Aller au contenu
POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule nº 7 - Témoignages du 27 octobre 2016 (réunion du matin)


HALIFAX, le jeudi 27 octobre 2016

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 9 h 3, pour poursuivre son étude sur les activités de recherche et de sauvetage maritimes, y compris les défis et les possibilités qui existent.

Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour. Je m'appelle Fabian Manning. Je suis sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador et président du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Je suis heureux d'être ici aujourd'hui, avec mes collègues. Avant de laisser la parole à nos témoins, j'invite les membres du comité à se présenter, en commençant par ceux qui sont immédiatement à ma droite.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Hubley : Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Munson : Jim Munson, de l'Ontario.

La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur McInnis : Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

Le président : La séance de ce matin portera sur les activités de recherche et de sauvetage maritimes, mais du point de vue de certaines industries qui dépendent de la Garde côtière canadienne et de ses partenaires. Nous sommes heureux d'accueillir nos témoins. Je vais demander à chacun d'eux de se présenter.

Murray Hupman, vice-président (Opérations), Marine Atlantique : Je m'appelle Murray Hupman. Je suis vice-président des opérations chez Marine Atlantique. Je travaille depuis notre bureau de North Sydney.

Capitaine Sean Griffiths, directeur général, Administration de pilotage de l'Atlantique Canada : Sean Griffiths, directeur général à l'Administration de pilotage de l'Atlantique Canada, qui est ici, à Halifax.

Capitaine Shri Madiwal, directeur, Opérations de la flotte, Marine Atlantique : Je suis le capitaine Shri Madiwal, et je suis directeur des opérations de la flotte chez Marine Atlantique. Nous sommes basés à North Sydney, en Nouvelle Écosse.

Le président : Je remercie nos témoins d'avoir pris le temps de se joindre à nous ce matin, alors que nous poursuivons notre étude sur les activités de recherche et de sauvetage. Je crois, messieurs, que vous avez des déclarations liminaires à prononcer. Monsieur Hupman, vous avez la parole.

M. Hupman : Bonjour, monsieur le président. Je tiens à vous exprimer notre gratitude pour cette occasion qui nous est donnée de vous parler de ce sujet. Comme nous sommes un important exploitant maritime qui fait la navette entre Terre-Neuve et le reste du pays, c'est un sujet qui nous tient à cœur.

J'ai fait distribuer une petite note d'information, que je vais commenter très brièvement. Cela ne durera pas plus de cinq ou six minutes. À mi-chemin, je vais laisser la parole au capitaine Shri Madiwal pour qu'il termine la présentation.

Qu'est-ce que Marine Atlantique? Pour les gens qui restent à Terre-Neuve, Marine Atlantique est un service de traversier absolument essentiel. Nous fournissons un lien d'importance névralgique en matière de transport entre Terre-Neuve et le reste du Canada ou, du moins, avec l'Est du Canada. Nous transportons à peu près tous les passagers qui ne prennent pas l'avion. Les gens qui souhaitent se rendre à Terre-Neuve et qui ne veulent pas prendre l'avion n'ont pas tellement de choix : ils doivent prendre leur voiture ou marcher. Nous offrons ce service entre North Sydney, Nouvelle-Écosse et Port-aux-Basques, Terre-Neuve, et, en saison, entre North Sydney et Argentia, qui est sur la côte est de Terre-Neuve.

Nous transportons environ la moitié de tous les produits qui sont envoyés à Terre-Neuve, c'est-à-dire les produits et les marchandises que la population consomme au jour le jour. Environ 90 p. 100 des produits périssables destinés aux Terre-Neuviens passent par nous. Les produits dont la valeur est assujettie aux délais de livraison — c'est-à-dire les produits qui doivent être livrés dans les 24 ou 48 heures — nous sont confiés systématiquement parce que nous faisons le trajet deux fois par jour.

Nous sommes un catalyseur économique clé pour la plupart des entreprises de l'île et de la côte du Labrador. Lorsque nos navires ne prennent pas la mer ou qu'il y a un pépin, nous en entendons parler. Nous en entendons parler très rapidement parce que ces interruptions ont une incidence sur les affaires de beaucoup de gens, tant sur l'île de Terre-Neuve que sur la côte du Labrador.

La deuxième diapositive vous donne une idée de notre flotte. Je crois que certains sénateurs étaient au Collège de la Garde côtière canadienne il y a quelques jours. Ceux qui ont profité de la visite de l'embarcation rapide de sauvetage sont passés juste à côté de nos installations. Selon l'heure, ils auraient pu voir un ou deux de nos navires arrimés aux quais.

Le président : Deux.

M. Hupman : Deux navires. Vous auriez vu l'Atlantic Vision, qui est notre plus gros navire en matière de tonnage brut. Nous avons quatre navires de cote glace, qui arrivent à faire leur chemin à travers des glaces d'une certaine épaisseur. Trois des quatre navires sont de cote glace 1A, et le quatrième est de cote glace 1B. En remplissant nos quatre navires, nous sommes en mesure de transporter 3 000 passagers à la fois. En tout temps, nous pouvons transporter un nombre considérable de passagers.

Notre vitesse de croisière habituelle est de 18 nœuds. Toutefois, étant donné la réglementation sur les heures de repos, nous réduisons la vitesse de nos navires une fois la nuit tombée afin de permettre aux membres de nos équipages de profiter du répit auquel ils ont droit. La nuit, le trajet prend un peu plus de temps et la vitesse du navire est légèrement réduite.

Les données financières pour l'exercice 2015-2016 nous indiquent que nous avons transporté un peu plus de 322 000 passagers. Il y a eu environ 1 700 traversées simples — par opposition aux allers-retours. Nous avons transporté plus de 116 000 véhicules passagers, donc des voitures, des camions et d'autres véhicules de ce type.

Au chapitre du transport commercial, 50 p. 100 des produits transportés l'ont été à bord des quelque 96 000 véhicules commerciaux qui ont utilisé nos services. Il y a deux ans, nous avons même dépassé le chiffre des 100 000 véhicules commerciaux transportés. L'économie de l'île de Terre-Neuve dépend énormément de nos services.

Au cours du dernier exercice, notre taux de ponctualité a été d'environ 91 p. 100, si l'on fait exception des retards attribuables à la météo. Il nous est arrivé de temps à autre d'avoir à annuler certaines traversées à cause des conditions du vent ou de la mer. Abstraction faite de ces annulations, nous avons été à l'heure environ 91 p. 100 des fois.

Je vais maintenant laisser la parole au capitaine Shri Madiwal, pour les deux prochaines diapositives.

Capt Madiwal : L'environnement dans lequel nous travaillons — essentiellement, l'Atlantique Nord — est caractérisé par des étés cléments. La navigation y est plaisante, mais cela reste un environnement très venteux. L'automne apporte son lot d'ouragans. Les conditions hivernales sont rigoureuses et la présence des glaces vient compliquer les choses.

Certains d'entre vous savent peut-être que l'un de nos traversiers est resté pris dans la glace, en 2015. Il y est resté pendant quelques jours et son retour au port s'est fait péniblement. Cela vous donne une idée des conditions difficiles et de l'environnement changeant dans lesquels nous travaillons.

Comme nous transportons beaucoup de gens, notre priorité absolue est et a toujours été la sécurité et le confort des passagers. Lorsqu'il s'agit de décider si nous souhaitons entreprendre ou poursuivre une traversée, notre décision est prise en fonction de notre capacité à composer avec les conditions météorologiques du moment. Les conditions météorologiques présentes et annoncées prennent une place considérable dans notre processus décisionnel.

Ce processus décisionnel qui vise à assurer la sécurité de nos passagers et de nos navires durant les traversées peut compter sur l'apport de nos marins — qui ont été formés et qui sont hautement qualifiés — et de certains membres de notre personnel de bureau.

La prochaine diapositive aborde la question de notre rôle d'intervenant. Étant donné le sujet de la discussion et de la séance d'aujourd'hui, nous tenons à mentionner le fait que la région où nous opérons est très achalandée. Nous naviguons dans le détroit de Cabot, où croisent de nombreux navires. Avec leur capacité de près de 1 000 passagers, leur plateforme d'hélicoptère et tout le reste, les navires de Marine Atlantique peuvent, au besoin et en temps voulu, s'avérer être de bons soutiens pour les opérations de recherche et de sauvetage. Comme le disait Murray, nous disposons de navires de cote glace de grande taille, et ces navires sont avantageusement positionnés. Compte tenu de tous les canots de sauvetage et de l'embarcation rapide de sauvetage dont ils disposent, ces navires seront assurément une addition appréciable aux infrastructures existantes de la Garde côtière canadienne.

En matière de sauvetage, nous dépendons surtout de la Garde côtière. Nous n'avons pas eu d'urgences récemment, mais il nous est arrivé ces derniers temps de répondre aux appels de détresse de certains navires de pêche dans le détroit de Cabot. La plupart du temps, nous dépendons des services de brise-glace de la Garde côtière pour libérer les voies que nous empruntons. C'est une question d'importance névralgique pour nos affaires.

La dernière diapositive brosse un aperçu de l'aspect commercial de nos opérations. Nous comptons près de 1 100 clients commerciaux qui dépendent de nos services au quotidien, qui se fient à la navette que nous assurons entre le continent et l'île. La majorité de nos produits à durée de vie critique — près de 90 p. 100 — sont acheminés par Marine Atlantique. Le traversier est un mode opératoire absolument crucial pour l'île ainsi que pour l'économie de Terre-Neuve et-Labrador.

Au fur et à mesure que l'industrie tend vers la chaîne d'approvisionnement juste à temps, nous constatons que les grosses boîtes et les grandes surfaces sont obligées de mettre tous leurs produits dans une seule remorque à destination de l'île. Il est vraiment essentiel que les voies que nous empruntons soient navigables et que nos navires continuent d'arriver à l'heure.

En ce qui concerne l'impact que les glaces ont pu avoir sur nos opérations en 2015, signalons que près de 39 traversées ont été retardées — ce qui a eu une incidence majeure sur l'économie de l'île — et que 16 traversées ont été annulées. Vingt-huit demandes de service de brise-glace ont été adressées à la Garde côtière. La disponibilité et la situation géographique du brise-glace de la Garde côtière ainsi que les temps de réponse qui fluctuent constamment ont une incidence sur nos horaires. Au total, les frais que nous avons dû verser pour le service de brise-glace de la Garde côtière s'élèvent à environ 66 000 $.

Le président : Comme je vis à 40 minutes d'Argentia, je peux confirmer qu'il y a parfois des journées venteuses dans la baie Placentia.

Capt Griffiths : Ma famille au complet vient de la baie Placentia.

Le président : Je l'ai su par votre nom.

Capt Griffiths : J'ai toute une présentation. La semaine dernière, à l'un de ces comités, j'ai eu droit à environ une heure. Comme je ne savais pas si j'allais avoir la même durée ici, je vais y aller rapidement.

La page 2 donne une idée des régions couvertes par l'Administration de pilotage de l'Atlantique. Il y a 17 zones de pilotage obligatoire, ce qui couvre environ 32 000 kilomètres de littoral de ce côté-ci du pays. Vous pouvez aussi voir combien de pilotes nous avons dans chaque district. La région la plus occupée en compte 13, et certaines des régions les plus tranquilles n'en ont que 2. Évidemment, tout dépend du trafic.

En page 3, vous pouvez voir les types de navires qui croisent sur la côte atlantique. Nous avons de tout, des porte conteneurs aux rouliers, en passant par les transporteurs d'automobiles, les pétroliers de l'étranger et les pétroliers canadiens, les pétroliers-caboteurs et les navires de croisière de plus en plus gros, comme ceux que nous voyons maintenant couramment dans les ports. Le transfert des pilotes se fait toujours de la même façon. En fait, la façon la plus sécuritaire de procéder est d'utiliser une échelle. Nous avons des règles, des règlements, des procédures et de l'équipement de sécurité pour assurer que l'embarquement du pilote se fasse toujours de façon sécuritaire.

Permettez-moi d'attirer votre attention sur la photo de la page 4. Je vous demande de l'examiner attentivement pendant quelques secondes, parce que nous allons voir tout à l'heure comment cela peut devenir difficile. Ce n'est pas une mince affaire pour le pilote que de grimper dans une échelle comme celle-là et d'en redescendre.

Nous avons une flotte de neuf bateaux-pilotes et ces bateaux nous appartiennent. Nous sommes sur le point d'en acquérir deux autres, ce qui devrait se faire le mois prochain ou peu après. Nous avons également environ 13 autres bateaux sous contrat répartis dans l'ensemble du Canada atlantique. Nous avons beaucoup de bateaux-pilotes rapides et fiables qui sont sur l'eau, et tous ont leur équipage. La réponse est à la hauteur. Nous avons déjà été mis à contribution, et je reviendrai aussi là-dessus.

Comme vous pouvez le voir sur cette photo, ces bateaux-pilotes sont très bien outillés pour secourir un homme à la mer. Il s'agit d'un panier mécanique que l'on peut descendre à l'eau et remonter. À proximité du panier, il y a des manettes qui permettent au capitaine de vedette de continuer à piloter le bateau en regardant par-dessus la poupe, tout en veillant bien entendu à la sécurité de la personne secourue.

Au Canada, toutes les urgences relèvent du Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage, à Halifax. Le déplacement des personnes qui nécessitent des soins médicaux relève de la Garde côtière. La Garde côtière dispose de navires à cette fin ainsi que de personnel, tant sur l'eau que dans les airs.

En ce qui concerne les activités de recherche et de sauvetage, il y a, en tête de liste, les navires dont c'est la capacité première puis, au deuxième rang, les navires de recherche et de sauvetage multifonctionnels. Au troisième rang, il y a les navires qui ont une capacité secondaire de recherche et de sauvetage et d'autres intervenants, dont les hélicoptères du ministère de la Défense et la Garde côtière auxiliaire. En dernier lieu, il y a les navires de passage, et c'est là que nous entrons en scène. Nos bateaux-pilotes sont mis à contribution en tant que navires de passage.

Il n'est pas essentiel de parler de cela, mais la formation des spécialistes en sauvetage est un programme très poussé auquel les techniciens de la recherche et du sauvetage du Canada atlantique et du reste du pays participent sur une base régulière. Ces personnes ont été très bien formées. Nos employés n'ont pas cette formation. Nous avons le cours de secourisme avancé en mer, mais rien n'arrive à la cheville de la formation que reçoivent les spécialistes ou les techniciens en recherche et sauvetage.

Passons à la page 9. Nos bateaux-pilotes ont été mis à contribution par le passé en tant que navires de passage et ils continueront à l'être. J'ai parlé du règlement concernant les signaux reçus de sources quelconques. Selon ce règlement, le capitaine de tout bâtiment dans les eaux canadiennes et la personne qualifiée qui est le capitaine d'un bâtiment, où qu'il soit, dès qu'ils reçoivent, d'une source quelconque, un signal indiquant qu'une personne, un bâtiment ou un aéronef est en détresse, doivent se porter à toute vitesse à leur secours et, si possible, en informer les personnes en détresse et la source du signal. Nous sommes obligés de faire cela et nous l'avons fait à de nombreuses reprises.

Nos bateaux-pilotes sont considérés comme des navires de passage en raison de leur disponibilité et de leur habileté à intervenir en cas d'incident. La présence de 24 navires qui sont répartis dans l'ensemble du Canada atlantique et qui sont capables d'intervenir rapidement constitue une ressource appréciable. Cependant, les équipages de ces bateaux n'ont que deux membres : un capitaine de vedette et un matelot de pont. Si nous devions répondre à un incident d'une certaine envergure, l'équipage de nos bateaux-pilotes serait vite dépassé. C'est quelque chose qui est déjà arrivé. Comme je le disais, nos gens connaissent le secourisme de base et les fonctions d'urgence en mer. Nous n'avons pas les compétences et la formation médicale nécessaires pour répondre adéquatement à de tels incidents.

Revenons-en à nos bateaux. De temps à autre, le centre de coordination des opérations de sauvetage peut demander à un bateau-pilote de répondre à une situation d'urgence en mer. C'est ce qu'il fait lorsque c'est la seule ressource disponible. Nous conviendrons tous qu'une réponse limitée est tout de même mieux que pas de réponse du tout. Toutefois, cela peut présenter des risques pour l'équipage. En effet, des membres de l'équipage pourraient se blesser et le bateau-pilote lui-même pourrait être endommagé.

J'ai deux exemples à vous donner. Au milieu des années 1990, deux incidents distincts se sont produits au large de Saint John. Un bateau-pilote a été utilisé pour évacuer sur une civière un passager malade qui se trouvait sur un navire de croisière. Il n'y avait pas d'ambulancier à bord, et l'équipage du bateau-pilote s'est exposé à des risques.

Encore dans les années 1990, l'équipage du bateau-pilote a secouru le capitaine d'un voilier qui s'apprêtait à prendre le large. La capitaine avait subi des blessures au cou qui mettaient sa vie en danger. Je crois qu'il y a eu une tempête et qu'il a été frappé par la bôme alors qu'elle passait d'un côté à l'autre. Le bateau-pilote est arrivé sur les lieux, et les membres de l'équipage ont donné les premiers soins au blessé jusqu'à ce qu'on l'ait ramené à terre.

En 1998, nous avons répondu à un appel pour un kayak qui avait chaviré tout juste à l'extérieur de Halifax. Le kayakiste était dans l'eau et il faisait froid, deux degrés. Il était probablement à quelques minutes seulement de mourir d'hypothermie. Il nous a remerciés à profusion de lui avoir sauvé la vie.

Le 30 septembre, vous pouvez voir sur cette photo qu'il y a dans le port une bouée de la marine à laquelle les navires sont amarrés. Un bateau de plaisance l'a frappé de plein fouet, ce qui a causé bien des blessures aux personnes à bord. Nous étions là parce que nous nous sommes rapidement rendus sur les lieux de l'accident. Cependant, nous n'avons pu que les éclairer dans la nuit puisque nous n'étions pas en mesure d'accueillir des blessés. C'est la Garde côtière qui s'en est chargée.

Ces deux autres exemples montrent en quelque sorte ce qui préoccupe l'administration. Le 20 septembre de l'an dernier, le centre de coordination de sauvetage a demandé à un équipage de bateaux-pilotes de participer à l'évacuation sanitaire d'un membre de l'équipage au large de Sydney. Il avait une infection cardiaque qui empirait. On nous a dit qu'il n'y avait ni garde-côte ni hélicoptère pour assurer l'évacuation. Nous nous sommes sentis obligés d'aider cette personne. Comme vous pouvez l'imaginer, quand on a des troubles cardiaques, il ne convient pas de descendre d'une échelle en pleine nuit sur une mer agitée. En réalité, nous avons fait subir plus de risques au patient que si nous avions eu une autre façon de le faire descendre.

Le hasard a voulu que cela se reproduise en novembre de la même année. Cette fois, on nous a demandé de faire descendre d'un bateau un membre de l'équipage dont la rétine était décollée. Il ne pouvait ni lever ni baisser les yeux — il devait regarder droit devant lui. Il avait un bandage sur l'œil. C'était la nuit, au large de Sydney, où il y avait des vagues de trois mètres de hauteur. J'ai été appelé pour répondre à cette urgence. Je leur ai dit : « Désolé, mais nous ne pouvons pas le faire. C'est tout simplement trop dangereux pour cette personne. » Ils ont fini par mettre le cap sur Halifax. Je crois qu'il est débarqué là-bas et qu'il est allé chez le médecin. Si nous étions intervenus, je pense que nous aurions empiré le cas de cette personne qui avait besoin d'obtenir une aide médicale.

Ensuite, sénateur Manning, un bateau a dérivé pendant une tempête assez violente dans la baie Placentia. Il se dirigeait vers les rochers avec un couple marié à bord. Nos hommes se trouvaient sur le bateau-pilote à Arnold's Cove dans la baie Placentia. Ils ont entendu l'appel radio et sont partis immédiatement. Voici une photo prise cette journée là des deux personnes qui se trouvaient sur le bateau à la dérive. Nous les avons fait monter à bord du bateau-pilote et avons regagné le rivage. C'est une histoire qui s'est bien terminée.

Dans des cas comme celui-là, c'est presque idéal pour nous d'intervenir. Nous sommes rapides et nous pouvons faire ces choses, mais nous ne sommes ni équipés ni formés pour assurer le transfert des blessés ou les évacuations sanitaires.

Vous verrez la conclusion à la dernière page. Le centre de répartition peut prendre ces appels du centre de coordination de sauvetage n'importe quand, 24 heures par jour, 7 jours par semaine et 365 jours par année sans interruption.

En règle générale, depuis ce qui s'est produit à Sydney, nous essayons de ne pas participer à des évacuations sanitaires de peur de faire plus de mal que de bien et en raison du risque de causer d'autres blessures pendant le transport. Le centre conjoint de coordination de sauvetage ne devrait demander de l'aide de nos bateaux de l'Administration de pilotage de l'Atlantique ou de ceux de nos entrepreneurs que s'il juge que nous sommes un navire de passage et que s'il tient compte des risques pour le blessé. C'est tout ce que j'ai.

Le président : À mon sens, vous nous avez fourni d'excellents renseignements, et je suis certain que nos sénateurs ont des questions qu'ils aimeraient vous poser. Comme d'habitude, c'est la vice-présidente du comité, la sénatrice Hubley, qui va commencer.

La sénatrice Hubley : Nous examinons une autre facette des opérations de recherche et de sauvetage, et il est clair que ce sera intéressant.

Ma question s'adresse à M. Hupman et au capitaine Madiwal. Quel est le protocole dans un quelconque de vos navires pour intervenir en cas d'urgence à bord? À quel moment la Garde côtière intervient-elle?

Capt Madiwal : Dans un cas comme celui-là, le capitaine avertit immédiatement les Services de communication et de trafic maritimes que nous avons besoin d'aide ou de soutien d'urgence. Cette information est ensuite transmise au centre conjoint de coordination de sauvetage, le cas échéant. Nous avons aussi un processus interne. Étant donné que nos voyages durent environ sept heures tout au plus, il peut aussi nous arriver de prendre contact avec les administrations locales pour qu'elles interviennent.

La sénatrice Hubley : Vous le feriez après avoir communiqué avec le centre conjoint de coordination de sauvetage. Vous pouvez le faire vous-mêmes. Vous pouvez chercher d'autres façons d'offrir du soutien en cas d'urgence.

Capt Madiwal : C'est exact. On appelle d'abord les Services de communication et de trafic maritimes pour qu'ils sachent que nous avons une situation d'urgence, que nous prenons de la vitesse et que nous nous rendons sur place. De plus, nous mettons en marche notre processus d'intervention d'urgence organisationnel. Les responsables des opérations de terminal sont informés ainsi que les administrations locales. Nous avons une ambulance et, selon le type d'urgence, la GRC et d'autres intervenants sont prêts à nous prêter main-forte quand le navire arrive au port.

La sénatrice Hubley : Vous avez mentionné 3 000 passagers. Estimez-vous que la Garde côtière canadienne ait la capacité d'intervenir dans le cas d'un accident maritime majeur qui impliquerait un de vos bateaux?

Capt Madiwal : À l'heure actuelle, n'importe lequel de nos navires transporterait plus de 1 000 passagers et membres d'équipage. Un de nos principaux défis est de trouver la façon de mener une opération de sauvetage massive. Cela ne concerne pas uniquement Marine Atlantique ou la Garde côtière. Bien d'autres organismes et mécanismes de soutien entreraient en ligne de compte. Nous ne détenons pas beaucoup d'informations concernant la capacité de la Garde côtière d'intervenir dans le cas d'urgences de ce type.

La sénatrice Hubley : Il y a une autre question que j'aimerais poser au capitaine Griffith, si vous me le permettez. J'aimerais que vous clarifiiez la différence entre l'intervention d'un navire de passage et celle d'un bateau de pêche à proximité.

Dans votre présentation, vous avez laissé entendre que vous êtes responsables en cas de blessure aggravée par une intervention. Pourriez-vous clarifier ce point? Qu'est-ce que cela signifierait en situation critique? Auriez-vous à vous retirer et à attendre l'arrivée d'un autre navire?

Capt Griffiths : En ce qui concerne les navires de passage, le bateau-pilote et le bateau de pêche s'équivaudraient. Le bateau qui se retrouve au bon endroit au bon moment est un navire de passage. Pour nous, un bateau-pilote ou un bateau de pêche, c'est du pareil au même.

Du point de vue de la responsabilité, c'est une question de circonstances qui ne présentent pas un danger de mort ou qui ne sont pas extrêmes. Si vous avez des blessés dans l'eau qui sont à l'article de la mort ou au bord de l'hypothermie, je ne pense pas que vous puissiez empirer leur cas en essayant de les hisser à bord d'un bateau-pilote. Si vous avez un navire pouvant facilement être ancré ou qu'un technicien en recherche et en sauvetage peut aisément rejoindre le bateau-pilote en l'absence d'un hélicoptère ou d'un navire de la Garde côtière, il existe d'autres options pour traiter une blessure qui ne met pas la vie du patient en danger. Nous nous sommes déjà retrouvés dans des situations dans lesquelles, selon moi, nous n'aurions pas dû nous retrouver.

Pour ce qui est de la responsabilité, sénatrice Hubley, je crois que c'est un terme utilisé un peu au sens large. J'ignore dans quelle mesure il y aurait responsabilité. Vous essayez de venir en aide à quelqu'un. Il existe une disposition du bon samaritain. Je ne sais pas dans quelle mesure elle s'appliquerait, mais je pense qu'on doit remettre en question toute action qui ferait en sorte qu'une personne qu'on hisse sur son bateau soit en plus mauvaise posture après le fait qu'avant.

La sénatrice Stewart Olsen : Je suis certaine que vous êtes tous formés à offrir des services de traversier. Vos équipages sont tous formés. Le sont-ils aussi à offrir des services de sauvetage?

M. Hupman : Oui, ils le sont.

La sénatrice Stewart Olsen : Fréquentent-ils un des collèges d'ici, le collège de la marine ou celui de la Garde Côtière?

M. Hupman : Oui, le Nova Scotia Community College, à Port Hawkesbury. À titre d'exemple, certains des règlements sont en train de changer, et tous les membres de nos équipages sont tenus de suivre une formation de recyclage aux fonctions d'urgence en mer. Nous investissons énormément de temps et d'argent pour que nos équipages suivent cette formation afin d'être conformes aux exigences le 1er janvier 2017. Ils l'ont déjà fait. Maintenant, ils suivent une formation de recyclage sur tous ces sujets. Pour intervenir en cas d'urgence, nous avons des gens qui ont suivi des cours de secourisme avancés et autres cours du genre.

La sénatrice Stewart Olsen : Pour le pilotage, est-ce la même chose avec vos équipages? Reçoivent-ils de la formation?

Capt Griffiths : Pas dans la mesure où l'équipage de Murray serait formé, non. Nos employés ont suivi des cours de secourisme en mer. Ils ont aussi suivi une formation aux fonctions d'urgence en mer, mais ne sont pas tenus de suivre la formation de recyclage au titre de la réglementation. Il n'y a pas de formation avancée pour les techniciens de la recherche et du sauvetage. Il n'y a pas non plus de formation relative aux embarcations rapides de sauvetage. Il n'y a rien de tout cela. Il s'agit d'un équipage de deux personnes. Nous emmenons les pilotes aux navires et nous les ramenons. On n'en a jamais eu besoin.

La sénatrice Stewart Olsen : Compte tenu de la grande rapidité de vos bateaux, j'aurais pensé qu'on vous appelait assez souvent pour que vous interveniez. Pensez-vous que ce serait avantageux que vos équipages aient cette formation d'appoint?

Capt Griffiths : Ce pourrait très bien être le cas. Ce n'est pas notre fonction principale, mais ce pourrait être avantageux pour atténuer les risques pour l'industrie.

Le sénateur Enverga : Pour votre information, j'ai moi-même vécu à Terre-Neuve pendant un an quand je suis arrivé ici.

Le président : Vous gardez toujours espoir. Ne trouvez-vous pas l'accent révélateur?

Le sénateur Enverga : C'est ma référence pour ce type de situation. En fait, je me trouvais à bord de l'un de vos traversiers quand j'ai décidé de retourner à Toronto. Un hiver m'a suffi.

Quelles sont les capacités actuelles de vos services de traversier? Avez-vous atteint votre maximum ou êtes-vous loin du compte?

M. Hupman : L'infrastructure de transport et la demande de services ont un peu changé au fil des ans. Au début des années 2000, la demande de passagers était énorme. Avec les facteurs économiques, le temps et tout cela, l'exigence a baissé du côté des passagers. À un moment donné, nous avions plus de 500 000 passagers. Nous avons maintenant un peu plus de 300 000 passagers. Le changement s'est opéré sur 10 ans, en faveur du côté commercial. Ce côté, qui était moindre par le passé, est maintenant beaucoup plus important qu'il l'était.

À l'été, la réponse est oui, nous fonctionnons, en quelque sorte, à pleine capacité. Si nous devons mettre un navire hors service pour quelque raison que ce soit, nous devons annuler les traversées et interrompre le service. À l'été, nous fonctionnons pas mal à pleine capacité.

Pendant la basse saison, c'est moins occupé. D'octobre à mars, nous retirons l'Atlantic Vision. Nous l'amarrons et nous le branchons à l'alimentation extérieure pour économiser du carburant et de l'énergie. Le second navire sera retiré autour du 1er janvier, pendant environ un mois et demi ou deux mois, et sera mis en disponibilité 24 heures sur 24.

Pendant la basse saison, nous ne sommes pas à pleine capacité, mais à l'été, nous le sommes.

Le sénateur Enverga : Avez-vous une réserve de prévoyance au cas où quelque chose arriverait à votre bateau?

M. Hupman : Oui.

Le sénateur Enverga : Je sais que les plateformes de forage pétrolier ont leurs propres services de sécurité et de sauvetage. Avez-vous la même chose?

M. Hupman : Je ne sais pas de quoi vous parlez.

Le sénateur Enverga : Comme les plateformes de forage pétrolier, vous fonctionnez avec plus de gens à bord.

Capt Madiwal : Nous avons du matériel d'opérations de sauvetage à bord. Pour en revenir à la question de la sénatrice Olsen concernant la formation, tous les membres de l'équipage sont formés aux techniques individuelles de survie. Ce n'est pas uniquement pour des raisons de sécurité personnelle, mais aussi pour évacuer les passagers du bateau en cas d'urgence. C'est un des principaux éléments de la formation.

En outre, tous les certificats que doivent obtenir les membres d'équipage de nos navires ou les officiers supérieurs ainsi que les examens qu'ils doivent réussir par le truchement de Transports Canada contiennent un important volet recherche et sauvetage. Si le capitaine de notre traversier a été assigné à des opérations de recherche et de sauvetage, ils sont conscients de toutes les choses qu'ils doivent faire. Ils savent comment intégrer ces connaissances et assumer les fonctions de commandant sur place à la demande du centre conjoint de coordination de sauvetage. Cette partie existe. Nous avons des exercices réguliers que nous prenons au sérieux, tant du point de vue de la sécurité que de la sûreté.

Le sénateur Enverga : En cas d'urgence majeure sur le traversier, disposez-vous de suffisamment de ressources ou d'équipement pour pouvoir sauver vos passagers?

Capt Madiwal : Oui. Les appareils de sauvetage sur nos traversiers sont conformes aux exigences de Transports Canada. Nous en avons beaucoup plus que prévu, car nous avons toujours un facteur de redondance. C'est une exigence qui dépend du nombre de passagers que nous pouvons transporter à tout moment.

Il y a toujours une quantité supplémentaire de gilets de sauvetage, d'embarcations de sauvetage et d'embarcations rapides de sauvetage dans le cadre d'un dispositif d'évacuation en mer. En gros, c'est comme les glissières d'évacuation d'aéronef. Il y en aura suffisamment pour tous les passagers, c'est clair, et il y aura une pleine capacité de réserve au cas où le traversier s'inclinerait sur un bord et qu'il serait impossible de lancer les radeaux de sauvetage de l'autre côté ou quelque chose du genre.

Le sénateur Enverga : Pour les pilotes, êtes-vous entièrement financés par le gouvernement? Sinon, comment vous finance-t-il?

Capt Griffiths : Nous ne sommes pas financés du tout par le gouvernement. Nous sommes autonomes.

Le sénateur Enverga : Pas du tout.

Capt Griffiths : Pas du tout.

Le sénateur Enverga : L'Administration de pilotage de l'Atlantique me surprend.

Capt Griffiths : Nous sommes une société d'État. Nous ne sommes simplement pas financés par les contribuables.

Le sénateur Enverga : Je sais que vous vous concentrez davantage sur certains secteurs des Maritimes. Y a-t-il des chevauchements avec la Garde côtière canadienne? Dans les faits, il est très possible que vous soyez les premiers arrivés sur les lieux. Combien de fois la Garde côtière fait-elle appel à vous? Et plus souvent que moins? Qu'en pensez-vous?

Capt Griffiths : En moyenne, c'est une ou deux fois par année. C'est sporadique. Peut-être qu'une année, on est appelé une fois et que l'année suivante, c'est trois fois. Je dirais une ou deux fois par année. Il nous arrive d'intervenir dans certains cas, mais pas dans d'autres, car un autre navire de passage est arrivé avant nous sur les lieux parce qu'il était à proximité.

Une chose à garder à l'esprit est que, dans tous nos secteurs d'opération, il y a des gardes-côtes spécialisés de la Garde côtière à Sambro et à Louisbourg. Nos principaux secteurs sont couverts par ces navires désignés dotés d'équipages formés à intervenir en cas d'urgence. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi l'un d'entre eux n'avait pas été envoyé dans le secteur dans lequel notre bateau-pilote se trouvait à Sydney.

Étant donné que nous sommes une société d'État, nous ne sommes pas autorisés à empiéter sur l'entreprise de quelqu'un d'autre. S'il y a un capitaine de navire qui peut procéder à l'évacuation sanitaire non urgente d'un membre d'équipage et se faire payer en retour, c'est à lui de le faire, pas à nous. Nous ne pouvons pas empiéter de pareille façon sur les affaires des autres.

Il s'agit de bateaux-pilotes désignés. Ils sont construits selon les exigences et certifiés par Transports Canada et la Lloyd's comme bateaux-pilotes, et non comme embarcations de sauvetage. Nous faisons du mieux que nous pouvons, mais, en cas d'urgence, nous ne refuserons pas; nous devons y aller. Nous sommes un navire de passage.

Le sénateur Enverga : En gros, vous le faites bénévolement. Vous pouvez faire ce que vous voulez, mais y a-t-il des cas où on a vraiment besoin de vous et que vous êtes incapables d'intervenir?

Capt Griffiths : Nous intervenons, oui. Nous ne refusons pas d'intervenir en cas d'urgence. De toute façon, la Loi sur la marine marchande nous y oblige. Nous essayons de nous tenir loin des évacuations sanitaires non urgentes dans lesquelles nous pouvons faire plus de mal que de bien.

Le sénateur Enverga : Êtes-vous assurés pour procéder aux évacuations sanitaires?

Capt Griffiths : Nous ne pouvons pas procéder à des évacuations sanitaires, non, à moins que ce soit une question de vie ou de mort et qu'il n'y ait pas d'autre option. Je suis sûr que le blessé préférerait nettement faire affaire avec nous que n'avoir aucune autre option.

Le sénateur Munson : Vous avez annulé 16 voyages, et je me demande quelle a été votre justification pour ce faire. À quel moment cela s'est-il produit? À qui vous adressez-vous? Qui peut vous dire que la glace est trop épaisse et les vents, trop forts pour que vous puissiez passer? Comment cela fonctionne-t-il?

Capt Madiwal : Nous suivons les prévisions de la météo que fournit Environnement Canada, lesquelles nous permettent d'avoir une bonne traversée et de nous rendre jusqu'au port.

Pour en revenir à Port-aux-Basques, les conditions éoliennes constituent un élément important. Compte tenu de la taille de notre vaisseau, qui mesure environ 200 pieds, c'est une opération très risquée pour nos capitaines. Afin d'assurer la sécurité et le confort de nos passagers — notre priorité —, nous prenons cette décision avant de quitter le port.

Le sénateur Munson : Avez-vous une ligne spéciale pour appeler Environnement Canada? Nous pouvons tous communiquer avec le ministère pour connaître les prévisions météorologiques. Avez-vous un dispositif spécial pour vous alerter quand les conditions seront difficiles?

Capt Madiwal : Nous n'avons pas de ligne spéciale pour rejoindre Environnement Canada. Nous suivons le site web sur lequel les prévisions météorologiques sont mises à jour régulièrement. En plus, nous avons aussi un lien par l'intermédiaire de la gestion des urgences, car d'autres événements nous y sont communiqués. Nous nous fondons sur ces données pour arrêter des décisions.

Le sénateur Munson : Quel pourcentage des traversées totales représentent les 39 retards et les 16 voyages annulés? Je suppose que cela fait partie des statistiques. Représentent-ils 5 p. 100, 10 p. 100 ou 2 p. 100 par année?

M. Hupman : Vous voulez dire par année?

Le sénateur Munson : Oui, par année.

M. Hupman : Probablement moins de 2 p. 100. Sur le plan opérationnel, je tiens à préciser que notre organisme tient des réunions quotidiennes pour discuter de toutes les considérations dont nous devons tenir compte pour décider de faire ou non le voyage. Lorsqu'il est question de glace, nous nous en remettons aux cartes des glaces d'Environnement Canada.

Le sénateur Munson : À quel outil d'Environnement Canada?

M. Hupman : Les cartes des glaces. Nous examinons ces cartes très régulièrement pendant la saison des glaces pour voir où se trouvent les glaces, la direction dans laquelle elles dérivent et leur épaisseur. Dans les faits, nous modifions nos trajets par nécessité pour éviter de nous retrouver coincés dans les glaces. Nous examinons les cartes tous les jours. Nous prenons des renseignements non seulement d'Environnement Canada, mais aussi de stations d'observation météorologique locales à divers endroits qui peuvent nous donner les renseignements les plus à jour possible.

Capt Madiwal : En outre, nous avons installé notre propre station d'observation météorologique à Port-aux-Basques, à Terre-Neuve. Nous surveillons les rafales de vent et les données en temps réel sur les vents. Cela nous aide à prendre des décisions.

Le sénateur Munson : J'ai quelques questions techniques pour le capitaine Griffiths. J'ai remarqué dans votre tableau à la page 2 qu'il y a des bateaux-pilotes partout, en quelque sorte. Le Québec entre en jeu au milieu de tout cela. Les pilotes qui travaillent dans la région de Gaspé et dans la partie méridionale juste en dessous du Labrador sont-ils aussi au service de l'État? Êtes-vous en contact avec eux?

Capt Griffiths : Oui, monsieur. Il y a quatre administrations au pays. Nous couvrons ce que vous voyez ici. L'Administration de pilotage des Laurentides couvre le fleuve jusqu'à la rive nord du Québec. L'Administration de pilotage des Grands Lacs couvre la voie maritime et les Grands Lacs, et l'Administration de pilotage du Pacifique couvre la côte Ouest du pays.

Si vous voyez une ville appelée Restigouche en bleu dans le nord du Nouveau-Brunswick, juste au nord de cet endroit, sur la rive sud de la péninsule gaspésienne dans la baie des Chaleurs, il y a une petite lamelle du territoire québécois qui relève de nous. C'est une toute petite partie du Québec. Le reste relève de l'Administration de pilotage des Laurentides.

Le sénateur Munson : Avez-vous des problèmes au plan linguistique?

Capt Griffiths : Non, nous n'en avons aucun.

Le sénateur Munson : Le personnel des administrations de pilotage qui fait affaire avec le Québec dans cette région est bilingue.

Capt Griffiths : Oui les pilotes du nord du Nouveau-Brunswick le sont.

Le sénateur Munson : Je suis certain qu'il existe un jargon des marins et tout. L'Administration de pilotage a-t-elle le moindre problème linguistique lorsqu'elle fait affaire à des navires étrangers? Cela peut-il poser problème de temps à autre? J'ai entendu dire que ce pouvait être le cas.

Capt Griffiths : Absolument, sénateur. La langue internationale de la mer est l'anglais. Tout le monde est censé parler anglais, mais les niveaux d'anglais varient d'un navire et d'un port à l'autre. C'est un mal nécessaire avec lequel nos pilotes composent chaque jour dans tous nos ports quand ils accueillent des navires étrangers. C'est difficile, mais il y a bien des façons de traiter la chose. Nos équipages s'en tirent très bien, alors il n'y a aucun problème.

Le sénateur Munson : J'ai une dernière question. Je suis curieux de savoir qui forme les pilotes. Ont-ils seulement des connaissances locales ou ont-ils déjà été dans la marine? S'agit-il d'anciens pêcheurs?

Nous voyons l'énorme quantité de travail qu'ils font en particulier dans ce port pour déplacer les navires. Je crois comprendre qu'ils relèvent maintenant le pont pour laisser passer des conteneurs massifs. Je suis sûr que le sénateur McInnis connaît l'histoire, mais pas moi. Je crois comprendre qu'on ne fait que le rehausser de trois mètres. Comment travaillez-vous avec tout cela?

Capt Griffiths : En réponse à votre première question, les capitaines nous arrivent de différentes disciplines; on y trouve de tout, des capitaines de remorqueurs aux capitaines de traversiers, en passant par des commandants de la Garde côtière, de la marine et de la marine marchande. Ils viennent tous pour être pilotes.

Le programme de formation offert à Halifax peut prendre environ trois ans. Lorsqu'un capitaine au long cours rejoint notre administration, il commence comme apprenti : en gros, il passe trois ou quatre mois à observer et à apprendre dans le contexte d'une centaine d'emplois différents. Au bout du compte, on lui fait passer un examen pour déterminer sa connaissance locale du port. Il s'agit d'une épreuve écrite et orale qui prend environ une journée complète. On lui pose des questions sur chaque coin, chaque contour, chaque bouée, chaque recoin du port qu'il doit connaître par cœur.

S'il réussit — et ils réussissent tous — il obtiendra les permis de pilotage pour le tonnage le plus bas. Il peut piloter seul tous les navires de moins de 10 000 tonnes, mais il doit toujours aller chercher de la formation pour piloter les navires au-dessus de cette limite.

Le sénateur Munson : S'agit-il d'un employé salarié?

Capt Griffiths : Dans notre administration, ce sont tous des employés salariés. Ce n'est pas le cas dans le fleuve ou en Colombie-Britannique.

Le sénateur Munson : Les nouveaux navires porte-conteneurs qui arrivent posent manifestement un autre risque. À vue de nez, il y en a d'aucuns dont la taille défie la gravité. Ils sont plus hauts que les immeubles à Halifax.

Capt Griffiths : Dans tous les cas, on calcule la taille des navires avant qu'ils arrivent. On tient compte de leur tirant d'air, c'est-à-dire à partir de la ligne de flottaison jusqu'au sommet du fouet de l'antenne VHF. C'est habituellement le point le plus élevé du navire. S'il mesure 41 mètres ou moins, il peut aller dans les Narrows. La marée entre en ligne de compte.

Le nombre de conteneurs qui se trouvent sur le navire le feront caler davantage dans l'eau. Plus il y a de poids à bord, plus il va caler, ce qui est préférable pour nous. Nous tenons toujours compte de ces éléments.

Pendant le projet Big Lift, nos pilotes ont assisté, dès le départ, à des réunions bihebdomadaires avec la commission du pont et des réunions hebdomadaires avec l'Administration portuaire d'Halifax pour s'assurer que la marine marchande ne serait pas touchée à Halifax et qu'on communiquerait avec l'industrie concernant la nouvelle hauteur du pont, la reprise des travaux et la fin de ceux-ci. On a abordé tous les points touchant ce pont dans le contexte de la marine marchande.

Le sénateur Munson : Ma dernière question en est une que l'un de nous pose normalement en raison du rapport que nous devons rédiger. Elle peut être posée de façon positive ou négative. Elle concerne la satisfaction à l'égard des communications avec la Garde côtière et les autres intervenants dans le cadre des opérations de sauvetage.

Devrions-nous en faire davantage? Devrions-nous mieux communiquer? La méthode actuelle fonctionne-t-elle à 100 p. 100? Et pour ce qui est de l'aspect négatif de la question : de quoi êtes-vous insatisfait?

Capt Griffiths : J'estime qu'il y a toujours moyen d'améliorer les communications à tous les niveaux. En règle générale, les communications ou les communications améliorées sont gratuites. Vous n'avez pas à les payer. Vous n'avez qu'à vous efforcer de les rendre efficaces.

Je pense que nous sommes insatisfaits lorsque nous avons un malentendu quand vient le temps de déterminer s'il est préférable que la Garde côtière ou un navire de passage intervienne dans une situation donnée. Il est possible que ce ne soit qu'une question de communications, qu'il suffise de s'asseoir avec les représentants du centre de coordination de sauvetage pour passer en revue les choses qu'il nous reste à faire.

Le temps file, mais il y a toujours moyen d'améliorer les communications, et nous prévoyons le faire.

Le sénateur Munson : Je suis certain que d'autres exploreront cet aspect crucial de la question.

Le sénateur McInnis : Nous avons remarqué que vous étiez préoccupés à l'idée de recevoir un appel du centre conjoint de coordination de sauvetage. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais vous l'avez mentionné à plusieurs reprises. Êtes-vous financés par les ports membres ou par les utilisateurs-payeurs?

Capt Griffiths : Par les utilisateurs-payeurs. Notre structure tarifaire est fondée sur un tarif ou un droit imposé à chaque navire. Il permet de payer le salaire du pilote, les opérations des bateaux, mon salaire, notre loyer, les améliorations locatives, tout.

Le sénateur McInnis : Comment détermine-t-on qu'il doit y avoir un pilote à bord dans un port?

Capt Griffiths : On suit la méthode de gestion des risques de pilotage. Le sénateur Manning sait trop bien de quoi il s'agit. C'est essentiellement une évaluation des risques menée par un tiers facilitateur au nom du conseil d'administration de l'Administration de pilotage de l'Atlantique. On mènerait une étude sur les risques relatifs au développement d'un nouveau port ou à l'augmentation importante du trafic dans un port si on commence à expédier du pétrole qu'on n'expédiait pas avant et que le risque est si faible qu'un pilotage obligatoire n'est pas nécessaire. Le tiers facilitateur recommanderait que le pilotage soit désormais obligatoire ou que l'on maintienne le statu quo. Cette recommandation serait présentée au conseil, qui l'accepterait ou la rejetterait. Ensuite, un règlement serait publié dans la Gazette du Canada. Voilà comment un port devient obligatoire ou non obligatoire.

Le sénateur McInnis : Prenez un port comme celui de Sheet, qui exige un pilote. Le pilote doit-il demander à une autre personne de l'emmener au navire? Comment cela fonctionne-t-il?

Capt Griffiths : Aujourd'hui, le port de Sheet est non obligatoire. Il n'est pas obligatoire d'avoir un pilote dans ce port.

Le sénateur McInnis : Oh, vraiment.

Capt Griffiths : Non.

Le sénateur McInnis : Avant, c'était obligatoire.

Capt Griffiths : Ce l'était, oui. Le trafic a diminué de façon dramatique il y a un certain nombre d'années mais, curieusement, nous étudions à nouveau ce port. Nous examinons tous nos ports en Nouvelle-Écosse, au Nouveau Brunswick, à Terre-Neuve et à l'Île-du-Prince-Édouard et faisons un survol du trafic pour voir si la situation a changé au cours des cinq dernières années. Doit-on l'examiner de plus près? Devrions-nous l'étudier à nouveau?

Compte tenu de l'augmentation du trafic dans le port de Sheet au cours des dernières années, nous l'examinons. Nous essayons actuellement de déterminer s'il y a suffisamment de risques pour justifier le pilotage obligatoire ou s'il y a lieu de maintenir le statu quo.

Le sénateur McInnis : Il est possible d'avoir du temps relativement mauvais. Nous avons vu vos photos du pilote qui montait dans l'échelle dans certains de ces énormes navires. Que se passe-t-il lorsque le temps est mauvais et qu'il lui est impossible de le faire? Le navire jette-t-il l'ancre? Qu'arrive-t-il?

Capt Griffiths : Un certain nombre de choses peuvent se produire. Premièrement, les navires n'entrent pas dans le port si nous sommes incapables de monter à leur bord. Cela peut arriver.

Deuxièmement, selon la géographie et le port dont il est question, les conditions météorologiques peuvent être mauvaises au poste d'embarquement, mais assez bonnes tout juste à l'intérieur de l'aire d'embarquement pour faire embarquer un pilote. Dans ce cas, si vous vous rendez à la page 5 où il est question de nos bateaux-pilotes, notre nouvelle flotte est équipée d'une technologie avancée qui guide les bateaux. Nous avons des dispositions et des règlements qui nous autorisent à avoir un pilote à bord du bateau-pilote pour piloter un navire dans la zone de pilotage et jusqu'en lieu sûr où il peut embarquer. C'est une autre option.

Troisièmement, s'il est question de départ, nous avons transporté des pilotes à maintes reprises. Si le temps est trop mauvais pour faire débarquer un pilote, il restera tout simplement à bord du navire-citerne ou du porte-conteneur et débarquera au port d'escale suivant. Les transporteurs maritimes sont plus que disposés à le faire. Cela représente une petite fraction du coût qu'ils devraient payer en retardant leur horaire d'un jour ou deux. Nos pilotes apportent une valise. Ils rejoignent le navire et reviennent quelques jours plus tard.

La sénatrice Poirier : En fait, une bonne partie de mes questions ont déjà été posées par quelqu'un d'autre. Je vais simplement m'étendre un peu sur ce que le sénateur McInnis a mentionné. Les bateaux-pilotes appartiennent à la société d'État. Ai-je raison?

Capt Griffiths : Ils nous appartiennent, oui.

La sénatrice Poirier : Et les pilotes sont des employés?

Capt Griffiths : Ce sont des employés, oui.

La sénatrice Poirier : Je sais que vous avez mentionné que la Garde côtière ne fait habituellement appel à vous que deux ou trois fois par année peut-être. Pendant une journée normale, vous est-il arrivé de devoir vous déplacer pour répondre à un appel que vous auriez reçu, mais d'avoir eu des problèmes et d'avoir dû les appeler pour venir vous aider?

Capt Griffiths : Non.

La sénatrice Poirier : Pour en revenir au premier groupe, et encore une fois un de mes collègues en a parlé, est-ce que la capacité d'accueillir 3 010 passagers est par navire ou pour vos quatre navires combinés?

M. Hupman : Pour nos quatre navires combinés.

La sénatrice Poirier : Je sais qu'on vous a déjà demandé si, en cas d'urgence, vous estimiez pouvoir évacuer tous les passagers de vos bateaux en même temps. La raison pour laquelle je veux y revenir est que, pendant notre visite à Greenwood hier, on a soulevé une préoccupation concernant le nombre accru de grands navires — comme des navires de croisière — qui y arrivent depuis quelques années et qui continueront de le faire.

Ils font de la formation continue pour veiller à avoir la capacité de réaction nécessaire en cas de catastrophe. Ce qui les préoccupe actuellement, c'est de savoir s'ils ont la capacité, avec tous leurs partenaires, de sauver le plus de gens possible en cas d'incident majeur. Avez-vous la certitude, en ce moment, que vos traversiers ont cette capacité, ou devrez-vous demander l'aide de vos partenaires?

M. Hupman : Parlons d'abord de l'exigence à laquelle nous devons satisfaire, dont le capitaine Madiwal a parlé plus tôt. Pendant une traversée, si nous nous retrouvions dans une situation où l'évacuation du navire était nécessaire, nous aurions la capacité de faire monter tous les passagers dans des radeaux de sauvetage et des embarcations de sauvetage. Nous sommes en mesure d'évacuer le navire. C'est à ce moment-là, lorsque tous les passagers sont dans des embarcations, que commence l'opération de sauvetage massive dont nous parlions. On pourrait avoir 1 000 personnes sur l'eau, dans des radeaux. Étant donné les conditions difficiles dans le golfe, on ne peut prédire quelles seront les conditions pendant une période de temps donnée. À titre d'exemple, il peut faire extrêmement froid à la mi-février, et même en juillet.

En ce qui concerne les services ou les opérations de sauvetage massives dont le capitaine Madiwal a parlé, nous n'avons pas une très bonne connaissance des capacités d'intervention directe de la Garde côtière, et nous ignorons si elle devrait faire appel à divers groupes de partenaires.

La sénatrice Poirier : D'après ce que j'ai entendu, elle devrait en effet faire appel à divers partenaires. La dernière question que je souhaite vous poser est la suivante : vous vous retrouvez sur l'eau tous les jours; combien de fois avez vous demandé l'aide d'autres personnes pour une opération de sauvetage, et combien de fois avez-vous prêté assistance à une personne en détresse?

M. Hupman : Je travaille au sein de l'organisation depuis environ 18 ans. Je n'ai pas souvenir que nous ayons demandé l'aide d'une autre organisation.

La sénatrice Poirier : Mais vous avez porté secours à des gens.

M. Hupman : En moyenne, nous avons probablement dû intervenir deux fois par année. Je pense que cela correspond en quelque sorte aux propos de Sean. Nos navires sont devenus des bâtiments d'occasion.

Nos navires sont équipés d'embarcations de sauvetage rapide, que nous pouvons déployer pour nous rendre rapidement sur les lieux d'une urgence. Bon nombre de nos employés ont reçu une formation. Nos navires comptent également des salles médicales, pour les urgences. Elles servent davantage aux urgences médicales à bord, mais elles peuvent être utilisées au besoin. Nous avons également des aires d'atterrissage d'hélicoptères, comme le capitaine Madiwal l'a indiqué, dans les cas où une évacuation médicale aérienne serait nécessaire. Nous avons donc ces capacités supplémentaires.

Le problème principal est la taille considérable du navire, qui fait 200 mètres de longueur. Il faut donc savoir ce que l'on fait lorsqu'on s'approche d'un petit navire de pêche. Parfois, nous ne faisons qu'offrir une protection. Nous nous plaçons en amont du vent et nous protégeons l'autre navire du vent ou des intempéries pour que les gens puissent procéder aux mesures d'urgence nécessaires.

La sénatrice Poirier : L'appel viendrait alors du CCCOS?

M. Hupman : Oui, mais nous répondons aussi aux appels vocaux. Si nous estimons que notre navire est le plus proche, nous répondons à l'appel pour indiquer que nous allons intervenir.

Le président : J'ai une question complémentaire. Plus tôt, capitaine Griffiths, vous avez mentionné que vous avez dû, à une occasion, prendre la décision de ne pas intervenir en réponse à une demande d'aide. Il doit être très difficile de prendre une telle décision parce qu'après, la situation peut devenir une question de vie ou de mort.

Je comprends la situation difficile dans laquelle vous vous retrouvez parfois lorsque vous recevez une demande d'assistance. Je me demande simplement comment cela fonctionne. La décision relève-t-elle uniquement de vous? Est ce une décision commune? Comment en arrive-t-on à cette décision?

Capt Griffiths : Cette décision précise a été prise après un examen de tous les faits, simultanément. Nous avions un navire qui passait à proximité de Sydney dans son trajet le long de la côte de la Nouvelle-Écosse. Selon la Garde côtière ou le CCCOS, la situation n'exigeait pas une évacuation médicale par canot de service ou par hélicoptère. C'était la nuit, et il y avait des vagues de trois à quatre mètres. Le bateau-pilote n'était pas équipé de matériel d'intervention d'urgence et son personnel n'avait aucune formation. Compte tenu de tous ces facteurs et de sa condition à ce moment là, j'ai jugé qu'il serait trop risqué d'intervenir. Je crois que le navire a simplement poursuivi sa route jusqu'à Halifax. Un pilote a amené le navire au port. L'homme a été transporté à l'hôpital par un agent.

Le président : Y a-t-il eu un suivi avec le CCCOS concernant cet incident? Je me demande simplement sur quoi ils ont fondé la demande. Je comprends très bien les motifs de votre décision. En ce qui concerne la décision initiale prise par le CCCOS, qui était de vous contacter, y a-t-il eu un suivi à cet égard? A-t-on mis en place un plan B en prévision d'un éventuel incident de ce genre?

Capt Griffiths : Oui. Nous avons depuis élaboré un protocole pour les diverses demandes d'interventions qui nous sont faites par le CCCOS. Nous avons inclus dans ce protocole des passages sur les évacuations médicales et les évaluations médicales pour les blessures ne mettant pas la vie en danger. L'Administration ne devrait pas se charger de telles situations.

Nous avons eu des discussions de suivi avec le CCCOS après l'incident. Les gens du CCCOS ont souscrit à notre position; ils voulaient simplement savoir si nous étions prêts à le faire. Certaines entreprises semblent parfois se dire qu'étant donné qu'il y a toujours, dans le port, un bateau-pilote doté en personnel et prêt à intervenir, il suffit de l'appeler. Toutefois, nous ne pouvons le faire; cela ne relève pas de nous et cela ne fait pas partie de nos activités principales.

Ils ont accepté notre décision de ne pas le faire. Le risque de perte était trop grand, et ils ont laissé le navire poursuivre sa route jusqu'à Halifax.

Le sénateur Enverga : Lorsque vous aidez la GCC, cela entraîne des coûts. Vous sont-ils remboursés? Demandez vous un remboursement?

Capt Madiwal : Non, nous ne demandons pas un remboursement. Je crois savoir qu'en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, nous avons le devoir de prêter assistance à un navire en détresse. Cela dépend de l'endroit où se trouve le navire. Il est possible que nous soyons le bâtiment d'occasion, dont Murray a parlé. À ce moment-là, nous serons tenus de mener une opération de sauvetage. Il s'agit là de la principale responsabilité de tout marin et de tout exploitant de navire.

Capt Griffiths : Il en va de même de notre côté. Nous ne demandons aucun remboursement et nous ne facturons pas ces services. Comme le capitaine l'a indiqué, nous sommes tenus de le faire de toute façon.

Capt Madiwal : Ce n'est pas seulement une exigence en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada. Cela fait aussi partie de la Convention internationale sur la recherche et le sauvetage maritimes, de la Convention des Nations Unies sur la haute mer et de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

Le président : C'était une franche discussion. Merci beaucoup d'avoir pris le temps de vous joindre à nous ici ce matin.

Chers collègues, notre prochain point à l'ordre du jour est le suivant : est-il convenu de permettre l'enregistrement d'une partie de la réunion, pourvu que cela ne nuise pas à nos délibérations?

Des voix : D'accord.

Le président : J'aimerais remercier la sénatrice Poirier de s'être occupée des demandes des médias francophones. Je viens de Terre-Neuve. Comme je cherche toujours à maîtriser la langue anglaise, certains jours, je vais laisser la sénatrice Poirier s'occuper des choses qui se font en français.

Avec notre prochain groupe d'experts, nous discuterons des activités de recherche et de sauvetage maritimes du point de vue des pêcheurs et de l'industrie de la pêche. Dans un premier temps, je demanderais à nos invités de se présenter, puis nous passerons aux exposés que certains d'entre eux ont préparés, d'après ce que je comprends.

Mitchell Jollimore, secrétaire, Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard : Mitchell Jollimore, secrétaire, Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard.

Craig Avery, président, Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard : Craig Avery. Je suis président de l'Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard et membre de la zone 3, la Garde côtière auxiliaire de l'Île-du-Prince-Édouard.

[Français]

Jean Lanteigne, président, Conseil canadien des pêcheurs professionnels : Je suis Jean Lanteigne, directeur général de la Fédération régionale acadienne des pêcheurs professionnels, située à Shippagan, au Nouveau-Brunswick. À ce titre, j'assume les fonctions de directeur général et de président du Conseil canadien des pêcheurs professionnels, qui représente les pêcheurs dans l'ensemble du pays.

[Traduction]

Stewart Franck, directeur exécutif, Fisheries Safety Association of Nova Scotia : Bonjour. Je m'appelle Stewart Franck, et je suis le directeur général de la Fisheries Safety Association of Nova Scotia.

Le président : La parole est à vous, monsieur Avery.

M. Avery : Monsieur le président Manning, mesdames et messieurs les membres du comité sénatorial, bonjour. Je suis le capitaine Craig Avery. Je suis également président de l'Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard, ou PEIFA.

Outre mes fonctions au sein de l'association, j'ai pratiqué la pêche de diverses espèces pendant plus de 40 ans. J'ai été membre de la Garde côtière auxiliaire pendant 16 ans. Aujourd'hui, je suis accompagné du capitaine Mitchell Jollimore, un pêcheur actif qui est membre de la direction de la PEIFA.

Les activités de recherche et sauvetage sont un enjeu très important pour moi et pour les 1 300 pêcheurs professionnels désignés que je représente. Nous formons un élément clé des activités de recherche et sauvetage menées dans les eaux côtières au large de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous nous acquittons de nos responsabilités avec le plus grand sérieux et nous sommes reconnaissants d'avoir l'occasion de présenter nos observations sur les défis et les possibilités qui existent, en tant que membres auxiliaires.

La Garde côtière auxiliaire de l'Île-du-Prince-Édouard compte 99 membres, répartis dans deux zones. La zone 3, dont je fais partie, compte 50 membres, et la zone 4 en compte 49. Notre flotte auxiliaire est principalement composée de bateaux de pêche d'une longueur de 40 à 45 pieds.

Nous savons également, selon les informations publiées sur la page de recherche et sauvetage du site web de la Garde côtière, qu'on vise à ce que la Garde côtière auxiliaire se charge de 20 p. 100 des appels de recherche et sauvetage. On a observé au cours des dernières années un recours accru aux services de la Garde côtière auxiliaire pour le remorquage de bateaux pendant la saison de pêche active. Il s'agit de situations où le navire en détresse et son équipage ne sont pas en danger.

Nous proposons que le personnel à temps plein de la Garde côtière soit placé sur appel, lorsqu'un navire de la Garde côtière est disponible, car la participation à de telles opérations pourrait représenter une perte de revenus considérable pour les membres auxiliaires, selon le moment de la saison. En général, ces pertes financières ne peuvent être recouvrées.

Actuellement, deux des 44 navires de la Garde côtière basés au Canada atlantique sont affectés à l'Île-du-Prince Édouard. Nous recommandons l'ajout d'un troisième navire de recherche et sauvetage à l'Île-du-Prince-Édouard, navire qui serait chargé de la plupart des remorquages de navires de plaisance pendant la saison de la pêche.

La Garde côtière canadienne et la Garde côtière auxiliaire de l'Île-du-Prince-Édouard entretiennent depuis longtemps des relations étroites à l'Île-du-Prince-Édouard. Les deux flottes ont souvent participé ensemble à des opérations très risquées et dangereuses visant l'atteinte d'un objectif commun : sauver des vies.

Nous espérons que le comité sénatorial examinera attentivement ces recommandations visant l'amélioration du service dans le cadre de la préparation de son rapport et qu'il conclura que ces mesures permettront de mieux servir la communauté maritime et de sauver des vies.

L'Association des pêcheurs de l'Île-du-Prince-Édouard et moi-même sommes reconnaissants de l'occasion qui nous a été donnée de parler de nos préoccupations au comité sénatorial. C'est avec plaisir que nous répondrons aux questions des sénateurs concernant nos recommandations.

Je tiens aussi à mentionner que nous avons reçu ce matin un courriel d'un de nos collègues, qui représente la Confédération des Mi'kmaq de l'Île-du-Prince-Édouard. La plupart de leurs navires se trouvent dans la région pour laquelle nous recommandons l'ajout d'un nouveau navire.

Si vous le permettez, je vais laisser à mon ami, Mitch, le soin de vous lire le courriel. C'est un message très court.

M. Jollimore : C'est une note de M. Ed Frenette, qui est coordonnateur de la liaison avec les pêches pour la Confédération des Mi'kmaq de l'Île-du-Prince-Édouard. Elle se lit comme suit :

La Confédération des Mi'kmaq de l'Île-du-Prince-Édouard appuie sans réserve l'ajout d'un navire de recherche et sauvetage à l'extrémité ouest de la zone de pêche au homard 24, en appui aux pêcheurs des collectivités de Lennox Island et d'Abegweit.

[Français]

M. Lanteigne : Bonjour. Je vais parler en français.

Mesdames et messieurs les sénateurs, monsieur le président du comité, j'aimerais tout d'abord vous remercier de cette invitation à comparaître devant vous. En tant que représentant de pêcheurs, je peux vous affirmer que nos membres ont à cœur la sécurité maritime.

Le Conseil canadien des pêcheurs professionnels (CCPP) est un organisme sans but lucratif qui contribue à la santé et à la vitalité de l'industrie de la pêche au Canada. Créé en 1995, le CCPP est constitué d'organisations de pêcheurs et est régi par un conseil d'administration. Les administrateurs du conseil proviennent d'organisations de pêcheurs de partout au Canada qui représentent la côte de l'Atlantique, la côte du Pacifique, les pêches en eau douce et les pêches des Premières Nations.

Le CCPP a pour principal objectif de veiller à ce que les pêcheurs aient les connaissances et les compétences nécessaires pour exercer leur métier et répondre aux besoins de main-d'œuvre actuels et futurs de l'industrie de la pêche au Canada. Bien entendu, cet objectif inclut les connaissances et les compétences nécessaires pour piloter de façon sécuritaire les navires de la flotte de pêche canadienne, qui compte plus de 20 000 vaisseaux dont la très vaste majorité mesurent moins de 65 pieds et sont opérés par des propriétaires indépendants.

Au cours des années, dans un effort de renforcer la culture de sécurité en mer de l'industrie, le CCPP a tenu plusieurs ateliers et des conférences nationales. Le conseil a aussi contribué à coordonner les efforts de l'industrie dans sa participation au Conseil consultatif maritime canadien (CCMC). Entre autres, le CCPP a élaboré des programmes de formation en sécurité maritime, tels que le programme de formation à distance de Capitaine Classe IV. Le conseil a aussi développé un simulateur électronique de stabilité des navires de pêches afin d'augmenter la compréhension liée à la stabilité et de diminuer les accidents.

II serait futile d'aborder le sujet des activités de recherche et de sauvetage (SAR) en les dissociant de la prévention. Après tout, les activités de SAR les plus efficaces sont celles qui n'auront jamais lieu. Au cours des 15 dernières années, l'industrie des pêches a contribué à diminuer le nombre d'incidents en mer et à renforcer la culture de la sécurité en mer grâce aux initiatives suivantes : la participation au CCMC; développement des formations adaptées aux besoins des pêcheurs; la mise sur pied de formations dans l'ensemble du pays en livrant directement la prestation de la formation ou en collaborant avec les maisons d'enseignement; la mise sur pied d'organismes de santé et de sécurité régionaux pour les pêcheurs; et les conférences et ateliers nationaux.

Toutefois, l'industrie considère qu'il reste beaucoup à faire en ce qui a trait à la sensibilisation et à la dissémination de l'information de sécurité. En 2012, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a publié le rapport d'enquête maritime intitulé Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada. À la page 68 du rapport, on peut lire ce qui suit :

Dès 1990, le Bureau a recommandé que TC « évalue l'efficacité de ses méthodes de diffusion de l'information sur la sécurité maritime destinée aux capitaines de bateaux de pêche et aux pêcheurs ». En 1995, le Bureau a de nouveau recommandé que TC, en collaboration avec d'autres ministères, organisations et organismes gouvernementaux, « mette immédiatement sur pied un programme national de promotion de la sécurité destiné à sensibiliser les exploitants et les équipages des petits bateaux de pêche aux effets que les pratiques d'exploitation dangereuses peuvent avoir sur la stabilité des navires ».

J'ai le regret d'annoncer que si une telle initiative a été mise sur pied, ce fut à l'insu des pêcheurs et des organisations de pêcheurs. Toujours selon le même rapport du BST :

[...] il reste encore du travail à faire pour en arriver à ce que l'information de sécurité ait un caractère plus pratique, soit plus facile à lire et soit plus accessible.

De l'aveu même du BST, les efforts de communication actuels ne portent pas leurs fruits, car on peut lire ce qui suit dans le rapport :

Malgré ces recommandations, les enquêtes du BST continuent de faire ressortir des lacunes de sécurité associées à la diffusion des messages et de l'information relatifs à la sécurité. Après un accident survenu en 2001 qui a impliqué le Alex B. 1, le Bureau a constaté que les BSN « ne semblent pas donner les résultats escomptés ».

Les organisations de pêcheurs et les associations de sécurité dans certaines régions travaillent à promouvoir la sécurité maritime. Toutefois, nous considérons que le manque de coordination et de collaboration à l'échelle nationale entre l'industrie et Transports Canada n'est pas résolu. D'ailleurs, le CCPP a produit un rapport sur la consultation nationale qu'il a tenue auprès de l'industrie au sujet de la formation. Bien que la consultation n'ait pas visé particulièrement la sécurité maritime, ces enjeux ont occupé une place importante au sein des discussions. On peut lire ce qui suit dans le rapport de 2014 :

Plus que jamais, l'industrie de la pêche souhaite la mise en place d'une stratégie de communication plus claire, cohérente et détaillée pour informer les pêcheurs à l'égard du Règlement sur le personnel maritime de Transports Canada.

Les participants ont entre autres proposé que l'industrie et Transports Canada unissent leurs efforts pour sensibiliser tous les pêcheurs.

Nous recommandons que Transports Canada collabore avec l'industrie pour mettre en œuvre une stratégie de communication claire, cohérente et détaillée en ce qui a trait à la promotion de la sécurité maritime et que Transports Canada soutienne les groupes de l'industrie dans leurs activités de promotion de la sécurité maritime auprès des pêcheurs. Nous recommandons aussi que Transports Canada maintienne les consultations régionales du CCMC, de même que les deux rencontres nationales annuelles du CCMC.

En ce qui concerne les opérations de recherche et de sauvetage, comme vous le savez, le temps de réponse est l'élément critique. Je me dois d'exprimer les vives inquiétudes de nos membres face aux fermetures de certaines stations SAR.

II est difficile d'imaginer, par exemple, comment la fermeture de la station de Rivière-au-Renard peut améliorer le temps de réponse. En effet, cette fermeture laisse prendre la relève aux stations des Escoumins et de Halifax pour une très grande partie du fleuve et du golfe du Saint-Laurent. En plus de créer des distances plus grandes d'intervention, ces fermetures peuvent compromettre les activités SAR de deux façons : premièrement, en compromettant la capacité d'être parfaitement compris dans l'une ou l'autre des langues officielles lors des communications dans les situations d'urgence, et deuxièmement, la distance et la superficie accrue du territoire couvert par ces stations rendent la tâche difficile pour les opérateurs d'acquérir une connaissance intime du territoire couvert. Cette situation augmente les risques d'interventions mal aiguillées et, conséquemment, les risques de tragédie.

Quant à la flotte d'intervention, des bateaux de sauvetage de la Garde côtière sont amarrés dans plusieurs ports le long de la côte pour respecter des délais rapides d'intervention. Toutefois, il apparaît que certains équipements ne sont pas adéquats pour répondre aux besoins de toutes les flottilles. Les vaisseaux Cape 47 MLB sont adaptés pour répondre aux besoins de la flotte côtière, puisque cette dernière est composée de bateaux de moins de 45 pieds ayant habituellement à leur bord d'un à trois membres d'équipage et qui naviguent en zone côtière. Toutefois, ce type d'équipement peut difficilement intervenir pour la flotte semi-hauturière qui opère des navires de 65 pieds et plus ayant souvent à leur bord cinq membres d'équipage et qui naviguent à plusieurs dizaines de milles des côtes dans les conditions difficiles du golfe du Saint-Laurent ou de la haute mer. De plus, ce type de navires n'est pas construit pour fonctionner dans des conditions hivernales.

Les vaisseaux ARUN 52, en plus d'être capables de travailler dans toutes les conditions, ont un rayon d'action de 100 milles. Ce type de vaisseau est utilisé majoritairement en Nouvelle-Écosse. En fonction de la flottille de la pêche crabière et crevettière du Québec et du Nouveau-Brunswick, qui représente environ 200 bateaux de pêche dans la catégorie de 65 pieds à 80 pieds (19 à 24 mètres), nous considérons qu'il est extrêmement important de couvrir ces régions avec ce type de bateau. Pour terminer sur ce point, nous ajoutons que nous avons été témoins, certains automnes, du retrait de l'eau du vaisseau Cape 47 MLB basé à Shippagan, pendant que deux bateaux de type senneur étaient encore actifs à la pêcherie. Les conditions météo étant dangereuses pour le Cape 47, alors on a cessé le service. S'il y avait eu urgence à ce moment-là, aucun navire de sauvetage n'aurait été à proximité pour offrir un service de secours. C'est jouer avec le feu!

Nous recommandons donc de revoir avec l'industrie le positionnement des équipements en fonction des flottilles de pêche desservies.

S'agissant des protocoles de détresse, il est entendu que les activités de recherche et de sauvetage se mettent en branle lorsqu'un navire est en détresse. II arrive, dans certains cas de bris mécaniques, qu'un navire ne soit pas en détresse par une mer clémente. Toutefois, le navire peut subitement être en péril dans l'éventualité d'une détérioration des conditions météorologiques.

Nous recommandons que la Garde côtière, en collaboration avec l'industrie, révise les protocoles d'intervention en tenant compte de la situation géographique du navire et des changements météorologiques possibles.

Au chapitre des changements climatiques, dans certaines régions, on observe de plus en plus d'événements météorologiques extrêmes qui créent des risques accrus de pertes de vie et de navires. Nous recommandons la collaboration avec l'industrie afin de rendre les rapports météorologiques plus précis et plus fréquents et afin de s'assurer que les ports de refuges sont adéquats et que la réponse SAR est adaptée.

En ce qui a trait à la politique des pêches et à la sécurité maritime, en 1996, Transports Canada et le ministère des Pêches et des Océans (MPO) ont signé le Protocole d'entente concernant la sécurité du transport maritime et la protection du milieu marin. Depuis ce temps, beaucoup de choses ont été accomplies, notamment en ce qui concerne les dates d'ouverture des pêches dites compétitives qui peuvent être repoussées dans le cas de prévisions météorologiques dangereuses.

Nous recommandons que Transports Canada et le MPO travaillent davantage de concert avec l'industrie afin de s'assurer de capturer les spécificités régionales et les pratiques des différentes flottilles pour veiller à ce que des effectifs SAR suffisants soient sur place lors des journées d'ouverture des pêches compétitives.

En conclusion, l'industrie désire une collaboration accrue avec les agences réglementaires et la Garde côtière afin de faire davantage de prévention et d'être consultée davantage sur les enjeux de SAR. L'industrie recommande aussi fortement de rétablir les niveaux de services d'avant les fermetures des stations SAR afin d'assurer une réponse adéquate aux appels de détresse.

Monsieur le président, chers sénateurs, merci de votre attention. Je demeure disponible pour répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président : Merci, monsieur Lanteigne. Monsieur Franck?

M. Franck : Monsieur le président, honorables sénateurs, chers invités et témoins, bonjour. Je vous remercie de votre invitation de faire une présentation au Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je suis honoré de vous informer au sujet de la Fisheries Safety Association of Nova Scotia, que j'appellerai FSANS.

La FSANS a été lancée en 2010 après avoir été constituée par l'industrie, pour l'industrie. Nous sommes une petite organisation non gouvernementale sans but lucratif menée par un conseil de direction bénévole dévoué qui représente la transformation et la récolte du poisson et l'aquiculture, et nous bénéficions d'un appui solide de conseillers du gouvernement notamment dans les secteurs des ports pour petits bateaux ainsi que de la conservation et de la protection du ministère des Pêches et Océans. Vous trouverez dans la pièce jointe aux notes la liste des membres de notre conseil d'administration et de nos conseillers.

La FSANS peut conseiller, consulter et formuler des recommandations relativement aux questions de sécurité en milieu de travail qui touchent le secteur des pêches dans la province de la Nouvelle-Écosse, y compris les bateaux de pêche en exploitation à l'extérieur des ports de la Nouvelle-Écosse. Nous ne prétendons pas être ni ne sommes une autorité ou un organisme spécialisé dans les affaires, les opérations ou les rouages exhaustifs de la Garde côtière canadienne, de la Garde côtière auxiliaire canadienne ou du système de recherche et sauvetage.

La FSANS a pour mandat d'améliorer la sécurité, de rendre l'industrie attrayante aux nouveaux travailleurs tout en protégeant les travailleurs existants, de donner des conseils sur l'évaluation du risque, la prévention des blessures et le contrôle des pertes qui mènent inévitablement à une diminution des coûts, dont la réduction des frais d'indemnisation des travailleurs au fil du temps. La FSANS et ses partenaires en prévention s'emploient à rendre les industries des pêches et de la transformation plus sécuritaires — souvent une personne, un quai ou une communauté à la fois — et l'industrie réagit en améliorant son rendement de façon remarquable.

J'ai envoyé une présentation sous forme de diapositives. Je ne sais pas si vous aurez l'occasion de la parcourir. Toutefois, toutes les informations se trouvent dans les notes. Je vais maintenant passer à la diapositive no 4.

La FSANS cherche à « inscrire la sécurité dans la nouvelle tradition » dans une industrie souvent reconnue pour son historique de tragédies, de pertes de vies, d'acceptation du risque et de résistance au changement. Il faut diverses approches, initiatives, associations et stratégies pour adapter une culture de manière à ce qu'elle soit axée sur la sensibilisation et la prévention.

À la diapositive no 5, on indique que ces dernières années, les conversations ont évolué vers le port de vêtements de flottaison individuels, la prise de meilleures décisions en matière de risque, des navires mieux équipés, et les mesures requises pour revenir à la maison en toute sécurité. Le travail se poursuit, mais il y a maintenant beaucoup de récits au dénouement plus heureux et on constate une diminution considérable des incidents graves et des coûts afférents.

La diapositive no 6 traite du plan d'action quinquennal sur la sécurité des pêches, intitulé « Fishing Safety Now », qui a été lancé en juin 2015. Encore une fois, des pêcheurs ont pris les devants, le plan ayant été élaboré par l'industrie, pour l'industrie. À ce titre, le plan a été communiqué à l'industrie afin qu'elle le mette en œuvre par l'intermédiaire de la FSANS et du Nova Scotia Fisheries Sector Council. Le plan vise à faire en sorte que l'industrie des pêches devienne l'une des industries les plus sûres en Nouvelle-Écosse.

La diapositive no 7 indique que la pêche demeure une industrie très dangereuse. La Commission d'indemnisation des accidents du travail de la Nouvelle-Écosse a indiqué en 2015 qu'un pêcheur de la Nouvelle-Écosse est jusqu'à 40 fois plus susceptible de trouver la mort dans le cadre de son travail que le travailleur moyen de la province. Et si ce n'était que 20, 10 ou 5 fois plus? Nous continuerons d'améliorer graduellement la situation dans ce secteur jusqu'à ce qu'il soit plus sécuritaire que la moyenne.

Nous sommes très conscients de l'excellent travail qu'accomplissent la Garde côtière canadienne, la Garde côtière auxiliaire canadienne et tout le système de recherche et de sauvetage maritime, notamment sur les plans de la recherche et du sauvetage, de la prévention et de l'aide à la navigation. Ces intervenants dévoués affrontent régulièrement des risques pour aider et protéger d'autres personnes, y compris des pêcheurs de la Nouvelle-Écosse. En fait, un grand nombre de pêcheurs de cette province agissent à titre de membres et de bénévoles au sein de la Garde côtière auxiliaire canadienne. À tout moment, le commandant du système de recherche et de sauvetage, la Garde côtière ou le Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage peuvent faire appel à l'incroyable ressource que constituent les milliers de bateaux de pêche de passage, qui peuvent participer aux opérations de sauvetage et récupération, et aider d'autres navires en panne ou en détresse. Nous leur sommes vraiment reconnaissants de déployer ces efforts.

En ce qui concerne les défis que présentent les activités de recherche et de sauvetage, sachez que la Fisheries Safety Association est avant tout une organisation de santé et de sécurité au travail. Nous nous préoccupons principalement de la sécurité des pêcheurs de la Nouvelle-Écosse et des autres personnes se trouvent sur l'eau ou à proximité, notamment les employés et les bénévoles qui participent à des opérations de recherche et de sauvetage. Il est bien suffisant de voir un équipage de pêche courir des risques en raison de circonstances connues ou imprévues, avec les variables afférentes à la navigation dans les eaux de l'Atlantique Nord; le fait de voir également des sauveteurs potentiels courir des risques constitue une grande source de préoccupation.

Le dernier lundi de novembre a lieu ce qui s'appelle le jour de dépôt des casiers le long de la côte sud du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse : c'est le début de la saison de la pêche au homard. La même procédure se déroule à divers moments dans d'autres régions de la province et du Canada atlantique. La Fisheries Safety Association craint que si des centaines de navires de pêche quittent de nombreux petits ports en toute hâte pour atteindre leurs territoires de pêche préférés, les ressources de recherche et de sauvetage ne soient dispersées, ce qui pourrait nuire à leur capacité d'intervenir rapidement. Advenant des appels à l'aide ou des urgences simultanés, le potentiel de confusion ou de communication de renseignements en double ou contradictoires pourrait nuire aux temps de réaction et à la capacité d'accorder la priorité aux cas les plus urgents.

Les occasions d'activités de recherche et de sauvetage maritimes, de sensibilisation et d'établissement de relations avec l'industrie, les organisations de sécurité et les pêcheurs au quai devraient être respectées. Des groupes peuvent communiquer des messages clés aux intéressés dans l'industrie de la pêche, les sensibiliser davantage et contribuer à réduire le nombre de situations d'urgence. Pour leur part, les divers pêcheurs peuvent influencer leurs coéquipiers et l'ensemble de la communauté.

Il faudrait tirer parti de l'expérience de recherche et de sauvetage pour favoriser l'éducation et la sensibilisation du public, contribuer à tirer des leçons et élaborer des études de cas fondées sur des situations d'urgence et des réactions réelles, tout en respectant les préoccupations relatives à la sensibilité et à la vie privée.

Une présence accrue de responsables de recherche et de sauvetage au quai contribue à favoriser et à appuyer la tenue d'exercices de récupération, d'activités de simulation et de sauvetage. Nous comprenons toutefois qu'il faille beaucoup de temps à la Garde côtière pour se rendre à une activité, même en hélicoptère.

On pourrait procéder à une réaffectation majeure des ressources, les faisant passer des activités de recherche et sauvetage à des activités de prévention. Les organisations de sécurité ont besoin de ressources supplémentaires et d'un soutien initial accru afin de faire la promotion des dispositifs de flottaison individuels, de la prise de décision fondée sur le risque, de l'éducation, des études de cas axées sur l'industrie, des rencontres de discussion ouverte sur la sécurité, et cetera

La diapositive no 10 indique qu'il faut faire connaître efficacement l'utilisation expressément approuvée des dispositifs et des aides de flottaison individuels et des gilets de sauvetage pour que les pêcheurs comprennent ce qu'ils doivent porter quand ils risquent de couler. Les dispositifs et les aides de flottaison individuels ne sont pas conçus pour flotter pendant plusieurs heures dans l'Atlantique Nord. C'est en pareille situation que les gilets de sauvetage, les combinaisons d'immersion et les canots et radeaux de sauvetage jouent un rôle crucial. Les dispositifs de flottaison individuels permettront toutefois de rester à la surface et d'être visible afin d'être rapidement secouru par l'équipage d'un navire se trouvant à proximité. Dans le pire des cas, ils peuvent aider aux opérations de récupération. Nous devons travailler ensemble pour encourager les pêcheurs à utiliser ces dispositifs en tout temps lorsqu'ils travaillent sur le pont d'un navire de pêche qui risque de couler.

En ce qui concerne l'utilisation des ressources de recherche et de sauvetage, si on tenait une, trois ou cinq activités de recherche et de récupération d'envergure chaque année? En fait, nous nous dirigeons peut-être en ce sens actuellement. Serait-il possible de réaffecter des ressources afin d'apporter plus d'aide sur les plans de l'équipement de sécurité, de la formation, de l'éducation, de la sensibilisation, des activités au quai, des rencontres de discussion ouverte sur la sécurité, des études de cas, et cetera?

Comme mon collègue l'a fait remarquer récemment, le Bureau de la sécurité des transports a publié en 2011 un rapport d'enquête sur des problèmes de sécurité dans lequel il met en exergue 10 problèmes principaux exigeant la prise de mesures immédiates pour apporter une amélioration réelle et durable à la sécurité dans le secteur de la pêche. Les ressources de recherche et de sauvetage peuvent appuyer la coordination et la mise en œuvre de mesures pour régler plusieurs de ces problèmes interdépendants.

Quand chaque région lance la pêche au homard lors de la journée de dépôt des casiers, nous proposons de faire plus attention pour que le personnel de recherche et de sauvetage soit majoritairement affecté aux régions concernées.

Merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion de témoigner. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

Le président : Merci à tous de vos exposés. Je suis impatient d'entendre les questions des sénateurs. Comme d'habitude, nous commencerons par la vice-présidente de notre comité, la sénatrice Hubley.

La sénatrice Hubley : Bienvenue à chacun d'entre vous et merci de comparaître aujourd'hui afin de nous transmettre de l'information.

Je vais tenter d'éclaircir la situation. En vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, quiconque se trouve sur l'eau est tenu d'intervenir rapidement si un incident se produit sur un navire se trouvant à proximité. Je me demande s'il faut également faire rapport de l'incident si on intervient en pareille situation.

J'aimerais également vous poser la question suivante : s'il s'agit d'un geste humanitaire et que la Garde côtière ne vous a pas chargé d'intervenir, je crois comprendre que vous n'êtes pas rémunéré. Vous ne pourriez probablement vous faire rembourser que votre carburant.

Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est? C'est à M. Avery que je m'adresse.

M. Avery : Si quelqu'un est en danger immédiat, il est essentiellement de votre devoir d'aider le navire ou la personne en détresse. J'ai aidé un grand nombre de navires en détresse avant et après être entré au service de la Garde côtière. On intervient automatiquement. Il arrive que des bateaux chavirent directement dans le port, et tout le monde se précipite, en sachant qu'il n'y aura pas de remboursement.

Vous voulez savoir s'il faut faire rapport de l'incident. Ce n'est pas nécessaire. Nous ne présenterons pas de rapport à moins que Transports Canada ne communique avec nous dans le cadre d'une enquête.

D'un autre côté, si je reçois un appel de la Garde côtière auxiliaire, on doit m'attribuer une tâche. Je suis immédiatement mis en rapport avec le CCCOS, qui coordonne toute la recherche et me suit à la trace alors que je fais route vers le navire, particulièrement si la situation est un peu dangereuse. Je suis déjà intervenu seul parce que je ne pouvais trouver personne pour m'accompagner au milieu de la nuit. On se met un peu en péril.

En pareil cas, je prépare un rapport que j'envoie au CCCOS. Nous obtenons un remboursement en fonction de la réclamation des coûts du kilométrage d'une personne qui voyage pour se rendre à une réunion. Tout dépend de la taille du bateau et du moteur au diesel, de divers facteurs et des autres dépenses assumées.

Nous bénéficions d'une assurance dont la Garde côtière auxiliaire s'occupe, mais seulement si on m'attribue une tâche. J'interviendrai parfois sans même qu'on me l'ait demandé, mais si je suis en route vers le port. Je signale alors que j'ai sauvé quelqu'un, mais je ne prends pas la peine d'obtenir un numéro de tâche si je suis à proximité.

J'ai secouru des bateaux, comme le ferait n'importe quel autre pêcheur. J'étais sur place. Je ne me soucie pas de recevoir une tâche, mais j'aime rapporter l'incident pour que la Garde côtière le consigne dans ses dossiers.

La sénatrice Hubley : Vous nous avez indiqué le nombre de membres de la Garde côtière auxiliaire sur l'Île-du Prince-Édouard. Quels sont les critères pour devenir membre? Faut-il suivre un programme d'éducation ou une formation en premiers soins, en sécurité maritime ou quelque chose de ce genre? Qui est chargé de gérer ou d'offrir ces formations?

M. Avery : En fait, ma collègue Lois Drummond va traiter de la question cet après-midi. Lois est responsable de la zone 3 et serait probablement mieux à même de vous répondre.

En ce qui me concerne, je dois effectivement suivre des cours. Il faut suivre le cours RBM-1 pour obtenir une licence radio, apprendre comment remorquer un navire en détresse et mettre à jour ses connaissances en premiers soins. Quand je me suis joint à la Garde côtière auxiliaire, je ne pensais pas qu'il y avait des critères. Il s'est peut-être ajouté quelque chose de nouveau depuis.

Il n'est pas nécessaire de posséder de bateau. Des membres de la Garde côtière auxiliaire se chargent de tâches administratives et certains agents de formation n'ont peut-être que de petits canots à moteur. Toutes ces personnes sont utiles et peuvent apporter de l'aide.

Dans le port où je pêche se trouve un homme qui ne possède pas de bateau, mais qui est là si je prends la mer. J'ai indiqué qu'il m'arrive d'intervenir seul, mais il est bon de pouvoir compter sur quelqu'un à qui on peut demander de nous accompagner. J'irai seul, mais ce n'est pas idéal, particulièrement si quelqu'un est en péril.

Je me suis déjà trouvé en difficulté, et on éprouve alors probablement un des pires sentiments que l'on puisse ressentir. Ce n'est pas comme lorsqu'on tombe en panne sur le bord de la route, car on peut alors téléphoner à un remorqueur. On attend parfois longtemps avant que quelqu'un n'arrive.

La sénatrice Stewart Olsen : Je commence à avoir une idée claire des disparités et des lacunes que nous pourrions, espérons-le, contribuer à corriger.

Je suis très encouragée de constater que tous vos exposés se ressemblent beaucoup. C'est une bonne chose, car cela confère davantage de poids à vos recommandations. Vous avez notamment proposé de mieux informer la population à propos de la sécurité.

J'ai trouvé intéressant l'examen du positionnement des stations afin de jeter un autre coup d'œil à la situation et de voir ce qu'il se passe. Il s'agit d'une recommandation de M. Lanteigne, il me semble. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Jugez-vous que la fermeture de certaines stations devrait être repensée?

M. Lanteigne : Je voudrais tout d'abord vous présenter mes excuses, car vous obtiendrez la traduction de mon exposé ultérieurement. Vous la recevrez probablement demain. Disons que le service de traduction d'Ottawa a mis du temps à préparer une version de mon exposé dans la langue de Shakespeare.

Puisque nous revenons à la question de la langue, je pourrais peut-être commencer en vous racontant une anecdote. Un Québécois a appelé le service de recherche et sauvetage, mais personne ne comprenait exactement ce qu'il disait. Ce matin, le capitaine a déclaré que l'anglais est une langue internationale. C'est bien tant qu'on s'exprime dans cette langue. Or, sachez que ce Québécois a fini par parler au Vatican. Tout amusante qu'elle soit, cette affaire est avérée. On a pensé qu'il voulait parler au pape, je présume.

En fait, je ne pense pas que le problème de langue soit si grave. Quand on compose le 911, on peut recevoir de l'aide dans les deux langues. Même si la station de Rivière-au-Renard est maintenant fermée, je pense que le service est bon. Il pourrait être meilleur, mais il fonctionne.

L'autre facteur est le temps de réponse. C'est là que l'emplacement de l'équipement dans le golfe devient important. C'est une situation très délicate. Une sénatrice a demandé qui était responsable d'intervenir, et Craig lui a répondu. C'est le navire le plus près qui doit offrir de l'aide. C'est correct. Le concept est bon. Cela fonctionne.

Il n'y a pas beaucoup de bateaux sur l'eau à cette période-ci de l'année. À certains endroits, on est essentiellement seul sur l'eau. Les situations d'urgence ne surviennent habituellement pas par beau temps. C'est toujours lorsqu'il fait tempête. Voilà pourquoi on court un risque.

L'embarcation de sauvetage de classe Cape de 47 pieds peut couvrir une distance de 50 milles. Pour les pêcheurs côtiers, c'est suffisant. Ils ne courent pas de risque, car ils sont à proximité de la côte. Mais quand on est plus au large et que le bateau qui est censé apporter de l'aide a un rayon d'action de seulement 50 milles, alors il ne peut intervenir. C'est en pareil cas que le genre d'équipement mis en place à certains endroits doit être examiné et remplacé.

On entend toutes sortes d'histoires à propos des embarcations de sauvetage de classe Cape de 47 pieds. Si jamais vous en visitez un, vous verrez qu'il peut accueillir quatre membres d'équipage attachés à leur siège. Ces navires doivent pouvoir se déplacer rapidement et de manière sécuritaire, et les membres d'équipage sont attachés à leur siège. Il n'y a pas de toilette. Si on demande aux intervenants combien de personnes peuvent monter à bord, ils répondent qu'ils tenteront d'amener autant de monde que possible. On entend des histoires d'horreur.

Il n'y a pas si longtemps, j'ai entendu dire que des membres d'équipage sont allés à la rescousse d'un voilier. Il y avait sept personnes à bord, dont trois femmes, et il n'y avait pas de toilette. Comprenons-nous : il s'agit d'une opération de sauvetage et non d'un service de yacht. Il faut savoir que le navire de classe Cape est rapide. Il peut se rendre sur place, mais dans bien des cas, il ne le peut pas. L'emplacement de l'équipement pose problème.

La sénatrice Stewart Olsen : Vous pouvez me corriger si j'ai tort, mais si on veut s'informer à propos de la sécurité maritime, on peut s'adresser à des pêcheurs et des membres d'équipage. Je commence à comprendre que nous avons un excellent service côtier. Notre Garde côtière accomplit un travail formidable, mais elle est bien petite pour notre grand pays. Nous devons repenser bien des choses dans ce domaine.

Lorsque les pêcheurs prennent la mer, est-ce par une équipe de recherche et de sauvetage ou plus probablement par un navire de passage qu'ils seraient secourus en cas d'incident?

M. Avery : À titre de pêcheur, je navigue depuis 40 ans, particulièrement dans la région où je pêche actuellement. Je dirais que ce n'est pas une équipe de recherche et de sauvetage qui interviendrait. Nous avons deux navires équipés aux fins de recherche et de sauvetage. À partir du port, ils se trouveraient à une distance pouvant aller jusqu'à 80 milles. Il faudrait que ce soit un navire à proximité ou un ami qui intervienne.

Si la situation est sérieuse, ce n'est pas un problème, mais comme je l'ai souligné, si la température n'est pas si mauvaise, les gens sont en train de pêcher et on doit attendre. Il n'est pas agréable d'attendre deux ou trois heures que quelqu'un vienne nous remorquer.

Nous sommes maintenant aux prises avec une autre situation. Lorsque ce n'est pas un membre de la Garde côtière auxiliaire qui répond à l'appel, les gens commencent à penser aux assurances. Lorsqu'un membre de la Garde côtière auxiliaire intervient auprès d'un bateau en détresse ou dans une autre situation — il pourrait s'agir d'un yacht d'un demi-million de dollars... Ce n'est pas comme si quelqu'un avait fait marche arrière dans un bateau à quai. La mer est agitée. J'ai déjà halé seul des bateaux. J'essaie alors de leur lancer des câbles de remorquage, seul sur le pont, alors qu'un vent du sud-ouest souffle de 35 à 40 nœuds au large. J'ai déjà connu ce genre de situation.

Il faudrait maintenant que je refuse d'intervenir dans le secteur où je me trouve. À proximité de Summerside ou de Souris, un navire de recherche et de sauvetage peut intervenir en l'espace de 30 minutes. On aurait probablement de bonnes chances de s'en sortir.

Comme vous venez tout juste de le mentionner, c'est un vaste littoral. On devrait l'examiner pour s'assurer que tout le monde au pays a une chance égale, qu'il y a toujours quelqu'un à proximité. C'est la raison pour laquelle nous payons des impôts, et nous devrions avoir droit à ce service.

M. Franck : Je suis du même avis. Les pêcheurs qui prennent la mer sont généralement plutôt à l'aise lorsqu'ils savent qu'il y a des ressources à proximité. Il ne s'agit peut-être pas de la Garde côtière canadienne ou de la Garde côtière auxiliaire canadienne, dont les navires pourraient être plus loin, comme l'a signalé M. Avery. Il est plus probable qu'on s'adresse à des amis qui pêchent dans les environs. Il arrive souvent qu'une grande partie de nos bateaux pêchent en groupes, ensemble ou près l'un de l'autre. On se tourne alors vers des bateaux de passage pour obtenir de l'aide, à moins d'être sur la côte est de la Nouvelle-Écosse. Il n'y a parfois qu'un seul crevettier en mer là-bas. Les membres d'équipage nous ont d'ailleurs signalé que cette situation les préoccupe. Il n'y a pas d'autres pêcheurs dans le secteur. S'ils ont besoin d'aide, qui sera là pour intervenir? Ce sera la Garde côtière canadienne ou la Garde côtière auxiliaire canadienne, qui pourraient se trouver très loin.

M. Lanteigne : J'ajoute que les pêcheurs — et nous en avons un à mes côtés — sont des chasseurs exceptionnels. On peut effectivement les comparer aux chasseurs. Ils connaissent très bien la mer et composent avec la nature. D'une certaine façon, ils deviennent téméraires.

Ils connaissent bien les conditions météorologiques. Ils sentent que tout ira bien. À leur place, vous ne prendriez pas la mer, car cela représente un risque pour vous. Pour eux, c'est normal; ils se sont habitués. C'est une sorte de pari qu'ils renouvellent sans cesse. Cela fait partie de leur travail; ils ne voient pas les choses de la même façon. Vous pourriez leur dire : « Mon Dieu, tu ne vas pas aller pêcher en mer aujourd'hui; tu devrais rester à la maison. » Et ils répondraient : « Non, c'est plutôt normal. »

J'ajouterai également que dans certains types de pêche, surtout la pêche à la crevette de nos jours, les pêcheurs me disent que plus le temps est mauvais, plus la pêche est bonne. Il est plutôt étrange que les prises soient meilleures lorsqu'il vente et que la mer est agitée.

Ils prennent des risques parce que le temps est mauvais au large. Ils devraient retourner chez eux, ou revenir sur leurs pas, mais ils restent là. Il arrive que le vent ait soufflé les solides fenêtres de grands bateaux de pêche qui reviennent au port. Il faut que le temps ait été très mauvais ce jour-là, mais les pêcheurs ont quand même pris le risque.

Il y a trois semaines, alors qu'il se trouvait dans le secteur Esquamine de Terre-Neuve, l'Atlantic Provider, un bateau de pêche dont le port d'attache se trouve à Shippagan, a complètement brûlé et coulé. Heureusement, la garde côtière a réussi à sauver les quatre personnes qui étaient à bord. Ils étaient à environ quatre heures de Port Saunders. Ils ont été secourus en toute sécurité. Ce genre de situation a lieu très souvent.

Le sénateur Enverga : Certaines des histoires que vous avez racontées m'ont touché. En gros, vous êtes l'un des bénéficiaires des services offerts par la garde côtière. Je vous ai tous écoutés. Vous semblez avoir un plus grand nombre de questions et de recommandations. Vous n'êtes pas entièrement satisfaits du service que vous recevez. Est-ce bien ce que j'entends? Vous voulez que nous formulions une recommandation. S'il y a une chose que vous voulez particulièrement que nous recommandions au gouvernement, pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit, s'il vous plaît?

M. Franck : Je serai courageux en étant le premier à faire une recommandation. Ma recommandation renvoie à la coordination des efforts, des activités et de la sensibilisation, surtout pour ce qui est de Transports Canada et du ministère des Pêches et des Océans. Nous devons coordonner les règles, les règlements, l'éducation, les interventions, les besoins en matériel, la certification du matériel et les approbations.

Dans ma déclaration liminaire, j'ai parlé du plan d'action Fishing Safety Now. L'un des 10 groupes de travail mobilisés est le groupe des améliorations et de la coopération entre les organismes. Lorsque les membres des organismes qui influent sur la santé et la sécurité dans l'industrie de la pêche discutent ensemble, ils apprennent beaucoup les uns des autres. Nous devons d'abord déployer des efforts à petite échelle pour progressivement le faire à l'échelle du pays afin que le protocole d'entente ou les autres liens entre Transports Canada et le ministère des Pêches et des Océans soient coordonnées dans le cadre des interventions, qu'il s'agisse de gestion des ressources ou des besoins en matériel des navires pour pratiquer certains types de pêche selon les saisons et ainsi de suite.

Je pense qu'une grande partie de cette coopération améliorerait la sensibilisation et la formation tout en dissipant la confusion parmi les pêcheurs, ceux qui font le travail au large. La présence sur l'eau de personnes plus qualifiées et plus sûres qui s'entraident et qui prennent de bonnes décisions en matière de risques permettrait de réduire le nombre d'opérations de recherche et de sauvetage.

M. Lanteigne : Les deux principaux éléments à retenir sont la sensibilisation et la formation. Votre question renvoie à un sujet que nous abordons constamment : qui prendra la relève? Quel est l'avenir de l'industrie de la pêche? Qui sera à bord des bateaux de pêche? Les associations de pêcheurs de partout au pays sont préoccupées par la question de la relève.

Toutes sortes de situations font en sorte que le métier n'est pas attrayant. Le métier de pêcheur a d'ailleurs longtemps été une sorte de dernier recours. Ceux qui échouent à l'université et qui ne veulent pas devenir électriciens ou exercer un métier similaire se retrouvent sur un bateau de pêche ou dans une usine de transformation du poisson.

Il est très facile de se retrouver à bord d'un bateau. Il s'agit d'être sur le quai les mains dans les poches et que quelqu'un vous demande ce que vous faites ce jour-là. Vous dites que vous n'avez rien de prévu, et il vous dit de monter à bord si vous voulez pêcher. Qu'en est-il de la sécurité? Qu'en est-il de la formation? Qu'en est-il du danger? Je ne fais que dresser un petit portrait, mais ils sont nombreux à être devenus pêcheurs de cette façon.

Pour conclure, le métier de pêcheur et celui de chauffeur de taxi sont les deux plus faciles à exercer sans une formation et une sensibilisation adéquates. De nos jours, il devrait être obligatoire de suivre une formation sur la sécurité pour exercer le métier de pêcheur.

M. Jollimore : La sensibilisation et la formation sont sans aucun doute des mesures préventives très importantes, qui auraient probablement pour effet de réduire le nombre d'appels de recherche et sauvetage, d'interventions et ainsi de suite. En tant que pêcheurs, nous sommes d'avis qu'il serait très important de toujours passer en revue l'ensemble des questions de sécurité.

On retrouve les navires à deux endroits à l'Île-du-Prince-Édouard, Souris et Summerside. Craig et moi pêchons vis à-vis du centre de l'île, sur la côte nord, et nous comptons parmi les gens de notre région qui devraient attendre l'aide le plus longtemps. La mise en place d'un modèle de protection uniforme serait idéale pour beaucoup de pêcheurs. Comme Craig l'a laissé entendre en parlant des jeunes pêcheurs, ce modèle représenterait pour eux un filet de sécurité, car ils sauraient qu'ils bénéficient de la même protection que les gens du prochain port ou d'ailleurs.

Le sénateur McInnis : Monsieur Avery, vous avez dit que lorsque la Garde côtière est disponible, elle devrait se charger des efforts de sauvetage plutôt que de les reléguer à la Garde côtière auxiliaire. À quel point est-ce un problème?

M. Avery : C'est un problème plutôt grave. Je vais vous donner un bref exemple. Il y a environ deux semaines, j'ai reçu un appel d'un pêcheur qui cherchait un navire de la garde auxiliaire dans la région. Je lui ai demandé si des gardes côtes étaient dans le coin, si le bateau de patrouille venant d'Alberton se trouvait dans les environs. Il m'a répondu qu'ils n'étaient apparemment pas dans le secteur à ce moment-là. Il a appelé le CCCOS où on lui a dit qu'on n'arrivait pas à joindre un membre de la Garde côtière auxiliaire. En gros, on lui a dit qu'il devait trouver un autre pêcheur pour le remorquer.

Ce que je veux dire, c'est que cela devient de plus en plus difficile. Je vais vous donner un exemple de ce qui se produit, une des raisons pour lesquelles je songe parfois à quitter la Garde côtière auxiliaire. Nous essayons de sensibiliser les pêcheurs et de leur expliquer en quoi consistent la Garde côtière auxiliaire et sa façon de fonctionner, mais ils sont nombreux à penser que nous sommes à leur entière disposition parce que nous en faisons partie.

J'ai à ce sujet toutes sortes de conversations avec des pêcheurs depuis un bon nombre d'années. J'ai essayé de leur expliquer la situation des membres de la Garde côtière auxiliaire. Lorsque je suis moi-même en train de pêcher, je ne suis pas libre de partir pour remorquer un autre pêcheur, à moins qu'il soit dans une situation périlleuse.

Je vais vous donner le bref exemple d'une discussion mémorable que j'ai eu avec un collègue qui pêchait le hareng. Lorsque le hareng se trouve dans les mailles du filet et qu'il est 23 heures ou minuit, vous avez environ deux heures à votre disposition. L'un des bateaux a brisé. J'ai dû refuser de le remorquer parce que j'essayais de sortir mes prises comme tout le monde. Je ne voulais pas les perdre. Il s'apprêtait à perdre les siennes. C'est tout ce qui le préoccupait. Il voulait rentrer, essayer de réparer son bateau et ressortir. Je lui ai dit que la mer était belle et calme ce soir-là et qu'il devrait attende que quelqu'un d'autre passe ou qu'un autre bateau ait sorti ses prises de l'eau. J'ai dû refuser parce que j'étais en train d'essayer de sortir les miennes.

Ce n'est pas une situation très agréable. Je crois qu'un navire de recherche et sauvetage aurait dû être en mesure de venir le remorquer après une heure ou une heure et demie. C'est la responsabilité des gardes-côtes. Les pêcheurs ne devraient pas avoir à espérer qu'un bateau de pêche soit là pour les remorquer.

Mon bateau vaut maintenant entre 350 000 et 400 000 $. Personne ne va oublier que la Garde côtière a coulé un bateau à Terre-Neuve en le remorquant. Je suis conscient du risque que je cours lorsque je remorque un autre bateau. Suis-je responsable si le bateau coule et que quelqu'un se noie? Oui, je suis responsable. On nous l'indique clairement.

C'est la raison pour laquelle je suis toutes les procédures. Je suis censé me rendre à bord pour demander au capitaine du bateau que je m'apprête à remorquer de signer un formulaire d'exonération, ce que je fais très rarement. La plupart du temps, la mer est agitée. Il est déjà difficile de fixer un câble, et encore plus ardu de faire signer un document.

Je parle à la radio avec le responsable du CCCOS qui s'occupe de l'intervention. Je lui demande la permission de monter à bord et je fixe ensuite le câble de remorquage. Toute la conversation est enregistrée, ce qui me protège ainsi que la Garde côtière auxiliaire.

Le sénateur McInnis : Monsieur Lanteigne, vous avez mentionné que la Garde côtière canadienne et les organismes de réglementation devraient collaborer davantage avec les pêcheurs. Le transfert de la Garde côtière de Transports Canada à Pêches et Océans a-t-il posé problème? La gouvernance actuellement en place sous les auspices de Pêches et Océans est-elle aussi bonne qu'elle devrait l'être? Accepte-t-on les mesures du ministère?

Lorsque des services sont transférés à un autre ministère, il leur faut souvent un certain temps pour s'y faire. D'après vous, la collaboration et la gouvernance de la Garde côtière posent-elles problème?

M. Lanteigne : Je ne pense pas que l'organisation — Transports Canada, Pêches et Océans ou autre — importe pour nous. Ce qui nous pose surtout problème, c'est plus la façon de nous traitons avec la garde côtière et la façon dont elle traite avec nous que l'organisation dont elle relève.

Il y a toujours eu une sorte de conflit entre les pêcheurs et Transports Canada. Le mécanisme utilisé est le CCMC, le Conseil consultatif maritime canadien. C'est là que nous nous rencontrons pour discuter des règles et de ce genre de choses.

Transports Canada s'occupe de tout ce qui se fait au large, de tout ce qui est sur l'eau : le trafic maritime, les bateaux de plaisance, les traversiers et ainsi de suite. Les pêcheurs abordent ces questions, mais la communication n'est pas toujours excellente. À l'époque, le CCMC se réunissait deux fois par année. La dernière rencontre a eu lieu il y a près d'un an. Je ne pense pas qu'il y en aura une cet automne. Cela ira peut-être au printemps prochain.

Le CCMC tenait également des réunions régionales. C'était une bonne façon de maintenir un lien avec les gens de la région. Il n'y en a pas eu depuis longtemps. C'est Transports Canada qui prend les décisions à cet égard. Sur une échelle de 1 à 10, je donnerais probablement un 4 ou un 5 aux relations entre l'industrie et Transports Canada. Ces relations ne sont pas ce qu'elles devraient être. Je pense que nous devons nous pencher sur la question peu importe si l'organisme relève de Transports Canada ou de Pêches et Océans.

Le sénateur McInnis : Dans votre exposé, vous avez parlé du simulateur de stabilité des bateaux de pêche. Comment fonctionne-t-il? Est-il seulement disponible à Terre-Neuve? Est-ce l'Université Memorial qui l'a mis au point?

M. Lanteigne : Oui, c'est l'Université Memorial.

Le sénateur McInnis : Est-il disponible en ligne?

M. Lanteigne : Oui, tous les pêcheurs qui veulent le télécharger peuvent le faire en ligne.

Le sénateur McInnis : À quel point le simulateur est-il important? Comment fonctionne-t-il?

M. Lanteigne : On peut entrer toutes les caractéristiques techniques de son bateau de pêche. Il est alors possible de simuler le type de conditions météorologiques, de charge et de moteur pour voir comment le bateau s'en sort dans ces conditions. C'est un excellent outil de formation. Il donne une idée de la façon dont un navire se comporterait dans toutes sortes de conditions. Cet outil est maintenant utilisé dans l'ensemble des écoles de pêche.

Il a été mis au point dans le cadre d'un projet de 1,5 million de dollars que nous avons mené conjointement avec l'Université Memorial. L'université s'est occupée de ce volet. Nous n'avons pas le financement supplémentaire nécessaire pour rendre son utilisation plus conviviale sur les ordinateurs personnels. C'est possible. Nous pensons que le simulateur n'est pas suffisamment convivial en ce moment pour que les pêcheurs puissent l'utiliser adéquatement et facilement, mais c'est un très bon outil pour le personnel qualifié.

Le sénateur McInnis : Nous sommes ici à parler de sécurité en mer. Ce sont des choses importantes. Hier, nous avons parlé de la bouée SmartAtlantic, au large d'Herring Cove, que les plaisanciers et les pêcheurs utilisent et qui est un outil de prévention. Je pense qu'il n'y a pas assez de bouées de ce genre.

C'est formidable, comme recherche. L'Université Memorial fait de l'excellent travail. J'ai trouvé cela intéressant. Pensez-vous que c'est la voie de l'avenir et que cela deviendra courant?

M. Lanteigne : Absolument. Nous avons toutes sortes de demandes de partout dans le monde concernant le programme conçu par l'Université Memorial. L'Espagne, les États-Unis et divers autres pays veulent avoir accès à ce logiciel.

Le sénateur Munson : J'aimerais approfondir ce que vous dites tous à propos de la formation, des exigences obligatoires en matière de sécurité et des rapports avec des fonctionnaires que vous ne connaissez pas. Les personnes responsables au sein de Transports Canada ou de Pêches et Océans affirmeraient probablement, si elles comparaissaient devant nous, qu'elles ont votre intérêt à cœur. M. Lanteigne parle de l'équipement qui n'est pas adéquat, de la détection, de la nécessité de répondre plus souvent, et cetera.

Nous avons tous discuté de ces choses. Est-ce qu'il y a un problème d'attitude paternaliste? Nous savons ce qui est préférable pour vous, mais vous semblez savoir ce qui est préférable pour vous-mêmes. Est-ce qu'il y a une attitude paternaliste et que peu importe ce que vous dites, ils ne vont tout simplement pas en faire plus? Est-ce qu'il y a une question financière en jeu? Au bout du compte, nous parlons de la vie des gens et de leur gagne-pain.

M. Lanteigne : Je suis sûr que Craig peut aussi parler de cela, de même que M. Franck, probablement. Dans les pêches concurrentielles, c'est l'argent qui fait le pêcheur. Les pêcheurs ne veulent pas de règles, car les règles peuvent avoir des effets sur les recettes. Craig parlait du hareng. La pêche au hareng est un bon exemple. S'il ne fait pas beau ce soir, mais qu'il y a beaucoup de hareng, ce qui compte, c'est qu'il y a du hareng. S'il y a une règle qui m'empêche de prendre tout ce qui est là, qui sont ces salauds de Transports Canada? Ce soir-là, ils ont un effet direct sur mon portefeuille.

Je pense que dans ce genre de situation, il est impossible que tout le monde soit à l'aise, et cela n'arrivera jamais. Vous ne changerez pas cela. C'est la nature. C'est bien d'avoir des règles. C'est bien d'avoir des règles de sécurité. Il est possible de mettre en place des règles qui vont limiter les choses ou accroître la sécurité, mais cela peut produire des effets importants sur les recettes et les revenus des pêcheurs.

Tout le monde est pour la sécurité avant tout. C'est la première règle, mais la réalité, c'est ce qui se produit. C'est là que vous avez les situations de conflit. Où faut-il fixer les limites?

M. Franck : Puis-je y aller de mes commentaires à ce sujet? Je crois que tous les gens des ministères prêtent attention, qu'ils ont la bonne attitude. Ils veulent bien faire. C'est peut-être parce que je choisis d'y croire. Chacun essaie de faire son travail. Je pense qu'ils essaient de bien le faire, au meilleur de leurs capacités.

Il arrive que le travail se fasse en vase clos, et il est facile pour les gens de dire que quelque chose ne relève pas de leur responsabilité. Les gens ne disent peut-être pas que ce n'est pas leur travail, mais cela aboutit ailleurs. C'est un autre service ou une autre division, untel ou unetelle qui s'occupe de cela. Ce qu'il faudrait peut-être, pour répondre à votre question, c'est la surveillance de tout ce qui se passe qui a des effets sur l'industrie.

Je suis arrivé dans l'industrie il y a cinq ans avec une formation en santé et sécurité. En allant aux réunions du CCMC et de l'industrie, j'ai rapidement constaté qu'il y a énormément de lois, de codes, de règles et de normes à respecter. Pour quiconque est en mer sur un bateau de pêche, il est extrêmement difficile de savoir tout ce qu'il faut savoir. Nous voyons cela quand quelqu'un passe par-dessus bord et ne revient pas à la maison. Le capitaine, les propriétaires et les représentants autorisés comprennent très rapidement que tout ce que Transports Canada exige pour que les exigences du MPO soient respectées ne suffit pas.

Il y a aussi tout un éventail de normes de santé et de sécurité à respecter dans chaque province. Les connaissances manquent concernant tous ces textes législatifs, codes et normes. Il n'y a pas de coordination qui permettrait de mettre toute l'information entre les bonnes mains de sorte que le travail puisse se faire en toute sécurité.

Les pêcheurs veulent faire leur travail et revenir à la maison en toute sécurité après chaque voyage : « Dites-nous de façon claire et concise ce que nous devons faire, et nous allons le faire. » C'est très mêlant quand tout est éparpillé.

Le sénateur Munson : J'ai une autre question. C'est probablement la question la plus naïve possible, venant d'une personne du nord du Nouveau-Brunswick qui vit maintenant en Ontario. C'est quand vous avez en tête la scène pittoresque que le terme que vous avez utilisé, « dumping », évoque. Dans la perspective du consommateur, ça ne semble pas être du dumping. C'est comme une course folle vers le secteur où vous croyez que vous trouverez le homard. Cela se répète chaque année, au début de chaque saison. Avec cela, il y a la sécurité et ainsi de suite, parce que comme ils le disent, on sort un peu plus tôt et on part. On croirait qu'après toutes ces années, chaque pêcheur saurait exactement où se trouve son secteur, ce qui préviendrait cette course folle pour s'y rendre.

Comme je le dis, c'est peut-être naïf. Je me disais tout simplement que si vous êtes un fermier plutôt qu'un pêcheur, vous savez où votre blé va pousser, où les choses vont se produire, et ainsi de suite. Pourquoi n'y aurait-il pas des secteurs désignés à perpétuité pour chaque famille, par exemple?

Je comprends ce qui se passe là-bas. Je veux juste faire valoir cela, compte tenu du chaos qui se produit en mer.

M. Avery : Je vais répondre à cela. Dans un monde idéal, ce serait bon. Il y a des endroits où les pêcheurs se rendent, car ce sont leurs propres secteurs. Parlons de homard, par exemple. Je pêche dans le secteur 24 et je couvre probablement une superficie de 20 milles. Si j'avais un secteur désigné, cela ne fonctionnerait pas, car certaines années, le homard ne va pas à certains endroits où je pêche.

Le sénateur Munson : Je sais. Je dis tout simplement que si les choses continuent, il va falloir plus de personnel de recherche et de sauvetage dans le secteur.

M. Avery : C'est un moment de grande vulnérabilité quand les bateaux sont chargés. Malgré les photos que vous voyez des bateaux qui se précipitent, les choses ne sont pas aussi mauvaises qu'elles en ont l'air.

Le sénateur Munson : Mais n'êtes-vous pas tous des amis là-bas?

M. Jollimore : Pas pendant la saison.

M. Avery : Si quelqu'un a des problèmes, tout le monde réagit. Les personnes avec lesquelles vous ne vous entendez pas bien et qui sont vos ennemis naturels seraient là pour vous aider.

Le sénateur Munson : Je vais présenter ma question autrement. Qu'est-ce que les services de recherche et sauvetage ou la Garde côtière ont dit? Ce que vous faites, c'est parce qu'il y a des vies en jeu. Que répondent-ils pour expliquer qu'ils ne fournissent pas des services appropriés de recherche et de sauvetage pendant ces périodes particulières? Je sais quand les choses se passent parce que je longe presque la côte quand je viens à la maison, pour voir où se trouve le homard.

M. Avery : M. McInnis a répondu à cette question il y a quelque temps, quand il s'est ouvert. S'ils répondaient, ils diraient qu'ils offrent la protection qu'il faut pour nous surveiller jusqu'à ce que quelque chose arrive. Si vous parliez aux fonctionnaires, ils diraient qu'il y a des choses en place.

J'aimerais vous donner un petit exemple. Je vais revenir un peu sur votre première question, quand vous avez parlé de l'équipement de sécurité dans les bateaux. Il y a un nouveau règlement en préparation dont vous êtes probablement au courant. Cela va se faire en juillet. Je pense que le règlement est dans la Gazette du Canada en ce moment. Le règlement sera pris en juillet 2017.

Nous avons très certainement des préoccupations à ce sujet. Bon nombre de nos pêcheurs sont maintenant dans des pêches de longue date. Peu importe ce qu'ils font, peu importe l'espèce pêchée, ils ne peuvent probablement pas dépasser trois mois. Ce serait beaucoup. Dans bien des cas, comme pour le homard, ce n'est que deux mois. Vous devez avoir le permis de pêche d'une autre espèce. Ils nous ont demandé de mettre de l'équipement dans nos bateaux. Comme je l'ai dit, les radeaux de sauvetage représentent un gros morceau. Il va probablement nous falloir 15 000 radeaux de sauvetage au Canada. Cela va représenter une mine d'or pour quelqu'un qui va se faire tout un tas d'argent. Il faut les ouvrir chaque année.

Je vais essayer d'être un peu moins sérieux, avec mes commentaires. Je pêche depuis 40 ans, et j'ai vécu quelques situations, mais il ne m'est rien arrivé de vraiment dangereux avant de faire mon entrée dans le port, pour revenir à la maison.

Nous avons parlé des réunions du CCMC. Il a fallu que nous fassions venir un fonctionnaire dans nos ports pour lui montrer les types de bateaux que nous utilisons pour la pêche. Ils parlaient de la salle des machines des bateaux. À cette époque, il y a environ 15 ans, ma salle des machines pouvait se comparer à un cercueil de six pieds. Il serait très difficile de marcher à l'intérieur. Ce n'était pas fait pour cela.

Ils n'avaient aucune idée de ce qu'étaient nos bateaux. Ils ne savaient pas du tout que j'avais un bateau de 43 pieds et que je devais y entrer par un endroit qui se trouvait à quatre ou cinq pieds dans l'eau. Même avec un radeau de sauvetage sur le toit, si quelque chose s'était produit, il n'aurait vraisemblablement pas été possible de le déployer.

En exigeant qu'on mette ceci et cela dans le bateau, vous pouvez aller trop loin. Vous ajoutez beaucoup de dépenses. Je trouve qu'il faudrait regarder attentivement la réglementation en ce moment. Il nous faut au moins nous accorder du temps pour que nous puissions faire venir un fournisseur ou obtenir de meilleurs prix. Pour le moment, cela va tout simplement représenter une grosse dépense.

Le dossier de sécurité des pêcheurs que je représente est très bon. Quand nous pêchons, nous nous trouvons entre 5 et 10 milles de la côte la plupart du temps. J'aime dire que ce qui m'a surtout sauvé la vie, c'est de dire deux ou trois bons Je vous salue Marie avant de réduire les gaz.

Le sénateur Munson : Vous réclamez de la sécurité. Vous utilisez les mots « obligatoire » et « sécurité », mais vous semblez dire qu'il y a trop de règlements. J'essaie de trouver l'équilibre dans ce que vous dites.

M. Franck : En réponse à ce dernier point, il y a beaucoup de règlements. Il faut les éclaircir et les coordonner. Les pêcheurs doivent être continuellement inclus dans la création de ces règlements et dans les plans de mise en œuvre.

Le nouveau Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche qui sera pris en juillet 2017 va causer beaucoup de problèmes à certaines personnes, concernant les procédures écrites. C'est une chose relativement nouvelle dans le secteur des pêches. Les autres industries ont des manuels et procédures sur la santé et la sécurité depuis 50 ou 100 ans.

Pour la pêche, c'est un concept relativement nouveau pour certains de nos petits bateaux de pêche. Nous avons énormément de travail à faire sur ce plan. Il serait bon que les divers ministères et divisions travaillent ensemble et contribuent à communiquer ces exigences.

La sénatrice Poirier : Merci, messieurs, de votre présence.

[Français]

J'ai des questions à poser à M. Lanteigne. Vous avez mentionné que votre conseil a été créé en 1995, et qu'il représente en majorité des organisations de pêcheurs. Est-ce avec les administrations portuaires que vous faites affaire, ou s'agit-il de pêcheurs individuels? Vous avez aussi mentionné au début de votre présentation que vous offrez plusieurs ateliers, des conférences nationales et des formations. Est-ce que tous les pêcheurs sont obligés d'y participer? Est-ce que tous les pêcheurs y participent? Dans le cas de ceux qui n'y sont pas obligés, participent-ils à vos activités?

M. Lanteigne : Le Conseil canadien des pêcheurs professionnels, c'est un conseil sectoriel qui a été formé sous le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences — je crois que c'est le titre que portait le ministère à ce moment-là — et il y avait des conseils pour tous les secteurs. Celui des pêches a été formé dans le cadre de cette initiative. Le CCPP représente ses membres qui sont toutes des organisations de pêcheurs. Ainsi, de Terre-Neuve jusqu'en Colombie-Britannique, des associations de pêcheurs sont membres du conseil.

Quant aux activités de formation offertes par le conseil, évidemment, elles ne sont pas obligatoires. Il s'agit d'activités facultatives, qui visent à faire de la promotion. Par exemple, nous avons abordé la question du simulateur électronique. L'activité a été diffusée aux écoles de formation des pêcheurs, mais elle a été conçue par le conseil. Donc, nous faisons ce genre de choses. Le cours de Capitaine Classe IV offert en ligne a été élaboré par le conseil, mais toujours en collaboration avec les organisations de formation qui existent dans les provinces.

La sénatrice Poirier : Vous avez parlé aussi d'un rapport que vous avez préparé qui contient des recommandations s'adressant à Transports Canada. Je pense que le rapport a été publié en 2014. Vous avez parlé aussi d'environ six différentes recommandations. J'imagine que ces recommandations figuraient à votre rapport, n'est-ce pas?

M. Lanteigne : Exactement, oui.

La sénatrice Poirier : Avez-vous eu des réponses de Transports Canada à certaines de vos recommandations? Est-ce que des mesures ont été prises en réponse à vos recommandations? Ou est-ce que vous attendez encore des activités ou des réponses de la part du ministère?

M. Lanteigne : On a toujours des discussions continues avec les gens de Transports Canada. On a toujours une relation avec eux, on est toujours en communication avec eux. Mais, comme Craig l'a décrit tantôt, la réalité, c'est qu'on a l'impression qu'on parle bien souvent à des gens qui ne comprennent pas la réalité de la pêche. Le fait de venir sur place pour voir comment un bateau de pêche est fait, pour constater la réalité des pêcheurs et déterminer quels aspects doivent être abordés avec eux, c'est extrêmement difficile pour les gens de Transports Canada, et il est difficile pour nous d'arriver à leur faire comprendre tout ce que ça comporte et tout ce que ça implique. Maintenant, est-ce qu'ils ont pris des démarches qui vont vraiment dans le sens de nos demandes? Non.

[Traduction]

La sénatrice Poirier : Au cours des derniers jours, nous avons rencontré beaucoup de gens. Nous avons beaucoup entendu et vu au sujet de bien des activités et de la façon dont les choses fonctionnent.

Je vais revenir sur le début de la saison de la pêche qui s'en vient. Nous avons discuté de cela quelques fois avec diverses personnes quand nous faisions le tour — soit avec les gens rencontrés à Greenwood ou avec ceux rencontrés au CCCOS. Il y a divers endroits pour lesquels la Garde côtière nous a parlé de certains moments de l'année où leurs services sont plus demandés en raison du grand nombre de flottes qui sortent en même temps.

On nous a beaucoup parlé de partenariats. La Garde côtière a beaucoup de partenariats. Le sauvetage requis est fonction du partenariat qui est le mieux en mesure de répondre au besoin. Cela me fait un peu penser aux urgences de l'hôpital. Il y a le tri, où l'on vous examine pour déterminer le problème. Puis on vous aiguille vers la personne qui peut le mieux résoudre le problème. Certaines des personnes avec lesquelles nous avons parlé nous ont dit que selon l'urgence, ils cherchent la meilleure façon d'y réagir immédiatement.

Je pense que c'est à Greenwood, hier, qu'ils ont mentionné que parfois, quelqu'un attend d'être tiré d'une situation donnée, mais il n'y a pas de problème. Il ne s'est rien passé sur la montagne — peu importe où la personne se trouve —, mais elle n'a plus de nourriture. Dans ce cas, la première chose à faire pour les premiers répondants est de simplement laisser tomber un sac de nourriture et veiller à ce que l'aide arrive par la suite.

Je sais que les partenaires sont très variés et comprennent les bénévoles qui servent d'auxiliaires. Nous en avons rencontré hier. Il peut s'agir de pêcheurs particuliers. Un tel pêcheur peut être la meilleure personne pour aider parce qu'il se trouve juste à côté et voit la personne. Il peut s'agir des pilotes des ports. Comme je l'ai dit, les partenaires sont nombreux et variés.

Estimez-vous que le partenariat fonctionne bien? Trouvez-vous qu'il y a une lacune? Pouvez-vous recommander quelque chose qu'on pourrait examiner plus attentivement? Je sais, même avec la saison de la pêche qui va commencer au début de novembre, que les gens que nous avons rencontrés sont au courant de cela. Il y aura des gens qui vont les survoler et les surveiller d'en haut. Ils seront là si quelque chose arrive.

J'ai eu l'impression, d'après certains commentaires, que vous n'êtes pas complètement à l'aise de dire que c'est la meilleure façon de le faire. Auriez-vous quelque chose à nous recommander et qui serait mieux que ce que nous avons déjà, avec le partenariat et tout ce qui se passe?

M. Avery : Je dois répondre qu'il faut plus de ressources pour les auxiliaires. Il serait bon d'avoir plus de fonds et de formation pour les auxiliaires. J'ai déjà fait une suggestion dans le passé. Là où je pêche, c'est à 80 ou 90 milles de distance du navire de recherche et de sauvetage le plus proche qui pourrait effectivement intervenir. Ils pourraient s'adresser aux membres auxiliaires d'autres secteurs qui ne participent pas à l'ouverture de cette pêche pour qu'ils se rendent dans le secteur où les risques sont élevés en raison de l'ouverture de plusieurs pêches en même temps. C'est une chose que je recommanderais certainement et qui, je pense, pourrait fonctionner.

Comme je l'ai déjà dit, il faut offrir plus de formation et d'information aux personnes en mer. C'est frustrant de rester dans la flotte auxiliaire, non seulement pour les pêcheurs, mais également pour les plaisanciers. J'ai vu un plaisancier dont le bateau était en panne dans la baie. Il se croyait dans le golfe, alors qu'il était dans la baie. Je l'ai su tout de suite quand le centre conjoint de la Garde côtière m'a appelé et qu'il m'a donné sa latitude et sa longitude. Je connais ces chiffres par cœur. J'ai dit : « Je ne pense pas qu'il soit dans le golfe. Je suis presque certain que ce chiffre se situe dans la baie. » Il avait une machine.

Quoi qu'il en soit, j'habite à Freetown, qui se trouve à presque une heure de route de l'endroit où mon bateau est amarré hors saison. J'ai un chalet où je vis quand je pêche. Ils m'ont demandé si je voulais y aller. C'était un plaisancier. Il était inquiet et n'avait qu'un petit bateau. J'ai fini par y aller, mais j'ai dû faire une heure de route jusqu'à Alberton, puis préparer mon bateau et me rendre jusqu'à lui; il s'est donc probablement écoulé presque deux heures avant que j'arrive. L'homme était vraiment dans tous ses états. J'en suis venu à lui demander : « Voulez-vous que je vous remorque ou non? Je n'ai pas besoin de cela non plus. »

Ce genre de situation illustre la nécessité que la Garde côtière soit présente dans une région. Il s'agit de personnel payé, et les ressources devraient être là pour intervenir en cas de besoin. Les services auxiliaires auraient peut-être besoin de plus de ressources. Il devrait y avoir un navire SAR prêt à intervenir dans toutes les régions.

M. Franck : Puis-je ajouter une petite chose à cela? Effectivement, il faut prévoir des ressources appropriées pour réagir aux différentes circonstances. À la Fishery Safety Association, nous nous inquiétons du grand nombre de bateaux qui sortent le jour de mise à l'eau des cages. Dans certaines parties de la Nouvelle-Écosse, en particulier, les bateaux de pêche sont de plus en plus gros, longs et larges. Il y a de grandes plateformes qui sortent.

C'est une autre section du MPO qui s'occupe de la forme des quais dans ces ports et qui s'assure que tous ces bateaux peuvent sortir rapidement en zone de pêche sans entrer en collision, causer des urgences et endommager l'équipement, dans les quais comme sur les bateaux.

Je ne vois pas principalement la Garde côtière canadienne ou la Garde côtière auxiliaire comme un taxi marin ou une remorque marine que n'importe qui peut appeler. Le triage est très important pour déterminer si le bateau est brisé, mais que tout le monde va bien. C'est une chose, mais il ne faudrait pas priver de ressources les véritables situations d'urgence, où un bateau est brisé et qu'une personne risque de se retrouver à l'eau.

Il arrive qu'on porte secours au mauvais bateau et que cela ne change peut-être rien. Cela nous inquiète. S'il y a 1 600, 1 700 ou 2 000 bateaux qui sortent le 28 novembre entre South Shore et le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, qu'arrivera-t-il s'il y a un ou deux incidents simultanés ou qu'un autre incident survient dans un autre secteur du Canada atlantique en même temps? Cela accapare des ressources, qui ne sont plus disponibles si on en a besoin. Il est très important que les pêcheurs répondent aux situations de leur propre ressort et qu'ils aident leurs collègues et amis. C'est pour cette raison qu'ils pêchent ensemble. C'est en grande partie parce qu'ils sont là.

Si je peux revenir un peu à la question que de la sénatrice Hubley a posée sur la déclaration de ce genre de situation, les incidents doivent être déclarés au Bureau de la sécurité des transports et à d'autres organismes. Le rapport ne mentionnera pas nécessairement tous les autres bateaux de pêche qui ont interrompu leurs activités pour mener une opération de recherche ou de sauvetage.

En mai 2011, nous avons perdu un pêcheur au large, au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Il paraît que 25 homardiers ont participé aux recherches pendant 8 à 10 heures, qu'ils ont interrompu leurs activités de pêche pour participer aux recherches. Malheureusement, ils sont revenus bredouilles.

Pouvez-vous imaginer ce que représente toute une journée de recherche et de sauvetage par les navires de la Garde côtière et 25 bateaux de pêche pour retrouver quelqu'un? Une grande partie des coûts des opérations de recherche et de sauvetage serait totalement évitable. Une grande partie des incidents pourrait être prévenue. Nous pourrions en faire beaucoup plus pour prévenir les blessures plutôt que d'investir autant en intervention. Nous avons besoin de ressources appropriées pour faire ce travail, mais en même temps, il faut nous concentrer sur la prévention.

La sénatrice Hubley : Je pense avoir obtenu une réponse à ma question, mais elle concernait l'emplacement stratégique du matériel en période de risque élevé. Nous avons appris hier qu'il y avait de la surveillance aérienne des eaux de la région de South Shore au début de la saison de pêche, par mesure de précaution. L'équipement est un aspect essentiel du travail que vous faites dans les services auxiliaires. Je pense que ce serait ma seule recommandation.

Pendant l'été, il arrive qu'il y ait un plus grand nombre de plaisanciers sur l'eau. Ils essaient de s'adapter pour offrir des services en période de pointe et ce genre de choses. Nous pourrions peut-être aussi nous tourner vers eux pour nous assurer que les pêcheurs ont les protections dont ils ont besoin pendant qu'ils sont sur l'eau.

Le sénateur Enverga : Pour revenir aux recherches pour retrouver des personnes perdues en haute mer, que pensez vous des radiobalises? Recommanderiez-vous que chaque personne en haute mer ou loin de la côte soit tenue de porter une radiobalise personnelle?

M. Avery : Je pense que ce serait une bonne idée. Même quand on se trouve près de la côte, un incident peut arriver assez vite parfois. Quand le brouillard se lève, il m'est déjà arrivé de me retrouver entouré d'une quarantaine de bateaux sans en voir un seul pendant de longues périodes. Ce serait assurément un bon outil d'aide à la recherche et au sauvetage.

M. Franck : J'ajouterais que les radiobalises de localisation personnelles sont fantastiques quand elles sont intégrées à un VFI. Si elles ne sont attachées à rien, on risque de trouver un corps. Nous voulons essayer de ramener les gens chez eux vivants. Si chaque personne portait un vêtement de flottaison individuel muni d'une radiobalise de localisation personnelle, ce serait une amélioration incroyable.

M. Lanteigne : À plus de 65 endroits, c'est déjà obligatoire. Bien sûr, nous serions totalement favorables à ce qu'il y en ait sur chaque navire sur l'eau.

Le sénateur Enverga : De plus, tous les téléphones cellulaires comprennent désormais un GPS. J'espère que quiconque sort en mer aura cette application, à défaut de porter une radiobalise.

Le président : C'était une excellente conversation. Je pense que nous avons beaucoup appris de vous. Nous réfléchirons sûrement aux propositions que vous nous avez faites concernant les différents aspects de la recherche et du sauvetage dans les prochaines semaines, pendant que nous préparons notre étude. Nous vous remercions infiniment de votre participation à nos délibérations d'aujourd'hui.

(La séance est levée.)

Haut de page