qui travaillent directement avec les agriculteurs pour une question sur le coût des intrants. Ils pourraient mieux vous répondre. De notre côté, nous produisons à grande échelle.

Le président : Qui pourrait mieux nous renseigner?

M. Whyte : Les distributeurs et les vendeurs qui vendent le produit directement aux agriculteurs.

M. Graham : Je crois que la meilleure réponse que je puisse vous donner est que nous devons en apprendre davantage sur la structure de la taxe sur les émissions carboniques pour pouvoir mieux vous répondre.

Le prix des engrais dépend de la demande des agriculteurs. Je dirais que les agriculteurs, quand ils vont témoigner devant le comité, disent souvent qu'il est difficile pour eux d'équilibrer l'augmentation des coûts de production avec les prix qu'ils demandent à leurs clients, c'est-à-dire l'industrie alimentaire, les entreprises céréalières, et cetera.

De manière générale, il est très difficile pour eux de transférer l'augmentation des coûts de production à leur clientèle, parce qu'ils doivent demeurer compétitifs s'ils veulent qu'on achète leurs produits.

Le président : Je comprends très bien tout cela. Je veux seulement connaître le coût. Si c'est 50 $ la tonne, peu importe le prix pour le deuxième ou le troisième élément dans la chaîne de vente, le coût augmente pour l'agriculteur. Quel serait l'impact sur ce que vous produisez aujourd'hui? Je ne comprends pas pourquoi ce serait difficile à déterminer.

J'aimerais qu'on prenne tous ces éléments extérieurs et qu'on les mette de côté. D'après ce que vous nous dites, si on imposait une taxe de 50 $ la tonne, la production cesserait au Canada.

M. Whyte : Peut-être, peut-être pas.

M. Graham : Non, pas nécessairement. Pour être franc, je dirais que notre industrie a investi à long terme au Canada, et les usines que nous avons installées ici sont encore bonnes pour des dizaines d'années. Nous ne laissons pas entendre de quelque façon que ce soit que nos usines vont fermer. C'est la même chose dans le cas de la potasse. Les mines ont des réserves pour 100 ou 200 ans, environ.

Si les gouvernements prennent de mauvaises décisions quant à ce système de plafonnement et d'échange ou quant à la tarification des émissions carboniques, cela aura un impact sur nos usines au Canada. Ce sera plus difficile d'aller au siège social et de dire : « Nous voulons apporter des améliorations progressives à nos installations, des agrandissements et ce genre de choses. » C'est ce genre d'impact que peut avoir une mauvaise décision.

Le président : Je crois que ce sera assez pour cette question.

Le sénateur Massicotte : Je sais que vous ne pouvez pas prédire ce qu'un agriculteur va faire, mais comment est-ce que vos coûts augmenteraient? En d'autres mots, est-ce qu'on parle de 5 p. 100, de 2 p. 100 ou de 1 p. 100? Dans quelle mesure une taxe de 50 $ sur les émissions carboniques augmenterait vos coûts?

M. Graham : Nous aimerions...

Le sénateur Massicotte : Peut-être que vous n'avez pas la réponse. Si vous le voulez, vous pouvez nous répondre plus tard.

M. Graham : C'est ce que nous aimerions faire. Nous allons revenir plus tard pour vous fournir de l'information à ce sujet.

Notre industrie agit par consensus, et ce sujet est ouvert au public depuis peu de temps. Nous voulons consulter nos membres avant de vous donner une réponse.

Le président : Cela me convient.

Plus tôt, vous avez dit qu'il y avait eu beaucoup de changements dans l'industrie dans les années 1990 à cause du prix du gaz. Qu'avez-vous fait? Quel genre de mesures avez-vous prises dans les années 1990?

J'ai participé à l'industrie gazière et pétrolière pratiquement toute ma vie, et les prix du gaz naturel n'ont pas commencé à augmenter avant les années 2000. Que faisiez-vous pendant les années 1990, alors que les prix étaient environ les mêmes qu'aujourd'hui, afin de réduire substantiellement vos émissions?

M. Graham : Je ne dirais pas que c'était une réduction « substantielle », mais nous avons fait ce que nous pouvions.

Le président : D'accord. Et pour quelles raisons?

M. Graham : Je n'ai pas étudié la question dernièrement, mais je crois que les prix du gaz naturel avoisinaient 3 $ le MBTU. Les prix du gaz naturel ont atteint des sommets de 9 $ ou 10 $...

Le président : Pendant les années 2000.

M. Graham : Oui. Mais il y a eu une grande augmentation pendant les années 1990 aussi.

En ce qui concerne les mesures que les gens ont prises, par exemple, des ingénieurs ont examiné les usines. « Est-ce que le robinet a une fuite? Si oui, on le remplace. Serait-il possible de désengorger l'usine en apportant un petit changement, par exemple en utilisant des compresseurs plus efficients? » C'était ce genre de choses. C'est le même principe lorsque votre voiture semble avoir un problème. Vous l'emmenez au garage, et vous faites une mise au point complète afin qu'elle roule aussi bien que possible.

On a procédé à des améliorations progressives afin d'être plus efficient au niveau énergétique.

Le président : J'ai grandi sur une ferme, et je dirais que la majeure partie de la population qui n'a pas grandi sur une ferme ne sait pas quels produits on utilise pour la production d'engrais, qui peuvent vraiment améliorer les récoltes et qui vont servir à nourrir le monde dans l'avenir.

Avez-vous déployé des efforts afin d'informer le public? Vous pourriez peut-être essayer, disons, une publicité télévisuelle. Votre industrie a-t-elle songé à informer un peu plus le public? Voyez-vous, il y a beaucoup de gens qui pensent que tout doit rester dans le sol, qui disent « nous n'en voulons absolument pas ». Le fait est que nous en avons besoin, parce qu'à notre connaissance, il n'y a actuellement aucune solution de rechange. Donc, menez-vous des activités d'information?

M. Whyte : Oui, c'est le cas.

Le président : Je n'en étais pas au courant. Je me demande pourquoi. C'est peut-être que je n'écoute pas les bons postes.

M. Whyte : Nous avons beaucoup de concurrents, et ce, sur beaucoup de fronts, mais oui, nous allons déployer plus d'efforts.

Nous intervenons aussi auprès des écoles. Par l'intermédiaire de la Fondation canadienne des nutriments pour la vie, nous travaillons avec des étudiants au secondaire et leur fournissons des jardins d'apprentissage. Le film Seul sur Mars a aussi eu un effet important. Le personnage avait besoin d'engrais. Il avait tout le reste, mais il avait besoin d'engrais pour faire pousser de la nourriture.

Vous avez raison; il faut revenir à l'essentiel. Le dilemme ne concerne pas uniquement notre industrie. C'est un dilemme pour l'agriculture et les restaurants. Les gens ne savent plus d'où vient leur nourriture. Il y avait une publicité de McDonald's où il était question de vrais œufs. C'est un problème.

Le président : Très bien.

Le sénateur Lang : Rapidement, j'ai une question. J'aimerais qu'on revienne sur le sujet de la réglementation du secteur que le sénateur Patterson a mentionnée. Aviez-vous conclu une entente avec le gouvernement précédent sur la nature de la réglementation qui allait être adoptée afin de vous permettre de poursuivre vos activités commerciales et d'atteindre les cibles qui vous ont été fixées? Aviez-vous conclu une entente?

M. Graham : Non. Je ne dirais pas qu'il s'agissait d'une entente, mais nous avions une compréhension mutuelle de notre industrie et de ce qui était réaliste. Le processus réglementaire est long, et rien n'est définitif jusqu'à ce que le ministre...

Le sénateur Lang : Non, je comprends cela. Ce que je voulais savoir, c'est si vous aviez un accord clair avec eux sur ce qui pouvait être fait et sur ce qui allait être fait, ce que vous pourriez supporter?

M. Graham : Oui.

Le président : Merci, messieurs. La séance a été très informative. Je vous prie d'envoyer les renseignements que l'on vous a demandés à la greffière.

M. Graham : Nous avons pris vos questions en note.

Le président : Elle veillera à ce que ce soit communiqué à tous.

(La séance est levée.)

Haut de page