Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne
Fascicule nº 10 - Témoignages du 19 octobre 2016
OTTAWA, le mercredi 19 octobre 2016
Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 11 h 3, pour réaliser une étude sur les mesures prises pour faciliter l'intégration des réfugiés syriens nouvellement arrivés et les aider à surmonter les difficultés qu'ils vivent, notamment par les divers ordres de gouvernement, les répondants du secteur privé et les organismes non gouvernementaux.
Le sénateur Jim Munson (président) occupe le fauteuil.
Le président : Bonjour. Je suis désolé d'être en retard. Il y a tellement de comités. Les sénateurs travaillent très dur et consacrent leur temps à bien des choses différentes, surtout mes collègues sénateurs conservateurs, les indépendants, aussi, et les quelques sénateurs libéraux qui sont peut-être encore ici.
Je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins ce matin. Nous avons longuement discuté avec des témoins depuis quelque temps, et nous avons produit en juin un rapport provisoire contenant des observations, que certains ont considérées comme des recommandations. Nous voulons approfondir cette question. La rétroaction a été incroyable, et ce, à de nombreux niveaux, parce que l'établissement dans un nouveau pays est une question importante.
Aujourd'hui, nous poursuivons donc notre étude sur l'intégration des réfugiés syriens nouvellement arrivés et ce qu'il faut faire pour les aider à surmonter les difficultés qu'ils vivent, notamment grâce au travail des divers ordres de gouvernement, des répondants du secteur privé et des organismes non gouvernementaux.
Avant que je présente les témoins, je veux que les sénateurs se présentent, en commençant par la vice-présidente.
La sénatrice Ataullahjan : Salma Ataullahjan, de l'Ontario.
Le sénateur Ngo : Thanh Hai Ngo, de l'Ontario.
La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.
[Français]
La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, sénatrice du Manitoba.
[Traduction]
Le sénateur Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar, de l'Ontario.
Le président : Je suis le sénateur Munson et je suis d'Ottawa, ici même, dans la capitale nationale.
Notre premier groupe de témoins est composé d'Angela Keller-Herzog, organisatrice centrale, et Catherine Fleming, responsable de la sensibilisation, du Centre d'action pour réfugiés d'Ottawa. Je vis ici et je possède donc une connaissance personnelle du travail que vous faites. Je suis en conflit d'intérêts. Nous parrainons aussi une famille, en collaboration avec d'autres groupes, et ces personnes se portent très bien. Les quatre garçons de la famille en question savent maintenant comment dire : « Il lance et compte », c'est la première phrase que je leur ai enseignée.
Nous accueillons aussi Saleem Spindari, gestionnaire, Projets de soutien d'établissement des réfugiés, Services aux familles et d'établissement, de MOSAIC, et Andrew Harvey, du Groupe d'établissement des réfugiés d'Ottawa-Centre.
Il y a très longtemps, mon père était ministre de culte de l'Église Unie du Canada, et me voici ici. Nous accueillons aussi le révérend Brian Cornelius, président du comité des finances, Première église unie, et le Dr Asmat Khan, à titre personnel.
Nous allons commencer par Angela Keller-Herzog. Merci d'être là.
Angela Keller-Herzog, organisatrice centrale, Ottawa Centre Refugee Action : Merci de nous avoir invités aujourd'hui.
Le CARO, le Centre d'action pour réfugiés d'Ottawa, est une association communautaire de bénévoles, qui se sont réunis il y a un an pour aider les réfugiés à s'établir à Ottawa. Tout a commencé sous la forme d'un groupe de voisins — comme beaucoup d'autres groupes un peu partout au pays — qui voulait parrainer une famille, mais l'initiative a fait boule de neige, vu l'important désir d'aider qu'éprouvaient des membres de notre collectivité. Nous comptons maintenant environ 250 bénévoles, qui s'acquittent de tâches et qui assument des rôles bien définis dans un groupe plus général d'environ 500 bénévoles qui offrent du soutien dans le cadre des activités du CARO. Nous avons recueilli environ 240 000 $ en dons privés de la collectivité.
Notre première famille parrainée, une mère héroïque et ses deux filles, est arrivée du Liban quelques jours seulement avant Noël l'année dernière. Nous n'avons eu que deux jours de préavis. Elles sont descendues par l'escalier roulant, celui-là même que vous utilisez probablement chaque fois que vous arrivez à Ottawa. Leurs yeux étaient grand ouverts. Elles ne savaient pas à quoi s'attendre, et, très rapidement, tout le monde s'enlaçait et pleurait. Même s'il a fallu faire des pieds et des mains, la volonté des bénévoles CARO de se mobiliser rapidement afin de leur trouver un endroit où rester et de les aider à commencer leur nouvelle vie était inspirante.
Depuis, vu l'enthousiasme permanent de notre réseau, nous avons entrepris le parrainage privé de 37 réfugiés dans 12 familles dans le cadre du Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas. Par conséquent, si on compte les adultes et les enfants, 33 personnes sont maintenant arrivées, et nous en attendons quatre autres. Six des douze familles sont d'origine syrienne, mais le CARO parraine aussi des réfugiés d'Irak, de Gambie, de Colombie et de République centrafricaine.
Nous avons appris beaucoup de choses durant la dernière année. Je suis une bénévole. Je suis coorganisatrice, cofondatrice et membre du comité directeur du CORA. Nous sommes tous des bénévoles.
Aujourd'hui, je vais parler de trois enjeux liés à l'intégration des réfugiés parrainés par le CARO. La réunification familiale, les retards bureaucratiques et le besoin de mettre en place des systèmes de soutien social durables pour certains des nouveaux arrivants au Canada.
Le besoin le plus urgent et le plus pressant dont nous font part les nouveaux arrivants parrainés par le CARO concerne la situation difficile à laquelle sont confrontés les membres de leur famille laissés derrière. Cinq des six familles syriennes arrivées au pays nous demandent de les aider à ce sujet. Leurs mères, leurs pères, leurs frères, leurs sœurs, leurs neveux et leurs nièces sont en danger. Dans certains cas, ils envoient une partie du peu de fonds dont ils disposent au Moyen-Orient afin d'aider les membres de leur famille à subvenir à leurs besoins les plus fondamentaux, à se procurer de la nourriture et de l'eau. Le stress psychologique et les inquiétudes ainsi que les pressions financières sur les familles, ici, peuvent compromettre l'efficacité du processus d'établissement.
Selon nous, la réunification des familles, peu importe le mécanisme ou le processus utilisé, est une bonne chose, et ce, de deux façons qui se chevauchent. Les nouveaux arrivants dont nous nous occupons ont plus de succès si leur famille est avec eux au Canada, qu'ils aient un emploi ou non, et les prochains réfugiés qui arriveront pourront s'intégrer plus facilement s'ils ont déjà de la famille ici.
Les personnes plus âgées ne devraient pas être considérées comme un fardeau pour le système social. Elles jouent des rôles importants pour assurer la cohésion sociale. En effet, bon nombre des bénévoles les plus actifs du CARO sont des aînés. Nous sommes plus forts, ensemble, et des familles unies sont plus résilientes.
Actuellement, c'est extrêmement difficile pour les nouveaux arrivants, qu'ils soient syriens ou non, d'entreprendre un processus pour faire venir au Canada en tant que réfugiés d'autres membres de leur famille. Les fonds requis pour entreprendre un processus complet de parrainage par le secteur privé sont intimidants, même pour les Canadiens de la classe moyenne, c'est donc, comme vous pouvez l'imaginer, encore plus intimidant pour les nouveaux arrivants. Pour répondre aux demandes de ce groupe seulement, le CARO aurait besoin d'au moins 200 000 $ de plus. En plus de l'argent nécessaire, les processus sont lourds, la réussite, incertaine et les délais se comptent en années.
Nous demandons au gouvernement du Canada d'examiner les politiques afin de faciliter le processus de réunification familiale et de définir des processus pour rendre la réunification plus accessible. Nous avons certaines suggestions et certains exemples de ce qui pourrait être fait et appliqué assez facilement.
Par exemple, le Canada pourrait faire en sorte qu'il soit plus facile pour les membres de la famille de nouveaux arrivants d'immigrer au titre de la catégorie des réfugiés pris en charge par le gouvernement, les RPG. Par exemple, il ne serait pas difficile de créer un Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas aux fins de réunification familiale, où on tirerait à la fois parti du soutien financier associé au parrainage par le secteur privé et du soutien financier du Programme des réfugiés parrainés par le gouvernement.
Par exemple, des fonctionnaires consulaires spéciaux pourraient fournir des services en Jordanie, au Liban, en Turquie et, peut-être, à d'autres endroits pour aider les candidats à un processus de réunification familiale à remplir les formulaires complexes et intimidants avec lesquels les répondants privés doivent composer à distance. Même à nous, et avec l'aide d'avocats et de personnes qui parlent arabe, il faut des semaines d'efforts pour les remplir.
Nous sommes convaincus que, avec une directive appropriée, IRCC pourrait trouver de nombreuses façons différentes de permettre la réunification familiale des réfugiés. Et n'oubliez pas, si les nouveaux arrivants comptent déjà de la famille ici, ils s'en sortiront mieux.
Le deuxième problème lié à l'intégration des réfugiés que le CARO a constaté est lié aux défis bureaucratiques que doivent surmonter les nouveaux arrivants. Plus précisément, nous aimerions mentionner qu'il y a des retards déraisonnables touchant l'approbation de services dentaires tout à fait ordinaires couverts par le Programme fédéral de santé intérimaire et mis en œuvre par la Croix bleue. Les gens attendent pendant des mois une réponse de l'assureur relativement aux préapprobations requises pour faire faire certains travaux de base, comme l'obturation de caries d'enfants.
Nous avons aussi remarqué qu'il y a des retards déraisonnables et une confusion générale en matière de traitement concernant la délivrance de cartes de résident permanent. Il faut des mois, et nous devons faire des suivis à répétition. Par exemple, une des familles que nous soutenons est ici depuis février, et les membres de la famille n'ont pas de carte. Sans ces cartes, c'est souvent impossible pour de nouveaux résidents permanents d'obtenir d'autres documents d'identité en Ontario, et les femmes sont touchées de manière disproportionnée, parce que les hommes ont parfois un permis de conduire qu'ils peuvent utiliser comme premier document d'identité.
La troisième suggestion du CARO au sujet du soutien à l'intégration des Syriens, c'est en fait que nous prions le gouvernement fédéral de reconnaître qu'un filet de sécurité en matière de santé mentale et de soutien social sera requis par certains des membres de cette population vulnérable. Par exemple, on remarque souvent que les femmes ne peuvent pas avoir accès aux cours d'anglais langue seconde censément gratuits parce qu'il n'y a pas de service de garde pour les bébés ou les enfants d'âge préscolaire. Ces femmes sont donc laissées pour compte.
Nous constatons que le stress lié à l'intégration à la vie au Canada, où les rôles sexuels sont différents, peut créer des tensions familiales au sein des ménages et au sein de la famille, et nous craignons que, sans soutien, ces tensions puissent s'exprimer sous forme de violence contre les femmes. En effet, sans soutien, il sera difficile au bout du compte pour ces femmes de devenir des parents efficaces lorsque leurs enfants deviendront adolescents, période qui, comme certains d'entre nous le savent, est parfois houleuse.
Même si nous voyons que beaucoup d'enfants s'adaptent bien au système scolaire canadien et qu'ils apprennent l'anglais rapidement, ce qui est toujours merveilleux, nous savons aussi qu'ils manquent de ressources d'ALS dans beaucoup d'écoles, et ces ressources sont nécessaires pour aider les enfants nouvellement arrivés à s'intégrer dans leurs nouveaux environnements linguistique et social.
En somme, selon nous, il faut fournir des services sociaux et des services de santé mentale accessibles et durables à cette population pendant bien plus que 12 mois, période après laquelle les programmes d'aide à l'intention des réfugiés parrainés par le secteur privé ou le gouvernement prennent fin. Le fait de créer ces accès, ces tremplins et ces filets de sécurité pour les personnes à risque est un investissement important que le Canada doit faire pour assurer l'intégration réussie de la première génération, plutôt que d'attendre les problèmes d'intégration de la deuxième et de la troisième génération.
Le président : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre et continuer à nous concentrer sur Ottawa pour l'instant, puis nous passerons à Vancouver, et au docteur. Passons pour l'instant à Andrew Harvey du Groupe d'établissement des réfugiés d'Ottawa-Centre.
Andrew Harvey, Ottawa Centre Refugee Settlement Group : Merci, monsieur le président et merci aux honorables membres, de nous accueillir aujourd'hui. Merci aussi au CARO de nous avoir lancé l'invitation.
Je suis membre du Groupe d'établissement des réfugiés d'Ottawa-Centre, qui a été créé en janvier dernier et compte environ une douzaine de professionnels, d'étudiants, de parents, de retraités ainsi qu'une réfugiée d'Afghanistan qui vient tout juste elle-même de terminer le processus d'établissement.
Notre histoire a commencé en fait il y a environ 10 ans lorsque je suis allé en Syrie pour réaliser des recherches dans le cadre d'études supérieures. Là, à Alep, je suis devenu ami avec beaucoup de personnes, y compris une des personnes que nous tentons actuellement de faire immigrer au Canada. Nous sommes restés amis depuis. En décembre 2015, l'année dernière, lorsque j'ai appris que, d'ici la fin de cette année, 2016, mon ami, son épouse et la famille de six personnes de son cousin allaient devoir quitter l'Arabie saoudite, où ils vivent actuellement, j'ai décidé d'essayer de les aider à venir au Canada.
Le Groupe d'établissement des réfugiés d'Ottawa-Centre a été créé, et nous avons communiqué avec notre corépondant, Osgoode-Kars Pastoral Charge, pour créer un partenariat à l'appui de ce processus complexe.
Depuis, nous avons recueilli plus de 60 000 $, présenté des demandes conjointes pour deux familles et respecté le délai de présentation de 2016 ainsi que la limite de plafond. Et, maintenant, après environ cinq mois, nous venons de recevoir, le 1er octobre, des numéros de demande pour les deux familles. Ce lundi, nous avons aussi reçu un avis selon lequel une des deux demandes avait été acceptée et était transférée à Abou Dhabi.
Les délais de traitement des demandeurs du Royaume d'Arabie saoudite sont estimés à environ 48 mois, et nous ne savons toujours pas ce qu'il adviendra de la demande de la deuxième famille.
Cela dit, aujourd'hui, je voulais attirer votre attention sur nos préoccupations au sujet des retards de traitement et des délais d'attente de façon générale, sur le fait qu'il est difficile, en tant que groupe de bénévoles, d'obtenir des renseignements précis au sujet du parrainage des réfugiés et sur le besoin de s'assurer que les familles peuvent rester ensemble afin qu'on n'ait pas besoin ultérieurement d'un processus de réunification des familles comme l'a décrit le CARO.
Premièrement, le processus prend trop de temps. Notre groupe s'est formé en janvier dernier, a rempli la demande vers la fin d'avril et a seulement reçu un avis d'IRCC en octobre.
Une des principales frustrations liées aux longs délais, c'est que nous avons commencé le processus lorsque le gouvernement encourageait les Canadiens à participer au processus d'établissement des réfugiés, mais le traitement accéléré des demandes a pris fin sans avertissement, quelques jours seulement avant la présentation de notre demande.
Nous comprenons que les délais de traitement restent plus rapides que ce qu'ils ont été dans le passé, mais IRCC doit pouvoir en faire plus pour raccourcir les délais de traitement de 48 mois, surtout à la lumière de la situation précaire dans laquelle les réfugiés se trouvent. Les deux familles que nous parrainons ont des visas du Royaume d'Arabie saoudite jusqu'à la fin de l'année, puis elles devront partir, mais elles ne savent pas exactement où. L'anxiété générée par leur situation est immense. Laissez-moi vous dire que, à la lumière de nos échanges en ligne, surtout au cours des deux ou trois derniers mois, elles commencent à perdre espoir.
Le deuxième problème que je veux porter à votre attention, c'est le fait que l'information concernant le traitement des demandes des réfugiés syriens qui vivent actuellement à l'extérieur de pays comme la Turquie, le Liban et la Jordanie, au moins, n'est pas vraiment très claire. Nous avons reçu beaucoup de renseignements contradictoires au sujet des exigences, et des délais d'attente, et cela a beaucoup ralenti nos efforts, surtout durant la période précédant la présentation de notre demande.
Nous avons eu beaucoup de difficulté à obtenir de l'information sur les demandes de réfugiés du Royaume d'Arabie saoudite.
Troisièmement, en ce moment, on ne sait pas exactement si les demandes conjointes présentées pour nos deux familles sont traitées ensemble ou séparément. En effet, nous savons seulement, pour l'instant, qu'une des demandes a été approuvée et envoyée à Abou Dhabi. Nous ne comprenons pas exactement comment le processus de traitement des demandes fonctionne, mais nous sommes certains que faire venir les deux familles ensemble favorisera, comme le CARO l'a mentionné, un tissu social solide et un processus d'établissement réussi. Les demandes conjointes de membres de la famille permettraient de réduire le besoin de réunification et toutes les complications que cela provoque ultérieurement.
Nous n'avons pas des recommandations très précises à vous formuler en ce moment. Je suis seulement venu ici pour faire cette déclaration. Les trois points que nous voulions souligner, comme je viens de le décrire, sont les suivants : traiter ensemble les demandes conjointes, établir un processus de demande plus clair et plus simple pour les groupes de réfugiés dans d'autres pays et, peut-être, affecter plus d'agents préposés aux cas venant de ces autres pays.
Merci de m'avoir écouté.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Harvey.
Nous allons maintenant passer au révérend Brian Cornelius, de l'Église Unie du Canada, ici, à Ottawa.
Révérend Brian Cornelius, président du comité des finances, Première église unie, Église Unie du Canada : Merci, honorables sénateurs, de l'invitation. Je suis pasteur de l'Église Unie, mais je suis aussi, à titre bénévole, le président du comité des finances de l'Église Unie du Canada.
L'Église Unie participe au parrainage de réfugiés depuis plus de 50 ans, ma congrégation ayant participé à divers niveaux au fil des ans, mais notre participation s'est accrue de façon exponentielle au cours de la dernière année lorsque les membres de notre congrégation ont déployé une énergie immense, tandis que nous avons créé des partenariats avec de nombreux groupes communautaires qui voulaient à tout prix participer à la mobilisation citoyenne canadienne en réaction à la crise syrienne.
C'est une expérience qui a été reproduite à de nombreuses reprises partout au Canada. Ma congrégation locale est associée avec 30 familles d'ici, à Ottawa, et, au sein de l'Église Unie partout au Canada, il y a plus d'un millier de dossiers, qui représentent des milliers de personnes.
Cependant, tandis que je vous parle, j'ai à l'esprit et dans mon coeur Ebrahim et Amina, et leur fille, Maria, qui a été conçue au Moyen-Orient et qui est née au Canada. Je pense à Ameen, je pense à Halima et à ses sept enfants. Je pense à Mohammad et Dima, et leurs fils, qui ne sont que quelques exemples de familles de réfugiés et d'amis que je connais personnellement.
Je garde aussi à l'esprit et je porte dans mon cœur les groupes de parrainage qui travaillent efficacement et très dur pour assurer l'intégration des familles réfugiées qui sont arrivées.
Je suis ici, et je pense aussi à Ali. Je vous parle d'Ali parce que c'est un réfugié que nous voulions parrainer bien avant qu'on parle de la crise syrienne. Cependant, en raison des processus extrêmement longs — plus de cinq ans, nous avons présenté la demande en 2011 —, nous avons été obligés d'abandonner son dossier pour diverses raisons dont je ne parlerai pas. Non seulement cette personne a été victime d'une violation de ses droits dans le cadre du processus, puisqu'elle a été interviewée en 2012 et qu'il n'y a jamais eu de suite, mais je mentionne cette situation parce qu'elle est liée précisément à la tâche de votre comité. Je crois vraiment qu'encourager les groupes de parrainage améliore grandement la possibilité d'intégration réussie des réfugiés au Canada.
Le fait de perdre cette énergie en raison des lents processus serait vraiment malheureux, parce que l'énergie déployée par les groupes de parrainage mobilisés fournit un réseau, et même un sentiment d'appartenance familiale aux nouveaux arrivants. Actuellement, en collaboration avec l'autre groupe, nous vous avons présenté un grand nombre de demandes de réunification familiale parrainées par la collectivité. Certaines des personnes en question ont été rencontrées pour une entrevue en février et mars, et ne sont toujours pas ici. Par conséquent, nous commençons à ressentir un peu de fatigue et de frustration puisque les délais de traitement semblent encore une fois s'allonger, et cela nous épuise. Nous avons tout cet argent en banque, mais nous ne pouvons pas le dépenser.
Laissez-moi vous expliquer les avantages liés à la façon dont les groupes de parrainage fonctionnent. Notre groupe de parrainage de réfugiés écoute le récit de nos amis récemment arrivés, nous écoutons leurs rêves et leurs espoirs futurs, puis, en plus de leur fournir un soutien pratique pour qu'ils trouvent un logement, de leur garantir et de leur fournir des services publics et des services de communication et de leur dispenser une aide liée à la multitude d'autres réalités concrètes, il s'efforce de créer un réseau dans le but initial d'atteindre et de surmonter trois objectifs ou défis et, au bout du compte, pour leur permettre de réaliser leurs rêves futurs plus ambitieux.
Le premier objectif, c'est de vraiment mettre l'accent sur l'acquisition des compétences linguistiques en anglais, et nous saluons tous les efforts qui ont été déployés pour offrir de très bons cours d'anglais. Nous reconnaissons qu'un des défis auquel nous sommes confrontés, c'est que beaucoup de réfugiés ont de très bonnes compétences à l'oral, mais ont de la difficulté à l'écrit, alors il faut vraiment mettre l'accent là-dessus.
Deuxièmement, même si leur cours d'anglais qui dure trois heures par jour les occupe beaucoup, il leur reste encore beaucoup de temps libre durant la journée. Par conséquent, nous avons mis au point des programmes. Par exemple, un de nos groupes de parrainage a communiqué avec des responsables de la formation des préposés de la manipulation des aliments de la Ville d'Ottawa et les responsables des cours de premiers soins et de RCR. La participation à ces cours permet aux réfugiés de commencer à utiliser leurs compétences linguistiques et d'améliorer leur curriculum vitae.
Un de nos groups de parrainage réalise beaucoup de préparatifs pour ces cours en recueillant des livres, des jeux et du matériel à manipuler afin de préparer les réfugiés à la participation à ces cours. En fait, la préparation est plus longue que le cours, mais l'apprentissage est très important. Non seulement ça, mais nous avons appris ce que, peut- être, nous pensions que les gens savaient déjà, alors nous avons pu briser certaines présuppositions erronées. Ce genre de choses se produit dans le cadre des activités des groupes de parrainage, pas nécessairement dans le cadre des programmes.
Ensuite, en ce qui a trait à la formation linguistique en anglais, nous tenons à souligner l'importance des services de garde afin de combler la lacune, surtout pour les mères. Ce n'est pas seulement pour les mères, mais c'est surtout pour elles.
Notre deuxième objectif a été de renforcer les compétences améliorant l'employabilité des réfugiés, dans le but d'accroître leur autonomie et de familiariser les réfugiés avec les pratiques canadiennes. Encore une fois, un de nos groupes de parrainage privés a créé un partenariat avec une entreprise locale pour fournir une expérience de travail à certains membres de la famille. Les responsables du groupe sont allés voir une entreprise locale et ont négocié des périodes d'emploi de deux mois avec ce dernier durant lesquelles ils acceptaient de payer une partie du salaire. En fait, l'employeur a créé un nouveau poste. Il n'a pas enlevé le travail à quelqu'un d'autre. Il a créé un nouveau poste.
Une fois l'initiative terminée, notre groupe de parrainage rencontrera ces propriétaires d'entreprise pour déterminer les prochaines étapes. On espère qu'un poste permanent pourrait être créé, un poste qui n'était pas là avant et, au minimum, les participants auront une nouvelle expérience de travail à ajouter à leur curriculum vitae. Les bénévoles ont dû travailler très dur pour réaliser cette initiative, et ce n'est pas rien, alors il est important de maximiser cette énergie qu'offrent les bénévoles.
Le troisième objectif concerne le fait de bénéficier de liens sociaux avec d'autres personnes et d'acquérir un sentiment de normalité recouvré après des années de traumatisme. Le but consiste aussi à inviter ces nouveaux amis à contribuer au tissu social de nos collectivités grâce à un engagement volontaire. Il y a un certain nombre de façons d'y arriver.
Dans un premier temps, il est évident qu'il faut soutenir les enfants et les jeunes adultes qui entrent dans le système d'éducation. Ce besoin peut sembler évident, mais il ne l'est pas. De notre côté, nous savons que certaines familles syriennes parrainées par le gouvernement n'ont eu l'aide de personne pour savoir comment se retrouver au chapitre de l'immunisation, de l'évaluation des niveaux de compétence en anglais et de l'inscription à l'école, ce qui a fait en sorte que leurs enfants n'ont pas été inscrits à l'école pendant trois mois et, dans un cas, jusqu'à six ou sept mois. Cela met en lumière le besoin d'obtenir le soutien de cercles de personnes qui entourent les familles qui arrivent.
Nos groupes de parrainage sont aussi des sources de renseignements exacts qui permettent d'aider les gens à faire des choix éclairés. Il y a beaucoup de mauvais renseignements communiqués. Par exemple, une famille avec laquelle nous travaillons s'est fait dire que, tout ce qu'elle devait faire pour obtenir un logement gratuit, c'était de se présenter dans un refuge, un point c'est tout. Cette information n'était pas véridique, et nous avons pu vraiment l'aider.
Enfin, je dirais qu'un des principaux défis auquel les réfugiés sont confrontés — quelqu'un l'a déjà mentionné — c'est l'intégration. L'un des principaux obstacles à l'intégration est le stress découlant du fait que des membres de la famille vivent encore dans des zones dangereuses.
Lorsque nous avons accueilli un réfugié à l'aéroport, il nous a mentionné pour la première fois la détresse des membres de sa famille dans la voiture en revenant de l'aéroport. Dans le cadre du long processus de demande — relativement auquel nous sommes devenus fort habiles —, nous avons constaté qu'il y a souvent des redondances, et les délais non précisés provoquent beaucoup d'angoisse, et même la dépression. Nous constatons cette déconnexion au sein des familles, alors nous travaillons très dur pour leur fournir du soutien social et l'accès à des ressources en santé mentale.
Il faut absolument éliminer le stress lié à la connaissance du processus de réunification familiale et de ce qu'il est possible d'espérer. Nous avons des suggestions de façons qui permettraient de simplifier le processus, et plus particulièrement en ce qui a trait aux exigences concernant la notarisation des documents et ce genre de choses, qui font souvent courir de grands risques aux réfugiés. Nous serions aussi favorables à la création d'un genre de programme de réunification familiale des réfugiés désignés par un bureau des visas.
En conclusion, nous appuyons beaucoup les programmes, les politiques et les travaux réalisés pour mobiliser des cercles de soutien et des réseaux autour des réfugiés qui arrivent. Je suis impressionné par les efforts déployés par nos groupes de parrainage. Ces personnes travaillent dur et fournissent une tonne de main-d'œuvre bénévole. Ils ont aussi donné vraiment beaucoup d'argent. De plus, j'ai participé personnellement afin de veiller à ce que les cadres financiers soient transparents, conformes à l'éthique et à même de protéger les personnes vulnérables, les réfugiés, comme les Canadiens de bonne foi qui donnent de leur argent et de leur temps. Par conséquent, nous travaillons très dur pour mettre ces structures en place.
Merci beaucoup de votre temps.
Le président : Merci beaucoup de nous avoir accordé de votre temps, révérend Cornelius.
Nous allons passer tout de suite à Saleem Spindari, de MOSAIC Vancouver. Soyez le bienvenu.
Saleem Spindari, gestionnaire, Projets de soutien d'établissement des réfugiés, Services aux familles et d'établissement, MOSAIC : Bonjour, monsieur le président et honorables sénateurs. Merci beaucoup de l'invitation. Après ma brève déclaration, je serai heureux de discuter avec vous et de répondre à vos questions.
Tout d'abord, j'aimerais me présenter et vous fournir certains renseignements contextuels. Comme le président l'a mentionné, je m'appelle Saleem Spindari et je suis gestionnaire des projets de soutien de l'établissement des réfugiés de MOSAIC. Je suis moi-même arrivé au Canada comme réfugié. J'ai fui l'Irak durant les années 1990, et je suis au Canada depuis 1997. J'ai donc une expérience concrète à titre de réfugié.
MOSAIC, l'organisation pour laquelle je travaille, est une organisation sans but lucratif au service des immigrants, des nouveaux arrivants et des réfugiés dans le Grand Vancouver depuis 40 ans. La vision de MOSAIC consiste à permettre aux nouveaux arrivants de participer pleinement à la société canadienne. Pour y arriver, MOSAIC offre des services et réalise des activités de développement communautaire et de défense des droits pour faciliter une participation concrète des immigrants et des réfugiés au sein de la société canadienne.
Grâce à un budget de plus de 20 millions de dollars, 300 employés, 400 bénévoles et plus de 300 entrepreneurs, MOSAIC offre des services dans 32 emplacements. C'est une des principales organisations en Colombie-Britannique. Nous travaillons en collaboration avec des intervenants locaux, provinciaux et nationaux. L'organisation est devenue l'un des centres de liaison de la Colombie-Britannique en matière de réfugiés parrainés.
Par exemple, au niveau national, MOSAIC est membre du Conseil canadien pour les réfugiés depuis 20 ans. Nos programmes incluent des services d'établissement, des cours de langue, d'emploi, d'interprétation et de traduction et de counseling ainsi que des activités d'extension communautaire à l'intention des familles et des particuliers, y compris les enfants, les jeunes et les aînés.
Les projets de soutien de l'établissement des réfugiés que je gère visent à diriger la Metro Vancouver Refugee Response Team, une équipe d'intervention à l'intention des réfugiés dans le Grand Vancouver qui est financée par le gouvernement provincial et qui réunit des membres de plus de 40 organisations représentant les secteurs gouvernemental, communautaire, de la santé, de l'éducation et des affaires.
Dès le début de la crise des réfugiés syriens, nous avons créé une liste de réunification des familles de réfugiés pour donner aux réfugiés des liens vers les répondants privés de la Colombie-Britannique. La liste compte actuellement environ 700 noms, et nous avons trouvé des répondants pour 170 de ces personnes. Vingt-deux personnes connectées grâce à notre liste sont déjà arrivées, et le dossier des autres est actuellement en traitement.
Nous consacrons beaucoup de temps au recrutement et au soutien de répondants du secteur privé. Nous avons organisé des événements de réseautage pour sensibiliser et soutenir des répondants du secteur privé. Les autres types de soutien que nous fournissons aux répondants du secteur privé visent à les aider à remplir les formulaires de demande de parrainage, et pas seulement à faire tout ce qui peut être fait ici, mais en assurant la communication avec les réfugiés grâce à Skype et en les aidant à remplir les demandes. Nous comptons des employés qui parlent arabe et kurde afin de soutenir les réfugiés.
Nous nous sommes efforcés d'assurer la résolution de conflit entre des répondants du secteur privé et des réfugiés parrainés par le secteur privé et nous avons aussi fourni de nombreux autres types de soutien aux répondants du secteur privé.
Un des programmes uniques que nous offrons aux réfugiés récemment arrivés, c'est notre programme d'emploi. Nous avons fourni de la formation aux réfugiés nouvellement arrivés. Dans le cadre d'un des programmes, on a pu recruter 45 réfugiés syriens, dont 25 ont trouvé un emploi à la fin de la formation.
Je dois dire que l'engagement du gouvernement du Canada a poussé de nombreux Canadiens à réagir de façon jamais vue à l'appel pour accueillir et soutenir les réfugiés. Le soutien est venu d'une multitude de personnes, depuis les membres de groupes confessionnels, comme des églises, des temples, des mosquées et des synagogues, qui ont présenté des demandes de parrainage et recueilli des dons, jusqu'aux étudiants de tous les niveaux de scolarité qui préparent des colis de réconfort, gardent le silence pendant une journée pour recueillir des fonds et organisent des campagnes de financement à l'appui des réfugiés. Nous avons vu des quartiers créer des groupes de cinq personnes afin de parrainer des réfugiés de façon privée et des membres de la collectivité offrir leur maison afin d'héberger temporairement des réfugiés récemment arrivés. La liste des gestes de générosité posés par les Canadiens de partout ne s'arrête pas là.
En cours de route, il y a eu des défis. Par exemple, le processus de réunification familiale est cahoteux. Les délais de traitement pour réunir des réfugiés avec leurs êtres chers dans des camps de réfugiés ou à l'étranger sont très longs. Le processus d'établissement et d'intégration des réfugiés prend plus de temps lorsque leurs êtres chers se trouvent encore dans des zones difficiles, dans des camps de réfugiés.
En tant qu'organisation membre du CCR, MOSAIC appuie la campagne de réunification des familles du CCR qui demande la création d'un programme d'entrée express pour réunir les familles, l'adoption d'une définition générale et inclusive de « membres de la famille » en rétablissant l'âge des personnes à charge afin d'inclure celles qui sont âgées de moins de 22 ans — en effet, nous avons constaté parmi les familles syriennes récemment arrivées que certaines personnes avaient été exclues — et l'élimination de la règle sur les « membres de la famille exclus » à l'arrivée au pays. Lorsque les membres de la famille n'ont pas été déclarés sur une demande parce qu'ils n'étaient pas avec le reste de la famille au moment où la demande a été présentée, ils sont exclus automatiquement. Cela crée parfois beaucoup de problèmes.
J'espère que le gouvernement fera de la réunification familiale une priorité principale, comme mes collègues l'ont décrite, afin de prendre une mesure quelconque en ce sens.
L'autre enjeu important est lié au délai de traitement des demandes de parrainage de réfugiés. Beaucoup de groupe de cinq personnes et de groupes communautaires attendent très longtemps avant que leur demande de parrainage soit peaufinée. Les délais de traitement dans un bureau intérieur sont très longs. Il faut attendre parfois jusqu'à huit mois pour que le bureau de Winnipeg mette la dernière main à une demande. Il devient très difficile pour les groupes communautaires de s'avancer et de formuler des engagements lorsque les délais sont longs et ne sont pas précis.
En plus de réfugiés syriens, d'autres réfugiés non syriens doivent attendre jusqu'à 70 mois, comme c'est le cas des réfugiés parrainés dont les dossiers sont traités par le bureau de Nairobi, en Afrique. Lorsque viendra le temps de s'attaquer aux délais de traitement, j'espère que c'est les délais de traitement du cas de tous les réfugiés, qu'ils soient Syriens ou autres, qu'on tentera d'améliorer.
Mes collègues et moi avons pu constater directement l'effet de cette situation sur les clients, dont les niveaux de stress augmentent, qui affichent de l'anxiété, ou ont des attaques de panique, jusqu'aux réfugiés qui se sentent coupables d'avoir laissé des membres de leur famille derrière eux. Les répondants du secteur privé sont pris de panique lorsqu'ils reçoivent l'appel d'un réfugié qui leur apprend que sa période de résidence dans son pays d'accueil se termine. Andrew vous l'a déjà mentionné.
Nous devrions tous travailler très dur pour maintenir le niveau de participation et d'engagement communautaire à l'appui des réfugiés parrainés par le secteur privé. Si l'on accélérait le traitement des demandes de parrainage par le secteur privé, plus de répondants du secteur privé se joindraient à cette honorable cause.
Merci beaucoup de l'occasion qui m'a été offerte. J'ai hâte de discuter avec vous.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Spindari.
Notre dernier témoin ce matin est le Dr Asmat Khan. Nous passerons ensuite aux questions. Il y a déjà quatre sénateurs sur la liste.
Docteur Khan, je crois savoir que vous allez mettre l'accent sur les problèmes de santé mentale, qui d'après ce qu'on a entendu, sont très importants. La parole est à vous.
Dr Asmat Khan, à titre personnel : Merci beaucoup, monsieur le président et honorables sénateurs.
Je suis un psychiatre privé. Les fins de semaine, je travaille aussi avec des malades hospitalisés, et j'ai effectué des recherches dans le passé pendant trois ans dans le cadre d'une affectation postdoctorale.
J'ai lu les transcriptions précédentes, et je sais qu'il y actuellement environ 32 000 réfugiés syriens. En faisant une estimation approximative à la lumière des études réalisées sur la prévalence du TSPT, il y a peut-être 6 000 personnes souffrant du TSPT parmi cette population. Ma réaction initiale, c'était de dire qu'il faut aider les réfugiés à atteindre un niveau de santé raisonnable. Selon moi, et comme l'Organisation mondiale de la Santé le prétend, je crois que cela signifie aussi leur fournir un soutien raisonnable sur le plan de la santé mentale. Selon moi, il faut mettre autant l'accent sur cet aspect des soins que sur l'aspect lié à la santé physique. Il faut soigner les 6 000 patients qui ont des besoins en matière de santé mentale.
J'ai lu quelque part qu'on prévoit pouvoir régler les problèmes de santé mentale des nouveaux réfugiés à même le système de santé mentale actuel. Il est publiquement connu que nous manquons de psychiatres et de ressources en santé mentale. Nous aurons des problèmes lorsque nous ajouterons ces 6 000 patients gravement malades et traumatisés dans un système qui est déjà surmené. C'est un aspect du problème.
L'autre aspect, c'est que ces patients ont des besoins doubles, parce que, souvent, ils ne parlent pas suffisamment bien anglais pour participer à certains types de psychothérapie, alors il faut habituellement compter sur un interprète. C'est l'un des obstacles qui les empêchent d'avoir accès à des soins de santé mentale.
Il y a aussi des problèmes au moment de planifier les rencontres. J'ai constaté que, parfois, un patient arrive, et l'interprète n'est pas là, ou l'interprète est là, mais pas le patient. D'après mon expérience pratique, tous les réfugiés syriens qui sont mes patients affichent un grave TSPT, l'équivalent, d'un point de vue physique, du fait d'avoir un membre ou deux qui ne fonctionnent pas. S'il s'agissait de 6 000 cas de difformité physique, imaginez tous les efforts que nous ferions pour les aider.
J'ai résumé mes observations en parlant de la mise en place d'un système de dépistage pour déceler ces 6 000 patients, afin qu'ils n'aient pas à souffrir comme ils le font, le tout devant commencer dans leur pays d'origine.
Il y a des obstacles à l'accès aux soins de santé, même lorsque ces soins sont accessibles, ce qui n'est pas le cas; je parle ici de la langue, de la culture, de l'interprétation de la santé mentale ou du TSPT en tant que tel. Comme je l'ai déjà mentionné, la psychothérapie occidentale est en grande partie inefficace.
Dans un monde idéal, il y aurait un système de dépistage en langue arabe, un document de dépistage qui tient sur une page que devraient remplir ces réfugiés pour que l'on puisse connaître, par exemple, le niveau de leur TSPT, afin que nous puissions faire quelque chose pour les aider de façon organisée.
Il faut faire un suivi auprès de ces patients. Le TSPT est un trouble chronique et récurrent. Il apparaît et disparaît. Il faut l'observer pendant une longue période. À la lumière d'une estimation grossière, nous avons besoin de psychiatres supplémentaires dans le système pour assumer la charge de travail que représentent ces personnes, si l'on veut pouvoir les aider.
Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant.
Le président : Merci, monsieur.
Est-ce que vous pratiquez à Toronto?
Dr Khan : Ici, à Ottawa.
Le président : Dans le cadre d'un témoignage précédent, nous avons entendu de telles histoires à un point tel qu'un enfant a été amené chez le dentiste. Dieu merci, le dentiste a fait le travail gratuitement. La mère a oublié que l'enfant était chez le dentiste. Elle s'est présentée à l'école et croyait que son fils avait été kidnappé, ici, à Ottawa et elle a subi un traumatisme. Nous vous remercions de nous avoir fait part de vos observations, et nous aurons beaucoup plus de questions pour vous.
La sénatrice Ataullahjan : Merci à vous tous d'être là.
Au Sénat, nous avons récemment accueilli le ministre. Je vais vous lire ma question :
Le gouvernement a présenté récemment le programme de parrainage privé de réfugiés sur la scène mondiale. Bien que le programme mérite des éloges, le gouvernement devrait reconnaître ses lacunes. Il importe de souligner tout particulièrement que d'innombrables groupes de parrainage de réfugiés syriens partout au Canada, qui ont amassé les fonds nécessaires pour subvenir aux besoins d'une famille de réfugiés pendant un an, attendent toujours, après plusieurs mois, d'accueillir les réfugiés qu'ils souhaitent parrainer.
Monsieur le ministre, vous avez affirmé que le gouvernement fait tout en son pouvoir pour que les Canadiens qui le souhaitent puissent parrainer des réfugiés syriens, mais les mesures et les ressources supplémentaires mises en place pour accélérer le processus n'étaient que temporaires, et l'arriéré demeure.
Bien des sources ont rapporté que les cours de langue pour les réfugiés syriens nouvellement arrivés ont été considérablement réduits ou simplement annulés en raison d'un manque important de financement de la part du gouvernement fédéral.
Puisque l'apprentissage de l'une des langues officielles du Canada constitue la première étape cruciale du processus d'intégration pour les réfugiés nouvellement arrivés, que fait le gouvernement dans l'immédiat...
Je n'ai pas obtenu une réponse satisfaisante, mais il m'a donné certains chiffres. Il m'a dit que 100 p. 100 avaient un logement permanent, 86 p. 100 avaient passé une évaluation de leur compétence linguistique, et 64 p. 100 s'étaient inscrits à des cours. On a appris aujourd'hui qu'à Vancouver de jeunes gens se plaignaient au sujet de l'hébergement et en raison du fait qu'ils avaient besoin d'aide pour s'y retrouver dans le processus d'enseignement au Canada. Dans le cadre d'un reportage de la CBC, hier, il était question du fait qu'il fallait offrir des services personnalisés en santé mentale à l'intention des immigrants et des réfugiés, des services qui tiennent compte de leur culture.
Les problèmes sont énormes, mais le ministre a dit qu'il ne peut rien faire de plus pour les réfugiés syriens. Qu'en pensez-vous?
Je suis désolée de vous balancer cela, mais nous entendons des choses similaires. Il y a des problèmes au chapitre de la formation linguistique et de la santé mentale ainsi que des retards pour les gens qui attendent l'arrivée de la famille qu'ils parrainent. La réponse qu'on m'a donnée ne m'a pas satisfaite.
Mme Keller-Herzog : Au sujet des retards dans le traitement, nous étions pas mal aux anges lorsque, au plus fort de la période où se faisait le transport aérien, les gens de Winnipeg pouvaient régler un dossier en 24 heures. Nous pouvions leur envoyer une demande de parrainage privée complète dans le cadre du programme mixte de RDBV, ce qui signifie que nous devions nous occuper du côté canadien du dossier. Les gens de Winnipeg passaient la demande en revue et la déclaraient complète en une journée, ce qui était fantastique, et alors on pouvait l'acheminer au consulat et au bureau des visas du pays tiers.
Assurément, l'affectation de ressources humaines accrues peut aider à accélérer les choses. Je suis à peu près certaine que le ministre a un personnel limité, mais la bonne gestion consiste justement à réaffecter les ressources aux aspects prioritaires, alors il y a peut-être une marge de manœuvre là.
Pour ce qui est de tous les autres enjeux que vous avez soulevés, nous avons remarqué que chaque famille a différents besoins et doit composer avec différentes contraintes. Dans ma déclaration préliminaire, j'ai souligné certains des points saillants parmi les besoins que nous avons relevés. Je sais, par exemple, que la ville d'Ottawa se prépare pour le 13e mois, à partir duquel une grande part du soutien financier direct à l'égard de l'assistance sociale reposera sur les épaules de la ville. Mais à l'égard de certains des services de santé — les services dentaires ainsi que les services psychologiques et psychiatriques —, il est plutôt clair que le fait d'intégrer des milliers de nouveaux arrivants qui appartiennent à des groupes vulnérables va mettre nos systèmes existants à l'épreuve.
M. Spindari : J'aimerais aborder la question des délais de traitement. Concernant nombre des réfugiés de MCRP, des répondants privés avec qui je travaille tentent de les extraire de la région kurde de l'Irak. Il y a eu beaucoup de retards. Certains dossiers sont à l'étape du traitement depuis environ 10 mois, et rien ne s'est produit.
Certaines des choses que nous avons proposées supposeraient peut-être d'utiliser le sous-traitant local fournisseur de services d'immigration auquel le gouvernement canadien confie la délivrance de visas temporaires pour les visiteurs au Canada et les personnes qui essaient d'aller étudier au Canada. L'entrepreneur en question est l'Organisation internationale pour les migrations. Elle se charge actuellement du traitement des demandes de visa de résident temporaire. Une des choses que nous nous demandions, c'était si cette organisation peut étendre son travail au traitement des demandes de Syriens ici.
Alors, il y a des possibilités. Je crois qu'il y aurait d'autres façons de procéder. Nous étions vraiment ravis lorsque le délai d'exécution était plus rapide, mais les choses commencent à ralentir maintenant.
Révérend Cornelius : Je me ferais l'écho des propos de M. Spindari. Il était entendu, lorsque les 25 000 réfugiés venaient en février, que cela exigerait des ressources supplémentaires. Je crois qu'il est très évident que cette mobilisation d'énergie a créé une deuxième bulle qui requiert maintenant des ressources supplémentaires, et que cela ne va peut-être pas devenir une démarche permanente. Mais je crois effectivement que nous sommes à un point critique où une crise pourrait éclater si vous perdiez toute cette énergie que les Canadiens ont mobilisée de bonne foi et qui est là maintenant, ainsi que l'argent qui se trouve à la banque; nous devons comprendre qu'il s'agit de ce genre de bulle. Nous devrions avoir une façon précise d'intervenir et affecter des ressources humaines à cette fin. Je sais que les gens travaillent très dur, mais il n'y a pas suffisamment de ressources humaines pour tout mener à bien. C'est tout aussi simple que cela, selon moi.
La sénatrice Gagné : Le Canada accueille des réfugiés et des immigrants depuis des lustres. Du point de vue de la gestion des systèmes, que devons-nous changer dans le système pour qu'il fonctionne? Nous avons l'expérience. Nous avons les ressources. J'entends dire qu'il nous faut davantage de ressources, mais il semble y avoir quelque chose de défectueux ou de brisé dans le système, et j'aimerais avoir votre opinion sur le sujet.
Dr Khan : Du point de vue de la santé mentale — et un sénateur a déjà souligné ceci —, notre système est cloisonné, par exemple à l'égard de l'information médicale et des ressources parallèles. J'observe que des éléments font double emploi.
La sénatrice Gagné : Que diriez-vous d'un système dans le cadre duquel les répondants du secteur privé ainsi que le grand public ou le gouvernement travaillent ensemble? Auriez-vous des recommandations à faire concernant un tel système?
M. Spindari : Une recommandation qui est ressortie consisterait à examiner le Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas. À l'heure actuelle, les personnes qui sont désignées aux fins du programme ne sont que du côté du gouvernement. Si nous devions l'utiliser pour la réunification des familles, ce serait vraiment bon. Le fait de pouvoir être désigné par des groupes privés — des personnes qui peuvent participer à cela —, permettrait, je crois, d'atténuer le stress imposé aux réfugiés qui sont déjà là, et le programme va trouver des façons pour les répondants du secteur privé qui sont vraiment intéressés à aider la famille reliée à la famille qu'ils ont parrainée plus tôt. Ce serait peut-être une solution.
La sénatrice Omidvar : Merci à tous. Premièrement, je tiens à vous féliciter pour le travail que vous faites. À l'instar du sénateur Munson, je parraine également une famille. Vous avez présenté des témoignages merveilleux et des idées fantastiques, comme le programme relatif à la manipulation des aliments. J'espère que ma famille pourra tirer parti de cela.
Ma question, par contre, concerne le point faible de tout cela. Je ne parle pas des réfugiés qui sont incapables d'accéder au système. Nous savons qu'il y a des répondants du secteur privé qui ne s'acquittent pas de leurs responsabilités. Nous savons qu'il y a des parrainages qui s'effondrent. Les relations entre deux êtres humains ne se passent pas toujours bien, les gens peuvent ne pas s'entendre.
J'ai entendu dire — et c'est sur ce point que j'aimerais des clarifications — que la plupart des parrainages privés qui échouent dans la collectivité sont des cas où une personne parraine un membre de sa famille. La personne parrainée arrive et, après deux mois, se fait dire : « Eh bien, au revoir. Je n'ai pas vraiment de place pour toi dans ma maison, et je n'ai pas vraiment tout l'argent que j'ai déclaré pouvoir te donner. »
Avez-vous l'impression qu'il s'agit d'un phénomène marginal? Même s'il l'est, il y a des familles à risque. Que faites- vous pour vous assurer que ces familles de réfugiés parrainées ne sont pas complètement laissées à elles-mêmes?
Avez-vous déjà entendu parler de cela? Cela arrive.
Révérend Cornelius : Vous parlez du cas précis où une famille accueille des membres de la famille. On m'appelle probablement une fois par semaine pour me demander de l'aide liée à la réunification familiale. Nous avons un mécanisme pour évaluer la situation, mais nous reconnaissons qu'il y a des limites. En tant qu'organisme, si nous aidons une famille à accueillir des personnes, nous devons nous assurer d'assumer fondamentalement la responsabilité, alors nous devons évaluer la capacité de la famille d'offrir un soutien continu. C'est le genre de travail que nous faisons à l'égard des partenariats privés.
Je ne peux pas me prononcer sur tous les parrainages qui se font partout, mais je crois qu'il importe de soutenir des organismes comme MOSAIC et d'autres qui possèdent l'expérience voulue pour ce qui est de comprendre les cadres financiers et d'offrir des garanties qu'elles feront de leur mieux pour assurer le succès de ces parrainages privés. C'est pourquoi j'ai parlé de veiller à ce que nous ayons des cadres financiers qui sont éthiques et de l'importance de savoir si nous possédons effectivement les capacités requises.
On fait parfois des promesses qu'on ne peut pas tenir, alors il faut évaluer la situation afin de pouvoir donner des assurances quant à notre capacité de tenir ces promesses.
Mme Keller-Herzog : Je crois que votre question touche en fait une foule de relations de soutien différentes. Il y a la relation dans la famille, c'est-à-dire entre le réfugié et le membre de sa famille. Il y a aussi la relation entre le répondant privé et la famille de réfugiés qu'il soutient, et je pense aussi aux réfugiés pris en charge par le gouvernement qui reçoivent relativement peu de soutien.
La première chose que je dirais, c'est que les réfugiés sont des êtres humains, comme vous et moi, et qu'il peut leur arriver de se disputer avec leur famille, et parfois les gens cessent de se parler pendant un certain temps. Alors, j'estime qu'il s'agit tout simplement de gens normaux, et s'il arrive à l'occasion qu'une famille devienne dysfonctionnelle, surtout lorsqu'on parle d'un groupe vulnérable comme celui-ci, ce n'est pas une observation fondée au départ sur quelques exemples isolés, et il n'y a pas lieu de s'en étonner. Ce sont des choses qui arrivent. La question qui s'impose à l'esprit consiste à déterminer s'il y a des structures de soutien permettant de récupérer les personnes qui ont perdu cette structure de soutien.
Je crois que les parrainages privés de réfugiés qui s'effondrent... Dans notre cas, nous avons des groupes de soutien aux familles qui ont plus d'une ou de deux personnes, alors ce n'est pas une question d'incompatibilité des personnalités. Nous avons des groupes de gens, et il y a des mécanismes communautaires où les gens surveillent les relations.
Parfois, dans le cas d'une famille qui s'installe chez une autre famille dans une région très rurale et qui dépend de celle-ci lorsque vient le temps de se déplacer, cette dépendance peut créer une situation plus délicate et fragile. Si nous avons davantage de réfugiés qui s'établissent dans les zones urbaines, c'est en partie pour cette raison.
Je crois qu'il est assez clair que le Canada se vante un peu sur la scène internationale au sujet de son merveilleux système de PPR, mais en même temps nous avons ces cloisonnements qui empêchent les RPG d'obtenir de la collectivité un soutien digne de ce nom. Certaines structures permettant aux RPG de nouer des liens avec la collectivité et d'obtenir du soutien ont été abandonnées, et maintenant nous avons les deux structures cloisonnées.
Comme certains l'ont déclaré ici, il y a au sein de la collectivité beaucoup de bonne volonté qui pourrait être utilisée afin d'assurer plus efficacement l'établissement et l'intégration des RPG. Il s'agit assurément d'un potentiel qui demeure inexploité.
M. Spindari : À MOSAIC, nous faisons de la résolution de conflits. Nous invitons les répondants privés et les réfugiés qu'ils parrainent à se rencontrer — soit collectivement, soit séparément — pour discuter des problèmes et trouver des façons de les régler.
Il arrive que des engagements s'effondrent, mais cela n'est vraiment pas fréquent, c'est un phénomène marginal. Nous avons eu des répondants du secteur privé qui ont loué une maison et tout préparé, et ils ont effectivement commencé à prendre soin de réfugiés pris en charge par le gouvernement, alors c'est la situation contraire. Ils aident des gens à quitter le logement temporaire en leur offrant un endroit où vivre temporairement jusqu'à ce que les autres familles arrivent.
Mais la réalité est que l'effondrement des parrainages privés concerne principalement le parrainage de parents, comme vous l'avez dit, et il arrive parfois que les réfugiés parrainés par le secteur privé ne veuillent pas être un fardeau pour la famille parce qu'ils savent à quel point celle-ci a du mal à joindre les deux bouts. C'est l'autre enjeu.
Le président : La sénatrice Ataullahjan vient de me rappeler la question que j'avais posée au ministre et ce que celui- ci a dit au sujet de la réunification des familles et du fait qu'amener davantage de réfugiés syriens se ferait aux dépens d'autres réfugiés, puisque nous ne pouvons accueillir tous les réfugiés du monde. Mais il semble que c'était sa réponse.
Que pensez-vous de cela? Cela fait partie de la conversation. Trouvez-vous la réponse du ministre satisfaisante? « Désolé, la réunification des familles peut fonctionner, mais elle se ferait aux dépens des autres réfugiés. » Faut-il vraiment que ce soit un ou l'autre? Peut-on faire les deux?
Mme Keller-Herzog : Le fait d'accroître les ressources signifierait que nous n'avons pas besoin de choisir.
Ensuite, si nous voulons que nos nouveaux arrivants se tirent bien d'affaire, il est assez clair que cela va se produire s'ils peuvent compter sur le réseau d'une famille qui est déjà là et qui a déjà commencé à s'établir. Si on part du principe qu'on souhaite la réussite des nouveaux arrivants, alors il est sensé de soutenir des candidats à la réunification familiale.
La sénatrice Andreychuk : Je crois que le sénateur Munson et moi-même siégeons au comité depuis trop longtemps, car il a commencé la question que j'allais poser, et peut-être que je vais en garder l'essentiel pour les fonctionnaires qui témoigneront plus tard.
Le président : Cela s'est déjà produit, ce qui, en tant que président, me rend... il y a en fait un fonctionnaire du gouvernement qui écoute ce témoignage, alors nous aurons une réponse adéquate. Lorsque nous poserons ces questions plus tard, il ne sera pas possible de nous répondre : « Eh bien, nous n'avons pas entendu cela. Nous allons le prendre en note. » C'est juste une idée.
La sénatrice Andreychuk : Juste une idée. Merci.
Du point de vue des politiques publiques, le système d'aide aux réfugiés a été établi pour venir en aide aux personnes très vulnérables qui n'avaient nulle part où aller. Elles ne peuvent retourner dans leur pays, et elles n'ont pas choisi d'être dans cette situation. Nous parlions toujours d'immigration, et puis nous avons créé le système d'aide aux réfugiés.
Je laisse de côté ici les gens qui choisissent de venir au Canada, qui sont sélectionnés pour venir au Canada ou sont encouragés à venir au pays.
Les réfugiés ont quitté une crise qui sévissait chez eux et se sont vu offrir des solutions temporaires. Maintenant, nous avons le partenariat privé. J'aimerais savoir comment vous déterminez qui prendre. On me répond très souvent qu'on prend les personnes qui peuvent être bien intégrées, mais, dans nombre de cas, ce ne sont pas les personnes les plus vulnérables.
Y a-t-il un consensus quant aux facteurs qui ont suscité cette vague de fond populaire à l'égard des réfugiés syriens, alors que le même phénomène ne s'est pas produit pour les gens, par exemple, du Mali ou d'autres groupes dans le monde qui sont dans des camps de réfugiés depuis longtemps? Il y a énormément de personnes déplacées qui sont arrivées à la conclusion qu'elles ne peuvent pas retourner chez elles.
J'aimerais donc savoir d'où vient cet élan collectif du cœur? Est-ce parce que le gouvernement l'a encouragé et facilité? Certains d'entre vous interviennent auprès des réfugiés depuis bien avant la crise qui secoue la Syrie aujourd'hui. Nous sommes ici pour déterminer quelle serait la meilleure politique gouvernementale pour réagir à une crise internationale. La crise ne touche pas qu'une région. C'est une crise mondiale.
J'aimerais donc savoir pourquoi et comment les gens de votre milieu choisissent une personne. Met-on l'accent sur les plus faciles à intégrer ou sur les plus vulnérables, c'est-à-dire sur le besoin?
Révérend Cornelius : Ma réponse comporte deux volets. Premièrement, nous sommes en communication avec un réseau de relations, alors nous avons eu une grande diversité. Nous réagissons à des situations de vulnérabilité extraordinaire. Je travaille actuellement avec trois femmes en Somalie — nous essayons de les amener au Canada — qui sont victimes de violence sexuelle. L'un des problèmes auxquels nous sommes confrontés concerne le fait qu'on leur demande des documents notariés et qu'elles doivent quitter les zones où elles sont en sûreté pour obtenir des documents notariés. C'est de la pure folie, alors nous travaillons avec des gens très vulnérables. Nous travaillons également avec des personnes hautement professionnelles qui sont venues ici.
Cela tient donc au réseau de relations, et nous essayons de ne pas nous mettre dans une situation où nous choisissons les gens, comme on le ferait au moment de remplir un canot de sauvetage.
Je reconnais que nous ne pouvons pas tout faire en ce monde et qu'il faut faire des choix. Du point de vue des politiques publiques, je crois que l'argent est optimisé lorsque l'on mise sur la réunification familiale, sur des situations où il y a un réseau qui accroît les chances de réussite. Ces réseaux contiendraient tout un spectre de personnes très vulnérables et de personnes très professionnelles. En ce sens, la réunification familiale nous évite de devoir faire un choix tout en mettant l'accent sur le potentiel de réussite. C'est le premier volet.
Deuxièmement, au sujet de la crise syrienne, des groupes comme l'OCRA ont conclu un partenariat avec nous en tant qu'Église. Nous avons commencé à regarder la liste de RDBV, et nombre des personnes que nous amenions au pays venaient d'autres parties du monde. La moitié des vôtres ne sont pas Syriens, alors il y a eu cette prise de conscience de l'existence de la crise des réfugiés dans le monde. Je crois que c'est une bonne chose. Pour une raison quelconque, la crise syrienne a remis cet enjeu dans l'esprit des Canadiens; j'espère que les politiques du gouvernement permettront de veiller à ce que notre façon de réagir aux réfugiés reste à l'avant-plan de nos préoccupations nationales. De vraies bonnes politiques publiques permettraient d'encourager cela.
Je reviens au programme mixte des RDBV, car il tire parti d'un partenariat entre le gouvernement et la collectivité. Il y a un sentiment que nous ne sommes pas isolés, et ce partenariat favorise réellement l'application d'une politique gouvernementale consistant à intervenir de façon continue auprès des réfugiés, cette année et dans les années à venir.
Le président : Juste pour clarifier, pourriez-vous nous dire ce qu'est le programme mixte des RDBV?
Révérend Cornelius : C'est le programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas.
Le président : C'est que des Canadiens regardent cette séance télévisée du comité.
Révérend Cornelius : Il prévoit six mois de soutien du gouvernement et six mois de soutien du groupe de parrainage. Bien souvent, le groupe apporte davantage que la moitié, parce que cela prend plus d'argent, en fait.
La sénatrice Andreychuk : Que puis-je répondre lorsque je me rends dans un camp de réfugiés et qu'on me dit : « Je n'ai aucune attache au Canada. Je n'y ai aucune famille. Pourquoi n'ai-je pas autant d'importance à vos yeux? »
Le président : J'ignore s'il y a une réponse à cela, mais je sais que la sénatrice Omidvar voudrait poser rapidement une question complémentaire à la vôtre avant que nous passions à la sénatrice Poirier.
La sénatrice Omidvar : J'ai une question lourde de sous-entendus. N'est-il pas vrai que le nombre de RDBV venant au Canada est en baisse, et non en hausse?
Révérend Cornelius : Des gens viennent me voir au sujet d'une participation éventuelle au programme mixte des RDBV, et nous n'avons pas accès à ce programme actuellement. Je crois comprendre que le programme mixte des RDBV ne fonctionne plus de la même façon qu'autrefois, et nous encouragerions le gouvernement à le rétablir. Si vous cherchez à favoriser la réunification des familles, ce programme constitue un très bon modèle pour tirer parti de la capacité des groupes communautaires et du gouvernement au chapitre de la réunification familiale.
La sénatrice Poirier : Merci à tous d'être ici. J'aimerais vous décrire une situation et savoir si ce genre de difficulté se manifeste ailleurs.
Je viens du Nouveau-Brunswick, l'une des petites provinces. Même nos grandes villes sont très petites par comparaison à nombre des grandes villes du Canada, où beaucoup de réfugiés ou d'immigrants s'établissent. Ils ont des réseaux sociaux et des attaches communautaires avec beaucoup d'autres personnes à ces endroits.
Or, une situation a été abordée à plusieurs reprises dans les journaux de la province au cours des dernières semaines. En novembre dernier, les gens du Nouveau-Brunswick ont ouvert leur cœur et leur foyer. J'ignore combien de personnes ont été parrainées par le secteur privé ou par le gouvernement, mais un peu plus de 1 400 personnes sont arrivées dans la province du Nouveau-Brunswick. De ce nombre, seulement 400 personnes environ, d'après ce que j'ai lu, étaient âgées de plus de 18 ans. Il y avait une représentation égale d'hommes et de femmes parmi les personnes majeures. De nombreux Néo-Brunswickois ont été étonnés d'apprendre que seulement 103 personnes avaient trouvé un emploi au Nouveau-Brunswick.
Nous savons que le Nouveau-Brunswick a une population vieillissante et cherche vraiment à ouvrir ses portes à un plus grand nombre d'immigrants. En outre, je crois qu'une demande a été reçue récemment ou qu'il y a des discussions entre le gouvernement du Nouveau-Brunswick et le gouvernement du Canada concernant le fait que le Nouveau- Brunswick est disposé à accueillir encore 2 000 à 2 500 personnes de plus.
J'ai cru avoir lu quelque part qu'il y avait une condition : la province doit démontrer qu'elle est en mesure de les soutenir et de les conserver. C'est la crainte que certaines personnes entretiennent à l'égard des 1 400 personnes qui sont ici. Il n'y en a que 103 qui travaillent actuellement, et leur première année se termine en novembre. De ces personnes, un peu plus de 400 seulement sont âgées de plus de 18 ans. Il est possible que les moins de 18 ans apprennent notre langue et notre culture et s'intègrent, mais arriverons-nous à les garder au Nouveau-Brunswick assez longtemps pour qu'ils ne s'établissent pas dans une grande ville au Canada? C'est certainement une difficulté pour les petites provinces et les collectivités rurales.
Révérend, vous affirmez avoir parrainé des milliers de personnes dans différentes régions au pays. D'autres personnes que je connais s'attachent davantage à une ville particulière, mais est-ce une difficulté que vous avez observée dans d'autres petites provinces ou régions rurales de nos provinces au pays? Que pouvons-nous faire, ou comment pouvons-nous aider à faire en sorte que ces gens réussissent mieux à s'intégrer chez nous et à trouver un emploi?
J'ai pris en note une idée que j'ai aimée, révérend. Vous approchez différentes communautés, organisations et entreprises locales pour voir s'il y aurait moyen pour elles d'accueillir des gens. Le Nouveau-Brunswick est l'une des seules provinces officiellement bilingues, alors vous avez affaire à des francophones et à des anglophones
Voudriez-vous nous faire part de tout commentaire ou de toute idée que vous pourriez avoir qui pourrait aider les petites provinces voulant accepter des réfugiés et veiller à ce qu'ils restent?
M. Spindari : Peut-être que je vais aborder la question de l'emploi d'abord. Il faut comprendre, au sujet des gens que nous avons reçus en Colombie-Britannique, qu'environ 60 p. 100 des arrivants étaient âgés de moins de 18 ans, alors ils étaient jeunes.
La plupart du temps, les mères restent à la maison, alors elles travaillent à domicile tout en prenant soin de six ou de quatre enfants à la fois. Si c'est le père qui est à la recherche d'un emploi, alors le nombre serait comme celui que vous avez mentionné. Une centaine de personnes sur 400 qui trouvent un emploi, ce serait un bon résultat.
C'est difficile pour les petites localités. Nous avons connu les mêmes problèmes en Colombie-Britannique. Nous avions un merveilleux groupe de parrainage à Pender Island, près de Victoria. Il a parrainé une famille qui n'est pas restée.
Il y a des déplacements entre toutes les collectivités et populations, et je crois que les Syriens n'y échappent pas. Je n'ai pas vu beaucoup de Syriens changer de provinces, alors j'espère qu'ils resteront au Nouveau-Brunswick.
Catherine Fleming, Sensibilisation, Ottawa Centre Refugee Action : Je crois que ce chiffre — 103 personnes employées — n'est pas étonnant. D'après notre expérience au centre, nombre des réfugiés qui sont arrivés n'ont peut- être pas fait d'études dans leur pays et ont fortement besoin de cours d'anglais langue seconde. Par exemple, il est très difficile de passer de l'arabe à l'anglais.
Nous sommes maintenant au stade où les réfugiés veulent se concentrer sur l'apprentissage du français ou de l'anglais comme langue seconde afin de trouver un meilleur emploi. Les programmes dont Brian a parlé sont les choses que j'encouragerais.
Par exemple, dans une famille avec laquelle Angela et moi-même travaillons, le mari a demandé si l'apprentissage de l'anglais pouvait aller au-delà de la première année, car ils ne sont pas aussi prêts à entrer dans la population active qu'ils le voudraient. Ils n'ont peut-être pas appris leur métier par des voies officielles dans leur pays — comme la Syrie —, alors ils devront bien maîtriser l'anglais ou le français afin de pouvoir participer à ces programmes de certification.
Ce sera long. Si nous continuons de nous attacher à ces programmes qui misent sur l'emploi assorti d'une formation informelle en milieu de travail, combinée avec des ressources continues pour les cours d'ALS ou de FLS, c'est la bonne façon de faire.
La sénatrice Poirier : Cela n'est offert que pour les 12 premiers mois, alors maintenant ils relèveront de la compétence des programmes sociaux provinciaux?
Mme Fleming : Oui. Mais ils peuvent continuer leur apprentissage de la langue anglaise au-delà de la première année, il n'y a pas de coupure du service après un an. Je crois que c'est fédéral.
M. Spindari : Oui, ils sont offerts par l'intermédiaire des cours de langue pour les immigrants au Canada, qui est un programme fédéral. Ce n'est pas limité à un an.
Mme Fleming : Non, ils peuvent continuer.
La sénatrice Hubley : Je vous remercie de vos exposés ce matin.
La Commission de la santé mentale du Canada a publié un rapport où elle traite de l'importance économique et sociale de la prestation de services de santé mentale adaptés à la population d'immigrants et de réfugiés du Canada. Elle a insisté sur l'importance d'une intervention précoce.
Vos organismes respectifs travaillent maintenant en première ligne. Quelle procédure vous permet de déterminer si les adultes ou les enfants sont aux prises avec des problèmes de santé mentale? Y a-t-il au sein de votre organisme des personnes qui sont formées pour reconnaître de tels problèmes? Avez-vous les ressources voulues pour diriger les personnes vers un traitement?
Le président : Docteur Khan, êtes-vous en contact avec ces organismes, ou est-ce qu'on fait appel à vos services?
Dr Khan : Non, je suis un particulier. Je serais ravi de rencontrer certains d'entre eux. Si des suggestions sont formulées en ce sens, j'en serais très heureux.
Comme l'honorable sénatrice vient de le dire, nous devrons savoir combien de personnes ont besoin d'une aide supplémentaire, étant donné qu'il s'agit surtout d'enfants. Nous avons de l'espoir pour ces enfants également. Mais le TSPT ne nous permet pas d'entretenir encore de l'espoir pour ces enfants, pour l'avenir. Le traumatisme, pour tous les réfugiés, dans tous les pays, dans toutes les guerres, est une chose horrible et laisse des traces permanentes. Si les services sont coordonnés et supervisés centralement, nous pourrions obtenir de telles données.
Révérend Cornelius : Je peux répondre à votre question directement, de deux manières.
Quand nous travaillons avec des groupes de parrainage, nous savons que les formulaires établissent dans les lignes directrices des montants minimums, mais nous recueillons en fait beaucoup plus d'argent que cela, car nous sommes au fait des facteurs d'imprévu, ce qui nous aide à assurer l'intégration.
Nous avons collaboré à des projets visant à soutenir des gens qui, nous avons fini par le comprendre, avaient besoin de conseils, et nous nous sommes arrangés pour qu'ils aient accès à du counseling privé, à même nos propres fonds. Cela ne fait pas partie de leur budget régulier. Nous sommes nombreux à reconnaître que cela fait partie des enjeux qu'ils amènent avec eux.
L'avantage des groupes de parrainage privés qui en ont pris conscience tient à nos réseaux, grâce auxquels nous pouvons les mettre en contact avec ces services. Les professionnels sont nombreux, dans ces cercles. Un certain nombre d'entre vous disent faire partie de ces cercles; vous pouvez constater l'expertise qui est rattachée aux cercles de bénévoles de même que leurs ressources financières.
Nous comprenons également que ce n'est pas parce qu'une année prend fin que les relations doivent prendre fin. Les gens sont nombreux à beaucoup hésiter à utiliser des services de santé mentale professionnels, car cela ne fait pas partie de la culture, ce n'est pas quelque chose qu'ils ont déjà vécu, et c'est pourquoi, en fait, ce sont plutôt des réseaux informels qui offrent du soutien à ce chapitre. Encore une fois, c'est la raison pour laquelle les groupes de parrainage privés tirent avantage de l'énergie des bénévoles qui se sont mobilisés.
M. Spindari : À Vancouver, tous les réfugiés parrainés par le gouvernement et la plupart des réfugiés parrainés par le secteur privé font l'objet d'une évaluation médicale dans une clinique spécialisée, la clinique Bridge, qui fait partie de Vancouver Coastal Health. On y fait des évaluations de toutes sortes, et si un besoin en santé mentale est cerné, la clinique s'occupera de l'aiguillage.
Je suis tout à fait d'accord avec le révérend. Le réseau de soutien des personnes qui s'occupent des groupes est axé sur le soutien dont les familles ont besoin étant donné que, sur le plan culturel, les gens n'ont pas l'habitude de se préoccuper de santé mentale et de demander du soutien professionnel en santé mentale.
Mme Keller-Herzog : J'aimerais vous raconter une petite anecdote.
L'une des réfugiées que nous avons accueillies avait un abcès dentaire. Son dentiste lui a conseillé de prendre des antibiotiques et ensuite d'obtenir un traitement médical. Elle ne fait pas confiance aux fournisseurs de soins dentaires. Elle prend des analgésiques depuis quelques mois déjà. Cette situation est pour nous extrêmement préoccupante. Le problème, même dans les cas où la douleur physique est évidente, n'est pas lié à un aiguillage. Elle sait qu'elle pourrait consulter un dentiste. Elle a dit que ce n'était pas une question de sexe, car ce dentiste est un homme. Donc, l'aiguillage a été fait, mais la confiance n'est pas au rendez-vous, et elle ne comprend pas que les services peuvent être utilisés.
La suggestion des travailleurs sociaux voulant qu'on fasse un suivi des aiguillages, qu'on continue à distribuer les brochures, n'est pas vraiment utile. Comme Brian le disait, des relations axées sur la confiance et la sensibilisation, la possibilité de savoir si une personne est exploitée financièrement, de cerner les problèmes éventuels, voilà les leviers clés, en réalité.
Le sénateur Ngo : Nous recommandons entre autres dans notre rapport de supprimer le prêt pour le transport. Pensez-vous que les prêts aux immigrants pour le transport représentent pour les nouveaux réfugiés un fardeau économique? Pensez-vous qu'il engendre beaucoup de stress? Que pourrions-nous faire pour alléger ce fardeau?
Le président : Vous pouvez répondre par l'affirmative aux deux questions.
M. Spindari : Nous estimons que c'est un fardeau. Le programme a un objectif humanitaire et il crée un fardeau pour les réfugiés. Ce serait magnifique s'il était supprimé.
Le sénateur Ngo : Si le prêt pour le transport n'est pas supprimé, il serait d'environ 10 000 $ pour une famille de six personnes arrivant au Canada; pensez-vous que cette famille peut rembourser ce prêt?
M. Spindari : Elle peut le rembourser. La plupart des gens qui ont reçu ce montant arrivent à le rembourser, mais ils doivent pour cela couper ailleurs. Ils ont utilisé les subventions pour frais de garde d'enfants qu'ils touchent, de façon à faire ces paiements. La volonté est là. Ils font cela. Mais, étant donné que nous considérons que tout ce programme est un programme humanitaire, si le prêt était supprimé, cela faciliterait leur transition et leur intégration et leur établissement dans leur collectivité.
Le président : Merci beaucoup. Cela a été extrêmement utile. Nous avons compris, lorsque nous avons entamé cette étude plus tôt au cours de l'année, que nous avions besoin d'une autre séance, et nous allons probablement en avoir besoin d'autres. Vous nous avez présenté des éléments de preuve incroyables, en faisant preuve de compassion. Nous sympathisons avec vous, évidemment. Nous allons bientôt présenter nos recommandations. Il s'agissait auparavant d'observations, mais on dirait qu'elles se sont transformées en recommandations. Nous avons recueilli davantage d'éléments de preuve selon lesquels, sur le terrain, il y en a encore beaucoup plus à faire pour les familles et nos partenaires de la société canadienne, et nous vous félicitons, tous autant que vous êtes, pour ce que vous faites.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, nous avons reçu des fonctionnaires, nous avons accueilli le ministre, mais après le congé estival et le rapport provisoire où nous avons présenté nos observations et les commentaires des nombreuses personnes qui collaborent à ce programme, nous avons plus de questions et nous savons que les fonctionnaires ont des réponses.
Pour notre second groupe de témoins, nous recevons aujourd'hui Dawn Edlund, sous-ministre adjointe déléguée, Opérations, du ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada; Ümit Kiziltan, sous-ministre adjoint délégué par intérim, Politiques stratégiques et de programmes; Corinne Prince St-Amand, directrice générale, Intégration—Bureau d'orientation relatif aux titres de compétence étrangers; et Bruce Grundison, directeur principal.
Si j'ai bien compris, c'est Mme Edlund qui commencera. Vous avez la parole. Bienvenue.
[Français]
Dawn Edlund, sous-ministre adjointe déléguée, Opérations, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada : Je vous remercie, monsieur le président, de nous avoir invités à comparaître devant votre comité aujourd'hui.
[Traduction]
Nous sommes heureux de pouvoir faire le point sur l'évolution des choses, dans le cadre de l'initiative de réinstallation des réfugiés syriens, depuis la comparution du ministre McCallum devant votre comité, en mai. Nous remercions également le comité de son étude de cet enjeu important ainsi que des observations préliminaires qui ont été publiées en juillet. Aujourd'hui, ma déclaration préliminaire portera sur ces observations.
En ce qui concerne le traitement, nous avons reçu, depuis le 4 novembre 2015, plus de 31 000 réfugiés syriens qui se sont établis dans plus de 300 collectivités de toutes les régions du Canada. Aujourd'hui, nous sommes heureux de pouvoir vous annoncer que 100 p. 100 des réfugiés parrainés par le gouvernement qui sont arrivés avant la fin de février ont déjà obtenu un logement permanent, ce qui représente une première étape importante sur la voie de l'intégration. Nous sommes également en train de traiter plus de 20 000 autres demandes.
Globalement, nous sommes en voie de réaliser notre engagement à accueillir 25 000 réfugiés parrainés par le gouvernement d'ici le 31 décembre. Il s'agit à la fois de réfugiés parrainés par le gouvernement et de réfugiés désignés par un bureau des visas. Nous devrions également atteindre notre cible consistant à terminer le traitement de toutes les demandes de parrainage privées de réfugiés syriens qui ont été présentées avant la fin du mois de mars de cette année, d'ici la fin de 2016 ou au début de 2017. Cela représente environ 12 000 réfugiés parrainés par le secteur privé.
Bien sûr, tout cela s'inscrit dans le contexte de la réinstallation de plus de 44 000 réfugiés au Canada, pendant l'année civile, ce qui représente une très importante augmentation par rapport à ce que nous faisons normalement chaque année en ce qui concerne la réinstallation de réfugiés.
En ce qui concerne les prêts aux immigrants, le comité a soulevé quelques préoccupations touchant le système actuellement utilisé pour le programme. Je puis vous affirmer que, compte tenu des conclusions de l'évaluation du programme faites à l'automne 2015, le ministère explore des solutions de réforme possibles du programme, et nous présenterons au ministre des conseils stratégiques touchant diverses options.
Il importe également de souligner que les gens qui ont de la difficulté à faire leurs paiements peuvent demander un report du remboursement, qui peut se faire jusqu'à 24 mois plus tard, et que, en tout temps, les gens qui se retrouvent en difficulté peuvent demander le réexamen de leurs modalités de remboursement de façon à ne pas devoir faire face à des fardeaux supplémentaires indus. Nous avons passé notre site web au peigne fin, pendant l'été, dans le but de clarifier cette information et de bien la mettre en évidence de façon que les gens puissent la trouver.
[Français]
La présence des réseaux sociaux et des fournisseurs de services offrant du soutien est essentielle à l'intégration de tous les réfugiés, pas seulement des Syriens.
Cela est vrai dans tous les domaines. Toutefois, le rapport provisoire de votre comité a mis en évidence des besoins spécifiques dans les domaines de la santé mentale et des services destinés aux jeunes.
[Traduction]
IRCC et ses partenaires, par exemple les fournisseurs de services, les répondants, les professionnels de la santé et des intervenants d'autres domaines, travaillent de concert afin d'être prêts à répondre aux besoins en santé mentale des réfugiés. Tous ceux qui sont admissibles au Programme fédéral de santé intérimaire auront droit à la même couverture. Elle comprend les soins de base, comme les soins couverts par l'assurance-maladie provinciale ou territoriale, et offre des avantages supplémentaires.
En ce qui a trait à la santé mentale, en particulier, cela comprend des services de psychothérapie privés, si c'est le médecin principal qui le prescrit et la couverture des médicaments d'ordonnance auxquels ont droit également les Canadiens qui touchent des prestations d'aide sociale.
Le gouvernement est prêt à s'attaquer à ces enjeux à toutes les étapes de la réinstallation, mais, conformément aux conseils des experts, nous comprenons que la meilleure façon de répondre à ces besoins consiste à offrir un environnement stable et positif, puisque les besoins se précisent souvent après que les réfugiés se sont établis dans leurs collectivités de destination.
En ce qui concerne les services destinés aux jeunes, le programme de réinstallation d'IRCC offre du financement pour les travailleurs des services d'établissement affectés à quelque 3 000 écoles primaires et secondaires qui accueillent un nombre élevé d'étudiants immigrants. Ces travailleurs offrent des services spécialisés et adaptés à la culture de même que des conseils sur des questions ponctuelles liées à la réinstallation, à l'éducation et à la santé mentale.
Vous avez peut-être entendu parler de la semaine de l'orientation des nouveaux arrivants, qui a lieu dans les écoles avant le début de l'année scolaire. Ces séances comprennent des activités conçues de manière à informer les étudiants au sujet des personnes et des ressources qui peuvent les aider à s'adapter à leur nouvelle école. Elles préparent les élèves nouvellement arrivés, réduisent leur niveau de stress et d'anxiété par rapport à la transition et les amènent à participer plus rapidement à la vie de leur nouvelle école.
[Français]
Dans l'ensemble, les réfugiés syriens qui sont arrivés au Canada obtiennent de l'information, trouvent des emplois, acquièrent des compétences linguistiques, mais le processus prendra du temps.
[Traduction]
Nous sommes en train de procéder à une évaluation visant à déterminer comment s'intègrent les Syriens qui sont arrivés au Canada avant le 1er mars, et les premières constatations révèlent que, parmi les réfugiés parrainés par le secteur privé qui ont participé à l'évaluation, plus de la moitié avaient déjà trouvé un emploi, ce qui est très encourageant. Le taux d'emploi des réfugiés parrainés par le gouvernement, qui maîtrisent beaucoup moins bien la langue, en général, que les réfugiés parrainés par le secteur privé, serait d'environ 12 p. 100, aujourd'hui, selon l'évaluation. Cela peut sembler peu, mais, encore une fois, c'est un bon premier pas.
Étant donné que la majorité des réfugiés syriens auront besoin pour commencer de cours de français ou d'anglais, il faudra attendre un certain temps avant qu'ils soient nombreux à posséder les compétences linguistiques nécessaires pour faire partie de la population active.
[Français]
La formation linguistique représentait une grande priorité dans le cadre de l'établissement et de l'intégration des réfugiés.
[Traduction]
Nous savons qu'il n'a pas toujours été facile de répondre aux besoins en formation linguistique, mais nous sommes en mesure d'annoncer que, à la fin du mois d'août, plus de 9 700 Syriens adultes, soit 87 p. 100 des adultes admissibles à une formation linguistique à l'extérieur du Québec, avaient déjà subi cette importante évaluation des compétences linguistiques, qui nous permet de savoir à quel niveau de cours il faut les inscrire. Sur l'ensemble des personnes dont les besoins en formation linguistique avaient été évalués, plus de 6 100 personnes, soit 64 p. 100 du total, étaient déjà inscrites à un cours de formation linguistique financé par IRCC.
Puisque les organismes fournisseurs de services ont eu accès à un financement supplémentaire avant la fin du mois de juin, nous nous attendons à ce que ce nombre augmente. Plus ils reçoivent de financement, plus ils peuvent embaucher du personnel et aménager de salles de classe. C'est tout simplement ainsi que cela fonctionne.
En ce qui concerne l'évaluation rapide des impacts, dont j'ai parlé il y a une minute, les premières constatations révèlent que 95 p. 100 des réfugiés parrainés par le gouvernement qui ont fait l'objet de l'étude sont inscrits à un type ou un autre de cours de formation linguistique. Peu importe que le cours soit donné par IRCC ou la province, ou qu'il s'agisse de cours de conversation, cette aide leur est offerte. Dans le cas des réfugiés parrainés par le secteur privé, la proportion est de 79 p. 100.
La demande de cours linguistiques financés par le gouvernement fédéral est élevée, et c'est pourquoi IRCC continue à collaborer avec les organismes fournisseurs de services et avec les autres ordres de gouvernement afin de déterminer les besoins, de cerner les occasions de partenariat et d'assurer une approche coordonnée.
Il convient également de souligner que le soutien au revenu offert par le gouvernement fédéral prend fin 12 mois après l'arrivée tandis que les services d'aide à l'établissement se poursuivent, ce qui veut dire que les cours de formation linguistique et les services de soutien liés à l'emploi sont maintenus.
Le comité, dans son rapport provisoire, a suggéré d'accélérer le temps de traitement de la prestation fiscale pour enfants, pour les réfugiés, de façon à leur éviter des problèmes financiers indus. Nous tenons à assurer au comité que nous avons travaillé avec l'Agence du revenu du Canada pour accélérer le versement de la prestation fiscale pour enfants. Étant donné les changements annoncés dans le budget de 2016, cela représentera une augmentation importante pour bon nombre de familles de réfugiés syriens. Nous travaillons toujours avec l'Agence du revenu du Canada, et la prochaine étape sera de nous assurer que les familles remplissent leurs déclarations de revenus de façon que ces prestations si nécessaires ne soient pas interrompues. Nous travaillons en ce moment même avec l'Agence du revenu du Canada à un plan en ce sens pour que cela se sache.
Vous êtes probablement nombreux à vous demander ce qui attend maintenant les réfugiés syriens, qui vont bientôt arriver à la fin de leur première année au Canada et ne bénéficieront plus du parrainage financier du gouvernement fédéral ou du secteur privé. Je vous rassure, IRCC travaille avec ses partenaires de tous les secteurs dans ce dossier. La semaine dernière, justement, le ministre a eu une discussion franche avec ses homologues des provinces et des territoires au sujet des défis qui se profilent, ce qu'on a appelé le « 13e mois ». Le Canada s'occupe depuis longtemps de la réinstallation des réfugiés, et nous avons appris grâce à cette expérience que la transition vers la vie au Canada se poursuit après la première année de soutien. Certains réfugiés qui sont aujourd'hui des résidents permanents font désormais partie de la famille. Ils ne sont plus des réfugiés isolés. Ils réussiront rapidement, même si cela peut prendre plus de temps à d'autres. C'est la réalité pour tous les réfugiés que nous avons aidés à se réinstaller.
Notre objectif, c'est que les réfugiés deviennent autonomes et aient un emploi rémunérateur. C'est un objectif à long terme qui suppose la participation de tous les ordres de gouvernement ou de tous les intervenants, y compris le milieu des affaires et la société civile.
[Français]
En conclusion, l'initiative de réinstallation des réfugiés syriens représentait une situation exceptionnelle et temporaire qui a exigé la prise de mesures extraordinaires.
[Traduction]
Nous savons que, outre les réfugiés syriens, il y a au Canada de nombreuses populations de réfugiés qui ont besoin de notre protection, et c'est pourquoi nous continuons à traiter les demandes de ces autres populations de réfugiés conformément aux normes en utilisant tous les moyens à notre disposition.
Donc, même s'il reste beaucoup de travail à faire tant pour intégrer les réfugiés syriens que pour honorer notre engagement à l'égard de la réinstallation d'autres populations vulnérables, nous sommes sûrs de pouvoir avec tous les Canadiens nous montrer à la hauteur.
Le président : Merci beaucoup de ces informations et de cette mise à jour. Comme vous l'avez entendu dire, nous avons tout un tas de questions à poser. Nous sommes vraiment heureux que vous soyez présents.
La sénatrice Ataullahjan : Merci beaucoup de cet exposé. C'était presque comme si le ministre venait témoigner de nouveau, étant donné les réponses qu'il m'a données en Chambre. Mais peu importe, je tiens à vous dire merci.
Pour accélérer le traitement des réfugiés syriens, il a fallu y a affecter 40 employés de plus. Leur tâche a pris fin le 18 juin 2016. Ces fonctionnaires sont-ils revenus parce que le traitement de toutes les demandes des familles de réfugiés parrainées était terminé? Sinon, pourquoi seraient-ils revenus au Canada?
Est-ce que les réfugiés ont été informés dans leur langue maternelle des options relatives au remboursement du prêt ou est-ce que ces options n'étaient expliquées que sur un site web?
Mme Edlund : Pour répondre à votre première question, nous avons organisé une opération éclair de six semaines environ, en mai et juin, à Beyrouth, pour respecter le troisième engagement pris par le gouvernement en lien avec les réfugiés parrainés par le secteur privé, c'est-à-dire un peu plus de 12 000 personnes qui avaient fait parvenir leur demande avant la fin du mois de mars. Pour respecter cet engagement, qui visait à traiter ces demandes avant la fin de 2016 ou dès le début de 2017, nous avons dépêché une équipe d'un peu plus de 40 personnes qui ont pu commencer le processus des entrevues dans le cadre d'une opération éclair. Nous avons continué le traitement de ces demandes pendant l'été, et il n'est pas encore fini. D'autres employés ont été envoyés en service temporaire sur place, à Beyrouth, par exemple. Nous avons donc augmenté notre effectif afin de réaliser notre objectif dans les délais fixés.
La sénatrice Ataullahjan : Vous êtes en train de me dire que les 40 employés en question sont toujours en affectation? Ils ne sont pas revenus au Canada?
Mme Edlund : Si vous voulez parler de ces 40 employés en particulier, oui, ils sont probablement retournés à leur mission d'attache ou sont de retour au Canada. Mais ils ont été remplacés par d'autres employés en service temporaire d'un autre échelon, tout simplement.
Bruce Grundison, directeur principal, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada : Il a fallu donner un grand coup pour enclencher le processus de traitement de façon à respecter l'engagement pris pour l'année, et cela s'inscrit dans le plan. C'était une mesure temporaire. Il nous arrive souvent de dépêcher des employés pour des périodes de six semaines. Nous avons tout simplement envoyé un plus grand nombre d'employés pour une période de six semaines.
La sénatrice Ataullahjan : Est-ce que vous vérifiez si les besoins ont été comblés ou est-ce que vous les envoyez automatiquement pour six semaines? S'il y a toujours un énorme arriéré, est-ce que cela compte? Vous les envoyez pour six semaines, ils font ce qu'ils peuvent, puis ils sont rappelés? Est-ce ainsi que cela fonctionne?
M. Grundison : Ils ont fait la tâche que nous leur avions confiée, qui consistait à traiter plusieurs milliers de demandes, de façon que le traitement s'est poursuivi à un bon rythme et que nous puissions respecter l'engagement avant le début de 2017. C'était nécessaire de le faire. Le traitement n'a jamais cessé. Il a fallu tout simplement donner un grand coup au début.
Mme Edlund : En ce qui concerne le plan, lorsque nous avons eu à interviewer un si grand nombre de réfugiés, et compte tenu de la date d'échéance, soit la fin de 2016 ou le début de 2017, nous avons envoyé dès le départ un assez grand nombre d'employés afin de donner un bon coup, puis nous avons continué à traiter ces dossiers tout au long de l'été et de l'automne. Nous n'avons tout simplement plus besoin d'autant d'employés pour respecter le délai que nous nous sommes fixé.
La sénatrice Ataullahjan : Vous n'avez pas besoin d'autant d'employés, parce que le besoin n'est plus là? Les demandes sont moins nombreuses?
Mme Edlund : Les demandes sont toujours très nombreuses. Un grand nombre de demandes concernant des réfugiés parrainés par le secteur privé ont été présentées après le 31 mars, mais elles ne sont pas comprises dans notre engagement relatif au traitement des demandes pour le moment.
La sénatrice Ataullahjan : Vous avez sûrement entendu le témoignage précédent du groupe de témoins que nous avons reçu avant vous. Nous nous intéressons aux enjeux en santé mentale; nous nous intéressons aux cours de formation linguistique, aux retards et à la réunification des familles.
Le Globe and Mail a publié un article sur les jeunes réfugiés syriens de Vancouver, qui affirment être préoccupés par le coût élevé de la vie et avoir de la difficulté à évoluer dans un système d'éducation complexe. Les jeunes gens ont besoin d'aide. Nous l'avons entendu dire de témoins à Montréal également, et en particulier en ce qui concerne les gens qui aimeraient obtenir un diplôme. Y aura-t-il des mesures d'aide pour les jeunes?
Et que faisons-nous quant aux enjeux en santé mentale? Nous avons entendu un médecin qui disait qu'à son avis, nous allons faire face à une explosion de problèmes de santé mentale une fois que les réfugiés se seront installés. Je félicite le gouvernement de ce qu'il a fait dans le dossier du logement. Une fois que les réfugiés seront établis, la vie reprend son cours normal. On nous a avertis : c'est à ce moment-là que les enjeux en santé mentale exploseront. Est-ce qu'un certain programme a été mis en place à ce chapitre? Est-il prévu qu'il y en ait un?
Mme Edlund : II est certainement prévu. Je vais en parler rapidement, puis je passerai la parole à ma collègue, Corinne Prince St-Amand.
La santé est un dossier de compétence provinciale, mais j'aimerais souligner que plusieurs volets de nos programmes de réinstallation explorent la question de la santé mentale et en font une priorité.
Nous offrons plusieurs programmes qui favorisent l'indépendance, le rétablissement de la santé et l'intégration dans la collectivité, de manière que les gens ne se sentent pas isolés. Nous avons travaillé avec l'Association canadienne pour la santé mentale à l'élaboration des programmes destinés à nos travailleurs des services d'établissement, car nous voulons les former afin qu'ils puissent reconnaître les signes avant-coureurs de ce qui pourrait se révéler plus tard un problème de santé mentale.
J'ai dit dans ma déclaration préliminaire que, maintenant que nous avons placé ces gens dans un environnement sûr et stable, nous nous attendons à ce que leurs besoins en santé mentale soient beaucoup plus facilement dépistables et qu'ils soient urgents, puisqu'ils sont maintenant en sécurité. Mais nous devons travailler de concert avec les provinces et territoires et avec certaines associations.
De manière générale, le plan consiste à travailler tous ensemble. Il s'est passé entre autres choses formidables que les organismes sont nombreux, par exemple l'Association canadienne pour la santé mentale, les Services aux immigrants de la Colombie-Britannique, notre propre évaluation rapide des impacts, les informations que nous fournit le Conseil de recherches en sciences humaines, dont nous finançons la recherche, et nous étudions cette population en détail pour tenter de cerner ces besoins et de voir où sont les lacunes pour savoir s'il faudrait du financement pour combler ces lacunes.
Corinne Prince St-Amand, directrice générale, Intégration-Bureau d'orientation relatif aux titres de compétence étrangers, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada : Comme Dawn l'a mentionné, la passation des programmes fédéraux vers le système de santé des provinces a une importance critique. Nos fournisseurs de services, à l'échelle du pays, sont le premier guichet auquel s'adressent les réfugiés. Puisqu'ils assurent une évaluation des besoins et offrent aussi des cours de formation linguistique, ils peuvent cerner des problèmes liés à la santé mentale. Une fois les problèmes cernés, une première évaluation est faite, et un aiguillage vers les autorités de santé provinciales compétentes est effectué.
Comme vous le savez très bien, les problèmes de santé mentale ne sont pas aussi visibles que les problèmes de santé physique. Comme Dawn l'a dit, le personnel de l'organisation qui fournit des services a suivi une formation pour être en mesure de cerner ces problèmes et de les aborder de façon appropriée avec le client puis de faire un aiguillage approprié.
Nous avons travaillé en très étroite collaboration avec la Commission de la santé mentale du Canada et nous avons surveillé de très près le rapport qu'elle vient de publier hier; sans surprise, ce rapport établissait que ces populations utilisaient les services en santé mentale moins fréquemment que le public canadien. C'est un enjeu que nous avons soulevé la semaine dernière, à l'occasion de la rencontre des ministres provinciaux et territoriaux, à Winnipeg, et nous allons continuer de collaborer étroitement avec nos collègues des provinces et territoires de même qu'avec les fournisseurs de services avec lesquels nous travaillons.
La sénatrice Ataullahjan : Ces populations savent-elles qu'elles peuvent s'adresser à des établissements de santé mentale? C'est le gouvernement fédéral qui a fait entrer les réfugiés. Je sais que c'est une responsabilité provinciale, mais, à un moment donné, il faut communiquer avec les provinces et expliquer que c'est un enjeu.
C'est ce que disent les médecins. Nous avons entendu des témoignages convaincants. Nous avons entendu ici même aujourd'hui dire que c'était un enjeu et que cela restera un enjeu. On peut retirer quelqu'un d'une zone de guerre, le faire venir ici et lui offrir un environnement sûr, mais les horreurs qu'il a dû traverser ne disparaîtront pas. Je ne suis pas médecin ni psychiatre, mais je sais que des problèmes de santé mentale se présenteront.
Le président : Le médecin avait donné des chiffres, disant que 6 000 des 32 000 réfugiés souffriraient de troubles de stress post-traumatique. Même si cette responsabilité est maintenant celle des provinces, et même si vous dites que le ministre a eu une discussion franche avec les provinces, pourriez-vous me dire s'il y a un mécanisme qui me permettrait de savoir combien de personnes, sur ces 6 000, le cas échéant, ont accès à du counseling en santé mentale? Existe-t-il un moyen pour nous de le savoir?
Le Dr Khan a évoqué le fait que la psychologie occidentale pourrait ne pas fonctionner dans ce milieu culturel particulier. Nous tentons d'en arriver aux soins du niveau de la rue.
Mme Edlund : Dans le cadre du Programme fédéral de santé intérimaire, nous faisons le suivi de qui utilise quels services de santé. Dans ma déclaration préliminaire, j'ai mentionné certains services de santé mentale offerts dans le cadre de ce programme. Dans les six à huit premiers mois, très peu de gens accèdent aux services offerts au titre du Programme fédéral de santé intérimaire. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de problème; peut-être que les gens se concentrent davantage sur d'autres problèmes liés à leur cheminement vers l'intégration. Cela pourrait vouloir dire que les gens accèdent aux services offerts par le régime de santé provincial ou territorial. Nous ne sommes pas certains.
Il s'agit d'une petite indication qui ne représente pas la réalité de la vie de ces personnes et l'état de stress post- traumatique dans lequel ils vivent maintenant qu'ils sont dans un environnement sécuritaire.
Ümit Kiziltan, sous-ministre adjoint délégué par intérim, Politiques stratégiques et de programmes, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada : Depuis le tout début — cela remonte au mois de novembre 2015 —, nous avons commencé à établir ce que nous appelons un cadre de surveillance des résultats, à trouver — en collaboration avec les provinces et les territoires — des sources d'information relatives à la mesure du rendement, à établir des interventions d'évaluation et à mettre sur pied des projets de recherche afin que nous puissions travailler auprès de cette population pour comprendre leur situation et leurs déplacements.
Nous disposons des réflexions apportées par des études et des travaux menés pendant des décennies auprès de populations de réfugiés. Nous sommes tout à fait conscients des problèmes de santé mentale ou d'autres types de difficultés liées à l'emploi, à la formation linguistique, et nous en faisons part à nos collègues provinciaux.
J'espère que nous aurons l'occasion de discuter de certains des renseignements relatifs au rendement dont nous disposons pour assurer la surveillance en ce qui a trait au type de besoins qui ont été évalués et au type de cours de langue que les personnes ont suivis. Toutefois, en ce qui concerne la santé mentale et l'accès aux services fournis à l'échelon provincial, nous n'avons pas ces moyens pour l'instant, mais nous tenons des discussions très actives avec nos collègues provinciaux.
Et vous comprendrez qu'il y a des questions de confidentialité concernant les types de services de santé que reçoivent les personnes. Nous devons régler ces questions avant de pouvoir dire que nous recueillons les renseignements systématiquement et si certains besoins sont comblés.
La sénatrice Omidvar : Je vais m'en tenir à la question du rythme et de la cadence des arrivées de réfugiés syriens promis à des répondants privés qui ont présenté leur demande avant le 31 mars 2016 et qui doivent arriver d'ici la fin de l'année ou au début de 2017. Je présume que vous voulez dire d'ici la fin du mois de mars 2017.
Je communique avec un tas d'entre eux qui sont passablement contrariés. C'est un euphémisme. Ils ont l'argent nécessaire. Certains ont loué des logements, les ont peints. Ils communiquent par Skype avec les enfants des familles dans les camps et ont noué un lien émotionnel. Je ne peux rien leur dire, à part que le ministre a promis qu'ils arriveraient d'ici mars 2017.
J'ai une question relativement à la recherche. Nous avons déjà fait cela; le contexte comparatif avec l'arrivée des Vietnamiens ne nous échappe pas. Que nous avait-il fallu, du point de vue des ressources gouvernementales et du personnel pour faire venir au Canada un nombre X de Vietnamiens parrainés par le secteur privé sur un nombre X d'années, et pouvons-nous comparer cette situation à l'effort que nous déployons aujourd'hui? Cela devrait nous donner une indication du fait que notre situation est comparable ou non et si nous investissons ce dont nous avons besoin en ce qui a trait aux infrastructures gouvernementales. Je ne parle pas des services. Je réponds davantage à la question de la sénatrice Ataullahjan au sujet des gens sur le terrain. Faisons-nous plus ou moins la même chose, ou bien ne sommes-nous pas à la hauteur selon nos propres références?
Mme Edlund : J'en sais un peu au sujet du mouvement de réinstallation des Vietnamiens. Si vous ne le savez pas, Mike Molloy, l'un des responsables du gouvernement du Canada, a écrit un livre qui vient tout juste d'être publié. Je crois savoir qu'environ 60 000 Vietnamiens ont été réinstallés au cours d'une période de 18 mois. Voilà quelle était la référence, à ce que je crois savoir. Comme je l'ai dit, c'était avant ma période de travail à Immigration, alors qu'on me corrige si j'ai donné les mauvais chiffres, mais ce sont ceux dont je dispose.
La sénatrice Omidvar : C'est sur une période plus longue.
Mme Edlund : Ils avaient un an pour effectuer la planification avant même de commencer, ce qui est une situation différente de l'aventure dans laquelle nous sommes embarqués dans le cadre de l'opération des réfugiés syriens.
À ce jour, je peux vous donner quelques chiffres au sujet du troisième engagement et de notre situation quant à l'interrogation des gens. Nous pensions que nous verrions environ 7 400 personnes suivre le processus. Tout le monde n'obtiendra pas une réponse affirmative, alors les 7 400 n'arriveront pas tous ici. Nous pensions qu'environ 5 000 d'entre eux allaient arriver d'ici la fin de décembre. Ensuite, ce serait environ 4 800 qui finiraient le traitement au début de 2017. Nous utilisons cette date approximative du mois de mars à cette fin.
Jusqu'à maintenant, de ceux qui ont déjà subi leur entrevue ou qui ont obtenu une décision finale et qui sont prêts à venir au Canada ou qui sont déjà admis, nous en avons traité 10 018. Je peux vous donner des chiffres exacts. De cette cohorte de quelque 12 000 réfugiés, 3 100 personnes ont déjà obtenu le droit d'établissement. Nous en avons 1 400 qui sont prêtes à prendre l'avion. Elles ont un visa; elles ont terminé le cours d'orientation canadienne à l'étranger, et nous attendons seulement que l'Organisation internationale pour les migrations fixe la date de leur voyage, ce qui prend habituellement de quatre à six semaines après la délivrance du visa.
Nous avons environ 900 cas où une décision défavorable a été rendue ou bien le réfugié a retiré sa demande et n'y a pas donné suite.
Dans le cas de ceux qui ont déjà été interrogés et qui font l'objet d'un contrôle médical et de sécurité, cela fait environ 5 400 personnes de plus. Ainsi, nous sommes sur la bonne voie pour terminer le traitement de cette cohorte de 12 200 personnes.
La sénatrice Omidvar : C'est utile. Merci.
La sénatrice Nancy Ruth : Ma première question concerne l'argent et les transferts aux provinces pour les coûts qui vont maintenant être engagés par elles, et l'autre porte sur la façon dont vous procédez à votre analyse différenciée selon les sexes.
Selon votre estimation, combien en coûte-t-il par réfugié pour les faire venir et payer pour eux, à l'échelon fédéral, durant la première année et au cours des quatre années suivantes? Avez-vous des chiffres à ce sujet?
Mme Edlund : Je ne dispose pas des chiffres pour chaque réfugié, mais nous pourrions vous obtenir ceux sur la façon dont nous avons établi les coûts.
La sénatrice Nancy Ruth : Comme une famille?
Mme Edlund : Par unité familiale. Je ne les connais pas par cœur pour l'instant, mais ils sont accessibles. Nous pourrons effectuer un suivi à cet égard.
La sénatrice Nancy Ruth : Si seulement 12 p. 100 des réfugiés qui sont arrivés sont employés, le reste des coûts est donc transféré aux provinces et aux divers services que les provinces doivent payer.
Mme Edlund : Pour l'aide sociale, oui.
La sénatrice Nancy Ruth : Quel mécanisme y a-t-il dans les transferts fédéraux ou dans un fonds spécial pour cette chose grâce à laquelle les provinces criblées de dettes comme la mienne — l'Ontario — vont recevoir de l'aide de la part du gouvernement fédéral? Un mécanisme a-t-il été établi à cette fin? Quel est le montant? Comment fonctionne-t-il, province par province?
Mme Prince St-Amand : Merci, sénatrice Nancy Ruth.
Le programme fédéral d'établissement est réparti partout au pays dans les provinces et les territoires. Le financement ne leur est pas vraiment destiné; il est envoyé aux organisations qui offrent les services d'établissement dans les provinces de l'Ontario, du Manitoba, et cetera, par province et territoire. Ainsi, une formule est établie à cette fin.
De plus, le gouvernement fédéral a fourni un supplément syrien, qui s'ajoute à cela, et la façon dont il a été distribué est fondée sur l'endroit où les Syriens se sont retrouvés le 29 février 2016.
En plus de cela, nous étudions la possibilité de passer après le 13e mois, et, dès que les familles syriennes arrivent, une prestation fédérale supplémentaire qui, nous l'avons remarqué, est en fait très importante, soit celle que Mme Edlund a mentionnée dans sa déclaration préliminaire concernant l'Allocation canadienne aux enfants... Nos collègues de l'Agence du revenu du Canada nous demandent à tous de tenter de diffuser le message selon lequel les familles de réfugiés syriennes doivent remplir leur déclaration de revenus, car, si elles ne le font pas, le versement de l'Allocation canadienne aux enfants prendra fin.
Cette allocation varie en fonction de la province ou du territoire, mais, simplement pour vous donner une idée, en Ontario, une famille de six touche 48 285 $ par année en allocations fédérales. Il s'agit d'une combinaison de l'Allocation canadienne aux enfants et du crédit pour la TPS. En plus de l'allocation aux enfants, si une famille gagne moins de 30 000 $ par année, elle peut demander un remboursement d'impôt qui englobe la TPS qu'elle aurait dû payer sur les biens et les services. Alors, 48 000 $ pour une famille de six, c'est une contribution assez importante.
La sénatrice Nancy Ruth : Pour un an?
Mme Prince St-Amand : C'est par année.
La sénatrice Nancy Ruth : Pendant combien de temps?
Mme Prince St-Amand : Cela dépend de l'âge des enfants, donc jusqu'à l'âge de 18 ans.
J'ai dit que l'allocation variait en fonction de la province ou du territoire. J'ai un exemple semblable pour la Nouvelle-Écosse. Simplement pour vous donner une comparaison, en Nouvelle-Écosse, la même famille de six toucherait 43 486 $ par année.
La sénatrice Nancy Ruth : Qu'est-ce que le supplément pour les Syriens, et comment est-il organisé?
Mme Prince St-Amand : Le supplément pour les Syriens est un financement supplémentaire que le gouvernement a mis en place et qui est envoyé aux organisations qui fournissent les services afin de les aider à offrir la formation linguistique supplémentaire, la formation en emploi et des services en santé mentale, soit tous les services d'établissement fournis par le gouvernement fédéral par l'intermédiaire des organisations de prestation de services de partout au Canada. Il ne s'agit pas d'un supplément versé directement à chaque personne; c'est un financement qui est envoyé aux organisations qui fournissent les services.
La sénatrice Nancy Ruth : Fondé sur le nombre de personnes qu'elles servent? Vous touchez tant d'argent si vous en servez une centaine ou un millier ou quoi que ce soit?
Mme Prince St-Amand : C'est exact.
La sénatrice Poirier : Pour revenir sur la question posée par la sénatrice Nancy Ruth et sur la réponse que vous avez donnée au sujet d'une famille de six en Ontario qui touche 48 000 $, ai-je bien entendu?
Mme Prince St-Amand : Oui.
La sénatrice Poirier : C'est un financement fédéral. Alors, est-ce que cela signifie qu'au 13e mois les programmes sociaux de la province commencent à s'ajouter à cela?
Mme Prince St-Amand : Oui.
La sénatrice Poirier : Est-ce le cas dans toutes les provinces?
Mme Prince St-Amand : Oui.
La sénatrice Poirier : Mais, au Nouveau-Brunswick, selon moi, une famille de six qui toucherait cette somme ne recevrait aucun financement provincial parce qu'elle dépasserait le montant que touchent les clients de l'aide sociale... une famille normale.
Mme Prince St-Amand : L'aide sociale est fondée sur le revenu, alors vous avez raison; il faudrait que vous fassiez le calcul précis pour voir si les familles syriennes seraient admissibles à l'aide sociale. Les prestations de revenu fédérales qu'elles toucheraient seraient prises en compte dans ce calcul.
La sénatrice Poirier : Alors, les prestations fédérales qu'elles touchent font partie de leur revenu, lequel serait pris en considération par la province? Est-ce que je comprends bien cela?
Mme Edlund : Nous avons demandé aux responsables des provinces et des territoires de nous parler et de clarifier cette question, car je crois savoir qu'à l'origine, la prestation fiscale pour enfants n'était pas censée être quelque chose qui devait être déduit des prestations d'aide sociale. Alors, si c'est vrai dans l'ensemble des provinces et territoires — et nous devons vérifier cela —, cela signifierait que les familles pourraient toucher l'aide sociale provinciale au Nouveau- Brunswick, et obtenir en plus ce montant aux fins de la prestation fiscale pour enfants et du remboursement de la TPS.
La sénatrice Poirier : Est-ce seulement pour les réfugiés, ou bien est-ce pour tout citoyen normal vivant dans cette province, qu'il soit un réfugié ou non?
Mme Edlund : Tout citoyen qui a des enfants touche la prestation fiscale pour enfants.
La sénatrice Poirier : Alors, à ce montant, ils ne toucheraient aucune aide sociale, pas chez nous. Je sais qu'ils n'en toucheraient pas.
Le président : Merci de la clarification.
La sénatrice Nancy Ruth : Vous êtes le ministère qui nous donne toujours espoir et en lequel nous avons foi concernant l'analyse différenciée selon les sexes, puisque vous êtes tenu de l'effectuer. Alors, quand vous me dites que vous tenez des statistiques sur les utilisateurs des programmes de santé mentale, quelle est la répartition de ces statistiques en fonction du sexe? Le faites-vous?
Une partie de ce que je vais dire, c'est que je vis que dans la même ville que la sénatrice Omidvar, et que nous entendons des histoires au sujet de Syriennes qui se présentent aux refuges et de violence faite aux femmes. Nous entendons dire qu'elles ne peuvent pas suivre la formation linguistique pour diverses raisons. L'une pourrait être la famille, et l'autre, parce qu'aucun service de garde n'est fourni. Je veux savoir ce que peut faire votre ministère pour recueillir des renseignements au sujet de problèmes comme ceux-là.
M. Kiziltan : Je vais décrire la façon dont nous nous préparons et dont nous recueillons les renseignements, puis je céderai la parole à ma collègue afin qu'elle décrive certains des éléments de programme.
Comme je l'ai indiqué, ce n'est pas la première fois que nous exécutons des programmes pour réfugiés. Nous avons de l'information. Nous disposons non seulement de recherches, mais aussi de renseignements relatifs à la mesure du rendement.
Pendant que nous nous préparions au mouvement de réfugiés syriens — pour ainsi dire —, nous assurions une surveillance et avons recueilli des renseignements au sujet des réfugiés qui accédaient à nos services. Nous savons qui, par sexe, accède — disons — à nos programmes de connexions communautaires ou à notre évaluation linguistique. Nous sommes en mesure d'effectuer une répartition par sexe, par niveau linguistique ou d'alphabétisation, de déterminer s'il s'agit d'une langue de haut niveau, d'établir les besoins, puis nous pouvons surveiller les écarts et voir qui reçoit des services pour répondre à ces besoins. Alors, nous comprenons les besoins en fonction du sexe. Nous pouvons surveiller les écarts par sexe et, si nous observons des écarts, nous apportons des corrections aux cours offerts dans le cadre des programmes — si on veut — afin d'atténuer ces écarts.
Cela dit, comme l'a mentionné Dawn au début, lorsque nous regardons la population adulte en entier qui a déjà accédé à un type de service, lorsque nous regardons tous les services, sauf deux — et je vais les nommer —, la répartition en fonction du sexe est à peu près égale. Ainsi, les hommes et les femmes accèdent aux services de la même manière. Les deux services — cela ne vous surprendra pas — sont les services liés à l'emploi, où les hommes sont légèrement surreprésentés du point de vue de l'accès, et l'autre, c'est la formation linguistique, pas l'évaluation linguistique, mais la formation. Vous y avez fait allusion. Il s'agit d'une situation où la garde d'enfants ou une aide en matière de transport sont nécessaires, et nous avons déjà cerné certaines lacunes et sommes en train d'y remédier dans le cadre des programmes afin de nous assurer que les obstacles de type garde d'enfants sont supprimés, surtout pour les femmes, quand elles accèdent à ces services fort nécessaires qui leur permettront, plus tard, d'entrer sur le marché du travail.
La sénatrice Nancy Ruth : Un service comme ceux-là serait-il payé à même le supplément pour les Syriens destiné aux services de formation linguistique, ou bien comment ces services sont-ils payés?
M. Kiziltan : Ils seront payés par tous les fonds accessibles pour les services d'établissement, mais, dans ce cas-ci — la population étant des réfugiés syriens —, ils seront payés à même les affectations ou fonds spéciaux accessibles pour les réfugiés syriens.
La sénatrice Nancy Ruth : Comment pouvez-vous obtenir plus d'argent si vous en avez besoin? Vous adressez-vous à votre ministre pour ensuite implorer le Conseil du Trésor?
M. Kiziltan : Si nos fonds s'épuisent, oui. Toutefois, nous disposons actuellement de l'argent nécessaire pour répondre à ces besoins. Cela va un peu de pair. À mesure que nous recensons les besoins et que nous voyons les lacunes — nous disposons d'un système perfectionné permettant de cerner ces lacunes —, nous prenons les décisions relatives aux investissements. Cela va paraître trop cliché, mais nous prenons des décisions fondées sur des données probantes afin que nous puissions investir les sommes là où les besoins sont les plus grands, car nous sommes convaincus de pouvoir surveiller ces besoins.
Corinne pourra peut-être expliquer plus en détail certains des programmes.
Mme Prince St-Amand : Pour ajouter des détails à ce qu'a dit mon collègue, les programmes d'établissement qui existent dans l'ensemble du pays sont particulièrement axés sur les femmes et les filles, mais je dois dire que nos organisations qui fournissent les services partout au Canada, compte tenu du mouvement de Syriens, ont dû mettre les bouchées doubles dans ce domaine. Une plus grande partie de l'argent destiné à l'établissement est consacré à ces types de projets.
Sénatrice Ruth, à Toronto, le centre pour femmes Rexdale est un expert dans ce domaine; il fournit des services de counseling et de soutien adaptés à la culture et à la langue qui aident les nouvelles arrivantes — plus particulièrement les réfugiées syriennes — à obtenir les renseignements pertinents afin qu'elles comprennent le cycle de la violence. Des employés sont là pour les aider à établir des plans de sécurité, leur indiquer comment s'y retrouver dans le système judiciaire et leur montrer comment obtenir les bons services médicaux et sociaux.
Comme je l'ai dit plus tôt, ces questions sont très délicates. Le ministère est en train de mettre en place un plus grand nombre de cercles de langue pour les femmes afin qu'elles se sentent plus à l'aise d'aborder ces questions. Elles ne se rendront pas au cours de langue sans bénéficier de services de garde et d'une aide au transport appropriés, qui sont également inhérents, à l'échelle nationale, à l'ensemble des programmes d'établissement.
Nous faisons de notre mieux. Nous sommes conscients des problèmes propres à la cohorte syrienne. Il s'agit là d'un exemple de ce que nous faisons, en Ontario. Je peux vous donner d'autres exemples provinciaux, au besoin.
Mme Edlund : Nous faisons l'essai de nouvelles façons novatrices de fournir les services d'établissement. Nous sommes intervenus dans le cadre de plus de 30 projets pilotes pour servir plus de 2 100 réfugiés syriens afin de les aider dans les domaines de l'apprentissage linguistique informel, des programmes de connexions communautaires et des services liés à l'emploi. Le quart des 2 100 réfugiés étaient des femmes adultes. La moitié des projets ciblaient principalement les familles, y compris les mères et leurs enfants. Également, la moitié des participants étaient âgés de moins de 25 ans. Dans cet espace d'innovation, nous tentons de créer ce nouveau programme pour les femmes, pour les enfants et pour les jeunes.
[Français]
La sénatrice Gagné : J'ai une question hypothétique à poser. J'aimerais puiser dans votre expérience de la dernière année.
Si vous aviez à planifier la prochaine vague d'accueil de 30 000 réfugiés, et selon votre expérience au cours de la dernière année, quels changements recommanderiez-vous par rapport aux divers programmes de réinstallation des réfugiés?
[Traduction]
Mme Edlund : Ma réponse initiale serait qu'en fait, nous planifions ce projet en même temps que sa mise en œuvre. Plus tôt, j'ai dit, concernant les réfugiés de la mer vietnamiens que les intervenants avaient eu environ un an pour effectuer la planification avant d'amener les gens au Canada. Nous avons procédé à la planification et à la mise en œuvre presque simultanément, tout en nous adaptant. Il aurait été utile de disposer d'un peu plus de temps au préalable, même deux ou trois semaines. Regardez, il faut composer avec ce qu'on a.
Nous avons également découvert que les besoins en information de nos organisations qui fournissent les services, des provinces et territoires, des commissions scolaires et des collectivités constituaient une lacune difficile à combler rapidement pour nous, et c'est encore le cas. Il serait important que nous disposions de plus de temps et de ressources à consacrer au fait de s'assurer que les renseignements dont nous disposons sont communiqués en temps opportun afin de permettre à d'autres partenaires du système de prévoir des choses et de se préparer à certaines choses. Je pense qu'il s'agit des deux éléments majeurs.
Bruce a dirigé notre centre de coordination national pour tous les vols et toutes les activités.
M. Grundison : En parallèle avec la planification, envisagez d'établir la cadence afin qu'il puisse y avoir un accueil adéquat lorsque les gens arrivent. Au cours de l'hiver, nous avons connu une augmentation marquée du nombre d'arrivées, mais il s'agit d'une situation anormale. Nous ne connaissons habituellement pas d'augmentation subite de populations vulnérables qui arrivent. Les recommandations seraient de les doser, de les planifier plus à l'avance et d'établir une meilleure cadence.
[Français]
La sénatrice Gagné : L'arrivée d'un grand nombre de réfugiés dans nos communautés, parfois dans de petites collectivités — et, dans mon cas, dans le contexte d'une communauté francophone aux prises avec des ressources limitées et une pénurie de main-d'œuvre qualifiée — a sûrement eu un impact sur le système scolaire.
Le gouvernement va-t-il étudier à fond l'impact de cette arrivée importante de réfugiés ou allez-vous laisser la province mener cette étude?
[Traduction]
M. Kiziltan : Dès le tout début, dans le cadre de notre travail avec les provinces, elles faisaient partie du casse-tête pour ce qui est de savoir qui arrive et à quoi ressemblera l'avenir du point de vue des difficultés auxquelles les réfugiés allaient faire face.
[Français]
On a eu une surprise par rapport au profil des familles. Plus de 50 p. 100 de la population de réfugiés avait moins de 18 ans. Donc, à ce niveau-là, les provinces ont dû bien se préparer.
[Traduction]
Comme l'a mentionné Mme Edlund, quand nous avons commencé à établir un partenariat avec le Conseil de recherches en sciences humaines, au mois de novembre, avant même qu'arrive le premier groupe, nous avons commencé — il s'agit également, selon moi, de l'un des tout premiers dans l'histoire du CRSH — à effectuer un investissement très précoce en finançant la recherche à l'aide d'une somme de 600 000 $ partout au Canada, en travaillant avec les universitaires. Nous avons appelé les chercheurs à étudier des sujets précis allant de l'intégration des LGBTQ jusqu'à l'étude des répondants et à la compréhension de la façon dont ils fonctionnent vraiment.
Il faut accorder de l'attention à beaucoup de phénomènes. L'un d'entre eux — et nous menons au moins quatre ou cinq projets de recherche, du Québec à la Saskatchewan —, c'est l'examen des besoins scolaires. Sont-ils comblés? Où sont les lacunes? Comment les élèves sont-ils intégrés dans les écoles? Nous avons déjà établi pas mal de programmes dans ce domaine.
En étudiant les effets particuliers de ce mouvement subit, surtout la cadence et l'ampleur de l'incidence du volume, nous étions très conscients du phénomène, et nous avons déjà mobilisé pas mal de gens afin qu'ils nous apportent un peu plus de renseignements — si on veut — afin de faire à la situation de façon plus intelligente.
La sénatrice Andreychuk : Pour donner suite à cette question, toutes les discussions provinciales-fédérales sont utiles, mais ce n'est pas toute l'histoire. En réalité, ce sont les gens sur le terrain, surtout dans le cas de l'augmentation subite, qui ont dû faire leur possible dans les circonstances. Selon ce que j'ai entendu dire, la situation a touché chaque école, chaque enseignant et chaque soignant partout dans le système.
Quand vous dites que vous menez des projets, et cetera, je pense qu'ils doivent être pris en compte, car ce sont tous des coûts humains à absorber à l'intérieur de notre système, si nous devons faire face à une autre augmentation subite. J'espère que la réponse, c'est que nous dosions, pas que nous fassions face à des vagues de réfugiés. C'est aussi ce que je vous entends dire. Le problème des arrivées massives sera toujours là. C'est la façon dont le gérons, dont nous le prévoyons et dont nous y faisons face...
Ma question particulière concerne le supplément pour les Syriens qui a été utilisé. Pouvez-vous définir ce supplément? Est-il destiné uniquement aux réfugiés syriens, ou bien à ceux qui sont arrivés dans la vague, qui — nous dit-on — ne sont pas toujours des réfugiés syriens? En outre, est-ce la première fois que nous ayons eu recours à la modalité d'un supplément au lieu de la négociation avec les gouvernements fédéral et provinciaux?
Mme Edlund : Laissez-moi approfondir un peu cette question pour vous, sénatrice.
Quand nous avons établi les coûts du projet, en novembre, nous savions que nous allions avoir besoin de mettre de l'argent de côté en vue de cet afflux très rapide de gens aux fins de l'aspect du soutien du revenu, du programme d'aide pour la réinstallation et pour nos fournisseurs de services qui offrent ce programme, ainsi que l'argent dont nous allions avoir besoin en ce qui a trait à l'établissement. Des sommes précises ont été mises de côté. Dans notre monde, on appelle cela des subventions et des contributions. Nous les appelons plus précisément le supplément pour les Syriens. C'était pour le volet de l'établissement, et on faisait allusion au nombre de Syriens qui venaient au Canada. Selon le calcul que nous connaissons, d'habitude, les réfugiés réinstallés ont recours aux services d'établissement pendant 39 mois, et ce supplément nous assurait que nous aurions les fonds nécessaires pour offrir ces 39 mois de services d'établissement.
Durant l'exercice en cours, les sommes supplémentaires offertes comme complément à l'argent déjà versé aux provinces et territoires pour l'établissement sont de 48,6 millions de dollars. Nous n'avons pas de garantie que, dans une organisation de prestation de service particulière, on recevra 10 Syriens et 5 réfugiés non syriens et que le complément pour les Syriens ne sera utilisé que pour les 10 et pas pour les 5 autres. C'est bien trop compliqué. Nous demanderions à nos organisations qui fournissent les services de tenir plus qu'un ensemble de documents pour faire le suivi des Syriens par rapport aux non-Syriens.
Nous avons tenté de répartir l'argent précisément dans les collectivités où nous savons qu'il y a une forte population de réfugiés syriens et où la demande de services linguistiques est élevée, par exemple, et nous finançons l'organisation qui fournit ces services afin qu'elle puisse répondre à ces besoins au moyen du complément pour les Syriens, qui s'ajoute à l'argent dont elle disposait déjà.
Il y a les 48,6 millions de dollars, cette année, du côté de l'établissement, mais il y a bien d'autres centaines de millions de dollars répartis sur la durée de vie du projet d'environ six ans. Cela dépend du moment où les réfugiés syriens arriveront, du moment où ils auront besoin que le soutien du revenu et les services d'établissement soient en place. J'espère que c'est un peu plus clair.
La sénatrice Andreychuk : Alors, je n'ai qu'une autre question à poser à ce sujet. Le projet était censé être destiné aux Syriens. Vous dites maintenant que vous ne faites pas de discrimination. Comment pouvons-nous être convaincus du fait que vous ne faites pas de discrimination à l'égard d'autres réfugiés qui entrent dans le système et qui ne font pas partie de cette vague de Syriens?
Mme Edlund : Le programme d'établissement que nous offrons est accessible à tous les nouveaux arrivants au Canada, y compris aux réfugiés réinstallés. Ils ne sont pas les seuls bénéficiaires du programme. L'an dernier, plus de 300 000 personnes ont reçu des services d'établissement, et environ 77 000 étaient des réfugiés. Ces services ont été offerts à même le financement de nos activités de base courantes, qui est d'environ 600 millions de dollars. Cette somme est répartie à l'aide de ce qu'on appelle un modèle d'affectation des fonds pour l'établissement. Nous étudions une moyenne mobile sur trois ans des endroits où les nouveaux arrivants émigrent au Canada. Un poids supplémentaire est accordé aux provinces et territoires qui acceptent davantage de réfugiés que les autres, de sorte qu'ils reçoivent des sommes supplémentaires selon ce modèle d'affectation des fonds.
Ce modèle est déjà établi — les 600 millions de dollars, plus ou moins — dans l'ensemble du système et s'applique à tous les nouveaux arrivants, y compris les réfugiés. Ensuite, nous mettons à disposition l'argent supplémentaire en raison de l'arrivée de Syriens supplémentaires.
La sénatrice Andreychuk : Peut-être que nous pourrions obtenir ces renseignements sur papier.
Le président : Ce document serait le bienvenu.
La sénatrice Andreychuk : Je sais que vous allez m'interrompre, mais je veux poser la question, et peut-être que les témoins pourront y répondre plus tard.
Nous avons parlé du TSPT en tant que problème, alors qu'en fait, je pense que le TSPT n'en est qu'un parmi tant d'autres, c'est-à-dire que les enfants qui grandissent et les familles ont leurs propres problèmes de développement. Le simple fait de déménager et de changer de société en est un autre, et tous pourraient être des problèmes de santé mentale. Nous pourrions peut-être obtenir quelque chose à ce sujet. Même si je pense que le TSPT est un enjeu important, selon moi, il rate la cible du développement et de la perturbation des familles. J'aurais espéré que les services de santé mentale englobent...
Mme Edlund : Toute la gamme...
La sénatrice Andreychuk : ... ce dont les Canadiens ont besoin et ce dont les autres personnes qui vivent tout changement, évolution et crise, ont besoin, au lieu de simplement désigner ces problèmes comme un TSPT. Je veux obtenir une certaine assurance du fait que c'est le cas.
Mme Edlund : Je pense que cela a été un peu abrégé, mais il s'agit de la santé mentale dans son ensemble. Compte tenu de l'expérience de vie qu'ont connue les gens, nous nous attendons à ce qu'il y ait des cas de TSPT. Nous savons que certaines familles accumulaient des stocks de nourriture lorsqu'elles ont été réinstallées et qu'elles séjournaient dans un hôtel, au départ. Nous fournissions trois repas par jour, ainsi que des collations, elles craignaient tellement l'insécurité alimentaire qu'elles ne savaient pas si la nourriture allait leur être fournie le lendemain ou pas. Il s'agit d'une autre forme du problème.
Ensuite, bien entendu, il y a la simple transition liée au fait de sortir de sa zone de confort, où on connaît la langue et les gens et où se trouvent les membres de sa famille élargie, pour se retrouver dans un environnement complètement nouveau et différent. Il y a beaucoup de facteurs de stress et de tensions à tous les types de niveaux, y compris la santé mentale, qui s'y rattachent.
Le sénateur Ngo : J'ai deux questions à poser. Tout d'abord, je voudrais revenir sur la question posée par la sénatrice Ataullahjan.
Concernant les prêts consentis aux immigrants, vous avez mentionné que tous les réfugiés qui éprouvaient des difficultés de remboursement pouvaient demander un paiement différé allant jusqu'à 24 mois ou qu'à tout moment, ils pouvaient déclarer qu'ils étaient en difficulté, ou quelque chose de ce genre. Sont-ils mis au courant de ces options dans leur propre langue?
La deuxième question concerne également les prêts consentis à des immigrants. Tous les groupes qui ont comparu devant nous ont mentionné le fait que ces prêts consentis relativement au transport sont un vrai fardeau économique pour les réfugiés. Nous savons qu'ils suscitent un taux élevé de stress chez eux.
Dans l'une des observations qui figurent dans notre rapport provisoire, nous nous demandions s'il était possible de renoncer au prêt de transport qui leur est consenti afin d'alléger ce fardeau.
Mme Edlund : Pour ce qui est de déterminer s'ils sont informés de ces options dans leur propre langue, peut-être que Bruce — en tant qu'agent des visas expérimenté qui a traité des cas de réfugiés — pourra expliquer ce qui se passe du côté de l'admission, au moment où nous soumettons les gens à une entrevue initiale, et comment nous leur expliquons le prêt et son fonctionnement.
Dans ma déclaration préliminaire, j'ai mentionné le fait que nous avions apporté certaines modifications à notre site web afin de faire ressortir davantage ces renseignements et pour que les gens en prennent connaissance. Nous devons étudier de façon plus poussée la façon dont ce message a été transmis aux organisations qui fournissent l'aide à la réinstallation et à celles qui fournissent les services d'établissement afin de nous assurer qu'elles peuvent aider à expliquer ces choses.
M. Grundison : Dans le contexte d'un interrogatoire à l'étranger, si la personne parle couramment l'anglais ou le français, l'agent et le personnel qui interrogent les réfugiés avant leur départ pour le Canada s'adressent à eux par l'entremise d'interprètes. Ainsi, les réfugiés reçoivent une interprétation dans leur propre langue des conditions de leur voyage au Canada et de ce qui leur arrive. Après leur arrivée au Canada, ils reçoivent également des services d'interprétation.
Je pense que ce à quoi vous voulez en venir, c'est s'ils sont avisés de la situation dans des termes qui leur permettent de comprendre les conditions. Je pense qu'ils le sont.
Les formulaires et les documents officiels sont en français et en anglais parce que c'est la norme canadienne. Toutefois, de l'information est fournie relativement à ces documents. Au moment où ils doivent commencer à rembourser le prêt, les fournisseurs de services qui sont au Canada leur fournissent des renseignements au sujet de ce processus.
Mme Edlund : Relativement aux prêts de transport, j'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire que nous avions effectué une évaluation du programme de prêts de transport à l'automne 2015. Nous sommes en train de préparer des propositions de politiques afin que le ministre et le gouvernement en tiennent compte au moment de déterminer si le processus relatif aux prêts de transport devrait être modifié.
Une partie de ce processus a déjà été modifiée. Dans le cas du mouvement de réfugiés syriens, nous avons payé pour la première fois les examens médicaux d'immigration et les services médicaux préalables au départ. Toutefois, le gouvernement a pris une décision concernant le Programme fédéral de santé intérimaire selon laquelle, à compter du mois d'avril prochain, tous les réfugiés réinstallés verront leur examen médical d'immigration payé, de même que les services médicaux préalables au départ. Cette modification a déjà été apportée et a été inspirée de ce que nous avions fait dans le contexte syrien.
Le sénateur Ngo : Le prêt de transport va être supprimé, ou bien êtes-vous en train d'étudier cette possibilité?
Mme Edlund : Nous sommes en train d'élaborer les propositions de politiques, mais, comme il s'agit de documents confidentiels du Cabinet, je ne peux pas vous en parler. Toutefois, le gouvernement a certainement été saisi de l'affaire et tiendra compte de ce qui peut et devrait être fait.
Le président : Je suis certain qu'il va écouter notre recommandation.
La sénatrice Omidvar : Si vous pouviez condenser cela en une courte phrase, nous aimerions recevoir une réponse écrite. Cette question concerne l'Initiative de réunification des familles syriennes que le gouvernement a lancée plus tôt cette année. Combien de membres de familles syriennes ont vu leur cas traité et sont arrivés? A-t-on procédé à une évaluation? Quels sont les résultats? Quels sont les plans de votre ministère pour ce qui est de poursuivre, d'élargir ou d'arrêter le programme, étant donné la déclaration du ministère et la vôtre selon lesquelles l'accent mis sur la Syrie est limité dans le temps?
Mme Edlund : Je ne sais pas si nous avons tous les détails nécessaires pour répondre à la question aujourd'hui. Il s'agissait d'un autre programme mis sur pied à la suite du mouvement de Syriens. Malheureusement, nous avons découvert qu'il y avait beaucoup plus de membres de familles qui voulaient être parrainés que de répondants qui se sont présentés. Voilà une des premières constatations.
Je ne suis pas certaine du nombre de cas qui ont été traités et du point où ils en sont. Nous n'avons certainement pas effectué d'évaluation de cet aspect.
La sénatrice Omidvar : En prévoyez-vous une?
Mme Edlund : Nous évaluons pas mal tout. Nous allons le mettre sur la liste.
Le président : Nous voulons vous remercier d'avoir comparu aujourd'hui. Les témoignages présentés au cours de la dernière période de deux heures et demie étaient nouveaux et fascinants pour nous, ce qui est extrêmement utile. Je suis heureux que nous poursuivions et remplissions notre rôle de Chambre de second examen objectif en étudiant ces enjeux et en présentant nos observations et nos recommandations.
Au nom du comité, je vous remercie du service que vous rendez au public. Je ne pense pas que les fonctionnaires reçoivent suffisamment de remerciements. C'est une question de service public.
Monsieur Grundison, je sais que vous avez fait beaucoup d'heures supplémentaires dans le cadre des travaux que vous avez effectués, et je veux vous en remercier, et je vous remercie tous de votre présence aujourd'hui.
(La séance est levée.)