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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule nº 9 - Témoignages du 31 janvier 2017


OTTAWA, le mardi 31 janvier 2017

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 17 h 27, pour étudier les activités de recherche et sauvetage maritimes, y compris les défis et les possibilités qui existent.

La sénatrice Elizabeth Hubley (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Bonsoir. Je m'appelle Elizabeth Hubley, sénatrice de l'Île-du-Prince-Édouard, et je suis ravie de présider la séance de ce soir. Avant de céder la parole aux témoins, j'aimerais inviter les membres du comité à se présenter.

Le sénateur Watt : Charlie Watt, du Nunavik.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, sénateur de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Forest : Éric Forest, sénateur de la région du golfe, au Québec.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Marc Gold, du Québec.

Le sénateur Sinclair : Sénateur Murray Sinclair, du Manitoba.

Le sénateur Christmas : Dan Christmas, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, sénatrice du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Raine : Nancy Greene Raine, sénatrice de la Colombie-Britannique.

Le sénateur McInnis : Tom McInnis, sénateur de la Nouvelle-Écosse.

La vice-présidente : Le comité poursuit son étude sur les questions ayant trait au cadre stratégique actuel et en évolution du gouvernement fédéral pour la gestion des pêches et des océans du Canada. Nous entendrons le témoignage de représentants de CHC Helicopter qui nous parleront des services de recherche et de sauvetage en mer qu'ils fournissent et des activités qu'ils mènent dans plusieurs pays.

Nous sommes heureux d'accueillir le président et chef de la direction de CHC Helicopter Canada, M. Sylvain Allard. Nous accueillons également des représentants de CHC Helicopter : le vice-président directeur, Global, M. Barry Parsons; le directeur commercial — SAR/EMS, M. Michael Fry; et le cadre supérieur — SAR/EMS, M. Ian McLuskie.

Au nom des membres du comité, je vous remercie de votre présence. Je crois comprendre que vous avez une déclaration préliminaire à présenter. Les membres du comité vous poseront des questions par la suite. Dans le but de conserver le plus de temps possible pour nos discussions, nous vous demandons de vous en tenir à une déclaration préliminaire de 10 minutes, s'il vous plaît.

La parole est à vous.

Sylvain Allard, président et chef de la direction, CHC Helicopter Canada : Merci, madame la présidente. Honorables membres du comité, bonjour. Je tiens tout d'abord à remercier le comité de donner à CHC Helicopter l'occasion de lui parler de son expérience dans les services de recherche et sauvetage qu'elle offre aux gouvernements partout dans le monde.

J'espère sincèrement que notre exposé vous aidera à évaluer les solutions possibles pour l'établissement d'une stratégie à long terme en recherche et sauvetage au Canada.

Comme vous l'avez indiqué, je m'appelle Sylvain Allard et je suis le président de CHC Helicopter Canada. Je travaille à CHC depuis 35 ans maintenant, ce qui inclut 12 années au poste de président et chef de la direction. CHC, par l'entreprise fondatrice, a commencé ses activités il y a 70 ans, à Penticton, en Colombie-Britannique. Au fil des ans, grâce à la vision d'un grand Terre-Neuvien, Craig Dobbin, elle est devenue l'une des plus grandes entreprises de services d'hélicoptère au monde.

Depuis près de 30 ans maintenant, CHC fournit des services d'hélicoptère pour la recherche et sauvetage à plusieurs gouvernements, à savoir, ceux du Royaume-Uni, de l'Irlande, de la Norvège et de l'Australie. Je suis accompagné de nos cadres, Barry et Ian, qui vous parleront de l'expérience que l'entreprise a acquise dans les différents pays. Sans plus tarder, je vais demander à Barry de vous parler de nos capacités, et nous passerons directement à vos questions par la suite.

Barry Parsons, vice-président directeur, Global, CHC Helicopter : Mesdames et messieurs, bonsoir. Je vous remercie à nouveau de nous accorder du temps pour nous permettre de vous présenter un exposé. Sylvain a mentionné nos débuts à Penticton, en Colombie-Britannique, il y a 70 ans. Il y a eu une fusion avec Sealand Helicopters, à St. John's, Terre-Neuve, et CHC est maintenant une entreprise qui mène des activités dans 23 pays. Je travaille à CHC depuis 2 ans et, de façon épisodique, j'ai été passager de CHC pendant mes 20 ans de carrière dans le secteur de l'exploitation du pétrole et du gaz naturel au large de Terre-Neuve, d'où je viens, et de la Nouvelle-Écosse, ainsi qu'en Alberta et en Colombie-Britannique.

Dans les 23 pays où CHC a mené ses activités ces dernières années, nous avons deux principaux secteurs d'activités : le transport de personnel dans le secteur pétrolier et gazier — ce qui correspond à mes premiers contacts avec CHC à l'époque où je travaillais dans ce secteur — et les services de recherche et sauvetage, comme l'a déjà mentionné Sylvain.

Nous offrons actuellement plusieurs modèles de services de recherche et sauvetage. L'un consiste à fournir ces services directement à nos clients de l'industrie du pétrole et du gaz pour combler les lacunes des services nationaux. Principalement dans les pays en développement qui n'ont pas de services de recherche et sauvetage nationaux, souvent, les sociétés pétrolières et gazières confient à des entreprises comme CHC l'offre de services de recherche et sauvetage pour la durée de leurs activités. Un sujet qui est pertinent pour votre comité aujourd'hui, ce sont les services de recherche et sauvetage que nous offrons à d'autres gouvernements nationaux et d'État.

Sylvain a parlé de la Garde côtière irlandaise. Nous fournissons des services similaires au ministère norvégien de la Justice, à la Force aérienne royale australienne, au gouvernement du Royaume-Uni et à certains gouvernements des États australiens sur la côte Est et la côte Ouest, la Nouvelle-Galles du Sud et l'Australie-Occidentale.

Au-delà des connaissances techniques approfondies — et j'espère que cela indique que nous les maintenons en tant qu'organisation du domaine de la recherche et sauvetage —, tant concernant l'aéronef que les services que nous fournissons dans la recherche et le sauvetage de personnes blessées, les nombreux modèles nationaux que nous avons déployés dans cette demi-douzaine de pays différents seront pertinents et enrichiront les discussions de ce soir sur les options que le gouvernement pourrait examiner pour combler les besoins en matière de recherche et sauvetage au Canada.

J'en signalerais deux en particulier : les services de la Garde côtière irlandaise que nous fournissons et les services que nous mobilisons actuellement pour le ministère norvégien de la Justice. En examinant les différents gouvernements nationaux et d'États auxquels nous fournissons des services de recherche et sauvetage à l'heure actuelle, vous constaterez que tous ces différents modèles de prestation de services ont deux choses en commun. La première, c'est la souplesse de CHC pour adapter les services aux besoins du gouvernement national. Comme vous pouvez vous en douter, les gouvernements nationaux et d'État ont des priorités et des groupes d'intervenants différents, de sorte que nous nous efforçons d'adapter les services pour répondre aux besoins du gouvernement national ou d'État.

La deuxième, c'est le trait commun qui relie tous nos contrats de recherche et sauvetage, une norme liée à un système très transparent et rigoureux de gouvernance commerciale et opérationnelle, de sorte que le gouvernement national ou d'État peut montrer, pour lui-même ou pour les intervenants publics, que les services pour lesquels ils paient sont fournis et qu'ils obtiennent exactement ce qui est annoncé.

Les deux contrats les plus pertinents qui pourraient enrichir nos discussions sont ceux de la Garde côtière irlandaise et du ministère norvégien de la Justice. Dans le cas de la Garde côtière irlandaise, l'aspect intéressant dans la façon dont nous fournissons les services en collaboration avec le gouvernement irlandais, c'est que bien que les membres du personnel de l'aéronef sont formés par CHC, qu'il s'agit d'employés de CHC, et que les biens appartiennent à CHC, ils portent tous l'insigne et les vêtements de la Garde côtière irlandaise. Aux yeux du public, il s'agit clairement d'un service fourni par la Garde côtière irlandaise et non par une entreprise comme CHC.

C'est pertinent, car cela témoigne non seulement de la souplesse du modèle opérationnel entre CHC et nos clients gouvernementaux, mais également de la capacité d'entreprises comme CHC d'adapter la prestation de services et de se conformer aux normes gouvernementales, plutôt que de seulement se conformer aux normes qu'elles élaborent elles-mêmes en tant qu'exploitantes d'hélicoptères professionnelles.

Dans le cas de la Garde côtière irlandaise, nous menons des activités là-bas depuis 2012. Nous couvrons toute la côte de l'Irlande sur quatre bases à l'aide de cinq aéronefs de type similaire, sujet qui pourrait convenir à nos discussions d'aujourd'hui. Pour ce qui est du ministère norvégien de la Justice, un contrat beaucoup plus récent, que nous avons obtenu l'an dernier, est mis en œuvre présentement. L'aéronef et le personnel seront désignés « CHC » — c'était la préférence des Norvégiens dans ce cas —, mais ce qui est pertinent dans le cadre de l'étude du comité, c'est que le modèle norvégien représente une occasion pour une entreprise de combler un besoin dans les services nationaux de recherche et sauvetage.

Le ministère de la Justice du gouvernement norvégien gère présentement des services de recherche et sauvetage, et il prévoit maintenir et fournir ses propres services nationaux de recherche et sauvetage dans l'avenir. Entretemps, un problème précis concernant l'aéronef requiert une couverture provisoire pour une période de trois à cinq ans. C'est à cet égard que CHC intervient pour fournir ce type de couverture. Selon ce que je comprends du contexte de certaines des solutions de recherche et sauvetage au Canada, cette capacité de définir une solution provisoire est un élément de discussion du comité.

Cela dit, je vais suivre votre conseil, madame la présidente, soit celui d'essayer d'être bref, et je serai ravi de répondre à toutes les questions sur tout sujet dont les membres du comité voudront discuter.

Le sénateur McInnis : Je vous remercie beaucoup de votre présence. J'ai lu de l'information au sujet de votre entreprise. Je dois dire que c'est impressionnant. Vous dites en toute modestie que les services de CHC Helicopter sont inégalés. Je me demande comment vous évaluez cela.

Qui sont vos compétiteurs? Vous dites que vos services permettent aux gens d'aller plus loin, d'en faire plus et d'être plus en sécurité. Pouvez-vous faire une distinction entre vos services et ceux de l'Aviation royale du Canada et entre vos hélicoptères et ceux utilisés par la Garde côtière canadienne?

M. Parsons : Je vous remercie de votre remarque sur notre modestie concernant ce que nous disons sur nos services inégalés.

Je travaille à CHC depuis deux ans, mais j'ai été un passager de CHC pendant plus longtemps, ce qui me permet peut-être de vous donner mon point de vue de passager, qui pourrait être à la base de ce qui est indiqué sur notre site web.

Si je peux être modeste également, CHC a inventé l'idée d'une entreprise d'hélicoptères mondiale. Avant que Sylvain et M. Dobbin et leurs homologues amènent CHC à la situation dans laquelle elle se trouve d'aujourd'hui sur la scène internationale, le secteur des services d'hélicoptère mondiaux était servi par de petits acteurs régionaux. Il y avait Sealand, dans les zones extracôtières du Canada. Il y avait quelques petits acteurs dans le golfe du Mexique et deux autres au Royaume-Uni. Le marché n'était constitué que de petits joueurs, qui respectaient tous des normes individuelles.

Dans un secteur où la sécurité est aussi essentielle, avoir l'idée d'établir une norme mondiale de gestion d'une entreprise était étonnamment révolutionnaire, et c'est une idée que CHC a mise sur le marché. C'est vraiment ce qui est à la base de l'idée de « services inégalés ». Je vous donnerais peut-être un autre exemple.

L'idée de gérer une entreprise de transport aérien en fonction d'un système de gestion mondial est un concept que CHC a intégré à l'industrie. Je dirais que c'est quelque chose qui est encore aujourd'hui, dans une large mesure, unique dans le secteur. C'est peut-être étonnant pour les gens qui ne font pas partie du secteur, mais je crois qu'à cet égard, nous sommes manifestement uniques par rapport à nos compétiteurs.

Vous vouliez savoir qui sont nos principaux compétiteurs. Il est difficile de répondre à cette question brièvement. En fait, cela varie énormément. Selon l'endroit dans le monde où nous menons des activités, le marché est encore dominé par de petits acteurs régionaux. Mes compétiteurs en Australie sont complètement différents de ceux au Mozambique et au Kazakhstan, par exemple. C'est un peu difficile de fournir une réponse complète.

CHC est un membre fondateur d'une organisation qui s'appelle HeliOffshore — et elle y joue un rôle de premier plan — dans laquelle nous essayons d'échanger des renseignements sur la sécurité avec nos compétiteurs et d'établir une attente selon laquelle même si nous sommes très compétitifs sur les plans commercial et technique, nous ne le sommes pas sur le plan de la sécurité. HeliOffshsore comprend cinq membres fondateurs. Il y a CHC; PHI, une entreprise qui exerce ses activités principalement dans le golfe du Mexique; Era, une autre entreprise active dans le golfe du Mexique; Bristow, une entreprise du Royaume-Uni active dans le golfe du Mexique; et je ne me souviens plus du nom de la dernière.

M. Allard : Elle est basée au Royaume-Uni.

M. Parsons : Il s'agit de Babcock. Ce sont probablement les cinq joueurs les plus importants, dont CHC, bien que, pour être honnête, certains sont actifs dans des régions et d'autres dans d'autres régions. CHC fait partie de la très courte liste d'acteurs mondiaux dans ce domaine.

Concernant votre observation sur nos services inégalés dans le contexte des capacités de l'Aviation royale du Canada ou de la Garde côtière canadienne, je crois que c'est un concept très important dans le cadre des discussions et de l'étude du comité. Dans nos échanges avec différents intervenants du gouvernement et différents organismes, nous avons appris jusqu'à maintenant que l'attente ou le besoin n'est pas de remplacer les ressources de l'Aviation royale du Canada ou de la Garde côtière, mais plutôt de les renforcer, selon l'organisme qui joue le rôle de premier plan.

Si je reviens sur l'exemple du ministère norvégien de la Justice, dans ce cas, il ne s'agissait pas de déterminer si le ministère pouvait faire mieux que CHC, mais c'est plutôt qu'il avait une lacune précise attribuable à l'aspect technique de son équipement. Nous représentions une bonne solution rentable. Cela a fonctionné, et le ministère a recouru aux services de CHC. Ce modèle est très instructif quant à la façon dont nous concevons les liens avec l'Aviation royale du Canada et la Garde côtière canadienne, si cela mène à un lien contractuel.

Le sénateur McInnis : Par exemple, nous avons eu l'occasion de visiter les bureaux du ministère de la Défense à Halifax et à Dartmouth, où l'on surveille tous les navires extracôtiers. Vous n'auriez pas d'installations, d'infrastructure pour cela. Vous parlez d'hélicoptères.

M. Parsons : C'est exact.

Le sénateur McInnis : Je crois comprendre, d'après ce que vous dites, que vous parlez également de combler les lacunes et non de faire des remplacements, n'est-ce pas?

M. Parsons : C'est exact. Il y a certains exemples dans le monde, dont la Garde côtière irlandaise. Nous sommes la division des hélicoptères de la Garde côtière irlandaise, un point c'est tout. L'Irlande ne considère pas cela comme une solution provisoire, à la différence de la Norvège, qui considère nos services comme une solution provisoire. Nous sommes capables d'adapter les solutions aux besoins de notre Garde côtière nationale.

Le sénateur McInnis : Que faites-vous en Australie?

M. Parsons : En Australie, nous avons plusieurs modèles différents. Le plus pertinent, c'est peut-être le service que nous fournissons au gouvernement de la Nouvelle-Galles du Sud, où nous offrons un service qui correspond à une combinaison de services d'ambulance aérienne et de recherche et sauvetage, principalement en zone terrestre dans cette situation. Il s'agit d'une solution permanente où les gens choisissent de faire affaire avec des fournisseurs de services à long terme.

Le sénateur McInnis : En lisant, j'ai appris également que vos aéronefs ont de nouveaux systèmes technologiques comme les capteurs infrarouges à observation vers l'avant, le système de commande automatique de vol à quatre axes, avec des modifications du système automatique et de la cabine arrière pour le treuil et les soins médicaux. On parle aussi d'hélicoptères sur mesure. Vous comprendrez que nous faisons une étude approfondie. Les forces militaires et la Garde côtière n'ont-elles pas cet équipement?

Michael Fry, directeur commercial — SAR/EMS, Global, CHC Helicopter : Oui et non.

Les équipements dont nous disposons sont conçus en fonction de besoins bien définis. Ils font très fréquemment l'objet d'une révision et d'une mise à niveau. On retrouve effectivement certains des équipements que vous avez mentionnés dans quelques-uns des hélicoptères. Le modèle canadien offre peut-être une capacité insuffisante du fait des adaptations intervenues au fil des ans. J'ai passé 24 ans dans les forces militaires et je sais qu'il peut y avoir des besoins à combler à gauche et à droite.

Je peux vous donner l'exemple des Griffons qui sont utilisés autour des Grands Lacs. Ce sont des hélicoptères de combat qui ont été adaptés aux fins des activités de recherche et sauvetage, un rôle qu'ils remplissent très bien. Ils sont cependant privés de certains des équipements dont vous parlez, ce qui les rend moins aptes à accomplir quelques-unes des tâches plus complexes qu'exige ce rôle.

Le sénateur McInnis : Le déploiement des Sikorsky à d'autres fins est-il seulement temporaire?

M. Fry : Les dernières informations à ce sujet nous viennent du rapport du vérificateur de 2013 qui indiquait qu'il s'agissait d'une mesure temporaire. Il semblerait que l'on ait maintenu le cap à ce niveau alors que les Cormorant prennent pour ainsi dire la relève pour les activités de recherche et sauvetage sur les côtes Est et Ouest.

La sénatrice Poirier : Comme l'indiquait mon collègue, vous considérez que vous êtes surtout là pour combler une lacune ou un vide dans l'offre de services. À quelle fréquence fait-on appel à vous pour répondre à un besoin particulier de la sorte?

M. Parsons : Voulez-vous savoir combien de contrats semblables nous avons conclus?

La sénatrice Poirier : Combien de fois fait-on appel à vous au Canada pour répondre à un tel besoin?

M. Parsons : Nous n'offrons pas actuellement un service semblable au Canada. Sauf erreur de ma part, la Norvège est le seul pays où nous constituons une solution de remplacement provisoire pour les services gouvernementaux nationaux de recherche et sauvetage. Mais, même dans le cas de la Norvège, il ne s'agit pas d'interventions ponctuelles. Nous obtenons un contrat pour combler pendant un certain nombre d'années un vide prévu en raison d'un manque de capacité du gouvernement à offrir le service avec ses propres actifs.

La sénatrice Poirier : Dois-je comprendre que vous n'avez pas actuellement de contrat avec le Canada?

M. Parsons : C'est bien cela, nous n'offrons pas actuellement de services de recherche et sauvetage au Canada.

La sénatrice Poirier : La Garde côtière canadienne a un délai d'intervention maximum de 30 minutes en tout temps, alors que ce délai est aussi de 30 minutes dans les heures de pointe pour le ministère de la Défense nationale et l'Aviation royale canadienne, et de deux heures dans les périodes normales pour une mission de recherche et sauvetage. Quel est le délai d'intervention maximum de CHC Helicopter?

Ian McLuskie, cadre supérieur SAR/EMS, Global, CHC Helicopter : Pour la plupart de nos contrats, le délai d'intervention habituel est de 15 minutes le jour et 45 minutes la nuit. C'est le temps qui s'écoule entre le moment de l'appel et le décollage de l'appareil. Nous nous assurons du respect de ce délai au moyen de notre propre logiciel de gestion des services de recherche et sauvetage. Notre client peut ainsi connaître tous les détails de nos activités, notamment quant à l'heure précise où notre appareil décolle et au moment où il atterrit de nouveau après l'intervention.

La sénatrice Poirier : Comment vos appareils de recherche et sauvetage peuvent-ils se comparer à ceux utilisés par l'Aviation royale canadienne?

M. McLuskie : L'appareil que nous utilisons actuellement à cette fin est le Sikorsky S-92. C'est un hélicoptère moderne satisfaisant aux normes les plus récentes et doté de tout l'équipement de pointe nécessaire pour pouvoir être utilisé dans toutes les conditions de glace, le jour comme la nuit, et quelle que soit la température. Pour vous donner une idée, disons qu'un hélicoptère semblable, s'il est piloté correctement et bien dirigé par l'équipage, peut descendre de nuit dans un espace ouvert au-dessus de l'océan pour permettre une visibilité à 15 mètres. C'est comme si l'on posait un hélicoptère dans une pièce comme celle-ci n'importe où dans l'océan au milieu d'une nuit sombre et tumultueuse.

La sénatrice Poirier : Pouvez-vous nous décrire la formation reçue par vos pilotes et vos ingénieurs aux fins des activités de recherche et sauvetage?

M. McLuskie : La plupart de nos pilotes et des autres membres de nos équipages proviennent du secteur militaire. Pas moins de 80 p. 100 d'entre eux ont été recrutés directement à leur sortie des forces au moment de leur retraite pour passer au secteur commercial. Nous avons également notre propre équipe qui s'occupe de la formation et des normes. Nos exigences de formation sont semblables, voire supérieures, à celles des forces militaires. Nous utilisons exactement les mêmes procédures normalisées d'exploitation et nous suivons les directives du Manuel international de recherche et sauvetage aéronautiques et maritimes. Nous nous en remettons aux mêmes systèmes, aux mêmes mesures et aux mêmes niveaux de compétence.

La sénatrice Poirier : Si vous n'avez pas actuellement de contrat avec le gouvernement canadien, êtes-vous en train d'essayer d'en obtenir un? Avez-vous déjà fait des tentatives en ce sens par le passé?

M. Allard : Les échanges se poursuivent depuis un bon moment déjà quant à la possibilité que nous offrions certains services de recherche et sauvetage au Canada. Je suis sans doute maintenant celui qui participe à cet exercice depuis le plus longtemps. Les pourparlers ont débuté au milieu des années 1980. Quand nous parlons de lacunes ou de vides à combler, c'est pour une longue période. Il ne s'agit pas d'interventions au jour le jour. C'est plutôt dans le cas d'un renouvellement de la flotte ou d'une mise hors service pour l'entretien. Je sais par exemple que le gouvernement devra effectuer d'importants travaux d'entretien pour sa flotte de Cormorant.

Si vous avez un vide à combler pour une année ou une période de deux ou trois ans, nous pouvons intervenir pour vous permettre de répondre aux besoins existants. C'est ce que nous entendons par combler un « vide ». Je ne suis pas en train de dire qu'il est impossible que nous recevions un appel pour un incident de recherche et sauvetage au Canada. C'est simplement que nous ne pouvons pas recevoir un tel appel de la manière dont le système est conçu actuellement.

J'ai passé un certain temps sur la côte Est et je peux vous dire que les pétrolières doivent obtenir des services supplémentaires pour répondre à leurs besoins en la matière. Autrement dit, elles doivent elles-mêmes octroyer des contrats pour assurer une aide additionnelle aux fins des activités de recherche et sauvetage. Je pense notamment aux services à assurer à partir de St. John's pour éviter les longs trajets depuis la base de Gander. C'est un choix qu'ont fait les sociétés pétrolières pour garantir un délai d'intervention plus court en partant de St. John's. C'est donc un autre genre de lacunes à combler en fonction des besoins d'un secteur particulier.

Lorsque nous parlons d'un vide à remplir, c'est le plus souvent à long terme. Certains pays ont décidé de s'en charger eux-mêmes et d'autres ont choisi la voie de la privatisation. Il faut d'abord analyser le besoin à satisfaire. Ils ont procédé à une analyse plus approfondie des questions de rentabilité, de délais d'intervention, d'équipements et d'investissements. Ils ont ainsi conclu qu'il pouvait être très avantageux de travailler de concert avec nous.

En Irlande, par exemple, les gens considèrent encore que c'est la Garde côtière irlandaise qui accomplit le travail. À titre d'entrepreneurs, nous nous assurons simplement que les services requis sont effectivement offerts.

Je peux vous dire que les responsables de toutes ces agences et de tous ces gouvernements seraient très heureux de pouvoir parler à un représentant canadien pour lui expliquer comment cela fonctionne. C'est dans ce sens-là que nous essayons de prendre des arrangements, car il est parfois difficile pour une entreprise de vendre sa propre salade. Il est préférable qu'un de nos clients puisse vous dire à quel point l'efficience des services peut ainsi être améliorée. Dans la plupart des cas, cela permet de réduire les coûts et les dépenses en capital.

M. Parsons : Je pourrais peut-être apporter certains éclaircissements. Voilà bien des années déjà que Sylvain participe à des discussions avec différentes agences gouvernementales et autres parties intéressées, mais nous souhaitions surtout vous rencontrer aujourd'hui pour vous parler de notre expérience de ces questions afin de guider vos délibérations aux fins de la recommandation d'une solution possible.

À ce que je sache, aucune décision n'a été prise quant à une activité d'approvisionnement quelconque. Nous ne sommes à la recherche d'aucun contrat. Nous essayons simplement de vous fournir certains renseignements pour éclairer votre réflexion.

M. Fry : Comme je ne suis pas moi-même canadien, je n'ai pas d'intérêt particulier à défendre à ce titre. J'ai toutefois eu affaire à différents ministères du gouvernement canadien au cours de la dernière année. Je pourrais peut-être me permettre une observation. Il y a eu une certaine polarisation au Canada entre les partisans d'un service de recherche et sauvetage uniquement gouvernemental et ceux qui prônent le recours à une solution entièrement commerciale. Je ne crois pas qu'aucun de ces deux scénarios soit optimal.

Il serait préférable pour le Canada de trouver la façon de tirer tous les avantages possibles du recours à des services commerciaux pour appuyer le ministère de la Défense nationale et celui des Pêches et des Océans qui accomplissent déjà un excellent travail au quotidien. Il n'y a pas un autre pays au monde qui assure une protection de recherche et sauvetage sur une superficie de 18 millions de kilomètres carrés.

La situation actuelle n'est pas problématique. Le système fonctionne bien, mais il convient d'y adjoindre une certaine capacité supplémentaire dans le contexte de la réévaluation des ressources du ministère de la Défense nationale pour lui permettre de continuer à bien remplir son mandat. Nous sommes un peu ici pour aider le ministère à y voir plus clair.

Le sénateur Enverga : Je peux lire dans votre mémoire que votre bilan de sécurité est le meilleur au monde. Cependant, on souligne également qu'un appareil Airbus H225 exploité par CHC Helicopter, qui en était propriétaire, s'est écrasé en avril 2016. Considérez-vous tout de même que votre bilan de sécurité demeure le meilleur au monde?

M. Parsons : Il y en a peut-être certains qui sont moins au fait de cet accident survenu en avril de l'an dernier. À la fin d'avril 2016, un hélicoptère Airbus H225 s'est écrasé tragiquement en Norvège. Comme vous l'avez indiqué, c'était un appareil exploité par CHC Helicopter et qui appartenait à l'entreprise. Treize personnes ont trouvé la mort ce jour-là. L'industrie à l'échelle planétaire essaie encore de se remettre de ce tragique accident.

Je pourrais vous fournir tous les détails susceptibles de vous intéresser, mais disons simplement que le fabricant de l'appareil a déterminé que l'accident était directement attribuable à la défaillance d'un élément de roulement de la boîte de transmission principale. En termes simples, c'est ce qui relie le rotor à l'hélicoptère. Comme vous pouvez vous l'imaginer, c'est une pièce d'équipement vraiment importante.

Comme le fabricant, Airbus, a déterminé qu'il y avait eu défaillance dans la conception de cette pièce, tous les appareils de cette flotte ont été mis hors service partout dans le monde. Encore aujourd'hui, il n'y a personne, pour autant que je sache, qui utilise à des fins commerciales un appareil de ce modèle.

Pour répondre à votre question quant aux répercussions sur le bilan de sécurité de notre entreprise sur la scène mondiale, je dirais que cela demeure un accident tragique; il n'y a pas à sortir de là. Il n'est pas question d'en banaliser la gravité, mais c'est l'équipement qui est actuellement visé par l'enquête. À ma connaissance, on ne s'intéresse aucunement à nos procédures d'exploitation, à l'historique d'entretien ou au rôle quelconque qu'auraient pu jouer les employés ou les systèmes de CHC Helicopter dans cet accident.

C'est un malheur terrible pour ces personnes qui ont perdu la vie comme pour leur famille. Le sort a voulu que ce soit notre entreprise qui utilise l'appareil défectueux ce jour-là. Il semblerait à ce moment-ci que le défaut de fabrication touche tous les appareils de la flotte. C'est une pièce d'équipement qui est défectueuse. Rien n'indique pour l'instant qu'il y ait eu de la part de notre entreprise une défaillance quelconque qui aurait mené à cet accident tragique.

Le sénateur Enverga : En somme, l'accident est attribué à un équipement défectueux?

M. Parsons : J'ajouterais qu'il est important de noter qu'il incombe au bureau norvégien d'enquête sur les accidents d'en déterminer la cause première. Le bureau n'a pas encore rendu public son rapport final à ce sujet. Je vous présente aujourd'hui mon propre résumé des discussions tenues au sein de l'industrie au sujet de ce qui a pu provoquer l'accident. La cause première n'a pas encore été officiellement annoncée. Les Norvégiens poursuivent leur enquête pour arriver à la déterminer.

Le sénateur Enverga : Vous dites que votre bilan de sécurité est le meilleur au monde. Comment vous comparez-vous aux autres entreprises privées offrant les mêmes services?

M. Parsons : C'est une question qu'il y a lieu de se poser, car la comparaison peut être difficile.

Nous évoluons au sein d'un marché concurrentiel. Le transport est au cœur de la plus grande partie des revenus et du modèle d'affaires de notre entreprise. Comme nos clients évoluent également sur un marché livré à la concurrence, la transparence n'est pas toujours un objectif facile à atteindre pour ce qui est des données.

Nous avons toutefois la chance de pouvoir compter sur l'Association internationale des producteurs de pétrole et de gaz qui publie des statistiques sur l'ensemble de l'industrie. Pour certains chiffres touchant les taux d'accident et d'incident, nous nous classons mieux que la plupart de nos principaux compétiteurs.

On pourrait sans doute trouver quelque part une petite entreprise qui n'a jamais eu d'accident parce qu'elle n'utilise qu'un seul appareil qui décolle peu fréquemment, mais nous pouvons certes affirmer que nos systèmes de gestion nous permettent de limiter les accidents mieux que ne le font les autres entreprises de services d'hélicoptère de calibre mondial ou de taille importante.

Le sénateur Enverga : Comment peut-on comparer les services de recherche et sauvetage offerts par une agence gouvernementale comme la Garde côtière canadienne et ceux dispensés par une entreprise privée comme la vôtre? Est-ce que les coûts sont inférieurs ou égaux, ou comment pouvez-vous comparer vos activités?

M. Fry : Un modèle commercial permet un certain nombre de gains d'efficience par rapport à un modèle gouvernemental. Lorsqu'il s'agit d'acquérir un hélicoptère, les forces militaires et le gouvernement doivent se conformer à un certain nombre de critères dont nous n'avons pas à nous préoccuper. Si nous devons acquérir un hélicoptère pour la recherche et le sauvetage, nous achetons simplement un appareil conçu à cette fin. Nous n'exigeons pas qu'il puisse être transporté à l'arrière d'un C-17. Nous n'avons pas à nous demander s'il est possible d'y installer des armements ni à nous intéresser aux autres critères que doivent considérer les forces militaires dans leurs exigences du fait que l'appareil peut éventuellement être appelé à jouer un autre rôle.

Nous achetons les appareils offerts sur les marchés, ce qui réduit les dépenses en capital. Je pourrais sans doute vous donner l'exemple du gouvernement du Royaume-Uni qui a décidé il y a un certain nombre d'années d'avoir recours à des services commerciaux pour les activités de recherche et sauvetage. Ces services étaient offerts auparavant par la Marine royale, l'Aviation royale et la Garde côtière du Royaume-Uni. Dans l'ancien système, 44 appareils étaient utilisés à partir de 12 bases. Le nouveau modèle commercial permet d'offrir la même capacité d'intervention, si ce n'est davantage, grâce à la technologie, à partir de 10 bases et en utilisant 22 appareils. Cela peut sembler paradoxal, mais il faut savoir que l'ancienne flotte d'hélicoptères utilisée par les forces militaires et la garde côtière approchait de la fin de sa vie utile.

Il s'agissait d'appareils Sea King de Sikorsky. Ils étaient très vieux et très lents. On en était presque aux élastiques et au ruban adhésif pour les faire tenir ensemble. L'apport des nouvelles technologies a permis d'accroître la capacité tout en économisant beaucoup. À plusieurs égards, le recours à une entreprise privée peut permettre de réduire les coûts par rapport à ceux des forces militaires.

M. McLuskie : Si je puis me permettre, nous avons modernisé les services offerts par la Garde côtière irlandaise en 2012-2013. Nous avons alors mis hors service les vieux S-61N pour les remplacer par des S-92 tout neufs. Avant ce changement, la garde côtière répondait à 450 appels de service par année le long des côtes irlandaises. En 2013, le nombre d'appels a dépassé les 1 100. L'offre de service a pu augmenter parce que l'appareil offre de plus grandes capacités. Il peut se rendre à de plus nombreux endroits et contribue davantage à assurer la sécurité des gens dans les eaux irlandaises et aux alentours.

Le sénateur Enverga : Vous avez parlé des coûts. Pouvez-vous nous donner une idée des sommes qui pourraient être économisées? Allons-nous vraiment épargner en optant pour ces appareils?

M. Allard : Je vais vous donner nos chiffres si vous nous donnez les vôtres.

Le sénateur Enverga : Je veux seulement me faire une idée approximative.

M. Parsons : Je vais laisser à Mike le soin de faire une estimation si le cœur lui en dit. Pour répondre à votre question quant à la réduction des coûts par rapport à la capacité, je peux vous indiquer à titre d'illustration que nous conservons à l'échelle planétaire une flotte de 100 à 200 appareils en fonction de la demande du moment. Notre pouvoir d'achat auprès des fabricants d'hélicoptères s'appuie sur cette flotte de 100 à 200 appareils en service à n'importe quel moment ainsi que sur un certain flux de commandes de nouveaux hélicoptères.

À titre d'exemple, nous avons commandé au moins deux, le minimum confirmé, et jusqu'à cinq Sikorsky S-92 pour la recherche et sauvetage dans toutes les conditions météorologiques. Ils sont en cours de fabrication et viendront grossir la flotte de notre entreprise pour être ensuite déployés au service de nos différents clients partout dans le monde. C'est sans doute une fréquence et une quantité d'achat différentes de celles de n'importe quel ministère ou gouvernement national. Vous pouvez probablement en déduire qu'il nous est possible de réduire ainsi nos coûts par rapport à ceux d'un ministère ou d'un gouvernement. Je ne voudrais pas risquer d'estimation quant à l'importance des coûts, mais libre à mon collègue de le faire.

M. Fry : Je dirais que les économies quant aux coûts ne sont pas le seul avantage. Pour ce qui est des délais, nos relations avec les fabricants et le fait que nous achetons des modèles commerciaux font en sorte qu'un nouvel appareil peut se retrouver sur l'aire de stationnement à l'extérieur d'un hangar de recherche et sauvetage dans un délai de 18 mois à 2 ans suivant la commande.

Les gouvernements ne procèdent pas de la même manière pour leurs approvisionnements, et il me serait difficile de vous nommer un seul gouvernement au monde qui peut compter sur un système d'approvisionnement à la fois souple et peu complexe.

M. McLuskie : Je pourrais peut-être ajouter certains faits pour éclairer les choses. Avant de quitter les forces militaires, j'étais responsable des services de recherche et sauvetage de l'aviation royale où j'ai passé 30 ans de ma vie. Nous choisissions nos équipages en appliquant les mêmes exigences en matière de compétences, mais ils comptaient deux fois plus de membres. Pour offrir une capacité de recherche et sauvetage équivalente dans le contexte militaire, il fallait beaucoup plus d'employés et d'appareils qu'au sein d'une entreprise commerciale.

La vice-présidente : J'aimerais souhaiter la bienvenue au sénateur Munson qui s'est joint à nous.

La sénatrice Raine : Tout cela est très intéressant. Est-ce qu'on peut dire qu'en matière d'acquisitions, vous magasinez et achetez dans le commerce des appareils correspondant à vos besoins, alors qu'un gouvernement national doit suivre toutes sortes de procédures, y compris des demandes de propositions?

M. Allard : Lorsque nous avons besoin d'un appareil, la liste des exigences à remplir peut être assez longue.

M. Fry : Si vous me permettez de préciser ce que j'ai dit, je n'irais pas jusqu'à affirmer que le modèle commercial permet de passer outre à la plus grande partie des modalités d'approvisionnement. Il faut qu'il y ait un processus concurrentiel comme pour les approvisionnements gouvernementaux. Les économies se font plutôt du point de vue des exigences qui peuvent être moindres.

Si vous cherchez un hélicoptère d'une telle taille parce qu'il doit se rendre en Afghanistan, dans le Grand Nord, les Grands Lacs, ou sur la côte Est ou Ouest, il y a un coût associé à toutes les exigences additionnelles que cela entraîne. En vous limitant à l'appareil dont vous avez besoin pour accomplir une tâche spécifique, vous réduisez grandement les coûts, le cycle d'approvisionnement et le délai de livraison.

La sénatrice Raine : Comme votre flotte compte de 100 à 200 appareils, elle vous offre une certaine flexibilité.

M. Fry : Tout à fait.

La sénatrice Raine : En sachant que vous aurez besoin d'un certain nombre d'hélicoptères pour accomplir cette tâche bien précise, vous allez simplement chercher les appareils conçus à cette fin.

M. Allard : Cela vient d'accords-cadres que nous avons avec des fournisseurs et des fabricants. Vous avez un modèle de base et établissez le nombre d'aéronefs. C'est vraiment axé sur le volume. Une fois que vous avez vos spécifications, vous pouvez les adapter à un contrat particulier, que ce soit pour l'exploitation pétrolière et gazière ou pour la recherche et le sauvetage. La réponse est ainsi un peu plus rapide, en gros.

M. Fry : Pour répondre à votre question, nous pouvons ici même vous promettre n'importe quoi. Permettez-moi de vous donner un exemple qui sera probablement utile. Je vais encore une fois parler de la Garde côtière irlandaise.

Ils avaient des appareils S-61 vieillissants et voulaient de la nouvelle technologie en raison de la nature des tâches de recherche et de sauvetage qu'ils exécutaient. Compte tenu de notre modèle de service, ils nous ont dit, à nous, leur fournisseur : « Nous voulons de la nouvelle technologie. » C'est à nous qu'il incombait de proposer des solutions. En deux ans, ils étaient passés des S-61 aux S-92, des aéronefs complètement différents; un programme de gestion du changement avait été mis en œuvre; et le personnel avait reçu une nouvelle formation. Tout avait été fait.

Sur le plan de l'agilité, cela représente une tâche très complexe pour un gouvernement. Nous n'avons pas les contraintes que représentent certains des très longs processus gouvernementaux, dans un tel système. Nous avons la flexibilité de modifier très efficacement la technologie pour un client. Je ne dis pas que c'est une panacée et que tout autre système est mauvais. Je dis simplement que nous avons de la souplesse, ce qui convient à bien des exigences d'un usage au quotidien.

La sénatrice Raine : Avec cette approche, nous examinons les lacunes dans notre capacité, en ce moment. Vous ne parlez pas de la flotte entière. Vous parlez d'une lacune particulière. Ce serait le même processus?

M. Fry : Tout à fait.

M. McLuskie : Nous avons déjà des critères sur lesquels nous nous sommes entendus, concernant l'équipement qu'il y aurait dans l'aéronef. Nous ne sortons pas magasiner. Nous savons déjà ce que nous voulons. Nous avons déjà averti les fabricants que nous voulons un avion muni du niveau d'équipement donné, en fonction de délais de livraison donnés. Cela signifie que tout est nettement mieux mené qu'autrement.

M. Fry : Il y a lieu d'ajouter que nous exerçons une bonne surveillance de ces fournisseurs et de l'équipement. Pour l'inclusion d'un élément servant à la recherche et au sauvetage dans une solution commerciale ou l'ajout d'un service de rechange dans le cadre d'un remaniement, il faut un lien de confiance très solide entre le gouvernement et le fournisseur, car au bout du compte, vous confiez à ce fournisseur la responsabilité d'assurer la sécurité de vos citoyens.

Nous ne prenons pas cela à la légère. Nous consacrons à cela énormément d'effort et de réflexion, car c'est par une nuit sombre et orageuse qu'il y aura des problèmes et que quelque chose ira mal. Il faut que l'équipement soit infaillible. La rigidité doit caractériser les procédures d'opération et l'équipement requis à cette fin, car c'est au pire moment possible que le problème surgira.

Le sénateur Sinclair : Tout cela est très intéressant, messieurs. Je suis curieux au sujet du commentaire que vous avez fait précédemment, selon lequel vous ne recommandez aucune des options, mais j'ai trouvé très utile le commentaire de M. Fry, quand il a dit que ce n'est pas une question d'ordre public ou privé, mais simplement une combinaison des deux.

J'ai su par le personnel que vous avez demandé de nous présenter un exposé. Je présume que vous avez un message à nous passer, alors veuillez me dire de quoi il s'agit.

M. Parsons : Permettez-moi de répondre. J'aurais deux messages clés. Premièrement, en cherchant la meilleure solution pour la recherche et le sauvetage dans les environnements marins à l'intérieur et autour du Canada, dites-vous qu'il existe des modèles commerciaux suffisamment flexibles pour être adaptés à toutes vos exigences. Nous avons donné quelques exemples extrêmes : l'exemple du gouvernement national qui décide effectivement de privatiser les activités et d'acheter une solution commerciale telle quelle, et celui à l'autre extrême du gouvernement qui définit des échelons intermédiaires de protection portant dans certains cas le logo et les couleurs de l'entrepreneur et dans d'autres, la marque de l'agence gouvernementale qui reçoit le soutien. Ce modèle offre beaucoup de souplesse. Ce n'est pas nécessairement évident pour les gens qui ne sont pas du domaine, mais c'est une observation importante.

L'autre chose, c'est qu'il y a une solution contractuelle pertinente à la solution dont vous discutez, et il faut pour cela un degré systémique de transparence, de sorte que l'entrepreneur puisse démontrer en détail la façon dont le service est fourni. Vous pouvez établir, par exemple, la conformité à la réglementation nationale. Vous pouvez faire le suivi des coûts réalistes et les comparer aux coûts prévus du modèle. C'est un élément essentiel de toute solution efficace.

Nous avons créé une solution appelée IAMSAR, maintenant utilisée à l'échelle mondiale par tous nos concurrents, pour garantir ce genre de transparence aux gouvernements nationaux qui font partie de nos clients.

Ce sont deux aspects essentiels que nous voulons vous communiquer aujourd'hui.

Le sénateur Sinclair : Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous ne dites pas, mais je comprends, d'après le travail accompli par le comité à ce jour et, peut-être, d'après vos commentaires, que vous voyez ce que le Canada fait comme étant principalement une opération publique — un fournisseur de service public.

M. Allard : En effet.

M. Parsons : Oui.

M. Allard : Ce n'est pas différent de ce qu'il y avait au Royaume-Uni ou en Australie. Ces pays sont passés par le même processus.

Le sénateur Sinclair : Et tous sont passés à un modèle commercial.

M. Allard : Un modèle commercial — La Norvège étant le dernier pays à l'avoir fait —, et ils s'en vont vers une solution intérimaire.

M. Fry : Je pourrais ajouter deux choses. J'ai connu d'autres administrations qui sont passées d'un service gouvernemental à un service commercial. Je n'en connais pas qui sont revenues à un service gouvernemental par la suite. Je ne sais pas si cela vous aide.

Le sénateur Sinclair : Peut-être plus que vous le croyez.

M. Fry : Le deuxième point, c'est qu'il s'agit d'information. Quand vous en venez à prendre ce genre de décisions, compte tenu des examens de politiques en cours au Canada, c'est un peu une décision qu'on prend une fois par génération. Nous souhaitons fournir de l'information, car c'est une décision importante.

La plupart des pays qui sont passés à des services de recherche et de sauvetage commerciaux sont des pays du G20. Cela a eu lieu. Certains de ces pays craignent l'inconnu que cela comporte.

J'ai connu les deux côtés de la situation. J'ai travaillé plusieurs années pour le gouvernement. Des soupçons pèsent depuis longtemps sur les entreprises commerciales — ce qui est juste —, et on s'inquiète de la perception du public qui voit un service fondamental au citoyen d'un pays passer entre les mains d'un fournisseur. Ces deux facteurs étaient présents quand le service a été mis en place.

En Irlande, on ne cherche pas délibérément à cacher le fait qu'il s'agit d'un fournisseur commercial. Ils ont juste choisi d'avoir les couleurs et l'uniforme. D'après moi, la plupart des gens en Irlande ne réalisent pas que les activités de recherche et de sauvetage ont été confiées à un fournisseur commercial.

M. Parsons : J'aimerais en dire davantage sur la Garde côtière irlandaise, car il y a plus que les aéronefs peints aux couleurs de la Garde côtière irlandaise plutôt qu'aux couleurs de l'entrepreneur, ou que l'équipage porte des combinaisons ou des uniformes aux couleurs de la Garde côtière irlandaise, et ainsi de suite. Le choix de la Garde côtière irlandaise est très important, en ce sens que maintenant, les membres du personnel de l'entrepreneur — qu'il s'agisse des pilotes, de l'équipage ou de qui que ce soit d'autre — exécutent leur mission en tant que représentants de la Garde côtière irlandaise. Nous ne représentons pas CHC. Nous représentons la Garde côtière irlandaise. Il y a tout un éventail de normes et d'attentes, contractuelles et autres, qui exigent que le comportement et le travail des membres de l'équipage soient conformes non seulement aux normes de CHC, mais à celles de la Garde côtière irlandaise, car nous portons l'insigne de la Garde côtière irlandaise sur notre poitrine. C'est un changement très subtil, mais très important dans notre façon de fournir le service.

D'autres gouvernements ont dévalué ce choix particulier, mais c'était important pour la Garde côtière irlandaise. D'après les discussions que nous avons eues à ce jour avec les agences canadiennes, j'ai l'impression que cela compterait dans une certaine mesure au Canada.

Le sénateur Sinclair : Au moment où vous travailliez à cette option, avez-vous pensé au temps qu'il faut aux gouvernements pour le processus d'appel de propositions nécessaire au genre de contrat dont vous parlez?

M. Fry : Oui.

M. Allard : Nous l'avons fait.

M. Fry : Pendant ce processus, nous avons eu plusieurs réunions avec les diverses agences d'approvisionnement à Ottawa. À des fins d'information, nous avons en fait obtenu l'autorisation de divulguer les documents que le Royaume-Uni et la Garde côtière irlandaise ont utilisés pour évaluer le modèle. Nous avons fourni cela à divers services d'approvisionnement fédéraux ici.

Au bout du compte, l'essentiel, c'est que nous sommes une entreprise commerciale. J'encouragerais le comité à valider ce que nous vous disons ici. Parlez à nos clients, parlez à la Garde côtière irlandaise, à la garde côtière du Royaume-Uni ou à son ministère de la Justice pour obtenir des points de vue indépendants et bipartisans sur ce modèle.

M. Parsons : Si le comité choisit de saisir cette occasion, ce pourrait être très utile. Notre rôle serait de simplement établir des liens de sorte que vous puissiez discuter à votre guise avec vos homologues d'Irlande, de Norvège ou d'ailleurs. Nous nous sommes adressés à nos clients d'Irlande et de Norvège en particulier, sachant que ces modèles pourraient vous convenir, et les gens des deux agences ont indiqué qu'ils seraient ravis de discuter de cela avec des représentants du Canada.

Le sénateur Sinclair : Les chercheurs du comité nous ont appris qu'en mai 2016, votre société mère a déclaré faillite au Texas.

M. Parsons : C'est vrai.

Le sénateur Sinclair : Vous pourriez nous faire part des incidences de cela sur vos activités commerciales.

M. Parsons : Brièvement, absolument aucune.

Le sénateur Sinclair : N'est-ce pas la beauté des procédures de faillite?

M. Parsons : C'est incroyable. Cela ne fait pas partie de mon expertise fondamentale. Cependant, je deviens plus que jamais un expert de cela.

CHC Canada ne faisait pas partie de cette procédure. Pour répondre à votre question relative à l'organisation générale, nous allons quitter le processus de restructuration au cours des deux ou trois prochaines semaines. Le processus est presque officiellement terminé et n'a eu aucune incidence sur nos activités à l'échelle mondiale. Nous continuons d'utiliser le même aéronef de la même façon et aux mêmes endroits qu'avant, quand le processus de restructuration s'est amorcé en mai de l'année passée.

Le sénateur Sinclair : Toute l'information qui nous permettrait d'en savoir plus à ce sujet est publique, n'est-ce pas?

M. Parsons : Absolument, et d'autres renseignements seront rendus publics au fil du processus.

À titre d'information pour le reste du comité, notre principale clientèle est formée d'exploitants pétroliers et gaziers. Nous assurons le transport aller-retour de leurs équipes qui travaillent sur les plateformes de forage, partout dans le monde. Vous savez que l'industrie pétrolière et gazière subit des pressions en ce moment. En tant qu'élément de cette chaîne d'approvisionnement, nous subissons notre part de ces pressions, ce qui a mené aux problèmes de restructuration en vertu du régime de protection du chapitre 11.

Le sénateur Sinclair : Les choses changent; nous verrons.

[Français]

Le sénateur Forest : Madame la présidente, je voudrais remercier le sénateur Sinclair qui a posé les trois questions que je voulais poser, particulièrement au sujet du dépôt de mai dernier. Donc, merci d'être présent et de répondre en toute transparence à nos questions.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Je veux que nous parlions de l'aspect fondamental des besoins relatifs à la recherche et au sauvetage au Canada. Ma question comporte deux parties. Quelle est votre compréhension de nos besoins et de nos lacunes, sur le plan de la structure — par exemple, nous n'avons pas suffisamment de ressources aux bons endroits, compte tenu de la demande ou des besoins ponctuels, comme s'il nous faut un brise-glace supplémentaire?

Quelle est votre compréhension des besoins? Je sais que c'est de l'information, mais vous le faites depuis des décennies. Quelle serait votre offre au système canadien? Que feriez-vous pour combler le fossé ou pour améliorer notre capacité de recherche et de sauvetage, si vous pouviez écrire le scénario?

M. Fry : Nous examinons beaucoup, depuis quelques années, les activités de recherche et de sauvetage du Canada. Je vois des besoins au Canada dans trois domaines.

Premièrement, le Cormorant arrivera d'ici quelques années à sa mise à niveau à mi-vie, ce qui exigera, je pense bien, un programme continu visant à retirer ces aéronefs des services de première ligne pour un entretien approfondi qui prendra beaucoup de temps. Il risque de manquer d'aéronefs pour les services de première ligne sur la côte Est ou la côte Ouest du Canada. Une prestation commerciale provisoire représenterait une solution, comme nous le faisons avec le ministère de la Justice de la Norvège.

Deuxièmement, je vois au Canada des besoins autour des Grands Lacs et une solution à plus long terme au Griffon. J'ai en main l'historique de l'appareil 412 de l'armée du Royaume-Uni, alors je suis vraiment un fan, mais c'est un hélicoptère destiné au champ de bataille qu'on utilise dans un rôle sans qu'il possède certains des aspects essentiels. À plus long terme, il faudra soit le remplacer ou améliorer cette capacité.

Troisièmement, c'est l'aspect le plus difficile à trouver en ce moment, et c'est le Grand Nord du Canada, avec le passage plus fréquent de navires de croisière et la nécessité d'y être visible sur le plan de la souveraineté.

Vous ne voyez peut-être pas le lien avec la recherche et le sauvetage. Je ne suis pas sûr. Avec l'accroissement de l'activité là-bas, les activités de recherche et de sauvetage devront être étendues. Je vous laisse déterminer si une prestation commerciale convient à cela. Le coffre à jouets du MDN ne va pas grossir par magie. Un de ces jours, il faudra gérer les ressources en fonction de cette tâche. Accroître la présence dans le Grand Nord avec les ressources et les actifs dont le MDN dispose en ce moment exigera la prise de décisions difficiles sur l'affectation des ressources.

Le dernier élément concernant le Grand Nord est moins défini, car je pense que le processus et la réflexion sont toujours en cours, mais il est lié aux deux autres éléments en ce qu'il y a possibilité de lacunes dans la capacité, et une prestation commerciale permettrait au MDN ou à n'importe quel autre ministère fédéral d'accomplir cette tâche.

Le sénateur Gold : Nous couvrons le Grand Nord à partir des bases de Halifax et de Trenton. Envisagez-vous une installation plus permanente dans le Nord, ou s'agirait-il simplement d'utiliser les technologies et aéronefs les plus avancés pour desservir plus efficacement le Nord? Comment le lien se ferait-il avec la présence plus visible et la souveraineté?

M. Parsons : C'est une excellente question. Mick a énoncé trois aspects des besoins futurs relatifs à la recherche et au sauvetage. Je vais commencer par celui qui est le plus pressant et concret peut-être, c'est-à-dire l'entretien qu'il faudra faire sur les hélicoptères Cormorant qui desservent en ce moment les côtes Est et Ouest. En raison de l'entretien majeur à venir, bon nombre de ces hélicoptères seront hors service pendant un certain temps. Une option pourrait être de réserver une base d'opérations pour le service commercial supplémentaire qui comblerait le manque, pendant que les hélicoptères sont à l'entretien. Le programme d'entretien des Cormorant pourrait alors se dérouler comme il se doit grâce aux ressources commerciales.

Au sujet du renouvellement de la flotte de 412 Griffon dans la région des Grands Lacs et compte tenu de la nécessité probable d'assurer des services jusque dans le Grand Nord, il y aurait peut-être lieu de discuter non pas de services de renfort mais d'un cadre futur pour assurer la prestation des services à long terme. Si l'on pouvait imaginer un partenariat avec des organisations commerciales pour bonifier les services dans les Grands Lacs ou encore sur les côtes Est et Ouest, cela pourrait libérer des ressources du MDN, du MPO et de la Garde côtière, qui pourraient alors les déployer dans le Grand Nord. Vous avez actuellement la liberté de choisir. Plutôt que de vous contenter de maigres ressources et de faire appel au secteur privé en renfort, vous pourriez bénéficier de ressources accrues et de la marge de manœuvre nécessaire pour les déployer dans différentes régions du pays.

Le sénateur Munson : Je m'excuse de mon retard. Je cherchais dans Google la signification de CHC. Il m'a fallu un certain temps pour la trouver. C'est l'acronyme pour Canadian Holding Company. Ce n'est pas aussi vendeur que CHC, je suppose. Il ne fait aucun doute que le comité devra se rendre en Irlande ou en Norvège pour aller vérifier certaines choses de lui-même.

Pour revenir à la question du sénateur Gold, vous avez parlé de la nécessité de renforts dans les Grands Lacs, sur la côte Est et sur la côte Ouest. Pourriez-vous nous offrir ces services à un coût inférieur à ce qu'il en coûte aux contribuables canadiens avec les ressources actuelles? Je ne sais pas si c'est possible, mais vous pouvez peut-être nous présenter une analyse des coûts. Pourriez-vous nous offrir des services plus économiques que nos services actuels?

M. Parsons : De toute évidence, notre expérience avec d'autres gouvernements nationaux laisse supposer que oui. Nous avons étudié différentes options en ce sens. L'un des exemples tangibles en serait les économies d'échelle associées au maintien d'une flotte totale de 100 à 200 aéronefs et le pouvoir d'achat que cela confère auprès des fabricants de ces aéronefs. C'est une importante dépense en capital à prendre en considération.

Le même raisonnement s'applique aux frais d'exploitation des aéronefs. Quand on a toute une chaîne d'approvisionnement de pièces pour une flotte totale de 100 à 200 aéronefs, on peut réaliser des économies d'échelle, puisqu'on utilise davantage ces pièces plutôt que de les conserver en trop grand nombre pour une flotte d'une quinzaine d'aéronefs seulement, comme dans ce cas-ci.

L'un des exemples de gain en efficacité que nous tirons de notre expérience de recherche et de sauvetage en Irlande c'est que notre pouvoir d'achat nous a permis de remplacer une flotte de Sikorsky 61 par une flotte de Sikorsky 92, ce qui a beaucoup augmenté nos capacités. Nous réussissons ainsi à assurer des services sur la côte et à répondre à presque trois fois plus d'appels de recherche et de sauvetage avec le même nombre d'aéronefs.

Au Royaume-Uni, nous avons réussi à faire de même en réduisant le nombre de bases de 20 p. 100 et le nombre d'aéronefs de la moitié environ, de manière à offrir une couverture accrue grâce à 22 aéronefs plutôt que 44. Je ne sais pas si cela répond bien à votre question sur le potentiel d'économies, mais je peux vous assurer que nous pouvons offrir autant et même plus de services à moindre coût, avec un moins grand nombre d'aéronefs et moins d'effectifs.

M. Allard : L'un des grands enjeux, outre la responsabilité, c'est les indicateurs clés de performance, soit les grands éléments qu'on souhaite mesurer chaque jour. C'est ce que permet la doctrine de l'IAMSAR. On peut consulter en ligne le bilan de sauvetage de la veille, en mesurer l'efficacité, vérifier le temps qu'il a fallu avant que l'hélicoptère décolle, la durée de l'opération en heures ou en minutes. Toutes ces données sont accessibles en ligne pour nos consommateurs.

Nous sommes efficaces et nous pouvons faire diminuer les coûts. La raison pour laquelle beaucoup de gouvernements ne sont jamais revenus en arrière, c'est que la prestation de services était assez bonne pour qu'ils y voient la solution.

C'est une occasion en or d'expérimenter quelque chose de nouveau, si l'on veut. En raison de l'entretien nécessaire de la flotte de Cormorant, il y aura un manque de ressources pendant une assez longue période, le temps que ces hélicoptères soient réparés au sol. Nous voyons là l'occasion de faire un premier essai, pour voir ce que ce genre de service peut apporter.

À partir de là, vous pourriez assurer les services dans les Grands Lacs et le Grand Nord grâce à un redéploiement des aéronefs que possède déjà le gouvernement, si vous en avez suffisamment pour combler les besoins.

Le sénateur Munson : Quand vous intervenez en renfort, comment le gouvernement peut-il savoir combien il lui en coûtera? Comment établissez-vous le contrat avec le gouvernement, afin d'intervenir en renfort au besoin, pour qu'il y ait un budget et que vous travailliez dans le respect des paramètres établis?

M. Allard : Il y a un processus d'appel d'offres.

Le sénateur Munson : Est-ce que cela s'est déjà fait au Canada? Il y a des activités de recherche et de sauvetage, mais je veux dire que le secteur privé intervienne en renfort. Y a-t-il un budget pour ce genre de chose?

M. McLuskie : Pas au Canada, mais ailleurs, oui. Les contrats conclus dans d'autres pays prévoient un budget précis et des attentes. Des ressources sont donc ciblées très clairement en fonction des attentes, du bilan des années précédentes et des recherches effectuées.

M. Parsons : Si je peux ajouter brièvement une chose, en tant que fournisseur commercial, nous avons le devoir d'agir en toute transparence et d'afficher nos coûts en temps réel, chaque mois ou selon la période jugée appropriée. Vous feriez mieux de poser cette question à des ministères et organismes comparables à d'autres pays qui ont fait l'exercice et qui sont de l'autre côté de l'équation. Ils en ont l'expérience : les Irlandais, les Norvégiens, les Australiens et les Britanniques. Ils ont tous déjà vécu cette transition. Je suis certain qu'ils se sont heurtés aux mêmes défis pour prouver la rentabilité de cette solution à leurs électeurs.

Le sénateur Munson : Je suis curieux, parce que les montants m'étonnent. Ce sont tous des pilotes professionnels, tant dans le secteur privé que dans le secteur public. Ils sont tous bien formés, mais je serais porté à croire qu'ils sont mieux payés dans le secteur privé. Il y aurait donc un attrait à travailler dans le secteur privé pour une entreprise comme la vôtre, même s'il est aussi avantageux de travailler pour le gouvernement, pour avoir un volume de travail stable et recevoir une rémunération raisonnable. Nous avons remarqué par le passé que ceux qui quittent le secteur public pour le secteur privé s'en portent plutôt bien financièrement.

M. McLuskie : Il faut dire que selon le modèle militaire, la période de service est d'environ deux à trois ans. Le taux de roulement y est beaucoup plus rapide que dans le monde commercial. Nous avons des pilotes d'appareils de recherche et de sauvetage qui travaillent de la même base depuis 17 ans. Ils n'ont pas bougé. Ils sont restés à la même base toutes ces années. Dans un environnement militaire comparable, les équipages changent tous les deux ou trois ans; il faut ensuite reformer tous les nouveaux éléments. Pour cette raison seulement, il y a un plus faible taux de roulement et moins d'interruptions de service.

M. Fry : J'aurais une chose à dire en réponse à cette question. Si l'on regarde en rétrospective comment s'est effectuée la transition des services militaires ou gouvernementaux à des services commerciaux dans les pays mentionnés (l'Australie, l'Irlande, le Royaume-Uni et la Norvège), il y a toujours un élément déclencheur. Il y a toujours un élément qui a suscité le changement. Celui-ci peut prendre diverses formes, et la décision peut se fonder sur diverses raisons, selon les priorités du gouvernement.

Au Royaume-Uni, le gouvernement avait une flotte vieillissante de Sea King qui devait être remplacée. La dépense en capital que représentait l'achat de 45 aéronefs était faramineuse. Il était donc beaucoup plus logique de restructurer le modèle de service.

Tout dépend vraiment de l'objectif et des difficultés de chacun. On peut vouloir améliorer sa situation, sans pour autant pouvoir y consacrer autant d'argent d'un coup, ou on peut aspirer à des services plus économiques, vouloir acquérir des nouvelles technologies ou améliorer la qualité des services. Tout dépend beaucoup de la priorité de chacun, mais selon notre expérience, la souplesse et l'agilité dont nous pouvons faire preuve répondent à ces exigences. C'est un modèle très populaire chez tous ceux qui l'ont adopté.

Le sénateur Munson : J'ai une dernière question à poser. La perception du public compte plus que tout.

M. Allard : Effectivement.

Le sénateur Munson : Vous êtes ici dans le cadre d'une mission commerciale pour vendre les avantages du secteur privé. Vous avez cité des exemples de succès en Irlande. Quand des hommes et des femmes du secteur public travaillent dans le domaine de la recherche et du sauvetage, ils font preuve d'un incroyable dévouement. Je m'attendrais donc au même genre de dévouement. Si quelque chose ne se passe pas bien — supposons qu'on ne réussisse pas à sauver quelqu'un dans le Nord —, les politiciens et le gouvernement seront tenus responsables de l'échec. Parce que les services ne sont pas arrivés assez vite ou je ne sais quoi d'autre.

La même chose peut arriver dans le secteur privé. En cas d'échec, la perception du public pourrait être : « C'est une entreprise privée, elle a été engagée pour cela », quelles que soient les compétences des intervenants. Vous préoccupez-vous de votre image, pour donner au public une bonne perception des services privés déployés pour venir à la rescousse des citoyens canadiens qui pourraient se trouver dans une mauvaise situation?

M. McLuskie : Tout à fait, et je parle d'expérience. J'administrais l'organisation de la recherche et du sauvetage du Royaume-Uni pour l'armée quand nous avons lancé le programme de transfert au privé. Beaucoup craignaient que l'armée perde l'admiration nationale que lui attiraient ses activités de recherche et de sauvetage. C'était le volet positif des activités militaires.

Certains avaient aussi l'impression que des civils ne pourraient pas avoir un entraînement aussi rigoureux. Nous avons prouvé, grâce à l'application des mêmes technologies, des mêmes techniques et des mêmes méthodes d'entraînement que nous pouvons faire aussi bien que ce que faisait l'armée et même mieux, dans certaines circonstances, en raison de la longue expérience de nos membres en service à une même base.

M. Parsons : Le service offert aux gouvernements nationaux et d'État de l'Australie, de l'Irlande, de la Norvège et du Royaume-Uni, ou d'autres pays où nous offrons des services, est tel que les activités de recherche et de sauvetage sont inévitablement, de par leur nature et leur définition, menées dans des conditions qui ne sont pas idéales. Il y a quelque chose de vraiment grave qui s'est passé quand les services de recherche et de sauvetage doivent intervenir. Il n'y a pas toujours de fin heureuse. Il y a parfois des tragédies, malgré tous les efforts de chacun.

Qu'on pense à la Garde côtière irlandaise ou au ministère de la Justice de la Norvège, ou encore à d'autres organes gouvernementaux nationaux, le gouvernement doit prévoir et gérer la perception du public, parce que le risque est bien réel et que nous avons déjà vécu des situations difficiles.

Je pense à des sauvetages au large de l'Atlantique Nord, en Irlande, et sur le continent australien qui ont mal tourné. Selon ma perception, à tout le moins, les opérations semblaient pourtant très bien gérées. La perception du public ne l'a pas emporté sur tout le reste. Les services ont pu démontrer leurs compétences, leur rigueur et leur respect des obligations établies par le gouvernement. La discussion qui en a découlé a été bien gérée.

Je serais porté à vous dire que vos homologues d'autres pays seraient les mieux placés pour vous donner des conseils à ce sujet.

M. Fry : C'est le nœud de la question. Nous avons beau parler de technologie et d'efficacité, mais la perception du public est la clé. C'est de quoi dépend le contrat ou le lien de confiance qui s'établit entre la partie contractante et le gouvernement concerné. Ce n'est pas un travail pour amateurs. C'est une tâche très complexe. Nous la prenons extrêmement au sérieux.

La façon dont cette confiance se construit, pour que ce modèle réussisse, consiste à préciser les obligations et « les demandes » imposées au contractant. Nous pouvons vous donner un début de réponse à la lumière de l'expérience d'autres pays, mais au bout du compte, le gouvernement canadien doit poser les bonnes questions pour obtenir les bonnes réponses. Le principe de base, c'est le niveau de confiance et les normes de rendement imposés au contractant. C'est avec grand plaisir que nous répondrons à ces attentes.

Si l'on prend l'exemple de l'Irlande, il y a un système de suivi en temps réel qui permet à n'importe qui de se connecter pour voir les mesures du rendement en fonction des indicateurs établis. Nous sommes allés voir cet après-midi les données de la Garde côtière irlandaise. Selon les mesures du rendement compilées à ce jour ce mois-ci, la disponibilité des services de recherche et sauvetage en Irlande est de 99,4 p. 100. C'est l'un des indicateurs qu'on nous a demandé de mesurer et de divulguer. Le seuil est actuellement fixé à 98 p. 100, et nous affichons une disponibilité de 99,4 p. 100.

Si l'on vérifiait ce même indicateur de rendement pour l'Aviation canadienne aujourd'hui, je doute qu'il soit de 99,4 p. 100. Il serait élevé. Il s'agit d'une organisation très compétente, mais un rendement de 99,4 p. 100 est exceptionnel. S'il est si exceptionnel, c'est parce que le gouvernement l'a demandé. C'est ce qu'il nous a demandé de maintenir, et c'est ce que nous maintenons chaque jour, parce que la vie des gens en dépend.

M. Parsons : Il importe de mentionner que le gouvernement a un système pour exiger la divulgation des résultats. Il peut voir quotidiennement si nous respectons cette obligation. Cela donne lieu à une grande imputabilité à tous les égards, dans le système, afin que tout soit mis en œuvre pour respecter cette obligation.

M. Fry : Il n'y a pas de chicane à la fin du mois pour déterminer si nous avons ou non eu un bon rendement. C'est évident. Nous faisons preuve de la plus totale transparence, au point où on peut se connecter chaque jour pour savoir quel pilote a participé à quelle mission, à quand remonte son dernier exercice de simulateur, en quoi consistait la mission à laquelle il a participé, combien de temps il a été sorti et voir la carte satellite de son itinéraire de recherche.

Le sénateur McInnis : Pouvez-vous faire tout cela à moindre coût? C'est la question. Pour revenir à l'argument du sénateur Munson, il n'y a pas que la question du secteur privé. Le gouvernement a déterminé qu'il fallait que cela coûte moins cher. Il a donc cherché et trouvé des services à moindre coût. Là est le nœud de la question, et c'est ce qui a suscité la controverse.

M. Fry : En toute déférence, vous me posez une question directe, donc je vous donnerai une réponse directe. Je pense que nous le pouvons, mais je vous ferai une mise en garde. Il faut comparer des pommes avec des pommes. Quand on brosse le portrait des services assurés par le gouvernement aujourd'hui, il y a des choses qui font partie d'un bassin d'opérations générales. Ces éléments doivent être pris en compte, mais oui, je crois fermement que nous le pouvons.

Le sénateur Watt : J'ai moi aussi l'impression de comprendre ce que vous voulez dire. Je viens du Grand Nord, je me reconnais donc dans les questions que vous soulevez. Depuis quelques années, nous éprouvons une grande insatisfaction à l'égard des services déployés dans le Nord, particulièrement pour ce qui est de la recherche et du sauvetage.

Comme vous le savez, quand une crise éclate dans l'Arctique, qu'elle touche le Subarctique, l'Extrême-Arctique ou le Labrador, les services de sauvetage viennent de Halifax. Ils viennent donc de très loin, se rendent jusque dans l'Extrême-Arctique afin d'essayer de trouver la personne ou de secourir une personne déjà identifiée. Ce n'est jamais satisfaisant.

Nous avons perdu beaucoup de personnes qui ont été emportées par les courants dans l'océan. Il faut parfois commencer par déterminer où la personne est disparue, où l'objet ou le bateau a disparu. Ils peuvent dériver sur une longue distance en une journée. Si l'on ne comprend pas bien les courants et leurs mouvements, on peut chercher au mauvais endroit. Cela arrive souvent dans les activités de recherche et de sauvetage de la Garde côtière pour cette raison, à cause de la distance. Le manque de connaissances a également coûté la vie à de nombreuses personnes.

Je vois un potentiel d'amélioration dans ce que vous me dites, si le secteur privé intervenait en renfort. Peut-être devriez-vous envisager non seulement d'intervenir en renfort, mais de reprendre toutes les activités de recherche et de sauvetage. Ce serait peut-être une solution acceptable jusqu'à ce que la situation s'améliore.

Quand des appareils de recherche et de sauvetage se rendent dans le Nord, je dirais que la plupart du temps, ils ne trouvent pas ce qu'ils cherchent. Nos aéronefs privés doivent donc prendre le relais quand ils abandonnent. Nous réussissons toujours à localiser la personne et à la sauver avec nos propres aéronefs, mais ces dépenses ne sont pas couvertes par le gouvernement du Canada. Nous nous en occupons donc habituellement nous-mêmes, à nos frais, nous faisons ce qu'il faut pour sauver des vies.

J'aimerais vous poser une question. Je sais que vous avez un certain volume d'aéronefs, d'hélicoptères. Plutôt que de faire comme la Garde côtière, c'est-à-dire de travailler à partir de Halifax, vous devrez dresser un bilan complet de la situation et déterminer où vous voulez installer vos bases dans les collectivités éloignées.

M. Allard : La plus grande partie de l'analyse des besoins consiste à déterminer quelle distance on peut couvrir à partir d'une base.

Le sénateur Watt : Exactement.

M. Allard : Il faut évaluer la distance couverte et le délai d'intervention. Cela doit aller de pair avec l'analyse du nombre de sauvetages effectués. On parle toujours des lacunes, mais en réalité, la question, c'est combien de temps a-t-il fallu pour aller secourir la personne? Dieu nous garde d'une grande catastrophe, parce que l'intervention dans ce cas devient encore plus importante. La question que tout le monde devrait se poser, c'est : « Offrons-nous des services adéquats dans le Nord? »

L'objectif de notre témoignage n'était pas seulement de mettre cette question en lumière. C'était aussi de mettre en lumière les petites lacunes quand un Cormorant a besoin d'entretien, puisqu'il faut le mettre hors service, mais tout de même assurer des services dans les Grands Lacs et évidemment, dans le Grand Nord. Quiconque dans ma position vous dira que si quelque chose de grave arrive dans le Nord, le délai d'intervention ne sera pas le même que si quelque chose arrive au large de Halifax. C'est certain.

M. McLuskie : Pour mettre les choses en contexte, les gens du secteur pétrolier et gazier norvégien estimaient qu'il y avait un problème dans les mesures d'intervention en cas d'incident dans la mer du Nord. On a donc placé des hélicoptères sur les plateformes de forage. Nous avons déplacé notre base sur les lieux d'exploitation plutôt que de la laisser sur la plage. Nous l'avons installée sur les plateformes de forage et menons désormais nos activités du large des côtes de la Norvège pour offrir des services de recherche et de sauvetage à l'industrie pétrolière et gazière.

M. Allard : La base des services de recherche et de sauvetage a donc été déplacée beaucoup plus au nord en Norvège.

Le sénateur Watt : Il faut également tenir compte du fait que les hélicoptères devront être modernisés de temps à autre pour les adapter aux changements climatiques en cours.

M. Allard : Tout à fait.

Le sénateur Watt : Lorsqu'un pilote d'hélicoptère se pose sur la glace, il peut penser que la surface est très épaisse et sécuritaire. Or, nous savons que des hélicoptères ont déjà défoncé la glace. Il est arrivé que des pilotes doivent être sauvés par la personne qu'ils essayaient justement de sauver. Ces facteurs doivent donc être pris en considération. Le fait est que la texture de la glace n'est plus la même. Vous pourriez donc devoir modifier l'équipement à bord des appareils.

M. Parsons : Certes, il est toujours important d'avoir une telle expertise.

Le sénateur Watt : C'est le genre de choses dont je parle.

M. Parsons : Nous sommes conscients que les problèmes sont complexes, que les solutions ne sont pas gratuites, et que vous avez pour mandat de trouver des solutions à ces problèmes complexes à l'aide d'un budget et de ressources limités.

Nous ne prétendons pas avoir la réponse à tous ces problèmes complexes aujourd'hui même, mais en résumé, nous disons qu'un partenariat avec un fournisseur de service commercial vous laisserait une certaine souplesse pour l'allocation de ces ressources. Qu'il s'agisse d'un service commercial dans le Grand Nord ou d'un service qui doit préférablement être assuré par un organisme fédéral canadien, ces solutions peuvent fonctionner. Nous disons simplement que vous pouvez envisager l'une ou l'autre de ces solutions, ou un mélange des deux.

Le sénateur Watt : Ma dernière question porte plutôt sur les gens du Nord qui travaillent dans ce domaine. Des Inuits évoluent dans le secteur des hélicoptères et de ce genre de choses. Seriez-vous prêts à former une coentreprise, si jamais vous obteniez le contrat?

M. Allard : Comme nous l'avons démontré dans le passé, c'est justement notre façon de procéder. Il faut s'associer à des exploitants locaux puisque c'est logique. Ces gens connaissent la région.

Le sénateur Watt : Ils ont un savoir.

M. Allard : Exactement.

M. Parsons : Le défi consiste peut-être à faire voir à ces gens la valeur du partenariat. Par exemple, Sylvain a parlé de la connaissance locale de l'environnement, que seul un partenaire local peut fournir. En revanche, notre expérience mondiale permettant de définir les normes de réussite des services de recherche et de sauvetage est peut-être ce que nous apportons au partenariat. Pour qu'une association avec un partenaire local soit réussie, il faut que les deux contributions apportent quelque chose à l'environnement.

M. Fry : Je suis à l'emploi de CHC depuis maintenant trois ans, et j'ai remarqué une chose qui me remplit de fierté. Dans bon nombre des régions éloignées où nous avons des activités, nous nous sommes engagés dans des programmes de nationalisation pour que les opérations de l'industrie pétrolière et gazière soient plus durables. Ces programmes ont permis de relever les compétences dans les domaines techniques et se sont très bien passés.

En plus de ce dont nous venons de discuter, le CHC a l'habitude de recruter à l'échelle locale et de relever les compétences techniques dans ces régions, notamment en formant bien les ingénieurs et les pilotes.

C'est un volet quelque peu laissé pour compte que vous voyez parfois dans des brochures, mais j'ai été témoin de ce qui est fait sur le terrain, et c'est très bien. C'est exactement le genre d'emplois ambitieux permettant l'amélioration des compétences qu'il faut confier aux gens de ces collectivités.

Le sénateur Watt : Je vous remercie de votre exposé, de votre discernement et de votre ouverture d'esprit, vous qui êtes prêts à vous rendre dans l'Extrême-Arctique. Je pense qu'il est temps de le faire. Les choses bougeront pas mal à l'avenir, dès que l'économie internationale se portera mieux.

Le sénateur Christmas : J'aimerais revenir sur les propos du sénateur Munson et de M. Fry. Les arguments que vous présentez sont convaincants. Le travail du comité permet de vérifier un grand nombre de ces faits et éléments de preuve. J'aime l'idée de m'adresser aux utilisateurs pour leur demander directement comment ils ont trouvé le service.

J'ai un problème. À vrai dire, je pense que ma tête peut être convaincue. Il y a suffisamment d'avantages, surtout si de nouvelles technologies permettent d'élargir la portée du service. Je suis persuadé que vous allez respecter ou même surpasser les normes de sécurité. Mais ce qui me pose problème — et j'imagine que d'autres Canadiens seront du même avis —, c'est qu'il est difficile de convaincre mon cœur que c'est la chose à faire.

J'ignore si le problème se rapporte à la privatisation. Il y a eu quelques expériences de privatisation au Canada, dont certaines n'ont pas été concluantes. C'est peut-être aussi une question de fierté, étant donné que les activités de recherche et sauvetage occupent une place prépondérante. Je viens de la Nouvelle-Écosse. L'armée est bien en vue dans ma province, qui accueille d'ailleurs la base de recherche et sauvetage.

Je viens d'une petite collectivité qui vit notamment de la pêche commerciale. Il y a quelques années, nous avons presque perdu un équipage de pêcheurs de crabe des neiges. En pleine nuit, pendant la pire tempête qui soit, le navire a soudainement pris l'eau, mais la pompe n'a pas fonctionné. L'équipe de recherche et sauvetage est alors venue à la rescousse des membres de notre équipage et leur a sauvé la vie. Il y a beaucoup de fierté à l'égard de ces opérations. Nous connaissons bien les militaires qui s'occupent des activités de recherche et sauvetage. Comme il a été dit, c'est vraiment une question de perception du public.

M. McLuskie : Je pense toutefois que cela va dans les deux sens. Il incomberait à la fois au nouveau fournisseur de service et au gouvernement de convaincre les clients que nous pouvons le faire. Quand il est question de recherche et sauvetage, on retrouve la même éthique dans les activités commerciales que dans les pratiques militaires. Ce sont de sérieux doutes que partageaient certains membres du gouvernement britannique. Ils craignaient que l'exploitant commercial ne puisse pas respecter l'éthique du milieu de recherche et sauvetage. Or, ces inquiétudes n'étaient pas fondées, et loin de là. L'équipe a adopté la culture exactement comme si elle faisait partie de l'armée.

M. Parsons : Je vous comprends. Vous venez de la Nouvelle-Écosse, alors que je viens de Terre-Neuve. J'ai grandi dans un milieu où ces activités faisaient l'objet de discussions publiques. Des services de recherche et sauvetage étaient offerts à Terre-Neuve; la province les a ensuite perdus, puis les a retrouvés. Voilà qui représentait un défi de taille pour la perception du public, et dans une certaine mesure pour l'efficacité du service. Mais la discussion portait surtout sur la perception du public.

Je dirais que d'autres pays — les Irlandais, les Australiens, les Britanniques et les Norvégiens — doivent tous relever le même défi d'une certaine façon, puisqu'il faut convaincre les électeurs de délaisser un modèle au profit d'un autre. Il s'agit donc d'un processus de gestion du changement à grande échelle. Je pense qu'il serait très utile de recueillir des conseils et des observations auprès de ces pays.

Prenons l'exemple de la Garde côtière irlandaise. Lorsque l'organisme a changé de modèle et a noué un partenariat avec des organisations commerciales, elle a notamment pu mettre à niveau sa technologie. L'enveloppe budgétaire de la couverture a tellement évolué que l'organisme a pu effectuer 1 100 sauvetages par année au lieu de 450.

En tant qu'électeur, ce genre d'argument aide grandement à convaincre mon cœur. Si cette solution permet de sauver trois fois plus de vies, j'y adhère de tout cœur. Il s'agit là d'une démonstration pratique du service plutôt que d'une simple discussion théorique. Allez discuter avec ceux qui ont connu un tel changement, et qui ont dû en démontrer le bien-fondé à leurs électeurs. S'il y a une chose à retenir de la discussion d'aujourd'hui, je pense que c'est le plus important. J'imagine que vous y trouverez des solutions aux problèmes fort complexes de perception du public.

Le sénateur Christmas : Je dirais que nous devrons nous pencher sur la question de la perception du public à un moment ou à un autre de nos discussions. Comment pouvons-nous proposer une option qui est dans l'intérêt des Canadiens tout en aidant la population à comprendre le modèle? Je trouve que le deuxième élément qui se rapporte au cœur est probablement plus difficile que le premier.

Par exemple, les gens se poseront des questions. Est-ce que cela signifierait que nous allons fermer les bases ou qu'il y aura une réduction du personnel militaire? Le changement aura-t-il une incidence sur les fournisseurs? Il y a d'autres questions aussi. Certains pourraient dire qu'il y aura des conséquences si nous choisissons cette option.

M. Parsons : Tout à fait.

M. Allard : Nous fournissons une expertise, mais aussi une expérience du processus, puisque d'autres pays se sont eux aussi demandé quoi faire pour convaincre la population. À vrai dire, la plupart des gens étaient bien heureux de passer à un modèle commercial. La question se résume aux gens. Quelqu'un ira vous chercher en pleine nuit. Au bout du compte, tout dépend de la personne assise dans le poste de pilotage et de celle qui descend sur une corde pour aller vous sauver. Au fond, la transition s'opère très efficacement pour ces personnes.

Ian a mentionné une chose au sujet de la transition. Au départ, comment faire confiance à l'organisation? Voilà qui revient à ce que Michael disait au sujet de la confiance. C'est très important. Je vous encourage à communiquer avec ceux qui l'ont fait, qui ont eu le même problème et la même discussion.

M. Fry : J'aimerais revenir sur un des points que j'ai soulevés tout à l'heure. Si nous observons ce qui se passe dans le monde en ce moment, je doute que l'idéal soit une militarisation complète ou une pleine commercialisation, selon mes constatations. Pour reprendre votre expression, un éléphant se mange une bouchée à la fois.

La perception du public se résume à la peur de l'inconnu, étant donné que vous sortez les gens de leur zone de confort pour les emmener dans une situation future. La transition peut être progressive et graduelle. Je crois que c'était la clé là où le processus a réussi. Il ne suffit pas d'allumer ou d'éteindre un interrupteur pour mettre en place un nouveau fournisseur de service. Les pays ont introduit progressivement la solution et, surprise, le ciel ne leur est pas tombé sur la tête. Les gens sont encore secourus quand ils en ont besoin, et ils obtiennent encore les soins médicaux dont ils ont besoin.

Je vous conseille vivement de ne pas tout changer du jour au lendemain, mais plutôt d'engager un processus progressif, graduel et soigneusement géré, où l'information et la transparence sont des éléments essentiels. Les habitants des secteurs riverains qui lisent leur journal doivent être informés. Ils ont besoin de comprendre la vision. Ils doivent savoir quels sont les problèmes actuels, quelle est la solution, comment le modèle va fonctionner, et quelle en sera l'incidence pour eux. Qu'arrivera-t-il si je tombe de mon bateau demain? Qui viendra me chercher? Quelle forme prendra l'aide? En fait, les opérations seront très similaires à ce qu'elles sont aujourd'hui.

M. McLuskie : Les gardes côtières du Royaume-Uni et de l'Irlande ont pris l'initiative de lancer un programme télévisé du nom de Seaside Rescue, où une caméra est placée dans l'aéronef et suit toutes les interventions. C'est devenu une des meilleures émissions de télévision, et les enfants l'écoutaient tout le temps. Voilà qui a beaucoup contribué à convaincre le public que le service offert serait tout aussi bon qu'il ne l'était auparavant.

M. Parsons : Mick vient de dire une chose vraiment utile : nous entrerons bientôt dans une période que vous pourriez considérer comme une occasion. En effet, la flotte de 15 hélicoptères Cormorant parviendra bientôt à un jalon d'entretien décisif, et le Canada devra faire quelque chose à ce chapitre.

Vous pourriez profiter de l'occasion pour essayer notre proposition à petite échelle et à un seul endroit, après quoi vous déciderez si la solution vous convient, et si elle est extrapolable. Nous agirons ensuite à partir de là.

M. Fry : Je suis d'accord avec Barry. Je pense que c'est une occasion rêvée. Je crois que vous seriez agréablement surpris des résultats, mais je ne suis pas tout à fait impartial.

La sénatrice Raine : Votre témoignage est des plus instructif.

Je regarde la liste du document que vous nous avez distribué sur la structure commerciale. Que veut dire « RNLI »?

M. Fry : C'est le Royal National Lifeboat Institute.

C'est une excellente observation. Nous avons parlé de connaissances locales tout à l'heure. Les hélicoptères sont nécessairement dirigés par un pilote. Or, les pilotes ont tendance à penser qu'ils savent tout.

Le sénateur Sinclair : Ils ont intérêt, s'ils pilotent un hélicoptère.

M. Fry : Il arrive qu'ils ne sachent pas tout, et les connaissances locales sont alors indispensables, comme nous l'avons mentionné tout à l'heure.

Qu'ils soient en Irlande, au Royaume-Uni, en Australie ou en Norvège, nos membres d'équipage s'exercent jour après jour en compagnie d'autres organismes, comme la police, le RNLI ou les professionnels médicaux, de façon à livrer un service sans faille sur le terrain.

Par ailleurs, le RNLI est un organisme bénévole. C'est un organisme de bienfaisance financé par le Royaume-Uni. Ses membres vivent au sein des collectivités. Ils courent jusqu'à l'embarcation de sauvetage quand ils entendent le klaxon, puis ils la mettent à l'eau. Ils connaissent les moindres rochers et remous de la côte. Ils fournissent des connaissances locales à tous les organismes, y compris à nous, et ils nous permettent d'adapter notre compréhension du monde aux réalités locales. Il s'agit donc d'un volet déterminant de la relation.

La sénatrice Raine : En Colombie-Britannique, une telle relation existe entre les bénévoles et la Garde côtière. Il est bon que vous ayez une expérience opérationnelle à ce chapitre.

M. Allard : En effet.

M. Fry : Nous avons assisté à la conférence nationale de recherche et sauvetage qui a eu lieu à Edmonton en octobre dernier. Outre l'immensité du territoire, il y avait un nombre remarquable de parallèles à établir. Nous nous sentions tout à fait à notre place et à l'aise.

M. McLuskie : Il est important de signaler aussi que l'organisation du RNLI traverse les frontières. Elle est au service de deux gouvernements — le gouvernement irlandais et le gouvernement britannique —, mais elle est gérée en toute impartialité par des bénévoles seulement. L'ensemble du financement provient de boîtes placées dans les vitrines des magasins et de ce genre d'initiatives. Les gouvernements n'y versent pas le moindre sou, et le service est fort efficace.

Le sénateur Munson : Je pense que vous avez partiellement répondu à la question concernant la restructuration financière et la faillite du groupe CHC. Cela a-t-il eu une incidence quelconque sur vos diverses activités de recherche et sauvetage?

M. Allard : Non.

Le sénateur Munson : Pas la moindre?

M. Parsons : Permettez-moi d'aller encore plus loin. Pour des raisons évidentes, nous accordons à notre service de recherche et sauvetage une priorité supérieure à celle d'autres missions d'hélicoptère à l'échelle mondiale. La restructuration du groupe CHC en vertu du chapitre 11 n'a même pas influencé les services quotidiens de la chaîne d'équipage sur les plateformes pétrolières et gazières. Elle n'a pas eu la moindre incidence sur le plan opérationnel.

Pour compléter l'argument de Sylvain, CHC Helicopter Canada ne fait même pas partie de ce processus. De toute façon, il n'y a eu aucun effet.

La vice-présidente : Avant de remercier nos témoins, j'aimerais souhaiter la bienvenue à trois nouveaux membres de notre comité. J'espère que vous avez aimé votre première séance. Malheureusement, le sénateur Forest avait une autre réunion, mais j'aimerais souligner la présence des sénateurs Gold et Christmas. Bienvenue.

Je tiens à dire à nos témoins qu'il était merveilleux de vous accueillir ce soir. Au nom des membres du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, je tiens à exprimer notre gratitude et nos remerciements. Vous nous avez donné beaucoup d'information sur CHC Helicopter, en plus de nous présenter une nouvelle perspective que nous pourrons envisager au fil de nos études. Merci beaucoup.

À la suite d'une motion de session sur la composition des comités sénatoriaux que le Sénat a adoptée au début de décembre, tous les comités ont été invités à ajouter un quatrième membre à leur Sous-comité du programme et de la procédure qui n'est pas membre d'un parti reconnu. Par conséquent, est-il convenu :

Que, conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 7 décembre 2016, le nombre de membres du Sous-comité du programme et de la procédure soit augmenté par un membre sans droit de vote choisi parmi les sénateurs qui ne sont pas membres d'un parti reconnu, désigné après les consultations d'usage?

Des sénateurs : D'accord.

La vice-présidente : S'il n'y a rien d'autre, je rappelle aux sénateurs d'aviser le greffier le plus tôt possible s'ils comptent accompagner le comité à Terre-Neuve-et-Labrador du 5 au 9 mars prochain. Je vous remercie.

Maxwell Hollins, greffier du comité : Je vais vous envoyer un courriel à ce sujet.

(La séance est levée.)

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