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SECD - Comité permanent

Sécurité nationale, défense et anciens combattants

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule no 44 - Témoignages du 28 mai 2019


OTTAWA, le mardi 28 mai 2019

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, auquel a été renvoyé le projet de loi C-77, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois, se réunit aujourd’hui, à 14 heures, pour l’étude article par article du projet de loi.

La sénatrice Gwen Boniface (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Chers collègues, nous allons commencer. J’invite les sénateurs à se présenter.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Sénateur Jean-Guy Dagenais, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Don Plett, de Landmark, au Manitoba.

Le sénateur Richards : Dave Richards, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur McInnis : Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Griffin : Diane Griffin, Prince Edward Island.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l’Ontario.

La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, du Manitoba.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

Le sénateur Gold : Marc Gold, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.

La présidente : Je suis la sénatrice Gwen Boniface, votre présidente.

Chers collègues, avant de commencer, nous devons nous occuper de deux questions de régie interne. Tout d’abord, comme vous le savez, la sénatrice Jaffer a quitté le comité. Par conséquent, nous devons élire un vice-président.

Le sénateur Gold : Je propose que le sénateur Mercer soit élu vice-président.

La présidente : Êtes-vous d’accord?

Des voix : D’accord.

La présidente : Passons à la deuxième question. Sénateur Dagenais, vous avez la parole.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, j’ai un point à l’ordre du jour. On a fait circuler la motion que je vais présenter et vous lire en français :

Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à étudier, afin d’en faire rapport, les circonstances ayant mené la GRC à déposer des accusations criminelles, maintenant retirées et jugées sans fondement, contre le vice-amiral Mark Norman, y compris la portée et la nature de la participation à ce processus d’autres personnes;

Que dans le cadre de cette étude, le comité soit autorisé à inviter le ministre de la Défense nationale, le chef d’état-major de la défense, le vice-amiral Norman, et tout autre témoin qu’il décide d’entendre;

Que le comité présente son rapport au plus tard le 20 juin 2019.

[Traduction]

La présidente : Sénateur Dagenais, en ce qui concerne la motion, je crois que nous avons convenu de l’envoyer au comité directeur; est-ce exact?

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’espère que l’ensemble des membres du Comité de la sécurité nationale accepteront la motion. Madame la présidente, je crois qu’il serait préférable de tenir un vote, parce que je veux être sûr que tout le monde sera d’accord avant qu’on discute de la motion et qu’on étudie le tout. Le but est d’apporter des éclaircissements sur la suspension du vice-amiral Norman. Il ne faut pas oublier que son dossier a été porté sur la place publique, et je pense que, par respect pour le vice-amiral Norman, on doit lui permettre de s’expliquer ou lui donner accès à une tribune sur la place publique. C’est le rôle du Comité de la sécurité nationale, qui est autorisé à examiner les pratiques, les circonstances et les capacités du Canada en matière de sécurité nationale et de défense. Je préfère tenir un vote pour qu’on accepte la motion et, par la suite, on pourrait discuter de la façon dont on pourrait entreprendre les travaux.

[Traduction]

Le sénateur Gold : La motion soulève certes une question importante. J’ai toutefois deux réserves quant à l’idée de tenir un vote. Par-dessus tout, il nous faudrait prendre le temps d’en discuter et d’en délibérer. À cet égard, le Sénat nous a donné l’autorisation de siéger exclusivement pour étudier le projet de loi C-77, dont je suis le parrain. C’est d’ailleurs pourquoi l’étude article par article m’intéresse particulièrement.

Premièrement, je ne pense pas qu’il soit approprié de débattre de ce que nous devrions faire avant la tenue d’un vote, car ce n’est pas ce que le Sénat nous a autorisés à faire aujourd’hui, en dehors des heures normales de séance.

Deuxièmement, je crois qu’il convient que le comité directeur ait l’occasion de discuter de cette question et de nous la renvoyer pour une discussion approfondie. J’ignore quand les membres du comité directeur proposent de se réunir, mais notre comité tiendra une séance lundi prochain. Je ne peux m’empêcher de penser que cela donnerait au comité directeur le temps de discuter des modalités et de nous présenter une recommandation que nous serions alors disposés à examiner de bonne foi.

Il ne convient pas d’empiéter maintenant sur le temps réservé à l’étude article par article, car c’est la seule raison pour laquelle nous avons été autorisés à siéger aujourd’hui, au lieu de participer aux débats du Sénat.

Le sénateur Plett : Eh bien, en ma qualité de whip, et comme le sénateur Gold le sait, nous avons tous deux donné la permission de siéger aujourd’hui. Des raisons sont invoquées au départ, mais nous ne faisons que donner notre approbation. Aujourd’hui, lorsqu’une demande a été envoyée pour savoir si le comité pouvait tenir une séance à 13 h 30 plutôt qu’à 14 heures, le sénateur Mitchell a dit explicitement : « Seulement si c’est pour s’occuper d’une affaire émanant du gouvernement. »

Lorsque nous voulons préciser la raison pour laquelle un comité est autorisé à siéger, nous avons l’option de le faire. Or, ce n’est pas ce que j’ai fait. J’ai uniquement donné mon accord après que la présidente du comité m’a demandé si j’approuverais la tenue d’un certain nombre de réunions différentes.

Le fait est que nous en discutons déjà. Un vote prend environ une minute. S’il n’y a pas de questions, nous pouvons procéder au vote sur-le-champ. Il faudra une minute ou une minute et demie et, ensuite, nous pourrons passer à l’étude article par article. Le débat en soi prendra plus de temps que cela. Alors, madame la présidente, je vous propose de mettre aux voix la motion.

La présidente : Sénateur Plett, si je peux me permettre d’apporter une précision aux fins du compte rendu, la séance d’aujourd’hui est le résultat d’un avis de motion et d’une motion adoptée par le Sénat.

Le sénateur Mercer : C’est une question importante. Le vice-amiral Norman est un vieil ami à moi, alors je serai heureux de le voir.

Selon ce que j’ai pu comprendre, l’objet de la réunion d’aujourd’hui était de discuter d’une affaire émanant du gouvernement. Lorsqu’on a demandé la permission de notre groupe pour siéger à 13 h 30, nous avons dit oui, mais le gouvernement a dit non. Qui plus est, le gouvernement tient à ce que nous discutions uniquement des initiatives ministérielles. C’est la seule chose que nous avons été autorisés à faire — discuter d’une affaire émanant du gouvernement.

Je crois que cette motion doit faire l’objet d’une discussion. Le sénateur Dagenais nous propose un court délai — et je suis conscient qu’il ne nous reste pas beaucoup de temps —, de sorte que nous en fassions rapport d’ici le 20 juin. Le comité directeur n’a pas tenu de réunion à ce sujet et n’a pas eu l’occasion d’examiner le calendrier ou la disponibilité des témoins proposés par l’auteur de la motion. Il se peut qu’aucun d’entre eux ne soit disponible. Ces personnes pourraient être à l’extérieur du pays pour affaires — en mission officielle n’importe où dans le monde.

À mon avis, pour rendre justice à la motion du sénateur Dagenais, le comité directeur doit se réunir et en parler. Je crois que nous aurions tort de voter là-dessus aujourd’hui. Nous devrions reporter le vote à la prochaine séance du comité.

Le sénateur Pratte : Je ne trouve pas que le processus proposé en l’occurrence soit acceptable. Il s’agit d’un sujet très important, et la motion comporte plusieurs aspects très intéressants, d’après ce que je viens de lire. Toutefois, je ne pense pas qu’il soit raisonnable de nous demander de dire : « Voici une motion, et votons là-dessus parce que cela ne prendra qu’une minute. » L’opposition est toujours favorable à l’idée de débattre longuement des questions et des projets de loi pour que nous ayons le temps de tenir un vrai débat. Nous avons besoin de temps pour réfléchir à la motion et à son libellé, ainsi qu’aux possibilités. Cela exige du temps. Je crois que nous avons besoin d’une telle période de réflexion. Il n’est pas raisonnable de nous demander de voter en moins d’une minute sur une motion qui vient de nous être présentée.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Écoutez, madame la présidente, je comprends que mes collègues veulent faire un débat de « procédurite ». Toutefois, je peux vous dire une chose : on étudie les projets de loi du gouvernement et, en tant que vice‑président du Comité de la sécurité nationale, auquel je siège depuis six ans, je n’ai jamais vu autant de flexibilité de la part de l’opposition, comme vous nous appelez. Depuis quelques semaines, nous tenons des réunions avec cinq ou six groupes de témoins le lundi, de 11 à 18 heures. On a eu l’autorisation des whips de siéger pendant que le Sénat siège, ce que je n’ai jamais vu. On ne peut pas nous reprocher de ne pas vouloir étudier les projets de loi du gouvernement.

Aujourd’hui, je présente une motion qui prendra quelques minutes. Je comprends que mes collègues d’en face ne souhaitent peut-être pas écouter le vice-amiral Norman pour des raisons purement politiques. Je vais essayer de me contenir, car je crois qu’on se sert de la « procédurite » dans le but d’éviter d’éclaircir une situation. Cette personne est suspendue depuis deux ans et elle mérite d’être entendue. Lorsqu’on nous dit qu’il faudrait un comité directeur pour étudier ensemble cette question, je ne comprends pas. D’un côté, on veut prendre le temps d’étudier... Je sais qu’aujourd’hui on devait faire l’étude article par article du projet de loi C-77, ce que nous ferons. On nous a bousculés dans l’étude de ce projet de loi qui nous arrive de la Chambre des communes et qui est, encore une fois, mal ficelé. On oblige le comité à l’étudier pendant deux jours et on nous demande notre approbation pour siéger de 11 h à 18 h afin d’accueillir cinq groupes de témoins. Je n’ai jamais vu ça. Aujourd’hui, on vient nous reprocher de prendre quelques minutes pour présenter une motion.

Je trouve cela inacceptable, madame la présidente. Il est rare que je me fâche dans ce comité, mais si on demande de la transparence, de l’assouplissement et de la collaboration, il serait tout à fait normal que nos collègues d’en face approuvent la motion. Si on veut discuter de la façon de faire cette étude, on peut le faire lundi, à condition qu’on accepte d’entendre le vice‑amiral Norman et le général Vance, qui est de l’autre côté de la médaille, ainsi que le plus ou moins loquace ministre de la Défense, qui s’est présenté hier et avait de la difficulté à répondre à nos questions.

Je vais arrêter là. On nous dit qu’il ne faut pas faire de partisanerie et que nous sommes une chambre de réflexion indépendante. Je pense qu’on ne se conduit pas comme une chambre indépendante aujourd’hui et que mes collègues se conduisent de façon partisane. C’est inacceptable.

Le sénateur Boisvenu : En réponse à mes collègues, les sénateurs Gold et Pratte, je comprends que le dossier Norman a été très peu couvert par les médias québécois. C’est un sujet qui a été couvert amplement par les médias au Canada anglais et dans les Maritimes. À moins d’avoir vécu sur la planète Mars ou ailleurs depuis trois semaines, cette motion n’a pas besoin de beaucoup de débat. Il est arrivé un événement inquiétant qui touche la défense nationale et, donc, notre comité. La motion de mon collègue est tout à fait justifiée et ne nécessite aucun débat, si ce n’est la question de savoir si, oui ou non, nous sommes d’accord pour entendre le vice-amiral. Voilà.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Madame la présidente, je tiens à rappeler que notre comité a pour pratique, me semble-t-il, de respecter les services supplémentaires requis par notre comité directeur pour réfléchir aux questions qui nécessitent un examen plus approfondi. J’espère que c’est ce que nous ferons dans le cas de cette motion. J’insiste pour que nous procédions ainsi.

Par ailleurs, je voudrais préciser que nous sommes ici pour l’étude article par article. Nous avons ici des gens qui attendent que nous cessions nos querelles. J’exhorte donc les sénateurs à s’en tenir au programme prévu pour aujourd’hui.

Le sénateur Plett : Je suis certainement d’accord avec la sénatrice McPhedran sur ce qu’elle vient de dire; bref, si nous tenions un vote rapide, nous pourrions y arriver.

La sénatrice McPhedran a fait allusion à la pratique des comités. En réalité, d’après la pratique adoptée dernièrement par un certain nombre de comités sénatoriaux, étant donné que le calendrier parlementaire tire à sa fin, ce ne sont pas les comités directeurs qui ont pris les décisions, mais bien les comités. Le projet de loi C-69 au Comité de l’énergie en est un exemple parfait, et c’est ce qui s’est également passé aujourd’hui au Comité des peuples autochtones.

Lorsque notre comité a entamé l’étude du projet de loi C-71, vous savez, madame la présidente, que je voulais renverser deux projets de loi. Je vous ai consultée, et nous avons fini par nous occuper des deux mesures législatives. Je vous ai d’ailleurs félicitée pour la manière dont vous avez géré l’étude de ces deux projets de loi. Or, lorsque je suis allé voir le leader du gouvernement au Sénat, il m’a dit catégoriquement que les comités sont maîtres de leur destinée. Le leader a affirmé clairement que ce sont les comités qui mènent la barque; ils peuvent décider des travaux qu’ils entreprendront.

Madame la présidente, nous n’avons pas besoin d’une longue discussion. Si les sénateurs d’en face ne sont pas contents, ils pourront voter contre la motion. Ce sera vite fait.

Madame la présidente, je vous encourage fortement à mettre aux voix la motion et, à défaut d’un accord, la motion sera rejetée.

Le sénateur Gold : Je comprends la passion avec laquelle les défenseurs de cette motion font valoir leurs arguments. Je n’avancerai aucune hypothèse quant à leurs motivations. Ce n’est pas dans mes habitudes.

C’est le Sénat — et non pas les whips — qui nous a autorisés à siéger pour nous occuper d’une affaire émanant du gouvernement, à savoir l’étude article par article. Les fonctionnaires sont ici; nous avons du travail à faire. Tout me porte à croire que des amendements seront proposés et discutés.

Pour ma part, je n’accepterai pas que l’on me conteste ou, oserais-je dire, que l’on m’intimide en vue de m’amener à voter sur quelque chose sans me donner l’occasion d’en discuter en bonne et due forme. Ce n’est pas une mince affaire, pour employer un euphémisme.

J’ai eu à peine le temps de lire la motion. Je ne sais pas ce qui est en cause. Bien franchement, je me demande même si cette question relève de la compétence de notre comité — même si nous sommes maîtres de nos travaux —, plutôt que de celle d’autres comités. Cela dépendrait de la portée de l’étude que le comité choisirait d’entreprendre parce que d’autres comités ont, en toute honnêteté, des mandats bien plus précis que le nôtre, notamment en matière d’administration de la justice.

Ce n’est donc pas si évident que cela. Il me serait utile d’avoir l’avis du comité directeur et du sénateur Mercer, qui vient de s’y joindre. Nous ne parlons que de quelques jours.

Voici ce que j'aimerais dire aux gens qui nous regardent peut‑être : il est irresponsable, de notre part, de faire fi non seulement de nos responsabilités au Sénat, mais aussi du mandat qui nous a été confié par le Sénat, c’est-à-dire celui de terminer l’étude d’un projet de loi d’initiative ministérielle qui porte sur les droits des victimes et qui prévoit d’importants changements au système de justice militaire, dans le but de tenir un vote rapide, lequel nous est littéralement imposé à la dernière minute pour je ne sais trop quelle raison.

J’hésite à en dire davantage sur la procédure, mais la recevabilité en l’occurrence n’est pas évidente. Je pourrais bénéficier de l’avis du comité directeur, et je demande instamment à l’auteur de la motion —

[Français]

— mon ami et collègue, le sénateur Dagenais, d’accepter que les membres du comité de direction prennent le temps de discuter ensemble et de nous revenir avec leurs recommandations.

[Traduction]

C’est la manière appropriée de procéder au Sénat.

Le sénateur Plett : Passons au vote.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je tiens à rassurer mes collègues. D’abord, j’ai un énorme respect pour notre présidente et nous avons une excellente relation. Avant de présenter la motion au comité aujourd’hui, j’avais pris le soin d’en aviser madame la présidente. La sénatrice Jaffer, qui était au comité directeur, est absente. Nous formions donc le comité directeur, car le sénateur Mercer s’est joint à nous aujourd’hui seulement. D’un commun accord, nous avions convenu de présenter cette motion hier à 17 h 30, parce qu’il nous restait une demi-heure avant la fin prévue à 18 h. Il était 17 h 45 et, voyant la fatigue de mes collègues, j’ai suggéré moi-même de reporter la discussion et le vote à aujourd’hui. Donc, nous formions le comité directeur. Pour ceux qui sont préoccupés par les discussions que doit tenir le comité directeur, nous avions eu ces discussions.

Une autre chose qu’il faut relever, c’est qu’il ne faut pas oublier que le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes n’a pas pu entendre le vice-amiral Norman, parce que les libéraux s’y sont opposés. Il y a peut-être eu de la partisanerie à la Chambre des communes. On dit qu’au Sénat, il n’y en a pas. Je pense que, d’un commun accord, nous devrions accepter cette motion.

Vous pouvez sourire. Vous nous reprochez parfois d’agir de façon partisane, mais je pense que nous devons le respect au vice-amiral Norman. C’est quelqu’un qui a une brillante carrière. Je ne le connais pas personnellement. À ceux qui hésitent, j’affirme que c’est une idée personnelle que j’ai eue, parce que je ne comprenais pas — peut-être à cause de mon vieux fond de policier — qu’on suspende pendant deux ans un individu qui a eu une brillante carrière. Je ne comprends pas non plus ce que la GRC a fait dans cette enquête. En tant qu’ancien policier, il me semble que l’on porte des accusations seulement parce que le procureur l’a autorisé. On lui dit maintenant : « Vice-amiral Norman, ne vous inquiétez pas, il n’y a plus d’accusation, vous pouvez reprendre votre travail, il ne s’est rien passé. » À mon avis, on a manqué de respect envers un haut gradé militaire.

Le rôle du Comité de la sécurité nationale est de défendre les militaires et leurs intérêts. Je peux les comprendre. Il y a la hiérarchie, on sait qui nomme les gradés. J’ai déjà été policier, alors je sais comment fonctionnent les grades. Nous avons une excellente tribune, le Comité sénatorial de la défense, pour étudier ce qui est arrivé au vice-amiral Norman et lui donner une chance de s’expliquer sur la place publique. La présidente et moi avons eu des discussions à ce sujet. Encore une fois, je souligne son excellent travail. Nous avons une bonne relation et nous continuerons sur cette lancée.

Aujourd’hui, je m’attends à ce qu’on vote sur cette motion pour entendre les témoignages du vice-amiral, du général Vance et du ministre de la Défense nationale. Par la suite, nous verrons comment nous progresserons dans ce dossier. En passant, si l’étude article par article vous préoccupe, nous avons suffisamment de temps pour la terminer aujourd’hui. Au lieu que le comité se réunisse à 13 h la semaine prochaine, je propose que la réunion commence à 11 heures. Nous sommes très flexibles. Je pense que nous avons suffisamment de temps aujourd’hui pour procéder à l’étude article par article.

Encore une fois, je vous implore d’accepter cette motion. Par la suite, nous passerons à l’étude article par article. Nous ne voulons pas retarder nos témoins, qui sont des militaires. Je comprends leur silence, car ils ne peuvent pas intervenir. Je pense qu’ils comprennent très bien tout le respect qu’on doit au vice-amiral Norman et, une façon de le respecter, c’est de l’inviter à comparaître devant notre comité.

Le sénateur Gold : Je vais essayer de trouver un compromis qui serait peut-être acceptable pour mes collègues.

[Traduction]

Je vais continuer en anglais pour pouvoir exprimer ma pensée plus clairement. Je maintiens tout ce que j’ai dit jusqu’à présent, et je pense qu’il ne convient pas de tenir un vote sans une discussion appropriée. Si je comprends bien, on nous a donné la permission de siéger à 14 heures, sans nécessairement préciser l’heure à laquelle la séance devrait prendre fin. Voici ce que je propose, et j’espère que ce sera acceptable pour vous.

[Français]

Sénateur Dagenais, dans un esprit de compromis et de collégialité, je vous propose de procéder à l’étude article par article. Cela pourrait prendre une heure ou deux. Je ne connais pas les amendements qui n’ont pas été partagés jusqu’à présent et je ne sais pas s’il sera nécessaire d’en débattre ou d’entendre le témoignage de nos invités. Nous avons le droit de siéger jusqu’à la fin de la séance. Nous aurons suffisamment de temps pour présenter cette motion à la fin et en débattre. Ainsi, mes collègues et moi aurons le temps de poser des questions et de décider comment nous voulons voter à la fin de la journée. Est-il acceptable, sénateur Dagenais, de reporter le vote sur la motion à la fin de la séance d’aujourd’hui afin de procéder à l’étude article par article immédiatement? Qu’en pensez-vous?

[Traduction]

Le sénateur Plett : Permettez-moi de commencer, et le sénateur Dagenais pourra intervenir par la suite.

Personnellement, sénateur Gold, je trouve que ce serait acceptable à condition que la motion soit mise aux voix, sans autre débat, après l’étude article par article.

Le sénateur Gold : Mes explications en français et en anglais n’étaient pas claires.

Le sénateur Plett : C’était très clair. Je crois que vous vous en êtes bien tiré avec la traduction.

Le sénateur Gold : Sénateur Plett, si je vous comprends bien, et tout le monde devrait saisir l’objet de votre demande, vous insistez pour que nous votions sur une motion que vous avez présentée, sans que nous ayons la possibilité de poser des questions. À première vue, il n’est question que du vice-amiral Mark Norman. Or, le sénateur Dagenais a évoqué, dans son intervention, le général Vance et le ministre. Vous pouvez comprendre l’incertitude que cela crée dans mon esprit, et c’est pourquoi j’aimerais avoir l’occasion de poser des questions. J'aimerais avoir la possibilité d’écouter les réponses, et j’ose espérer qu’il y aura un véritable dialogue, plutôt qu’un dialogue des sourds, c’est-à-dire que les observations éventuelles de mes collègues — observations dont je n’ai pas la moindre idée, parce que nous n’avons pas eu l’occasion d’en parler — trouveront une oreille réceptive.

Qu’y a-t-il de mal à faire le travail que nous sommes tenus d’accomplir et que nous avons été autorisés à effectuer par le Sénat, pour terminer l’étude article par article avant de passer à la question que vous venez de présenter ce matin?

Le sénateur Plett : Voulez-vous proposer un échéancier?

Le sénateur Gold : J’ai proposé que ce soit fait aujourd’hui.

Le sénateur Plett : Je veux bien, mais nous sommes 12 personnes. Nous allons siéger ici sans aucune limite de temps — à ce stade-ci, nous ne faisons que répéter les mêmes arguments. C’est ce qui risque d’arriver si nous n’en précisons pas la durée : nous pourrions rester ici et débattre de la question de long en large jusqu’à minuit.

Pourquoi n’accepterions-nous pas de prendre 30 minutes, après l’étude article par article, pour discuter de la motion et passer ensuite au vote? Je crois que c’est raisonnable.

Ce n’est pas une longue motion; c’est assez simple. Elle ne dicte rien ou ne force personne à faire quoi que ce soit. Elle ne fait que convoquer des témoins, dont certains risquent de ne pas pouvoir se présenter. Quelqu’un a dit que le ministre pourrait se trouver à l’extérieur du pays. Le cas échéant, personne ne s’attendrait à ce qu’il vienne. D’ailleurs, aucune des motions adoptées au Sénat ne pourrait obliger quelqu’un à rentrer d’Allemagne à telle ou telle date.

Je crois que nous voulons être raisonnables. Alors, fixons une durée — 30 minutes, 45 minutes, une heure —, puis passons au vote. C’est ce qui me paraît raisonnable.

[Français]

Le sénateur Pratte : Je suis d’accord avec le compromis proposé par le sénateur Gold. J’estime qu’on aurait besoin d’un certain temps pour discuter de la motion et, notamment, du texte de la motion. En principe, je suis d’accord à ce que le comité examine cette question. C’est un dossier important et il y a beaucoup de questions sans réponse, alors je suis d’accord. Cependant, après avoir fait rapidement une première lecture du texte, j’ai au moins trois questions sur lesquelles je ne veux pas me prononcer tout de suite.

Premièrement, dans le texte en français, il est indiqué ceci : « accusations criminelles, maintenant retirées et jugées sans fondement ». Elles ont été retirées, mais jugées sans fondement par qui? Les procureurs ont dit que le vice-amiral ne s’était pas comporté de façon illégale, mais de façon inappropriée. Je ne suis pas sûr de vouloir garder dans la motion une détermination de ce que le comité estime être la responsabilité ou non du vice‑amiral Norman.

Deuxièmement, dans la version française, il y a une erreur dans le premier paragraphe, où il est indiqué ceci : « y compris la portée et la nature de la participation à ce processus du autre personne ». S’agit-il d’une autre personne, de toute autre personne? Ça devrait être corrigé.

Troisièmement, j’ai une question en ce qui concerne la date d’échéance. Je comprends que tout le monde s’attend à ce que le Parlement ne siège pas après le 21 juin pour l’instant, mais, honnêtement, compte tenu de la complexité de ce dossier, je vois difficilement comment on pourra arriver à faire enquête de façon sérieuse à raison d’une réunion par semaine. Nous allons entendre le vice-amiral Norman, s’il consent à comparaître, et le général Vance. Si nous souhaitons mener une enquête sérieuse, nous devons entendre beaucoup de témoins pour clarifier des questions. La date du 20 juin nous pose un problème. Je trouve que ça nous restreint.

En principe, je suis favorable à la tenue d’une enquête, mais j’ai des questions quant à la motion. Il faudrait trouver du temps pour en discuter avant de voter. Nous pourrions peut-être le faire après notre étude article par article.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Vous avez parlé de partisanerie tout à l’heure, madame la présidente, et je crois qu’il n’y a rien de plus partisan que cette motion. Nous sommes à quelques mois des élections. Je dirais que l’objectif des conservateurs est de porter ce dossier sur la place publique et d’aller à la pêche aux renseignements pour trouver quelque chose qui mettrait le gouvernement actuel dans l’embarras. C’est ce qui risque fort bien de se produire si cette motion est adoptée.

J’aimerais ajouter à la liste des témoins possibles l’ancien ministre conservateur de la Défense nationale et les hauts fonctionnaires du Cabinet de Stephen Harper, qui ont peut-être donné des ordres au vice-amiral ou demandé au ministre de la Défense nationale d’entreprendre un tel processus avec le vice‑amiral Norman.

Comme je l’ai dit tout à l’heure, j’estime être un ami du vice‑amiral Norman. J’ai beaucoup de respect pour lui, et j’ai été très heureux lorsque toute cette affaire a pris fin. À peine deux minutes après avoir entendu la décision, je lui ai envoyé un courriel pour le féliciter et lui souhaiter bonne chance.

Je tiens toutefois à savoir ce qui s’est passé d’autre. Si vous voulez parler de partisanerie et porter ce dossier sur la place publique, faites attention à ce que vous demandez, parce qu’une fois que vous commencez à décortiquer le tout, il faut aller jusqu’au bout. Quelqu’un de l’ancien gouvernement conservateur pourrait probablement être mêlé à cette affaire, qu’il s’agisse du ministre conservateur de la Défense nationale ou des hauts fonctionnaires du Cabinet de M. Harper.

Ce qui dérange, c’est qu’ils le savaient et qu’ils ont laissé le vice-amiral Norman endurer cela pendant deux ans. Vous auriez pu y mettre fin en disant ouvertement : « Attendez un peu : nous lui avons demandé de faire cela, nous lui avons ordonné de le faire, et il n’a rien fait de mal. » C’est ce que vous auriez dû faire, mais ce n’est pas ce qui a été fait.

Alors, n’évoquez pas ces considérations politiques de votre côté. D’autres questions politiques seront posées par les sénateurs qui sont assis de ce côté-ci de la table.

La présidente : Si vous me le permettez, avant de passer au sénateur Dagenais, j’aimerais rappeler à tous le processus que nous avons suivi pour le projet de loi C-77, un processus qui, à mon avis, a été très bien reçu par le comité, et vous réexpliquer pourquoi j’ai pris la peine de le renvoyer au comité directeur. Le sénateur Mercer m’a rappelé ce processus. Nous avons décidé de faire un plan de travail concret et de le présenter de nouveau au comité. Il porterait sur les témoins, sur l’ordonnancement des travaux, bref, sur toutes les choses que je vois soulevées ici, dans cette discussion. C’est précisément la raison pour laquelle, au début, j’ai dit que cela allait être renvoyé au comité directeur, et que nous pourrions revenir avec un plan de travail.

Je pense que c’est juste un peu inhabituel. Je pense que le processus que nous avons suivi pour le projet de loi C-71 a très bien fonctionné. Je tenais simplement à ce que cela soit inclus dans la discussion.

À mon avis, ce sur quoi vous vous mettrez d’accord ou ce qui sera perçu comme étant convenu devrait concerner l’ensemble, pas seulement quelques personnes et d’autres témoins.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Il y a déjà une demi-heure que nous en parlons. Je demanderais le vote.

[Traduction]

La présidente : Le sénateur Plett est sur la liste.

Le sénateur Plett : Tout d’abord, je vous informe que je vais appuyer cela.

Brièvement, madame la présidente, vous avez fait un excellent travail sur le projet de loi C-71. Je crois que je vous l’ai déjà dit. Cependant, le projet de loi C-71 était un projet de loi dont il fallait s’occuper, et nous étions tous d’accord avec cela, alors il y avait un plan de travail.

Je pense qu’une fois que nous nous serons entendus sur la nécessité de faire quelque chose, la suite pourra se dérouler comme vous le dites, et je suis tout à fait d’accord avec vous à ce chapitre : c’est au comité directeur de décider comment nous devons procéder. Quand voulons-nous tenir nos réunions? Quelle devrait être la durée de nos réunions? Qui devrions-nous ajouter? La motion fait référence à d’autres témoins que le comité pourrait inviter. Je pense que ce sont des choses dont le comité directeur pourrait décider. Ce n’est pas lui qui décide si nous traitons quelque chose ou non. Son rôle est d’établir comment nos travaux devraient se dérouler.

Le comité directeur ne peut pas décider de l’acceptabilité de cette motion. Il peut décider de la façon dont nous allons traiter de cela si elle est adoptée.

En ce qui concerne le sénateur Mercer, disons que je n’arrêtais pas de me demander où la sénatrice Ringuette était allée chercher son détestable amendement, mais je présume maintenant que vous avez dû lui prêter main-forte. Je vous suggère d’apporter un amendement et de convoquer Scott Brison si vous pensez qu’il devrait venir. Appelez l’ancien ministre conservateur de la Défense. Bien entendu, ces amendements pourront être mis aux voix.

Madame la présidente, nous en avons débattu. Le présentateur de la motion a demandé sa mise aux voix et je dis qu’il faut la mettre aux voix.

La présidente : Sénateur Plett, la sénatrice Griffin aimerait dire quelque chose. La proposition du sénateur Gold de reporter l’étude du projet de loi C-77 après la discussion est sur la table.

La sénatrice Griffin : Vous serez heureux de savoir que ce que je veux dire est très court, et que cela concerne un aspect technique. Les accusations n’ont pas été retirées; elles ont été suspendues. Donc, si la résolution va de l’avant, cela devrait à mon avis être considéré comme un amendement favorable.

La présidente : Les sénateurs accepteraient-ils un échéancier? Nous pourrions nous pencher sur cette question après, parce que nous aurons besoin d’amendements. Je sais qu’il y en a déjà quelques-uns. Pourrions-nous attendre d’avoir fini l’étude article par article? Pourrions-nous nous donner une limite de temps?

Le sénateur Gold : À condition que nous nous entendions pour dire que nous allons prendre encore une heure, une heure et demie, ou quelque chose du genre. À vrai dire, je pense que nous avons besoin de plus de temps plutôt que moins. Je suis prêt à consacrer un certain laps de temps — je suis au milieu d’une phrase, sénateur Plett.

En réponse à la question, oui, je suis d’accord pour limiter la durée du débat de cet après-midi. Je pense qu’il est moins inapproprié de procéder de cette façon que de voter sans discussion ou de continuer pendant 35 minutes alors que nous étions censés procéder à l’étude article par article. Je propose donc d’accorder jusqu’à 90 minutes pour en discuter une fois que nous aurons terminé l’étude article par article.

La présidente : Plaît-il aux honorables sénateurs de procéder de cette façon?

Des voix : Non.

Le sénateur Gold : Qu’est-ce qui serait acceptable?

Le sénateur Plett : Une discussion de 30 minutes.

La présidente : Non.

Le sénateur Plett : D’accord. Mettons la question aux voix. Mettez la question aux voix dès maintenant.

Le sénateur Mercer : Madame la présidente, je propose l’ajournement de la séance.

La présidente : Le sénateur Mercer a proposé l’ajournement de la séance. Que tous ceux qui sont en faveur disent oui?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : Je crois que les « non » l’emportent.

Voulez-vous un appel nominal?

Des voix : Non.

La présidente : Dans ce cas, revenons à la discussion.

Distingués membres du comité, pouvons-nous parvenir à un accord? Quelqu’un a parlé de 30 ou 45 minutes. Je crois que le sénateur Plett a parlé d’une heure. Ce que nous entendons de ce côté-ci, c’est une heure.

Le sénateur Gold : Je serais prêt à accepter une heure. Pour les raisons qui ont été énoncées et pour d’autres qui ne l’ont pas été, nous avons besoin de temps. Personne n’a eu l’occasion de poser des questions et encore moins d’entendre les réponses. Même si je pense qu’une heure ne suffit pas, je suis disposé à l’accepter.

La présidente : Vous êtes d’accord?

Des voix : Oui.

La présidente : Pouvons-nous donc passer à l’étude article par article?

Des voix : Oui.

La présidente : Avant de commencer, j’aimerais rappeler un certain nombre de choses aux sénateurs. Si, à un moment donné, un sénateur ne sait pas où nous en sommes dans le processus, veuillez demander des précisions. Je veux m’assurer en tout temps que nous comprenons tous de la même façon où nous en sommes.

En ce qui concerne le déroulement du processus, je souhaite rappeler aux sénateurs que, lorsque plusieurs amendements sont proposés dans un article, les amendements doivent être proposés dans l’ordre des lignes d’un article. Je vérifierai donc si des sénateurs avaient l’intention de proposer un amendement antérieur dans cet article. Si des sénateurs ont l’intention de proposer un amendement antérieur, ils auront la possibilité de le faire.

Un petit point : si un sénateur s’oppose à un article entier, je vous rappelle que, au comité, le processus approprié consiste non pas à proposer une motion visant à supprimer l’article entier, mais à voter plutôt contre l’article du projet de loi. Il serait utile, pour ce processus, si un sénateur propose un amendement, qu’il indique au comité d’autres articles dans le projet de loi sur lesquels cet amendement pourrait avoir un effet, sans quoi, il sera très difficile pour les membres du comité de rester cohérents dans leurs décisions.

Le personnel s’efforcera de faire le suivi des endroits où des amendements subséquents doivent être proposés et il attirera votre attention sur ceux-ci. Comme aucun préavis n’est nécessaire pour proposer des amendements, il se peut, bien sûr, qu’aucune analyse préliminaire des amendements n’ait été faite pour établir lesquels pourraient porter à conséquence pour d’autres et se révéler contradictoires.

Si des membres du comité ont des questions au sujet du processus ou de la pertinence de ce qui se passe ici, ils peuvent assurément invoquer le Règlement. En tant que présidente, je vais écouter l’argument, déterminer s’il y a eu une discussion suffisante et prendre une décision. Le comité est le maître ultime de ses travaux dans les limites établies par le Sénat, et on peut porter en appel une décision devant le comité plénier en demandant si elle devrait être maintenue.

En tant que présidente, je vais faire tout mon possible pour m’assurer que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole en aient l’occasion. Toutefois, pour ce faire, je vais compter sur votre coopération et vous demander à tous de tenir compte des autres sénateurs et de garder vos observations les plus brèves possible.

En dernier lieu, je tiens à rappeler à tous les sénateurs que, s’il existe une incertitude quant aux résultats d’un vote par oui ou non ou d’un vote à main levée, le recours le plus efficace consiste à demander un vote par appel nominal, qui a l’avantage de donner des résultats sans équivoque. Les sénateurs savent qu’en cas d’égalité des voix, la motion sera rejetée.

Y a-t-il des questions par rapport à ce que je viens de dire? S’il n’y en a pas, nous pourrons procéder.

Bienvenue à la table, sénateur Ngo.

Est-il convenu que le comité passe à l’étude article par article du projet de loi C-77, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois?

Des voix : D’accord.

La présidente : Avec votre consentement, est-il convenu de regrouper les articles qui n’ont pas été modifiés en groupes d’un maximum de 10?

Des voix : D’accord.

La présidente : Nous allons distribuer les amendements.

Le sénateur Gold : Je viens de recevoir une lettre du ministre. Puis-je présenter une motion afin qu’elle soit consignée dans le compte rendu? Comment devrions-nous procéder?

La présidente : On nous a signalé qu’une lettre a été distribuée, je crois, par le ministre.

Sénateur Gold, vouliez-vous en parler?

Le sénateur Gold : Je pense que cela devrait être consigné dans le compte rendu d’une façon ou d’une autre. Pardonnez-moi d’être un peu confus au sujet de la procédure.

La présidente : Souhaitez-vous la déposer?

Le sénateur Gold : Oui. Je propose que cette lettre du ministre soit déposée. Je vous remercie.

La présidente : Nous allons donc passer à l’étude article par article.

L’étude du titre est-elle réservée?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 1 est-il adopté?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je ne sais pas si je suis au bon endroit. Il s’agit de la section 1.1 du préambule.

[Traduction]

La présidente : Sénateur, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, nous allons simplement distribuer les amendements pour que les gens puissent les voir.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, je vais expliquer le motif de mon amendement. Cet amendement inclut un préambule à la Déclaration des droits des victimes à la section 1.1 de la Loi sur la défense nationale. C’était une recommandation de l’ombudsman fédéral des droits des victimes, aux pages 4 et 5 du mémoire qui a été déposé au comité. La déclaration proposée dans le projet de loi C-77 ne renferme aucun préambule général reconnaissant par exemple les éléments suivants : 1) les infractions causent des torts aux victimes et à l’ensemble de la collectivité militaire; 2) il est important que les droits des victimes soient pris en compte à l’échelle du système de justice militaire; 3) les victimes méritent d’être traitées avec courtoisie, compassion, respect et dignité et devraient s’y attendre.

Donc, un tel préambule existe dans la Charte canadienne des droits des victimes, adoptée en 2015, ainsi que des renvois à la Déclaration canadienne de 2003 des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité. Voilà donc l’objet de l’amendement.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Je me souviens que pas plus tard qu’hier, nous avons entendu des témoignages qui portaient sur la question de savoir si la forme de rédaction était appropriée ou s’il convenait même d’inclure un préambule dans une partie de ce projet de loi qui fera partie d’un projet de loi plus vaste, et j’aimerais savoir ce que les fonctionnaires en pensent. Lorsque vous vous prononcerez là-dessus, pourriez-vous également nous dire si cela fait double emploi avec les dispositions de la déclaration des droits des victimes qui s’y trouvent? Le point le plus important est de commenter l’amendement proposé. Ensuite, j’aurais peut-être d’autres observations à formuler, si cela ne vous dérange pas.

Colonel Stephen Strickey, juge-avocat général adjoint, Justice militaire, ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Merci.

Je tiens à ce que vous sachiez que c’est un plaisir pour nous d’être ici afin d’aider le comité à mener l’étude article par article. J’ai avec moi une excellente équipe qui a travaillé très fort sur ce projet de loi. Je vous informe que nous n’avons pas eu l’occasion d’examiner les modifications. D’ailleurs, celle-ci vient tout juste de nous être remise.

Nous nous efforcerons certainement de fournir au comité toute l’expertise technique dont nous disposons au sujet du projet de loi, mais je vais implorer l’indulgence du comité étant donné le délai dans lequel on nous demande de fournir des observations.

[Français]

Cela dit, madame la présidente, je voudrais prendre quelques minutes pour étudier les modifications, si possible, parce que je crois qu’il vaut la peine d’avoir une conversation avec le greffier. Bien évidemment, je ne suis pas un expert à l’égard d’une modification technique comme celle-là, et j’aimerais avoir un avis de la part du greffier avant de répondre.

Le sénateur Boisvenu : Si vous vous souvenez, j’ai posé la question à la dame qui était ici lundi, à savoir pourquoi le projet de loi ne comporte pas de préambule comme celui de la Charte des droits des victimes, adoptée en 2015, et comme celui de la Déclaration canadienne de 2003 des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité. La dame disait qu’une telle déclaration existait, mais sous forme de pièces détachées dans beaucoup d’éléments légaux qui constituent la Loi sur la défense nationale. Il n’y a pas d’instrument qui rassemble le tout.

Deuxièmement, pourquoi est-il important d’avoir un préambule? C’est parce qu’il n’y a pas eu de consultations auprès des victimes d’actes criminels. Il faut préciser dans le préambule l’objectif de cette loi, qui est de respecter les victimes et de les traiter avec dignité, confiance et empathie. C’est là l’objet du préambule, soit d’indiquer pourquoi la loi est adoptée. Cette loi, elle est adoptée pour les victimes, mais les victimes n’ont pas été consultées.

Je crois que le préambule prend ici tout son sens. Une victime des forces armées pourrait ainsi consulter le préambule et voir ce que le législateur prévoyait de faire avec cette loi. C’est le préambule qui énonce les objectifs à ce chapitre. Je pense que la proposition de mon collègue, le sénateur Dagenais, est tout à fait fondée.

Le sénateur Dagenais : En complément, madame la présidente, j’aimerais aller dans le même sens que mon collègue, le sénateur Boisvenu. À mon avis, les victimes doivent être traitées avec courtoisie, compréhension et respect, comme je l’ai mentionné. On doit aussi tenir compte des impératifs de la vie privée des victimes et les respecter autant que possible.

De plus, il convient de prendre toutes les mesures raisonnables pour minimiser les inconvénients que subissent les victimes, de tenir compte de la sécurité des victimes à toutes les étapes du processus de justice pénale et de prendre les mesures nécessaires afin de protéger les victimes contre l’intimidation et les représailles. Le projet de loi doit prévoir également la nécessité de renseigner les victimes au sujet du système de justice pénale, de leur rôle et des possibilités qui leur sont offertes d’y participer, et de renseigner les victimes sur l’état de l’enquête, le calendrier des événements, le progrès de la cause et son issue.

En outre, le projet de loi doit aussi indiquer l’importance de renseigner les victimes au sujet des services d’aide qui sont offerts et des autres programmes dont elles peuvent se prévaloir, ainsi que des moyens qui doivent être mis à leur disposition afin d’obtenir une indemnisation financière. Je pense que tout cela doit être ajouté au projet de loi.

Les opinions, les préoccupations et les commentaires des victimes constituent, selon moi, des éléments très importants dans le processus de justice pénale. Il convient d’en tenir compte, conformément aux lois, aux politiques et aux procédures en vigueur. De plus, il convient de tenir compte des besoins, des préoccupations et de la diversité des victimes dans l’élaboration et dans la prestation des programmes et des services, ainsi que des programmes connexes d’éducation et de formation.

Enfin, il faut renseigner les victimes au sujet des options dont elles peuvent se prévaloir pour parler de leurs préoccupations lorsqu’elles sont d’avis que les principes énoncés ci-dessus n’ont pas été respectés.

Je crois donc que nous possédons suffisamment d’éléments pour adopter l’amendement afin que le projet de loi soit modifié à la satisfaction des victimes. Il ne faut jamais oublier que le but principal de ce projet de loi est de favoriser les victimes.

Le sénateur Pratte : Dans mon esprit, deux questions se posent quant à cet amendement. Le texte est essentiellement le même que celui de la Charte canadienne des droits des victimes. Ce n’est donc pas un texte qui est controversé comme tel. La première question est purement technique. Comme le sénateur Gold l’a dit, la question qu’on se pose est de savoir s’il y a un problème de rédaction législative à insérer un préambule à l’intérieur de la Loi sur la défense nationale. Le préambule se trouverait juste avant la déclaration qui, elle-même, constitue une partie de la Loi sur la défense nationale. Est-ce qu’il y a un obstacle technique qui se pose? C’est la première question.

La deuxième question est de savoir si, dans le texte du préambule proposé, compte tenu du fait que c’est un « copier-coller » du texte de la Charte canadienne des droits des victimes, il y a un problème à importer dans la Déclaration des droits des victimes, dans la Loi sur la défense nationale, le même texte que celui qui se trouve dans la Charte.

[Traduction]

Col Strickey : Je vous remercie de vos questions.

Je comprends ce que vous dites, monsieur, en ce qui concerne l’emplacement approprié d’un préambule comme celui-ci. La « Déclaration des droits des victimes » commencerait à l’article 71.01 proposé. Dans une perspective technique, je dirais que nous devons consulter les rédacteurs législatifs du ministère de la Justice afin de déterminer ce qu’il convient de faire du point de vue de la rédaction — je suis un expert technique en matière de justice militaire, mais pas en rédaction législative, malheureusement. Je ne sais pas si cela devrait être placé au début, car j’ai l’impression que, d’un point de vue technique, nous ajoutons un préambule au projet de loi et non un préambule à la place qui lui revient dans la loi. J’ai dit que c’était une question qui devait être élucidée, pas une réponse.

Deuxièmement, en préparant l’étude article par article aujourd’hui, j’ai bien examiné quelques-uns des amendements. Encore une fois, je m’excuse bien bas parce que je ne suis certainement pas un expert des règles de ce comité ou de quoi que ce soit d’autre. Cependant, en tentant de déterminer ce dont il allait être question lors de notre comparution, nous n’avons pas pu établir si un tel amendement relatif au préambule pouvait être adopté. Encore une fois, je ne vous donne pas une perspective juridique. Je laisse au comité le soin de trancher. Ceci n’est pas une question technique. En fait, je ne fais que renvoyer la question au comité.

Le sénateur Gold : J’aimerais faire quelques observations plus générales, moins sur cet amendement que sur le processus. Je demande l’indulgence de mes collègues. Je ne ferai ce long discours qu’une seule fois.

D’après ce que j’ai compris, nous allons devoir traiter avec un certain nombre d’amendements par la suite. Certains seront inutiles. À mon avis, c’est le cas de celui-là. En fait, il vient compliquer les choses, parce qu’il contient des propos qui... En revanche, il y en a d’autres qui seront méritoires et qui permettront sans aucun doute d’améliorer le projet de loi. Tous les projets de loi peuvent être améliorés. Celui-ci en est un bon, mais il n’est pas parfait. Notre travail consiste à améliorer la loi, et nous prenons tous ce travail au sérieux. C’est du moins mon cas.

Nous sommes en face d’un défi pratico-pratique, que tous les membres autour de la table comprennent : le nombre de semaines de séances qu’il reste à ce Parlement est limité; les jours de séance de la Chambre des communes sont comptés. Par conséquent, le défi pratique est le suivant : si nous modifions ce projet de loi pour l’améliorer, il y a un risque très probable qu’il meure au Feuilleton. Ceci a été évoqué ou reconnu ici par le ministre lorsqu’il a répondu à la question de la sénatrice McPhedran. Pour les législateurs, c’est une question pratique; pour le parrain du projet de loi que je suis, c’est une perspective consternante.

En ce qui concerne la partie du projet de loi qui introduirait une déclaration des droits des victimes, j’ai été persuadé par le témoignage de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels, Mme Illingworth, et celui de la directrice exécutive du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, Mme Preston, que le projet de loi constitue un pas dans la bonne direction et doit être adopté. Elles se sont montrées très claires dans leur témoignage.

J’ai également été impressionné par les décisions difficiles prises par le major Arkell et Lindsay Rodman, et par les conclusions que ces témoins ont tirées. Interrogées au sujet du projet de loi, elles ont déclaré que, bien qu’il soit imparfait, elles recommanderaient son adoption. Cela a été difficile pour le major Arkell, et nous avons ressenti l’humanité dans sa réponse. Elle a déclaré qu’il devrait être adopté tel quel, bien que chacune des témoins que je viens de citer ait proposé des recommandations et des amendements. Personne ne pensait que ce projet de loi était parfait, mais tout le monde a jugé que, tout bien considéré, il valait mieux l’adopter que de ne rien faire. J’étais d’accord avec ces témoins.

Je suis d’accord avec elles pour dire que le fait de ne pas adopter ce projet de loi ou de risquer qu’il meure au Feuilleton serait un grand pas en arrière pour les droits des victimes. Cela maintiendrait le système dans le cadre duquel les victimes qui sont prises, sans y être pour quelque chose, dans le système de justice militaire se voient refuser les mêmes droits, aussi incomplets soient-ils selon nous, que la loi accorde actuellement aux victimes dans le système de justice civile, des droits dont notre collègue, le sénateur Boisvenu, a été le champion, et à raison, lors d’une législature précédente.

Je crois aussi que si nous n’adoptons pas ce projet de loi ou, plus précisément, si nous courons le risque qu’il meure au Feuilleton, en tant que législateurs responsables, nous devons faire preuve de lucidité à ce sujet et assumer la responsabilité de nos actes. Le fait de risquer la mort de ce projet de loi au Feuilleton envoie un message tout à fait erroné aux victimes d’infractions commises dans le cadre du système de justice militaire, mais il envoie aussi le mauvais message à l’armée. Cette dernière est responsable d’assurer et de poursuivre la réforme de la culture militaire qui a donné lieu à un niveau inacceptable d’inconduite sexuelle et d’autres actes inacceptables au sein des forces armées.

Tout au long de nos audiences, j’ai été encouragé par l’ouverture du ministre, du Cabinet du juge-avocat général et des fonctionnaires, dont bon nombre sont présents aujourd’hui, à prendre en compte les préoccupations et les inquiétudes de ce comité. J’ai été encouragé par le processus qu’ils ont décrit visant à recueillir des commentaires dans le cadre du très important processus de réglementation. Nous savons tous, ceux d’entre vous qui ont plus d’expérience que moi, qu’une grande partie de l’action se trouve dans les règlements et que beaucoup de nos questions portaient là-dessus. En tant qu’avocat de droit constitutionnel, j’ai une certaine expérience dans ce domaine.

J’ai trouvé les témoignages très encourageants. Bien que je n’aie pu lire que brièvement la lettre du ministre, que j’ai déposée plus tôt aujourd’hui, j’ai trouvé très encourageant son engagement à examiner un certain nombre de questions qui étaient au cœur de nos préoccupations et qui pourraient très bien être soulevées dans des amendements qui n’ont pas encore été distribués.

J’en arrive donc à ma conclusion. Ce projet de loi a reçu l’appui de tous les partis à la Chambre des communes. Il pourrait évidemment être amélioré, mais si nous risquons pour cela qu’il meure au Feuilleton, je dois dire que, en tant que personne qui croit en ce projet de loi et aux droits qu’il accorde aux victimes, aussi imparfaits soient-ils, qui croit au message qu’il envoie aux victimes et aux autres réformes qu’il introduit dans le système de justice pénale, y compris l’introduction de certaines dispositions du système de justice pénale, du système de justice civile, sur la détermination de la peine et sur les crimes haineux liés à l’orientation et à l’expression sexuelles, qu’elles soient ou non fondées, j’ai de la difficulté à accepter l’apport de tout amendement.

Je veux être honnête avec vous. Si les circonstances étaient différentes et que nous ne risquions pas de voir ce projet de loi mourir au Feuilleton, je n’ai aucun doute que l’on proposerait des amendements — même si ce n’était pas nécessairement celui-ci — que je serais heureux d’appuyer. Toutefois, étant donné que je ne peux pas mettre ce projet de loi en péril, je ne peux pas appuyer cet amendement et je vais voter contre tous les amendements. Je tiens à ce qu’il soit bien clair que ce n’est pas que je pense que les amendements ne seraient pas justifiés, bien que je ne les aie pas encore vus. Je pense simplement que le projet de loi est trop important pour qu’on le laisse mourir.

Comme je l’ai dit, vous n’entendrez pas à nouveau l’intégralité de mon discours.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Premièrement, si les projets de loi étaient mieux ficelés et préparés de façon moins hâtive, on ne serait pas obligé de les réétudier et d’y apporter des amendements. Le but d’un amendement est d’améliorer un projet de loi. Dans ce cas-ci, il s’agit de rendre le projet de loi plus acceptable pour les victimes. J’ai entendu des victimes hier. Les trois témoins s’entendaient pour dire que le projet de loi ne leur apporterait rien de plus.

Évidemment, je connais aussi les stratégies du gouvernement. On nous apporte les projets de loi en fin de session et on ne nous donne que deux jours pour les étudier, ce qui n’est pas sérieux. C’est un manque de respect pour les victimes, qui attendent ce projet de loi. Aujourd’hui, on nous dit que cet amendement est inutile. Tous les amendements à un projet de loi visent à le parfaire et à le peaufiner, et nous le faisons dans l’intérêt des militaires et de tous les Canadiens. Je pense que cet amendement est acceptable.

Le sénateur Boisvenu : Je comprends très bien la position du sénateur Gold, qui défend la position du gouvernement libéral. Cela fait quatre ans que ce gouvernement est au pouvoir. En quatre ans, le gouvernement n’a rien fait pour les victimes d’actes criminels. Nommez-moi un autre projet de loi qui a été élaboré depuis quatre ans et qui traite des victimes d’actes criminels. Il n’y en a aucun. Il y a eu un projet de loi qui visait entre autres à rendre l’ombudsman des victimes d’actes criminels égal à l’ombudsman des criminels, à savoir l’inspecteur carcéral. Tous les libéraux ont voté contre ce projet de loi qui aurait fait en sorte que le représentant des victimes au sein du gouvernement ait été égal à celui qui est porte-parole des criminels. Quatre ans se sont écoulés, et on nous dit que tous les amendements qu’on présente sont inutiles.

De votre côté, vous représentez les intérêts du gouvernement. De notre côté, nous représentons les intérêts des victimes, qui n’ont pas été consultées. Donc, on va parler en leur nom et on va essayer d’améliorer ce qui peut l’être. Quand, dans un projet de loi, on indique aux victimes que, si elles sont absentes, on nommera un représentant à leur place, c’est un manque de considération envers elles.

Si votre position est de dire qu’au départ, ça ne sert à rien de modifier ce projet de loi, que faites-vous à titre de sénateurs? Notre travail est d’améliorer un projet de loi pour qu’il corresponde aux besoins des gens les plus vulnérables de notre société, à savoir les victimes d’actes criminels. Si on décide de ne pas améliorer ce projet de loi, qu’est-ce qu’on fait ici? Qu’est-ce que cela nous a donné d’écouter les témoins hier, qui nous ont dit qu’il vaut mieux ne pas avoir de projet de loi que d’adopter un projet mal ficelé qui ne va en rien faire avancer les droits des victimes et qui ne va rien changer? Les témoins nous l’ont dit.

À la limite, peut-on améliorer ce qui est perfectible? À ce chapitre, on peut laisser aller des choses, mais il y a des éléments dans ce projet de loi qu’il faut absolument modifier. C’est le ministre qui le dit dans sa lettre, et je le cite :

Veillera à ce que le CIIS, la police militaire et le Service des poursuites militaires informent de manière proactive les victimes [...]

Or, le projet de loi ne mentionne pas la nécessité de travailler en amont, c’est le ministre qui l’écrit. Peut-on faire en sorte que le projet de loi corresponde à ce que le ministre veut?

[Traduction]

Le sénateur McInnis : J’hésite à parler du projet de loi parce que je n’ai pas eu l’avantage qu’ont eu d’autres membres d’entendre des témoins et des témoignages, et d’étudier réellement le projet de loi. Je pense que ce dernier est important. Lorsque j’étais procureur général en Nouvelle-Écosse, nous avons adopté un projet de loi sur les droits des victimes, et c’était en 1988-1989.

Le préambule d’une loi est l’énoncé de l’objet de la loi. Il en établit le principe et la forme directrice.

Avec tout le respect que je vous dois, sénateur Gold, — j’ai beaucoup de respect pour vous, et vous le savez — vous n’adoptez jamais un projet de loi imparfait si vous savez que des changements et des amendements peuvent y être apportés. Je sais que vous souhaitez ardemment l’adoption du projet de loi, mais nous ne savons pas quand le Sénat s’ajournera. Je sais que vous vous inquiétez des amendements qui vont à l’autre chambre, et nous voulons, évidemment, nous assurer que le projet de loi soit adopté avant leur départ.

L’autre élément important pour faire adopter le projet de loi est que lorsque nous partirons pour l’été, nous savons que le Parlement sera dissous et tout ce que cela entraînera; les choses seront oubliées.

L’autre point que je voulais faire valoir — et c’est peut-être sans rapport avec le sujet, mais cela doit être mentionné — c’est que je vois souvent des projets de loi qui sont adoptés à la Chambre des communes pour lesquels on n’a tout simplement pas pris le temps de faire un bon travail. Nous voyons l’attribution du temps dans divers comités. C’est dans cet organe, le Sénat, que nous avons la capacité et le temps de faire du bon travail, d’inviter de bons témoins et d’entendre ce qu’ils ont à dire. Je suis sûr que vous l’avez fait cette fois-ci.

Toutefois, j’aimerais vous conseiller de ne jamais adopter un projet de loi imparfait si vous pouvez l’améliorer.

Je comprends ce que vous voulez dire : certains de ces amendements — je n’ai pas eu l’occasion de les étudier — ne vont peut-être pas au cœur même du projet de loi. Je n’aime pas le mot « vider » un projet de loi de son contenu. Il ne s’agit pas de cela et certains des amendements que je viens d’examiner ont assurément pour but d’améliorer le projet de loi. Si c’est possible, on devrait le faire.

Le sénateur Gold : Je ne pense pas avoir été mal compris, mais comme ma femme me dit souvent que je le suis et qu’elle a toujours raison, je vais répéter ce que j’ai dit.

Bien que je n’aie pas eu l’avantage de voir les amendements qui suivent celui-ci, je suis persuadé que, non seulement ils partent de bonnes intentions, mais qu’ils auraient pour effet d’améliorer le projet de loi. Il ne s’agit pas d’une situation, comme nous l’avons vu ailleurs, dans laquelle on tente de vider le projet de loi de son contenu. Ce n’est pas du tout le cas.

Je ne ferai aucun commentaire sur la façon dont le sénateur Boisvenu définit mon rôle. En tant que parrain, mon rôle est d’essayer de faciliter l’adoption d’un projet de loi auquel je crois en principe. Mes remarques ont été faites dans un esprit d’ouverture et de transparence. Comme de nombreux membres du comité le savent, j’ai partagé ces préoccupations avec d’autres, au sein de mon groupe parlementaire et ailleurs, dans l’espoir que nous aborderions les décisions que nous devons prendre en toute connaissance de cause. Je considère qu’il s’agit là de notre responsabilité en tant que législateurs. Le but est évidemment de toujours essayer d’améliorer la loi, mais parfois, la moitié d’un pain vaut mieux que rien, et j’ai bien peur que nous nous trouvions dans cette situation avec ce projet de loi.

Nous agirons donc tous comme nous l’entendons, mais il y aura des conséquences si nos meilleures intentions ont pour effet que ce projet de loi ne soit pas adopté et que les victimes n’obtiennent pas les droits qui sont proposés dans cette loi.

Ce n’est pas la première fois que les sénateurs sont confrontés à ce dilemme ou qu’ils discutent avec passion pour exactement la même raison. Pas plus tard qu’en 2015, dans le contexte du débat en troisième lecture du projet de loi C-32, notre collègue, le sénateur Boisvenu, a fait exactement la même observation lorsqu’il a pris connaissance des amendements du sénateur Joyal. Il a déclaré ce qui suit : « Les victimes appuient la Charte des droits des victimes », et nos témoins l’ont fait, en grand nombre, même lorsqu’ils avaient des réserves, mais ils ont dit qu’elle pouvait être améliorée. Je cite :

Dans le fond, nous avons le choix entre deux outils : une Cadillac, pour laquelle on n’aura pas assez d’argent pour la faire fonctionner, ou une bonne berline, avec laquelle on pourra faire beaucoup de chemin, parce qu’on aura les moyens de la conduire.

Ici, il ne s’agit pas d’une question d’argent ou de ressources; il s’agit plutôt de savoir si nos meilleures intentions auront ou non les conséquences inattendues et — je ne dirai pas « imprévues », car elles sont prévisibles — malheureuses de faire mourir le projet de loi.

Je tiens simplement à préciser que ce n’est pas parce que je ne pense pas que notre rôle soit d’améliorer les projets de loi, et ce n’est pas parce que je suis ici pour faire ce que le gouvernement demande. Le gouvernement établit ses priorités et détermine quand il présente des projets de loi. Je tiens cela pour acquis.

J’ai un problème pratique. Je crois qu’un demi-pain vaut mieux que rien, et c’est seulement pour cette raison, et je l’annonce simplement. Je ne contrôle le vote de personne ici, malgré ce que certains pourraient dire, mais je tiens à ce qu’il soit clair qu’il s’agit toujours d’un dilemme pour moi.

J’ai choisi d’agir de cette façon, et je n’en dirai pas plus à ce sujet.

La présidente : Avant que le colonel ne lève la main à quelques reprises.

Voulez-vous faire une remarque?

Col Strickey : Oui, madame la présidente. Nous avons eu l’occasion de l’examiner d’un point de vue technique, et je crois que cela répond à la préoccupation du sénateur Pratte relativement au fait de prendre une disposition dans une loi et de l’insérer dans une autre. En examinant le préambule ligne par ligne, et comme le comité le sait, lorsque j’ai comparu hier, j’ai dit à maintes reprises — et je vous ai dit que vous vous lasseriez que je le répète sans arrêt — que le projet de loi C-77 reflète autant que possible la Charte canadienne des droits des victimes. Il s’agirait d’un exemple de situation dans laquelle il faudrait apporter des amendements pour s’assurer que l’on tienne compte du système de justice militaire. Par exemple, lorsqu’il est dit à la première ligne : « Attendu que les actes criminels ont des répercussions préjudiciables sur les victimes et la société », nous avons recommandé d’en faire une infraction d’ordre militaire pour s’assurer que le système de justice militaire soit pris en compte. À la ligne 3, on lit : « Attendu qu’il importe que les droits des victimes d’actes criminels soient pris en considération dans l’ensemble du système de justice pénale », encore une fois, le système de justice militaire. À la ligne 5, on lit : « Attendu que la prise en considération des droits des victimes [...] » d’infractions d’ordre militaire — au lieu de « crime » — relève de l’administration d’une justice militaire adéquate. Un autre changement à la ligne suivante, et ainsi de suite.

Pour ce qui est de l’examen technique de ce préambule, le sénateur Pratte a tout à fait raison de dire que, selon nous, si l’on décidait de l’adopter, il faudrait apporter un certain nombre de modifications pour assurer la conformité au système de justice militaire et non au système de justice civile.

[Français]

Le sénateur Dagenais : On a entendu des témoins durant deux jours, et ce qu’il ne faut jamais oublier, c’est que les victimes qui sont venues témoigner — et elles nous l’ont dit à plus d’une reprise — n’ont jamais été consultées. Donc, tout ce projet de loi a été rédigé sans qu’on consulte les victimes. Je pense que nos amendements visent à faire entendre la voix des victimes et à leur donner un projet de loi dans lequel elles pourront se retrouver. J’ai posé la question aux victimes qui ont comparu, et sans répéter ce qu’a dit le sénateur Boisvenu, elles nous ont affirmé que le projet de loi C-77 ne leur apporte rien de plus. Si, parce qu’il y a des amendements, le projet de loi devait mourir au Feuilleton, il reste l’ancien projet de loi, qui n’est pas parfait non plus. Un projet de loi n’est jamais parfait, mais peut-on du moins adopter quelques amendements pour le rendre plus acceptable pour les victimes? C’est ce qu’on demande. Aujourd’hui, on fait la consultation que les victimes n’ont jamais eue.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : J’entends un « non ». Les sénateurs souhaitent-ils la tenue d’un vote par appel nominal?

Des voix : Oui.

Mark Palmer, greffier du comité : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu ?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Griffin?

La sénatrice Griffin : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Le résultat du vote est le suivant : pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

Avant de passer à autre chose, je suis sure que vous avez remarqué que le voyant clignote. Nous avons donc un vote à 16 h 3. Nous allons continuer, mais nous arrêterons pour donner à tous les sénateurs le temps de se rendre au Sénat.

L’article 1 est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : L’article 2 est-il adopté ?

Le sénateur Boisvenu : J’ai un amendement.

La présidente : Nous attendons simplement qu’il soit distribué.

Sénateur Boisvenu, nous allons nous tourner vers vous.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Donc, l’alinéa actuel indique ce qui suit :

b) si la victime est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles et demande qu’un membre des Forces canadiennes soit nommé pour agir pour son compte, le membre nommé par le chef d’état-major de la défense ou tout officier autorisé par lui.

Donc, c’est le principe d’agir pour le compte de la victime.

Cet amendement est lié au droit de la victime d’avoir quelqu’un qui peut la représenter pour agir en son nom. Je pense que c’est un droit fondamental. Si la victime ne peut pas le faire pour des raisons opérationnelles, surtout dans les cas de déploiement, elle peut demander à un parent, à un ami ou à son conjoint d’exercer ses droits de victime; bref, à une personne de confiance.

Le projet de loi C-77 prévoit que ce sera une personne nommée par l’état-major de la Défense ou tout officier autorisé par lui à agir au nom de la victime si elle ne peut pas le faire pour des raisons opérationnelles. Ainsi, il retire à la victime incapable d’agir pour des raisons opérationnelles le droit de choisir une personne en qui elle a confiance. Je crois qu’il y a tout de même un risque élevé — c’est une hypothèse — que la personne qui représente la victime puisse être quelqu’un qui est proche de l’agresseur. Donc, il y a quelque chose ici d’inconcevable au chapitre de la justice et de la représentation si la victime doit être représentée dans le cadre de procédures judiciaires. Je crois que le choix lui appartient; il n’appartient surtout pas à l’employeur. Cet amendement fait en sorte qu’elle puisse demander à un autre membre des forces armées d’agir à son compte.

Bref, elle va choisir qui agira pour exercer ses droits. Cela évite les conflits d’intérêts et inspire confiance à l’égard du processus judiciaire pour favoriser la transparence. Il s’agit de faire en sorte que le principe de remplacement et de représentativité soit un droit qui appartient entièrement à la victime.

Je propose donc ce qui suit :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 2, à la page 3, par substitution, aux lignes 28 à 32, de ce qui suit :

« compte pour des raisons opérationnelles, elle peut demander à un autre membre des Forces canadiennes d’agir pour son compte. »

[Traduction]

La présidente : En débat.

Le sénateur Gold : Je me demande si l’un des fonctionnaires pourrait nous aider à comprendre la justification de la disposition visée par cet amendement.

Col Strickey : Cet article doit être lu en tenant compte de la définition de « victime » au paragraphe 2(3). Il est nécessaire pour faire en sorte que certains particuliers soient autorisés à exercer les droits d’une victime si elle est décédée ou incapable d’agir pour son propre compte. Plus précisément, l’étude article par article fait ressortir une disposition qui tient compte des exigences exceptionnelles des opérations militaires, puisqu’elle permet à une victime qui est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles de demander qu’un membre des Forces canadiennes soit nommé pour agir pour son compte et ainsi exercer ses droits conformément à la Déclaration des droits des victimes.

Quand on regarde la disposition actuelle du projet de loi, à l’alinéa 4(1.1.)b), le libellé clé d’un point de vue technique est le suivant : « la victime est empêchée d’agir pour son propre compte ». Si cette victime ne peut pas agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles, une personne sera nommée pour le faire à sa place. En ce sens, l’application de l’article est déclenchée par les circonstances.

Le sénateur Gold : Merci. Je veux m’assurer de bien comprendre. Pouvez-vous expliquer ce que signifie la tournure « si la victime est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles »? Pouvez-vous préciser de quoi il pourrait s’agir? Vous avez parlé d’une personne décédée. Évidemment, si vous n’êtes plus là, vous ne pouvez pas choisir quelqu’un pour vous représenter, mais pourriez-vous nous donner un exemple où cela pourrait survenir en l’espèce afin que nous puissions comprendre l’importance de cet amendement?

Col Strickey : Merci pour votre question. Je peux vous soumettre quelques hypothèses.

Vous vous souviendrez que, hier, nous avons parlé de l’expression « pour des raisons opérationnelles ». Elle est employée dans l’ensemble des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes. Nous avons discuté hier de l’agent de liaison de la victime dans le contexte de l’article sur les raisons opérationnelles, soit un officier désigné selon les règles actuelles du tribunal militaire, « pour des raisons opérationnelles ». Ce serait le cas, par exemple, s’il n’était pas possible de joindre la victime en raison d’un déploiement ou de la défaillance d’un système de communication, ou encore si la victime est en déplacement. Si, pour n’importe laquelle de ces raisons, une victime ne peut pas exercer ses droits conformément à la Déclaration des droits des victimes, cette mesure permet à la chaîne de commandement de s’en charger pour elle.

Le sénateur Gold : Autrement dit, la victime demande à un autre membre des Forces armées canadiennes de la représenter, mais pour quelque raison que ce soit, son recours se limite à cette demande. Donc cette mesure permet une certaine... Mais seulement si la victime demande à être représentée et seulement au moment où elle la demande, et pas par un parent, mais bien par un membre des forces armées. C’est exact?

Col Strickey : C’est exact, monsieur.

Le sénateur Richards : Je crois que ce qui pose problème, c’est la tournure « le membre nommé par le chef d’état-major de la Défense ou tout officier autorisé par lui ». La victime pourrait ainsi se trouver en position de vulnérabilité. Je pense que c’est ce qui inquiète le sénateur Boisvenu. Pouvez-vous traiter brièvement de cet aspect?

Col Strickey : Merci pour votre question.

Je suis d’avis qu’il s’agit d’un cas très rare que l’on rencontre à l’occasion au sein des Forces armées canadiennes où, pour des raisons opérationnelles exceptionnelles... Ce qui peut prendre bien des formes. Comme je l’ai dit, il peut s’agir d’un déploiement, d’un déplacement ou d’un exercice au milieu de nulle part. Si, dans ce cas précis, la victime ne peut pas agir pour son propre compte parce qu’elle est tenue au secret ou qu’on doit attendre l’atterrissage d’un avion, cette mesure permettrait à la chaîne de commandement d’agir, pour une période donnée — qui correspond selon moi à la notion d’être « empêchée d’agir pour son propre compte » —, jusqu’à la fin des raisons opérationnelles invoquées. Ainsi, la chaîne de commandement pourra remédier à l’absence de la victime pour s’assurer qu’elle est en mesure d’exercer ses droits.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’inviterais nos témoins à la prudence dans les exemples qu’ils apportent. Se servir d’une exception pour gérer la règle générale m’apparaît périlleux. Conservons la règle générale. Vous parlez d’une personne décédée. Or, les militaires en théâtre d’opérations ne décèdent pas tous. Les femmes qui ont été agressées sexuellement n’étaient pas toutes en théâtre d’opérations.

Je vous demande d’éviter d’interpréter une disposition à l’aide d’exemples exceptionnels, alors que la disposition a une portée générale. Nous étudions une charte des droits, et on dit que la victime n’a pas le droit de nommer son représentant. Voyez-vous la faiblesse du projet de loi? À sa base même, d’un point de vue philosophique, on retire le droit à la victime de nommer son représentant en cas d’absence. Or, on veut appeler cela une charte des droits. Il y a quelque chose que je ne comprends pas ici.

[Traduction]

Le sénateur Gold : J’essaie de comprendre cela, moi aussi. Je comprends un tout petit peu plus, mais je veux m’assurer de comprendre comme il faut.

Dois-je comprendre, toutefois, que cet amendement viendrait annuler toute la pertinence de l’alinéa 4(1.1)b)? Actuellement, il se lit comme suit :

(1.1) [...] peuvent être exercés par l’un ou l’autre des particuliers ci-après pour le compte de la victime...

b) si la victime est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles...

Ce qui signifie que la victime ne peut pas demander que le major Untel agisse pour son compte. Si les victimes ne sont pas en mesure de le faire, l’amendement précise donc qu’elles peuvent demander à un autre membre d’agir pour leur propre compte, mais elles ne sont pas en mesure de le faire par définition. Elles n’ont pas accès à leur premier choix, donc ici elles n’ont tout simplement pas le choix.

Si je comprends bien l’article, il vise à répondre à des circonstances exceptionnelles où les victimes ne peuvent pas exercer leur droit de choisir, mais il peut y avoir une audience ou un quelconque processus où leurs droits doivent être défendus de quelque façon, et l’article vient remédier à cette lacune.

Ai-je raison de penser que cet amendement est intrinsèquement contradictoire? Vous ne pouvez pas agir. Quand vous ne pouvez pas agir pour votre propre compte pour des raisons opérationnelles, vous demandez à quelqu’un d’autre de le faire; mais, par définition, si vous aviez été en mesure d’agir, vous auriez été représenté par la personne de votre choix. Vous ne pouvez pas recourir à cette personne, alors comment pouvez‑vous recourir à quelqu’un d’autre?

Est-ce qu’il y a quelque chose qui m’échappe? Je crois qu’il est tout à fait convenable de vouloir éviter les conflits d’intérêts, mais je pense que l’on retire du coup à la victime le droit d’être représentée quand, pour une raison ou pour une autre, elle ne peut pas exercer elle-même les droits que lui accorderait normalement la loi.

Je ne voudrais absolument pas que qui que ce soit parmi nous adopte un amendement qui se veut bien intentionné et qui ajoute des droits si, dans les faits, il en retire. Peut-être que je comprends mal.

Col Strickey : Vous avez bien raison.

Il est important de revenir à l’alinéa 4(1.1)a), qui précise que divers particuliers peuvent exercer les droits de la victime pour son compte, par exemple si la victime est incapable de le faire pour des raisons autres qu’opérationnelles. Nous avons une liste. Donc, si pour des raisons autres qu’opérationnelles la victime ne peut pas exercer ses droits, il y a une liste de personnes qui peuvent le faire pour son compte : son conjoint, son conjoint de fait, un de ses parents ou une personne à sa charge. Et il y a un certain nombre d’autres sous-alinéas.

L’alinéa 4(1.1)b), comme vous l’avez bien énoncé, monsieur le sénateur, s’applique quand il y a des « raisons opérationnelles ». D’un point de vue technique, j’avance que l’alinéa b) vise à remédier à une lacune si la victime ne peut pas agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles, et rien d’autre.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : L’alinéa b) parle d’un ou d’une militaire en déploiement, donc la personne est vivante. Elle ne peut pas se présenter. Dans le fond, on dit que la partie qui va décider de sa représentativité, ce sont les forces armées. Où est la logique lorsqu’on dit à l’alinéa a) que, si la victime est décédée, c’est un proche ou un ami qui la représentera, mais que, à l’alinéa b), si elle est en déploiement, ce sont les forces armées qui choisiront son représentant?

a) si la victime est décédée ou incapable d’agir pour son propre compte pour des raisons autres qu’opérationnelles :

Là, on parle de la personne qui peut parler en son nom, n’est-ce pas? Cependant, à l’alinéa b), si elle est en déploiement, ce sont les forces armées qui vont la représenter.

Le sénateur Gold : Sénateur, vous avez oublié de mentionner une autre phrase. :

b) si la victime est empêchée d’agir pour son propre compte pour des raisons opérationnelles et demande qu’un membre des Forces canadiennes soit nommé [...]

[Traduction]

Autrement dit, la victime a demandé une nomination. Si elle a demandé qu’il s’agisse d’un membre des forces armées, mais qu’elle n’est pas en mesure de choisir, je me demandais s’il n’y avait pas là une contradiction. J’ai peut-être tort. Je ne sais pas. C’était ma question.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je vais vous dire où est la contradiction. Les victimes n’ont pas été consultées sur le contenu de cet alinéa. C’est la question que je posais hier à l’une des victimes : si vous êtes en déploiement, qui voulez-vous comme représentant? Ce que je dis en tant que représentant des victimes, c’est que cet alinéa doit être modifié. On n’a pas consulté les victimes pour le rédiger. Ce sont les hauts commandants qui l’ont rédigé. Nous devons tout simplement le modifier pour redonner le pouvoir aux victimes, à leurs proches ou à quelqu’un qui pourra décider à la place de la victime.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : Monsieur le greffier, veuillez procéder à un vote par appel nominal.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Griffin?

La sénatrice Griffin : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Abstention.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : Le résultat du vote est le suivant : pour : 5; contre : 5; abstention : 1.

La présidente : La motion est rejetée.

L’article 2 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Une voix : Avec dissidence.

La présidente : Avec dissidence.

Mesdames et messieurs, le temps file. Nous allons suspendre les travaux dans cinq minutes environ.

Les articles 3 à 6 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

La présidente : La motion est adoptée.

L’article 7 est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Je crois comprendre qu’il y a des amendements proposés à l’article 7, sénateur Boisvenu?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Absolument, madame la présidente. Est-ce que les gens en ont copie?

[Traduction]

La présidente : Mesdames et messieurs, puisque l’amendement fera probablement l’objet d’un débat, souhaitez‑vous en obtenir une copie avant la suspension des travaux pour aller voter à la Chambre?

Des voix : Oui.

La présidente : Nous allons distribuer les copies et suspendre les travaux.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

La présidente : Mesdames et messieurs, je vous rappelle que nous étudions un amendement qui a pour numéro et titre PB7-5a.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Vous ne serez pas surpris du dépôt de cet amendement qui vise essentiellement à changer le nom de « Déclaration des droits des victimes » pour celui de « Charte des droits des victimes ». Dans le fond, l’appellation juridique dans le système de justice civile est « Charte canadienne des droits des victimes », et on propose d’en changer le nom pour celui de « Charte des droits des victimes » dans le système de justice militaire.

Je pourrais parler longuement sur ce sujet. L’amendement vise essentiellement à donner aux victimes du système de justice militaire un symbole puissant en ce qui touche la protection de leurs droits, pas seulement en ce qui a trait au contenu, mais également à titre de symbole. Comme on le sait, la Charte canadienne des droits et libertés, qui a été adoptée en 1982, assure dorénavant aux gens qui sont accusés ou reconnus coupables des droits fondamentaux que les cours ont reconnus historiquement. Cette charte a pris toute cette valeur à partir des déclarations des cours.

La Déclaration des droits des victimes existe dans beaucoup de provinces; elle existait au sein du gouvernement fédéral jusqu’à ce qu’il adopte la Charte des droits des victimes d’actes criminels. On avait mené un combat assez corsé à l’époque, parce que l’appareil bureaucratique ne voulait pas utiliser le mot « charte ». Il voulait plutôt utiliser, comme dans le projet de loi, le mot « déclaration ». Or, pour les victimes d’actes criminels, le fait d’obtenir une charte représentait pour eux une victoire aussi grande que les droits que leur reconnaît la charte. L’adoption de la Charte des droits des victimes dans le système de justice militaire rend donc justice aux victimes.

Je propose donc ce qui suit :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 7, à la page 5, par substitution, à la ligne 7, de ce qui suit :

« Charte des droits des victimes dans le système de justice militaire ».

Je vous remercie.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : D’abord, permettez-moi, sénateur Boisvenu, de vous remercier sincèrement pour toutes les années que vous avez consacrées à la défense des droits des victimes et aussi pour le dépôt de ce que j’estime être d’extrêmement bonnes propositions d’amendements. Mes commentaires portent sur cet amendement en particulier, ainsi que sur un certain nombre d’autres qui sont vraiment pertinents.

Je garde également à l’esprit les commentaires faits plus tôt par un ancien procureur général sur l’importance de ne pas adopter des projets de loi de nature imparfaite. Je dois dire, cependant, que bien que je sois au Sénat depuis assez peu de temps, je n’ai pas encore vu un seul projet de loi parfait être adopté, peu importe le sujet.

J’estime que nous travaillons dans un cadre pragmatique. Je dois dire que la lettre que nous avons reçue aujourd’hui du ministre de la Défense a eu un profond effet sur moi et ma façon d’aborder cet amendement de même que les autres vraiment pertinents qui sont proposés. Avec votre permission, j’aimerais en lire un passage pour qu’il soit consigné au compte-rendu, ce qui me paraît extrêmement pertinent pour cet amendement et certains des autres qui seront probablement proposés.

Dans sa lettre, le ministre affirme ce qui suit :

[...] Je tiens à préciser que la Défense nationale s’est engagée à travailler avec vous et avec tous les parlementaires pour apporter des changements significatifs afin que les Forces armées canadiennes soient un milieu de travail respectueux qui favorise l’inclusion et la diversité. J’ai écouté attentivement vos préoccupations et, dans le cadre de cet engagement, la Défense nationale [...]

Le verbe « s’est engagée à » est important.

Je cite le ministre :

exigera que les règlements fassent en sorte que les agents de liaison avec les victimes (ALV) reçoivent une formation appropriée afin de s’acquitter efficacement de leur rôle dans le système de justice militaire;

veillera à ce que le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, le CIIS, la police militaire et le Service des poursuites militaires informent de manière proactive les victimes de leurs droits en vertu de cette loi, y compris le droit de demander des renseignements et de demander à tout commandant divisionnaire un ALV de leur choix;

permettra aux ALV de travailler de concert avec les coordonnateurs de l’intervention et du soutien du CIIS dans les cas d’inconduite sexuelle pour s’assurer que les victimes connaissent les ressources dont elles disposent et leurs droits en vertu de la Déclaration des droits des victimes;

veillera à ce que l’analyse des politiques nécessaire à la rédaction du règlement comprenne des consultations avec les victimes et les principaux intervenants, comme le CIIS, afin de s’assurer que tous les points de vue sont correctement pris en compte; et

veillera à ce que les règlements relatifs au processus d’audience sommaire soient rédigés à la lumière des principes fondamentaux de la création d’un système disciplinaire non criminel et non pénal.

J’ai eu l’occasion de soulever certains de ces points avec certaines des personnes venues témoigner devant nous. Pour moi, la lettre du ministre est très rassurante.

Je crois que ce projet de loi va demeurer imparfait. Je crois que cet amendement et plusieurs autres l’amélioreraient, mais qu’il demeurerait malgré tout imparfait.

J’ai demandé au ministre en personne si le projet de loi risquait de mourir au Feuilleton, et sa réponse me confirme que, à la lumière des initiatives en cours et des engagements pris par le ministre dans sa lettre d’aujourd’hui, il est important d’adopter ce projet de loi et de ne plus permettre de délais qui pourraient, éventuellement, se solder par un échec législatif.

La présidente : Sénateur Boisvenu, souhaitez-vous ajouter quelque chose?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je ne remets pas en question ce que les gens d’en face me disent, mais des amendements mineurs au projet de loi, comme celui-ci, ne porteraient pas atteinte aux délais. Au fond, lorsque le ministre reçoit un projet de loi avec des modifications aussi mineures, c’est lui qui prend la décision. Il peut presque la prendre sur-le-champ et dire qu’il accepte ces modifications. Tout ce qu’il doit envoyer au Sénat, c’est sa réponse.

L’argument du délai n’est pas du tout en jeu ici. Ce n’est pas comme si on devait modifier le projet de loi en profondeur, en en retirant des articles. Lorsqu’on parle d’un élément aussi mineur que le titre, cela ne dépend que de la volonté du ministre. Il n’y a aucun lien avec les délais, madame la sénatrice. Je trouve regrettable qu’on se serve de cette prétendue raison pour dire qu’on ne peut pas accepter de modifications mineures en ce qui a trait aux délais.

Cela fait 10 ans que je suis au Sénat, et je sais que, lorsqu’un ministre accepte des modifications, cela se fait en 48 heures. Ce n’est pas une question de mois ou de semaines; c’est très expéditif. Cela dit, c’est votre choix.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Sénateur Boisvenu, je respecte énormément votre avis sur le sujet. De mon point de vue, toutefois, ce n’est vraiment pas une question de contenu. Cela concerne le nombre de jours de séance qu’il nous reste pour terminer un ordre du jour extrêmement chargé de même que la grande probabilité que tout amendement provoque un délai assez important pour provoquer la mort du projet de loi au Feuilleton.

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’ai pris connaissance de la lettre du ministre. Ce que je trouve curieux, c’est que le ministre se décide à nous envoyer une lettre à la dernière minute, alors qu’il sait très bien que nous allons étudier le projet de loi article par article et que des amendements seront proposés. Cette lettre, même si elle est bien écrite et tout à fait louable, n’est qu’une stratégie pour nous faire avaler en douce son projet de loi C-77. Je rejette le fait qu’on mette en lumière la lettre du ministre pour dire qu’elle nous convient et que, étant donné que nous avons cette lettre, nous devrions faire fi des amendements. Cela fera bientôt sept ans et demi que je suis ici, et c’est la première fois que je vois cela.

Peu importe le temps qu’il nous reste, s’il le faut, on siégera en juillet. Il n’y a aucun problème à siéger en juillet ou en août afin d’étudier comme il faut ce projet de loi. Selon moi, ce qui a force de loi, c’est un amendement plutôt qu’une lettre énonçant les bonnes volontés du ministre. S’il avait de bonnes volontés, il aurait pu l’envoyer plus tôt aussi; cela fait déjà trois ans et demi qu’il est en poste. C’était mon commentaire.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : Monsieur le greffier, veuillez procéder à un vote par appel nominal.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L'honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : Le résultat du vote est le suivant : pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

L’article 7 est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Les articles 8 à 15 sont-ils adoptés?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’ai un amendement à proposer à l’article 7, page 5.

L’amendement qui suit concerne le droit à l’information. On l’a entendu durant les réunions du comité, aussi bien de la part des représentants des victimes que des gens du domaine du droit. On fait référence au fait que l’élément le plus important pour une victime, lorsqu’elle dénonce son agresseur, c’est l’information. Ce projet de loi fait en sorte que ce ne serait que sur demande que les victimes seraient informées. Cette critique a été vivement soulevée par l’ombudsman des victimes d’actes criminels. Nous savons que, dans le cas de ces victimes, certaines sont des mineures âgées de 16 ou 17 ans. Ces victimes vivent une situation d’autorité qui fait que, souvent, sous la pression de l’autorité, elles n’auront pas l’énergie, le courage ou la force d’aller chercher de l’information. Les forces armées sont un milieu particulier où l’autorité a une ascendance très forte sur le personnel au départ, mais c’est encore plus vrai lorsqu’un membre du personnel est victime d’un supérieur, surtout dans le cas des victimes d’agressions sexuelles.

Je pense que même le ministre l’a compris. D’ailleurs, je le disais plus tôt, dans la lettre qu’il a écrite, lorsqu’il dit que la police militaire et les Services des poursuites militaires informeront ou informent de manière proactive les victimes de leurs droits, pour ma part, compte tenu de la façon dont ce projet de loi est rédigé, je crois que les victimes seraient informées seulement sur demande, alors que le ministre parle de travailler en amont.

Il y a une contradiction qu’il faut absolument corriger, sans quoi je pense que la déclaration du ministre aurait, à mon avis, une nature contradictoire par rapport à la position qu’il décrit lui‑même.

Voici donc ma proposition:

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 7 :

a) à la page 5 :

(i) par substitution, à la ligne 24, de ce qui suit :

« 71.02 Toute victime a le droit d’obtenir »,

(ii) par substitution, à la ligne 33, de ce qui suit :

« 71.03 Toute victime a le droit d’obtenir »;

b) à la page 6, par substitution, aux lignes 6 et 7, de ce qui suit :

« 71.04 (1) Toute victime a le droit d’obtenir des renseignements en ce qui concerne : ».

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Le résultat du vote est le suivant : pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’ai un autre amendement à l’article 7. Est-ce que nous pouvons le distribuer? Madame la présidente, cet amendement vise à mettre le poste d’agent de liaison à l’abri de pressions pouvant provenir des membres d’une unité ou d’une chaîne de commandement. On sait que la chaîne de commandement nomme les agents de liaison. Donc, pour nous, il est très important de rendre ces nominations indépendantes.

On ferait donc en sorte que ce soit un avocat, appelé « avocat militaire », qui soit agent de liaison, plutôt qu’un travailleur social ou une personne d’une autre nature. Ce ne serait pas le commandement qui le nommerait. Le commandement ne ferait qu’informer la victime de son droit d’avoir un agent de liaison. Le juge avocat-général responsable de tous les avocats procéderait à ces nominations.

La façon dont l’agent de liaison est nommé actuellement par les forces armées ressemble un peu à ce qui se fait au Centre d’aide aux victimes d’actes criminels, qui accompagne les victimes dans le processus judiciaire, qui les informe des procédures, et cetera. Un des plus grands vides qu’on observe, surtout concernant les victimes d’agressions sexuelles, c’est le manque de soutien juridique. Nous pensons que le fait d’avoir un agent de liaison qui n’ait pas de formation en droit fasse en sorte que les victimes soient mal assistées durant les procédures judiciaires. On sait que dans les cas d’agressions sexuelles, qui représentent les plaintes les plus fréquentes au sein des Forces canadiennes, l’un des soutiens nécessaires pour que les victimes ne retirent pas leur plainte en cours de poursuite — dans le domaine civil, presque 50 p. 100 des victimes abandonnent la poursuite —, c’est un soutien judiciaire adéquat. D’ailleurs, plusieurs provinces l’ont compris et offrent dorénavant un soutien judiciaire aux victimes durant tout le processus, pour faire en sorte qu’elles n’abandonnent pas les poursuites après avoir porté plainte.

Donc, voici l’amendement que je propose :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 7, à la page 8, par substitution, aux lignes 21 à 33, de ce qui suit :

« tionnelles empêchent la nomination d’un agent de liaison de la victime, un commandant informe la victime de son droit de faire nommer un agent de liaison.

(2) Sur demande de la victime, le juge-avocat général nomme un avocat militaire à titre d’agent de liaison de la victime pour aider celle-ci de la manière prévue au paragraphe (3). Le juge avocat-général nomme un autre avocat militaire pour remplacer l’agent de liaison en cas d’absence ou d’empêchement de ce dernier.

(2.1) L’agent de liaison nommé au titre du paragraphe (2) doit satisfaire aux conditions prévues par règlement du gouverneur en conseil, notamment les règlements qui concernent la formation requise des agents de liaison, en particulier droit criminel et en victimologie. ».

Le sénateur Pratte : Cet amendement me cause un peu de soucis, car il limite la formation de l’agent de liaison de la victime. Ce serait un avocat. Or, selon les témoignages que nous avons entendus, notamment hier, des victimes elles-mêmes nous indiquent que leurs besoins sont de nature multiple, pas seulement de nature légale. Donc, je ne vois pas pourquoi on réserverait ce rôle nécessairement à un avocat. Je sais que c’est le système aux États-Unis, mais ce n’est pas parce que c’est ainsi aux États-Unis qu’il faut nécessairement faire la même chose ici.

Dans sa lettre, le ministre s’est formellement engagé à ce que les agents de liaison des victimes reçoivent la formation nécessaire, et je cite :

Exigera que les règlements fassent en sorte que les agents de liaison avec les victimes (ALV) reçoivent une formation appropriée afin de s’acquitter efficacement de leur rôle dans le système de justice militaire;

C’est un engagement très clair qui avait été demandé par plusieurs personnes, et je ne vois pas pourquoi on limiterait la formation ou le type de personne qui serait agent de liaison de la victime seulement à des avocats.

Le sénateur Boisvenu : C’est pour la seule et unique raison que la majorité des plaintes au sein des forces armées sont des plaintes pour agressions sexuelles, et que le besoin des victimes est celui d’un soutien juridique durant les procédures judiciaires. À cela, il y a deux raisons : le taux d’abandon des poursuites qui est très élevé, à cause des pressions qui proviennent de l’interne, et la structure de commandement dans les forces armées, qui entraîne beaucoup plus de pressions que ce que l’on peut observer au civil. C’est strictement pour ces raisons. Les besoins sont davantage de nature juridique que de nature psychologique ou thérapeutique.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Je tiens une fois de plus à féliciter le sénateur Boisvenu pour la nature de son amendement.

Je crois que, d’une certaine façon, sa proposition arrive avant son temps. Dans le témoignage de la major Rodman, hier, j’ai clairement retenu que les Forces armées canadiennes envisagent maintenant d’adopter un modèle abandonné par les Américains après sa mise à l’essai. Ils se rapprochent maintenant beaucoup plus de ce que décrit ici le sénateur Boisvenu.

Je suis vraiment d’accord avec le raisonnement exposé par le sénateur Boisvenu quant à la valeur d’être représenté par quelqu’un qui, même s’il n’est pas avocat, a tout de même reçu une formation juridique.

Je demeure toutefois du même avis que tout à l’heure. Je ne vais pas aller davantage dans les détails maintenant, parce que je l’ai déjà fait. Je ne peux pas approuver cet amendement principalement parce qu’il aura, selon moi, pour effet de torpiller le projet de loi.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je me suis peut-être mal exprimé. C’est vraiment sur demande de la victime. Cela n’exclut donc pas la possibilité d’avoir d’autres types d’agents de liaison. Je pense à des criminologues qui ne sont pas avocats. C’est à la demande de la victime, ce qui veut dire que, si le besoin de la victime est d’avoir un avocat-conseil, je pense que le système doit lui permettre d’en avoir un, ce que la loi ne lui permettrait pas à l’heure actuelle.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Il s’agit de l’amendement PB 7-8c.

Cet amendement vise à renforcer le rôle de l’agent de liaison, qui est défini au paragraphe 71.16(3) du projet de loi, en lui ajoutant des responsabilités, entre autres celle d’informer la victime des programmes auxquels elle a droit. Cela dépasse la notion d’expliquer comment les accusations relatives aux infractions d’ordre militaire sont portées. On parle donc d’informer la victime des programmes auxquels elle a droit et des droits que la présente déclaration lui confère.

Cet amendement vise à aiguiller la victime vers les services auxquels elle a droit dans le domaine militaire. Ce serait un droit qui serait ajouté aux responsabilités des agents de liaison. Par ailleurs, si la victime quitte les forces armées ou le ministère de la Défense nationale, elle a un droit reconnu d’être orientée vers les provinces au lieu d’être larguée tout simplement. Ce que prévoit ce projet de loi, c’est l’absence de responsabilités à la suite du départ de la victime des forces armées.

C’est un souhait qui a été soulevé par l’ombudsman des victimes d’actes criminels. Cette disposition pourrait être améliorée à tout le moins en énonçant expressément que l’agent de liaison est également tenu d’expliquer à la victime les droits qui lui sont conférés.

Voici donc l’amendement proposé, et je cite :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 7, à la page 8, par adjonction, après la ligne 38, de ce qui suit :

« a.1) d’informer la victime des divers programmes auxquels elle a droit;

a.2) d’informer la victime des droits que la présente section lui confère;

a.3) de veiller à ce que, dès que possible après son départ des Forces canadiennes, la victime soit informée des programmes offerts dans sa province de résidence pour lui venir en aide; ».

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Madame la présidente, j’ai un autre amendement, toujours à l’article 7.

[Traduction]

La présidente : Sénateur Boisvenu, pouvez-vous attendre pendant que nous distribuons l’amendement?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Absolument, madame la présidente, je suis très obéissant à vos directives.

Cet amendement retirera du projet de loi les dispositions suivantes qui enlèvent aux victimes le pouvoir de faire respecter leurs droits.

Je vous lis ce que contient le projet de loi :

Absence de droit d’action

71.24 La violation ou la négation d’un droit conféré par la présente section...

— donc, si la victime trouve que ce qui est contenu dans ce projet de loi viole ses droits ou ne les reconnaît pas —

... ne donne pas ouverture à un droit d’action ni au droit d’être dédommagé...

— si les droits de la victime ne sont pas respectés, elle ne peut pas en appeler —

[...] Il est entendu que le présent article ne change en rien le droit d’action et le droit d’être dédommagé conférés autrement.

Évidemment, si ses droits sont respectés.

À l’article 71.25, on dit ceci :

Aucun appel d’une décision ou d’une ordonnance ne peut être interjeté au seul motif qu’un droit conféré par la présente section a été violé ou nié.

Donc, ces articles enlèvent tout droit d’exercer un droit d’appel. Si nous ne retirons pas cet article, les victimes peuvent porter plainte, et si la plainte est rejetée, elles n’ont aucun recours. Si nous voulons que leurs droits soient respectés, il faut que les victimes puissent exercer ce droit. Si on enlève ces deux articles, c’est le droit actuel qui s’applique, qui précise le droit à une révision judiciaire, et s’il y a une erreur de droit, le droit fédéral s’applique.

S’agissant des procédures ainsi que de la procédure d’un délinquant dans le système correctionnel actuellement, il convient de renseigner les victimes au sujet du service d’aide disponible et des autres programmes. Les opinions, les préoccupations et les commentaires des victimes constituent des éléments importants dans le processus judiciaire pénal. Il convient d’en tenir compte, conformément aux lois, aux politiques et aux procédures en vigueur. Il convient de tenir compte des besoins, des préoccupations et de la diversité des victimes dans l’élaboration et la prestation des programmes et des services.

Il convient aussi de renseigner les victimes au sujet des options dont elles peuvent se prévaloir. Et s’il y a une option qu’elles doivent absolument avoir, c’est un droit d’appel. Si leurs droits conférés par cette déclaration ne sont pas reconnus ou respectés, cela veut dire, pour moi, que si ces deux articles sont maintenus dans ce projet de loi, c’est un manque de respect à l’égard des victimes.

Je propose donc ce qui suit :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à l’article 7, à la page 11, par suppression des lignes 9 à 16.

Le sénateur Pratte : Il y a quelque chose que je ne comprends pas, parce que les deux mêmes articles, exactement mot pour mot, se retrouvent dans la Charte canadienne des droits des victimes. Si c’est bon pour la charte, ça doit être bon aussi pour la déclaration. Je comprends que ce que l’on veut, c’est que, dans les deux cas, il n’y ait pas de recours judiciaire. Il y a un recours dans le cadre d’un système interne de gestion des plaintes, mais pas de recours devant les tribunaux; c’est ce qui est prévu dans la charte, aux articles 28 et 29. Ce sont exactement les mêmes mots.

Le sénateur Boisvenu : Le problème est le suivant, sénateur Pratte.

Le sénateur Pratte : Je viens de vous faire un grand compliment.

Le sénateur Boisvenu : Oui, j’ai compris. Le problème est celui-ci : il ne faut pas comparer les deux chartes par rapport à ce système parce que, dans la charte canadienne, les responsabilités du gouvernement fédéral sont très minimes et ne concernent que le système carcéral et la Commission des libérations conditionnelles pour lesquels il existe déjà un mécanisme lié aux plaintes.

Le problème de cette charte est qu’elle touche aussi bien les responsabilités dévolues actuellement aux provinces en ce qui a trait à l’aide aux victimes, qu’il s’agisse de dédommagement, de soutien financier ou de soutien psychologique. Ces responsabilités relèvent des provinces et non de la Charte canadienne des droits des victimes. Cette charte-ci englobe tous les droits et tous les services que les victimes se verront accorder par les Forces armées canadiennes; les victimes n’iront pas cogner à d’autres portes.

En ce qui a trait à la Charte canadienne des droits des victimes, lorsque vient le temps d’offrir les services de première ligne, les victimes ne cognent pas à la porte du gouvernement fédéral; elles cognent à la porte du gouvernement provincial, que ce soit à l’IVAC ou au CAVAC.

Ce n’est pas le cas que nous avons devant nous, puisqu’ici, il s’agit d’un guichet unique que sont les Forces armées canadiennes et qui offre l’ensemble des services que les provinces offriraient normalement dans le cadre de la Charte canadienne des droits des victimes.

Il s’agit donc de deux contextes complètement différents. En retirant ce droit, si une victime portait plainte pour avoir été agressée et que sa plainte n’était pas retenue, elle n’aurait pas d’autre endroit où aller frapper. Dans le cas de la Charte canadienne des droits des victimes, les victimes ont d’autres recours ailleurs, dans leur province. Il y a une grande distinction entre les deux.

Le sénateur Pratte : Je ne suis pas sûr de suivre complètement votre raisonnement. Excusez-moi, je ne suis pas très ferré dans ce domaine. Il reste que, en vertu de la Charte des droits des victimes, il n’y a pas non plus de droit d’action ni de droit d’appel. C’est la même chose.

Le sénateur Boisvenu : Je le répète. En fonction de la Charte canadienne des droits des victimes, une victime a des recours ailleurs, que ce soit à l’IVAC ou au CAVAC, afin d’être indemnisée, informée et accompagnée juridiquement ou de recevoir de l’aide psychologique. Ce sont les provinces qui offrent ces services et non le gouvernement fédéral, alors que la charte dont nous traitons ici englobe tous les services et tous les droits des victimes des Forces armées canadiennes. Il y a une grande distinction à faire entre les deux chartes.

Si la responsabilité des victimes d’actes criminels relevait du gouvernement fédéral — je parle des victimes civiles —, vous auriez tout à fait raison; il y aurait alors vraiment une lacune dans la Charte canadienne des victimes. Cependant, ce n’est pas le cas, car 80 p. 100 des services offerts aux victimes civiles sont offerts par les provinces.

Dans le cas qui nous occupe, 100 p. 100 des services offerts aux victimes le sont par les Forces armées canadiennes. Si on ne leur reconnaît pas un recours pour faire appel à ce droit, elles n’auront pas d’autre endroit où faire reconnaître leurs droits.

Le sénateur Dagenais : Je m’associe aux commentaires du sénateur Boisvenu.

Le projet de loi C-77 offre aux victimes un guichet unique. Il n’y a pas d’autres avenues, il a entièrement raison de le dire. Pour avoir déjà consulté ces services, je peux affirmer que les services offerts aux victimes sont des services provinciaux et qu’il y a plusieurs endroits où la victime peut recevoir un service, en appeler d’une décision ou recevoir une consultation.

Il faut comprendre une chose, c’est que l’amendement du sénateur Boisvenu vise à ouvrir les perspectives pour les victimes. Il s’agit donc de bonifier le projet de loi pour aider les victimes, car il s’agit bien d’un projet de loi qui vise à les aider.

Selon moi, on ne peut pas être contre cet amendement. Non seulement il y a le projet de loi, mais on veut l’améliorer en donnant l’occasion aux victimes d’avoir accès à l’IVAC, au CAVAC et à d’autres soutiens auxquels les victimes pourraient avoir recours, au lieu d’être contraintes à utiliser les services offerts par le gouvernement fédéral, qui sont les services de l’armée. Je le répète, c’est un projet de loi qui vise à aider les victimes, alors pourquoi ne pas leur donner plus de possibilités?

Parfois, une organisation, malgré toute la bonne volonté de ses membres, peut ne pas suffire à la tâche. Aussi, la victime pourrait se sentir plus à l’aise ailleurs. Je m’inspire d’un courriel que j’ai reçu hier d’une ancienne militaire qui a été victime et qui me disait que son seul recours, c’est l’armée. Or, elle désirait avoir accès à d’autres avenues pour se faire entendre. C’est ce que prévoit l’amendement proposé par le sénateur Boisvenu. Si on refuse d’adopter cet amendement, c’est comme si on disait aux victimes qu’on préfère leur imposer des contraintes. Par exemple, si vous êtes obligé d’aller à la Caisse populaire et que vous n’avez pas le droit d’aller à la Banque Nationale ou à la Banque Royale, vous êtes restreint. En quelque sorte, on restreint les droits des victimes dans le projet de loi, et notre amendement vise à élargir sa portée en offrant un peu plus de souplesse et de possibilités aux victimes. Je pense qu’il serait tout à fait louable d’accepter un tel amendement. Je ne vois pas pourquoi on veut s’y opposer.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

L’article 7 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : L’article 7 est adopté avec dissidence.

Les articles 8 à 16 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

La présidente : Les articles 17 à 26 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, vous allez vite.

[Traduction]

La présidente : Je vous donnerai une chance de nous rattraper.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Il me semble que j’avais un bon amendement à proposer. On va aller plus loin. Merci.

[Traduction]

La présidente : Les articles 27 à 36 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

La présidente : Les articles 37 à 46 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

La présidente : Les articles 47 à 56 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

Une voix : Avec dissidence.

La présidente : Les articles 57 à 64 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : L’article 65 est-il adopté?

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’ai un amendement à proposer :

Que le projet de loi C-77 soit modifié, à la page 81, par adjonction, après la ligne 24, de ce qui suit :

« 65.1 Le ministre de la Défense nationale établit et fait déposer devant chaque chambre du Parlement, au plus tard quinze jours avant le premier anniversaire de l’entrée en vigueur de l'article 7 de la présente loi, un rapport sur les répercussions [...] ».

Ces 15 jours après le premier anniversaire, si on le lit tel qu’il est rédigé, cela veut dire qu’après l’adoption du projet de loi, le ministre doit faire rapport aux deux Chambres des impacts du projet de loi quasiment un an plus tard. Je peux vous dire qu’un an, c’est un long délai lorsque vous êtes victime d’une agression sexuelle ou autre.

On nous a dit qu’un rapport dévastateur sur les droits des victimes a été diffusé aussi récemment que la semaine dernière. Nous savons que la situation ne s’est pas améliorée, selon les témoignages que nous avons entendus. On veut savoir dans un an si ce projet de loi aura donné des résultats. Or, un an, c’est beaucoup trop tard. Il faut prendre en considération le bien-être des victimes. On ne les a pas entendues. On ne les a pas consultées.

Quand vous êtes victime d’un acte criminel — j’en ai connu quelques-unes dans ma carrière —, vous devez attendre les procédures judiciaires. Avec ce projet de loi, on veut faire attendre les victimes encore un an. Je crois qu’on devrait écourter le délai, accepter l’amendement et indiquer qu’un an, c’est trop long. On devrait enlever cette restriction, comme le propose l’amendement, et établir un délai beaucoup plus court afin de donner une chance aux victimes d’être mieux représentées. Encore une fois, on ne les a pas consultées.

Je pense que le colonel voulait intervenir.

[Traduction]

Col Strickey : Pour éclaircir un point dont nous avons discuté hier, l’article 273.601 de la Loi sur la défense nationale prévoit un examen obligatoire qui engloberait tout ce qui relève de la partie III du Code de discipline militaire, et je pense que la lettre du ministre indiquait qu’un examen serait imminent. Je présume donc que cet examen inclurait non seulement les modifications au projet de loi, advenant son adoption, mais aussi une myriade d’autres questions dont nous avons parlé au sein du comité, madame la présidente.

La présidente : Merci.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Il y a une chose qui est certaine : ce projet de loi aurait dû être élaboré de concert avec les victimes d’actes criminels. On a élaboré un projet de loi dans les hautes sphères des forces armées. On ne peut pas critiquer l’exercice mené, car il y avait une bonne volonté, mais l’erreur fondamentale a été de rédiger un projet de loi en l’absence des victimes d’actes criminels. C’est impardonnable.

Lorsque nous avons écrit la Charte canadienne des droits des victimes, nous avons consulté près de 3 000 personnes. Cela a fait toute la différence. Je sais que ce projet de loi sera évalué, comme chaque fois qu’un gouvernement adopte un projet de loi, mais je pense spécifiquement aux victimes. Il faut savoir, un an après, comment les victimes ont été protégées grâce à ce projet de loi, que nous trouvons insatisfaisant et incomplet. Les victimes nous ont dit que cela ne va rien changer à leur vécu. Elles vont vivre les mêmes frustrations et le même abandon. Si les forces armées ou le ministre nous disent qu’il s’agit d’un outil qui va changer le sort des victimes, même s’ils n’ont pas consulté les victimes, car ils savent ce qui est bon pour elles, je pense qu’il faut aller voir les victimes un an plus tard et leur demander si le projet de loi a changé quoi que ce soit pour elles. Sinon, dans deux ou trois ans, nous verrons le même rapport de Statistique Canada avec le même pourcentage de militaires — surtout des femmes — qui sont agressés, et cela ne va rien changer. Il est important qu’on fasse un minimum d’effort au cours de l’année suivant la mise en œuvre de ce projet de loi, en consultant les victimes pour leur demander si elles sont satisfaites de la façon dont les forces armées les ont traitées.

Le sénateur Dagenais : Pour ajouter au commentaire du sénateur Boisvenu, cela me rappelle une expérience. Ces discussions auraient dû être menées de façon paritaire. Je m’explique.

Comme le sénateur Boisvenu l’a soulevé, c’est comme si les grands patrons avaient tout décidé sans demander aux employés ce qu’ils en pensaient. La discussion et la rédaction du projet de loi ont été faites à sens unique. Le patron a indiqué ceci : « Voici ce que j’ai pensé pour vous, mes employés, et voici ce que vous allez obtenir, mais je ne veux pas savoir ce que vous en pensez. » C’est le projet de loi actuel. Il aurait fallu tenir une discussion paritaire. Je comprends qu’il n’y a pas d’association syndicale dans l’armée, mais il aurait pu y avoir des discussions paritaires, ce qui n’a pas été fait.

La crainte, c’est que même si l’on attend un an pour voir les résultats du projet de loi, il sera peut-être trop tard pour certaines victimes, surtout les victimes que nous avons entendues. Quand le mal est fait, il est fait. C’est difficile pour les victimes. Encore une fois, on devrait accepter cet amendement tout en pensant aux victimes. Arrêtons de penser aux délais et au projet de loi du gouvernement. Pour une fois, est-ce qu’on peut penser aux victimes? On évoque la fin de la session qui approche et on trouve qu’il ne reste pas beaucoup de temps. On veut faire adopter le projet pour ne pas qu’il meure au Feuilleton. On peut siéger un peu plus tard en juin. Après, il y a juillet et août. On devrait prendre le temps nécessaire, car, à l’heure actuelle, on est en train de faire adopter en catastrophe un projet de loi mal ficelé.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Je veux réagir à certains points que le sénateur Dagenais vient de soulever et indiquer clairement que je serais plus qu’heureuse de siéger plus longtemps, y compris pendant l’été, mais cette décision ne dépend pas de nous. Cela échappe à notre contrôle. Par conséquent, je me dois de soulever une objection quand d’aucuns affirment que les choix difficiles que nous faisons aujourd’hui sont en faveur ou au détriment des victimes.

Pour ma part, je pense observer chez d’autres collègues une motivation qui les pousse vers une intégration des droits des victimes dans la loi, ne serait-ce que de façon minimale.

Le projet de loi est terriblement imparfait. Je sais toutefois, d’après les consultations que j’ai menées auprès d’avocats et de survivants, que le fait de pouvoir aller de l’avant avec certains projets qui ont été encouragés — y compris par l’attention que notre comité a portée à la question de l’inconduite sexuelle dans l’armée — constitue un petit pas nous permettant d’appuyer ces initiatives et les personnes auxquelles ont été confiées des responsabilités, des responsabilités qui, dans certains cas, n’existaient pas avant.

Pour ma part toujours, avec le plus grand respect pour votre position, je pense que cette mesure, toute difficile soit-elle, a aussi été pensée par soucis et en soutien à l’égard des victimes et des survivants.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’ai un respect énorme pour les forces armées. Il y a des membres de ma famille qui ont été dans les forces armées. Lorsque j’étais jeune, j’ai passé cinq ans dans les cadets de l’air. J’ai une conjointe qui a travaillé sept ans dans les forces armées.

Deux erreurs ont été commises dans ce projet de loi. La première, c’est de ne pas avoir consulté les victimes. La deuxième erreur, qui m’apparaît encore plus importante, c’est que le gouvernement s’est servi d’une consultation publique qui a été effectuée dans le contexte d’un autre projet de loi. Je n’ai jamais vu cela. C’est comme si on avait pris les plans d’une Volkswagen pour construire une Cadillac. C’est ce qui a été fait.

En plus de ne pas avoir consulté les victimes, on utilise une consultation qui a été faite dans le contexte de la Charte des droits des victimes, ce qui n’a aucun rapport avec la charte des militaires. Erreur fondamentale. C’est comme si je demandais à l’armée de me bâtir un char d’assaut et qu’elle se base sur les plans d’une Volkswagen pour ce faire. Quel en sera le résultat? Vous allez vous enliser.

C’est ce qui se passera avec cette charte, parce qu’on a utilisé un contexte totalement différent, au civil. D’ailleurs, le gouvernement l’a dit tout au long des consultations, il a répété la même chose : les militaires, c’est un contexte et un monde différents. Il n’a pas cessé de le répéter et il se sert d’une consultation publique au civil. C’est inconcevable. Il s’agit d’un manque flagrant de professionnalisme à mon avis.

Enfin, on ne donne pas l’occasion aux victimes de se faire entendre dans le cadre de l’étude de ce projet de loi. C’est la troisième erreur qui est commise.

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, pas plus tard que la semaine dernière, à plusieurs reprises, Radio-Canada rapportait les paroles de représentants de Statistique Canada et de l’armée qui disaient que, malgré toute la bonne volonté du général Vance, qu’on a eu l’occasion de rencontrer à plusieurs reprises, avec l’opération Honour, il n’y a eu aucune amélioration. C’est Statistique Canada qui nous l’a dit. Il n’y a eu aucune amélioration.

On pense qu’avec le projet de loi, dans sa forme actuelle, il va y avoir une amélioration, mais compte tenu de ce qu’on a entendu, on prend encore le même mauvais chemin. On aurait dû apprendre de l’opération Honour, qui a été mise en œuvre il y a quatre ans. Je loue les efforts du général Vance, qui était rempli de bonnes intentions. Je le crois. Cela a été difficile. Quand on constate l’échec de l’opération Honour, si on pense que le projet de loi C-77 sera meilleur, et qu’on rejette en plus des amendements qui pourraient donner plus de possibilités aux victimes, on prend le mauvais chemin. C’est une erreur.

Encore une fois, si le gouvernement est encore en place après les prochaines élections, il vivra avec ses erreurs, mais j’espère que ce sera réparé un jour ou l’autre parce qu’on fait fausse route.

Le sénateur Pratte : Sénateur Boisvenu, malgré votre carrière extraordinaire dans le domaine des droits des victimes, vous n’avez pas le monopole de la protection des droits des victimes. La raison principale pour laquelle la plupart d’entre nous avons rejeté plusieurs de ces amendements, c’est que nous sommes convaincus que, malgré certaines faiblesses, la Déclaration des droits des victimes est une avancée importante, parce que le texte est le même que celui de la charte.

Je comprends que le contexte est différent, mais il n’est tout de même pas banal qu’on introduise dans le droit militaire la charte des déclarations des droits des victimes qui reprend, mot pour mot, à plusieurs égards, la charte dont le sénateur Boisvenu est l’un des principaux auteurs. Nous estimons qu’il s’agit là d’une avancée importante pour les droits des victimes. Vous avez une autre interprétation, c’est votre droit, mais vous n’avez pas le droit de prétendre que vous êtes les seuls à prendre la défense des droits des victimes.

Le sénateur Dagenais : Vous nous en reparlerez l’année prochaine.

Le sénateur Boisvenu : Nous n’avons jamais prétendu avoir le monopole. J’ai une expérience différente de la vôtre, mais ce que nous prétendons, c’est d’avoir plus de respect pour les victimes que vous en avez eu.

[Traduction]

La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : Procédons à un vote par appel nominal.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Absolument.

M. Palmer : L’honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L’honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L’honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Pour : 6; contre : 6.

La présidente : La motion est rejetée.

L’article 65 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Une voix : Avec dissidence.

La présidente : C’est noté.

L’article 66 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le sénateur Boisvenu : Avec dissidence.

La présidente : L’article 67 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : L’article 68 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : Le titre est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : Le comité souhaite-t-il envisager l’annexion d’observations au rapport?

Je crois comprendre que trois sénateurs déposent des observations.

Le sénateur Gold : Les observations dont je voulais traiter se trouvent dans un document agrafé intitulé DRAFT — CONFIDENTIAL — ÉBAUCHE, qui est présenté en anglais et en français.

Je me ferais un plaisir d’expliquer de façon générale l’intention de ces observations, puisqu’elles sont devant nous et qu’elles peuvent être portées au compte rendu, à moins que vous souhaitiez que je les lise. Je suis à votre disposition.

La présidente : Comme tout le monde a le document devant soi, vous pouvez peut-être en parler.

Le sénateur Gold : Je le ferai avec plaisir.

Ces observations s’appuient sur les commentaires que j’ai formulés, ainsi que sur ceux que la sénatrice McPhedran et d’autres personnes ont faits dans le cadre de l’étude de ce projet de loi, étant donné que certains passages méritaient d’être améliorés. Nous avons soulevé des questions tout au long du processus avant d’entendre les témoins. Nous voulions nous assurer que le rapport traitait des déclarations de principes et des orientations, car je crois — comme vous, je l’espère — qu’il est important que le gouvernement examine cette question en profondeur. En outre, ces observations constituent une sorte de repère pour que notre comité puisse, au cours de la prochaine législature, demander des comptes au gouvernement et évaluer les progrès souhaités, attendus et recherchés pour ce qui est d'améliorer le système de justice militaire à tous les égards.

Ces observations reprennent un grand nombre de thèmes évoqués par les témoins. Le seul passage que j'aimerais vous lire est le préambule, qui énonce les principes directeurs. Il y a ensuite une série d’observations sur les droits des victimes.

Soit dit en passant, un grand nombre de ces observations trouvent leur écho dans la lettre du ministre, dans les engagements qu’il a pris, à tout le moins. C'est une bonne chose, car car il apporte de l’eau à notre moulin, si vous me permettez l’expression. Nous abordons toutefois la question des audiences sommaires également, un point qui, soit dit en passant, n’a pas fait l’objet de nombreux débats ou du moindre amendement; il s’agit toutefois de modifications substantielles au système de justice militaire. Des témoins ont soulevé d’importantes questions que nous avons prises au sérieux, que j’ai prises au sérieux, et je voulais m’assurer qu’elles figurent aussi au compte rendu.

Permettez-moi de lire les deux premiers paragraphes, car je veux que vous saisissiez le contexte dans lequel j’ai abordé ces questions en m’inspirant des interventions de mes collègues :

Compte tenu des recommandations de ce comité dans son rapport de mai 2019 intitulé Le harcèlement et la violence sexuels dans les Forces armées canadiennes et des témoignages recueillis lors de son étude du projet de loi C-77, ce qui modifie la Loi sur la défense nationale et d’autres projets de loi, le comité fait les observations avec une emphase sur l’importance des régulations pour la mise en œuvre de l’intention de ce projet de loi.

Dans l’ensemble, les observations du comité [...]

— soit celles que je vous propose ici —

[...] sont fondées sur la conviction que les procédures de justice militaire doivent être accessibles et équitables pour toutes les parties. Pour ce faire, les victimes doivent pouvoir jouer un rôle important dans les procédures de justice militaire afin d’être protégées, considérées, informées, respectées et entendues.

Vous avez ensuite devant vous les détails. Si vous avez des questions ou des suggestions en vue d'apporter des améliorations, je suis à votre entière disposition pour les examiner.

La présidente : Honorables sénatrices et sénateurs, avez-vous des commentaires à formuler?

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’ai tenu compte rapidement des observations de mon collègue, le sénateur Gold, qui sont bonnes, soit dit en passant, mais là où je mettrais un bémol, c’est au paragraphe 11, l’examen législatif où on indique que l’examen indépendant de la Loi sur la défense nationale, prévu pour la septième année — imaginez, dans sept ans — après la mise en œuvre du projet de loi C-77, devrait permettre d’évaluer l’efficacité de la déclaration des victimes et la mesure dans laquelle ces observations ont été prises en compte.

Imaginons une victime l’an prochain. On prendra en considération l’efficacité dans sa déclaration et on évaluera dans six ans si sa déclaration est bonne. Je vous garantis que je n’aimerais pas être une victime.

Le sénateur Gold : Je vous remercie de cette question, car ce n’était pas l’intention.

Comme on l’a entendu lors des témoignages d’hier, et cela a été répété aujourd’hui, la référence à l’examen indépendant dans sept ans est liée aux dispositions du projet de loi. Ce que j’ai compris en rédigeant ça, c’est que l’examen indépendant aura lieu en 2021, si ma mémoire est bonne. Donc, on ne parle pas de sept ans. En fait, il est plutôt question d’un an ou d’un peu plus d’un an, parce que l’examen indépendant dans sept ans est encadré dans la législation elle-même. On n’attend pas sept ans, loin de là. Il s’agit ici de préciser que, dans le contexte de ce que le colonel Strickey a décrit il y a à peine une heure, nous allons mettre l’accent sur l’efficacité de la déclaration, et aussi sur le déroulement du processus pour le remplacement des audiences sommaires. Est-ce que j’avais raison?

[Traduction]

La présidente : Sénateur Gold, avant de passer au colonel, je crois comprendre, d’après ce que le greffier m’indique, qu’il pourrait y avoir un problème entre la version anglaise et la traduction française. Je me demande si vous pourriez lire l’observation no 11 aux fins du compte rendu pour qu’on l’entende bien.

Le sénateur Gold : Quelle version traduit le mieux l’intention que je viens de décrire?

La présidente : La version anglaise.

Le sénateur Gold : La version anglaise. Merci. Je la lirai avec plaisir.

L’observation no 11 indique ce qui suit au sujet de l’examen législatif :

The seventh-year independent review of the National Defence Act immediately following the implementation of Bill C-77 and its regulations should assess the efficacy of the Declaration of Victims’ Rights, summary hearings, and the degree to which these observations have been applied.

La présidente : Cela vous aide-t-il, sénateur Dagenais?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, j’essaie de comprendre. Ce que je comprends, c’est que l’examen indépendant de la loi se fera dans sept ans et qu’il permettra d’évaluer l’efficacité des déclarations des victimes. Cela veut donc dire qu’en 2026, nous allons examiner l’efficacité des déclarations des victimes. On parle d’un examen indépendant qui se tiendra dans sept ans. Dans sept ans, je ne serai plus au Sénat; les gens seront soulagés, mais je trouve ce délai extraordinaire. Pourquoi sept ans?

[Traduction]

La présidente : J’essaie d’y voir clair. Je pense que quelque chose s’est perdu entre l’anglais et le français. Malheureusement, comme je ne parle pas français, je ne peux pas expliquer le problème. Je crois comprendre que l’examen doit avoir lieu au bout de sept ans, mais qu’il sera réalisé en 2021. Ai-je raison, colonel?

[Français]

Col Strickey : Madame la présidente, en vertu de la Loi sur la défense nationale et de l’examen indépendant, au paragraphe 273.601(2), et je cite :

Rapport au Parlement

(2) Au plus tard sept ans après la date d’entrée en vigueur du présent article et, par la suite, au plus tard sept ans après le dépôt du rapport précédent, le ministre fait déposer le rapport d’examen devant chacune des chambres du Parlement.

[Traduction]

Ce sont les sept ans auxquels le sénateur Gold fait référence.

Le sénateur Gold : Je pense que nous devons savoir quand le prochain examen doit avoir lieu. Je n’ai aucune objection à ce que cela soit indiqué dans les observations pour qu’il soit clair qu’on n’attendra pas sept ans.

Lieutenant-colonel Geneviève Lortie, directrice juridique, Justice militaire - Politiques, ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Cette disposition est entrée en vigueur le 1er juin 2014; en vertu de la Loi sur la défense nationale, le prochain rapport sera présenté le 1er juin 2021.

Le sénateur Gold : Le rapport est attendu. Je présume que les auteurs commenceront à préparer le rapport au moins un an à l'avance, soit presque immédiatement après l’entrée en vigueur du projet de loi C-77 avec la Déclaration des droits des victimes. Puis la structure du rapport serait établie l'année suivante. Je ne pense pas qu’on pourra le faire plus rapidement.

Le sénateur Pratte : À mon avis, dans la version anglaise, la mention de l’examen indépendant aux sept ans immédiatement après la mise en œuvre du projet de loi C-77 porte à confusion. Je ne sais pas exactement comment on pourrait formuler le tout, mais je proposerais de supprimer la référence aux sept dans les deux langues et de simplement indiquer que le prochain examen indépendant aura lieu en 2021.

[Français]

Il est déjà prévu dans la loi que cela a lieu tous les sept ans, mais le prochain examen est attendu en 2021, soit dans deux ans.

Le sénateur Dagenais : C’est ce que je comprends. Donc, tous les sept ans, il y a un examen indépendant.

Le sénateur Pratte : C’est ça.

Le sénateur Dagenais : C’est tout de même assez long.

Le sénateur Pratte : Oui, peut-être, mais...

Le sénateur Dagenais : Il faudrait peut-être modifier la loi à un moment donné.

[Traduction]

Le sénateur Gold : C’était l’intention de l’observation; toute formulation qui dissiperait tout doute et qui clarifierait le sens est la bienvenue.

[Français]

Je vous remercie pour la précision.

[Traduction]

La présidente : Je pense que nous avons peut-être une suggestion.

Julia Nicol, analyste, Bibliothèque du Parlement : Ne pourriez-vous pas clarifier le sens en faisant référence à la disposition de la Loi sur la défense nationale qui exige l’examen après sept ans, en indiquant « l’examen prévu à l’article... »? Tout serait clair et il ne serait pas question des sept ans.

Col Strickey : Oui, je pense que cela suffirait. À mon avis, cela clarifie la question des sept ans et dirigerait le lecteur vers la disposition de la loi.

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’ai écouté, et on ne passera pas la soirée là-dessus, j’ai compris l’interprétation. Même si je n’ai pas l’air de comprendre, je comprends.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Nous ferions référence à l’article untel de la loi.

La présidente : Y a-t-il d’autres commentaires sur d’autres articles? Je pense que nous sommes tous d'accord.

Des voix : Oui.

La sénatrice McPhedran : J’appuie sans réserve les observations acceptées précédemment et auxquelles j'ai collaboré. J'aimerais en proposer deux autres.

Voici la première :

La Déclaration des droits des victimes devrait être interprétée comme s’appliquant non seulement aux membres des Forces armées canadiennes, mais également à tout employé ou contractuel civil victime d’un crime dans l’exercice de ses fonctions au sein des Forces armées canadiennes ou du ministère de la Défense nationale, au Canada ou à l’étranger.

Y a-t-il des questions ou des commentaires à ce sujet?

Le sénateur Pratte : Je tiens simplement à éclaircir un point. Dans la version actuelle du projet de loi, ces employés ne sont pas visés. Est-ce correct ou est-ce ambigu?

La sénatrice McPhedran : Je trouve que c’est ambigu et j’inviterais les fonctionnaires à à intevenir.

Col Strickey : S’il est question de la Déclaration des droits des victimes, ou DDV, dont nous avons parlé hier, ses dispositions s’appliqueraient aux citoyennes et citoyens canadiens, aux personnes présentes au Canada et aux résidents permanents. Je pense que vous m’avez corrigé à ce sujet hier.

Pour ce qui est de toutes les causes au Canada, une fois que la Déclaration des droits des victimes aura force de loi, il s'agira de déterminer si l’affaire relève du système de justice militaire ou du système de justice civile. Selon l’instance saisie de la question, c’est la Charte canadienne des droits des victimes ou la Déclaration des droits des victimes qui s’appliquera.

À l’étranger, je ne peux me prononcer sur toutes les figures de cas, mais si l’affaire est examinée par le système de justice militaire pour des civils canadiens déployés, par exemple, alors la Déclaration des droits des victimes s’appliquerait.

La sénatrice McPhedran : Étant donné que nous avons longuement discuté de la question et que je pense que ce point est assez ambigu, je me suis dit : « Pourquoi ne pas en parler dans les observations pour éclaircir la question? »

La présidente : Sommes-nous d’accord?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Je vais parler de l’observation no 1. On dit que la Déclaration des droits des victimes devrait être interprétée comme s’appliquant non seulement aux membres des Forces armées canadiennes, mais aussi aux contractuels civils qui travaillent dans l’armée. Ai-je bien compris? Disons que je suis un civil qui travaille dans l’armée. Si je subis du harcèlement sexuel ou quelque chose du genre, il faudra que je me tourne vers le système militaire, car je ne pourrai pas aller à l’extérieur. Je ne pourrai pas faire appel à l’IVAC ou au CAVAC, comme le sénateur Boisvenu le mentionnait. Ce n’est pas tout à fait exact?

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Cette observation vise à prendre en compte une situation où un civil ou un entrepreneur est pris dans le système de justice militaire.

La présidente : L’observation no 2?

La sénatrice McPhedran : Oui. Elle se lit comme suit :

Que, lors de l’établissement des règlements nécessaires à la mise en œuvre du projet de loi C-77, il soit dûment tenu compte des recommandations du rapport de ce comité, Le harcèlement et la violence sexuels dans les Forces armées canadiennes.

Des voix : D’accord.

La présidente : Très bien.

Sénatrice Dasko, allez-y.

La sénatrice Dasko : Merci, madame la présidente. La sénatrice Griffin m’a demandé de présenter deux observations. Vous en verrez trois dans le document, mais elle m’a demandé de retirer la troisième, car elle estimait que c’était couvert dans les observations du sénateur Gold dont nous avons parlé plus tôt. Je vais les lire :

Le comité recommande que le gouvernement :

1. envisage d’offrir des conseils juridiques gratuits aux victimes dans le système de justice militaire;

2. charge les Forces armées canadiennes d’examiner comment les droits des victimes sont respectés et de partager assidûment ces conclusions;

Voilà les observations qu’elle m’a demandé de présenter.

La présidente : Êtes-vous d’accord?

Des voix : Oui.

La présidente : Est-il convenu que je fasse rapport de ce projet de loi, avec observations, au Sénat?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

La présidente : Je tiens à remercier les fonctionnaires d’être des nôtres ce soir.

Comme convenu, nous allons commencer à débattre de la motion du sénateur Dagenais.

[Français]

Le sénateur Dagenais : On devait avoir une discussion d’une heure sur ma motion. C’est ce que vous venez de dire?

[Traduction]

La présidente : Sommes-nous prêts à poursuivre?

La sénatrice McPhedran : Je demande une très petite modification. J’ai eu l’occasion de discuter avec le colonel Strickey, et je pense que mes collègues conviendront qu’il a signalé une erreur que j’ai faite dans l’observation no 1. Je n’aurais pas dû utiliser le mot « crime », mais plutôt « infraction d’ordre militaire ». Je vous demanderais d’appuyer ce changement afin que cela reflète fidèlement le système de justice militaire.

Des voix : D’accord.

La sénatrice McPhedran : Merci beaucoup.

La présidente : Nous passons maintenant à la motion.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’aurais un commentaire. Le ministère de la Défense n’a jamais mis à notre disposition le cartable article par article pour nous permettre de travailler sur nos amendements et de bien comprendre le sens. On a eu une présentation relativement sommaire. Normalement, on nous fournit un cartable détaillé. On l’a demandé à maintes reprises, mais on ne l’a jamais reçu.

Je tiens à indiquer au comité que, de notre côté, nous n’avons pas eu le soutien que nous aurions dû recevoir de la part du gouvernement pour bien nous préparer à présenter des amendements. Nous avons travaillé très fort, et je remercie le personnel de mon bureau de son aide. La moindre des politesses aurait été que le gouvernement nous fournisse le maximum d’information pour que nous puissions faire un travail adéquat. Merci.

[Traduction]

La présidente : Merci. C’est noté.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, pour le bien de mes collègues, on vient de m’informer que la sénatrice Griffin, qui a participé aux discussions en début d’après-midi, voudrait participer aux prochaines discussions. Elle devrait être ici dans 25 minutes. Peut-on suspendre la séance pendant 25 minutes en l’attendant? Pourquoi non?

Madame la présidente, j’étais prêt à passer au vote. Mes collègues ont dit non, qu’ils voulaient avoir le temps d’étudier la motion, et ils ont demandé une heure. Ce n’est pas à ma demande qu’on a demandé une heure. La sénatrice Griffin demande d’avoir l’occasion de participer à la discussion parce qu’elle était là au début. Je pense que, par respect pour la sénatrice Griffin, qui est une membre permanente du Comité de la sécurité nationale, nous devrions suspendre la séance. Il ne s’agit pas d’une demande personnelle de ma part. Si on m’avait écouté ce matin, on ne serait pas encore ici ce soir. On dit non sans même avoir pris le temps d’écouter les explications; je pense qu’on devrait donner l’occasion à la sénatrice Griffin d’être présente. Pourquoi ne veut-on pas l’entendre et qu’elle participe à la discussion? Elle est membre permanente du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Le sénateur Gold : Ce que je comprends, c’est que, compte tenu du fait qu’elle préside un autre comité, elle a cherché un remplacement et la sénatrice Dasko était disponible pour la remplacer. Si la sénatrice Griffin veut revenir, elle peut suivre le processus normal pour revenir au comité en remplaçant la sénatrice Dasko. C’est une longue journée, et nous sommes prêts à discuter de votre motion. Je pense qu’il faut aller de l’avant.

Le sénateur Dagenais : On pourrait envoyer un message à la sénatrice Griffin. Parfois, la présidente peut se faire remplacer par le vice-président. Je ne sais pas si quelqu’un pourrait le lui transmettre; au moins, nous devrions tenter de le lui demander.

Je trouve cela un peu déplorable, car on nous a demandé une heure de discussion; il y avait des gens qui étaient ici à la première heure et qui ont participé à la discussion. Je comprends que les joueurs ont changé, mais je pense que, par souci de transparence, on pourrait donner l’occasion à la sénatrice Griffin de participer — et c’est à sa demande, pas à la mienne. Par respect pour la sénatrice, je vous transmets le message; ce n’est pas à ma demande, c’est elle qui demande de participer à la discussion.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : J’aimerais faire remarquer qu’il y a beaucoup de considérations pour bon nombre d’entre nous. Certes, la sénatrice Griffin a un rôle important au sein du comité, et il est tout aussi important d’essayer de répondre à une demande de ce genre, mais en même temps, nous avons respecté les procédures et quelqu’un la remplace.

L’autre point que je tiens à souligner, c’est qu’il y a toutes sortes de considérations, dont une en particulier que j’aimerais que l’on prenne en compte. Mon médecin m’a dit que je ne devrais pas être ici après 20 h 30 ce soir. J’irais jusqu’à dire que je ne devrais sans doute pas être ici du tout.

Je vous demanderais également d’en tenir compte, et j’aimerais qu’on poursuive.

Le sénateur Mercer : Ce qui me préoccupe, si nous refusons, c’est que nous sommes au début d’une très longue période de quatre semaines pendant laquelle les pauses seront très peu nombreuses. D’ici la fin juin, plusieurs collègues invoqueront des raisons de santé, à l’instar de notre collègue, en particulier ceux qui n’ont jamais vécu la période préélectorale.

Le mois de juin est toujours très chargé. Il y aura des pressions pour que les choses soient faites dans un délai donné.

Oui, cela me touche aussi. J’aimerais bien rentrer chez moi, mais je suis heureux de faire mon travail, ici au comité. Il faut être conscients qu’attendre pendant un certain temps qu’une collègue arrive, c’est beaucoup demander. Si elle se présente, tant mieux.

La sénatrice Dasko : Je tiens à dire que la sénatrice Griffin m’a demandé de la remplacer et que je suis ici pour cela. Si elle choisit de revenir et de reprendre sa place, cela ne me posera pas problème, mais je pense que nous devrions continuer.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Nous ne parlons pas d’une heure ou de deux heures. Il y a presque 20 minutes qui se sont écoulées. Je comprends que mes collègues sont fatigués et que nous arrivons tous au moins de juin. Cela fait sept ans que je suis ici et, effectivement, en juin, tout le monde veut partir en vacances et tout le monde a des projets de loi à régler. C’est épouvantable le travail que nous pouvons abattre dans un mois, alors que, les mois précédents... Je préfère me taire.

Si 20 minutes, c’est trop, écoutez...

[Traduction]

La présidente : Si j’ai bien compris, vous voulez qu’on poursuive.

La sénatrice Dasko : Elle a aussi discuté de cette motion avec moi.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Vous n’y étiez pas au début des discussions.

[Traduction]

La présidente : Nous avons le temps. Continuons, voulez-vous?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Madame la présidente, j’ai dit ce que j’avais à dire concernant la motion et, avec raison, le sénateur Pratte a mentionné qu’il y avait une erreur d’orthographe, soit « du » qu’il faudrait remplacer. Effectivement, je suis d’accord avec le sénateur Pratte pour dire qu’il faudrait plutôt lire « la nature de la participation à ce processus ou autre personne ». Je pense que le « du » devrait être remplacé par « ou » autre personne. C’est une erreur de frappe. Il faudrait vérifier s’il n’y a pas une erreur dans la version anglaise. Ce serait plutôt « par une autre personne », si on veut refléter la version anglaise.

Le sénateur Pratte : « De toute autre personne ».

Le sénateur Dagenais : « De toute autre personne »? Je reconnais là l’éditorialiste de La Presse.

Dans la version anglaise, je crois qu’il n’y a pas d’erreur.

Madame la présidente, comme je le mentionnais, mon intention, en présentant cette motion, c’était que, dans le cadre des travaux futurs du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, on invite le vice-amiral Norman, le général Vance et, bien entendu, le ministre de la Défense nationale, et que le comité ait l’autorisation d’étudier — cela fait d’ailleurs partie de nos responsabilités —, pour en faire rapport, les circonstances qui ont amené la GRC à déposer des accusations criminelles, qui ont maintenant été retirées et jugées sans fondement.

Malheureusement, la sénatrice Griffin n’est pas présente, mais elle mentionnait que les accusations n’avaient pas été retirées, mais suspendues. Peut-être que le sénateur Gold, qui est avocat, nous le dira, mais j’ai rarement vu des accusations être suspendues. On porte ou on retire des accusations. Souvent, c’est le directeur des poursuites criminelles et pénales qui détermine si on va retirer les accusations parce qu’il n’y a pas de motif. On ne tient pas une épée de Damoclès au-dessus de la tête d’une personne en lui disant qu’elle peut retourner chez elle même s’il y avait des accusations contre elle et que, pour l’instant, on les suspend. Je pense que les accusations ont été retirées et jugées sans fondement.

On a parlé longtemps de la défense des militaires, afin qu’ils soient bien défendus et bien représentés. Je pense que le numéro deux de l’armée aurait droit à une tribune publique pour expliquer sa situation. Je me dis que cette personne a été malheureusement accusée au tribunal de la place publique, et j’en réfère au sénateur Pratte qui sait que le tribunal public est souvent plus sévère qu’un tribunal judiciaire. Pendant deux ans, le vice-amiral Norman s’est retrouvé suspendu, ce qui a eu des répercussions sur lui, sa femme, sa fille et sa réputation, et je pense qu’on doit lui donner l’occasion de venir s’expliquer. De plus, par souci de transparence, on doit également inviter le général Vance, qui va nous donner sa version des faits, de même que le ministre de la Défense nationale.

Tout cela n’est pas dans le but de faire un procès sur la place publique, mais bien d’apporter des éclaircissements à une situation que je considère comme étant grave. On ne voit pas souvent le numéro deux de l’armée canadienne se faire suspendre et se faire dire de retourner chez lui et qu’on ne veut pas l’entendre même si on le soupçonne. Le plus surprenant, c’est qu’après deux ans, on va retirer les accusations. Je n’irai pas plus loin, parce qu’on pourrait aussi inviter la commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, qui ne pourrait rien nous dire parce que l’enquête est en cour.

Je pense qu’on devrait du moins donner l’occasion au vice‑amiral Norman de venir s’expliquer, par souci de transparence et pour le bien des Canadiens. Les Canadiens sont fiers de leur armée et je pense que lorsqu’un numéro deux est suspendu de cette façon sur la place publique, si on veut le réinstaller dans son poste, on doit lui donner l’occasion de s’expliquer. Ce qui est d’autant plus bizarre, c’est que le général Vance est prêt à le réinstaller dans ses fonctions, alors que le ministre de la Défense prétend avoir nommé quelqu’un pour le remplacer.

Je regarde ce qui s’est produit par le passé. On a vu souvent de hauts dirigeants de sociétés d’État, de hauts fonctionnaires pour lesquels il a fallu attendre deux, trois ou quatre ans avant de les remplacer. Quelle était l’urgence de remplacer le vice-amiral Norman, sachant très bien que c’était une suspension et qu’il pouvait être remis en poste? Par souci de transparence et d’équité, on doit entendre les deux parties. Je sais que mes collègues vont dire ceci : « Le sénateur Dagenais, c’est un conservateur, et il veut en faire un événement politique. » Cependant, ce n’est pas le sénateur Dagenais qui a suspendu le vice-amiral Norman, et ce n’est pas le sénateur Dagenais qui veut le réintégrer.

Évidemment, il n’est pas question non plus d’inviter le premier ministre Trudeau. Par contre, ce qui est un peu dommage, c’est que ceux qui étaient responsables des conséquences de sa suspension ont quitté la Chambre des communes lorsqu’est venu le temps de présenter des excuses. Pour la perception sur la place publique... On sait qu’en politique tout est question de perception. J’entends des commentaires, autant au Québec qu’ailleurs, et les Canadiens se demandent ce qui s’est passé. Je vais louanger les journaux anglais qui ont amplement couvert cet événement. Malheureusement, au Québec, et je ne blâme pas les journaux francophones, car, peut‑être que ça attire moins l’attention des Québécois ou c’est moins vendeur. Cependant, je pense que tout a été écrit dans les journaux, qui ont relaté le fait qu’on ait suspendu le numéro deux de l’armée canadienne et que, après deux ans, on jugeait maintenant qu’il ne devrait plus être suspendu. Ça laisse beaucoup de questions en suspens.

Je comprends mon collègue, le sénateur Mercer, lorsqu’il dit : « Si vous voulez inviter le vice-amiral Norman, vous pourriez inviter aussi M. Harper et Peter MacKay. » Or, on pourrait inviter également M. Brison, qui a été président du Conseil du Trésor et qui, au bout de trois ans, a décidé de retourner passer plus de temps avec sa famille. A-t-il été impliqué de près ou de loin dans toute cette histoire?

Je pense que les Canadiens doivent connaître la vérité. Je pense que le rôle du Sénat... Souvent, mes collègues m’en font part. Le Sénat a un rôle de réflexion et nous sommes redevables aux Canadiens. Nous ne sommes pas des élus, nous sommes ici pour étudier des dossiers, faire des réflexions et illustrer le rôle du Sénat qui est un peu celui du chien de garde de la Chambre des communes.

Cela étant dit, le but de ma motion est d’inviter le vice-amiral Norman, le général Vance et, bien entendu, le ministre de la Défense à se faire entendre, s’ils acceptent notre invitation. On ne peut pas les forcer et ils peuvent refuser, mais il serait de bon aloi, par souci de transparence, de les inviter à venir expliquer ce qui s’est passé. Ce n’est pas un procès public qu’on se propose de faire. Souvent, on mentionne nos voisins des États-Unis et on constate le nombre de fois où des gens de la Maison-Blanche ou le directeur du FBI ont été appelés à témoigner devant les comités sénatoriaux américains. Or, je crois que, même si nous ne sommes pas élus, nous sommes des sénateurs, et, lorsque des événements isolés se produisent qu’on ne voit pas souvent, le rôle du Sénat est d’inviter les personnes concernées à venir au Sénat, où elles auront l’occasion de s’expliquer. De plus, nous nous donnons l’occasion de les questionner. Il ne s’agit pas de faire un procès, mais de procéder un peu comme ça se fait régulièrement aux États-Unis, où il y a eu plusieurs commissions sénatoriales. Je pense que le rôle du Sénat — je n’aime pas l’expression de « chien de garde de la Chambre des communes » —, c’est de suppléer à la Chambre des communes et de l’aider.

C’est pour cette raison que j’ai déposé cette motion. Je n’ai pas été influencé par personne, ça vient de moi. Je vois sourire le sénateur Pratte. Oui, c’est un beau monologue, mais je vais le faire tout de même. Honnêtement, je l’ai suggéré moi-même à mon leader et à mon whip. Lorsque j’ai vu que ça ne passait pas à la Chambre des communes, où les libéraux sont en majorité, j’ai pensé tenter ma chance au sein du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, où on pourrait essayer de faire mieux que nos collègues de la Chambre des communes en donnant aux personnes concernées l’occasion de s’expliquer.

Je crois en avoir assez dit et j’espère vous avoir convaincus. Sinon, j’espère que ce sera matière à réflexion. Je vous remercie de m’avoir écouté. Je vois que je vous mets tous de bonne humeur, je n’ai jamais vu autant de beaux sourires à ce comité. Je crois que vous avez apprécié mon monologue, et sachez que je suis disposé à en faire d’autres, mais sur d’autres sujets.

[Traduction]

La sénatrice McPhedran : Sénateur Dagenais, merci beaucoup de vos explications détaillées sur les raisons qui vous ont amenées à faire cette proposition. J’ai quelques observations et questions qui reflètent mes préoccupations.

Premièrement, je n’ai peut-être pas bien compris, mais je crois que vous avez utilisé le terme « inviter » pour parler de la comparution du vice-amiral Norman, du ministre de la Défense et peut-être d’anciens ministres conservateurs. Toutefois, lorsqu’un comité permanent du Sénat fait une demande en ce sens, ce n’est pas une simple invitation, n’est-ce pas? Il me semble que ce qui fait défaut, dans votre analyse, est la question de savoir s’il convient de compliquer davantage la vie de M. Mark Norman.

Je pense que nous nous devons, à ce moment-ci, de faire preuve d’empathie à l’égard d’une personne qui, pendant plus de deux ans, a fait l’objet d’une surveillance soutenue et d’allégations, en plus d’être convoquée devant des organismes publics. Je ne connais pas cet homme personnellement, mais j’hésite beaucoup à entreprendre un processus qui, en fait, pourrait tomber à un bien mauvais moment pour le vice-amiral Mark Norman.

Ma deuxième observation est la suivante : dans votre description de votre analyse de cette proposition, il m’a semblé que l’enquête de la GRC était un élément crucial qui vous a incité à aller de l’avant. Pourtant, je ne crois pas vous avoir entendu dire, ne serait-ce qu’une seule fois, que la GRC pourrait être invitée à comparaître devant le comité. Même si c’était le cas, je pense que nous connaissons tous assez bien le fonctionnement du système de justice pour savoir qu’il ne sert pas à grand-chose d’essayer de déterminer ce qui s’est passé ou non, quels étaient les motifs sous-jacents, pourquoi certains documents n’ont pas été trouvés ou déposés. Il y a toute une panoplie de questions.

Quant à la décision des procureurs fédéraux de surseoir à l’accusation contre M. Norman, je pense que nous pourrions avoir de nombreuses discussions en prenant le thé, ou autre chose, pour savoir ce qui s’est passé. Il n’en demeure pas moins que la décision est claire. Ce que nous savons, c’est que M. Mark Norman a réintégré les Forces armées canadiennes. La décision revient au général Vance. C’est à lui qu’incombe cette décision.

Sénateur Dagenais, mon instinct me dit que nous devrions laisser la situation évoluer, que nous devrions laisser M. Mark Norman reprendre une vie normale et que nous ne devrions pas lui faire subir de nouvelles pressions à ce moment-ci. J’exprime une opinion très personnelle et, je suppose, de façon un peu instinctive, en tant qu’ancienne avocate ayant représenté des gens et sachant ce qui arrive, souvent, lorsqu’on arrive au terme d’un processus qui a été éprouvant.

Ce sont mes observations. Même si je considère que vous soulevez des points très importants, je ne suis pas du tout convaincue que ce soit l’avenue que doit emprunter le comité à ce moment-ci.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci pour vos propos, sénatrice McPhedran.

Évidemment, si cela peut vous rassurer, j’avais pensé inviter la commissaire de la GRC. Dans ma motion, j’aurais pu donner toute la liste des témoins, mais j’ai précisé les principaux. À moins que je ne me trompe, j’ai écrit : « et tout autre témoin qu’il décide d’entendre ».

Vous êtes une avocate, vous l’avez mentionné. Je connais déjà les réponses de la commissaire de la GRC, elle va me dire que cela fait l’objet d’une enquête et qu’elle ne peut pas nous en dire plus. Si cela peut vous réconforter, j’en avais eu l’intention, parce qu’il est clairement mentionné qu’une enquête avait été amorcée et qu’on a décidé de retirer les accusations. Je ne veux pas mettre en doute les méthodes d’enquête de la GRC, mais j’avais eu en effet l’intention d’inviter la GRC.

En ce qui concerne le vice-amiral Norman, je ne veux pas relativiser les choses, mais quand on décide d’étudier un sujet en particulier, il y a un comité directeur. Ici, il y aura le sénateur Mercer, madame la présidente et moi. On établira avec le greffier une liste de témoins. Par exemple, si on accepte la motion, on invitera les sénateurs à soumettre une liste de témoins et, par la suite, le comité directeur dressera la liste. C’est la façon dont on procède, et je ne vois pas une façon différente de le faire.

Compte tenu du caractère particulier de la situation, je crois qu’il faudrait au moins une motion pour nous permettre d’avancer dans notre travail. On dresse la liste des témoins, le comité directeur tient une réunion, et on fixe les dates des rencontres.

Je comprends les inquiétudes du sénateur Pratte qui trouve que le 20 juin, c’est très court. C’est vrai, mais, vous savez, on n’est pas obligé de finir le 20 juin, on peut continuer à travailler. D’ailleurs, les sénateurs sont payés pendant les mois de juillet et août. Je ne crois pas que les contribuables nous en voudront de travailler. Je le voyais de la même façon, et ça fait partie de nos responsabilités.

Dans tous les comités, c’est comme ça, on prépare la liste des témoins. Écoutez, il y aurait peut-être d’autres militaires qui pourraient être invités qu’on ne connaît pas, ou même d’autres ministres. Je ne suis pas contre le fait qu’on invite l’ancien ministre Peter MacKay, au contraire. Cela permettrait plus de transparence et les gens auraient l’impression que le Sénat fait son travail. Ils pourraient dire que nous prenons le dossier en main, car nous entendons des témoins.

Je ne vous cacherai pas qu’il va peut-être y avoir des journalistes à la porte, mais on ne doit pas tenir compte de ce qui se passe à l’extérieur. Nous avons un travail à faire comme comité, et je pense que, non seulement nous pourrions faire notre travail, mais ça donnerait enfin une valeur au Sénat. Il est rare que j’utilise des expressions anglaises, mais le Sénat est perçu comme le rubber stamp des projets du gouvernement. Pour une fois, nous prendrions le taureau par les cornes et nous ferions notre travail, que nous faisons très bien, d’ailleurs. Nous sommes tous des sénateurs d’expérience qui ont des expériences différentes.

Je pense que cela permettrait au vice-amiral Norman de s’exprimer. Je ne le connais pas personnellement, mais je pense qu’il aurait aimé être rencontré. Il ne faut pas oublier qu’il a été sali sur la place publique et qu’il mérite de s’expliquer sur la place publique.

Vous savez, on m’a déjà accusé sur la place publique, et le député de la Chambre des communes qui l’a fait s’est excusé publiquement. Ce qui se fait sur la place publique mérite d’être expliqué sur la place publique et non en privé.

C’était ma réaction à votre commentaire.

[Traduction]

Le sénateur McInnis : Je suis réticent à me lancer dans le débat, mais quoi qu’il en soit, voici ce que J’en pense.

Il n’y a rien de mal à inviter un haut dirigeant du gouvernement, mais je serais très surpris que le vice-amiral Norman se présente, et ce, pour plusieurs raisons. L’une d’elles, bien sûr, c’est que je m’attends à ce qu’il y ait bientôt — je n’en sais absolument rien, mais je le suppose — une poursuite au civil ou la négociation d’un règlement quelconque. La GRC ne divulguerait certainement pas des renseignements qui, d’après ce que je comprends, serviraient de preuves, parce qu’elle ne connaît pas la tournure que prendra cette affaire pour le moment. Il serait mal avisé que des représentants de la GRC viennent ici et discutent d’éléments de preuve qui pourraient ou non être présentés devant un tribunal civil.

Le comité peut siéger à huis clos plutôt qu’en séance publique. Je conviens évidemment avec le sénateur Dagenais que le public a le droit de savoir et qu’il porte beaucoup d’intérêt à cette affaire, mais je pense que ce serait difficile. Il n’est pas nécessaire d’obliger ces gens à comparaître. Ils pourraient venir au comité, mais je pense qu’ils n’auraient pas la possibilité de parler tout à fait librement.

Je changerais quelques mots. Vous voulez un rapport sur les circonstances. En fait, vous voulez en fait un rapport sur les renseignements ou les preuves ou les faits. Les circonstances, c’est un aspect.

Ces gens ne témoignent pas sous serment. Cependant, certains de ses propos pourraient nuire à d’autres affaires à l’avenir.

Cela dit, il n’y a aucun mal à le demander. On peut toujours inviter ces gens à venir au comité. Normalement, ils acceptent, par respect. Les refus sont rares.

Ma préoccupation est de savoir en quoi ce sera utile. Quels renseignements obtiendrons-nous? Voilà les questions.

Le sénateur Mercer : Question.

La présidente : Nous sommes saisis d’une motion.

La sénatrice Griffin : En fait, j’ai une question avant qu’on mette la question aux voix.

Avant de partir cet après-midi, j’ai proposé de modifier le libellé de la motion pour dire que les accusations ont été suspendues plutôt que retirées. Cela a-t-il été changé?

Des voix : Non.

La sénatrice Griffin : J’aimerais proposer un amendement à la motion. Si je me souviens bien, on lisait : « retirées » et « sans fondement ». L’expression « sans fondement » me dérange, car nous ne pouvons avoir la certitude à cet égard tant que cela n’aura pas fait l’objet de discussions. Je me sentirais plus à l’aise si « sans fondement » n’y figurait pas.

Le terme « retirées » n’est pas correct. Les accusations ont été suspendues. Ce que je voudrais faire, c’est remplacer « retirées » et « sans fondement » par « suspendues ».

Cet amendement favorable vous convient-il, sénateur Dagenais?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Sénatrice Griffin, je comprends votre appréhension. Est-ce qu’on ne pourrait pas plutôt dire ceci : « déposer des accusations criminelles maintenant retirées », en s’arrêtant là et en enlevant les mots « jugées sans fondement »?

Il y a des avocats autour de la table; croyez-vous que des accusations peuvent être suspendues?

Le sénateur Gold : Il n’y a pas l’expression en français.

Le sénateur Dagenais : Je n’ai jamais entendu cela. On ne suspend pas des accusations; il me semble qu’on les retire ou on les maintient.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : J’ai fait une recherche sur Google, parce que je comprenais votre préoccupation, et j’ai trouvé une définition qui pourrait se traduire ainsi :

La suspension des procédures est une décision rendue par le tribunal dans le cadre d’une procédure civile ou pénale. Elle met fin à une procédure judiciaire, comme un procès ou une autre procédure judiciaire. Le tribunal peut ensuite lever la suspension et reprendre les procédures, en fonction des événements qui se sont produits après l’ordonnance de la suspension.

J’avais pris la définition anglaise sur Wikipédia.

La présidente : Il y a certainement de meilleurs avocats que moi ici, mais je crois comprendre que dans le cas d’une suspension, les procédures sont arrêtées, ce qui n’empêche pas qu’elles soient reprises. C’est pour cela qu’on dit qu’elles sont suspendues plutôt que retirées.

Le sénateur McInnis : La suspension a été ordonnée en fonction de preuves. Si de nouvelles preuves étaient présentées, par exemple, s'il comparaissait ici, en séance publique, et non à huis clos... Voilà pourquoi je serais très étonné qu’il se présente. Il pourrait tenir des propos qui pourraient lui être nuisibles.

Je pense que cette affaire n’est pas encore terminée. Nous le savons tous. Je serais très surpris qu’il vienne dire des choses qui pourraient lui nuire plus tard.

Vous pouvez toujours demander.

La sénatrice Griffin : J’en conviens. La décision revient à la personne à qui l’on demande de témoigner au comité.

En outre, s’il acceptait, ne serait-il pas protégé par le privilège parlementaire?

Le sénateur Mercer : Non.

La sénatrice Griffin : Pas au comité?

Le sénateur Mercer : Non.

La sénatrice Griffin : Dans ce cas, s’il vient ici, il sera certainement accompagné de son avocat.

Le sénateur Gold : Plus on en parle, plus je suis mal à l’aise. Ce qui s’est passé est très malheureux, certes, mais le plus simple, ne serait-il pas de poser la question au vice-amiral Norman? C’est la clé. Il serait relativement facile, au cours des prochains jours, de chercher à savoir s’il serait prêt à témoigner et, le cas échéant, dans quelles conditions. Cela nous aiderait énormément à déterminer s’il faut aller de l’avant ou non.

Cela me ramène d’une certaine façon à... Bien que nous ayons accepté de mettre la question aux voix, je ne suis pas très enthousiaste à l’idée d’appuyer cette motion. S’il était convenu de ne rien faire officiellement jusqu’à ce qu’on sache s’il serait prêt à venir, je pense que ce serait l’approche la plus humaine à l’égard du vice-amiral Norman. À défaut de cela, cette motion me rend certainement mal à l’aise, pour être franc.

Si cette motion est adoptée, soit. Si elle était rejetée, cela ne nous empêcherait pas d’explorer d’autres avenues pour voir s’il serait prêt à témoigner et dans quelles circonstances. Pour le moment, étant donné les raisons soulevées par la sénatrice McPhedran et le ton de la motion, cela me met mal à l’aise.

Nous enlèverons les termes « sans fondement », heureusement, parce que nous n’en savons rien. Il y a des preuves, du moins dans le domaine public, qui portent à croire qu’il y a eu certains comportements. Il ne s’agissait peut-être pas de comportements criminels. Et là, c’est sans parler du fait que c’est autant sinon plus une question d’administration de la justice que de défense et de questions militaires. C’était lié à des questions d’approvisionnement. J’hésite.

La sénatrice Griffin : Je voulais des éclaircissements avant que nous passions au vote. Je considère que deux choses doivent être retirées pour que je sois à l’aise avec cela. La première est inexacte, car on indiquait que c’était « sans fondement », ce qui est une affaire de jugement, et que les accusations avaient été suspendues et non retirées. Je préférerais donc que les deux soient supprimés. Le première parce que cela me rend mal à l’aise, et l’autre parce qu’elle est inexacte.

La présidente : Je pense que vous avez déjà proposé un amendement favorable à ce sujet. Je pense que le sénateur Boisvenu allait prendre la parole à ce sujet.

La sénatrice Griffin : Très bien.

La présidente : Est-ce que je me trompe?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Non, je voulais répondre à mon collègue, le sénateur Gold. Je voulais seulement commenter son commentaire.

[Traduction]

La présidente : Sénateur Dagenais, répondez-vous à la sénatrice Griffin?

[Français]

Le sénateur Dagenais : C’est un commentaire complémentaire au commentaire de la sénatrice Griffin.

De toute façon, je ne suis pas contre le fait de remplacer les mots « maintenant retirées et jugées sans fondement » par les mots « maintenant suspendues ».

Le but de la motion est d’inviter le vice-amiral Norman. Je pense que la sénatrice Griffin serait plus à l’aise avec l’expression « à déposer des accusations criminelles qui sont maintenant suspendues ». C’est ce que la sénatrice Griffin présente comme amendement.

Le but de la motion, c’est de donner l’occasion au vice-amiral Norman de s’expliquer. Comme on le fait avec tous les témoins, on envoie une invitation. S’il refuse de se présenter, ce sera sa décision. Ce n’est pas la première fois qu’on invite des témoins et que, pour une raison quelconque, ils disent préférer ne pas venir. On trouve alors d’autres témoins.

Au moins, je me dis que nous aurons fait notre travail. Le travail du Comité de la sécurité nationale consiste à étudier des sujets à caractère militaire, et je pense qu’on a un travail à faire. À partir du moment où on invite des gens et qu’ils décident de ne pas se présenter, cela leur appartient. On n’a jamais envoyé de sommation à comparaître; nous ne sommes pas une cour de justice. Vous le savez, combien de fois a-t-on invité des témoins qui répondent ne pas être disponibles? Ils ne nous disent pas carrément qu’ils ne veulent pas venir, mais ils nous disent ne pas être disponibles.

Au moins, on aura fait notre travail en disant qu’on a voulu éclaircir une situation et étudier cette situation, à titre de Comité de la sécurité nationale. Et si, pour des raisons personnelles, les témoins décidaient de ne pas se présenter, ce serait tout. Nous ne sommes pas une cour de justice, mais au moins nous aurons fait notre travail. Parfois, je lis des articles dans les journaux sur les sénateurs qui décrivent ce que les sénateurs font ou ne font pas. Au moins, les gens pourront dire que les sénateurs du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense ont fait leur travail, et qu’en réponse à nos demandes, les gens ont préféré ne pas se présenter. Libre à eux, personne n’est obligé de venir témoigner.

Je connais bien le général Vance, et il s’est toujours rendu disponible lorsqu’on l’invitait. Peut-être que cette fois-ci il ne viendra pas. C’est à lui de décider. Il appartient aux gens de décider s’ils veulent venir témoigner au comité ou pas, mais au moins, notre travail sera fait.

En passant, s’il y a un vote, je comprends que la sénatrice Dasko ne votera pas, puisque la sénatrice Griffin est de retour parmi nous. Je le précise avec respect pour la sénatrice Dasko.

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense est un comité très intéressant, madame, je peux vous l’assurer.

Le sénateur Boisvenu : J’aimerais ajouter deux commentaires. La première des choses, c’est qu’elles soient fondées ou pas, les accusations ont été abandonnées. Deuxièmement, pour répondre au sénateur Gold, dès le lendemain de l’abandon des accusations, M. Norman a donné une conférence de presse en compagnie de son avocate, et il a dit qu’il avait des choses à dire et qu’il aimerait pouvoir donner sa version des faits. Je n’ai pas de doute qu’il préférerait être invité dans un contexte organisé, qui ne soit pas un cirque. Je crois qu’il est préférable qu’il vienne s’expliquer ici, entre parlementaires et membres des forces armées, plutôt que de donner une version aux médias.

Nous avons l’habitude des interrogatoires, nous avons l’habitude de rencontrer des témoins sur des sujets très variés, et je crois que nous pourrions le faire de façon très professionnelle et écouter la version des faits du vice-amiral. À mon avis, il s’agirait d’une chance unique, pour les Canadiens et les Canadiennes, de connaître la vérité de la part d’une des deux parties, l’autre partie ne voulant pas s’expliquer.

[Traduction]

La présidente : Chers collègues, pour que l’amendement favorable à la motion soit clair, est-ce bien, à la deuxième ligne, « ... accusations criminelles, maintenant suspendues... »?

Merci.

Tous ceux qui sont en faveur de la motion, telle qu’amendée? Fait-on un vote par appel nominal?

Le sénateur Pratte : Désolé, madame la présidente. Je crois comprendre que l’amendement a été accepté. Par conséquent, la question a été réglée. La motion est maintenant modifiée. Nous votons sur la motion telle que modifiée.

La présidente : C’est exact.

Tous ceux qui sont en faveur de la motion, telle que modifiée?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

La présidente : Procédons par appel nominal.

M. Palmer : L'honorable sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Non.

M. Palmer : L'honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénateur Dagenais?

Le sénateur Dagenais : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Non.

M. Palmer : L'honorable sénatrice Griffin?

La sénatrice Griffin : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénateur McInnis?

Le sénateur McInnis : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Palmer : L'honorable sénateur Mercer?

Le sénateur Mercer : Non.

M. Palmer : L'honorable sénateur Ngo?

Le sénateur Ngo : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

M. Palmer : L'honorable sénateur Pratte?

Le sénateur Pratte : Non.

M. Palmer : L'honorable sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Oui.

M. Palmer : Pour : 7; contre : 5.

La présidente : La motion est adoptée.

La séance est levée.

(La séance est levée.)

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