Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule nº 37 - Témoignages du 14 décembre 2017
OTTAWA, le jeudi 14 décembre 2017
Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 8 heures, pour poursuivre l’étude du projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et modifiant une autre loi en conséquence.
La sénatrice Rosa Galvez (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bonjour et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je m’appelle Rosa Galvez, et je suis une sénatrice représentant le Québec. Je vais laisser mes collègues se présenter, mais avant, je veux présenter, à ma gauche, le greffier du comité, Maxime Fortin, et à ma droite, les analystes du comité, Sam Banks et Marc LeBlanc.
La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Cormier : René Cormier, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Cordy : Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, du Québec.
La présidente : Le 6 décembre dernier, le Sénat nous a transmis le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et modifiant une autre loi en conséquence. Nous sommes à la deuxième réunion prévue pour étudier ce projet de loi. Nous allons entendre des témoins du gouvernement du Yukon puis de l’industrie avant de procéder à l’étude article par article.
[Traduction]
Aujourd’hui, nous accueillons, par vidéoconférence, du gouvernement du Yukon, l’honorable Ranj Pillai, député, ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources et ministre du Développement économique, ainsi que Lindsay DeHart, directrice, Direction de l’évaluation des activités de développement. Nous savons que c’est très tôt le matin pour vous, alors nous vous sommes très reconnaissants d’être là avec nous.
Merci beaucoup d’être là. Monsieur le ministre, je vous prie de nous présenter votre déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions et réponses. Merci.
L’honorable Ranj Pillai, député, ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources et ministre du Développement économique, gouvernement du Yukon : Merci, madame la présidente, et merci à vous tous de nous donner l’occasion, ce matin, de vous faire part de nos idées sur cette question très importante. Je vais y aller de ma déclaration liminaire, pour que nous ayons le plus de temps possible pour les questions et réponses.
Nous pouvons tous convenir qu’il est impératif pour le succès des relations et de la réconciliation au Canada de mettre en œuvre les ententes définitives avec les Premières Nations du Yukon dans le respect et l’honneur. Le gouvernement du Yukon est de loin l’organisme décisionnaire et l’organisme de réglementation le plus actif, selon le processus de la LEESY, et nous possédons de cette loi une vaste expérience. Je vous remercie de nous donner l’occasion d’en faire profiter le comité.
Bien que le projet de loi S-6 ait permis d’édicter bon nombre des recommandations concernant l’examen de la LEESY cinq ans après sa promulgation, les quatre changements législatifs apportés par le projet de loi S-6 que le projet de loi C-17 vise à abroger ont été adoptés sans une consultation marquante des Premières Nations du Yukon, ce qui a mené à une contestation judiciaire au Yukon. Notre gouvernement, qui formait alors l’opposition, avait questionné le gouvernement du Yukon de l’époque sur ce point très important.
Il est prioritaire pour nous d’éliminer les dispositions qui ont causé des frictions avec les Premières Nations et de nous mettre à progresser dans nos relations dans le cadre de la LEESY, ainsi que de rehausser la certitude et la confiance qu’inspire le processus d’évaluation des activités de développement au Yukon.
Pour notre gouvernement, l’un des piliers essentiels est de garantir le respect de l’esprit et de l’intention des ententes finales avec les Premières Nations du Yukon et des ententes sur l’autonomie gouvernementale. Entre autres mesures prises par le gouvernement, nous avons entamé un dialogue avec les Premières Nations du Yukon, individuellement et par l’intermédiaire du Forum du Yukon, afin de faire progresser les éléments présentant des intérêts mutuels. Il est prioritaire de réinitialiser les relations qui vont guider l’avenir du Yukon. Le projet de loi C-17 que nous avons devant nous est un élément important et nécessaire de ce processus.
Le gouvernement du Yukon travaille depuis un bon moment avec le Canada et avec les Premières Nations du Yukon à assurer le retrait des modifications litigieuses apportées à la loi par le projet de loi S-6. Cela a commencé par le protocole d’entente sur l’abrogation de la LEESY et culmine avec le projet de loi dont vous êtes maintenant saisis. Le gouvernement du Yukon appuie l’adoption et la promulgation de ce projet de loi tel quel, et ce, dès que possible.
De plus, toutes les Premières Nations du Yukon qui sont autonomes, le Conseil des Premières Nations du Yukon, le gouvernement du Yukon et le gouvernement du Canada mettent en œuvre un protocole d’entente sur la réinitialisation de la LEESY. Il s’établit ainsi une nouvelle relation de travail positive concernant la mise en œuvre et le fonctionnement futurs de la LEESY.
Tous les signataires de cette entente sont impatients de mettre le protocole d’entente en relief lors de notre prochaine réunion intergouvernementale, qui aura lieu demain, en fait, ici au Yukon. Comme vous l’avez entendu à votre séance de mardi, les premières réunions de ce groupe doivent avoir lieu à la mi-janvier. Le gouvernement du Yukon joue activement son rôle en lançant ces conversations, et nous reconnaissons le travail acharné que le Canada et les Premières Nations du Yukon accomplissent à cet égard.
Le gouvernement du Canada et le gouvernement du Yukon doivent agir honorablement dans la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales. Cela inclut les processus d’établissement par loi découlant de cela, maintenant et à l’avenir. Je suis ravi de travailler avec le gouvernement du Canada et les Premières Nations du Yukon à veiller à l’adoption de dispositions législatives robustes sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, et à concevoir un plan solide pour leur mise en œuvre.
J’aimerais aussi parler des préoccupations exprimées par les groupes de l’industrie qui sont actifs au Yukon alors que le projet de loi progressait au Parlement. Les engagements que ces protocoles d’entente et ce projet de loi comportent sont en train de rebâtir la confiance dans la gouvernance du processus de la LEESY. Une fois que le projet de loi C-17 sera adopté, il sera possible de s’attaquer à la tâche d’envergure de faire en sorte que la LEESY fonctionne pour tous les Yukonnais dans son libellé actuel. Cela ne se fera pas sans l’apport précieux des intervenants de l’extérieur du gouvernement, dont les groupes de l’industrie. Cependant, ces discussions et l’élaboration et la mise en œuvre de nouvelles politiques ne seront complètes qu’avec l’apport et la collaboration de l’OEESY, l’Office d’évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon, qui jouera un rôle dans ces relations nouvelles.
Cela dépasse la portée du projet de loi C-17, mais je veux vous parler de la façon dont ce processus fonctionne au Yukon et de ce que nous faisons pour convaincre les gens d’opter pour le Yukon comme étant un endroit formidable où travailler et investir.
Le gouvernement actuel veut faire du Yukon un endroit encore plus attrayant pour l’exploitation minière responsable. Nous savons que le sol du Yukon n’est pas d’accès facile ni facile à travailler en raison des fenêtres saisonnières. Nous travaillons activement à concevoir, avec nos partenaires des Premières Nations, une nouvelle génération d’accès aux secteurs riches en minéraux afin de faciliter de plus nombreux projets d’investissement et de donner plus d’occasions aux Yukonnais et aux entreprises, et de permettre à l’industrie minérale du Yukon de progresser et de prospérer, grâce à un vaste soutien et à la clarté réglementaire essentielle à notre bien-être économique.
Nous espérons que les changements apportés par le projet de loi C-17, conjugués à l’entente sur la mise en œuvre future de la LEESY, serviront à résoudre toutes les questions juridiques en suspens dont les cours sont saisies et qu’ils traceront un parcours positif vers l’avenir.
Au nom du gouvernement du Yukon, je remercie le gouvernement du Canada d’avoir proposé ces changements. Merci.
La présidente : Merci beaucoup.
Je vous prie, sénateurs, de restreindre vos préambules, et monsieur le ministre, de fournir des réponses directes aux questions.
Le sénateur Massicotte : Merci beaucoup. J’ai deux questions. Vous avez parlé des modifications apportées précédemment à la loi, et vous dites que cela a été fait avec l’approbation de certaines parties essentielles seulement — des Premières Nations, je présume —, que cela a été contesté en cour, et cetera. J’étais probablement membre de ce comité au moment où cela a été approuvé, mais je ne m’en souviens pas.
Les gens ne le font pas des erreurs par exprès. Je suis sûr, même si c’était le gouvernement précédent, que les intentions étaient valables et qu’à leurs yeux, c’était la bonne chose à faire. J’aimerais que vous me rafraîchissiez la mémoire. Vous n’êtes pas d’accord maintenant avec ce qui a été fait; vous voulez apporter des modifications à cela.
Pourquoi ces modifications ont-elles été apportées précédemment? Quel a été le résultat de cette contestation judiciaire? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans ce raisonnement? De toute évidence, vous dites que ce qu’ils pensaient valable ne l’est pas. Donnez-moi un peu de contexte, je vous prie.
M. Pillai : Absolument, sénateur. Je sais que nous avons quelques petites difficultés techniques. Je crois avoir pu entendre votre question au complet, mais si j’ai manqué quelque chose, veuillez me le signaler pour que je rectifie le tir.
La perspective générale au Yukon, comme vous l’avez entendu des conseils et des Premières Nations du Yukon, et certainement de notre gouvernement, c’est qu’il y a assurément eu un dialogue avec l’industrie, et qu’il y avait alors un processus en cours et un désir d’envisager une certaine modernisation ou amélioration de la loi. Tout au long du processus, il y a eu un dialogue actif entre les intervenants.
Ce que nous comprenons généralement, mes collègues et moi — quand nous étions dans l’opposition à l’époque, et maintenant que nous formons le gouvernement, et d’après nos échanges avec les Premières Nations du Yukon —, c’est que, au dernier moment du processus, on a proposé quelque chose qui n’avait pas été soumis à un examen rigoureux et à une discussion approfondie comme la majorité de ce qui avait été fait avant. Donc, inévitablement, j’ai entendu l’expression « déposé pendant la réunion » pour certaines des modifications qui ont été relevées. Je pense bien que l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Le conflit que cette approche a causé au Yukon se fait encore sentir aujourd’hui. Je suis sûr que cela s’est reflété dans les témoignages de certains intervenants que vous avez entendus cette semaine. Je crois qu’il y a eu certains éléments du travail des gouvernements. Bien sûr, c’était un projet de loi fédéral, et il était entendu que les architectes de cela représentaient aussi les gens du gouvernement et, peut-être, notre chambre. C’est le processus qui a servi à rédiger le projet de loi, mais en ce qui concerne certains éléments de cela, les Premières Nations du Yukon estiment qu’elles n’ont pas eu la chance de participer au dialogue, ce qui constitue donc une atteinte à la procédure.
Bien sûr, cela a mené à un recours juridique. Je n’ai pas les connaissances juridiques nécessaires pour expliquer ce processus, mais on en dit que l’affaire est suspendue, et en ce moment, les groupes qui ont lancé le recours attendent de voir ce qui découlera du processus en cours et auquel nous participons tous.
Le sénateur Massicotte : Ma deuxième question découle de cela. Je soupçonne que c’est peut-être la raison d’un certain processus qui a été suivi il y a quelques années.
Je crois comprendre que nous allons entendre des témoins de l’industrie minière, ce matin, dont Mike McDougall, d’Alexco, et ainsi de suite. Ils disent en gros : « Nous apprécions ce processus et nous voulons que tout le monde embarque, mais un processus est un processus. » Ils s’inquiètent du résultat de tout cela et craignent qu’il en découle des complications indues avec les permis, des retards indus à cause de légères modifications, alors que vous voulez étendre un peu votre territoire.
Est-ce qu’ils ont lieu de s’inquiéter? Si leurs préoccupations sont valables, le processus est bien, mais économiquement, il pourrait y avoir d’importants effets négatifs. Quelle est votre réponse à ces observations et ces préoccupations?
M. Pillai : Je sympathise avec les gens de l’industrie, car même si je comprends qu’ils cherchent simplement à faire avancer leurs projets, ils essaient de veiller à être des entreprises socialement responsables; le secteur minier est un groupe fantastique de personnes qui mènent les entreprises du secteur tertiaire, et leur contribution au Yukon inspire énormément le respect des Yukonnais et des gens qui sont impliqués.
Je sympathise avec eux parce que je crois que leurs préoccupations étaient absolument valables et qu’ils les ont mises en avant. Le processus employé pour résoudre certaines des préoccupations était défectueux. C’est vraiment de cela que nous parlons. Quand nous regardons le processus et son résultat, il a mené à de l’incertitude.
Si notre discussion d’aujourd’hui porte sur la question de savoir si nous croyons que ce processus aurait un effet négatif sur l’économie, c’est sûr que c’est très important pour moi, à titre de ministre du Développement économique ainsi que de ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources. Mon mandat est en partie de veiller à ce que le secteur soit prospère.
Alors quand nous nous penchons sur ce cas particulier, certains résultats seront difficiles. Quand nous regardons l’ensemble des enjeux qui nous attendent, je me demande si j’aimerais mieux avoir de l’incertitude concernant mes relations avec le gouvernement, l’industrie et les Premières Nations. Je crois que la chose la plus importante à faire, c’est veiller à la prospérité du secteur.
Est-ce que le projet de loi va donner lieu à des recours? C’est possible, mais il est à espérer que ce matin, nous allons parler de la voie à suivre à l’avenir. Que je sois à Vancouver ou Toronto, ou n’importe où en Amérique du Nord à parler avec des investisseurs de grandes sociétés qui ont investi au Yukon, la vraie préoccupation, c’est de savoir quelle est notre relation avec les Premières Nations autonomes et notre gouvernance des Premières Nations.
Au cours de la dernière année, notre gouvernement s’est vraiment concentré là-dessus. Dans les deux mois suivant notre arrivée au pouvoir, nous avons signé un autre protocole d’entente avec toutes les Premières Nations autonomes, ce qui a été le signal de la réinitialisation de nos relations. Ce que nous avons constaté, c’est une augmentation de 30 p. 100 de l’investissement maintenant, par rapport à ce qui avait été projeté en janvier, dans le secteur minier.
Je crois que c’est la clé d’un long processus durable. Nous pouvons parler un peu plus ce matin du processus à venir, et je respecte tout à fait ce qui va se dire aujourd’hui devant vous. Cependant, encore une fois, l’industrie a été prise dans un processus alors qu’elle veut simplement faire avancer ses projets, mais les architectes de cela n’ont pas pris en compte les dommages collatéraux du processus qui était utilisé, ce qui est très dommage.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur le ministre.
La sénatrice Seidman : Merci d’être avec nous aujourd’hui, monsieur le ministre. Quand nous avons entendu les témoignages au sujet du projet de loi S-6, en 2014, le premier ministre du Yukon à l’époque, Darrell Pasloski, est venu témoigner.
Il a dit :
[…] on constate de plus en plus qu’il est essentiel d’apporter des changements à la loi devant vous aujourd’hui pour permettre au Yukon de rester concurrentiel.
Alors la question que je vous pose est celle-ci. Est-ce que quelque chose a changé? Êtes-vous en désaccord avec l’énoncé de l’ancien premier ministre?
M. Pillai : Notre territoire est certainement concurrentiel. Je pense que pour déterminer ce qui fait qu’un territoire est concurrentiel, il faut tenir compte de nombreux facteurs. Le processus de réglementation en est un, à n’en pas douter. Il y a aussi bien sûr les richesses naturelles, l’infrastructure, la capacité — et il y a toujours les relations avec les gouvernements des Premières Nations, qui sont de la plus haute importance dans une conversation moderne sur l’extraction des ressources.
À ce sujet, je pense que nous devons toujours travailler à améliorer nos règlements, nos lois et la certitude. Vraiment, c’est pour nous un élément de politique qui produit des effets sur l’industrie. C’est l’évaluation. Mais en plus, dans le ministère que j’ai l’honneur de diriger, le ministère de l’Énergie, des Mines et des Ressources, ou avec Mme DeHart, qui est ici avec moi, nous avons aussi un organisme de réglementation au gouvernement du Yukon. La clé, c’est que nous cherchons constamment à voir comment améliorer cela aussi.
C’est donc un processus constant, et je pense qu’il est essentiel de toujours améliorer le processus de réglementation, que ce soit à l’échelon territorial ou fédéral.
J’ai été l’hôte de tables rondes, au cours de la dernière année, et à certaines de ces tables rondes, nous avons accueilli certains des principaux dirigeants de l’industrie de l’investissement en Amérique du Nord, dans le secteur minier. Ce que nous avons entendu, concernant l’avantage concurrentiel, ayant vu d’autres processus en cours, en particulier sur la côte Ouest, et concernant certains des enjeux relatifs aux oléoducs qui sont soumis au processus réglementaire, c’est que l’approche du guichet unique que la LEESY nous a donné correspond aux souhaits de l’industrie de l’investissement. Franchement, ils ne s’arrêtent pas sur les 24 derniers mois. Ils disent simplement en général qu’ils comprennent que ce régime a la faveur, à l’échelle du pays.
Encore une fois, quand je parle avec des dirigeants des achats qui ont mené des processus aux États-Unis — cela dépend aussi de l’État —, avant le régime actuel, parce que nous voyons des changements dans la structure de réglementation du pays, le Yukon était favorisé. Pouvons-nous améliorer les choses? Absolument. Mais je pense qu’en travaillant à améliorer le processus, nous avons une obligation et un traité signé, et nous devons nous assurer que le processus est suivi.
Nous ne pouvons perdre de vue le fait que si vous utilisez le mauvais processus pour obtenir des améliorations et que vous poursuivez dans cette voie, vous reculez un peu, plutôt que d’avancer un peu.
La sénatrice Seidman : Est-ce que j’ai une minute pour poursuivre?
La présidente : Oui.
La sénatrice Seidman : Je déduis de ce que vous venez tout juste de dire que vous n’êtes peut-être pas en désaccord avec ce que l’ancien premier ministre a mentionné concernant la loi précédente, mais c’est le processus qui vous pose problème et qui a causé des ennuis au Yukon.
Si c’est le cas, vous allez donc vous pencher sur un nouveau libellé et l’appuyer le plus tôt possible afin de tenir compte des dispositions qui ont été retirées de la loi, n’est-ce pas?
M. Pillai : L’une des plus importantes prochaines étapes, dans le cadre de notre travail, est de donner l’occasion aux intervenants de retourner à la table des négociations. Mon rôle consiste notamment à m’assurer que les préoccupations et les intérêts de l’industrie sont également entendus dans le cadre des négociations.
Nous nous sommes engagés à ce que le gouvernement du Yukon, le gouvernement du Canada et les Premières Nations du Yukon se rencontrent de nouveau en janvier pour entamer une discussion sur la façon d’aller de l’avant et d’examiner tous les aspects de la LEESY afin de déterminer ce que nous pouvons améliorer. Nous pensons tous pouvoir revoir des éléments de cette mesure et peut-être améliorer les choses, et je suis certain que des sujets qui n’ont pas été abordés vont également l’être dans le cadre de ces démarches.
À propos de certains aspects du texte législatif précédent, je pense qu’en en examinant certains, comme les délais, je vais avoir des préoccupations concernant une partie de l’information et des témoignages qui portent là-dessus, d’après ce que j’ai vu et entendu dans le cadre de mes fonctions.
Oui, je crois que nous sommes tout à fait résolus à trouver une voie à suivre et à améliorer continuellement les choses. Bien entendu, dans nos discussions sur le protocole d’entente, des éléments nous incitent à parvenir à un bon processus d’examen continu. Il convient donc de retourner de temps à autre à la table des négociations et d’améliorer les outils que nous avons pour en faire le territoire le plus concurrentiel au pays, ce qui est essentiellement notre objectif.
La présidente : Merci.
Le sénateur Wetston : Monsieur le ministre, merci du travail que vous faites. De toute évidence, nous espérons que l’exploitation des ressources du Nord se poursuivra.
Je ne vais pas vous demander de répondre, mais je me demande si vous avez eu l’occasion d’examiner le rapport sur les corridors que le comité des banques a présenté il y a quelques mois. Si vous ne l’avez pas vu, je pense que pourriez vouloir y jeter un coup d’œil.
Le sénateur Patterson : C’est contraire au Règlement.
Le sénateur Wetston : Pour être franc, je ne fais que fournir de l’information, sénateur Patterson.
Je passe maintenant à un point qui pourrait être conforme au Règlement, qui porte sur la loi. Je voulais vous poser des questions sur le lien entre l’élimination de la délégation des pouvoirs des ministres et les instructions générales obligatoires, qui se trouvent évidemment dans la loi.
Pouvez-vous expliquer le raisonnement qui sous-tend ces modifications?
M. Pillai : Il serait déplacé de ma part d’essayer de définir l’objectif puisque je n’ai pas participé aux discussions à l’époque. Je crois que vous faites allusion aux responsabilités déléguées à l’échelle territoriale en matière d’efficacité, dans ce cas précis.
Une fois de plus, je dois revenir sur l’importance de prendre ces décisions avec toutes les parties concernées et de vous assurer que le travail que vous présentez à la fin a été fait avec rigueur et au moyen du bon processus afin que le contenu adopté bénéficie de l’appui des parties. C’est une des difficultés.
Oui, il y avait certainement des préoccupations à cet égard, mais, une fois de plus, je vais dire pour le moment que c’est ce que j’avais compris. Mme DeHart a peut-être quelque chose à ajouter à ce sujet.
Lindsay DeHart, directrice des projets d'envergure Yukon, Direction de l’évaluation des activités de développement, Bureau du conseil exécutif, gouvernement du Yukon : Bonjour. Oui, afin de soutenir les propos du ministre, en ce qui a trait à l’efficience et à l’examen de la délégation, la position du gouvernement du Yukon à l’époque consistait seulement à essayer d’améliorer avec le gouvernement fédéral et les Premières Nations du Yukon des aspects plus administratifs de la loi.
En ce qui concerne plus particulièrement la délégation des pouvoirs, comme le ministre l’a mentionné, à l’aide du récent protocole d’entente, nous rétablissons une relation pour aller de l’avant. Cela ne donne pas nécessairement d’instructions générales à l’office d’évaluation, mais c’est l’occasion pour les parties de se rencontrer et d’examiner ensemble les problèmes liés à la LEESY. Comme on l’a fait remarquer, l’office d’évaluation participerait aux discussions.
Le sénateur Wetston : Vous avez mentionné que l’industrie veut toujours faire progresser les projets. Je suppose que c’est logique, mais il arrive souvent que des intervenants et la réglementation gouvernementale créent des obstacles. Je ne suis pas certain si c’est ce que vous laissiez entendre, mais j’aimerais vous le demander.
À mon avis — et je l’ai souvent dit —, le gouvernement devrait essentiellement intervenir à un rythme que l’industrie peut endurer. Votre industrie peut-elle endurer les circonstances auxquelles vous faites face en ce qui a trait à cette loi?
M. Pillai : Je crois que oui, tout à fait. Je pense que ce qu’il faut comprendre, c’est que nous endurons maintenant une série de conflits qui nous ont été légués. Cela fait certainement partie des dossiers sur lesquels j’ai dû me pencher. Nous avons eu une série de contestations judiciaires liées à des décisions politiques au cours des dernières années. Une partie de ce que je dois faire, et de ce que je fais lorsque je parle aux gens de l’industrie et à d’autres personnes, c’est expliquer que notre gouvernement a changé sa façon de travailler avec ses partenaires des Premières Nations.
À l’heure actuelle, le Yukon est un des meilleurs endroits au monde pour investir, et les partenaires qui viennent maintenant dans notre territoire le constatent. Pour la première fois dans l’histoire de l’industrie, nous avons certaines des plus grandes sociétés minières au monde, et elles sont nombreuses à avoir reconnu les mérites de notre approche au cours des 12 derniers mois. Quand des sociétés comme Barrick et Newmont commencent à investir au Yukon, comme c’est le cas actuellement, cela montre que notre approche est la bonne.
Nous avons dû endurer certaines des difficultés que nous voyons. Nous venons tout juste d’achever un processus lié à une cause entendue par la Cour suprême du Canada. Nous l’avons achevé au cours des dernières semaines. C’est donc une autre chose qui est réglée, et nous pouvons continuer de progresser. Cette mesure législative est une des dernières, et nous pouvons donc tous passer à autre chose et construire une industrie viable.
Le sénateur Patterson : Je suis heureux de vous voir, monsieur le ministre.
Je suis le porte-parole pour le projet de loi, et je tiens à mentionner que je comprends parfaitement les parties et les principaux intervenants qui disent qu’il faut adopter le projet de loi sans amendement, qu’il aidera à créer un climat de certitude. Je comprends aussi pourquoi ils disent qu’il mettra fin aux litiges, qui ont probablement refroidi les investisseurs, mais il laisse aussi de très grandes questions sans réponse. Le projet de loi fera disparaître l’article 49.1 et le paragraphe 56(1). De grands projets sont enlisés dans le processus réglementaire, et les politiques qui régissent maintenant ces questions seront en vigueur après l’adoption du projet de loi S-6.
À propos des délais, à la dernière séance du comité, j’ai entendu le représentant du Conseil des Premières Nations du Yukon dire que les délais de 15 à 18 mois n’étaient pas assez longs. Il semble avaliser le délai de 34 mois qui a été nécessaire pour approuver le projet Mactung.
Grâce à ce projet de loi, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut auront en place des dispositions qui n’exigeront manifestement pas une importante réévaluation environnementale lorsque de petits projets sont modifiés, et ces territoires n’auront pas les mêmes délais que le Yukon.
Premièrement, souscrivez-vous à mon analyse voulant que d’importantes questions demeurent sans réponse — d’importantes lacunes qui doivent être comblées — alors que nous adoptons complaisamment la mesure législative qui fera régner la paix au Yukon? Deuxièmement, quel est le délai de votre gouvernement pour la mise en place de politiques et de règlements visant à remplacer ces dispositions? Je sais qu’une réunion aura lieu dans la nouvelle année, mais avez-vous un délai? Il a fallu aux mêmes parties huit ans pour faire l’examen quinquennal de la loi, et en tant que comité, si nous adoptons le projet de loi en faisant preuve de bonne foi, comme le recommandent des intervenants que nous respectons au Yukon, nous devons savoir ce qui suivra et de quelle façon vous comblerez ces lacunes que l’adoption de la mesure législative créera selon moi.
M. Pillai : Merci, monsieur le sénateur. Je suis ravi de vous voir de nouveau ce matin. Nous aurons probablement l’occasion de nous revoir à l’une des conférences sur les mines cette année. Je vous remercie de vos observations.
Je suis d’accord. J’ai également examiné certaines des déclarations ainsi que votre point de vue sur cette importante mesure législative.
Je vais essayer de décortiquer certaines choses et de vous donner une bonne réponse de la part du gouvernement territorial à propos de cette mesure législative.
Premièrement, je dirais que lorsque nous regardons le processus en cours, et nous parlons des délais — je vais commencer par cette difficulté —, une partie de la discussion que nous avons eue avec le gouvernement fédéral visait à garantir, tout d’abord, que les Premières Nations du Yukon qui participent au processus ont les bonnes ressources pour effectuer ces évaluations. C’est essentiel. Je ne crois pas que c’est ce que nous avons vu, y compris pour ce qui est du gouvernement fédéral précédent, à mesure que nous comprenons davantage que les Premières Nations doivent pouvoir participer sérieusement au processus, comme il se doit.
Je vais vous donner un exemple. À l’heure actuelle, je sais que vous savez probablement que notre territoire est un endroit très propice au développement. Dans certaines régions, des Premières Nations autonomes ont peut-être deux employés affectés aux terres, mais les dépenses en capital qui pourraient être engagées dans des projets atteignent peut-être un demi-milliard ou un milliard de dollars. Ils ont donc de nombreux processus en cours, et ils doivent veiller à avoir la capacité nécessaire pour évaluer et examiner les documents qui sont présentés.
Dans bien des cas, le travail se fait à l’interne, mais on s’adresse également à des experts, et il y a un coût à cela. Tout d’abord, je dirais qu’il faut tenir compte d’une discussion plus approfondie au sujet des délais. Il n’est pas seulement question de la mobilité de l’argent investi; l’argent est mobile — il n’est pas fidèle au territoire. Nous en tenons tous compte, mais lorsqu’il y a un projet dans un territoire traditionnel, nous devons nous assurer que les nations concernées ont les ressources nécessaires pour effectuer une bonne évaluation et participer. Quand une entreprise veut mettre en branle dans la région un projet de 500 millions de dollars, nous devons nous assurer que tout le monde peut faire les bonnes démarches.
Deuxièmement, y a-t-il des difficultés à venir? D’après ce que j’ai compris de la question, suis-je d’avis à ce stade-ci qu’il y a une lacune dans le libellé ou le processus? Quand vous regardez l’histoire de la LEESY, il n’est pas juste question de difficultés. C’était une loi très favorable lorsqu’elle est entrée en vigueur, et l’industrie s’est certainement heurtée à des obstacles au cours des dernières années précédant cette mesure législative.
J’aimerais juste que nous arrivions à un point où nous pouvons régler les problèmes que nous avons eus au cours des dernières années et où tous les groupes se sentent à l’aise avec le libellé, mais la réalité, c’est que cela a vraiment ébranlé le lien de confiance entre certains intervenants. Nous avons eu une réunion pendant notre conférence sur la géoscience, la conférence de notre industrie cet automne. Certaines des personnes que vous avez entendues et que vous entendrez ont pris part à cette discussion. C’était une excellente occasion de rassembler tous les intervenants dans la même pièce. Les membres de la Chambre des mines du Yukon, qui vous parleront aujourd’hui, ont créé cette occasion et cette tribune, et je les remercie. Nous avons parlé au grand chef et au Conseil des Premières Nations du Yukon. L’Association minière du Canada était représentée, tout comme le directeur général de l’OEESY. Mme DeHart, qui m’accompagne aujourd’hui, était aussi présente. L’industrie était également représentée. En gros, tous les intervenants étaient réunis pour discuter de l’incidence que cette mesure législative aura sur eux.
Le grand chef a exprimé un point de vue très clair et distinct, et je pense que vous l’avez fort probablement entendu mardi. Le point de vue, d’après ce que j’ai compris de la part des Premières Nations du Yukon, c’est que nous ne serons pas en mesure de progresser comme nous le voulons d’ici à ce que le projet de loi soit adopté et à ce que les torts soient redressés.
À mon avis, nous n’avons pas le choix de rassembler tout le monde pour tenter d’améliorer le libellé du projet de loi et l’adopter. Je crois que les gens aimeraient recourir à une autre approche, mais je ne pense pas qu’il y en ait une pour nous. On voit clairement qu’à cause des erreurs et des abus de confiance qui ont eu lieu, la seule façon d’améliorer la situation et de panser les plaies est de faire adopter ce projet de loi.
Va-t-il y avoir des difficultés? Peut-être. Sommes-nous prêts à améliorer la loi, et sommes-nous prêts à discuter avec l’industrie et nos intervenants pour tenter de l’améliorer à l’échelle territoriale? Tout à fait. Nous sommes prêts à faire toutes ces choses, mais nous venons d’hériter de la situation. À ce stade-ci, je n’ai pas eu l’occasion de réunir tous les intervenants étant donné que nous étions déjà empêtrés dans cette contestation judiciaire au moment de prendre le pouvoir.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Le temps file, et trois autres sénateurs doivent prendre la parole. Je vous prie donc d’éviter les préambules et de répondre brièvement.
Le sénateur Neufeld : Vous pouvez répondre rapidement. À quel moment avez-vous été élu pour la première fois? À quel moment le gouvernement a-t-il changé? Combien de temps s’est écoulé depuis?
M. Pillai : C’était en 2016.
Le sénateur Neufeld : D’après ce que j’ai compris, le gouvernement fédéral, il y a environ deux ans, a signé le protocole d’entente pour faciliter ce qui se fait actuellement au moyen de la modification de la loi. Le document fait trois pages, il est très simple et il aborde quatre questions. Lorsque vous avez formé votre gouvernement, avez-vous eu des discussions avec le gouvernement fédéral à propos des processus transitoires, comme l’a demandé mon collègue, le sénateur Patterson, car je pense que cela me dérange; je pense que cela dérange énormément l’industrie. Comment allez-vous transférer cela, et combien de temps faudra-t-il pour mettre en place les règlements? J’ai posé la question au ministre, et on ne m’a évidemment même pas donné de délai approximatif. Je n’ai pas eu de réponses. On ne le savait pas.
Avez-vous la moindre idée du temps qu’il faudra pour mettre en vigueur des règlements portant sur les quatre points qui se trouvent dans ce projet de loi de trois pages afin que l’industrie se sente à l’aise d’investir, comme vous le dites, des milliards de dollars au Yukon, ce qui est formidable à mon avis? Je pense que cela préoccupe tout le monde, et je sais que vous ne faites pas exception. Vous l’avez montré. Réconfortez-moi en me disant à quel point votre gouvernement travaillera avec acharnement à l’élaboration de processus transitoires et de règlements afin que l’industrie se sente à l’aise d’investir de l’argent.
M. Pillai : Je crois que le protocole d’entente de remise à zéro est primordial. J’ai vraiment l’impression que nous devons nous assurer que le gouvernement fédéral collabore entièrement et sérieusement avec nous et que le ministre fédéral s’engage à le faire, que ce soit à l’égard des ressources ou des intervenants, ou pour faire en sorte d’avoir un libellé qui fonctionne, qui aidera l’industrie, ainsi que les Premières Nations, à garantir l’efficience du processus et à accroître l’efficacité.
C’est entre autres difficile, monsieur le sénateur, étant donné que tout le monde doit retourner à la table des négociations pour pouvoir en discuter. Je pense que nous pouvons examiner la loi actuelle avec des intervenants pour trouver des façons de l’améliorer. Le programme législatif à l’échelle fédérale est robuste. Je ne peux toutefois pas en parler, car je ne représente pas le gouvernement fédéral. Toutefois, nous voulons certainement travailler aussitôt que possible avec les intervenants qui se trouvent ici pour examiner la réglementation du Yukon et trouver une façon d’améliorer le libellé.
À notre échelon, nous voulons examiner notre programme législatif aussi rapidement que possible, afin que les choses puissent progresser au cours des prochaines années, mais à l’échelon fédéral, ce serait une tout autre conversation. Je crois toujours que nous pouvons offrir un territoire prometteur pour les investissements en utilisant le cadre déjà en place.
Le sénateur MacDonald : Bonjour, monsieur le ministre.
Je suis sûr que vous connaissez bien les défis liés à la création d’emplois à long terme et à l’augmentation des revenus dans certaines des régions les plus éloignées du pays, mais c’est également un défi dans de nombreuses provinces. Le Yukon, comme d’autres territoires et ma propre province, la Nouvelle-Écosse, compte sur les transferts du gouvernement fédéral pour soutenir son administration.
L’autre jour, j’ai posé une question à la ministre et aux représentants du gouvernement, et je n’ai pas reçu de réponse. Puisque vous êtes le ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources et le ministre du Développement économique au Yukon, j’aimerais savoir si vous pouvez dire au comité combien d’argent a été transféré au Yukon l’an dernier dans le cadre de la formule de financement des territoires dans votre récent budget?
M. Pillai : Sans avoir un nombre exact — et il se peut que je me trompe d’un point de pourcentage, sénateur —, habituellement, cela représente environ 90 p. 100 du budget total du Yukon. Je crois qu’au cours des dernières années, le pourcentage des revenus autonomes générés au Yukon a diminué, mais la très grande majorité du financement qui permet au gouvernement du Yukon de fonctionner provient certainement des paiements de transfert. Ils représentent peut-être 85 p. 100 ou 90 p. 100 du total. Je suis désolé, je n’ai pas ces données en main, mais nous nous efforçons surtout d’augmenter les revenus autonomes, car en tant que Canadiens, nous croyons que nous devons au Canada d’augmenter et de diversifier notre économie, afin de pouvoir participer davantage à l’économie du pays.
Le sénateur MacDonald : Vous ne connaissez pas le montant exact?
M. Pillai : Non, je n’ai pas le montant exact.
Le sénateur MacDonald : Personne ne semble connaître ce montant.
La présidente : Vous avez également posé cette question à la ministre. Vous pouvez peut-être maintenant la poser par écrit.
Le sénateur MacDonald : Connaissez-vous le montant des revenus que vous générez vous-même à partir des revenus tirés des redevances de l’exploitation minière? Ces revenus augmentent-ils ou diminuent-ils?
M. Pillai : Ces dernières années, les revenus tirés des redevances n’étaient pas très élevés. En ce moment, nous avons une mine en production. Elle est située sur un terrain de catégorie 8, c’est-à-dire une parcelle de terre précise qui appartient à l’une de nos Premières Nations autonomes et qui est supervisée par cette Première Nation. La majorité des redevances sont donc détenues par cette Première Nation. En ce moment, les redevances que nous recevons proviennent de l’industrie de l’exploitation placérienne. Toutefois, nous avons certainement observé une baisse, et je crois qu’elle est probablement liée aux cycles des produits de base.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Merci, monsieur le ministre. Vous avez parlé des efforts que vous faites pour attirer les investisseurs au Yukon. Voici ma question pour vous. On a parlé des changements apportés à la loi, dont l’industrie à l’époque, en 2015, croyait que c’était essentiel de les apporter, et donc cela a été fait — on nous dit aujourd’hui que c’est autre chose. Ma préoccupation porte sur le fait de pouvoir présenter un portrait qui comporte une certaine certitude pour les investisseurs. Est-ce que ces investissements actuellement réalisés au Yukon remontent à plus loin que 2003? Ce qui me frappe dans la loi de 2003 sur l’environnement au Yukon, c’est qu’il y a un environnement juridique, qui est différent de ce qui se passe dans les provinces au Canada, mais qui est clair, et dans lequel on dit que les accords intervenus avec les Premières Nations doivent prévaloir en cas de conflit avec la loi. Je vous donne les articles : « Consultation, »article 3;« Final agreement prevails over the Act, », article 4.
Je me demandais dans quelle mesure vous diriez que c’est en effet un élément de certitude qui vous permet d’attirer des investisseurs, ou le contraire.
[Traduction]
M. Pillai : Qu’il s’agisse de notre gouvernement actuel ou des gouvernements territoriaux précédents du Yukon — si j’ai bien compris la question —, je pense toujours que dans le cas de nos Premières Nations autonomes, nos traités modernes sont très progressifs, et nous croyons que ces accords font de nous des chefs de file au pays.
Tous les gouvernements sont d’avis qu’il s’agit d’un énorme avantage et que les fondements de ces traités permettent de fournir une certaine certitude. Donc, si je comprends bien la question, ma réponse serait oui, mais veuillez me corriger si j’ai mal interprété votre question.
La sénatrice Cordy : J’aimerais vous poser une brève question, monsieur le ministre. Je vous remercie également d’être ici à une heure très matinale pour vous.
Les changements contenus dans ce projet de loi créeront-ils un climat d’investissement plus stable au Yukon pour les entreprises?
M. Pillai : Merci, madame la sénatrice. Je suis heureux de vous revoir. Oui, je ne peux pas répéter assez qu’à notre avis, les relations avec les Premières Nations sont extrêmement importantes. Lorsque nous nous rendons sur les sites miniers et lorsque nous nous réunirons à Vancouver en janvier pour discuter de la situation dans le secteur minier, nous serons assis avec nos partenaires des Premières Nations.
Ce processus permettra d’établir une certitude globale, et je crois que notre relation avec les gouvernements de nos Premières Nations est de la plus haute importance lorsqu’il s’agit de la certitude. Nous améliorerons le projet de loi, nous terminerons l’instrument de réglementation, et nous poursuivrons notre travail sur tous ces éléments.
Nous venons tout juste de terminer un accord en partenariat avec nos gouvernements des Premières Nations; il concerne des nouvelles routes d’accès d’une valeur d’un demi-milliard de dollars. Si nous souhaitons que notre gouvernement puisse établir des partenariats et bâtir ces routes d’accès pour libérer le potentiel minier du Yukon et générer des revenus autonomes, nous devons établir de bonnes relations. Ce projet de loi représente seulement l’une des étapes nécessaires pour bâtir un fondement qui mènera à une industrie durable.
La présidente : Merci beaucoup.
Bienvenue à la deuxième partie de cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivons notre étude sur le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et modifiant une autre loi en conséquence.
Je m’appelle Rosa Galvez, et je suis présidente du comité. Je demanderais à mes collègues sénateurs de se présenter lorsqu’ils poseront leurs questions.
Nous entendrons d’abord des témoins de l’industrie par vidéoconférence de Whitehorse et de Vancouver. De Whitehorse, nous entendrons Samson Hartland, directeur général de la Chambre des mines du Yukon. Nous entendrons également Jonas Smith, directeur général de Klondike Placer Miners’ Association, qui est accompagné de Mike McDougall, le président de l’association. Nous accueillons également, par vidéoconférence, Brad Thrall, président d’Alexco Resource Corp. Ici à Ottawa, nous accueillons Brendan Marshall, vice-président, Affaires économiques et du Nord, Association minière du Canada.
Nous entendrons d’abord nos témoins de Whitehorse.
Mike McDougall, président, Klondike Placer Miners’ Association : Je suis Mike McDougall, président de la Klondike Placer Miners’ Association, et je suis accompagné de notre directeur général, Jonas Smith.
Je suis heureux de comparaître devant vous aujourd’hui pour vous parler du projet de loi C-17. La Klondike Placer Miners’ Association représente environ 160 mines de placer familiales exploitées partout au Yukon; il s’agit d’une industrie sur laquelle le Yukon moderne a été fondé.
Cette année, notre industrie modeste, mais essentielle, est en voie de produire presque 90 millions de dollars en or. Cela a des effets importants sur notre petite administration, qui est autrement dominée par le secteur public.
La majeure partie de l’activité économique découlant de nos activités profite aux petites collectivités rurales dont le secteur privé offre peu de possibilités. Je tiens à préciser dès le départ que nous appuyons pleinement la participation des Premières Nations à la gestion des ressources du Yukon et que nous nous attendons à ce que nos gouvernements populaires remplissent leurs obligations en matière de consultation qui sont établies dans les accords d’autonomie gouvernementale inscrits dans la Constitution.
Nous respectons aussi pleinement les discussions importantes qui se tiennent entre les gouvernements qui tentent d’atteindre un consensus avant de s’engager auprès d’autres parties intéressées, mais à notre avis, il est maintenant temps de discuter avec les intervenants de notre industrie.
L’industrie de l’exploitation des placers est le client le plus important du niveau du bureau désigné de l’Office d’évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon, et à ce titre, le projet de loi et son prédécesseur, le projet de loi S-6, nous intéressent énormément, et nous nous attendons à participer pleinement à toutes les étapes de son évolution.
Au fil des ans, les représentants de la Klondike Placer Miners’ Association ont comparu devant plusieurs comités des deux Chambres du Parlement, tout comme l’a fait M. Smith dans le cadre de ses fonctions au sein du Yukon Producers Group. Dans chaque cas, nous avons appuyé les modifications que le projet de loi C-17 propose d’éliminer et, surtout, les dispositions sur les délais fixés par la loi et sur les exemptions aux nouvelles évaluations.
Les partisans de ce projet de loi ont laissé entendre que son adoption permettra de rétablir la certitude. Toutefois, et je parle avec respect, nous pensons que ce sera le contraire. Même si nous apprécions l’engagement politique pris par tous les partis de réexaminer la question des délais et celle de la nouvelle évaluation, il n’en demeure pas moins qu’il n’y a actuellement aucun échéancier pour terminer ces discussions.
Si le projet de loi C-17 est adopté dans sa forme actuelle, il y aura absolument une période d’incertitude et à notre avis, le climat d’investissement et les possibilités offertes aux citoyens du Yukon en subiront les conséquences.
Nous savons que ces dispositions ont fait l’objet de critiques. Par exemple, on a demandé pourquoi il fallait prévoir des délais dans les mesures législatives, car les politiques internes de l’OEESY les respectent ou les suivent déjà. Je répondrais avec ma propre question, c’est-à-dire que si l’office respecte les délais ou reste en dessous, quel problème leur enchâssement dans le projet de loi pose-t-il?
Nous avons entendu certaines personnes dire qu’elles sont préoccupées, car elles ont l’impression que les Premières Nations n’ont pas la capacité de participer adéquatement tout en respectant ces délais. Mais encore une fois, si l’office atteint ou reste déjà en dessous de ces délais, pourquoi parlons-nous des délais et n’abordons-nous pas la question de la capacité de participation des Premières Nations? En fait, la capacité de financement des Premières Nations est l’une des questions en suspens dans le cadre de l’examen quinquennal de la loi. Nous prions donc le gouvernement fédéral de s’attaquer à ce déficit.
De plus, même si les employés de l’OEESY s’efforcent de respecter leurs délais internes, ils n’y parviennent pas toujours. De plus, l’évaluation représente seulement une étape dans le processus d’approbation des projets, qui contient de nombreuses autres possibilités de causer des retards.
Ainsi, l’imposition d’échéanciers stricts et courts ne fera qu’améliorer les choses pour tous les participants au processus.
En ce qui concerne l’article 49.1, l’exemption à une nouvelle évaluation, nous avons entendu des critiques selon lesquelles certaines des décisions prises pourraient affecter les territoires traditionnels des Premières Nations si elles ne sont pas consultées. Pourtant, comme il a été mentionné dans l’audience tenue par vos honorables membres plus tôt cette semaine, en avril 2016, on a signé un protocole d’entente qui inclut officiellement les Premières Nations au processus de prise de décisions relatives aux exemptions à la nouvelle évaluation.
Plus de 100 partisans de projets du secteur minier et du secteur municipal ont entrepris ce processus de collaboration, et environ les deux tiers ont été exemptés de subir une nouvelle évaluation non nécessaire par l’entremise de l’article 49.1. Lorsque des ressources publiques, y compris des ressources des Premières Nations, ne sont pas utilisées pour mener de nouvelles évaluations inutiles, cela libère la capacité nécessaire de s’attaquer à des enjeux plus importants. Cela renforce le point que je faisais valoir, c’est-à-dire la capacité des Premières Nations de répondre efficacement à des demandes de projets dans le cadre des délais mis en œuvre par la loi et les politiques de l’office. Les opposants au projet de loi S-6 font valoir que ses modifications auront des conséquences nuisibles pour l’environnement, mais comme je l’ai souligné, des douzaines de projets ont été exemptés d’une nouvelle évaluation avec la participation complète des Premières Nations, en raison du protocole d’entente qui a été signé en avril 2016.
Dans la grande majorité des cas, l’OEESY respecte ou reste en dessous des délais prescrits dans le projet de loi S-6. L’environnement a-t-il été compromis à cause de cela? Bien sûr que non.
Madame la présidente, nous ne sommes pas à l’abri de la réalité de la situation. Nous reconnaissons que le gouvernement fédéral, le gouvernement territorial et le gouvernement des Premières Nations se sont engagés à adopter ce projet de loi aussi rapidement que possible, mais nous vous demandons de tenir compte de notre point de vue. L’élimination des dispositions sur les délais et sur la nouvelle évaluation sans prévoir un texte de remplacement représentera un pas en arrière dans le cadre de la politique publique.
Nous reconnaissons que ce projet de loi fera progresser la réconciliation, et nous acceptons le fait qu’il sera adopté au bout du compte, mais nous vous recommandons vivement de vous pencher sur sa mise en œuvre. En effet, toutes les parties se sont engagées à élaborer un texte de remplacement le plus rapidement possible, mais aucune date limite n’a été fixée pour la fin de ces discussions. Afin de favoriser la certitude au sein de l’industrie minière, nous vous recommandons vivement d’envisager de retarder la mise en œuvre du projet de loi jusqu’à ce qu’un texte de remplacement élaboré mutuellement soit terminé et qu’il fasse l’objet d’un consensus.
D’après ce que nous comprenons, ce dialogue sera engagé au début de la nouvelle année. Nous demandons la mise en place d’un mécanisme qui rend toutes les parties responsables d’arriver à une conclusion. À titre de client le plus important de l’OEESY, la Klondike Placer Miners’ Association s’attend à participer à ces discussions dès que possible. Nous avons très hâte.
Je vous remercie de m’avoir donné la chance de livrer cet exposé.
La présidente : Je sais que nous avons des problèmes d’interprétation. Je suis désolée. C’est en raison de la piètre qualité de l’audio.
Un autre intervenant du groupe de Whitehorse a-t-il un exposé à livrer? Allez-y.
Samson Hartland, directeur général, Chambre des mines du Yukon : Mesdames et messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous revoir. Je suis le directeur général de la Chambre des mines du Yukon. Notre organisme a comparu plusieurs fois devant votre comité au sujet des diverses versions de ce projet de loi et de ses prédécesseurs.
La Chambre des mines du Yukon est la chambre la plus ancienne du Yukon, car elle a été créée en 1943. Nous représentons plus de 400 membres dans divers secteurs de l’exploitation minière au Yukon — des entreprises de services et d’approvisionnement aux prospecteurs et explorateurs, et cetera.
Il y a cinq ans, lorsque je suis entré en fonction, nous avons créé un plan stratégique quinquennal qui cernait les piliers de l’exploitation minière au Yukon. Avec la participation de divers échelons de gouvernement et de divers secteurs de l’économie du Yukon, ces piliers ont été classés par ordre d’importance. La participation des Premières Nations et les relations avec ces dernières se sont retrouvées en tête du classement, et avec raison.
Lorsque nous avons participé au projet de loi S-6, le prédécesseur du projet de loi C-17…
La présidente : Je suis désolée, mais nous devons nous assurer que l’interprétation fonctionne. À moins que les sénateurs francophones acceptent que la réunion se poursuive en anglais seulement.
Le sénateur Massicotte : Qu’arrivera-t-il aux francophones qui suivent la réunion?
La présidente : Exactement. C’est ma question.
Maxime Fortin, greffière du comité : Nous avons des téléspectateurs, car la réunion est télévisée.
La sénatrice Fraser : Madame la présidente, il est très important que le Parlement du Canada mène ses activités dans les deux langues officielles. Il est également important que nous entendions les témoins. Je ne crois pas que nous ayons reçu une déclaration écrite de M. Hartland, mais nous avons reçu des déclarations écrites de tous les autres témoins. Si c’est nécessaire, les membres du comité peuvent utiliser ces documents, car je suis sûre qu’ils contiennent les arguments les plus importants des témoins. Par contre, je ne suis pas sûre que nous puissions continuer d’entendre les témoins sans un service d’interprétation adéquat.
La présidente : Oui.
Le sénateur Massicotte : Je peux prendre deux minutes pour vous résumer ce qu’ils vont dire.
La présidente : Nous allons entendre le témoin de Vancouver. La communication audio fonctionnera peut-être mieux. Nous travaillerons sur la communication avec Whitehorse pendant ce temps. Êtes-vous d’accord?
M. Hartland : Madame la présidente, nous entendez-vous?
La présidente : Oui, nous vous entendons. Nous avons un problème avec l’interprétation.
Je vais donner la parole au témoin de Vancouver.
Brad Thrall, président, Alexco Resource Corp. : Bonjour, madame la présidente et membres du comité. Je vous remercie de me donner la chance de comparaître aujourd’hui et de vous communiquer le point de vue de l’industrie au sujet de cet important projet de loi.
Je suis président d’Alexco Resource Corp. Je suis aussi président du Yukon Producers Group, qui représente huit grandes entreprises minières et entreprises de services et d’approvisionnement qui mènent leurs activités dans notre territoire. Alexco est une société minière canadienne qui possède et exploite le district argentifère de Keno Hill, situé au nord de Whitehorse, sur le territoire traditionnel de la Première Nation Na-Cho Nyak Dun. J’aimerais utiliser le temps précieux qui m’est imparti aujourd’hui pour parler de l’importance de l’article 49.1 de la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, c’est-à-dire la disposition sur la nouvelle évaluation, et de son abrogation possible si un texte de remplacement n’est pas élaboré.
On a beaucoup parlé du cadre de collaboration et du processus qui a été annoncé il y 10 mois et qui devait être mis en œuvre et utilisé pour aborder l’abrogation de ces dispositions importantes du projet de loi C-17. Alexco appuie la mise en œuvre d’un cadre de collaboration entre les Premières Nations, le Yukon, le Canada et l’industrie pour élaborer un texte de remplacement, mais nos intervenants, de concert avec de nombreux autres intervenants de l’industrie, sont préoccupés, car jusqu’ici, ce processus a très peu progressé, et il semble qu’il n’y ait aucun échéancier lié à sa mise en œuvre.
L’abrogation de ces dispositions avant la mise en œuvre de ce cadre entretiendra l’incertitude économique, nuira à la compétitivité du Yukon et réduira les possibilités économiques et sociales de tous les habitants du Yukon.
Le district argentifère de Keno Hill d’Alexco comptait plus de 30 mines d’argent souterraines de 1913 à 1989, et c’était le deuxième district de production d’argent en importance au Canada. En 2006, lorsque nous avons acheté ce district, il était en faillite et fragilisé sur le plan environnemental, et il représentait une lourde responsabilité environnementale pour le Canada.
Nous nous distinguons des autres sociétés d’exploitation des ressources en ce sens que nous avons également fondé une entreprise indépendante d’assainissement de l’environnement, c’est-à-dire Alexco Environmental Group, ou AEG, qui se spécialise dans le nettoyage de friches industrielles ainsi que dans tous les aspects de la gestion environnementale et de l’obtention de permis environnementaux. Notre travail de nettoyage des responsabilités historiques du district a été effectué dans le cadre d’une relation contractuelle avec le Canada et, jusqu’à maintenant, Alexco a investi plus de 22 millions de dollars et partage les coûts permanents avec le gouvernement fédéral. Tous les fonds que nous avons investis atténuent la responsabilité des contribuables canadiens.
De plus, nous avons récemment produit de l’argent, du plomb et du zinc tirés du district, et nous planifions activement de reprendre notre production en 2018, en attendant les résultats d’évaluations supplémentaires effectuées en vertu de la LEESY.
Dès que nous aurons repris notre production, nous emploierons plus de 200 travailleurs, ce qui constitue un effectif important dans notre petit district. Notre masse salariale dépassera, à elle seule, 35 millions de dollars. Nous offrirons de nombreux contrats et débouchés aux Premières Nations et aux fournisseurs de services locaux, et nous aurons une occasion accrue d’appuyer et d’illustrer les valeurs sociales, culturelles et environnementales de la collectivité et de ses citoyens.
Madame la présidente, nous n’ignorons rien de la LEESY. Nous avons franchi les étapes du processus de la LEESY 11 fois au cours des 10 dernières années et, au moment où nous nous parlons, nous les franchissons pour la 12e et 13e fois. Je crois que l’expérience que nous avons acquise au cours du processus d’évaluation des activités de développement, notre relation avec le Canada, le nettoyage environnemental des responsabilités historiques ainsi que notre expérience de l’exploitation minière au Yukon font de nous des intervenants exceptionnellement bien placés pour participer à cette importante discussion.
La loi actuelle permet aux promoteurs de certains projets de présenter à l’organisme décisionnel — habituellement le gouvernement du Yukon ou des Premières Nations — des demandes en vertu de l’article 49.1 afin que des projets évalués antérieurement puissent aller de l’avant sans qu’il soit nécessaire de les réévaluer. On évite ainsi le dédoublement des efforts.
En vertu de la loi actuelle, lorsque nous apportons de légères modifications à nos plans opérationnels, ce qui fait partie de la réalité du secteur minier, nous ne sommes habituellement pas tenus de faire réévaluer le projet en entier. Toutefois, si le projet de loi C-17 est adopté sans reformulation, les plans devront être réévalués même s’ils n’entraînent aucune incidence environnementale ou socioéconomique majeure et aucune modification du volet de production.
Les petits changements apportés aux activités d’exploitation pourraient être traités comme de simples modifications de permis, ce qui aiderait par la suite à assurer la pérennité des emplois et des activités commerciales.
Je vous prie de comprendre que nous appuyons fermement le fait de mener une évaluation environnementale rigoureuse lorsque de nouveaux projets sont envisagés ou lorsque des changements fondamentaux sont apportés à des projets en cours. Cependant, de légers changements apportés à un plan de mine ou à des installations environnementales ne devraient pas nécessiter la reprise à zéro de l’évaluation. Si nous retournons à l’ancienne mesure législative, l’incertitude régnera, et les investissements ainsi que les emplois, les possibilités et les avantages offerts aux résidants et aux collectivités seront compromis.
Madame la présidente, depuis que la LEESY a été modifiée, les promoteurs près de 100 projets ont été autorisés à modifier leurs permis ou leurs licences sans que leurs projets fassent l’objet d’une réévaluation complète. Ces projets ne se limitent pas au secteur minier. Ils comprennent également des projets pour les municipalités et les gouvernements des Premières Nations.
À notre avis, la disposition relative aux réévaluations a eu exactement l’effet voulu. Elle a accru l’efficacité à tous les paliers de gouvernement, elle a réduit substantiellement ou éliminer les évaluations en double, et elle a réduit les frais pour les contribuables, tout en permettant au Yukon d’être concurrentiel par rapport aux autres territoires ou provinces.
Nous croyons que la voie appropriée à suivre pour toutes les parties concernées — le Yukon, le Canada, les Premières Nations, les municipalités et l’industrie — consiste à procéder immédiatement à la mise au point d’un cadre de collaboration et de rédiger ensemble une formulation de remplacement pour préserver les dispositions relatives à la réévaluation et aux délais.
En adoptant le projet de loi C-17 sans remplacer le libellé ou prévoir un processus clair, concis et rapide pour établir ce cadre, nous rétablirons la courbe de croissance que le Yukon a connue depuis le transfert des responsabilités en 2003.
Je vous remercie d’avoir pris le temps de m’écouter.
La présidente : Je vous remercie beaucoup, monsieur Thrall.
Nous allons poursuivre la séance avec M. Marshall.
Brendan Marshall, vice-président, Affaires économiques et du Nord, Association minière du Canada : Merci, madame la présidente. Je suis prêt. J’étais prêt dès ma naissance. Je plaisante évidemment. Vous en êtes à la septième manche des délibérations très sérieuses qui se déroulent ce matin.
Avant de commencer ma déclaration, je tiens simplement à dire qu’il y a 11 ans, j’ai eu le privilège de commencer ma carrière à titre de membre du personnel du Sénat. Par conséquent, j’ai beaucoup de respect pour le travail que vous et les comités sénatoriaux accomplissez, et j’ai, je suppose, une compréhension différente de votre institution qui, à bien des égards, est incomprise par un grand nombre de Canadiens. Je vous remercie donc de l’occasion qui m’est donnée de participer à votre séance de ce matin.
Je tiens à préciser, pour le compte rendu, que je m’appelle Brendan Marshall. Je suis vice-président des Affaires économiques et du Nord à l’Association minière du Canada.
L’exploitation minière est le plus important moteur économique du secteur privé dans le Nord du Canada. Ce secteur emploie environ 8 500 travailleurs et offre près d’un emploi sur six là-bas. En 2016, ses contributions directes au PIB du Yukon, des Territoires-du-Nord-Ouest et du Nunavut s’élevaient à environ 13 p. 100, 18 p. 100 et 21 p. 100 respectivement. Toutefois, sa valeur potentielle est encore plus élevée.
Nos recherches indiquent que plus de 15 mines pourraient commencer ou reprendre leurs activités de production dans les territoires au cours des 10 prochaines années, que les investissements pendant la durée de vie totale des mines pourraient dépasser 35 milliards de dollars, et que les entreprises pourraient offrir des emplois encore mieux rémunérés dans la région.
Les perspectives du Yukon s’améliorent. D’importantes sociétés minières, comme Goldcorp, Barrick, Newmont et Agnico Eagle, investissent dans l’exploration minière du territoire et dans l’élaboration de projets, dont la concrétisation pourrait entraîner un incroyable essor économique dans la région.
Cela n’a rien d’étonnant. Le Yukon est une région attirante sur le plan géologique, ayant de solides antécédents dans le domaine minier qui s’ajoutent aux investissements récents et constructifs des gouvernements dans les infrastructures. Ces gouvernements travaillent ensemble pour apporter à la région le développement économique dont elle a besoin. Les perspectives offertes aux collectivités autochtones du Yukon, au gouvernement du Yukon et au gouvernement du Canada sont substantielles et pourraient permettre au Yukon de devenir l’un des principaux territoires miniers du Canada et du monde entier.
L’AMC comprend que, pour que cela se produise, il est essentiel que les sociétés entretiennent des relations positives avec les collectivités autochtones du Yukon. L’industrie minière canadienne reconnaît depuis longtemps l’importance de faire participer d’une façon significative les Autochtones canadiens à ses activités. Les sociétés minières appuient la réconciliation économique autochtone depuis 1974, longtemps avant qu’elle devienne à la mode. Elles ont signé près de 500 ententes individuelles avec des collectivités et des partenaires autochtones, dont quelque 400 demeurent actives aujourd’hui, et ces ententes ont eu un effet transformateur dans bon nombre de collectivités. Ces ententes ont engendré des emplois, des occasions de formation professionnelle et, dans certains cas, des redevances ou des actions à intérêt direct. Pendant ce temps, ces entreprises versent également des impôts et des redevances aux gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
Voici quelques exemples de ces accords : la société Victoria Gold a signé une entente globale de coopération et d’avantages avec la Première Nation des Nacho Nyak Dun dans le cadre du projet Eagle Gold; la société Western Copper and Gold a conclu une entente avec la Première Nation de Selkirk; et la société Goldcorp a négocié des ententes avec la Première Nation des Tr’ondëk Hwëch’in et la Première Nation de White River dans le cadre du projet Coffee. Toutes ces ententes apportent des avantages économiques aux collectivités.
Mettons maintenant l’accent sur le projet de loi C-17. L’AMC respecte le processus tripartite auquel participent le gouvernement fédéral, le gouvernement territorial et les gouvernements des Premières Nations du Yukon. C’est un processus auquel notre industrie ne prend pas part, mais nous sommes une partie prenante de ses résultats. Nous saluons, en effet, les efforts déployés par les gouvernements territorial et fédéral en vue de regagner la confiance perdue de leurs partenaires des Premières Nations, parce que, lorsque la confiance est brisée, les intervenants gouvernés souffrent, et notre secteur fait partie des intervenants gouvernés.
Bien que l’AMC comprenne et respecte les réalités sur le terrain qui ont abouti à l’élaboration du projet de loi C-17, en tant que représentants d’une association nationale, nous avons l’obligation de vous informer des conséquences plus générales et de l’incidence sur notre industrie qu’ont de telles décisions.
L’abrogation de l’article 49.1 portant sur l’examen ou la réévaluation de modifications insignifiantes, comme on l’appelle communément, pourrait avoir des répercussions négatives sur l’industrie minière du Yukon et sur l’économie plus générale du territoire. Bien que des représentants territoriaux nous aient informés qu’ils pourraient trouver des solutions gérables même si l’article 49.1 était abrogé, notre milieu nous rappelle constamment l’expérience que nos membres ont vécue en vertu de l’ancien régime, qui était souvent problématique et extrêmement coûteux pour toutes les parties concernées, y compris les collectivités locales, et qui, en fin de compte, n’a pas protégé davantage l’environnement.
Permettez-moi de vous donner un exemple réel de ce qui est survenu en vertu de l’ancien régime, un régime auquel nous risquons d’être assujettis de nouveau. L’AMC connaît une mine détentrice d’un permis délivré en vertu de la LEESY dont les secteurs suivants, qui avaient déjà été évalués, ont dû faire l’objet d’une réévaluation lorsque la société a cherché à élargir ses activités en vertu de l’ancien processus de la LEESY. Au nombre des éléments qui ont dû être réévalués, on retrouve les répercussions socioéconomiques, l’hydrogéologie, les caractéristiques géochimiques des résidus miniers et des stériles actuels, la gestion actuelle des eaux utilisées pour l’exploitation et une voie d’accès complète qui était en place depuis plus de 20 ans.
Les conséquences de cette réévaluation étaient importantes. Les activités minières à ciel ouvert ont été interrompues pendant plus de six mois, ce qui a entraîné des mises à pied. La réputation de l’entreprise en question a souffert auprès des collectivités locales, et des dommages économiques considérables ont été enregistrés en raison du temps perdu et des coûts de démarrage. Ces dommages ont été accentués par des pertes de marché provoquées par une baisse persistante des prix du cuivre pendant la période où la mine était inactive. Toutefois, ce qui importe encore plus, ce sont les atteintes à la réputation du Yukon et du Canada, en tant que destinations pour les investissements dans le secteur minier, que cela a entraînées. L’industrie se souvient parfaitement de ces répercussions, ce qui explique notre préoccupation concernant la mesure législative proposée et la perspective du retour de ce régime.
Il est clair que l’AMC ne laisse pas entendre que les projets ou tout autre élément devraient être en mesure de contourner le processus de délivrance des permis. Permettez-moi d’être très clair à ce sujet. Cependant, nous recommandons fortement de ne pas réévaluer les éléments de n’importe quel projet qui ont déjà été évalués et autorisés, et qui ne seront pas touchés par l’élargissement proposé de la portée du projet en question. Il devrait en aller de même à l’étape du développement ou de l’élargissement du projet. Aucun autre territoire ou province du Canada ne fait cela. Alors, pourquoi le Yukon devrait-il le faire?
En fonction de cela, nous recommandons que le gouvernement prenne la mesure suivante : s’assurer que l’abrogation de l’article 49.1 portant sur l’examen ou la réévaluation de modifications insignifiantes ait lieu seulement 18 mois après la date d’entrée en vigueur de la mesure législative. Le délai proposé permettrait d’organiser une consultation en bonne et due forme afin que la valeur et l’importance de la forme actuelle de la mesure puissent être évaluées adéquatement par tous les intervenants touchés.
Ou, s’il n’est pas possible de retarder la mise en œuvre de cette disposition, il faudrait mener un processus de consultation aussitôt que possible afin que la valeur et l’importance de la forme actuelle de la mesure puissent être évaluées adéquatement par tous les intervenants et qu’une politique ou une autre solution qui respecte l’esprit de la pratique actuelle puisse être mise en place.
Je vous remercie d’avoir pris le temps de m’écouter. C’est avec plaisir que je répondrai à toutes vos questions.
La présidente : Merci beaucoup. Nous allons maintenant poser des questions à nos quatre témoins. Je vais accorder au porte-parole du projet de loi, sénateur Patterson, le privilège de s’exprimer.
Le sénateur Patterson : Merci, madame la présidente. Je pense que le problème auquel nous faisons face, c’est qu’en dépit du fait qu’on nous recommande de retarder la mise en œuvre ou l’entrée en vigueur du projet de loi, cela ne peut être accompli qu’en modifiant le projet de loi, d’après ce que m’indique notre conseiller juridique. En l’absence d’une disposition d’entrée en vigueur, le projet de loi entrera en vigueur lorsqu’il aura reçu la sanction royale.
Par conséquent, je mentionne aux représentants de l’industrie qui ont témoigné aujourd’hui qu’en suivant leurs conseils relatifs au report de l’entrée en vigueur du projet de loi, nous irions à l’encontre de l’avis des ministres territorial et fédéral qui nous demandent d’adopter le projet de loi sans le modifier, avant que des discussions aient lieu.
Alors, je crois que nous serons forcés de suivre le conseil de l’Association minière du Canada, selon lequel nous devrions organiser un processus de consultation aussitôt que possible et aller rapidement de l’avant.
Il me semble — et j’aimerais interroger M. Thrall à ce sujet — que le ministre Pillai nous a parlé de l’une des réalités qui entraînent des retards par rapport aux échéances et peut-être aussi des problèmes liés au processus de réévaluation. Il nous a avoué avec franchise que les Premières Nations ont du mal à s’occuper des projets. Elles disposent de peu de ressources. Il nous a indiqué que, parfois, l’effectif de leur service des terres s’élève à une ou deux personnes. Ses employés doivent évaluer un énorme projet de l’ordre d’un demi-milliard de dollars ou plus.
Monsieur Thrall, vous avez travaillé avec la Première Nation des Nacho Nyak Dun dans le cadre de votre fabuleux projet, et je vous félicite du travail que vous avez accompli, ainsi que des emplois et des redevances que vous avez engendrés et qui contribuent à l’économie du Yukon et du Canada. Pourriez-vous nous dire si les Premières Nations ont besoin d’être mieux appuyées pour développer la capacité de participer au processus et pour le rendre efficace et rapide? Avez-vous des observations à formuler à ce sujet?
M. Thrall : Merci, monsieur le sénateur. Oui, je crois que mon commentaire ferait écho au vôtre. Si l’on pense à notre relation avec la Première Nation des Nacho Nyak Dun — j’ai dit tout à l’heure que nous en étions à notre 13e évaluation —, il ne s’agit que d’une seule société dans leur territoire traditionnel; il y en a beaucoup d’autres.
Donc, lorsqu’on additionne toutes les activités qui se passent dans le territoire des Nacho Nyak Dun, cela entraîne d’importantes pressions sur leurs ressources et leur capacité. La Première Nation a des contraintes budgétaires, comme nous tous. Je crois qu’il s’agit d’un sujet important, qu’il faut aborder : si l’on demande continuellement aux Premières Nations de prendre part au processus, qui est très important, il faut veiller à ce qu’elles aient la capacité, le soutien et le financement dont elles ont besoin pour y participer.
Le sénateur Patterson : Je m’adresse maintenant aux représentants de la Placer Miners et de la Chambre des mines du Yukon; je vais être direct. Votre message était clair : vous nous exhortez à retarder l’entrée en vigueur du projet de loi. Nous avons besoin d’un mécanisme pour faire respecter les échéances. Il y aura bien sûr une période d’incertitude, comme vous l’avez dit, tandis qu’on remplacera la formulation existante.
Or, je me dois de vous dire ceci : pour retarder l’entrée en vigueur du projet de loi, il faut modifier la loi. Même en tant que porte-parole du projet de loi, je ne me sens pas assez brave pour tenir tête au gouvernement du Canada, au gouvernement du Yukon et au Conseil des Premières Nations du Yukon et leur dire que nous allons faire fi de leurs indications claires voulant qu’on adopte le projet de loi sans modification.
Comprenez-vous le dilemme du comité? Seriez-vous d’accord pour dire que, en adoptant le projet de loi sans modification, on pourrait recommander vivement — on dit « faire des observations » ici au Sénat lorsqu’on fait rapport sur un projet de loi — que toutes les parties accordent la priorité à la préparation d’un échéancier pour le remplacement de la formulation existante et peut-être d’informer le comité des progrès réalisés à cet égard et même aussi qu’on aborde la question de la capacité des Premières Nations qu’ont soulevée de façon claire le ministre et M. Thrall? Reconnaissez-vous qu’il s’agit de la seule option dont nous disposions à l’heure actuelle?
M. McDougall : Merci, monsieur le sénateur. Je suis d’accord avec vous. Vous m’excuserez de ma naïveté au sujet de l’élaboration des lois au Canada. Je crois toutefois que la solution que vous proposez est viable pour nous. Je crois que la clé, c’est de s’attaquer à la formulation le plus tôt possible, en consultation avec l’industrie, et je suis aussi d’avis que les Premières Nations doivent obtenir un financement approprié pour prendre part au processus. Samson, vouliez-vous ajouter quelque chose?
M. Hartland : Bien sûr. Merci. Nous travaillons en collaboration avec nos partenaires du gouvernement du Yukon, le bureau du ministre fédéral et le Conseil des Premières Nations du Yukon à la préparation d’un échéancier pour aller de l’avant. Nous savons que depuis que nous avons exprimé notre appui à l’égard de l’adoption du projet de loi C-17 il y a environ 10 mois, on a réalisé peu de progrès avec l’échéancier. Quoi qu’il en soit, nous comprenons que les négociations et les discussions entre les divers ordres de gouvernement prennent du temps et nous respectons cela, et nous savons qu’à un moment donné, l’industrie sera consultée.
Le ministre fédéral s’est engagé à collaborer avec les Premières Nations du Yukon, le gouvernement du Yukon et les intervenants lorsque les modifications auront été apportées afin d’étudier ces questions pour trouver des solutions administratives à court terme ou des solutions législatives à long terme. Le grand chef Peter Johnston a pris ce même engagement en réponse à nos préoccupations relatives aux réévaluations et aux échéanciers et s’est dit convaincu que nous pouvions régler ces questions par l’entremise de discussions constructives.
Nous avons continué de tenir des discussions constructives de manière informelle au cours des 10 derniers mois, mais nous avons hâte qu’on établisse un échéancier ferme que nous pourrons expliquer clairement à nos membres et à l’industrie en général, afin de confirmer qu’on abordera ces questions et qu’on s’engage à travailler avec eux au cours d’une certaine période.
La présidente : Je vais répéter ce que vous venez de dire aux fins de l’interprétation. Ce que je vous ai entendu dire, c’est qu’il était très constructif pour tous les intervenants de pouvoir s’asseoir à la table. Vous vous êtes aussi dits d’accord avec l’observation faite par mon collègue, le sénateur Patterson?
M. Hartland : C’est exact.
La présidente : Merci.
J’ai une question : vous savez que vos lois changent beaucoup, et vous avez tous parlé à de nombreuses reprises du manque de compétences techniques et de la recherche relative aux ressources techniques. Dans l’exemple qui a été donné, on parle du besoin de revoir l’hydrogéologie, les caractéristiques géochimiques des dépôts de drainage et des résidus miniers, la gestion actuelle de l’eau et la route d’accès qui est en place depuis 20 ans.
Pourriez-vous nous confirmer qu’on ne s’arrêtera pas au projet de loi? Ce sont des changements majeurs et il faudra réévaluer, redimensionner et réviser certaines choses en raison de ces changements, surtout en ce qui a trait au pergélisol et aux routes.
Se peut-il que parfois, les retards soient nécessaires ou qu’on ne puisse tout simplement pas contourner ces nouvelles réalités?
M. Hartland : Pardon, madame la présidente, mais est-ce que votre question s’adresse à quelqu’un en particulier?
La présidente : Oui, parce que vous êtes des ingénieurs de l’industrie minière. M. Thrall à Vancouver pourrait peut-être y répondre.
M. Thrall : Oui, merci, madame la présidente.
L’exemple donné par Brendan visait une autre entreprise, mais je peux vous parler de notre expérience. Ce que nous disons, c’est que dans les faits, lorsqu’on développe une mine, qu’il s’agisse d’une mine souterraine, d’une mine à filons étroits ou d’une grande mine d’or ou de cuivre à ciel ouvert, il y aura des changements. Le prix des produits et les coûts opérationnels changent; c’est tout simplement la nature de l’industrie.
Selon notre expérience, au fil de l’évolution de nos plans de mines, nous devons apporter quelques changements mineurs, mais en vertu de la loi précédente et des dispositions relatives à la réévaluation, certaines installations déjà en place ont dû subir des réévaluations à plusieurs reprises.
Je pense par exemple à une installation d’empilage des résidus secs et à une usine qui n’avaient subi que très peu de changements — si ce n’est aucun —, mais qui ont tout de même fait l’objet d’une réévaluation.
Ce sont là des exemples de nos préoccupations relatives à la perte des dispositions sur la réévaluation.
Je conviens qu’il est fort probable que d’autres changements importants soient apportés au fil de l’évolution de la mine et qu’il faudra procéder à de nouvelles études ou évaluations. Toutefois, selon notre expérience, la grande majorité des agrandissements sont similaires à ce que nous avons déjà fait et bon nombre de ces installations n’auraient pas à subir une nouvelle évaluation.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Merci. Je voudrais poursuivre sur ce que le président d’Alexco Resource Corp. vient de dire à propos des changements et de la nature des changements. Si je vous comprends bien, il y a des changements inévitables, et je pense qu’on le comprend très bien, dans l’évolution d’un projet minier. Il y a des changements qui peuvent être mineurs, majeurs, d’autres qui sont liés à la nature même de vos travaux, donc de la mise en oeuvre du projet à mesure qu’il évolue. Il y en a qui peuvent dépendre de facteurs externes, telle l’évolution du climat. Ce que j’essaie de comprendre, c’est s’il y a une espèce de consensus dans l’industrie minière sur ce qui est considéré comme un changement mineur et ce qui est considéré comme un changement majeur. Cela peut être un autre terme qui l’exprime, mais vous comprenez l’idée, il s’agit de la différence entre un changement prévisible, qui pourrait même être annoncé au départ d’un projet, quand il est évalué et accepté, et un changement plus important, significatif. Est-ce qu’il y a un consensus dans l’industrie sur ces concepts?
[Traduction]
M. Thrall : Merci. Je peux répondre à cette question.
Je dirais qu’il y a un manque de consensus non seulement au sein de l’industrie, mais aussi parmi les directions de l’évaluation et les organismes de réglementation au sujet de la définition de certains termes comme « important ».
C’est une question qu’il faudrait aborder dans la loi de sorte que tous utilisent la même définition d’un changement important. Ce terme peut être subjectif et de nombreuses personnes ont un point de vue différent à son sujet.
M. Marshall : Cela démontre la complexité de l’industrie minière. Je crois qu’il est impossible d’avoir une définition claire de ce qui est important par opposition à ce qui n’est pas important, parce que dans les faits, la réalité climatique de chaque projet varie. Il y a une myriade de complexités qui influent sur la capacité d’une société à exploiter la mine de façon responsable.
Dans le cadre du processus réglementaire, lorsqu’un projet arrive à l’étape des permis, il est associé à une portée. Cette portée peut être utilisée à titre de mesure du projet pour évaluer l’importance réelle du changement.
Il est inapproprié de penser qu’on puisse établir une mesure claire et nette pour évaluer l’importance d’un changement proposé. Je dirais simplement que le degré de complexité des projets appelle à une évaluation au cas par cas.
[Français]
La sénatrice Dupuis : J’aurais une question supplémentaire à la suite de votre réponse, monsieur Marshall. En fait, ma question ne visait pas à savoir si l’on veut figer dans une législation ce qui constitue une modification importante et ce qui constitue une modification mineure. J’essaie de comprendre sur le terrain dans la réalité des choses... Y compris au Sénat, on pourrait vous dire que chaque sénateur est différent. Disons qu’il y a ici un ensemble qu’on appelle le Sénat, et qu’on doit composer avec une certaine réalité, une certaine compréhension, certains facteurs, certains éléments. J’essayais de comprendre ce qui se passe dans votre industrie. Dans toute industrie, tout corps de métier, toute profession, il y a des niveaux d’importance dans la réalisation des activités. On s’entend qu’une activité générale est permise avec un certain nombre de réalités. Si l’on dépasse cette réalité ou ces facteurs, on parle d’un autre projet ou d’un projet amendé de façon importante. Dans la réalité des choses, y a-t-il ce genre de compréhension, pas avec l’idée de la figer dans une réglementation, dans une loi, mais y a-t-il une compréhension sur le terrain dans votre secteur d’industrie sur ce genre de réalité?
[Traduction]
M. Marshall : Je ne crois pas pouvoir répondre à la question plus clairement que je l’ai fait dans ma réponse précédente.
Divers promoteurs proposeront divers projets qui seront associés à diverses visions et qui feront l’objet d’une évaluation ou d’une réévaluation. Je vais vous donner un exemple de haut niveau pour faire suite à l’exemple donné plus tôt dans lequel Alexco voulait déplacer une usine sur son site. Je parle de façon hypothétique d’un projet que je ne connais pas très bien, mais si tout ce qu’on veut faire, c’est de déplacer l’usine du point X au point Y, on ne parle pas d’accroître le taux d’extraction de la mine ni de produire plus de résidus; on ne parle pas non plus de changer la portée du projet. On veut seulement déplacer une infrastructure et l’installer ailleurs sur le site, ce qui n’aura probablement aucune incidence sur l’environnement. On peut donc considérer ici que ce changement n’est pas important en ce qui a trait à la portée du projet.
Si, toutefois, l’agrandissement proposé donnait lieu à une augmentation importante du taux d’extraction ou s’il entraînait des changements relatifs à la gestion des déchets et nécessitait un traitement des résidus ou un volume d’entreposage accrus — quelque chose du genre —, alors on pourrait dire qu’il s’agit d’un changement important par rapport à la portée originale du projet et qu’il faudrait peut-être procéder à un examen détaillé.
Encore une fois, je souligne que nous ne voulons pas nous soustraire au processus réglementaire. Ce n’est pas du tout le but de notre exercice. Ce que nous voulons, c’est que les volets d’un projet qui n’ont pas d’incidence importante sur sa portée ne fassent pas l’objet d’une réévaluation, puisque cela entraîne un fardeau supplémentaire pour les Premières Nations, un recours accru à la LEESY et une perte de temps pour les entreprises.
Dans certains cas, un processus qui n’avait donné lieu à aucune amélioration de l’environnement par rapport à l’état actuel du projet s’était avéré très coûteux pour le territoire, l’entreprise et les collectivités locales, et nous aimerions pouvoir éviter cette situation ou ces circonstances à l’avenir.
La présidente : Nous vous remercions de vos explications.
J’aimerais maintenant remercier tous les témoins pour leurs témoignages éclairés et cette conversation. Votre capacité de répondre à nos nombreuses questions est fort appréciée.
[Français]
Maintenant, nous pouvons faire notre étude article par article.
[Traduction]
C’est d’ordre public, alors tout le monde peut rester pour l’entendre.
Le sénateur Patterson : Madame la présidente, j’invoque le Règlement.
Je propose que nous étudiions l’ensemble des dispositions afin de donner le temps au comité de réfléchir aux observations si nous acceptons d’adopter le projet de loi sans modification.
La présidente : Oui, je suis d’accord. Pouvez-vous le proposer?
Le sénateur Patterson : On peut le faire en groupe.
[Français]
La sénatrice Dupuis : A-t-on le document de l’étude article par article?
[Traduction]
La présidente : Avez-vous une copie du projet de loi?
[Français]
La sénatrice Dupuis : Habituellement, dans les comités, nous avons un document pour l’étude article par article. A-t-on ce document ici?
La présidente : Non, on ne l’a pas.
La sénatrice Dupuis : Serait-il possible que, la prochaine fois, ce document soit déposé en même temps que l’ordre du jour qui indique l’étude article par article? Merci. C’est exactement ce que je voulais.
[Traduction]
La présidente : Êtes-vous d’accord pour que le comité procède à l’étude article par article du projet de loi C-17?
Des voix : D’accord.
Le président : Est-il convenu de reporter l’étude du titre?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 1 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 2 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 3 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 4 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 5 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 6 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 7 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 8 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : L’article 9 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le projet de loi est-il adopté?
Des voix : D’accord.
La présidente : Merci.
Le comité souhaite-t-il annexer des observations au rapport?
Des voix : D’accord.
La présidente : Le comité souhaite-t-il passer au huis clos pour discuter des observations?
Des voix : Oui.
La présidente : À l’unanimité.
La présidente : Est-il convenu que je fasse rapport du projet de loi, avec observations, au Sénat?
Des voix : D’accord.
La présidente : D’accord. Merci beaucoup. C’est ma première expérience.
Le sénateur Massicotte : J’aimerais faire un commentaire, et je serai heureux de le faire en séance publique.
La plupart d’entre vous ne le réalisent probablement pas, parce que le temps file, mais notre chère sénatrice Fraser participait aujourd’hui à sa dernière réunion du Comité de l’énergie. Non seulement est-elle membre du comité depuis un an ou un an et demi et y a-t-elle beaucoup contribué, comme nous avons pu le constater ce matin, mais elle a aussi pendant longtemps contribué de façon immense à notre institution. Elle est un de nos piliers.
Au nom de tous les sénateurs, je tiens à vous remercier officiellement de votre engagement, de votre dévouement et de votre honnêteté. Vous avez été une sénatrice phénoménale. Vous faites la fierté du Sénat, et je tiens à vous remercier, en notre nom à tous.
Des voix : Bravo!
La présidente : Je vous souhaite à tous un très joyeux Noël. Profitez bien des Fêtes, car je crois qu’elles ne dureront pas très longtemps. Nous nous reverrons en février. Merci beaucoup.
(La séance est levée.)