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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 
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Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule nº 8 - Témoignages du 1er novembre 2016


OTTAWA, le mardi 1er novembre 2016

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 18 h 2 pour poursuivre son étude sur la recherche et le sauvetage maritime, y compris les défis et les possibilités qui existent.

La sénatrice Elizabeth Hubley (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Je m'appelle Elizabeth Hubley, je suis sénatrice de l'Île-du-Prince-Édouard, et je suis très heureuse de présider la réunion ce soir. Avant de céder la parole aux témoins, j'invite les membres du comité à se présenter. Je commencerai par ma gauche.

Le sénateur McInnis : Le sénateur Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

La sénatrice Raine : Sénatrice Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Poirier : Sénatrice Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Munson : Jim Munson, de l'Ontario.

La vice-présidente : Merci.

Le comité poursuit son étude sur la recherche et le sauvetage maritime, y compris les défis et les possibilités qui existent. Ce soir, nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de la Fédération maritime du Canada. Voudriez- vous vous présenter?

Michael Broad, président, Fédération maritime du Canada : Merci, madame la sénatrice. Je m'appelle Michael Broad et je suis président de la Fédération maritime du Canada. À ma gauche, voici Chad Allen, qui est notre directeur des opérations maritimes et était autrefois capitaine en second sur des navires battant pavillon étranger navigant entre l'Europe, l'Asie et l'Amérique du Nord. À ma droite, voici Sonia Simard, qui est notre directrice des affaires législatives et environnementales.

La vice-présidente : Au nom des membres du comité, je vous remercie de vous être présentés ici aujourd'hui. Je crois savoir que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Donc, afin de pouvoir consacrer le plus de temps possible aux délibérations, je vous demanderais de limiter vos déclarations à 10 minutes. Vous avez la parole.

M. Broad : Merci, madame la sénatrice, et merci à vous tous de nous donner cette occasion de participer à votre étude sur les activités de recherche et de sauvetage maritimes.

Notre organisation, la Fédération maritime du Canada, représente les propriétaires, les exploitants et les agents maritimes dont les navires participent au commerce mondial du Canada. Notre contribution à l'étude de votre comité vise à lancer une alerte concernant le besoin urgent de financer le remplacement de la flotte de brise-glace de la Garde côtière canadienne; nous avons en effet constaté que certains membres de votre comité avaient déjà posé des questions à ce sujet.

Je vais m'efforcer de rester bref et je vais me concentrer sur quelques messages clés.

La flotte de brise-glace de la Garde côtière joue un rôle fondamental, car elle maintient les eaux canadiennes ouvertes au commerce maritime. Cela s'applique en particulier aux routes commerciales, comme celles de la côte nord- est de Terre-Neuve et du golfe du Saint-Laurent, celles du fleuve Saint-Laurent et des Grands Lacs et celles de l'Arctique canadien, qui doivent toutes compter sur les services des brise-glaces de la Garde côtière pour rester ouvertes à la navigation malgré les conditions difficiles des hivers glacés.

Les services de déglaçage et de gestion des glaces sont les piliers du mandat de la Garde côtière, en vertu de la Loi sur les océans, et sa flotte joue un rôle essentiel dans la protection de l'environnement maritime en escortant les différents navires qui circulent sur les eaux glacées, entre autres les pétroliers et les autres navires transportant des marchandises dangereuses.

Malgré son importance, la flotte de brise-glace de la Garde côtière est dans une situation précaire, et elle est mal placée pour répondre aux besoins du nombre accru de navires qui sillonnent les eaux canadiennes. Le nombre de vaisseaux résistant aux glaces, dans cette flotte, diminue d'année en année, et plusieurs des brise-glaces restants ont dépassé leur durée de vie utile, leur âge moyen étant de plus de 36 ans.

Même si le gouvernement a investi afin de prolonger la durée de vie des vaisseaux de la flotte, ses efforts n'ont pas abouti à une augmentation de la capacité de déglaçage; en fait, ils ont plutôt réduit le nombre global de vaisseaux disponibles, puisqu'un certain nombre sont immobilisés pour ces travaux de prolongation de la vie utile.

Même si la flotte de brise-glace de la Garde côtière prend de l'âge et est limitée tant en nombre qu'en capacité, la demande de services de déglaçage demeure forte, ce qui est dß principalement aux activités industrielles le long des cours d'eau canadiens, à l'augmentation constante du trafic des conteneurs, à l'augmentation des services de traversier dans l'Est du Canada et à l'importance croissante du trafic dans l'Arctique, mais aussi au fait que les brise-glaces sont toujours requis par la lutte contre les inondations, les activités de recherche et sauvetage et d'autres priorités du gouvernement. On s'attend à ce que les pressions sur cette flotte augmentent encore davantage lorsque l'accord commercial entre le Canada et l'Europe entrera en vigueur.

Le vérificateur général, le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans de même que tous les intervenants du secteur maritime ont reconnu publiquement qu'il fallait établir un calendrier complet et réaliste pour remplacer la flotte de brise-glace. Le Comité d'experts sur la sécurité des navires-citernes a déposé en 2015 un rapport insistant sur la nécessité d'ajouter des navires résistant aux glaces à la flotte pour satisfaire aux engagements du gouvernement et assurer la sécurité de la navigation.

Nous croyons également que les efforts déployés par la Garde côtière pour utiliser de façon optimale ses brise-glaces actuels, même s'ils sont louables, équivalent à mettre un pansement sur une jambe de bois. Nous sommes convaincus que la Garde côtière s'en tire très bien avec ce qu'elle a, mais que se passerait-il si l'un de ses brise-glaces encore opérationnels tombait subitement en panne, la flotte étant déjà si réduite?

Un exemple illustre nos préoccupations. En 2013 et en 2014, des vaisseaux chargés de conteneurs remplis de marchandises juste-à-temps et de matières premières ont été retardés, parfois jusqu'à cinq jours durant, en raison des mauvaises conditions de la glace et d'un manque de brise-glaces dans le corridor commercial du Saint-Laurent. En 2015, la voie maritime a ouvert plus tard que jamais depuis 1997 en raison de la gravité des embâcles, lesquels ont compliqué le travail des brise-glaces qui cherchaient à ouvrir les corridors commerciaux des Grands Lacs. Enfin, pendant la saison de navigation dans l'Arctique, en 2015, la Garde côtière n'a pas réussi à respecter ses niveaux de service affichés et n'a pas envoyé le nombre convenu de brise-glaces pour escorter les navires commerciaux et de ravitaillement, conformément à une directive du gouvernement visant à détacher deux des meilleurs brise-glaces du Canada pour une mission au pôle Nord. Cette situation met en relief le trop petit nombre de brise-glaces de la flotte, actuellement, et fait en sorte qu'il est difficile pour la Garde côtière de respecter ses objectifs malgré les variations du climat et du trafic.

Les membres du comité doivent comprendre le rôle essentiel que jouent les missions de ravitaillement annuelles pour la survie des collectivités nordiques et savoir à quel point ces missions sont tributaires d'un transport maritime accessible et fiable. Je n'ai pas de chiffre en tête, mais j'affirmerais que le coßt de l'exploitation et du maintien des vieux vaisseaux de la Garde côtière et celui du Programme de prolongation de la vie des navires dépassent de beaucoup le coßt de l'exploitation et de l'entretien d'une flotte renouvelée. Au bout du compte, les capacités insuffisantes de la flotte de brise-glace nuit à la capacité du Canada de mettre en place, de soutenir et de maintenir une robuste chaîne d'approvisionnement, un soutien essentiel à l'économie du Canada, et d'assurer le bien-être social et économique des collectivités éloignées.

En conclusion, pour surmonter ces obstacles, la Fédération maritime du Canada est en faveur de l'élaboration et de la mise en ouvre immédiate d'un plan concret visant le renouvellement efficace de la flotte de brise-glace de la Garde côtière. J'inviterais les membres du comité à envisager plus précisément les recommandations suivantes :

Premièrement, nous recommandons d'adopter un plan concret visant à renouveler la flotte de brise-glace de la Garde côtière, ce qui suppose de dégager des fonds et d'établir un calendrier réaliste et vérifiable pour la livraison de ces navires à moyen terme.

Notre deuxième recommandation vise à renouveler en priorité les brise-glaces moyens de type 1200 avant de commencer les travaux de construction prévus du brise-glace polaire proposé de 1,3 milliard de dollars.

Notre troisième recommandation vise à court terme à étudier toutes les options pour accroître le nombre de bâtiments disponibles et permettre à la Garde côtière de respecter ses engagements relativement au niveau de services de déglaçage, y compris envisager la possibilité d'acheter ou de noliser des brise-glaces étrangers ou de faire construire de nouveaux navires à l'étranger.

Madame la présidente, distingués membres du comité, merci de votre attention. Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions.

La vice-présidente : Merci beaucoup de cet exposé.

J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au sénateur Wallace de même qu'à la sénatrice Eaton et au sénateur Sinclair.

Notre première question sera celle du sénateur McInnis, membre de notre comité directeur.

Le sénateur McInnis : Je souhaite la bienvenue aux témoins et je les remercie de s'être présentés. Je savais que cela allait un jour m'arriver, pendant ma carrière. J'ai quitté mon bureau à la hâte et j'ai pris le mauvais cartable; toutefois, j'ai lu tous vos documents.

J'aimerais dire pour commencer que vos commentaires et ce que j'ai lu cet après-midi m'amènent à penser que le mot « crise » est peut-être trop fort; diriez-vous que nous approchons d'une crise? Si j'ai bien compris, nous possédons quelque 17 vaisseaux de dimensions diverses. Nous en avons deux grands et, bien sßr, nous avons passé une commande pour en faire construire un autre important, et je crois que, selon le calendrier, il devrait être construit en 2018 et entrer en service un peu plus tard, mais ces choses-là sont souvent repoussées.

Oø en sommes-nous? Il me semble que c'est très sérieux, à vous entendre, en particulier quand on sait que ces navires pilotent de très gros transporteurs remplis de marchandises dangereuses, et tout cela, ce qui soulève des préoccupations touchant l'environnement. Oø en sommes-nous à cet égard, et à quel point est-ce que c'est grave?

M. Broad : Merci. Comme je l'ai dit, l'âge moyen de ces navires est de plus de 36 ans. En fait, le Louis St-Laurent a la cinquantaine, peut-être, ou il s'en approche. Cela fait plusieurs années que nous parlons de cette question.

Lorsque la saison des glaces est difficile, il y a en effet des retards. Les navires sont retardés parce qu'il n'y a pas suffisamment de brise-glaces pour leur frayer un chemin. L'an dernier, nous l'avons vu, le programme de réapprovisionnement a été chamboulé, encore une fois parce qu'il manquait de brise-glaces. Deux de ces navires avaient été envoyés en mission au pôle Nord.

Je ne dirais pas que c'est une crise, mais il est temps d'agir. Il est temps de renouveler la flotte. C'est la même chose pour tous les actifs. Ces bâtiments ont plus de 36 ans. Plus le temps passe, plus les retards seront nombreux. Chaque année, le nombre des retards augmente. Je crois que cela se poursuivra ainsi, et c'est mauvais pour l'économie et pour le commerce.

Le sénateur McInnis : Est-ce que le Louis St-Laurent cause des retards? Est-ce qu'il restera en service encore longtemps?

M. Broad : Oui, et il faudra prolonger la durée de vie de plusieurs des autres navires. On a déjà prolongé la durée de vie du Louis St-Laurent. Mais ces travaux ne se font que pendant l'hiver, au moment oø les brise-glaces sont en demande.

Le sénateur McInnis : Je pensais à des solutions à court terme. Y a-t-il des vaisseaux disponibles, que l'on pourrait noliser?

M. Broad : Je ne suis pas un expert, mais, étant donné la chute récente du prix du pétrole — et, comme nous le savons tous, les projets pétroliers ont été mis en veilleuse —, nous savons qu'il y a quelques brise-glaces battant pavillon étranger disponibles, et on pourrait les affréter, mais je ne sais pas combien cela coßterait. Toutefois, nous ne pouvons pas le faire, actuellement, car les lois canadiennes l'interdisent. Nous devons utiliser des vaisseaux battant pavillon canadien, et il nous faudra une éternité avant de pouvoir nous servir de navires étrangers, à moins de changer la loi.

Le sénateur McInnis : Quelle opinion ont de nous les intervenants de la communauté internationale du transport maritime?

M. Broad : Ils voient bien que les actifs de certains secteurs du commerce sur le Saint-Laurent prennent de l'âge. Les armateurs que nous représentons voient bien que la flotte vieillit. M. Allen a parcouru le Saint-Laurent sur toute sa longueur, pendant un certain nombre d'années, à bord de porte-conteneurs. Nous avons besoin d'un bon équipement, dans ce secteur, et les retards augmentent tous les ans.

La sénatrice Eaton : Je trouve que votre lettre est intéressante d'un bout à l'autre, et j'aurais adoré pouvoir en discuter davantage avec vous, mais il y en a parmi mes collègues qui aimeraient aussi vous parler. Dans une de vos recommandations, et j'ai trouvé cela très intéressant, vous dites qu'il faudrait se doter en priorité de brise-glaces lourds et de brise-glaces moyens, avant même le brise-glace de classe polaire de 1,3 milliard de dollars.

Mais les eaux polaires ne sont-elles pas plus menacées, aujourd'hui, en raison du trafic accru? Est-ce que vous y enverriez ces navires brise-glaces lourds et moyens si vous le deviez? Pourquoi avez-vous présenté cette recommandation-là?

M. Broad : Je ne sais pas à quel moment la construction de ce navire va commencer, mais je ne crois pas qu'il sera livré avant 2022; il coßtera 1,3 milliard de dollars. Ce navire, il y a quatre ans, pouvait être construit pour 780 millions, et aujourd'hui, il en coßte jusqu'à 1,3 million de dollars, et il devrait être construit au Canada. Je ne crois pas que nous ayons les moyens de construire de façon efficiente ce type de navire, ici, mais nous ne voulons pas commenter les politiques du gouvernement. Nous pensons que, plutôt que de construire un navire de 1,3 milliard de dollars, nous pourrions en construire plusieurs pour le même prix.

La sénatrice Eaton : Est-ce que les plans du brise-glace de classe polaire sont prêts? La construction n'a pas encore commencé, mais est-ce que les plans sont prêts? Faudrait-il retourner à la planche à dessin pour les navires lourds et moyens?

M. Broad : Non, je crois que, présentement, il serait plus facile de se lancer dans la construction des navires moyens et lourds, si j'ai bien compris, à tout le moins, que de construire un navire de classe polaire. Toutefois, à ce sujet, des membres de la Garde côtière m'ont dit que, de nos jours, pour construire un nouveau brise-glace, au Canada, étant donné tout ce qui se passe dans la marine et sur les chantiers maritimes du Canada, il faut huit ans. Il n'y a pas vraiment de bonnes nouvelles, en ce qui a trait aux brise-glaces.

La sénatrice Eaton : Eh bien, pour mon comité comme pour d'autres — je siège également au Comité des finances —, tout cela est très décourageant; nous entendons bien ce que disent les représentants de la marine et de la Garde côtière, et on ne peut que se demander pourquoi les choses n'avancent pas plus vite.

La sénatrice Poirier : Merci, madame et messieurs, de vous être présentés ici. J'aurais deux ou trois questions sur le même sujet.

Plusieurs témoins nous ont parlé de l'augmentation de l'activité dans l'Arctique depuis le début de notre étude, que ces activités soient récréatives ou commerciales. Vous serait-il possible de nous renseigner sur le niveau d'activité de vos membres sur les routes de glace, ces cinq dernières années, et de nous dire à quel moment le déglaçage est nécessaire? Est-ce qu'il vous serait possible de communiquer ces renseignements à notre comité?

M. Broad : Pas ce soir, mais oui, ce serait possible.

La sénatrice Poirier : Ma deuxième question vise à savoir si vous pensez que cette tendance à l'augmentation va se maintenir. Est-ce que les entreprises qui circulent sur ces routes de glace ont déjà dit qu'elles craignaient pour leur sécurité en raison du manque de brise-glaces?

M. Broad : En ce qui concerne votre première question sur le niveau du trafic et sur la tendance, il y a eu cette année des croisières sur le navire de plaisance Crystal Serenity, et la région devient une destination pour le tourisme d'aventure. Quelques-uns de nos membres participent à des projets miniers, sur l'île de Baffin, les projets de Baffinland. Nous savons également que les transporteurs aimeraient bien qu'un passage du Nord-Ouest s'ouvre afin de pouvoir aller de l'Asie jusqu'en Europe en passant par l'Arctique. Personnellement, cette idée ne me plaît pas.

Le trafic augmente bel et bien, au point oø le Canada envisage d'adopter un code polaire et cherche à tracer des corridors commerciaux définis en réponse aux préoccupations touchant l'environnement et les opérations de sauvetage. Il ne faut pas que les navires aillent n'importe oø, dans l'Arctique, et c'est pourquoi le gouvernement veut maintenir ces corridors maritimes.

Quelle était l'autre question?

La sénatrice Poirier : Est-ce que les entreprises qui circulent sur ces routes de glace ont déjà dit qu'elles craignaient pour leur sécurité en raison du manque de brise-glaces?

M. Broad : Pas à notre connaissance.

La sénatrice Poirier : Vous avez également mentionné, dans votre déclaration d'ouverture — et il en était également question dans vos notes, je l'ai vu — l'accord économique et commercial global, l'AECG une question d'actualité. À votre avis, si la Garde côtière ne renouvelait pas à temps sa flotte de brise-glace, est-ce que cela pourrait nuire à nos exportations et à nos importations? Dans l'affirmative, dans quelle mesure est-ce que cela nuirait, à votre avis?

M. Broad : C'est difficile à dire. De toute évidence, si on ne renouvelle pas la flotte de brise-glace dans un proche avenir, la circulation sur le Saint-Laurent deviendra beaucoup plus difficile, et les ports entre Québec et Montréal pourraient être menacés.

J'imagine que la solution consisterait peut-être à faire passer les marchandises par d'autres ports, mais cela augmenterait de beaucoup les coßts. Le transport maritime est toujours moins cher que le transport ferroviaire ou routier, et il est en passant plus respectueux de l'environnement, en plus.

Le sénateur Munson : Merci de votre présence. Vous avez fait allusion à l'Arctique. Est-ce que nous avons aujourd'hui la capacité de faire ce travail? Nous avons beaucoup entendu parler de cet énorme navire rempli de touristes. Est-il déjà passé? Est-ce qu'il s'est rendu jusqu'au Nord?

M. Broad : Oui.

Le sénateur Munson : Mais il y en aura d'autres. Cette capacité pique chaque fois ma curiosité. La tendance va s'accentuer. Serait-il possible qu'un de ces navires se prenne dans les glaces et que nous ne soyons pas capables de l'en libérer?

M. Broad : J'aimerais demander à Mme Simard de répondre.

Sonia Simard, directrice, Affaires législatives et environnementales, Fédération maritime du Canada : En ce qui a trait à la capacité dans le Nord, si on l'envisage sous l'angle du trafic commercial, nous en sommes encore dans une situation oø le trafic est principalement destiné au ravitaillement des collectivités et aux activités minières. Mais, encore là, en ce qui a trait à la capacité de fournir des services de déglaçage — par exemple, pour ravitailler les collectivités locales —, il arrive parfois que ces vaisseaux doivent attendre, parce que le brise-glace doit cesser de l'escorter vu qu'il est appelé, par exemple, à la rescousse par un navire de National Geographic en tournage dans la région. Il doit mettre fin à une escorte commerciale parce qu'il doit participer à une opération de recherche et sauvetage. Cela arrive, aujourd'hui; les priorités et les besoins de l'ensemble des utilisateurs ne sont pas nécessairement respectés. Et nous l'avons vu, ces derniers hivers.

Étant donné l'augmentation du trafic, pourrait-on imaginer un scénario selon lequel les besoins ne seraient pas comblés? Il n'est pas difficile d'imaginer un scénario selon lequel on n'arriverait pas à trouver un bateau escorte pour un navire qui va ravitailler les collectivités, pour un navire commercial, pour des activités de recherche et sauvetage ou encore pour un navire de tourisme d'aventure, avec toutes les exigences que cela suppose.

Puisque nous parlons du tourisme d'aventure, les navires qui empruntent le passage du Nord-Ouest pour des croisières à fins sportives ou d'excursion ne sont peut-être pas aussi bien préparés que l'on aimerait s'y attendre. À l'heure actuelle, nous ne contrôlons peut-être pas tout à fait ce trafic, et cela crée des besoins supplémentaires à la dernière minute, tandis que la circulation commerciale est beaucoup mieux établie et que ses besoins sont connus à l'avance.

Oui, il se peut que les conflits augmentent en nombre. Toutefois, pour le moment, la tendance — vous parliez de l'augmentation du trafic dans le passage du Nord-Ouest — nous ne pensons pas pour le moment — corrigez-moi si je me trompe — que le passage du Nord-Ouest va se transformer en autoroute d'ici cinq ans. Il faudra beaucoup plus de temps. Nous ne sommes pas ici pour vous dire que nous avons besoin d'un nombre accru de brise-glaces parce que nous pensons que, dès demain, le passage du Nord-Ouest sera devenu une autoroute. Ce n'est pas ce que nous disons.

Pour le moment, cependant, en ce qui a trait au besoin de soutenir les navires qui assurent le ravitaillement, les navires commerciaux, les projets miniers, tout cela, il y a parfois des retards, parce que les brise-glaces qui nous escortent doivent être affectés à des activités de recherche et sauvetage ou à d'autres missions.

Le sénateur Munson : Si on laisse de côté les opérations de sauvetage air-mer, pour mon édification personnelle, j'aimerais savoir quelles sont les priorités des brise-glaces, qu'ils appartiennent ou non à la Garde côtière. Leur priorité est-elle d'accompagner les navires qui ravitaillent en nourriture et en fournitures de la vie quotidienne les collectivités du Nord ou d'ouvrir dans la glace un chemin pour les touristes bien nantis qui veulent visiter notre Nord? Quelle serait la priorité d'un brise-glace?

Mme Simard : Personnellement — et j'ignore si mes collègues voudront ajouter quelque chose —, en ce qui concerne les priorités, dans le domaine commercial, je ne suis pas certaine que les priorités soient fixes. Mais il est certain que, si une opération de recherche et sauvetage est lancée, les brise-glaces devront cesser d'escorter les navires commerciaux pour participer à cette opération.

Quand vous parlez d'ouvrir un chemin dans la glace pour les navires d'excursion, les petits vaisseaux et les bateaux- pilotes qui se rendent dans la région, s'ils se retrouvent en danger, oui, les navires commerciaux perdront leur escorte. Si nous avons bien compris, la Garde côtière va remplir son mandat premier, c'est-à-dire, je crois, les opérations de recherche et sauvetage; nous ne sommes pas venus ici pour dire que cela ne devrait pas être ainsi. Mais c'est un fait, si les navires qui s'engagent dans les eaux de l'Arctique ne sont pas équipés comme ils le devraient pour affronter ce type de climat et que les navires en mission de ravitaillement, qui sont, eux, bien équipés, mais peuvent avoir besoin de services de déglaçage, les brise-glaces iront d'abord au secours des petits vaisseaux perdus dans l'Arctique. Cela arrive, et nous croyons que la priorité pourrait changer si des vies étaient menacées.

La sénatrice Poirier : À quelle fréquence est-ce que cela se produit?

Mme Simard : Je devrais apporter des précisions. Notre association ne représente pas le secteur du ravitaillement. Les missions de ravitaillement des collectivités locales sont confiées à des vaisseaux battant pavillon canadien. Au Canada, un navire qui transporte des marchandises du point A au point B doit être immaculé au Canada. Le ravitaillement est assuré par des vaisseaux canadiens. Nous représentons les navires au long cours qui, par exemple, vont prendre livraison de produits miniers au sud, je devrais dire au nord du 60e parallèle.

La sénatrice Poirier : Je voulais savoir, en fait, à quelle fréquence il arrivait qu'un brise-glace quitte un navire commercial pour participer à une opération de recherche et sauvetage?

Mme Simard : J'en ai parlé parce que ça s'est produit, à notre connaissance, dans le cas de navires de ravitaillement. Ça ne nous est pas arrivé à nous. Ce sont nos collègues du secteur, ceux qui s'occupent du ravitaillement. Nous savons que c'est arrivé au moins une fois l'an dernier et que le navire de ravitaillement a craint de perdre son escorte en cas d'appel à l'aide. C'est ce que nous savons.

M. Broad : Nous ne sommes pas des experts du trafic maritime dans l'Arctique. Nous travaillons surtout au sud du 60e parallèle. Je dirais que, parmi nos membres, 98 p. 100 font leurs affaires au sud du 60e parallèle.

Le sénateur Munson : J'ai une autre question pour le capitaine, parce que vous avez dit que vous aviez été un peu partout dans le monde à bord de différents navires. Vous, ou peut-être M. Broad, avez peut-être l'expérience nécessaire pour nous comparer à d'autres pays.

Vous avez donné un chiffre. Nous possédons bien 17 brise-glaces? C'est-à-dire 17 plus celui que nous pourrions avoir en 2018 ou dans 6 ou 7 ans d'ici.

Comment notre situation se compare-t-elle avec celle, par exemple, de la Russie, de la Norvège septentrionale, de la Suède, ou encore des États-Unis, en Alaska? Est-ce que nous accusons beaucoup de retard par rapport à ces pays, ou est-ce que nous nous en tirons bien?

M. Broad : La Russie, assurément, possède quelque 48 brise-glaces, et est en train de construire 4 nouveaux brise- glaces de classe polaire. La Russie a de l'avance sur tous les pays, à ma connaissance.

Les États-Unis n'ont pas énormément de brise-glaces. Combien en ont-ils sur les Grands Lacs?

Chad Allen, directeur, Opérations maritimes, Fédération maritime du Canada : Ils n'en ont que deux ou trois.

M. Broad : Ils sont également en train de construire un brise-glace de classe polaire. Je crois que c'est entre autres pour cette raison que le Canada voulait lui aussi avoir un autre brise-glace de classe polaire.

Le sénateur Munson : Nous parlons aussi de ce voyage, cette magnifique histoire d'un vaisseau qui est parti de quelque part en Russie et s'est rendu en Chine en utilisant une route polaire; quelle extraordinaire entreprise!

M. Broad : Oui.

Le sénateur Munson : Je ne crois pas que nous pourrions faire la même chose.

M. Broad : Non. Ils ont pris une route différente. Comment est-ce qu'ils l'appellent, la route de l'Est?

M. Allen : Il y en a deux. Il y a le passage du Nord-Ouest et il y a la route de la mer du Nord. C'est celle-là qui passe par la Russie, la route de la mer du Nord.

Le sénateur Munson : Les Russes pourraient donc nous donner des leçons. S'ils peuvent se le payer, pourquoi ne pouvons-nous pas nous le payer?

M. Broad : Oui.

Le sénateur Enverga : J'aimerais parler de la capacité de recherche et sauvetage de la Garde côtière. La semaine dernière, nous nous sommes rendus à Halifax, et à Sydney, en Nouvelle-Écosse, et il a été question de la capacité.

Sauriez-vous dire combien de fois vous avez aidé la Garde côtière dans des opérations de recherche et sauvetage parce que vous étiez, disons, heureusement dans les parages? Auriez-vous des chiffres à ce sujet?

M. Allen : Je ne suis pas personnellement au courant de ces statistiques, mais, comme vous le dites, cela fait partie des éventualités, lorsqu'il y a des opérations de recherche et sauvetage. Si un vaisseau est en mesure d'aider, il doit aider, en vertu de la Convention SOLAS.

Le sénateur Enverga : Savez-vous combien de fois il est arrivé que des membres de votre groupe puissent aider la Garde côtière? Jusqu'à quel point la Garde côtière peut-elle compter sur vous, sur les vaisseaux commerciaux, lorsqu'il y a des gens à sauver?

M. Allen : Je crois qu'elle peut compter sur nous, à coup sßr, pour utiliser les ressources qui se trouvent en mer, c'est- à-dire sur l'océan Atlantique, ou quelque part sur l'océan Pacifique. Il est probable que ces navires se trouveront plus près que les navires officiels de recherche et sauvetage de Halifax ou de la côte Ouest.

Le sénateur Enverga : La dernière fois que nous y sommes allés, nous avons posé une question à la commissaire de la Garde côtière, et elle nous a dit que le Grand Nord changeait. Les changements climatiques devaient entraîner un réchauffement de l'Arctique, mais il arrive que la glace y soit plus épaisse que jamais auparavant. Diriez-vous que c'est vrai, en vous fondant sur l'expérience de vos membres?

M. Allen : Je ne suis pas un environnementaliste. Nous disons toujours que nous ne sommes pas des experts de l'Arctique. Il est très difficile pour nous de parler des conditions changeantes dans l'Arctique.

Mme Simard : Je ne parle pas par expérience personnelle, mais quand vous lisez des choses sur le passage de l'Arctique, que ce soit dans des revues spécialisées ou de la documentation scientifique et qu'il est question des changements climatiques, ce qui est important, sur le plan de la navigation, c'est que nous parlons d'eaux libres de glace, nous ne nous attendons pas à ce que ce soit bientôt une réalité. Ce qu'il y a, c'est que, étant donné que la glace fond, il y a aujourd'hui davantage de morceaux de glace flottants qui encombrent les passages. Bien que la superficie des banquises ait diminué, il y a de plus en plus de morceaux de glace qui flottent librement, compliquant davantage les choses pour les navigateurs.

Sur la question des changements climatiques, si nous pensons à la navigation en haute mer, je crois que tous les marins pourront vous dire que, dans l'Arctique, les changements entraînent beaucoup de défis supplémentaires et nouveaux, puisqu'il y a maintenant des blocs de glace qui flottent librement, alors qu'ils formaient autrefois des icebergs plus imposants. C'est donc un défi pour les navigateurs, dans l'Arctique, et cela sera encore un défi demain.

Le sénateur Enverga : Je comprends, maintenant.

La sénatrice Raine : C'est un plaisir pour notre comité de vous accueillir. Quelqu'un a dit que les travaux visant à prolonger la durée de vie des vaisseaux ne se font que pendant l'hiver. Je ne comprends pas pourquoi il en est ainsi. Pourriez-vous l'expliquer?

M. Allen : Eh bien, en fait, la Garde côtière a établi un plan sur 10 ans, qui est affiché sur son site web, et ce plan indique à quel moment ces vaisseaux vont faire l'objet de travaux de prolongation de la vie et à quel moment ils vont être mis en cale sèche. La Garde côtière est tout à fait au courant des besoins dans l'Arctique et au sud du 60e parallèle, dans le Golfe. Elle fait ce qu'elle peut pour répondre aux besoins pendant les périodes de pointe, et elle ne dispose que d'une très petite fenêtre au cours de laquelle elle peut faire des travaux. Il est inévitable que des chevauchements se produisent.

Le printemps prochain, en avril, trois brise-glaces moyens et un brise-glace lourd vont devoir être rénovés. Si nous connaissons un hiver rigoureux, il y aura tout de suite un problème, dès le printemps. Ils essaieront bien sßr de travailler au printemps, en avril, mais s'il y a de la glace, un problème est à prévoir.

La sénatrice Raine : À ce moment-là, est-ce que la remise à neuf se fait l'été ou l'hiver? Est-ce que les navires ne sont pas en train de briser la glace, l'hiver?

M. Allen : C'est ce qu'ils font ici, dans le Sud. Dans l'Arctique, cela correspond en gros à une période d'entretien.

La sénatrice Raine : Ils ont abandonné l'Arctique.

M. Allen : Oui. Ils n'y vont pas, l'hiver. Ils n'y vont que pendant les mois d'été. Les périodes au cours desquelles il est vraiment possible de retirer des vaisseaux du service sont plutôt limitées, puisqu'il faut répondre au besoin des secteurs industriels de l'Arctique et du Sud.

La sénatrice Raine : La logistique est très complexe. Est-ce que vous saviez que deux brise-glaces allaient être affectés au pôle Nord, avant d'être mis en face des faits, l'été dernier?

M. Broad : Non. Cela nous a un peu pris par surprise.

La sénatrice Raine : Voici ma dernière question : si une équipe de tournage de National Geographic voulait se rendre dans l'Arctique et que cela risquait de mettre à rude épreuve notre petite flotte de brise-glace, est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut donner ou refuser son autorisation?

M. Broad : Eh bien, Sonia en connaît un peu plus que moi sur les aspects juridiques de cette question, mais les gens ont tous le droit de faire du commerce là et oø ils l'entendent, et les navires ont droit de passage dans les eaux internationales. Vous ne pouvez pas interdire à un navire de se rendre là-bas, même si, oui, cela crée des problèmes. Je me rappelle que le commissaire précédent de la Garde côtière m'avait parlé d'un type qui avait voulu se rendre en ski jusqu'au pôle Nord. Il m'a dit : « Nous avons dß aller le sauver; le montant d'argent que cela nous a coßté est incroyable. »

C'est un vaste territoire, et il y a des vaisseaux qui s'y rendent, le passage est gratuit, et, de temps en temps, ils restent pris; la Garde côtière doit donc aller à leur secours. Je dirais actuellement que c'est l'exception. Cela n'est pas la norme.

La sénatrice Raine : Il faut alors se demander qui paye la note, quand quelqu'un fait quelque chose de stupide, par exemple se rendre dans un lieu inaccessible et y rester pris. Il existe sßrement un moyen; nous avons adopté des mesures de protection environnementale, selon lesquelles, en cas de catastrophe, c'est l'industrie qui paye le nettoyage. Ne pourrions-nous pas adopter des mesures du même genre? Cela me dépasse de voir que nous nous débattons pour faire construire de nouveaux vaisseaux et que nous devons quand même assumer des coßts que nous ne pourrons jamais recouvrer. J'imagine que vous n'avez rien à dire à ce sujet?

M. Broad : C'est un bon point, vous avez raison, mais, je le répète, je crois que cet exemple illustre l'exception plutôt que la norme.

La sénatrice Raine : Oui.

M. Broad : Étant donné les dimensions de l'Arctique, vous pourriez y envoyer 15 ou même 20 brise-glaces, et vous ne pourriez pas couvrir le territoire complet. Mais je crois que vous avez soulevé un point intéressant : les ressources sont limitées, et nous devons trouver le moyen et la façon de les utiliser de la manière la plus efficiente possible.

La sénatrice Raine : Je sais que je m'écarte du sujet, mais si j'ai bien compris, le navire de touristes qui a emprunté ce passage a dß payer les frais de déglaçage.

M. Broad : C'est vrai. Il était accompagné de son propre brise-glace, un brise-glace britannique.

La sénatrice Raine : Je voulais vous poser une autre question, parce que vous avez parlé des expéditions juste à temps. J'imagine que le transporteur de marchandises juste à temps tient compte des conditions de la glace, évidemment, avant de garantir la livraison pour une date donnée de marchandises qui devront traverser des eaux glacées, pouvant peut-être exiger un déglaçage, alors, s'il se présente un imprévu qui les retarde, est-ce que c'est l'entreprise qui doit assumer les frais de ce retard? A-t-elle des recours pour le cas oø la route n'est pas ouverte?

M. Broad : Non, elle n'a aucun recours. Bien sßr, c'est l'entreprise qui devra couvrir ces coßts, et il y aura des coßts supplémentaires. Le navire de transport est retardé; il ne sera pas payé, non plus que le navire en retard. Donc, s'il en coßte 20 000 $ par jour pour ce navire, c'est cher. Les navires, en particulier ceux qui sont rattachés à un port et empruntent toujours les mêmes corridors commerciaux, sont retardés. Lorsqu'ils arrivent à Montréal, ils font demi- tour pour se diriger vers l'Europe. Ils doivent aller plus vite, pour rattraper le temps perdu, ce qui fait qu'ils brßlent davantage de carburant et que cela leur coßte encore plus cher. Il y a donc des coßts qui s'ajoutent aux intérêts des chargeurs, et l'importateur perd de l'argent, une vente, quelque chose, mais il n'a aucun moyen de recouvrer ces sommes. Il y a ainsi un certain nombre de coßts supplémentaires qui s'ajoutent, pour le propriétaire du navire, pour le chargeur.

La sénatrice Raine : Mais il est quand même très important, si nous voulons un commerce prospère et viable, que toutes ces choses fonctionnent bien. Comme vous le dites, étant donné que les navires ont 35 ans d'âge, vous prévoyez des problèmes, un jour, si nous ne construisons pas davantage de navires.

M. Allen : J'aimerais ajouter rapidement quelque chose à ce que Michael vient de dire. Lorsqu'un navire arrive en retard, s'il s'agit d'un porte-conteneurs qui doit arriver à un centre intermodal, il y aura tout un effet de dominos. Le réseau ferroviaire, le système ferroviaire dans son ensemble, tient pour acquis que les navires seront là à temps. La marge de manouvre n'est pas très grande, ici. Si un navire est en retard, cela se répercute en quelque sorte sur les trains disponibles et aussi sur la main-d'ouvre disponible, étant donné que la main-d'ouvre est également un élément crucial. Donc, quand un navire ou plusieurs navires sont en retard, il y a un effet en aval sur toute la chaîne d'approvisionnement. C'est un effet de dominos.

La sénatrice Raine : Il serait peut-être bien de se donner un peu de jeu, quant à la construction des brise-glaces.

La vice-présidente : Une autre question, monsieur Enverga.

Le sénateur Enverga : Étant donné tous les problèmes que vous pose le retard des navires, pourriez-vous estimer le manque à gagner ou encore le coßt de tous ces retards? Donnez-moi tout simplement une estimation de la somme que cela représente, pour le secteur, lorsque les brise-glaces sont en retard ou qu'ils ne sont tout simplement pas disponibles. Pourriez-vous nous donner une idée?

M. Broad : Non, mais je pourrais peut-être le faire dans deux ou trois mois, étant donné que la Garde côtière essaie justement de les avoir. Nos membres ne se sont jamais réunis pour consigner toutes les heures perdues ou le manque à gagner total, mais nous travaillons avec la Garde côtière, aujourd'hui, pour essayer de réunir quelques chiffres.

Le sénateur Enverga : Allez-vous nous communiquer cette information bientôt, dès qu'elle sera disponible?

M. Broad : Il s'agit d'un rapport de la Garde côtière. Je ne sais pas à quel moment il sera disponible, mais je sais qu'elle travaille justement sur ce sujet, oui.

Le sénateur Sinclair : Merci d'être venu. À la deuxième page de votre document, vous dites, dans le paragraphe du milieu, que des brise-glaces qui accompagnaient des navires commerciaux et de ravitaillement ont dß être réaffectés, deux d'entre eux, à une mission dans le pôle Nord. S'agissait-il d'une mission de recherche et sauvetage, êtes-vous au courant?

M. Broad : Non, il s'agissait d'une mission scientifique, n'est-ce pas, Sonia?

Mme Simard : C'était une mission scientifique, oui, il s'agissait de cartographier le plateau continental.

Le sénateur Sinclair : D'accord. Donc, le gouvernement du Canada a pris la décision de les réaffecter. Et est-ce que cela a eu des répercussions pour les navires commerciaux qu'ils escortaient?

M. Broad : En fait, non, il n'y a eu aucune répercussion sur les activités de ravitaillement dans l'Arctique.

Le sénateur Sinclair : D'accord. Je ne l'avais pas compris, à la lecture du paragraphe. J'aimerais que vous me disiez — vous l'avez peut-être dit et je ne vous ai pas entendu — si les navires de pêche commerciale qui recourent aux escortes de la Garde côtière, pour maintenir les voies ouvertes, payent des droits, pour cela, ou si c'est offert gratuitement aux expéditeurs commerciaux.

M. Broad : À ma connaissance, c'est gratuit, oui.

Le sénateur Sinclair : Si c'est inexact, vous pouvez nous en aviser plus tard.

M. Broad : Je le ferai.

Le sénateur Sinclair : Cela signifie, alors, que la flotte de recherche et de sauvetage n'est disponible que si on n'en a pas besoin en vue d'opérations de recherche et de sauvetage, n'est-ce pas?

Mme Simard : Si vous me le permettez, nous vous parlons des brise-glaces, alors oui. Les activités de recherche et de sauvetage menées dans le Sud même dans le Nord ne sont pas menées si souvent. Je pourrais prendre deux minutes afin d'expliquer simplement la situation parce que c'est ma faute et je ne voulais pas induire en erreur le comité. Ce que nous vous avons dit concernant le potentiel de réaffecter navires à des activités de recherche et sauvetage dans le Nord est un exemple. En effet, Mike a mentionné que nous n'observons pas ces activités chaque jour. Nous vous avons donné cet exemple afin de montrer le conflit potentiel.

Mais en ce qui concerne notre besoin d'avoir des brise-glaces affectés à des activités commerciales, tous les cinq ans, la Garde côtière travaille avec l'industrie afin d'évaluer les besoins de celle-ci en fonction du niveau de service qu'elle peut nous offrir, et nous avons une entente de cinq ans. Pour vous donner un exemple, de 2011 à 2016, il y avait un écart entre les services dont l'industrie avait prévu avoir besoin et le nombre d'heures que les brise-glaces de la Garde côtière sont capables d'offrir en réalité. L'écart — rappelez-le moi, Chad — est de combien d'heures?

M. Allen : Je vais vous le donner en pourcentage. C'est 22 p. 100 en ce qui concerne ce que nous avons demandé, ce que l'industrie a décrit comme besoin, par rapport à ce que la Garde côtière pouvait s'engager à offrir en matière de capacité. À l'époque, en 2011, il y avait un écart de 22 p. 100 pour ce qui est du nombre de jours oø nous avions besoin du soutien de brise-glaces.

Nous procédons actuellement au renouvellement de l'entente, mais nous craignons que l'écart ne se creuse parce qu'il y a un brise-glace en moins, le Tracy. Nous avons augmenté les activités de carénage et en cales sèches et avons aussi accru les services de traversier. Alors, l'écart augmentera certainement au-delà de 22 p. 100. Nous ne connaissons pas encore l'augmentation. Nous n'avons pas vu l'engagement de la Garde côtière. Nous travaillons toujours sur ce que seront nos besoins. Ils n'ont pas beaucoup changé, mais les capacités de la Garde côtière ont certainement changé, et je crois qu'elles seront davantage mises à l'épreuve une autre fois encore.

M. Broad : Si je peux juste ajouter quelque chose, nous respectons l'analyse de la recherche et du sauvetage du comité, et nous ne sommes pas ici pour parler de recherche et de sauvetage. Nous venons d'entendre certaines des questions qui portaient sur la flotte de la Garde côtière et voulions venir ici et y répondre. Notre connaissance de la recherche et du sauvetage est très limitée, au mieux.

Le sénateur Sinclair : Merci de cette clarification, et nous n'oublierons certainement pas cela.

Je voulais effectivement poser une autre question, et elle porte sur cette entente dont vous avez parlé. Je crois que le temps est venu de la renouveler et qu'elle est renégociée à l'heure actuelle. Prévoyez-vous une augmentation de la navigation commerciale au cours des cinq prochaines années en comparaison des cinq dernières? Si oui, quelle serait cette augmentation?

M. Allen : Selon les discussions que nous avons eues avec les intervenants qui participent aux négociations, nous ne nous attendons pas à une augmentation majeure des besoins en services de brise-glace en nous fondant sur ce que nous avons décrit au cours des années précédentes. La demande n'a pas changé, mais je crois que la capacité de la Garde côtière à satisfaire à la demande continuera de diminuer.

M. Broad : Si je peux ajouter quelque chose, nous ne savons pas ce qu'apportera l'AECG, l'accord économique avec l'Europe qui vient d'être signé. Les estimations antérieures indiquaient une valeur de 5 milliards de dollars par année de nouveaux chargements, ou de nouveaux volumes d'affaires, qui entreront au pays, alors nos besoins pourraient très bien augmenter. Si le commerce augmente effectivement, la côte Est, Montréal et Québec bénéficieraient certainement de ce commerce accru. Et, bien sßr, nous devons conserver le fleuve Saint-Laurent ouvert.

Le sénateur Sinclair : Selon vous, cela ne serait-il pas aussi vrai en ce qui a trait au Partenariat transpacifique?

M. Broad : Non. J'en doute parce que le Partenariat transpacifique favorisera davantage le commerce avec l'Asie.

Le sénateur Sinclair : Qu'en est-il des exportations?

M. Broad : Les marchandises seraient exportées par l'intermédiaire des ports de la côte Ouest. Il n'y aurait pas beaucoup d'exportations de la côte Est du Canada vers l'Asie. On exporterait probablement de la côte Ouest.

Le sénateur Wallace : Merci de votre exposé. Comme je viens des provinces de l'Atlantique, je ne pouvais faire autrement que penser à cet écart qui existe entre les besoins en services de brise-glace — je pense en particulier au fleuve Saint-Laurent lorsque j'en entends parler — et les besoins en matière d'expédition. Le temps, c'est de l'argent, et si la capacité relative aux brise-glaces n'est pas assez grande, les coßts d'expédition augmenteront et ainsi de suite.

Vous avez mentionné les ports de Montréal et de Québec, mais il y a des ports plus à l'est que ceux-ci, sur la côte de l'Atlantique, dont les plus importants sont ceux de Halifax et de Saint John. Si la Garde côtière ne se maintient pas au même niveau que la capacité relative aux brise-glaces et les besoins de l'industrie, peut-être que cela fournira aux ports de la côte Atlantique l'occasion d'être viables à des fins d'expédition.

M. Broad : Vous avez entièrement raison, particulièrement au sujet des conteneurs, mais il y a aussi d'importants chargements en vrac, et le chemin de fer prendrait une part des profits de quiconque pour expédier cela. Ce n'est pas uniquement les conteneurs. Les ports de Halifax et de Saint John sont certainement bien positionnés quand vient le temps de transporter des marchandises, mais il y a beaucoup d'autres types de cargaisons outre les conteneurs qui sont transportés en amont et en aval du fleuve.

Le sénateur Wallace : En effet, et c'est axé entièrement sur les résultats financiers.

Vous avez dit que la capacité de la Garde côtière, en matière de brise-glace, tient à 17 navires âgés en moyenne de 36 ans. Quand le dernier navire de la Garde côtière a-t-il été bâti au Canada ou à quel moment celle-ci a-t-elle acheté un nouveau navire? Environ, selon vous.

M. Allen : Je crois que c'était au début des années 1980.

Le sénateur Wallace : La flotte existante de 17 navires appartient-elle au gouvernement ou à la Garde côtière ou y en a-t-il qui sont affrétés à long terme et proviennent du secteur privé?

M. Broad : Non. Ces 17 navires ne sont pas tous des brise-glaces, n'est-ce pas, Chad?

M. Allen : Non, je ne le crois pas.

M. Broad : Lorsque nous parlons de brise-glaces qui brisent effectivement la glace — non pas seulement de baliseurs ou peu importe — on parle probablement d'environ neuf navires, mais le gouvernement du Canada les possède tous. Aucun d'entre eux n'est en affrètement à long terme. Encore une fois, il doit s'agir de navires battant pavillon canadien.

Le sénateur Wallace : Bien évidemment l'argent, comme la plupart des choses de la vie, devient le problème du gouvernement. Les coßts de mise à niveau et les 1,3 milliard de dollars du navire polaire sont des sommes d'argent importantes. Mais au Canada, y a-t-il un marché ou une disponibilité relative aux brise-glaces pouvant être affrétés? Est-ce que cela existe dans le domaine de l'expédition commerciale?

M. Broad : Il existe des brise-glaces que vous pouvez affréter, particulièrement maintenant depuis que certains projets pétroliers en Alaska et ailleurs ont été mis en veilleuse. Mais je ne sais pas s'il y en a d'autres. Les pays nordiques, comme la Finlande, peuvent construire des brise-glaces.

Le sénateur Wallace : Ce que je veux dire c'est que s'il manque de brise-glaces au pays, comme vous l'avez dit, et qu'on n'a pas construit de nouveaux navires depuis les années 1980, il semble que c'est une longue période. Existe-t-il d'autres options visant à obtenir ces brise-glaces du secteur privé? Le secteur privé les construirait-il et les affréterait-il à long terme? Cela s'est-il déjà produit? Cette possibilité existe-t-elle selon vous? Nous avons des chantiers navals au pays qui peuvent les construire, alors peut-être que le secteur privé peut trouver qu'il s'agit d'une possibilité qui peut être rentable. S'agirait-il d'une option que le gouvernement pourrait examiner? Les coßts d'immobilisations ne figureraient pas dans les états financiers du gouvernement.

M. Broad : C'est un excellent point, monsieur le sénateur, mais conformément aux lois existantes, non, cela ne serait pas possible.

Le sénateur Wallace : À moins qu'ils ne soient construits au Canada.

M. Broad : À moins qu'ils ne soient construits au Canada.

Toutefois, nous demanderions au gouvernement d'examiner attentivement la situation et d'effectuer peut-être une analyse de rentabilisation complète à ce chapitre. Il ne nous revient pas de commenter la construction navale au Canada, loin de là, mais nous ne devons pas oublier qu'il n'y a pas encore beaucoup de compétences à cet égard, et c'est une bonne chose pour notre pays qu'elles seront mises en place à Halifax, à Vancouver et peut-être à Québec. Mais ce qui compte le plus, c'est : est-ce la bonne façon de procéder?

Peut-être qu'on peut utiliser une combinaison. Les navires construits pour la marine, au Canada, pour des raisons de sécurité et toutes sortes de choses, passeront beaucoup de temps dans les chantiers navals. Peut-on envisager un scénario dans lequel il existe peut-être la combinaison suivante : construire quelques navires au Canada, en affréter certains afin de satisfaire aux besoins à court terme et en construire à l'étranger? Il existe plusieurs façons d'examiner la situation, mais je crois que le gouvernement ferait bien d'examiner attentivement les options, d'effectuer une analyse de rentabilisation et de voir ce qu'il pourrait trouver.

Le sénateur Wallace : En particulier, s'il existe une certaine capacité disponible dans les chantiers navals canadiens. Dans certains de ces chantiers, il semble qu'il n'y en ait pas maintenant, d'après ce qui se passe.

J'ai simplement l'impression qu'il y a peut-être une possibilité ici pour le secteur privé de les construire et de les offrir en affrètement à long terme. C'est un enjeu qui vise la Garde côtière, je sais, mais compte tenu de vos connaissances en matière d'expédition, je me suis demandé si tout cela était logique. Je crois que j'ai votre réponse à cet égard.

M. Broad : Lorsque vous dites le secteur privé, voulez-vous dire les chantiers navals canadiens ou d'autres?

Le sénateur Wallace : Je parle de conglomérats d'investisseurs qui pourraient construire un navire de 1 milliard de dollars et pourraient le faire dans un chantier naval canadien avec l'avantage qu'il y aurait un affrètement à long terme convenu au préalable avec le gouvernement fédéral. Il conviendrait de le prendre pour 20 ans à un taux déterminé, alors c'est un investissement.

M. Broad : C'est certainement une possibilité, oui.

Le sénateur Wallace : Contrairement à la situation actuelle, oø nous tentons d'amener le gouvernement fédéral à trouver des milliards de dollars, en plus de tout le reste.

Mme Simard : Si je peux ajouter quelque chose sur ce point : ils pourraient être construits ici, ou encore l'analyse de rentabilisation pourrait aussi examiner la construction à l'étranger. Si vous pensez à un investissement privé, les constructeurs pourraient examiner l'analyse de rentabilisation. Comme vous le dites, nous n'en avons pas construit depuis les années 1980, alors il est peut-être très difficile pour les chantiers navals canadiens de répondre à une demande à court terme parce qu'ils sont assez occupés à l'heure actuelle en raison de la stratégie d'approvisionnement à long terme.

Le sénateur Wallace : J'ai seulement encore une petite question, si je le peux, madame la vice-présidente.

À quel point est-il réaliste, vu l'âge des navires existants, d'examiner — et je sais que, chaque année, on met de l'argent dans l'entretien de ces navires, j'en suis certain —, mais au lieu de les remplacer, peut-on envisager une modernisation majeure, une amélioration du renforcement de la capacité relative aux brise-glaces et de la capacité des moteurs? Alors au lieu d'en acheter de nouveaux, conserver ce qu'on a maintenant et dépenser de l'argent. Au lieu de débourser 1,2 milliard de dollars, peut-être affecter 300 ou 400 millions de dollars à une modernisation.

De ce que vous connaissez des navires, est-ce logique lorsqu'on tient compte de l'âge de ces navires ou est-ce une solution d'urgence jusqu'à ce qu'on en trouve une plus permanente?

M. Broad : En ce qui concerne la prolongation de la vie des navires, je crois que les administrations antérieures ont examiné exactement ce que vous suggérez. Je ne suis pas un expert, mais selon mon expérience, c'est une solution symbolique. Nous devons certainement continuer de prolonger la vie des navires à l'heure actuelle parce que la construction de ces brise-glaces sera très longue. En attendant, nous devons, d'une manière ou d'une autre, entretenir ces navires. Ils ne dureront pas éternellement, et c'est davantage une solution symbolique qu'autre chose.

M. Allen : J'aimerais mentionner que le Louis St-Laurent, construit en 1969, a subi un carénage majeur il y a quelques années. Une fois les travaux commencés, on a trouvé de plus en plus de problèmes, ce qui a entraîné des coßts beaucoup plus importants au bout du compte.

La sénatrice Raine : Je ne comprends pas très bien le problème entourant les pavillons de complaisance. Existe-t-il une loi canadienne qui prévoit que le gouvernement canadien ne peut pas louer ou affréter un navire arborant un pavillon différent? Est-ce notre loi qui nous empêche de faire cela?

Mme Simard : Conformément au droit canadien, ce que nous appelons la Loi sur le cabotage, si vous exploitez un navire entre deux points au Canada, une exploitation maritime au Canada, vous devrez avoir un pavillon canadien et un équipage canadien à bord de ces navires.

D'autres pays ont des lois similaires. Les États-Unis, en ce qui concerne le cabotage, sont aussi assujettis à la Merchant Marine Act de1920. Le Canada n'est pas le seul pays avec ces types de règles.

Lorsqu'il s'agit de construire des navires à l'étranger, les propriétaires au pays construisent maintenant parfois des vaisseaux à l'étranger et les importent. Ils ont des tâches réduites et importent ces navires, mais doivent ensuite s'assurer que le navire bat pavillon canadien et utilise un équipage canadien.

Lorsque nous parlons de brise-glaces, on aurait besoin d'un pavillon et d'un équipage canadiens. C'est notre compréhension de la loi canadienne.

La sénatrice Raine : Mais c'est notre loi?

Mme Simard : C'est notre loi.

La sénatrice Raine : Alors nous aurions la capacité de changer cette loi et nous permettre alors d'affréter ou de louer ou de faire autre chose, si nous devions le faire. Si notre loi ne fonctionne pas, nous pouvons la changer.

Mme Simard : Vous avez bien raison. Conformément à la Loi sur le cabotage, il existe déjà un mécanisme qui permet à un détenteur d'un permis d'utiliser des navires battant pavillon étranger si aucun navire du pays n'est disponible. Il s'agit d'un permis à court terme visant un commerce particulier, et il est assorti de procédures. Ce dont vous parlez n'est pas un concept inconnu au Canada. La loi n'est pas rédigée de cette manière à l'heure actuelle, mais le concept d'avoir une exemption visant certains types de commerce lorsque vous ne pouvez pas trouver la capacité au Canada existe dans le droit canadien actuellement.

La sénatrice Raine : Si je comprends bien, un navire qui vient d'un autre pays se rend à Halifax, à Vancouver ou directement à Montréal et n'est stoppé à aucun endroit avant son arrivée, il peut battre pavillon étranger. Mais s'il s'arrête à Halifax, à Québec, à Montréal et ainsi de suite, il devrait alors battre pavillon canadien?

Mme Simard : La petite différence, c'est que les navires battant pavillon étranger pourraient venir et s'arrêter, par exemple, à Montréal et décharger une partie de leur chargement, poursuivre leur route vers les Grands Lacs et décharger une autre partie de leur chargement — il s'agit toujours d'un navire hauturier qui fait un voyage hauturier — et ensuite être chargés au Canada et aller à l'étranger. Mais vous ne pouvez pas prendre le même chargement et le transporter du point A au point B sur le territoire canadien. Ce transport serait visé par la Loi sur le cabotage, et il serait réservé. Il arrive que des navires hauturiers effectuent plusieurs voyages, mais ne transportent pas le même chargement entre deux points au Canada. Ils continueront de décharger leurs marchandises exportées ou importées.

La sénatrice Raine : En ce qui concerne le manque de brise-glaces, cela ne les touche pas du tout. Si nos brise-glaces ne répondent pas à la demande — et vous prévoyez que nous ne serons pas en mesure de ravitailler les collectivités du Nord, d'appuyer les activités commerciales du Nord et de maintenir le fleuve Saint-Laurent ouvert — nous serions alors en mesure d'affréter un brise-glace, s'il y en a un de disponible, pour ajouter à notre capacité au cours d'une situation d'urgence.

Mme Simard : Ma compréhension est que nous serions en mesure d'affréter un navire. Il existe des façons d'enregistrer de nouveau ce navire au Canada pendant qu'il est exploité ici et de s'assurer qu'il y a un équipage canadien à son bord conformément à la loi actuelle. Ce n'est pas le scénario dont vous avez parlé, mais il est conforme à la loi actuelle. On devrait apporter certaines modifications à la loi, mais, oui, on pourrait affréter un navire à long terme, dans la mesure oø ce navire bat pavillon canadien et a un équipage canadien.

Le sénateur McInnis : Même si la capacité relative aux brise-glaces est certainement importante pour la recherche et le sauvetage, je veux seulement vous rappeler que je crois que le ministre Morneau entamera des consultations prébudgétaires partout au pays et je vous suggère d'assister à certaines d'entre elles. Vous avez formulé d'excellents points, sans aucun doute.

L'ancien gouvernement a mis en place un programme d'approvisionnement concernant le remplacement de navires militaires et de brise-glaces. On y a mis beaucoup d'efforts. C'est bizarre. Je passe près des chantiers navals Irving en Nouvelle-Écosse, et je les ai traversés, et il s'agit d'une installation navale de classe mondiale sans aucun doute, et ces brise-glaces devraient être construits en Colombie-Britannique. Cela a été mis en place, et je crois que c'est là que le lobby devrait être; je le pense vraiment. Ces navires durent très longtemps.

Je saute du coq à l'âne ici, mais je me souviens de l'hélicoptère Sea King. C'est en 1990 que le gouvernement a annoncé un nouveau programme, et il a été annulé. Les gouvernements font les choses différemment. Les priorités changent lorsqu'il y a un changement de gouvernement.

Selon moi, ce que vous dites est extrêmement important. Ça nous ouvre les yeux à tous, comme représentants du peuple canadien. Je crois qu'il serait important pour vous de poursuivre ce dialogue, mais je vais passer à autre chose si vous me le permettez.

M. Broad : Merci, monsieur le sénateur.

Le sénateur Munson : Alors vous dites que nous n'avons pas d'influence? C'est ce que vous dites?

Le sénateur McInnis : Ce que je dis c'est que j'ai toutes sortes d'idées destinées au ministre Morneau relativement à ce que son budget devrait renfermer pour le Canada atlantique, monsieur le sénateur Wallace, mais je ne suis pas certain que c'est...

Le sénateur Enverga : On a répondu à la plupart des questions que j'avais pour la deuxième série de questions; cependant, je veux juste poser une petite question. Je sais que vous avez mentionné que la GCC n'est pas bien positionnée pour répondre aux besoins. Comment évalueriez-vous les services à l'heure actuelle, sur une échelle de 1, qui est insatisfait, à 10, qui est très satisfait?

M. Broad : Relativement à l'ensemble des services de la Garde côtière canadienne?

Le sénateur Enverga : Oui.

M. Broad : Je lui attribuerais très certainement un huit en raison du fait qu'elle remplit très bien son mandat avec ce qu'elle a. C'est une excellente organisation, et je crois qu'elle a seulement besoin de davantage de soutien financier. Elle offre des services à l'industrie et à d'autres organisations et organismes gouvernementaux, et nombre de personnes lui demandent de faire beaucoup de choses. Elle fait un excellent travail de recherche et de sauvetage. Elle est vraiment excellente. Les gens de la Garde côtière mettent leur vie en péril chaque jour afin de sauver des gens — peut-être pas chaque jour —, mais ils font de nombreux sauvetages. J'accorde une excellente note à la Garde côtière.

La vice-présidente : Monsieur Broad, madame Simard et monsieur Allen, je vous remercie beaucoup d'avoir été avec nous ce soir. Nous avons certainement apprécié vos exposés et vos réponses à nos questions. Merci, chers collègues. La séance est levée.

(La séance est levée.)

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