Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule no 19 - Témoignages du 5 février 2018
OTTAWA, le lundi 5 février 2018
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd’hui, à 13 h 5, pour étudier, dans le but d’en faire un rapport, les politiques, les pratiques, les circonstances et les capacités du Canada en matière de sécurité nationale et de défense (sujet : le système d’alarme d’urgence).
La sénatrice Gwen Boniface (présidente) occupe le fauteuil.
(La séance se poursuit à huis clos.)
(La séance publique reprend.)
[Traduction]
La présidente : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.
Avant toute chose, j’aimerais inviter mes collègues à se présenter, à commencer par notre vice-président.
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.
Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, sénatrice indépendante du Manitoba.
Le sénateur Richards : David Richards, Nouveau-Brunswick.
La présidente : Merci.
Cet après-midi, nous allons entendre des témoignages sur le système d’alarme d’urgence du Canada, dans le cadre de notre étude sur les politiques, les pratiques, les circonstances et les capacités du Canada en matière de sécurité nationale et de défense.
Nous allons d’abord accueillir les représentants du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, après quoi nous recevrons ceux de Pelmorex Weather Networks (Television) Inc.
Les représentants du CRTC sont Scott Shortliffe, dirigeant principal de la consommation et directeur exécutif, et Rachelle Frenette, avocate générale et sous-directrice exécutive par intérim.
Monsieur Shortliffe et madame Frenette, nous avons déjà reçu votre déclaration liminaire, mais nous vous invitons à en rappeler ou à en approfondir certains aspects, après quoi nous passerons aux questions.
Scott Shortliffe, dirigeant principal de la consommation et directeur exécutif, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes : Merci beaucoup, madame la sénatrice. Je n’ai pas grand-chose à ajouter, car je préfère avoir plus de temps pour répondre aux questions.
J’aimerais toutefois apporter quelques précisions sur l’échéancier, car ce n’était peut-être pas très clair dans notre déclaration liminaire.
Le conseil a demandé que le système soit prêt à transmettre des alertes à partir du 6 avril 2018. D’où la question qu’il fallait se poser : cela signifie-t-il que des alertes d’urgence sans fil seront émises à partir du 6 avril? En fait, c’est un système à double clé.
Imaginez une porte avec deux serrures. La première concerne la date à laquelle le système doit être prêt, soit le 6 avril, et tout indique que ce sera le cas. La deuxième concerne le fait que le conseil a chargé le comité directeur du CRTC sur l’interconnexion — je reviendrai là-dessus tout à l’heure — d’examiner certaines questions sur lesquelles le conseil doit se prononcer avant que le système d’alertes d’urgence puisse entrer officiellement en vigueur. C’est ce qu’est en train de faire le conseil, mais j’ignore s’il se prononcera d’ici au 6 avril ou si ce sera plus tard. Ce que je voulais dire, c’est que le conseil doit se prononcer sur ces questions-là avant que le système puisse entrer en vigueur.
Pour en revenir au comité directeur du CRTC sur l’interconnexion, c’est un organisme qui examine les dossiers techniques. Il peut compter jusqu’à 100 membres et se subdiviser en un certain nombre de sous-comités techniques, dans le domaine des télécommunications.
Le comité directeur a été invité à se pencher sur deux questions en particulier. La première concerne la vérification du système d’alerte d’urgence. Vous avez certainement remarqué, lorsque vous regardez la télévision, qu’un bandeau apparaît de temps à autre, accompagné d’un bip sonore, indiquant qu’il s’agit d’une vérification du système. Avec le système d’alerte d’urgence sans fil, vous entendrez aussi de temps à autre un bip sonore, pour signaler une vérification du système. Plusieurs questions se posent : faut-il que, à chacune des cinq vérifications annuelles, un bip sonore se fasse entendre sur tous les téléphones cellulaires? Faut-il utiliser un canal spécial, pour ne pas déranger la majorité des Canadiens? Ou y a-t-il un juste milieu? En effet, vous voulez que les Canadiens reçoivent les alertes, mais vous ne voulez pas non plus que, à force de recevoir le même bip sonore ou le même bandeau caractéristique, ils deviennent blasés et n’y fassent plus attention.
Voilà pour la première question. La deuxième question que nous avons posée au comité directeur, et qui est liée, concerne la campagne de sensibilisation du public qu’il serait souhaitable de lancer. Les deux questions sont liées étant donné que nous avons besoin de savoir comment seront signalées les vérifications du système avant de pouvoir concevoir un programme de sensibilisation du public.
Le comité directeur devait rendre son rapport à l’automne, ce qu’il a fait. Le conseil est en train d’examiner le rapport et doit se prononcer sur ces deux questions avant que le système puisse entrer en vigueur.
Voilà les précisions que je voulais apporter, car, en relisant notre déclaration liminaire, je me suis rendu compte que nous n’étions peut-être pas très clairs en ce qui concerne cette date du 6 avril.
Permettez-moi d’ajouter, avant de terminer, que d’après mes informations, les fournisseurs de services sans fil, que nous appelons les FSSF — je vous prie de m’excuser, mais nous utilisons beaucoup de sigles dans notre jargon. N’hésitez pas à me demander des explications si vous ne connaissez pas un sigle. Pour en revenir aux fournisseurs de services sans fil, la date du 6 avril est la date butoir que le conseil leur a imposée, et ils travaillent d’arrache-pied pour être prêts à cette date-là. De son côté, le conseil doit se prononcer sur les deux questions que le comité directeur a été chargé d’étudier.
Enfin, et cela ne dépend pas du conseil, les organisations de gestion des urgences qui émettent les alertes doivent, elles aussi, être prêtes. Cela se situe au niveau provincial ou au niveau fédéral.
Il y a donc toutes sortes de questions complexes qui doivent être réglées avant que le système d’alerte d’urgence puisse entrer en vigueur. Voilà les précisions que je voulais ajouter à notre déclaration liminaire, et maintenant, je suis prêt à répondre aux questions que vous voudrez me poser.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci de votre présentation, monsieur Shortliffe. De toute évidence, ces systèmes d’alarme sont importants. Ils sont d’ailleurs beaucoup utilisés aux États-Unis, entre autres par l’entremise de la télévision et des médias sociaux. Bon nombre d’agents utilisent Internet et les médias sociaux.
Avez-vous envisagé cette avenue?
M. Shortliffe : Oui. Votre question est intéressante. Quand le conseil s’est penché sur la question des systèmes d’alarme d’urgence pour le public, il y avait deux possibilités, soit via les médias sociaux et les messages textes. Finalement, nous avons décidé que la meilleure approche était d’envoyer un message aux téléphones cellulaires. Il n’y a pas d’option permettant de refuser la réception du message. Donc, si vous avez un téléphone intelligent, vous recevez un message d’urgence. N’importe quel logiciel peut le faire en ce moment. C’est la première méthode utilisée pour s’assurer que tous les utilisateurs de téléphones cellulaires reçoivent ces informations.
L’idée, c’est aussi de recevoir des messages d’urgence intégrés avec la radio, la télévision et les téléphones cellulaires, afin que tous les utilisateurs reçoivent les mêmes informations en même temps.
Le sénateur Dagenais : Je comprends que les gens doivent recevoir les mêmes informations en même temps. La diversité est une qualité du Canada. Il y a l’anglais et le français, mais il y a aussi d’autres langues. A-t-on déjà envisagé de transmettre le message dans plusieurs langues?
M. Shortliffe : C’est une bonne question. Cependant, cela ne relève pas des compétences du conseil. Les organismes d’urgence qui émettent ces messages sont responsables du contenu. Par exemple, le Québec pourrait demander d’avoir tous les messages en français et en anglais, mais en privilégiant le français. D’autres provinces pourraient demander d’autres langues, mais c’est leur choix, et non le choix du conseil. Le ministère de la Sécurité publique est responsable de cette question au niveau fédéral.
Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Shortliffe.
[Traduction]
Le sénateur McIntyre : Je vous remercie tous les deux de comparaître devant notre comité aujourd’hui, et je remercie également M. Shortliffe de sa déclaration liminaire.
J’aimerais y voir un peu plus clair. En 2004, il y a à peu près 14 ans, notre comité a présenté un rapport sur le Système national d’alertes au public qui recommandait, entre autres, que le CRTC établisse des règlements pour obliger tous les fournisseurs de services de télévision, publics et privés, à collaborer à la mise en place de systèmes d’alertes au public aux niveaux provincial, territorial et national. C’est ce qu’ils ont fait puisque, comme vous l’avez dit, le CRTC a informé le public, en 2009, qu’un nouveau système d’alerte serait mis en œuvre par Pelmorex. En 2010, Pelmorex a mis en œuvre le Système d’agrégation et de dissémination national d’alertes, l’ADNA. Je crois savoir que ce système est fondé sur le Protocole d’alerte commun, le PAC. Je crois savoir également que l’ADNA n’accepte que les alertes d’urgence provenant d’agences gouvernementales autorisées, et que ces alertes sont transmises en format PAC aux fournisseurs de services de télévision et aux fournisseurs de services de télécommunications pour qu’ils les diffusent au public, mais sur une base volontaire.
Pourquoi les fournisseurs de services de télévision et les fournisseurs de services de télécommunications ne sont-ils pas obligés de diffuser les alertes d’urgence à la population canadienne?
M. Shortliffe : Je vous remercie beaucoup de votre question, sénateur. En fait, cela a été rendu obligatoire en 2014 et 2015. Au début, c’était facultatif.
Le sénateur McIntyre : Mais pas pour les messages textes.
M. Shortliffe : Nous n’avons pas encore lancé le système d’alerte par messagerie texte, mais pour ce qui est des fournisseurs de services de radio et de télévision, c’était facultatif au départ.
Le sénateur McIntyre : À la fois pour les fournisseurs publics et privés?
M. Shortliffe : Oui. C’est maintenant obligatoire, les fournisseurs de services de radio et de télévision doivent se conformer aux protocoles d’alertes d’urgence.
Le sénateur McIntyre : Depuis 2014?
M. Shortliffe : Oui, depuis 2014. Ils devront également se conformer au système d’alerte sans fil, à l’exception, malheureusement, du Nord, où la téléphonie par satellite empêche toute géolocalisation. Or, l’objectif est de diffuser l’alerte à la région concernée, et pas ailleurs. Si la Ville d’Ottawa veut émettre une alerte de tornade, cela ne concerne pas les habitants de Restigouche. La géolocalisation est donc une fonction importante du système d’alerte au public, que cela se fasse au moyen de la radio, de la télévision ou des téléphones cellulaires.
Dans le Nord, on utilise principalement la téléphonie mobile par satellite, ce qui empêche la géolocalisation, et c’est la raison pour laquelle on leur a accordé une exemption, pour le moment. Toutefois, le conseil espère que, d’ici quelques années, une fois que son plan de connectivité à large bande sera mis en œuvre, tout comme celui d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, le Nord sera connecté au système d’alerte sans fil.
Pour tous les autres fournisseurs de services de radio et de télévision, c’est obligatoire.
Le sénateur McIntyre : J’aimerais maintenant vous poser une question au sujet du système d’alerte avec messagerie texte. Qui le supervisera? Sécurité publique Canada? Les provinces et les territoires? Une combinaison des deux? Quel rôle joueront les municipalités? Combien coûtera la mise en œuvre de ce système?
J’aimerais également savoir le rôle que joueront les fournisseurs de services sans fil au sein de ce système. Toutes les entreprises vont-elles participer, ou bien seulement les trois plus grandes, Rogers, Bell et Telus?
M. Shortliffe : Je vais commencer par le commencement, si vous le voulez bien. Tous les fournisseurs de services sans fil doivent participer, à l’exception des fournisseurs de téléphonie mobile du Nord. Si, pour une raison pour une autre, ils ne peuvent pas participer, ils doivent soumettre au conseil ce qu’on appelle une « demande partie 1 ». Personne ne l’a encore fait. D’ailleurs, tous les fournisseurs de services sans fil vont devoir soumettre des rapports, dont le premier est prévu pour le 21 mai de cette année, et ensuite, pour mai 2019 et mai 2020. Ils devront y faire état des progrès qu’ils ont accomplis dans la mise en œuvre de systèmes d’alerte sans fil et des difficultés qu’ils ont rencontrées. Ils devront également s’assurer que les combinés qu’ils distribuent sont capables de recevoir les alertes. Voilà pour les fournisseurs de services sans fil.
Pour ce qui est des organisations qui peuvent émettre des alertes, elles sont au nombre de 14 et on les appelle les organisations de gestion des urgences, les OGU. Il y a Environnement et Changement climatique Canada, qui est l’organisation fédérale, et ensuite ses homologues provinciaux et territoriaux. Chacune d’entre elles a la responsabilité de déterminer qui, au sein de son propre système, est habilité à émettre des alertes et en fonction de quels critères.
Ensuite, vous avez les municipalités, les réserves autochtones et divers utilisateurs. Au Canada, il existe 988 comptes qui peuvent émettre des alertes, mais dans un rayon limité. Une petite municipalité peut émettre une alerte concernant sa zone géographique. Elle ne peut pas, par exemple, émettre une alerte à l’échelle du pays ou de la province.
La gestion de chaque alerte relève de l’organisation pertinente. Sécurité publique Canada joue un rôle de coordination par l’entremise du CSRGU, soit le groupe des Cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences, qui se réunissent pour discuter de ces dossiers. Ils s’assurent également d’une certaine uniformité à l’échelle nationale, même s’il peut y avoir une hiérarchie différente ou des permissions différentes d’une province à l’autre. Les provinces ont le pouvoir de décider comment elles veulent assurer la gestion des urgences.
Mes amis de chez Pelmorex vont comparaître tout à l’heure. Ils savent beaucoup mieux que moi comment cela se passe dans chaque province, et ils sont donc certainement mieux en mesure de vous donner une réponse plus précise.
Le sénateur McIntyre : Merci.
La sénatrice McPhedran : Je vous souhaite la bienvenue parmi nous. Suite à votre description du rôle du CRTC sur cette question, j’aimerais vous poser une question à plusieurs volets. Si j’ai bien compris, le CRTC, soit n’a pas le pouvoir, soit il ne l’utilise pas, d’établir une norme nationale uniforme pour ce qui est des alertes d’urgence. C’est bien cela?
M. Shortliffe : Vous soulevez deux points. D’abord, le CRTC a mis en œuvre une norme uniforme pour l’aspect technique, mais pas pour le contenu des messages. De façon générale, le CRTC ne prend pas position sur le contenu des messages transmis par les télécommunications. En revanche, il a mis en œuvre une norme technique, la norme ATIS, qui s’applique aux alertes d’urgence, mais qui ne porte pas sur le contenu des messages, lequel est du ressort du groupe des CSRGU.
La sénatrice McPhedran : Toujours sur la question des pouvoirs dont dispose le CRTC, j’aimerais savoir dans quelle mesure on tient compte des Canadiens qui souffrent de handicaps?
M. Shortliffe : Avant de vous répondre, j’aimerais retrouver les documents que j’ai là-dessus, pour pouvoir vous donner la réponse la plus complète possible.
Je m’aperçois, et je vous prie de m’en excuser, que je n’ai pas répondu à une partie de la question du sénateur McIntyre qui concernait le coût du système. Une fois que j’aurai répondu à la question de la sénatrice, madame la présidente, je finirai de répondre, si vous le voulez bien, à la question du sénateur McIntyre. Je vous présente mes excuses, sénateur.
Lorsque le conseil a pris sa décision, il a élaboré une directive sur la présentation uniforme pour la mise en œuvre de la norme ATIS, et il s’est assuré que cette norme répondait aux besoins des Canadiens aveugles ou malvoyants. Il a ensuite encouragé les fabricants à concevoir des appareils avec une fonction texte-voix. Pour ce qui est des fournisseurs de services sans fil, il leur a fixé l’objectif d’avoir, dans les 12 mois de la date de décision, au moins un combiné accessible capable de recevoir des alertes; autrement dit, d’ici au 6 avril 2018, tous les fournisseurs de services sans fil devront offrir à la vente au moins un combiné accessible capable de recevoir des alertes.
Certains fournisseurs de services sans fil, comme Bell Mobilité, on dit qu’ils avaient déjà des combinés de ce type. Les autres devront confirmer, dans leur rapport du 21 mai au CRTC, qu’ils ont mis des combinés accessibles à la disposition des Canadiens.
La sénatrice McPhedran : Merci. Toujours sur la question des pouvoirs du CRTC en matière de normes techniques, j’aimerais savoir si ces normes imposent certaines mesures à prendre pour émettre des alertes, et si elles prévoient des garde-fous au cas où, par exemple, des employés ne cochent pas la bonne case d’un menu déroulant? Deuxièmement, qui appuie sur le bouton, au figuré, pour émettre l’alerte? Est-ce que cela fait partie de la norme technique applicable à l’échelle nationale?
M. Shortliffe : Non, cela ne fait pas partie de la norme technique nationale, car c’est du ressort des organisations de gestion des urgences, dont le CSRGU assure la coordination. Ce n’est donc pas quelque chose que le CRTC réglemente à l’échelle nationale.
En réponse à une question sur les fausses alertes, le CRTC a déclaré que c’était la responsabilité de celui qui avait émis l’alerte. Un fournisseur de services sans fil a demandé si, dans le cas d’une fausse alerte qu’il aurait relayée, il serait tenu responsable. Le conseil a répondu que non, que c’est la personne qui émet l’alerte qui est responsable de son contenu. Chaque organisation de gestion des urgences, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau provincial, a donc la responsabilité d’adopter les procédures pertinentes pour éviter l’émission d’une fausse alerte, mais le conseil n’intervient pas dans ce domaine.
La sénatrice McPhedran : La dernière partie de ma question concerne la reddition de comptes. Étant donné ce que vous venez tout juste de dire, puis-je vous demander comment vous allez vous assurer que, par exemple, les fournisseurs respectent l’exigence que vous leur imposez? Quel genre de vérifications faites-vous pour vous assurer qu’ils mettent bien à la disposition des Canadiens souffrant de handicaps des combinés utiles et fonctionnels?
M. Shortliffe : Tout cela sera précisé dans le régime qui sera adopté pour le système d’alerte par messagerie texte, que le groupe de travail du CRTC sur l’interconnexion est en train d’examiner. Je ne peux donc pas vous en dire plus pour l’instant, si ce n’est que le conseil est bien conscient qu’il faudra une plateforme pour les messages textes, et que nous aurons besoin de recevoir des rapports réguliers sur la bonne réception des messages.
Je me dois de préciser que, avant de mettre ce système en place, le CRTC a fait un essai dans la région de Durham et Peel, en 2016 je crois, en collaboration avec Recherche et développement pour la défense Canada, qui est un sous-ensemble du ministère de la Défense nationale, afin de s’assurer que la technologie était au point et que nous pouvions mettre en œuvre un système qui nous permettrait d’avoir des rapports sur le genre de messages reçus. Toutefois, le conseil n’a pas encore pris de décision sur le dernier protocole de messagerie texte.
La sénatrice McPhedran : Madame la présidente, puis-je demander que les témoins nous fassent parvenir davantage d’informations, lorsque les décisions auront été prises?
La présidente : Bien entendu.
Le sénateur Richards : Il se peut que vous ayez déjà répondu à cette question. Comment les grands réseaux qui contrôlent tout cela vont-ils empêcher des pirates informatiques de chercher à nous faire peur et à nous envoyer nous cacher dans les bois? Qu’est-ce qu’on peut faire pour empêcher cela? Existe-t-il des garde-fous?
M. Shortliffe : Malheureusement, sénateur, je ne peux pas répondre à votre question parce que ce n’est pas du ressort du CRTC. Le CRTC a la responsabilité du système de télécommunications, et, si vous me pardonnez la métaphore, il a préparé le ballast, mais maintenant, c’est aux organisations de gestion des urgences de poser les rails et de faire rouler les trains. C’est à ces organisations qu’il incombe d’adopter des protocoles pour interdire les piratages informatiques. Malheureusement, je ne peux pas vous en dire plus. Je vous prie de m’en excuser, mais cela n’est pas du ressort du conseil.
Le sénateur Richards : Très bien.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Un système d’alertes a été mis en œuvre il y a quelques années. Je me souviens que le son était affreux. Nous avions l’impression que l’interlocuteur parlait à partir du fond d’une boîte de conserve vide. C’était incompréhensible. J’avais été déçu de la piètre qualité du système vocal. Avez-vous l’intention de procéder à des évaluations sur le plan strictement de la qualité sonore du message ainsi que de la traduction? Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois que les premiers messages avaient été traduits par Google. C’est presque un manque de respect envers les francophones. Effectuerez-vous un travail de validation et de vérification?
M. Shortliffe : La qualité de la traduction est toujours un enjeu. Malheureusement, cette responsabilité revient au bureau qui s’occupe des messages d’urgence, et non au conseil. De plus, les normes sont différentes entre les provinces. À la télévision et à la radio, la situation s’est améliorée, mais ce n’est pas parfait.
Cela n’est pas de notre ressort et Pelmorex Weather Networks (Television) Inc. est responsable de la diffusion. Quatorze différentes organisations fédérales et provinciales sont impliquées dans le contenu des alertes.
Le sénateur Boisvenu : Je crois comprendre que c’est vous qui allez effectuer la mise en œuvre de ce système.
M. Shortliffe : Oui.
Le sénateur Boisvenu : Ne pouvez-vous pas insérer des critères de qualité dans votre appel d’offres, si je peux m’exprimer ainsi?
M. Shortliffe : C’est dangereux, car le rôle du conseil n’est pas d’intervenir sur le contenu.
Le sénateur Boisvenu : Vous le faites déjà avec la radio au Québec en exigeant 45 p. 100 de contenu francophone.
M. Shortliffe : Oui.
Le sénateur Boisvenu : Donc, vous exercez un certain contrôle. J’essaie de comprendre pourquoi vous n’assurez pas aussi un contrôle sur la qualité.
M. Shortliffe : Nous pourrions avoir des exigences quant au quota du contenu francophone, mais pas sur la qualité de ce contenu. Dans ce cas, c’est une question qui relève des télécommunications et non de la radiodiffusion. En matière de télécommunications, notre rôle est d’assurer que les réseaux existent, mais c’est un organisme provincial qui est responsable de tous les contenus.
Le sénateur Boisvenu : Qui est responsable des dépenses? Le gouvernement fédéral ou les provinces?
M. Shortliffe : Les dépenses sont partagées. Pour la gestion des contenus, c’est le gouvernement provincial. Pour la diffusion par les compagnies sans fil, c’est intégré à leur prix. Le conseil a statué que les compagnies comme Bell, Rogers, Québecor et autres ne pourraient pas demander plus d’argent pour fournir ce service. C’est désormais intégré dans le prix des services de téléphone cellulaire.
Le sénateur Boisvenu : J’ai une autre question qui me préoccupe un peu au sujet du processus de réglementation. J’ai été haut fonctionnaire pendant 15 ans au ministère de l’Environnement du Québec. Quand vient le temps de l’intervention sur le terrain, à la suite d’une alerte, le processus d’implication du gouvernement fédéral est très politique. Il est aussi très lent, très long. Donc, lorsqu’il y a une catastrophe, si on fait intervenir l’armée, par exemple, et qu’elle arrive trois semaines trop tard, on amplifie le problème. Comptez-vous également apporter des améliorations au processus pour intégrer l’ensemble des acteurs, lors d’une crise ou d’une catastrophe, pour que l’intervention se fasse de façon non politique et, surtout, rapidement?
M. Shortliffe : C’est une bonne question, mais, avec tout mon respect, c’est une question qu’il faut poser aux responsables de l’agence concernée. En ce qui nous concerne, il est plus important de nous assurer que les systèmes sont en place et fonctionnent, et que la plupart des Canadiens sont en mesure de recevoir les alertes sans fil. Sécurité publique Canada coordonne le système avec les provinces et les territoires pour s’assurer que toutes les alertes sont valides et envoyées à temps. Je sais qu’il y a des divergences entre les provinces. Certaines provinces émettent beaucoup d’alertes pour des situations spécifiques. D’autres utilisent moins le système. C’est une discussion entre les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral. C’est une responsabilité qui relève du ministère de la Sécurité publique et non de notre conseil.
Le sénateur Boisvenu : Le système s’adressera au citoyen. Une fois l’alerte donnée, le citoyen saura-t-il à qui s’adresser pour obtenir de l’information et des réponses si, par exemple, sa sécurité est en danger? L’alerte permettra-t-elle de savoir où s’adresser pour obtenir des réponses?
M. Shortliffe : Oui, mais c’est une question de contenu et de normes de contenu. Peut-être que mes amis de Pelmorex pourraient répondre à votre question avec plus de précision.
[Traduction]
La présidente : Monsieur Shortliffe, pourriez-vous répondre à la question du sénateur McIntyre au sujet du coût du système, avant que nous passions au deuxième tour de questions?
M. Shortliffe : Je suis désolé, sénateur McIntyre. Ce que nous avons dit, c’est que les fournisseurs de services sans fil ont dû assumer, il est vrai, des coûts de mise en œuvre et de fonctionnement, mais qu’ils ne pouvaient ni les facturer séparément ni les faire payer aux abonnés.
Quant à savoir si cela se traduira par une augmentation inexpliquée des factures, c’est difficile de le dire, car on ne sait jamais vraiment, même dans un marché concurrentiel, comment les fournisseurs de services sans fil font leurs factures. Mais ce que leur a dit le conseil, c’est que la transmission des alertes sans fil fait partie intégrante des conditions du service, que nous ne voulons pas qu’ils facturent les Canadiens pour cela. Bref, nous leur avons dit que c’était à eux d’absorber les coûts.
La présidente : À en juger par les documents que nous avons reçus, nos collègues américains ont une bonne longueur d’avance sur nous en ce qui concerne les messages textes.
M. Shortliffe : Oui.
La présidente : Étant donné que les États-Unis ont une structure aussi complexe que la nôtre, avec des États et des gouvernements locaux, je me demande pourquoi nous nous trouvons dans cette situation, alors que l’Australie et les États-Unis sont bien plus avancés que nous.
M. Shortliffe : C’est une bonne question. Je peux vous dire quand même que nous profitons de l’expérience des États-Unis. J’ai parlé tout à l’heure de la norme ATIS. C’est une norme qui a été élaborée aux États-Unis et qui a ensuite été adaptée au Canada. Nous avons donc pu profiter de leur expérience et tenir compte des problèmes qu’ils ont eus lorsqu’ils ont mis en œuvre le système d’alerte d’urgence.
Le conseil a décidé que les systèmes d’alerte d’urgence ne seraient connectés qu’aux réseaux LTE, c’est-à-dire les réseaux de technologie d’évolution à long terme, soit les téléphones cellulaires plus avancés. Il a pris cette décision parce que 98,5 p. 100 des Canadiens ont accès à une couverture LTE. Cela ne veut pas dire nécessairement qu’ils ont un téléphone LTE. Mais les États-Unis ont eu des problèmes lorsqu’ils ont essayé de couvrir des technologies plus anciennes.
Nous avons aussi appris qu’aux États-Unis ils ont un grand nombre de paliers de décision. Cela m’a beaucoup surpris. Il y a quelques mois, j’ai assisté à une réunion organisée à Montréal par Sécurité publique et d’autres organisations. Ils avaient invité le département de la Sécurité intérieure, et je m’attendais à ce que cette organisation américaine nous dise que son système marchait parfaitement, mais c’est là que j’ai appris qu’ils avaient les mêmes problèmes que nous. Des problèmes d’uniformité, des problèmes de langue, surtout dans le Sud où on parle beaucoup l’espagnol. Certes, nous sommes en retard par rapport à eux pour ce qui est de la mise en œuvre de la technologie, mais nous avons certainement tiré des leçons de leur expérience. En fait, ils rencontrent les mêmes problèmes au niveau des politiques publiques.
Ce qu’il y a aussi d’intéressant avec les États-Unis, c’est que, étant donné que nous avons adopté une version adaptée de la norme ATIS, les Canadiens peuvent recevoir les alertes américaines lorsque leur téléphone cellulaire est en mode itinérance. Autrement dit, s’ils sont en Floride et qu’il y a une alerte au tsunami, ils peuvent, avec leur téléphone cellulaire canadien, recevoir l’alerte au tsunami. Réciproquement, si un Américain est en voyage au Canada et qu’il y a une alerte d’avalanche, il recevra cette alerte. Bref, le fait d’avoir adopté leur système a eu des retombées positives pour nous.
[Français]
Le sénateur Dagenais : J’ai une question, mais je ne sais pas si elle a déjà été posée. Récemment, il y a eu deux alertes au Japon liées aux missiles de la Corée du Nord. Il faudra être prudent. On sait que les systèmes d’alarme peuvent parfois s’activer pour rien. Y a-t-il un système qui permet de valider une alerte donnée, pour confirmer qu’il s’agit vraiment d’une alerte authentique et éviter de semer un vent de panique au sein de la population? Est-ce que vous avez un système de vérification?
M. Shortliffe : Oui et non, parce qu’il y a deux parties à cela. L’idée est que seules les alertes valides peuvent utiliser la tonalité et la vibration spécifiques à notre alerte. Éviter qu’une alerte soit émise par erreur est une question qui relève d’organisations spécifiques.
C’est l’une des raisons pour lesquelles on a décidé d’utiliser une alerte avec affichage sous forme de bannière — en anglais, c’est « banner » — qu’on retrouve dans tous les téléphones cellulaires, et pas seulement les messages textes. Une personne pourrait envoyer un message texte indiquant qu’il y a un feu ou une tornade. Toutefois, seules les personnes autorisées pourraient utiliser le système officiel.
[Traduction]
La présidente : J’ai besoin d’une précision. Dans ce cas, s’agit-il d’un bandeau qui apparaît sur votre téléphone ou bien d’un message texte?
M. Shortliffe : C’est exactement ça, vous ne pouvez pas éliminer le message. C’est comme lorsque vous regardez la télévision et qu’il y a le bip sonore et l’alerte. Ça apparaît sur la chaîne, et vous ne pouvez pas l’éliminer.
Avec votre téléphone cellulaire, peu importe que vous soyez branché sur une application ou que vous regardiez une vidéo, vous aurez le bandeau et le bip sonore sur votre téléphone.
Le seul cas où le bandeau n’apparaîtra pas sur le téléphone, c’est si celui-ci est débranché. Si votre téléphone cellulaire est en mode vibration, il y aura une vibration spécifique qui indiquera qu’il y a une alerte d’urgence. Autrement dit, vous pourrez faire la distinction entre cette vibration et celle que vous entendez lorsque vous recevez un courriel.
Tout cela est bien sûr partie des procédures de vérification du système et du programme de sensibilisation du public.
Le sénateur Oh : Je vous prie de m’excuser, mon avion devait atterrir à 10 heures, je viens juste d’arriver.
M. Shortliffe : Je vous en prie, sénateur.
Le sénateur Oh : Lorsque nous étions à la frontière à Niagara Falls ou près de la frontière américaine, il nous est arrivé de recevoir sur notre téléphone un signal indiquant que nous étions en mode itinérance sur un réseau américain. Comment cela fonctionne-t-il?
M. Shortliffe : Le système d’alerte d’urgence sera intégré au système d’alerte d’urgence des États-Unis. Si vous êtes en mode itinérance, vous recevrez les alertes d’urgence pertinentes. Si une alerte s’applique des deux côtés de la frontière, vous serez alors informé par le système d’alerte canadien et par le système d’alerte américain.
Par exemple, des incendies de forêt peuvent se produire des deux côtés de la frontière. Si des incendies se déclarent en Colombie-Britannique et dans l’État de Washington, les deux parties vont émettre des alertes d’urgence. Si vous vous trouvez en mode itinérance aux États-Unis et que vous venez tout juste de traverser la frontière, vous recevrez une alerte du système américain, mais elle ressemblera beaucoup à une alerte du système canadien.
Leur système emploie lui aussi des bannières. C’est simplement que nous avons tous les deux adopté la même norme. Nous avons voulu faire en sorte que, en quelque endroit que vous vous trouviez, aussi bien aux États-Unis qu’au Canada, vous recevrez un avis d’alerte qui s’applique là où vous êtes.
Du point de vue technique, c’est toujours le problème, car l’avis d’alerte doit s’appliquer au lieu où vous vous trouvez. Si vous vivez à Vancouver, vous ne voulez pas, en effet, recevoir une alerte jaune lancée à Halifax. S’agissant d’une situation qui peut mettre des vies en péril, un tremblement de terre, par exemple, il est donc essentiel que l’alerte soit géolocalisée.
C’est d’ailleurs comme cela que l’on procède aux États-Unis. Nous avons, au Canada, 988 organismes autorisés à émettre des alertes. Aux États-Unis, il y en a des milliers. Encore une fois, les avis sont géolocalisés de manière très précise.
Pour répondre à votre question, vous recevriez, effectivement, un avis d’alerte. Selon le côté de la frontière où vous vous trouvez, l’avis vous sera transmis par un organisme d’alerte canadien ou américain, selon que votre téléphone est ou non en itinérance.
Le sénateur Oh : Et cela ne coûte rien?
M. Shortliffe : Non, c’est gratuit.
Le sénateur McIntyre : Je voudrais vous poser une question qui fait suite à celle que vous a posée le sénateur Richards sur le point de savoir si un système d’alerte en ligne ou un système de messages SMS pourrait être compromis par des criminels ou des pirates informatiques. A-t-on pris des mesures destinées à prévenir le piratage?
M. Shortliffe : Je suis désolé, sénateur, mais je ne suis malheureusement pas en mesure de vous répondre sur ce point. La question dépend en effet des diverses autorités compétentes en matière de gestion des urgences, en l’occurrence les provinces et Environnement et Changement climatique Canada. Je regrette, mais je ne dispose pas des éléments qui me permettraient de répondre à votre question.
Le sénateur Richards : Cela dépend donc des provinces. À moins que nous soyons tous sur la même longueur d’onde, il n’y a ainsi pas de norme qui s’applique à l’ensemble des Canadiens. Un pirate informatique pourrait donc s’infiltrer dans le système dans une région donnée de notre pays. Est-ce exact?
M. Shortliffe : Non, je dis simplement qu’il me manque les éléments qui me permettraient de vous répondre. Les Cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences (CSRGU) coordonnent l’action des provinces, des territoires et des organismes fédéraux, et je sais que c’est un des problèmes qui les préoccupent. Je ne possède pas, sur ce point, les renseignements nécessaires, mais cela ne veut aucunement dire que ces renseignements n’existent pas. C’est simplement que je ne les ai pas en main.
Le sénateur McIntyre : Le CRTC serait-il en mesure de nous les fournir?
M. Shortliffe : Il s’agit, en fait, de renseignements dont nous n’avons pas l’usage au CRTC. Le mieux serait de les demander à Sécurité publique Canada chargé d’assurer, au niveau fédéral, la coordination avec le CSRGU.
Le sénateur McIntyre : Le comité devrait donc s’adresser sur ce point à Sécurité publique Canada?
M. Shortliffe : Je regrette d’avoir à vous le dire, mais c’est effectivement le cas.
La sénatrice McPhedran : Je voudrais, pour faire suite à ces questions, vous demander — et je suis parfaitement consciente que vous ne pouvez pas sur ce point nous donner un « avis » —, mais nous vous saurions gré, dans la mesure où vous le pouvez, de nous aider à mieux comprendre le dispositif de coordination, de communication, de collaboration et de suivi de l’action de ces deux organismes fédéraux essentiels que sont le CRTC et Sécurité publique Canada.
M. Shortliffe : Très volontiers. Nous participons régulièrement à des réunions de travail avec Sécurité publique Canada. Ce ministère a d’ailleurs eu l’amabilité de nous inviter à prendre part à certaines réunions du GTAP, le Groupe de travail sur les alertes au public, qui lui-même transmet des renseignements au CSRGU qui regroupe les cadres supérieurs chargés de ce dossier.
Nous avons, tout en respectant leur autorité, tenté de les tenir au courant de ce que nous faisons, et je pense qu’ils se sont comportés envers nous de la même manière. Ils ont en effet manifesté un louable esprit d’ouverture et de transparence. Les deux organismes ont, certes, des rôles différents, mais nous voulons éviter d’élaborer sans le vouloir une norme technique qui les empêcherait de mener à bien leurs propres activités et d’assurer la coordination avec les provinces. Ils souhaitent, de leur côté, nous tenir au courant des difficultés auxquelles ils doivent faire face.
Comme je le disais tout à l’heure, j’ai, il y a quelques mois, été invité à prendre part à une réunion à laquelle avaient également été conviés des représentants des États-Unis. Cette réunion, organisée par Sécurité publique Canada, nous a été extrêmement utile, à moi et à mes collaborateurs. Je m’y suis rendu, en effet, accompagné de mon équipe du CRTC.
Nous avons ainsi eu l’occasion de rencontrer des représentants des divers organismes provinciaux de gestion des urgences, qui nous ont cité des exemples très pratiques des difficultés qui peuvent se présenter, non seulement en matière d’alertes au public diffusées sur des réseaux sans fil, mais même au niveau des alertes transmises à la télévision ou à la radio. Nous avons ainsi pu prendre conscience des problèmes auxquels ils doivent faire face, et cela nourrit notre réflexion au sein du conseil.
Nous entretenons avec ces divers organismes des liens professionnels très serrés. Je dois cependant faire attention de ne pas parler en leur nom au sujet de questions ou de situations relevant de leurs seules compétences. Cela dit, nous travaillons en très étroite collaboration avec Sécurité publique Canada.
La sénatrice McPhedran : Puis-je en déduire qu’il n’y a, entre ces divers organismes, aucune entente ou protocole régissant leur action, et que chaque cas est réglé individuellement selon ce que les responsables estiment devoir faire dans une situation donnée?
M. Shortliffe : En effet. Dans le cadre de ce système, chacun exerce des responsabilités qui lui sont propres. Notre responsabilité à nous était de faire en sorte que les alertes au public puissent être diffusées sur les réseaux sans fil, en conformité avec les règles qui régissent les alertes au public diffusées à la radio et à la télévision. Mais, en ce qui concerne le contenu même des messages diffusés, ce sont eux les principaux responsables de l’élaboration des politiques applicables. Ce sont également eux qui contribuent à dresser la liste de diffusion immédiate, c’est-à-dire la liste des informations à diffuser sur-le-champ en raison d’une menace pour la vie. Ce sont également eux qui, avec nos collègues de Pelmorex, établissent les bases de la gouvernance du Système d’agrégation et de dissémination national d’alertes, le système ADNA.
Le CRTC a fait valoir le besoin qu’il y avait de créer un tel système. Il fallait pour cela que Pelmorex parvienne à un accord avec les organismes de gestion des urgences et le CSRGU, puis avec Sécurité publique Canada qui, en tant que principal responsable fédéral de l’élaboration des politiques en ce domaine, devra se pencher sur le contenu même des messages à diffuser en cas d’urgence, et s’assurer que les systèmes sont à l’épreuve des incursions.
Il n’existe pas, entre ces divers organismes, d’entente formelle, mais chacun sait clairement quelles sont les responsabilités qui lui incombent dans l’ensemble du dispositif.
Le sénateur Oh : Je sais qu’à Singapour le gouvernement dispose d’un système d’alerte général sous forme de messages écrits. Ainsi, par exemple, si la police recherche quelqu’un faisant l’objet d’un mandat d’arrestation, elle peut afficher sur tous les téléphones cellulaires du pays une photo du suspect. Disposons-nous, ici, d’un tel système d’alerte?
M. Shortliffe : Pas que je sache, mais tout dépend des autorités responsables en matière d’alerte. Mes confrères de chez Pelmorex seraient mieux à même de vous répondre sur ce point. C’est une question qui devrait plutôt être posée aux diverses autorités responsables. Je tiens à préciser que les normes applicables et le mode de fonctionnement du système varient beaucoup d’une province à l’autre.
Il est clair que la mise en place d’un tel système ne poserait aucun problème technique, mais encore faudrait-il décider des organismes autorisés à émettre les alertes, et trouver le moyen de les géolocaliser. Singapour, qui présente de nombreux attraits — j’ai eu l’occasion de m’y rendre quand j’étais jeune, et c’est très volontiers que j’y séjournerais à nouveau — s’étend sur un territoire assez restreint. La situation se complique lorsqu’il s’agit d’alertes lancées à l’échelle de toute une province, et il faut alors bien préciser quels sont les autorités ou organismes autorisés à émettre l’alerte.
Les autorités responsables du lancement des alertes en cas d’urgence seraient mieux à même de répondre à votre question.
La présidente : Les sénateurs et membres du comité auraient-ils d’autres questions à poser?
Je voudrais revenir sur l’expérience des États-Unis quant à ces questions qui relèvent de la mission confiée au CRTC. D’après vous, quelles seraient la principale ou les deux principales leçons à tirer de ce que les Américains ont fait en ce domaine? C’est ma première question.
Deuxièmement, y a-t-il, à votre connaissance, des pays qui ont, en ce domaine, tiré un certain nombre d’enseignements dont nous pourrions nous-mêmes nous inspirer?
M. Shortliffe : C’est une excellente question à laquelle j’espère pouvoir apporter la réponse qu’elle mérite. Il est probable qu’il me viendra à l’esprit cette nuit, trop tard hélas, une réponse encore meilleure.
Je pense que la leçon que nous avons tirée de tout cela, c’est qu’il nous faut continuer d’avancer. La technologie ne cesse de progresser et si nous attendons de parvenir à une solution technique parfaite en tout point, nous n’aboutirons pas.
La technologie LTE, c’est-à-dire la technologie Long Term Evolution, ou technologie de l’évolution à long terme, permet de contacter l’immense majorité des Canadiens et j’estime qu’il était de notre part raisonnable d’opter pour cette technologie. En attendant une solution qui permettrait de contacter tous les Canadiens équipés d’un téléphone cellulaire, nous risquions de ne jamais aboutir. Il est possible que dans cinq ans une nouvelle technologie, un nouveau progrès technique nous permette de le faire.
En ce qui concerne les événements qui posent une menace à la vie, il nous faut, je pense, adopter le meilleur système dont nous puissions raisonnablement disposer à un moment donné. Il nous faut être conscients que ce système devra sans doute faire à l’avenir l’objet de certains ajustements, et accepter qu’on ne saurait atteindre la perfection.
Ce qu’on a pu relever aux États-Unis, c’est que la plupart des autorités responsables du lancement d’alertes disposent de moyens multiples, assurant ainsi au système une certaine redondance. S’il y a la possibilité de lancer des alertes sur les réseaux de téléphonie mobile, les systèmes d’alertes diffusées à la radio et à la télévision restent cependant en service. Je dois dire, d’ailleurs, que dans certains cas d’urgence, le meilleur moyen est encore d’aller frapper aux portes, car certaines personnes peuvent ne pas être branchées et ne pas être conscientes, donc, du danger qui plane sur elles.
Au conseil, nous avons appris qu’il nous faut aller toujours de l’avant, adapter notre action aux nouvelles technologies et œuvrer de concert avec nos partenaires afin de nous tenir au courant des difficultés qui peuvent se poser, sans pour cela attendre de trouver la solution parfaite.
La présidente : J’aimerais revenir un moment sur la situation dans les communautés du Nord canadien. J’entends par cela, le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest…
M. Shortliffe : Les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut notamment.
La présidente : Mais qu’en est-il de régions telles que le Nord de l’Ontario, où le maillage demeure très imparfait?
M. Shortliffe : Oui, cela vaut également pour le Nord de l’Ontario. Il existe en effet au Nunavik et au Québec, dans le Nord de l’Ontario, dans certaines parties du Nord de la Saskatchewan et du Manitoba, des régions à faible densité géographique qui n’ont pas accès à ces réseaux de communication.
Nous avons pu constater dans le cadre du travail que le conseil a effectué sur la question, l’importance cruciale que les stations de radio revêtent dans ces communautés. C’est une des nombreuses choses qui nous ont portés à conclure que personne ne devrait désormais pouvoir se soustraire au système d’alerte en cas d’urgence, car nous nous sommes rendu compte que dans certaines de ces communautés, les stations de radio ont une importance vitale.
Aux yeux du conseil, l’accès au haut débit est un droit qui doit pouvoir être assuré à tous les Canadiens, et c’est pourquoi, alors que nous continuons à investir dans le haut débit, et qu’Innovation, Sciences et Développement économique Canada continue, lui aussi, à investir dans le haut débit, nous trouverons de nouveaux moyens de diffuser les avis d’alerte dans ces communautés. Dans l’idéal, toute communauté disposerait en matière d’alerte de plusieurs moyens qui se chevauchent.
Il y a, dans le Nord, la radio et la télévision, et c’est déjà bien, mais il nous faut, à l’avenir, offrir aux citoyens de nos régions du Nord un éventail plus large de moyens. Lorsque je parle du Nord, j’entends non seulement les divers territoires, mais également les régions nordiques de nos provinces.
La présidente : Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : En ce qui concerne les alertes liées à un événement militaire, étant donné que les Canadiens et les Américains entretiennent des relations en matière de défense nationale, ce système sera-t-il également intégré entre les deux pays?
M. Shortliffe : C’est une bonne question, sénateur, mais je ne peux malheureusement pas vous répondre.
Le sénateur Boisvenu : Le ministère de la Défense peut-il répondre à cette question?
M. Shortliffe : Je crois que oui. En premier lieu, il serait peut-être bon de poser la question aux représentants de Sécurité publique Canada. Ils ont de l’information en ce qui concerne l’approche fédérale d’urgence. Sinon, il faut poser la question au ministère de la Défense.
Le sénateur Boisvenu : L’alerte AMBER est-elle un système parallèle ou sera-t-elle intégrée avec celui-ci?
M. Shortliffe : Oui, c’est intégré. Il y a des alertes à diffusion immédiate, notamment l’alerte AMBER.
Le sénateur Boisvenu : D’accord. Je vous remercie.
[Traduction]
Le sénateur McIntyre : Me permettrez-vous une dernière question? Je voudrais revenir un instant aux directives émises en avril 2017 par le CRTC.
Ainsi que vous nous l’avez expliqué, monsieur Shortliffe, en avril 2017, le CRTC a enjoint aux fournisseurs de services sans fil de doter leurs réseaux LTE d’un service d’alertes sans fil au public d’ici avril 2018. Je précise que cela ne veut nullement dire qu’à partir du mois d’avril de cette année les Canadiens vont être en mesure de recevoir des avis d’alerte en cas d’urgence.
Cela étant, le CRTC devrait-il, selon vous, adopter un nouveau règlement afin d’obliger les parties concernées à faire en sorte qu’à partir d’avril 2018 les Canadiens soient effectivement en mesure de recevoir des avis d’alerte?
M. Shortliffe : En fait, et comme je l’ai dit au départ, le conseil devrait surtout considérer les rapports qu’il a demandé au comité directeur sur l’interconnexion de préparer.
Je tiens des fournisseurs de services sans fil que tout sera en place d’ici le 6 avril. Aucun d’entre eux ne nous a, à ce jour, demandé de prolonger le délai. Pour le conseil, il s’agit donc surtout de considérer les rapports qui lui ont été remis, de s’assurer que le plan qu’il a mis au point est satisfaisant, et de rendre, après cela, sa décision. Je ne peux pas vous préciser la date à laquelle interviendra cette décision, car le conseil n’annonce la date que lorsque la décision est prête à être rendue publique. Pour l’instant, tenons-nous-en à cet aspect de la question, et non à celle de savoir si les fournisseurs de services sans fil vont être en mesure de s’intégrer au système.
Je peux affirmer, à titre purement personnel, qu’en grande partie nous œuvrons de concert avec les fournisseurs de services sans fil. Ils semblent tous avoir fait dans ce dossier un travail efficace. Ils sont tous conscients de l’importance des avis d’alerte.
Le sénateur McIntyre : Je ne voudrais pas trop insister sur ce point, mais que ferait le CRTC si, en avril 2018, le système n’était toujours pas opérationnel?
M. Shortliffe : À supposer qu’on arrive à la date en question, et que le système n’est toujours pas prêt, alors que le conseil avait annoncé son lancement prochain, le conseil dispose, en cas de non-respect d’une de ses ordonnances, de toute une panoplie de moyens lui permettant d’assurer le respect de ses décisions. C’est une des raisons pour lesquelles nous avons demandé que les premiers rapports nous soient remis en mai 2018. Sans entrer dans le détail, je peux dire que le conseil dispose d’un large éventail de moyens de faire respecter ses ordonnances.
Le sénateur McIntyre : Quels sont ces moyens que vous venez d’évoquer?
M. Shortliffe : Permettez-moi de demander à mon collègue juriste de vous répondre sur ce point.
Le sénateur McIntyre : Pourriez-vous nous parler des outils qui viennent d’être évoqués?
Rachelle Frenette, avocate générale et sous-directrice exécutive par intérim, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes : La loi constitutive du CRTC prévoit plusieurs mécanismes lui donnant les moyens de faire respecter ses ordonnances. De telles dispositions figurent tant dans la Loi sur les télécommunications, au titre de laquelle nous réglementons l’activité des fournisseurs de services sans fil, que dans la Loi sur la radiodiffusion, en vertu de laquelle nous réglementons l’activité des opérateurs de radio-télévision et distributeurs d’émissions télévisées.
Il n’est jamais facile de répondre à une question hypothétique, mais le conseil dispose effectivement d’un certain nombre d’outils réglementaires qui lui permettent d’assurer le respect de la réglementation en vigueur. Il peut s’agir, par exemple, d’intervenir auprès des détenteurs d’une licence émise en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, et de les convoquer à une audience au cours de laquelle ils vont devoir répondre aux questions qui leur sont posées. La Loi sur les télécommunications nous offre, elle aussi, un certain nombre d’outils réglementaires, tels que des sanctions administratives pécuniaires qui peuvent être imposées en cas de non-respect d’une disposition réglementaire. Je pourrais vous citer d’autres exemples, mais je préfère m’en tenir à ceux dont je viens de faire état.
La présidente : J’en profite pour remercier nos témoins, M. Shortliffe et Mme Frenette. Merci de vous être rendus à notre invitation et d’avoir répondu à nos questions.
Nous accueillons maintenant le second groupe de témoins, composé de Paul Temple, vice-président principal, Affaires réglementaires et stratégiques de Pelmorex Weather Networks (Television) Inc., et de M. Martin Bélanger, directeur, Alertes au public.
Monsieur Temple, monsieur Bélanger, nous allons vous demander de bien vouloir nous présenter quelques observations préliminaires, après quoi nous procéderons aux questions. Soyez les bienvenus devant le comité.
Paul Temple, vice-président principal, Affaires réglementaires et stratégiques, Pelmorex Weather Networks (Television) Inc. : Nous vous remercions de votre invitation.
Je voudrais commencer par quelques remarques rapides. Je m’appelle effectivement Paul Temple et je travaille chez Pelmorex Weather Networks Inc., société mère des marques MétéoMédia et le Weather Network, bien connues pour leurs émissions de télévision et leurs médias numériques.
Je suis entre autres chargé de la surveillance des alertes au public et, en particulier, du Système d’agrégation et de dissémination national d’alertes, communément appelé le système ADNA.
Je suis accompagné de mon collègue, Martin Bélanger.
[Français]
Martin Bélanger, directeur, Alertes au public, Pelmorex Weather Networks (Television) Inc. : Bonjour. Je m’appelle Martin Bélanger. Je suis le directeur des services d’alertes au public à Pelmorex. Mes responsabilités sont axées sur la gestion et l’opération du système d’agrégation et de dissémination d’alertes nationales, communément appelé le système ADNA.
[Traduction]
M. Temple : Dans le document d’information que nous vous avons remis, il y a un aspect des alertes au public qui n’est pas évoqué, en l’occurrence la gouvernance. Les services de télévision spécialisée diffusés par le Weather Network et par MétéoMédia sont réglementés par le CRTC. Bon nombre des conditions d’octroi de la licence de télévision que nous a délivrée le CRTC concernent les alertes au public.
J’ajoute que nous avons un conseil de gouvernance composé de représentants des diverses provinces et territoires et du gouvernement fédéral. Siègent également à ce conseil des représentants des secteurs de la télévision, de la radio, du sans-fil, de la câblodistribution et de la communication par satellite. C’est ce conseil de gouvernance qui oriente notre action dans un certain nombre de dossiers touchant les alertes au public.
J’espère que ces rapides observations vous seront utiles. Maintenant, c’est très volontiers que nous répondrons à vos questions.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités de leur présence. Vous fournissez un service d’alertes pour les agences gouvernementales, entre autres. Il faut être prudent, car un tel service peut parfois émettre de fausses alertes. Comme je le mentionnais aux témoins précédents, au Japon il y a eu récemment de fausses alertes liées au lancement de missiles de la Corée du Nord.
Pouvez-vous garantir qu’une alerte est validée au moment de son lancement ou disposez-vous de moyens pour valider votre système d’alertes avant qu’un message soit diffusé? On sait qu’une fausse alerte peut avoir des conséquences dramatiques pour l’ensemble de la population.
[Traduction]
M. Temple : C’est une question tout à fait pertinente.
Le déclenchement d’une fausse alerte peut être dû à diverses choses. Il peut s’agir, par exemple, d’une atteinte à la sécurité, voire d’un acte de malveillance de la part d’un employé d’une autorité émettrice. Dans ce cas-là, il n’y a pas grand-chose que nous puissions faire pour l’éviter. À supposer, en effet, qu’un employé d’un organisme provincial de gestion des urgences décide de déclencher une fausse alerte, il n’y a rien que nous puissions faire. Si le système d’alarme est compromis, il n’y a, là encore, pas grand-chose que nous puissions faire pour l’empêcher.
Cela dit, la sécurité du réseau que nous mettons à la disposition des autorités revêt pour nous une importance prioritaire. Nous achevons actuellement notre second exercice de vérification. Nous avons retenu les services de spécialistes de la sécurité, des analystes indépendants, à qui nous avons demandé d’examiner notre système et de nous remettre des recommandations quant aux moyens de renforcer, si besoin est, la sécurité. Nous prenons cela très au sérieux.
Et puis, une alerte peut également être compromise lors de sa réception ou au moment de sa retransmission par une station de radio ou un fournisseur de services sans fil. Nous ne sommes, là non plus, pas en mesure de vérifier la sécurité de leurs installations, mais nous faisons tout le nécessaire pour protéger notre propre dispositif. Nous consacrons à cet aspect de notre activité un temps et des efforts considérables.
La seconde partie de la question portait sur ce que nous pourrions faire dans le cas d’une alerte manifestement fausse. Afin de bien comprendre le système que nous avons mis en place, il faut savoir qu’il repose sur des règles, des schémas et des protocoles techniques. Le système est en fait conçu de manière à pouvoir fonctionner de façon entièrement automatique. Lorsqu’une alerte est donnée par une autorité, si les protocoles techniques sont respectés, l’alerte est transmise en quelques secondes sans intervention humaine. On a récemment vu un exemple de cela en Colombie-Britannique, lorsque la province a lancé une alerte au tsunami. Les autorités ont elles-mêmes composé le message sur notre plateforme, et trois secondes après qu’elles l’eurent approuvé, le message était transmis. Personne n’est là, donc, chargé de lire les alertes lancées en cas de menace à la vie ou aux biens, car l’alerte doit être diffusée sans attendre. Il ne nous appartient pas de remettre en question une alerte qui vient d’être lancée. Ce n’est pas à nous de dire : « Environnement Canada entendait-il vraiment émettre une alerte à la tornade? » ou « Le Québec devrait-il vraiment déclencher une alerte jaune? » Cela ne fait aucunement partie de nos responsabilités. Notre rôle consiste à transmettre au public, aussi rapidement que possible, les messages qui, aux yeux des autorités, revêtent une importance critique.
Nous n’avons d’ailleurs pas les moyens de décider si une alerte se justifie effectivement, ou si elle est inexacte ou mal inspirée. Cette responsabilité appartient en effet à l’autorité qui lance l’alerte.
Le sénateur Oh : Existe-t-il un centre de commandement national qui interviendrait en cas d’urgence touchant l’ensemble du territoire national?
M. Temple : Selon moi, en matière d’alertes, la responsabilité revient généralement aux organismes provinciaux de gestion des urgences. Nous avons, nous-mêmes, des centres des opérations. Nous en avons, en effet, plus d’un, car nous ne voulons pas risquer une faillite du système en cas de catastrophe. C’est pour cela que nous avons dupliqué nos installations et que nous les avons situées dans des lieux différents. En cas de panne d’une des installations, cette redondance fait que le système peut continuer de fonctionner. Notre système est placé sous le contrôle d’une équipe de gestion, mais les installations elles-mêmes sont réparties en divers endroits du territoire. Je ne sais pas ce qu’il en est du gouvernement, mais il s’agit là d’un aspect du problème qui devrait retenir l’attention du ministère de la Sécurité publique.
Le sénateur Oh : Selon vous, n’y aurait-il pas lieu de prévoir un centre de commandement principal, avec des cellules de crise réparties dans les diverses régions du pays?
M. Temple : Se pose alors le problème de la répartition des compétences au sein de notre merveilleuse Confédération. Il n’est pas certain que les provinces souhaitent voir un centre de contrôle installé à Ottawa leur prescrire les alertes à lancer, mais je n’entends pas, sur ce point, en dire davantage.
Le sénateur McIntyre : Je vous remercie, messieurs, de votre intervention devant le comité, et des réponses que vous nous avez fournies au sujet de cette question importante.
Quel est le rôle des responsables municipaux, provinciaux et fédéraux au sein du Système national d’alertes au public? Comment assurent-ils la coordination de leur action, et comment harmonisent-ils leurs activités avec celles du secteur privé?
M. Temple : En ce qui concerne le centre d’ADNA, nous avons conclu des ententes formelles avec chacune des provinces. Aux termes de ces accords, chaque province est, dans les limites de son territoire, compétente pour décider de qui aura accès au système d’alerte, des divers types d’alertes et des régions visées. Ainsi, pour prendre l’exemple du Nouveau-Brunswick, nous nous sommes réunis avec les responsables provinciaux pour mettre en place les protocoles leur permettant de diffuser les divers types d’alertes sur le territoire de la province. Une fois cela organisé, c’est au Bureau de gestion des mesures d’urgence du Nouveau-Brunswick de décider de la manière dont il entend assurer le fonctionnement de ce système dans la province. Il ne nous appartient pas, en effet, de dire au Nouveau-Brunswick ou au Québec comment gérer le système d’alerte au public de la province. Notre rôle consiste à leur donner les outils qu’il leur faut, et de leur assurer la souplesse de maniement nécessaire.
Ainsi, en Ontario, une des premières choses que le gouvernement ait faites a été d’ouvrir des comptes au nom de la Police provinciale de l’Ontario pour permettre à celle-ci de lancer des alertes jaunes. Ce n’est pas nous qui en avons décidé ainsi, mais le gouvernement de la province. Il ne nous appartient pas de dire à l’Ontario comment procéder en ce domaine. C’est donc le gouvernement qui a décidé de donner à l’OPP le pouvoir de lancer des alertes jaunes, mais notre système est suffisamment souple pour ne permettre à la police provinciale que de lancer des alertes jaunes, à l’exclusion d’autres types d’alertes. En Ontario, la police ne peut d’ailleurs lancer des alertes jaunes que dans les zones indiquées par le gouvernement de la province. C’est une des approches possibles.
Le gouvernement de la Saskatchewan peut, lui aussi, se prévaloir de cette souplesse de mise en œuvre. Nous avons conclu avec la province le même accord qu’avec l’Ontario, mais la Saskatchewan a opté pour une approche différente. En effet, le gouvernement de la Saskatchewan a formé, à l’échelon municipal, des centaines d’utilisateurs autorisés à émettre des alertes. Mais, encore une fois, c’est le gouvernement de la Saskatchewan qui décide des personnes autorisées à lancer des alertes, et qui délimite les zones pouvant recevoir de telles alertes. Disons, dans un cas tout à fait hypothétique, que le gouvernement ait décidé d’autoriser l’agent de gestion des urgences de Saskatoon à émettre des alertes. Il peut préciser que les alertes ne pourront être lancées qu’à Saskatoon et, encore, que seuls certains types d’alertes pourront être émises. C’est entièrement à lui d’en décider. Nous fournissons les outils nécessaires et chaque province ajuste le système en fonction de ses besoins. Le dispositif relève du contrôle des diverses provinces.
Ma réponse vous paraîtra peut-être longue, mais j’espère qu’elle vous a été utile.
Le sénateur McIntyre : Comme vous le dites dans votre mémoire, pour que le système national d’alertes sans fil au public fonctionne correctement, il faut la collaboration de toutes les parties prenantes. J’entends par cela les autorités fédérales, provinciales et territoriales ainsi que Pelmorex et l’ensemble des fournisseurs de services sans fil. Il importe donc de lancer une campagne de sensibilisation ayant l’efficacité voulue.
Quelles sont les mesures de sensibilisation prises pour faire en sorte que le public canadien et les divers secteurs d’activités économiques du pays aient une bonne compréhension de l’actuel système d’alerte, afin de pouvoir y recourir de manière satisfaisante?
M. Temple : Bonne question. C’est effectivement très important, car il s’agit de quelque chose de nouveau. Dans le cadre de la licence qui nous est octroyée par le CRTC, Pelmorex va, au cours des prochains mois, consacrer environ 800 000 $ à la conception et au lancement d’une campagne médiatique.
Ainsi que je le disais tout à l’heure, notre entreprise est dotée d’un conseil de gouvernance et nous avons constitué un groupe de travail formé de spécialistes du marketing et de la communication détachés par les autorités provinciales, les radiodiffuseurs et les entreprises de téléphonie sans fil. Ils nous aident actuellement à préparer cette campagne médiatique. La campagne portera essentiellement sur les médias numériques et la publicité pour mobiles. Elle vise essentiellement les gens de la génération du millénaire, ceux qui possèdent ce type d’appareils. C’est un des meilleurs moyens de sensibiliser le public, mais nous allons également recourir à la publicité à la radio et à la télévision.
Si vous consultez un site web et même sur votre téléphone, vous verrez apparaître des publicités dont l’objectif sera de vous informer que des alertes sans fil vont bientôt commencer. Nous avons aussi un site web que nous exploitons, enalerte.ca et onalert.ca, qui fournit toutes sortes d’informations sur l’émetteur de l’alerte, pourquoi elle est émise et à quoi elle sert, autrement dit, les réponses à probablement bon nombre de vos questions.
Les représentants du conseil qui ont témoigné avant nous ont également parlé de certains types de téléphones. Nous allons diffuser de l’information contenant des liens avec chacune des compagnies de téléphonie. Ainsi, si votre fournisseur de téléphonie sans fil est Bell, par exemple, vous pourrez consulter le site web et cliquer sur un lien qui vous permettra de savoir si votre téléphone est l’un de ceux qui recevront ces alertes. Nous menons cette campagne de sensibilisation pour encourager les gens à consulter le site web où ils peuvent obtenir beaucoup plus de renseignements.
Le sénateur McIntyre : Vous parlez là de la mise en œuvre technique du système?
M. Temple : Exactement. Si le conseil nous donne son agrément le 6 avril — nous espérons que ce sera le 6 avril, parce que nous nous préparons pour ce jour-là. Nos publicités sont beaucoup plus efficaces si l’on précise que ça commencera le 6 avril.
Quelle que soit la date, nous espérons commencer à diffuser ces publicités au milieu du mois de mars de façon à avoir plusieurs semaines pour sensibiliser la population, étant bien entendu que la campagne continuera jusqu’à la Semaine de la sécurité civile, qui sera la première semaine du mois de mai, pour se poursuivre probablement jusqu’au début de l’été.
La sénatrice McPhedran : Merci de votre présence. Je suis très sensible à la différence que vous avez faite entre la plateforme, dont vous êtes responsable, et le contenu des alertes, dont vous n’êtes pas responsable. J’aimerais creuser un peu plus cette question en examinant le rôle ou l’architecture de la plateforme, ce qui m’amènera peut-être à vous interroger sur ses limites.
Je connais très bien l’île de Vancouver. D’après les informations que j’ai reçues au sujet de l’alerte au tsunami, l’une des critiques que l’on entend constamment est que ces alertes ne disent pas aux gens quoi faire ni où se réfugier. Évidemment, selon la gravité du phénomène océanique, il y a différentes façons de réagir pour essayer de se mettre à l’abri.
En ce qui concerne la plateforme, vous avez déjà indiqué qu’il n’y a que certains appareils qui permettront de sauver des vies, et que les gens qui ne sont pas des milléniaux croiront peut-être qu’ils ont un appareil susceptible de leur sauver la vie, alors que ce n’est pas le cas.
En écoutant votre témoignage, j’ai eu le sentiment que vous transférez une large part de la responsabilité aux consommateurs eux-mêmes, au public. Avez-vous sérieusement envisagé toutes les possibilités de faire en sorte que tous les appareils soient capables de sauver des vies? Est-ce un problème qu’on peut régler à partir de la plateforme, quand on sait que les gens de Tofino, par exemple, avaient reçu relativement peu d’informations sur ce qu’ils devaient faire pour se protéger?
M. Temple : Je vais vous répondre en parlant du contenu et des consignes, parce que je suis à peu près sûr qu’un organisme d’alerte du public — c’est toujours dangereux de s’exprimer au nom de quelqu’un d’autre — vous dirait, lui, qu’une situation d’urgence n’est probablement pas le meilleur moment pour dire aux gens ce qu’ils doivent faire, que cela doit se faire bien à l’avance.
Nous avons essayé de rendre notre système le plus souple possible. Martin me corrigera si je me trompe, mais cela peut inclure une URL. Par exemple, l’organisme pourra indiquer la nature ou le type d’urgence et inclure une URL qui permettra aux gens d’obtenir des renseignements plus précis en fonction de leurs propres besoins.
Notre système permet à l’émetteur d’inclure des images, des photos et des diagrammes. Si l’on veut inclure un trajet d’évacuation, par exemple, ou quelque chose du genre, le système le permet. Quant à savoir si l’émetteur sera capable de le faire, c’est une autre question, mais de notre côté, nous avons un système qui se prête à ce genre d’améliorations susceptibles de donner des informations plus complètes aux gens dont la vie est en danger.
Cela concerne le contenu des messages, car le plus important, c’est de savoir si les gens sont correctement informés. Je ne peux transmettre que ce que l’on me donne. Donc, si les gens ne sont pas correctement informés sur ce qu’ils doivent faire, il n’y a pas grand-chose que je puisse faire pour y remédier, si ce n’est fournir à l’émetteur les outils nécessaires.
La sénatrice McPhedran : J’aimerais avoir des précisions pour être sûre que nous sommes tous sur la même longueur d’onde. Si j’ai bien compris, il n’y a pas de boucle de rétroaction entre ceux qui gèrent la plateforme et ceux qui gèrent le contenu.
Si l’un de ceux qui gèrent la plateforme constate qu’il manque quelque chose de crucial dans le contenu, il ne pourra rien y faire, si j’ai bien compris votre réponse.
M. Temple : N’oubliez pas que l’alerte a été émise en trois secondes.
La sénatrice McPhedran : Mais on envoie d’autres alertes par la suite, pour donner plus d’éclaircissements, n’est-ce pas? Ou est-ce que vous ne recevez qu’une seule alerte, et c’est tout?
M. Temple : Non. L’organisme peut envoyer autant d’alertes qu’il veut, mais, si nous nous trouvons à 5 000 ou 3 000 kilomètres de distance, nous avons un opérateur qui s’assure que la plateforme fonctionne parfaitement, mais il n’est pas là pour lire le message d’alerte et se demander si les gens de Vancouver savent quoi faire. Il n’en a pas la moindre idée.
La sénatrice McPhedran : Donc, il n’y a pas de boucle de rétroaction entre les deux?
M. Temple : Eh bien, ce qui se passe typiquement, c’est que nous obtenons de la rétroaction de… Nous avons le site web et les médias sociaux. Nous obtenons de la rétroaction après coup et nous n’hésitons pas à la faire circuler. Nous discutons de ces questions pendant les réunions de notre conseil. Par contre, il n’y a rien que nous puissions faire pendant l’alerte elle-même. Je suppose que les émetteurs reçoivent beaucoup plus de rétroaction et ce, bien plus rapidement que nous, ce qui leur permet de juger si leur information est complète et adéquate.
Ce n’est pas à nous de nous assurer que leurs alertes sont efficaces. Nous pouvons certainement leur transmettre les réactions, comme nous l’avons déjà fait dans le passé. C’est l’une des choses que nous faisons au conseil.
Je ne peux parler que du système de radiodiffusion parce que c’est celui qui fonctionne depuis quelques années. Nous n’avons pas encore lancé le système d’alerte sans fil.
Je vais vous donner un bon exemple. Tout à l’heure, un des sénateurs a parlé de la piètre qualité du son. C’est une question qui relève du radiodiffuseur local. Ce qui se passe, c’est qu’on a utilisé au départ divers systèmes de texte-voix, essentiellement parce que l’organisme d’alerte ne fournissait que du texte. Nous leur donnons la possibilité de fournir un fichier audio s’ils le veulent, mais, au début, ils ne donnaient que du texte. Un fichier texte n’est cependant pas très utile pour les stations de radio et celles-ci ont donc dû utiliser des systèmes de synthèse de la parole à partir du texte.
Il y a eu beaucoup de plaintes à ce sujet, ce qui nous a finalement amenés à mettre en place un système centralisé de texte-voix de bien meilleure qualité pour répondre aux plaintes. C’est un processus qui a évolué au cours des années parce que nous recevions continuellement des plaintes sur la mauvaise qualité du son. Les radiodiffuseurs ne semblaient pas être en mesure de résoudre le problème, et il nous a semblé plus cohérent d’intervenir nous-mêmes, ce que nous avons fait.
La sénatrice McPhedran : Permettez-moi d’interrompre votre réponse, mais j’ai hâte d’entendre ce que vous avez à dire à propos des appareils.
M. Temple : Comme je l’ai dit, le système repose essentiellement sur des normes et des profils techniques. Donc, ce qui provient de nos fils de données — nous avons des fils de données. Nous recevons des données du satellite et nous les rendons disponibles par Internet. Je ne vais pas vous donner tous les détails techniques, je vous dis simplement que c’est accessible. N’importe qui peut y avoir accès.
Comme ça repose sur des normes, vous savez exactement ce que vous allez recevoir. Je dis souvent que c’est comme si on rédigeait une adresse sur une enveloppe. Tout le monde sait que l’enveloppe est destinée à M. ou Mme X, Y ou Z, qui réside à telle ou telle adresse dans telle ou telle province ou tel ou tel pays, avec un code postal particulier. Eh bien, le formatage de nos messages d’alerte procède du même concept. Ils sont structurés d’une certaine manière qu’à tel endroit vous verrez de quelle alerte il s’agit, qui en est l’émetteur, à quel moment elle a été émise et quel en est le message. Il y a toutes sortes de choses.
N’importe qui peut prendre ces fils de données et concevoir son propre système d’alerte si ça lui chante. Vous en avez un exemple parfait avec notre propre entreprise. Comme n’importe quel autre radiodiffuseur, le Weather Network ou MétéoMédia prend effectivement le fil d’alerte et l’intègre à son propre réseau ainsi qu’à ses applis téléphoniques. Ainsi, si vous avez une appli météo sur votre téléphone et qu’une alerte est lancée à Kamloops, vous la recevrez instantanément sur votre téléphone.
Évidemment, il s’agit là d’une appli de téléphone intelligent, pas d’une… C’est facultatif. Si vous ne voulez pas de l’appli de MétéoMédia ou si vous ne voulez pas recevoir de notification, vous ne recevrez pas cette alerte. Mais rien n’empêche qui que ce soit… Nous savons que Google utilise notre fil d’alerte... Ils pourraient envoyer des notifications aux gens. Vous pourriez aussi l’intégrer à un système de sirène dans une collectivité isolée.
C’est un système vraiment très souple parce qu’il repose sur des normes techniques. Si un bidouilleur de Brandon, au Manitoba, voulait programmer un petit logiciel pour qu’une sirène locale se déclenche lorsqu’il y a une alerte de tornade, il pourrait le faire.
La sénatrice McPhedran : Merci. Ma question était un peu différente et vous n’y avez pas vraiment répondu. Elle portait sur la très vaste gamme d’appareils qui existent sur le marché et sur le fait que, parce qu’ils ont dans leur poche un téléphone soi-disant intelligent, beaucoup de gens ont l’impression que ce système pourra leur sauver la vie.
Si je vous ai bien compris, ce n’est absolument pas le cas parce qu’il n’y a qu’un nombre limité d’appareils qui sont capables de transmettre ces messages de vie ou de mort. Je vous ai donc demandé ce que font votre groupe de travail, vos collaborateurs et votre industrie pour assurer ce lien crucial entre la plateforme, le contenu et les appareils.
En êtes-vous satisfait? Pouvez-vous nous donner l’assurance qu’on a envisagé toutes les possibilités d’étendre l’application de ce système de diffusion de messages à toute la gamme d’appareils existants, afin de donner la meilleure protection possible à la population canadienne?
M. Temple : Veuillez m’excuser, j’avais interprété votre question au sujet des appareils d’une manière très générale, en ne me limitant pas aux appareils mobiles, d’où ma très longue réponse.
Pour être tout à fait franc — je ne devrais pas parler au nom des autres —, nous n’en savons rien parce que nous n’exploitons pas les systèmes de téléphonie sans fil, nous ne savons donc pas combien d’appareils cela représente. C’est une question que vous devriez poser aux opérateurs de téléphonie sans fil parce que nous n’avons aucune idée du type de téléphones qu’ils ont vendu et à qui. La réponse à votre question ne peut venir que d’opérateurs comme Bell, Rogers et Telus. Nous, nous n’en savons rien.
Je ne me souviens plus s’il en a été question pendant les audiences. De toute façon, c’est une chose dont ils n’aiment pas parler parce qu’ils considèrent qu’il s’agit d’une information commerciale sensible. Bell ne veut pas dire à Rogers combien il y en a. Je ne sais pas qui pourrait vous répondre, si ce n’est les opérateurs de téléphonie sans fil eux-mêmes. Nous, nous ne savons pas quels sont les téléphones en cause.
Mais comme je l’ai dit, nous essayons, dans le cadre de notre campagne de sensibilisation, de faire comprendre aux gens que les téléphones sans fil ne seront pas nécessairement tous équipés pour recevoir les alertes et que les usagers peuvent se renseigner pour savoir si leur propre téléphone l’est ou non.
La sénatrice McPhedran : Une dernière petite question. Ceux qui étaient chargés de concevoir la plateforme et d’en assurer la mise en œuvre l’ont fait en réalité sans savoir jusqu’où elle pourrait être utilisée?
M. Temple : Quand vous parlez de plateforme, vous voulez parler du système que nous exploitons?
La sénatrice McPhedran : C’est vous qui avez parlé de « plateforme ». Je reprends simplement votre terme.
M. Temple : Nous avons conçu la plateforme à partir des spécifications de l’industrie pour permettre à ces types de téléphones — je crois que le CRTC a parlé tout à l’heure des téléphones LTE — de recevoir les alertes. Quant à savoir combien il en existe, c’est une information confidentielle des opérateurs de téléphonie.
La sénatrice McPhedran : Merci.
M. Temple : Je pense qu’on part du principe qu’à terme tous les téléphones auront cette capacité, mais, pour le moment, je ne saurais vous dire combien il y en a parmi tous ceux qui sont en circulation. Seuls les opérateurs de téléphonie sans fil pourraient vous le dire.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J’ai quelques questions pour vous en lien avec celles que j’ai posées aux témoins précédents. Vous avez fait l’essai du système entre 2014 et 2017, et je sais que l’expérience a été très critiquée pour ce qui est de la qualité des messages. Lors des premières alertes, les messages étaient tellement incompréhensibles qu’ils effrayaient plus qu’ils n’aidaient.
Avez-vous un système pour vérifier la qualité de ces messages? Ne pourrait-il pas y avoir une façon de recevoir de la rétroaction de la part des citoyens afin de savoir s’ils ont bien compris le message? Est-ce qu’un système de contrôle de la qualité sera mis en place?
[Traduction]
M. Temple : Oui, précisément au sujet du son parce que je crois que c’est ce qui avait causé le plus de plaintes. Ce que nous avons fait, comme je l’ai dit, c’est que nous avons mis en œuvre un système texte-voix centralisé. Comme les alertes doivent être diffusées très rapidement, les gens n’ont pas le temps de préparer un fichier son à partir du fichier texte, et c’est pourquoi nous avons mis en place ce système centralisé, de manière à créer une version sonore pendant que le message est en train d’être dactylographié, ce qui permet à l’émetteur de l’écouter.
Notre système permet littéralement à l’émetteur de recevoir une version sonore du message quelques secondes seulement après qu’il a fini de le taper. Il peut ainsi l’écouter avant sa diffusion.
La synthèse de la voix à partir d’un texte est un système merveilleux, mais, s’il n’y a pas d’espace entre deux mots, le système considérera qu’il s’agit d’un seul mot. S’il n’y a pas de point à la fin de la phrase, le système pensera simplement que c’est un long, très long paragraphe. Ce n’est qu’une machine, après tout. J’ai mentionné l’OPP, mais si vous mettez « OPP », la machine dira « op ». Elle ne reconnaît pas les sigles.
Nous avons donc mis en place ce système qui permet à l’émetteur d’écouter le message audio afin d’y apporter des corrections. S’il y a une faute d’orthographe ou autre, l’émetteur peut la corriger. Les émetteurs peuvent aussi adapter le lexique en modifiant le logiciel pour que les noms de lieux soient prononcés correctement.
La prononciation des lieux du Québec, par exemple, a été adaptée afin qu’ils soient prononcés comme un Québécois s’attendrait à les entendre. Même chose pour l’Ontario. Dans la plupart des provinces, la prononciation des lieux est assez particulière. Par exemple, la machine ne saurait pas comment prononcer Pentanguishene. Il a fallu le lui apprendre. C’est une adaptation qui est effectuée par la province elle-même, pas par nous, parce que je ne sais pas comment prononcer certains noms de lieux de la Saskatchewan, par exemple, et vous ne voudriez certainement pas m’entendre prononcer les noms de certains villages du Québec, ce qui ne pose aucun problème à Martin. Mais c’est chaque province qui assume cette responsabilité.
On a parlé tout à l’heure de rétroaction, et je peux vous dire que c’est une question qui en a suscité beaucoup au fil du temps, ce qui nous a amenés à apporter des améliorations au système.
J’espère que la rétroaction que nous obtenons maintenant des provinces indique que la qualité du son est bien meilleure. Je ne saurais vous dire si c’est la même chose pour la qualité des traductions car, encore une fois, cela relève de la responsabilité de l’émetteur.
Le sénateur Boisvenu : Mais les émetteurs peuvent les corriger ?
M. Temple : Oui.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J’ai lu le document que vous nous avez remis relativement aux systèmes intégrés. En examinant les statistiques, j’essayais de comprendre pourquoi le nombre d’alertes, en Saskatchewan et au Manitoba, était plus élevé — tout près de 4 000 alertes — que dans presque toutes les autres provinces combinées. Y a-t-il une particularité culturelle ou géographique qui explique le grand nombre d’alertes dans cette région par rapport à d’autres endroits au Canada?
[Traduction]
M. Temple : Certaines provinces ont été très actives en matière d’alertes publiques. Je le répète, chaque province prend ses propres décisions à ce sujet. Certaines décident de centraliser leur système d’alerte, alors que d’autres préfèrent laisser cette responsabilité aux premiers intervenants locaux.
C’est vraiment une décision provinciale. En Saskatchewan, je crois qu’on a fait descendre la responsabilité très bas au niveau local. Toutefois, je crois savoir que, dans cette province, la plupart des alertes ne sont pas radiodiffusées, tout simplement parce qu’ils ne sont pas prêts. Les municipalités peuvent émettre certaines alertes qui ne vont pas interrompre la radiodiffusion, mais qu’il est quand même utile de connaître parce que le fil d’alerte est en réalité semblable à un fil de nouvelles. Le message peut être transmis à une salle des nouvelles sans qu’il soit nécessaire d’interrompre l’émission radiodiffusée. Vous pouvez voir le nombre d’alertes qui ont été lancées en consultant les tableaux que nous avons envoyés. Cette information peut aller dans les salles de nouvelles, elle peut aussi aller dans les systèmes automatisés qui la transmettent aux applis téléphoniques. Si vous voulez recevoir les alertes de gel, vous pouvez programmer un simple logiciel qui vous préviendra lorsque l’alerte sera émise, mais cela n’interrompra pas les émissions et n’enverra pas un message sur un téléphone. C’est strictement réservé aux cas où la vie est en danger.
S’agissant de la Saskatchewan, même si je n’aime pas parler au nom des autres, je crois savoir qu’elle souhaite que ses émetteurs d’alertes au niveau municipal se familiarisent avec notre système. La province continue d’exercer un contrôle rigoureux sur les alertes les plus sérieuses.
[Français]
M. Bélanger : J’aimerais ajouter un commentaire. Certaines provinces sont centralisées, alors que d’autres sont décentralisées, comme la Saskatchewan. Certaines provinces décident aussi du type d’alertes qui seront émises. Une province peut seulement émettre une alerte d’urgence — comme dans le cas d’une alerte AMBER —, alors qu’une autre, comme la Saskatchewan, peut émettre quelques centaines de types d’alertes différentes. La majorité des alertes ne sont pas conçues pour des situations d’urgence.
La différence de chiffres entre les provinces peut aussi dépendre du type d’alerte ou de la situation lors de laquelle les provinces doivent envoyer un message au public.
Le sénateur Dagenais : On dit que la décision de diffuser telle ou telle alerte peut appartenir aux provinces ou aux municipalités. On l’a vu en 2016, dans le cas de la Police provinciale de l’Ontario.
Le choix du type d’alerte à lancer et la façon dont elle sera lancée incombe à plusieurs personnes. On a aussi mentionné qu’il peut y avoir un problème de traduction ou du choix de la langue dans laquelle l’alerte sera lancée, selon les provinces. Tout cela ne rend-il pas votre organisme plus vulnérable?
[Traduction]
M. Temple : Je ne crois pas que ça le rende plus vulnérable, mais cela laisse la responsabilité à la province. Comme je l’ai dit, nous n’imposons aucune restriction. Nous avons passé un accord-cadre avec la province et ouvert un compte-cadre, si je peux m’exprimer ainsi. Ensuite, c’est à la province qu’il appartient de décider à qui elle y donne accès.
J’espère simplement qu’elle n’y donnera accès qu’à des personnes qui auront reçu une formation adéquate non seulement sur l’utilisation de notre système, mais aussi sur les critères, les politiques et les procédures mis en œuvre par la province.
L’accord dit en substance que la province assume la responsabilité de ses utilisateurs. Il ne m’appartient certainement pas de dire à la Saskatchewan si M. X ou Y devrait y avoir accès ou non. C’est la province qui doit prendre cette décision. Je peux lui donner les outils nécessaires pour créer le type de comptes dont elle a besoin et pour mettre en œuvre des politiques restreignant ou limitant certains types d’alertes, mais, au final, tout cela relève de la province elle-même.
Le sénateur Richards : Je vous remercie d’être venus témoigner. Je voudrais simplement faire une observation au sujet du Nouveau-Brunswick. Vous avez bien dit que ce sont les provinces qui émettent les alertes, n’est-ce pas? Ce n’est pas le gouvernement fédéral? Il serait peut-être bon qu’il y ait une supervision fédérale.
Vous voyez ici le nombre d’alertes émises pour des produits chimiques toxiques. Il y en a eu sept au Nouveau-Brunswick. Je suppose qu’il s’agissait de déversements de produits chimiques et qu’aucun ne touchait la totalité de la province. C’était sans doute limité à certaines localités comme Saint John, par exemple. Dans ce cas, lance-t-on une alerte dans toute la province ou seulement à l’endroit où le déversement s’est produit? Lance-t-on une alerte panprovinciale ou seulement municipale?
M. Temple : En fait, ces alertes ont été émises par la province à l’occasion de la panne de courant électrique. C’était pour prévenir les gens qui utilisaient des barbecues ou d’autres systèmes artificiels...
Le sénateur Richards : C’était pendant la tempête de verglas, ce qui est une situation tout à fait différente.
M. Temple : La province voulait prévenir les gens de ne pas emporter leurs barbecues à l’intérieur des logements, parce qu’il y avait eu plusieurs morts accidentelles. Il y a eu plusieurs alertes simplement parce qu’on voulait répéter plusieurs fois ce message. Si l’on avait émis le message le mardi, et que le courant n’était toujours pas rétabli, on le rediffusait le mercredi plusieurs fois de suite, pour s’assurer que les gens soient bien prévenus. C’était donc seulement...
M. Bélanger : Exact, c’était seulement pendant la tempête de verglas.
Le sénateur Richards : Très bien. Ce qui avait retenu mon attention dans cette liste, c’étaient les alertes concernant des produits chimiques, et j’en avais conclu que c’étaient des alertes strictement locales. Merci.
Le sénateur McIntyre : Pour faire suite à la question du sénateur Richards, monsieur Temple, je constate au tableau 2 de votre mémoire que les alertes concernant des dangers pour la vie ont été émises par le truchement du système ADNA. Y a-t-il une contribution des provinces au sujet des alertes concernant des dangers pour la vie?
M. Temple : Oui. Quand vous parlez des alertes concernant des dangers pour la vie, de quel tableau s’agit-il? Du tableau 2?
Le sénateur McIntyre : Du tableau 2.
M. Temple : Il y a donc eu 1 103 alertes émises par Environnement Canada, et les autres ont toutes été émises par des provinces, soit 3 par le Manitoba, 8 par le Nouveau-Brunswick, 58 par l’Ontario, 8 par le Québec et 8 par la Saskatchewan. Toutes celles-là ont été émises par les autorités provinciales.
Le sénateur McIntyre : Je note que le système d’alerte actuel du Canada est accessible en ligne, mais où ces alertes sont-elles diffusées en ligne? Sont-elles visibles sur le site web de Sécurité publique Canada, sur les sites web des services d’urgence provinciaux ou sur les deux?
M. Temple : Comme je l’ai dit, le produit de notre fil d’alerte est standardisé et n’importe qui peut donc le prendre et l’intégrer à son propre site web.
Dans le cas du Weather Network et de MétéoMédia, nous diffusons chaque alerte qui passe dans le système. Donc, si vous allez sur la page de theweathernetwork.com ou de meteomedia.com, vous trouverez les alertes.
Je ne peux pas parler pour les autres, mais la plupart des provinces affichent sans doute aussi leurs propres alertes sur un site web. Je ne pense pas qu’il y ait une source fédérale unique. Environnement Canada affiche ses propres alertes, mais je ne pense pas qu’il affiche aussi celles des provinces. Le Weather Network et MétéoMédia affichent tout sur notre site web.
Le sénateur McIntyre : Voici peut-être une dernière question. En guise de clarification, messieurs, si j’ai bien compris, les opérateurs de téléphonie sans fil seront tenus d’ici avril 2018 de diffuser les alertes. Ou cela sera-t-il facultatif?
M. Temple : Non, je ne crois pas que ce sera facultatif. Je crois, d’après ce qu’a dit le CRTC quand il a comparu tout à l’heure, qu’il lui restait à revoir et à approuver certains rapports du CDCI. En supposant que ces rapports soient acceptés par le conseil, je m’en tiens à la date du 6 avril, sauf avis contraire. De toute façon, nous, nous serons prêts le 6 avril. Quant à savoir si ce sera obligatoire ou non, cela dépendra de l’approbation de ces deux rapports par le CRTC.
Le sénateur McIntyre : Cela dit, je tiens à faire une remarque. J’espère que les clients des services de téléphonie sans fil ne seront pas obligés de s’inscrire pour bénéficier du système d’alerte et qu’ils recevront automatiquement les alertes les concernant. C’est à la fois crucial et important. Sinon, en cas de menace, nous ferons face à une crise nationale.
M. Temple : Non, ils n’auront pas à s’inscrire. La seule question sera de savoir à quelle date le service démarrera. Est-ce que ce sera le 6 avril? Je peux vous assurer qu’ils n’auront pas à s’inscrire. La seule inconnue reste la date de lancement, qui sera fixée par le CRTC.
J’espère vraiment que ce sera le 6 avril car, comme je l’ai dit, nous préparons actuellement une campagne médiatique et nous avons besoin de savoir quelle date y inclure. Nous aimerions pouvoir dire aux consommateurs que ce sera à partir du 6 avril…Mais nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où nous aurions mentionné le 6 avril si c’est en réalité le 15 avril.
Le sénateur McIntyre : Je peux vous dire que, si le système n’est pas opérationnel fin avril, notre comité tapera du poing sur la table.
La présidente : Si personne d’autre n’a de questions à poser, je souhaiterais moi-même en poser une. Vous avez dit avoir demandé à des vérificateurs indépendants de se pencher sur votre travail. Pourriez-vous nous faire part d’une ou deux choses que vous avez apprises de cette manière et que vous avez mises en œuvre après cet examen?
M. Temple : Le rapport le plus récent n’est pas encore finalisé. Nous procédons encore à son analyse.
En ce qui concerne le rapport précédent, comme je crois vous l’avoir dit, aucun d’entre nous n’y comprend quelque chose. On y parle de serveurs et je suis perdu. Je peux cependant vous dire qu’il n’y avait dedans rien de vraiment préoccupant. Les auteurs avaient un système d’évaluation à trois couleurs, vert, jaune et rouge. Je pense qu’il n’y avait rien de rouge, mais ils ont recommandé d’améliorer des choses, ce que nous avons fait immédiatement.
Nous en avons fait rapport à notre conseil de gouvernance. Nous faisons rapport d’une manière qui… Nous ne voulons pas que nos plans détaillés circulent librement dans la nature, mais nous informons les membres de notre conseil de gouvernance de ce qui a été recommandé. Les vérificateurs sont venus et ont parlé au conseil qui a pu ainsi recueillir directement leur opinion. Nous n’avons pas été les seuls à parler au conseil. Nous avons l’intention de suivre la même procédure avec la prochaine vérification. Nous demanderons aux vérificateurs de s’adresser directement aux membres du conseil de gouvernance s’ils estiment qu’il y a des problèmes à résoudre et des choses à améliorer ou s’ils ont des préoccupations quelconques.
La présidente : C’est votre système de freins et de contrepoids, qui vous permet de rassurer le conseil de gouvernance?
M. Temple : Exactement.
La présidente : Merci. Les sénateurs ont-ils d’autres questions?
Monsieur Temple et monsieur Bélanger, merci beaucoup d’être venus témoigner devant le comité. Nous vous remercions des informations que vous nous avez communiquées.
M. Temple : Merci de nous avoir invités.
La présidente : Avant de suspendre la séance, sénateurs, nous devons prendre une décision au sujet d’une motion et, pour cela, nous allons continuer à huis clos. Sénateur Dagenais, vous avez la motion?
[Français]
Le sénateur Dagenais : La motion concerne le Sous-comité des anciens combattants :
Que le Sous-comité des anciens combattants soit composé des membres suivants : les honorables sénateurs Boniface, Dagenais, Jaffer, McIntyre et Richards, dont trois constitueront le quorum.
[Traduction]
La présidente : Êtes-vous d’accord, mesdames et mesieurs les sénateurs ?
Des voix : D’accord.
La présidente : Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes afin de pouvoir continuer à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)