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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule nº 5 - Témoignages du 19 septembre 2016 - avant-midi


EDMONTON, le lundi 19 septembre 2016

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 heures, pour étudier l'élaboration d'une stratégie pour faciliter le transport du pétrole brut vers les raffineries de l'Est du Canada et vers les ports situés sur les côtes Atlantique et Pacifique du Canada.

Le sénateur Michael L. MacDonald (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Bonjour à tous. Je déclare la séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ouverte.

Avant de présenter nos témoins, j'aimerais demander au comité la permission d'enregistrer la séance publique à Edmonton par les médias électroniques. On veut l'enregistrer, donc il nous faut la permission du comité pour que les audiences à Edmonton, à Calgary et à Vancouver soient enregistrées électroniquement par les médias. Êtes-vous d'accord?

Des voix : Oui.

Le vice-président : Merci.

Au nom du comité, je tiens à dire que nous avons le grand plaisir d'être ici à Edmonton. J'aimerais commencer par féliciter les gens de l'Alberta pour la résilience dont ils ont fait preuve durant cette période de difficultés économiques, et particulièrement la population de Fort McMurray qui, avec courage et persévérance, entreprend la reconstruction de sa collectivité.

Ce matin, le comité continue l'étude sur l'élaboration d'une stratégie pour faciliter le transport du pétrole brut vers les raffineries de l'Est du Canada et vers les ports situés sur les côtes Atlantique et Pacifique du Canada. L'étude a commencé en mars dernier dans le but de trouver une meilleure façon de transporter les produits pétroliers canadiens vers les marchés.

Nous sommes heureux d'être dans une région pétrolière pour entendre ce qu'ont à dire les gens près de l'industrie par rapport aux opinions limitées dont on nous fait souvent part à Ottawa.

J'aimerais présenter notre premier groupe de témoins. M. James Merkosky, de la Chambre de commerce d'Edmonton, vice-président du conseil d'administration; Scott McEachern, membre du conseil d'administration; et Adam Sweet, de la Société de développement économique d'Edmonton, conseiller principal au président.

Vous pouvez présenter vos exposés messieurs, et après quoi, les sénateurs poseront des questions.

Scott McEachern, membre du conseil d'administration, Chambre de commerce d'Edmonton : Bonjour à tous. Au nom de la Chambre de commerce d'Edmonton, je vous souhaite la bienvenue dans cette belle ville qu'est Edmonton.

Je m'appelle Scott McEachern. Je siège au conseil d'administration de la Chambre de commerce d'Edmonton et je travaille comme vice-président de l'ingénierie et des projets à Pipelines Enbridge.

Nous sommes ici pour discuter du transport du pétrole brut au Canada, de la situation actuelle et de ce qu'elle sera à l'avenir. Il sera question d'une stratégie nationale de transport, des considérations liées à la mobilisation du public, de la confiance accordée au processus réglementaire et de la recherche d'un juste équilibre entre l'importance de la sécurité énergétique pour la prospérité future du Canada et l'importance de prendre des mesures à l'égard des changements climatiques et des principaux enjeux environnementaux.

J'aimerais aborder quelques-unes de ces questions capitales pour donner le coup d'envoi. Du point de vue de l'industrie, et de mon point de vue en tant que directeur de la Chambre de commerce, je peux vous dire que ces enjeux joueront un rôle central alors que nous collaborons en vue de tracer la voie vers la mise en valeur de sources d'énergie responsable au Canada.

Compte tenu des récents événements survenus à Montréal, j'aimerais parler d'abord du processus d'examen des pipelines. Il est absolument vital pour le Canada d'avoir la confiance du public à l'égard du processus réglementaire, et le Canada a besoin d'un modèle rigoureux, transparent, inclusif et prévisible pour renforcer cette confiance. Les gens doivent sentir que le processus est à la fois équitable et opportun. Cela requiert un effort conjoint de l'industrie, des organismes de réglementation et du gouvernement, et ce, dès maintenant.

Les investisseurs aussi doivent croire au processus. Sans investissements à long terme, il n'y a tout simplement pas d'énergie responsable; pas plus qu'il n'y a de création d'emplois ou de recettes fiscales permanentes.

Le dédoublement et le chevauchement au sein du processus réglementaire causent des retards inutiles et des incertitudes. Il est important d'établir des lignes de temps claires pour restaurer la confiance des investisseurs et, du point de vue de l'industrie, la manière la plus directe d'éviter le dédoublement est d'avoir recours à l'Office national de l'énergie (ONE), puisque c'est l'organisme de réglementation le mieux placé pour évaluer les projets d'infrastructure de compétence fédérale.

Il est également impératif pour le Canada d'avoir accès au marché. Nous allons nous retrouver perdants à grande échelle en raison de notre manque de connectivité aux marchés globaux. L'économie d'Edmonton, l'économie de l'Alberta et l'économie du Canada ont toutes été freinées par le fait d'avoir un seul client pour notre pétrole.

En cette période de ralentissement économique, le besoin d'accéder à de nouveaux marchés est plus grand que jamais. Grâce aux ressources, à la technologie et aux marchés financiers, nous avons, au Canada, un avantage latent sur le plan de l'énergie. Le mot clé dans cet énoncé est « latent ». Il faut l'utiliser, sans quoi nous le perdons.

En juillet, Kenneth Green de l'Institut Fraser a corédigé un rapport intitulé The Costs of Pipeline Obstructionism, dans lequel il a mentionné que, sans pipelines adéquats vers les côtes du Canada, les producteurs pétroliers canadiens ont été forcés de vendre leurs produits aux États-Unis à des prix considérablement réduits, ce qui a engendré des retombées économiques grandement diminuées pour le Canada.

Ce rapport de l'Institut Fraser demandait également au gouvernement d'accélérer l'examen des projets de pipeline. La fenêtre de possibilités ne restera pas ouverte longtemps, et si nous ne réagissons pas, d'autres nous dameront le pion.

Selon mon expérience professionnelle, je peux aussi vous dire que la sécurité et la fiabilité opérationnelle constituent des priorités pour l'industrie pipelinière. Chris Bloomer est le président de l'Association canadienne de pipelines d'énergie, la CEPA. Lorsque la CEPA a publié son rapport de 2016 sur le rendement de l'industrie, en juin, Chris a fait observer que le seul objectif à atteindre était le chiffre zéro, et que la CEPA et ses membres ont une vision commune selon laquelle aucun accident n'est acceptable.

Grâce aux technologies de pointe et à une culture axée sur la promotion incessante de la sécurité, les exploitants de pipelines au Canada mettent l'accent sur la prévention et l'adoption d'une approche à plusieurs volets en matière de sécurité à l'aide de moyens, comme des valves automatiques à commande à distance, des systèmes automatiques de détection de fuites, des inspections régulières à l'aide d'outils de haute technologie semblables aux appareils d'imagerie par résonance magnétique que nous avons dans nos hôpitaux et des activités d'excavation de vérification et d'entretien permettant d'examiner les pipelines afin de relever toute défectuosité et d'effectuer toute réparation requise.

Grâce au programme CEPA Priorité intégrité, les entreprises membres mettent en commun des pratiques exemplaires permettant de renforcer la gestion de la salle de contrôle, les interventions d'urgence et l'entretien des pipelines. En cas d'incident pipelinier, l'Entente d'aide mutuelle en cas d'urgence de la CEPA agit principalement à titre d'entente d'aide mutuelle entre les services d'incendie, tandis que les entreprises membres s'occupent de fournir le personnel, l'équipement et les outils nécessaires pour assurer une intervention rapide et efficace.

La sécurité des plans d'eau est aussi un volet essentiel de l'approche globale du secteur pipelinier en matière de sécurité. Cela englobe l'utilisation du forage directionnel horizontal, qui réduit au minimum les répercussions sur l'environnement et les parties concernées même dans les zones vulnérables. Cela veut dire qu'il faut prêter une attention particulière aux zones qui ont une incidence potentiellement accrue sur le public, notamment les sources d'eau potable et les points de franchissement de cours d'eau. Cela veut également dire qu'il faut collaborer avec le gouvernement, les organismes de réglementation, les organismes environnementaux et les représentants communautaires à toutes les étapes de la planification du projet afin de comprendre les besoins environnementaux uniques et locaux et d'y répondre.

Pour nombre d'entre nous dans l'industrie, notre stratégie de mobilisation des peuples autochtones est fondée sur l'établissement de liens mutuellement profitables avec les collectivités autochtones. Cela comprend les partenariats communautaires, la formation, les possibilités d'emploi, les possibilités économiques et commerciales autochtones et un dialogue significatif fondé sur le respect mutuel et la confiance.

L'industrie appuie pleinement le gouvernement du Canada dans son mandat consistant à mobiliser les collectivités autochtones. Nous pensons que cela est essentiel au succès du processus d'examen de l'ONE également.

À la Chambre de commerce d'Edmonton, nous croyons que la prospérité future de l'Alberta dépend d'une collaboration constructive entre le gouvernement, les Premières Nations et l'industrie, puisqu'elle touche le développement économique de notre province.

La Chambre de commerce d'Edmonton appuie les efforts que déploie le gouvernement pour s'attaquer à la menace bien réelle qu'est le changement climatique. Le secteur énergétique reconnaît également que le changement climatique est un enjeu mondial légitime. Dans certains endroits, l'industrie dirige le mouvement vers un avenir sobre en carbone grâce à des investissements considérables dans les énergies renouvelables et le positionnement de notre gaz naturel, qui est un carburant de transition abondant à faible coût, pour en arriver à un bouquet énergétique sobre en carbone.

Encore une fois, l'industrie appuie le gouvernement, qui s'engage auprès des provinces et de l'industrie à travailler à l'élaboration d'un cadre national de lutte contre les changements climatiques.

J'espère que ces quelques réflexions préliminaires ont mis la table pour une discussion franche, honnête et productive aujourd'hui tandis que nous nous penchons sur le concept du transport national du pétrole brut au Canada.

Je serai heureux de répondre aux questions lorsque nous en serons là.

Adam Sweet, conseiller principal au président, Société de développement économique d'Edmonton : Bonjour, monsieur le président. Monsieur le président, honorables membres du comité, merci de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Je me réjouis de la discussion qui, je l'espère, suivra l'exposé.

Je m'appelle Adam Sweet et, au nom de la Société de développement économique d'Edmonton, ou SDEE pour faire plus court, je suis heureux de vous faire part de nos observations quant à l'élaboration d'une stratégie pour faciliter le transport du pétrole brut vers les raffineries de l'Est du Canada et vers les ports situés sur les côtes Atlantique et Pacifique du Canada.

Comme l'a souligné notre PDG, Brad Ferguson, si Mark Twain était un Albertain, il dirait que la mort de l'industrie du combustible fossile a été grandement exagérée.

Notre province a la chance de posséder une abondance de produits énergétiques uniques. L'extraction et la production de pétrole classique, de pétrole issu des sables bitumineux, de gaz naturel, de charbon et de méthane de houille ont généré des milliards de dollars de richesse, des milliards de dollars en programmes gouvernementaux et en recherche et développement. Nous pourrions avoir accès à des milliers de milliards de dollars et à des milliers de milliards de barils si nous adoptions la bonne approche.

Afin de donner un contexte aux membres de votre comité, monsieur le président, la SDEE est l'organisme de la ville d'Edmonton chargé de cultiver l'énergie, l'innovation et l'investissement nécessaires pour bâtir une économie prospère et résiliente à Edmonton.

Nous dirigeons et gérons Edmonton Tourism, le Shaw Conference Centre, Startup Edmonton, Make Something Edmonton, le Edmonton Research Park, une coentreprise regroupant l'Université de l'Alberta et nous-mêmes appelée TEC Edmonton, une équipe responsable de l'économie urbaine qui se concentre sur la mise en service de locaux à bureaux couvrant une superficie égale à 31 terrains de football et sur 5,5 milliards de dollars en immeubles au centre-ville, ainsi qu'une équipe chargée du commerce et de l'investissements dont les activités sont axées sur l'ouverture de nouveaux marchés pour les innombrables produits de santé, d'agriculture, de TIC et de fabrication de pointe qu'abrite la région métropolitaine d'Edmonton.

Nous sommes un modèle unique au Canada et nous sommes intimement connectés aux facteurs de croissance économique locale. Même s'il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire à l'échelle locale, il y a malheureusement un facteur économique fondamental qui établit le contexte dans lequel nous exerçons nos activités.

Même si l'économie d'Edmonton est, techniquement, l'une des plus diversifiées au pays, en ce qui a trait aux secteurs qui constituent notre PIB, elle vient au deuxième rang des économies les plus fluctuantes en ce qui concerne la résilience économique en raison de la dépendance excessive du secteur aux revenus émanant de l'industrie énergétique et, plus précisément, de l'investissement qui stimule sa croissance économique.

En résumé, la région métropolitaine d'Edmonton est le carrefour de la fabrication et de l'offre de services de l'industrie énergétique et des sables bitumineux de l'Alberta. C'est là que prennent vie les dix milliards de dollars consacrés annuellement aux dépenses en capital.

Pour être clair, sans investissement il n'y a ni création d'emplois ni augmentation des recettes des administrations publiques provinciales ou fédérales. Nous ne devons jamais oublier que les capitaux sont mobiles. Sans l'environnement adéquat pour générer un bon rendement, il n'y a pas lieu de les laisser ici.

En guise de contexte pour les membres de votre comité, monsieur le président, voici certains chiffres courants au sujet des dépenses en immobilisations en Alberta provenant de l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta. Les dépenses en immobilisations ont diminué de 38,4 p. 100, atteignant environ 37,3 milliards de dollars en 2015, soit une baisse de 60,5 milliards de dollars par rapport à 2014. On prévoit une baisse des dépenses en immobilisations d'au moins 30 p. 100 en 2016, pour atteindre 26 milliards de dollars. Cela marque la première fois de l'histoire de l'Alberta où les dépenses en immobilisations ont diminué pour la deuxième année consécutive.

Le taux et l'ampleur du déclin des dépenses d'immobilisations en 2016 s'annoncent pour être considérablement plus importants que le ralentissement en 2009 et, par conséquent, la reprise rapide qui a eu lieu en 2010 est peu probable.

Pire encore, la confiance des investisseurs a fléchi en raison du manque de confiance dans le processus décisionnel qui régit leurs activités : ils ne sont pas convaincus que le système ne changera pas à mi-parcours et que les dépenses accrues généreront les revenus et le rendement du capital investi nécessaires, et ils ne croient pas que le gouvernement fera ce qu'il dit; il y a une marge entre les mots et les actions, et à cet égard, nous sommes tous sur la même longueur d'onde.

Ce n'est pas un concept complexe. Serait-il judicieux d'investir dans une fromagerie du Québec si vous n'étiez pas certain que le gouvernement vous laisserait transporter votre fromage jusqu'au marché, ou d'acheter une section boisée en Colombie-Britannique si vous ne saviez pas si le gouvernement imposerait de nouvelles conditions à votre permis de coupe, ou d'acheter une usine de transformation du poisson en Nouvelle-Écosse d'où vient votre famille si vous pensiez que les boîtes de conserve ne pourraient pas quitter la péninsule?

Nous ne pouvons pas construire de pipelines à la SDEE même si nous souhaiterions pouvoir le faire. Même si la tâche relève du secteur privé, il y a un rôle clé pour nos dirigeants fédéraux. Il n'est pas nécessairement question d'une stratégie. Cela concerne surtout le leadership. Le leadership définit le contexte dans lequel les autres exercent leurs activités, et le travail des dirigeants consiste à répondre à la question de savoir pourquoi.

Si nous en avons besoin, ce qu'a prouvé notre économie, alors il incombe à nos dirigeants fédéraux d'en être les défenseurs. Nous ne pouvons plus simplement refiler la question aux mandarins et aux spécialistes du marketing pour qu'ils y répondent. Nous devons nous assurer que toutes les décisions à l'échelle du pays sont fondées sur l'équité.

Par exemple, si nous décidons quels secteurs de l'industrie doivent tenir compte des émissions de gaz à effet de serre en amont, qu'en est-il des émissions de gaz à effet de serre en amont que suppose le fait de sauver une grande entreprise d'aviation ou une industrie automobile? Pourquoi cela s'applique-t-il toujours uniquement aux audiences de l'Office national de l'énergie?

Nous devons également nous assurer que les dirigeants défendent notre économie ici et à l'étranger. Nous devons redoubler d'efforts de promotion et doubler les ressources à notre ambassade aux États-Unis. Nous reconnaissons que ce sera une bataille et que nous devrons nous armer de courage pour y arriver.

Je n'ai pas parlé des progrès considérables qu'a réalisés l'industrie en améliorant son bilan environnemental ni du travail qu'a effectué le gouvernement provincial en essayant de redorer l'image environnementale des sables bitumineux. Nous savons que, pour être plus concurrentiels, nous devons être plus propres, plus verts, plus abordables, plus rapides, plus sécuritaires, et vous dire tout ce que font nos entrepreneurs prendrait tout mon temps.

Durant notre discussion, je serai heureux d'élaborer plus en détail certains avantages que nous procurerait l'adoption de cette approche. Toutefois, compte tenu du temps qu'il reste, permettez-moi de formuler un dernier commentaire.

Un homme que je considère comme un mentor m'a un jour enseigné que nous sommes beaucoup plus susceptibles de changer notre façon de penser en passant aux actes que de changer notre façon d'agir en nous bornant à réfléchir. Lorsqu'il est question d'exploiter nos ressources naturelles, il ne suffit pas nécessairement de produire une stratégie. Il faut en fait prendre les choses en main et faire ce qui doit être fait. Merci.

Le sénateur Mercer : Merci, messieurs, de vos exposés.

Nous commençons nos audiences ici en Alberta et nous sommes impatients d'entendre ce que les gens ont à dire. Je ne suis pas non plus surpris par la façon dont vous avez entamé notre semaine en Alberta.

Je viens de la Nouvelle-Écosse. Ceux d'entre nous qui viennent de la côte Est ont hâte de parler des pipelines et d'aider à amener les produits de l'Alberta au marché, mais l'une des choses qui m'inquiètent, c'est que nous, et j'entends par là un « nous » global, ne parlons pas du prix du pétrole. Je ne montre personne en particulier du doigt. Nous ne parlons pas de cela dans le contexte de ce que nous ferons du point de vue financier si nous sommes capables de transporter le produit jusqu'à la côte, si nous sommes capables de le transporter sur la côte Pacifique ou la côte Atlantique.

Je pense que nous pouvons exclure la côte du Golfe du Mexique puisque cela touche au cœur même du problème dont je souhaite parler : le prix du pétrole brut du Texas et le prix sur les marchés internationaux.

Je ne pense pas que nous avons expliqué collectivement aux Canadiens ce que signifie la différence de prix entre ce que vous rapporte votre produit si vous le vendez aux Américains et ce que vous pourriez obtenir pour votre produit s'il était vendu sur le marché international.

Nous devons inculquer cette notion aux Canadiens. C'est là toute la différence. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons le faire, mais comme bon nombre de nos autres industries, le secteur pétrolier est pris en otage par le fait que nous n'avons qu'un seul consommateur. Il doit y avoir une diversification dans les nombreuses industries différentes, mais cela est plus facile à comprendre particulièrement lorsqu'il y a une différence entre le prix du pétrole brut du Texas et le prix sur les marchés internationaux.

Peut-être quelqu'un peut-il m'expliquer pourquoi nous ne parlons pas davantage de cela et de l'avantage que nous pourrons tirer lorsque nous serons en mesure d'exporter les produits pétroliers de l'Alberta et de la Saskatchewan par voie maritime soit à partir de la côte Est, soit à partir de la côte Ouest. En ce qui me concerne, je m'intéresse à ce que fait la côte Est, mais si nous le faisons à partir de la côte Ouest, il y a également beaucoup de marchés là-bas. Peut-être quelqu'un peut-il m'éclairer à ce sujet.

M. McEachern : Je vais tenter de reprendre environ là où vous vous êtes arrêté. L'industrie du pétrole et du gaz et certainement l'industrie des pipelines, dont je fais partie, sont des industries canadiennes typiques. Nous sommes humbles. Nous avons parlé de ce que serait l'avantage économique si nous pouvions combler la lacune qui existe entre ce que les côtes pourraient nous apporter à l'avenir et ce qu'est le marché actuel alors que nous n'avons qu'un seul consommateur. Là où nous devons vraiment renforcer le message, c'est en nous assurant que le Canadien moyen peut en tirer un avantage, que ce soit à l'aide de notre système social et du revenu ultime généré par les impôts ou par tout autre moyen de représenter le gain net obtenu en permettant aux organismes et aux entreprises qui investissent dans l'industrie du pétrole et du gaz de pouvoir mettre en commun ces avantages.

La solution que j'entrevois ne consiste pas uniquement à brandir un montant de revenus correspondant à des milliards et des milliards; il faut aussi être en mesure d'exprimer cela de manière à ce que la personne moyenne comprenne l'avantage que procure le fait de combler l'écart entre les marchés.

Le sénateur Mercer : C'est utile, même si nous n'avons pas parlé des chiffres réels, alors que, selon moi, c'est ce que nous devrions inculquer aux Canadiens.

Tandis que nous parlons des pipelines, l'un des problèmes est l'engagement de nos Premières Nations et le risque qu'ils fassent obstacle à l'élaboration de quelque pipeline que ce soit, puisque bon nombre d'entre eux devront traverser des terres que possèdent et contrôlent nos Premières Nations.

J'ai eu l'occasion hier de tomber sur le chef Dwight Dorey, chef national du Congrès des peuples autochtones à l'aéroport de Halifax. Il vient de la Nouvelle-Écosse. Nous avions un peu de temps avant nos vols respectifs, nous avons donc discuté longuement.

L'un des enjeux dont j'ai discuté avec le chef Dorey est la façon dont nous pourrions surmonter ce qui semble être une objection. L'aspect dont j'essayais de lui parler, et il était quelque peu réceptif, même si je ne veux pas parler à sa place, touchait la façon dont nous amenons les jeunes Autochtones à prendre part à l'élaboration et à la construction de pipelines. C'est très important parce que c'est une activité très lucrative. La gestion à long terme du pipeline, une fois qu'il sera fonctionnel, la gestion des pipelines existants et la façon dont l'industrie amène les Autochtones à y prendre part constituent également des avantages considérables pour eux. Le chef Dorey n'a pris aucun engagement, mais il trouvait la discussion intéressante.

Avez-vous amorcé une quelconque réflexion de votre côté ou avez-vous discuté avec les Premières Nations?

M. McEachern : Laissez-moi commencer par, disons, simplement un commentaire du point de vue de la Chambre de commerce d'Edmonton, puis nous passerons au point de vue de l'industrie, que je connais très bien également.

Du point de vue de la Chambre de commerce d'Edmonton, nous avons assurément des partenariats dans le Nord avec divers groupes autochtones du nord de l'Alberta et du nord du Canada également. C'est un effort actif et durable que nous poursuivons.

Dans le cadre des efforts que nous déployons auprès des Autochtones, il importe de reconnaître que nous devons établir une solide relation de confiance. Il faudra du temps pour établir ces relations, mais nous devons prendre cet engagement et nous devons nous assurer qu'il s'agit d'un effort continu.

Du point de vue de l'industrie, je peux vous dire que nous avons pris part à certaines activités dans des domaines clés qui sont importants pour nous afin de procurer cet avantage à long terme aux Premières Nations et de nous assurer que nous créons des possibilités d'emploi et des débouchés commerciaux.

L'une des initiatives que nous avons lancées en fait — et elle a débuté au Manitoba — était la mise en place d'une école qui a offert de la formation aux jeunes Autochtones sur l'utilisation d'équipement. C'était une formation de conducteur. Nous croyons que c'était un point de départ. Les premiers à obtenir leur diplôme pour ce cours l'ont eu en 2014 ou en 2015. Nous pensons que c'est une façon de créer un avenir durable.

Il faut aussi nous assurer de donner une chance aux entreprises autochtones. Il faut nourrir cette relation parce que la plupart de ces organisations n'ont pas ce qu'il faut pour démarrer et construire un pipeline au complet. Elles doivent grandir à partir des forces qu'elles ont et s'appuyer sur leurs forces. C'est un autre aspect qui est important selon moi.

M. Sweet : Le défi vient en partie du fait que, au Canada, l'entité gouvernementale qui réglemente les produits et qui accède aux terres des Premières Nations est le même que celui qui est responsable des traités définissant ces terres. C'est un grand défi que nous voyons pour l'industrie minière dans le Nord. Ce n'est pas évident lorsque les mines que vous tentez de réglementer se trouvent dans des régions où vous essayez en même temps d'en venir à une entente de traité.

Si on examine l'Aboriginal Pipeline Group ou d'autres travaux qui ont été réalisés par exemple, on constate que le travail s'est fait grâce à des modèles de propriété, grâce à des modèles de propriété commune et de collaboration. Il peut valoir la peine de nous pencher sur des questions de ce genre pour réussir à amener les Premières Nations à faire partie de la solution plutôt que de les exclure.

Le sénateur Mercer : Je sais que le président aimera ma dernière question. Lorsqu'il est question du pipeline de l'Est, nous continuons de parler de celui qui se rendrait à Saint John, au Nouveau-Brunswick. Je voudrais parler d'un autre point d'arrivée. J'aimerais que le pipeline passe à côté de Saint John, mais j'ajouterais peut-être un tronçon qui se rendrait à la raffinerie de Saint John, au Nouveau-Brunswick. Je veux qu'on discute de la possibilité que le pipeline aboutisse dans le détroit de Canso, en Nouvelle-Écosse.

Je crois qu'il est important que nous puissions aborder cette question et commencer à en parler sérieusement parce que si le pipeline passe par Saint John, au Nouveau-Brunswick, et que nous bâtissons ce grand terminal juste au large de Port Saint John, nous allons ensuite envoyer ces navires chargés de grandes quantités de produits pétroliers par la baie de Fundy, une zone écologiquement sensible.

La baie de Fundy n'est pas seulement un écosystème écologiquement sensible; elle héberge aussi un petit groupe de baleines. Certaines sont si grosses qu'elles ne peuvent pas s'enlever de la trajectoire des bateaux, même si elles les voient venir.

Je veux parler du détroit de Canso parce que, lorsque nous importons du pétrole au Canada, l'un des principaux terminaux d'où il provient est maintenant celui du détroit de Canso. Nous disposons déjà de l'espace nécessaire pour l'emmagasiner là-bas lorsqu'il arrive et nous le déplaçons vers l'intérieur des terres lorsqu'il arrive du Venezuela ou de l'Arabie saoudite ou peu importe.

Nous avons déjà les terminaux nécessaires pour le faire venir. Il me semble qu'à ces terminaux, il suffit d'inverser le sens du pipeline et nous pourrions envoyer le pétrole par navire à l'étranger. À mon avis nous avons déjà un port sain; c'est l'océan Atlantique. Ce n'est pas une petite zone vulnérable comme la baie de Fundy, qui est écologiquement sensible pour nombre de gens, et qui touche la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick en plus de l'État du Maine. Tandis que si vous allez à Port Hawkesbury ou dans le détroit de Canso, vous faites affaire avec la Nouvelle-Écosse, un point c'est tout.

L'industrie a-t-elle discuté de la possibilité que le pipeline de l'est ne se termine pas par Saint John, mais soit prolongé jusqu'en Nouvelle-Écosse au détroit de Canso?

M. McEachern : Je ne crois pas être en mesure de m'exprimer au nom de l'industrie au sujet de cette question. Certes, je connais beaucoup mieux le pipeline Enbridge qui est le Northern Gateway et qui va vers la côte Ouest. Puisque votre question est très précise, je pense que je vais la laisser à mes collègues qui examinent le projet Énergie Est.

Ce que je dirais à ce sujet, en tant que membre de l'industrie, c'est que nous devons absolument être conscients des aspects localisés propres à l'environnement. Lorsque vous parlez de la baie de Fundy, elle répond certainement aux caractéristiques d'une zone écologiquement sensible. Nous devons être certains de comprendre cela lorsque nous cherchons à placer des installations comme les terminaux et les pipelines eux-mêmes.

M. Sweet : La Société de développement économique d'Edmonton ne peut parler pour l'industrie, mais je tiens à préciser, pour le compte rendu, que j'appuie tout ce qui est en faveur du développement de la Nouvelle-Écosse et de son économie, car j'ai bien peur que ma famille me renie si je ne dis pas cela.

Le sénateur Mercer : Nous y veillerons.

Le sénateur Mitchell : En tant que sénateur représentant l'Alberta, originaire d'Edmonton, j'aimerais simplement souhaiter la bienvenue aux membres du comité, à leurs employés et aux autres personnes qui sont ici avec vous. C'est merveilleux de montrer directement aux gens de l'Alberta, aux Edmontoniens, l'excellent travail que les comités comme le nôtre font au Sénat et pour les Canadiens.

Je vous remercie de vos exposés. Un certain nombre d'enjeux très très pertinents ont été soulevés dans ces exposés. J'aimerais en aborder un en particulier pour commencer : il s'agit de la question à laquelle vous avez fait allusion ou que vous avez directement abordée lors des négociations avec les peuples autochtones.

Je m'intéresse aussi particulièrement à la relation entre les négociations au sujet d'un pipeline et les répercussions sur l'élaboration d'un traité, particulièrement dans un endroit comme la Colombie-Britannique ou le Nord, où les traités n'existent pas nécessairement.

Y a-t-il des relations ou des engagements potentiels qui seraient nécessaires de la part des peuples autochtones concernant les ententes de construction d'un pipeline qui auraient des répercussions, négatives ou autres, sur l'élaboration de traités? Il s'ensuit qu'il y a probablement un peu de cela, selon moi. Il me semble qu'une entreprise ne peut mener ces négociations adéquatement elle-même.

Dans quelle mesure et de quelle manière des entreprises comme Enbridge, par exemple, coordonnent-elles leurs activités en négociant avec les peuples autochtones avec l'intervention directe des gouvernements provinciaux et fédéral au besoin? Comment gérez-vous tout cela?

M. McEachern : Oui, c'est un gros aspect. Je dirais que c'est un domaine dans lequel nous devons apprendre à mieux collaborer. Je pense qu'il y a une lacune actuellement entre le rôle qu'a joué ou peut jouer le gouvernement du Canada et celui joué par l'industrie.

Je ne peux pas me prononcer sur certains sujets tandis que nous parlons du Canada de l'Est, mais en ce qui concerne l'Ouest, je crois que nous agissons à titre d'intermédiaire à l'égard de certains de ces projets de pipeline. Il y a une lacune. Il y a un problème qui existe, et je crois qu'il est probablement lié aux relations issues de traités.

Ce qui est essentiel ici, c'est que le gouvernement du Canada doit intervenir et prendre part à cette relation. Que ce soit l'industrie ou le gouvernement du Canada qui dirige la collaboration... il sera nécessaire d'assurer une harmonisation avec les trois niveaux de l'industrie, le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et les Premières Nations afin que nous puissions nous rapprocher des côtes, que ce soit la côte Est ou la côte Ouest.

M. Sweet : J'ai deux petits commentaires à ajouter. L'industrie a fait un travail colossal en amorçant le dialogue avec les Premières Nations et elle a progressé de façon spectaculaire même au cours des dernières années.

Il y a deux autres scènes où il y a un rôle à jouer. D'abord sur la scène fédérale, où il faut établir le contexte expliquant pourquoi cela est important et comment nous pouvons travailler ensemble. C'est un aspect qui devra être clair et cela devra presque prendre la forme — c'est terrible de dire les choses ainsi — d'une tournée de discours où il faudra rencontrer les gens et expliquer les choses encore et encore.

Il existe en fait un autre rôle à jouer sur la scène municipale. Nous avons Edmonton, qui compte la deuxième population autochtone urbaine en importance, sur le point de devenir la plus grande population autochtone au Canada. Notre maire a commencé à défendre les questions liées à l'établissement de liens et à la mobilisation des collectivités des Premières Nations.

Cela peut se faire dans d'autres municipalités majeures pour aider les gens à comprendre ce que sont les avantages pour ces villes et comment établir des liens entre les Premières Nations qui sont dans la région et ces ressources municipales.

Cela ne touche pas seulement l'industrie. Il y a en fait un besoin que de multiples ordres de gouvernement s'en mêlent.

Le sénateur Mitchell : Cela confirme en quelque sorte mon hypothèse ou ma préoccupation selon laquelle, dans une certaine mesure, les gouvernements ont délégué cette relation et ces négociations aux peuples autochtones qui, on peut le présumer, pourraient appuyer de bonne foi notre industrie, mais tout de même je m'inquiète du fait que l'industrie ne peut pas prendre les engagements qui sont nécessaires pour rassurer les peuples autochtones dans le contexte élargi des droits et du droit, et de l'élaboration d'un traité, par exemple; il y a des engagements que seul le gouvernement fédéral et peut-être les gouvernements provinciaux peuvent réellement prendre avec une forme de certitude. La collaboration est très importante, et c'est quelque chose que le comité devrait se donner la peine d'examiner dans son rapport.

J'ai une autre question, si vous me le permettez. Elle est plutôt technique. Si le pétrole n'est pas transporté par des pipelines, il a été et sera transporté par train. Compte tenu des enjeux dont il est question ici, pouvez-vous nous donner une idée approximative du volume, plus ou moins, de pétrole actuellement transporté par train qui le sera par un pipeline ou plusieurs, advenant un tel scénario? Vous pouvez en choisir un : Kinder Morgan ou Gateway. Ce ne sont pas tous les trains de pétrole qui seront remplacés par des pipelines, mais une bonne partie le sera.

James Merkosky, vice-président du conseil d'administration, Chambre de commerce d'Edmonton : Je pense que personne d'entre nous n'a les chiffres à portée de main, mais selon moi, l'essentiel c'est que les pipelines constituent un moyen sécuritaire et plus efficace de transporter le pétrole.

Deux points soulevés précédemment sous-tendent exactement cela. Notre seul consommateur est actuellement un producteur d'énergie lui-même, à savoir les États-Unis, donc tout ce que nous pouvons faire pour attirer d'autres clients importe.

C'est par train qu'est actuellement transportée la majeure partie du pétrole dans ces mêmes champs de pétrole, ce qui n'est pas aussi sécuritaire que par pipeline. J'imagine que ce qui compte, c'est que, dans notre esprit, les pipelines sont des méthodes plus sécuritaires et plus efficientes pour transporter ce pétrole. C'est ce que nous devons viser.

Le sénateur Black : Merci à vous tous d'être ici présents. Je vous remercie de vos exposés remarquables centrés sur les enjeux, ils étaient fort convaincants.

J'ai deux demandes et une question. Ma première demande est la suivante : monsieur, si le rapport de M. Green que vous avez évoqué a été préparé, pourriez-vous en fournir une copie au comité s'il vous plaît? Cela nous serait grandement utile.

Maintenant, vous avez tous fait un travail remarquable en expliquant quels étaient les défis qui se posent. C'est apprécié, c'est concis, et je crois que c'est une façon très utile pour le comité de commencer.

Ce sur quoi j'aimerais me concentrer avec vous c'est la question suivante : quelles sont les conséquences économiques pour l'Alberta et le Canada de ne pas construire de pipelines? Pouvez-vous être aussi bref dans ces réponses que vous ne l'avez été pour cibler les problèmes?

M. McEachern : Je vais laisser mes collègues parler un peu des chiffres, mais je dirais qu'il y en a deux. D'abord, il y a l'écart de prix qui sera éliminé si nous transportons le pétrole jusqu'aux côtes, ce qui nous permettra d'avoir plus qu'un seul client. Ensuite, et je crois que cela est aussi sinon plus important encore, c'est que nous allons constater que le développement de la province de l'Alberta et son investissement dans nos sables bitumineux et même dans le pétrole classique seront inutiles si nous n'avons pas la possibilité de transporter ce volume de pétrole ni l'espace pour le mettre.

La réponse comporte vraiment deux volets. Il y a l'écart de prix et il y a l'investissement de la province de l'Alberta dans le pétrole.

M. Merkosky : Je crois aussi que notre créneau est très limité pour prendre ces engagements et construire ces pipelines. Nous vivons dans un monde concurrentiel. Il y a beaucoup de producteurs d'énergie. Si nous n'agissons pas bientôt, la possibilité pourrait disparaître à jamais. Plus nous attendons, plus il est probable que cela se passe ainsi.

Un autre aspect concerne le fait que le Canada est actuellement un pays qui importe du pétrole d'autres pays, et ce pétrole est importé au moyen de voies navigables. Nous devons reconnaître, en tant que pays, que la construction de pipelines pour transporter notre pétrole ailleurs au pays est essentielle uniquement du point de vue du Canada.

M. Sweet : Je crains d'être taxé d'alarmiste avec les trois commentaires suivants, mais je pense que les conséquences touchent notre croissance économique actuelle. J'ai parlé des baisses des dépenses d'immobilisations, qui sont notre moteur économique et qui font avancer le développement économique de la cinquième ville en importance au pays.

Le premier élément est le pipeline Trans Mountain de Kinder Morgan qui créerait 678 000 années-personnes et générerait 18,5 milliards de dollars en revenus pour les gouvernements provinciaux et fédéral échelonnés sur les 20 premières années d'activité, dont la plus grande part revient à l'Alberta.

Le deuxième aspect toucherait l'édification du pays, disons-le. L'Alberta a besoin de l'aide du reste du pays actuellement. Un Canadien célèbre a déjà dit : « L'homme oublié n'oublie pas », et je m'inquiète de la capacité des efforts d'édification du pays à l'avenir si le reste du pays n'apporte pas son aide à la province en ce moment.

Le sénateur Black : Lorsque vous parlez d'aide, vous entendez le soutien de la construction des pipelines?

M. Sweet : Oui, c'est exactement ce que je veux dire, monsieur. Cela renforce le troisième élément, soit les possibilités économiques futures qui s'offriront aux prochaines générations.

Même s'il est certainement nécessaire de passer des carburants fossiles à des sources énergétiques plus viables à long terme, il faut le faire avec prudence. Je suis père d'un enfant âgé de deux ans, et on m'a enseigné très jeune que, lorsque je deviendrais parent, je perdrais le droit d'être imprudent. Nous ne pouvons être imprudents en cherchant à orienter notre industrie énergétique vers ces nouveaux secteurs.

Le sénateur Black : Réponses remarquables. En s'inspirant de tout cela, des gens de la province qui me parlent — et comme vous le savez, je suis également sénateur de l'Alberta — me disent qu'en effet, les investissements ont cessé. Les nouveaux investissements en Alberta ont pris fin, et les investissements au sein de nos entreprises en Alberta ont effectivement cessé. Êtes-vous d'accord avec cela?

M. Merkosky : Je travaille dans le monde de la comptabilité, et nous observons un recul considérable en ce qui concerne les investissements en Alberta. Cela s'explique par deux raisons. D'abord, il y a des incertitudes concernant la direction de l'industrie. Et ensuite, en fait, il y a l'accès aux marchés.

La quantité de pétrole que nous produisons en Alberta n'a aucune importance. Si nous n'arrivons pas à l'amener sur les marchés, c'est pratiquement inutile. Je crois que c'est l'une des principales raisons pour lesquelles les investissements prennent du recul actuellement.

M. McEachern : J'ai peut-être un point de vue légèrement différent à cet égard. Je crois que c'est cette semaine ou la semaine prochaine que se tiendra la Conférence internationale sur les pipelines à Calgary. Il y en a une tous les deux ans depuis environ 20 ans.

Une des choses que nous avons observées au fil des ans, je crois, c'est que le monde voit notre environnement réglementaire comme l'un des plus prévisibles et l'un des plus stables au monde. Les gens l'observent et voient la possibilité de l'imiter. Ils voient en fait une possibilité d'utiliser les documents et les discussions avec les gens de l'Office national de l'énergie pour contribuer à l'élaboration de règlements pour des pays au-delà de nos propres frontières.

Actuellement, nous avons perdu cette prévisibilité. L'ONE n'a plus la capacité d'assumer ce rôle de chef de file, et je crois que c'est là un aspect important du rôle que peut jouer le gouvernement du Canada. Cela facilitera la stabilisation et favorisera le retour au Canada des investissements qui touchent l'industrie du pétrole et du gaz.

Le sénateur Black : C'est un point très intéressant. Êtes-vous en train de nous dire que vous croyez que l'incertitude actuelle au sujet du statut de l'ONE a une incidence négative sur les investissements?

M. McEachern : Absolument.

La sénatrice Unger : Encore une fois, merci à tous d'être venus, vos présentations étaient excellentes. Un bon nombre de mes questions ont déjà été commentées ou posées.

J'aimerais tout d'abord parler du dossier de l'Alberta au sujet des peuples autochtones. Ce sont des statistiques qui remontent à 1914. Excusez-moi 2014. Si seulement nous étions en 1914; nous pourrions peut-être construire ce pipeline.

Ce sont des statistiques de l'Association canadienne des producteurs pétroliers qui datent de 2014. De 2011 à 2012, plus de 1 500 consultations ont été tenues entre les Premières Nations et l'industrie au sujet de l'exploitation des oléoducs, des forêts ou d'autres ressources.

Des entreprises autochtones de Wood Buffalo et Lac La Biche travaillant avec des entreprises de sables bitumineux ont généré quelque 1,8 milliard de dollars en travail, en sous-traitance.

Au cours des 14 dernières années, les entreprises autochtones ont touché plus de 8 milliards de dollars en revenus en établissant des relations avec l'industrie des sables bitumineux.

Le Fort McKay Group of Companies, qui participe grandement à l'exploitation des sables bitumineux, génère plus de 150 millions de dollars en revenus annuels. Syncrude ainsi que toutes les industries de sables bitumineux sont d'importants employeurs de membres des Premières Nations.

Je crois que la relation qu'entretient l'Alberta avec les membres des Premières Nations est un modèle digne d'admiration. Je regarde ce qui se passe dans d'autres coins du Canada et je me demande pourquoi ces types de relations de travail n'existent pas dans d'autres provinces.

Avez-vous des commentaires à cet égard? Si vous n'en avez pas, je peux continuer de parler, mais ne vous gênez surtout pas.

M. McEachern : J'aurais peut-être un petit commentaire. Dans la province de l'Alberta, la proximité à elle seule a vraiment favorisé la croissance de ces relations. Nous devons nous pencher très sérieusement sur la question de savoir comment susciter une discussion qui montre que d'autres groupes dans d'autres provinces peuvent jouir de ces mêmes avantages grâce à l'exploitation durable de nos ressources.

Peut-être le gouvernement du Canada pourrait-il aider à ouvrir le dialogue afin que nous puissions montrer aux autres les avantages dont ont profité la province de l'Alberta et les peuples autochtones de la province.

La sénatrice Unger : Lors de rencontres précédentes, deux professeurs de l'Université de Lethbridge ont comparu devant nous. Nous posions des questions, et la conversation tournait autour de la notion de l'adhésion sociale. On l'a décrite comme étant, et je ne suis pas certaine si ce sont ces deux messieurs qui l'ont fait, une chose amorphe. Qui a un droit de regard sur l'adhésion sociale?

Je crois que le concept s'appellera autrement, mais ici, nous avons la meilleure industrie du Canada freinée par les gens. Je dirais que, si j'avais apporté le rapport statistique complet réalisé par Angus Reid, lorsqu'on a demandé à de jeunes gens qui protestaient s'ils étaient au courant des règles de navigation, celles applicables au transport du pétrole vers les côtes, la plupart d'entre eux ne savaient pas vraiment de quoi il s'agissait. Êtes-vous d'accord pour dire que les principales préoccupations sont les déversements et le changement climatique?

En ce qui concerne la sécurité des pipelines, les autres pays voient le Canada comme étant très sécuritaire. Nous prenons notre temps et faisons toutes ces choses. Pourtant, pour ce qui est question de l'environnement et de l'adhésion sociale, je déteste le dire, même si toutes les conditions étaient établies par l'ONE pour chaque entreprise de pipeline, et que tout le monde faisait ce qu'il faut à la perfection, croyez-vous que les Canadiens et les autres gens qui s'opposent à l'idée diraient : d'accord, vous avez raison; allons-y, construisons les pipelines? En fait, je me demande si cela arrivera un jour.

M. Sweet : Lorsque je pense à l'adhésion sociale et à la façon de l'obtenir, j'ai souvent l'impression que la fonction publique, l'ONE, les promoteurs et tout le monde se retrouvent tous devant une boule magique no 8, que nous l'agitons et que nous espérons que tout semble indiquer que la réponse sera oui, vous l'aurez cette adhésion sociale.

Même si vous avez cela, même si vous obtenez cette réponse, cela n'a pas vraiment d'importance. Ce qui compte vraiment, c'est de savoir si les dirigeants établissent le contexte pour vraiment favoriser et susciter cette adhésion sociale.

Ma description n'est pas vraiment bonne, mais c'est un concept amorphe qui tient vraiment au fait de savoir si oui ou non nous sommes sur la même longueur d'onde et si les Canadiens comprennent que c'est la bonne direction à prendre et qu'il y a une entente à ce sujet.

Nous ne pouvons pas tous avoir ce que nous voulons, cela n'est tout simplement pas possible. Il faut plutôt savoir si nous pouvons nous rassembler et avoir une compréhension commune quant à la direction à adopter. À mes yeux, c'est comme ça qu'on devrait parvenir à l'adhésion sociale, et seuls les dirigeants du pays sont capables de rassembler les gens.

M. Merkosky : Je m'exprime au nom de la Chambre en disant que nous avons le statut d'intervenant au sujet d'un certain nombre de projets liés à des pipelines et, à cet égard, nous ne serons jamais complètement d'accord, j'en conviens.

Il nous a semblé qu'une minorité très bruyante avait été entendue davantage que la majorité. En ce qui concerne le projet Trans Mountain, par exemple, qui était un projet de pipeline, lorsqu'il y a eu un sondage à cet égard, il y avait plus de Canadiens favorables que défavorables au projet. Je ne pense pas que l'histoire a été racontée aux Canadiens puisque, comme je l'ai dit, le résultat a été plus ou moins étouffé par la minorité bruyante.

M. McEachern : Je crois que l'adhésion sociale est une définition amorphe parce que nous l'avons laissée devenir une définition amorphe. Je suis d'avis que nous devons éviter l'expression adhésion sociale et nous rappeler que c'est une question d'acceptation du public.

Nous devons aussi nous rappeler que l'Office national de l'énergie, en tant qu'organisme de réglementation des pipelines, a un rôle à jouer concernant la prise de décisions dans l'intérêt supérieur du public. Cela ne veut pas dire de tout le monde. Cela ne signifie pas forcément les gens qui crient haut et fort. On parle de l'intérêt supérieur du public.

Souvenons-nous que le groupe qui nous donne cette « adhésion » ou « adhésion sociale » est l'Office national de l'énergie. Encore une fois, c'est dans l'intérêt supérieur du public; qui est dans l'intérêt du Canada.

La sénatrice Unger : Comme vous le savez, il y a un confinement secondaire autour des réservoirs de stockage de manière à atténuer une fuite s'il y en a une. La loi l'exige déjà dans de nombreux cas. Savez-vous si on l'utilise en ce qui concerne les pipelines?

M. McEachern : Oui, les réservoirs disposent d'un confinement secondaire, comme vous l'avez mentionné. Dans nos réseaux de pipelines, la majorité des pipelines sont des tuyaux à paroi simple, mais il y a certainement des cas où, vu certains problèmes techniques importants, il y a un tuyau secondaire qui entoure le premier.

Nous devons nous pencher sur des technologies qui permettront de favoriser les capacités de détection de fuites. Fait plus important encore, nous devons revenir à la planification, à l'ingénierie et à la conception des pipelines pour assurer la sécurité de la conception, pour élaborer des procédures de fonctionnement et d'entretien faisant en sorte que les pipelines fonctionnent de manière sécuritaire, et promouvoir une culture de la sécurité qui tient compte de tous les processus et les contrôles et qui gère la sécurité de l'exploitation de ces pipelines.

Pour revenir à votre question, y a-t-il des systèmes de confinement secondaire dans les pipelines? La plupart des réseaux de pipelines sont constitués de tuyaux à paroi simple et ne disposent d'aucun confinement secondaire en cas de fuite provenant du tuyau principal.

La sénatrice Unger : Je pense que dans des zones particulièrement sensibles ou controversées, comme celles d'où vient l'approvisionnement en eaux municipales, les gens pourraient peut-être comprendre et dire : c'est une bonne chose. Donc, je présume que c'est pour cette raison que le travail n'a pas été fait à l'échelle du pays.

Pour ce qui est de l'élaboration d'une culture de sécurité, aussitôt que vous avez prononcé ces mots, j'ai tout de suite pensé à toutes ces publicités que j'avais vues, principalement celle d'Exxon et celles venant des États-Unis, qui vantent leurs mesures de sécurité, même au sujet des sables bitumineux. Peut-être que l'industrie doit faire plus. Chose certaine, le gouvernement doit en faire plus et, dans certains cas, en faire moins, notamment en ce qui concerne le moratoire sur la circulation des pétroliers sur la côte Ouest. C'est comme un autre coup de masse.

Comment arrivez-vous à vous tirer d'affaire? Il ne semble pas y avoir de raison logique, du moins que je peux voir, pour justifier ce moratoire. Si vous souhaitez aborder la question, allez-y.

M. Sweet : En ce qui concerne le moratoire, cela témoigne de la question de la confiance dont nous avons beaucoup entendu parler. Nous sommes convaincus qu'une analyse portera sur la méthode la plus efficace pour transporter le produit jusqu'à la côte et, pendant ce temps, tout ce qui transporte le produit de la côte vers les marchés est interdit; cela crée donc une certaine confusion.

Au sujet de l'adhésion sociale, j'ai une idée, ou disons un commentaire, à présenter au comité. Environ 45 p. 100 de l'énergie du Québec provient de sources renouvelables. Il s'agit surtout d'hydroélectricité. Il y a une centrale hydroélectrique sur la rivière des Outaouais, tout juste derrière le Parlement. La rivière des Outaouais est pleine de barrages. Je me demande ce qui se serait passé si on avait essayé d'obtenir l'adhésion sociale pour ces projets dans le contexte actuel.

Prenons par exemple les impacts environnementaux qu'ont entraînés les travaux autour du site C et tout ce qui s'y rattache; il faut se demander si c'était la bonne chose à faire et, dans l'affirmative, les personnes responsables doivent prendre une décision qui permettra la réalisation des travaux.

Voilà donc une des questions auxquelles on doit répondre lorsque l'adhésion sociale peut s'avérer difficile. D'autres ont été en mesure d'exploiter les ressources et de faire des progrès. La situation est-elle pareille en Alberta?

Le vice-président : Avant de passer à la deuxième période de questions, j'aimerais formuler un commentaire à l'intention de M. Sweet et un autre à l'intention de M. McEachern. Vous pourrez peut-être ensuite y réagir.

Monsieur Sweet, dans votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné que — et c'est un point que j'ai soulevé et que je vais continuer de soulever — les mesures arbitraires des émissions de gaz à effet de serre en amont associées au pipeline.

Vous avez également mentionné — et c'est un autre de mes arguments — qu'il est bien connu dans l'industrie que l'un des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre est l'industrie aéronautique, et ce, à tous les niveaux. Si l'industrie aéronautique peut demander des milliards de dollars en financement et se soustraire à toute restriction quant à son exploitation, il serait arbitraire et tendancieux d'appliquer des critères différents à l'industrie du pétrole. À dire vrai, je crois qu'aucun de ces critères ne devrait être imposé aux industries. Il y a d'autres façons d'envisager la situation qui ne supposent pas de mettre directement des bâtons dans les roues des industries.

En ce qui concerne le pipeline, j'aimerais vous adresser quelques mots, monsieur McEachern, à propos de la mentalité associée aux compagnies pipelinières. Ce que je veux dire, c'est que les pipelines ne produisent rien. Ils ne produisent pas de bitume, ils ne font que l'acheminer. C'est tout ce qu'ils font. Une fois que le produit est acheminé du point A au point B, vous en êtes débarrassé. Par exemple, si vous acheminez du bitume jusqu'à la côte Est du Canada, vous en êtes débarrassé une fois qu'il est rendu jusqu'à nous. Ce n'est pas notre cas.

Notre comité est chargé de déterminer la meilleure façon d'acheminer le produit au marché. L'un des problèmes qui pèsent sur nous est le fait que les compagnies pipelinières ne semblent pas se soucier de ce qui arrive au bitume une fois qu'il est rendu à destination.

Il aurait été avisé pour les compagnies de concevoir leurs pipelines en tenant compte du lieu de sortie d'abord, puis de construire le pipeline à reculons jusqu'à la source, au lieu de faire le contraire comme c'est le cas présentement.

Le sénateur Mercer a mentionné Point Tupper. Voilà un autre problème pour la côte Est. Cela n'est pas surprenant, vu les problèmes que cela a causés dans le golfe du Saint-Laurent lorsqu'il a été décidé de ne pas installer de terminal de pipeline dans le fleuve Saint-Laurent. Je crois que le risque a été bien géré à ce chapitre.

Vous avez mentionné avoir participé au projet Northern Gateway. En tant que représentant de la côte Est du Canada, je ne comprenais pas pourquoi on avait même songé à acheminer le bitume à Kitimat quand il était possible de l'envoyer à Prince Rupert. Je ne comprends simplement pas cette façon de penser. Les compagnies pipelinières doivent comprendre que la manipulation de ce produit suppose un processus à deux ou à trois volets.

Nous sommes ici parce que nous voulons que le produit se rende au marché. Nous sommes ici parce que nous y sommes favorables. Nous ne sommes pas l'Office national de l'énergie. Nous ne sommes pas ici pour entendre des témoignages pour ou contre. Nous y sommes favorables. Nous voulons trouver un moyen d'acheminer un produit et de contourner les obstacles.

On peut critiquer l'industrie. On peut critiquer les groupes d'intérêt. Je suis convaincu que le leadership doit émaner du gouvernement fédéral. Cette question relève du gouvernement fédéral.

Si j'ai une critique à adresser au gouvernement précédent, dont je faisais partie, c'est de ne pas avoir été assez proactif à ce chapitre. Quant au nouveau gouvernement, il se traîne les pieds encore plus. Nous avons laissé la situation avec des problèmes; il y a encore des problèmes aujourd'hui. Nous sommes ici aujourd'hui pour trouver une solution.

Le sénateur Mitchell : Nous manquons de temps, et je serais intéressé à entendre votre opinion. L'un des principaux problèmes relativement à la sécurité des pipelines, ce sont les perforations causées par les gens qui creusent sans prendre de précaution, sans demander d'information pour localiser le pipeline.

Je sais que la Common Ground Alliance fait du bon travail, mais il n'y a qu'une seule province au pays qui s'est dotée de lois, l'Ontario. Cela m'a choqué, et à dire vrai, je n'en croyais pas mes oreilles.

Pouvez-vous nous donner une idée de la façon dont l'industrie interagit avec la Common Ground Alliance et utilise le service Appelez avant de creuser et ce genre de mesure de sécurité liée aux pipelines? Peut-être pourriez-vous mettre en perspective la part des dégâts et des fuites de pipeline qui sont causés par des personnes et qui seraient faciles à prévenir si ces personnes ne faisaient qu'appeler?

M. McEachern : Oui, la communication avec les tiers est un point extrêmement important que nous devons examiner. Je siège à un comité de l'Association canadienne de normalisation qui étudie actuellement la façon dont sont établies les exigences réglementaires, et nous avons aussi élaboré d'importantes campagnes de sensibilisation du public. Toute l'industrie reconnaît qu'il s'agit d'un problème.

Nous ne craignons pas qu'une loi soit adoptée à l'échelle de toute la province afin de nous fournir la capacité et les moyens dont nous avons besoin pour communiquer nos messages à tous les Canadiens et ainsi protéger l'infrastructure que nous avons mise en place pour servir le public.

Le sénateur Mitchell : De fait, j'ai travaillé avec la Common Ground Alliance avec Mike Sullivan et d'autres dans le but d'élaborer une loi fédérale à ce sujet qui porterait sur les pipelines interprovinciaux qui passent en territoire domanial, mais vos commentaires sont très encourageants et me laissent penser qu'il serait possible d'y arriver à l'échelon national, province par province. C'est une tâche colossale, mais je crois qu'elle est très importante.

Le sénateur Black : Comme nous le savons tous, le projet Gateway est une pièce importante du casse-tête, en théorie. Il nous serait très utile que vous nous parliez de l'état actuel du projet proposé.

M. McEachern : D'après ce que je sais, la date limite pour interjeter appel est la fin de cette semaine. Jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur l'appel, nous ne pourrons faire que des suppositions à propos du projet Northern Gateway.

Le sénateur Black : Pour que les choses soient claires, donc, nous savons que l'Office national de l'énergie a approuvé le projet Gateway, mais y a imposé environ 300 conditions. Nous savons que le projet a été présenté au Cabinet du Canada pour approbation.

Nous savons qu'un tribunal a tranché et affirmé que l'approbation du gouvernement du Canada est invalide parce qu'il n'y a pas eu de consultation. Maintenant, nous attendons de savoir si le gouvernement du Canada va interjeter appel de cette décision.

M. McEachern : C'est ce que j'ai compris, effectivement.

Le sénateur Black : Donc, actuellement, si le gouvernement du Canada décide de ne pas interjeter appel de la décision, d'après vous, est-ce que le projet Gateway n'est pas approuvé?

M. McEachern : Je ne suis pas avocat de formation, mais c'est ce que je crois comprendre, d'après ce que j'en sais. À ce sujet, je ne sais pas s'il y a d'autres appels ou d'autres tribunes, si nous pouvons présenter l'affaire au gouvernement ou à d'autres tribunaux.

Le sénateur Black : Si, comme le souhaite la sénatrice Unger, la raison l'emporte dans ce cas précis et que le projet Gateway est approuvé, il reste toujours le problème très important que le président a soulevé et dont j'entends tout le temps parler lorsque je me rends sur la côte Ouest du Canada, soit le fait que Kitimat n'est pas un endroit approprié pour le terminal de pipeline. Prince Rupert serait beaucoup mieux. Qu'avez-vous à dire là-dessus?

M. McEachern : Je ne peux rien dire à ce sujet précisément, mais je comprends cette façon de voir les choses, parce que, dans l'industrie, il est surtout question d'acheminer le produit du point de départ au point d'arrivée. Il ne fait aucun doute que je vais présenter cette nouvelle perspective à mon organisation. Croyez-moi, j'y suis favorable.

Le vice-président : Je veux remercier les témoins de leurs exposés.

Accueillons notre prochain témoin, David MacLean, vice-président des communications et des politiques de l'Alberta Enterprise Group.

Vous pouvez commencer votre exposé, monsieur MacLean. Ensuite, les sénateurs auront quelques questions à vous poser.

David MacLean, vice-président des communications et des politiques, Alberta Enterprise Group : Monsieur le président, mesdames et messieurs, c'est un honneur pour moi d'être ici. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de rencontrer d'autres membres de l'industrie et d'échanger avec eux à propos des importantes questions liées à la construction de pipelines au Canada.

Pour ceux qui l'ignorent, l'Alberta Enterprise Group est une association professionnelle sans but lucratif au service de ses membres. Nous représentons plus de 100 entreprises canadiennes qui comptent au total 150 000 Canadiens dans tous les secteurs, de la restauration aux titans du secteur énergétique du Canada, en passant par les ateliers de soudure et les sociétés de transport.

Nos membres nettoient les combinaisons des personnes qui travaillent à l'exploitation des sables bitumineux. Ils construisent des camps de travailleurs et s'occupent du fonctionnement, et ils nourrissent les ouvriers. Ils transportent le carburant et l'équipement nécessaire à l'industrie du forage, ils s'occupent de la comptabilité et fournissent une aide juridique pour les membres du secteur énergétique.

Alberta Enterprise Group représente la totalité de la chaîne d'approvisionnement du secteur énergétique, de l'outil de forage jusqu'à la station-service sur l'autoroute. Nous appuyons l'aménagement d'une infrastructure de pipelines dans tout le Canada, afin de faire parvenir l'énergie canadienne aux marchés mondiaux. Nous croyons qu'il est dans l'intérêt du pays de faire progresser ces projets.

Le projet de l'oléoduc Énergie Est, qui débutera ici même dans la région d'Edmonton, représentait en 2013 environ 12,8 milliards de dollars de dépenses pour six provinces, selon le Conference Board du Canada.

Le Conference Board du Canada estime que le projet va créer 128 000 équivalents temps plein ou années-personnes d'emploi. Au total, il s'agit de 45,7 p. 100 d'emplois directs, et le reste sont des emplois indirects ou induits.

Près de 90 p. 100 des avantages en matière d'emploi reviendront aux provinces où passera le pipeline. En ordre d'importance, il y a d'abord l'Ontario, le Québec, le Nouveau-Brunswick et l'Alberta.

On s'attend à ce que les 12,8 milliards de dollars de dépenses pour les projets Énergie Est et réseau principal Est génèrent 2,9 milliards de dollars en recettes pour les gouvernements provinciaux et fédéral pendant la phase de construction. On estime à 8,2 milliards de dollars les salaires et les traitements et revenus supplémentaires liés au projet, et l'impact financier le plus important sera les 1,4 milliard de dollars au titre de l'impôt sur le revenu.

Si l'on tient pour acquis que la perception des impôts fédéraux sera faite en fonction de la population respective de chaque province, le Conference Board du Canada estime que l'Ontario recevra la plus grande partie des avantages financiers fédéraux et provinciaux, soit 902 millions de dollars, suivi du Québec et du Nouveau-Brunswick avec 319 millions de dollars.

Au cours des 20 premières années, les activités liées au projet vont créer 88 193 équivalents temps plein d'emploi. Ce nombre va atteindre 117 000 équivalents temps plein si le pipeline est exploité à pleine capacité.

L'Ontario, avec 43 p. 100, sera la province la plus avantagée. Tout de même, les autres provinces, en particulier les Prairies, avec 33 p. 100 et le Québec, avec 15 p. 100, vont pouvoir tirer parti d'un grand nombre de nouveaux emplois.

On s'attend à ce que l'exploitation du pipeline génère au moins 4,7 milliards de dollars de recettes gouvernementales au cours des 20 premières années. Les rentrées d'impôt des sociétés comptent pour 50 p. 100 de l'impact financier, suivies de l'impôt sur le revenu des particuliers à hauteur de 24 p. 100. Le reste est attribuable aux impôts indirects et aux cotisations plus importantes aux régimes d'assurance sociale.

Selon le modèle du Conference Board, l'impact combiné sur les recettes fiscales générées sera le plus important en Ontario, à hauteur de 35 p. 100, suivi du Québec.

Si l'on compte le minimum de l'impôt des sociétés et des dividendes générés, le projet Énergie Est permettra au gouvernement de percevoir 31,9 milliards de dollars de plus en recettes. La perception de l'impôt des sociétés à l'échelon fédéral comptera pour 42 p. 100 du total, et pour 28,3 p. 100 à l'échelon provincial.

Le point de départ du pipeline Trans Mountain de la société Kinder Morgan se trouve ici même dans la région de la capitale — comme nous nous plaisons à l'appeler — et les retombées économiques du projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain de la société Kinder Morgan sont tout aussi époustouflantes. Selon le Conference Board, le projet pourrait générer 678 000 années-personnes d'emploi ainsi que 18,5 millions d'avantages financiers pendant les 20 premières années. Il s'agit de 33 900 emplois et de 925 millions de dollars par année au cours de cette période.

L'Alberta serait la province la plus avantagée pour ce qui est des avantages financiers issus du projet, mais la Colombie-Britannique bénéficierait de 24 p. 100 des impacts liés à l'emploi et de 12 p. 100 des avantages financiers.

L'agrandissement de Trans Mountain générerait 8,5 milliards de dividendes supplémentaires ici même au Canada. Ces dividendes contribuent aux régimes de pension et aux fonds de retraite de millions de Canadiens.

On parle d'incroyables avantages économiques potentiels. Même si ces estimations étaient revues à la baisse à cause de la faiblesse des prix actuels, les avantages demeurent impressionnants.

Les avantages que pourront tirer les Canadiens de ces projets, s'ils sont approuvés, éclipsent tout autre projet de relance économique que le gouvernement pourrait tenter. On vante souvent les impacts économiques liés aux dépenses pour l'infrastructure fédérale, mais celles-ci ne sont rien en comparaison. Pas même un sou de l'argent des contribuables ne serait dépensé pour ces projets, et pourtant, aucun d'entre eux n'a la certitude d'être approuvé.

Alberta Enterprise Group comprend que ce sont les Canadiens qui doivent autoriser la construction d'infrastructures énergétiques, et que les institutions doivent être justes et objectives. Nous sommes tenus par la loi de consulter les Premières Nations et de collaborer avec eux à cette fin.

Nous comprenons que ce ne sont pas tous les projets d'exploitation des ressources qui sont acceptables, et que tout projet comprend des risques environnementaux, économiques et sociaux. Ces risques doivent être soupesés en fonction des avantages afin d'éclairer la décision à prendre.

Malgré les risques que supposent les projets de pipeline, nous devons conclure que les avantages l'emportent. Le monde est rempli de conduites, de camions, de trains et de pétroliers qui transportent d'un bout à l'autre du monde de l'énergie sous forme de pétrole brut, de bitume dilué, d'uranium et de charbon. Chaque jour, cette énergie empêche la civilisation humaine de sombrer dans la misère.

Selon l'Agence internationale de l'énergie, près de 1,6 milliard de personnes n'ont toujours pas accès à l'électricité. Des centaines de millions de personnes sont forcées de faire cuire leur nourriture en utilisant du bois, des déchets, du fumier, des feuilles ou du charbon, ce qui peut entraîner de très graves problèmes de santé. En Inde, 82 p. 100 de la population utilise ce genre de combustible pour préparer les repas chaque jour.

Les gens qui n'ont pas un accès facile à de l'électricité ne peuvent que rêver du confort offert dans les pays industrialisés, et ils s'efforcent d'y arriver aussi, un jour. La solution à la pauvreté énergétique sera inévitablement un mélange d'hydrocarbures, d'énergie nucléaire et d'énergie renouvelable. Tous prévoient que les hydrocarbures vont jouer le rôle le plus important.

Pourtant, il y a des Canadiens qui sont réticents à ce que notre pays prenne part à ce marché. Ils ne veulent pas que le Canada fournisse au monde entier l'énergie dont il a besoin. Les rêves et les intérêts de certains Canadiens et de certains politiciens canadiens sont fondamentalement déconnectés de la situation énergétique réelle dans le monde. Nous croyons non seulement que le Canada devrait construire l'infrastructure nécessaire pour fournir au monde entier de l'énergie, mais que le Canada a la responsabilité de le faire. Le Canada est un pays progressiste assujetti à de strictes normes environnementales et muni de dispositions pour assurer la santé et la sécurité des travailleurs. Les travailleurs canadiens sont libres de se syndiquer et de négocier collectivement. Le Canada est une société libre et ouverte qui permet aux voix dissidentes de s'exprimer.

On ne peut pas en dire autant d'un grand nombre de pays dans le monde qui sont disposés à fournir de l'énergie au Canada. L'énergie sera produite, et la demande du marché sera satisfaite, mais le fournisseur ne pourra pas être le Canada si nous ne construisons pas l'infrastructure nécessaire, et ce ne seront pas les contribuables et des investisseurs canadiens qui vont en profiter.

Bien entendu, le gouvernement fédéral joue un rôle important dans la réalisation des projets. Il doit veiller rigoureusement à ce que les organismes de réglementation, comme l'Office national de l'énergie, se montrent impartiaux. Il doit faire en sorte que les calendriers des projets approuvés soient raisonnables et préférablement aussi rapides que possible, tout en s'assurant de laisser autant de temps qu'il le fait pour les consultations et les débats. Les droits des peuples autochtones doivent également être respectés.

Les premiers ministres provinciaux du Canada ont récemment donné leur accord à la stratégie énergétique qui a été proposée par notre premier ministre, ou peut-être celui d'avant. À ce chapitre, il s'agit d'une réussite importante pour les gouvernements de l'Alberta et de la Saskatchewan. Ils ont tous signé un engagement en vue d'élaborer et de renforcer des réseaux de transmission et de transport modernes, fiables, efficients et sécuritaires sur le plan environnemental qui serviront à l'exportation et à des fins intérieures.

On reconnaît donc implicitement que la transmission et le transport d'énergie sont dans l'intérêt national et que tous les Canadiens ont intérêt à ce que le projet aboutisse.

Nous devons, en tant que société, combler le fossé entre les préoccupations écologiques entretenues par bon nombre de Canadiens et la situation énergétique réelle dans le monde. Alberta Enterprise Group essaie de mettre l'accent sur les avantages économiques; c'est notre expertise et notre mandat. Il est clair que les Canadiens méritent un plus haut niveau de discussion autour de l'énergie et du risque. Le monde a besoin d'énergie, et dans un avenir proche, l'énergie proviendra en grande partie des hydrocarbures.

Si ce ne sont pas les Canadiens qui fournissent au monde l'énergie dont il a besoin, ce sera quelqu'un d'autre. Avec ses politiques solides liées à la santé, à la sécurité et à l'environnement, le Canada est parfaitement en mesure de satisfaire à la demande mondiale, ce qui lui permettra de tirer parti des avantages économiques générés.

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner.

Le sénateur Black : Monsieur MacLean, je dois vous dire que vous avez présenté le meilleur exposé que j'ai entendu depuis que j'ai commencé à siéger à des comités sénatoriaux il y a quatre ans. Le sujet était parfaitement cerné, pertinent et objectif, alors je vous en remercie beaucoup. Je n'ai pas beaucoup de questions à vous poser, mis à part quelques détails à préciser, si vous le pouvez, s'il vous plaît.

Vous l'avez mentionné, mais je veux confirmer que l'argent généré par les projets de pipeline pour les Canadiens viendra en totalité du secteur privé. Le gouvernement n'y a rien à voir. Est-ce bien cela?

M. MacLean : Oui, absolument.

Le sénateur Black : Lorsque nous parlons des investissements nécessaires pour redresser la mauvaise posture économique dans laquelle le Canada se trouve actuellement, la meilleure solution serait peut-être de construire des pipelines et de générer de l'argent dans le secteur privé.

M. MacLean : Il n'y a aucun doute.

Le sénateur Black : Merci beaucoup.

J'aimerais poser une question générale à tous les témoins. Selon vous, advenant le rejet des projets de pipeline, qu'adviendra-t-il des économies d'Edmonton, de l'Alberta et du Canada?

M. MacLean : Sans pipeline, on peut dire adieu à des milliards de dollars pour le gouvernement provincial qui aurait dû être générés en très peu de temps.

Certains éléments d'Alberta Enterprise Group n'existent plus. Ils ont disparu, voyez-vous. La situation est loin d'être reluisante. Je n'ai jamais vu notre province dans un pire état que maintenant. Nos membres n'ont rien de bon à dire; la situation est difficile.

L'approbation des projets de pipeline relancerait très facilement l'économie de l'Ouest canadien, de la Saskatchewan et de l'Alberta, et ce, dans une grande mesure. L'un de nos membres a conclu un contrat de 1,8 milliard de dollars pour de la construction dans le projet d'agrandissement de Trans Mountain. Je ne sais pas si l'entreprise a commencé à mettre ses employés à pied, mais je sais qu'elle est fermée actuellement. Sitôt le projet approuvé, elle va pouvoir reprendre ses activités, tout comme le pourront les travailleurs en Colombie-Britannique et en Alberta. Pour stimuler l'économie, les pipelines devancent de loin tout projet d'infrastructure gouvernemental.

Le sénateur Black : Bien entendu, nous sommes tous en faveur d'une réglementation stricte en matière d'environnement. Nous l'avons toujours été. C'est le propre des Canadiens, et des Albertains.

Supposons que, pour ce cas précis, les intérêts environnementaux l'emportent sur les intérêts économiques et que les projets de pipeline sont rejetés, cela aura-t-il une quelconque incidence sur la scène mondiale?

M. MacLean : Pas le moins du monde, surtout vu l'émergence des États-Unis et la mise au point de technologies conçues en partie ici en Alberta sur l'hydrofracturation de ressources non classiques de gaz de schiste. Les États-Unis en sont un producteur principal sur la scène mondiale. Le marché s'est transformé sous nos yeux. Le Canada n'est pas un acteur important et il ne l'a jamais été. Notre importance est minime et nous avons de la chance d'occuper la place que nous avons au sein du marché mondial de l'énergie. Même si le Canada se retirait complètement, cela n'aurait pratiquement aucun impact sur les prix de l'énergie dans le monde.

Le sénateur Mercer : À la première page de votre document, vous dites que le point de départ pour le projet Énergie Est sera ici dans la région d'Edmonton et qu'il représentera 12,8 milliards de dollars de dépenses dans six provinces, selon le Conference Board du Canada. Le Conference Board du Canada ne sait pas compter, parce que si le pipeline se rend jusqu'au point d'arrivée prévu, il parcourra sept provinces, pas six.

Vous avez peut-être entendu les questions que j'ai posées aux premiers témoins ce matin. Il est toujours question de terminer le pipeline à Saint John, au Nouveau-Brunswick. Saint John, au Nouveau-Brunswick, représente un point important dans l'acheminement du produit, à cause de l'énorme raffinerie là-bas, qui fournit le produit à l'Est du Canada. Sur les plans logique et environnemental, le meilleur endroit serait le détroit de Canso, en Nouvelle-Écosse, où il y a déjà un important terminal de pipelines pour le pétrole exporté au Canada depuis l'étranger, comme le Venezuela ou l'Arabie saoudite, entre autres.

Je veux amorcer une discussion sur les endroits plus sécuritaires sur le plan environnemental pour le terminal du pipeline du projet Énergie Est. Je le concède, le terminal se trouvera dans une autre province, mais cela nous permettrait également de réduire les coûts d'expédition, puisque le produit sera beaucoup plus près des marchés. C'est aussi plus sécuritaire pour l'environnement.

En ce qui concerne l'aspect environnemental délicat de la baie de Fundy, il n'y actuellement aucune opposition importante. Toutefois, la société Irving va commencer à construire le terminal de pipeline dans la baie de Fundy dès que le projet sera approuvé. Il ne s'agit pas d'un terminal terrestre : on va le construire dans la baie de Fundy, un endroit délicat sur le plan environnemental. On y trouve les plus hautes marées du monde ainsi que certaines espèces délicates de baleines pendant l'été.

Je ne sais pas pourquoi nous devons — d'autres personnes et moi-même — rappeler continuellement aux gens qu'il existe un meilleur endroit pour le pipeline du projet Énergie Est dans le détroit de Canso, comparativement à Saint John au Nouveau-Brunswick.

M. MacLean : J'ai grandi à Fort McMurray, et je ne connais pas grand-chose à la navigation maritime. Franchement, je ne sais pas grand-chose de la géographie dans votre partie du monde. J'ai vécu ici toute ma vie.

Ce que je sais, c'est que le projet Énergie Est est très populaire au Nouveau-Brunswick, et que cela représente un avantage. Je sais aussi que nous pouvons remplacer une partie de la charge d'alimentation de la société Irving Oil par du bitume dilué. Advenant l'agrandissement de la raffinerie, elle pourrait être un client potentiel pour l'énergie canadienne.

Donc, peu importe, nous devons faire ce que nous avons à faire. J'ai entendu dire qu'il y avait un projet d'aménagement d'un port en eau profonde au Québec. Je ne me souviens plus de la région. J'espère que TransCanada a étudié l'aspect économique et les préoccupations environnementales locales qui devraient être examinées.

Le sénateur Mercer : La construction d'un port en eau profonde au Québec est une autre question délicate sur le plan environnemental, puisque cela toucherait le Saint-Laurent et le golfe du Saint-Laurent, où il y a une nappe d'eau captive partagée entre toutes les provinces canadiennes.

Je comprends que vous disiez venir de Fort McMurray et ne pas connaître grand-chose du sujet, mais je crois que vous devriez en apprendre un peu plus. Tous ceux qui participent au projet doivent savoir que nous avons déjà d'importants d'éléments d'infrastructure en place. Vous n'avez pas à construire de nouveaux terminaux de pipeline pour recevoir le produit. Il y en a déjà. Ce n'est pas comme si le produit était acheminé quotidiennement; l'acheminement de l'étranger est hebdomadaire. Cela ne poserait aucun problème de le détourner afin de pouvoir recevoir le produit de l'Alberta, puisque la prospérité de l'Alberta est essentielle à la future prospérité du Canada.

Nous avons tous intérêt à ce que le projet aboutisse. Mais il est aussi important de vérifier si nous avons la possibilité d'éviter les zones écologiques délicates comme la baie de Fundy pour nous rabattre sur des eaux plus opportunes. Le président serait probablement d'accord avec moi si je suggérais que la Nouvelle-Écosse, plus que tout autre endroit, serait plus appropriée sur le plan environnemental si nous voulons obtenir l'approbation provinciale.

Le vice-président : Nous sommes toujours d'accord sur tout, monsieur le sénateur.

Le sénateur Mercer : Nous sommes toujours d'accord, oui, bien sûr. Monsieur MacLean, je voulais seulement que vous en preniez conscience.

Nous devons également commencer à représenter les occasions qui se présentent en valeur monétaire. Le sénateur Black a soulevé de très bons points relativement au fait que les projets n'engageront aucune dépense du gouvernement. Il s'agit de l'argent du secteur privé. Le projet va aussi créer un tas d'emplois, et il permettra de stimuler l'économie sans que le gouvernement ait à dépenser quoi que ce soit. C'est une bonne nouvelle. Dieu sait que le Trésor en a besoin.

Nous devons également poursuivre la discussion à propos de la différence entre les prix : je veux dire les dépenses associées au projet Énergie Est ou au projet d'agrandissement de Trans Mountain, les dépenses associées à l'acheminement du produit, par rapport aux dépenses actuelles liées à l'expédition du produit vers le sud à notre seul client.

Les Canadiens doivent comprendre la situation et ce que cela sous-entend. Ce n'est pas si compliqué. Les Canadiens peuvent faire le calcul si on leur explique que nous vendons actuellement notre produit pour un tel montant, et que le prix serait différent si nous utilisons l'un des deux pipelines, vers l'une des deux côtes. Dans la majorité des cas, les Canadiens nous demanderont pourquoi nous ne faisons rien.

La population va nous demander d'être respectueux de l'environnement et de prendre des mesures pour assurer la sécurité environnementale. Elle va exiger que nous respections les Autochtones avec qui nous aurons à négocier d'un bout à l'autre du pays.

Les compagnies pétrolières qui font des affaires ici dépensent des milliards de dollars en aval en marketing et en publicité, mais elles ne semblent pas comprendre qu'il faut vendre l'idée aux Canadiens. L'une des façons d'y arriver est de leur faire faire ce calcul simple.

M. MacLean : Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous mettons l'accent sur l'aspect économique, puisque nous sommes un groupe d'affaires. C'est notre expertise.

L'aspect économique du projet Énergie Est repose en entier sur l'écart entre les prix dans l'Ouest du Canada et le prix du WTI à Cushing et le pétrole brut de référence Brent. Cet écart est important, mais il se réduit.

En outre, nous devons agir rapidement afin de tirer parti de notre marché et de nous assurer que tout fonctionne selon nos besoins. L'écart ou la différence par rapport à Cushing se resserre parce que les grosses entreprises américaines sont en train de construire des pipelines, de les inverser et de reconfigurer les réseaux pipeliniers afin de contourner le goulot d'étranglement.

En ce qui concerne ce qu'on appelait l'ancien écart, rien de tel n'existe. Je crois qu'on a appelé cela de nombreuses façons, mais c'est beaucoup moins aujourd'hui. L'écart du Brent existe toujours, et nous devons donc avoir accès aux prix de la mer du Nord. Voilà qui justifie complètement le projet Énergie Est.

La sénatrice Unger : Merci M. MacLean de votre exposé. C'était très intéressant.

Une fois qu'on commence à faire le calcul des avantages, on croirait qu'il est difficile d'y voir un problème. Malgré tout, il y a les États-Unis, qui sont pratiquement autonomes sur le plan énergétique. Depuis bon nombre d'années déjà, des bateaux-citernes de l'étranger, par exemple l'Arabie saoudite, le Moyen-Orient et les États-Unis, nous approvisionnent en pétrole. Comme je l'ai déjà dit, il ne semble y avoir aucun problème relativement aux pipelines; pourtant la majeure partie de l'opposition est fondée sur une idéologie qui s'oppose aux sables bitumineux.

Essentiellement, ce que je veux savoir, c'est comment nous pourrions, nous qui sommes en faveur de la construction de ces pipelines, convaincre ceux qui s'y opposent? Est-ce que c'est même possible de leur présenter un message qui pourrait les accrocher? Toutes les statistiques que vous avez présentées dans votre exposé sont relativement bien connues, et pourtant il y a toujours des gens qui s'opposent aux projets.

M. MacLean : Sénatrice Unger, je dois avouer que la discussion prend parfois une tournure surréaliste. Voyez-vous, mis à part le projet Northern Gateway, aucun projet important n'a été rejeté.

En Alberta, sept ou huit mines d'exploitation des sables bitumineux ont obtenu leur licence et ont commencé l'exploitation. Dernièrement, trois nouvelles mines ont été approuvées, et on n'attend plus que les décisions d'investissement définitives.

Nous savons tous deux que ces mines ou ces projets de DGMV qui ont été approuvés la semaine dernière ne vont pas progresser, vu les conditions actuelles du marché. Malgré tout, le projet Énergie Est et le projet d'agrandissement de Trans Mountain n'ont pas été rejetés.

L'avenir du projet Northern Gateway est incertain. Il semble que le gouvernement fédéral est intervenu, et maintenant il appartient aux tribunaux de démêler la situation. Je suis déçu, mais j'ai également l'impression que nous tous allons un peu trop vite. Nous nous préoccupons tous de l'adhésion sociale. Nous croyons qu'il doit y avoir un consensus dans l'ensemble de la population. Ce n'est pas exactement vrai. Nous n'avons rien mis à l'essai.

Nous craignons tous une montée aux barricades et une révolte citoyenne si un projet comme Énergie Est était approuvé, mais nous n'avons jamais poussé les choses au point de voir si cela se produirait réellement.

Par exemple, nous savons tous qu'il y a une très forte opposition au projet Northern Gateway dans diverses régions de la Colombie-Britannique, en particulier chez les Premières Nations, mais qu'arriverait-il si le projet était autorisé et que la construction commençait? Quelle serait notre position, par rapport à la règle du droit? Le projet va-t-il être bloqué? C'est possible. Est-ce que le projet Énergie Est serait bloqué? Je l'ignore.

Parfois, il me semble que nous précipitons les choses. Le problème auquel est en butte le projet Énergie Est, bien sûr, est le fait qu'on l'a suspendu. Qui sait ce que nous réserve l'avenir? Les années vont s'écouler, comme cela a été le cas pour le projet d'agrandissement de Trans Mountain, qui se résume simplement à agrandir un pipeline qui a déjà un droit de passage.

J'espère que le Cabinet fédéral va prendre en novembre une décision favorable. Je ne suis pas préoccupé par ceux qui n'aiment pas nos projets, parce que, pour l'instant, aucun projet n'a échoué.

La sénatrice Unger : Vous touchez à l'essentiel de ma question. Deux témoins de l'Université de Lethbridge ont formulé des commentaires à propos du projet Énergie Est. L'un des témoins nous a dit que certains groupes des Premières Nations dont les terres seraient touchées par le projet ont dit qu'ils allaient tenter de l'arrêter. L'argent ne les intéressait pas. Ils étaient même prêts à aller jusqu'à l'agitation civile, s'ils en ressentaient le besoin.

L'idée circule, et, honnêtement, je ne sais pas si nous voulons exercer plus de pression pour voir jusqu'où ils sont prêts à aller.

M. MacLean : Vous avez peut-être remarqué que je n'ai pas utilisé le terme « adhésion sociale » dans ma déclaration préliminaire. J'ai utilisé les mots « permission » ou « permission du public ».

Je crois que toute personne raisonnable comprend que nous n'avons pas besoin d'en arriver à un consensus. Il faut qu'un organisme réglementaire indépendant et objectif tranche la question de façon raisonnable après avoir écouté tout le monde. Je ne crois pas avoir vu ce processus vraiment appliqué. Comme je l'ai dit, l'Alberta a réussi maintes fois à faire approuver de nouveaux projets, et c'est seulement maintenant que nous semblons très préoccupés par les pipelines.

Sénateur Mitchell : J'aimerais aborder l'aspect des impacts économiques un peu plus en profondeur, puisque le sénateur Black a déjà soulevé quelques points.

J'ai été très intéressé par votre argument selon lequel l'importance des impacts économiques sera en grande partie fonction de la taille des provinces que va traverser le pipeline. Il semble évident que l'Alberta sera avantagée, vu qu'une grande partie de la construction aura lieu ici.

Vous avez dit qu'il y aurait l'équivalent temps plein de 128 000 années-personnes, et en qu'environ 30 p. 100 du total serait au Québec. Ai-je donc raison de dire qu'il y aurait l'équivalent temps plein de 40 000 années-personnes au Québec pendant la période où aura lieu la construction du pipeline?

M. MacLean : C'est ce qu'affirme le Conference Board du Canada pour l'étape de la construction.

Le sénateur Mitchell : Et combien de temps cela prendra-t-il?

M. MacLean : Je crois que cela représente de trois à quatre ans.

Le sénateur Mitchell : Ensuite, il y a les 8,2 milliards de dollars en salaires, en traitements et en revenus supplémentaires du travail qui découlerait du projet. La suite logique serait que 30 p. 100 de ces 8,2 milliards de dollars iront aux 40 000 emplois au Québec. Si je sais bien compter, cela représente 60 000 $ par emploi.

M. MacLean : Cela me semble correct.

Le sénateur Mitchell : Cela me semble correspondre, cela me semble fonctionner. Au prochain paragraphe, vous mentionnez que le Québec touchera 749 millions de dollars. Pouvez-vous préciser? Je crois que vous avez dit qu'il s'agissait du total de l'avantage financier qui reviendrait à la province. Est-ce qu'on parle des recettes, de l'investissement ou de l'impôt? Quelle est votre méthode de calcul?

M. MacLean : Il s'agit du produit de l'impôt sur les sociétés, de la rentrée d'impôt sur le revenu des particuliers et de l'impôt foncier généré par le projet.

Le sénateur Mitchell : S'agit-il du total annuel ou du grand total?

M. MacLean : Le grand total.

Le sénateur Mitchell : Cela est généré uniquement par ce projet?

M. MacLean : Seulement pour l'étape de construction. La majeure partie des avantages économiques pour le Québec seront pendant la construction. Si je ne me trompe pas à propos du projet Énergie Est, le pipeline au Québec sera complètement nouveau, alors tous les avantages économiques seront liés à la construction.

Le sénateur Mitchell : C'est une chose de parler d'emplois. Vos chiffres sont impressionnants. Mais qu'est-ce que ces emplois supposent vraiment, par exemple?

Il y a une autre approche qui est parfois mentionnée, mais le sujet n'a pas été abordé jusqu'ici ce matin : selon vous, quel serait précisément l'impact sur le PIB d'un pipeline ouest-est construit par Kinder Morgan ou d'un pipeline de l'Ouest? Pouvez-vous nous en parler, autant pour ce qui est de la construction que de l'exploitation?

M. MacLean : Oui, mais je n'ai pas l'information avec moi. Le Conference Board a estimé l'impact sur le PIB. Il l'a mesuré, mais je ne me rappelle pas le nombre exact.

Le sénateur Mitchell : Nous pourrons nous en informer. Il est clair que nous avons besoin d'un pipeline. Que nous avons besoin de deux pipelines. Nous devons exploiter nos ressources afin de maintenir notre richesse économique, et je crois que c'est un argument très fort que les gens commencent à accepter. L'industrie reconnaît qu'il y a d'autres sources d'énergie et que nous allons devoir élaborer de nouvelles technologies dans l'avenir si nous voulons demeurer compétitifs, si nous voulons préserver notre économie.

Dans votre groupe professionnel, y a-t-il des entreprises qui investissent dans les énergies de remplacement, qui les exploitent ou qui cherchent à les exploiter? D'après vous, comment cela s'inscrit-il dans l'avenir des économies de l'Alberta et du Canada? Croyez-vous que cela légitimise, dans la conscience populaire, les pipelines?

M. MacLean : Comme vous le savez, on va imposer en janvier 2017 une tarification pour les émissions de carbone. Quelle que soit votre opinion personnelle à ce sujet, nous croyons que le modèle de l'Alberta est le meilleur au pays, et peut-être dans le monde, parce qu'il permet au marché de décider par lui-même comment atténuer ou réduire la taxe liée aux changements climatiques qu'il va devoir payer. On crée ainsi un marché pour l'énergie renouvelable.

Je peux déjà donner en exemple deux ou trois entreprises, une très petite minorité, qui ont déjà commencé à se tourner vers l'énergie renouvelable afin de satisfaire à la demande. L'Université de l'Alberta contribue grandement à la force de l'économie de la province. Elle possède une excellente masse critique quant à l'expérience touchant la technique, les sciences et la recherche. Elle dispose également des capacités d'ingénierie avancées nécessaires au secteur pétrolier et gazier, ce qui fait qu'elle est tout à fait apte à fournir de nouvelles solutions technologiques pour réduire les émissions de carbone.

Le changement est en train de se produire. Il a commencé avant même l'arrivée de la taxe sur le carbone, parce que tout le monde voulait réduire son utilisation et sa consommation de pétrole. Aujourd'hui, la tendance se fait ressentir encore plus fortement dans l'économie de l'Alberta.

Le sénateur Mitchell : Je trouve très intéressant le fait que l'une des vraies synergies que l'on observe en ingénierie se passe entre la géothermie et le forage. L'Alberta est très forte en ce qui concerne le forage.

M. MacLean : Nous n'avons pas d'égal pour ce qui est du forage, et nous avons certains des meilleurs ingénieurs au monde. Nous sommes parfaitement en mesure d'affronter la situation.

Notre organisation se charge d'héberger en Alberta des délégations d'entreprises. La plupart des entreprises de technologie spécialisées dans les énergies renouvelables viennent du Québec. J'aimerais que cela change. J'aimerais voir de nouvelles technologies pour l'énergie renouvelable venir de l'Alberta et être utilisées par le reste du Canada.

Le vice-président : Monsieur MacLean, j'ai quelques questions et commentaires sur votre exposé.

Je veux aborder le sujet des avantages liés à l'emploi que vous avez mentionnés. L'Ontario touchera la plus grande part de ces avantages liés à l'emploi, à hauteur de 97 p. 100. Vous avez parlé des pipelines qui allaient passer par ces provinces, mais le problème ne se résume pas seulement aux pipelines. Le problème, c'est le produit qui passe dans les pipelines. Comme je l'ai dit à l'un de nos témoins précédents, l'un des problèmes liés aux compagnies pétrolières, c'est qu'elles ne semblent pas comprendre l'aspect problématique de ce que leurs pipelines transportent.

Par exemple, de nos jours, en Nouvelle-Écosse, il y a environ 500 000 barils de pétrole qui traversent les eaux chaque jour pour se rendre dans les raffineries du Nouveau-Brunswick et du Québec. Nous n'en tirons aucun avantage, pas un seul. À présent, il est question de doubler ce volume, 500 000 barils de plus qui passeraient par la baie de Fundy, dans nos eaux, sans qu'il y ait d'avantages pour nous.

Il y a des millions de barils de pétrole qui passent dans nos eaux chaque jour, et la Nouvelle-Écosse n'en tire rien. Nous ne sommes aucunement récompensés pour le risque que nous prenons. Je crois que les compagnies pipelinières et les exploitants de sables bitumineux doivent comprendre qu'il s'agit d'un élément problématique de leur projet.

J'appuie le projet, comme tout le monde ici présent. Nous voulons que tous les Canadiens puissent en tirer des avantages, mais la Nouvelle-Écosse se retrouve coincée au milieu de l'Atlantique Nord avec des ports de haute mer, sans avoir droit à aucun des avantages générés par ces projets. Ce sera aussi un problème pour les gens de la côte Est. Je vais m'assurer que ce soit un problème.

L'industrie ici est environnée de terre. Nous comprenons cela, mais il y a une grosse différence entre le bitume dans l'eau et le bitume dans un pipeline. Je ne suis pas préoccupé par les pipelines. Ce qui me préoccupe, c'est la manipulation appropriée du bitume qui passe dans l'eau et la gestion du risque.

Je veux que vos collègues et vous compreniez bien ce que je veux dire. Nous sommes ici pour trouver une solution à nos problèmes, et je crois que la gestion du risque en est un élément très important.

M. MacLean : Je suis saisi par ce que vous avez dit à propos du fait que la Nouvelle-Écosse n'en tire aucun avantage. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, il y a des avantages énormes pour la confédération. La Nouvelle-Écosse n'en est pas exclue, elle touche également les avantages liés au projet Énergie Est et même au projet d'agrandissement de Trans Mountain. N'oubliez pas que la Nouvelle-Écosse va aussi profiter des avantages générés par le projet d'agrandissement de Trans Mountain.

Le vice-président : Ce que vous dites, ce sont des généralités. Je veux parler des détails spécifiques.

M. MacLean : D'accord, mais regardez tout le chemin que nous allons devoir parcourir. Il y a d'abord les avantages spécifiques pour les Premières Nations. Nous avons cédé du terrain, et maintenant ils sont partenaires actionnaires. Selon moi, c'est une merveilleuse initiative.

Cédons un peu plus de terrain et permettons au gouvernement de la Colombie-Britannique de tirer parti du projet d'agrandissement de Trans Mountain. Nous pourrions aussi accorder 2 p. 100 de plus au gouvernement de la Nouvelle-Écosse afin qu'il tire aussi parti du projet Énergie Est, puisque les bateaux-citernes passent par cette province.

Au bout du compte, on se retrouve avec un projet sans fondement économique. Sur le plan financier, le projet n'est pas sain.

Bien sûr, assurons-nous que tout le monde peut tirer parti des avantages générés par les pipelines. Si on s'aventure sur cette voie, il sera impossible de construire quelque chose de durable dans le pays, parce que tout le monde va demander sa part du gâteau, et le gâteau a une limite. Selon moi, les Premières Nations, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nunavut bénéficieront tous du projet Énergie Est.

Je comprends votre point de vue, mais je ne vois pas ce que nous pouvons faire avec la confédération au complet.

Le vice-président : Non, je ne crois pas que vous compreniez mon point de vue, monsieur MacLean. Tout ce que je veux, c'est un avantage équitable pour la gestion du risque.

M. MacLean : D'accord.

Le vice-président : Ce n'est pas un risque qui nous dérange. Ce que nous voulons, c'est participer au projet dans une certaine mesure.

Il y a un gazoduc de l'île de Sable qui passe par chez nous pour se rendre au Nouveau-Brunswick. Ce gazoduc sera vide pendant 12 ou 16 mois. Il suffit de l'inverser comme on le fait partout ailleurs. Le gazoduc se rend à Point Tupper.

Nous préférerions assumer tout le risque lié à un port en haute mer que celui lié à un bras de mer intérieur où il y a des baleines, des baleines à bosse et les industries du pétoncle, du hareng et du saumon ainsi que les marées les plus hautes, les plus basses et les plus fortes du monde et qui est, de surcroît, juste à côté d'une frontière internationale.

Il y a des gens qui disent : « Oui, mais il s'agit de navires à double coque. » C'est le cas, mais ça ne fait aucune différence s'ils ont deux coques ou non s'ils chavirent. J'ai grandi près des eaux. Je viens d'une famille qui navigue depuis des décennies, voire des siècles. Ce qui circule sur les eaux est différent du produit qui passe par les pipelines.

M. MacLean : Est-ce qu'il y a 500 navires qui passent dans la baie de Fundy annuellement, ou s'agit-il de 500 pétroliers?

Le vice-président : Non, non, il y en a beaucoup plus. Il y a 500 000 barils de pétrole qui passent chaque jour par les eaux de la Nouvelle-Écosse pour se rendre aux raffineries du Québec et du Nouveau-Brunswick.

M. MacLean : Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse est-il présentement indemnisé pour cela?

Le vice-président : Écoutez, nous sommes membres de la confédération. Nous ne nous attendons pas à être indemnisés. Nous trouvons cependant étrange que les navires ne sont pas autorisés à circuler dans le nord de la Colombie-Britannique alors qu'ils peuvent naviguer sur nos eaux.

M. MacLean : Je trouve cela étrange, moi aussi.

Le vice-président : Selon moi, ce projet vise aussi à renforcer la nation. Il y a une espèce de déconnexion lorsqu'il est question d'acheminer ce produit aux marchés. Il y en a qui pensent qu'il n'y a plus rien à craindre une fois qu'il est dans le pipeline. Je sais que c'est votre cas, mais ce n'est pas le nôtre.

La sénatrice Unger : J'ai un commentaire à faire, au sujet de la Nouvelle-Écosse qui ne retire aucun avantage. D'abord, qui devrait essayer de résoudre ce problème d'absence de pipeline? Je crois que c'est le gouvernement fédéral qui devrait vraiment être sensibilisé à ce sujet. Je n'avais jamais envisagé la question sous cet angle, que le pétrole qui passe par la Nouvelle-Écosse n'apporte aucun avantage à ses habitants.

Monsieur MacLean a mentionné les premiers ministres provinciaux. Ils ont des réunions du Conseil de la fédération, et pourtant, comme vous l'avez dit, l'Alberta et la Saskatchewan se sont entendues, disons, sur l'aspect du renforcement de la nation.

La question se résume ainsi : comment pouvons-nous obtenir une réaction du gouvernement fédéral et des premiers ministres provinciaux afin de régler ce problème?

Le vice-président : Si vous me permettez d'ajouter mon grain de sel à ce sujet, le gouvernement fédéral a l'autorité d'approuver le projet de pipeline. La Constitution lui donne ce pouvoir. Ce n'est pas matière à débat. Ce qui importe ici, c'est la question politique et le renforcement de la nation. Il importe d'adopter l'approche qui est dans le meilleur intérêt du pays d'abord.

Quand j'ai dit que la Nouvelle-Écosse n'en tire aucun avantage, je ne dis pas qu'il n'y a aucun avantage en général. Bien sûr, il y en a. Mais il y a aussi un risque. Si nous devons gérer beaucoup de risques, si nous devons composer avec beaucoup de risques, nous devrions pouvoir faire valoir notre opinion sur la façon appropriée de le gérer, et si nous pouvons en bénéficier, c'est encore mieux.

M. MacLean : Je trouve rafraîchissant d'entendre qu'il y a des collectivités en Nouvelle-Écosse qui veulent recevoir l'énergie que nous produisons.

Le vice-président : Bien sûr que c'est le cas.

M. MacLean : Ce n'est pas quelque chose que l'on entend tous les jours, et cela me réconforte.

Le vice-président : J'imagine que cela veut dire que les mauvaises personnes se font entendre, ou alors que les bonnes personnes demeurent muettes. Quoi qu'il en soit, je crois que la question prendra de l'importance au cours des prochains mois. Monsieur MacLean, je vous remercie beaucoup de votre exposé.

Chers collègues, notre dernier témoin de la journée nous vient de Ressources naturelles Canada. Il s'agit de Heather Dettman, chercheuse scientifique chez CanmetÉNERGIE.

Madame Dettman, je vais vous laisser nous présenter votre exposé, puis nous aurons des questions à vous poser.

Heather D. Dettman, chercheuse scientifique, CanmetÉNERGIE, Ressources naturelles Canada : Merci beaucoup. Je suis honorée d'avoir l'occasion de m'adresser à vous tous, mais je dois avouer qu'il est toujours difficile de résumer de façon générale tout le contenu technique de l'exposé en 10 minutes. Je vais relever le défi.

Si vous consultez le document que je vous ai fourni, vous verrez que l'exposé que j'ai préparé est plutôt général. J'y ai intégré toutes sortes de renseignements supplémentaires pour vous aider à comprendre les termes techniques que l'on peut entendre dans l'industrie ainsi que des définitions, quelques notions de base sur le pétrole, la nature des hydrocarbures ainsi que d'autres sujets de discussion.

Je vais utiliser mon temps pour vous aider à comprendre ce dont il est question ici. Il n'y a que quelques diapositives qui traitent vraiment de l'exposé que j'ai présenté en juin et qui m'a valu toute cette attention. Essentiellement, je vais vous présenter les conclusions.

D'emblée, je dois dire que ce dont je vais parler n'est pas révolutionnaire en ce qui concerne la pollution pétrolière. Le milieu sait déjà tout ce dont il est question, et il en a même été témoin à cause de véritables déversements de pétrole. Toutefois, ce qui est probablement nouveau, c'est le fait que nous avons mis au point des installations où nous pouvons simuler dans des réservoirs prévus à cet effet ce qui arrive dans la nature. Voilà quelque chose de nouveau, en quelque sorte. C'est un nouvel effort.

Si vous regardez la première diapositive, le pétrole brut produit au Canada est transporté par pipeline, ou par chemin de fer, par voie terrestre ou par pétrolier. Le bitume est une substance épaisse extraite des sables bitumineux. Le bitume, puisqu'il est plus épais et plus lourd que le pétrole brut classique, a besoin d'un solvant plus léger ou d'huile spéciale afin de pouvoir être transporté par pipeline. C'est ainsi qu'on obtient un produit appelé du bitume dilué.

Il existe différents types de bitume dilué, selon le produit utilisé comme diluant. J'ai même préparé une explication détaillée des différents diluants plus loin dans mes diapos.

Le pétrole brut transporté d'un bout à l'autre du Canada comprend le pétrole brut classique, dans lequel aucun diluant n'est ajouté ni nécessaire, le bitume dilué et le bitume brut, qui, comme certaines personnes le savent, peut être transporté par voie ferroviaire. Il s'agit de bitume ou de pétrole brut pour lesquels on utilise moins de diluant qu'il serait nécessaire pour un pipeline. Il y a aussi d'autres renseignements dans le bas que je ne vais pas aborder. Votre analyste pourra y jeter un œil et vous en informer.

En ce qui concerne les différents diluants, le point important est qu'il y a essentiellement trois différents types de diluants utilisés. Le premier qui vient à l'esprit des gens, pour le bitume dilué, est le condensat de gaz naturel. Nous allons aborder un peu de chimie. Ce sont des molécules relativement petites; quand j'utilise les termes C4 à C8, je parle molécules qui ont de quatre à huit atomes de carbone.

Leur principale caractéristique est qu'elles s'évaporent rapidement parce qu'elles sont si petites. Si votre bitume est dilué avec ces petits hydrocarbures, ils s'évaporeront rapidement, et vous vous retrouverez avec votre pétrole lourd ou bitume de départ.

À propos de l'étude de l'académie nationale des sciences des États-Unis mentionnée dans l'ensemble du document, on suppose qu'il s'agit du diluant utilisé dans le bitume dilué. Toutefois, le condensat de gaz naturel n'est pas utilisé dans les pipelines de l'Office national de l'énergie. Il est seulement utilisé en Alberta. On l'utilise dans les conduites d'alimentation et dans les conduites de collecte qui servent, dans une certaine mesure, à acheminer le pétrole du champ jusqu'à la raffinerie ou à un autre endroit en Alberta, mais il ne sort pas de la province.

L'autre diluant le plus couramment utilisé est l'huile légère ou condensat, aussi appelée condensat CRW. Cette huile comprend au minimum quatre atomes de carbone et 40 au maximum, de C4 à C40. Puisqu'elle peut avoir 40 atomes de carbone au maximum, elle peut comprendre un plus grand éventail de molécules. Les atomes de carbone plus lourds, ceux qui sont supérieurs à C12, ou même de C12 à C40, restent dans le pétrole; environ 25 p. 100 de la masse du diluant est comprise dans ce genre de molécule.

Lorsqu'il y a des déversements, les molécules de C4 à C12, environ, s'évaporent rapidement, très rapidement, mais les molécules de C13 à C40 demeurent dans le pétrole. Cela produit un changement dans le bitume. Ce ne sera plus jamais vraiment le même produit. C'est autre chose. Une fois que ce type de condensat s'est évaporé, je crois qu'une façon de décrire le bitume serait de dire qu'il est un peu plus léger. Je l'ai déjà dit, mais le condensat CRW est le diluant utilisé dans le réseau de pipelines sous la responsabilité de l'Office national de l'énergie.

Il y a aussi un troisième type de diluant, le pétrole brut synthétique. Les plus petites molécules pour ce diluant comptent 12 atomes de carbone, C12, et vont jusqu'à C40. Cette huile légère un peu plus lourde est aussi appelée synbit. Le condensat, le diluant que j'ai mentionné avant celui-ci, est appelé dilbit. Quand on parle de dilbit, comme le dilbit qui s'est déversé à Kalamazoo, on parle de condensat CRW. Quand on utilise le terme synbit, on parle de pétrole brut synthétique. Puisque le pétrole brut synthétique est légèrement plus lourd, il restera en majeure partie dans le pétrole. Disons que le produit restera volatil pendant un long moment après un déversement.

Les choses peuvent s'embrouiller lorsque le public ou même l'industrie se mettent à parler du bitume dilué. On entend dire que l'abréviation pour le bitume dilué est dilbit, mais ce n'est pas le cas. On parle seulement de dilbit lorsque le condensat CRW est utilisé dans le réseau de pipelines. Lorsqu'il y a un déversement en Alberta, les gens se mettent à parler de dilbit. C'est très déroutant, mais c'est la terminologie exacte dans ce cas. Les différents diluants ont des impacts différents, autant sur le plan technique qu'en ce qui concerne la réaction aux déversements.

À la prochaine diapo, on voit ce qui arrive lorsque du pétrole se déverse dans l'eau. Le graphique est plutôt simple : si le pétrole — disons du bitume dilué ou du pétrole brut classique — se déverse dans l'eau, il va flotter à la surface, comme le voit ici, parce que sa densité est plus faible que celle de l'eau.

Avec le temps, le pétrole commence à se mélanger à l'eau. Pour diverses raisons que je vais expliquer un peu plus loin, il commence à se mélanger à l'eau. À mesure que le pétrole se mélange, les sédiments dans l'eau — et il y a presque toujours des sédiments dans l'eau — vont commencer à s'agglutiner autour des gouttes de pétrole. Le pétrole devient de plus en plus lourd et de plus en plus dense, ce qui le fait couler.

Ce n'est pas le pétrole lui-même qui coule. Ce sont les sédiments qui se sont incorporés au pétrole qui le rendent lourd. Le pétrole se transforme en une espèce de petite roche, puis il coule. Il est beaucoup plus difficile de nettoyer le déversement une fois qu'il a coulé à cause des sédiments.

C'est un problème intéressant, parce qu'il y a toujours environ six variables qui ont un effet en même temps, par exemple la biodégradation et la photooxydation, ce genre de processus, qui influencent aussi ce qui arrive au pétrole.

Passons à la prochaine diapo. Qu'est-ce qui influe sur la quantité de pétrole brut qui peut être récupérée? Si le mouvement de l'eau et les conditions météorologiques font que le pétrole se déplace rapidement loin du lieu du déversement — par exemple, à cause d'un courant marin, d'une grosse tempête ou de ce genre de condition —, il est plus difficile de le récupérer.

En ce qui concerne les hydrocarbures légers, ils s'évaporent dans l'air. J'imagine qu'on pourrait dit que c'est une bonne chose. Ils disparaissent, emportés par le vent. Le produit à récupérer est donc moindre, puisqu'une partie s'est évaporée. C'est un aspect du problème. Une fois que ces hydrocarbures légers sont évaporés, ce qui reste est plus dense. Le problème tient au fait qu'il est possible que le produit qui reste soit un peu plus dense que l'eau. Lorsque c'est le cas, les vagues font finir par le submerger. Il faut répondre à ce genre de questions lorsqu'on aborde ce problème.

Avec le pétrole brut classique, la densité de la nappe d'hydrocarbures altérés est plus faible qu'avec le bitume dilué. Il demeure, d'après les échantillons que nous avons étudiés, que la densité est toujours plus faible que celle de l'eau douce. Il en ressort donc que le produit flotte. Même après que nous l'avons altéré aux fins de notre étude, le produit flottait toujours après huit jours.

Un aspect que les gens ne semblent pas connaître ou comprendre en contexte est celui de la dispersion du pétrole, qui se produit lorsque le pétrole est très léger, comme c'est le cas du pétrole classique. Lorsque la viscosité du pétrole est très faible — lorsqu'il est très fluide, il flotte —, il peut lui arriver la même chose que de la crème dans du café : les vagues vont commencer à le mélanger à l'eau. Une fois que le pétrole est mélangé à l'eau, il est impossible de le récupérer, puisqu'il n'est plus à la surface.

C'est un phénomène bien connu avec le pétrole brut classique, par exemple. Le rapport de l'académie nationale des sciences des États-Unis aborde ce sujet; le phénomène a été bien documenté près des côtes de la Californie, ou le pétrole brut classique s'est mélangé à l'eau et a disparu après avoir incorporé des sédiments. Au bout du compte, on se retrouve avec un taux très faible de récupération du pétrole brut classique à cause de cela. La bonne nouvelle, c'est que le produit disparaît. La mauvaise, c'est que, dans les faits, la moitié se trouve encore dans l'environnement, quelque part. Seulement, on ne peut plus le voir. Donc, une fois que le pétrole s'est mélangé à l'eau à cause des vagues, il peut couler, et il va vraiment couler dès qu'il accumulera des sédiments.

On en arrive maintenant aux résultats des tests que nous avons menés. Nous avons réalisé différentes expériences grâce à nos bassins. Au colloque technique du Programme AMOP, nous avons présenté deux études. Dans la première, nous avons étudié ce qui se passait avec un déversement d'hydrocarbures si le bitume avait d'abord subi un prétraitement de valorisation partielle. D'un point de vue analogue, il est possible de partir avec du bitume frais produit et se retrouver avec du pétrole brut synthétique à l'autre bout en le faisant passer par une usine de valorisation de Syncrude ou de Suncor. Nous avons fait des tests afin de voir ce qui se passait lorsque le produit était transformé en pétrole brut synthétique par étapes le long du transport, et comment cela influence la façon dont le pétrole se comporte. Voilà donc l'un de nos domaines de recherche.

Une autre étude que nous avons menée et qui semble beaucoup attirer l'attention, ce sont les tests que nous avons faits dans les bassins où nous avons simulé les conditions de Kalamazoo afin de comparer la situation à ce qui serait arrivé avec le pétrole brut classique. Si du pétrole brut classique s'était déversé, comment se serait-il comporté?

Nous avons commencé avec le pétrole provenant de Cold Lake, le principal pétrole brut qui s'est déversé à Kalamazoo. Nous avons également tenu compte du pétrole Western Canada Select qui s'est déversé, dans une moindre mesure, à Kalamazoo. Puis, nous avions notre pétrole brut classique.

Dans l'image, vous voyez une petite partie du bassin que nous avons utilisé pour nos tests. Je crois que la photo a été prise au quatrième jour, et vous pouvez y voir le mouvement des vagues. Puisque notre bassin est relativement petit, les vagues ont rapidement déplacé le pétrole sur les côtés. Il arrive la même chose près des plages, où le pétrole est constamment ramassé par les vagues et rejeté sur les plages.

Nous avons procédé avec deux jours de vagues, puis deux jours sans vagues, suivis de deux autres jours avec vagues et finalement de deux autres jours sans vagues, puis nous avons observé le résultat. Nous avons pu simuler ce qui se serait passé avec l'eau et les sédiments s'il y avait eu un déversement dans la rivière Saskatchewan-Nord.

Passons à la prochaine diapositive. Nous avons d'abord utilisé les conditions habituelles pour ce genre d'études. La température de l'eau était d'environ 15 degrés, et nous avons commencé avec le produit de Cold Lake, du bitume dilué. Comme nous l'avions prévu, nous avons observé que le produit devient plus dense avec le temps, mais qu'il flottait toujours même après huit jours. Lorsque nous avons enlevé le bitume dilué, il n'y en avait pas de traces sur le sable — ou les sédiments — au fond. Lorsque nous avons pesé la masse de ce que nous avions récupéré, en excluant la partie qui s'était évaporée, nous avons constaté que nous avions récupéré 100 p. 100 du produit, selon une certaine marge d'erreur.

Quand nous avons refait le test avec le pétrole brut classique, il ne restait plus rien à la surface à la fin. Nous sommes restés surpris, parce que les gens n'arrêtent pas de dire que si le bitume est mauvais, alors, par référence, le pétrole classique devrait être bon. Selon moi, on peut dire que le produit est bon s'il est possible de le récupérer.

À la fin des tests que nous avons effectués, tout le produit avait coulé au fond. Pour récupérer le pétrole brut classique, il nous a fallu vider l'eau, ramasser les sédiments dans des seaux, puis secouer les seaux, frapper dessus, ce genre de choses, et attendre que le produit ressorte. L'échantillon que nous avons analysé a même été extrait du fond de notre réservoir.

L'Institut océanographique de Bedford de Pêches et Océans Canada à Halifax a déjà publié des études à ce sujet. Les chercheurs ont conclu que le pétrole à très faible viscosité se mélange davantage à l'eau et accumule plus de sédiments que le pétrole plus lourd. L'article a été publié en 2002.

Nous commencions donc à comprendre un peu mieux ce qui se passait. La température à Kalamazoo était supérieure à 15 degrés. D'après ce que j'ai pu voir sur Internet, la température était d'environ 22 à 25 degrés. De surcroît, la température de l'air était très chaude, puisque c'était l'été au Michigan.

Nous avons donc repris les tests que nous avons menés pour le pétrole de Cold Lake avec des températures plus chaudes. Nous avons constaté que le pétrole devient moins visqueux à mesure que la température augmente. Essentiellement, il devenait davantage comme le pétrole brut classique.

Nous avons donc mélangé un peu de pétrole de Cold Lake avec l'eau et les sédiments. Nous avons constaté que ce pétrole ainsi que le Western Canada Select — l'autre pétrole qui s'est déversé à Kalamazoo — ont réagi passablement de la même façon. Essentiellement, environ 15 p. 100 du pétrole s'est mélangé aux sédiments.

D'abord et avant tout, notre conclusion générale est que le bitume dilué continue de flotter huit ou neuf jours après un déversement, et il est possible de le récupérer. Nous avons également observé qu'il n'y avait aucun mélange lorsque les températures sont basses. Sauf pour le produit qui s'est évaporé, tout a été récupéré à la surface de l'eau. Avec des températures plus chaudes, le produit commençait à se mélanger, et le pétrole brut classique se disperse dans l'eau et se mélange aux sédiments lorsqu'il y a assez d'énergie.

Nous continuons nos recherches. Nous aimerions mener des tests plus longs afin de voir combien de temps cela prendra avant que les produits soient submergés, ou si cela va même arriver, mais habituellement, lorsqu'il faut réagir à un problème, on s'attend normalement à ce que le produit soit récupéré dans les neuf jours avant que les vagues ou la température ne viennent compliquer les choses, selon les circonstances. Nous voulons aussi faire des tests avec différents types de pétrole. Vu la durée de cette chose qu'on appelle hiver, ici au Canada, nous allons certainement vouloir, dans l'avenir, simuler des situations de gel-dégel, ou au moins des conditions hivernales. Nous avons mis au point des installations qui nous permettront de mener ces études, ce que nous allons faire dans l'avenir.

Nous avons communiqué nos résultats à nos collègues d'Environnement et Changement climatique Canada et de Pêches et Océans afin qu'ils puissent les incorporer à leurs modèles. Je crois que cela résume tout ce que j'avais à dire.

L'autre partie de mon exposé traite du programme que nous avons élaboré dans le cadre du système de sécurité de classe mondiale pour les navires-citernes ainsi que les études que nous avons menées et les initiatives connexes. Je crois qu'il vous sera facile de lire et de comprendre cela. Nous avons terminé la partie difficile, et je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le sénateur Black : Vous avez très bien présenté votre exposé. Il est toujours difficile de résumer simplement les choses compliquées. J'imagine que nous allons maintenant voir si j'ai bien compris ou non.

Mes préoccupations sont surtout liées à ce qui pourrait arriver si nous avons la chance de voir le projet Énergie Est approuvé, au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse — mais mettons cette conversation de côté pour l'instant — ou le projet d'agrandissement de Trans Mountain à Burnaby, ou les deux.

J'ai eu l'occasion de rendre visite les autorités portuaires de Prince Rupert et de Vancouver ainsi qu'à la Garde côtière et aux responsables de l'administration portuaire. Il me semble avoir compris qu'il existe un produit que l'on peut utiliser pour disperser le pétrole en cas de déversement.

Mme Dettman : Un agent dispersant, oui.

Le sénateur Black : Quelle est votre opinion des dispersants? D'après vous, fonctionnent-ils?

Mme Dettman : Comme vous le savez probablement, les dispersants n'ont pas encore été approuvés pour utilisation au Canada. J'imagine qu'il serait plus approprié de dire qu'ils n'ont pas encore été utilisés au Canada. Les dispersants conviennent mieux aux déversements en haute mer ou lorsque le pétrole menace une côte très fragile.

Le sénateur Black : Voilà qui s'applique aux deux cas.

Mme Dettman : Oui, exactement. Disons qu'un bateau en haute mer cause un déversement. Le pétrole qui se répand se dirige vers la côte, vous pouvez utiliser un agent dispersant afin de disperser le pétrole ou de l'espacer afin qu'il reste dans l'eau et n'atteigne pas la côte.

D'un côté, vous pouvez ainsi préserver les côtes où se trouvent les régions les plus vulnérables, vu les créatures — animaux et oiseaux — qui y vivent et les activités qui s'y passent.

Malgré le recours à la dispersion, il a été constaté que le pétrole qui s'est déversé dans le golfe y est toujours. L'utilisation la plus importante d'agents dispersants a eu lieu en réaction aux déversements dans le golfe. L'agent dispersant a été pompé dans le pétrole pour l'empêcher d'atteindre la surface, mais maintenant, à ce qu'ils disent, on dirait qu'il y a un cerne de bain autour du golfe dans l'eau.

À mon avis, il s'agit d'une conséquence naturelle de ce qui a été fait; voyez-vous, le pétrole brut comprend au minimum quatre atomes de carbone, C4, et peut aller jusqu'à plus de C120. Les hydrocarbures qui sont les plus faciles à biodégrader ne dépassent pas environ C15, alors, avec plus de 15 atomes de carbone, cela peut prendre très longtemps. Il y a des molécules dans le produit qui pourraient être biodégradables, mais le reste ne va probablement pas se disperser avant longtemps. Puisqu'un agent de dispersion a été utilisé, tout ce qui reste, ce sont ces hydrocarbures. En quelque sorte, on obtient une solution par dilution. Même s'il est invisible, il est toujours là.

Le sénateur Black : Comment fonctionne un dispersant? Est-ce que c'est seulement une dilution?

Mme Dettman : Un agent dispersant fait exactement ce que ça dit. C'est comme lorsque vous ajoutez du savon à votre eau de vaisselle. Vous lavez votre vaisselle, vous n'avez pas de savon et vous voyez la graisse remonter à la surface. Puis, vous ajoutez du détergent et vous ne la voyez plus, vous voyez des bulles.

Le sénateur Black : Le problème est toujours là, même s'il est dispersé.

Mme Dettman : Il est toujours là, mais il est dispersé. Les gouttes sont très petites. Les gens qui mènent ce genre de recherches depuis longtemps — comme le ministère des Pêches et des Océans — on a constaté que lorsque le pétrole se dégrade et commence à se mélanger à l'eau, il va se former une goutte d'une certaine dimension, parce que le pétrole lui-même ne veut pas être dans l'eau. Il se comporte comme de l'huile dans l'eau, il veut en sortir.

Donc, vous avez une goutte d'une certaine dimension et les bactéries responsables de la biodégradation aiment l'eau. Elles se déplacent dans l'eau. Ces bactéries ne peuvent interagir qu'avec le pétrole qui touche à l'eau. Avec une grosse goutte, les bactéries à l'extérieur peuvent, dans une certaine mesure, la réduire petit à petit, mais la partie du centre de la goutte de pétrole demeure intacte, jusqu'à ce qu'elle devienne plus petite ou qu'elle se brise.

Afin d'accélérer le processus, on essaie de réduire la dimension des gouttes. Donc voilà l'idée sous-jacente. La digestion microbienne fait partie du processus de dégradation naturelle. Une autre possibilité est la photo-oxydation au soleil. Encore une fois, il faut que les gouttes soient petites.

Le sénateur Black : Il me semble que c'est une bonne technique. Êtes-vous d'accord?

Mme Dettman : Pour faciliter le processus de biodégradation, oui.

Le sénateur Black : Quand j'ai rencontré les représentants des organisations, ils ont dit que le Canada avait les ressources nécessaires pour nettoyer tout déversement de pétrole éventuel dans l'eau ou, au moins, pour réagir à la situation, que sa capacité à ce chapitre serait aussi bonne que dans n'importe quel autre pays du monde. Il y a une norme mondiale. On ne m'a pas dit que la norme mondiale était suffisante, mais on a mentionné que nous pouvions faire tout ce que la science nous permet relativement au pétrole et à l'eau. Êtes-vous d'accord?

Mme Dettman : D'après ce que j'ai vu aux congrès internationaux, je dirais que c'est vrai. Le colloque technique du Programme AMOP réunit des gens du monde entier, et les techniques utilisées sont à peu près les mêmes partout. Les détails précis des interventions ne font pas partie de mon champ d'expertise, mais c'est ce que j'ai retenu de mes discussions.

Le sénateur Black : Qu'espérez-vous pour votre recherche? Est-ce qu'il y a une application pratique à votre recherche?

Mme Dettman : Nous croyons toujours que c'est le cas.

Le sénateur Black : Je n'en doute pas. Je me demandais simplement si vous pouviez me dire lesquelles.

Mme Dettman : Je crois que notre objectif est de fournir de l'information. L'expertise dans nos installations provient, de fait, des expériences que nous avons menées sur le pétrole. Nous tirons notre expertise de l'industrie du pétrole, essentiellement en quantifiant tous les déversements qui ont lieu. Avant, les chimistes dans le domaine de l'environnement se contentaient de regarder les molécules qui étaient liées de façon importante à la toxicité. Nous arrivons à brosser un portrait plus complet de la situation en ajoutant ce qui se produit avec le reste du pétrole.

Par exemple, quand je parle de dispersants avec d'autres personnes, mon discours diffère de celui des autres, parce qu'ils sont habitués de voir le produit disparaître, puis de chercher des marqueurs de toxicité et ce genre de choses qui sont pertinentes pour la chimie environnementale.

De notre côté, nous mettons l'accent sur là où les choses vont. Ce sera très pratique, dans l'avenir, si l'on veut déterminer où doit se terminer un nettoyage. Est-ce qu'il faut draguer un endroit une fois qu'on considère qu'il est sécuritaire? Est-ce qu'on le drague cinq fois? C'est ce genre d'applications pratiques que nous voulons fournir.

Le sénateur Black : Merci, madame Dettman. Tout cela est très utile.

Le sénateur Mercer : Madame Dettman, merci beaucoup. Pour reprendre ce que le sénateur Black a dit, vous avez très bien su expliquer la matière. Il m'arrive parfois de penser que nous n'apprenons rien pendant ces réunions, mais j'ai appris beaucoup de choses au cours de la dernière demi-heure. Je vous en remercie.

J'aimerais que nous revenions à la diapositive de la page 2, ou devrais-je dire la première vraie diapositive. Vous avez mentionné que le railbit transporté par wagon nécessite moins de diluant que le transport par oléoduc. Je suppose, et corrigez-moi si je me trompe, que le train de Lac-Mégantic, au Québec, transportait du railbit.

Mme Dettman : Non. Le train de Lac-Mégantic transportait du pétrole brut de la formation de Bakken. Ce n'est pas la même chose. Il s'agit de pétrole brut très léger. Je vous remercie d'avoir posé la question, cela va me permettre de vous expliquer un autre point technique.

Lorsqu'on parle de pétrole léger et de pétrole lourd, en réalité, ce dont il est question est la quantité d'essence dans le pétrole. Il faut envisager les choses de cette façon. En termes simples, le pétrole brut est un mélange d'essence, de carburant diesel, de combustible de soute B et de bitume. Essentiellement, on retrouve dans tous ces produits toutes les tailles de molécules, de C4 à C120 et plus. Donc, voilà pour ce point.

Le pétrole léger comme celui de la formation de Bakken ou le pétrole brut classique est composé à 30 ou à 40 p. 100, ou du moins dans une proportion importante, d'essence. Le diesel compte pour 20 p. 100. Les 30 p. 100 qui restent sont composés des matières les plus lourdes. Le pétrole lourd, par exemple, est composé à moitié de bitume et peut-être seulement de 15 p. 100 d'essence. Voilà l'essentiel de ce que je veux dire. Avec le pétrole brut classique comme celui de la formation de Bakken, il y a tellement d'essence qu'il ne suffit que d'une étincelle pour que tout s'embrase.

Le sénateur Mercer : Comparativement au bitume, il brûlerait à une température inférieure.

Mme Dettman : Parce qu'il contient tellement d'essence, une substance explosive. Il y a une différence, mais les deux contiennent de l'essence. Les deux peuvent avoir un point d'explosion quelconque, parce qu'ils ont tous deux cette matière composée de C4. C'est seulement que l'un en a beaucoup moins en comparaison du pétrole classique. Cela veut dire, j'imagine, qu'il est plus volatile ou qu'il pourrait s'embraser plus rapidement. Les substances plus lourdes ne brûlent pas aussi facilement.

Le sénateur Mercer : J'essaie d'envisager la chose du point de vue de vendre aux Canadiens l'idée que je veux qu'un pipeline traverse leur cour. Je veux être en mesure de leur dire que c'est du bitume qui coule dans ces pipelines, qu'on y aura ajouté un produit pour faciliter son déplacement et qu'il est improbable que cela occasionne un incendie similaire à celui de Lac-Mégantic s'il y a un déversement. Selon moi, c'est ça, vraiment, que les Canadiens veulent savoir. Ai-je raison de dire que ce serait improbable? Si nous faisions ce que les gens veulent, s'il y avait un déversement au cours du transport de bitume vers l'est ou l'ouest à partir de l'Alberta, est-il improbable qu'il s'enflamme?

Mme Dettman : Je crois que c'est vrai; s'il y avait beaucoup d'étincelles autour du produit, il pourrait s'enflammer, mais il n'exploserait pas. C'est le genre de chose qui se produirait.

Je devrais peut-être me renseigner avant de répondre parce que d'autres ont examiné cette question en particulier. Je pourrais vous revenir avec l'information. C'est peut-être la meilleure manière d'y répondre parce que je sais que des groupes ont examiné précisément cette question et connaissent la terminologie.

Le sénateur Mercer : Veuillez le faire.

Mme Dettman : Je vais vous donner une meilleure réponse.

La sénatrice Unger : Si je peux me permettre d'intervenir, le pétrole de Bakken qui a explosé à Lac-Mégantic était hautement inflammable, et comme il contenait plus d'essence, il a brûlé à de plus hautes températures et a généré des flammes importantes. Si nous le comparons au pétrole, ce dernier brûlera, mais il n'explosera pas comme le fait le pétrole de Bakken.

Mme Dettman : Je suppose que je tente de trouver exactement les bons mots pour définir cela, mais c'est absolument vrai. Même si on a un incendie avec de l'essence, c'est lorsqu'il y a explosion et que des gens sont blessés. Si par contre les gens utilisent du carburant diesel, ils peuvent l'allumer et l'utiliser pour faire du barbecue. C'est ce genre d'inflammabilité. Je crois que j'ai de la difficulté à trouver les termes techniques exacts pour l'expliquer, mais ce que vous décrivez est vrai.

La sénatrice Unger : Je vous remercie de votre explication parce que je crois qu'elle illustre très bien la différence. Je m'interrogeais à propos des molécules C4 à C8. Ce n'est pas un diluant.

Mme Dettman : C'est un condensat de gaz naturel, alors on l'appelle effectivement un diluant.

La sénatrice Unger : Comme il s'évapore assez rapidement, peut-on l'utiliser à d'autres fins, ou a-t-il des applications bien précises?

Mme Dettman : Certainement, on peut penser à l'exemple de l'Alberta : lorsqu'on veut transporter du pétrole vers les conduites de collecte ou les conduites d'alimentation, il est pratique à utiliser parce qu'il est facile à retirer. Ils peuvent l'ajouter au pétrole brut et lorsque celui-ci commence à tourner autour de C4 ou C5, il est facile à retirer, et leur pétrole brut est prêt pour l'utilisation.

Par exemple, si vous prenez le bitume, son point d'ébullition initial est environ C12. Si vous avez C4 à C8, il s'évapore facilement, et il vous reste le bitume. Vous passez à votre prochain processus, car lorsque vous allez à la raffinerie, vous voulez l'utiliser pour les processus : commencer la distillation ou un autre processus quelconque à la raffinerie. Vous voulez vous débarrasser facilement de ce diluant, alors il est facile de le retirer. Il comporte un avantage en ce sens.

La sénatrice Unger : Mais il ne peut pas être utilisé pour le prochain, le dilbit C4 au C40.

Mme Dettman : Est-ce une sorte de produit?

La sénatrice Unger : Je me demande si le diluant qui s'évapore rapidement ne pourrait pas être utilisé dans d'autres de ces applications différentes touchant le brut lourd.

Mme Dettman : Il a certainement une utilité, je suppose. Il s'intègre à l'essence. Comme l'essence est de C4 à environ C12. Ils sont dans cette fourchette, alors il peut faire partie d'un produit. Il peut être utilisé.

Je crois que nous avons besoin de beaucoup de diluant, alors il présente des inconvénients. C'est en réalité un avantage d'avoir du pétrole léger lorsqu'on intervient au moment d'un déversement. Si nous avons ces composants plus lourds avec le bitume qui aident à conserver une densité plus faible que celle de l'eau — parce que la densité de certains bitumes est très proche de celle de l'eau —, alors sa densité peut être un peu plus faible ou un peu plus forte.

Si vous avez la partie plus lourde du condensat CRW, alors cela peut aider à le conserver à un niveau inférieur au cours d'une intervention en cas de déversement. Je crois que cela tient à la quantité dont ils ont besoin et à la valeur relative de cela. Ils n'en ont probablement pas assez, vraiment. Ils n'en auraient pas assez pour être en mesure de l'utiliser seulement comme diluant, mais pour une intervention en cas de déversement, il est préférable que le produit comporte ce pétrole léger plutôt seulement le condensat de gaz naturel.

La sénatrice Unger : J'ai un commentaire à faire, ensuite une question à poser. J'ai entendu récemment que les billes exfoliantes qui sont utilisées dans les cosmétiques pour hommes et pour femmes — comme les exfoliants pour le visage et ce genre de choses — sont maintenant interdites parce que ces billes ne se désintègrent pas aussi rapidement que l'on croyait.

Mme Dettman : Lorsqu'elles se retrouvent dans l'eau et l'environnement.

La sénatrice Unger : Oui, lorsqu'elles sont évacuées par l'évier. Peut-on faire quelque chose à cet égard? On est en train de les interdire. J'ai été surprise que quelque chose d'inoffensif comme un exfoliant facial utilisé pendant de nombreuses années soit maintenant une mauvaise chose.

Mme Dettman : Tout est chimique du point de vue d'un chimiste. L'industrie des cosmétiques utilise beaucoup d'huiles et d'eaux. Je crois qu'elle utilise habituellement des huiles végétales, mais cela revient à de la chimie de base. Il s'agirait de petites gouttes d'huile, et si elles ne peuvent pas être dissoutes, alors elles demeurent dans l'environnement. L'huile ne se mélange pas à l'eau et finit par devenir un problème, comme les plastiques qui ne se décomposent pas en raison du type de molécules qui les utilisent.

Le sénateur Mitchell : Merci, madame Dettman. J'aimerais savoir à quel moment le processus bactérien qui décompose l'huile entre en jeu.

Mme Dettman : Les microbes sont très opportunistes. Comme les océans sont remplis de navires et essentiellement que nous parcourons le monde entier, toutes les eaux sont reliées. Les navires déversent un peu de carburant ici et là. Ce sont des choses qui arrivent.

Les bactéries mangeront tout ce qu'elles peuvent trouver pour survivre. Il existe des catégories entières de bactéries qui ont précisément évolué pour manger des produits pétroliers. On observe des suintements naturels, il paraît, dans la baie d'Hudson et dans le golfe. La Terre fabrique du pétrole. Cela fait partie de son processus de recyclage. Nous n'avons pas de produits particuliers qui s'accumulent et qui nous couvrent — si je peux m'exprimer ainsi —, alors cela fait seulement partie de ces processus naturels.

Dès que vous avez un déversement, que ce soit une petite quantité de diesel de votre bateau à moteur ou de tout autre type d'embarcation près d'un quai d'une région portuaire, les bactéries se mettraient à l'œuvre. Comme je l'ai décrit, le pétrole se retrouve dans l'eau et ne s'y mélange pas complètement. C'est en réalité des gouttelettes. Elles agissent à la surface du pétrole. Elles font cela pour survivre. C'est ce qu'elles mangent.

Pour les petites molécules, elles peuvent tout absorber et le transformer en CO2. Cela fait partie de ce processus. Le CO2 est ensuite absorbé par les arbres et recyclé par les êtres vivants de nouveau dans le cadre de ce cycle.

Si les molécules sont trop grosses, certains types de structures commencent à avoir du mal à fonctionner. Elles vont en quelque prendre de petites bouchées et le recracher. Dans une partie de ma recherche, j'ai passé 10 ans à examiner des pétroles bruts qui ont ce qu'on appelle un indice d'acidité total élevé sous l'angle de la corrosion des installations de raffinerie. C'est ce qui reste après qu'une bactérie a tenté de consommer à petites bouchées la molécule sans toutefois y parvenir. Ces molécules demeurent dans l'environnement, et c'est comme ça que le processus se déroule.

Le soleil peut bien sûr aider ce processus, car il peut faire ce qu'on appelle la photooxydation. Celle-ci peut briser les molécules plus grosses en molécules plus petites. Certaines de ces molécules seront complètement brisées et produiront du CO2, — ce qui, encore une fois, fait partie du cycle de la planète — ou peuvent se fractionner en éléments assez petits pour que — peut-être — des bactéries puissent s'y attaquer.

La boue, par exemple, est remplie d'acides humique et fulvique, qui sont de grosses molécules comportant de l'oxygène qui sont inertes dans l'environnement. Tout enfant de deux ans se fabrique un suçon et lèche de la boue un moment donné. Le pétrole finirait comme la boue, mais dans quelle mesure? Dans le cadre de notre recherche, nous tentons de déterminer combien de temps il faudrait. Est-ce après qu'il s'est biodégradé? Combien de photooxydation faut-il? Où est ce point final? Nous espérons que notre recherche répondra à ces questions.

Le sénateur Mitchell : Merci. La science peut être amusante. Je veux seulement préciser le point que vous faisiez concernant le brut léger qui se disperse en quelque sorte dans l'eau. Vous ne croyez pas qu'il s'y trouve, mais il y est vraiment, et c'est une mauvaise chose si vous tentez de le retirer. Peut-être est-ce le brut lourd qui s'agglutine aux sédiments et coule au fond, ou est-ce que les deux types de brut ont ce problème?

Mme Dettman : C'est vraiment sur quoi notre recherche porte. Les gens savent depuis longtemps que les bruts classiques se disperseront facilement, et le but de la recherche sur les produits dispersants est de l'aider à faire ce qu'il tend à faire de toute façon.

Il existe des articles disant à quel point il était formidable que, après trois jours, ce pétrole était disparu et que la côte était sauvée. C'est ce type de terminologie qu'on entendait, à quel point c'est fantastique. Aucun pétrole ne veut vraiment se retrouver dans cette eau, et, alors que les sédiments sont chargés, le pétrole ne l'est pas. Il n'ont pas de raison naturelle, vraiment, de rester ensemble. Par le passé, les gens n'ont pas vraiment parlé de la raison pour laquelle cela se produit, et notre travail vise à comprendre cela.

Si les bactéries mâchent ce pétrole un peu, elles deviennent plus chargées, et maintenant les sédiments peuvent s'accrocher à quelque chose, puis couler au fond. Cela expliquerait pourquoi on trouve le brut conventionnel au fond de l'océan après tous ces déversements. Lorsque nous avons eu le déversement de l'Exxon Valdez près du versant nord de l'Alaska, le pétrole s'est retrouvé au fond de l'océan, sous le navire. Dans le golfe, on l'a trouvé au fond. Ces mécanismes n'ont pas bien été étudiés. C'est un autre aspect pratique que nous essayons de bien comprendre. Oui, c'est ce qui se produit.

Le vice-président : J'ai quelques questions à vous poser et des clarifications à vous demander. Tout d'abord, au sujet du pétrole brut synthétique, ou PBS : est-ce le produit que nous connaissons sous le nom « syncrude »? Est-ce du syncrude?

Mme Dettman : Il existe divers termes pour ce pétrole. Non, Syncrude est le nom d'une société.

Le vice-président : Oui, mais syncrude est aussi un produit valorisé et raffiné.

Mme Dettman : Il le serait. Le syncrude est un brut synthétique, si c'est ce que cela signifie. J'ai entendu divers noms pour le désigner. Habituellement, il se rend jusqu'à C40, et ils en retirent l'essence, alors il s'agit essentiellement de diesel plus le combustible de soute.

Le vice-président : Le bitume qui est transporté dans les conduites aujourd'hui, le produit qui s'y trouve actuellement, est-ce du PBS? Qu'est-ce que c'est exactement? Est-ce du diluant?

Mme Dettman : Il y a des conduites qui ont du PBS, mais quant au bitume, le synbit, si vous avez quelque chose appelé synbit, alors ce produit comprend du pétrole brut synthétique mélangé au bitume.

Le vice-président : Ce produit est envoyé aux États-Unis.

Mme Dettman : Il peut contenir diverses choses, et c'est pourquoi j'ai cette page d'explications. Si on l'appelle dilbit, alors il comporte un condensat CRW. Si on l'appelle synbit, alors c'est du bitume mélangé à du pétrole brut synthétique. Il peut même y avoir un dilsynbit, à savoir du condensat et du PBS, du pétrole brut synthétique, dans le produit.

Il y a aussi des conduites qui ont du pétrole brut synthétique. Au bout du compte, les exploitants de tous ces oléoducs en Alberta ont conclu des ententes à long terme avec des raffineries partout aux États-Unis. C'est comme un panier d'épicerie, ils disent : nous voulons tant de celui-ci, tant de celui-là et tant de cet autre. Alors, le pipeline est comme l'autoroute entre les deux. Le client passe une commande, et le produit est expédié.

Certains aiment avoir du pétrole brut synthétique. Il y en a même, dans d'autres pipelines, qui veulent essentiellement du bitume dilué. Ils commenceront avec de l'essence, ensuite du diesel, ensuite du brut conventionnel et puis du bitume dilué et du brut. Essentiellement, ce sont des mélanges qui sont distribués au bout en fonction de qui a acheté quoi, parce que les raffineries sont en réalité des postes de fluidification.

Le vice-président : Pour ce qui est de sa viscosité et de ses propriétés, comment le dilbit ou le synbit se comparent-ils au mazout C, particulièrement dans l'eau?

Mme Dettman : Le mazout C en fait partie, alors ils sont plus légers. Ils sont plus légers. Ils flottent. Leur densité est plus légère. Le mazout C est une combinaison. Lorsque j'ai parlé du mazout qui était comme du bitume, comme le mazout C. Tout pétrole brut en a. Lorsque vous avez du dilbit, il comporte une part d'essence et de diesel avec le mazout C.

Le vice-président : Le dilbit et le synbit sont toujours plus légers que le mazout C.

Mme Dettman : Oui.

Le vice-président : Ils ont davantage de raffinement.

Mme Dettman : Il comprend aussi de l'essence et du diesel alors que le mazout C n'a pas ces composants.

Le vice-président : Dans le cadre de vos recherches et de votre travail, vous connaissez bien le cas de l'Exxon Valdez, bien sûr, mais avez-vous étudié le déversement du pétrolier Arrow — près de la baie de Chedabucto, en Nouvelle-Écosse en 1970? Nous avons eu deux déversements pétroliers sur la côte Est, celui de l'Arrow et celui du Kurdistan.

Mme Dettman : De fait, j'ai essayé d'obtenir des échantillons d'un site — et j'y travaille encore — pour voir à quoi ressemble maintenant le pétrole altéré. Je n'en connais pas beaucoup d'exemples. Je crois que c'est dans le cas de l'Arrow qu'ils n'ont pas touché au site et voient maintenant la façon dont le pétrole a été altéré. À la réunion de l'AMOP, qui s'est tenue à Halifax cet été, ils ont fait une visite sur le terrain pour voir ce site et recueillir des échantillons, mais je n'ai pas pu y aller, car c'était complet en l'espace de cinq minutes.

Le vice-président : Je crois comprendre que la plupart des dommages causés à cet endroit, des dommages à long terme ou même à moyen terme, ont été causés par les efforts de récupération.

Mme Dettman : Oui.

Le vice-président : Il y avait des homards complètement couverts de pétrole qui ont dispersé celui-ci un peu partout en 24 heures. La plupart des dommages étaient à court terme. Ce qu'ils ont fait au bout du compte c'était d'enlever tout le sol de la plage et des terres humides et de causer des dommages à long terme.

Mme Dettman : C'est vrai, et cela fait partie de la discussion continue. J'ai entendu que cela s'était aussi produit à d'autres endroits. Ils se rendent sur les lieux et s'ils tentent de récupérer le pétrole, ils arrachent toute la végétation pour le retirer. Essentiellement, ils tuent l'écosystème qui s'y trouvait juste en agissant ainsi.

Avec le travail que nous faisons, particulièrement pour ce qui est de déterminer ce que le pétrole fait en tout temps et d'établir sa toxicité relative... Dans certaines situations, on pourrait seulement laisser le temps faire son œuvre.

Le vice-président : J'ai seulement une autre question. Quand vient le temps de transporter ce produit... Disons que le bitume vient de la côte Est du Canada. Il vient de la côte Est du Canada. Ils le déversent dans l'eau.

Mme Dettman : Cependant, il ne s'agit pas seulement de bitume. Il sera toujours dilué s'il est transporté par pipeline.

Le vice-président : Il sera toujours dilué s'il est transporté par pipeline. Ai-je raison de supposer que plus il est raffiné ou plus il est mélangé avec de l'essence et d'autres choses pour faciliter son transport par pipeline, plus faible est l'empreinte carbone pour ce qui est de transporter ce produit?

Mme Dettman : En ce moment, je crois qu'il existe divers facteurs, alors la préoccupation tient à la quantité qu'on récupère. Nous avons eu deux déversements de bitume dilué. Un s'est produit à Burrard, et l'autre, à Kalamazoo. Dans les deux cas, on a eu en fait de forts taux de récupération. Même à Kalamazoo, les derniers chiffres relatifs au déversement sont que 74 p. 100 du bitume a été récupéré à la surface et environ 24 p. 100 ont été récupérés en effectuant à répétition des travaux de dragage.

Leurs chiffres de récupération font état d'un taux de récupération de 140 p. 100 par rapport à ce qui a été déversé, montrant ainsi qu'ils ont du mal à évaluer la quantité déversée. Dans ce cas, aucun poisson n'est mort, selon cette étude, et ils ont en réalité dépensé beaucoup d'argent en travaux de récupération parce que nombre de gens vivent dans cette région et tout le monde voulait dire : « Il y a une tache, il y a une tache », alors il faut la nettoyer.

C'est une chose. On peut réagir. Si on commence à avoir des bruts conventionnels, alors ils disparaissent, mais ils contiennent beaucoup plus d'essence. Lorsqu'on a de l'essence, c'est là qu'on commence à éprouver des problèmes de toxines botuliniques, des problèmes immédiats de toxicité aiguë et des problèmes d'inflammabilité.

Avec le diluant du déversement de Kalamazoo, il y avait des gens dans le secteur, mais il ne s'est pas enflammé. Si on avait eu du brut conventionnel avec une quantité importante d'essence, on aurait couru un plus grand risque de voir le tout s'enflammer à cause d'une cigarette allumée jetée à l'eau.

Il y a un aspect de toxicité du produit qui est pire. Il disparaîtrait, mais il serait dispersé et pourrait se trouver dans les sédiments encore davantage même que le bitume dilué, parce qu'il disparaît et se mélange avec les sédiments, et on ne peut pas vraiment le séparer des sédiments. Ce composant plus léger pourrait essentiellement comporter davantage de HAP, qui ont une toxicité plus longue.

Je parle ici en quelque sorte du fait qu'il y a divers aspects à envisager. Cela dépend de ce qu'on examine. Si on peut le voir, c'est laid, mais on peut le récupérer. Cela pourrait avoir moins d'effets. Aucun poisson n'est mort à Kalamazoo, mais à Pine River, où l'on prétend avoir obtenu un taux de récupération élevé, on parle de milliers de poissons qui mourront pendant des années du fait que du brut conventionnel a été déversé dans l'eau. Cela aura un effet à plus long terme. Il est plus léger parce qu'il s'agit de brut conventionnel, mais il avait cet effet toxique plus élevé.

Si on passe aux produits qui ont du pétrole brut synthétique qui est plus léger et va jusqu'à C40 sans avoir de grosses molécules, il s'agirait d'une version très concentrée qui aurait possiblement des HAP et de la toxicité.

On ne le voit peut-être pas. Il pourrait se disperser, mais pourrait avoir un impact de toxicité plus élevé. Le pétrole est mauvais pour nous en général. Il faut déterminer de quoi il s'agit, où le produit se trouve et quels types de problèmes seraient causés.

Le vice-président : Avez-vous fait des études ou mené des travaux sur les fonds de cours d'eau exposés? Je reviens à la baie de Fundy. Lorsque ce mascaret se retire, on a des milles carrés de fond exposé. Il est exposé pendant 12 heures, mais il peut être couvert de 20 pieds d'eau dans les 12 prochaines heures, puis de 30 et puis de 40 pieds d'eau. C'est une immense marée. Les produits dispersants ne sembleraient pas être trop commodes.

Mme Dettman : Non, non.

Le vice-président : Il semble qu'ils ne seraient pas très pratiques dans cet environnement où il n'y a pas d'eau la moitié du temps. Tout ce pétrole, ou de grandes quantités de celui-ci, irait au fond. Que se passerait-il dans une situation pareille?

Mme Dettman : Le pétrole finirait au fond et y demeurait probablement. Je crois que c'est même ce qui est arrivé à Lac-Mégantic. L'eau s'est retirée. Ils avaient le contrôle de cela. L'eau a baissé, le pétrole est demeuré au fond et lorsque l'eau est remontée, il est demeuré au fond. Essentiellement, ils sont allés nettoyer les roches, en quelque sorte.

La sénatrice Unger : Vous avez mentionné qu'à mesure que vous terminez votre recherche, vous la transmettez à de nombreux organismes gouvernementaux. Je me demande dans quelle mesure elle est bien accueillie. C'est extrêmement intéressant.

Je connais beaucoup de gens qui craignent les déversements pétroliers dans l'eau. Comment votre étude est-elle reçue, et comment pouvez-vous publiciser vos conclusions pour que le public ait davantage conscience, d'abord de votre travail, puis des différents impacts?

Mme Dettman : Je dois dire que depuis sa présentation en juin, j'ai été très, très, occupée à faire exactement ce genre de choses. Bloomberg voulait une entrevue, et je m'y suis prêtée en juin. Cet article a ensuite été publié, et j'ai depuis reçu nombre de courriels parce que mon nom y figurait. J'ai reçu de nombreux courriels, et les demandes d'entrevue continuent d'affluer. C'est une chose inhabituelle pour un scientifique. Habituellement, on fait son travail, et tout le monde s'en fout, mais cet article a suscité beaucoup d'intérêt.

J'ai certainement soumis l'information à l'AMOP. Ces articles sont disponibles. Je crois qu'ils sont publicisés. Je ne dirai pas exactement ce qui s'en vient, mais je continue d'accorder des entrevues. J'imagine qu'à un moment donné, cependant, je pourrai retourner au travail et poursuivre mes recherches. J'ai mon groupe. Il est très difficile de faire de la promotion tout le temps. Nous devons faire le travail de recherche.

En tout cas, j'imagine que c'est une qui intéresse les gens. Je réponds certainement à toute demande. J'ai assisté à des réunions particulières où j'ai donné des cours de pétrole 101, même à des gens des Premières Nations ou à quiconque le demandait. J'ai travaillé avec les gens qui le demandaient, qu'il s'agisse de groupes environnementaux ou de l'industrie pétrolière.

Comme je le dis à l'occasion de ce type d'événement, j'ai cette information et je parle — autant que je peux — à quiconque veut savoir parce qu'au bout du compte, je suis censée aussi faire de la recherche. Il faut chercher l'équilibre.

Le vice-président : Madame Dettman, merci pour votre exposé ce matin.

Chers collègues, cela conclut la séance de ce matin.

(La séance est levée.)

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