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POFO - Comité permanent

Pêches et océans

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans

Fascicule nº 10 - Témoignages du 28 février 2017


OTTAWA, le mardi 28 février 2017

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, auquel a été renvoyé le projet de loi S-203, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois (fin de la captivité des baleines et des dauphins), se réunit aujourd'hui, à 17 h 15, pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour. Je m'appelle Fabian Manning; je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador. Je suis heureux de présider la réunion de ce soir.

Avant de céder la parole à nos témoins, j'inviterais les membres du comité à se présenter, à commencer par le sénateur qui se trouve à ma droite.

Le sénateur Munson : Sénateur Munson, de l'Ontario.

Le sénateur Christmas : Dan Christmas, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Hubley : Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Sinclair : Murray Sinclair, du Manitoba.

Le sénateur McInnis : Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.

Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario. Bon retour parmi nous.

Le président : Merci, mesdames et messieurs les sénateurs.

Ce soir, le comité entreprend l'examen du projet de loi S-203, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois (fin de la captivité des baleines et des dauphins).

Nous sommes heureux d'accueillir notre ancien collègue et l'ancien parrain du projet de loi, l'honorable Wilfred P. Moore. C'est bon de vous revoir à Ottawa, même si ce n'est pas pour longtemps. Au nom des membres du comité, je vous remercie de votre présence ici aujourd'hui. Je vous remercie également de nous aider à entreprendre notre étude.

Je comprends que vous avez préparé un exposé. Je vous invite donc à nous le présenter, sénateur Moore, et je suis certain que nous aurons des questions à vous poser ensuite. Vous avez la parole.

L'honorable Wilfred P. Moore, ancien sénateur, à titre personnel : Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, de m'avoir invité ici aujourd'hui. En tant qu'ancien parrain du projet de loi S-203 et en tant que simple citoyen maintenant, je suis honoré d'avoir l'occasion de contribuer à votre étude sur la Loi visant à mettre fin à la captivité des baleines et des dauphins.

C'est avec enthousiasme et attention que je suivrai ce qui sera un examen très rigoureux des enjeux scientifiques et moraux soulevés dans ce projet de loi. J'espère que, tout comme moi, vous en viendrez à la conclusion que le Canada doit mettre fin progressivement à la captivité des baleines et des dauphins, sauf dans les cas de sauvetage et de réadaptation.

Pour commencer, j'aimerais remercier le sénateur Sinclair d'avoir repris le flambeau à titre de parrain du projet de loi. Merci beaucoup, Murray. Je souhaite que vos efforts portent leurs fruits. Si je le peux, je serai heureux de vous aider à faire passer le projet de loi à la Chambre des communes.

Je vais tenter d'être bref, parce que je veux que nous consacrions le plus de temps possible aux questions des membres du comité. J'aimerais toutefois prendre un moment pour expliquer la justification scientifique et morale du projet de loi S-203 et pour en décrire les détails juridiques. Je vais aussi proposer trois amendements, que le comité pourrait prendre en compte dans le cadre de son étude.

Comme vous le savez, j'ai fait valoir qu'il était cruel et injustifiable de garder les baleines dans des bassins d'observation. Cette conclusion morale est appuyée par des données scientifiques, qui montrent que les baleines, les dauphins et les marsouins, collectivement appelés les cétacés, ont des caractéristiques communes, notamment une grande intelligence, des émotions, la sociabilité, des capacités de communication complexes et un mode de vie en déplacement. Nombre de personnes sont d'avis que ces caractéristiques rendent ces créatures dignes de considération morale.

C'est pourquoi le projet de loi S-203 vise à accorder aux baleines et aux dauphins des protections juridiques raisonnables contre les méfaits de la captivité. De façon spécifique, le projet de loi S-203 vise à les protéger contre le confinement, l'isolement, les problèmes de santé, une durée de vie réduite, des taux de mortalité infantile élevés et la privation sensorielle, qui doit être aiguë pour des créatures qui perçoivent le monde par l'écholocalisation.

Il ne faut pas oublier que les baleines et dauphins sauvages vivent dans des écosystèmes complexes et stimulants; ils interagissent, communiquent et entretiennent des liens étroits avec des groupes familiaux élargis, et franchissent de longues distances. Les baleines et dauphins en captivité passent au contraire leurs journées dans de minuscules bassins de béton. Ils vivent en quasi-isolement ou en isolement complet et ils doivent exécuter des numéros pour divertir les gens.

Au Canada, deux établissements gardent les baleines et les dauphins en captivité : Marineland, un parc d'attractions de Niagara Falls, en Ontario, et l'aquarium de Vancouver. Marineland détient la grande majorité des cétacés en captivité du Canada, soit environ 50 bélugas et dauphins et un épaulard en isolement.

Comme je l'ai dit lors de la deuxième lecture du projet de loi, Marineland achète des baleines capturées en Russie, les reproduit au Canada et les fournit aux aquariums américains, puisqu'en règle générale, les États-Unis ne permettent pas l'importation de baleines prises à l'état sauvage.

Phil Demers, un ancien entraîneur-chef de Marineland que l'on a consulté au sujet du projet de loi, a dit que l'entreprise entraînait les baleines en les privant de nourriture et en leur donnant du poisson contenant du Valium. De plus, Marineland fait actuellement face à 11 accusations de cruauté envers les animaux en ce qui a trait à ses animaux terrestres.

L'aquarium de Vancouver n'a que trois cétacés à l'heure actuelle. Ils ont été sauvés et rétablis et ne pouvaient pas être relâchés. Le projet de loi S-203 permettrait le maintien de ces activités. Toutefois, en novembre dernier, les deux bélugas de l'aquarium de Vancouver sont morts soudainement. La mère, Aurora, qui avait été arrachée à sa famille près de Churchill, au Manitoba, en 1990, est morte peu de temps après sa fille Qila.

L'aquarium de Vancouver s'était engagé à déterminer la cause de ces décès la semaine dernière et — probablement en prévision des audiences à venir — a annoncé un investissement de 20 millions de dollars dans l'agrandissement des bassins pour les baleines. Pour remplir ces bassins, l'aquarium a l'intention d'importer cinq bélugas qui sont présentement loués à des parcs d'attractions américains, dont SeaWorld. L'aquarium de Vancouver a fait valoir qu'il n'allait pas reproduire ces baleines et qu'il éliminerait progressivement l'exposition des bélugas sur une période de 12 ans, jusqu'en 2029.

Tout comme Marineland, l'aquarium de Vancouver s'oppose au projet de loi S-203. Toutefois, cette prise de position me semble contradictoire, puisque l'annonce de la semaine dernière appuyait la proposition morale voulant qu'on ne doive pas reproduire les baleines et que la garde en captivité des baleines doive être éliminée de façon progressive, sauf dans les cas de sauvetage.

J'encourage l'aquarium de Vancouver à expliquer ce manque de cohérence au comité. Je demanderais aussi à l'aquarium de Vancouver de dire publiquement s'il approuve les droits légaux de Marineland de reproduire les baleines et dauphins en captivité et d'en faire l'échange.

L'aquarium de Vancouver prétend que ses activités visent à appuyer la recherche qui est essentielle en vue de la conservation des baleines sauvages. Comme vous le savez d'après la réponse finale que j'ai présentée lors de la deuxième lecture, l'éminent spécialiste des sciences de la mer Sidney Holt a qualifié cette revendication comme étant « au mieux spécieuse », puisque la captivité n'a pas contribué de façon significative à la conservation de quelle qu'espèce de cétacé que ce soit. Aussi, plus de 20 biologistes marins de partout dans le monde ont donné leur appui au projet de loi S-203; Jane Goodall a donné son appui aux politiques du projet de loi S-203 et a fait valoir que le programme de surveillance des bélugas de l'aquarium de Vancouver n'était plus défendable sur le plan scientifique.

Sur le plan légal, le projet de loi S-203 exerce les pouvoirs fédéraux en ce qui a trait au commerce international, à la cruauté criminelle envers les animaux et aux mammifères marins dans les eaux côtières. De façon précise, le projet de loi S-203 interdit la capture, l'importation et l'exportation par l'entremise de modifications à la Loi sur les pêches et à la Loi sur la protection d'espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial. Il crée aussi une infraction de cruauté criminelle envers les animaux, qui interdit la reproduction des cétacés ou la garde en captivité de nouveaux cétacés. Tout comme pour les autres infractions visant une pratique en particulier, comme les combats d'animaux ou l'appâtage, ou le relâchement des oiseaux dans le but de les abattre, cette disposition vise à condamner une pratique cruelle par l'entremise d'une pénalité appropriée.

En vertu du projet de loi S-203, le sauvetage et la réadaptation seront permis, et les deux parcs marins pourront garder les cétacés présentement en captivité dans leurs établissements, dont certains vivront encore pendant des dizaines d'années. En vertu du projet de loi S-203, il faudra obtenir un permis pour utiliser les cétacés à des fins de divertissement.

Je ne veux pas trop prendre de temps; je vais donc rapidement vous présenter les trois amendements proposés au projet de loi S-203, que le comité pourra prendre en compte en vue de l'améliorer.

Premièrement, je sais que certains s'inquiètent du caractère trop large des restrictions relatives à l'importation et à l'exportation, telles qu'elles sont rédigées. Selon leur formulation actuelle, ces restrictions pourraient s'appliquer à des spécimens scientifiques morts ou aux défenses de narval qui passent la frontière. Cela n'était certainement pas mon intention; ainsi, on pourrait modifier l'article 4 afin d'expliquer que la restriction s'applique uniquement aux cétacés vivants et au matériel reproductif pouvant être utilisé aux fins de la reproduction en captivité.

Deuxièmement, comme je l'ai dit à la Chambre, je suis en faveur de la modification de la sanction pénale de l'article 2 afin d'en faire une infraction punissable par procédure sommaire sans peine d'emprisonnement, mais qui soit associée à une amende importante pour prévenir et condamner la reproduction des cétacés.

Troisièmement — et c'est le point le plus important —, je vous encourage fortement à songer à apporter une modification supplémentaire aux restrictions en matière d'importation et d'exportation de l'article 4. De façon précise, j'ajouterais une exception afin de permettre l'importation ou l'exportation de cétacés vivants dans le but de déplacer les baleines et dauphins à la retraite vers des refuges en mer, afin qu'ils vivent dans de meilleures conditions, qui sont raisonnablement naturelles.

Lori Marino, une scientifique que je recommande au comité et qui appuie le projet de loi S-203, est présidente du Whale Sanctuary Project, un organisme américain qui travaille à créer de tels refuges, notamment dans l'État de Washington, en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse. J'aimerais beaucoup voir le Canada mener un tel projet novateur et inspirant. Ne serait-il pas merveilleux de voir l'aquarium de Vancouver être un partenaire de premier plan pour un tel projet? Je peux vous dire que je l'appuierais à 100 p. 100 si tel était le cas.

Parmi les gens qui appuient le projet de loi S-203 se trouvent Marc Bekoff de l'Institut Jane Goodall; Gabriela Cowperthwaite, réalisatrice du documentaire Blackfish distribué par CNN; Ric O'Barry, ancien entraîneur de Flipper et sujet du documentaire The Cove, gagnant d'un Oscar, sur la chasse aux dauphins; la Fédération des sociétés canadiennes d'assistance aux animaux; la marraine éventuelle du projet de loi à la Chambre des communes, Elizabeth May; 5 775 Canadiens qui ont signé la pétition présentée à la Chambre et plus de 27 000 personnes qui ont signé une pétition internationale de change.org.

Le maire de Vancouver, Gregor Roberston, s'est opposé publiquement à la reproduction en captivité et le maire de Niagara Falls, Jim Diodati, a parlé d'une occasion pour Marineland de se réinventer.

J'aimerais maintenant citer l'allocution de notre ancienne collègue, la sénatrice Janis Johnson, prononcée devant la Chambre des communes le 22 mars 2016 :

Honorables sénateurs, je suis d'avis que le maintien des baleines en captivité ne durera pas éternellement. Il faut évoluer. L'opinion publique a changé. Les données scientifiques montrent clairement qu'il est inacceptable de maintenir des baleines en captivité à des fins de divertissement. Le projet de loi nous donne l'occasion de nous ranger le plus tôt possible du bon côté dans ce débat. Il ne s'agit pas d'un problème local, honorables sénateurs, mais bien d'un problème moral.

Ainsi, je crois qu'il est maintenant temps d'agir, mesdames et messieurs les sénateurs.

Pour conclure, j'aimerais vous remercier à l'avance du travail que vous consacrerez à ce projet de loi. La décision revient au comité, au Sénat et à la Chambre des communes, mais à titre de commentaire final, j'encouragerais le comité à garder en tête la souffrance des baleines et des dauphins en captivité. Nous en savons suffisamment sur ces créatures pour comprendre ce qu'elles doivent vivre lorsqu'elles sont gardées en captivité : l'isolement, le confinement, les problèmes de santé, la privation sensorielle et le traumatisme associé aux taux élevés de mortalité infantile. Nous en savons suffisamment sur ces créatures pour savoir que c'est mal.

Je vous demande de tenir compte des données probantes et aussi de penser avec votre cœur. Je crois que vous en viendrez à la conclusion que les baleines et les dauphins méritent de vivre librement, avec les autres espèces, en pleine mer. Merci.

Le président : Merci, sénateur Moore.

La sénatrice Hubley : Sénateur Moore, nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui. Nous sommes très heureux de vous revoir.

Vous avez fait référence aux nombreux courriels que nous avons reçus et j'aimerais que nous en parlions davantage. Comme vous le savez, l'aquarium de Vancouver a annoncé de nouveaux projets de recherche sur le béluga. Il a dit qu'il accroîtrait son programme de recherche sur les mammifères marins, qu'il récupèrerait les bélugas prêtés à d'autres établissements et qu'il agrandirait l'habitat des bélugas. Toutefois, d'ici la fin de 2029, l'aquarium cesserait d'exposer les bélugas et mettrait fin à son programme de recherche et de conservation des bélugas.

Que pensez-vous des annonces de l'aquarium de Vancouver?

M. Moore : J'ai lu cela avec beaucoup d'intérêt. On n'aborde pas vraiment la question clé : ces créatures ne devraient pas vivre dans des piscines. C'est un fait reconnu.

J'ai écouté ce que les représentants de l'aquarium avaient à dire au sujet de 2029. Je ne sais pas ce que signifie cette date, sauf que l'aquarium pense pouvoir reprendre deux baleines qu'il a prêtées ou louées — peu importe — à un autre établissement. Ce transfert pourrait leur coûter la vie. Je ne sais pas à quoi ils s'attendent. Si c'est mal en 2029, c'est mal en 2017. Cela ne devrait pas arriver.

Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, la société est rendue ailleurs. L'aquarium devrait entrer en contact avec des gens comme Lori Marino et offrir un habitat plus naturel aux cétacés qui ne peuvent pas être relâchés dans la nature.

La sénatrice Hubley : Dans son courriel, l'aquarium fait valoir que votre projet de loi nuira à la recherche sur les bélugas. Il sous-entend aussi que votre projet de loi nuira au sauvetage des mammifères marins et mettra un terme à la recherche sur les cétacés dans son ensemble. Je crois que vous avez lu cette note. Qu'en pensez-vous?

M. Moore : Ce n'est tout simplement pas vrai. Le projet de loi ne vise pas à mettre fin à la recherche; il prévoit le maintien de la recherche sur les cétacés que l'aquarium a en sa possession. Il prévoit aussi la recherche sur les cétacés qu'il aura secourus et qui ne pourront pas être relâchés dans la nature. L'aquarium pourra garder ces cétacés et effectuer des recherches. Ce que vous venez de dire n'est tout simplement pas vrai.

Le sénateur Munson : Merci, Willie, de votre présence ici aujourd'hui. L'aquarium de Vancouver, qui représente l'autre camp, est très actif et a transmis à certains d'entre nous de nombreux renseignements sur votre projet de loi.

Il réitère que l'étude et l'observation des cétacés en captivité nous ont permis de mieux les comprendre et nous ont aidés à protéger les populations sauvages. Vous avez dit que vous croyiez que l'étude de ces mammifères marins devait se poursuivre, mais croyez-vous qu'elle a une valeur scientifique?

M. Moore : Les scientifiques qui témoigneront devant le comité seront probablement mieux placés que moi pour répondre à cette question.

Je vous ai déjà fait part de certains commentaires. En voici un de Jane Goodall :

On ne peut plus se servir de motifs scientifiques pour justifier l'existence de programmes d'élevage de cétacés à l'aquarium de Vancouver, ou le prêt de bélugas à Sea World. Cela est démontré par le haut taux de mortalité associé à ces programmes d'élevage et par le fait que l'aquarium continue d'utiliser ces animaux dans des spectacles interactifs afin de divertir les foules. L'élimination progressive de ces programmes est une conséquence naturelle de notre vision évolutive des animaux non humains qui partagent cette planète avec nous.

Comme l'a fait valoir Sidney Holt, cette recherche est, au mieux, spécieuse.

Je vais vous parler de ce qui s'est passé en Nouvelle-Écosse l'automne dernier. Le sénateur McInnis est peut-être au courant de cette histoire puisqu'on en a parlé à quelques reprises dans les journaux locaux. C'est l'exemple d'une vraie interaction entre des humains et un cétacé.

Deux pêcheurs travaillaient sur leur bateau à marée basse à Digby, en Nouvelle-Écosse, sur la rive de la baie de Fundy. Un jeune rorqual à bosse est venu tout près d'eux et restait là, tranquille. En regardant le rorqual, les pêcheurs ont remarqué qu'un filet de pêche était pris dans sa bouche. Le rorqual a attendu que les pêcheurs le libèrent de ce filet, puis il est resté là un temps et est reparti.

Ce rorqual à bosse savait ce qu'il faisait. Il demandait de l'aide. Les pêcheurs n'en revenaient pas. Voilà ce que nous sommes. Voilà ce que nous devrions faire : entrer en relation avec ces créatures, pas les mettre dans des piscines.

Le sénateur Munson : J'aimerais faire un suivi, rapidement. Dans ses documents, l'aquarium de Vancouver parle d'économie et d'emploi. Il dit qu'il a 450 personnes à son emploi, notamment des médecins, des scientifiques et des biologistes. C'est un important moteur de l'économie et les employés prennent vraiment bien soin de ces animaux, qui ont été rescapés sur des plages et qui ne pourraient pas survivre si on les relâchait dans la mer, en raison de certains problèmes.

L'élimination progressive du programme se fera sur une longue période, jusqu'en 2029. Si le projet de loi est adopté, comment un établissement comme l'aquarium de Vancouver pourra-t-il fonctionner si les parents ne peuvent plus amener leurs enfants voir des animaux en captivité? Comment cela va-t-il fonctionner?

M. Moore : C'est l'aquarium de Vancouver qui a fait l'annonce pour 2029. Le projet de loi permet la recherche continue. Il ne met pas un terme à la recherche. Il n'élimine pas ces emplois. Il empêche les gens d'attraper les baleines sauvages, de reproduire les baleines et de les louer ou de les vendre à d'autres établissements. L'aquarium de Vancouver gère le plus grand aquarium d'Europe, en Espagne. Est-ce qu'il a un programme de reproduction? Est-ce qu'il fournit des baleines, des cétacés à cet établissement?

C'est bien de parler d'emploi et tout cela, mais quelle est la vraie raison d'être de l'aquarium? Est-ce vraiment la santé et le bien-être de ces cétacés ou est-ce plutôt l'argent?

Le sénateur Plett : J'ai aussi plusieurs questions à poser, mais je vais commencer par une ou deux, puis j'attendrai la prochaine ronde.

J'aimerais tout d'abord vous remercier de votre présence ici aujourd'hui, sénateur Moore. Je me demandais si, dans le cadre de l'élaboration du projet de loi, qui ne touche en fait que deux établissements au Canada, vous êtes entré en contact avec les responsables de l'aquarium de Vancouver ou de Marineland, ou si vous avez visité l'un ou l'autre de ces établissements qui ont ces petites piscines dont vous parlez.

M. Moore : J'ai visité l'aquarium de Vancouver à quelques reprises. Les responsables de Marineland ont communiqué avec moi une fois et voulaient que je parle à leur conseiller juridique, ce que je n'étais pas prêt à faire.

Le sénateur Plett : Je suppose que cela fait un bon moment que vous êtes allé à l'aquarium de Vancouver et que vous n'y êtes pas retourné depuis que vous avez entrepris de rédiger ce projet de loi. Est-ce exact?

M. Moore : C'est exact.

Le sénateur Plett : Quelles sont les preuves de la souffrance des mammifères marins de l'aquarium de Vancouver ou de Marineland?

M. Moore : La souffrance?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Moore : Ces mammifères marins ne souffrent pas, sénateur, ils meurent. Ils meurent. On les reproduit. Ils ne vivent pas plus de deux ou trois ans. On sépare les petits de leur mère. Les mères se laissent couler au fond de la piscine et se frappent la tête contre ses parois parce qu'elles sont en détresse.

Le sénateur Plett : Quel âge avait Aurora lorsqu'elle est morte?

M. Moore : Je ne sais pas quel âge elle avait. Ce que je dis, c'est que peu importe son âge au moment de sa mort, elle aurait vécu beaucoup plus longtemps en liberté.

Le sénateur Plett : Suggérez-vous alors qu'on mette fin à la chasse aux bélugas au Nunavut? Parce qu'Aurora aurait pu s'y trouver et vivre moins longtemps.

M. Moore : Je ne suis pas contre le droit traditionnel des Inuits de chasser le béluga pour nourrir leur communauté.

Le sénateur Plett : Mais ces bélugas souffrent, puisqu'ils sont chassés. Si vous êtes en croisade pour sauver les baleines et pour qu'elles cessent de souffrir, pourquoi ne voulez-vous pas mettre fin au massacre des baleines dans l'Arctique et à la garde en captivité dans la Sud?

M. Moore : Je ne savais pas qu'on massacrait les baleines dans l'Arctique.

Le sénateur Plett : Je parle de l'abattage des baleines.

M. Moore : Si c'est comme cela que ces Canadiens survivent et si cela leur permet de vivre sainement sans se faire imposer le mode de vie du Sud, alors je suis d'accord.

Le sénateur Plett : Je vais poser une autre question, monsieur le président, puis j'attendrai la prochaine série.

La population de bélugas du Saint-Laurent a beaucoup diminué. Il n'en reste que 800 environ, et ce n'est certainement pas la faute de Marineland ou de l'aquarium de Vancouver. Le béluga est gravement menacé d'extinction.

En mettant fin au programme de recherche sur le béluga au Canada, on mettrait immédiatement fin à la formation continue dont ont besoin nos premiers répondants pour sauver, rétablir et relâcher les cétacés en détresse. Voilà ce que nous disent les responsables de l'aquarium et de Marineland.

Proposez-vous de fermer le seul centre de sauvetage des mammifères marins du Canada? C'est ce qui se produirait.

M. Moore : Je ne demande la fermeture d'aucun centre de sauvetage.

Le sénateur Plett : S'ils ne font plus d'affaires, ils fermeront leurs portes.

M. Moore : Qui a dit qu'ils ne feraient plus d'affaires?

Le sénateur Plett : Ce sont les établissements.

M. Moore : Je n'ai pas dit cela. Eux l'ont dit peut-être, mais pas moi.

Le sénateur Plett : Ils viendront témoigner devant nous.

M. Moore : Je ne dis pas qu'ils doivent fermer leurs portes. Je l'ai déjà dit : la recherche et la prise en charge des cétacés qui ne peuvent pas être relâchés dans la nature vont se poursuivre. C'est ce que prévoit le projet de loi.

Le sénateur Plett : S'ils les relâchent dans la nature.

M. Moore : S'ils le peuvent; si c'est possible. Si ce n'est pas possible, alors ils peuvent les garder dans leurs installations et effectuer des recherches. Le projet de loi prévoit cela, monsieur le sénateur. Ce que les représentants ont dit, dans leur...

Le sénateur Plett : Nous allons recevoir les représentants de Marineland et de l'aquarium de Vancouver.

Le président : Vous vouliez ajouter quelque chose, sénateur Moore?

M. Moore : J'allais seulement dire qu'une loi similaire — mais pas aussi exhaustive — a été adoptée en Californie en septembre et l'établissement a mis fin à la garde des cétacés en captivité. Fait intéressant, c'était appuyé par SeaWorld.

Le sénateur McInnis : Merci, sénateur Moore, de votre présence ici aujourd'hui. Vous n'abandonnez pas, même à la retraite.

M. Moore : C'est la même chose pour tous les sénateurs ou anciens sénateurs.

Le sénateur McInnis : Je tiens à dire que je ne suis pas un expert — et je crois que personne ici ne l'est —, mais je garde l'esprit ouvert. Bien que j'aie beaucoup lu sur le sujet dans le cadre de ma recherche, mon idée n'est pas encore faite. Vous avez dit que la garde en captivité de ces créatures dans ce que vous appelez des « piscines » était « immorale ». Ce sont des créatures très intelligentes et émotives.

M. Moore : Oui.

Le sénateur McInnis : Elles nagent apparemment 150 kilomètres par jour, plongent à 200 mètres de profondeur et vivent en troupeaux.

J'ai aussi lu sur leurs problèmes de santé... le stress, l'isolement social, les plaies ouvertes, la perte de dents et l'entraînement par privation de nourriture.

On lit cela et on se demande qui peut bien être contre ce projet de loi.

Ensuite, on pense au volet éducatif de ces établissements : apparemment, 4 000 enfants handicapés ou ayant des besoins spéciaux les visitent chaque année, en plus de milliers d'écoliers, de bénéficiaires de la fondation Fais-Un-Vœu et des participants aux programmes collégiaux sur la mammalogie. On met de l'avant le volet éducatif de ces établissements.

Lorsque les étudiants universitaires ou même les étudiants du secondaire visitent ces établissements, ils peuvent être intéressés et peut-être même songer à devenir scientifiques ou biologistes de la vie marine. On apprend aussi que 80 scientifiques de renommée mondiale, venant de partout dans le monde, ont rédigé une lettre dans laquelle ils font valoir que ces mammifères en captivité au Canada reçoivent des soins de très grande qualité. De plus, le président-directeur général de l'aquarium de Vancouver, John Nightingale, a dit que l'élimination progressive du programme sur les baleines et les dauphins mettrait fin à la recherche sur les cétacés et que nous ne pouvions pas nous fier à la disponibilité variable des mammifères rescapés.

Je vais vous poser une question sur la dernière partie dont je viens de parler et non sur les aspects moraux ou bouleversants de la chose : quelle est selon vous l'importance du volet éducatif de ces établissements et des scientifiques de renommée mondiale? Quel est leur poids dans cette affaire?

M. Moore : Le poids de leurs déclarations?

Le sénateur McInnis : De leurs déclarations et de façon générale, le poids du volet éducatif de ces établissements et de la recherche des scientifiques qui utilisent ces animaux en captivité.

M. Moore : Je ne m'y oppose pas, monsieur le sénateur. Je reconnais cela. J'ai de jeunes amis qui sont des biologistes de la vie marine et qui travaillent avec les baleines et les requins. Je suis sensible à cela.

Le projet de loi ne met pas fin à la recherche. Il permet la recherche continue sur les cétacés que ces établissements ont en leur possession et sur les autres cétacés qui seront rescapés et qui ne pourront pas être relâchés dans la nature. Cela semble faire partie de l'historique de ces établissements. Bien que Marineland soit un lieu de reproduction, l'aquarium de Vancouver accueille des animaux rescapés et fait de la recherche. Je ne dis pas qu'il faut mettre fin à cela. J'en comprends l'importance.

Il s'agit toutefois d'un habitat non naturel pour ces grandes créatures en mouvement, qui se retrouvent coincées dans de petites piscines.

Le sénateur McInnis : C'est juste, mais ces gens disent qu'on ne peut pas se fier à la disponibilité des animaux rescapés.

M. Moore : Qui dit cela? Qui sont ces gens?

Le sénateur McInnis : John Nightingale a dit cela.

M. Moore : Je ne sais pas quel est l'inventaire de cet établissement. Je suis certain que si vous lui posez la question, il vous dira combien d'animaux rescapés son établissement a accueillis. Ils sont nombreux, selon ce que je comprends, parce qu'il les a souvent évoqués pour justifier sa recherche. Selon ce qu'il a dit dans le passé, ces animaux sont disponibles.

Il y a aussi d'autres façons d'éduquer les gens. On ne doit pas se limiter à cela. D'autres établissements aux États- Unis se réinventent et se réorganisent pour offrir la même éducation sans avoir de cétacés en captivité. Ils sont capables de le faire. Nous pouvons suivre leur exemple. Nous devrions entrer en contact avec ces établissements et nous en inspirer.

J'espère que cela répond à votre question.

Le sénateur McInnis : Mais vous comprenez le défi auquel est confronté le comité. C'est pourquoi j'ai hâte d'entendre les experts qui témoigneront devant nous. J'aimerais entendre ce qu'ils ont à dire parce que pour le moment, après avoir fait ma recherche et lu les documents, j'ai l'impression de jouer à pile ou face. On ne peut pas prendre une décision responsable de cette façon.

Je veux l'entendre. Je comprends ce que vous dites. Je comprends l'émotion. C'est une question qui suscite des émotions. Je dois tenir compte de tous les renseignements disponibles et prendre la meilleure décision possible, mais c'est une question difficile et j'ai hâte d'entendre les prochains témoins, monsieur le président.

Je respecte votre démarche. Vous étiez un sénateur distingué et vous êtes certainement un citoyen distingué de la Nouvelle-Écosse. Vous n'auriez pas entrepris de parrainer ce projet de loi si vous ne croyiez pas fermement que c'était la bonne chose à faire, mais cela représente un défi.

M. Moore : Je le sais, monsieur le sénateur. C'est la raison d'être du Sénat. Notre travail n'est pas facile. Nous étudions souvent des sujets nouveaux. Nous examinons tous les volets d'une question et c'est tout ce que je demande au comité de faire pour ce projet de loi.

Je sais que ce n'est pas facile, mais je crois que j'ai raison. Je vous demande de garder l'esprit ouvert et d'écouter les témoins. C'est tout ce que je vous demande de faire, parce que vous entendrez de bons témoins, des deux côtés. Je sais que vous allez entendre de bons témoins qui appuient le projet de loi.

Le sénateur McInnis : Merci beaucoup.

Le sénateur Enverga : Bienvenue, mon ami Willie. Vous êtes maintenant libre, parce que vous n'êtes plus au Sénat.

M. Moore : Il fallait que cela arrive, monsieur le président.

Le sénateur Enverga : J'espère que vous profitez de cette liberté.

Les représentants de Marineland m'ont fait parvenir des documents. Ils ont dit que la Société de protection des animaux de l'Ontario avait visité leur établissement la semaine dernière ou il y a deux semaines, et qu'elle n'avait décelé aucun problème ni élément préoccupant. Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet? Lorsqu'on dit qu'il n'y a pas d'élément préoccupant, est-ce que cela veut dire que les choses se passent bien? Qu'en pensez-vous?

M. Moore : Je ne sais pas. Je ne suis pas au courant du dossier. J'ai vu aux nouvelles que l'établissement était accusé de quelque chose par un groupe de défense des animaux ou en vertu d'une loi. Je ne connais rien de ce dossier, alors je ne peux pas le commenter.

Le sénateur Enverga : Merci de l'excellent travail que vous avez fait ici. Vous avez été un membre important du Sénat et nous vous respectons pour tout ce que vous faites.

M. Moore : Merci, cela me touche.

Le président : Nous commençons maintenant la deuxième série de questions.

Le sénateur Munson : J'allais vous appeler M. Moore, mais ce serait bizarre. Vous avez parlé d'un permis provincial; à quoi servirait-il? En quoi cela changerait-il les choses? Pouvez-vous nous expliquer ce qu'un tel permis signifierait?

M. Moore : Les cétacés sont considérés comme des biens. Comme ce sont des biens, il faut que quelqu'un en régisse l'utilisation et la conservation. Les lois provinciales existent. Il me semble que les provinces devraient avoir le dernier mot en ce qui a trait à l'octroi de permis.

Le sénateur Munson : Quels autres pays ont interdit la garde en captivité, l'exposition publique, l'importation, l'exportation, la capture et l'utilisation des mammifères sauvages et marins à des fins de divertissement? Avez-vous une liste de ces pays? Ce serait bien de l'avoir et de savoir pourquoi ils ont fait ce choix. Si vous ne l'avez pas avec vous, vous pourrez nous la transmettre plus tard.

M. Moore : J'ai cette liste, mais il me faudra du temps. Je pourrai l'envoyer au greffier et vous pourrez la transmettre aux membres du comité, monsieur le président. Ces pays sont nombreux et leur décision est fondée sur nombre des éléments qui se retrouvent dans le projet de loi.

Le sénateur Munson : Comme l'a fait valoir le sénateur McInnis, nous gardons l'esprit ouvert et nous allons entendre plusieurs témoins.

Ceux qui s'opposent au projet de loi évoquent souvent la question de la criminalité ou d'une infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité, comme vous l'avez décrite. De nombreux médecins et scientifiques travaillent dans ces établissements. Je reconnais ce que vous dites. C'est une question très sensible. Je comprends que la captivité n'est pas une bonne chose, mais les gens qui travaillent dans le domaine depuis 20 à 30 ans ont rescapé les baleines sur les plages et s'en servent pour leur travail scientifique. Ils ont à cœur le bien-être de ces animaux. Ce qui suscite le débat ou la discussion, c'est le fait qu'ils seraient étiquetés à titre de criminels, que leur travail constituerait une infraction criminelle.

Que répondez-vous à cet argument?

M. Moore : Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, j'ai proposé d'envisager de modifier cette disposition pour retirer cet aspect.

Au départ, le projet de loi prévoyait la création d'un nouvel acte criminel et l'imposition d'une amende symbolique. En vue d'essayer d'arriver à un projet de loi qui conviendrait à tous, j'ai communiqué avec le sénateur Claude Carignan, le leader des sénateurs conservateurs au Sénat, et j'ai convenu de modifier cette disposition pour que cela devienne seulement une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et d'augmenter l'amende à 200 000 $, parce que nous avons pensé aux entités qui pourraient commettre ce que nous voulons éviter. Il s'agirait principalement de sociétés. Ce ne seraient pas des particuliers.

L'acte criminel associé à cette disposition a été retiré. Nous devrions envisager cela dans l'amendement que je vous propose d'adopter. Cela n'a aucun effet sur les scientifiques et leurs travaux. Cela ne met pas un frein à la recherche. Le projet de loi permet la recherche. Il ne crée pas un acte criminel, ce que n'est pas la recherche.

Le sénateur Munson : Je vous en remercie beaucoup. J'ai une petite question concernant le processus actuel. Vous êtes l'un des sénateurs — en compagnie des regrettés grands sénateurs Norm Atkins, Mike Forrestall et j'en passe — à m'avoir encouragé il y a très longtemps à mes débuts il y a environ 14 ans lorsque j'ai mentionné avoir une idée au sujet de l'autisme en vue d'instaurer la Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme au moyen d'un projet de loi. C'est un enjeu qui touche les mères, les pères et les enfants. J'ai travaillé à ce dossier, j'ai fait une déclaration en ce sens, et la question a fait l'objet d'une interpellation. J'ai exercé des pressions pour que le comité des affaires sociales en soit saisi, et la question a finalement été débattue.

Il a fallu trois ans au Sénat pour adopter le projet de loi. Cela n'aurait pas dû prendre trois ans. Il y avait une certaine opposition concernant le préambule et les divers éléments auxquels un tout nouveau sénateur ne s'attend pas. Le projet de loi a finalement été adopté.

Monsieur Moore, vous êtes un ancien sénateur, et nous avons devant nous un projet de loi qui doit être soumis à ce processus. Ensuite, si tout se passe bien, le projet de loi est envoyé à la Chambre des communes et doit être encore une fois soumis à ce processus. C'est un projet de loi d'initiative parlementaire, et nous sommes bien au fait que les projets de loi d'initiative parlementaire font légion.

Est-ce réaliste de croire que ce projet de loi peut se rendre loin? Réussira-t-il à rallier suffisamment de voix sur une période raisonnable pour accomplir quelque chose que vous et des milliers d'autres considérez comme extrêmement important?

M. Moore : Lorsque j'étais au Sénat, des gens des deux côtés ont communiqué avec moi. Je crois que le projet de loi sera adopté par le Sénat, s'il est mis aux voix, mais il doit d'abord être examiné par le comité avant d'être renvoyé au Sénat.

Je sais que des députés de la Chambre des communes ont à l'œil ce projet de loi. Ils savent que le projet de loi doit d'abord suivre son cours au Sénat. Je suis surpris qu'il ait fallu autant de temps pour nous rendre jusqu'à ce point. J'avoue que cela me dérange de ne plus être sénateur. Je ne peux pas siéger au comité, poser des questions ou même me prononcer sur la question.

Cependant, bon nombre de règles régissent le Sénat, et il arrive parfois que le second examen objectif puisse ralentir un peu le cours des choses. Les sénateurs, les délibérations et la qualité des témoins me donnent bon espoir que le projet de loi ira de l'avant. J'espère qu'il passera à la prochaine étape d'ici un ou deux mois. J'espère qu'il ne sera pas freiné par une autre pause estivale ou autre chose comme l'an dernier. Il ne sied pas au Sénat de le faire. Si nous sommes vraiment la chambre de second examen objectif pour délibérer d'un enjeu, faisons-le.

Je demeure optimiste, sénateur. Qu'avez-vous d'autre?

Le sénateur Munson : Merci beaucoup.

Le président : À titre informatif, j'aimerais mentionner aux membres du comité et au sénateur Moore que nous avons une longue liste de personnes qui souhaitent prendre la parole au sujet du projet de loi. En fait, ce projet de loi a suscité de l'intérêt des deux côtés; c'est magnifique. Nous faisons de notre mieux pour accélérer le processus. Nous avons été informés que de nouvelles personnes se sont manifestées aujourd'hui. Nous verrons ce que nous pourrons faire à ce sujet. Nous faisons de notre mieux.

Le sénateur Plett : Sénateur Moore, je suis d'accord avec votre dernier commentaire. J'espère toujours être au Sénat lorsque mon projet de loi d'initiative parlementaire ira finalement de l'avant.

M. Moore : Je l'ai appuyé. J'ai pris la parole à ce sujet. Vous le savez. Je ne l'ai pas bloqué.

Le sénateur Plett : Je le sais. Il me reste encore huit ans au Sénat, et j'espère que je réussirai à le faire d'ici là. Sénateur Moore, il n'en reste pas moins que vous l'avez appuyé, et je vous en suis reconnaissant. Il arrive parfois d'être du même côté et parfois d'être du côté de la vertu.

M. Moore : Don, j'ai besoin de votre aide. Rendez-moi la pareille.

Le sénateur Plett : Sénateur Moore, vous avez parlé de modifier la disposition pour en faire une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Cependant, une déclaration de culpabilité par procédure sommaire demeure une déclaration de culpabilité; cela ferait d'eux quand même des criminels. Néanmoins, ce n'est pas une question, mais bien une observation.

J'ai visité l'aquarium trois ou peut-être quatre fois depuis que vous avez présenté ce projet de loi. J'ai visité Marineland et j'ai en fait visité l'aquarium la fin de semaine dernière. Évidemment, Aurora et Qila étaient déjà décédées lors de ma visite. En tant que législateur concerné par le dossier, si je veux être parrain ou porte-parole d'un projet de loi, je crois que je dois me rendre à la source pour obtenir des renseignements. Voilà pourquoi j'y suis allé; je voulais recueillir des faits et comprendre pourquoi ces baleines sont mortes.

Ces morts laissent complètement perplexes les vétérinaires et l'équipe de spécialistes des sciences de la mer. Ils sont sidérés. Je suis certain que vous le croyez, et je suis d'accord. Comme vous le savez, une telle situation ne s'est jamais produite, à savoir que deux baleines meurent dans des circonstances mystérieuses alors qu'elles étaient en parfaite santé avant que les symptômes apparaissent. Aucune possibilité n'a évidemment été écartée.

J'ai peut-être mal lu un élément dans votre exposé, mais je trouve intéressant que vous soyez au courant de la cause de la mort de ces deux bélugas lorsque vous insinuez qu'ils sont morts, parce qu'ils étaient en captivité. Des scientifiques et des chercheurs sont venus de partout dans le monde pour visiter le site et essayer d'élucider ce mystère, parce que ce n'est pas normal.

Connaissez-vous la cause de la mort de la centaine de baleines sauvages qui se sont mystérieusement échouées sur les côtes indiennes l'an dernier? Il semble que vous soyez au courant de la cause de la mort de ces baleines. Pourquoi ces baleines sont-elles mortes ou ne savez-vous tout simplement pas la cause de la mort de ces baleines?

M. Moore : J'ai vu les reportages, sénateur. Je ne suis pas un scientifique. Des scientifiques de partout dans le monde ont émis des opinions à cet égard, et un témoin prendra la parole au sujet du projet de loi.

Le sénateur Plett : Lorsque je vous ai demandé si vous aviez des faits qui expliquent pourquoi les baleines sont peut- être en détresse — je ne me rappelle plus la question exacte — ou la moindre preuve que les mammifères marins à l'aquarium de Vancouver souffrent, vous avez répondu qu'ils sont morts. Cela prouve-t-il qu'ils souffrent, parce qu'ils sont en captivité?

M. Moore : Je crois que c'est le cas. Ce n'est pas leur habitat naturel.

Le sénateur Plett : Pourquoi une centaine de baleines sauvages sont-elles mortes dans l'océan Indien?

M. Moore : Je n'en sais rien.

Le sénateur Plett : Il s'agit par contre de leur habitat naturel.

M. Moore : Des scientifiques devront en trouver la cause.

Le sénateur Plett : Vous nous donnez des réponses, mais vous ne les expliquez pas.

Sénateur Moore, vous avez parlé de Phil Demers de Marineland. Je crois qu'il témoignera peut-être devant le comité. Si Phil Demers nous écoute ou nous regarde, cela lui donnera peut-être l'occasion de se préparer à répondre lui- même à ces questions. Cependant, cela vous préoccupe-t-il que les constantes allégations de M. Demers aient toutes été non fondées et que cela n'ait mené à aucune accusation contre Marineland?

Cela vous préoccupe-t-il aussi que M. Demers ne soit même pas qualifié pour s'occuper d'un chat domestique et qu'il n'ait absolument aucune qualification pour évaluer le bien-être des animaux, alors qu'il se présente prétendument comme un témoin expert?

Cela vous préoccupe-t-il aussi que M. Demers ait publiquement affirmé avoir pris illégalement des médicaments spécialisés pour les mammifères marins pour son usage personnel lorsqu'il travaillait à Marineland?

M. Moore : Je ne suis pas au courant des affirmations que vous faites, sénateur.

Le sénateur Plett : Cela vous préoccupe-t-il que cette personne soit un témoin expert ici?

M. Moore : M. Demers répondra lui-même à vos questions lorsqu'il témoignera devant le comité, ce que j'espère qu'il fera.

Le sénateur Plett : Cela vous préoccupe-t-il?

M. Moore : Je n'en connais pas les faits, et je ne répondrai pas à des questions hypothétiques.

Le sénateur Plett : Cela n'a rien d'hypothétique. Merci.

Le président : Merci, sénateur. Je suis persuadé que ces délibérations seront très intéressantes.

La sénatrice Hubley : J'aimerais traiter de l'aspect pédagogique de la situation. Je ne cherche pas à me prononcer sur le caractère adéquat ou non de la chose. Si nous plaçons un animal sauvage dans une situation qui ne favorise pas son bien-être, cela a-t-il une valeur pédagogique? Voilà ce dont je veux débattre; je ne me prononce pas d'un côté ou de l'autre.

Je tenais à vous informer que le Collège vétérinaire de l'Atlantique à Charlottetown réalise beaucoup de recherches. Le personnel y soigne de petits et grands animaux trouvés sur des fermes, mais il utilise cette réalité dans leurs programmes pédagogiques. Des stages d'été y sont offerts pour les enfants qui ont l'occasion de voir les soins prodigués aux animaux et de comprendre que certains animaux se rétablissent tandis que d'autres ne survivent pas; c'est la vie.

J'attends de voir si un tel programme pédagogique a une réelle valeur pour les jeunes et a une approche plus authentique par rapport à ce que devrait être l'éducation concernant des animaux de cette taille et de cette nature.

Je crois que nous pourrons aussi poser cette question à certains de nos scientifiques. Avez-vous vu ou entendu des exemples de centres qui prennent soin d'animaux — pas les aquariums proprement dits — et qui offrent un programme pédagogique différent? Nous ne qualifions pas ce qu'ils font comme de l'éducation tout simplement parce qu'ils présentent un animal dans un environnement que nous ne considérons peut-être pas comme sain pour lui.

M. Moore : C'est une question intéressante. Comme je l'ai mentionné plus tôt, SeaWorld en Californie se réinvente sans garder en captivité des cétacés. Il y a des moyens d'éduquer les gens; cela peut prendre la forme de films ou de vidéos ou se faire en milieu sauvage.

Lorsque les gens pensent aux cétacés, j'ai l'impression qu'ils s'imaginent toujours cette belle créature dans l'océan. Ce sont des baleines à bosse qui font de la houle avec leurs nageoires caudales et pectorales. C'est l'image que nous avons en tête. C'est ce dont nous parlons. Cela n'arrive pas. Il n'est jamais arrivé de voir une baleine à bosse le faire dans un aquarium. Elles ne peuvent pas le faire. Ce n'est pas leur habitat.

Les biologistes de la vie aquatique et les éducateurs seront mieux placés que moi pour répondre à ces types de questions.

Le sénateur Plett : Sénateur Moore, dans votre propre province, saviez-vous qu'il y a des programmes qui permettent à des humains de nager avec des baleines, d'entrer de manière intrusive dans leur habitat naturel et d'approcher des cétacés à l'état sauvage? Cela vous préoccupe-t-il que des humains s'en aillent dans l'eau pour nager avec des baleines dans votre province?

M. Moore : Je ne suis pas au courant qu'un tel programme est offert.

Le sénateur Plett : Cela vous aurait-il préoccupé si vous aviez été au courant de l'existence d'un tel programme?

M. Moore : Non. Avez-vous déjà lu le livre Voices in the Ocean?

Le sénateur Plett : Sénateur Moore, vous êtes le témoin. Vous êtes censé répondre aux questions, pas en poser.

M. Moore : Non. Lisez ce livre. Il est question de nager avec des cétacés. C'est un livre révélateur. Je sais que nous avons de bonnes excursions pour l'observation des baleines en Nouvelle-Écosse dans la baie de Fundy sur la côte Atlantique. Nous en avons à Churchill, au Manitoba. Des publicités sont diffusées dans des journaux en Nouvelle- Écosse pour inciter les gens à venir y faire un tour.

Le sénateur Plett : Par contre, j'approuve cela dans la nature et dans les aquariums. Je présume que c'est la différence.

Le sénateur Christmas : Merci, sénateur Moore, de nous saisir de cet enjeu. C'est un tout nouvel enjeu pour moi; je n'en ai jamais traité avant. J'écoute les questions et votre témoignage, et j'essaie de déterminer, à mon avis, les critères pour me prononcer sur cet enjeu. Bon nombre d'arguments tournent autour de la nécessité pour les humains de mener des recherches sur les espèces.

L'aspect inverse me tracasse; j'aimerais pouvoir entendre le témoignage d'un cétacé. Si nous pouvions parler à un cétacé et lui poser des questions, nous en serions fixés. Nous n'aurions pas besoin de poser de questions à des scientifiques ou d'entendre de témoins.

Cela découle peut-être de mon éducation autochtone, mais nous nous sommes toujours fait dire que les animaux sont nos frères et nos sœurs. Ce sont des êtres vivants qui ont leur propre esprit, leur propre famille et leur propre langage. Lorsque je pense ainsi à la question, je les considère comme des égaux.

Lorsque j'examine l'enjeu de l'autre manière, je les vois comme des objets auxquels nous pouvons imposer notre volonté. Nous pouvons décider de leur manière de vivre et d'être. Lorsque je vois les cétacés comme des objets, c'est logique de les enfermer dans des enclos et de les utiliser à des fins de recherche et d'éducation, mais il y a quelque chose dans mon esprit qui me dit que ce n'est pas la bonne approche. Nous devons vraiment voir les cétacés comme nos égaux et comme des êtres vivants.

Si j'avais l'occasion de poser une question à un béluga, je crois que je lui demanderais ce qui est le mieux pour sa famille. Je serais très curieux d'entendre sa réponse. C'est évidemment impossible.

M. Moore : Je crois avoir partiellement répondu à votre réflexion dans l'exemple que j'ai donné au sujet de la jeune baleine à bosse dans la baie de Fundy.

L'été dernier, en conduisant, j'écoutais Dick Van Dyke, une vedette de la télévision aux États-Unis. Il nageait, mais il s'est aventuré trop loin; il était en difficulté. Un groupe de marsouins est apparu, l'a soulevé et l'a ramené jusqu'à la côte. Les animaux nous parlent. Ils font ce qu'il faut pour nous.

Le sénateur Christmas : Le sénateur Plett a parlé de la chasse à la baleine par les Autochtones. Je suis d'accord pour dire que cette activité fait souffrir les animaux, mais la chasse a toujours été faite dans la culture autochtone avec respect et parfois avec un brin de tradition et un certain cérémonial.

M. Moore : Exactement.

Le sénateur Christmas : Nous sommes reconnaissants que la créature ait donné sa vie pour assurer la subsistance de notre peuple. Je comprends que la chasse ne peut pas se faire sans infliger une certaine souffrance et malheureusement causer la mort d'un animal.

Dans mon esprit, un animal qui se rendrait pour cette raison est une chose, mais le fait de garder un animal en captivité pendant une longue période dans le seul but de servir les intérêts des humains en matière de recherche et d'éducation n'est pas en adéquation avec la dignité globale de l'animal, le respect que nous lui devons et son droit à la liberté.

Je vais m'arrêter là. Cette question me donne du fil à retordre, et j'essaie de jauger les différents aspects qui entrent en compte.

M. Moore : J'apprécie l'esprit candide de vos observations. Je vous en remercie. Ce n'est pas une question facile, monsieur le sénateur, et j'en suis conscient.

Le président : Merci, sénateur Christmas. Vous avez exprimé ce que ressentent une bonne partie des sénateurs ici présents.

Le sénateur Gold : Je vous prie de m'excuser de mon retard, mais aussi d'avoir posé une question qui avait déjà été posée et à laquelle on avait déjà répondu.

Selon le projet de loi, il est clair que l'interdiction ne s'applique pas à quelqu'un qui aurait la garde ou le contrôle d'un cétacé dans le but de lui fournir de l'aide ou des soins.

M. Moore : Oui, c'est exact.

Le sénateur Gold : À Clearwater, en Floride, il y a un hôpital spécial qui traite les animaux marins qui sont blessés, dont les marsouins et les dauphins. J'y suis allé l'an dernier avec mes petits-enfants. Il s'agit d'animaux qui ont été secourus, parfois en manque d'une nageoire. Le problème, c'est que, pour différentes raisons qu'on nous a expliquées, ces animaux ne peuvent pas retourner à la vie sauvage. Ils sont là. On les aide et l'on prend soin d'eux, mais ils ne sont pas relâchés dans leur habitat naturel. Le public est invité à visiter ce centre et à contribuer à son financement, et c'est ce qui permet au centre de rester ouvert.

Je ne parle pas d'un centre comme l'aquarium de Vancouver ou Marineland — deux endroits où je ne suis jamais allé —, mais j'aimerais savoir comment vous croyez que ce projet de loi et cette exception vont s'appliquer à un centre de secours comme celui que je viens de décrire, un centre ouvert au public et qui dépend du public pour poursuivre sa mission?

M. Moore : Le projet de loi ne demande pas que l'on mette fin à la recherche ou que l'on cesse de garder des cétacés rescapés dans des endroits comme ceux-là lorsqu'ils ne peuvent pas être relâchés dans la nature. Le projet de loi reconnaît l'existence de cette dynamique. Il ne l'interdit pas.

Le sénateur Gold : J'espère que non. Je me demande toutefois si le libellé est suffisamment général pour englober une situation où l'on garderait sur place et à la vue du public un cétacé que l'on aurait guéri ou dont on aurait pansé les plaies, mais pas dans un contexte de spectacle comme ceux qu'organise SeaWorld.

En d'autres mots, l'exception comme vous la concevez s'appliquerait-elle aux soins à long terme que nécessiteront les animaux qui ne pourront plus jamais être remis dans leur état naturel?

M. Moore : Oui, l'exception s'appliquerait à cette situation.

Le sénateur Sinclair : J'ai écouté les questions et les réponses et j'ai lu la documentation, dont les quelque 1 000 courriels que j'ai reçus, probablement parce que mon nom a été associé au vôtre.

M. Moore : Ce sont les risques du métier.

Le sénateur Sinclair : Oui, je comprends cela. En fin de compte, la chose se résume à ces deux questions. Selon vous, l'éducation du public, y compris celle des jeunes enfants, nécessite-t-elle inévitablement la captivité d'animaux en santé comme ceux-là?

M. Moore : Je dirais que non.

Le sénateur Sinclair : Pouvez-vous vous expliquer?

M. Moore : Il y a différentes façons d'éduquer les gens. On peut leur montrer des films, procéder à des démonstrations, faire des exposés ou amener les jeunes voir les baleines dans leur habitat naturel. Pour moi, cela est beaucoup plus éducatif que de regarder une créature qui ne bouge pas et ne fait pas vraiment les choses comme elle le ferait en milieu naturel, un animal qui serait forcé de rester dans un bocal à poissons à regarder les visiteurs qui le regardent. Mais qu'est ceci? Je trouve la chose déprimante rien que d'y penser.

Le sénateur Sinclair : Le sénateur Plett a fait remarquer que cette loi ne touchera vraiment que deux établissements au Canada : Marineland et l'aquarium de Vancouver.

Êtes-vous au courant de renseignements, de travaux de recherche ou de données qui pourraient aider les sénateurs à se faire une idée de la mesure dans laquelle ces deux établissements dépendent de la captivité de baleines pour leurs recettes? Le savez-vous?

M. Moore : Non, je ne le sais pas. J'ai l'impression que Marineland est un lieu de reproduction. L'aquarium de Vancouver fait la même chose. Sur quoi s'appuie-t-il? L'aquarium envisage la possibilité de rapatrier deux de ses bélugas d'un autre établissement. Je ne sais pas s'il les avait vendus ou loués, mais, de toute évidence, les bélugas ont été croisés et on les a transportés à un autre endroit. Et maintenant, l'aquarium les rapatrie.

Comment cela se déroule-t-il? Quelle est la motivation commerciale derrière cette démarche? Je n'ai pas l'impression que c'est une question d'éducation.

Le sénateur Sinclair : Merci.

Le président : Je signale à tous les membres du Comité que nous allons recevoir des représentants de ces deux établissements — l'aquarium de Vancouver et Marineland — ainsi que d'autres témoins qui viendront nous parler de cela.

Le sénateur Munson : Je suis content que le sénateur Sinclair ait posé cette question. Je voudrais simplement savoir de quoi l'on parle lorsque l'on parle d'« éducation » ainsi que de science et de recherche. Vous ne seriez pas contre l'idée que des organismes quasi publics, quasi privés récupèrent ces animaux de ces « piscines », comme vous les appelez, et d'avoir un environnement non public où ils pourraient faire de la recherche scientifique, plutôt que d'avoir une situation où les travaux auraient aussi une motivation économique, c'est-à-dire la possibilité de demander des frais d'entrée pour y assister? Dans l'optique de la science, cela reste nécessaire.

Ne seriez-vous pas opposé à ce que ce genre de choses se fasse, par exemple, à Marineland ou à l'aquarium de Vancouver? Est-ce qu'il ne s'agit pas simplement pour eux de faire leurs travaux scientifiques et de recherche de façon appropriée? Pourquoi devrait-on demander au public de payer?

Je pose la question parce que le sénateur Christmas a parlé de l'adaptation et de la vie avec les peuples autochtones. Au milieu des années 1990, à CTV, dans votre province de la Nouvelle-Écosse, j'ai réalisé un reportage national qui s'appelait « A Whale of a Dog Story » ou, si vous voulez, « une histoire de chien grosse comme une baleine ». L'histoire se déroulait dans la baie Chedabucto, dans le comté de Guysborough. J'ai fait un topo de cinq ou six minutes sur ce pêcheur qui, tous les jours, partait faire un tour sur la baie en compagnie de son chien. Or, il y avait là un béluga qui s'était égaré de son clan — de toute évidence, en essayant de rejoindre le Saint-Laurent ou quelque chose d'autre —, et tous les jours, lui et le chien se frottaient l'un à l'autre.

On a dit que c'était du jamais vu, que cela n'arriverait jamais avec une créature marine. Pourtant, cela se produisait jour après jour. Alors nous sommes allés sur place et nous avons fait ce reportage. Si votre but est d'éduquer les gens, voilà une façon formidable de le faire. Amenez vos enfants dans la nature pour qu'ils voient exactement comment les choses se passent en vrai.

Pour en revenir à notre conversation, j'ai réfléchi à cette idée d'avoir des baleines dans un espace confiné, et de la recherche qui pourrait être faite de façon appropriée et de la possibilité que l'on puisse leur permettre de vivre leur vie à travers ces recherches, attendu qu'elles ne pourront jamais retourner à l'environnement dont je viens de parler. Cette idée pourrait-elle vous servir?

M. Moore : C'est une idée qui me semble très sensée. Je crois que la vraie solution, la solution ultime, serait le projet de Mme Lori Marino, soit celui d'avoir des enclos marins dans des anses ou des petites baies, des refuges qui pourraient être circonscrits et où les animaux marins pourraient vivre à l'état sauvage. S'ils en ont besoin, on pourrait les nourrir, et le public pourrait venir les voir évoluer dans leur environnement. Au moins, il s'agirait de leur habitat naturel.

Le président : Ce sera une étude intéressante lorsque nous aurons « une histoire de chien grosse comme une baleine » lors de notre première séance.

Le sénateur Munson : Je suis submergé par toutes les idées que les sénateurs formulent en ce moment.

Le sénateur Plett : Sénateur Moore, je vous ai peut-être mal compris, alors j'aimerais tirer quelque chose au clair avec vous. Lorsque vous avez répondu à la sénatrice Hubley, j'ai cru vous entendre dire que SeaWorld ne gardait plus de cétacés, mais de toute évidence, ce n'est pas ce que vous avez dit. Qu'avez-vous dit exactement?

M. Moore : J'ai dit que la Californie avait adopté une loi semblable à celle qui est proposée ici, et que SeaWorld l'avait appuyée.

Le sénateur Plett : Mais ils gardent toujours des cétacés. Ils ne les croisent pas.

M. Moore : La loi visait à mettre fin à cette pratique.

Le sénateur Plett : Mais ils en ont toujours. Je n'étais pas certain de ce que vous avez dit.

Je tiens à dire que je suis d'accord avec le sénateur Christmas lorsqu'il affirme que ces baleines se rendent, en quelque sorte, pour de la nourriture ou quelque autre raison. Or, elles doivent être tuées et la mise à mort est parfois brutale.

Toutefois, il faut aussi tenir compte du fait que l'aquarium de Vancouver est le seul centre marin où les scientifiques canadiens peuvent avoir accès à des bélugas aux fins de recherches nécessitant la participation d'animaux formés pour la recherche. Le fait de fermer le programme de recherche sur les bélugas de cet établissement signifiera la fin de la recherche scientifique dans ce domaine.

Dans cette optique, êtes-vous d'accord avec l'idée de mettre fin à la recherche scientifique nécessaire pour sauver les espèces menacées?

M. Moore : Absolument pas. Monsieur Plett, je le répète, mon projet de loi ne met pas fin à la recherche, il la respecte. Il encourage la recherche, il cherche à venir en aide aux cétacés qui ont été secourus et il cautionne la poursuite des recherches effectuées sur les spécimens qui sont déjà dans ces établissements.

Ce que Vancouver a dit dans son communiqué de presse n'est pas vrai, monsieur le sénateur. Le projet de loi ne cherche pas à tuer la recherche.

Le sénateur Plett : Merci.

Le sénateur McInnis : Profitons de la présence du sénateur parmi nous pour poser la question : combien y a-t-il de cétacés disponibles aux fins de recherche? Savez-vous si quelqu'un a déjà cherché à le savoir?

M. Moore : Vous voulez dire, combien y en a-t-il en captivité présentement?

Le sénateur McInnis : Pas seulement cela, car je parle de disponibilité. Les gens de l'aquarium ont dit qu'ils ne pouvaient pas compter sur une disponibilité laissée au hasard.

M. Moore : Oui, je vous ai entendu dire cela. Je ne sais pas si des recherches ont été faites à cet égard.

Le sénateur McInnis : Nous pourrons poser la question plus tard. Savez-vous si l'on fait de la recherche en milieu sauvage?

M. Moore : C'est le meilleur endroit pour en faire.

Le sénateur McInnis : Oui, je suis conscient de cela, mais je veux savoir s'il s'en fait à l'heure actuelle.

M. Moore : Il faudra poser la question aux scientifiques. Je sais qu'il s'en fait. Je sais que M. Hal Whitehead, un biologiste de la vie marine de l'Université Dalhousie, a fait beaucoup de recherche en milieu sauvage. Il va comparaître ici même. Il pourra vous donner une tonne de renseignements. C'est l'essentiel de sa carrière.

Le président : À moins que quelqu'un ait d'autres questions, je veux informer le Comité — comme nous l'avons déjà dit — que la plupart des membres ont reçu une liste des témoins que nous allons entendre. Essentiellement, la direction a approuvé la liste que nous avons fait circuler par l'intermédiaire de Max et d'Odette. Nous pourrions essayer d'organiser quelques groupes d'experts partageant à peu près le même point de vue plutôt que de rencontrer chacun individuellement, sinon nous n'aurons jamais terminé. Nous croyons que nous pourrions inclure les deux noms reçus cette semaine dans l'un des groupes d'experts que nous avons déjà établis.

Je ne veux pas avoir plus de quatre experts par groupe. Je veux garder ce nombre à trois ou quatre, et essayer de donner des thèmes à ces séances. Par exemple, si nous voulons nous pencher sur la question des aquariums, efforçons- nous de recevoir des représentants des deux aquariums à la table, et ainsi de suite. Nous sommes ouverts aux propositions, mais c'est effectivement ce que nous projetons de faire.

Comme je l'ai dit, nous avons reçu deux nouveaux noms cette semaine, mais nous croyons que ces personnes appartiennent à des domaines qui s'accordent bien avec ceux des personnes que nous avons déjà.

La séance qui se termine a été une première séance très intéressante à propos de ce projet de loi. Je pense que nos échanges des quelques prochaines semaines seront des plus intéressants. Nous avons évidemment bien hâte d'entendre ce que le sénateur Moore aura à nous dire à ce sujet. Je suis convaincu qu'en cours de route, vous allez trouver le temps de nous faire part de vos opinions, si besoin est. Nous nous réservons le droit, sénateur, de vous convoquer de nouveau si nous avons à le faire.

Sur ce, la séance est levée.

(La séance est levée.)

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