Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule nº 3 - Témoignages du 24 février 2016
OTTAWA, le mercredi 24 février 2016
Le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 16 h 22 pour étudier les questions relatives aux délais dans le système de justice pénale au Canada et pour procéder à l'étude de l'ébauche d'un budget.
Le sénateur Bob Runciman (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Je souhaite la bienvenue à mes collègues, aux invités et aux membres du public qui suivent aujourd'hui les délibérations du Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles.
Le mois dernier, le Sénat a autorisé le Comité à examiner les questions relatives aux délais dans le système de justice pénale au Canada et les rôles du gouvernement du Canada et du Parlement en vue d'éliminer de tels délais et à faire rapport à ce sujet. Il s'agit de notre cinquième réunion sur cette question.
Nous accueillons aujourd'hui Kevin Fenwick, sous-ministre et sous-procureur général du ministère de la Justice du gouvernement de la Saskatchewan, qui se joint à nous par vidéoconférence depuis Winnipeg, Michael Waby, directeur exécutif de la Stratégie de modernisation du système de justice pénale, et Agata Falkowski, conseillère en matière de projet de la Stratégie de modernisation du système de justice pénale, tous deux du ministère du Procureur général de l'Ontario.
Merci de vous joindre à nous aujourd'hui. Nous attendons impatiemment vos exposés. Les sénateurs pourront ensuite vous poser des questions.
Monsieur Fenwick, je crois que nous allons commencer par vous. La parole est à vous.
Kevin Fenwick, sous-ministre et sous-procureur général, ministère de la Justice, gouvernement de la Saskatchewan : Bonjour. Comme vous l'avez dit, je suis sous-ministre et sous-procureur général. Je suis heureux de pouvoir vous parler au nom de mon ministre, Gordon Wyant. Selon moi, s'il m'a demandé de le remplacer aujourd'hui, c'est parce qu'il sait que la question de la réforme du système de justice — et le thème des délais dans le système de justice y est assurément lié — est un sujet qui me tient à cœur. Je suis donc reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée de m'adresser à vous aujourd'hui.
Je suis désolé de ne pas pouvoir comparaître en personne aujourd'hui, à Ottawa. En fait, je suis à Winnipeg. J'y suis arrivé plus tôt aujourd'hui pour participer, demain, à une table ronde sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées. Je vous remercie donc de m'accommoder.
D'après ce que j'ai entendu des conditions météorologiques à Ottawa, j'ai peut-être bien fait de rester ici. Je suis sûr que les sénateurs Plett et Batters seraient d'accord avec moi : les conditions météorologiques actuelles en Saskatchewan et au Manitoba sont des conditions typiques du milieu de l'hiver dans les Prairies : il fait environ moins 2, c'est calme, et il n'y a pas de vent.
Je suis ravi de l'occasion de travailler en collaboration avec certains de mes collègues nationaux et provinciaux sur des secteurs de responsabilité partagée liés à l'administration de la justice. L'approche axée sur la collaboration que nous tentons d'implanter aux différentes tables fédérales-provinciales-territoriales — comme en témoigne l'invitation du Sénat — peut nous aider à gérer toute une gamme de facteurs qui entraînent des retards dans le système de justice pénale, et ce, partout au pays.
Je ne crois pas qu'il faille s'éterniser sur le fait que les retards ne sont pas une bonne chose — nous sommes bien sûr tous d'accord. Les retards dans le cadre des poursuites criminelles sont coûteux et donnent des résultats moins qu'optimaux au sein du système de justice, et ce, non seulement pour les personnes qui se retrouvent devant les tribunaux, mais également pour les victimes et les familles des victimes et des accusés.
J'aimerais d'abord formuler un commentaire d'ordre général : comme vous tous, j'imagine, je sais bien qu'il n'y a pas de remède miracle ni de solution magique unique qui nous permettra d'éliminer rapidement et facilement les retards dans le système de justice pénale. C'est un dossier complexe. Cependant, en guise de contexte, je tiens à ajouter d'entrée de jeu que, en Saskatchewan, nous croyons que les retards sont tout autant causés par la culture du système de justice que par sa structure et son organisation. Je formulerai volontiers quelques commentaires généraux à ce sujet un peu plus tard.
Il est connu que la culture dame le pion à la structure. Je suis d'accord. Cela signifie que, si nous refusons de tenir compte à la fois des changements structurels et organisationnels et des changements d'attitudes et de culture au sein du système de justice, nos efforts pour éliminer les retards donneront peu de résultats.
Nous avons défini un programme d'innovation très proactif au sein du ministère de la Justice de la Saskatchewan. Notre mission relativement au programme d'innovation est assez simple : nous voulons un système de justice qui est compréhensible, abordable et rapide. Cette mission se reflète dans un certain nombre de projets qui nous tiennent à cœur. Plusieurs administrations à l'échelle du pays font preuve de leadership dans ce dossier, et je crois que notre province est l'une d'elles.
Nos initiatives qui visent à créer un système de justice rapide, abordable et compréhensible sont axées sur les citoyens. Actuellement, il y a environ 20 projets en cours qui recoupent les domaines de la justice pénale, du droit civil et du droit de la famille. Nous mobilisons des intervenants afin qu'ils examinent le mode de prestation des services de justice et réfléchissent à la manière de les améliorer afin d'offrir un accès équitable à tous.
Dans le cadre de ma déclaration, je veux aborder quatre domaines précis, ce que je ferai de façon très brève : l'aide juridique, le Programme d'assistance parajudiciaire aux Autochtones, les tribunaux thérapeutiques et les programmes de justice communautaire.
Je vais commencer par l'aide juridique. L'aide juridique joue un rôle crucial relativement à l'offre de services juridiques accessibles dans le domaine du droit criminel et du droit de la famille. En Saskatchewan, notre système est fondé sur un modèle clinique, qui mise sur des avocats-conseils à l'interne et des assistants juridiques. Nos études montrent que les personnes désavantagées sur le plan économique qui sont accusées d'infractions criminelles comptent parmi les membres les plus marginalisés et les plus vulnérables de la population. Elles souffrent souvent d'autres problèmes, comme une alphabétisation déficiente, des problèmes de santé mentale, un faible niveau d'instruction et des problèmes de consommation d'alcool et de drogues.
Depuis 2007-2008, le gouvernement fédéral a bloqué ses contributions à l'aide juridique de la Saskatchewan à 4,2 millions de dollars. Pendant la même période, les contributions de la province ont augmenté, passant de 14,4 millions de dollars à 18,6 millions de dollars. Cependant, de toute évidence, cette augmentation provinciale n'est pas suffisante pour répondre à la demande. Par conséquent, nous avons constaté une forte diminution du nombre d'avocats qui fournissent des services d'aide juridique.
Cependant, une occasion s'offre à nous : l'accord de financement actuel en matière d'aide juridique conclu par les provinces avec le gouvernement fédéral expire en mars 2017, et nous aurons donc l'occasion, dans le cadre de rencontres fédérales-provinciales-territoriales, d'entamer des discussions concernant une éventuelle augmentation du financement.
Cependant, je tiens à préciser que — en tout cas, du point de vue de la Saskatchewan — nous ne demandons pas plus d'argent pour continuer à faire les mêmes choses des mêmes manières. Nous voulons entamer des discussions concrètes sur la prestation des services d'aide juridique de façon à nous assurer que les provinces et le Canada en obtiennent le plus possible pour leur argent et — ce qui est encore plus important — que les personnes admissibles à l'aide juridique bénéficient des meilleurs services possibles.
Le deuxième thème que je voulais aborder concerne le Programme d'assistance parajudiciaire aux Autochtones de la Saskatchewan. Ce programme aide les adultes et les jeunes autochtones qui ont maille à partir avec la Loi. Les auxiliaires parajudiciaires embauchés dans le cadre de ce programme veillent à ce que les Autochtones présumés avoir commis une infraction criminelle reçoivent un traitement juste et équitable des tribunaux.
Ce programme fonctionne très bien. Des services sont actuellement offerts dans 83 p. 100 des tribunaux de la Saskatchewan. Sans le Programme d'assistance parajudiciaire aux Autochtones, il y aurait beaucoup plus de démarches judiciaires coûteuses et encore plus de retards dans le système.
Malgré la réussite du programme — encore une fois —, on doute de sa viabilité en raison de l'absence de financement fédéral. Au cours des 10 dernières années, en effet, comme pour l'aide juridique, le financement provincial a augmenté, mais le financement fédéral est demeuré inchangé.
Le troisième commentaire que je voulais formuler concerne la transition des modèles de tribunaux traditionnels au profit d'autres solutions de rechange — les tribunaux thérapeutiques et les tribunaux axés sur les solutions dont on entend beaucoup parler.
Je n'aime pas trop parler de « solutions de rechange » et je reviendrai aussi sur ce thème plus tard. Je préfère de loin parler de « modèles de tribunaux appropriés » plutôt que de « modèles de tribunaux de rechange ». Lorsqu'on utilise le mot « rechange », cela suppose que la façon dont on a toujours procédé est la façon « normale ». Selon moi, l'objectif est de trouver le modèle le plus approprié en fonction des personnes qui se retrouvent devant les tribunaux.
Il y a une expression que j'utilise sans arrêt lorsque je décris les réussites de nos tribunaux thérapeutiques en Saskatchewan. Cette expression, qui concerne plus précisément notre tribunal de traitement de la toxicomanie de Regina, est la suivante : « cinq bébés libres de dépendance ». Au cours des deux ou trois dernières années, cinq bébés libres de dépendance sont nés de mères qui participent à notre programme de tribunal de traitement de la toxicomanie. Même si nous ne pouvons pas garantir que ces enfants ou certains de ces enfants n'auront jamais de démêlé avec le système de justice pénale, ou, assurément, ne deviendront pas des fardeaux pour les contribuables, je peux presque vous garantir que, s'ils étaient nés avec une dépendance, ils auraient très certainement été un plus lourd fardeau pour les contribuables.
La quatrième chose dont je voulais parler, c'est ce qu'on appelle généralement les programmes de mesures de rechange pour adultes et les programmes de sanctions extrajudiciaires destinées aux jeunes. Encore une fois, je tiens à préciser que je préfère de beaucoup l'expression « mesures appropriées ». Ces renvois permettent de réduire le nombre de cas qui se retrouvent devant les tribunaux. Ils permettent d'accroître la capacité des tribunaux et d'éliminer les retards dans le cadre du traitement des dossiers qui doivent se retrouver devant les tribunaux et être tranchés par des tribunaux pénaux. Par conséquent, nous croyons qu'il est possible de miser davantage sur de telles mesures appropriées ou de rechange.
Le gouvernement fédéral peut aider la Saskatchewan à réduire davantage les délais au sein du système de justice pénale en se penchant sur la question du financement de l'aide juridique et des tribunaux thérapeutiques et en prenant les mesures de soutien — financières et autres — qui s'imposent pour appuyer les programmes de justice communautaire. Il peut aussi nous aider en soutenant des modifications pragmatiques et opérationnelles du Code criminel et de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Encore une fois, je vous rappelle que nous ne demandons pas plus d'argent pour continuer à gérer les problèmes comme on l'a toujours fait; l'objectif est plutôt de faire preuve de plus de créativité au moment de dépenser ces fonds.
Il y a un certain nombre d'autres programmes actuellement en cours en Saskatchewan qui, selon moi, ont un impact sur les délais. En ce moment, nous travaillons en étroite collaboration avec la Law Society of Saskatchewan pour offrir un meilleur accès aux services juridiques grâce à des assistants juridiques, qu'on appelle communément « parajuristes ». Le barreau nous demande de réfléchir à cette possibilité. Bien sûr, nous regardons ce que font les autres provinces pour trouver des modèles. L'Ontario a déjà fait un bon bout de chemin à cet égard, et nous examinons donc ces options.
Nous travaillons actuellement en partenariat avec l'Ontario sur les pratiques de nos partenaires du système de justice en matière de détention provisoire dans le but de réduire le temps passé inutilement et sans raison en détention provisoire, tout en maintenant les principes de sécurité communautaire et d'application régulière de la loi. Les processus des tribunaux responsables des détentions sont aussi très complexes, mais, selon nous, les travaux que nous avons réalisés jusqu'à présent sont très prometteurs.
Nous réalisons actuellement un projet pilote à Saskatoon dans le cadre duquel nous envisageons des options qui permettent de réduire le nombre de prévenus en détention provisoire à court terme. Comme je crois que notre mémoire l'indique, l'un des enjeux les plus déroutants, c'est que la grande majorité des personnes en détention provisoire en Saskatchewan le sont pour des périodes relativement courtes. Il faut donc se demander pourquoi, puisqu'elles seront prêtes à être libérées après une détention provisoire de quatre, cinq, six ou dix jours, elles ne pourraient pas l'être un peu plus rapidement si l'on exerçait un certain contrôle.
Une des données intéressantes tirées des travaux que nous avons réalisés sur les détentions provisoires à Saskatoon, c'est que, si les recommandations formulées par les intervenants importants du système sont mises en place, nous estimons pouvoir réduire le nombre de fouilles corporelles complètes de 18 000 par année. Il s'agit des fouilles qui sont effectuées lors du déplacement des prévenus entre le centre correctionnel provincial de Saskatoon et la Cour provinciale de Saskatoon — j'ai bien dit 18 000 fouilles corporelles de moins.
Nous sommes très certainement intéressés par des améliorations comme la vidéocomparution pour les prévenus détenus en zone éloignée et une meilleure communication entre la Couronne, la défense, les tribunaux et la police. Nous croyons avoir déjà réussi à abréger certains délais et à améliorer l'efficience des tribunaux, mais il reste assurément beaucoup de travail à faire. Nous travaillons actuellement en collaboration avec le Centre canadien de la statistique juridique dans le cadre d'une étude sur les nouveaux contacts. En reliant les services de police, les tribunaux et les services correctionnels, l'initiative devrait permettre de mieux cibler les programmes, ce qui pourrait atténuer davantage les pressions exercées sur le système de justice.
En terminant, je tiens à souligner que la Saskatchewan est déterminée à travailler en collaboration et à servir, le cas échéant, de site de démonstration pour la mise à l'essai de nouvelles initiatives permettant de réduire les délais dans l'appareil judiciaire.
Je vais maintenant formuler quelques commentaires sur le thème de la culture. Nous avons créé un système au sein du système de justice pénale — tout comme au sein du système de justice civile —, en vertu duquel il est tout à fait normal que les procédures durent des mois et des mois. Le défi que je lance aux avocats qui travaillent dans le système, c'est de réfléchir au fait que, si un client entrait dans leur bureau pour leur demander de réaliser une transaction immobilière et qu'ils leur répondaient : « bien sûr, revenez dans six ou huit mois, et nous verrons ce que nous pouvons faire », ils perdraient leur clientèle très rapidement. Nous voyons les choses différemment lorsqu'il est question de contentieux, que ce soit dans le domaine du droit civil ou celui du droit criminel.
L'autre commentaire que je veux faire concerne mes deux fils. Ce sont maintenant des adultes, mais, il y a 20 ans, ils avaient 8 et 11 ans. S'ils avaient fait quelque chose de mal et que mon épouse et moi avions déterminé qu'il fallait sévir, si quelqu'un m'avait dit que la meilleure chose à faire était de les enfermer et de leur demander de revenir dans huit mois pour que l'on puisse déterminer la nature de leur punition ou la mesure corrective à prendre, nous serions tous d'accord pour dire que ce n'est pas un modèle efficace. Cependant, c'est ce que nos tribunaux criminels font tout le temps. Nous prenons des mois et des mois pour régler des dossiers plutôt que de nous conformer à ce que toutes les études que j'ai lues laissent entendre, soit que les mesures correctives appliquées rapidement après le comportement fautif sont plus efficaces.
Je vais m'arrêter ici. Je serai bien sûr heureux de participer à toute discussion ou à répondre aux questions des membres du comité.
Le président : Merci.
Monsieur Waby?
Michael Waby, directeur exécutif, Stratégie de modernisation du système de justice pénale, ministère du Procureur général de l'Ontario : Merci, monsieur le président. Je tiens aussi à vous remercier de m'avoir invité à comparaître devant le comité et je suis reconnaissant de l'honneur de comparaître au nom de notre procureure générale, Madeleine Meilleur.
Je vais essayer d'être le plus utile possible au comité en mettant l'accent sur les efforts que la province de l'Ontario déploie et les mesures qu'elle a prises récemment pour combattre les problèmes de retards et les déficiences au sein de notre système de justice pénale. Selon moi, au cours de la dernière décennie, l'Ontario a tenté de mettre en place progressivement une série de mesures visant à éliminer ces retards et à accroître l'efficience du système de justice pénale provincial.
Je tiens aussi à reprendre certaines des choses dites par M. Fenwick. Le comité comprend très bien que, parfois, les causes des retards au sein du système de justice pénale sont complexes. Elles sont souvent diverses, et fréquemment, interreliées.
Le comité sait aussi que, dans le cadre du traitement d'un dossier criminel, il y a des retards évitables et inutiles, mais aussi des délais de traitement naturels et nécessaires, dont s'assortit le traitement approprié de chaque affaire criminelle. Évidemment, en Ontario, c'est sur les retards évitables et inutiles que nous avons tenté de concentrer nos efforts afin d'améliorer la situation.
Enfin, et je le dis simplement en guise de remarque préliminaire, vous ne serez pas surpris de m'entendre dire que, nonobstant l'importance des gains d'efficience et de la modernisation du système de justice pénale de l'Ontario, ces objectifs louables sont nécessairement assujettis aux principes fondamentaux de justice auxquels nous adhérons au Canada et aux considérations primordiales liées à la sécurité publique.
Cela dit, je vais maintenant revenir sur certaines des mesures que l'Ontario a prises dans le passé et faire le point sur cette question. Vers 2004-2005, dans le but de dissiper les préoccupations grandissantes au sujet de l'arriéré des tribunaux criminels, nous avons réalisé, en Ontario, une initiative intitulée l'Initiative de réduction des retards dans le système judiciaire, ou l'IRRSJ. La meilleure façon de décrire cette initiative, c'est de dire qu'il s'agissait d'une série de tribunaux éclair ciblés, en soutien aux tribunaux aux prises avec un important arriéré, qui était jugé préoccupant. On affectait des ressources à ces endroits et on tentait de mettre en place une structure permettant de réduire concrètement les délais, quels que soient les types de dossiers à l'origine des problèmes jugés préoccupants dans la région visée.
Avec du recul, on a déterminé que la coordination et la collaboration dans le cadre de cette stratégie étaient déficientes et qu'il fallait trouver une approche plus intégrée pour éliminer certains des problèmes systémiques constatés en Ontario. On était très préoccupé par le nombre de plus en plus élevé de comparutions auxquelles un accusé devait s'astreindre avant que son dossier soit traité par les tribunaux et pour tout le temps requis pour que le tribunal tranche son cas.
Par conséquent, en 2008, la province a mis sur pied l'initiative Justice juste-à-temps, un programme bénéficiant de ressources spéciales dans le cadre duquel l'Ontario a fait preuve, pour la première fois — je pense qu'il est juste de le dire — d'une grande rigueur pour comprendre les particularités et les causes des problèmes auxquels nous nous butions. Pour la première fois, nous avons tenté de définir des cibles importantes liées à la réduction du temps de traitement des dossiers dans le système et du nombre de comparutions auquel un accusé doit s'astreindre pour que son dossier soit considéré comme traité dans des limites raisonnables.
Grâce à ce système, on a vraiment tenté, pour la première fois, d'éviter un des pièges dans lesquels, selon moi, les intervenants du système de justice pénale tombent très souvent, soit s'appuyer sur des données probantes de nature anecdotique concernant le rendement d'un secteur précis du système de justice pénale et de miser plutôt sur des analyses rigoureuses fondées sur des données probantes. À cette fin, les données statistiques ont commencé à jouer un rôle important dans le cadre de l'initiative Justice juste-à-temps, et beaucoup d'efforts ont été déployés afin d'affecter les ressources nécessaires pour permettre de mesurer la façon dont on traite un dossier dans le système. On communiquait en outre des tableaux de bord trimestriels sur cette question.
Je crois qu'on peut dire sans se tromper que l'initiative Justice juste-à-temps s'appuyait sur une approche de bas en haut. Elle incluait la création, dans chaque tribunal de la province — et, évidemment, par conséquent, dans chaque région — d'une équipe de leadership local axée sur la collaboration qui réunissait des représentants du milieu juridique, du barreau, des services judiciaires et de la police. Ces comités se réunissaient à une fréquence déterminée pour essayer de comprendre les problèmes locaux rencontrés et élaborer des initiatives locales, qu'il s'agisse d'utiliser des technologies ou de rationaliser les processus pour faciliter le traitement du dossier d'un accusé au cours des étapes préalables au procès ainsi que des initiatives pour essayer de lutter contre l'effondrement des procès.
Pendant assez longtemps — parce que l'initiative Justice juste-à-temps s'est terminée vers la fin de l'année dernière —, l'initiative a renversé ce qui s'était révélé une tendance troublante, soit une augmentation des délais avant les procès et du nombre de comparutions. Elle nous a aussi aidés à dissiper certaines de nos principales préoccupations.
Le fait que l'initiative était axée sur la collaboration a été très édifiant. Nous avons appris que, s'il devait y avoir une solution unique au problème, il était essentiel que les principaux intervenants et participants du système de justice agissent à l'unisson, puisque aucun intervenant et aucun groupe ne peuvent contrôler toutes les composantes en jeu.
L'approche de bas en haut a assurément présenté des avantages. Elle a permis de tenir compte des préoccupations et des problèmes locaux et d'y trouver des solutions adaptées. En toute légitimité, selon moi, l'un des aspects qui auraient pu être améliorés dans le cadre de l'initiative Justice juste-à-temps, c'était sa capacité d'exporter les bonnes idées. Même s'il fallait respecter les exigences locales et qu'il fallait bien sûr tenir compte des besoins et des problèmes locaux, on ne pouvait pas faire abstraction du principe selon lequel, dans le cas de certains problèmes, les solutions s'exportent, et les pratiques exemplaires transférables peuvent être bénéfiques à l'ensemble des tribunaux de la province plutôt que se limiter à un seul emplacement.
Malgré le très bon travail réalisé dans le cadre de l'initiative Justice juste-à-temps, qui a permis de commencer à renverser les tendances troublantes qui avaient été constatées, en septembre de l'année dernière, le ministère du Procureur général, en étroite collaboration avec la Cour de justice de l'Ontario a mis sur pied un groupe responsable de la modernisation du système de justice pénale. Ce groupe est coprésidé par la juge en chef Lise Maisonneuve, de la Cour de justice de l'Ontario, et le sous-procureur général, Patrick Monahan. Il s'agit d'un comité de gouvernance à qui je rends des comptes à une certaine fréquence, soit environ aux six semaines. Il compte des sous-ministres et des SPGA, qui représentent des intervenants clés, comme le ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels, l'Aide juridique, des avocats de la défense, l'Association des chefs de police de l'Ontario, le ministère du Procureur général et, évidemment, les tribunaux ontariens.
Le principe qui sous-tend cette nouvelle approche ontarienne est d'adopter davantage une structure de haut en bas plutôt que l'inverse. Essentiellement, la structure qui a été mise en place est centrée sur le fait que des initiatives sont proposées au comité gouvernemental et sur un solide leadership judiciaire et un parternariat bénéficiant d'un leadership interministériel.
Le comité et les divers intervenants n'approuvent pas uniquement les initiatives de façon collaborative — parce que, selon moi, en Ontario, comme d'autres collègues dans d'autres provinces, nous avons très bien su miser sur la collaboration au fil des ans —, mais aussi de manière coordonnée. Même si la collaboration reste une condition préalable, plus les efforts sont coordonnés, meilleurs seront les résultats. Je n'ai pas à rappeler au comité qu'un des périls lorsqu'on veut apporter des changements importants, que ce soit au chapitre de la culture ou des procédures, est l'approche cloisonnée en vertu de laquelle chaque entité fait son petit travail indépendamment.
Nous avons toute une gamme d'initiatives qui porteront sur les améliorations technologiques, dont l'objectif est d'améliorer le traitement des dossiers au sein du système de justice pénale, dès le début, à l'étape du cautionnement, jusqu'à la mise en liberté de la section, en passant par la phase préalable au procès.
Nous réalisons actuellement une initiative qui est dirigée en grande partie par la sphère judiciaire et qui mise sur une étroite collaboration avec nos collègues de l'aide juridique. Dans le cadre de cette initiative, nous avons convenu avec ces intervenants d'une structure de financement pour rémunérer les comparutions pour lesquelles, actuellement, les avocats ne sont pas rémunérés.
Nous avons adopté un système judiciaire préalable au procès plus rigoureux et amélioré grâce auquel nous nous assurerons que tous les dossiers inscrits pour instruction font l'objet d'une enquête préliminaire et sont traités à nouveau avant la date de procès et assujettis à une deuxième audience rigoureuse devant un juge. L'un des avantages liés au fait de travailler en collaboration avec des dirigeants principaux — comme je le fais dans le cadre de ce comité de gouvernance —, c'est de compter sur la présence des principaux décideurs, qui peuvent réagir de façon assez souple et productive et dans un esprit de collaboration aux efforts du comité de gouvernance.
Nous terminons la première phase des initiatives que nous voulions réaliser, et je prévois que, durant notre réunion de la semaine prochaine, nous commencerons à envisager la réalisation d'initiatives liées à certains des thèmes soulevés par mon collègue, M. Fenwick. Que ce soit grâce à des technologies permettant de réduire au minimum le besoin qu'un accusé doive se lever à 5 h 30 pour faire l'objet d'une fouille à nu avant sa sortie de l'établissement correctionnel, être soumis aux aléas de la circulation et des conditions météorologiques pour se rendre devant tel ou tel tribunal, pour ensuite répéter tout le processus dans l'autre sens à la fin de la journée, et tout ça, pour se lever devant le juge et lui dire « votre honneur, j'aimerais revenir jeudi », ce processus ne semble pas un bon usage du temps de quiconque. Le recours aux technologies pourrait permettre des comparutions plus efficientes.
Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues du ministère des Services correctionnels dans le cadre d'une initiative qui accordera beaucoup plus de souplesse aux avocats de la défense et aux avocats de l'aide juridique afin qu'ils puissent consulter leurs clients dans des établissements correctionnels, ce qui réduira par le fait même le nombre de déplacements des détenus vers les tribunaux.
Par conséquent, j'espère que nous avons réussi à mettre en place ce qu'il faut et que nous commençons vraiment à régler certains des problèmes persistants. Je crois aussi que, au cours de la dernière décennie, nous avons enfin cerné l'approche qui, selon nous, sera la plus efficace pour arriver à nos fins. C'est un travail en cours. Nous avons raison d'être fiers des progrès réalisés, mais personne ne s'assied sur ses lauriers.
Nous répondrons volontiers à vos questions sur des aspects précis de notre travail.
Le président : Merci.
Nous allons passer aux questions.
Le sénateur Baker : Merci aux témoins, M. Fenwick et M. Waby. Vous êtes deux anciens avocats plaidants, M. Waby, principalement pour la Couronne, et M. Fenwick, pour la Couronne et la défense ainsi que dans le domaine du droit familial. Vous avez fait vos preuves et vous faites un excellent travail dans vos postes respectifs. Je dois vous féliciter tous les deux. Je vous suis depuis longtemps.
Ce que vous nous avez présenté est très intéressant. Cependant, le comité est là pour réfléchir à des mesures à prendre pour réduire les délais devant les tribunaux. Nous comprenons les initiatives que vous avez décrites et qui sont en cours. Cependant, lorsque je regarde les faits en Ontario, l'affaire R. c. Boss a été suspendue et jugée irrecevable le 4 février 2016; l'affaire R. c. Chen, a été jugée irrecevable le 4 février 2016; l'affaire R. c. Nadesu a été suspendue, puis jugée irrecevable le 19 janvier — ce dossier concernait trois chefs d'accusation de fraude de plus de 5 000 $ —; et l'affaire R. c. Hart, a été suspendue, puis jugée irrecevable le 5 janvier 2016. Ces dossiers viennent tous de l'Ontario et datent des dernières semaines. Il y a aussi des cas comme l'affaire Chopra, qui a été jugée irrecevable le 8 janvier.
Enfin, au cours des six dernières semaines, l'affaire S. c. E. a été jugée irrecevable le 8 janvier. Le dossier concernait des infractions très graves — deux infractions de nature sexuelle contre un enfant de 7 ans —, et l'affaire a été suspendue en raison de retards dans le cadre du procès.
Passons à la Cour d'appel de la Saskatchewan. Il y a tout juste deux mois, l'affaire typique R. c. Scott, un cas d'agression sexuelle et de contacts sexuels, a été jugée irrecevable par la Cour d'appel. Cette dernière a maintenu la décision du tribunal inférieur et accepté l'argument lié aux retards dans le cadre du procès et à l'alinéa 11b). Deux mois avant, la Cour d'appel de la Saskatchewan a jugé l'affaire R. c. Lee irrecevable. Il s'agissait d'un cas d'enlèvement d'enfant.
Je pourrais continuer longtemps. Il s'agit de cas récents dans vos deux provinces et qui datent des dernières semaines et des derniers mois.
En tant qu'anciens avocats plaidants, vous êtes passés par ce processus. Monsieur Waby, vous avez déjà plaidé des dossiers où l'alinéa 11b) a été invoqué. En fait, vous avez perdu l'affaire Spencer. Vous vous en souvenez? Vous travailliez pour la Couronne.
Vous connaissez le système. Vous savez ce dont il retourne. Vous avez abordé cette question, mais pouvez-vous nous fournir des exemples précis ou nous formuler des suggestions sur des façons de corriger ces graves injustices qui se produisent dans notre système de justice?
M. Waby : J'ai les mêmes préoccupations que vous quant aux dossiers qui ne sont pas tranchés sur le fond. C'est une grande préoccupation.
C'est la raison pour laquelle le ministère du Procureur général prend très au sérieux les dossiers jugés irrecevables au titre de l'alinéa 11b). Encore une fois, comme vous le savez, lorsqu'une telle demande est accueillie, l'affaire ne peut pas être plaidée sur le fond.
En Ontario, malgré une tendance générale à la baisse du nombre total de dossiers — il y en a eu environ 220 000 au sein de notre système l'année dernière — un dossier jugé irrecevable au titre de l'alinéa 11b), c'est déjà un de trop. Les exemples que vous avez mentionnés sont effectivement préoccupants, même si je ne connais pas les faits précis en vertu desquels la demande au titre de l'alinéa 11b) a été accueillie.
Pour en revenir à ce que vous avez dit, je crois que les initiatives que nous avons mises en place et celles que nous envisageons de réaliser visent vraiment à garantir une comparution de qualité. Dans un contexte où on a l'impression que les dossiers sont plus complexes, qu'il y a plus de documents communiqués, plus de vidéos fournies par les services de police et plus de travail de nature technique à faire sur ordinateur, eh bien, il faut pouvoir faire ce travail moderne et technique dans des délais acceptables. Il faut tout faire pour s'assurer que les dossiers des victimes de crime, des témoins et des accusés sont plaidés sur le fond et ne sont pas jugés irrecevables au titre de l'alinéa 11b).
M. Fenwick : Je vais répéter ce que j'ai déjà dit : selon moi, il n'y a pas de solution miracle. La question est excellente, et on voit tout de suite que vous avez fait vos devoirs, ce qui n'est pas surprenant.
Si nous revenions au commencement et que nous observions ce qui se passe à chacune des étapes que doivent franchir un accusé, la Couronne et la défense, dans le système de justice pénale, nous pourrions nous poser la question suivante : « Pourrions-nous améliorer ce processus de l'ordre de 20 ou même de 50 p. 100? » Nous pourrions le faire à chacune des étapes. Au bout du compte, l'amélioration sera importante.
Je vais vous donner un exemple. Dans la culture qui est la nôtre, aujourd'hui, un ajournement est automatiquement accordé dès la première comparution devant le tribunal. La plupart des juges vous diront que l'ajournement est accordé d'office. À la seconde comparution, si un ajournement est demandé, il sera probablement lui aussi accordé d'office, et il le sera aussi probablement la troisième fois.
Les tribunaux ont la responsabilité de poser des questions plus précises afin de savoir pourquoi les parties ne sont pas prêtes à procéder ce jour-là et pourquoi elles demandent un ajournement. Les avocats de la défense et les procureurs de la Couronne pourraient tous deux répondre à cette question.
En ma qualité de sous-procureur général de la Saskatchewan, ma tâche consiste entre autres à m'assurer que nos procureurs sont plus proactifs. Je ne vois pas pourquoi un procureur devrait attendre que l'avocat de la défense lui envoie une lettre demandant la communication de renseignements. Pourquoi les procureurs ne sont-ils pas plus proactifs en ce qui a trait à la communication de documents? S'ils prévoient que la demande sera transmise, pourquoi ne prennent-ils pas les devants?
La notion de communication par voie électronique pourrait se révéler très utile. J'étais auparavant ombudsman pour la province de la Saskatchewan. Selon le système en place, quand le bureau de l'ombudsman recevait une plainte relative à la Commission d'indemnisation des accidentés du travail, à l'époque, nous devions envoyer une lettre et demander à la commission de nous envoyer un dossier; et nous recevions une pile de documents parfois aussi haute que cela.
Aujourd'hui, la Commission des accidents du travail de la Saskatchewan a tout informatisé. Si le bureau de l'ombudsman a besoin d'un dossier, il n'a qu'à lui envoyer un courriel. Elle va nous donner un code d'accès. Nous nous branchons au serveur, et le dossier y est automatiquement versé. Nous pourrions examiner la possibilité de communiquer les informations par voie électronique, nous aussi. Ce serait instantané, à l'ère de l'électronique.
Il arrive aujourd'hui, en Saskatchewan, que, lorsqu'un accusé se voit refuser l'aide juridique, dans bien des cas — je crois que c'est dans la plupart des cas —, il va interjeter appel de cette décision relative à son inadmissibilité. Il y a automatiquement un ajournement, et celui-ci dure habituellement plusieurs semaines, pendant cette procédure d'appel. Pourquoi ne fournirions-nous pas un iPad aux tribunaux des régions rurales et aux agents qui traitent les appels sur l'admissibilité à Saskatoon, de manière à pouvoir entendre l'appel immédiatement? Ce ne serait pas compliqué; il s'agit de quelque chose de relativement simple.
Voilà déjà trois exemples de solutions grâce auxquelles on pourrait dès le départ retrancher un certain nombre de semaines.
Selon les données, pour un plaidoyer de culpabilité, il faut en moyenne huit comparutions devant un tribunal, en Saskatchewan. Et il ne s'agit pas seulement des tribunaux provinciaux. Nous devons nous poser la question suivante : que s'est-il passé entre la première comparution et la huitième comparution qui fait que ce n'est qu'à ce moment-là qu'un plaidoyer de culpabilité peut être enregistré?
De la même façon, il arrive que les cours supérieures aient un grand nombre d'affaires à trancher dans le cadre d'un procès et que le plaidoyer de culpabilité soit enregistré la veille ou la semaine précédant la date fixée pour le procès. Entre-temps, les tribunaux sont surchargés.
Nous devons nous demander pour quelle raison la décision d'enregistrer un plaidoyer de culpabilité n'a pas été prise dès la première ou la seconde comparution devant le tribunal, ou au moins à la troisième ou la quatrième, plutôt qu'à la huitième ou encore deux ans plus tard, lorsque l'affaire doit être entendue par la Cour du Banc de la Reine.
Que s'est-il passé entre-temps? Essayons d'éliminer les obstacles qui font en sorte que la décision n'est pas prise plus tôt. Je crois qu'en faisant cela, nous pourrons réduire de beaucoup le nombre d'affaires dont les tribunaux sont saisis en leur donnant ainsi la capacité de s'occuper des affaires qui doivent faire l'objet d'un procès beaucoup plus tôt.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités. Évidemment, nous sommes tous très conscients qu'il y a des retards. Lorsque j'étais policier et que j'allais porter une plainte au procureur de la Couronne, il y en avait des piles sur son bureau. Parfois, il y avait un procureur de la Couronne pour 10 ou 12 procureurs de la défense. Évidemment, c'est le problème des procureurs de la Couronne.
Lorsqu'on examine froidement la situation, on constate que des rencontres ont été tenues avec des ministres fédéraux et provinciaux de la Justice. Je crois même qu'à un certain moment, un comité directeur sur l'efficacité a été créé, qui comptait des juges, des procureurs et des policiers. Il y a eu un comité national mixte composé de hauts représentants, de même qu'un symposium sur la réforme.
Ainsi, il y a eu un nombre important de réunions qui ont mobilisé beaucoup de monde pour parler des délais. Que manque-t-il donc pour obtenir des résultats efficaces? Avez-vous autre chose que des réunions à nous suggérer dans le cadre de nos rapports? On constate que de nombreuses réunions ont été organisées pour trouver des solutions. Or, aucune solution n'a été trouvée jusqu'à maintenant.
On a mentionné la possibilité d'exploiter les technologies dans les cas où il y a une pénurie de procureurs de la Couronne. Est-ce qu'on manque aussi de salles d'audience? J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
[Traduction]
M. Waby : Eh bien, sénateur, je crois que tout le monde aimerait avoir toujours plus de ressources. Je crois cependant que nous vivons dans un monde où l'on reconnaît que les ressources dont nous disposons doivent être utilisées de manière réfléchie et productive. Il est certain que nous devons utiliser les ressources de façon optimale, et que, si nous obtenons davantage de ressources, c'est extraordinaire.
Je crois que l'on comprend assez bien les nombreux et grands problèmes du système de justice pénale.
Malgré tout le respect que je vous dois, je ne peux pas vraiment me dire d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il n'y a pas eu de progrès. Je crois qu'il y a eu certains progrès accomplis. L'Ontario n'est pas la seule province dans cette situation, mais de ce point de vue, il y a eu d'importants progrès touchant la réduction des retards. Quatre-vingt-deux pour cent des dossiers sont réglés en huit mois. Nous réglons 95 p. 100 des dossiers, et je parle seulement pour l'an dernier.
Cela dit, tous les dossiers et toutes les comparutions doivent avoir une raison d'être. Les agents de police doivent pouvoir communiquer rapidement avec les procureurs de la Couronne, tout comme les avocats de la défense. Les procureurs de la Couronne doivent prendre leurs décisions en temps opportun. Ils doivent avoir reçu les documents communiqués par les agents de police. Pour reprendre l'expression de M. Fenwick, la comparution devant un officier de justice devrait être une procédure rigoureuse, et il ne faut pas que, par défaut, toutes les demandes d'ajournement soient accordées sans discussion et sans que quiconque ne pose de question.
Je crois qu'il est sain de reconnaître, même si nous enregistrons des progrès, que nous pouvons encore en faire plus. Permettez-moi de reprendre un commentaire que j'ai fait plus tôt : nous ne nous reposons pas sur nos lauriers. Un taux d'affaires classées de 95 p. 100 est un assez bon taux, pour l'Ontario. C'est notre objectif, et nous visons même un objectif plus élevé.
Pour en revenir au commentaire du sénateur Baker touchant l'alinéa 11b), nous ne voulons pas que des affaires auxquelles cet alinéa pourrait s'appliquer soient tranchées à tort simplement parce que l'affaire a traîné en longueur.
La technologie a un rôle utile à jouer. Je ne crois pas qu'il existe une solution passe-partout, et ce n'est pas parce qu'une solution est dite « électronique » qu'elle va tout de suite donner de bien meilleurs résultats. Mais, en ce qui concerne l'Ontario, je suis certain que nous reconnaissons que la technologie pourrait être mieux utilisée et utilisée de manière plus productive et que nous pourrions en tirer d'importants avantages.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Monsieur Fenwick, avez-vous des commentaires?
[Traduction]
M. Fenwick : Au risque de vous donner l'impression que je vous lis ma liste d'épicerie, j'aimerais ajouter deux ou trois choses.
Je crois que notre problème tient en grande partie à la capacité globale du système. On pourrait bien dire que la solution consiste à augmenter de façon importante le nombre des procureurs et des avocats de l'aide juridique, qui sont et de loin les avocats les plus nombreux dans notre province, mais cela suppose que nous faisons par ailleurs les choses comme il le faut, et je ne crois pas que cette hypothèse soit juste.
En plus de toutes les choses dont j'ai déjà parlé, je crois que nous pourrions réduire le nombre total d'affaires que notre système traite par d'autres moyens. Je vais vous donner un exemple.
Je suis un partisan des mesures appropriées. Je suis un partisan de la déjudiciarisation, je ne crois pas que les délinquants qui présentent un risque relativement faible impliqués dans des causes relativement mineures doivent se retrouver devant les tribunaux. Pourtant, à l'heure actuelle, en Saskatchewan, 90 p. 100 des dossiers qui sont déjudiciarisés et qui font l'objet de mesures de rechange le sont après la mise en accusation. Je crois toutefois que, lorsque vous étiez agent de police, vous saviez probablement dès les premiers contacts avec l'accusé s'il s'agissait d'un bon candidat pour les mesures de rechange.
Ma question serait la suivante : si vous prévoyez recommander des mesures de rechange, pourquoi devez-vous presque toujours porter d'abord des accusations? Nous réduirions énormément le nombre de dossiers qui se retrouveraient devant les tribunaux en proposant la déjudiciarisation avant la mise en accusation; pourtant, nous ne le faisons pas beaucoup dans notre propre province. Je ne sais pas ce qu'il en est ailleurs, mais je crois que le ratio est semblable.
Nous avons déjà des dispositions selon lesquelles un agent du procureur général, un procureur, doit faire une vérification avant que des accusations soient portées. Nous devrions étudier cela. Si cela existe, c'est pour de bonnes raisons, mais il est évident que cela prolonge la durée du processus, si un agent de police ne peut pas décider lui-même qu'il faudrait déjudiciariser l'affaire avant de porter des accusations. Voilà donc un autre exemple d'un aspect que nous pourrions étudier.
Je tiens également à dire que nous avons l'habitude — et cela nous ramène peut-être encore une fois à la question de la culture — qui fait que, si une affaire doit être ajournée pour six mois avant un plaidoyer de culpabilité, nous allons probablement l'ajourner quatre ou cinq fois encore pour un mois ou six semaines chaque fois.
Il existe souvent de très bonnes raisons pour lesquelles il faut attendre plusieurs mois avant de traiter une affaire. Tenons-en compte, et accordons un seul ajournement. Si c'est parce qu'une personne doit mettre ses affaires en ordre, si c'est parce qu'une personne doit changer de situation et s'il lui faut trois, quatre, cinq ou six mois pour le faire, accordons un seul ajournement, ce qui, par voie de conséquence, réduira le nombre de dossiers dans le système.
J'ai déjà dit à nos procureurs de la Saskatchewan que, lorsque mon mandat de sous-procureur général prendra fin, peu importe à quel moment cela se produira, s'il y a une chose que je pourrais faire pour leur rendre la vie plus facile, ce serait de faire en sorte que je n'aurais plus jamais à les voir littéralement pousser devant eux un chariot plein de dossiers, sur le trottoir menant au tribunal, puisque ces dossiers concernent la plupart du temps des affaires qui vont tout simplement être remises. Bien sûr, ces procédures d'ajournement prennent deux minutes au tribunal, et prendraient 10 ou 15 minutes à l'extérieur du tribunal, mais cela fait beaucoup de dossiers et, au bout du compte, cela prend beaucoup de temps.
Voilà le genre de choses que nous pourrions faire. Les petits ruisseaux font les grandes rivières, et c'est en coupant de petites minutes qu'on économisera des heures de procès.
Le sénateur Joyal : Je vais reprendre, monsieur Fenwick, là où vous en étiez rendu; je vais revenir en particulier à votre image du chariot plein de dossiers.
Je me demandais si nous sommes vraiment à jour, au chapitre de la technologie, dans l'administration de la justice et en particulier des dossiers criminels. J'ai l'impression que nous n'en sommes réellement encore qu'à ses balbutiements. Jusqu'ici, aucun des témoins que nous avons eu le privilège et le plaisir d'entendre n'a décrit à notre intention de quelle façon on pouvait envisager d'utiliser la technologie d'une manière comparable à ce qui se fait, nous le savons, dans d'autres sphères de l'administration ou de la fonction publique. Vous avez tous deux pratiqué le droit, pendant un certain temps, comme l'a mentionné mon collègue le sénateur Baker. Je suis certain que vous utilisez l'ordinateur, comme tout le monde le fait aujourd'hui, mais j'ai l'impression que l'appareil de la justice n'a pas encore fait tous les changements nécessaires pour s'adapter à l'utilisation de la technologie. Est-ce que j'exagère ou est-ce que ce que je vous dis est sensé?
M. Waby : Je ne crois pas que vous faisiez fausse route, car il est vrai que, à bien des égards, les tribunaux pénaux n'en sont pas nécessairement rendus là où nous voudrions qu'ils soient rendus. Tous les jours, il y a des gens qui se présentent devant un tribunal pénal les poches pleines de technologie — des téléphones cellulaires, même des tablettes — avec laquelle ils peuvent faire toutes sortes de choses. Il est compréhensible qu'ils trouvent frustrant de constater que les tribunaux pénaux utilisent un système moins efficace sur le plan technologique que les systèmes que nous utilisons à la maison.
Je crois qu'il est juste de dire que l'on reconnaît qu'il reste beaucoup à faire. En Ontario, nous avons adopté une approche selon laquelle nous mettons en place ou nous allons mettre en place toute une gamme de mesures. Dans certaines régions, le modèle conventionnel sur papier est désormais remplacé par le transfert électronique de documents. Les services de police communiquent leurs documents d'information plus rapidement, par voie électronique, et ces documents sont plus complets, ce qui représente une assez bonne amélioration, quand cela fonctionne, par rapport au système papier.
Nous travaillons à un projet de réception par voie électronique grâce auquel les renseignements seront transmis aux tribunaux par voie électronique plutôt que par les moyens traditionnels, le support papier; ainsi, plutôt que l'on doive affecter cinq personnes à enregistrer des données sur un formulaire, une personne sera en mesure de le faire à elle seule.
Avec nos collègues du ministère des Services correctionnels, nous allons bientôt amorcer, au printemps je l'espère, un projet pilote axé sur la technologie, qui permettra aux avocats de la défense de communiquer avec leurs clients à partir d'un ordinateur portable ou d'une tablette.
Je ne peux pas parler au nom des autres provinces, mais il est certain que, en Ontario, on est très bien au courant du fait que les comparutions en personne devant un tribunal ont très souvent pour objectif principal de donner la capacité à un avocat de communiquer avec son client. Les solutions ne peuvent être efficaces en vase clos, et les avocats n'auront pas la possibilité de parler à distance avec leur client. Vous pouvez prendre tous les moyens technologiques possibles, mais si un avocat doit parler à un client, il doit parler à son client. Je suis très satisfait de participer à un projet technologique qui donnera aux avocats cette possibilité, leur évitant de devoir convoquer un client ou de se rendre en prison pour le voir.
La Division des services aux tribunaux de l'Ontario mène un certain nombre d'initiatives dans le domaine technologique qui visent à nous faire entrer dans le XXIe siècle. Bien sûr, ces choses-là ne se font pas du jour au lendemain, mais ce projet qui vise à mettre en place les dispositifs technologiques appropriés le plus rapidement possible pour régler les questions, justement, dont vous venez de parler, suscite un très grand enthousiasme. Plus vite le projet sera terminé, plus vite nous allons réaliser qu'il augmente l'efficience et, à mon avis, plus vite nous aurons l'impression d'offrir les meilleurs services qui soient aux gens qui recourent à nos tribunaux pénaux.
Le sénateur Joyal : Ce qui me préoccupe, c'est la façon d'aborder tout cela de façon rationnelle, comme vous l'avez dit, pour entrer comme tout le monde dans le XXIe siècle. Vous savez comment les programmeurs travaillent : ils dissèquent les diverses opérations, essaient d'établir un lien, puis revoient le contexte et les connexions. Je ne peux pas vous expliquer comment cela fonctionne. Vous le savez probablement mieux que moi.
Avez-vous prévu de lancer un projet pilote dans le cadre duquel, par exemple, dans un district judiciaire donné, vous essaieriez d'intégrer la technologie de façon à obtenir des résultats concluants que vous pourriez ensuite appliquer à l'ensemble du système? Vous vous attendez peut-être à ce que le système complet change du jour au lendemain, car la nouvelle génération maîtrise très bien la technologie; je ne crois pas que cela va se passer ainsi, mais je peux me tromper.
Serait-il juste de dire que c'est là une façon d'envisager l'amélioration du système?
M. Waby : À mon avis, vous avez certainement raison, sénateur. C'est une bonne façon d'envisager les choses. Je crois que l'approche adoptée généralement en Ontario consiste à chercher pour chaque problème une solution technologique. Pour répondre à ce que M. Fenwick a dit plus tôt, il n'existe pas de solution technique passe-partout qui permettrait de résoudre tous les problèmes, mais, par exemple, au cours des 12 derniers mois, nous avons intégré la technologie afin de pouvoir tenir par vidéo des audiences sur la libération sous caution dans un certain nombre de régions de l'Ontario. Étant donné la topographie du nord de l'Ontario, il est évident que ce projet procurerait d'énormes avantages. De la même façon, dans la région de Toronto, le volume à lui seul se traduirait par d'importants avantages, si l'on pouvait traiter davantage de cas et de façon plus efficiente.
Nous avons examiné le déroulement du processus de libération sous caution et nous avons essayé de voir les choses par la lentille de la technologie. De manière générale, nous avons procédé étape par étape, comparution par comparution, enjeu par enjeu; nous avons ensuite cherché à répondre de la façon la plus satisfaisante possible aux questions suivantes : « Que pourrions-nous améliorer? Par quelle solution technologique pourrons-nous améliorer les choses, et pourrons-nous intégrer cette solution à nos autres tâches? »
J'espère que c'est là une approche productive; nous avons constaté, dans tout ce que nous avons fait ces derniers temps, que ces premiers pas sont encourageants.
Le sénateur McIntyre : Merci à vous deux de ces exposés. Ma question a pour point de départ la question du sénateur Joyal, qui se demandait si les nouvelles technologies permettraient de régler les retards qui affectent les tribunaux dans notre système de justice criminelle.
La semaine dernière, des représentants de l'Association du Barreau canadien ont comparu devant notre comité. Ils ont recommandé, si je me souviens bien, de moderniser la procédure des comparutions périodiques en créant un système en ligne où l'accusé et son avocat pourraient comparaître en ligne, sauf en cas d'un conflit qui nécessite une supervision judiciaire.
Quel est votre avis sur ces suggestions? Si vous êtes d'accord, quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer dans la mise en place d'un tel système?
M. Waby : Sénateur, je crois que cette proposition est intéressante. La technologie pose toujours quand même certains problèmes, étant donné qu'il n'existe pas de solution passe-partout. Pour certains des accusés qui doivent comparaître, je crois que l'obligation de comparaître au moyen de la technologie poserait de sérieuses difficultés et pourrait même se révéler un véritable défi. Il est évident que quand nous explorons des initiatives axées sur la technologie, nous devons en tenir compte. De manière générale, plus il sera possible de traiter des comparutions sans exiger la comparution en personne, mieux ce sera.
C'est la même chose quand il s'agit d'accusés qui ont des problèmes de santé mentale; dans leur cas, il n'est pas toujours recommandé de tenir une comparution par vidéo, peu importe la raison. La seule mise en garde que je ferais, c'est qu'il ne faut pas oublier que le principe qui sous-tend tout cela est important, mais il ne faut pas qu'il soit le seul fondement sur lequel on décide de changer le mode de comparution.
M. Fenwick : Je serais d'accord. J'ajouterais que, à mon avis, les progrès ont été plus importants à ce chapitre du côté des tribunaux civils.
La Colombie-Britannique vient de lancer un très intéressant mécanisme en ligne pour le règlement des différends, et la Saskatchewan s'y intéresse. Je crois que, si nous avons hésité davantage à envisager ces options pour le système criminel, c'est pour des préoccupations liées à la Charte et aux droits des accusés.
Mais pour répondre à votre question, je ne sais pas exactement ce que nous pourrions demander au gouvernement fédéral pour que cela puisse se faire, mais il est certain qu'il nous intéresserait d'examiner ce concept, comme a dit M. Waby. Je crois qu'un examen serait certainement justifié.
Le sénateur McIntyre : Évidemment, nous ne devons pas généraliser. Je comprends qu'il peut arriver qu'une personne ayant des problèmes de santé mentale, par exemple, ait besoin d'une évaluation psychiatrique, et que le verdict rendu est qu'elle n'est pas apte à subir son procès ou qu'elle n'est pas criminellement responsable en raison de ce trouble mental. Je comprends que cette situation puisse se produire.
La sénatrice Batters : Merci à tous d'être venus ici.
Monsieur Fenwick, c'est agréable de rencontrer une autre personne qui vient de la Saskatchewan. Merci d'avoir comparu aujourd'hui devant notre comité. J'ai deux ou trois questions à vous poser.
Lorsque je travaillais pour le ministère de la Justice, il y a quelques années, à titre de chef du personnel, je me souviens d'avoir entendu parler d'un projet de tribunal parallèle, qui devait être mis sur pied à Saskatoon. J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de ce projet particulier.
M. Fenwick : Cela existe, et pas seulement à Saskatoon. À Saskatoon, en fait, nous avons reconnu qu'il y avait bien des affaires qui passaient à travers les mailles du filet. C'est pourquoi, bien que les rôles des tribunaux soient bien remplis, nous nous retrouvions avec des salles d'audience vides. Nous avons conçu un système qui fonctionnait un peu comme celui des transporteurs aériens, j'imagine. Nous avons décidé de recourir à la surréservation, mais il n'est arrivé que rarement que nous ayons dû refuser du monde.
Donc, nous convoquions les parties à cinq affaires, même si nous n'avions que quatre salles du tribunal; pour le cas inhabituel où les parties aux cinq affaires se présentaient, nous nous arrangions. Pourtant, plutôt que d'avoir une ou deux salles d'audience vides, nous avons constaté que, par exemple, notre capacité avait augmenté de 20 p. 100.
J'ai un autre exemple de ce que nous avons fait récemment, et cela concerne certains tribunaux du nord de la province. Nous avons organisé des comparutions en parallèle avec l'aide d'avocats des services juridiques. Le problème auquel nous faisons face, c'est que nous passons une grande partie de la journée en ajournement, étant donné que la Couronne parle à ses témoins, et l'avocat de l'aide juridique à son client. Donc, plutôt que de n'avoir qu'un seul procureur et un seul avocat de l'aide juridique dans les salles d'audience du nord, nous y envoyons deux procureurs et deux avocats de l'aide juridique. Pendant qu'il y en a deux qui discutent avec leur client et leurs témoins, les deux autres sont dans la salle d'audience. C'est la même chose. Vous pourriez avoir tendance à réagir en disant que nous dédoublons le travail, mais en fait, nous avons constaté que le temps de comparution devant les tribunaux avait réduit plutôt que d'augmenter.
La sénatrice Batters : Je voulais que cela soit clair dans l'esprit de tous, car c'est une chose dont nous n'avions jamais entendu parler ici avant. Cela concerne en fait les procès qui ont bel et bien lieu, étant donné qu'un si grand nombre de procès sont annulés à la dernière minute, soit parce qu'il y a eu négociation de plaidoyer ou plaidoyer de culpabilité.
J'ai parlé de cette question avec quelques avocats criminalistes de la défense de l'Ontario, et c'était un concept tout à fait nouveau pour eux. De toute évidence, c'est une approche innovatrice qu'a adoptée la Saskatchewan, et je suis heureuse de savoir qu'elle donne de bons résultats.
Ma deuxième question concerne Statistique Canada. Des représentants ont comparu devant notre comité au début de notre étude. Nous avons appris que la Saskatchewan était l'une des très rares provinces — je crois que seuls le Québec et le Manitoba entrent dans cette catégorie — qui transmettent à Statistique Canada les données concernant les cours provinciales seulement, non pas celles qui concernent les cours supérieures. J'ai vu que vous y avez brièvement fait allusion. Je ne sais pas comment vous l'avez formulé exactement, mais voici ce qui est écrit dans votre mémoire :
La Saskatchewan ne dispose pas de renseignements provinciaux pour les Cours du Banc de la Reine sur le temps écoulé entre la première comparution et le jugement final, en raison de la complexité de ces affaires, mais celles-ci prennent généralement plus de temps. La Cour du Banc de la Reine en Saskatchewan entend moins de 10 p. 100 des affaires.
J'aimerais que vous nous expliquiez cela, car nous avons posé la question aux représentants de Statistique Canada, mais ils n'avaient pas de réponse. Pourquoi est-ce que la Saskatchewan ne transmet que les renseignements qui concernent les cours provinciales, non pas ceux des cours supérieures?
M. Fenwick : Malheureusement, c'est tout simplement que nous n'avons pas jusqu'ici recueilli les données des cours supérieures, mais nous commençons à le faire. J'ai le très grand plaisir de vous annoncer que, cet automne, nous allons avoir en ligne un nouveau système de collecte de données sur les tribunaux, qu'on appelle l'Integrated Justice Management System, qui remplace le système de TI utilisé depuis 30 ans par les tribunaux de notre province. Il est déjà fonctionnel aux deux tiers. Il combine des données sur le système correctionnel, les services de police et les tribunaux. Le dernier tiers concerne les tribunaux. Cet automne, il sera fonctionnel dans les tribunaux provinciaux, et nous espérons que la prochaine étape le verra fonctionnel à la Cour du Banc de la Reine.
J'espère que, d'ici un an ou deux, nous pourrons répondre à cette question que oui, nous avons ces données en main, mais jusqu'ici, notre système de TI ne nous donnait tout simplement pas la capacité de les recueillir.
La sénatrice Batters : Merci. J'apprécie l'aide que vous apportez à cette importante étude.
Le sénateur White : Merci à tous d'être ici.
Les quelques derniers témoins que nous avons entendus ont parlé des aspects sur lesquels nous devrions concentrer nos efforts. Je viens du milieu policier, et j'essaie de savoir pourquoi nous avons consacré nos efforts à certains domaines.
En Ontario, en 2009, nous avons mené une recherche qui a révélé que 25 p. 100 des affaires se concluaient par une absolution sous conditions, une absolution inconditionnelle ou une peine d'emprisonnement avec sursis; pourtant, en moyenne, il fallait neuf comparutions pour arriver à cette décision. Ce n'est pas sans ressembler à la situation en Saskatchewan; j'apprécie vos commentaires.
En réalité, nous renvoyons devant les tribunaux des affaires qu'ils n'ont pas à traiter. Nous n'avons plus le sens des proportions. La conduite avec facultés affaiblies, le vol à l'étalage ou la tentative de meurtre sont toutes des questions tranchées par un même juge.
Nos débats ont entre autres porté sur la question suivante : serait-il possible de regrouper dans les provinces certaines infractions pour lesquelles les services de police — comme cela se fait en Colombie-Britannique dans les cas de la conduite avec facultés affaiblies — pourraient décider de ce qu'il convient de recommander, la déjudiciarisation, une peine à la discrétion des services policiers ou une contravention? Prenez par exemple les accusations pour vol à l'étalage en application des lois provinciales de la Saskatchewan, plutôt que de renvoyer l'affaire devant un tribunal pénal pour que, neuf comparutions plus tard, il soit décidé d'accorder une peine d'emprisonnement avec sursis ou une absolution sous conditions.
Au sujet de la Saskatchewan, avez-vous étudié les solutions de rechange à la mise en place d'un système plus imposant pour traiter des affaires, quand vous savez qu'au moins 25 p. 100 d'entre elles ne devraient pas être traitées dans le système, dès le départ?
M. Fenwick : Nous ne les avons pas encore étudiés de très près, non, mais les commentaires que j'ai formulés plus tôt au sujet de la déjudiciarisation avant la mise en accusation portaient exactement sur cet aspect. Dans un très grand nombre de cas, il s'agit d'affaires qui pourraient aboutir à une absolution inconditionnelle; il s'agirait donc d'un premier pas.
Nous suivons de très près ce que la Colombie-Britannique a fait dans le dossier de la conduite avec facultés affaiblies. Nous n'avons pas encore discuté de la question de savoir s'il conviendrait de créer un tribunal administratif qui s'occuperait des infractions criminelles mineures. Je ne voudrais pas donner un avis touchant la constitutionnalité de cette proposition.
Pour répondre à votre question, non, nous n'avons pas étudié cela.
Le sénateur White : J'ai une deuxième question, sauf si M. Waby veut lui aussi répondre.
M. Waby : Sénateur, je crois que le principe qui veut que nous nous assurions que seuls des particuliers fassent affaire avec le système des tribunaux, qu'il s'agisse de jeunes ou d'adultes, est un bon principe. Des outils qui permettraient aux services de police d'exercer un pouvoir discrétionnaire approprié de façon à tenir à l'écart du système ordinaire des tribunaux les personnes qui n'ont pas à y être constituent une solution judicieuse et prudente.
Étant donné votre expérience, je suis certain que vous ne savez que trop bien que l'issue possible d'un procès et la peine qui sera imposée tiennent à toutes sortes de facteurs, et que bon nombre de ces facteurs ne sont pas toujours accessibles ou connus avant le jour du procès.
Toutefois, les chiffres que vous avez donnés font vraiment valoir le fait que les comparutions devraient toujours avoir un sens. Si on peut obtenir un résultat après cinq comparutions, il est inutile qu'il y en ait neuf.
Le sénateur White : J'ai une seconde question touchant la détention provisoire. Je sais que c'est un problème en Ontario. Nous avons un centre de détention provisoire ici, à Ottawa. Il est probable que les deux tiers des personnes incarcérées dans l'établissement du chemin Innis se trouvent en détention provisoire, ce qui signifie qu'ils n'ont aucune condition à respecter, ni aucun programme à suivre et qu'ils n'ont pas non plus droit à une aide puisque, dans bien des cas, ils ont un problème de toxicomanie ou de santé mentale.
J'ai appris que la Nouvelle-Écosse avait approuvé, cette semaine, un système de contrôle électronique pour la détention provisoire, ce qui constitue donc une solution de compromis entre la détention provisoire et le contrôle électronique proprement dit.
Est-ce que l'une des provinces que vous représentez a envisagé d'adopter le contrôle électronique comme mesure de compromis pour les gens qui ne peuvent pas être libérés sous caution?
M. Fenwick : Il en a été question, je crois, dans nos discussions sur notre projet relatif à la détention provisoire. À mon avis, c'est un exemple absolument parfait d'une solution qui nous permettrait de mieux prendre en charge les cas de détention provisoire de courte durée.
Si mon collègue Dale McPhee, sous-ministre de la Justice responsable des services correctionnels et des services policiers, était présent, il pourrait vous donner des chiffres beaucoup plus exacts que je ne le puis. Je crois que le nombre des cas de détention provisoire est moins élevé qu'en Ontario. Je crois qu'en Ontario, cela représente les deux tiers et, de notre côté, environ la moitié.
Ce qui me préoccupe davantage, c'est le fait que, dans plus de la moitié des cas, la détention provisoire dure au plus 13 jours et que, pour la moitié, elle dure six jours ou moins. Ma question est donc la suivante : s'il est possible de libérer une personne en toute sécurité trois ou quatre jours en moyenne après son arrestation, que s'est-il passé pendant ce temps? Je crois que c'est un très bon exemple des cas où le contrôle électronique est une solution appropriée.
À l'aide de quelques dispositifs comme celui-là, il semble que nous pourrions réduire de manière importante le nombre des cas de détention provisoire, peut-être environ 25 p. 100. Cela vaut vraiment la peine d'étudier la question.
Est-ce que nous en parlons? Oui, nous en parlons. Cela fait partie du partenariat auquel nous travaillons, à l'heure actuelle, avec l'Ontario. Nous travaillons pour trouver des solutions de ce genre.
M. Waby : En particulier, sénateur, je dois participer dans environ deux semaines à une réunion sur cette question même. On a récemment présenté cela comme un aspect à explorer. Nous aimerions beaucoup explorer son potentiel. Je crois que tous les membres du comité ont vu son potentiel.
Votre question arrive à point, si on parle des « horaires de réunion », puisque cette question a été soulevée la semaine dernière pour la première fois. J'ai une première rencontre à ce sujet la semaine prochaine, et nous verrons où cela pourrait nous mener.
Comme l'a dit M. Fenwick, nous nous occupons aussi de toutes sortes d'autres initiatives, y compris de concert avec nos collègues de la Saskatchewan, sur l'initiative commune de détention provisoire, et je suis convaincu que cette initiative, elle aussi, sera profitable.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je vous remercie, monsieur Waby et madame Falkowski. Je m'excuse de mon retard. J'ai dû quitter la salle tantôt.
J'aimerais vous amener sur une autre piste de réflexion et examiner le système plus en amont. On fonctionne beaucoup plus en aval. Le système de justice est un peu comme un chien qui court après sa queue. On ajoute des ressources, puis les retards augmentent, et ainsi de suite.
J'ai fait une comparaison entre le taux de récidive par région et les délais des tribunaux. Dans ce tableau-ci, ce sont les délais des tribunaux, et là, ce sont les taux de récidive. Les deux se correspondent. Lorsqu'on examine le taux de récidive dans une province comme le Québec, qui est de 50 p. 100, on remarque que c'est là où les délais sont les plus longs. Or, lorsqu'on regarde d'autres provinces où le taux de récidive est plus bas, les délais des tribunaux sont les plus courts.
J'ai l'impression que nous travaillons comme un concessionnaire automobile. Nous mettons plus d'argent à réparer les véhicules qu'à les vendre. Nous travaillons constamment en aval plutôt qu'en amont. À titre d'exemple, au Québec, le nombre moyen de séjours par personne dans une prison provinciale est de huit séjours. N'y a-t-il pas de lien entre la récidive et l'engorgement de nos tribunaux?
De plus, n'y a-t-il pas de lien entre la non-performance de nos programmes de réhabilitation et les délais des tribunaux? Si nous réussissions à réduire le taux de récidive de 50 p. 100, les délais des tribunaux seraient-ils plus courts, puisque les accusés ne seraient plus des portes tournantes dans le système?
[Traduction]
M. Waby : Sénateur, je pense que toute personne saine d'esprit ayant toutes ses facultés serait d'accord avec la notion selon laquelle il vaut mieux prévenir que guérir. Selon moi, il faut reconnaître qu'il vaut bien mieux utiliser toutes les ressources à notre disposition pour empêcher une personne d'entrer dans le système de justice pénale ou d'y retourner. J'appuierais de tout cœur tout travail qui puisse être effectué de façon productive afin d'empêcher les personnes qui ont déjà commis une infraction de récidiver et de retourner dans le système, et cela ne pourrait être qu'une bonne chose.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : N'y aurait-il pas lieu de mener une réflexion à la fois sur l'engorgement de nos tribunaux et sur la performance de notre système lorsqu'il s'agit de réintégrer des délinquants dans la société?
Le taux de récidive chez les jeunes de 18 à 30 ans est de 70 p. 100. Ils nourrissent le système en allant et en revenant. Ce sont les victimes qui en souffrent. Elles n'ont pas choisi d'entrer dans le système pénal. Les criminels, eux, l'ont choisi. Donc, si nous menons une étude uniquement sur les ressources ou les systèmes informatiques, sans examiner en amont la performance de nos systèmes carcéraux, dans 10 ans, ne croyez-vous pas que nous nous retrouverons à la case départ?
[Traduction]
M. Waby : Je pense que nous devons procéder à un examen critique de tous les services que nous fournissons. Du point de vue de l'Ontario, je sais que deux nouvelles installations correctionnelles ont été inaugurées assez récemment. Il s'agit du Centre de détention du Sud de Toronto et du Centre de détention du Sud-Ouest, à Windsor. Le modèle correctionnel sur lequel ces centres sont fondés accorde la priorité aux programmes, à l'éducation et à la formation. Il est particulièrement adapté à la population en détention provisoire — alors que certains délinquants pourraient avoir besoin de participer à un programme à long terme exigé par une ordonnance de probation ou par une peine d'emprisonnement, le programme de détention provisoire offert dans ces deux installations est conçu pour être mieux adapté aux besoins d'un détenu en détention provisoire à court terme.
Selon moi, l'une des raisons pour lesquelles nous nous soucions tellement, en Ontario, de nous assurer que seules les personnes qui doivent se présenter physiquement dans une salle d'audience le font, c'est que, outre les avantages financiers et les avantages liés à la logistique, à la dotation et aux horaires, nous avons la perception — légitime, selon moi — des avantages très humains liés au fait qu'une personne ne soit pas retirée d'un programme qui pourrait être avantageux pour elle et l'empêcher d'emprunter précisément la voie que vous avez évoquée.
Dans l'ensemble du secteur de la justice, on reconnaît de plus en plus l'importance du phénomène que vous avez décrit. Je sais que la nouvelle structure correctionnelle qui a été mise en place suscite beaucoup d'intérêt, de même que les avantages qui, nous l'espérons, en découleront. Toutefois, je pense que toute étude et recherche sur cette question ne pourrait être que la bienvenue.
Le président : J'ai écouté les questions posées par le sénateur Joyal au sujet de la technologie. Je suppose que je suis un peu pessimiste. Je me souviens d'avoir abordé cette question il y a 25 ans lorsque j'étais député à l'Assemblée législative de l'Ontario. Nous avions investi des millions de dollars dans un programme appelé « Projet d'intégration du système judiciaire », mais il a frappé un mur à un moment donné.
Je sourcille un peu, monsieur Waby, lorsque vous dites que la question de la surveillance électronique a été soulevée pour la première fois auprès de votre ministère il y a deux ou trois semaines. Je sais que nous en parlions il y a 12 ou 13 ans au ministère du Solliciteur général.
Je pense que M. Fenwick voulait formuler certains commentaires sur la question de la technologie lorsque je l'ai interrompu, plus tôt.
M. Fenwick : Ça va. Allez-y.
Le président : Monsieur Waby, pour répondre au sénateur Baker qui citait des exemples de décisions rendues au titre de l'alinéa 11b), avez-vous une analyse portant sur un cas précis où une décision a été rendue au titre de l'alinéa 11b)? Vous avez dit que vous ne connaissiez pas les détails.
M. Waby : Je ne connais ni les cas particuliers mentionnés par le sénateur Baker, ni les jugements et ce qui les sous- tendait. Compte tenu de la façon éloquente dont il les a utilisées, je présume que ces affaires ont fini par être rejetées pour retard déraisonnable.
Puisque c'est le cas, je ne pense pas que je pourrais faire mieux que répéter les commentaires que j'ai formulés précédemment au sujet des préoccupations du ministère à l'égard de toute affaire.
Le président : Procédez-vous à une analyse des raisons pour lesquelles cette décision au titre de l'alinéa 11b) a été rendue?
M. Waby : Je crois comprendre que le ministère recueille en quelque sorte les décisions qui sont liées à l'alinéa 11b), surtout parce qu'elles sont une grande source de préoccupation. Je crois que les procureurs de la Couronne doivent respecter une exigence redditionnelle selon laquelle ils doivent aviser leurs gestionnaires dans les cas où ils ont plaidé une cause qui a été rejetée au titre de l'alinéa 11b).
Le président : Y a-t-il un moyen pour vous de communiquer cette information?
M. Waby : Je serais certainement heureux d'étudier cette possibilité, monsieur le président. Je suis convaincu que nous possédons ces données. Je n'en ai apporté aucune aujourd'hui, mais je sais qu'il s'agit d'un travail continu de la part du comité, et je serai heureux de faire part de cette demande au ministère.
Le président : Nous avons accueilli des représentants de l'Association du Barreau canadien la semaine dernière, plus précisément M. Ian Carter, qui a formulé une proposition. Il a affirmé qu'elle changerait la donne. Selon lui, aucune mesure portant à conséquence ne ressort d'un tribunal où une décision doit être rendue. Il laisse entendre que tout se passe à l'extérieur des tribunaux, même s'il y a des gens qui se présentent sans être prêts et qui demandent un autre ajournement.
Il a mentionné une salle d'audience à Ottawa qui est utilisée cinq jours par semaine pour des comparutions courantes et — je le cite — « il ne se passe rien qui porte à conséquence ». Il proposait que nous envisagions de passer à un système qui se rapproche du système civil. Il a laissé entendre que la plupart des comparutions qui ont lieu à Ottawa sont complètement inutiles. Il a ajouté que cet aspect pouvait être corrigé par le gouvernement fédéral s'il apportait des modifications mineures au Code criminel. Malheureusement, il ne nous a pas dit de quelles modifications il s'agissait, mais j'aimerais savoir si l'un d'entre vous veut réagir à cette recommandation.
M. Fenwick : Je serais ravi d'intervenir à ce sujet.
Je ne sais pas non plus précisément quelles modifications seraient apportées au code, mais je pense qu'il s'agit certainement d'une proposition qui mérite d'être prise en considération, pas seulement pour l'efficience des tribunaux. Parmi les lettres que je reçois sur mon bureau, certaines des plus tristes provenaient de membres de la famille de victimes. J'en ai deux qui me viennent à l'esprit et qui sont encore sur mon bureau — une plainte au sujet de 18 comparutions devant les tribunaux, et une plainte au sujet de 22, avant que quelque chose finisse par être réglé. Dans les deux cas, l'accusé a fini par plaider coupable.
Je pense que si nous disposions d'un mécanisme comme celui que vous décrivez ou celui que M. Carter a décrit, où les affaires courantes pourraient être réglées sans comparution devant un tribunal — par vidéo ou par un autre moyen —, l'une des choses qui nous seraient utiles serait un dossier électronique qui permettrait aux membres de la famille ou aux victimes d'ouvrir une session et de dire : « Eh bien, je n'ai pas à me présenter devant le tribunal aujourd'hui, parce que cette affaire va tout simplement être ajournée. »
Alors je pense que ce mécanisme présenterait des avantages que nous ne devrions pas perdre de vue pour les familles et les victimes, de même que pour le système judiciaire. Je suis tout à fait d'avis que cette proposition mérite un examen approfondi.
Voilà qui pourrait être mon commentaire en réponse à l'invitation que vous m'avez lancée auparavant. On m'a laissé entendre — je n'appuie pas nécessairement cette hypothèse — que le mieux que nous puissions faire en ce qui a trait à l'intégration de la TI dans le système judiciaire, c'est faire venir une classe d'une école secondaire et demander aux élèves d'examiner le système, les jeunes qui ont affaire avec la technologie tous les jours. On leur demanderait de s'asseoir et d'observer pendant deux ou trois jours, puis de nous dire comment nous pourrions utiliser la technologie. Nous pourrions obtenir de très bonnes réponses.
En tant qu'avocats et en tant que système judiciaire, nous pouvons être accusés de nombreuses choses, mais le fait d'accepter le changement de façon trop hâtive ne fait pas partie des critiques dont nous sommes coupables.
Le président : Nous disposons d'environ 15 minutes pour une deuxième série de questions, et nous avons d'autres affaires à aborder ce soir.
Le sénateur Baker : J'essaierai d'être bref.
Monsieur Fenwick, vous nous avez laissé entendre que le système de divulgation pourrait être accéléré, que les renseignements sont tout simplement retenus et que la divulgation proactive aiderait les choses. Quand vous avez dit cela, j'ai pensé à l'affaire pénale typique, un avocat de la défense qui présente une demande afin de rendre publics des mandats, des dénonciations en vue de l'obtention faites sous serment. Les tribunaux ne refusent jamais les demandes d'avocats qui veulent des dénonciations sous serment en vue de l'obtention sur un dispositif d'écoute, par exemple, ou toute autre affaire pertinente par rapport au procès; pourtant, la disposition du code prévoit qu'on doit présenter une demande au tribunal, qui doit rendre une décision. C'est toujours fait. Vous dites : « Pourquoi ne pas présenter cette demande à l'avance, l'étayer, l'étudier en détail et faire en sorte qu'elle soit prête à remettre à la défense? »
Ça serait très utile, monsieur Fenwick. Il s'agit d'une excellente suggestion. Nous aurions un article du Code criminel à modifier.
Qu'en est-il des affaires préalables au procès, même des affaires de caution que vous avez mentionnées, qui n'ont pas trait à l'innocence ou à la culpabilité de l'accusé, mais qui peuvent être réglées par une personne qui n'est pas saisie de l'affaire, pas par le juge du procès?
Selon le Code criminel, le terme « juge de paix » désigne un juge de paix ou un juge de la cour provinciale. Ainsi, un juge de paix est habilité à faire beaucoup de choses sous le régime du Code criminel. La plupart des provinces n'ont pas la permission de le faire. Elles ne peuvent pas délivrer de mandat dans l'Est, mais je crois savoir qu'il existe en Ontario un système permettant à un juge de paix d'en délivrer un.
Le système judiciaire fédéral a une procédure relative à ce qu'on appelle des protonotaires, qui remplacent les juges dans les affaires préalables au procès. Les demandes de divulgation, et ainsi de suite, peuvent être plaidées sans l'intervention d'un juge. Ce sont des avocats expérimentés.
Quelles sont vos réflexions à ce sujet, en ce qui concerne le fait de libérer nos tribunaux et nos juges? Cela permettrait-il d'éliminer un système de conflit, disons, du fait que des juges instruisent des affaires préalables au procès au lieu du procès? Que diriez-vous si nous proposions un système permettant de libérer nos juges qui serait semblable à celui des protonotaires de la Cour fédérale pour trancher les affaires préalables aux procès?
M. Fenwick : Ma réponse à cette question sera très rapide et concise, car je ne m'y connais pas beaucoup dans ce domaine. Je n'arrive pas à trouver d'objections solides à cette proposition.
J'ajouterais toutefois un élément. J'irais plus loin que le fait de dire qu'il s'agit d'une conférence de gestion avant le procès. Du côté civil, en Saskatchewan, l'une des choses que nous encourageons, c'est une plus grande utilisation des règles de procédure qui permettent la tenue de conférences postérieures aux plaidoiries plutôt qu'une conférence préalable au procès.
Voici ma suggestion : devrions-nous étudier un système semblable dans le cas des affaires pénales? Qu'il s'agisse d'un juge ou d'un autre responsable, n'attendons pas que ce soit préalable au procès : tenons plutôt les conférences après les plaidoiries pour en régler le plus que nous pouvons à l'étape la plus précoce possible. Je pense qu'il y a un lien entre ces systèmes.
M. Waby : Sénateur, je dirais — je serai le plus bref possible — que, du point de vue de l'Ontario, nous voulons nous assurer — comme toutes les provinces, j'en suis sûr — que le travail que font les fonctionnaires judiciaires est important et qu'ils n'accomplissent pas de tâches inutiles. Cela revient aux thèmes que nous avons abordés en partie : nous assurer que les gens ne comparaissent pas inutilement dans les salles d'audience et qu'il n'y a pas de comparutions inutiles, un point c'est tout.
Je pense que, compte tenu de tous les avantages que nous observons, en Ontario, relativement au fait que les juges de paix peuvent participer à un éventail assez vaste de processus préalables au procès, qui ne visent pas à déterminer la culpabilité, cela fonctionne très bien pour nous à de nombreux égards.
Encore une fois, je n'irai pas dans les détails parce que je ne connais pas bien le système que vous avez mentionné, mais j'ai des réserves, une petite voix dans ma tête qui m'envoie un avertissement simplement parce que je pense qu'un certain nombre de comparutions profitent de l'intervention judiciaire, puisqu'il s'agit d'une intervention judiciaire. La présence d'un juge et le fait qu'il rende une décision particulière peut apaiser l'esprit des gens plus que ce pourrait être le cas s'il s'agissait d'une comparution administrative.
Le sénateur White : Je veux aborder brièvement le point de vue de la police, car nous tenons souvent des discussions au sujet des policiers qui portent ces affaires devant les tribunaux. De fait, j'ai parlé à des chefs, aujourd'hui. La vérité, c'est que la grande majorité des policiers du pays assumeraient la responsabilité de détourner la déjudiciarisation avant la mise en accusation, en particulier, bien plus que la déjudiciarisation après la mise en accusation afin d'envoyer les bonnes personnes devant les tribunaux, et je pense que le système le permet.
Je pense que la crainte est liée à la possibilité que la police oppose une résistance. Lors des rencontres pour la réforme de la justice tenues au pays en 2009, en 2010 et en 2011, j'ai vu les hauts dirigeants de la police, et ils ont tous dit la même chose : « Accordez-nous le pouvoir de tenter de trouver un système qui envoie les bonnes personnes devant les tribunaux, et je pense que vous obtiendrez leur appui. »
La semaine dernière, nous avons entendu une personne dire que la solution consistait à augmenter le nombre de juges, de procureurs de la Couronne, d'avocats de la défense et de tribunaux, et je peux vous dire d'emblée qu'il ne s'agit absolument pas de la solution qui permettra de régler ce problème. De fait, rien ne pourrait être pire, de mon point de vue, que de renforcer un système qui envoie les mauvaises personnes devant les tribunaux pour neuf comparutions à la fois. Êtes-vous d'accord?
M. Waby : La réponse courte, sénateur, serait « oui », qu'il n'est pas souhaitable du point de vue de quiconque de faire entrer dans le système plus de gens qui n'ont pas besoin d'y être.
Le sénateur Joyal : Monsieur Waby, compte tenu de vos antécédents et du fait que vous avez reçu une formation dans la mère patrie, comme nous disions à un autre siècle, y a-t-il des leçons que nous pourrions tirer des pratiques exemplaires liées à votre expérience du droit pénal dans un autre pays?
M. Waby : Je sais que nous passons pas mal de temps à examiner d'autres administrations pour voir quelles leçons nous pouvons en tirer. Je pense qu'il y a une distinction à faire entre le respect des cultures et des systèmes judiciaires en place dans une administration particulière qui pourrait être unique à cette administration et le fait d'en tirer les bonnes idées et ce qui est transférable.
La traçabilité électronique, qui a été mentionnée, pour ce qui est de faciliter une libération sous caution, pourrait être quelque chose de nouveau pour moi, dans mon rôle actuel. Et en ce qui concerne le commentaire formulé plus tôt par le président, je suis certain que ça n'est pas nouveau pour lui ni pour le ministère du Procureur général, mais c'est intéressant et il s'agit d'une pratique assez bien établie au Royaume-Uni.
Au Canada, la Charte apporte une dimension qui rend difficiles à mettre en œuvre certaines idées qui pourraient être très saines. Très souvent, ce qui semble être une bonne idée sur papier dans une autre administration pourrait tout simplement être impossible à mettre en œuvre. Ensuite, le défi consiste à nous assurer que nous pouvons tirer le meilleur parti des autres systèmes et mettre ces idées en œuvre à notre façon. Tout comme nous pouvons enseigner aux autres administrations, nous reconnaissons que nous sommes capables d'en tirer des leçons également.
Le sénateur Joyal : Merci.
Le sénateur McIntyre : Lorsque le gouvernement fédéral modifie le Code criminel ou adopte une nouvelle loi sur des affaires pénales, il prépare habituellement des manuels ou des outils qui sont distribués aux provinces. Dans quelle mesure ces outils et manuels sont-ils utiles? Existe-t-il d'autres ressources ou formes de soutien du gouvernement fédéral qui sont utiles pour les provinces?
M. Fenwick : Oui, ils sont utiles, et ils ne sont pas préparés en vase clos. La plupart d'entre eux sont préparés à la suite d'une collaboration entre les hauts responsables des provinces et des territoires et le gouvernement fédéral. Certains échanges ont lieu, et les provinces donnent des conseils relativement à ce qui serait utile. « Oui » est la réponse à cette question.
Existe-t-il d'autres ressources? D'autres types d'informations, qui découlent en grande partie du travail effectué conjointement à l'échelon des responsables, sont aussi utiles. Certes, les organes de planification stratégique de la plupart de nos gouvernements qui travaillent à l'échelon des responsables peuvent ensuite fournir des documents à notre section des poursuites, par exemple à la suite de ces conversations, et c'est également utile.
Le président : Je pense que cela clôt le débat. Je veux vous remercier tous de nous avoir accordé votre temps, mais, surtout, de la contribution informative et utile que vous avez apportée à nos séances. Nous l'apprécions beaucoup.
Chers sénateurs, vous avez tous reçu une proposition de budget. Elle a été analysée en détail par le comité directeur. Ce qui est proposé, ce sont deux voyages d'une journée, les vendredis 15 et 22 avril, puis un voyage de trois à quatre jours à Vancouver, à Calgary et à Saskatoon les 2 et 4 mai, pendant que siégera le Sénat. Les deux whips nous ont demandé d'effectuer les voyages durant cette semaine de séances, alors nous n'aurons pas de problème à cet égard.
Le sénateur Plett a encore une fois soulevé la question du besoin de visiter Calgary, alors je devrais ouvrir une discussion à ce sujet. Le sénateur Boisvenu a parlé de deux jours à Montréal.
Sénateur Boisvenu, nous estimions que nous devrions étudier la possibilité d'une séance prolongée à Montréal, d'ajouter des heures, afin de tenter de nous assurer que les personnes qui, comme le sénateur Dagenais ou vous-même l'estimez, devraient avoir la possibilité de se présenter auront cette possibilité.
Je lance la discussion à ce sujet.
La sénatrice Fraser : Je suis un peu confuse. Vous dites qu'il y aura deux voyages d'une journée, les 15 et 22 avril. Ces deux voyages seront-ils à Montréal?
Le président : Un à Montréal, et l'autre à Toronto, désolé.
La sénatrice Fraser : Un à Toronto, d'accord.
Le sénateur Joyal : Ce sont des vendredis?
La sénatrice Fraser : Ces voyages auront lieu le vendredi.
Je ne peux prendre part à aucun voyage pendant que le Sénat siège. Mes autres obligations m'en empêchent.
Quant au budget pour Montréal, vous pouvez retirer une des chambres d'hôtel. Je préfère dormir dans mon propre lit que dans une chambre d'hôtel, et le sénateur Boisvenu est du même avis.
Le sénateur Joyal : Même chose pour moi.
Le sénateur Dagenais : Même chose pour moi.
Jessica Richardson, greffière du comité : Alors, retirons-en quatre. Nous pouvons certainement faire cela. C'est la norme que de simplement établir le budget pour les 12 sénateurs, mais il s'agit d'une modification facile à apporter, et nous pourrons rajuster les chiffres en conséquence.
Le président : Madame la sénatrice Fraser, avez-vous autre chose à dire à ce sujet?
La sénatrice Fraser : Je ne pense pas, non.
Le président : Sénateur Joyal?
Le sénateur Joyal : Même chose pour les taxis; certainement pas pour moi. Quel que soit le moyen de transport, je serai déjà là, alors je n'en aurai pas besoin.
Le président : Y a-t-il quelqu'un qui partage la préoccupation du sénateur Plett au sujet d'aller à Calgary? Je la partageais au départ, car il nous avait été indiqué que des représentants de l'Alberta allaient comparaître devant nous. Maintenant, il s'agit au mieux d'une hypothèse.
La sénatrice Fraser : Quel genre de gens seront présents à ces séances? Je ne demande pas des noms.
Le président : C'est une bonne question. Je vais laisser notre greffière y répondre.
Mme Richardson : Les sénatrices Jaffer et Batters avaient beaucoup d'idées à propos du fait d'entendre le point de vue des gens de la localité que, pensaient-elles, nous ne pourrions faire venir à Ottawa. Elles voulaient également mener un sondage sur le terrain et rencontrer les gens. Elles estimaient que nous ne pourrions pas y arriver sans faire venir les gens à Ottawa.
Le président : Elles proposaient des déplacements sur le terrain, le matin, puis la tenue de séances, dans l'après-midi.
Le sénateur Baker : Des déplacements sur le terrain?
Le président : Aller voir des tribunaux spécialisés et ce genre de choses. Cela n'a pas encore été précisé, sénateur Baker.
Le sénateur Joyal : Pourrais-je vous parler en toute franchise...?
Le sénateur Baker : La séance est-elle télévisée?
Mme Richardson : Elle est publique, mais pas télévisée. Les budgets doivent être adoptés en public.
Le sénateur Joyal : Je ne m'oppose pas à l'idée du sondage, mais je veux savoir ce que nous étudions. Qui sont les groupes cibles dont nous voudrions connaître l'avis? Nous ne voulons pas arriver à Montréal et dire : « Nous sommes à cet endroit. Pouvez-vous venir et nous dire ce que vous pensez? » Il faut que ça soit utile à notre étude.
Je comprendrais si des groupes ou des services avaient été désignés comme étant d'une utilité possible pour nous. J'ai proposé l'ancien juge en chef de la Cour supérieure, qui a pris sa retraite en juin dernier. Il a été juge en chef pendant 12 ans. À son départ, il a fait des déclarations publiques relativement aux retards. À mon avis, il s'agit certainement d'une personne qui sait vraiment comment le système fonctionne et où est le sable dans l'engrenage. Nous l'avons vu dans les statistiques.
Cette personne se sentirait libre de parler parce qu'elle n'est plus juge, et elle accepterait certainement l'invitation à témoigner. Mais nous n'avons pas besoin d'aller à Montréal pour cela. L'ex-juge en chef a mentionné qu'il serait prêt à venir ici. Cela coûtera beaucoup moins cher si nous payons son voyage jusqu'ici que de payer le voyage jusque là pour 10 d'entre nous. Ça n'est qu'un exemple.
Le président : Je suis d'accord. Nous ne voulons pas mener un genre d'opération à l'aveuglette. Vous vous souviendrez de la discussion tenue la semaine dernière lorsque la question...
Le sénateur Joyal : Je m'excuse. Je n'étais pas là.
Le président : La question des voyages a été abordée. Je pense que j'étais peut-être le seul participant réticent. Il est clair que l'avantage d'effectuer ces voyages doit nous être expliqué. Je pense que beaucoup de travail devra être effectué d'ici une semaine ou deux afin de préciser leur bien-fondé et de l'expliquer aux membres afin que nous puissions obtenir vos réponses.
Dans l'intervalle, si vous avez des suggestions d'endroits particuliers à visiter, faites-en part à la greffière dès que possible afin que nous puissions fournir des détails précis.
Le sénateur Baker : C'est frustrant quand vous évoquez le sujet des protonotaires, par exemple. Il faut vraiment connaître une personne qui sait comment ce système fonctionne. Si vous parlez du système de publication des mandats comme d'une perte de temps, vous avez besoin d'une personne qui a de l'expérience dans ce domaine particulier.
Il y a trois associations. L'Association du Barreau canadien représente la Couronne, la défense, les juges et ainsi de suite. Nous avons l'Association canadienne des juristes de l'État. Nous avons communiqué avec ses représentants auparavant, monsieur le président. Nous avons l'Association canadienne des avocats de la défense. Je parle de la grande organisation nationale.
Même dans le cas de l'Association du Barreau canadien, cette association a des présidents dans chacune des provinces. Elle a un président pénal. Elle comprend un groupe de droit pénal qui intervient directement.
Je voudrais que comparaissent devant le comité des membres de l'Association canadienne des juristes de l'État et de l'Association du Barreau canadien qui savent précisément de quoi nous parlons lorsque nous évoquons quelque chose qui se passe dans le cadre d'un procès. Ils ont une connaissance de première main du système. Seules les personnes qui exercent connaissent certaines de ces choses, tout comme la police. Dans sept provinces du Canada — à notre connaissance —, la police porte les accusations. Puis, c'est le tour de la Couronne. Nous devrions vraiment entendre directement les policiers nous faire part de leur expérience pratique.
Par ailleurs, les règles sont différentes dans chaque province. C'est mon problème. Nous avons les règles de procédure dont nous discutons. Dans certains cas, ces règles ralentissent les choses, et elles sont différentes dans pratiquement toutes les provinces.
Si nous pouvions recevoir les intervenants de première ligne, les représentants des agents de police, les avocats de la Couronne et de la défense appartenant à ces organisations — parce qu'ils sont identifiés, dans chaque grande ville —, ça serait vraiment utile.
Le sénateur Joyal : Pendant que le sénateur Baker effectuait son intervention, je pensais à autre chose. Nous pourrions certainement entendre l'avis de l'ex-juge en chef de la Cour d'appel, Michel Robert, sur cette question. Il se trouve que je siège au conseil d'une fondation et que l'une des choses que nous revoyons est l'engorgement dans les palais de justice à Montréal. Il est le président de la fondation, et il possède une expérience très approfondie et pratique du système et de son engorgement. Si nous l'invitions, il viendrait. Il est maintenant à la retraite et avocat dans un cabinet juridique. Je suis certain qu'il s'organisera afin d'être disponible pour venir.
Si nous invitons l'ancien juge en chef François Rolland et l'ex-juge en chef Robert, nous obtiendrons de très bons commentaires relativement à ces responsabilités dans l'administration quotidienne de la justice. Ils sont disponibles. Ils s'organiseraient pour l'être afin de venir ici.
Le président : J'imagine qu'ils préféreraient se présenter à la Cité parlementaire plutôt que dans un hôtel de Montréal.
Le sénateur Joyal : Oui. C'est télévisé, et la presse pourrait le récupérer si elle le voulait.
Le sénateur White : Combien le sénateur Runciman vous a-t-il payé pour que vous veniez aujourd'hui?
Le sénateur Joyal : Je jure de dire toute la vérité. Nous n'avons pas du tout parlé de ce sujet.
Le président : Nous allons essayer d'organiser cette séance. Cela ne veut pas dire que nous ne pourrons pas nous rétracter si le voyage n'en vaut pas la peine, selon le genre de réponses que nous obtiendrons et les commentaires des membres à la table. Nous ferons cette évaluation dans quelques semaines.
Le sénateur White : Par vidéoconférence.
Le président : Certainement.
Le sénateur Baker : Bien sûr, je suis d'accord avec cela.
Le président : Je devrais mentionner la générosité du sénateur White, qui a proposé d'inclure un voyage à Halifax. Il a accepté que nous tranchions cette question par vidéoconférence.
Le sénateur Baker : Et Terre-Neuve, par vidéoconférence.
La sénatrice Fraser : Je suis septique à propos du besoin de voyager, mais s'il y a des connaissances que nous pourrions tirer de la visite d'un tribunal ou du témoignage d'autres personnes que les avocats qui utilisent les tribunaux, il y a des tribunaux dans cette ville. Je me rappelle que, dans le passé, nous avions loué un autobus pour une journée. Nous pourrions le refaire.
Le président : Nous avons entendu parler d'un autobus qui est branché tous les jours aux affaires courantes ordinaires.
En tant que membre du comité, je ne suis pas certain de ce que vous proposez. Vous n'êtes pas enthousiaste à l'idée de voyager.
La sénatrice Fraser : C'est tout à fait exact. Je ne dis pas que je ne le fais pas, mais je ne suis pas enthousiaste à cette idée. Je ne suis pas absolument convaincue que c'est nécessaire. J'attendrai avec intérêt les résultats de vos travaux, mais j'attire votre attention sur les ressources qui sont dans cette ville.
Le président : Ma norme est le rapport qualité-prix.
Le sénateur Joyal : Je reviendrai sur la même question dans d'autres provinces et déterminerai si la bibliothèque et la greffière pourraient recenser les autres provinces. Nous avons communiqué avec le juge LeSage, de l'Ontario. Si nous recueillons le témoignage des juges Rolland et Robert du Québec, nous aurons entendu des juges à la retraite qui ont exercé la responsabilité ultime d'être juges en chef dans leur propre province. Je serais certainement curieux de savoir ce qui se passe en Saskatchewan, en Nouvelle-Écosse ou en Colombie-Britannique, si, par hasard, des gens ont pris leur retraite récemment, comme au Québec, alors tout est encore frais dans leur mémoire. Cela serait certainement utile pour le comité en entier.
Mme Richardson : À la lumière de ce que j'entends, nous pouvons reporter cette décision à la prochaine semaine de séance, en mars. Toutefois, compte tenu des dates choisies et acceptées par les membres du comité directeur, nous ne pourrions pas la reporter davantage. Il serait utile pour les analystes d'entendre les propositions des sénateurs et d'élaborer un plan pour chaque ville, puis peut-être que le comité prendrait une décision plus éclairée.
Cela me rendra la tâche un peu plus difficile, en tant que greffière, pour effectuer la planification, mais s'il ne s'agit que de voyages d'une journée, je pense que je pourrais tout de même les planifier efficacement, puisque le plan de travail aura peut-être été élaboré d'ici là. Une fois que le budget aura été adopté à la fin du mois de mars, nous pourrons nous mettre en route.
À la lumière de ce que j'entends ce soir, je dirais que, si nous pouvions en rester là pour le moment et revenir avec un plan de travail potentiel que vous pourriez étudier avec le budget, cela pourrait aider le comité à prendre une décision plus éclairée.
Le président : D'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Merci à tous.
(La séance est levée.)